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    St Macaire le Grand,vie, uvres et paroles mmorables

    d'aprs les manuscrits coptespublis et traduits par

    E. Amlineau

    en 1894

    Comprenant

    La Vie de St MacaireLes vertus de St Macaire

    Les apophtegmes de St Macaire

    Traduction revue et prsentationpar Albocicade

    2013

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    Introduction

    I. PrambuleIl existe, dans la premire gnration des moines d'Egypte que nous font connatre diverscrits, plusieurs "Macaire", qu'il convient de ne pas confondre, d'autant que chacun estsusceptible d'tre dsign sous diffrents noms.Il y en eut ainsi un qui fut disciple de St Antoine et qui ensevelit ce dernier ; Macaired'Alexandrie, dit aussi "le citadin" ; "Macaire le Grand", dit aussi "Macaire de Sct" ou"Macaire l'Egyptien" dont il est question ici et d'autres encore.Durant longtemps, ce que fut sa vie ne put tre que conjectur, partir des allusions contenuesdans les recueils d'apophtegmes grec ou latins et dans l'Histoire Lausiaque de Pallade.En 1894 Emile Amlineau, clbre coptologue s'tant particulirement intress aux dbutsdu christianisme gyptien, publia une "Histoire Des Monastres de la Basse-gypte"constitue d'une longue introduction suivie des "Vies" de divers saints en copte, documents

    jusque l inconnus, mais dont la tradition grecque s'tait fait l'cho. Cet ouvrage constitua le

    volume 25 des "Annales du Muse Guimet"Amlineau accompagna fort opportunment son dition des textes coptes d'une traductionfranaise. Toutefois, tant du fait de l'volution de la langue et de la culture que parce qu'en denombreux endroit il a laiss un texte quelque peu abscons se rservant parfois de l'expliciteren des notes nombreuses, il n'a pas paru judicieux plus d'un sicle de distance dereproduire cette traduction l'identique. C'est donc la traduction d'Amlineau, maisamnage, qui est prsente ci-aprs.

    Amnage en remplaant des mots coptes trop soigneusement conservs par Amlineau(remplacer "Schiit" par Sct, par exemple) en explicitant des termes trop abscons (quepouvait bien signifier "ta voix rsonne comme celle du grand Antoine, le kataxiarque des

    moines apotactiques" ?) et plus gnralement en rendant limpides des phrases qu'un excsde littralisme rendait obscures. Je n'y ai, hlas, pas toujours russi. Que le lecteur se consoletoutefois en se disant qu'avant, c'tait plus confus encore. J'espre seulement qu'en tentant ces"claircissements" je n'ai pas introduit de contre sens.Ce que j'ai, volontairement, introduit, c'est un dcoupage avec numrotation, suivant en celal'dition qu'en a donn le P. Placide Deseille [1].

    Notons toutefois que mme amnage cette traduction renvoie un univers qui ne nous estpas immdiatement familier : les dbuts du monachisme dans l'Egypte du IVe sicle. Nombred'lments de contexte doivent tre explicits.Ce sera fait en une sorte de "mini lexique".

    II. Les textes traduits.

    De tous les textes traduits par Amlineau dans le volume 25 des "Annales du Muse Guimet",trois concernent directement St Macaire l'Egyptien qui seront brivement prsents ici :

    Vie copte de St Macaire.La "Vie" prsente ci aprs sous le patronage de l'vque Srapionde Thmuis n'est pas proprement parler un "biographie" : le narrateur ignore, ou passe soussilence des pisodes importants de la vie de St Macaire, tel son exil. Par ailleurs, faut-il parlerd'un ou de plusieurs narrateurs ?En effet, quel age a bien pu mourir le bon Sarapamon qui se souvient des confidences qu'ilchangeait avec le jeune Macaire pas encore moine (13), s'il peut parler comme d'un tempsdj loign de la venue des vques pour les funrailles de Macaire ? ( 30). Et faut-il voir

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    en ce Sarapamon, l'vque Srapion qui occupa le sige de Thmuis de 339 359, qui fut avantcela disciple d'Antoine, et dont le nom trne dans le titre ? Sans doute faut-il plutt considreren tout cela des indices des sources multiples et contemporaines des vnements, comme lesignale d'ailleurs la notule ( 3) o le narrateur fait rfrence ce que lui ont appris les "presqui nous ont prcds". Notons enfin qu'Amlineau a puis dans divers manuscrits,

    globalement concordants, pour donner le texte qu'il a prsent.

    Vertus de St Macaire.Il s'agit d'un recueil de 87 apophtegmes coptes, dont seulement 17 ont des parallles connus,soit en grec soit en armnien. Si certains de ces apophtegmes sont assurment anciens, lerecueil semble s'tre enrichi au fil des sicles. Ainsi, tel apophtegme ne saurait tre antrieurau Concile d'Ephse auquel il fait rfrence comme un vnement dj ancien ( 35), tandisque tel autre ( 62) est une critique transparente de l'islam. On y rencontre divers nomsconnus dans les recueils d'apophtegmes grecs : Poemen, Pambo, Mose, Evagre.

    Apophtegmes coptes sur St Macaire

    Si la majorit des textes des "Vertus" sont inconnus en grec, il n'en est pas de mme de cerecueil puisque six seulement des apophtegmes coptes sur les 34 que compte ce recueil n'ontpas d'quivalant connu en grec.

    III. Petit "lexique"

    Antoine le Grand. On ne saurait parler de Macairesans voquer Antoine, qui est considr comme lefondateur de l'rmitisme chrtien. Sa vie nous estconnue par le rcit qu'en a fait Athanase d'Alexandrievers 360. Il serait n vers 251 et mort vers 356 l'gede 105 ans.N en gypte Cme (aujourd'hui Qeman, Fayyoum)dans une famille assez riche d'agriculteurs gyptiensfervents chrtiens, il devient orphelin dix-huit ansavec une sur cadette lever. Ayant des terres cultiver, il prend l'vangile la lettre, l'ge de vingtans, et distribue tous ses biens aux pauvres, aprs avoirinstall sa sur selon ses vux dans une communautfminine, puis il part vivre pendant 13 ans dans ledsert, fondant la communaut des Kellia (vivant dans

    des huttes, des grottes ou de petits ermitages, il clbreavec sa communaut le synaxe le samedi) avec sondisciple Ammonas qui s'est prcdemment install Nitrie. L'afflux de nombreux disciples troublant sonisolement, il part en 285 vivre en ermite Pispir, enplein dsert, dans un fortin romain abandonn sur la route de la mer Rouge, imitant lesnombreux anachortes qui vivaient dans la pauvret et la chastet aux alentours des bourgs.L, il subit les tentations du Diable ; les dmons s'attaquent sa vie. Antoine rsiste tout etne se laisse pas dtourner par les visions enchanteresses qui se multiplient.Peu peu, saint Antoine le Grand a des disciples qui viennent suivre son enseignement. Ilsvivent proximit dans des grottes et l'coutent prcher, s'associent lui pour prier. Au fil des

    ans, ils se regroupent en diffrents noyaux de disciples choisissant un plus ancien leur tte etchoisissant tous Antoine comme guide spirituel. Ils sont l'ouest et l'est du Nil. Saint

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    Hilarion le sollicite en 307 pour obtenir des conseils sur la faon d'organiser un monastredans l'actuelle rgion de Gaza, considr comme l'un des premiers de la chrtient.En 312, saint Antoine s'loigne davantage pour s'isoler. Il va en Thbade, sur le montQolzum (o se trouve aujourd'hui le monastre Saint-Antoine). Le Diable lui apparat encorede temps en temps, mais ne le tourmente plus comme autrefois. Vnr par de nombreux

    visiteurs, Antoine leur donne chaque fois des conseils de sagesse, les invitant la prire pluttqu' la violence.

    Chrubin. La "Vie copte" de St Macaire rapporte ( 10, 11, 14, 15, 17, 20, 28) qu'unchrubin fut envoy Macaire pour l'encourager dans la vie en Dieu et fut avec lui en toutediscrtion jusqu'au jour de sa mort. Les "Vertus" ( 1 et 78) s'en font l'cho. Notons que ladescription du Chrubin "aux six ailes, et aux yeux innombrables" correspond en fait auxSraphins.

    Chadouf. Le chadouf est un systme simple pourpuiser de l'eau dans un puits peu profond.

    Il est constitu d'un grand bois basculant sur unaxe. D'un ct, une outre ou un grand vase aubout d'une corde pour remonter l'eau, de l'autreune masse (ou simplement la base du bois) faisantcontrepoids. Il suffit d'actionner la corde pourfaire descendre l'outre vide ou la remonter pleine,le bois "montant et descendant pour donner l'eau".St Macaire note qu'il ne suffit pas, pour serepentir, de multiplier les prosternation, " lamanire du chadouf". (Vertus 27)

    Egypte. Macaire est nomm "l'Egyptien", et diverses reprises il est question que les moinesse rendent "en Egypte". Est-ce dire que Sct, aussi appel le Ouadi Natroun la Valle duNatron ne se trouverait pas en Egypte ? Selon le dcoupage gographique actuel, bien srque si. Mais l'poque on dsigne couramment sous ce terme les parties habites du pays, paroppositions aux dserts, oueds et autres montagnes.

    Macaire le Grand. Il est n vers l'an 300, dans le village deJijbr (actuellement "Shabshr-Menuf") dans le Delta du Nil.Ses parents taient de Haute-Egypte et avaient du quitter leurrgion pour s'installer dans le Delta suite des revers de

    fortune. Entre 20 et 30 ans, il devint ermite dans le dsert deSct, et fut disciple "intermittent" d'Antoine, de qui il reutl'habit monastique. Ordonn prtre "contre sa volont", ilpossdait les charismes de gurison et de prophtie.Fermement oppos l'hrsie arienne, il fut, vers 374, exildans une le du Nil par l'vque Lucius d'Alexandrie. Il putcependant revenir au dsert pour y finir ses jours, g de plusde quatre-vingt dix ans. Il mourut tout la fin du IVe sicle.

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    Mtanie La mtanie (terme qui vient dugrec mtanoia () et signifie"retournement", "conversion") est ungeste pnitentiel, accompagnant trsfrquemment la prire dans lEglise

    orthodoxe.Il existe deux "formes" de mtanie : lapetite mtanie o lon sincline entouchant le sol de la main droite, et lagrande mtanie o lon se prosternecompltement en touchant le sol dufront. Comme le note St Basile le Grand,"chaque fois que nous plions les genouxet que nous nous relevons, nousdmontrons en acte avoir t jets terrepar notre pch et rappels au ciel par la

    Misricorde de Celui qui nous a crs."(Canon 91 : Amphiloque)Le P. Alexandre Schmemann, pour sa part, crit : "L'homme tout entier, dans sa chute, s'estdtourn de Dieu, l'homme tout entier devra tre restaur ; cest tout l'homme qui doit revenir Dieu. (...) Pour cette raison, tout l'homme corps et me se repent. Le corps participe laprire de l'me, de mme que l'me prie par et dans le corps." (Le Grand Carme, 1974)La "grande mtanie", comme la "petite" est suivie dun signe de croix.Mais, comme le note Macaire, la mtanie elle seule ne suffit pas (Vertus 27)

    Monachisme gyptien. C'est l'poque o, avec la fin des perscutions de l'Empire contre leschrtiens, de nombreux gyptiens choisissent, l'imitation d'Antoine, le radicalisme del'Evangile, comme avant eux l'avaient fait les martyrs. Cest ainsi que, ds les annes 320-330, outre les implantations d'Antoine, deux centre monastique staient crs, lun dans leNord du dsert libyen ( louest de la valle du Nil et a une centaine de kilomtresdAlexandrie) lautre en Haute Egypte.Le centre monastique du Nord a pour initiateur Saint Macaire le Grand, chamelier quiconnaissait les pistes du dsert et qui, de la sorte, put trouver un endroit isol o il y avait lafois leau indispensable la vie, des roseaux qui lui servaient de matire premire pour letravail manuel, ainsi que la proximit des pistes des caravanes avec lesquelles il pourraitchanger le produit de son labeur contre le peu de pain et de sel dont il avait besoin. Ilstablit dans une valle dsertique nomme Sct et sy adonna la prire perptuelle

    pendant laquelle il occupait ses main en tressant des cordes avec les roseau quil avait cueillis; ce travail simple lui permettait de suivre simultanment les deux conseil de lAptre SaintPaul qui sont le fondement mme de la vie monastique : "Priez sans cesse" (1 Th 5, 17) et"Ceux-l, nous les invitons et engageons dans le Seigneur Jsus Christ travailler dans lecalme et manger le pain qu'ils auront eux-mmes gagn" (2 Th 3, 12).Saint Macaire eut vite de nombreux disciples et en quelque annes deux autres sites voisinsfurent occups : le dsert de Nitrie et les Kellia. A la fin du quatrime sicle, plusieurs milliersde moines y vivaient, et lon venait du monde entier pour sinitier leur mode de vie, quicorrespond peu prs celui "dermite vivant en communaut", chacun vivait chez soit dansune hutte isole appele cellule et travaillait de ses mains ; avec un ancien on pouvaisventuellement trouver un ou deux jeunes disciples dsireux de sinitier la vie monastique

    On se rendait lglise que pour les offres dominicaux, car les autres temps de prire taientobserv par chacun dans sa cellule. La communaut tait fort discrte : elle avait sa charge

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    lobligation de trouver des prtres pour clbrer (en Basse Egypte il y en avait plusieurs danschaque centre monastique) et dassurer le service de lintendance (vendre le produit du travailde chacun et acheter, en change, le ncessaire) afin que tous aient lesprit libre pour lalouange Dieu.

    Natron. Le natron ( ne pas confondre avec le "nitre" ou salptre) est une sorte de rochecristalline vitreuse, de translucide blanche, contenant principalement du carbonate desodium hydratet du bicarbonate de sodium, qui se forme surtout lors de l'vaporation de lacsriches en lment sodium. En Egypte, le natron tait employ en solution liquide pour lamomification : les corps taient plongs dans des bains de natron, qui servait dshydrater lecorps. Le natron servait galement au blanchiment du linge, la prparation du cuir et laconservation de la viande. Les gyptiens ont dcouvert qu'en ajoutant certains ingrdients aumlange natron et sable (par exemple de la chaux), on obtenait des verres diversementcolors.

    Oued. L'oued (ou "ouadi" ou encore

    "wadi") est un lit de torrent des rgions semidsertiques, la plupart du temps sec maisqui peut conserver des trous d'eauimportants, et qui suite des prcipitations,peut se transformer en torrent furieux.Par extension, le terme oued dsigne lavalle rocheuse entourant le lit du torrentproprement dit.

    Pneumatophore.Macaire le Grand est, plusieurs reprises, qualifi de pneumatophore, c'est--dire de "porteurde l'Esprit saint" en qui est accompli ce pour quoi nous prions ainsi "Roi cleste, Consolateur,

    Esprit de Vrit, toi qui es partout prsent et qui remplis tout, trsor des biens et donateur de

    vie, viens, fais ta demeure en nous, purifie-nous de toute souillure, et sauve nos mes, toi qui

    es bont."

    IV. Elments bibliographiques

    * Histoire des Monastres de la Basse-gypte, Vies des saints Paul, Antoine, Macaire,

    Maxime et Domce, Jean le Nain ; Texte copte et traduction franaise par E. Amlineau ;Monuments pour servir l'histoire de l'gypte Chrtienne ; Annales du Muse Guimet, Tome25 ; 1894

    * Les Homlies spirituelles de St Macaire, traduites et prsentes par le P. Placide Deseille,Col. Spiritualit orientale n 40, Abbaye de Bellefontaine, 1984. (Pour la "Vie copte de StMacaire")

    * Les Sentences des Pres du Dsert, tome 3 et tables, par Dom Lucien Regnault, moine deSolesme, 1976 (Pour la traduction lgrement rvise par Guillaumont des "Apophtegmes" (p203 234) et des "Vertus" (p 118 202) ainsi que pour les apophtegmes grecs numrots de

    Gr 905 GR 1764. et les autres sigles employs dans les tableaux de correspondance, annexe3.)

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    * Les sentences des Pres du Dsert, tome 4, collection alphabtique, prsente et traduitepar Dom Lucien Regnault, moine de Solesme, 1981 (pour les apophtegmes grecs de StMacaire, collection alphabtique, p 173)

    * Evagre le Pontique, Trait pratique, trad Guillaumont, SC 170, 1971

    * Pallade, Histoire Lausiaque, Descle de Brouwer, 1981

    V. Notes :

    1. Le P. Placide Deseille, dans son dition des Homlies spirituelles de St Macaire, a reprisquasi sans changement la traduction d'Amlineau tout en lui ajoutant une numrotation desparagraphes. Ayant adopt son dcoupage (sachant qu'il note le titre comme premierparagraphe), j'en ai tendu le principe aux autres documents prsents ici.

    Ajoutons encore ceci, alors que la numrisation et la relecture de ces textes tait presqueacheve, je me suis rendu compte que Dom Lucien Regnault, dans le troisime tome des"Sentences des Pres du dsert" a repris la traduction des apophtegmes coptes ainsi que des"Vertus" dans la traduction d'Amlineau peine revue par Guillaumont. Quoique revue, cettetraduction laissait bien des obscurits dues surtout au fait que tant le traducteur que sonrviseur ont suivi trop servilement la structure des phrases coptes. Il ne m'a pas sembl

    judicieux de les suivre en cette voie.

    Enfin, il est certain, malgr ma bonne volont, que des erreurs de numrisations m'aurontchapp, que le rendu de certains passages sera regard comme insatisfaisant et queglobalement le lecteur aura maintes fois l'occasion de pester contre les invitablesinsuffisances de ce genre de travail. Plutt que de me vouer aux gmonies, que le lecteurveuille bien, pour lui et pour moi, prier le Seigneur des Misricordes, notre Seigneur Jsus leChrist.

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    Vie d'abba Macairepre et chef des moines de la montagne sainte de Sct,

    illuminateur plein du Saint Esprit,

    accompli en toute vertu,telle que l'a raconte abba Srapion,qui fut disciple d'abba Antoine le porteur du St Esprit

    puis trs saint vque de Thmuis,la ville voue au Christ.

    + Dans la paix de Dieu : Amen +

    2. Les choses qu'a racontes Mose, le serviteur de Dieu, dans la Loi qu'il reut de Dieu pour

    notre bien car la Loi nous conduit au Christ, selon la parole du dessein de Dieu comme a ditle saint aptre et aussi les choses qu'on a crites aprs la Loi, soit les Juges, soit lesProphtes, soit les livres de Rois, soit le reste en un mot l'Ancien et le Nouveau Testament sont profitables pour le plus grand nombre, car le discours vise ce but unique : l'Incarnation deNotre Sauveur ; c'est pourquoi on appelle "Loi" l'criture ancienne, selon ce qui est crit dansl'vangile : "Un iota ou un trait ne sera pas enlev de la Loi avant que tout cela ne soit arriv."C'est pourquoi, comme le iota et le trait signifient la croix, l'accomplissement de cesprophties s'est rencontr dans le Seigneur qu'on a crucifi sur la croix pour nous tous et qui aendur la mort dans la chair, afin de nous sauver, avec le monde entier, de la puissance dudiable.Mais ceux aussi qui ont servi le Verbe selon l'enseignement de notre Seigneur, c'est--dire lessaints Aptres, eux dont la voix est alle dans la terre entire, et ils ont t le salut de toute laterre habite, et les autres qui sont venus aprs eux, qui ont suivi les traces uniques de la pit,combattant en toute vertu contre les guerres contraires de cette vie qui n'est qu'un songe,regardant en avant l'esprance imprissable, selon que le Seigneur nous l'a enseign dans sesparoles saintes qui sont dans l'vangile, en disant ainsi : "La voie est troite qui mne la vie,et peu la trouvent" ; regardant donc tous ceux-l et mditant leur sujet, le saint porteur del'Esprit abba Macaire a t saisi d'un beau zle et a t leur compagnon, digne d'tre admir enparoles et en uvres, comme le discours nous le montrera mesure que nous avancerons.Nous serons donc, par nos paroles, profitables aux auditeurs de la pit, en exposant, au moinsen partie et par la grce de Dieu, les actions de ce saint.

    3. Donc, ce grand abba Macaire, ainsi que nous l'avons appris des Pres qui nous ontprcds, tait l'enfant de parents pieux, vivant dans le service de Dieu et le servant selon lasainte loi de l'Evangile. Son pre tait un prtre assidu au sanctuaire de Dieu avec une grandedvotion, et sa mre tait une femme fidle, marchant dans la modestie et vnrant Dieuassidment.Tous deux taient justes, et le Christ tait avec eux. Mais comme ils avaient en abondance leschoses ncessaires la vie, ils vaquaient surtout au salut de leurs mes. Une fille avait t leurpremire-ne et lorsqu'elle eut grandi un peu, le Seigneur la visita, et elle migra de cette vie.Or, ce prtre aimant Dieu et sa bienheureuse femme, comme ils aimaient tous deux la puret,ils n'eurent plus, pendant longtemps, de relations intimes aprs la mort de l'enfant, vaquant

    ds lors la prire, au jene, l'aumne, au service des malades, au point qu'ils taientrenomms ce propos et pour leur pit, tant aims de tous.

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    Mais celui qui hait le bien le diable ne put supporter de les voir vivant ainsi : il leur portaenvie selon sa coutume, et ainsi il suscita des preuves sur eux. L'une aprs l'autre, au moyend'hommes de scandale qui taient ses agents lui, Satan, de sorte qu'ils furent ruins etperdirent tous les biens qui leur appartenaient comme avant eux le juste Job, hommegnreux dans le choses de Dieu car cette poque il n'y avait pas de gouvernement dans

    leur rgion. La bienheureuse femme ayant vu ce qui tait arriv et qu'on cherchait les tenirdans la crainte, elle conseilla son mari de sauver leur me, de sortir de leur pays et de leurfamille, ce qu'ils firent. Mais lui, le prtre, comme partag entre ses penses, restait silencieux propos de tout cela, pensant : "Que m'est-il arriv ?" Ensuite, lorsque la nuit venue il se futendormi, voici qu'il vit en songe un saint vieillard totalement lumineux, vtu comme l'taientles patriarches ; et lorsque le vieillard fut prs de lui, il lui dit : "Ne crains pas, c'est moiAbraham, le pre d'Isaac qui engendra Jacob. coute-moi et ne dsobis pas la voix de tafemme : sors de cette rgion, car ainsi Dieu l'a dcid ; va Jijbr pour y habiter, et moi, je net'oublierai pas, dit le Seigneur, mais je te bnirai ; car moi aussi, je suis sorti de ma terre deHarran et j'ai demeur dans la terre de Canaan, comme le Seigneur me l'avait dit. Et moi je tedonnerai un fils, dit le Seigneur, de cette femme qui est avec toi maintenant, et son nom sera

    stable jusqu'aux gnrations, ainsi que les fils qu'il engendrera spirituellement, pour qu'ils meservent dans le lieu que je lui indiquerai." Entendant cela, le prtre se rjouissait dans sastupeur, et fut convaincu. Au matin, il appela sa femme et lui raconta tout ce qu'il avait vu, etcomment on lui avait parl. Aussitt qu'ils furent d'accord sur la volont de Dieu, ils laissrentle reste de ce qui leur appartenait, ils quittrent leur rgion et s'tant rendus Jijbr, ils yhabitrent, comme on le leur avait ordonn dans la vision. Ils avaient juste apport avec euxquelques provisions, ce qui leur suffisait, seulement ce dont ils avaient besoin. Lors doncqu'ils furent arrivs Jijbr, ils marchrent dans les lois du Seigneur selon leur habitude. lesclercs de ce lieu-l, voyant la conduite exemplaire du saint homme, le prirent d'tre leurcompagnon de service dans le sanctuaire ; ce qu'il n'accepta pas, cause des canons del'Eglise.Au bout de quelques temps, alors qu'ils taient installs, il se mit travailler la terre pour envivre et se fit laboureur. Au bout d'un certain temps, il tomba malade et demanda qu'on leportt l'glise, dans la confiance qu'il recevrait gurison. Durant la nuit, tant encore veill cause de la souffrance et de la maladie, il vit qu'un ange du Seigneur se tenait prs de luidans le sanctuaire et l'appela une, deux et jusqu' trois l'ois, en disant : "Lve-toi, viens ici."Mais il dit : "Je t'en prie, Seigneur ! je n'en ai pas la force, cause de la maladie." Maislorsque l'ange se fut approch de lui, il le prit en disant : "C'est le Seigneur qui a ordonn quetu sois guri : lve-toi et tiens-toi debout." Et aussitt il se leva et il se tint debout. L'ange luidit : "Retourne chez-toi, couche avec ton pouse, elle concevra et elle enfantera un fils. Toi etsa mre vous vous rjouirez, et il deviendra clbre par sa pit, si bien qu'on citera son nom

    presque dans la terre entire, car il amnera Dieu des hommes pour qu'ils le servent lamanire des anges ; ils imiteront presque les tres incorporels par leur manire de vivre et leurpit." Lorsqu'il se fut rveill, comme sa femme tait dans l'glise et prenait soin de lui, ill'informa de tout cela. Au matin, ils allrent dans leur maison et son pouse devint enceintesans retard, selon la parole de l'ange. Elle enfanta un fils qu'elle appela Macaire : il tait beauet rempli de toute grce.

    4. Lorsque l'enfant eut grandi, il faisait l'aumne chaque jour, selon les instructions de sesparents, voyant qu'ils servaient Dieu de toute cette manire et que surtout ils le dirigeaient parsuite de la grce de Dieu qui tait en lui ; car c'tait un enfant, de la promesse, selon ce quenous avons dj dit. Alors peu peu il prit de la force, il commena d'aider son pre dans les

    travaux de la vie, le Seigneur les bnissant et augmentant leur btail et leurs plantes, de sorteque chacun admirait la grande abondance qui tait en leur maison.

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    Les habitants du village virent la conduite de l'enfant et la grce de Dieu qui brillait sur sonvisage, aussi les clercs du village le prirent et le conduisirent l'vque en le priant de faire deMacaire un lecteur, et il fut fait ainsi. Lorsque son pre et sa mre le surent, ils furent d'abordattrists, puis ils dirent : "Que le plaisir de Dieu soit fait !" Ensuite, lorsqu'il eut grandi en ge,son pre et sa mre s'inquitrent et ses parents le pressrent de se marier. Mais lui ne voulait

    pas en entendre parler et leur dit : "Ne vous fatiguez pas me chercher une chose de cettesorte, car certes Dieu ne sera pas content de ce projet." Pensant qu'il s'agissait d'un caprice, sesparents le prirent de nouveau de leur obir, oubliant ce qu'on leur avait dit son sujet.

    Mais le jeune Macaire ne se souciait que du Seigneur, mditant chaque jour les livres l'glise et dans sa maison, comprenant ce qu'il lisait, aidant les clercs comme si l'glise avaitbesoin de lui pour son service, cela avec l'accord de ses parents. Alors, contre sa volont, onle maria, selon les lois humaines ; mais son souci et son cur taient en Dieu, comme je l'aidit : il ne coucha pas du tout avec sa femme et ne la regarda pas mme : mais lorsqu'on les eutinstalls ensemble il se mit au lit comme s'il tait malade. Et ainsi il sortait, chaque jour, puret gard par la prvoyance de Dieu. Lorsque les jours de la noce furent passs, on le fit diacre.

    Puis il demanda son pre d'aller, lui aussi, avec ses ouvriers et ses chameaux la montagnedu Natron. avec les foules qui s'y rendaient pour en rapporter du natron : et cela, il le fit afind'chapper au soucis de la femme, afin de ne plus la ctoyer partir de ce moment. Et il en futainsi, car en ce temps-l des multitudes d'hommes de tous les bourgs qui sont prs de Sct serunissaient, et ainsi ils devenaient un seul coeur pour aller la montagne pour en rapporterdu natron avec les chameaux, s'aidant les uns les autres par crainte des barbares qui, habitantune montagne loigne, venaient de temps autre du cot ouest du fleuve et faisaientprisonniers ceux qu'ils attrapaient pour les emmener dans leur pays. C'est pourquoi, commeabba Macaire allait rgulirement en cette compagnie, ceux de son village prirent l'habitudede l'appeler "Macaire le Chamelier". Un jour, alors que tout le groupe de ceux qui venaientchercher le natron taient arriv au lieu convenu, au pied d'un rocher dominant la valle, ilss'installrent ct du puit dont ils devaient tirer le natron pour passer la nuit. Le jeuneMacaire se coucha aussi et, cause de la fatigue, s'endormit.Pendant cette nuit-l, il se trouva comme dans un songe : un homme se tenait debout devantlui dans un vtement qui lanait des clairs et qui tait d'une couleur comme celle de l'arc-en-ciel, et il lui parla en disant : "Lve-toi, regarde au pied de ces rochers, cette valle qui est aumilieu : prends garde ce que tu vois." Et lorsque j'eus regard, dit-il, je dis celui qui meparlait : "II n'y a rien que le commencement de l'oued qui est l'ouest de la valle, et l'autremontagne qui l'environne, je la vois." Et il me dit : "Voici ce que dit le Seigneur : Cette terre,

    je te la donnerai ; tu y habiteras, tu y produiras ton fruit grandira, ta semence se multipliera, tuengendreras des fils spirituels et des chefs se nourriront de toi, ils seront placs higoumnes

    sur des peuples, et ta racine sera stable sur le rocher. Le peuple que tu engendreras par tesenseignements, je bnirai ses rameaux, afin qu'ils glorifient Dieu jusqu'aux extrmits de laterre entire, cause de ton bon souvenir. Lve-loi donc du sommeil et va ton chemin en paix; rflchis bien ce que tu as entendu et ce qui t'a t appris. Et aprs cela, voici que jet'apparatrai de nouveau, et, si tu deviens parfait, je t'apparatrai pour te parler directement, ditle Seigneur. Et prends garde, n'informe personne de la vision que tu as vue jusqu' un certaintemps." Et lorsque, au matin, le jeune Macaire se leva, il resta comme pris de stupeur, pensant ce qui lui avait t dit et la vision qu'il avait vue ; car il n'avait auparavant jamais rien vcude semblable. Et lorsque ses compagnons lui demandaient : "Quel est cet bahissement quit'est arriv ?" il ne rpondait rien du tout. Trois jours aprs, repartant de la montagne duNatron il retourna vers sa maison o il trouva sa femme prise d'une forte fivre. Au bout de

    peu de temps, Dieu la visita et elle reposa en paix ". Lorsque le jeune homme vit ce qui taitarriv, il se dit : "Macaire, occupe-toi srieusement du salut de ton me, car toi aussi on te

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    visitera. "Mais, comme il tait beau dans l'glise et aimait chacun cause de son humilit,tous l'aimaient, depuis le petit jusqu'au grand, comme leur propre fils, et tous parlaient de luien voyant son progrs et la grce de Dieu qui tait en lui, et ils disaient : "Qu'en sera-t-il de ce

    jeune garon ? o a-t-il pris cette science ?" car il ne frquentait pas les jeunes gens de sonage, se tenant plutt avec les vieillards blanchis qui avaient mris en sagesse, et tous ceux qui

    le connaissaient disaient : "Vraiment, ce jeune homme, on dirait un ange !" Avec son pre etsa mre, il tait d'une grande douceur, et, comme ils avaient un pur amour pour Dieu en touteschoses ils se rjouissaient beaucoup de ce que bien souvent ils l'avaient vu priant dans leschemins, faisant l'aumne aux indigents et visitant les malades. Du reste, ses parents necherchaient plus le convaincre de se marier, mais voyant la grce qui le revtait, legouvernait depuis son enfance et rchauffait son me comme une nourrice, ils regardaient saparole comme inspire, et se souvenant enfin qu'il tait le fruit d'une promesse, et ils luidonnrent repos en toute chose.Mais lui, le jeune homme, voyant la pit de ses parents, les servait en toute et leur obissaitcomme fait un serviteur pour ses matres.

    5. Lorsque le jeune garon fut arriv l'ge adulte selon la loi, son pre tait un vieillarddevenant aveugle, comme Isaac le patriarche. Et lorsqu'il fut devenu sans force par suite de lamultiplication du temps, ds lors il resta couch sur le lit ; et le bienheureux Macaire taitassidu prs de lui, le servant, lui demandant avec foi, tout moment, de le bnir. Et ainsi ilarriva. Lorsque ses jours furent accomplis dans une bonne vieillesse : il s'tendit et se reposa,et on l'ensevelit convenablement. Quand son pre se fut endormi, aussitt il lui vint au curd'abandonner cette vie et ses soucis, de n'avoir plus se soucier que d'une chose et pouvoirs'adonner la prire avec libert d'esprit : et ainsi il commena de distribuer peu peu tout cequi lui appartenait. Mais lorsque sa mre l'apprit, elle lui parla en priv, disant : "Mon fils,qu'est-ce que tu fais ? Voici que tu es un jeune homme, prends garde de perdre ce que tu as,de devenir indigent, et ainsi de te faire le serviteur des autres !" Et lui, ne voulant pas attristerson cur, lui rpondit : "Je ferai ce que tu me diras." Toutefois, il garda son projet dans soncur. Or, aprs six mois et quelques jours le Seigneur visita la bienheureuse vieille, et,lorsqu'elle se fut repose, on plaa son corps prs de celui du bienheureux prtre.Lorsque le bienheureux Macaire fut rest seul, des foules de penses l'entourrent.

    6. Un jour de fte, il lui vint cur d'inviter les besogneux et les infirmes, de leur fairel'aumne d'un repas selon la coutume, afin qu'ils fassent mmoire de ses parents. Il y avait, unpeu en arrire de son village, un ermite la tte chevelue qui craignait Dieu grandement etmenait une vie tranquille dans une petite cellule, tout seul. Comme il tait venu l'glise en ce

    jour, parce qu'il n'y avait pas de prtre en sa cellule pour lui donner la bndiction, le saint

    Macaire l'invita d'aller aussi recevoir l'aumne ; ce qu'il accepta. Lorsqu'ils eurent fini demanger, le saint Macaire lui dit : "Je t'en prie, mon pre, permet que je vienne te voir demainmatin, afin que je te dise ma pense, car la chose en a besoin." Et, connaissant la vie dubienheureux Macaire, le vieillard y consentit. Au matin, Macaire se rendit vers lui, il l'informade son dsir de perfection, "car, dit-il, moi aussi je dsire tre ermite et m'occuper du salut demon me." Le vieillard, voyant la grce de Dieu qui tait dans le jeune homme, s'tonna deson dsir et de sa demande, puis il lui permit de rester, afin de savoir ce que le Seigneur luiferait connatre son sujet, car certes c'tait un voyant. Comme le soleil allait se coucher, ilsmangrent un peu puis s'allongrent pour dormir. Toutefois, tandis que le vieillard s'abstenaitdu sommeil, le Seigneur lui ouvrit les yeux et voici qu'il vit un groupe de moines autourd'abba Macaire endormi, tous blancs, ayant tous comme des ailes sur leurs paules la

    manire des aigles. Et il entendit une voix qui disait : "Lve-toi, Macaire, commence leservice ; car le temps est venu. Lve-toi, car c'est moi qui t'envoie." Lorsque le saint vieillard

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    eut entendu cela, il ne dit rien ; mais lorsque le jour eut paru et que le bienheureux Macaireallait repartir, le vieillard lui dit : "N'as-tu rien vu, cette nuit ?" Il lui dit : "Non, rien du tout ;mais j'ai dormi en repos et en rafrachissement de mon me." Alors le vieillard lui dit : "Cequi est mont en ton cur, fais-le ; car c'est le Seigneur qui t'invite." Le vieillard ne lui dit riende ce qu'il avait vu, de peur que le jeune homme ne s'enorgueillisse ; mais il lui ordonna de

    s'en aller au loin, afin d'habiter dans des cellules prs d'un autre village, car personne encoreparmi les dvots de Dieu n'habitait dans les dserts intrieurs, si ce n'est le grand Antoine quiallait souvent dans les lieux dserts et de nouveau en sortait. Aussi le bienheureux Macaire,lorsqu'il fut retourn au village, commena promptement de distribuer tout ce qui luiappartenait aux pauvres et aux infirmes.

    7. Et ainsi, il sortit de son village, il alla s'installer dans une cellule l'extrieur d'un autrevillage o il habita seul pendant quelque temps. Les habitants de ce village voyant sa manirede vivre et sa douceur, comme ils n'avaient pas de prtre pour leur donner la bndiction dansle village, allrent parler en secret l'vque son sujet, et, l'ayant emmen sans qu'il stpourquoi, il fut ordonn prtre malgr lui. Cependant cela lui arriva par une disposition

    divine, afin qu'il se secourt, et les autres avec lui, lorsque, aprs cela, il habita dans le dsert.Lorsqu'il eut habit dans cette cellule pendant quelques temps, ce qui fut profitable tous,alors le diable commena de changer sa premire manire de combattre, et nulle pens ne vintde quelques temps troubler le bienheureux Macaire, ceci afin qu'il restt en ce lieu et n'ensorte pas pour aller combattre, de crainte que le dsert ne devint pas un monde nouveau pourle Dieu du ciel, le lieu o il rassemblerait pour le Seigneur une arme de soldats spirituels, seservant des armes de la sagesse contre les armes apostates, c'est--dire celles des espritsimpurs ; qui combattraient le diable par les flches aigus des vertus et remporteraient sur luila victoire au nom de Jsus le Christ notre Dieu.Mais Dieu, qui est prvoyant et sage, permit qu'une preuve s'levt contre abba Macaire, afinqu' cause de cela il se rappelt ce qui lui avait t dit et qu'il aille dans le dsert, au lieu quilui avait t indiqu, afin d'y rassembler quiconque dsirait la vie ternelle. Cette preuve,vous la connaissez tous, comme il l'a raconte lui-mme de nombreuses fois ; cependant jevous la dirai, frres.

    8. Il y avait dans ce village une jeune fille ayant grandi en ge mais n'tait pas marie ; il yavait aussi un jeune homme dans son voisinage qui lui tait proche selon la parent. Et lesparents du jeune garon pensaient marier la jeune fille leur fils par une union respectable,selon les lois de la nature ; mais lorsqu'ils eurent grandi tous les deux il ne fut pas possible deles marier cause de la pauvret des parents du jeune homme. Cependant le jeune garon et la

    jeune fille s'taient frquent, cause de la parent et du voisinage, comme nous l'avons dit.

    Ils se rencontraient ensemble une foule de fois dans les maisons et dans les rues, et, alorsqu'en un jour de fte ils avaient bu du vin s'enivrer, ils couchrent ensemble, perdant tousdeux leur virginit. Et ainsi la jeune fille devint enceinte, et craignant tous deux que leursparents ne les tuent cause du dshonneur, ils prirent une dcision injuste, ajoutant encore ungrand pch leur coucherie. Ils se dirent donc l'un l'autre : "Que ferons-nous ? car si nosparents apprennent cela, ils nous perdront ! Disons que c'est le prtre ermite qui a agi ainsi,car c'est un tranger et personne ne lui fera grce." Et il fut ainsi.Lorsque les parents de la jeune fille surent qu'elle tait enceinte, ils lui demandrent : "Quet'est-il arriv ? Qui t'a fait cela ? Apprends-le-nous !" Mais elle, comme le jeune homme luiavait dit, rpondit : "Je suis alle un jour vers l'ermite ; c'est lui qui m'a fait cela et m'aengrosse." Aussi les parents, furieux cause du dshonneur qui leur tait arriv au sujet de

    leur fille, se rendirent en compagnie d'autres personnes la cellule d'abba Macaire et le firentsortir en lui donnant de violents coups comme pour le tuer ; mais lui, le saint, comme il ne

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    savait pas ce qui tait arriv, leur demandait : "Qu'y a-t-il pour que vous me frappiez ainsisans piti ?" Finalement, ils attachrent son cou des marmites remplies de cendre et leconduisirent au milieu du village, une foule d'enfants le suivant, le frappant, le poussant dect et d'autre, comme pour un meurtrier, et criant tous contre lui, disant : "Sus lui, sus a lui,car il a viol la jeune fille." Mais un pieux lac, qui souvent rendait des services Macaire afin

    de recevoir sa bndiction, le suivait alors avec respect. Tandis que ces gens faisaient souffrirMacaire tant par les coups que les moqueries, des fidles arrivrent et le voyant presque mortdemandrent : "Que lui est-il arriv ?" Et lorsqu'ils eurent appris de quoi il tait accus, ilsdirent : "Cette chose n'est pas vraie ; car nous qui connaissons cet homme, nous savons qu'ilest fidle en vrit." Et s'tant approchs, ils le dlirent et brisrent aussi les marmites pleinesde cendre qu'on avait mises sur son cou. Mais le pre de la jeune fille dit : "Rien n'estpossible, jusqu' ce qu'il ait trouv quelqu'un qui se porte garant de lui, de sorte que lorsque la

    jeune fille enfantera, il paie pour l'accouchement et la nourriture de l'enfant." Et Macaire dit :" violence ! jugement o je me trouve sans le savoir !" Alors l'homme qui le servait dit :"Faites charit, prenez-moi pour garant", ce qui fut fait. Aussi, on relcha Macaire, et il s'enalla sa cellule, moiti mort.

    9. Lorsqu'il fut arriv sa cellule, il se parla et dit : "Macaire, voici que tu t'es trouv unefemme ! Dsormais, il faut que tu travailles nuit et jour afin de te nourrir avec elle et sonenfant". Et ainsi il travailla avec zle, et les corbeilles qu'il faisait, il les donnait celui qui leservait pour qu'il les vende et en donne le prix la jeune femme, afin que lorsqu'elleaccoucherait, elle le dpense pour elle et pour l'enfant. Mais Dieu qui est ami des hommes,qui glorifie ceux qui le glorifient, qui connat les choses avant qu'elles ne soient, ainsi que lepass, qui connat ses lus ds longtemps avant qu'ils n'aient ts engendrs, ne voulut pas queson trsor reste cach et que l'action de son serviteur Macaire reste ignore, mais au contrairevoulut que chacun sache qu'il y a espoir qui reste aux gens pieux.Aussi, lorsque le temps o cette malheureuse jeune fille devait accoucher, alors que lesdouleurs de l'enfantement la saisissaient avec violence, elle fut en danger de mort durantquatre jours et quatre nuits sans pouvoir accoucher. Sa mre lui dit "Que t'arrive-t-il ma fille ?Encore un peu, et te voila mourante !" Et elle rpondit : "Je suis digne de mourir, car nonseulement j'ai pch, mais en plus j'ai accus tort le serviteur de Dieu, l'ermite. Car ce sainthomme ne m'a absolument pas touch : c'est tel jeune homme qui m'a mise enceinte !" Quandil apprit cela, le jeune homme s'enfuit, de peur d'tre attrap. Lorsque cette malheureuse eutaccouch, aprs avoir avou la vrit, l'homme qui servait le saint abba Macaire alla letrouver, plein de joie et de louange et lui dit : "Cette jeune fille qui t'a calomni n'a puaccoucher jusqu' ce qu'elle ait avou "ce n'est pas le saint qui m'a fait cela, mais c'est tel

    jeune homme". Tous ceux qui apprirent ce qui tait arriv se rendirent auprs d'abba Macaire,

    le glorifiant et le louant beaucoup. Mais celui qui se rjouissait le plus tait l'homme quiservait Macaire, car le Seigneur l'avait lav de tout dshonneur, car on lui faisait desreproches, ou peu s'en faut, une foule de gens le mprisant et lui disant "Vois-le, ton sainthomme ! Voici ce qu'il a fait !"Ces choses tant ainsi arrives, le saint abba Macaire dcida de quitter cette cellule et d'allerhabiter dans un autre endroit.

    10. Le jour o, selon sa coutume, il devait prendre les saints mystres dans sa cellule, setenant comme son habitude l'autel, il regarda vers la droite et vit : voici qu'un chrubin auxsix ailes et aux yeux innombrables se tenait prs de lui. Abba Macaire commena le regarderfixement, disant "Qu'est-ce ?" et, cause de la splendeur et de la clart de sa gloire, il tomba

    face contre terre, comme mort. Quand il fut rest un peu de temps tendu terre, le chrubinle prit et aprs lui avoir rendu des forces, il le fit lever. Lorsque Macaire se fut remis, le

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    chrubin lui dit : "Pourquoi ton cur s'est-il encrass de la sorte ? Tu as nglig ce qui t'a tdit au pied du rocher, et tout cela est devenu pour toi comme un songe. Cependant, tu as bienfait de supporter l'preuve jusqu' ce qu'elle se termine, afin que par l'preuve tu apprennespeu peu tre vaillant dans les combats dans lesquels le Seigneur permettra que tu soisprouv par les dmons et les hommes. Termine donc l'office que tu as commenc, et prends

    les saints mystres, car ils te purifieront et te rendront forts, puis prpare-toi durant la nuit quivient, afin de partir rapidement de ce lieu et d'habiter dans le lieu qui t'a t indiqu par leSeigneur. Seulement, tiens-toi prt et ne nglige pas l'ordre qui t'a t donn, car la nuitprochaine, je reviendrai ici auprs de toi, et nous partirons de nuit, sans que cela se sache, cause de la lourdeur des hommes. Et ne crains rien, car c'est ainsi que le Seigneur m'a ordonnnon seulement de t'emmener de ce lieu-ci, mais encore d'tre avec toi dans le lieu que leSeigneur t'a indiqu, afin que soit accompli ce que tu as entendu, comme cela t'a t dit. Eneffet, le seigneur a dcid que tu seras pre d'une multitude, non selon l'engendrement charnelmais selon l'appel des enfants spirituels. Quant moi, j'ai reu l'ordre du Trs-Haut de serviren secret jusqu' la fin des temps le peuple que tu runiras selon le dessein de mon Dieu, conditions qu'ils gardent les commandements et les prceptes du Seigneur que tu leur

    donneras." Puis il lui dit encore : "Je reviendrai vers toi la nuit prochaine. Ne crains rien, netergiverse pas car c'est le Seigneur qui commande. Prends garde et ne contredis pas."

    11. Le saint abba Macaire, ayant prit consolation et courage de la prsence du chrubin,oublia les souffrances et douleurs qu'on lui avait causes, et se prpara suivre en touteschoses ce qui lui avait t dit.Et dans la nuit suivante, alors qu'il s'tait lev pour dire l'office selon sa coutume, voici que lelieu devint lumineux comme en plein midi d't, et abba Macaire sut ainsi que c'tait lechrubin qui tait revenu vers lui. Cette Puissance, aprs tre reste un peu de temps sans luiparler afin de ne pas l'effrayer, lui dit enfin : "Lve-toi, ceins-toi de force au nom de Dieu quite fortifie, et suis-moi l'endroit qui t'a dj t dsign par le Seigneur". Alors, laissant toutechose dans la cellule, il partit avec joie, conduit par le chrubin, par la puissance de Dieu. Aubout de deux jours, ils arrivrent la montagne, allant ici et l pour la visiter en tous sens.Alors abba Macaire lui dit : "Je t'en prie, mon seigneur, apprends-moi en quel lieu j'habiteraicar je ne connais aucun endroit ici". Le chrubin lui dit : "Choisis le lieu que tu voudras parmiceux que tu verras, fais un essai et prends celui qui est bon : seulement prends garde auxesprits mauvais, leurs embches malveillantes, et si tu es constant, je te visiteraiconstamment selon ce qui m'a t ordonn par mon Dieu." Lorsque abba Macaire eut pass denombreux jours inspecter la montagne, en faisant le tour, il arriva au commencement del'oued qui entoure les endroits o l'on rcolte le natron, et creusant dans le rocher, il s'y fit unecaverne et y habita pendant des jours afin de n'tre pas trop loign de l'eau.

    12. Ensuite, ayant pris le chemin des lieux dserts et y tant plus tranquille, il alla en haut durocher situ au sud et il y habita ; car prs des lieux o l'on chargeait le natron, les marchandsle faisaient souffrir, jetant du natron d'en haut, l'endroit o les barbares turent les soldats.Lorsqu'il y fut rest quelque temps, il creusa deux cavernes dans le rocher ; en l'une d'elles ilfit un sanctuaire, du ct de l'est, afin d'y prendre la bndiction, et il y restait assis, vaquant la prire et travaillant tresser les corbeilles qu'il faisait, et il les donnait aux marchands qui,aprs les avoir vendues, lui apportaient ce dont il avait besoin et aussi des rserves pourl'offrande sainte. Lorsque la multitude des dmons qui taient en ce lieu vit le courage dusaint et sa ferveur pour Dieu, ils devinrent comme des btes sauvages furieuses, tournantautour de lui sans pouvoir l'approcher, car cela ne leur avait pas encore t accord par Dieu.

    Cela lui arriva avec misricorde et grce, afin qu'il ne soit pas immdiatement effray ni

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    dcourag trop vite car il n'y avait personne sur cette montagne pour le diriger avec prudencedans le combat contre les penses mauvaises et des esprits impurs.

    13. Au bout de peu de temps, il se dit en lui-mme : "Voici donc le lieu ! J'y suis venu commeil m'a t ordonn, mais il n'y personne ici qui me dirige faire l'uvre spirituelle selon

    l'usage de ceux qui habitent le dsert. Et que ferai-je ? Voici, pendant que j'tais en Egypte,j'ai entendu dire comment le saint Antoine habitait le dsert intrieur, il y a longtemps. Je melverai donc pour aller vers lui, afin qu'il me donne une rgle et qu'ainsi ma penses'affermisse, jusqu' ce que je revienne ici." Puis, s'tant lev, il pria et sortit. Il se dirigea versla montagne, jusqu'au lieu o vivait abba Antoine. Lorsqu'il fut arriv, le vieillard le reutavec joie ; et, lorsqu'il lui eut appris sa pense avec franchise, comme un fils auprs de sonpre, sans aucun secret, alors le vieillard lui baisa la tte et lui dit : "Mon fils Macaire, tu esbienheureux ainsi que ton nom l'indique. En effet, le Seigneur m'a inform l'avance que tuviendrais vers moi : c'est pourquoi j'attendais ce temps afin que nous voyions ton salut etsachions ton tat." Alors le vieillard l'encouragea et le consola par des paroles convenables l'habit du monachisme, lui faisant connatre comment il avait t combattu de toutes les

    manires par les penses en cachette et aussi ouvertement jusqu' la mort. "Afin, dit-il, que toiaussi tu deviennes vaillant, si l'on te combat." Et abba Macaire le priait de l'autoriser resterprs de lui, mais le vieillard ne l'accepta pas, lui disant : "Chacun selon l'ordre que Dieu lui adestin, qu'il y reste". Et aprs avoir pass plusieurs jours en cet endroit, prenant conseilchaque jour, sa pense considra avec calme le moment du retour. Lorsqu'il tait l, ilcouchait chaque jour prs de moi, l'insignifiant Sarapamon, et aprs la prire de la nuit, nousparlions entre nous des grandeurs de ceux qui avaient combattu selon Dieu et nous nousencouragions l'un l'autre en nous racontant notre vie.

    14. Mais lorsque le saint fut retourn son endroit, il demeura dans son habitation, nes'occupant que de Dieu seul : son esprance tait en lui et le chrubin le gardait chaque jourconstamment.

    Et un soir, il sortit pour aller puiser de l'eau du ct de l'oued, car il n'avait pas encore creusde puits. Pendant qu'il marchait, rcitant les Ecritures, voici qu'une voix se fit entendre duciel, qui disait : "Macaire, Macaire !" S'tant arrt, il regarda de ci, de l, mais vit qu'il n'yavait personne alentour. Ayant entendu de nouveau, puis une troisime fois la voix, il s'assitplein de crainte, et la voix lui dit : "Parce que tu as cout mon ordre et que tu m'as suivi, jerassemblerai pour toi, en ce lieu, un peuple de toute tribu, afin qu'ils me servent et que je soisglorifi par eux, en faisant que mon nom soit bni leur sujet cause de leurs bonnes uvreset de leur vie bienheureuse. Toutefois, prends garde, ne repousse personne de ceux qui

    viendront toi." Lorsqu'il eut reprit courage, il poursuivit son chemin, et lorsqu'il fut arriv sa caverne, il mangea et se coucha. Alors qu'il tait sur le point de s'veiller pour prier selonsa coutume, il entendit les dmons qui se parlaient les uns aux autres et disaient : "Laisserons-nous cet homme habiter ici ? Laisserons-nous, cause de lui, ces dserts devenir un port derefuge pour quiconque est en danger ? Et surtout les laisserons-nous devenir comme une citsemblable au ciel pour ceux qui esprent en la vie ternelle ? Si nous supportons celui-ci, desmultitudes se runiront lui et les dserts ne seront plus sous notre puissance ; mais plutt ilsnous pourchasseront par le fouet de leurs prires. Alors, venez, effrayons-le : peut-tre lechasserons-nous !"Mais le saint Macaire ayant entendu cela, son coeur s'affermit comme celui d'un lion, et aussiil bnissait Dieu en lui-mme, qui lui avait ouvert les oreilles afin qu'il connaisse

    l'impuissance des dmons.

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    15. Donc, lorsque le saint se mit en prires, voici que toute l'assemble des dmons vint endessus de la caverne sur la montagne, tant comme une foule de cavaliers qui faisaient minede se livrer combat les uns aux autres. D'autres se tinrent prs de la porte et faisaient commedes balles de feu qu'ils lanaient dans la caverne o aussitt elles clataient. Mais saintMacaire psalmodiait constamment, disant : "Le Seigneur est ma lumire et mon salut, qui

    pourrais-je craindre, moi ? C'est le Seigneur qui combat pour mon salut, devant qui serais-je,moi, infirme de coeur ?" et ce qui suit. Lorsque le matin eut paru, il sortit et voici qu'il n'yavait personne, et, aprs tre rentr, il s'assit son ouvrage selon son habitude. Et il en taitainsi chaque jour, parce que le Seigneur avait permis que les dmons le tentent longtemps pardes penses. Et ainsi les dmons lanaient des penses mauvaises en son coeur, "et commeune table, dit-il, couverte de toutes sortes de victuailles, ainsi commencrent pour moi lespenses de fornication, de voracit, d'angoisse, de chagrin, d'orgueil, de vaine gloire, decrainte, de deuil, de louange, d'honneur, d'incrdulit, de blasphme, de cette dsesprance enDieu qui loigne de tout chemin de la pit, en un mot tout l'ensemble des actions des dmonsdans les penses, ils m'en combattirent, comme l'avait annonc mon pre abba Antoine." Etc'est en cela que le Seigneur le secourait : par sa prvoyance et sa droite lection envers lui ;

    et il en sortit vainqueur.Lorsqu'un long temps fut pass, environ une anne depuis qu'on le combattait ainsi, alors il seleva, il alla vers le saint Antoine. Et lorsqu'il le vit de loin, abba Antoine nous dit nous, sesdisciples : "Voici un vritable Isralite en qui il n'y a pas de ruse ; car celui-ci sera un rameaulev et droit, et le fruit de ses branches sera doux la bouche du Seigneur, je veux dire sesenfants et les fils de ses fils qui recevront ses instructions saintes." Lorsque abba Macairearriva devant le saint abba Antoine, il se jeta visage contre terre et se prosterna devant abbaAntoine, puis, s'tant relev, l'embrassa. Et, lorsque le vieillard vit abba Macaire triste et d'uneapparence sans force, cause des attaques des dmons, le vieillard lui dit joyeux "Que t'est-ilarriv, mon fils Macaire ?" Abba Macaire lui dit : "Le Seigneur vient de t'apprendre ce quim'est arriv, mon pre." Et l'encourageant par des multitudes de paroles, Abba Antoine lui dit: "Sois fort et prends courage, car c'est ainsi que Dieu a rsolu de t'prouver par l'adversit,afin que toi aussi tu puisses secourir les autres : car tu dois tre pre d'une foule de tribus quiaimeront la vraie sagesse de la vie de moine ainsi que tu l'as appris de la voix du Seigneur quetu as entendue lorsque tu allais puiser de l'eau." Entendant cela avant qu'il ne l'ait informd'aucune de ses penses, abba Macaire fut tonn et il se disait en lui-mme : "Il n'est pasncessaire que je dise quoi que ce soit au saint, car il sait toute chose en esprit." Et aprs qu'ileut pass quelques jours avec lui, jusqu' ce qu'il ait reu la fois sa bndiction et sesconseils, il le pria de lui donner l'habit, car Antoine avait dit abba Macaire en secret "Ne tefatigue pas revenir ici, car dans peu de temps j'irais vers le Seigneur." Et lorsqu'il eut priavec instance, Antoine lui donna l'habit et c'est pour cela qu'on le nomme disciple d'Antoine.

    Mais lui, abba Macaire, suppliait abba Antoine genoux et avec larmes de le garder prs delui, jusqu' ce qu'il ait reu la bndiction dernire. Et ne voulant pas l'attrister, abba Antoinele garda prs de lui. Alors, abba Macaire fit une mtanie, et le vieillard lui dit : "Encore unpeu, et le Seigneur te donnera repos de la charge excessive des penses mauvaises, et par lasuite les dmons te combattront ouvertement, comme pour moi ; mais sois fort et prendscourage, le Seigneur est avec toi pour te secourir : ne crains pas et prends garde cettePuissance, je parle du chrubin : ne lui donne aucun scandale dans aucune oeuvre, afin qu'ilreste avec toi jusqu' la fin pour te consoler, selon ce qui vous a t ordonn par le Seigneur, toi tout autant qu' lui." En entendant cela, abba Macaire fut de nouveau dans la stupfaction,et il dit au vieillard : "Je te prie, mon pre saint, que je demeure prs de toi jusqu' ce que j'aiereu la bndiction, si tu laisses le corps." Le vieillard lui dit : "Ce n'est pas le temps, mon fils,

    et ce n'est pas ce qui a t ordonn ; mais ainsi que je te l'ai dit tout d'abord, que chacundemeure au lieu o il a t appel." Et le vieillard lui donna un bton qui lui avait dur

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    longtemps, et l'ayant embrass, il pria sur lui. Et lorsque notre pre saint abba Antoine eutachev sa course, nous primes soin de son corps saint. Et notre pre saint abba Macaireretourna vers son habitation dans le dsert, et il y demeura vaquant ses services, rendantgloire notre Seigneur Jsus le Christ.

    16. Ensuite des multitudes commencrent a se runir auprs de lui, le priant l'un aprs l'autrequ'il les fasse moines, afin qu'ils demeurent prs de lui, qu'il leur enseignet la voie de Dieu. Etil recevait lui tous ceux qui venaient lui, comme on le lui avait ordonn, et il les guidait,tous, chacun selon ce dont il avait besoin. Il les gardait auprs de lui jusqu' ce qu'il leur aitenseign l'uvre de Dieu, l'dification des hommes et le travail des mains : ainsi il leur faisaitcreuser dans le rocher des cavernes qu'ils couvraient de palmes, de rameaux et de roseaux del'oued, et ils y habitaient. Et quelques-uns parmi les frres, il les plaa prs de lui comme dansle rang de disciples. Et en ce temps-l vinrent lui deux jeunes garons du cot de laRomanie, voulant demeurer au dsert : et ceux-l aussi, il les reut et les affermit. Mais aubout de peu de temps le Seigneur les visita et ils se reposrent. Le vieillard a tmoign leursujet que leur uvre plut au Seigneur en toutes choses. Lorsque ces saints jeunes hommes

    furent entrs dans le repos, on les enterra prs de la caverne, et quand quelques moineshabitrent dans cet endroit, prs de la caverne, on appela ce lieu "Deir Baramos" (Monastredes Romains) jusqu' ce jour.

    17. Lorsque le saint Macaire eut vu l'allgresse des multitudes et leur amour pour Dieu, alorsle saint abba Macaire les runit tous auprs de lui, et lorsqu'ils se furent tous mis l'oeuvre, ilsse btirent une petite glise. Mais le nom du saint abba Macaire commena de devenir clbreet atteignit jusqu'aux cours royales cause du nombre de ses actions et des gurisons que leSeigneur oprait par lui pour sa gloire. Aussi, les dmons voyant comment la pit taitrenomme et le grand nombre d'mes que le saint non seulement secourait mais encoreapportait en don Dieu afin qu'elles le servent, entrrent dans une grande fureur et allrentvers lui l'heure de midi, alors qu'il tait assis tout seul. Et tous l'ayant encercl comme deschiens, ils lui crachrent au visage, lui dchirrent les chairs sans piti, de sorte que tout soncorps fut rendu comme des raisins noirs. Il resta longtemps terre, n'ayant personne pourl'aider, et a peine put-il, le troisime jour, se rendre l'glise avec souffrance.Lorsqu'il fut guri de cela, voici que le chrubin lui apparut et lui dit : "C'est cause de toique le Seigneur est venu habiter ce lieu. Maintenant lve-toi et suis-moi : je te montrerail'endroit o tu achveras ton service jusqu' ta fin." Et l'ayant entran, il le conduisit sur lehaut de la montagne au sud de l'oued, l'ouest du puits, en surplomb de la valle, et il lui dit :"Commence de te faire une habitation en ce lieu et btis une glise : assurment dans peu detemps un peuple nombreux habitera en ce lieu." Et ainsi il y habita jusqu'au jour de sa mort :

    on appelle ce lieu "abba Macaire" parce qu'il y acheva sa vie. Mais le saint abba Macaire,lorsqu'il eut habit en ce lieu une multitude de jours, les dmons le firent beaucoup souffrir encachette et ouvertement.

    18. Ainsi, un jour qu'il creusait un puits avec les frres, afin d'en boire l'eau, l'heure de miditant venue ils cessrent afin de prendre un peu de repos, lui seul resta afin de se laver avantde rentrer. Alors les dmons arrivrent sur lui, le prcipitrent dans le puits qu'ilscommencrent combler jusqu' ce qu'il soit enseveli des pieds la taille. Lorsque les frresfurent ressortis, ils ne le virent pas et se disaient les uns aux autres : "Qu'est-il arriv notrepre ?" et lorsqu'ils furent arrives prs de lui, ils lui dirent : "Qu'est-ce qui t'est arriv ?" Maislui, leur ayant souri, dit : "Donnez-moi la main, vous autres, et tirez-moi de l." Et ainsi, ils le

    hissrent. Lorsque le puit fut achev, il s'en retourna. Les frres burent de son eau et ilsl'appelrent "le puits d'abba Macaire" jusqu' ce jour, parce qu'il avait t jet dedans : en

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    effet, il a creus une multitude de puits avec les frres mais aucun d'entre eux n'a t appel"puits d'abba Macaire" except celui-ci. Et de plus, aprs sa mort, un grand nombre degurisons eurent lieu ce puits.

    19. Quant au bienheureux ahba Macaire, on lui amenait de nombreux malades d'un peu

    partout y compris d'endroits loigns, et il les soulageait tous, presque comme s'il avait tl'un des aptres. Et dj le grand Antoine avait dj rendu tmoignage de lui, en disant : "Il at donn Macaire de par Dieu la grce des gurisons !" et quelle que soit l'heure, lesenvirons de son habitation taient envahis de malades et de ceux qui taient possds desdmons ; il les gurissait en les signant au nom de notre Seigneur Jsus le Christ : les lpreux,il les rendait purs ; ceux qui taient paralyss il les gurissait, et par une parole de sa bouche,ou plus exactement par la puissance de Dieu, il les renvoyait guris chacun dans son chemin ;les morts, il les ressuscitait : en un mot, rien ne lui tait impossible cause de sa grandehumilit et de son amour inextinguible pour Dieu, ou plutt c'tait le Saint-Esprit qui agissaiten tout ce qu'il faisait.Un jour, on lui amena une fois un sourd-muet, comme le possd dans l'Evangile, frappant

    quiconque le rencontrait ; et quoiqu'ils fussent quatre l'avoir saisi, c'est grand peine qu'ilspurent l'amener au saint. Et, lorsqu'ils l'eurent amen, le vieillard dit aux hommes : "Lchez-le!" et lorsqu'ils l'eurent lch, aussitt le malade s'lana sur lui, brisa les liens qui taient soncou et ses mains et s'enfuit dans la montagne en criant comme un chameau. Et les hommesdirent au vieillard : "S'il rencontre quelqu'un, il le tuera !" Mais le vieillard, qui priaitsilencieusement en son cur, dit : "Laissez-le, ne craignez pas." Et lorsqu'il eut err un certaintemps, il revint vers eux. Et le vieillard lui dit : "Quel est ton nom ' ?" Il rpondit : "Satan c'estmon nom." Le vieillard lui dit : "Maintenant tu vas sortir de celui-ci, au nom de Jsus monDieu, et ne retourne plus en lui jusqu'au jour de sa mort ; car c'est ainsi que le Seigneur Jsusl'a dclar." Et lorsque l'homme fut tomb terre, il devint comme un mort devant le vieillard,et celui-ci prit de l'eau, lui en mit sur le visage, sur les oreilles et lui en versa dans la bouchepour le faire boire. Puis, le laissant endormi prs des hommes, il entra et pria. Ressortant, ilprit de l'huile de la lampe du sanctuaire, il en mit dans la bouche du malade et aussi dans sesoreilles, et, aprs l'avoir secou, il lui dit : "Lve-toi, va dans ta maison." Et, lorsqu'il se futlev, il obit et parla, le dmon s'en tant all de lui, et il rendait gloire Dieu et au saint abbaMacaire sur la merveille qui avait eu lieu.

    20. Une nuit qu'abba Macaire dormait, trois dmons vinrent et lui dirent : "Nous sommes dessaints ; lve-toi, que nous prions." Lorsqu'il se fut assis, il dit : "Allez dans les tnbres, aulieu o seront les larmes." Et ils lui dirent : "Blasphmeras-tu les saints ? Lve-toi, prions ; carles dmons ne diront pas aux hommes : Priez. Et vois, nous sommes trois, en imitation de la

    Trinit." De nouveau, il les maudit au nom du Seigneur. Et lorsqu'ils se furent approchs, ilscommencrent le secouer avec la natte qui tait sous lui, alors il s'cria : "Mon SeigneurJsus, secours-moi !" et aussitt ils devinrent comme de la fume et disparurent.

    Un jour qu'il tait assis, voici que le chrubin vint lui et, en le voyant, abba Macaire serjouit. Le chrubin lui dit : "Sois fort dans les combats et en toute chose rends gloire Dieu ;et prends garde de t'enorgueillir au sujet des gurisons que tu opres, de peur que tu ne perdesle fruit de tes souffrances." Et abba Macaire lui dit : "Quel est mon orgueil, mon seigneur ?car voici que les dmons font souffrir mon corps et mon me en mme temps par la mauvaiseodeur de leurs passions impures, et je suis en moi-mme comme une femme qui est souilleau temps de ses rgles : de quoi pourrais-je donc m'enorgueillir, ayant d'ailleurs l'exprience

    que le Seigneur Jsus le Christ est mon secours et que c'est sa grce qui opre la gurison."

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    21. Une autre fois, alors que ce saint vieillard, le saint abba Macaire se tenait en repos, ilpensait et se dit : "Je sortirai de cet oued et je verrai s'il y en d'autres qui se sont installs dansce dsert avant moi." Toutefois, il ne le fit pas, et cette pense le combattit pendant cinqannes. Alors il dit : "Je me lverai, j'irai et je marcherai dans cet oued et je verrai ce que j'ytrouverai, comme j'y ais t incit." Et lorsque le vieillard saint abba Macaire fut sorti, qu'il

    eut march quatre jours, il arriva un lac, avec une le au milieu. Et lorsqu'il fut arriv l'le,il regarda vit des hommes dont la chair tait devenue noire et avait t rendue grossire parl'air, dont les cheveux et les ongles taient devenus longs : leur aspect s'tait change de tellesorte que, lorsqu'il les vit, il fut effray, disant : "Ce sont des esprits !" Mais eux, lorsqu'ilsl'eurent vu effray au point de presque s'vanouir, l'appelrent au nom du Seigneur.Aussi, ayant repris confiance, il leur parla. Ils lui dirent : "Que t'est-il arriv et qu'es-tu venuchercher ?" Et il leur rpondit : "Ce que je cherche, je l'ai trouv et le Seigneur ne m'en a paspriv : c'est votre bndiction."Et s'tant approch d'eux, il les toucha pour voir si peut-tre ils n'taient pas des esprits, etlorsqu'il vit que c'taient de saints hommes, il leur fit une mtanie. Eux aussi le regardrent ;et il les interrogea sur leur manire de vivre. Ils lui dirent : "Nous n'habitons pas un monastre

    dans le dsert et nous n'avons jamais vu d'habit comme celui que tu portes ; mais aprs noustre mis d'accord, nous sommes venus en ce lieu voici dj bien longtemps ; et depuis quenous sommes ici, nous n'avons rencontr personne de ce monde ; car, en marchant les unsavec les autres dans cette montagne, nous voyons une foule d'animaux sauvages de toutessortes et les hommes de la montagne nous les rencontrons une foule de fois, et par le secoursde Dieu, nul d'entre eux ne nous a touchs pour nous nuire. Et comme tu le vois, noussommes nus : il en est ainsi en toute saison ; nous ne souffrons ni dans l't, ni dans l'hiver ;car, certes, c'est Dieu qui nous dispense la vie de cette manire." Et lorsqu'ils l'eurentinterrog sur le monde et ceux du monde, il leur rpondit : "Grce Dieu et vos prires, leSeigneur en prend soin par sa providence." Et lorsqu'il eut reu leur bndiction, il s'loignad'eux et retourna son lieu d'habitation.

    22. Mais le saint abba Macaire vieillissait et la force commena de l'abandonner ; mais sonme tait florissante chaque jour dans le service de Dieu ; et fervent dans l'amour de Dieu, iltait terrible face aux dmons, de sorte qu' cause de la multitude des souffrances qu'ils luiavaient causes, ils commencrent de cesser leur lutte contre lui. Une fois donc qu'ils s'taientrassembls autours de lui pendant qu'il tait dans l'oued cueillant des palmes l'cart desfrres, ils se saisirent de la faux qui tait dans ses mains et la lui ayant prise, ils la tinrentsuspendue au-dessus de lui, comme pour la faire tomber sur sa tte ; mais lui, ayant le couraged'un lion en son cur, leur cria d'une voix forte : "Si le Seigneur vous a donn puissance, ehbien faites-la tomber sur moi ; sinon, eh bien allez-vous-en dans les tnbres !" Les dmons,

    s'tant rassembls crirent contre lui, disant : "Nous en avons fini avec toi pour toujours, cartoute la fatigue que nous avons endure pour te combattre a t vaine et nous n'avons jamaispu te dominer." Et il leur dit : "Ce n'est pas ma force qui fait cela, mais c'est la grce de Dieu!" Et ainsi ils disparurent, et de ce jour-l le Seigneur commena de lui donner repos parrapport aux attaques des dmons, et au lieu des combats dont ils le troublaient avec excs ileut la tranquillit et la consolation constantes, non pas cependant sans souffrance : car lasouffrance ne laissa pas son cur jusqu'au moment de sa mort ; mais il pensait chaque jour, endisant : "L'preuve passe !" Et ainsi il tait abstinent en toute heure, selon l'abondance desagesse que le Seigneur lui avait accorde depuis son enfance.

    23. Et lorsque le saint fut devenu vieux, il fut pri par des multitudes de leur donner l'habit

    monastique, afin qu'ils reoivent sa bndiction. Et il en fut ainsi, et il eut de nombreuxdisciples. Mais ils n'taient pas tous avec lui ; car quelques-uns d'entre eux, ayant t zls

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    d'un beau zle pendant qu'il vivait, s'installrent loin de lui en divers lieux. Et comme d'autreshabitrent prs d'eux, on donna leurs noms aux autres monastres : ce sont ceux de JeanKolobos, d'abba Pischo, disciples d'abba Amo, disciple d'abba Pithou.Mais le saint Macaire se rjouissait avec allgresse, voyant ses rameaux se multiplier et sarace tre renomme, voyant la fructification des arbres spirituels qu'il avait plants dans cette

    vigne du Seigneur Sabath ; il rendit gloire Dieu avec reconnaissance et se disait en lui-mme : "Toute chose qui m'avait t dite d'abord, le Seigneur l'a accomplie et j'en ai vu unepartie de mes veux." Car ce ne sont pas les hommes de l'Egypte seuls qui habitent en cedsert, mais on s'y est rassembl d'une foule de pays, de la Romanie et de l'Espagne, de laLibye et de la Pentapole, de la Cappadoce et de Byzance, de l'Italie et de la Macdoine, del'Asie et de la Syrie, de la Palestine et de la Galatie. En un mot, ses yeux virent ce qui lui avaitt dit l'avance, et cela s'accomplit prs de lui.

    24. Un jour, alors qu'il tait devenu vieux et sans force, les dmons voulurent l'prouver, etcomme on l'avait laiss assis dans la cour, au moment o le soleil allait se coucher, il s'tenditcomme pour dormir. Les dmons, s'tant rassembls en foule la porte extrieure du

    monastre, prirent l'aspect de mendiants et frappant et suppliant, ils dirent : "Fais-nouscharit." Ayant reconnu leur voix, Macaire se jeta volontairement sur le lit, et eux se dirent lesuns aux autres "Il dort !" et d'autres disaient : "Peut-tre est-il mort ! reposons-nous dsormaisdu souci qu'il nous causait, car son me tait solide comme du diamant, et notre fatigue, il l'arendue vaine. Voyez toutes les souffrances que nous lui avons causes, il ne s'en est passouci. Venez, il est mort, nous serons en repos de sa tempte ; car peut-tre, aprs sa mort, celieu se dispersera-t-il et deviendra-t-il dsert de ces saints hommes comme auparavant." Maislui, entendant cela, se taisait constant dans la prire. Alors les dmons, angoisss par letrouble qui les environnait, prirent des pierres et brisrent la porte. Cependant mme ainsi ilne leur prta pas attention. Finalement, ils prirent des pierres et les lancrent dans la cour ;mais comme le Seigneur protgeait Macaire, aucune des pierres n'atteint le lieu o il setrouvait ; et il resta couch comme s'il dormait. Et chacun d'eux dit : "En vrit, Macaire estmort !" Et ils commencrent les lamentations, comme pour se moquer de sa mort, etpoussrent des cris. Et lorsque quelques-uns des frres eurent entendu cela, ils accoururentpour voir ce qui tait arriv. Alors le saint se leva, et se tenant debout il leur dit : "Que leSeigneur chtie et extermine votre race de la face de la terre entire !" Et ayant pris du sable,ils le jetrent en l'air en criant : "Tu nous as vaincus cette fois encore, mchant vieux !" Etaprs les avoir chtis au nom du Seigneur, il les chassa comme des sauterelles.

    25. Et lorsque la force commena de l'abandonner, les frres le suppliaient de se reposer unpeu des fatigues excessives qu'il s'imposait, et il leur disait : "Encore un peu et toute chose

    sera accomplie ! Cependant je rends grces votre affection, car je sais l'amour qui est envous pour moi qui suis maintenant un infirme." Comme il tait assis un jour, sur le point demanger, alors que le soleil allait se coucher, un de ses disciples entra, accompagn d'autresfrres selon la coutume, et dit : "Voici, il y a dehors un homme honorable accompagn d'unenfant, tous deux dguiss en mendiants." Il leur dit : "Que veulent-ils, et que cherchent-ils ?"Le disciple lui dit : "Je ne sais ni ce qu'ils veulent ni ce qu'ils cherchent." Le vieillard lui dit :"Fais-les entrer." Mais lorsque le disciple fut sorti et leur eut dit cela, ils n'entrrent pas. Alorsle vieillard sortit et ayant vu en esprit de qui il s'agissait dit au disciple : "Va-t'en." S'tantassis, l'homme dit : "Cet enfant est mon fils : il y a en lui un "archonte" (car c'est ainsi que ledmon s'tait prsent, disant : "Je suis un chef de lgions") qui le frappe quatre ou cinq foispar jour. Je l'ai men une foule de saints en mon pays, mais il n'a pas t guri : il dchire

    ses vtements et se mord jusqu'au sang, c'est pourquoi je l'ai revtu de ces vieux habits." Et le

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    vieillard lui dit : "Comment as-tu os amener cette jeune fille en ce lieu dsert ! et cela ne t'apas suffi, tu as menti l'esprit de grce : car c'est la fille d'Agathonique, l'parque d'Antioche,tu es venu avec elle en ce lieu avec une grande suite que tu as laisse, pour le moment, enarrire de la montagne, sur le chemin, et tu as amen cette jeune fille sous cet habit, afin quepersonne ne vous reconnaisse. Et tu as bien fait cause du scandale." Et lorsque l'homme eut

    entendu cela, il tremblait, il tomba sur son visage aux pieds de Macaire. Alors le saint lui dit :"Lve-toi, ne crains rien et ne recommence plus mentir." Et l'homme lui dit : "Je t'en prie,mon seigneur, je suis un serviteur de cette jeune fille, et ainsi que m'a command son pre,depuis mon pays, j'ai fait ainsi ; car, moi, je suis un serviteur." Et lorsque le vieillard eutappel, on lui apporta de l'huile, et se tenant debout, il pria sur l'enfant et sur l'huile ; puis,aprs lui en avoir sign le front et les oreilles, il la lui rendit gurie et il lui dit : "Quand tuauras rejoint tes compagnons, ne reste pas cette nuit dans cette montagne cause de la foulede femmes qui vous accompagnent ; mais va vers l'Egypte, en un endroit prs de nous, jusqu'ce que tes btes de somme, et aussi tes hommes, aient repris des forces ; car voici qu'a causede la foi de son pre envers les saints et de sa foi droite en l'orthodoxie, le Seigneur a faitgrce l'enfant de la gurison, et tu connatras par exprience la chose avant que tu sois all

    dans ton pays." Lorsque l'homme eut appel quelques-uns de ses compagnons de service quise tenaient debout au loin, ils apportrent un sac contenant quatre mille pices d'or quel'homme tendit au saint en disant : "Je t'en prie, mon seigneur et pre, reois ce modesteprsent de mon matre, quatre mille pices d'or, afin que tu les distribues aux pauvres." Mais illui dit : "Mon fils, on ne vend pas le don du Seigneur et nous n'avons pas besoin ici de pareillechose ; mais va-t'en en paix vers ceux qui t'ont envoy." Et, lorsque l'homme s'en fut all,pour observer la parole du vieillard, il ne se reposa pas dans la montagne jusqu' ce qu'il ftarriv en Egypte. Et, lorsqu'il eut connu par exprience que l'enfant tait gurie, il retournadans son pays. Et ce que nous avons dit jusqu'ici est suffisant ; car il serait impossible decompter les vertus et les gurisons que le Seigneur opra par lui, ainsi que le nombre de sesascses, d'ailleurs on a crit ses uvres dans d'autres livres.

    26. Le saint abba Macaire devint fort lourd des suites de la maladie et du grand ge ; sa chairfut presque consume par les fatigues qu'il lui fit endurer en secret ; car il ne laissa personnevoir ses ascses et il ne laissa personne savoir tout cela jusqu'au jour de sa mort, parce qu'il segardait svrement de la gloire humaine selon ce qui lui avait t ordonn par le chrubin quilui avait parl ds le commencement. D'autre part ses yeux commencrent s'obscurcir, luirefusant leur service cause de l'abondance de ses ascses et du temps de la vieillesse, car ilavait quatre-vingt-dix-sept ans, tant sur le point de mourir. Alors peu peu ses forcesl'abandonnrent et il commena de se coucher ; il tremblait en se dplaant, et lorsque lesfrres l'entouraient en cercle, il donnait courage chacun selon son oeuvre, et il leur disait :

    "Voici qu'en tout ce temps que j'ai pass avec vous, le Seigneur sait que je ne me suis pascach de vous pour vous enseigner ce qui tait bon pour vos mes, car j'ai essay de nescandaliser ni un petit, ni un grand, et je ne me suis jamais couch lorsqu'il y avait unequerelle entre moi et quelqu'un. Je n'ai pas mpris ma conscience, en aucune uvre selonDieu, afin qu'elle me blme moi-mme ; Dieu connat mon amour pour lui et mescompagnons, ainsi que ma charit pour toute crature. Pourtant le Seigneur lui-mme m'esttmoin qu'ainsi qu'il me l'a dit une fois : "Tu n'as pas atteint, par tes services, la mesure de cesfemmes fidles qui sont en des lieux nombreux" : cela, je l'ai mdit jusqu' ce jour. De mmeles victoires que j'ai remportes sur les dmons, sa Grce sait que je n'ai jamais pens avoirfait quelque chose par ma vertu ; mais la victoire, la misricorde et les aides de Dieu, ce sontelles qui ont aid ma force. Du reste, mes enfants, poursuivez vos ascses et soyez abstinents,

    car dans quelque temps Macaire sera transport."

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    27. Les frres, entendant ces paroles et surtout voyant sa faiblesse, se mirent crier et pleurercomme s'il allait les quitter en les laissant orphelins. Aussi, de nouveau, il les exhortait setaire et leur disait : "Allons, le moment n'est pas encore arriv. D'ailleurs, pourquoi pleurez-vous et m'attristez-vous ? Car il est impossible que cela ne nous arrive pas tous, chacun enson temps, selon le dcret inexorable de notre Dieu." Et mme ainsi, c'est peine s'il put les

    consoler et les faire taire ; puis ils se levrent et se retirrent chacun dans son habitation.Lorsque les frres furent partis, de nouveau il fut prit de faiblesse le domina, et, tant entrseul dans la caverne, il se coucha : c'tait la septime heure. Et comme, selon sa coutume, ilmditait sur son dpart, sa comparution devant Dieu, sur la sentence qui serait prononcecontre lui ce moment et au lieu o ou le jetterait, voici que lui apparurent deux saints,resplendissant de gloire et d'honneur, et leur visage tait rempli de joie. Lorsque le vieillardles vit, il garda le silence quelque temps et l'un d'eux lui dit : "Sais-tu qui je suis ?" Aprsl'avoir longuement regard, et quoique la grandeur de l'clat o ils se trouvaient l'empcht debien le reconnatre, il dit celui qui lui parlait : "Selon moi, tu es mon pre abba Antoine." Etle saint abba Antoine lui dit : "Connais-tu aussi celui-ci, et sais-tu qui il est ?" Et de nouveauil garda le silence, car il avait coutume de ne jamais rpondre avec prcipitation. Antoine lui

    dit : "Celui-ci est notre frre Pakhme, le pre des moines de Tabennsis, et nous avons tenvoys pour t'inviter. A partir de maintenant, fais ce qui te proccupe, car il te reste encoreneuf jours, puis tu laisseras cette tunique de peau et tu habiteras prs de nous. Lve tes yeuxen haut et vois l'endroit qui t'a t prpar, afin que tu reoives la joie et viennes dans lerepos." Ensuite, les saints se retirrent.

    28. Mais le saint vieillard ne dit rien de cela personne, afin de ne pas les attrister, et aussipour que son esprit ne fut pas fatigu par les hommes ; car tous le regardaient comme un chefau milieu de ses soldats : qu'ils viennent le perdre, et toute la multitude est comme si onavait coup leurs ttes, de sorte qu' cause du manque de chef, il leur est impossible demarcher la guerre et au combat ; et surtout, en vrit, parce qu'il tait, aprs Dieu, comme undieu pour toute la race des moines, tous le regardant comme un miroir, et leurs mes prenaientde la force dans ses exhortations. Et lorsqu'il se fut couch sur sa natte, comme sonhabitude, il ne se releva plus cause du poids de la maladie et parce qu'il souffrait de lafivre. Alors, peu peu, la force l'abandonna , et dans la nuit, du huitime au neuvime jourdepuis qu'il tait malade, selon la parole d'abba Antoine, c'tait le 27 du mois de Phamenth,voici que le chrubin qui tait rest avec lui depuis le commencement, vint, accompagn d'unegrande foule de churs incorporels, et lui dit : "Hte-toi et sors, car tous ceux qui se tiennentl debout, t'attendent." Et il dit d'une grande voix : "Mon Seigneur Jsus, toi le bien-aim demon me, reois mon esprit." Et ainsi il s'endormit.

    29. Il y avait peu de monde avec lui ce moment l, et nul ne savait qu'il allait mourir ce jour-l, car comme chaque jour il tait d'esprit allgre et encourageait les frres. Lorsque les frreseurent appris sa mort, ils pleurrent tous sur l'abandon dans lequel ils se trouvaient. Quant auxfrres qui taient dans les saints dserts, ayant eux aussi reu de lui le chemin qui conduit a ladroiture de la vertu, et qu'il avait comme stratge arms de toutes les armes du combat contrele diable, ce tyran impudent et contre tous ses bataillons mchants, qu'il avait difis enfin surle roc inbranlable qui est le Christ notre Dieu, qu'il avait gards jusque-l invaincus par lagrce du Trs-Haut rpandue sur eux cause des prires de notre pre saint, le grand abbaMacaire : quand ceux-l donc eurent appris que le saint tait sorti du corps, ils quittrent leurshabitations, se lamentant et tant dans le deuil cause du dpart de celui qui avait t emmenavec justice en haut, dans les habitations clestes pour y tre runi avec les puissances

    angliques qu'il avait imites en uvres et en paroles, par les actions angliques qui s'taientmanifestes dans sa vie sainte et qui taient dignes d'tre admires, qui avaient t une

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    instruction et une direction pour quiconque voulait vivre selon toute la justice des saintsvangiles.Etant arrivs l'glise, pleurant tous avec amertume parce leur pre, qui tait un sujetd'mulation et de courage pour eux tous dans la vie anachortique et les autres oeuvresbonnes, leur avait t arrach, ils se pressrent tous autours de ce corps saint durant plus d'une

    heure, se lamentant avec tristesse. Et aprs cela, ils firent la liturgie convenable, ils amenrentsur ses restes glorieux le sacrifice non sanglant, le corps et le sang de notre Seigneur Jsus leChrist. Enfin, ils dposrent son corps saint dans la caverne prs de l'glise qu'il avait btie ets'en retournrent dans leurs habitations, tant dans un grand deuil parce qu'on les avait privsdu nourricier de leurs mes dans la crainte du Seigneur, accompagns par le saint hommeabba Paphnouti qui tait le plus grand parmi les disciples du saint homme.C'est lui qui prit la paternit dans les lieux saints aprs Macaire, car lui aussi tait un sainthomme, suivant entirement le but et les oeuvres du saint homme, le grand abba Macaire :c'est pourquoi il devint clbre en tout lieu. Des foules de moines venaient vers lui, nonseulement de Sct, mais presque de toute l'Egypte, recevant de lui toute forme de vertu qu'ils'tait acquise avec douceur par la guidance soigneuse de cet homme vraiment juste et parfait,

    le grand abba Macaire.

    30. Quelque temps aprs, les gens de Jejbir (c'tait le village du saint, comme nous l'avons diten commenant ce rcit) parvinrent savoir en quel lieu le corps du saint avait t dpos :tant venus Sct en secret, ils emportrent le corps de notre bienheureux pre au village,comme s'il y avait eu un accord mais sans que personne le sache. Et lorsqu'ils l'eurentenseveli dignement, ils firent la grande chsse de bois qui tait ncessaire, et y dposrent soncorps saint. Et quelques temps aprs, ils btirent un martyrium au sud-ouest du village, avec labndiction et les prires du saint. Et lorsque, l'ayant abondamment orn, ils l'eurent achevvers le dixime jour d'Epiphi, alors ils envoyrent une dlgation au saint vque de ce temps,lui demandant de consacrer l'difice. Celui-ci vint avec de nombreux autres vques, et ilsaccomplirent solennellement la liturgie convenable : ils offrirent les saints dons etdistriburent le corps et le sang de notre Seigneur Jsus le Christ toute la foule. C'tait lequatorzime jour d'Epiphi. Enfin, aprs le saint service, ils dposrent le corps du saint abbaMacaire, l'homme juste en vrit, dans un lieu au sud-est de cette sainte glise, ayant faitconnatre le rcit de son corps saint par lequel s'oprent jusqu' nos jours de grandes vertus,des prodige et, des gurisons nombreuses par la puissance du grand Dieu, laquelle habita enson serviteur saint, abba Macaire. Puis, ayant pass la nuit suivante veiller, chantant avecordre de nombreux psaumes, des bndictions et odes spirituelles, ils s'en retournrent en paixdans leurs habitations, et tous ces saints vques qui s'taient runis au lieu o se trouvait levritablement grand et saint abba Macaire rendaient gloire Dieu.

    31. Ces choses, auditeurs aimant tre instruits, nous les avons dites jusqu'ici pour faireconnatre une partie des uvres glorieuses de notre pre, afin que vous sachiez quel tait lamanire de vivre de cet homme parfait en vrit ; et c'est volontairement que nous omettonsune foule de signes, de prodiges ou de gurisons nombreuses que Dieu a opres par lui, afinque notre discours ne se multiplie pas trop. Peut-tre pensera-t-on que ces choses, pourtantvridiques, sont un mensonge, cause de l'abondance et de la grandeur de ses uvrestonnantes ; car il s'est vritablement lev de toute cette manire, et qui trouvera-t-on qui luisoit semblable ou de qui dira-ton qu'il lui a t suprieur ?Car qui donc a t semblable lui en ce temps-ci dans ses pratiques leves, dans sa foiexacte, ou encore dans son ardent dsir pour Dieu et dans sa conscience pure envers tout

    homme ?

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    Qui a t semblable lui dans ses actes nombreux d'humilit, par laquelle il a bris et dtruittoutes les armes de la puissance de l'ennemi ? Car il a aiguis ses armes pour affermir sesreins et ses entrailles, ainsi que le Seigneur l'a dit dans Job, qui fut lui aussi un grand homme,parlant propos du diable : "Sa force est dans ses reins, et son courage dans ses entrailles".Celui qui a t bris chez ce saint a t poursuivi par la vertu de Dieu qui tait en lui.

    Qui donc a, comme lui, refrn la bte mchante, c'est--dire la colre, ou qui donc s'estacquis une douceur gale pour tout le monde comme ce saint ?Qui donc a, comme lui, tu l'orgueil, cette abomination devant Dieu, ou la gloire qui dtruit laprofonde quitude de l'me, comme ce bienheureux ?En un mot qui a dtruit toutes les manires d'agir de l'ennemi, les a mises en drision en lui,les a manifestes en lui comme indignes et pernicieuses pour l'homme, comme l'a fait cethomme juste ?Car il a chass loin de lui, par le secours du Trs-Haut, toutes les mchantes apparences de latyrannie du diable par l'abondance de ses prires et les larmes nombreuses qu'il a verses.Donc, en entendant ces choses, mes bien-aims, que chacun de nous montre le mme zledans l'accomplissement de cet espoir jusqu' la fin, en regardant, certes, dsormais la conduite

    de cet homme parfait, savoir : notre bienheureux pre, produisant pour Dieu les fruits del'esprit, selon ce que nous avons vu en sa vie admirable, le reprsentant devant nos yeux toutmoment, et produisant ainsi les fruits qui conviennent la vie respectable laquelle nous aappels le Christ notre Dieu, par les privilges de notre pre saint et son enseignement tout la fois. En outre de ce qu'il nous a guids, il nous a donn, par sa grande douceur, la lumirevers les vertus selon Dieu ; car, en vrit, il a t aussi un aptre en notre temps et il n'a t enrien infrieur ces grands hommes, Pierre, Jean, les saints Aptres, ainsi que nous l'avons vude nos yeux et que nous avons entendu dire d'autres qui sont fidles. De ces choses, il n'estpas possible de dire toutes les parties, parce qu'en tout, la mesure est agrable Dieu.Donc maintenant, que l'un de nous produise pour Dieu la misricorde avec bienveillance,selon la force qu'il a ; qu'un autre produise l'amour de Dieu et la charit du cur envers sescompagnons ; pour l'un ce sera une ascse surhumaine, pour un autre des veilles raisonnables,avec mesure et attention ; pour l'un, une prirepure, pour l'autre parole juste ; pour l'un, la puretde corps et d'me, pour l'autre l'abstinence et uneconscience bonne envers chacun, en nescandalisant personne de peur que son adoration nesoit souille.En un mot que chacun de nous soit prpar ceque nous venons de dire, afin que notrebienheureux pre voie ces bons fruits se multiplier

    en nous, brillant en notre vie en tout temps, et qu'ilprie pour nous celui auprs duquel il se trouve, leChrist, afin que nous soyons runis lui dans ceslieux qu'il a obtenus dans le royaume permanentdes cieux ; que nous aussi nous obtenions ces lieuxavec lui, par la grce, les misricordes, l'amourqu'a pour les hommes notre Seigneur et notre Dieu,Jsus le Christ, auquel conviennent toute gloire,tout honneur, toute adoration, ainsi qu'au Pre aveclui et au Saint-Esprit vivificateur et consubstantiel lui, maintenant et en tout temps, et jusqu'aux

    sicles de tous les sicles. Amen.

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    Recueil des vertus de notre pre juste,le grand abba Macaire

    Vertus d'abba Macaire 1.On dit d'abba Macaire que lorsqu'il fut affermi dans la vertu, alors qu'il habitait le dsert,rendant grces avec persvrance, le Seigneur de gloire envoya vers lui un chrubin en cettemontagne. Le chrubin ayant plac ses mains comme une mesure sur sa poitrine, abbaMacaire lui dit : "Que fais-tu ?" Le chrubin lui dit : "Je mesure ta poitrine." Abba Macaire luidit : "Que signifie cette parole ?" Le chrubin lui dit : "On appellera du nom de ton coeur cettemontagne que le Christ t'a donne en hritage ; mais il te demandera ses fruits." Abba Macairelui dit : "Quels fruits ?" Le chrubin lui dit : "Des fruits spirituels qui sont lescommandements et les vertus, et le Christ notre Dieu fera de toi sur cette terr