m o n d e . d u c o n t i n e n t à t r a v e r s l e L a ...
Transcript of m o n d e . d u c o n t i n e n t à t r a v e r s l e L a ...
Novembre 2020
"Encourager la jeunesse à s'instruire et à se cultiver, c'est bâtir une société meilleure."
Esther Jonhson, Ecrivain, Auteur Romancière, 1965
La Grande Afrique : la voie
du continent à travers le
monde.
Rédacteurs :
Sitraka RABARY
Rim AYOUCH
Mariam BEN SLAMA
Maeïlys SYLIA
Komon Jude-Armand KIENOU
Remicar SEREME
Veronica MENDES
Design & Mise en page : Sitraka RABARY
Journal- Novembre 2020
Le hashtag #CONGOISBLEEDING: Que se
passe-t-il au Nord-Kivu > p.5
La société sénégalaise à travers le prisme
de ses séries > p.9
YENNENGA la princesse amazone :
la naissance du peuple Mossi > p. 8
Les relations sino-africaines : une
longue histoire > p.7
Covid 19 : Quel impact économique pour
les pays africains ? >p.4
SOMMAIRE
Le nouveau bureau de l'ASPA 2020-
2021 > p.1
ASPA en Novembre 2020 > p.2
Poème : Mine ? > p.11
ASPA
POLITIQUE ET ECONOMIE
HISTOIRE
ART ET CULTURE
La Grande Afrique : la voie du
continent à travers le monde.
Journal- Novembre 2020
Le bureau de l’ASPA, composée de
quatorze personnes, pour cette
année 2020-2021 reflète l’image
que notre association s’est définie.
Avec une telle pluralité et
richesse, l’ASPA promet une
merveilleuse année malgré la
crise sanitaire qui nous impacte
tous.
Après un mois assez chargé, nous
sommes heureuses de vous
présenter les têtes qui se cachent
derrière chaque poste de l’équipe
pour cette année académique.
Tous étudiants en Master à
Sciences Po Paris, ils suivent des
parcours diversifiés, ce qui
enrichit fortement l’association.
Tous unis par un grand intérêt
pour le continent africain, cette
équipe ne manque pas de visions
et de projets, et, le moins que l’on
puisse dire, c’est que vous ne serez
pas déçus.
Exécutif
En sa deuxième année de Master
Governing the Large Metropolis se
tient la présidente de l’ASPA,
Irina Gbaguidi. Venant du Bénin,
elle décrit ce dernier comme un
"pays doux et rassurant, riche de
sa culture, ses spiritualités et sa
population". "Ma plus belle fierté
est de l'appeler mon pays".
Passionnée de lecture et de
politique, notre présidente se
définit par cette citation de
Michelle Obama : "Ne laissez
personne parler pour vous et ne
comptez pas sur les autres pour se
battre pour vous". Elle voit en
l’ASPA un héritage, une famille
que l’on porte même après les
études à Sciences Po, et surtout
une plateforme pour le
panafricanisme et la promotion
de l'unité du continent , tout en
respectant les spécificités
territoriales.
Son bras droit, le vice-président,
Lukas Noah Drammeh est
également en sa deuxième année
de Master, en International
Security avec spécialité: Afrique,
diplomatie et méthodologies de
recherche. Originaire de
l’Allemagne et de la Gambie, il a
assumé ses origines africaines en
ayant passé du temps avec sa
famille gambienne. Il se définit
par la citation : "Les mots doivent
être suivis d’actions !" car il est
convaincu que la génération
actuelle doit arrêter de prétendre
et réapprendre à laisser parler ses
actions car les belles paroles ne
suffisent plus. Ayant un profil de
leader, l’ASPA est pour lui une
association qui assume l’unité et
la diversité du continent africain.
Suivant de près toutes les
réunions et ayant déjà occupé une
fonction similaire auparavant, la
Secrétaire Générale, Dorcas
Goabga, venant du Burkina Faso,
un pays à caractère intègre disait-
elle, est en sa deuxième année de
Master en Droit économique.
Aimant voyager, passer du temps
avec ses amis, observer mais aussi
écrire, c’est une vraie
combattante qui n’hésite pas à
repousser ses limites. Persuadée
que seule l'action commune pour
le changement est efficace, l’ASPA
est pour elle "plus qu’une
association" et est l'exemple-type
de l’unité africaine, une unité
dans la diversité.
Le trésorier Dayvis Dos Reis
Borges est le dernier membre de
notre exécutif et est en sa
deuxième année de Master en
Finance et Stratégie. A part les
études, il est passionné par le
football, les jeux vidéos, le vélo et
la course. Amoureux de ses pays,
le Cap-Vert et Togo, il est de
nature curieux et aime apprendre.
Voyant le monde actuel comme
un monde "cassé" qui devrait être
réparé, l’ASPA est pour lui un bon
début pour améliorer la société à
notre échelle et il espère s’y faire
"une bonne bande de potes" dit-il.
L’ASPA étant composé de 5 pôles
différents, les suivants sont les
responsables de ces derniers :
Pôle conférence
En première année du master
d’urbanisme "Governing the large
metropolis", Kenza Fahim est la
co-responsable du pôle
conférence de notre association.
Originaire du Maroc, elle décrit
son pays comme étant complexe,
car d’un côté multiculturel et
particulièrement riche, mais de
l’autre, inégalitaire et paradoxal.
Elle affectionne particulièrement
cette citation de Pierre Rabhi
:"Comme le colibri, je compte faire
ma part des choses, pour mon
pays et mon continent." Kenza
aime se laisser transporter à
travers la musique, la lecture et
les voyages. L'ASPA représente
pour elle une ouverture vers son
pays et son continent, ainsi
qu’une porte ouverte au dialogue
et à l'échange.
Actuellement en Master 1
d’Affaires Publique, avec une
spécialité culture, Lauren Easum
est l’autre co-responsable du pôle
conférence. Elle a grandi entre
les États Unis, le Burundi, la
France et les Pays-Bas.
Convaincue que le syncrétisme
donne naissance à de belles
choses, elle aime se définir par
cette citation de Gaël Faye:
"Quand deux fleuves se
rencontrent, Ils n'en forment
plus qu'un et par fusion nos
cultures deviennent indistinctes /
Elles s'imbriquent et s'encastrent
pour ne former qu'un bloc
d'humanité". Passionnée d’art,
Lauren aime particulièrement lire
et écrire en terrasse. Elle voit
l’ASPA comme un endroit de
partage culturel et un moyen de
faire connaître le continent
africain dans toute sa diversité.
Pôle événement
En première année de master en
"International Security", Amélie
Ségla est la co-responsable de
notre pôle évènement.
Sénégalaise, le premier mot qui
lui vient en tête pour décrire son
pays est l'hospitalité, la teranga.
Pour elle, le Sénégal, c’est avant
tout un peuple attachant et
résilient qui cultive l’art de bien
vivre et le partage. Pour se
décrire, elle choisit de citer Delia,
notre co-responsable partenariats:
"On ne danse pas, on performe".
Car, que ce soit sur une piste de
danse ou pour un projet, rien
n'épuise Amélie. Passionnée de
photographie, d'écriture et de
poésie, vous la verrez toujours
munie de sa caméra ou de ses
calepins. L'ASPA est pour elle une
grande famille qui lui permet de
penser l’Afrique d'aujourd'hui et
de demain.
Maktoub Razaki est le co-
responsable du pôle évènement.
Tout comme notre présidente,
Irina, il est dans le master
"Governing the Large Metropolis",
et vient également du Bénin. En
parlant de son pays, Maktoub
tient à souligner que le vodou, qui
est une pratique religieuse
répandue au Bénin, est en réalité
très éloignée des clichés négatifs
qui lui sont associés. Pour se
décrire, il choisit une citation en
Yoruba, sa langue maternelle : "O
porrr", qui signifie littéralement
“c’est beaucoup” car c’est
quelqu’un qui met toujours
beaucoup d’énergie dans les
différents projets qu’il
Le nouveau bureau de l'ASPA 2020-2021
Quand la nouvelle équipe se présente, nous voyons à quel point l’ASPA est une association riche en humain, en
ambition et en vocation.
1ASPA
entreprend. Pour lui, L’ASPA est
non seulement une grande
famille, mais c’est également une
vitrine des enjeux liés au
continent africain sur le campus
de Sciences Po.
Pôle partenariat
Actuellement en M1 de "Médias,
Communication et Industries
créatives", Delia Tebani, notre
première co-responsable
partenariat est algérienne. La
première chose qui lui vient en
tête pour décrire son pays est
l’humour qui, selon elle,
accompagne les algériens tant
dans leurs vies quotidiennes, que
dans les moments d’exception.
Pour se décrire, Delia cite sa sœur
Haninai qui la surnomme
"couteau-kabyle" car, comme un
couteau suisse, Delia est
multifonction et multi-terrain.
Passionnée de basket-ball et d’art,
si vous voyez Delia sans ballon à
la main, c’est qu’elle a un stylo
pour écrire ou dessiner à la place.
Pour Delia, l’ASPA c’est un coup
de cœur, un échange continu basé
sur un amour partagé: "les
Afriques". C’est une rencontre
d’âmes passionnées qui se
nourrissent de leurs différences.
La seconde responsable de ce pôle,
Haibado Yacin Abdoulkader, est
actuellement en master
d’International Public
Management. Elle vient de
Djibouti, qu’elle qualifie comme
étant un petit bout de terre; riche
en chaleur et grandeur humaine.
Passionnée par le karaté, pour les
valeurs de discipline et de
maîtrise de soi que sa pratique
inculque, elle est également une
Journal- Novembre 2020
fan inconditionnelle de Nelson
Mandela. Sans surprise, elle
choisit cette citation -extraite de
l’un des poèmes de Mandela -
pour se définir : "Je suis maîtresse
de mon esprit ; Je suis capitaine
de mon âme". Pour Haibado,
l’ASPA c’est avant tout un espace
de partage et d’échanges qui
promeut la cohésion dans la
différence, ce qui correspond avec
sa définition de l’Afrique :
prospère dans sa pluralité ;
pauvre dans la division.
Pôle communication
La première responsable de ce
pôle est Maty Ngom et est en
International Development Dual
Degree London School of
Economics. Elle vient du Sénégal
qui a été l'un des précurseurs de
l'industrie cinématographique en
Afrique. Prête à prendre des
risques pour atteindre ses
objectifs, elle incarne cette
attitude par la citation "Ku bëgg
aakara ñeme kaani" ("Celui qui
veut des beignets ne doit pas
craindre le piment."). Elle aimerait
un monde où en temps que femme
noire, africaine et musulmane,
elle ne soit plus considérée
comme une minorité mais comme
un habitant de notre planète au
même titre que les autres. L’ASPA,
une vision, une équipe, un avenir,
pouvant changer la perception
stéréotypée du continent Africain
selon elle.
La seconde responsable, Ida
Rosalie Gomis Gomis est
actuellement en césure et effectue
un stage chez Hermès en tant qu’
assistante chef de Projets
Communication.
Rim décrit son pays -le Maroc-
comme un pays aux multiples
facettes, regorgeant de générosité.
Passionnée d’écriture, elle utilise
cet art comme un exutoire.
Inspirée par l’écrivaine franco-
marocaine Leila Slimani, Rim
pense, tout comme cette dernière,
"qu’écrire, c'est se défaire de cette
peur du regard des autres, donc la
littérature est évidemment une
révolte". Rêvant d’une Afrique
plurielle, innovante, et résiliente,
l’ASPA, représente pour elle un
espace privilégié, lui permettant
de prendre part aux enjeux qui
traversent le continent. Son poste
de co-rédactrice en chef de La
Grande Afrique, lui permet de
mettre en avant, à travers ses
écrits, sa vision de l'Afrique.
Un bureau riche en diversité, des
esprits plein de créativité, un
intérêt commun pour l’Afrique,
une grande famille qu’est l’ASPA,
l’association vous donne rendez-
vous pour un voyage au cœur de
notre cher continent pour cette
belle année 2020-2021.
Sitraka RABARY & Rim AYOUCH
Sénégalo-espagnole, la mixité de
la culture sénégalaise est pour elle
le fondement d’une grande
puissance culturelle. Aimant le
sport, la musique, l’art, et les
voyages, la citation qu’elle a
choisie pour se définir est "Deja
huellas por dónde caminas".
Voulant un monde où l’on
coexiste et l’on vit de "bissap
frais"; pour l’ASPA, elle veut
qu’elle incarne une association de
partage, d’encouragement et de
rayonnement pour la diversité
africaine et surtout par sa culture.
Pôle média
La première responsable de ce
pôle est Sitraka Rabary, en Master
2 en Stratégies Territoriales et
Urbaine, une malagasy qui adore
écrire et use de cet art, dans
toutes ses formes, pour construire
son propre monde. De nature
introvertie, aimant passer du
temps avec elle-même, elle est
passionnée par la contemplation
des étoiles qui incarnent la paix.
Elle se définit, non par une
citation mais par un mot qui
incarne sa personnalité "Hope".
Pour elle, peu importe la difficulté
de la situation à laquelle elle fait
face, il y a toujours de l’espoir
pour que tout se finisse de la
meilleure manière qui soit. Être
rédactrice en chef à l’ASPA est
une opportunité pour mettre en
avant l’Afrique et sa vocation
mais également son pays,
Madagascar, qui est un havre de
richesse naturelle.
La seconde responsable de ce pôle,
Rim Ayouch, est en Master 1 de
"Governing the Large Metropolis".
Tout droit venue de Casablanca,
2
ASPA en Novembre 2020
instagram sur des problématiques
actuelles qui sont "la voix de la
jeunesse nigériane portée par le
mouvement #ENDSARS et
l’engagement des artistes dans ce
combat", ainsi que "les aléas et
ressentis des étudiants africains a
l’étranger". Par ailleurs, des
playlistes et sélections de films
thématiques ont été publiés
chaque jeudi et vendredi soir
depuis la reprise des activités par
l’association en s’adaptant au
contexte actuel de crise sanitaire.
Dans ce même contexte, le pôle
conférence a, quant à lui,
commencé par l’organisation
Bien que la deuxième vague de la
pandémie du coronavirus en
France ait engendré un deuxième
confinement, les activités de
l’Association de Sciences Po pour
l’Afrique (ASPA) pour le mois de
Novembre ont été maintenues.
Une association active malgré les
contraintes sanitaires. Les
membres du bureau à travers
chaque pôle ne se sont pas
tournés les pouces, loin de là.
Pôle transversal à stratégies mises
à l’épreuve
Le pôle communication qui est
transversal à tous les échelons de
l’association rend compte des
activités de l’ASPA aux yeux du
public. Permettant la mise en
connaissance de ces dernières, ses
publications se font à travers les
réseaux sociaux : Instagram,
LinkedIn et Facebook tout en
retraçant tous les mouvements au
sein de l’association : conférence,
live, publication d’article, etc.
Allier sujets d’actualité à un
monde interconnecté
L’équipe du journal La Grande
Afrique a écrit ce mois-ci six (06)
articles nous permettant de
voyager au sein du continent pour
mieux connaître ses revers.
Mettant en avant les actualités
africaines à travers les impacts
économiques du Covid 19, la
situation du Nord-Kivu, les
impacts des échanges Chine-
Afrique, puis les cultures et
histoires à travers l’influence et le
succès des séries sénégalaises
mais aussi la naissance du peuple
Mossi et enfin le dynamisme au
sein de l’association, La Grande
Afrique retrace ces derniers dans
les autres articles de ce journal du
mois de Novembre.
Le pôle événements a proposé ce
mois de Novembre deux lives
ASPA
d’une conférence inaugurale
s’intitulant "Solidarité inter-
africaine face au Covid-19 : des
innovations entrepreneuriales à
une collaboration continentale".
Marquant ainsi l’ouverture de
leurs activités, il continuera à en
organiser bien d'autres dans les
semaines à venir.
Fonctionnement en maillage
hybride
Le pôle partenariat s’est
majoritairement attelé à répondre
aux besoins du pôle event
Journal- Novembre 2020 3
dans la mise en place des
événements prévus. La mise en
place de Zooms littéraires et la
sélection de livres mettant en
avant le continent africain en
collaboration avec des maisons
d’éditions animeront les
prochaines semaines. D’autres
conventions de partenariat pour
offrir des réductions aux
adhérents de l’association pour
des soins beauté, journal,
restaurant, etc. s’en suivront. Une
nouveauté pour l’association :
tout événement en digital pour
faciliter leur accès.
Pour le premier dîner de l’ASPA
qui aura lieu aujourd’hui à 19h,
les responsables du pôle ont
enchaîné entre appels et envois
d’e-mails pour trouver un
restaurant ayant une histoire à
raconter et pouvant nous faire
voyager entre culture et goûts
émerveillant les papilles. Le choix
s’est porté sur le restaurant "Resto
Gasy" spécialisé dans la
nourriture malagasy. Concocté en
premier lieu par le pôle
événementiel, ce dîner se fera en
présence de Nadège Beausson-
Diagne, actrice française d'origine
sénégalaise et ivoirienne. Un
temps de discussion sera consacré
aux échanges avec elle sur des
sujets d’actualité comme la
représentativité des femmes
noires dans le cinéma.
Sitraka RABARY
ASPA
Journal- Novembre 2020 4POLITIQUE ET ECONOMIE
Un endettement accéléré
L’endettement du continent
africain s’est considérablement
accéléré au cours des dix
dernières années. Le poids de la
dette publique s’est aggravé,
passant de 35 % du PIB africain à
60 % entre 2010 et 2018. Cette
hausse a été particulièrement
importante dans les pays
exportateurs de matières
premières, qui ont subi la chute
des cours de 2014 à 2016, selon le
directeur du Centre des études
économiques d’Afrique (CSEA).
L’endettement total du continent
africain est actuellement estimé à
365 milliards de dollars. Très
présente en Afrique depuis un peu
plus d’une décennie, la Chine est
aujourd’hui le premier créancier
du continent et détient 40 % de la
dette africaine, soit entre 145 et
170 milliards de dollars. Parmi les
principaux créanciers des pays
africains, on trouve également le
Fonds monétaire international
(FMI), la Banque Mondiale, le
Club de Paris, mais également de
nombreux créanciers privés
(larges entreprises et fonds
d’investissements).
La pandémie plongera l’Afrique
sub-saharienne dans sa première
récession en vingt-cinq ans selon
la Banque mondiale.
Ainsi, fin mars, les ministres des
Finances africains ont appelé à
une annulation du paiement des
intérêts des dettes afin de pouvoir
utiliser leurs capacités
budgétaires pour combattre les
conséquences économiques de la
crise du coronavirus.
Conséquences qui risquent d’être
particulièrement dramatiques sur
un continent sur lequel la moitié
de la population vit déjà avec
moins de deux dollars par jour.
Emmanuel Macron a récemment
plaidé pour une annulation de la
dette des 40 pays africains les
plus pauvres. Pour l’instant, il n’a
pas obtenu cette annulation mais
un moratoire au niveau des
créanciers bilatéraux (12 milliards
de dollars) ainsi qu’auprès des
pays prêteurs du Club de Paris et
du G20 (8 milliards de dollars), ce
qui représente un total de 20
milliard de dollars sur les 32
milliards de dollars que ces pays
devaient rembourser cette année,
les 12 milliards restants sont dus à
la Banque Mondiale.
D’abord mise en avant par le
président sénégalais, Macky Sall,
puis par le président français,
Emmanuel Macron et le secrétaire
traçabilité impossible par le grand
public. Par ailleurs, les
communiqués sont généraux et ne
donnent aucun détail. Par
exemple, 1,75 milliard de francs
CFA ont été consacrés à «
réhabiliter, rénover et agrandir »
des blocs d’isolement de trois
hôpitaux de Yaoundé et ne donne
aucune visibilité des dépenses qui
ont été réalisées. Le même cas
peut-être vu à Madagascar
puisque dans les 716 millions de
dollars de dons et prêts alloués,
les dépenses restent pour une
grande partie intraçables.
Récemment, plusieurs documents
de détournement des fonds de
lutte contre la pandémie ont été
envoyés au bureau indépendant
de lutte contre la corruption
(BIANCO) bien que la présidence
malagasy reste sur sa position en
affirmant le bon usage de ces
derniers. Ces questions de
traçabilité et de transparence
inquiètent la population qui se
plaignent d’aides sociales quasi-
inexistantes, ou du moins
insuffisantes, malgré le montant
important des aides perçues au
niveau international.
En effet, bien que ces aides
existent, le niveau de vie se
dégrade dans bon nombre de pays
africains, et beaucoup se
retrouvent sans emploi à cause de
la fragilité économique du
continent. Malgré le fait que le
taux de contamination ne soit pas
aussi élevé que dans les autres
continents, la pandémie fait des
massacres au niveau économique.
La croissance que le continent
avait si mal à construire se
retrouve particulièrement
dégradée par le coronavirus.
Le déclin de croissance est affiché
à - 3,3 % pour cette année et
comme la Banque mondiale l’a dit,
plus de 40 millions d’africains
risquent de se trouver sous le
seuil de pauvreté : entrant ainsi
dans la catégorie de "l’extrême
pauvreté". Alors que cette
dernière façonnait déjà leur
environnement quotidien, le
coronavirus la dégrade encore
plus. Malgré le problème de la
transparence des aides cité ci-
dessus, d’autres pays arrivent à
développer des aides sociales, et
général de l’ONU, Antonio
Guterres, la question d’une
annulation de certaines dettes
n’est d’ailleurs pas encore à
l’ordre du jour. « La procédure
actuelle permet un moratoire
jusqu’au 31 décembre des
échéances liées à la dette
publique. Après une année de
grâce, en 2021, ces paiements
seront étalés sur trois ans, à partir
de 2022 », affirme Odile Renaud-
Basso, présidente de la Banque
européenne pour la
reconstruction et le
développement.
Des aides internationales à effets
non mesurables
Dans la lutte contre la pandémie,
la Banque mondiale a déployé 160
millions de dollars de soutien
financier pour plus de cent pays
afin de protéger les plus
vulnérables.
Au Cameroun, à part l’aide venant
de la banque mondiale et celle du
Fonds Monétaire Internationale,
le gouvernement avait fait appel à
la solidarité publique pour
constituer un fonds d’urgence
dans le combat contre le covid-
19.Cependant, la manière dont ce
fonds a été utilisé n’a pas été
communiquée, rendant ainsi sa
Covid 19 : Quel impact économique pour les pays africains ?
Économiquement parlant, la gestion de la crise sanitaire est plus que disparate au niveau du continent africain. Bien
qu’une large partie des pays soient déjà émergents, certains sont encore parmi ceux les plus pauvres au monde; et
cette qualification influence de manière importante l’environnement économique durant cette période de pandémie.
mettent en place de belles
initiatives. Des distributions
alimentaires peuvent en effet être
retracées : vasty tsinjo, tosika
fameno, vary mora, tsena mora et
kaly mora à Madagascar, la
distribution de denrées
alimentaires au Sénégal pour près
de 10 millions de personnes.
Conclusion
Bien que ces difficultés se
ressentent dans les trajectoires de
ces pays africains, plusieurs
initiatives africaines se sont
démarquées au niveau mondial,
Journal- Novembre 2020 5
e Bénin et Madagascar ont, par
exemple, su proposer des remèdes
contre le coronavirus.
Nonobstant, les solutions
proposées restent questionnées,
mais les recherches de remèdes
continuent.
Par ailleurs, parmi les trois pays
au monde considérés comme
ceux qui ont mieux géré cette
crise sanitaire, l’un d’entre eux est
un pays africain : le Sénégal. Il se
tient dans ce rang à côté de la
Nouvelle-Zélande et du
Danemark. Le directeur de la
direction de gestion d'urgence
sanitaire au niveau du Ministère
de la Santé du Sénégal, Abdoulaye
Bousso, affirme que ce classement
est dû à leur sens de
l’organisation et au respect des
mesures gouvernementales par la
population. En parallèle, des
initiatives entrepreneuriales ont
été répertoriées sur la quasi-
totalité des pays du continent, en
passant par la République du
Congo, avec la conception de
l’application Halte Covid via un
modèle d’auto diagnostic jusqu’à
des structures de plus en
pluslocales avec la création de
robot distributeur de gel hydro-
alcoolique par l’un des membres
de l’équipe malagasy au First
Global Challenge 2020.
Sitraka RABARY & Rim AYOUCH
POLITIQUE ET ECONOMIE
Le hashtag #CONGOISBLEEDING: Que se passe-t-il au Nord-Kivu ?
Depuis quelques semaines, on
assiste sur les réseaux sociaux à
un regain du discours alarmant
sur la situation actuelle en
République démocratique du
Congo. Le hashtag
#CongoIsbleeding (le Congo
saigne) est actuellement en
tendance sur Twitter et
Instagram. De même, de
nombreuses publications, photos
et vidéos circulent afin de mettre
en lumière et dénoncer les
exactions et plus généralement
l’ensemble des violations des
droits humains qui ont lieu
actuellement dans la région du
Nord Kivu à l’est du Congo.
Cette région est aujourd’hui
encore le théâtre de nombreux
conflits qui, semblent-ils, ne font
pas écho dans les médias
internationaux. Pourtant, c’est le
conflit qui a fait le plus de morts
depuis la fin de la Seconde Guerre
mondiale. Entre 1998 et 2007, les
conflits dans la région auraient
entraîné de façon directe ou
indirecte plus de 5, 4 millions de
morts selon une étude réalisée par
l’ ONG International Committee.
Plusieurs décennies avant, à l'ère
ou le Congo était encore sous
domination belge, dix millions de
congolais ou plus seraient morts
de l’ethnocide colonial belge.
Dès lors, il convient de voir
comment la lourde histoire du
Congo a aujourd’hui encore des
répercussions sur sa population et
si oui, ou non, il y a un génocide
en cours passé sous silence
médiatique, comme on peut le lire
sur les réseaux sociaux.
Le hashtag #CongoIsBleeding
La période inédite que nous
traversons aujourd’hui conduit à
un éveil des consciences sur
toutes les sortes d’injustices dans
le monde. Face à une jeunesse de
plus en plus critique, les sujets
inexplorés voire occultés par les
médias sont mis à nu sur les
différentes plateformes de
partage en ligne. Le mouvement
#BlackLivesMatter, emblématique
de la première partie de l'année
2020 s’est exporté dans le monde
entier, a secoué des milliers de
personnes et mobilisé l’opinion
publique. De même, de nouveaux
combats ressurgissent comme
celui du sort du peuple Ouïghours
en Chine, la crise anglophone au
Cameroun, les tensions
électorales en Côte d’ Ivoire et en
Guinée, ou encore le mouvement
#EndSars au Nigéria. Pour ce qui
est du Congo, le sujet n’est pas
nouveau : atrocités, meurtres,
viols, exactions en tous genres et
témoignages sont relayés sur les
réseaux sociaux....Mais la
complexité de la région du Nord
kivu ne permet pas à tous de
comprendre de façon simple ce
qu’il se passe.
Quelle est la situation actuelle au
Congo ?
Le Nord- Kivu, zone actuelle des
conflits est la région du Congo la
plus riche en minerais, diamants,
pétrole, uranium, cobalt et coltan.
C’est aussi une région frontalière
à l’ Ouganda, au Burundi et au
Rwanda et deux raisons
expliquent donc les tensions qui y
ont lieu. D’abord, à la suite du
génocide Rwandais de 1994, de
nombreux génocidaires ont été
chassés du pays vers le Kivu. Ce
phénomène a conduit à la
poursuite du conflit ethnique
rwandais sur les terres
congolaises. Ensuite, à ce même
moment, des voix s'élevaient au
Congo contre le Président Mobutu
au pouvoir et les anciens
génocidaires rwandais y ont vu le
moyen de s’allier à une partie du
peuple congolais. Enfin, le conflit
dans la région fut renforcé par le
fait que cette région du kivu,
riche en ressources naturelles,
fournit 80% du coltan du monde.
Le coltan, qui sert à la fabrication
de nombreux appareils
électroniques comme les
téléphones, les ordinateurs ou
encore les voitures, est très prisé
par les firmes internationales.
Pour cette raison, l’ensemble des
groupes armés ont vu dans ces
ressources un moyen de financer
leurs combats, et donc de
continuer à exister. C’est à ce
moment qu’est née l'expression
"minerais de sang". Les groupes
armés de la région souhaitent
chacun s’ accaparer les terres.
Pour cela, ils terrorisent les
populations locales, les agressent,
les violent , les torturent, et
incendient leurs maisons, ce qui
les pousse à se déplacer et donc à
abandonner leurs terres.
Aujourd’hui, plus de 50 000
personnes qui vivaient dans la
région du nord Kivu ont fui leurs
maisons et se retrouvent sans
domicile. Plus de la moitié sont
des enfants qui se retrouvent
souvent livrés à eux- mêmes. Une
fois ces terres acquises, une partie
des habitants des villages se voit
réquisitionnée pour 1$ par jour ou
moins afin de travailler dans les
mines.
Les méthodes de travail forcé ne
sont pas sans rappeler celles
pratiquées par Léopold II lorsque
le Congo était encore sous
domination belge, et que des
ressources telles que le
caoutchouc étaient exploitées de
manière intensive.
Quelle est notre responsabilité
dans ce conflit ?
La crise dans la région du kivu est
une crise à la fois politique et
ethnique. Dès lors, quelle serait la
responsabilité de toute personne
non impliquée directement dans
le conflit? Comme dit
précédemment, l’un des facteurs
qui permet au conflit de survivre
est la présence de ressources rares
dans la région. Ces ressources
servent à la fabrication
d’équipements électroniques,
fabriqués par des enseignes
internationales et achetés par des
consommateurs qui en ont les
moyens. Ces consommateurs se
situent pour la plupart dans les
pays occidentaux et sont donc
ceux qui nourrissent la demande.
Or, la demande entraîne l’offre.
Tout consommateur d’appareil
électronique nourrit donc, même
inconsciemment cette demande et
donc le conflit dans le nord kivu.
De même, les firmes
transnationales, bien que
conscientes de la situation au
Congo et des violations des droits
humains dans le nord kivu ne se
manifestent pas.
Journal- Novembre 2020 6
Que faire ?
En tant que consommateurs, le
boycott total des appareils
électroniques est impossible car le
coltan est partout. La jeune
génération, celle qui tweet et
s’indigne sur les réseaux sociaux,
a bien souvent le privilège de
vivre dans un contexte qui le
permet. Cette liberté d’expression
en ligne peut aller de pair avec
des actions concrètes telles que la
réduction de ses achats ou de sa
fréquence d’ achats.
Un crime contre l’humanité?
Pour l’heure, il est au moins
certain que la situation pourrait
être qualifiée de crime contre
l’humanité, vu les attaques
généralisées et systématiques
exercées par les groupes armés de
la région comme les meurtres, les
viols et transferts forcés de
populations. La qualification de
crimes de guerre aurait aussi de
fortes chances d’être retenue,
compte tenu des infractions
commises par les groupes armés
comme la torture, l’appropriation
de biens de façon arbitraire et
l’enrôlement forcé dans l’armée.
Enfin, pour ce qui est du crime de
génocide, il se définit comme un
ensemble d'actes commis dans
l'intention de détruire un groupe
national, ethnique, racial ou
religieux. Il faudrait donc prouver
que les personnes qui ont été
tuées et persécutées l’ont été en
raison de leur appartenance à un
groupe particulier.
La véritable difficulté reste que
ces qualifications ne peuvent être
données qu’ à l'issue d’un
jugement.
Maeïlys SYLIA
POLITIQUE ET ECONOMIE
Journal- Novembre 2020 7HISTOIRE
La Chine: premier partenaire
commercial de l’Afrique
La Chine est devenue, en l’espace
d’une vingtaine d’années, un
acteur économique colossal en
Afrique. Aujourd’hui, l’ex Empire
du milieu est le premier
partenaire commercial du
continent. Environ 10 000
entreprises chinoises sont
implantées en Afrique dans des
secteurs variés comme le BTP, la
télécommunication et les
industries extractives. Le
gouvernement chinois investit
également de manière massive
dans les infrastructures des
différents Etats africains. Par
exemple, Xi Jinping, secrétaire
général du parti communiste
chinois, a promis 60 milliards de
dollars pour le développement de
l’Afrique lors du forum sino-
africain tenu le 3 septembre 2018
à Pékin. Celui-ci a également
promis d’annuler une partie de la
dette des pays les moins
développés du continent.
Les échanges Chine / Afrique: une
longue histoire
Bien que les échanges entre la
Chine et les pays africains se
soient accélérés et ont pris une
ampleur considérable ces
dernières années, les relations
sino-africaines sont en réalité
vieilles de plusieurs siècles. Bien
avant l'arrivée des Européens sur
le continent, une flotte impériale
commandée par l’amiral Zheng
He, figure peu connu en Occident
mais célébré en Chine, aurait
traversé l’océan indien en 1418,
longeant les côtes d’Afrique
orientale et commerçant avec les
hommes de la Tanzanie, du Kenya
et de la Somalie. Plusieurs
vestiges archéologiques trouvées
sur la côte tanzanienne et la côte
kenyane, tel que des monnaies
chinoises datant de l'empire Ming
ou des bols en porcelaine
enchâssés dans des tombes,
témoignent de contacts et
échanges entre les deux peuples
qui pourraient remonter au IXe-
Xe siècle.
L’arrivée des navigateurs
portugais et le renforcement de la
présence européenne sur le
continent africain a relégué la
Chine à l’arrière-plan à partir du
XVe siècle. Ce n’est qu’à partir du
XIXe siècle que des immigrants
chinois ont commencé à
s’installer dans les Îles et les
littoraux de l’océan Indien
occidental (Madagascar, Île de la
Réunion), mettant à nouveau en
place les échanges d’antan mais
très loin de l’ampleur que connaît
ces échanges actuellement.
En 1949, l’avènement de la
République Populaire de Chine
marque un tournant dans la
relation entre la Chine et
l’Afrique. Les liens créés sont
d’abord fondamentalement
politiques. En effet, pendant cette
période du début des
indépendances africaines, la
Chine a développé un intérêt
particulier pour l’Afrique dans le
cadre d’une solidarité tiers-
mondiste face aux puissances
occidentales. La conférence de
Bandung de 1955 marque le point
de départ d’une véritable
politique mise en place par la
Chine au Sud du Sahara. Dans les
années 70, cette relation se
prouve “gagnante-gagnante”;
l’Afrique avait le soutien de la
Chine dans son combat pour
l’indépendance et la Chine avait
le soutien du continent sur sa
politique contre Taïwan. L’Afrique
permettait également à la Chine
d’élever son statut sur la scène
internationale en se présentant
comme le porte-parole des pays en
développement.
Bien que dans les années 80, la
Chine s’éloigne de l’Afrique pour
se concentrer sur ses politiques
internes, elle fait un retour en
force suite aux évènements de
Tien An Men de 1989. Faisant face
à un isolement sur la scène
internationale, la Chine se
retourne vers ses amies d’antan.
En mai 1996, Jiang Zemin,
secrétaire général du Parti
communiste chinois, de 1989 à
2002, a visité le continent et a
proposé aux différents pays une
stabilisation pérenne et
multilatérale des relations sino-
africaines. Ce projet se divise en
cinq points: amitié sincère,
traitement d’égal à égal, unité et
coopération, développement
commun et approche de l’avenir.
La base des relations entre les
deux devient, dès lors,
économique plutôt que politique.
Depuis le début des années 2000,
le gouvernement chinois incite les
entreprises chinoises à investir en
Afrique afin de consolider cette
coopération Sud-Sud. Un nouveau
système d'échanges s'est mis en
place. Les pays africains vendent
leurs matières premières aux
entreprises chinoises qui, en
retour, investissent dans leurs
infrastructures. La Chine
participe donc à la construction
de routes, ports, chemins de fer,
etc. à travers le continent. Le pays
contribue également à environ un
sixième ( ⅙ ) du total des prêts
accordés à l’Afrique, selon une
étude du John L. Thorton China
Center à la Brookings Institution.
Plus qu’un acteur économique,
la Chine dispose également d’une
influence diplomatique de plus en
plus importante sur le continent.
Elle compte 52 missions
diplomatiques dans les capitales
africaines, contre 49 pour les
Etats-Unis. La Chine est également
le membre du Conseil de Sécurité
des Nations Unies qui dispose du
plus grand nombre de Casques
bleus sur le continent (+ de 2000).
Ces relations sont toutefois
régulièrement critiquées.
La Chine-Afrique: une nouvelle
forme de Scramble for Africa?
Aux yeux de nombreux experts, la
démarche de Pékin s’apparente à
un système néocolonialiste dans
lequel les entreprises qui
extraient des minerais en échange
d’infrastructures et de
financements de projets agissent
comme des intermédiaires pour le
gouvernement chinois et
exploitent les ressources du
continent au profit du
développement de la Chine sans
se soucier du développement de
l’Afrique.
La présence des entreprises
chinoises sur le continent n’est
d’ailleurs pas toujours positive
pour les marchés locaux. En effet,
les petits producteurs africains
ont du mal à survivre face à des
produits chinois de moindre
qualité mais bon marché.
Nombreuses entreprises chinoises
choisissent d’importer leurs
mains d'œuvres directement de
Chine, car ce n’est pas cher, plutôt
que d’engager des locaux. Quant à
ceux qui engagent des locaux, il y
a des dénonciations régulières de
mauvais traitements et de
mauvaises conditions de travail.
PLO Lumumba, directeur de la
Kenya School of Law identifie le
problème en ces termes : “Je pense
que les chinois savent ce qu’ils
veulent alors que les africains,
eux, ne le savent pas”. Il semble
donc important que les
gouvernements africains
déterminent rapidement ce qu’ils
veulent ressortir de ces échanges
et reprennent le contrôle de leur
relation avec leurs partenaires
étrangers, qu’il s’agisse de
l’Occident ou de la Chine.
Remicard SEREME
Les relations sino-africaines : une longue histoire
Depuis le début de la pandémie, la Chine a distribué plusieurs dizaines de tonnes d’équipements médicaux à
différents pays de l’Afrique et a envoyé près de 200 experts pour prêter main forte aux membres du personnel
médical africain. Ces démarches s'inscrivent dans le cadre des échanges sino-africains qui se sont multipliés
exponentiellement depuis le début des années 2000.
Journal- Novembre 2020 8HISTOIRE
YENNENGA, la princesse amazone : la naissance du peuple Mossi
Le Burkina Faso compte soixante (60) ethnies. Le peuple Mossi est l’ethnie majoritaire car il représente 52% de la
population. Les mossi sont estimés à 10 millions d’habitants au Burkina Faso et à 30 millions dans le monde. La
langue parlée par les Mossi est appelée le Mooré. Elle comprend six (6) dialectes qui sont : le yadre, le yaana, le zaore,
le taolemde, le busumdi, et le saremde, etc. La naissance de ce peuple emblématique est liée à l’histoire de Yennenga,
la princesse amazone qui est la mère du premier Moogho Naaba (nom donné au chef du peuple mossi). Elle est la
fondatrice du royaume Moogho. A la base l’histoire du peuple Mossi est orale. En effet, il n’existe pas de documents
écrits. Par conséquent, les récits peuvent différer dans les livres d’histoires et selon la province géographique des
différents auteurs et narrateurs.
Yennenga, de son vrai nom Poko,
est une princesse originaire du
royaume de Dagomba dans
l’actuel Ghana. Elle est la fille du
Naaba Nadega et de la reine
Napoko. La princesse était le
premier enfant du Roi qui était
désespéré de n’avoir pas eu un
héritier mâle. Yennenga avait un
grand amour pour les chevaux
mais, comme c’était une femme,
sa place n’était pas sur le dos d’un
animal conformément à la
tradition. Mais, son tempérament
ardent la poussa à braver les
interdits. Elle commença alors à
chevaucher à côté de son père qui
était au début hésitant. La
princesse amazone accompagna
son père au cours de toutes ces
chevauchées. Son adresse et son
habileté firent d’elle une
redoutable amazone. Cela lui a
permis de diriger la cavalerie
royale qui était entièrement
composée d’hommes.
La fuite de Yennenga
Bien que féroce guerrière la
princesse était devenue une belle
jeune femme. De nombreuses
familles des royaumes voisins
voulaient l’unir à leur fils.
Yennenga ne voulant pas se
marier était désintéressée par
toutes ces offres. Son père n’était
pas de cet avis. Yennenga
craignant d’être mariée de force
s'enfuit à cheval. Elle arriva dans
la forêt où elle se serait perdue.
La naissance d’un peuple
La princesse Yennenga loin de son
royaume se retrouva en région
Bissa. Son cheval l’amena devant
une case où elle fut bien
accueillie et traitée par son
occupant, un jeune chasseur du
nom de Rialé. Elle y passa la nuit.
Le lendemain, tous les deux
purent découvrir leur identité :
elle princesse
amazone et lui chasseur de sang
princier. Tous les deux avaient fui
leur royaume pour échapper à
leur destin. Rapidement ils
tombèrent amoureux et la
princesse mis au monde un
garçon qu’ils nommèrent
Ouédraogo (nom qui signifie
cheval mâle) en l’honneur du
cheval qui a guidé la princesse
vers le chasseur. Le garçon hérita
des qualités de ses parents : fier,
habile, intelligent et courageux.
Les années passèrent et la
princesse soucieuse de se
réconcilier avec son père décida
d’y envoyer son fils pour qu’il
fasse la connaissance de son
grand-père. Le vieil homme était
tout content d’avoir vu son petit-
fils. Il organisa une grande fête en
son honneur. Il lui offrit, du
bétail, des serviteurs et une
escorte de guerriers Dagomba afin
de fonder de nouveaux royaumes.
Lorsque Rialé vit son fils revenir à
la tête d’une troupe il s’écria : « je
suis venu seul dans ce pays,
maintenant j’ai une femme et
j’aurai beaucoup d’hommes ». Le
village qu’ils fondèrent fut appelé
Morosi : Moro signifie un homme
et Si signifie beaucoup en
Bambara. Un nom qui, par
déformation, devint Mossi. Le
royaume Mossi et son peuple
étaient ainsi nés.
Komon Jude-Armand KIENOU
Journal- Novembre 2020 9ART ET CULTURE
Le succès des séries sénégalaises
Aujourd’hui, le succès des séries
sénégalaises est tel que le Sénégal
pourrait, d’ici quelques années,
s’imposer comme une grande
industrie cinématographique.
Certains médias comme le Monde
Afrique évoquent même la
possibilité pour ce dernier de
détrôner le Nigeria devenant ainsi
un « Dakarwood ». Sur la chaîne
YouTube de la société de
production Marodie, le nombre
total de leur visionnage a dépassé
la barre d’un milliard.
Leur montée en puissance a
commencé en 2019 avec le
lancement de « Maîtresse d’un
homme marié ». Depuis son
lancement, elle compte pour
chaque épisode entre 2 et 5
millions de vues sur YouTube.
Si les Sénégalais suivent de très
près chaque épisode, leur essor est
en partie expliqué par le succès
rencontré auprès de la Diaspora.
En effet, aujourd’hui près d’un
tiers des personnes qui les suivent
sont issues de la Diaspora. Étant
ainsi largement regardées à
l’étranger, il est intéressant
d’aborder la question de l’image
du Sénégal qu’elles renvoient au
monde entier et plus précisément
à la Diaspora.
Une société de moins en moins
influencée par la mode et les
standards de beauté occidentaux
Les femmes de la Diaspora qui
regardent les séries sénégalaises
se disent fières de voir des
femmes qui leur ressemblent à
l’écran.
L’ensemble de ces séries produites
par la société Marodie ont pour
point commun la promotion de la
beauté des femmes noires. La
première chose à noter lorsque
l’on regarde ces dernières, c’est
que les actrices sénégalaises
célèbrent la beauté de leurs
cheveux à travers différentes
coiffures qui les mettent en
valeur. Dans ces séries, les
personnages n’éprouvent aucune
honte ni appréhension lorsqu’il
s’agit de montrer leurs cheveux
tels qu’ils sont dans leur vie
professionnelle et personnelle.
Que cela soit dans la série «
Golden », « Maîtresse d’un homme
marié » ou encore « Karma»,
chaque épisode est également
l’occasion pour les acteurs et
actrices de mettre en avant la
créativité des créateurs locaux en
portant des tenues vestimentaires
toutes plus belles les unes que les
autres. À chaque épisode, les fans
– et les moins fans – de la série
ont l’occasion de découvrir la
beauté du Boubou ou encore du
Moussor.
Une société moderne, loin de
l’image misérabiliste trop souvent
attribuée au Sénégal
Pendant des décennies, les médias
occidentaux ont contribué à la
promotion d’une image
misérabiliste des villes
sénégalaises. Grâce à ces séries, le
monde peut enfin découvrir une
nouvelle image du Sénégal. À
travers ces dernières, l’aspect
“moderne” du pays est mis en
valeur. Les acteurs eux-mêmes
n’hésitent pas à faire la
promotion –de manière pas
toujours très subtile – touristique
du pays, de ses paysages et de ses
richesses.
Malgré le fait que ce ces séries
soient parfois un peu trop portés
sur l’émergence d’une classe
moyenne qui calque son mode de
vie sur celui des Occidentaux, les
clichés des quartiers les plus
huppés de Dakar font du bien à
une Diaspora qui a besoin que l’on
valorise davantage la ville
africaine.
Une société dans laquelle le sujet
de la sexualité est tabou ?
Les nombreux scandales autour
des séries sénégalaises semblent
mettre à jour un tabou autour de
la sexualité.
L’ONG islamique JAMRA qui juge
les séries produites par Marodie
comme « indécentes et obscènes »,
saisit régulièrement le Conseil
national audiovisuel (CNRA) afin
de les faire interdire. Si nous
sommes encore loin de leur
interdiction totale, l’ONG a
néanmoins réussi à ce que la série
« Infidèles » soit désormais
marquée de la mention
déconseillée aux moins de 16 ans.
Cet appel à l’interdiction de ces
séries est assez surprenant dans
une société où les télénovelas sont
très regardées. En effet, dans les
télénovelas les ébats sexuels entre
les différents personnages sont
très souvent mis en avant, et
pourtant ces dernières n’ont
jamais connu les scandales que
connaissent actuellement les
séries produites par Marodie.
Cette contradiction s'explique
peut-être par le fait que la société
sénégalaise ne soit pas encore
prête à voir un couple sénégalais
entretenir des relations intimes à
l’écran.
Cependant, ce point mérite une
certaine nuance. Premièrement, le
fait que les Sénégalais continuent
à les regarder malgré les
scandales est une preuve
suffisante que le tabou de la
sexualité au Sénégal doit être
relativisé. Deuxièmement, l’idée
de sexualité assumée est observée
à travers un regard occidental. Or,
il pourrait être pertinent de se
dire que finalement chaque
société a ses propres limites, liées
à son histoire et à sa culture, sur
ce qu’elle considère comme
tolérable à l’écran.
Une société dans laquelle les
femmes cherche à s’émanciper
mais où le poids des traditions
pèse parfois
« Madou te remercie. Il dit que la
fatalité décide des êtres et des
choses : Dieu lui a destiné une
deuxième femme, il n’y peut rien.
Il te félicite pour votre quart de
siècle de mariage où tu lui a
donné tous les bonheurs qu’une
La société sénégalaise à travers le prisme de ses séries
« Maitresse d’un homme Marié », « Golden », « Infidèles » ou encore « Karma », derrière ces noms accrocheurs pour les
uns et amusants pour les autres, se cachent en réalité les plus grandes séries à succès du Sénégal.
Journal- Novembre 2020 10ART ET CULTURE
femme doit à son mari »,
-Mariama Bâ
Cet extrait du roman sénégalais
Une si longue lettre”, publié dans
les années 1980, met en avant une
situation dans laquelle un mari
envoie son frère annoncer à sa
première femme qu’après vingt-
cinq années de mariage, il a
décidé d’épouser une seconde
femme, bien plus jeune.
À cette annonce, la première
femme s’effondre. Malgré son
niveau d’étude élevé, sa situation
stable, et ses enfants qui
l’encouragent à divorcer, elle ne
trouve pas le courage de refaire sa
vie après cette trahison, et décide
de devenir une co-épouse.
Si plusieurs décennies séparent ce
livre des séries sénégalaises, cet
extrait aurait pu être adressé à
Jeanne dans la série « Karma »
la série « Karma » ou encore Lalla
dans « Maîtresse d’un homme
marié”. En effet, à travers elles, on
découvre que la polygamie est
encore très présente dans la
société sénégalaise et que les
femmes - peu importe leurs
classes sociales - sont confrontées
à cette réalité et parfois, par peur
du regard de la famille et de la
société, elles décident de rester au
côté de leurs maris.
Il est évident que les séries
sénégalaises mettent en avant des
réalités de la société sénégalaise
telle que la polygamie ou encore
le tabou de la sexualité. Toutefois,
l’image qu’elles renvoient du
Sénégal est souvent idéalisée,
puisque les différents épisodes
n’exposent pas assez le fait qu’une
grande majorité des Sénégalais ne
bénéficient pas de la modernité
croissante du pays.
Veronica MENDES
Journal- Novembre 2020
You,
A brilliant pigment, out in the sun for a little run,
You have the distant waves caress your skin as you lay on a grass that is not
your own,
You have spices squeezing between your nostrils and accents resonating at the
bottom of your heart,
You feel the salt of the ocean hanging from your lips and the air at the top of
your mountains stuck to your ears,
Your tongue twists in a bizarre manner to fill gaps you never thought you had,
You find yourself speaking a language that is not yours, one that never was,
These sounds are unfamiliar with your mouth, yet they keep throwing
themselves out like they did from your grandmother’s mouth long time ago,
You thought you could jump over letters and roll over syllables, but they keep
reminding you of the wrongness of this freedom,
They give you a space to occupy,
They teach you not to extend your laugh or your hair beyond it,
To keep your hands inside the bubble,
To keep your breath for yourself,
You are given this blank space so just fill it and stay quiet.
You understand that your ع ,ح and خ do not seem as welcomed by the world as
they are celebrated by your throat,
Your meanings are lost in translation
They have no directions to follow, and road signs, up in the air, are written in
an alphabet they do not comprehend,
So the words keep floating around you, in the bubble that was drawn for you,
Jokes never seem to cross the bridge and family stories become laughing spots,
Your palate,
The space between your eyebrows,
The gap between your toes,
Your upper lip,
And the edge of your eyelashes try to coexist in a world that seems to overlook
them,
Your very own paper palace crafted for you on a stolen land,
Your roots might be buried deep down in the soil,
Your leaves might be growing out of the branches,
This moment might be your home now and forever,
This shall remain a territory that has your name engraved in it but will never
belong to you,
So rocks become the rings adorning your fingers,
The keys to your house are still warmly hiding in your right pocket,
And behind the fabric,
Bruises spread on your body like a map guiding you through the stories they
are telling for you,
The only weapon you have left is you,
Your body taking the land that was once watered by your ancestors,
Your spirit learned pain through the centuries,
You know it will never leave,
Your mind is fighting ideas that were planted in it without your permission,
So, you ask yourself how you can leave a home that has taken care of you all
these years,
But as you walk your fingers through the map on your thighs, along your legs,
following paths of veins and arteries on your stomach,
Always remember that when you were drawn in the coloring book of life, God
never questioned what shade of brown crayon to use for you, nor how much
hair to stick above your upper lip,
God never trained your tongue to swirl a particular way, she choreographed it
all on her own,
So remember,
You are not a blank to be filled,
You are a canvas so paint yourself whatever shade of the universe you want,
They will never be able to colonize that,
No matter how much they try.
Mariam BEN SLAMA
11ART ET CULTURE
Mine ?
La Grande Afrique : la voie du continent à
travers le monde.
Novembre 2020
Design & Mise en page : Sitraka RABARY