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Lisa Le Scornet Master 1 : Communication des Organisations Séminaire : Organisations, Hommes et Management Sous la direction de : Alice Anberrée 2018-2019 Page sur 1 59 L’UTILISATION DES COULEURS EN COMMUNICATION ET SCIENCES DE GESTION

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Lisa Le Scornet

Master 1 : Communication des Organisations

Séminaire : Organisations, Hommes et Management Sous la direction de : Alice Anberrée

2018-2019

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L’UTILISATION DES COULEURS EN COMMUNICATION ET SCIENCES DE

GESTION

REMERCIEMENTS

A l’issue de huit mois de recherches, d’interrogations et d’enquêtes, je souhaite remercier chaleureusement toutes les personnes qui ont contribué à la réalisation de la vidéo de vulgarisation et la réalisation de cette revue de littérature.

Je remercie tout d’abord, ma directrice de mémoire, Madame Alice Anberrée, pour m’avoir accompagnée dans mon analyse, aidé et conseillé tout au long de mon travail de recherche.

Par ailleurs, j’exprime une profonde reconnaissance à l’égard de tous les intervenants rencontrés au cours des différents séminaires, qui ont su me guider dans le travail de montage et de réalisation de la vidéo.

Je tiens également à remercier mes amis de l’IEP, pour le regard critique qu’ils ont porté sur mon sujet et les remarques avisées qu’ils ont su formuler sur mon travail.

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SOMMAIRE REMERCIEMENTS 2

INTRODUCTION 5

REVUE DE LITTÉRATURE 12

I. Communication et couleur : les armes de la séduction du consommateur 12

A. La couleur : une composante visuelle de l’esprit humain 12

1. La couleur et les enjeux sensoriels de la consommation 12

2. L’influence de la couleur sur nos perceptions : un enjeu du marketing 14

B. Influence chromatique en marketing : les couleurs et leurs symboles 16

1. Blanc, Bleu, Gris, Jaune, Marron, Noir : symboles et représentations 16

2. Orange, Rose, Rouge, Vert, Violet : symboles et représentations 19

C. Singularité et différenciation : l’usage de la couleur par les marques 22

1. Stratégie de distinction et couleur 22

2. Le nouvel éveil de l’attention du consommateur par les couleurs 24

II. Les neuro-sciences et le consommateur : une explication des comportements d’achat26

A. Analyse de l’influence des couleurs par le prisme des neuro-sciences 26

1. Consommation et cognition : une première explication des attitudes du consommateur 26

2. Les motivations d’achat du consommateur : une rationalité limitée 28

B. Neuro-marketing et efficacité des campagnes publicitaires 30

1. Techniques d’estimation de l’activité du système nerveux périphérique 30

2. Les avancées technologiques récentes : une meilleure appréciation du comportement du consommateur 32

C. Interprétation et appropriation des résultats neuroscientifiques en marketing 33

1. Les apports des techniques de neuro-imagerie : les limites de l’interprétation 33

2. Une communication sur-mesure : l’adaptation du marketing aux besoins inconscients du consommateurs 35

III. Les couleurs au coeur des sciences de gestion 37

A. La couleur au coeur de la productivité des organisations 37

1. La couleur et la création d’ambiance de travail propice au bien-être des salariés 37

2. Expériences de la couleur en organisations : une influence vérifiée 39

B. La couleur utilisée dans les processus de recrutement 40

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1. Les tests psychologiques fondés sur la couleur 40

2. Limites de la fiabilité des tests basés sur la couleur dans les processus de recrutement 42

C. Manager par les couleurs 43

1. Théorie des couleurs et sciences de gestion 44

2. La couleur et l’amélioration de la communication dans les organisations 45

CONCLUSION 49

BIBLIOGRAPHIE 51

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INTRODUCTION

La perception de la couleur, de ses tonalités et de ses nuances, implique souvent des codes, des symboliques. Les différentes utilisations sociales et les usages des couleurs témoignent de leurs différences. La couleur classe, catégorise : elle est un véritable marqueur identitaire. Bernard Roullet définit la couleur comme « une variable 1

environnementale ou contextuelle qui influence des états affectifs ou des processus cognitifs, utilisant ou non des biais culturels ou symboliques ». Gaëlle Pantin-Sohier et Joël Brée définissent quant à eux la couleur comme «  le caractère d’une lumière, de la surface d’un objet, indépendamment de sa forme, selon l’impression visuelle particulière qu’elle produit  ». 2

Se situant à l’intersection de données multiples, la couleur est un phénomène particulièrement complexe qui se définit, se pratique et se vit différemment selon les cultures et les sensibilités, dans le temps et dans l’espace. Aujourd’hui, la couleur est au centre de chaque produit, de chaque publicité et dans tous les points de vente. Divard & Urien résumaient ainsi «  le consommateur vit dans un monde de couleurs ». En effet, 3

la couleur est souvent avec la forme, le premier élément qui permet l’identification d’un logo ou d’une marque. L’apparence colorée d’un produit influe sur sa couverture médiatique et sur la communication réalisée autour de son lancement. Dès lors, la couleur apparaît comme une caractéristique visuelle largement exploitée par le marketing sensoriel.

A l’instar des objets familiers que nous ignorons tout en les côtoyant, les couleurs d’un produit ou d’une affiche sont souvent transparentes au regard du consommateur. «  Transparentes  » ne signifie pas «  absentes  » : les couleurs, nous influencent subtilement, aussi bien par ses effets matériels directs que par ses effets cognitifs indirects que produisent également la musique et les odeurs. Ainsi, l’objectif de cette recherche est de mesurer l’effet de la couleur sur la perception des produits et des offres par le consommateur. Dans cette revue de littérature, nous nous attacherons à déchiffrer l’influence de la couleur en matière de neurosciences sur l’individu puis à

Roullet B. (2004), L’Influence de la couleur en Marketing. Vers une neuropsychologie du consommateur, 1

Thèse de doctorat en Sciences de Gestion, Université de Rennes I. p.1

Le Petit Robert, 2001 ; cité par Gaëlle Pantin-Sohier et Joël Brée, 2004, p. 242

Divard R. & B. Urien, Le Consommateur vit dans un Monde de Couleurs, Recherche et Applications 3

Marketing, Vol.16, N°1, 2011, p.3-24Page � sur �5 59

comprendre leur traduction sur les comportements d’achat. Nous appuierons cette revue de littérature avec des études sur les couleurs précédemment menées par des chercheurs en neuro-sciences, en psychologie, sociologie ou marketing.

L’objectif recherché ici est d’éclairer le lecteur sur les recherches conduites dans différentes disciplines sur la perception des couleurs. Les littératures en marketing, en psychologie et neurosciences présentent un réel intérêt car leur conjugaison permet de formuler des hypothèses reliant les deux domaines, à savoir l’étude des couleurs et les attitudes du consommateur. Par ailleurs, il apparaît que les enjeux soulevés par notre étude résonnent particulièrement bien dans notre époque souvent surabondée et saturée de couleurs. En effet, après des décennies de couleurs « neutres », nous faisons face à une explosion de la couleur. Dans le domaine commercial, celle-ci apparaît plus que jamais comme un élément de séduction : elle est le premier critère de décision d’achat. Ainsi, nous comprenons l’importance du choix des couleurs en tant qu’instrument de marketing. Plus spécifiquement, le marketing s’est penché sur les relations existantes entre la couleur et l’attention et entre la couleur et la persuasion dans un contexte publicitaire.

Le travail de recherche le plus complet qui ait été réalisé jusqu’à présent dans la littérature française qui croise l’influence de la couleur en marketing et la neuropsychologie du consommateur a été fourni par Bernard Roullet. Dans sa thèse publiée en 2008, M. Roullet passe en revue toutes les approches adoptées par les universitaires et les recherches scientifiques concernant l’impact des couleurs, et tire la conclusion de l’impossible objectivation homogène de l’influence de la couleur en marketing. Il n’avance ainsi pas de règles intangibles concernant des stimuli chromatiques et des enjeux publicitaires. Néanmoins, ce travail permet d’appréhender les influences de la couleur à travers le prisme des neurosciences, apportant un point de vue davantage scientifique et rationnel à nos observations.

A défaut d’avoir pu produire nous-même un travail de terrain dans les limites imposées par le format de la présente revue de littérature et compte tenu de l’aspect particulièrement scientifique des observations, nous nous appuierons sur celui réalisé par Bernard Roullet pour soutenir le cas échéant nos arguments. La force de la thèse de Roullet réside dans son apport théorique par rapport à d’autres travaux ou thèses se focalisant sur une seule application marketing de la couleur. La thèse de Roullet s’efforce de proposer un cadre conceptuel qui passe en revue les différentes applications de la couleur afin d’en rapprocher et confronter les résultats. Des connaissances neuroscientifiques permettent d’appuyer ou de réfuter des théories marketing

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existantes et apportent ainsi un nouvel éclairage sur certains comportements ou réactions de consommateurs dans des contextes d’achat ou de consommation. Cette confrontation des disciplines et la diversité des contextes marketing convoqués offrent une meilleure appréciation du pouvoir de la couleur et de sa robustesse.

Dans la présente revue de littérature, nous proposons une démarche différente dans la quête de compréhension de l’influence de la couleur dans l’environnement du consommateur. Bien que nous axons essentiellement notre problématique sous une approche marketing, nous ne voudrions la réduire à une analyse purement marketing. En effet, nous questionnons ici une évaluation du pouvoir de la couleur sur l’homme dans sa globalité et souhaitons étendre son application aux sciences de gestion. Afin de répondre aux questions soulevées lors de notre séminaire « Organisation des Hommes et du Management  », il nous apparaissait indispensable de souligner les passerelles existantes entre la couleur et les ressources humaines. Ainsi les questions soulevées par ce travail préliminaire à la réalisation d’une vidéo de vulgarisation sont multiples : selon quels processus les couleurs interviennent-elles sur la perception d’un produit dans l’esprit du consommateur ? Comment redéfinissent-elles les codes du marketing et de la communication ? Comment parviennent-elles à faire appel aux émotions ? De quelle façon les couleurs peuvent-elles être appréhendées comme de véritables outils en sciences de gestion dans les organisations ?

Dans la littérature traditionnelle de la communication et du marketing, les articles existants cherchent à optimiser et rentabiliser l’usage de la couleur en marketing : comment l’utilisation appropriée de la couleur peut permettre d’augmenter les ventes de tel ou tel produit ? Or dans le présent travail de recherche, nous porterons davantage notre intérêt sur la puissance de la couleur sur les attitudes et les comportements de l’individu et du consommateur. Il s’agit ici de questionner l’existence du libre-arbitre de chacun dans ses choix de consommation. Loin de vouloir se réduire à une présentation sommaire des différentes implications de la couleur en marketing, nous souhaitons examiner les imbrications existantes entre les couleurs et l’homme, ses émotions, ses intuitions et sa posture en tant que consommateur, travailleur et individu.

Il nous apparait primordial de définir brièvement ici ce que nous entendons par les termes de « marketing », de « marketing expérientiel »  de « psychologie cognitive » qui résident au coeur de notre réflexion. Le marketing est présent dans toutes les sphères de l’activité marchande et s’installe progressivement dans les domaines non marchands. Le marketing est avant tout un état d’esprit : c’est une démarche centrée sur le client. Le marketing s’articule principalement en trois phases :

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• comprendre le marché pour définir le champ concurrentiel • segmenter et s’adapter par un positionnement distinctif • agir sur le marché pour vendre, via des actions marketing.

Si les « 4P », produit (Product), prix (Price), distribution (Place) et communication (Promotion) sont toujours les variables d’action traditionnellement privilégiées du marketing, elles ont progressivement été élargies à d’autres éléments comme l’expérience de consommation. Ce sont les travaux de Holbrook et Hirshman menés en 4

1982 qui ont mis en lumière les liens existants entre les états affectifs d’un individu et sa recherche d’expérience en achetant un produit.

En résumé, nous pouvons définir le marketing comme l'analyse des besoins des consommateurs et l'ensemble des moyens d'action utilisés par les organisations pour influencer leurs comportements. Elles créent la valeur perçue par les clients et adaptent l'offre commerciale de l'entreprise aux désirs des consommateurs. Le marketing expérientiel apparaît comme une branche du marketing qui peut être défini comme l’ensemble des dispositifs et actions visant à faire vivre une expérience plus ou moins mémorable ou mémorisable à des  clients. Enfin, par l’expression de «  psychologie cognitive », nous entendons une approche de l’esprit humain centrée sur le traitement de l’information et l’étude des états mentaux. C’est-à-dire que nous envisageons la mémoire ou le raisonnement comme un processus actif, impliquant des modules spécialisés, chargés de sélectionner, d’organiser, mettre en forme et produire des informations.

Comme le relève Virginie De Barnier «  le concept d’attitude envers le message publicitaire est fondamental pour la compréhension des processus publicitaires. Il permet de capter les réponses affectives générées par une exposition aux messages » . 5

Ainsi, l’influence de la couleur sur les messages publicitaires et le consommateur est multiple et protéiforme car elle touche à l’affect, aux cognitions et aux propensions comportementales chez le consommateur. En misant sur la couleur, les marques reviennent aux fondements du marketing : satisfaire les désirs des individus à travers la consommation (Gorge, Ozçaglar-Toulouse et Toussaint, 2015).

Holbrook & E.C. Hirschmann, The Experiential Aspects of Consumption: Consumer Fantasies, Feelings 4

and Fun, Journal of Consumer Research, vol. 9, September 1982, p 132-140.

Virginie de Barnier, Recherche et Applications en Marketing, Vol. 17, No. 3, La Marque (2002), p. 825

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Cependant, en ce qui concerne la présente revue de littérature, nous prétendons porter à un échelon supérieur notre analyse, en considérant que la couleur affecte la publicité mais que son champ d’influence ne saurait se réduire à celui-ci. La couleur est intrinsèquement porteuse de symboles, de connotations qui influent également les mécanismes attentionnels de l’individu mais pas uniquement dans un environnement publicitaire. Ainsi, cette revue de littérature entend présenter les travaux antérieurs qui mettent en avant les effets de la couleur sur les processus physiologiques ou affectifs notamment l’impact chromatique sur des processus mentaux plus complexes comme la capture attentionnelle ou la mémorisation. Dès lors, nous pourrons tirer des conclusions concernant l’utilisation de la couleur sur les processus attentionnels qui interviennent aussi bien dans les disciplines du marketing, de la communication et des ressources humaines.

Néanmoins balayer les influences de la couleur dans ces différentes disciplines nous contraint à une véritable impératif de synthèse. En effet, cette revue de littérature ne se veut exhaustive et n’a pas non plus la prétention de se substituer aux livres existants consacrés à la couleur, que ce soit les écrits historiens reconnus spécialistes de la symbolique des couleurs, les recherches artistiques, les études scientifiques menées par des neurologues ou des stratèges en marketing.

Aussi, il convient de rappeler ici que la neuropsychologie se définit par Séron comme une science carrefour . Pour cet auteur, l’objectif initial de la neuro-psychologie 6

était «  l’établissement d’un rapport intelligible entre d’une part, la structure et le fonctionnement du cerveau et d’autre part, le comportement et les opérations mentales ». En d’autres termes, l’être humain se livre à des comportements définis dans des contextes commerciaux spécifiques. Ainsi, les couleurs affectent notre perception des choses, nos attitudes et nos comportements. Selon une étude menée par Color Research en collaboration avec l’Université de Winnipeg, les consommateurs n’ont besoin que d’un maximum de 90 secondes pour se faire une opinion sur un produit quant à sa valeur, à sa fiabilité et que la couleur compte pour 62 à 90 % dans ce résultat. Parallèlement, 95% des entreprises utilisent qu’une ou deux couleurs pour représenter leur marque selon une infographie publiée par Marketo et Column Five. Si elle peut sembler anodine au premier abord, la couleur est en réalité, une partie intégrante des composantes qui vont séduire le client et l’inciter à l’acte d’achat. Mais alors comment

Seron Xavier, « Introduction », dans : Xavier Seron éd., La neuropsychologie cognitive. Paris cedex 14, 6

Presses Universitaires de France, « Que sais-je ? », 2002, p. 3-5. URL : https://www.cairn.info/la-neuropsychologie-cognitive--9782130521921-page-3.htm

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les organisations utilisent-elles aujourd’hui la couleur au centre de leur stratégie marketing ? Le consommateur est-il encore maître de sa consommation ? Dans le contexte bigarré des produits de grande consommation, la couleur apparait comme le plus puissant des langages visuels. Selon Giboreau et Body (2012) la couleur serait ainsi le premier élément d’attraction et d’impact, avant la forme et les mots. Ainsi, si nous suivons cette logique, les marques et les organisations ont tout intérêt à utiliser la puissance des couleurs qui influencent les systèmes neuro-biologiques des consommateurs, c’est à dire leur système émotionnel.

La présente revue de littérature entend ainsi analyser l’influence visuelle des couleurs sur l’attitude de l’individu à travers le prisme des neuro-sciences, de la psychologie, de la communication et des sciences de gestion. Il s’agit ici de démontrer son impact en termes d’identité visuelle pour une marque, une organisation, un produit, un prix ou un contenu mais également son pouvoir d’action dans les organisations et en management. A travers la réalisation d’une vidéo de vulgarisation, j’entends fournir les clés de compréhension de l’utilisation des couleurs en marketing et en sciences de gestion pour répondre aux interrogations soulevées précédemment. Comme nous l’avons souligné, cette analyse convoque différentes disciplines et se trouvent à l’intersection entre la sociologie, la psychologie, les sciences cognitives, les neurosciences, les ressources humaines et le marketing. Ainsi, la présente revue de littérature abordera le consommateur sous l’angle de l’acteur sur un marché, au sein d’une organisation, d’un membre d’une sous culture, du citoyen du XXI ème siècle confronté à de multiples influences culturelles et à la place grandissante du numérique. Dans cette perspective, je présenterai ainsi les limites de la rationalité des acheteurs en faisant appel à des exemples puisés dans le quotidien de ceux-ci.

À l’abord de cette réflexion, il conviendra de poser dans une première partie les schémas théoriques et conceptuels convoqués par la couleur dans l’imaginaire collectif. La couleur est utilisée dans des contextes commerciaux très variés mais systématiquement envisagée comme susceptible d’être un levier du marketing sensoriel. Ainsi, nous verrons dans cette première partie de quelle façon les branches de la communication et du marketing se sont appropriées les couleurs comme une véritable arme de séduction.

À partir de cette identification des différentes symboliques représentées par les couleurs, nous entreprendrons dans un second temps d’identifier les variables neuro-scientifiques qui apportent un éclairage différent sur ce « pouvoir chromatique ». Nous appuierons nos conclusions d’analyses et d’études menées par des psychologues et par

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des chercheurs en comportement du consommateur. La lecture de ce corpus académique fourni par les chercheurs, nous fournira de solides bases scientifiques à notre revue de littérature.

Enfin, après avoir approfondi notre analyse sur l’utilisation de la couleur comme outil sensoriel pour le marketing et la communication, nous aborderons la couleur et son utilisation dans les sciences de gestion. Afin de trouver un écho pertinent aux thématiques qui ont pu être abordées au cours de notre master et de notre séminaire « Organisation des Hommes et du Management », nous verrons que la gestion peut également se faire au travers des couleurs. Celles-ci constituent un véritable outil pour les ressources humaines.

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REVUE DE LITTÉRATURE

La couleur apparaît aujourd’hui étroitement liée aux enjeux de communication et de marketing. En effet, le marketing a voulu utiliser la couleur comme un nouvelle force de persuasion auprès du consommateur. Dans un environnement toujours plus concurrentiel, les organisations et les marques cherchent sans cesse à se distinguer. La couleur offre alors une réponse à cet impératif de singularité tout en permettant de capter l’attention des consommateurs.

I. Communication et couleur : les armes de la séduction du consommateur

Nous entendons ici apporter la preuve que si la couleur est une nouvelle arme au service de la promotion des produits, elle est avant toute chose, une composante visuelle de l’esprit humain.

A. La couleur : une composante visuelle de l’esprit humain

1. La couleur et les enjeux sensoriels de la consommation

L’influence des couleurs nécessite que nous nous penchions tout d’abord sur sa prétendue capacité d’influence afin de mieux appréhender son utilisation en communication visuelle. Plusieurs théories et recherches sur la couleur appuient ce principe. Elles démontrent que la couleur possède une grande influence sur nos perceptions et nos comportements face à une marque, un prix ou un produit. Par ailleurs, la couleur réintroduit le concept « d’achat plaisir ». En effet, toute expérience de consommation passe par les différents sens du consommateur et la vue apparaît comme le sens le plus sollicité lors de l’expérience d’achat. A ce titre, et de manière encore plus marquée de nos jours, la couleur répond à une tendance de fond : la revalorisation de la sensorialité.

Ainsi en « période de crise », nous pouvons observer que l’individu se recentre sur les fonctions primaires comme celles de se rassurer, de se protéger ou encore celle de séduire. La couleur permet toutes ces dimensions et offre aux individus une forme d’expression non verbale. Elle agit ainsi comme un déclencheur et favorise un ressenti. Elle est un élément communicant dans l’inconscient des individus. Les consommateurs, comme s’ils cherchaient à repousser la morosité ambiante, poussent les objets à devenir émotionnels. Dans ce processus, la couleur joue un rôle clé dans le besoin de

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divertissement grandissant au sein de la consommation. Nous constatons ainsi, depuis quelques temps, une forme de retour en force de la couleur après des années de neutralité prudente marquées par des gris austères ou des blancs intimidants. Il semblerait ainsi que la couleur aille de paire avec le bien-être comme le montre une étude de Desforges en 2015 et qui souligne le fait que le marketing doit dorénavant tenir compte de cette nouvelle aspiration.

En effet, les cinq sens - à savoir la vue, l’ouïe, l’odorat, le toucher et le goût- sont essentiels à la vie humaine. Ils informent le cerveau sur l’environnement qui l’entoure. Clés d’ouverture au monde, ils permettent à l’homme de sentir puis de percevoir le monde dans lequel il vit. Les sens sont la porte d’entrée aux émotions humaines et sont liés à la mémoire, aux souvenirs émotionnels que telle ou telle information sensorielle a provoqué. Leur pouvoir d’évocation est donc immense.

Aujourd’hui, les gestionnaires et les organisations exploitent le potentiel des couleurs afin de capter de l’attention des consommateurs. Ainsi, nous pouvons noter que dans l’industrie et la grande distribution, les couleurs sont très souvent utilisées dans l’affichage des prix avec une utilisation récurrente des couleurs comme le rouge, le jaune et le noir afin d’attirer l’attention sur les réductions. En effet, selon une étude menée en 1998 par Grewal, Monroe et Kirshnan , le rouge serait une couleur qui induit 7

chez les consommateurs de fortes perceptions d’économies en comparaison avec d’autres couleurs.

Cette incroyable puissance des sens, le marketing et la communication l’ont très vite appréhendée. Leur capacité à construire des liens émotionnels, au centre même du concept de marque est exploitée par les entreprises. Si les sens de la vue et de l’ouïe recueillent le plus d’attention, les autres reçoivent un intérêt grandissant. Dès lors, les marques jouent sur la sensorialité des consommateurs en misant sur le fait que les souvenirs émotionnels tissés avec elles sont plus susceptibles de se former, d’être stockés et réactivés lorsqu’une large palette de sens est engagée. Nous pouvons ici citer la célèbre enseigne Uniqlo qui joue des couleurs pour construire une expérience client mémorable et se distinguer de ses concurrents dans le secteur du textile. La marque japonaise vend des vêtements abordables pour le quotidien et joue sur la diversité de son offre, la multiplicité des couleurs proposées et son excellent rapport qualité-prix. A

Monroe M., The Apparent Weight of Color and Correlated Phenomena, American Journal of Psychology, 7

vol. 36 (2), 1998, p 192-206.Page � sur �13 59

chaque fois, la marque utilise, l’arc-en-ciel des 50 couleurs de son offre pour faire vivre une expérience unique au consommateur.

Selon Nigel Hollis (2015), consultant chez MillwardBrown, la réussite d’Uniqlo réside essentiellement sur une expérience en magasin forte, soutenue notamment par un merchandising très soigné des vêtements colorés. Ce marketing bien rôdé en termes de merchandising s’observe dans l’arrangement autour des couleurs de tous les magasins Uniqlo. Les vêtements sont rangés selon un code couleur très strict. Chaque étagère de vêtements va de la couleur la plus claire à la plus foncée et même les mannequins doivent suivre ce même principe. L’expérience avec la couleur ne s’arrête pas aux vêtements. Les étages sont reliés par des escaliers arc-en-ciel illuminés par des ampoules led. Le magasin de San Francisco a été le premier quant à lui, à proposer une nouvelle technologie, celle du « miroir magique  », permettant au client d’essayer un vêtement dans toutes les couleurs de la gamme sans se changer. Ainsi, nous pouvons comprendre à travers cet exemple la place prépondérante jouée par la couleur dans la construction d’une expérience client singulière. Les couleurs et leur agencement jouent incontestablement sur les émotions du consommateur et font appel à sa sensorialité.

2. L’influence de la couleur sur nos perceptions : un enjeu du marketing

Ainsi, la compréhension du monde est étroitement liée à ce que les yeux voient. La vue est le sens qui permet d’observer et d’analyser l’environnement et un tiers de notre cerveau y est consacré. 70% des récepteurs sensoriels de notre corps sont dans nos yeux et 80% des informations qui nous parviennent sont visuelles. Dès lors, la façon la plus optimale de capter l’attention du cerveau humain est de passer par le système visuel. La publicité, les packagings, les pages de site web, les applications, etc. le sollicitent sans cesse. La vue est l’objet de multiples recherches pour le marketing et la communication dans de nombreux secteurs d’activités.

Les couleurs sont incontournables pour attirer l'œil du consommateur. En effet, d'après une étude du Secrétariat de Seoul International Color Expo (2004), 93% des consommateurs accordent le plus d'importance sur les informations visuelles lors de l'achat d'un produit. Les couleurs représentent plus de 50% des informations considérées par la grande majorité d'entre eux (84,6%). La couleur est donc une composante visuelle que l’esprit humain assimile le mieux. C’est une composante qui se remémore le plus, avant les formes et les mots.

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Chaque couleur a une signification cachée et exerce ses influences à un niveau inconscient. La palette de couleur va conditionner notre attirance envers une marque, un produit ou un contenu et cela indépendamment du canal de communication utilisé par l’organisation : dépliant, publicité, site Web, réseaux sociaux, etc. Un choix de couleur inadéquat avec une offre transmettra un message différent ou erroné de celui que l’organisation entend diffuser à travers son produit. C’est en ce sens que la couleur et sa symbolique occupe une place fondamentale en marketing et en communication.

En effet, une étude menée par Varma en 1992 comprenant 109 publicités provenant de trois magazines ont permis de définir une forme « d’efficacité publicitaire » à travers quatre variables dépendantes : la capture attentionnelle, la compréhension, l’intérêt et la préférence. Ainsi Varma indique que la couleur est une variable essentielle 8

car elle est explicative et significative. La couleur d’une annonce influe positivement sur la capture d’attention, l’intérêt exercé et la préférence. De la même façon, Gronhaug, Kvitastein & Gronmo (1991) testèrent 333 annonces de magazines auprès d’un 9

échantillon important (N=1.000) et prouvèrent que la couleur était un facteur explicatif de la mémorisation et de la reconnaissance. Enfin, plus récemment, Pieters & Wedel (2004) ont soumis 1.363 annonces presse à un total de 3600 consommateurs, en 10

enregistrant leurs fixations oculaires avec notamment la technique de l’eye-tracking que nous aborderons par la suite (II. 1). Il s’avère que le visuel est toujours supérieur au texte en matière de capture attentionnelle, quelque soit la taille du visuel, tandis que l’élément textuel voit l’impact intentionnel s’accroître proportionnellement à sa surface.

La couleur peut ainsi impacter le jugement perceptif ou l’appréciation d’un produit ou d’une offre par un individu. C’est également ce que démontrent Polzella & Hassen (1997) à travers une étude qui souligne que certaines couleurs rapprochées à 11

d’autres coloris peuvent apparaitre plus foncées ou plus claires. Dès lors, les couleurs sont susceptibles d’influer notre perception visuelle. Il nous apparait utile de fournir à travers cette revue de littérature, un rapide inventaire au lecteur, de chaque couleur et

Varma, Perceptual Appeal In Advertisement, Journal of Advertising Research, vol. 32 (6), Nov 1992, p 39- 8

46.

Gronhaug, Kvitastein & Gronmo , Factors moderating advertising effectiveness as reflected in 333 tested 9

advertisements, Journal of Advertising Research, vol. 31(5), Oct-Nov 1991, p 42-50.

Pieters & Wedel, Attention Capture and Transfer in Advertising: Brand, Pictorial and Text Size Effects, 10

Journal of Marketing, vol. 68 (2), 2004, p 36-50.

Polzella & Hassen, Aesthetic Preferences for Combinations of Color and Music, Perceptual and Motor 11

Skills, vol. 85 (3), December 1997, p 960-962. Page � sur �15 59

de sa symbolique dans l’imaginaire collectif. Loin de vouloir présenter un catalogue schématique de chaque couleur et qui serait peu intéressant, il s’agit plutôt ici de synthétiser brièvement l’ascendant des couleurs sur nos attitudes, nos affects et nos émotions. Nous tenterons d’étayer au mieux la symbolique de chacune des couleurs auprès du lecteur avec des utilisations commerciales de la couleur par les marques et les organisations.

B. Influence chromatique en marketing : les couleurs et leurs symboles Cette présentation synthétisée des couleurs précède une analyse plus scientifique de l’impact des couleurs avec notamment les recherches produites par les neuro-sciences. Si cette synthèse des symboles et représentations convoquées par les couleurs peut sembler trop sommaire, elle permet au lecteur de disposer des clés de compréhension pour l’interprétation des conclusions tirées par la suite de cette revue de littérature. Afin de réaliser cette présentation des représentations et symboliques convoquées par la couleur, nous nous appuierons sur différentes lectures et notamment sur le travail réalisé par Véronique Boulocher-Passet et Sabine Ruaud dans leur ouvrage « La couleur : au coeur de la stratégie marketing ».

1. Blanc, Bleu, Gris, Jaune, Marron, Noir : symboles et représentations

• Blanc

Du latin albus, qui donnera aube, aubépine (épine blanche), mais aussi blank qui signifie « brillant, clair ». Pour les uns, le blanc est une couleur opposé au noir, il est pur et oriente la perception visuelle. Tandis que pour d’autres, c’est la teinte obtenue en mélangeant la lumière de toutes les couleurs. Le blanc s’associe dans la culture occidentale à de nombreux concepts relevant du domaine du sacré. En communication visuelle, le blanc se retrouve fréquemment utilisé comme la couleur du support. Le blanc suggère la pureté, la propreté et la perfection. Il symbolise aussi l’innocence et la virginité. Il est utilisé en marketing pour représenter les domaines du mariage, pour évoquer la propreté, la netteté ou apporter des zones de repos visuel.

La couleur blanche est liée à la notion d’hygiène et de propreté. En France, tous les ans, les enseignes textiles et la grande distribution font au mois de janvier le mois de «  blanc  » à savoir le mois des bonnes affaires pour réaliser des achats de linge de maison et de toilette. La publicité sur les lessives est également un miroir sociologique intéressant pour constater l’évolution de la symbolique de la propreté mais aussi celui

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du statut de la femme. Les publicitaires ont longtemps communiqué en affirmant aux utilisatrices que les lessives leur permettaient d’obtenir un linge plus blanc. La publicité a eu recours à des expériences scientifiques avec des ingénieurs en laboratoire avec des démonstrations avec des taches de sang, de cambouis ou d’encre comme avec la marque Skip d’Unilever. Le blanc a cependant des traits négatifs : il rappelle la pâleur de la mort. Dans les rêves, le « cheval blanc » est lié à un pressentiment de mort. Par ailleurs, dans la symbolique asiatique traditionnelle, le blanc est associé à la mort, au deuil.

• Bleu

Le premier fait intéressant démontrée par l’étude « Color Research » est que le bleu serait la couleur la plus appréciée dans le monde, indépendamment du genre. Le bleu est la couleur la plus utilisée pour les identités visuelles d’entreprise. C’est une couleur dite « calme », qui incarne, l’honnêteté, la loyauté et la confiance. Evoquant le ciel ou la mer, le bleu est ainsi généralement associé à la sagesse et à la sérénité. Il peut également symboliser la fraîcheur d’où sa forte présence sur les packagings de boissons.

Par ailleurs, c’est une couleur qui est très fréquemment utilisée dans les chartes graphiques des secteurs de l’aéronautique, des finances, de l’immobilier, de l’informatique, du tourisme dans le but de rassurer les clients. A contrario, le bleu peut également représenter une forme de dirigisme ou de froideur. Il n’en demeure pas moins que c’est une couleur privilégiée par les organisations pour son caractère universel et le sentiment de sécurité et de confiance qu’il instaure. Nous retrouvons ainsi le bleu dans les domaines technologiques et des réseaux sociaux comme Dell, IBM, Facebook, Twitter et LinkedIn.

• Gris

Le gris vient du germanique grau. Il possède une double symbolique : la tristesse, la mélancolie, l’ennui mais également la connaissance et l’intelligence, que l’on retrouve dans l’expression « matière grise ». Ainsi, à mi-chemin entre le blanc et le noir, le gris est une teinte plutôt fade, associée à la tristesse et à la solitude. Symbole de l’entreprise des années 1970, le gris est passé de kitsch à ultra-tendance en quelques décennies. Le gris est désormais au coeur des campagnes de marketing et des produits les plus réclamés. Cette couleur peut présenter un aspect revendicateur, alternatif et avant-gardiste : le gris est dorénavant utilisé dans les tons foncés voire anthracite notamment sur les façades et à l’intérieur de nombreux magasins et concept stores. En

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effet, son côté très industriel le rend particulièrement populaire pour la décoration de bureaux. Il véhicule une atmosphère analytique et émotionnellement froide.

Qu’il s’agisse de packagings, de produits ou de campagnes de communication, de nombreuses marques se sont appropriées le gris dans leur communication visuelle. En effet, le gris représente une idée de modernité, d’urbanité dans l’esprit du consommateur. Ainsi il est facile de constater que le luxe s’est emparé de cette couleur qui véhicule les idées d’anticonformisme, de personnalité et de « chic ». Cette charte graphique du gris est aussi déclinée sur le digital par de nombreux groupes comme le site internet d’Audi.

• Jaune

Du latin galbinus, dérivé de galbus, «  vert pâle, jaune vert » et donne le terme jaune, « couleur de l’or ». Le jaune apparaît comme la couleur héritière de la lumière, il symbolise le soleil, la richesse (épis de blé, or). Dans les pays arabes, le jaune représente la nature, le soleil et les couleurs du désert et de l’automne. En Egypte, c’est une couleur positive qui symbolise la prospérité, le bonheur. Selon l’étude réalisée par Color Research, le jaune est une couleur synonyme de gaieté et d’inspiration. C’est la couleur la plus lumineuse et si elle peut facilement évoquer la joie, la tonicité et l’optimisme en marketing elle peut, en contrepartie, fatiguer les yeux. Ainsi le jaune stimulerait les différents processus mentaux, le système nerveux et la communication. Dans les stratégies de communication visuelle, le jaune est fréquemment utilisé pour attirer l’attention, pour représenter l’optimisme et la jeunesse. Parmi les différentes marques qui l’utilisent, nous retrouvons Nikon, Hertz, les Pages Jaunes et IKEA.

• Marron

Le marron est une couleur souvent associée à la terre et à la nature, il inspire la relaxation et le calme. C’est également une couleur en quelque sorte « pure » qui peut suggérer l’authenticité, la fiabilité et la stabilité dans l’inconscient du consommateur. Le marron est une couleur qui peut aussi éveiller l’appétit. Dans les secteurs de la communication visuelle, cette couleur est utilisée dans les domaines de la santé et du bien-être, les entreprises artisanales ou celles qui entendent suggérer un certain sens de la tradition. Le marron est ainsi utilisé pour commercialiser et vendre des produits naturels ou que nous pourrions qualifier de « rustiques ».

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• Noir

Si le blanc est la somme de toutes les couleurs, le noir est celle de leur disparition. Techniquement parlant, le noir est l’absence totale de lumière. Le noir peut être vu comme une couleur mystérieuse ou encore symbole de neutralité. En psychologie des couleurs, le noir représente le pouvoir et le contrôle. Il se dégage du noir un côté sophistiqué qui fait de lui une couleur tout indiquée pour suggérer la distinction, l’élégance, le raffinement et le luxe : nous observons une très grande majorité des véhicules en différentes tintes de noir et cela s’avère encore plus vrai pour ceux de grand luxe.

En marketing, le noir dégage ainsi une image de « haut-de-gamme » et donne un sentiment d’élégance, de noblesse. En effet, depuis quelques années, en France, les évocations sombres ou nocturnes se multiplient dans les noms de parfums. La référence à la nuit, qui amène son lot de mystère et de séduction, n’est toutefois pas nouvelle. En 1913, le couturier Paul Loiret lance, sous sa marque « Les parfums de Rosine », une Nuit d’Orient rebaptisée ensuite Nuit de Chine au sillage puissant et oriental. Quelques années plus tard, à la fin des années 1930, Nuit de Longchamp de Lubin embaume le cou des femmes du monde. Ainsi, il semblerait que la nuit soit utilisée en marketing comme un moment bien plus riche et bien plus équivoque que son pendant diurne, comme l’a confirmé en 1997, l’affiche Midnight Poison de Dior.

2. Orange, Rose, Rouge, Vert, Violet : symboles et représentations

• Orange

Liés au jaune, l’orange et le terme « orangé » désignant la couleur sont venus par le nom du fruit qui a été introduit en Europe au XI ème siècle par les arabes, puis les espagnols et le sud de l’Italie. C’est une couleur chaude, dynamique, synonyme d’énergie. C’est aussi la couleur de l’encens, des pagodes et des bonzes. L’orange est ainsi souvent associé dans l’esprit des individus à la chaleur, la joie et au dynamisme. Cette couleur apporte, au même titre que le jaune, de l’optimisme et de la confiance. Il est souvent rapproché à des valeurs de communication et de créativité. Néanmoins selon plusieurs études, il a été démontré que cette teinte est également une des couleurs les plus détestées ce qui explique, en partie, les raisons pour lesquelles l’orange a longtemps été « boudé » par les marques. Associé au mouvement hippie, il semble être redevenu populaire auprès des marchés du low-cost ou de l’occasion comme Easy Jet, Le Bon Coin ou encore Amazon.

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• Rose

Tirant son nom de la fleur éponyme, issu du latin rosa, le rose est la couleur de l’enfance, de la tendresse avec la convention classique : le rose pour les filles et le bleu pour les garçons. Ainsi, le rose est une couleur qui peut être utilisée en termes d’identité visuelle pour symboliser la douceur, la tendresse, le romantisme et le confort. Souvent associée à la féminité, aujourd’hui le rose est communément utilisé dans la confiserie, la mode et les produits de consommation féminins. Cette couleur est à la fois ludique et douce, elle peut rappeler aux consommateurs leur enfance. En marketing, les études ont démontré qu’il s’agit d’une couleur utilisée par les enseignes pour faire un bond dans le passé ou viser un public féminin. Parfois synonyme de mièvrerie comme dans l’expression « à l’eau de rose », ce ton a basculé de la candeur à la perversité au cours du XXème siècle où il a incarné une « sexualité hard » ou perverse avec le téléphone rose par exemple. Le rose symbolise la féminité, le charme. Utilisé en décalage, le rose va conférer à la « Panthère rose » un succès international.

• Rouge

Du latin rubeus, ruber « rouge, rougeâtre, roux ». Dès l’Antiquité, la couleur rouge a été définie comme la première des couleurs, au coeur d’un système chromatique composé du noir et du blanc. Le rouge est la couleur par excellence pour stimuler. Le rouge est une couleur qui contribue à augmenter l’adrénaline et se retrouve dès lors dans les pièces où la productivité est requise comme les bureaux à domicile. Nous associons traditionnellement cette couleur à la passion, l’amour, la violence, la virilité, le désir ou la sensualité. Partout le rouge s’immisce dans les affaires de coeur et rime avec désir, séduction, amour et passion. C’est aussi la couleur de la détermination et de l’ambition. Le rouge a enfin, une autre symbolique forte qui est celle du danger. Le rouge est présent dans la vie de tous les jours pour interpeller, signaler, prévenir, mettre en garde, alarmer, prohiber ou interdire. Nous le retrouvons ainsi dans le sport avec le célèbre «  carton rouge  », sur les plages ou encore dans les corrections de copies. Présent sur les robes des magistrats, dans la signalisation routière ou pour nommer les découverts bancaires, il symbolise ainsi le danger comme dans le conte de Perrault où le Petit Chaperon rouge se caractérise par son bonnet rouge, symbole du danger qui guettait la petite fille qui le portait.

Néanmoins l’utilisation marketing du rouge nous éloigne relativement de ces considérations puisque de nombreuses marques destinées aux jeunes, utilisent le rouge comme couleur principale. Nous pouvons ici citer : Nintendo, Coca-Cola, Kellog’s, Virgin

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ou Lego. C’est également une couleur qui est utilisée en marketing pour les promotions, et les soldes parvenant à créer un sentiment d’urgence. Le rouge se retrouve ainsi très fréquemment utilisé lors de ventes de liquidation pour pousser à des achats impulsifs ou stimuler l’appétit comme avec Quick ou Heinz.

• Vert

Du latin «  viridis  », le vert a un lien avec une famille de mots qui évoquent la vigueur, la croissance : vivere (être vert), vir (l’homme), vis (force), etc. Ainsi, en raison de son association à la nature, le vert est une couleur qui symbolise la croissance, la quiétude, l’équilibre et a tendance à être rassurant. Plusieurs études se sont attachées à démontrer qu’un environnement de verdure permet de réduire la fatigue et invite souvent au calme et au repos. Il représente dans l’esprit des individus un synonyme de prospérité, de nature et d’écologie.

L’association du vert et de la nature remonte à l’époque romantique. Par la suite, durant la seconde moitié du XIXe, au moment où certains commerces urbains se dotent de signes de reconnaissance, les apothicaires, dont la pharmacopée est à base de plantes, ont choisi ce vert végétal pour leurs croix. Le vert indique ainsi le désir de bien-être caractérisé par la vigueur et la santé. Dans les les années 2000, avec le greenwashing, le vert est revenu sur le devant de la scène mais avec un effet pervers : certains s’étant repeint dans ce ton, sans suivre forcément une éthique écologique. Dans cette perspective, il n’est donc pas étonnant qu’il soit repris par des organisations comme Tropicana, Starbucks ou McDonald’s qui est passé du rouge au vert. Le vert permet, d’un point de vue de marketing, d’accentuer le côté «  responsable  » de l’entreprise aux yeux de ses potentiels clients.

• Violet

Le terme « violet » est dérivé de l’ancien français viole, la fleur violette et est issu du latin viola qui désignait différentes plantes, dont la violette (viola purpurea). Né de l’union du rouge et du bleu, deux couleurs totalement opposées, le violet et les autres teintes de sa famille, comme le mauve et le pourpre possèdent une sorte de double personnalité qui leur a toujours valu des réactions très variées. A la fois jeune et vieillotte, moderne et rétro, fraîche et désuète, c’est la couleur de l’ambivalence et des sentiments mêlés : une part d’énigme sensuelle mais inquiétante. Les études de Color Research présentent le violet comme une couleur qui évoque la spiritualité, le rêve et présenterait une vertu pour calmer les tensions. Nous pouvons citer la marque de soins

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Fa, du groupe Henkel qui a lancé en 2010 «  Mystic Moments  » dans sa gamme déodorant et gel douche avec un packaging violet pour insister sur l’expérience multi-sensorielle que pouvait procurer une douche avec ce soin. Par ailleurs, de nombreux médias télévisés utilisent du violet dans leur logo et leur communication pour inviter les téléspectateurs au rêve, à l’imagination, à l’évasion comme France 4 par exemple.

Nous pouvons également citer l’exemple de la marque Whiskas, marque d’alimentation pour chats du groupe agroalimentaire américain « Mars Incorporated », qui habille ses produits en violet. Jugée au départ trop clivante et tranchante, les dirigeants de la marque ont cru en cette couleur, séduits par sa force, son originalité et son côté énigmatique, en symbiose avec l’univers du chat : mystérieux mais avec un caractère animé, indépendant mais capable de développer une relation quasi magnétique avec l’homme.

Ainsi après cette première présentation de l’influence et de la symbolique de chacune des couleurs nous comprenons que l’agencement des couleurs, le jeu des volumes constituent des facteurs attractifs forts de la clientèle avec lesquels les enseignes travaillent aujourd’hui très minutieusement. De nombreuses recherches témoignent de l’influence des couleurs sur les comportements et perceptions en points de vente. Les couleurs « chaudes » sont dites « activantes » et ont un pouvoir d’attraction fort. Il est souvent conseillé de les utiliser à l’extérieur du magasin pour attirer la clientèle. Elles favorisent les achats d’impulsion et augmentent le taux de rotation des clients, ce qui explique pourquoi les enseignes de restauration rapide comme McDonald’s ou Subway en sont friandes. A l’opposé, les couleurs froides, plus relaxantes, favorisent les achats réfléchis et augmentent le temps passé des clients en points de vente. Elles contribuent aussi à accroître l’évaluation de cherté d’un produit ou d’un espace. Les couleurs pastel quant à elles sont choisies pour amplifier l’impression d’espace. Suivant les objectifs de comportements ou de perceptions poursuivis, les lieux de distribution ou de services privilégient les unes ou les autres.

C. Singularité et différenciation : l’usage de la couleur par les marques

1. Stratégie de distinction et couleur

Après avoir précédemment synthétisé la symbolique représentée par chacune des couleurs dans l’imaginaire du consommateur, nous souhaitons ici rappeler la place de la couleur en marketing pour un positionnement stratégique. En effet, selon Legoff (1999), Steve Jobs déclarait lors du lancement de son premier ordinateur sur le marché :

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«  le choix de la couleur va devenir l’une des questions essentielles pour acheter un micro-ordinateur ».

La couleur devient effectivement un élément considérable de différenciation sur les marchés où l’offre est de plus en plus standardisée. La couleur permet ainsi de communiquer à l’acheteur une certaine image du produit ou de la marque et une distinction visuelle. Elle fournit, dans ce contexte, des émotions et associations qui peuvent renforcer les bénéfices du produit et le symbolisme. Ainsi, une étude menée par Schoormans et Robben en 1996 montre déjà l’influence considérable de la 12

couleur sur les perceptions et les états émotionnels des consommateurs. Les auteurs mettent en avant que la couleur du packaging est un attribut non verbal qui véhicule des significations au produit et qui influence directement les évaluations et le choix de la marque. Les résultats de cette étude indiquent que la couleur a une influence sur les jugements et la perception des marques par les individus.

En effet, nous pouvons également ici citer l’étude conduite Droulers en 1987 13

montre l’influence de la couleur du conditionnement pharmaceutique sur les réactions des patients. Ainsi, les patients seraient largement influencés par la couleur pour attribuer, ou non, des qualités spécifiques aux médicaments. Parmi les dix couleurs manipulées pour l’étude (le bleu, le vert, le jaune, le rouge, le rose, l’orange, le violet, le marron, l’argent et l’or), le rouge apparait dans l’esprit du patient comme davantage curatif tandis que l’argent renvoie à un pouvoir d'action plus lent et le jaune s’utiliserait ainsi pour des problèmes plus mineurs. L’étude montre que 94% des patients imaginent qu’il faille manier le médicament contenu dans une boite rouge avec précaution. Le rouge renvoie ainsi un gage de rapidité d’action et de précision lors de l’usage du médicament, dans l’imaginaire du patient. Si le rouge est une couleur active, stimulante et chaude, le bleu, à l’inverse, apparaît comme une couleur davantage passive, calmante et froide. Dans ce contexte, nous comprenons parfaitement que la perceptions des médicaments soit assujettie aux couleurs. La couleur d’un conditionnement pharmaceutique modifie les attitudes et les croyances à l’égard du médicament mais également l’efficacité potentielle perçue par le client.

Schoormans & Robben (1997), The effect of new package on product attention, categorization and 12

evaluation, Journal of Economic Psychology, p. 271-287.

Droulers, Le packaging et le médicament, Thèse de doctorat en médecine, soutenue le 10 juin 1987, 13

Faculté de Médecine, Université de Rennes 1. Page � sur �23 59

Nous l’avions abordé dans la première sous-partie de cette revue de littérature : la couleur attire l’oeil et affecte la perception sensorielle des consommateurs, c’est à dire la perception des informations délivrées par les cinq sens (Krishna, 2012). Cependant, il convient de comprendre que cette perception des couleurs peut être différentes selon les croyances, les cultures, les émotions ressenties ou même les préférences des individus.

En effet, rappelons ici la précaution qu’il convient de prendre quant à l’interprétation des études réalisées. En effet, la réaction des individus aux couleurs peut être nuancée par la culture, le genre ou la personnalité. Il ne s’agit donc pas ici d’une science aux résultats constants et exacts. Ainsi, dans le cadre d’une campagne marketing internationale, il convient d’apprécier les différentes significations d’une couleur dans un pays ou un continent ciblé. Par exemple, si le blanc est généralement associé à la pureté dans les pays occidentaux, il symbolisera le deuil dans une majorité des pays asiatiques. En effet, nous sommes dans une ère de mondialisation : cinq continents, 243 pays et territoires dont 193 indépendants représentés à l’ONU. Bien que ces pays soient regroupés en zones géographiques plus ou moins homogènes, chacun possède a priori, sa propre culture. En philosophie, la culture désigne ce qui est différent de la nature, c’est à dire ce qui est de l’ordre de l’acquis et non de l’inné. La culture a longtemps été considérée comme un trait caractéristique de l’humanité, qui la distinguait des animaux. Dans ce contexte, il est indéniable que la perception des couleurs est différentes selon les cultures, les pays. Nous pouvons même parler de « géographie des couleurs » de part la grande volatilité culturelle de la symbolique des couleurs dans les pays.

2. Le nouvel éveil de l’attention du consommateur par les couleurs La couleur est d’abord utilisée par l’entreprise comme vecteur attentionnel, c’est à dire comme un élément visuel permettant une capture quasi-automatique de l’attention. Elle signale une nouveauté, un danger, une présence, une offre limitée dans le temps. Avant de réfléchir aux connotations symboliques éventuelles d’un produit « parme » ou « jaune », le gestionnaire s’interrogera sur la visibilité et la lisibilité de la couleur employée : mon logo est-il visible sur mes camions ? Voit-on ma publicité dans l’annuaire ? Mon offre se distingue-t-elle des concurrents ? Mes clients se sentent-ils à l’aise dans mon magasin ? Dans un deuxième temps, il s’efforcera d’opter pour des coloris porteurs de sens, valorisant une offre et son positionnement dans une gamme, et respectant les pratiques ou symboles d’un marché extérieur.

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Dans diverses revues de littérature (Norman & Scott, 1952 ; Adams & Osgood, 1973 ; Whitfield & Wiltshire, 1990), les auteurs ont souligné les constats récurrents d’effets affectifs de la couleur. Lewinski (1938) avait soumis 50 personnes (50% de 14

femmes) à des « illuminations chromatiques » et sollicité leurs réactions verbales d’après des sémantiques différentielles pré-établies. Les couleurs verte et bleue étaient jugées «  très agréables » et les couleurs orange et jaune «  très désagréables ». Parallèlement, les sujets trouvaient les couleurs rouge, orange et jaune «  stimulantes  » et la teinte violette « déprimante ». Ainsi les couleurs et leur perception sensorielle influence l’état émotionnel des consommateurs.

Selon les auteurs (Lee & Barnes, 1989) les couleurs seraient ainsi un moyen de communication non verbal et qui transmettrait des messages aux individus. Ainsi, l’article rédigé par Lee & Barnes en 1989 démontre que les publicités coloriées 15

captivaient l’attention de 53% des lecteurs. De plus, une recherche conduite par Sparkman et Austin en 2000 , a prouvé que les volumes de vente d’un produit avaient augmenté de 41% en raison du simple ajout des couleurs sur une annonce publicitaire dans un journal.

Sur le plan du marketing, nous voyons que même la dénonciation des couleur est utilisée avec la pratique du Color Naming, c’est à dire l’action de donner une dénomination aux références couleurs des produits. C’est un élément capital du discours de vente, largement utilisé par certains secteurs notamment celui des cosmétiques. Par exemple, la palette de maquillage comprend une gamme très variée de nuances qu’il conviendrait, normalement, de dénommer par des termes génériques comme « rouge », « rose-clair », etc. Or, des termes plutôt ambigus sont utilisés comme les marques de vernis OPI et Essie qui font appel à l’émotion de la consommatrice avec des appellations toujours originales comme le rose pâle « Pink-ing of you » ou encore le beige Sand Tropez. Ainsi, à travers cette pratique du Color Naming, les marques peuvent éveiller chez les consommatrices des émotions car elle permet à la cliente de s’imaginer la référence, la situation.

Lewinski, An Investigation of Individual Responses to Chromatic Illumination, Journal of Psychology, vol. 14

6, 1938, p 159-166.

Lee & Barnes Jr, Using Color Preferences in Magazine Advertising, Journal of Advertising Research, 15

December 1989 / Jan. 1990, vol. 29 (6), p 25-30. Page � sur �25 59

II. Les neuro-sciences et le consommateur : une explication des comportements d’achat

Depuis une dizaine d’années, les recherches en sciences du cerveau et neuroscientifiques ont apporté de nombreuses réponses aux enjeux de la couleur en marketing. Ainsi, ces recherches ont produit un corpus académique important dont l’explication apparait indispensable à la bonne compréhension de cette revue de littérature. Ainsi, cette seconde partie de notre analyse transmettra au lecteur les bases neuro-scientifiques de la conscience, des affects et de la cognition qui sous-tendent n’importe quel comportement du consommateur. En effet, ces recherches et avancées scientifiques permettent d’établir des liens et des connexions entre les phénomènes mentaux et les comportements des individus. La thématique des couleurs ne se retrouvera pas au centre de chacune de ces sous-parties mais l’évocation des techniques neuro-scientifiques utilisées en marketing apparaissait indispensable à la cohérence de la présente revue de littérature.

A. Analyse de l’influence des couleurs par le prisme des neuro-sciences

L’objectif ici est d’analyser les différentes connexions qui peuvent s’établir dans l’inconscient du consommateur par la présence de telle ou telle couleur sur un produit, une marque ou un contenu et qui peuvent le pousser à l’acte d’achat. De façon synthétique je rassemblerai ici l’ensemble des articles issus des recherches neuroscientifiques et qui apportent une réponse constructive à notre analyse. Nous ne présenterons pas ici de données scientifiques qui pourraient sembler trop « pointues » et dont l’interprétation nécessiterait d’importantes connaissances dans le domaine des sciences, dans un souci de bonne compréhension de la part du lecteur.

1. Consommation et cognition : une première explication des attitudes du consommateur

De nombreuses études récemment conduites mettent en lumière l’impact des couleurs, de leur perception et leurs effets sur les individus. Les couleurs affectent les consommateurs d’un point de vue affectif et cognitif. Cette conviction a été largement appuyée par des techniques d’imageries médicales et les résultats de ces progrès scientifiques se traduisent par une prise en compte grandissante de cet inconscient du consommateur par les marques et les organisations. Celles-ci mettent au point des stratégies de séduction et d’attraction du consommateur qui tiennent compte de

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l’influence des couleurs. Plusieurs travaux viennent ainsi appuyer cette corrélation entre couleurs et émotions.

Dans le cadre d’une étude scientifique expérimentale menée en 1935, Hevner 16

avait soumis des motifs abstraits de couleur rouge ou bleue à des étudiants et leur avait demandé leurs impressions. Les termes « joyeux », « excitant » pour le rouge et « triste », «  serein » pour le bleu revinrent fréquemment. Parallèlement, les sujets trouvaient les couleurs rouge, orange et jaune stimulantes et la teinte violette déprimante. Ainsi, les couleurs possèdent une réelle influence sur les affects des individus.

D’autres études ont tenté de mesurer l’influence de la couleur sur le niveau d’anxiété des personnes. Celles-ci ont été menées en laboratoire ou en situation réaliste comme au sein de bureaux. Jacobs & Suess (1975) ont évalué sous quatre conditions 17

chromatiques différentes (le rouge, le jaune, le vert et le bleu) le niveau d’anxiété des sujets exposés. 40 sujets furent ainsi convoqués à trois reprises au cours de sessions de 15 minutes. A travers un test appelé « STAI  » (State-Trait Anxiety Inventory), les auteurs 18

de l’étude ont projeté des diapositives unies formant une image de 1,52m x 2,44m, soit 3,70m2 sous une illumination identique de 107,6 lux aux sujets. Les résultats de cette étude indiquent que les couleurs dites «  chaudes  » (le rouge et le jaune) induisent significativement des niveaux d’anxiété plus élevés que les couleurs « froides » (le vert et le bleu).Ainsi, il apparaît que la couleur joue un rôle fondamental dans ce que nous nommons « l’espace percepteur » du consommateur (Percy, 1974).

Hevner, Experimental Studies of the Affective Value of Color and Lines, Journal of Applied Psychology, 16

vol. 19 (2), 1935, p 385-398.

Jacobs & Suess, Effects of Four Psychological Primary Colors on Anxiety State, Perceptual and Motor 17

Skills, vol. 41 (1), 1975, p 207-210.

«  Les concepts d’anxiété-trait et d’anxiété-état ont été introduits par Cattell puis approfondis par 18

Spielberger. L’anxiété-trait (anxiété-T ou AT) se réfère à des différences interindividuelles stables dans la propension à l’anxiété, c’est-à-dire à des différences dans la tendance à percevoir les situations aversives comme dan- gereuses ou menaçantes et à y répondre par une élévation de l’intensité des réactions d’anxiété- état (anxiété-E ou AE). Plus le trait d’anxiété d’un sujet est accentué, plus il est probable que ce sujet expérimente une augmentation de l’anxiété-E dans une situation menaçante. L’anxiété-E s’élève face à un danger physique ou à un stress psychologique et diminue en réponse à une séance de relaxation ».

Définition produite par Langevin V., département Expertise et conseil technique, INRS Boini S., département Épidémiologie en entreprise, INRS François M., département Homme au travail, INRSRiou A., département Expertise et conseil technique, INRS

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En 2002, une équipe de chercheurs américains travaillant sur les marques Pepsi Cola et Coca-Cola sont interpellés par le fait que les consommateurs préfèrent le goût du Pepsi lorsque la boisson est consommée en test aveugle sans que figure la marque, alors que ces mêmes consommateurs vont aimer davantage le Coca-Cola lorsque la marque apparaît. Read Montague , neurologue texan, a l’idée de réaliser une 19

expérience en utilisant l’imagerie cérébrale. Les conclusions de l’expérience sont surprenantes : l’IRM montre que, dans les deux cas, des zones différentes du cerveau sont activées. Une marque forte comme Coca-Cola a le pouvoir de faire travailler la zone du cortex frontal considérée comme le siège des fonctions exécutives du cerveau qui gère également l’attention et la mémoire à court terme. Lorsque la marque n’est pas présente, c’est une autre zone du cerveau qui travaille : le « putamen » qui fait partie du cerveau primitif et qui est considéré comme le siège des plaisirs immédiats et instinctifs. Lorsque les consommateurs connaissent la marque du coca qu’ils testent, la zone du cerveau primitif n’est plus activée, c’est la zone du cortex préfrontale, une zone de la conscience qui prend la commande et vient inhiber le choix réalisé précédemment.

Cette étude permet de mettre en lumière l’importance que joue une marque forte sur les mécanismes du cerveau d’un consommateur. Pour Read Montague, les consommateurs mémorisent les images et les messages de la communication de Coca-Cola. La marque se substitue progressivement à leur jugement dans leur cerveau et modifie leurs préférences d’achats.

2. Les motivations d’achat du consommateur : une rationalité limitée

Dans les pays anglo-saxons en particulier aux Etats-Unis, en Grande Bretagne et en Asie, les dirigeants et grands groupes internationaux montrent un réel intérêt pour faire intégrer les recherches neuro-scientifiques dans les disciplines du marketing, de la vente et de la communication. Nous pouvons cependant être surpris de constater que le marketing et la communication continuent à se fonder, en grande partie, sur l’hypothèse que le consommateur est rationnel tant dans ses décisions d’achat que dans sa perception des messages publicitaires.

Or les recherches accomplies à partir des techniques issues des neurosciences vont à l’opposé de cette croyance. Les neuro-scientifiques démontrent qu’une très grande partie de nos actions est directement régie par notre cerveau en dehors de la

Etude menée par Samuel M. McClure,Jian Li,Damon Tomlin, Kim S. Cypert, Latane ́M. Montague,19

and P. Read Montague, Department of Neuroscience, Menninger Department of Psychiatry and Behavioral Sciences, Baylor College of Medicine 1 Baylor Plaza, Houston, Texas 77030.

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conscience. Lorsque nous nous levons le matin, nous nous brossons les dents, conduisons pour aller au travail… La plupart de ces actes se réalisent sans réfléchir. Il en est de même pour les achats. Les experts nord-américains en neuro marketing tels qu’A.K Pradeep et Martin Lindstrom n’hésitent pas à affirmer que 70 à 80% d’entre eux sont irrationnels.

Si les choix des consommateurs ne sont pas rationnels, ils suivent néanmoins deux processus principaux : une évaluation inconsciente et rapide des options immédiates et des expériences conscientes de choix. Rappelons ici, que de nombreuses études scientifiques d’analyse de la prise de décision humaine montre que l’évaluation inconsciente et rapide peut représenter la majeure partie du choix réel. Cette interpellation nous amène à nous intéresser aux modes de perceptions et de comportement inconscient du cerveau confronté aux sollicitations émanant du marketing et de la communication. Le comportement inconscient du neuro-consommateur est influencé par la manière dont son cerveau est structuré, mais aussi par ses humeurs que modifient les émotions et les désirs. Dès 1954, deux psychologues américains, James Olds (1922-1976) et Peter Milner, identifient une zone du cerveau qui procure du plaisir. Le centre se situe au niveau du noyau accumbens . Quand il est 20

stimulé par différents facteurs comme la contemplation d’une scène émouvante, le rappel d’un moment heureux intégré dans les « marqueurs somatiques » comme lors d’une relation sexuelle ou bien la consommation de drogues, ce noyau entraîne une production de dopamine. Elle fait partie des hormones neurotransmetteurs, engendrant une sensation de plaisir. Le marketing et la communication en commençant par la couleur cherchent ainsi à communiquer cette sensation au neuro-consommateur afin de le rendre plus sensible à leur offre.

Ainsi, notre cerveau est fréquemment considéré par les neurologues comme un organe dont une des fonctions importantes est de contribuer au bonheur des personnes en organisant un fonctionnement équilibré et harmonisé du corps et des

Noyau accumbens : Le noyau accumbens est une région du cerveau impliquée dans le circuit de la 20

récompense et la dépendance aux drogues. C'est une structure paire, il en existe un dans l'hémisphère droit et un autre dans l'hémisphère gauche. Le noyau accumbens est relié à d'autres régions du cerveau :

• l'aire tegmentale ventrale du mésencéphale : les neurones de cette région fabriquent la dopamine et possèdent des axones dirigés vers le noyau accumbens,

• le cortex préfrontal qui joue un rôle dans la motivation et la planification des actions, • l'hippocampe.

Définition de :https://www.futura-sciences.com/sante/definitions/medecine-noyau-accumbens-4925/Page � sur �29 59

pensées humaines, à partir du système hormonal. Ce processus est appelé « homéostasie » et intervient dans le comportement de consommation des individus.

B. Neuro-marketing et efficacité des campagnes publicitaires

Les neuro-sciences et le neuro-marketing qui en est issu, se définissent aujourd’hui par le recours à des mesures d’observation, à des expériences et expérimentations de l’activité cérébrale afin d’étudier les mécanismes de raisonnement et d’évaluation d’un consommateur dans sa prise de décision (Oullier et Sauneron , 21

2010). Ces disciplines et les conclusions qui en sont tirées apparaissent alors largement exploitées par le marketing et la communication. Cette sous-partie de la présente revue de littérature tentera de rassembler les différentes techniques neuro-scientifiques existantes et qui servent de bases à la construction de campagnes publicitaires.

1. Techniques d’estimation de l’activité du système nerveux périphérique

Le corpus de textes académiques fourni par les neuro-sciences relate l’utilisation de la fréquence cardiaque du consommateur comme un indicateur précieux pour le marketing. En effet, les variations de pulsations cardiaques sont considérées comme un révélateur du plaisir, de la mémorisation, de l’attention ou comme précédant des réactions émotionnelles comme la peur (Minor et Wang, 2008). Ces variations de pulsations cardiaques sont alors mesurées par des capteurs mécaniques placés sur le corps comme au bout d’un doigt par exemple, ou par électrocardiogramme qui permet ainsi d’enregistrer l’activité électrique du coeur. Les données recueillies permettent alors d’analyser les fluctuations d’attention face à certains messages radio ou publicitaires.

Parmi les différentes techniques d’estimation de l’activité du système nerveux périphérique du consommateur nous pouvons également citer l’activité électrodermale. En d’autres termes, cette technique reflète les variations de micro sudation cutanée. Si cette technique peut paraitre étonnante elle permet d’étudier l’attention, l’excitation et les réactions face à des images ou des messages de prévention (Bradley, Codisporto, Cuthbert et Lang, 2001). Les résultats obtenus permettent alors d’orienter et d’adapter la communication réalisée par les organisations, y compris les institutions de santé publique. Soulignons ici que ce signal est également sensible à des facteurs intrinsèques et environnementaux qui nous amène à relativiser les résultats obtenus.

Oullier, Sauneron, Nouvelles approches de la prévention en santé publique : l’apport des sciences 21

comportementales, cognitives et des neurosciences (Rapport n°25 du Centre d’analyse stratégique). Paris : La Documentation Française, 2010 : 192 p.

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Nous devons également citer l’analyse des muscles faciaux réalisée par l’électromyographie, également nommée « EMG ». L’activité des muscles du visage est étroitement liée au système nerveux qui entraîne la contraction des fibres musculaires du visage. Ainsi, l’électromyographie permet, par l’intermédiaire d’électrodes placées sur le visage, d’enregistrer l’activité électrique des muscles faciaux. Bolls et Bradley ont montré en 2001 que cette technique médicale est alors exploitée en marketing pour évaluer les réactions appétives et défensives à des stimuli comme des images ou messages publicitaires. Ils montraient alors que des images de torture ou de mutilation produisent un mouvement au niveau du muscle orbiculaire de l’oeil associé au dégoût et qu’à l’inverse des images de familles et de nourriture sollicitent le zygomatique et l’orbiculaire, qui est interprété comme l’expression d’un sourire et donc d’une satisfaction.

Enfin, nous devons également citer ici une autre technique très utilisée en marketing :   l’eye-tracking. Cette technique fonctionne avec l’utilisation d’une lumière infrarouge envoyée sur l’oeil qui est réfléchie et détectée par une caméra. Si elle est particulièrement utilisée en marketing c’est parce qu’elle permet d’enregistrer le nombre et le temps de fixation des yeux sur un stimulus. Cette méthode mesure ainsi l’attention visuelle en séparant les effets d’attention et ceux de mémorisation qui se produisent au cours de la décision d’achat d’un consommateur (Chandon, Hitchinson, Bradlow et Young, 2007). Concernant les réactions émotionnelles, les appareils de mesure de l’activité oculaire permettent également cette prise en considération car ils permettent de mesurer la dilatation de la pupille qui informe sur l’activité émotionnelle du consommateur.

Si ces différents instrument scientifiques offrent des mesures intéressantes de l’attention et des réactions émotionnelles, elles doivent cependant être nuancées. En effet, ces outils impliquent des temps d’enregistrement longs, répétés et contraints par des phénomènes neuro-physiologiques des sujets enregistrés. Par exemple, l’analyse des pulsations cardiaques évoquée précédemment nécessite de laisser un temps suffisant entre les différents stimuli auxquels nous exposons un sujet afin de permettre au corps de revenir à une valeur de base après une perturbation. Ainsi, nous pouvons dire que ces techniques scientifiques permettent d’obtenir des résultats précieux mais présentent également certaines limites. Il n’est pas certain que ces techniques enregistrent obligatoirement l’activité du système nerveux périphérique : il peut également s’agir d’autres phénomènes. Ainsi, Bolls et Bradley soulignent l’importance de combiner ces méthodes de mesure et à des mesures verbales et déclaratives.

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2. Les avancées technologiques récentes : une meilleure appréciation du comportement du consommateur

L’électro-encéphalographie également appelée « EEG » permet d’enregistrer les variations de l’activité de certains neurones du cortex cérébral via des électrodes en contact avec le cuir chevelu par l’intermédiaire d’un gel. Les électro-encéphalographies fournissent alors des indications sur les différents rythmes cérébraux en fonction de l’état d’activation des neurones. Ces différents rythmes cérébraux sont ensuite classés selon leur fréquence à différents états comme la somnolence, l’éveil, le repos, la concentration ou encore l’état de vigilance. Ainsi, l’observation de l’activité cérébrale par l’EEG permet d’analyser lorsque les messages publicitaires sont mémorisés, appréciés ou non (Vecchiato, 2013).

Aujourd’hui, les progrès de la science ont permis le développement d’électro-d’électro-encéphalographies portables. Autrement dit, l’enregistrement de l’activité cérébrale d’une personne qui se déplace grâce à la transmission des données en wifi. Parallèlement, les fabricants d’eye-trackers ont mis au point des lunettes permettant, non seulement, de connaitre le champ de vision d’une personne en mouvement mais également de connaître la trajectoire de son regard. Depuis 2013, les données d’eye- tracking et d’électro-encéphalographie sont collectées et synchronisées sur des smartphones, permettant de comprendre et d’analyser où se porte exactement le regard des consommateurs dans leur environnement quotidien. En effet, il possible de connaître avec une excellente précision la trajectoire du regard, la séquence des fixations oculaires ainsi que leur durée. Cependant, il subsiste certaines difficultés d’analyse de l’activité cérébrale notamment lorsque l’environnement altère le fonctionnement du cerveau. Par exemple, dans un supermarché, les stimuli et artéfacts sur les données sont très nombreux et savoir où la personne regarde ne garantit pas une parfaite compréhension des processus cognitifs.

En neurosciences du consommateur, les recherches et les travaux se penchant sur les interactions sociales sont rares. Pourtant les interactions sociales jouent un rôle primordial dans une situation de vente. Ainsi la méthode de l’hyperscanning permet d’enregistrer l’activité cérébrale de plusieurs individus de manière concomitante. De cette façon, nous pouvons apprécier l’influence des individus exercée entre eux. Ces analyses permettent alors de mesurer l’influence du jugement d’autrui sur la formation de l’avis du consommateur sur un produit, sur la réputation d’une marque. Jusqu’à la mise au point de cette technique, aucune méthode n’avait permis de prendre en

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considération l’influence des interactions entre les individus sur leurs comportements d’achat.

C. Interprétation et appropriation des résultats neuroscientifiques en marketing

1. Les apports des techniques de neuro-imagerie : les limites de l’interprétation

Aujourd’hui il semblerait que les techniques de neuro-imagerie fonctionnelle permettent d’observer des modifications importantes de l’activité cérébrale et des différentes aires du cerveau. Néanmoins, il subsiste, comme dans toute démarche scientifique, une part significative de subjectivité dans l’interprétation des données recueillies concernant les variations de l’activité cérébrale (Button, 2013).

Bien que des expérimentations aient montré des corrélations avérées entre l’activation de certaines zones du cerveau et l’exécution de certaines tâches, il n’en demeure pas moins que la science, la médecine ou le marketing doivent rester prudents à ne pas extrapoler ou sur-interpréter les données issues de ces analyses. En effet, il existe un réel danger de simplification du fonctionnement du cerveau, écueil que nous tenterons d’éviter à travers la réalisation de notre vidéo de vulgarisation. En effet, si vulgariser l’information revient parfois à effectuer un travail de simplification, dans un souci de transmission, il ne doit pas se soustraire à une certaine rigueur méthodologique et à un devoir de précision. A titre d’exemple, il est scientifiquement erroné d’associer un hémisphère entier du cerveau à un trait de personnalité rationnel ou émotionnel comme l’ont montré Nielsen, Zielinski, Ferguson, Lainhart et Anderson en 2013 . 22

Pourtant cette simplification abusive «  cerveau droit/cerveau gauche » a donné lieu à des conclusions hâtives notamment dans les disciplines du marketing et de la communication. En effet, la sur-interprétation des données issues d’un des hémisphères du cerveau a conduit à l’intériorisation de messages erronés concernant la production d’émotions face à certains messages publicitaires (Ambler, Ioannides et Rose, 2000 ). Il 23

existe ainsi, comme l’a montré Pessoa en 2008, des parties du cerveau qui interviennent dans le traitement et la production d’émotions sans distinction hémisphérique.

Nielsen, Zielinski, Ferguson, Lainhart et Anderson, An evaluation of the left-brain vs. right-brain 22

hypothesis with resting state functional connectivity magnetic resonance imaging, Collection 2013.

Ambler, T. , Ioannides, A. and Rose, S. (2000), Brands on the Brain: Neuro-Images of Advertising. 23

Business Strategy Review.Page � sur �33 59

De la même façon, nous pouvons citer ici le développement de certaines techniques de vente fondées sur la «  théorie des trois cerveaux  », développée par MacLean en 1970. Cette théorie scientifique attribuerait ainsi au cerveau reptilien la 24

responsabilité du comportement et aurait ainsi été « ciblé » par les techniques de vente ensuite. Ainsi, la théorie du cerveau triunique ou « théorie des trois cerveaux » postule que le cerveau est constitué de trois couches indépendantes constituées du «  vieux cerveau  » également appelé «  reptilien  », du cerveau limbique et du néocortex. Le cerveau reptilien interviendrait dans la satisfaction des besoins primaires comme manger, boire ou se reproduire et produirait des réponses « réflexes ». Cependant, cette supposée indépendance fonctionnelle entre ces trois niveaux est à relativiser. En effet, les résultats de connectivité fonctionnelle entre ces différentes régions du cerveau montrent qu’elles sont en permanence en interaction et donc interdépendante dans le production de comportements et dans les processus de décision (Pessoa, 2008 ; Oullier, 2010). Dès lors, si la construction de cette cartographie cérébrale facilite la lecture des résultats, l’activité du cerveau et les réseaux qui la sous-tendent peuvent avoir différents rôles en fonction de la tâche à effectuer. Il n’existe donc aucune relation univoque entre une région précise du cerveau et un comportement complexe tel que la décision d’achat.

Ensuite, il apparait que si l’information et l’analyse critique sont des remparts nécessaires contre la désinformation et les dérives en neuro-sciences, eux-seuls ne sont pas suffisants. En effet, comprendre le fonctionnement du cerveau des consommateurs soulèvent de nombreux fantasmes souvent liés à une méconnaissance des possibilités et limites des techniques neuroscientifiques. De la même façon, nier les bénéfices apportés par les recherches scientifiques est tout aussi préjudiciable notamment pour améliorer la prévention en santé publique (Oullier, Sauneron, 2010 ; Petit, 2014).

Enfin, il semblerait que les avancées technologiques que nous avons abordées précédemment ne permettront jamais de faire l’économie de la prise en compte de données comportementales et socio-économiques. Il apparait alors judicieux de coupler l’utilisation des ces techniques de neuro-imagerie à des données comportementales. De plus, les données sur le fonctionnement du cerveau utilisées pour mieux appréhender le comportement du consommateur apparaissent que peu utiles en l’absence de contextualisation.

Paul D. MacLean, Brain Evolution: The Origins of Social and Cognitive Behaviors, Journal of Children in 24

Contemporary Society, Vol. 16: 1-2, 1983.Page � sur �34 59

2. Une communication sur-mesure : l’adaptation du marketing aux besoins inconscients du consommateurs

Ainsi nous avons pu aborder précédemment que le neuro-marketing, issu des sciences cognitives et des neurosciences, présente de précieux indicateurs pour les publicitaires dans la conduite de leurs campagnes marketing. En effet, nous avons pu observer que les récents progrès scientifiques en matière de techniques médicales d’analyse du cerveau, offrent une analyse scientifique très pointue des comportements et habitudes des consommateurs et futurs clients. A travers les IRM, les électro-encéphalographie (EEG), les tests oculaires ou bien d’autres méthodes d’analyse du comportement cérébral, les publicitaires saisissent et comprennent les attitudes de la clientèle. Les odeurs, les émotions, les couleurs et les réactions instinctives ou inconscientes sont décodées dans une optique marketing afin d’épouser au mieux les attentes des consommateurs.

Cette mesure très exacte de l’impact émotionnel suscité par la publicité et le marketing permet aux organisations de mesurer le degré d’efficacité de leur campagne publicitaire. Selon les zones du cerveau stimulées par une publicité ou une offre promotionnelle, le neuro-marketing permet d’étudier les différentes réactions des sujets comme au travers des expressions du visage, la stimulation de tel ou tel hémisphère du cerveau. Ces analyses vont alors impacter le lancement d’un produit et la communication réalisée autour de celui-ci. En effet, l’activité cérébrale est différente selon de nombreux aspects propres à la personnalité de chaque consommateur comme l’influence d’une couleur, d’un logo de marque, d’une odeur ou encore d’un son. Selon les stimuli provoqués par les outils du neuro-marketing au sein d’un groupe ou d’une catégorie de consommateurs identifiée, les marques et les organisations adapterons leur communication.

Les techniques scientifiques d’imagerie médicale montrent ainsi que la couleur peut alors être perçue par le consommateur comme un indice central ou périphérique lors de son expérience d’achat. Par exemple, la couleur bleutée d’un paquet de café présentera un indice central dans le sens où l’individu associera cette couleur au fait qu’il soit décaféiné. A l’inverse, les couleurs acidulées présentes sur les ordinateurs iMac d’Apple lors de son lancement, étaient davantage des indices périphériques mais permettaient une identification de la gamme d’ordinateurs et de la marque. Naturellement, les caractéristiques individuelles et personnelles du consommateur interviennent dans la prise en compte de ce facteur visuel comme l’ont montré Crowley

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et Hoyer en 1989. Les traits de personnalité, les propensions comportementales ou 25

cognitives vont influer sur l’appréciation de cet indice chromatique par le consommateur.

Dans un but de focaliser notre attention sur des choses en particulier, nous allons concentrer notre attention toute entière sur certaines choses et nous désintéresser d’autres. Il existe 2 types d’attention dans le comportement d’un consommateur. Tout d’abord, nous remarquons l’attention «  top-down  » qui se remarque, par exemple, lorsque nous prévoyons de chercher quelque chose dans un magasin. Ce comportement fait appel aux fonctions du cortex pré-frontal (l’intelligence) et du cortex pariétal (l’attention) qui s’activent et donnent en quelque sorte l’ordre au cortex occipital (siège de la vision) de s’activer.

Ensuite, nous remarquons également l’attention que nous qualifions de « bottom-up » qui intervient lorsque nous trouvons quelque chose dans le magasin par hasard et que nous décidons si nous l’achetons ou non. Dans cet environnement, le contraste, la densité, la luminosité et le mouvement attirent automatiquement l’attention. Nous observons que le signal visuel est d’abord envoyé vers le Thalamus qui envoie un traitement vers le cortex occipital (vision) puis vers le cortex pré-frontal pour une interprétation éventuelle. Ainsi, nous comprenons ici que l’attention visuelle est régulièrement sollicitée et peut également être déclenchée par les publicités et notamment l’information chromatique.

Crowley and Hoyer (1989) ,"The Relationship Between Need For Cognition and Other Individual 25

Difference Variables: a Two-Dimensional Framework", in NA - Advances in Consumer Research Volume 16, eds. Thomas K. Srull, Provo, UT : Association for Consumer Research, Pages: 37-43.

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III. Les couleurs au coeur des sciences de gestion

Après avoir analysé, décrit et défini la couleur selon différents angles et disciplines, nous sommes en mesure de l’aborder dans un contexte de gestion. En effet, bien que cela puisse paraître surprenant, la couleur est omniprésente dans les activités de l’entreprise et dans la gestion des ressources humaines. Elle apparaît, dans un premier temps, utilisée par l’entreprise comme un vecteur attentionnel. En d’autres termes, la couleur est utilisée dans les entreprises comme un élément visuel permettant une capture de l’attention comme nous l’avons évoqué précédemment dans notre analyse. Il s’agit ici d’analyser la façon dont les couleurs sont envisagées comme des facteurs de productivité, de créativité et comment elles interviennent dans les processus de recrutement.

A. La couleur au coeur de la productivité des organisations

1. La couleur et la création d’ambiance de travail propice au bien-être des salariés

Ainsi, selon Stone (2003) la couleur qui domine dans un espace de travail est 26

« un facteur qui peut impacter sensiblement l’humeur, la satisfaction, la motivation et la performance ». Les couleurs « chaudes » et « froides » auront un impact très différent sur les travailleurs d’une organisation. Wineman (1979) montre que les «  couleurs 27

ambiantes chaudes » focaliseront davantage l’attention et la conscience des travailleurs vers l’extérieur tandis que des « couleurs ambiantes froides » focaliseront leur attention vers l’intérieur favorisant des tâches visuelles ou mentales.

En effet, si elle est en partie un signe, la couleur est avant tout un facteur d’influence de nos comportements et de notre humeur. Selon Jean-René Blin dans La 28

couleur source d’énergie fonctionnelle : « Le véritable rôle des couleurs fonctionnelles dans un univers où l’homme est devenu un étranger, est de procurer aux êtres humains une sensation de détente cérébrale et de repos psychique, car le rythme de la vie moderne est en disharmonie avec la vie intérieure des êtres. Ce déséquilibre procure une inadaptation profonde de l’être à son milieu et de ce fait, nous devenons nerveux et

Stone, Environmental View and Color for a Simulated Telemarketing Task, Journal of Experimental 26

Psychology, vol. 23 (1), March 2003, p 63-78.

Wineman J. D., Color In Environmental Design: Its Impact On Human Behaviour, Environmental Design 27

Research Association, vol. 10, 1979, p 436–439.

Jean-René Blin, « La couleur source d’énergie fonctionnelle », art. cité, p. 6228

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instables. Les lumières, les couleurs et les sons peuvent transformer une ambiance de travail. […] Étant donné que le salarié passe une grande partie de sa vie dans le cadre du travail, il faut rendre ce cadre agréable pour qu’il soit mieux supportable. »

Dès lors, nous sommes amenés à nous interroger sur l’influence de la couleur sur nos états psychologiques et sur son impact quant à notre productivité. Il apparait alors que ce « pouvoir » de la couleur soit modulé par l’intensité de la teinte et sa longueur d’onde. Différentes études scientifiques ont mis en évidence les correspondances existantes entre les couleurs et les états psychologiques. Ainsi, Saffre montre que les 29

violets et indigos sont considérés comme «  tristes  », les bleus et les verts comme « reposants », les jaunes et orangés comme « toniques » tandis que les orangés-rouges et les rouges sont perçus comme « excitants ». Saffre montre cependant que l’intensité de la teinte fait varier la tonalité du sentiment éprouvé.

L’ambiance peut quant à elle se définir comme un «  tout  », une combinaison d’éléments dont les propriétés n’auront que des valeurs relatives et tiendront à la justesse de leurs assemblages. Néanmoins il semble que l’ambiance ressentie dans les organisations participe pleinement à une relation de communication subjective avec le milieu. En utilisant judicieusement la couleur pour les tissus des sièges, ou ceux plaqués sur les murs, les organisations pourraient alors baisser la fatigue engendrée par la monotonie du travail de bureau. La palette de couleurs participerait ainsi au «  climat psychologique » présent dans l’entreprise et au confort mental des employés.

Selon Jean-René Blin il existerait un lien entre l’exposition répétée à certaines couleurs et la modifications profondes de structures psychiques chez les individus. En effet, il distingue deux principaux groupes de couleurs. Le premier est constitué de «  trois radiations mineures » qui apporteraient une certaines détente sur les lieux de travail. Le second groupe identifié rassemble des couleurs d’hyperactivaiton physiologique et cérébrales valables pour des travaux lents et monotones dans une ambiance silencieuse. Blin affirme ainsi que les couleurs issues de ce second groupe augmenteraient l’hyperactivité des glandes thyroïdes et des glandes de générescence qui sont le symbole d’un état psychologique de surexcitation et d’énervement de longue durée, suivi d’une grande fatigue cérébrale. Il apparait alors que la couleur touche au plus profond de l’organisme et oriente l’attention et l’intensité psychique portée vers le travail.

E. Saffre, «  Ambiances colorées, confort visuel et climat psychologique  », Hommes et techniques, 29

numéro cité, p. 120-121.Page � sur �38 59

2. Expériences de la couleur en organisations : une influence vérifiée

Il apparait que le pouvoir des couleurs en entreprise n’est pas anodin : chaque couleur stimule différemment l’humeur et l’état d’esprit des employeurs. Les couleurs constituent alors un outil psychologique très efficace dans les organisations et son pouvoir doit être mesuré par celles-ci afin de mettre en place un environnement propice au bien-être. La couleur affecte les prises de décisions, la productivité, la créativité et la communication.

Si pendant de nombreuses années, le monochromatisme, a largement été utilisé en entreprise, il semblerait qu’aujourd’hui il y ait un nouvel élan pour les couleurs. Il a été montré que les ambiances achromatiques avec du blanc et du gris étaient à éviter car elles pouvaient impacter négativement la créativité et le moral des salariés (Brigitte Boussuat , 2017). En effet, il a été montré que cette «  pauvreté chromatique  » 30

augmenterait de 15% le risque de burn-out et diminuerait la productivité. Brigitte Boussuat, experte sur l’influence comportementale des couleurs, préconise de les utiliser pour teinter «  positivement  » nos espaces de travail. Selon elle, les couleurs créeraient des ambiances dynamisantes ou apaisantes. Par exemple le rouge est une couleur particulièrement stimulante et excitante pour les organisations et, à l’inverse, le bleu et le vert sont des couleurs perçues comme « apaisantes ». Idéalement, le bureau de demain sera donc composé d’espaces colorés tirant parti de toute la palette chromatique et assignés à des tâches et des moments particuliers.

Autre exemple : les couleurs jaune ou orange favoriseraient ainsi les prises de décision. La couleur orange serait également adéquate pour favoriser la communication en entreprise. Le bleu favoriserait la créativité et est idéal dans les métiers qui demandent d’être créatif comme les graphistes, les architectes, etc. Il doit cependant être associer avec des couleurs comme le rouge, le rose ou le jaune afin que son potentiel maximum soit utilisé. Le vert quant à lui possède des propriétés relaxantes et est utilisé pour favoriser la concentration en entreprise. C’est une couleur qui peut facilement être intégrée en entreprise via notamment les plantes.

Un autre exemple atteste de l’influence de la couleur sur l’environnement et nos perceptions. Si nous observons deux pièces en tous points semblables à l’exception que l’une est peinte dans un ton dit « chaud » et l’autre dans un ton «  froid », nous aurons l’impression que la température ambiante de la première sera de quelques degrés plus

Bossuat, David, Lagache, Pour un management humain, agile et durable, Collection : Management/30

Leadership, Dunod, juin 2017. Page � sur �39 59

élevée que la température de la seconde. Ainsi, comme cet exemple du ressenti, l’utilisation des couleurs en entreprise nécessite de faire prédominer la sensation sur la réalité physique. Il s’agit finalement de participer au bien-être des salariés dans un état de neutralité qui ne puisse pas perturber la concentration induite par la tâche à accomplir. De la même façon que la température, la couleur doit délester le corps d’un effort d’adaptation à son environnement : ne pas le mettre en désaccord avec son milieu. Dès lors, nous pouvons comprendre ici que les couleurs touchent au plus profond de l’organisme, source d’énergie psychique orientée vers le travail et l’intensité de l’attention.

B. La couleur utilisée dans les processus de recrutement

1. Les tests psychologiques fondés sur la couleur

Rappelons ici que depuis plusieurs années, les entreprises et des cabinets de

conseils s’appuient sur de nombreux tests psychologiques afin d’évaluer les capacités et les potentiels de la personnalité de leurs salariés. Ces tests de personnalité sont également utilisés pour évaluer les profils des candidats lors de certains recrutements. Une partie de ces tests psychologiques exploitent les couleurs pour tirer des conclusions sur la force de productivité des travailleurs, visant à cerner des traits de personnalité ou à évaluer des capacités cognitives comme la mémoire immédiate par exemple. En effet, comme nous l’avons déjà évoqué en première partie de cette présente revue de littérature, selon Kreitler (1972) «  la couleur est un facteur qui fait appel aux couches irrationnelles profondes de la personnalité ».

Parmi les différents testes qui existent nous pouvons citer le « test d’anxiété » mis au point par Max Lüscher (Lüscher, 1969 ; 1992) et le « Color Pyramid Test » (CPT) créé en 1950 par Max Pfister et qui sera normalisé par Schaie et Heiss en 1964. Le test de Lüscher est régulièrement employé par les organisations pour sélectionner les candidats. Ainsi, le test des couleurs de Lüscher consiste pour le sujet ou le candidat à classer dans l’ordre qui lui convient, les huit couleurs présentées sur de petits cartons. L’ordre choisi, de la couleur préférée à la couleur la moins aimée, sous-tend les traits de personnalité de l’ordonnateur, selon Lüscher. Ces couleurs sont : le gris, le bleu, le vert, le rouge, le jaune, le violet (ou rose), le marron et le noir. Selon Yvernault , les couleurs 31

permettraient de révéler un aspect de la sensibilité des candidats : les deux premières

Yernault., Les Tests De Recrutement Qui Peuvent Vous Eliminer, Capital N°142, Juillet 2003, p 106- 109. 31

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couleurs indiqueraient ainsi les «  désirs profonds  » tandis que les deux couleurs les moins appréciées présenteraient les tensions subies. Les couleurs primaires, à savoir le jaune, le vert, le bleu ou le rouge devraient arriver en tête car les placer en fin de classement suggèrerait que le candidat est stressé ou déprimé (Yvernault, 2003). Le cabinet Alphamanager interprète ainsi le classement des couleurs effectué par les candidats (tableau ci-dessous).

Tableau d’analyse des couleurs - Test de Lüscher - Cabinet Alphamanager

Autre test parfois utilisé lors des processus de recrutement : le test de Rorschach. En effet, bien que ce test soit davantage utilisé en psychiatrie ou psychanalyse, il arrive parfois que celui-ci dépasse la sphère purement clinique. Le test de Rorschach nécessite dix planches sur lesquelles sont reproduites différentes tâches d’encre en noir ou en couleur. Celles-ci sont symétriques car elles ont été obtenues par le pliage d’une feuille papier. Au cours de ce test, la personne doit indiquer ce que lui évoque chacune des tâches, soit dans son intégralité, soit pour l’une de ses parties seulement. Ensuite, le psychologue doit pouvoir déterminer, à partir des résultats obtenus, les principales

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Couleur choisie Signification si la plus aimée

Signification si la moins aimée

Fuschia Influençable et sensible

Aime prendre les décisions

Gris Réservée et prudent Aime les défis, ne supporte pas la critique

Brun Déteste les difficultés et fuit les problèmes

Loyal, donne le meilleur de lui-même

Bleu Aime le calme, règle les conflits

Inquiet et insatisfait : repli sur soi-même

Orange Énergique et plein de vitalité, dynamique

Facilement irritable, tendance à la paranoïa

Vert Ambitieux, veut s’affirmer

Stressé, surmené, mérites insuffisamment reconnus

Jaune Plutôt rêveur que pragmatique, avenir idéalisé

Voit l’avenir en noir : promotion refusée

Noir Déprimé, agressif, supporte mal l’autorité

Déterminé, efficace, rigoureux, capacités d’analyse

composantes du caractère du sujet : s’il est introverti ou davantage extraverti, s’il possède une intelligence organisatrice et productive, etc. Cette interprétation est fondée selon différents critères comme le fait que sujet s’intéresse davantage à la forme de la tâche, si la tâche est colorée ou si les conclusions qu’il élabore à partir de la forme sont négatives ou positives. Nous avons retranscrits les potentielles interprétations issues du test de Rorschach dans le tableau ci-dessous :

Tableau d’interprétations des personnalités sous-jacentes selon les descriptions couleur/forme dans le test de Rorschach

2. Limites de la fiabilité des tests basés sur la couleur dans les processus de recrutement

Ainsi, le recours aux tests qui se basent sur la couleur, semble largement se diffuser en entreprise et dans les processus de recrutement. A partir des résultats obtenus et d’une méthode très formalisée, le psychologue va déterminer les principaux traits de caractères propres au sujet : s’il s’agit d’une personne introvertie ou si elle possède une intelligence organisatrice… Dès lors, il apparaît que l’interprétation faite verbalement par le sujet sera catégorisée et influencera le recruteur.

Pourtant, accorder une importance trop grande aux résultats obtenus de ces tests peut s’avérer préjudiciable. En effet, en se basant sur les interprétations exprimées par le candidat, nous déduirons s’il est plus réactif que d’autres personnes, avec des objectifs réalistes ou non, ou s’il s’agit de quelqu’un d’influençable ou de peu rigoureux.

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Interprétation donnée par le sujet Code utilisé Analyse

Forme + tonalité positive F+ Esprit capable d’apprécier correctement les choses. Doué et appliqué

Forme + tonalité négative F- Manque d’intelligence voire souffre de retard mental

Forme + couleur FC Sujet objectif capable de dominer ses émotions et réaliste

Couleur + forme CF Sujet influençable ou caractère changeant et manquant de rigueur

Couleur seule C Risque de conflit : sujet pouvant devenir incontrôlable et très irritable

Stevens (1993) appelait déjà à la prudence « pour les cliniciens qui auraient à évaluer 32

les styles de modulation affective chez les sujets modérément atteints, fondés sur la théorie traditionnelle de l’interprétation couleur-affect ». Nous comprenons ici que l’importance accordée aux couleurs dans le processus de recrutement par les organisations doit être nuancée. Accorder trop d’importance aux résultats de ces tests psychologiques écarterait certains candidats qui pourraient cependant correspondre aux missions demandées. Les tests psychologiques fondés sur les couleurs doivent être davantage utiliser comme d’éventuels indicateurs.

Par ailleurs, le développement de cette catégorie de tests dans les processus de recrutement a donné naissance à de nombreux articles sur internet qui dispensent des conseils afin de «  répondre correctement  ». Ainsi, nous pouvons douter de la spontanéité des réponses des candidats et nous inquiéter de l’importance donnée à des réponses préalablement réfléchies. En effet, les articles que nous pouvons trouver sur Internet prodiguent des conseils relatifs au test de Rorschach par exemple. Nous trouvons des conseils comme « ne restez jamais muet devant une tâche », « évitez de donner trop de représentations organique  », «  essayer d’équilibrer entre les représentations humaines et animales ». Ces consignes nous laissent ainsi perplexes et nous interrogent encore une fois sur le bien-fondé de telles pratiques en entreprise concernant le recrutement. Pour conclure sur ce paragraphe, nous pourrions dire que les entretiens de recrutement doivent faire prévaloir les réalisations ou expériences d’un candidat plutôt que de faire prévaloir ses goûts ou attirances personnelles en matière de couleur.

C. Manager par les couleurs

La couleur présente enfin un grand intérêt pour les sciences de gestion. Par exemple, la gestion des ressources humaines est concernée puisque « un grand nombre d’expérimentations in vivo ont montré que le choix des couleurs exerçait une influence sur la productivité, le sentiment de fatigue du personnel, l’état moral, la sécurité et l’absentéisme » (Déribéré, 1996) . 33

Stevens, Edwards, Hunter Bridgman, An Investigation of the Color-Affect Hypothesis in Exner’ s 32

Comprehensive System, Perceptual and Motor Skills, vol. 77, 1993, p 1347-1360.

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1. Théorie des couleurs et sciences de gestion

La théorie des couleurs se base sur l’observation des comportements des individus et est issue de divers travaux de psychologues et comportementalistes. «  Manager par les couleur  » est un ouvrage écrit par Patrick David, expert en management et qui nous permet de comprendre de quelle façon une utilisation adéquate des couleurs en entreprise favorise une bonne communication. La théorie des couleurs définit ainsi quatre grandes familles comportementales symbolisées par les couleurs. Nous trouvons d’abord la couleur rouge qui symbolise la rapidité, le sens du défi, la volonté de réussir, l’autonomie, l’exigence et l’esprit de conclusion. Le jaune quant à lui représentera les individus conviviaux, optimistes, créatifs, avec de l’enthousiasme et une aisance orale. Le bleu est interprété comme la précision, la rigueur, l’organisation, la planification, la recherche de perfection, le respect des normes et des règles. Enfin le vert est associé aux personnes calmes, discrètes, qui sont fiables et stables. A travers l’observation des attitudes des employés au sein d’une entreprise, nous pouvons repérer des comportements préférentiels. L’utilité de cette démarche est de pouvoir moduler sa communication en fonction de notre interlocuteur afin que celle-ci soit la plus convaincante et adaptée possible.

Aujourd’hui, la théorie des couleurs est une méthode très utile en ressources humaines pour «  gérer  » ses collaborateurs de façon appropriée. Le travailleur ne s’adapte plus autant à l’organisation que par le passé mais l’organisation s’adapte à lui notamment au travers de sa communication. Ainsi, un manager commercial qui sait déléguer confiera à un commercial « rouge » une mission importante avec obligation de résultat, présentée comme un défi et à un commercial « jaune », l’animation d’une sortie ou d’un challenge qui fera appel à sa créativité. Pour une mission de confiance ou de fidélisation, les managers solliciteront davantage un commercial « vert ». Les employés « bleu » se verront davantage confier des études comparatives ou l’analyse précise et structurée d’un marché ou d’un concurrent. Les enseignements issus de la théories des couleurs permettent ainsi une identification des potentiels de chacun et favorise la cohésion de groupe en organisation.

Patrick David, explique ainsi qu’un manager «  rouge  » pilotera son équipe de façon directive et fixera des objectifs ambitieux et des performances de haut niveau. A l’inverse, un manager «  jaune  » revêtira un aspect beaucoup plus «  animateur  », résolument optimiste, il entretiendra avec ses collaborateurs, une relation bienveillante et détendue. Le manager vert se montrera quant à lui particulièrement bienveillant, emphatique et accordera une place importante à la discussion et à la participation de

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ses collaborateurs. Ainsi, nous pouvons identifier des traits de caractère dominants dans la personnalité de chacun des employés et qui n’aboutirons pas aux mêmes résultats. Cette richesse de profils identifiée doit être conjuguée à une communication et un management sur-mesure. En effet, la gestion des ressources humaines qui naît de cette richesse et diversité de profils doit être capable de révéler le potentiel de chacun et favoriser les synergies. Cette méthode permet d’adapter le langage, les comportements et tactiques à chaque collaborateur ou situation. Elle offre un management personnalisé et individualisé. Il existe ainsi un comportement colorisé pour chaque mission managériale. Par exemple, le jaune sera utilisé pour les missions d’animation dynamiques et motivantes ou des actions originales qui transmettront un climat positif à l’équipe. Le bleu sera quant à lui, utiliser pour mettre en place des plans d’actions structurés ou rédiger des comptes rendus de réunions. Pour mener des entretiens annuels d’évaluation, les organisations devraient privilégier le vert, également utilisé pour former ses équipiers er promouvoir les valeurs de l’entreprise. Enfin, le rouge permettra de motiver et d’encourager les membres d’une équipe. Parmi les méthodes comportementales, celles qui ont recours aux couleurs permettent aux managers de gagner en efficacité. Grâce aux couleurs, il apparaît que le manager découvre ses atouts, ses axes de progrès, ses zones de confort et d'inconfort.

2. La couleur et l’amélioration de la communication dans les organisations

Plus récemment, la ville de la Rochelle a fait l’expérience du management par les couleurs pour certains services de la ville. Adapter sa communication à son interlocuteur : tel est le principe du management par les couleurs. En partant du DISC de Maston ou 34

« langage des couleurs », la ville de la Rochelle entend adapter sa communication à son interlocuteur. Cet outil d’analyse comportementale, développé à partir des travaux du psychologue américain William Moulton Marston, classe les comportements en quatre grands types de profil : dominant, influent, stable et conforme (DISC).Nous retrouvons ici une application de ce que nous évoquions plus haut : une identification du profil et du potentiel des employés.

Selon lui, chaque personne se comporte différemment par rapport à son environnement en 34

fonction de : - La perception qu'il en a : hostile / favorable - L'action qu'il a envers lui : l'accepter tel quel / agir dessus

Lorsque ces deux axes (perception et action) sont placés de façon orthogonale, apparaissent alors 4 styles comportementaux qui permettent une vision prédictive des besoins et zones de confort de la personne.

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Image du Disc de Maston 35

La méthode s’adresse aussi bien aux managers qu’aux agents qui souhaitent améliorer la communication avec leurs collègues voire avec leurs proches. Cette méthode permet de prendre conscience de son propre mode de fonctionnement et s’avère être particulièrement utile pour communiquer et manager en organisation. En effet, ce travail par les couleur permet de pouvoir adapter sa communication au profil de son interlocuteur, en fonction de ce que nous connaissons de sa zone de confort et de ce qui le déstabilise.

Ainsi, les conclusions tirées de cette expérience permettent de soutenir que les profils « bleus » seraient dotés d’une excellente capacité d’analyse tandis que les profils dits «  verts » seraient davantage réceptifs au travail en équipe. Les profils «  jaunes » seraient expansifs et les « rouges » travailleraient rapidement et seul. « Cette approche sert à mieux se connaître, à mieux anticiper les réactions et à mieux gérer les interactions avec les autres » explique Thomas Gautronneau , assistant administratif au 36

sein du service «  eau potable  ». L’utilisation du DISC de Marston limite les sources

Image issue du site web : https://www.disc-marston.com35

Témoignages recueillis dans l’article rédigé par Maud Parnaudeau, A chaque collaborateur, une couleur 36

qui guide l’encadrant, publié le 07/02/2019, La Gazette.Page � sur �46 59

d’incompréhension et de tension. « La connaissance de la couleur permet de prévenir les problèmes en évitant les choses qui fâchent  » commente Danièle Dumont, responsable du service « eau potable ».

Par ailleurs, concernant la bonne conduite des réunions en entreprise ou lors de gestion participative, il existe un outil pédagogique qui peut être parfaitement adapté aux cercles de groupe. Il s’agit ici de «  l’abaque de Régnier », qui consiste à exprimer une position, un degré d’accord ou de désaccord par un vote coloré, également appelé «  vote colorimétrique  ». L’Abaque de Régnier est une méthode originale de communication qui concerne l’information qualitative et permet à chaque participant d’exprimer son opinion par la visualisation de couleurs sur un thème donné. Elle est tout à la fois un outil de sondage, de diagnostic d’une situation par les acteurs de terrain et une aide à la prise de décision dans une démarche fondée sur la participation, la concertation et le consensus.

Cet outil permet alors d’exprimer cinq degrés d’assentiment différents à travers le vert foncé, le vert clair, le jaune, l’orange et le rouge représentant le continuum accord complet jusqu’au désaccord complet, auxquels s’ajoutent le blanc et le noir. L’affichage de plaques colorées correspondantes permet de visualiser et de se représenter intuitivement la position ou le consensus d’un groupe. Les couleurs apparaissent donc utiles à une fonction essentielle du management : la prise en considération des avis de chacun des membres du groupe. En effet, l’abaque de Régnier favorise une participation active de l’ensemble des individus d’un groupe et facilite les échanges et la mise en commun des points de vue sur un certain nombre d’objets, de propositions ou d’idées.

A travers, l’utilisation et l’exploration des couleurs, cet outil managérial permet également d’explorer le potentiel intuitif, associatif ou conceptuel d’un groupe. Rendant possible l’expression d’avis opposés, l’abaque de Régnier nécessite certaines règles d’application qui doivent être respectées par l’animateur. Celui-ci doit notamment veiller au respect du temps de parole de chacun ainsi que de s’assurer que les choix soient individuels et non influencés. Enfin, l’abaque de Régnier permet l’expression de votes nuancés à l’intérieur d’un même groupe ou sur un réseau plus étendu grâce à des logiciels d’implémentation de l’Abaque et notamment de la plateforme Colorvote. Ces innovations technologiques permettent ainsi de former une image à distance, par le vote en ligne sur internet, à partir d’individus dispersés sur la planète mais appartenant à la même organisation.

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CONCLUSION

L’exercice de recherche sur l’utilisation des couleurs en communication et en sciences de gestion, que nous avons engagé tout au long de ces pages nous conduit à porter un regard nuancé sur les couleurs. Comme nous l’annoncions en introduction, notre objectif était de comprendre l’influence de la couleur sur les attitudes et comportements de l’individu et du consommateur mais au-delà, il s’agissait de décrypter les imbrications pouvant exister entre la couleur et l’homme. L’objectif de cette présente revue de littérature était de porter un regard critique sur le rapport existant entre les couleurs et les émotions, les intuitions et le consommateur du XXIème siècle. Pour ce faire, nous avons passé en revue les différentes implications de la couleur aussi bien en communication qu’en sciences de gestion afin d’en confronter les résultats.

Analyser et apporter des éléments de preuve à travers les recherches neuroscientifiques, nous a permis d’éclairer nos constatations et d’expliciter certains comportements ou réactions de consommateurs dans des contextes d’achat ou de consommation. Nous avons également tenu à évoquer dans une dernière partie, les utilisations de la couleur en management et ressources humaines. La couleur apparaît comme un nouvel outil pour la gestion qui s’opère au sein des organisations. Par rapport à d’autres travaux ou thèses qui focalisent leur analyse sur une application marketing de la couleur, nous nous sommes efforcés de proposer une analyse de la couleur sous différents aspects.

Notre revue de littérature, si elle apporte des éléments de réponses et de réflexion à la problématique de la couleur en marketing, elle n’avance pas de solutions «  toutes faites  » ou des règles intangibles quant au recours des couleurs dans des contextes commerciaux. La conduite de ce travail de recherche a souhaité explorer la couleur sous différents aspects, dans son intégralité et non sous un angle purement marketing. La présente revue de littérature apporte ainsi une approche générale, actualisée et synthétisée sur l’influence des couleurs dans notre environnement, circonscrite par le cadre explicatif des neurosciences.

Ce travail de recherche, préliminaire à la réalisation d’une vidéo de vulgarisation, nous a ainsi permis de dessiner les contours de notre analyse et de montrer l’importance de la couleur dans les sphères de la communication, du marketing, de la

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psychologie du consommateur et dans les sciences de gestion. Nous nous sommes ainsi appropriés les multiples enjeux revêtis par la couleur. A travers la rédaction de cette revue de littérature nous avons pu mesurer cette influence d’un point de vue cognitif, sur la mémorisation et les réactions affectives déclenchées par la couleur. Réaliser une vidéo de vulgarisation devrait permettre de synthétiser l’ensemble des enseignements tirés de ce travail de recherche et les transmettre de façon pédagogique.

Enfin, nous ne pouvons nier les limites inhérentes à l’approche que nous avons adoptée. En choisissant de traiter l’influence de la couleur dans son intégralité, nous avons écarté un ensemble d’éléments empiriques et scientifiques qui auraient permis d’appuyer nos assomptions théoriques. Introduire les résultats d’expérimentations scientifiques très pointues, relatifs à la couleur pouvait s’avérer particulièrement intéressant. Cependant, cela risquait également de brouiller les pistes de compréhension d’un public peu familier aux sciences et à la l’interprétation de ces résultats. Une telle entreprise, semblable à celle réalisée par Bernard Roullet, nécessiterait de pouvoir réaliser des expérimentations scientifiques, ce que les limites du format de cette présente revue de littérature ne permettaient pas.

Concernant les voies futures de recherche dans le domaine des couleurs, nous voyons aujourd’hui naître des simulations de magasin virtuel en trois dimensions dans une perspective publicitaire. Des laboratoires travaillent déjà à la modélisation d’espaces commerciaux et de linéaires virtuels, ainsi qu’à la numérisation 3D de packagings réels, manipulables virtuellement grâce à des gants sensoriels. Une autre voie concerne l’étude des interactions entre différents stimuli sensoriels comme la couleur et la foule, la couleur et les odeurs, etc. Il semblerait ainsi que l’influence de la couleur n’ait pas fini de susciter les interrogations.

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