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description

Depuis 2001, avec l’accompagnement de l’Éducation nationale sur le plan pédagogique, le Conseil général des Landes confie un ordinateur personnel portable à chaque collégien de 4e et de 3e, et à chaque enseignant des 35 collèges publics du département. Cet ouvrage se veut être un retour sur les huit années d’innovations de cette opération – nommée “un collégien, un ordinateur portable”.

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L’opération “un collégien, un ordinateur portable”répond à quatre objectifs complémentaires :– relever les défis de l’égalité, en assurant l’égal accès des élèves

à ces outils dont la maîtrise leur sera indispensabledans leur vie professionnelle et citoyenne ;

– favoriser l’émergence de nouvelles pratiques pédagogiques ;– diffuser la “culture” de ces techniques dans tous les foyers landais ;– développer l’attractivité des Landes afin d’attirer

les opérateurs de télécommunications dans un département rural où la seule logique économique ne les conduirait pas.

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à la mémoire de François-Xavier Benusiglio

disparu brutalement le 2 octobre 2009, à l'âge de 54 ans.

Directeur de l'éducation, de la culture et du patrimoine

au Conseil général des Landes,

il fut l'une des chevilles ouvrières de cette opération.

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Sommaire-----Henri Emmanuelli, président du Conseil général des Landes..................9

-----# 1. PortraitsPhotographies de Vincent Monthiers 2006-2009 .....................................17

-----# 2. Points de vuePierre Lacueille ............................................................................................51Mario Asselin ...............................................................................................59Seymour Papert ...........................................................................................64Bruno Devauchelle .................................................. ....................................66Céline Metton-Gayon..................................................................................71Marie Bruneau, Bertrand Genier ...............................................................76

-----# 3. Au collège3-1. Langues vivantes ..................................................................................823-2. Français et langues anciennes.............................................................1003-3. Histoire et géographie.........................................................................1183-4. Éducation à l’information ...................................................................1303-5. Sciences .................................................................................................1423-6. Mathématiques ....................................................................................1623-7. Technologie ..........................................................................................1783-8. Éducation physique et sportive (EPS) ........................................... ......1883-9. Arts plastiques et éducation musicale................................................1923-10. Unités pédagogiques d’intégration .................................................2083-11. Ateliers, travaux de groupe et classes à projets ..............................2163-12. Gestion de la vie scolaire...................................................................232

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-----# 4. Ce qu’ils en disent4-1. Enquête TNS-Sofres 2009 ....................................................................2424-2. Témoignages ........................................................................................2574-3. Regarder voir........................................................................................273

-----# 5. Documents5-1. École et ordinateur, repères historiques ............................................2905-2. Un collégien, un ordinateur portable ................................................302– historique de l’opération landaise ..........................................................308– les moyens.................................................................................................310– la logistique ..............................................................................................314– le comité de pilotage ...............................................................................314– liens sur internet et bibliographie sommaire .........................................316– remerciements ..........................................................................................318

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-----Nous avons obtenu des résultats. Sont-ilsévidents? Personnellement – et c’est peut-être une histoire de tempérament –, jetrouve que cela ne va pas assez vite. Jecontinue cependant à penser qu’il faut per-sévérer, qu’il faut améliorer, que d’ailleursil faudra peut-être étendre à d’autres caté-gories, en dehors de l’école, l’accès à cetoutil qui progresse très vite.»

Henri Emmanuelli est député, président du Conseil général des Landes-----Comment en êtes-vous venus à cette idée de doter chaque élève de 4e et de 3e descollèges publics du département des Landes d’un ordinateur portable?HENRI EMMANUELLI : Cela fait déjà assez longtemps que, dans ce départe-ment des Landes, les élus ont pensé que l’outil informatique serait utileaux enfants, pour deux raisons. D’abord une raison pédagogique – il re-présente de nouveaux moyens d’apprendre –, ensuite parce que notreconviction était que les enfants avaient tout intérêt à maîtriser cet outilpour leur avenir professionnel, y compris dans ses usages extra-scolaireset extra-pédagogiques.En France, la première expérience de ce type remonte, je crois à 1983; elleavait été menée dans un autre département, celui de l’Isère, où Louis Mermaz avait introduit dans les écoles primaires – et non pas dans les col-lèges – les fameux ordinateurs T07 et M05. Expérience intéressante parceque ces machines (qu’on peut considérer aujourd’hui comme assez pri-maires) permettaient de s’initier à l’informatique mais aussi à la pro-grammation – ce qui ne se fait plus du tout aujourd’hui: nous utilisons tousun micro-ordinateur sans nous préoccuper de la manière dont la machinefonctionne. L’idée a ensuite été reprise en 1985 au plan national1.

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Ce plan “Informatique pour tous” était assez exceptionnel, même s’il aconnu des résultats assez variés… Je veux dire par là qu’on a aussi re-trouvé beaucoup de ces ordinateurs dans les placards, et qu’ils n’ont pastous beaucoup servi. Dans les Landes, j’avais décidé, à cette époque, quel’on doublerait la dotation matérielle de l’État et, puisqu’il s’agissait déjàde maintenir en état de fonctionnement ces outils informatiques, nousavons créé l’Association landaise pour l’informatique (ALPI) à laquelle lescommunes et les écoles qui le souhaitaient ont adhéré. Cet aspect-là duplan “Informatique pour tous” a très bien fonctionné et cette associations’est, depuis, transformée en syndicat mixte qui fournit toujours à ses ad-hérents des prestations de maintenance, dispense des formations infor-matiques, s’occupe de la dématérialisation des procédures administra-tives, etc.C’est ainsi que je me suis mis à l’informatique, en travaillant dur le soirpour ne pas avoir l’air idiot auprès de ma fille qui était à l’école primaire,et en me disant : « Il faut que j’en sache au moins autant qu’elle.» J’avaisréussi, au bout de deux mois, à faire un petit logiciel où un avion passait– c’était assez basique – et lâchait une bombe sur une maison qui explo-sait… ou pas, si on la ratait. Au bout de trois mois, on arrivait à faire cela,et c’était assez extraordinaire.Il y eut ensuite, en 1996 ou 1997, un plan départemental d’équipement etde raccordement à internet des classes de CM2. Il concernait 211 écolesprimaires ; nous l’avons mis en place de façon conjointe avec le rectorat,l’ALPI et France Telecom. Le Conseil général offrait à ces écoles un ordi-nateur et une année d’abonnement à internet sur la base d’un raccorde-ment Numéris négocié avec l’opérateur. Les communes ont ensuite pris lerelais pour assurer la continuité de cet abonnement.

C’est donc sur un terrain déjà connu, et sur lequel nous étions déjà in-tervenus au moins à deux reprises de façon importante, que nous avonsdécidé, en 2001, de distribuer des ordinateurs portables aux collégiensdes Landes.Mais cette distribution ne représente que la partie visible de l’opération;la partie invisible étant l’accès de tous les collèges, depuis toutes lessalles de classe, au réseau informatique et à internet, et leur équipementen matériels de visualisation collective. Dans ce département de 350000habitants, nous avons donc distribué chaque année à peu près 7200 or-dinateurs portables pour les enfants, auxquels il faut en ajouter 1300 pourles principaux de collèges, les professeurs et les surveillants généraux (quis’appellent maintenant conseillers principaux d’éducation). Ce qu’il faut

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retenir c’est que, depuis septembre 2001, 39000 collégiens ont ainsi bé-néficié d’un ordinateur portable.

En décidant ce plan d’équipement, quels étaient vos objectifs?Nous avions évidemment un objectif pédagogique – même si notre rôlen’est pas de nous immiscer dans la pédagogie, mais simplement de four-nir des moyens aux collèges sur lesquels s’exerce encore notre compétencedépartementale. Et nous avions aussi le souci de surmonter la fracture nu-mérique, c’est-à-dire la différence qui peut exister dans les familles entreceux qui avaient – je parle au passé, parce que les prix ayant baissé, cettedifférence s’est aujourd’hui beaucoup réduite – les moyens d’accéder à l’in-formatique et ceux qui ne les avaient pas. L’idée était d’offrir une sorted’égalité d’accès à l’outil et à certaines ressources, dont par exemple l’En-cyclopædia Universalis ou le Petit Robert, qui sont loin d’équiper tous lesfoyers landais.Nous avons choisi des ordinateurs portables pour qu’ils ne restent pas àl’école mais entrent aussi dans les familles, avec, sur le plan conceptuel,l’ambition d’établir une liaison à partir du foyer de l’enfant vers un bureauvirtuel sur internet. Sur ce point, on a essuyé des plâtres (qui ne sontd’ailleurs pas encore tout à fait secs): d’abord, nous n’avons pas rencon-tré beaucoup de compréhension – c’est le moins qu’on puisse dire – de lapart des opérateurs de télécommunication sur le prix des liaisons domi-cile-collège ; ensuite, nous avons eu beaucoup de difficultés techniques etd’incompréhension réciproque avec le rectorat et, finalement, les deux lo-giciels ENT (environnement numérique de travail) successifs qui devaientfaire tourner ces bureaux ne sont pas arrivés à terme…

Premier objectif, donc: “égalité numérique”, j’appellerais ça comme ça.Il s’agissait aussi de faire pénétrer l’informatique dans les foyers landais.Nous sommes en effet un département assez curieux: il a les apparencesd’un département rural – ce qu’il est d’une certaine manière. C’est aussiun département très touristique avec deux millions de touristes en été. Enmême temps, c’est celui où la population active dans l’industrie est la plusimportante de la région. D’où ce département non identifié quant à sa ca-ractéristique principale: pas de grosses urbanisations – c’est ce qui donnecet aspect rural – et des usines mais elles sont très dispersées à travers lemassif forestier ou les vallons de Chalosse – on ne les voit pas.Il s’agissait donc de faire entrer l’informatique dans les foyers landais donton pouvait penser, a priori, que ce ne serait pas spontané dans un pays oùil fait si bon vivre.

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Avez-vous obtenu des résultats?Oui ! Ce département rural dispose maintenant depuis 2007 d’un taux deconnexions internet ADSL de 97%, ce qui est au-dessus de la moyennerégionale – et ce n’était pas évident au départ en 2000-2001. Nous avonségalement un taux de pénétration de l’informatique dans les foyers trèsintéressant – comme le montrent plusieurs études mesurant lesconnexions internet par foyer et par catégorie socioprofessionnelle: pourles familles landaises ayant un enfant scolarisé en collège, par exemple,le taux d’équipement en ordinateurs dépasse 96 %, c’est-à-dire qu’il estsupérieur à celui des enseignants.Je remercie à cette occasion les 4000 familles landaises qui ont massive-ment répondu, l’an dernier, à l’enquête Sofres2. Elles déclarent, dans uneécrasante majorité, être satisfaites de cette opération, dont elles estimentqu’elle contribue à relever les défis de l’égalité, en assurant l’égal accèsdes élèves aux outils informatiques, même si elles souhaitent, elles aussi,que ces outils soient davantage utilisés en cours.

Sur le plan pédagogique, j’y arrive, ce n’est pas à moi de faire un bilan,mais je pense que ce n’est pas évident… J’ai quelques difficultés avec l’Éducation nationale qui a une culture un peu “mandarinale” – je penseaux mandarins chinois, ceux qui avaient l’éternité devant eux… Celaavance, mais ça ne va pas vite.Les résultats sont-ils probants ou pas? Nous avons buté d’emblée, mais defaçon extrêmement cruelle au départ, sur l’absence de ressources numé-riques et de logiciels pédagogiques, au point que nous avons dû payer nous-mêmes la numérisation des premiers manuels scolaires, car les éditeurss’y refusaient… «Des livres interactifs? Nous n’en avons pas! Mais nouspouvons les faire si vous nous payez pour cela.» Nous l’avons fait. Maisc’était une manière assez pauvre d’utiliser l’outil informatique que de dis-poser des livres simplement numérisés. Car ces premiers manuels soi-di-sant interactifs ressemblaient plutôt aux cahiers de vacances d’autrefois:ils étaient d’une tristesse, d’une pauvreté et d’un archaïsme qui laissentpantois! En passant des consoles de jeux à ces logiciels-là, nos enfants doi-vent avoir l’impression de faire un voyage dans le passé… Je parle au pré-sent, car je me suis laissé dire que, dans certaines disciplines, ces manuelsn’ont guère évolué, ni sur l’ergonomie, ni sur les fonctionnalités.Les collèges publics du département ont donc expérimenté ces manuels“numérisés” pendant trois années scolaires, jusqu’en juin 2004. Depuis,comme le rectorat s’est engagé dans un chantier important pour privilé-gier l’oral dans l’enseignement des langues vivantes, nous avons continué

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à fournir des manuels numériques en anglais et en espagnol. Ces manuelsqui intègrent des ressources audio et des vidéos me font penser à des mini-laboratoires de langues que chaque élève peut utiliser chez lui, depuis sonordinateur portable.En mathématiques, je voudrais également souligner la qualité des logicielsd’exercices pour lesquels j’ai un petit faible, car ils sont réalisés par unequarantaine de professeurs, regroupés dans une association nationale quiproduit des contenus à partir des situations pédagogiques vécues. Il y a,dans cette démarche militante et bénévole, quelque chose qui me sembleparfois manquer à d’autres enseignants, davantage installés dans les rou-tines du système, peu enclins à une quelconque mutualisation…

Sur la centaine de logiciels disponibles sur l’ordinateur portable – et dontla plupart ont été choisis après concertation avec le rectorat –, je laisse-rai les spécialistes s’exprimer: c’est un sujet controversé. Je continue àpenser qu’il en manque beaucoup, ou – ce qui a fait problème en perma-nence avec les enseignants – que ces logiciels ne recouvrent pas entière-ment le champ des programmes scolaires…Néanmoins, les choses évoluent. France 5 et l’Institut national de l’au-diovisuel produisent des programmes vidéos de qualité auxquels tous lescollèges landais sont abonnés depuis cinq ans; sur leurs ordinateurs por-tables, les collégiens disposent aujourd’hui d’outils performants, et les en-seignants se mettent graduellement à l’utilisation des logiciels – graduel-lement, car leurs déclarations à la Sofres laissent entrevoir d’importantesmarges de progression…

Quels enseignements tirez-vous de ces neuf années de pratiques?Et quelles perspectives pour l’avenir?Nous avons obtenu des résultats – 57% des enseignants déclarent se ser-vir de l’ordinateur portable à au moins un cours sur deux – et on nous ditqu’au regard des autres établissements de France et de Navarre, ces ré-sultats sont exceptionnels. Est-ce aussi évident? Personnellement – et c’estpeut-être une histoire de tempérament –, je trouve que cela ne va jamaisassez vite. Je continue cependant à penser qu’il faut persévérer, qu’il fautaméliorer, que d’ailleurs il faudra peut-être étendre à d’autres catégories,en dehors de l’école, l’accès à cet outil qui progresse très vite.L’opération “un collégien, un ordinateur portable” a démarré l’année oùJack Lang créait le Brevet informatique et internet (B2i) que les collégiensdoivent obtenir à la fin de leurs quatre années de collège. Le rectorat, quianalyse, chaque année, la manière dont les choses se passent en Aquitaine,

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me fait remarquer que la spécificité de notre département tient moins auxexcellents résultats des élèves qu’au nombre d’enseignants qui validentcette épreuve – les deux tiers dans notre département – et au nombre dedisciplines qui y participent. Ils mettent ces bons résultats au crédit de cetteopération landaise d’équipement en ordinateurs portables, qui n’a pasd’équivalent dans les autres départements. J’en prends acte.

L’enseignement principal que je tire de l’enquête Sofres, c’est que les en-seignants ont bien intégré ces matériels et logiciels à leurs pratiques ha-bituelles, mais qu’ils utilisent davantage la visualisation collective enclasse, avec le vidéoprojecteur et le tableau interactif, que les ordinateursportables des élèves. C’est pourquoi, je m’autorise à dire qu’en matière deprogression des pratiques pédagogiques, nous n’en sommes encore qu’autout début. L’informatique est à l’Éducation nationale ce que les “méde-cins” de Molière étaient à la médecine: pour l’instant, on fait des saignées.J’entends des “Oh!”, mais il faut parler fort pour être entendu…

Ces outils ont pourtant beaucoup de potentiel en matière de pédagogie etde création. Depuis vingt ans, on ne manque d’ailleurs pas d’études uni-versitaires précises dans le domaine des sciences de l’éducation et dessciences cognitives, mais elles ne sont pas connues, ni suffisamment re-layées par l’Éducation nationale vers les enseignants de terrain. Or – c’estpeut-être une évidence mais bonne à rappeler –, les usages de l’informa-tique et de l’internet à l’école ne peuvent être efficaces que s’ils partentd’une situation pédagogique réfléchie et pensée. Nous touchons là le cœurdu sujet : lorsque, par exemple, les inspecteurs pédagogiques réunissentles enseignants de leur discipline autour de ces outils, on observe une forteprogression des usages, alors que, dans les matières où ils ne le font pas,cette pratique reste limitée à quelques pionniers. Voilà la preuve qu’uneréflexion pédagogique sur les usages attendus – qui relève de la respon-sabilité de l’Éducation nationale – doit aller de pair avec la mise à dispo-sition des outils. En effet, il ne suffit pas de disposer du matériel, des lo-giciels et du personnel pour s’occuper de la maintenance, même si tout lemonde est d’accord sur un point : c’est un préalable nécessaire. C’estd’ailleurs l’une des conclusions de l’institut TNS-Sofres qui note une forteattente des enseignants en matière d’accompagnement pédagogique parleur hiérarchie, pour les aider à intégrer les outils numériques dans leurenseignement.De mon temps, ou de celui où mes enfants étaient scolarisés, nous n’avions,pour schématiser, que deux sources d’informations: les enseignants et lesparents. Avec l’arrivée de moyens de communication massifs dans notre

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vie quotidienne, nous sommes entrés dans une société qui offre des po-tentialités gigantesques, exceptionnelles, extraordinaires d’accès au savoir.Nous avons maintenant – y compris dans des endroits adorables desLandes où il y a des arbres et des écureuils – accès à des bibliothèques en-tières ; c’est un bouleversement considérable, qui change profondément lerapport à la connaissance, quel que soit le lieu où l’on se trouve, et que jetrouve prodigieux. Je ne suis pas le seul. Nous essayons donc de diffusercet outil. J’espère que l’école républicaine saura s’adapter et accompagnernos enfants à la nécessaire éducation à l’information qui va de pair aveccette nouvelle situation.Je suis heureux que d’autres départements, collectivités – et aussi le mi-nistère de l’Éducation nationale avec sa récente expérimentation de ma-nuels numériques – s’engagent dans ce type d’expérience, même sous desformes beaucoup plus limitées, ponctuelles ou expérimentales. Plus nousserons nombreux, plus il deviendra évident que cet outil est incontour-nable. Le département des Landes croit à l’informatique; il y croit de toutes lesforces de sa raison… Nous allons donc persévérer dans ce sens-là.

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1 cf. ci-après, page 293.

2 cf. ci-après, page 258.

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#1.POR-TRAITS.-----

PHOTOGRAPHIES DE VINCENT MONTHIERS, 2006-2009

L’intégralité des reportages est sur http://www.flickr.com/photos/cg40/sets

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#2.POINTSDE VUE.

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-----J’ai tout de suite considéré que cette opé-ration prenait à bras-le-corps une pro-blématique incontournable, celle de larelation des jeunes avec le numérique,avec cette idée particulièrement intéres-sante de ne pas cloisonner d’un côté desusages scolaires et de l’autre une pratiqueinformatique individuelle à la maison.»Pierre Lacueille est IA-IPR de sciences physiques et chimiques.Il a été conseiller Tice du recteur de l’académie de Bordeaux de 2003 à 2008.-----Vous êtes, depuis le début, un observateur attentif et un partenaire fidèle de l’opération“un collégien, un ordinateur portable”. Voudriez-vous revenir sur les débuts de cette his-toire, du point de vue de l’Éducation nationale?Pierre Lacueille (PL) : C’était quelque chose qui sortait complètement des représen-tations habituelles, dans un contexte où les établissements des autres départementsde l’académie étaient généralement très peu dotés. Le regard des adultes sur l’in-formatique n’était pas celui d’aujourd’hui: internet, pour ne citer que cet exemple,ne faisait pas partie de la vie quotidienne… Autour de moi, un certain nombre depersonnes ont pu se montrer sc eptiques au sujet de l’initiative landaise. Pour ce quime concerne, j’ai tout de suite considéré que cette opération prenait à bras-le-corpsune problématique incontournable, celle de la relation des jeunes avec le numérique,avec cette idée particulièrement intéressante de ne pas cloisonner d’un côté desusages scolaires et de l’autre une pratique informatique individuelle à la maison, quiresterait à l’écart de l’école. Je suis de ceux qui n’ont jamais voulu diaboliser l’ordi-nateur, ni faire d’angélisme à son propos. Voilà un outil extrêmement performantqui touche à la communication, à la culture, à l’éducation… Bref, d’une certainefaçon, à toutes les réalités de la vie culturelle et affective d’un élève: sa relationavec ses camarades, avec les adultes et avec le monde.

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Ce volontarisme politique a tout de même un peu surpris l’institution?PL : Il est évident que le fait de doter chaque élève d’un ordinateur personnel a,d’une certaine façon, mis une sorte de pression “rentabiliste” sur l’école, avec unecertaine forme d’obligation pour les enseignants d’intégrer ces machines dans leurenseignement… Pour ma part, j’ai toujours essayé d’avancer l’idée qu’il fallait êtreprudent par rapport à cela, et qu’il fallait “laisser du temps au temps” – d’ailleurs,on m’a parfois un peu chambré à ce sujet.Au rectorat d’académie, je dois dire que l’opération nous a permis un retour d’ex-périence assez rapide: nous avons, dans les Landes, un laboratoire grandeur natu-re. Nous avons aussi pu décliner d’autres actions, de façon différente et avec d’autresoutils (je pense, en particulier, à ce qui a été fait pour l’enseignement des languesvivantes dans les Pyrénées-Atlantiques, avec des baladeurs mp3). Au sein de l’Éducationnationale, émergeait déjà l’idée d’évaluer les compétences de l’élève au collège;cette notion s’est élargie aujourd’hui à celle de “socle commun de connaissances etde compétences”. On s’apprêtait alors à mettre en place le B2i (brevet informatiqueet internet), pour s’assurer que les élèves sortant de l’école primaire, du collège oudu lycée, avaient atteint un certain niveau en matière d’informatique. Et, de ce pointde vue-là, l’opération landaise a produit des résultats indéniables.

Et occasionné quelques difficultés…PL : La grande particularité de cette opération, par rapport au fait d’équiper les éta-blissements scolaires en ordinateurs fixes, c’est l’individualisation de l’outil. Et ce quiest intéressant, dans le cas des Landes, c’est que nous disposons d’un outil à la foisscolaire et individuel. Il y a là un véritable enjeu éducatif, et je pense qu’il est inté-ressant, pour l’école, de s’y frotter: de plus en plus de jeunes, aujourd’hui, ont leurblog, participent à des réseaux sociaux… Je pense que l’école doit s’emparer de cesproblématiques, et éduquer ces adolescents à gérer leur “identité numérique”.Comment se présenter ? Comment séparer la sphère individuelle de la sphèrepublique? L’un des grands mérites de cette opération, c’est de permettre le surgis-sement de ces questions. En contrepoint, il ne faut pas oublier que les chefs d’éta-blissement, en tant que représentants de l’État, ont des responsabilités vis-à-vis dece qui se passe à l’intérieur des collèges. Il faut donc essayer de comprendre pour-quoi certains ont parfois pu paraître un peu frileux quant à l’accès des mineurs à inter-net. Chacun a essayé de gérer ces questions – bien sûr avec ses peurs, ses angoisses,mais aussi avec ses aspirations.

On n’avait peut-être pas tout à fait mesuré la difficulté, pour des adolescents qui ont décou-vert l’ordinateur dans les loisirs, à passer à l’ordinateur comme outil de travail…PL: La question que vous posez là n’est pas uniquement liée au jeu: les jeunes d’au-jourd’hui découvrent d’abord l’ordinateur comme un outil de communication, etégalement comme moyen d’accéder à une certaine culture adolescente: la musique,

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le cinéma, le sport, etc. Il est d’ailleurs intéressant de remarquer, à ce propos, que cer-taines de leurs compétences, acquises dans le contexte de leur vie privée, sont par lasuite validées dans le cadre scolaire. Il faut bien comprendre que l’opération landai-se s’est déroulée dans ce que j’appellerais, sans jeu de mots, un hinterland, entre unegénération d’adolescents de 14-15 ans et des enseignants qui n’ont pas été élevés avecces outils, et qui n’étaient pas forcément utilisateurs. Nous avions là une sorte defracture générationnelle et culturelle, et il faut bien comprendre que, pour certainsd’entre eux, le fait de voir apparaître tout d’un coup ces outils dans leur classe a pureprésenter un stress. Je vous donne rendez-vous dans dix ans, pour voir comment unenouvelle génération d’enseignants, plus familiers de ces outils, pourra s’en emparer!

Nous avons pu observer, dans les collèges, des utilisations particulièrement pertinentes, alorsque l’enquête que vient de livrer la Sofres présente, quantitativement, un bilan assez miti-gé. Comment évaluer aujourd’hui l’impact de l’opération?PL : En ce qui concerne le recueil d’information sur les usages, le travail de reporta-ge que vous avez fait pendant deux ans pour le journal En Connexion a permis, mesemble-t-il, d’enrichir le débat, et de montrer comment sont utilisés les outils numé-riques dans les collèges du département.Je voudrais revenir sur cette enquête Sofres, et en premier lieu préciser qu’il nes’agit, en aucun cas, d’une évaluation. Évaluer, au sens étymologique, c’est donnerde la valeur, ce qui suppose de faire appel à une référence. Lorsque cette enquêtea été décidée, elle était avant tout destinée à être un outil interne de pilotage. Nousétions convenu avec le Conseil général que, pour faire un état des lieux statistiquede la situation, il était nécessaire de confier cela à un organisme spécialisé. Alors queles corps d’inspection ont la mission d’évaluer les performances professionnelles desenseignants, il était intéressant d’obtenir une “photographie” des usages, en dehorsde tout regard hiérarchique de l’administration sur ses agents.Cette enquête a apporté un certain nombre de chiffres, à partir de données d’ordredéclaratif. À mes yeux, son intérêt était de vérifier si nos impressions, à partir des visitesde terrain, étaient en phase avec une réalité à grande échelle. Mais, en aucun cas,on ne peut tirer un bilan à partir de données purement quantitatives. Et je ne com-prends pas quelle est la référence qui permettrait d’affirmer que le bilan est “miti-gé”, quand on a 54% des enseignants qui déclarent se servir de leur ordinateur, aumoins à un cours sur deux… Parle-t-on d’un attendu institutionnel? Personnellement,je ne le connais pas. Se base-t-on sur les résultats d’un autre département? Lequel?Nous sommes confrontés, d’un point de vue quantitatif, à l’analyse d’un verre àmoitié vide, ou à moitié plein, et, pour dire vrai, je considère ce terme de “mitigé”comme injuste, et désagréable pour le nombre d’enseignants, sans cesse croissant,qui utilisent cet outil avec beaucoup de pertinence. Je trouve l’enquête Sofres inté-ressante, mais doit-elle, pour autant, être livrée telle quelle à la presse grand publicsans l’éclairage d’un regard un peu expert? Je ne le pense pas. Parmi les bilans, je

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regrette que l’on n’ait pas donné les chiffres sur l’objectif d’acquisition des compé-tences en matière informatique: je veux parler des résultats obtenus pour le B2i(brevet informatique et internet). Je tiens à rappeler que le département des Landesest, sans doute, celui dans lequel le B2i est le mieux mis en œuvre: on remarque, parexemple, que les disciplines représentées dans sa validation sont bien plus nom-breuses qu’ailleurs. Voilà l’un des indicateurs qui montrent la réelle appropriation del’outil par les enseignants landais, et même s’il reste des points faibles sur lesquelsnous devons encore travailler, tout cela est très positif!Par ailleurs je m’inscris en faux contre toute tentative de normalisation du profil del’enseignant : certains font un très bon travail, tout en ayant, pour des raisons cul-turelles, du mal à utiliser les Tice, mais vous trouverez, à l’opposé, des technophilesqui ne sont pas pédagogues!

Un fait nous a particulièrement frappés: l’utilisation des ordinateurs est beaucoup plus for-te en espagnol qu’en anglais ou en allemand… Y aurait-il différentes manières d’enseignerles langues vivantes?PL: Vous faites un constat qui est juste: on retrouve d’ailleurs la même chose au lycée.Je serais tenté de donner comme première explication la différence de statut entrepremière et seconde langue: peut-être, quand on est assis sur un sac d’or, a-t-on unpeu moins tendance à chercher des pistes innovantes… Pourtant, ces ordinateurs, quipermettent l’accès à des ressources multimédias à la maison, sont en parfaite adé-quation avec les réformes mises en œuvre par l’État en matière d’enseignement deslangues vivantes : contrairement aux anciennes modalités d’évaluation qui étaientbasées sur l’écrit, on s’intéresse aujourd’hui beaucoup plus à la compréhension de l’oral,et à l’expression orale. Et pour cela, l’ordinateur est un outil formidable! Cette réfor-me est donc une des premières résonances entre les objectifs de l’école et l’intégra-tion de ces nouveaux outils, et je pense qu’il y en aura d’autres.

Pouvez-vous nous dire un mot de la situation en sciences physiques?PL: Dans ce domaine, j’ai conseillé au Conseil général des Landes de renforcer l’équi-pement des collèges en outils de communication interne à la classe. En sciences phy-siques, je ne préconise pas une utilisation systématique de l’ordinateur des élèves encours. Celui-ci est utile pour apprendre à se servir du tableur, ou bien pour faire dela recherche documentaire, mais quand on travaille sur la relation des élèves à un phé-nomène physique réel, il est beaucoup moins pertinent. Quand vous travaillez sur unepaillasse, il serait artificiel de prendre l’ordinateur pour se servir du traitement de tex-te : un bloc-notes suffit. Soyons prudents, et vigilants, de manière à ne pas écarterla graphie, et le geste manuel, qui ont leur importance dans l’appropriation dusavoir. J’insiste régulièrement sur le fait que l’opération des Landes se réduit souvent,surtout dans les médias, à l’idée d’un ordinateur prêté à chaque élève: mais c’est aus-si un concept de “classe communicante”, dont ne bénéficient pas de manière aussi

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systématique les établissements des autres départements. Je viens de mesurer récem-ment le chemin parcouru par un enseignant que je n’avais pas vu depuis quatre oucinq ans : la prise en main de ces outils dans sa classe lui a permis d’aborder l’écritu-re et la réflexion de ses élèves de façon beaucoup plus enrichissante!On ne sait donc pas encore tout ce que l’on peut faire avec les ordinateurs?PL : Pour ma part, j’inverserai la logique de votre proposition: il ne s’agit pas detrouver “comment utiliser les ordinateurs”, mais plutôt de comprendre que la maî-trise de ces outils de communication et d’accès à l’information est incontournable pourun adolescent du 21e siècle. L’ordinateur nous renvoie ainsi à des problèmes éduca-tifs majeurs. Comment faire avancer l’école sur un certain nombre de priorités ?Comment faire, en particulier, pour que moins d’élèves quittent le collège sans aucu-ne formation? Faire en sorte que tous soient épanouis dans leur scolarité, et devien-nent des adultes à l’aise dans leur citoyenneté, performants dans leur métier, dansleurs relations sociales, dans leur capacité à innover et à agir ? L’environnementnumérique mis en place dans le département des Landes est un outil au service decette politique, et il serait, à mon avis, maladroit de réfléchir, dans chaque discipli-ne, en termes de taux d’usage! On ne renforcera pas l’utilisation de l’ordinateur endisant qu’il faut s’en servir davantage, mais à partir du moment où se développerontdes pédagogies actives, individualisées, des pédagogies de projet. Et cela, vous le com-prenez bien, est un enjeu à long terme.

Comme vous l’avez souligné, la particularité de l’opération landaise, c’est à la fois de dotertous les enseignants et tous les élèves de 4e et de 3e d’un ordinateur personnel portable, maiségalement de mettre en œuvre massivement des outils de visualisation collective (vidéo-projecteurs, tableaux interactifs, visualiseurs numériques)… Pensez-vous que ces deux dis-positifs soient en concurrence?PL : Pour moi, il y a complémentarité. Ces outils, par définition, ne sont pas destinésaux mêmes usages : l’ordinateur est un outil individuel de consultation, de produc-tion et de communication, alors que le tableau numérique permet la communicationvisuelle collective. Nous avons aujourd’hui, dans les Landes, une architecture optimale,et les enseignants doivent vraiment mesurer leur chance. Le tableau numérique estcomme une fenêtre et une ouverture sur le monde, avec l’accès à internet, la possi-bilité d’un enrichissement du cours par la vidéo, l’image, l’animation, etc. Grâce auvisualiseur, qui permet la mise en relation des objets réels avec le monde numé-rique, nous venons tout récemment de compléter les différents maillons de la chaî-ne d’information. Il s’agit d’une caméra numérique, reliée à l’ordinateur, qui permetde projeter en temps réel n’importe quelle image sur le tableau interactif. J’ai toutde suite pensé qu’il pourrait nous servir, en sciences, à accompagner la démarche d’in-vestigation. Il nous manquait un outil qui permette de communiquer à la classe, defaçon instantanée, la production écrite d’un élève – ou d’un petit groupe. Dans un cours, il y a plusieurs temps. Celui pendant lequel l’enseignant est émetteur

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d’information – il utilise alors un outil de visualisation collective –, et d’autresmoments où les élèves sont acteurs et l’enseignant remédiateur : c’est alors que lesordinateurs personnels peuvent prendre tout leur sens. Ce qu’il faut vraiment rete-nir, c’est l’idée de “classe communicante”: une classe ouverte vers l’extérieur – àtravers le CDI, internet, etc. –, et une classe où la communication circule, de l’ensei-gnant vers les élèves, mais aussi à partir de chaque élève qui se trouve en situationde produire de l’information. Alors sont mises en jeu des compétences argumenta-tives : la capacité à s’exprimer en public, notamment. Nous avons, dans les Landes,toute une gamme d’outils complémentaires, et je serais tenté de dire qu’il faudraitgénéraliser ce type d’équipement dans tous les collèges de France!

Dans l’article que vous avez signé sur le bilan de l’opération “un collégien, un ordinateurportable” dans Les dossiers de l’ingénierie éducative (nº 60, décembre 2007), vous valideztout l’intérêt de cette politique d’équipement, mais en même temps, vous admettez que lenécessaire travail d’appropriation de ces outils reste à mener du côté de l’Éducation natio-nale… C’est donc bien que l’École n’était pas préparée à l’arrivée d’ordinateurs individuels.Ne trouvez-vous pas la chose étonnante dans la mesure où la question des rapports entreécole et ordinateurs n’est pourtant pas récente: le “plan calcul” du général de Gaulle y faitdéjà référence en 1967?PL: La question n’est pas nouvelle, mais la technique la renouvelle en permanence! Nousavons deux systèmes qui s’interrogent l’un l’autre: le monde de l’informatique et celuide l’école. L’informatique est un outil incontournable, qui évolue en permanence:cela n’aurait aucun sens de comparer ce que l’on pouvait faire avec un ordinateur àl’époque des TO7, et ce que l’on peut faire aujourd’hui avec les ordinateurs portablesdu département des Landes! Nous sommes, et nous serons, interrogés et sollicités enpermanence par les possibilités nouvelles de la technique. Et, sur ce point, il n’y aurapas de statu quo. Ce qui me semble bien acquis, c’est la maîtrise technique: les élèvesbaignent dans ces environnements numériques de plus en plus tôt. Si, du temps du géné-ral de Gaulle, l’objectif pouvait être d’apprendre à se servir de ces outils, nous sommesaujourd’hui sur d’autres problématiques, d’autres enjeux, d’autres débats.Voyez l’un des items du B2i: «Je suis capable de sélectionner des informations, et d’ex-primer avec pertinence mon choix.» Personne, il y a de cela un demi-siècle, n’auraitpu imaginer une pareille compétence! Cela montre bien que l’école est capable devivre avec son temps, et de prendre en compte le fait que nous sommes aujourd’huisur une problématique de surabondance de l’information.

D’accord, mais quand on voit la rapidité d’évolution de ces techniques, on a l’impression quel’école va rester perpétuellement à la traîne… Ne pensez-vous pas que tous les débats surla connexion à internet dans les collèges, par exemple, ne vont pas se trouver bien vite balayés,quand tous les collégiens auront dans leur poche un téléphone qui autorise une connexionpermanente?

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PL : Vous voulez dire que l’école a toujours une guerre de retard? Eh bien, je seraistenté de dire qu’elle a aussi un rôle conservateur, au sens noble du terme! L’humaniténe doit pas forcément se plier à la technique! Et ce retard, que vous décrivez, est peut-être souhaitable : il faut bien digérer les choses, c’est ce que j’appellerais un princi-pe de précaution éducative. L’école doit aussi être vigilante aux dérives potentiellesde ces outils. J’en vois deux: l’un autour de la question de la concentration, l’autresur la construction psychologique des individus. Pour le premier, il faut être conscientque ces outils “nomades” ont tendance à introduire de nouveaux formats standard.Voyez le domaine de l’image animée: après le film, après le clip musical, voilà aujour-d’hui l’arrivée de formats très courts de 10 ou 20 secondes. Nous devons, à unmoment donné, dire à nos élèves de se déconnecter! L’intelligence humaine a aus-si besoin de silence, de concentration, de recueillement, et je suis partisan de réins-taurer, à l’école, des temps consacrés à la lecture, sur des séquences d’une demi-heure, par exemple. Il faut entendre le fait qu’aujourd’hui, un adolescent a du malà concentrer son attention sur un texte de 200 mots! Je n’ai rien contre la consul-tation “fun” de sites comme YouTube ou DailyMotion, mais je pense qu’on ne peutpas rejeter tout un pan de la pensée humaine: l’accès au savoir et à la complexiténécessite de la concentration, et le format des documents véhiculés par internet atendance à privilégier l’accrochage du regard, et la rapidité.Le deuxième écueil à éviter porte sur l’aspect psychologique: il est assez amusant devoir que toute une littérature de science-fiction décrivait déjà, dans les années 1970-1980, la situation d’un individu connecté en permanence. Ce rapport très particulierque nous entretenons aujourd’hui avec notre téléphone portable ne relève-t-il pasd’une sorte d’évolution anthropologique? La possibilité de transcender son envi-ronnement social, ou familial, à partir des possibilités immenses offertes sur internetdoit nous inciter à rester vigilants, et à mesurer notre enthousiasme par rapport auxréseaux sociaux. Sur ces questions, ma position est assez pragmatique: à partir dumoment où une technique existe, la réflexion éthique doit suivre. Avec un public dejeunes – enfants et adolescents – en pleine construction psychologique et identitai-re, l’école ne peut pas faire l’impasse d’une réflexion sur cette notion de monde vir-tuel (le monde des jeux), et sur cette idée d’hyperconnectivité. Il faut alerter les ado-lescents qui sont habitués à partager des photos, par moments assez farfelues: toutesces informations déposées sur internet se sédimentent. Nous devons réfléchir sur cet-te notion d’“identité numérique”, pour prémunir les jeunes contre les risques et lesdérives possibles des réseaux, mais aussi pour comprendre que, dans le monde vir-tuel, on apprend peut-être moins bien à gérer la frustration.

L’accès au savoir, et en particulier au livre et à l’écrit, qui concerne particulièrement l’école,soulève une série de questions passionnantes…PL : La question que vous soulevez, c’est celle de l’éducation à l’information: elle estcruciale ! Les enseignants doivent accepter l’idée que l’un des fondamentaux de

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l’école dans les quinze prochaines années sera de faire en sorte qu’un individu soitcapable de gérer lui-même de l’information, et d’apprendre à apprendre. Le rôle del’enseignant risque ainsi d’évoluer de celui d’émetteur d’informations et de connais-sances vers celui de médiateur et de formateur. Nous avons réfléchi, avec mon col-lègue Christian Philippe [en charge des professeurs documentalistes], à l’idée quechaque élève pourrait disposer d’une sorte de carnet de bord en ligne, où on puis-se vraiment suivre les différentes étapes de son projet de recherche. De telle maniè-re qu’il parvienne à dire pourquoi il a fait tel choix plutôt que tel autre, dans cet abî-me de possibles et d’informations foisonnantes, et ce qu’il en tire.J’aimerais, à ce propos, rassurer les enseignants sur leur fonction: loin d’être condam-née par ces outils, elle est, au contraire valorisée par eux, en tant qu’experts de lagestion de l’information. Cela les amène, à mon sens, à accepter un élargissementde leur discipline. Je pense que la mise en œuvre de ce que l’on appelle le “socle com-mun de compétences et de connaissances” (une déclinaison française de ce que laCommunauté européenne a appelé “les huit compétences clés”), que tout élèvedoit maîtriser à l’issue de son cursus de scolarité obligatoire, est un moyen pournous de relancer une dynamique, et d’aller plus loin dans cette idée.

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-----Mes différents voyages en France m’ontappris à connaître certains traits caracté-ristiques de votre culture, et en premierlieu, votre intolérance au “work in pro-gress” : vous vous posez beaucoup dequestions, et il vous faut avoir trouvétoutes les réponses avant de commencerà bouger…»Mario Asselin est Québécois, pédagogue et blogueur1

-----Les Québécois ont un point de vue singulier : voilà des gens qui vivent à proximité du monde anglo-saxon,

et qui parlent et écrivent en français. Une double culture qui les rend curieux de ce qui se passe en France,

et leur donne un rôle, assez unique, de passeurs. Mario Asselin est de ceux-là. Nous l’avons rencontré à la

fin de l’été 2009, pendant l’université d’été Ludovia2, à Ax-les-Thermes. Pour lire cette conversation dans

de bonnes conditions, il faudrait pouvoir “entendre” cet accent québécois, savoureux et inimitable. Nous

avons choisi de garder certaines belles trouvailles de langage, comme la “ferme de blogs”, mais préféré

en remplacer quelques autres qui, dans un texte écrit, auraient pu paraître un peu trop exotiques : “Il nous

a fait des yeux de poisson”, par exemple, devient “il nous a regardés avec des yeux ronds…”

-----Vous avez une expérience et une expertise reconnues sur le terrain des nouveaux médias appli-qués aux apprentissages. Pouvez-vous nous raconter votre parcours ?J’étais directeur d’une école primaire – l’institut Saint-Joseph de Québec, 460 élèves,de la maternelle au collège –, qui a été choisie, au début des années 2000, par le minis-tère de l’Éducation pour expérimenter la réforme de l’enseignement. Nous cher-chions à mettre en place des dispositifs de différenciation pédagogique, et nousavons commencé à intégrer les nouvelles technologies en 2002. J’ai commencé à blo-guer cette année-là, et en 2003 nous lancions une première “ferme de blogs”, dansune classe où chaque élève disposait d’un ordinateur portable. L’expérience a ététellement réussie que je me suis retrouvé très sollicité pour en parler, au Québec etailleurs. J’ai alors dû faire un choix: en janvier 2005, j’ai décidé de quitter mes fonc-

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«

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tions de directeur d’école et d’opter pour une forme de travail “à l’horizontale”,c’est-à-dire auprès de plusieurs institutions en même temps. En avril 2005, je rejoignaisl’équipe d’Opossum3, au sein de laquelle je travaille toujours. Notre rôle, c’est d’aiderles collectivités, les institutions et les entreprises à intégrer les nouvelles technologiespour qu’elles servent dans les apprentissages. Je reste donc en relation constanteavec des enseignants, et il ne se passe pas une semaine sans que je me rende dans uneécole. Et si j’aime toujours autant me retrouver dans un milieu scolaire, j’ai cependantchangé de point de vue: mon horizon s’est élargi, mon regard s’est fait plus critique.Par exemple, je ne crois plus que l’école détienne le monopole de la transmission dusavoir tout au long de la vie. Et je mesure mieux ce qui se joue en dehors d’elle.Même si je reste convaincu que l’école garde un grand rôle à jouer, je pense qu’elles’expose, dans les prochaines années, à de profondes perturbations si elle ne prendpas acte de tout ce qui se passe aujourd’hui!

Le Maine, les Landes, le Québec… Un État, un département, une province, qui mènent desopérations impliquant des ordinateurs portables à l’école. Parallèles, différences: quel regardportez-vous sur ces expériences ?Je connaissais l’existence d’un programme ambitieux dans le Maine4, et j’ai eu lachance de pouvoir m’y rendre pour une mission d’étude, en 2002. J’ai donc pu visiterdes écoles, rencontrer des enseignants, des responsables d’établissements, et aussiSeymour Papert. À l’époque, le gouverneur de l’État du Maine, Angus King, lui avaitdemandé conseil : «Je dispose de cinquante millions de dollars, et je cherche à fairequelque chose pour changer la donne économique: nous sommes ici beaucoup tropdépendants de la forêt.» Le levier était donc économique. Seymour Papert conseilled’investir dans l’achat d’ordinateurs portables, et d’axer ce programme sur les collé-giens : «Et si vous faites cela, je vous promets qu’en dix ans, l’économie de l’État duMaine aura changé!» Le gouverneur King a décidé de suivre ces conseils… Au début,les gens disaient: «C’est de l’argent jeté par les fenêtres, nous sommes contre le gou-verneur King…» Mais si vous allez aujourd’hui dans le Maine, vous trouverez ungrand nombre de témoignages inverses: «Oui, c’est un geste heureux, qui a effecti-vement changé la perspective…» On parle volontiers d’une plus grande motivationdes élèves pour apprendre, entreprendre des études plus longues, se lancer dans larecherche, etc. J’ai eu connaissance de l’opération landaise en 2004. Mes différents voyages en Francem’ont appris à connaître certains traits caractéristiques de votre culture, et en premierlieu, votre intolérance au “work in progress”: vous vous posez beaucoup de questions,et il vous faut avoir trouvé toutes les réponses avant de bouger. Je pense que vous faitesainsi parce que vous êtes très responsables. Vous vous sentez dépositaires des valeursrépublicaines, et chaque Français a l’impression de devoir les défendre personnelle-ment. Les inconvénients, c’est que vous vous privez de certaines opportunités, et quevous êtes parfois amenés à choisir l’option la plus sécurisante à court terme. L’exceptionqui confirme la règle, c’est l’attitude du président Emmanuelli qui, en faisant le choix

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de doter chaque collégien d’un ordinateur portable, a fait la même chose que legouverneur King, dans le Maine… Mais je porterais au crédit de ma thèse l’étude quele Conseil général des Landes vient de publier5 : elle est unique et très complète. Poserdes questions, obtenir des réponses, traiter des données, essayer de comprendre ceque ça donne… Je ne dis pas que les Français sont les seuls à agir de la sorte, mais c’esttrès français, tout ça! Je trouve que c’est une belle façon de faire. Le bémol, c’est qu’àchercher à toute force l’objectivité, la rigueur des données chiffrées, le systématismedes procédures régulées, vous pouvez aussi prêter le flanc à la subjectivité: n’impor-te qui peut faire parler les chiffres à sa manière…La situation, au Québec, n’a rien à voir avec celle des Landes ou du Maine. Il n’existeaucun programme national comparable: les projets sont menés au cas par cas. Quandnous avons lancé notre projet dans l’école dont j’étais le directeur, nous avons travailléavec un groupe d’élèves dont les parents étaient volontaires: l’école leur louait un ordi-nateur portable, pour une période d’un an ou deux, après quoi il leur était acquis.Du point de vue pédagogique, nous étions convaincus que “les traces” sont trèsimportantes et que, pour bien évaluer les compétences, il ne faut pas se préoccuperseulement du résultat, mais aussi du processus. Nous avions déjà l’habitude, dansnotre école, de faire des “cahiers de traces” commentées, objectivées et sélectionnées– avec des “coups de cœur”, des “défis”, etc. Nous étions devenus habiles à travaillerainsi, et nous nous sommes demandé comment remplacer ces portfolios “papier”par un dispositif numérique, un cyberportfolio, en quelque sorte… qui présenteraitnotamment l’avantage d’être facilement consultable, à l’école ou à la maison. Un aminous a aidés à monter un premier dispositif technique, et c’est ainsi qu’est née notrepremière “ferme de blogs”. Au bout d’une année d’expérimentation, nos élèveslisaient et écrivaient beaucoup plus et beaucoup mieux. Nous avons aussi constaté uneforme de désinhibition, notamment du côté des garçons, qui ont souvent des diffi-cultés à “se mettre en mots” et à parler de leurs émotions. Là, ils prenaient goût à lefaire: «Pour la première fois de ma vie, je peux dire des choses sans être interrompu…»Les professeurs ont vite remarqué l’instauration d’un nouveau rapport, plus égalitaire,dans la classe – les élèves les plus lents s’enhardissant à intervenir et à exprimer leurpoint de vue, ou à poser leurs questions. La relation au clavier change beaucoup dechoses : «Quand j’écris avec mon crayon, disent les élèves, je suis obligé de faire trèsattention, car chaque erreur coûte cher: je suis obligé d’effacer, ce n’est pas propre…Mes idées sortent plus vite que le temps qu’il me faut pour les écrire. Sur le clavier, jen’ai pas à faire attention: je peux tout écrire d’un coup, et y revenir après.» Les professeurs ont d’abord mis ces résultats spectaculaires sur le compte des ordinateursportables. Pour vérifier, nous avons mis en place les cyberportfolios en première année[de primaire], dans une classe qui ne disposait que d’un seul ordinateur. À tour de rôle,chaque matin, quelques élèves avaient le privilège d’aller écrire, ou déposer un des-sin, sur le blog de la classe. Ils sont tout d’un coup devenus les héros de l’école: chaquejour, on avait hâte de découvrir la nouvelle trouvaille, la nouvelle façon d’écrirequ’avaient encore inventée les petits. Après avoir pensé que tout venait des ordina-

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teurs portables, on a cru que tout venait du directeur! Mais j’ai quitté cette école depuis2005, et si vous allez sur internet aujourd’hui, vous pouvez consulter les cyberportfoliosde l’institut Saint-Joseph6 : ma plus grande fierté, c’est que tout cela continue à fonc-tionner, même si je ne suis plus là. Ainsi donc, ce ne sont pas les ordinateurs por-tables qui ont servi de levier pour l’intégration des nouvelles technologies, c’est la publi-cation sur le web.

Vous êtes un grand défenseur de la pratique du blog en situation pédagogique. Commentprenez-vous en compte l’évolution du web et l’émergence des réseaux sociaux ?Je ne comprenais pas pourquoi les élèves blogueurs ne faisaient jamais de faute d’or-thographe dans leurs titres, très peu dans leurs billets, alors que dans leurs commen-taires, c’était horrible! Quand nous avons posé la question à l’un d’eux, il nous aregardés avec des yeux ronds: «Mais enfin, tout le monde sait cela! Si on fait des fautes,Google ne nous trouvera jamais!» Ces jeunes gens avaient une connaissance intuiti-ve des algorithmes qui sous-tendent le fonctionnement des moteurs de recherche ets’y étaient parfaitement adaptés! J’ai alors décidé, pour tenter de comprendre un peumieux les adolescents nés avec ces dispositifs, et qui les utilisent quotidiennement, d’ou-vrir un compte FaceBook et un compte Twitter. Tous les éducateurs le savent: le levierprincipal de développement de l’individu, c’est la quête d’identité. Or, les réseaux sociauxrépondent parfaitement à cette quête: «J’existe, et je sais que j’existe dans la mesu-re où j’obtiens un écho fréquent de mon existence. Savoir que je suis important pourquelqu’un, plusieurs fois dans la même journée, me construit.»Tenir un blog, c’est une chose, mais aujourd’hui je me suis rendu compte par moi-mêmeque ma présence sur Twitter, sur Facebook, sur tous ces nouveaux réseaux, a encoreplus de portée, en termes de trouvailles, de partage… Plus je suis présent sur lesréseaux, plus je reçois en retour, c’est-à-dire plus on me sollicite, plus on me pose desquestions, plus je suis obligé de penser à ce que je réponds… Donc plus j’apprends.De fait, je suis devenu mon propre “média”: j’ai développé mon propre lectorat etje dispose d’un réseau de personnes d’influence qui, elles-mêmes, diffusent versd’autres personnes. J’occupe ainsi un créneau de blogueur-reporter: en même tempsque je fais profiter les autres de mes propres trouvailles, je suis sollicité pour relayerà mon tour certaines choses.

Si vous aviez une vision, un conseil, une idée à transmettre aux enseignants landais ?Eh bien, je leur proposerais d’abord d’essayer de voir si la posture d’apprenant ne leurconviendrait pas. Vous me dites avoir constaté que certains changements sont déjàen route, voilà le signe que c’est chose en partie faite. Mais les enseignants qui déci-deront d’officialiser cette posture y trouveront plusieurs avantages: d’une part, ils vontgagner une plus grande marge de manœuvre – si vous-mêmes êtes un apprenant, alorsvous avez le droit à l’erreur –; d’autre part, cela peut les amener à prendre plus derisques, à se déplacer, donc à aller vers d’autres découvertes. Et, probablement, leur

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éviter d’avoir à céder à cette demande que l’on fait souvent aux enseignants utilisa-teurs des outils numériques: faire un acte de foi en faveur de ces dispositifs. Je leurdis : “Vous allez vous retrouver en situation d’expérimenter des choses pour vous-mêmes… Adoptez un mot sur Wikipédia, et voyez si, de temps à autre, vous ne pou-vez pas y contribuer, allez faire des commentaires dans les blogs, allez rejoindre laconversation sur les réseaux sociaux… Peu importe la porte d’entrée, essayez, etessayez d’objectiver ce que vous allez y apprendre. Demandez-vous si ce que vous yapprenez a une chance d’être transférable dans votre travail de faire apprendre.”

Pour finir, puisque nous sommes à Ludovia, quelle est votre réflexion à propos de ce que l’onnomme aujourd’hui les “serious games”?Quand mon premier fils avait quatre ou cinq ans, il était friand de jeux vidéo. Etj’étais contre, parce que, comme tout bon enseignant, je pensais qu’il faut souffrir pourapprendre. Mais en l’observant, ainsi que mes pensionnaires de l’internat, j’ai décou-vert qu’ils étaient capables de résoudre des problèmes, de surmonter des échecs, destructurer leur pensée, d’être créatifs, d’imaginer des scénarios… Bref, d’apprendre.J’ai vu aussi des choses que je n’aimais pas: la violence, certains excès, certaines ten-dances à jouer un peu trop longtemps. J’en suis venu à essayer de comprendre dansquelles conditions ces environnements pourraient être utilisés pour les apprentis-sages. C’est une chose qui existe déjà: les pilotes d’avion, les chirurgiens, les pompiers…utilisent des simulateurs basés sur le fonctionnement de certains jeux vidéo. Je me suisintéressé aux travaux de Julian Alvarez, de Fanny Georges, de Yann Leroux, et je mesuis rendu compte qu’il existait tout un développement de la recherche sur ce terrain.Me positionnant encore une fois comme apprenant, j’ai découvert qu’il me restait enco-re bien du chemin à faire avant de présumer que ces environnements ne créent pasd’apprentissage. Mieux, je pense aujourd’hui qu’ils représentent un filon incroyable.Les jeunes les utilisent, c’est la première raison de s’y intéresser. Pourquoi ne pas allersur ces territoires pour essayer de faire des transferts? Et ça fonctionne! Il n’est qu’àvoir le bouillonnement de rencontres qui se produit ici, à Ludovia, où des gens d’ho-rizons très divers – chercheurs, politiques, responsables d’entreprises multimédias,enseignants, pédagogues, responsables du ministère de l’éducation… – trouvent un lieu pour laisser des traces de leurs propres apprentissages.

-----1 http://carnets.opossum.ca/mario

2 http://www.ludovia.org, université d’été sur la thématique de l’e-éducation et des applications multimédia

ludiques et pédagogiques.

3 http://www.opossum.ca

4 sur l’opération menée dans le Maine, voir page 295

5 sur l’enquête TNS Sofres, voir page 258

6 http://cyberportfolio.st-joseph.qc.ca

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-----Installer un ordinateurdans chaque classe,ou même cinq ordinateurs par classe,ça n’a aucun sens!»Seymour Papert est mathématicien, informaticienet professeur émérite au MIT (Massachusetts Institute of Technology) ;il est l’un des pionniers de l’intelligence artificielle.-----Imaginez un pays qui connaîtrait un grand développement de la philosophie, de lapoésie, du théâtre, des sciences, etc., mais où personne n’aurait jamais pensé à écri-re. On invente le crayon et le papier. Très rapidement, le commerce et la science setransforment. Quelqu’un émet alors l’idée d’introduire ces inventions à l’école, ce quiprovoque un grand débat : convient-il de doter chaque classe d’un crayon, de troiscrayons, ou plutôt de disposer une montagne de crayons dans une classe spéciale?Ridicule! Tout ce que les enseignants et les enfants pourraient faire de très intéres-sant avec un crayon et une gomme par classe n’aurait évidemment rien à voir avecle rôle que l’écriture a joué dans notre civilisation. Eh bien, avec l’ordinateur, c’estla même chose: installer un ordinateur dans chaque classe, ou même cinq ordinateurspar classe, ça n’a aucun sens! […]

Fragile ? L’ordinateur est devenu l’outil privilégié de tous ceux qui font un travailde connaissance, un travail intellectuel, un travail d’information… Pourquoi en pri-ver les enfants? Le premier réflexe et le premier argument, c’est de dire : «Confierces objets chers et fragiles à des adolescents? Vous n’y pensez pas : ils perdent tout,ils cassent tout !» Pourquoi donc vous méfiez-vous ainsi de vos enfants? Votre atti-tude n’est pas rationnelle : quand vous leur confiez une bicyclette, ils ne la perdentpas, de même qu’ils ne perdent pas leurs jeux vidéo. Toutes les statistiques montrentque lorsqu’on confie des ordinateurs à des enfants, ils les considèrent comme desobjets précieux. Ils ne les cassent pas, ils ne les perdent pas. Il ne s’agit pas techno-logie, ni même d’école: c’est une question qui concerne vos enfants, et vos rapportsavec eux. […]

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Différences. Pour avoir suivi de près l’expérience du Maine, je suis frappé par la dif-férence des discours des initiateurs du projet français. Dans le Maine, on pense queles ordinateurs vont provoquer une mutation de l’enseignement: moins d’ensei-gnement magistral, plus d’apprentissage, une plus grande indépendance pour lesenfants qui dirigeront leur propre travail et leurs études, avec beaucoup plus d’idéespour apprendre en faisant des projets de toutes sortes, etc. En France, au contraire,on considérerait plutôt les ordinateurs comme des outils pour aider les enseignantsà mieux faire leurs cours magistraux. […]

Esprits indépendants. Si on croit, comme moi, que notre siècle a besoin d’esprits indé-pendants, capables d’apprendre des choses nouvelles, alors il nous faut des enseignantsporteurs de ces mêmes convictions. Un enseignant qui ne se croit pas capable – oupas autorisé – d’avoir des idées originales ne peut pas transmettre cette faculté à sesélèves. Jadis, le but de l’école, c’était que les élèves la quittent en sachant faire cequ’on leur avait appris. Mais, aujourd’hui, il leur faut acquérir la capacité de faire cequ’ils n’ont pas appris. C’est un changement d’attitude radical, et je pense que l’or-dinateur le rend possible. Et je pense que c’est dans le Maine que cette philosophieest suivie le plus sérieusement.

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Retranscription d’un entretien vidéo avec Seymour Papert

enregistré à Québec, le 16 mars 2004, à l’issue de l’une de ses conférences.

Ce film a servi d’introduction au colloque

“un collégien, un ordinateur portable: vers un nouvel espace numérique éducatif”,

organisé par le Conseil général des Landes, le 7 mai 2004, à Moliets.

http://www.dailymotion.com/cg40/

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-----L’ordinateur portable relié à internet peutêtre considéré comme un objet pivot, sym-bolique dans l’adaptation des outils àl’humain : il a résolu, au moins partielle-ment, la question de la mobilité.»Bruno Devauchelle est formateur chercheur en sciences de l’éducation; il travaille, au Cepec(Centre d’études pédagogiques pour l’expérimentation et le conseil) de Lyon, à l’accompa-gnement des équipes enseignantes mettant en œuvre les Tice.-----En 1997, 69% des jeunes déclaraient que l’École devait les initier davantage à l’in-formatique1. En confiant à tous les collégiens de 4e et 3e du département un ordinateurportable, les initiateurs du projet landais ont apporté, dès 2001, une réponse concrè-te et totalement nouvelle dans le paysage scolaire français. Parce qu’ils ont eu le cou-rage et la volonté de poursuivre cette expérience sur le long terme, l’évaluationeffectuée en 2008-2009 prend une valeur particulière parce qu’elle invite à réfléchirsur une habitude, et pas seulement sur une expérimentation.Au moment où l’ordinateur portable vient remplacer l’ordinateur fixe en matièred’équipement individuel, cette expérience nous permet de tenter de répondre àquelques questions qui sont au centre des préoccupations des éducateurs, parentsou professionnels.

Le fait de mettre un ordinateur portable à disposition des jeunes peut-il modifier le rapport auxapprentissages scolaires?En 2004, lors du colloque de Moliets, on avait déploré la forte résistance des manuelsscolaires papier alors que chaque élève était équipé d’un ordinateur. Depuis lors, petità petit, la situation a changé du fait d’une évolution conjointe de l’attitude desélèves et des enseignants. Cependant cela ne suffit pas: si l’écran ouvre sur la paged’un livre, et seulement sur cette page à lire, rien ne se passera. Dans le même temps,les élèves ont développé des habiletés à utiliser internet, et cette progression,entre 2001 et 2009, est impressionnante en dehors du monde scolaire qui, pour l’ins-tant, reste encore en marge de ces nouvelles formes d’accès à l’information. Et pour-tant on observe des évolutions, tant du côté des enseignants que de celui des élèves.D’une part les enseignants prennent progressivement la mesure de ce qu’ils peuvent

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“faire avec” les élèves: même si les pratiques restent très marquées par les habitudes,la présence de l’ordinateur des élèves amène progressivement les enseignants à lesutiliser. D’autre part, les élèves manifestent certaines attentes vis-à-vis du système sco-laire et sont prompts à prendre des initiatives. Ils demandent alors à ce que cet usa-ge des Tice soit accepté jusqu’au cœur même de l’acte d’enseignement, l’évalua-tion. Ils utilisent l’ordinateur, et mettent à profit ses potentialités pour leursapprentissages, parfois même à l’insu de l’enseignant. C’est alors à celui-ci de faireen sorte que ces pratiques soient perçues comme enrichissantes, et non pas concur-rentielles ou frauduleuses.

Pratiques familiales, pratiques sociales, pratiques scolaires, quelle place possible pour l’or-dinateur portable dans la vie du jeune qui apprend?La présence de l’ordinateur stimule inévitablement les pratiques. L’ordinateur por-table ajoute la mobilité donc une adaptation plus grande aux contextes de vie desjeunes. À l’intérieur du groupe familial, contrairement à une machine fixe, l’ordi-nateur portable est bien l’outil de celui qui en est le responsable. C’est un outil noma-de que l’on peut facilement déplacer. Les possibilités de connexion à internet parWi-Fi enrichissent cette mobilité en permettant des échanges permanents avecd’autres espaces que l’espace familial. Deux pratiques classiques, l’accès à l’informationet les échanges avec les pairs, sont à la base de l’activité des élèves. Différentesétudes ont montré récemment que les jeunes se protègent de manière habile desdangers qu’ils identifient, mais aussi que les parents ne leur sont, en cela, que d’unmodeste concours. On retrouve ici la problématique des loisirs et du travail scolai-re à la maison qui prend un sens nouveau avec l’ordinateur portable, source poten-tielle de malentendus : on peut croire qu’un jeune travaille parce qu’il est devantson ordinateur, mais on peut aussi surprendre un jeune à la découverte du mondeà partir de recherches qu’il mène sur internet, seul ou en concours avec d’autres qu’ilcontacte par messagerie instantanée. Sans pour autant prendre toute la place par-mi les multiples sollicitations, les ordinateurs portables ont accentué la dominationprogressive des écrans interactifs par rapport aux écrans passifs (télévision). C’estautour de cette interactivité que peuvent se développer des activités d’autant plusriches qu’elles sont en lien avec des apprentissages, scolaires ou non. La curiosité natu-relle de l’enfant peut trouver là un terrain où s’exprimer, encore faut-il trouver desstratégies pertinentes d’accompagnement et de stimulation à la maison, dans les lieuxsociaux, mais aussi à l’école.

Qu’est-ce qu’apprendre pour un jeune ayant un ordinateur portable entre les mains?Les adultes restreignent souvent l’activité d’apprendre au monde scolaire. Dès ledébut de la scolarisation, dans un univers de compétition individuelle, la réussite sco-laire est un facteur surdéterminant pour beaucoup de parents. Pour le jeune, les chosesne sont pas complètement perçues de cette façon-là. L’adolescent qui dispose d’un

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ordinateur portable y voit d’abord un objet identitaire qui l’autonomise face auxadultes. Cette autonomie est aussi une forme d’apprentissage, mais le monde sco-laire ne s’est emparé que récemment et avec précaution de cette compétence.Gagnant avec l’ordinateur portable le droit à “son” écran, le jeune peut donc ydévelopper un ensemble d’activités dont on sait qu’elles constituent une partie deson éducation et de ses apprentissages, scolaires ou non. Comme l’ont montré les psy-chologues, chaque être humain dispose naturellement d’un désir d’investigation dumonde environnant, et de capacités étonnantes pour y arriver. Pouvoir utiliser un ordi-nateur portable, c’est augmenter sa capacité à découvrir le monde. Les parentssavent bien qu’une certaine “guidance” est nécessaire pour éduquer les enfants,même si c’est souvent bien difficile. Avec ces machines nomades, il est plus facile, pourun jeune, d’élargir ses pratiques, mais aussi de s’affranchir de ses parents. Il y déve-loppe bien souvent des apprentissages informels, mais qu’il ne pourra valoriser ques’ils reçoivent un écho dans son environnement familial, amical ou scolaire. De nom-breux jeunes cherchent autour de leurs centres d’intérêts des informations, des com-pléments, pour alimenter leurs projets. Très éloignées de l’académisme, ces pra-tiques sont pourtant bien de vrais apprentissages non balisés. L’École serait tentéede leur donner un cadre; elle essaie, parfois maladroitement, de s’imposer par l’obli-gation du devoir à la maison. Si c’est la seule proposition qui est faite, on verra viteles limites de cette stratégie… Habitués aux communautés d’échanges, les jeunes pour-raient, bien accompagnés, développer des communautés apprenantes à partir de cesmoyens à leur disposition. Jadis les clubs, les ateliers, les groupes, les associations pro-posaient aux jeunes ces moments d’enrichissement; la présence de l’ordinateur por-table ne s’y substitue pas, mais elle offre une opportunité supplémentaire d’offrir uneréponse à la soif de découvrir le monde.

Quel accompagnement des jeunes et des élèves, si l’on veut parvenir à une appropria-tion des Tice ?Que signifie accompagner des jeunes dans un tel contexte? En premier lieu, et l’opé-ration des Landes le met en évidence, il convient de fournir un cadre de possible, fiableet adapté. Ordinateur, réseau, maintenance, etc., en sont la base, mais ce n’est passuffisant. Enseignants, parents, éducateurs ont, en priorité, la responsabilité d’ac-compagner cette formidable mutation.Le premier incontournable de l’accompagnement, c’est le dialogue. Introduire un corpsétranger dans un milieu suscite des réactions de toutes sortes: quel accueil réserve-t-on à l’expression de ces réactions? comment les gère-t-on? À la maison comme àl’école l’ordinateur portable ne doit pas être une séparation, mais au contraire unobjet d’échange.Le deuxième incontournable, c’est l’encouragement. Quand un jeune exprime descentres d’intérêts, l’adulte a souvent tendance à tenter de les cadrer dans le sens qu’ilperçoit comme prioritaire. Or l’équilibre peut être fragile lorsque la concurrence est

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vive entre les intérêts divergents des adultes et ceux des jeunes. L’encouragement,c’est d’abord aider le jeune à prendre conscience de ses propres centres d’intérêts età les approfondir, pour mieux se situer par rapport à eux, et ne pas en faire un espa-ce privé, de repli protecteur contre le monde adulte.Le troisième incontournable, c’est la responsabilisation. L’une des principales diffi-cultés des parents et des enseignants face à l’usage de l’ordinateur portable, c’est lacrainte ou la méconnaissance, et dans les deux cas, le premier réflexe, c’est la sécu-risation: empêcher l’utilisation, encadrer les pratiques. Accompagner le jeune consis-terait plutôt à lui permettre de devenir responsable, donc de rendre compte de sesactivités. Avec l’ordinateur portable, il sera toujours intéressant de repérer des réa-lisations, des trouvailles, à faire partager aux autres, dans la classe ou à la maison.Nous vivons dans un univers environné de TIC de toutes sortes, mais apprendre lesTIC n’est pas une fin en soi. Être acteur raisonné de cet usage ne se résume pas à desapprentissages, tout comme l’écriture ne se résume pas à des exercices scolaires. Cequ’en pédagogie on appelle le transfert des apprentissages est une première marchevers l’appropriation, qui est l’utilisation responsable, autonome et adaptée des élé-ments de l’environnement pour atteindre des buts explicites. Même lorsqu’il y atransgression de la loi, il y a appropriation pour peu que cette transgression soit iden-tifiée au bon moment. Pour cela, il faut qu’il y ait un accompagnement basé sur laconfiance, fondation principale de cet édifice.

Quelles directions pour l’avenir?Chaque nouvelle génération vit environnée d’outils nouveaux. Il est nécessaire de réflé-chir au sens de ces évolutions, et de pouvoir accompagner les jeunes qui entrent dansun tel monde. Les questions sont nombreuses, aussi bien sur le plan technique quesur le plan humain.Les propositions constantes de solutions techniques nouvelles posent deux ques-tions : est-ce que cela va continuer? n’y a-t-il pas des constantes? Il est facile d’ob-server que le monde économique et technique a tout intérêt à faire des propositionsqu’il présente comme nouvelles. À y regarder de plus près, on remarque quelquesconstantes qui amènent à relativiser ces changements pour les situer plutôt dans lecadre de l’amélioration de l’existant que de la nouveauté. Ainsi en est-il de cette évo-lution majeure du “smartphone”, ou terminal miniature mobile, qui est l’intégrationde l’ordinateur dans le moule du téléphone portable. Nouveauté sur le plan del’offre commerciale, ce n’est, techniquement, qu’une convergence et une intégrationsupplémentaire: si on observe une apparente “nouveauté”, sur le fond, les techniquessont simplement rapprochées par une miniaturisation et une intégration de plus enplus forte. Le modèle du numérique électronique est actuellement la constante sous-jacente à tous ces nouveaux objets.L’ordinateur portable relié à internet peut être considéré comme un objet pivot,symbolique dans l’adaptation des outils à l’humain, car il a résolu, au moins partiel-

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lement, la question de la mobilité. L’intégration technique rend disponible cettepropriété nouvelle sur des machines de plus en plus proches du quotidien. Les pucesRFID2, et bientôt les nanotechnologies, ou encore l’optoélectronique, vont accentuercette tendance forte.Pour le jeune, pour l’élève, pour le monde scolaire, cette évolution s’inscrit dansdeux dimensions : l’une, générale, voit aujourd’hui la société s’organiser autour del’information et de la communication numérique, l’autre, spécifique, remet en cau-se la relation au savoir, à l’information, et invite à une réflexion sur le rôle et la pla-ce du système scolaire.La plupart des évolutions des trente dernières années ont été provoquées par la dif-fusion des techniques numériques dans toutes les sphères de la société. L’information,en tant que matériau que l’on transporte et que l’on traite, est au cœur des évolu-tions en cours. Elle en est, en quelque sorte, le modèle initial: désormais l’informa-tion est plus importante économiquement que la marchandise dans notre société occi-dentale. Cette évolution est essentielle à comprendre et à maîtriser pour aider lesjeunes à s’orienter dans le monde de demain.Ils vivent désormais environnés d’écrans de toutes tailles, plus ou moins proches,plus ou moins mobiles ; ils ont des accès constants aux sources qui peuvent les aiderà apprendre. La valeur de l’expérience des Landes est de montrer l’importance de laprise en compte de ce fait par les décideurs et par le monde scolaire, et de repérerles chemins les plus pertinents. On le sait bien, le monde scolaire est partagé entresa conscience du phénomène et un cadre encore trop rigide pour en accepter les consé-quences. Pendant ce temps, les jeunes font preuve d’intelligence et développentdes stratégies qui vont au-delà de ce cadre, et qui les concernent au quotidien. C’estprobablement sur la capacité de chacun à discerner ce qui peut l’aider de ce qui legêne dans ce monde numérique (outils ou contenus), qu’il faudra accentuer lesefforts – les moyens matériels devant devenir de plus en plus invisibles pour céderla place aux usages avancés et raisonnés.

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1 Josiane Jouet, Dominique Pasquier, “Les jeunes et la culture de l’écran”,

revue Réseau n° 92-93, 1999, pp. 26-102.

2 De plus en plus d’objets du quotidien, tels que les cartes de transport

ou les clés de contact des voitures, sont munis de puces sans contact,

utilisant pour la plupart la technologie RFID (radio frequency identification) :

de minuscules marqueurs électroniques lisent à distance les données émises par la puce

grâce à une antenne qui “dialogue” par ondes radio avec un lecteur émetteur-récepteur

sur des distances pouvant atteindre plusieurs dizaines de mètres.

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-----Les compétences numériques des collégiens… et leurs limites.Céline Metton-Gayon est sociologue, chercheuse associée au CEMS (CNRS/EHESS).Elle vient de publier Les Adolescents, leur téléphone portable et internet,aux éditions l’Harmattan (2009).-----Il est désormais usuel d’affirmer que les adolescents appartiennent à une “généra-tion internet”, dotée de fortes compétences dans le domaine des technologiesnumériques1. Les recherches montrent qu’ils ont acquis une “culture de l’écran2”,mettant en jeu un “apprentissage formel des codes de la technique qui repose à lafois sur des savoir-faire, des connaissances empiriques et des représentations men-tales3”. Les adolescents eux-mêmes revendiquent une forte expertise dans le domai-ne d’internet : selon l’enquête d’Olivier Martin4, ceux de la tranche d’âge 10-13 ansdéclarent à 74% savoir installer des logiciels, 73% surfer, et 26% effacer l’historiquede consultation des sites. La palette des compétences déclarées est donc vaste. Pourautant, reste à savoir si le degré d’expertise revendiqué par les jeunes est aussi éle-vé et transverse que celui qu’ils déclarent. Et nous verrons que, dans certainsdomaines, notamment celui des recherches scolaires, la compétence “numérique”des adolescents reste limitée.5

Des compétences avérées…Le sentiment d’expertise et de facilité tel qu’il est ainsi ressenti et exprimé par lesjeunes n’est pas surprenant: les adolescents ont rencontré très tôt internet dans leurtrajectoire biographique. Dans les années 1990, ils ont grandi avec la montée en puis-sance du marché des jeux vidéo sur consoles, et de l’informatique domestique connec-tée à internet. Ils connaissent aujourd’hui la diffusion de la connexion très haut débit,la démultiplication des équipements médiatiques et l’expansion grand public de latéléphonie mobile. En maniant dès leur plus jeune âge ces technologies, ils ont putrès tôt se familiariser avec les modes opératoires de la technique. Leur apprentis-sage paraît d’autant plus facile qu’il se fonde largement sur des usages ludiques etétroitement liés au plaisir. Même lorsqu’ils éprouvent des difficultés, la manipula-tion ludique, ce qu’ils appellent le “bidouillage”, l’emporte sur le sentiment dedéroute ou d’égarement6. Avon, 12 ans, déclare ainsi : «Au début, quand mon pèreil avait son (ordinateur) portable, je voulais savoir […]. Quand je le prenais, desfois, j’arrêtais les jeux et je regardais comment on s’en sert, et comme ça j’ai apprisà m’en servir. »

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De plus, les jeunes bénéficient d’une volonté politique des pouvoirs publics, qui depuisles années 1980 ont multiplié les projets de développement de l’informatique dansles établissements scolaires. Le programme initial “Informatique pour tous7” a lais-sé place à une série d’autres mesures, plus nombreuses encore avec l’arrivée d’in-ternet. Depuis l’année 2000, l’équipement en matériel informatique n’a cessé de pro-gresser et couvre aujourd’hui la quasi-totalité des établissements du secondaire. LeB2i (brevet informatique et internet), à l’origine facultatif, est aujourd’hui obliga-toire pour obtenir le brevet des collèges. En parallèle des projets nationaux, certainesactions ont également été montées par les collectivités locales8. Les jeunes, mêmes’ils ne possèdent pas d’équipement informatique domestique, bénéficient donc d’unecertaine formation à l’informatique et à l’internet dans le cadre scolaire.Toutefois, s’il est incontestable que les jeunes tirent des bénéfices indéniables de leurscompétences, reste à savoir si le degré d’expertise qu’ils s’autoattribuent – et se voientgénéralement attribuer – est sans faille.

…mais des compétences limitées : l’exemple de l’usage scolaire d’internetToutes les études le montrent, internet est aujourd’hui devenu un dispositif d’ac-cès à l’information très massivement utilisé par les collégiens comme mode derecherche. Selon le Clemi (Centre de liaison de l’enseignement et des médias d’in-formation), 69 % des 12-18 ans s’en servent ainsi. Jessica, par exemple, n’utilisepresque plus qu’internet pour ses exposés scolaires : «La bibliothèque, c’est plus àla mode… Moi non plus, j’y vais plus, parce que je tire tout sur internet» (Jessica,14 ans).L’accès aux sources disponibles par internet éveille en effet de forts espoirs de la partde jeunes qui avancent la “facilité” des recherches. Tout se passe en fait comme sicet outil permettait de réduire les efforts cognitifs nécessaires dans le travail d’ana-lyse. «Quand Madame P. me donne par exemple quelque chose sur Antonio Vivaldi,je vais sur Google, je tape “Antonio Vivaldi” et je vois tout ce qu’il y a sur Vivaldi.Je clique sur la biographie, et voilà » (Anthony, 13 ans). L’expression « et voilà »d’Anthony laisse ainsi entendre que le savoir serait là, sur l’écran, sélectionné et pla-nifié, directement transférable de l’écran à la copie scolaire. Mais, bien vite, lesespoirs des jeunes se heurtent en réalité à des difficultés successives. Les travaux deChartier ont en effet bien montré combien les modalités de confrontation ausavoir sur internet sont très différentes de celles de l’écrit, et méritent des compé-tences spécifiques9. En effet, dans la culture imprimée, une perception immédiateassocie un type d’objet, une classe de textes et des usages particuliers. L’ordre desdiscours est ainsi établi à partir de la matérialité propre de leurs supports : la lettre,le journal, la revue, le livre, l’archive, etc. Mais, avec le format numérique, tous lestextes, quels qu’ils soient, sont donnés à lire sur un même support (l’écran de l’or-dinateur), et dans les mêmes formes. Les différents genres ou répertoires textuelsdeviennent donc semblables dans leur apparence et équivalents dans leur autori-

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té. De plus, à la différence d’un texte écrit, l’information recueillie sur internet sefonde sur la juxtaposition d’informations de nature très disparate. Elle s’inscrit doncen rupture avec le principe d’un savoir hiérarchisé et cumulatif, puisque les élé-ments ne sont pas directement mis en relation. La démarche de la recherche élec-tronique pose des défis liés à la nouvelle autonomie du lecteur.Dans le cas des jeunes interviewés, ces défis ne sont pas toujours facilement surmontés.Les jeunes évoquent en effet leurs difficultés successives. Si le choix du moteur derecherche ne semble pas poser de problème10, celui du mot-clef pertinent semblemoins évident.À cette première difficulté dans le choix du mot-clé ajoute parfois une autre liée àla confrontation avec l’hypertexte. En effet, le fait de cliquer sur un lien fait appa-raître une nouvelle fenêtre à l’écran, qui est étrangère au contexte de départ. Lejeune se trouve alors placé devant une multitude de fragments de textes, qu’il doitrelier par un sens. Sur internet, le fil narratif présent dans le livre étant inexistant,le lecteur doit à chaque fois créer un contexte de réception adapté. La lecturehypertextuelle constitue dès lors un saut dans l’inconnu: à chaque clic, l’internau-te quitte un contexte établi pour un autre non défini à l’avance et plus ou moinslié au contexte précédent : «Chaque hyperlien est ainsi une invitation à aller plusloin, une promesse de contenus 11». Stéphane, 12 ans, affirme ainsi : « Je suis allé surVoila (un moteur de recherche). Et je suis tombé sur des sites qui n’avaient rien àvoir avec Beethoven, ou des sites italiens, ou alors sur des sites français mais très malfaits… Par exemple, sur Beethoven, il y avait deux lignes […]. En fait, je croyais queBeethoven il était connu, mais pourtant, il n’y a rien en France.»Une fois les sources d’information trouvées, reste encore à les filtrer et à les hié-rarchiser. L’abondance des données accessibles à travers le moteur de recherched’informations est parfois désarmante12. Cinthia, 13 ans, affirme ainsi : « Il y a un peutrop de sites, parce que… Des fois aussi, ils pourraient résumer quoi […]. C’est trop,parce que nous, on comprend pas tout de suite. Et ça fait beaucoup de travail, par-ce qu’il y a beaucoup de sites, et sur chaque site faut qu’on voie lequel est le plusimportant…» Le tri des résultats n’est pas facile puisque les éléments sont mis aumême niveau, sans avoir été soumis aux exigences de l’évaluation scientifique.Rares sont d’ailleurs les adolescents qui se montrent soucieux de la vérification dessources : beaucoup se contentent de faire un simple recopiage des différentes don-nées trouvées. Le “copier-coller” est d’ailleurs souvent décrit comme un “fléau” parles enseignants, qui dénoncent un certain rapport utilitariste au texte. Le contexteet le cheminement de la réflexion s’effaceraient au profit du seul contenu informatifutile à un moment donné et dans un objectif ciblé.De ce point de vue, certains clivages sont perceptibles : l’âge et l’origine sociale desjeunes. L’âge, tout d’abord, joue dans la mesure où les usages intensifs d’internetcomme mode de recherche laissent progressivement place à d’autres modes fina-lement considérés comme aussi efficaces. Vers la fin du collège, les jeunes semblent

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utiliser internet de manière plus “raisonnée”, et encore plus au lycée. Aurore, 17 ans,avec le recul, affirme ainsi : «Quand j’étais au collège, c’était boulimie d’internet.C’était la solution facile. On se fait une image d’internet parce qu’en fait, au collè-ge, le Net, on idéalise un peu […]. Mais au lycée, je trouve que bon, internet, c’estbien mais c’est large, il faut chercher […]. Donc l’encyclopédie, je trouve qu’on s’yremet un peu plus quand même.»Par ailleurs, les clivages sociaux sont prégnants : tous les jeunes ne sont pas égale-ment invités à utiliser internet par leurs parents. En effet, les familles de milieupopulaire accueillent généralement internet avec intérêt, en se réjouissant des faci-lités d’accès à l’information : « Internet, c’est comme une grande bibliothèque à lamaison : tout est là ! Tu as tout sur place, c’est vraiment génial…» (Mouna, 42 ans,agent d’entretien). Ils encouragent même souvent l’utilisation d’internet à visée sco-laire, sans contrôler les usages qui en sont faits. En revanche, d’autres parents dontle capital scolaire est plus élevé se montrent nettement plus sceptiques quant àl’utilisation exclusive d’internet comme mode de recherche. Ils restent fidèles auxtechniques traditionnelles et à la culture du livre. Et leurs enfants intériorisent l’in-jonction: ils témoignent aussi d’une plus forte culpabilité à aller directement sur inter-net. Stéphane trouve par exemple “trop facile” le copier-coller : « Je me débrouillepour écrire, pour trouver quelque chose dans les livres, parce que sinon, ça veut direqu’on a tout trouvé sur internet… Ça veut dire qu’on n’a rien fait…» Ces jeunes affir-ment se référer davantage à d’autres sources que celles trouvées sur internet. Ils sem-blent enfin davantage capables de cartographier les différents moteurs de rechercheet de les comparer.

ConclusionL’expertise des plus jeunes, donc, n’est pas uniforme et imparable: le concept d’une“génération internet”, dotée de compétences évidentes et également distribuées,mériterait d’être affiné. De ce point de vue, nous venons de le voir, les inégalitéssociales sont flagrantes : les élèves qui bénéficient d’un guidage familial sont lar-gement avantagés dans leurs recherches électroniques, aussi bien dans le choix dubon moteur de recherche que dans le tri judicieux des informations trouvées. Dansce contexte, l’accès à internet, souvent présenté comme un moyen de réduire lesinégalités d’accès au savoir, est en fait susceptible de les accroître. Dès lors, on nesaurait suffisamment rappeler le caractère précieux de l’apprentissage scolaire del’usage d’internet, permettant au plus grand nombre de maîtriser les fondamentauxd’une recherche en ligne.

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1 I. E. Snyder, Page to screen: taking literacy into the electronic era, London and New York, Routledge, 1998.

L. J. Gurac, Cyberliteracy: Navigating the Internet with awareness, New Haven, Yale University Press, 2001.

2 Ce concept a été élaboré en 1988 par Ehrenberg et Chambat en écho à la “culture de l’imprimé” défi-

nie par Roger Chartier, pour évoquer la familiarisation liée au nouveau continuum formé par la multipli-

cation des supports écrans. P. Chambat & A. Ehrenberg, De la télévision à la culture de l’écran. Sur quelques

transformations de l’imaginaire consommatoire. Le Débat, 52, 1988.

3 J. Jouët & D Pasquier., Les jeunes et la culture de l’écran. Réseaux, 92-93, p 29, 1999.

4 O. Martin, L’internet des 10-20 ans. Réseaux, 123, 2004. Clemi, Enquête Mediappro. Appropriation des

nouveaux médias par les jeunes: une enquête européenne en éducation aux médias, 2006.

5 Les données de cet article sont extraites de l’ouvrage Les Adolescents, leur téléphone portable et inter-

net, tiré d’une thèse de sociologie, pour laquelle 76 entretiens ont été menés auprès de collégiens et de leur

famille. Voir C. Metton-Gayon, Les Adolescents, leur téléphone portable et internet, l’Harmattan, 2009.

6 F. Millerand, P. Jacques, P. C. Marie & G. Luc, Les Usages d’internet chez les adolescents québecois. Actes

du Colloque international sur les usages et services des télécommunications, 1999.

7 Consistant, dans les années 1980, à équiper les collèges en ordinateurs “TO7” ou “MO5”.

8 Ces actions consistent notamment à équiper les collégiens de 4e et de 3e d’un ordinateur portable, afin

de les aider dans leur scolarité. Le Conseil général des Landes mène l’opération depuis 2001.

9 R. Chartier, Les métamorphoses du livre, Paris, Editions de la BPI, 2001.

10 L’usage des moteurs de recherche est un des éléments abordés pendant les cours. Les jeunes connais-

sent en général les principaux, de type Google, Yahoo ou Voila.

11 C. Vandendorpe, Du papyrus à l’hypertexte. Essai sur les mutations de texte et de la lecture”, Paris, La

Découverte, p 227, 1999.

12 O. Mongin, M.-O. Padis & R. Robert, Internet, lecture et culture de flux. Entretien avec Jean-François Barbier-

Bouvet. Esprit, 280, 2001.

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-----Tout au long de ce “tour des Landes descollèges”, nous avons vécu des momentsd’attention intense, d’enthousiasme, dejubilation, d’émotion (et, bien sûr, quelquessituations d’ennui!).»Marie Bruneau et Bertrand Genier ont réalisé – de 2001 à 2009 – une vingtaine de numérosdu journal dédié à l’opération “un collégien, un ordinateur portable”, pour le compte duConseil général des Landes.-----Nous avons, sur l’opération landaise, un point de vue un peu singulier: interpelléspar le Conseil général pour accompagner les débuts de l’histoire, nous étions le17 septembre 2001 au collège Jean-Moulin de Saint-Paul-lès-Dax, à l’occasion de laremise des premiers ordinateurs portables. Ensuite, au cours de cette première année,nous avons pu visiter les trois collèges volontaires pour “tester” l’opération: un for-midable remue-ménage était en train de germer, et nous avons eu très vite le sen-timent qu’une telle expérience à cette échelle, et dans un contexte assez inégalementpréparé à accueillir l’arrivée soudaine de ces machines, ne manquerait pas d’en-gendrer un foisonnant gisement d’histoires, d’idées, d’initiatives… Aussi, quelquesannées plus tard, quand la question nous sera posée de rendre compte de l’utilisa-tion pédagogique des ordinateurs portables, l’idée s’imposera tout naturellement:«Plaçons-nous en situation de témoins, d’enregistreurs, pour recueillir – en paroleset en images – quelques-unes de ces histoires… Puis restituons une sorte de chroniquedu projet sous la forme d’un journal.» Nos interlocuteurs nous prennent au mot, etalors que nous pensions n’opérer que sur un nombre restreint de collèges, ils ren-chérissent : «Pourquoi choisir? Il faut les visiter tous!»

Reportage, de l’anglais to report : rendre compteAinsi s’est formé le projet : visiter tous les collèges publics du département, à la foispour y observer des situations pédagogiques “avec ordinateurs”, et pour rencontrerles différents acteurs de l’opération. La règle du jeu était simple: assister à des courset décrire ce qui s’y passe, ce qui nous frappe, nous étonne… Et ouvrir les guillemetspour laisser chaque enseignant expliquer les attendus pédagogiques de chaquesituation. Une simple observation, donc, mais une observation active, avec l’objec-

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«

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tif de traquer le singulier et le générique, les petits rituels et les grands principes…Littéralement, faire reportage – de l’anglais to report : rendre compte.Aujourd’hui (octobre 2009), notre mission s’achève. Nous avons visité quasimenttous les collèges, et avec une moyenne de cinq situations par établissement, nous avonsassisté à près de cent cinquante cours, et conduit plus de deux cents entretiens (per-sonnels d’encadrement et de vie scolaire, enseignants, parents, assistants d’éduca-tion, collégiens). La matière recueillie est conséquente, et nous avons vu des chosesparticulièrement inédites, innovantes, encourageantes: si l’enquête menée par l’ins-titut TNS Sofres (cf. page 258) dresse un bilan quantitatif un peu mitigé, pour ce quiest du “qualitatif”, nous pouvons témoigner que les exemples ne manquent pas!

Qu’avons-nous vu?> dans chaque collège… Allions-nous trouver, dans chaque collège, matière à réali-ser trois pages du journal? C’était l’une des inconnues du projet… Au bilan, la répon-se est “oui”, même s’il y a de grandes disparités d’un établissement à l’autre… Danstous les collèges, nous avons rencontré des enseignants intéressés et impliqués; elleset ils ont essayé d’imaginer de nouvelles manières de faire, pour intégrer les ordinateurs– aussi bien le leur que celui des élèves – dans leur enseignement.

> dans toutes les matières… C’est sans doute le fait le plus marquant: il n’y a pas d’uncôté des disciplines “avec ordinateurs”, et d’autres “sans”… Les ordinateurs por-tables ont naturellement trouvé leur place en technologie et dans l’enseignementdes sciences expérimentales – que ce soit en sciences physiques et chimiques, ou enSVT (sciences de la vie et de la Terre). En langues vivantes, ils ont ouvert d’éton-nantes possibilités, aussi bien en matière d’écoute que d’enregistrement. En histoi-re et en géographie, la richesse et la qualité des ressources documentaires sont plé-biscitées. En français, les usages sont en plein développement, bien au-delà de laperception que nous en avions au début de notre périple: les professeurs de lettresclassiques, par exemple, ont largement adopté les outils numériques pour l’ensei-gnement du grec et du latin. En éducation musicale ou dans les arts plastiques, cer-tains enseignants ont poussé très loin l’intégration des ordinateurs dans leur péda-gogie, notamment en tant qu’outils de création. Plus difficile à observer parce quel’utilisation n’y est que très ponctuelle, la place des ordinateurs portables a égale-ment été trouvée en éducation physique et sportive. Quelques réserves peut-être –ou hasard des rencontres –, une utilisation visiblement plus limitée en mathématiquesque ce que nous aurions pu imaginer. Une bizarrerie: la grande différence de pra-tiques entre les professeurs d’espagnol et leurs collègues d’anglais ou d’allemand:toutes les langues vivantes ne s’enseigneraient-elles pas de la même manière? Et unconstat : ce qui fait aujourd’hui l’actualité numérique – blogs, réseaux sociaux, etc.– est totalement absent des pratiques, même de celles des enseignants les plus enga-gés dans l’opération.

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> quel que soit l’âge… Contrairement à certaines idées reçues, ce ne sont pas forcémentles enseignants les plus jeunes qui ont recours aux ordinateurs des élèves pendantle cours: nous avons notamment rencontré des quinquagénaires heureux qui ont pui-sé là une motivation nouvelle, et l’occasion de sortir de la routine, et de remettre enjeu leur pédagogie. Ce sont souvent ceux-là qui nous ont proposé les situations à lafois les plus maîtrisées et les plus innovantes, même s’ils étaient parfois technique-ment moins à l’aise que certains de leurs collègues plus jeunes – sans doute plusfamiliarisés avec l’informatique, mais parfois moins disponibles, moins assurés péda-gogiquement, ou plus frileux vis-à-vis de leur hiérarchie. Voici peut-être une desexplications à la diffusion relativement lente des pratiques “avec ordinateurs” :contrairement à ce que laissent transparaître les discours, les difficultés sont sans dou-te ici moins d’ordre technique que pédagogique…

> mais de manière très contrastée… D’un établissement à l’autre, et sans qu’il y aitapparemment de raison objective pour expliquer cela, l’utilisation des ordinateursportables est quantitativement très différente. Ici, le recours aux ordinateurs desélèves est très régulier dans quasiment toutes les matières, alors que là, dans d’autresétablissements a priori en tous points semblables, il en va tout autrement. Chaquecollège a son histoire; et sans doute, le rôle du chef d’établissement, la compositionde l’équipe pédagogique, le projet d’établissement ont quelque chose à voir dansl’affaire… Une chose est certaine: des synergies particulières sont à l’œuvre. La dif-fusion des pratiques semble s’opérer un peu par contamination – l’échange se fai-sant de pair à pair, entre collègues. On voit se développer ici un pôle fort d’usagesen mathématiques, là des pratiques quasi généralisées en langues vivantes, etc.

À quoi servent les ordinateurs?Dans les différents cours auxquels il nous a été donné d’assister, nous avons pu obser-ver trois types de situations:– seuls l’ordinateur de l’enseignant et le vidéoprojecteur sont utilisés, éventuellementavec un tableau interactif ;– seuls les ordinateurs des élèves sont mis à contribution;– l’ordinateur de l’enseignant, les ordinateurs des élèves et le vidéoprojecteur sontutilisés ensemble, généralement avec un tableau interactif.Dans le premier cas, c’est souvent, pour l’enseignant, une manière de rendre son coursplus vivant, plus riche, plus attractif, d’améliorer la façon de présenter les choses, dedélivrer un savoir, d’expliquer des phénomènes.Dans le second cas, les élèves sont généralement dans une démarche “active” qui lesplace au cœur de la recherche – l’enseignant allant de l’un à l’autre, pour orienter,stimuler, etc.Dans le troisième cas, il faut bien distinguer ce qui est de l’ordre d’un cours magis-tral classique – le professeur délivrant son cours, et les ordinateurs des élèves servant

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uniquement à la prise de notes –, d’autres situations plus inédites dans lesquelles lesordinateurs des élèves servent par exemple à conduire une recherche documentai-re, visionner un document audiovisuel, produire un texte et/ou s’enregistrer.Ainsi, d’un cours à l’autre [comme on pourra le constater dans les pages qui sui-vent], les usages sont bien différents. Parfois, les ordinateurs servent à faire d’uneautre manière – ou mieux – ce qu’on faisait auparavant: exercices, prise des notes,consultation de documents, etc. Par contre, notamment quand les ordinateurs desélèves sont mis à contribution, on assiste à l’invention de nouvelles situations péda-gogiques. Ce cours d’espagnol, par exemple, où chaque élève a pu écouter un docu-ment sonore, rédiger un texte à propos de ce qu’il en avait compris, et s’enregistrerpour rendre son devoir sous la forme d’un fichier audio – le tout dans une ambian-ce studieuse –, nous a fortement impressionnés! Mais il est certain que cela ne s’im-provise pas. Ces situations doivent se préparer, et la réussite tient autant à la maniè-re dont l’enseignant les installe, qu’au fait qu’il le fasse régulièrement, en inventantcertains rituels: à quel moment du cours interviennent les machines? comment accè-de-t-on au réseau? etc. Toute une série de petites habitudes à “faire ensemble” quirendent ces pratiques naturelles… Non, ça n’est pas simple, mais quand on y arrive,la plus-value est évidente.

Pour conclure…Rappeler que la spécificité de l’opération landaise, c’est le fait que chaque collégiende 4e et de 3e dispose, pour l’année scolaire, d’un ordinateur personnel portablerichement doté en logiciels et en ressources pédagogiques. Et qu’à cette échelle, etsur une telle durée, cette histoire est unique en France.Préciser qu’il nous semble bien difficile – voire illusoire – de vouloir dresser un bilanprécis des usages, et d’en généraliser les conclusions, tant chaque situation est sin-gulière… En l’absence de modèles pédagogiques préétablis, de directives, ou d’orien-tations, chaque collège, chaque enseignant joue sa propre partition, plus ou moinsactivement, avec plus ou moins d’imagination, de liberté, d’enthousiasme. Tout aulong de ce “tour des Landes des collèges”, nous avons vécu des moments d’attentionintense, d’enthousiasme, de jubilation, d’émotion (et, bien sûr, quelques situationsd’ennui!). Nous avons aussi parfois douté, en réalisant à quel point l’école n’est paspréparée à accueillir ces machines à certains égards un peu “diaboliques”. Des ensei-gnants ont été déstabilisés, d’autres enthousiasmés, tous se sont trouvés dans l’obli-gation de se poser beaucoup de questions, particulièrement sur leur rôle et sur leurmanière d’enseigner. Comment gérer une situation de classe, quand on n’a plusdevant soi que des visages cachés derrière des écrans? Un débat s’est ouvert au sujetde l’accès à internet, un autre à propos des usages non strictement scolaires desordinateurs…Engagés comme observateurs et comme témoins, investis de la mission de collecteret de restituer un peu de ce vécu individuel et collectif, nous nous sommes laissés

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prendre à l’aventure… Les étonnements, surprises, enthousiasmes ou doutes de nosinterlocuteurs nous ont, par contamination, étonnés, surpris, enthousiasmés ou rem-plis de doutes à notre tour… Des questions essentielles ont été posées; certaines com-mencent à trouver des réponses. D’autres non. Une collectivité territoriale met enœuvre des moyens ; des enseignants sont en train d’inventer la vie qui va avec.

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1 Tous les numéros du journal En Connexion

et différents documents de communication sont disponibles, sous forme numérique,

sur http://issuu.com/1collegien1ordinateurportable/docs

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#3.AUCOLLÈ-GE.

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Les langues vivantesPour l’enseignement des langues vivantes, le premier avantage desordinateurs portables, c’est de pouvoir disposer, à volonté, d’unegrande variété de documents “authentiques” – c’est-à-dire parléspar des locuteurs dans leur langue natale. L’ordinateur de l’élève est un véritable petit laboratoire de langues:en cours ou à la maison, chacun peut facilement écouter ou vision-ner à son rythme, globalement ou par morceaux, toutes sortes dedocuments audiovisuels – émissions de radio, publicités, actualitéstélévisées, clips vidéo, chansons, etc. –, et progresser ainsi dans sacompréhension de la langue à l’oral. L’élève peut également s’enregistrer et s’écouter autant de foisqu’il le souhaite avant d’envoyer – via internet ou le réseau du col-lège – le produit de son travail à ses professeurs.Avec internet, on entre facilement de plain-pied dans la vie et la cul-ture du pays dont on étudie la langue, par exemple, pour préparerun voyage: chercher des horaires de trains, découvrir une ville ou lescollections d’un musée, etc. Les élèves peuvent entreprendre des re-cherches autonomes, et le professeur y trouve de nouvelles possi-bilités pour enrichir ses cours, et les rendre plus vivants.

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collège George Sand, à Roquefort – mars 2009Cours d’espagnol de Cecilia Palencia, avec une classe de 3e

/ / / Noticias del mundoUn cours branché en direct sur la respiration dumonde, qui caracole «à sauts et à gambades»d’un média à l’autre…

Nouvelles du monde. Un élève s’est chargé d’aller écrire la date du jour surle tableau blanc : Viernes dieciséis de Enero de dos mil nueve. Sur l’indi-cation du professeur, tous les ordinateurs sont maintenant connectés surle site d’information en espagnol www.Terra.es. On prend connaissance dela dernière nouvelle qui s’affiche, photo à l’appui. Joseph résume (en es-pagnol) : «C’est l’histoire du pilote qui a réussi à faire amerrir en urgenceun Airbus sur l’Hudson, aux États-Unis.» Sans s’attarder plus longtemps, le professeur affiche maintenant la cartedes prévisions météo: nous apprenons que Madrid est soumise à une al-ternance de nuages et d’éclaircies, alors que Séville s’installe dans la dou-ceur… «Depuis la 4e, nous expliquera plus tard Cecilia Palencia, chacun demes cours commence par cette rapide incursion sur les nouvelles dumonde. Le plus difficile, au début, c’est d’habituer les élèves à brancher etdébrancher leurs ordinateurs en silence. Mais dès qu’ils savent le faire, c’estgénial ! Et régulièrement, j’apprends qu’ils sont allés tout seuls sur le siteTerra.es, en dehors du cours. C’est bien qu’ils aiment, non? Même quandje fais un cours très classique – il faut bien apprendre les conjugaisons…–, je garde toujours un petit moment pour l’actualité. Parce que j’aime bienchanger de média, passer d’une chose à l’autre, varier…»¿Que es eso? Nous voilà sur un site d’exercices. Candice vient piloter l’or-dinateur du professeur. Son travail s’affiche sur le tableau: il est questionde choisir le terme qui convient pour compléter une phrase simple…C’est au tour de Joseph – ici, on dit José – de la remplacer. «Nous venonsde raviver quelques éléments de vocabulaire et d’expression orale, nousindiquera plus tard le professeur.» Tout s’est passé très vite. Hop! Nousvoilà déjà ailleurs…Melchor, Gaspar y Baltasar. Tout le monde connaît les rois mages; mais sa-vez-vous qu’en Espagne, ce sont eux, et non pas le Père Noël, qui appor-tent des cadeaux aux enfants sages (et du charbon à ceux qui ne le sontpas)? Encore un tour sur internet, histoire de regarder le reportage de la

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télévision espagnole sur la toute dernière fête des rois à Barcelone. Le pro-fesseur fait régulièrement une pause pour s’assurer que, dans la classe,on a compris le sens général, sans s’attarder outre mesure sur les détails…«Vous récupérerez les vidéos sur le réseau pour les regarder à nouveauchez vous. Et vous essaierez de bien comprendre chaque question du pré-sentateur, et les réponses des enfants.»Rumbatón pa mi guerrera. «Vous vous souvenez de la chanson que nousavons apprise avant les vacances?» Le professeur lance le morceau sur sonordinateur relayé par un ampli. C’est un long texte. Une avalanche de mots.Mélange d’influences rock, latines, reggae… Inutile de suivre les paroles surle papier : la plupart des élèves connaissent par cœur la moindre intona-tion de ce texte de Huecco. Attention, énergie! Ils sont dans la musique, dansle rythme, dans la poésie… «C’est une chanson difficile, nous dira CeciliaPalencia. Ils se sont exercés chez eux, en regardant la vidéo. Je sais qu’ilssont tout le temps sur l’ordinateur, alors je leur dis: “Moi ça ne me dérangepas que vous écoutiez des chansons, mais choisissez-les en espagnol!”»Amérique du Sud. Encore quelques minutes avant la fin du cours. Juste letemps de lancer un défi! À tour de rôle, un élève propose le nom d’un pays;ses camarades doivent en trouver la capitale. Les doigts se lèvent… Ilsconnaissent tout! Quand nous demanderons à Cecilia Palencia quel est sonsecret: «Je m’appuie sur ce qu’ils aiment. Si je leur dis, par exemple: nousallons travailler sur l’Amérique du Sud, ils vont trouver cela très ennuyeux!Mais si je leur demande de trouver un symbole pour chaque pays, les gar-çons cherchent un footballeur, les filles, plus sages, un monument… De toutefaçon, il faut tout connaître, non?»

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collège de Saint-Vincent-de-Tyrosse – janvier 2008Cours d’espagnol de Nadine Castéra, avec une classe de 3e “européenne”

/ / / Un vrai labo de languesÉcouter, et saisir au vol quelques bribes desens. Parler, parce qu’à plusieurs on com-prend mieux. Écouter encore. Écrire une suiteà l’histoire et s’enregistrer…

«Allumez vos ordinateurs, demande le professeur, et mettez-vous tout desuite sous SynchronEyes1. Je distribue des casques… Vous allez téléchar-ger le document sur lequel nous allons travailler aujourd’hui, puis l’écou-ter et noter tous les mots que vous comprenez.» Petit moment d’agitationdans la classe, mais l’opération est rondement menée, et chacun se metbien vite au travail…Écouter et comprendre. «Je ne comprends rien!» se déses père mon voisinà la première écoute. «C’est souvent comme ça, nous expliquera NadineCastéra. Au début, il y a toujours un moment de flottement: cette confron-tation directe avec d’autres voix que la mienne est très difficile pour lesélèves. Ensuite, avec l’habitude, ils se rendent compte que l’important, cen’est pas de comprendre tous les mots, mais de savoir décrypter un mes-sage à partir de quelques indices, de quelques mots-clés essentiels.»Concentration dans la classe; quelques bribes de sons s’échappent des ma-chines… Au tableau, SynchronEyes montre les écrans de tous les ordina-teurs de la classe: ici et là, quelques mots apparaissent par vagues, quandl’un ou l’autre des élèves les frappe sur son clavier. “No soy feliz”, “me le-vanto temprano”, “de mal humor…” C’est le travail de Thomas que le pro-fesseur a choisi d’afficher pour démarrer la mise en commun. Une dis-cussion, en espagnol, établit que le document sonore que chacun vientd’écouter évoque les problèmes d’une femme aux prises avec les difficul-tés de la vie quotidienne. Au fil des échanges, les détails de l’histoires’éclaircissent, et Thomas, depuis son ordinateur, corrige et complète sontravail toujours affiché au tableau, et dans la classe, chacun fait de même. Il s’agit maintenant de préciser les problèmes rencontrés par l’héroïne…«Stop ! Todo el mundo levanta los ojos – Levez les yeux: nous allons fairele point…» C’est une femme, elle a un mari et deux enfants. Elle supportemal son chef, ses clients, son mari, les embouteillages, ses enfants…

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Écrire. «Ouvrez maintenant un logiciel de traitement de texte; vous allezvous mettre à la place de cette dame, et écrire trois phrases sur lesbonnes résolutions qu’elle devrait prendre pour changer sa vie.» Nina de-mande si on doit utiliser les mots de vocabulaire du cours précédent; unde ses camarades s’il peut inventer un nom pour le mari. «Madame, onpeut dire : ¿Me suicidaré?»Le professeur passe maintenant de l’un à l’autre pour aider chacun à cor-riger son texte: «Je vous signale qu’au futur, les règles d’accentuation sonttrès importantes. Vous savez que vous disposez d’un petit utilitaire qui vouspermet de placer les accents très facilement…»Écouter encore, s’entraîner, et s’enregistrer. «Quand vous avez terminé, vouscopiez votre document, et vous le collez dans Lectra2. Vous écoutez aumoins quatre fois votre texte, en essayant de le mémoriser et en faisanttrès attention à l’accentuation. Vous passez ensuite sur Audacity3 pour vousenregistrer…» En réponse à notre interrogation, Nadine Castéra ex-plique : « Ils posent leur texte par copier-coller sur le logiciel Lectra qui enfait une lecture automatique. Certes, la voix est un peu métallique, maisce n’est pas bien grave: les accents sont correctement posés, c’est ce quim’importe. Ils écoutent deux ou trois fois, et quand ils sont prêts, ils peu-vent s’enregistrer.»Effectivement, dans la classe, les élèves écoutent, s’entraînent à voixbasse, et s’enregistrent discrètement avec le microcasque. «Sauvegardezvotre fichier sur le réseau, avec votre nom, et la terminaison MP3.» Le pro-fesseur affiche au tableau le dossier dans lequel chacun doit enregistrerson fichier ; les uns après les autres, les noms des élèves apparaissent.Après le cours. «J’essaie d’exploiter au maximum les possibilités de l’or-dinateur, nous expliquera Nadine Castéra. Au début, il a fallu se lancer, etce n’est pas évident; c’est tout à fait autre chose qu’avec une méthode clas-sique. Maintenant, ce qui me plaît surtout, c’est le fait que chaque élèvepuisse travailler à son rythme et à son niveau… Intégrer les ordinateurspersonnels dans l’enseignement ne veut pourtant pas dire faire n’importequoi – on pourrait être tenté, par exemple, de proposer beaucoup trop dechoses à l’écoute… –, mais il faut au contraire savoir faire des choix, et or-ganiser très rigoureusement chaque séquence en fonction de ses objectifs.[…] L’ordinateur permet de personnaliser l’enseignement, mais il y a desmoments où on se retrouve tous ensemble, et c’est ce que j’aime. […] Sij’avais fait écouter ce même document à toute la classe, seuls les esprits lesplus vifs auraient pris la parole. Ici, lorsqu’on se concentre sur la compré-hension, chacun garde la maîtrise: certains mettent un peu plus de temps,ils reviennent en arrière… Et finalement, tous parviennent à comprendrequelque chose. En fait, l’ordinateur permet à chacun de s’approprier le do-

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cument, pour participer ensuite à la construction du cours. J’ai vraimentl’impression que les élèves sont beaucoup plus actifs. En fin de compte, l’im-portant c’est bien que tous aient réussi et participé, à leur niveau, non?»1 SynchronEyes est un logiciel de gestion des ordinateurs des élèves depuis celui du professeur.

2 Lectra est un logiciel d’entraînement à la lecture qui existe pour le français, l’allemand, l’an-

glais, l’espagnol, l’italien et l’occitan.

3 Audacity est un logiciel libre de manipulation de données audio-numériques.

-----collège de Saint-Pierre-du-Mont – avril 2009

Cours d’anglais de Howard Bennett, avec une classe de 3e

/ / / Present perfectFluidité et souplesse de l’utilisation des outilsnumériques pour ce cours qui implique per-sonnellement chaque élève, tout en laissantune porte ouverte à l’imprévu.

Present perfect? Notre professeur le sait bien, voilà une forme verbale quipose souvent beaucoup de problèmes aux francophones: «Je vous pré-viens, cette subtilité de la langue anglaise ne s’acquiert vraiment qu’à forcede pratique!» La courte explication “magistrale” qui va suivre s’appuie surun petit schéma, dans lequel le temps file sur une ligne horizontale: àgauche, le passé, à droite, le futur… Le professeur poursuit son explica-tion sur le tableau interactif, en affichant un site internet qui annonced’emblée la couleur : «Un temps bizarre, avec un nom bizarre…» Ques-tions-réponses sur un tempo vif. Comment se construit la forme verbale?Quelques cas précis d’utilisation? Tous les renseignements sont sur la page

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web. «Ce qu’il faut retenir, conclut le professeur, c’est que le present per-fect est employé quand on fait un bilan, quand on ne s’intéresse pas auxcirconstances d’un événement…»Il convoque maintenant un nouveau site web sur le tableau. C’est le bloganglophone d’un voyageur au long cours: Thailand, Laos, Vietnam, India,Nepal… Tour à tour, les élèves sont invités à former une phrase qui meten œuvre le fameux present perfect : “He has gone to Uganda…” Une carteretrace l’itinéraire complet de notre globe-trotter : nouveau prétexte à fairecirculer la parole. Et les volontaires ne manquent pas pour s’essayer à desvariations, tant la règle du jeu est clairement établie: “He has stayed… hehas seen… he has visited…”Where have you been? Sur l’écran du tableau interactif, une mappemondetirée de Google Maps va être le support d’un nouvel échange. Chacun estinvité à désigner un pays qu’il a lui-même visité, en anglais, of course ! Eten prenant bien soin de se servir du present perfect… Un grand voyage vanous conduire au Maroc, en Sicile, à Madrid, Montréal, en Angleterre et auLiban… Le professeur surligne scrupuleusement chaque nouvelle destina-tion. L’exercice se poursuit sur une carte de France: Poitiers, Nantes,La Rochelle, Moustey, Nancy, Aurillac. «Ce détour n’était pas vraiment prévu dans mon planning de cours, nousindiquera plus tard Howard Bennett, je l’ai ajouté en route… J’adore tra-vailler en funambule, et sans filet! Certains professeurs s’inquiètent toujoursà propos des pannes: il faut savoir qu’avec l’informatique, on s’expose à desimprévus, mais à l’inverse, on a aussi la possibilité de changer de plan decours à tout moment! Ce qui est authentique, ici, c’est le vécu des élèves.Et je privilégie toujours ces moments d’échange où chacun s’exprime dansune structure guidée, où l’on parle de soi, de ses parents, de son expériencepersonnelle…»What did you do? L’habitude est bien établie depuis la classe de 4e : tousles lundis matin, en cours d’anglais, chacun raconte son week-end. «En-core une façon de privilégier les échanges, commente Howard Bennett. Jeme prête moi-même au rituel. Pour cet exercice, que nous appelons “prisede parole en continu”, je demande à chaque élève d’essayer de parler aumoins une minute. Ses camarades sont en situation d’évaluation auditive:ils doivent noter ce qu’ils ont compris.» Aujourd’hui, les ordinateurs sontmis à contribution, et chacun, via le logiciel Audacity, est invité à enre-gistrer son récit sur son ordinateur. Un gentil brouhaha remplit bientôt lasalle. La procédure est parfaitement au point. Microcasque sur la tête, per-sonne ne semble particulièrement impressionné, et l’opération ne prendque quelques minutes. «Inutile d’écouter votre enregistrement, indique leprofesseur. Quand vous avez fini, envoyez-moi votre fichier sur le réseau.»

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La juste place. Encore quelques minutes avant la fin du cours. Le profes-seur distribue une liste de mots: cheville, bras, dos, barbe, sang, cerveau…et donne la consigne, pour la prochaine fois, de chercher, avec l’ordina-teur, leur traduction en anglais. «Quand on veut parler de l’utilisation desTice, nous dira plus tard Howard Bennett, on a souvent tendance à pré-senter des cours où l’informatique tient la place centrale. C’est un contre-sens ! Mon propos n’est pas de vous montrer comment on utilise l’infor-matique : elle est là, elle fait partie de notre quotidien. Et si l’ordinateurpouvait avoir, il y a quelques années, un côté un peu “strass et paillettes”,il fait maintenant partie des meubles, comme le tableau blanc et le pupitre.La clé de mon cours d’aujourd’hui, c’était l’apprentissage d’une structureverbale un peu complexe et assez difficile à comprendre pour les Français,puisqu’elle n’existe pas dans votre langue. Je me sers des outils informa-tiques dans la mesure où ils me sont utiles.»

-----collège de Linxe – janvier 2009

Cours d’anglais de Magali Benquet, avec une classe de 3e

/ / / Oral comprehension & recordingLe professeur a noté au tableau la liste du ma-tériel nécessaire: “You need internet, headset,Audacity and personnal worksheet.”

La classe est divisée en deux ateliers. Oral comprehension pour le premier.Recording pour le second… «Il faut accepter de perdre du temps au dé-but…», nous confie Magali Benquet en aparté, pendant que, dans laclasse, chacun s’installe, allume son ordinateur, se connecte au réseau, ré-cupère casque audio et micro…

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Oral comprehension. Les élèves du premier groupe sont invités à répondre,par écrit, à un questionnaire qui suppose de s’être connecté à un site viainternet1, et d’avoir écouté et compris deux interviews d’anglophones surla célébration de Noël, l’un en Afrique du Sud, l’autre en Irlande. Casquesaudio sur la tête, chacun se concentre, écoute et réécoute.Florian a eu un peu de mal : «Ce n’est que ma deuxième année d’an-glais…», me dit-il. «Combien de fois as-tu écouté la séquence? lui de-mande son professeur. – La première fois en entier, puis par morceaux,deux ou trois fois. – C’est insuffisant: recommence encore plusieurs fois;ensuite tu feras une écoute ciblée pour trouver les informations précisesdont tu as besoin pour répondre aux questions.»«Parfois, commente Magali Benquet à notre intention, les élèves se lais-sent bercer par cette espèce de bain sonore de la langue étrangère, un peucomme s’ils écoutaient de la musique sans prêter attention aux paroles…En fait, il faut savoir pourquoi on écoute: soit on le fait pour essayer decomprendre, soit simplement pour pouvoir répéter ce qu’on entend, sinon,on rêve et on ne comprend rien. […] Avec les ordinateurs portables, cha-cun peut fonctionner comme il veut: certains mettent le son très fort,d’autres vont écouter et réécouter le morceau plusieurs fois, d’autres en-core vont morceler l’écoute. Tout le monde peut vraiment progresser.Avant, quand nous faisions une écoute en classe entière, c’était toujoursles meilleurs qui réagissaient en premier.»Pas trop difficile? «Ça va», me répond Coline, qui finit tranquillement derédiger ses réponses. Sur une échelle de 1 à 10, Mory et Florian s’accor-dent à estimer la difficulté à 5,5. Et Julien de commenter: «Au début, onne comprend rien, mais en écoutant plusieurs fois, ça vient. C’est quandmême dur, mais c’est faisable…»Recording. Pendant ce temps, les élèves du second groupe doivent s’enre-gistrer en improvisant quelques phrases, à partir des notes prises à l’oc-casion des séances précédentes. «Je leur ai demandé de faire une re-cherche : chacun devait choisir un personnage anglophone, et repérerquelques éléments de sa vie. C’était une recherche dirigée qui a donné lieuà toute une série d’activités. Ce qui est demandé aujourd’hui, c’est ce quenous appelons dans notre jargon, de la “prise de parole en continu”. Cha-cun doit faire des phrases complètes, et s’enregistrer avec Audacity pen-dant au moins une minute, mais ils ne doivent surtout pas s’enregistrer enlisant un texte qu’ils auraient écrit avant.»Émila a choisi de faire le portrait de John Lennon. Elle vient de terminerson enregistrement. Ouf! Mais elle n’est pas vraiment satisfaite: «Je croisque je vais le refaire…»

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Le cours se termine. «Vous exportez votre document en mode MP3, et vousl’enregistrez par le réseau, dans le dossier “productions orales, biogra-phies”, en n’oubliant pas de noter votre nom! La semaine prochaine, noustravaillerons sur une chanson: vous avez le clip et le karaoké sur le réseau.Chacun doit apprendre une ligne de We are the world, et le chorus. Bonou pas bon en anglais, vous en êtes tous capables. Pour faire un mur,chaque brique est importante…» Fin du cours : «By by…»-----

1 www.coe.int/T/DG4/Portfolio/documents/cadrecommun.pdf

2 www.audio-lingua.eu : ce site propose des fichiers MP3,

enregistrés par des locuteurs natifs, libres de droits pour une utilisation pédagogique.

-----collège Saint-Exupéry, à Parentis – mars 2009

Cours d’anglais de Carlos de Oliveira, avec une classe de 3e

/ / / “You said a cobra?”Tableau interactif et ordinateurs portablessont tour à tour convoqués pour accompagnerla progression des élèves et les amener à s’ex-primer oralement.

Lire. “Suddenly, the hostess’s face became pale…” Le cours débute par lalecture à haute voix d’un texte projeté sur le tableau interactif ; à tour derôle, les élèves s’appliquent à prononcer correctement les mots de cettelangue à la fois familière et lointaine… La scène se passe en Inde. Le nar-rateur, qui participe à une réception à l’ambassade, est seul à remarquer

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qu’un cobra circule entre les pieds des invités, très absorbés par leurs ac-tivités mondaines. Dans la classe, le professeur questionne ses élèves pours’assurer que chacun a bien compris. La parole circule : «Le vidéopro-jecteur est, dans ce cas, un outil extrêmement mobilisateur, commenteraplus tard Carlos de Oliveira : les élèves n’ont pas la tête baissée sur leurlivre, et tous les regards sont focalisés sur le tableau. Le texte est affichéen grand : c’est clair et évident. Quand j’attire leur attention sur unephrase, tous la voient en même temps, personne n’est en train de cher-cher la ligne…»Réfléchir. «Allumez maintenant vos ordinateurs pour copier le dossier quinous intéresse: vous allez devoir me prouver que vous avez compris le sensdu texte que nous venons de lire…» S’il se présente comme une sorte dejeu, l’exercice qui attend nos élèves suppose un réel effort de réflexion: unedizaine de phrases courtes – en anglais, bien sûr – sont disposées surl’écran, sans aucune logique apparente. Il s’agit de les déplacer pour re-constituer la trame du récit. «C’est, dans la continuité du travail de lec-ture, une façon de m’assurer que le sens du texte est bien clair pour toutle monde, et de préparer l’activité suivante», nous glissera le professeur,pourtant très occupé à passer de table en table, volant au secours de l’un,mettant un second sur la voie, encourageant un troisième… «Stop ! Quiveut venir au tableau, pour placer les trois premières phrases?» Félix estvolontaire. Plusieurs de ses camarades vont ensuite se relayer jusqu’à lareconstitution complète de l’histoire.Parler… Le professeur distribue maintenant un micro-casque à chaqueélève : «Ouvrez le fichier son, vous allez entendre une question, à laquellevous devez répondre en utilisant le micro pour vous enregistrer. Vous pou-vez relire le texte, pour bien vous imprégner des expressions, avant derépondre.» Voilà donc nos élèves « lâchés sans bouée» – l’expression estde Carlos de Oliveira : «L’avantage de l’ordinateur portable, c’est qu’ilspeuvent s’enregistrer une première fois, puis s’écouter et recommencers’ils le souhaitent. – Un vrai petit labo de langue? – C’est tout à fait ça…et qui offre une certaine autonomie à chacun: les élèves en difficulté peu-vent travailler à leur rythme, tandis que ceux qui sont plus à l’aise pas-sent à l’activité suivante sans attendre que tout le monde ait fini. » Visages tendus, regards fixes: la concentration est flagrante, et notre pré-sence dans la classe complètement oubliée. «Je suis sûr que chacun auraau moins écouté la question, et réfléchi à une réponse, en s’aidant éven-tuellement du document… Et comme je leur demande de me rendre unfichier son, ils sont obligés de produire quelque chose. Alors que dans unesituation plus classique, en dehors des quatre ou cinq élèves qui sont vrai-ment dans le travail, les autres sont souvent passifs. Certains peuvent

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même passer une heure sans dire un seul mot. […] Aujourd’hui mon ob-jectif, au-delà de la compréhension, c’est d’éclaircir un point grammati-cal bien précis: l’emploi du prétérit. Quand nous ferons la correction, nousnoterons cette règle, avec un résumé du texte. Ceux qui le souhaitentpourront utiliser leur ordinateur, d’autres préféreront écrire sur leur ca-hier : c’est à eux de choisir. »Driiing! La sonnerie interrompt le cours. Les élèves repartent avec laconsigne de terminer l’exercice à la maison. Carlos de Oliveira, s’il se dé-clare en grande affinité avec les outils numériques, n’est pas pour autantun inconditionnel du tout informatique: «J’apprécie cette diversité d’ou-tils qui est à ma disposition: cela me permet de travailler sur plusieurs sup-ports et de varier les activités. Avec cette classe, j’ai attendu le début dusecond trimestre avant de travailler avec les ordinateurs: je souhaitais,dans un premier temps, fonctionner en face à face avec mes élèves.»

-----collège Serge Barranx, à Montfort-en-Chalosse – mai 2009

Cours d’occitan de Patric Guilhemjoan, avec un groupe d’élèves de 4e

/ / / “A hum de calhau”1

«Anglais, espagnol, occitan: toutes les languesvivantes s’enseignent de la même façon!»

“E son alucats los ordinators?” [Vous avez allumé vos ordinateurs?] Pournous qui «comprenons sans parler», cette collusion entre la langue en-tendue dans l’enfance et ces machines dernier cri résonne comme un ana-chronisme un peu étrange, et délicieux. Elle ne surprend pas les élèves quis’acquittent en un clin d’œil de l’opération. Après une très courte révisionde vocabulaire à l’oral, on va s’employer à commenter l’image maintenantaffichée sur chaque écran : scène de genre, au rayon chapeaux d’un

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grand magasin. “Que’m vatz díser çò que vedetz…” [Vous allez me dire ceque vous voyez.] La conversation se met en place entre un professeur quis’emploie à obtenir le maximum de ses élèves, et de jeunes locuteurs quis’enhardissent bien vite à former des phrases complètes: “Que vei un grancapèth…” [je vois un grand chapeau].Sur les écrans, maintenant un texte: nous sommes toujours dans le ma-gasin en présence de “Mirelha e Joana, las dròllas qui’s crompan un ca-pèth” [les jeunes filles qui achètent un chapeau]. En marge du texte, unlexique. Écrits, les mots que l’on vient d’entendre prennent une nouvelleconsistance.Enseigner les langues vivantes. Patric Guilhemjoan, qui enseigne aussil’anglais, nous fera part de son expérience comparée dans l’une et l’autrelangue : «Anglais, espagnol, occitan: toutes les langues vivantes sont en-seignées de la même façon! J’apprécie l’ordinateur personnel pour sesfonctions de laboratoire de langues, avec les deux vrais atouts que sont laprise de parole en continu – puisqu’on peut s’enregistrer –, et la compré-hension orale – puisqu’on peut écouter et réécouter. En cours d’occitan,c’est pleinement satisfaisant parce que nous sommes en petit groupe. Maisavec une classe de vingt-huit ou trente élèves, c’est beaucoup plus diffi-cile à gérer ! Par contre, comme nous ne disposons pas, pour l’occitan, debeaucoup de ressources en ligne comme c’est le cas en anglais, il faut bienfaire l’effort de les fabriquer!» C’est la raison pour laquelle Patric Guil-hemjoan, qui est aussi responsable d’une maison d’édition, a contribué àla création d’un site d’enseignement de l’occitan2, sur lequel on peuttrouver des exercices interactifs, des vidéos, des sons, etc.Dijaus lo 9 d’abriu [jeudi 9 avril]. C’est la date du jour que les élèves notentsur leur fichier de cours. La leçon de grammaire qui va suivre est l’occa-sion d’un joli détour dans les subtilités de cette langue, qui «diminue» ou«augmente» toutes sortes de mots – noms, adjectifs, adverbes –, leur tri-cotant du même coup une mitaine qui embellit ou dévalorise. «Certainsdiminutifs ajoutent une connotation négative au sens d’origine…» expliquele professeur. Reste encore à garder trace de ce que l’on vient d’apprendre. Alors, cha-cun s’applique à recopier, sur son ordinateur, la leçon que le professeurécrit, en occitan, sur le tableau. On soigne la typographie, on met les titresen couleur : visiblement, la satisfaction de voir sa page joliment composéeajoute un agrément au travail un peu mécanique de copie, et un rapidecoup d’œil par-dessus l’épaule de l’un ou l’autre suffit à nous renseigner:les fichiers de cours sont bien tenus!«Allez sur le site www.pernoste.fr», indique maintenant le professeur.«Monsieur, on a besoin des écouteurs? – Oui, vous aurez un fichier son à

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écouter… – Ah, ce sont encore les papy et mamy qui parlent?» La re-marque attire un sourire sur le visage de Patric Guilhemjoan… “Que cauhar l’exercici orau adara…” [il faut maintenant passer à l’exercice oral],prévient-il. Sur les écrans, la photo d’un magnifique paysage de montagne.Nous sommes dans les Pyrénées, bien sûr! Romain préfère écouter en-tièrement le document sonore avant de commencer à choisir les bonnesréponses parmi celles qui lui sont proposées. «Monsieur, annoncent fièrement Pauline et Anaïs, on a eu 20/20! Mais pasdu premier coup…» (Elles ont écouté deux fois le document.)-----

1 à toute vitesse

2 http ://www.pernoste.com

-----collège Pierre Blanquie, à Villeneuve-de-Marsan – novembre 2007

avec Claudie Farbos de Luzan, professeur d’anglais

/ / / Ma prof dans l’ordi…Claudie Farbos de Luzan est dans sa classe, en train de travailler sur sonordinateur. Entretien. «En ce moment, mes élèves de 3e viennent de me-ner une petite recherche sur l’internet, à propos d’un courant musical deleur choix : ils devaient remplir une grille de renseignements que j’avaispréparée à leur intention. Je leur ai demandé de produire un texte en an-glais, qu’ils devront lire devant leurs camarades, en illustrant leur propospar un diaporama ou une vidéo. Ils m’ont envoyé ces textes… et vous metrouvez là en train de les corriger! Je me propose, le week-end prochain,d’enregistrer leurs textes avec ma voix, et de leur transmettre ces fichierspour qu’ils aient le temps, avant de faire leur présentation à la classe, detravailler chez eux la prononciation: il vaudrait mieux que leurs camaradespuissent comprendre ce qu’ils ont à dire!»

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Français et langues anciennesProjeter facilement un texte au tableau, à l’échelle de la classe, voilàune première utilité de l’ordinateur pour les professeurs de lettres:l’attention de tous les élèves se focalise sur le même document, et lesfonctionnalités du traitement de texte – mise en couleurs, gras, sou-ligné, italique, etc. – sont très efficaces pour annoter, mettre en évi-dence, ou attirer l’attention sur tel ou tel détail. L’ordinateur est éga-lement un réservoir potentiellement infini de documents que l’onpeut associer entre eux: «Le texte ne se présente plus comme un ob-jet de lecture linéaire, mais comme le nœud d’un réseau: autrestextes, images, références cultu relles, etc.1 » C'est un constat assez unanime: au clavier, les élèves écrivent pluslong, et avec plus de plaisir. Ceux qui ont une mauvaise graphie nesont pas pénalisés. Tous apprécient la liberté de se corriger. Le rap-port à l’écriture change, la manière de faire aussi: l’ordinateur au-torise par exemple des pratiques collaboratives, comme le faitd’écrire une nouvelle ou un poème à plusieurs.L’accès facilité à la recherche documentaire présente également iciun intérêt déterminant, particulièrement en langues anciennes, oùles programmes font la part belle à la découverte des civilisations:nombre d’enseignants s’accordent d’ailleurs à dire que l’ordinateurparticipe vraiment d’un intérêt renouvelé pour leur discipline.

-----1 L’école et les réseaux numériques, inspection générale de l’Éducation nationale, juillet 2002.

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collège du pays d’Orthe, à Peyrehorade – juin 2008Cours de français de Jean-Louis Claverie, avec une classe de 3e

/ / / L’affiche rougeÉtonnante séquence multimédia, où l’on convo -que successivement l’image, le texte, la musiqueet la vidéo, pour construire un cours de fran-çais sur la poésie engagée.

Paris, février 1944: 22 résistants, étrangers pour la plupart, sont condam-nés à mort et fusillés le jour-même au Mont Valérien. Parmi eux, MissakManouchian. Une dizaine de jours plus tard, leurs photos se retrouvent pla-cardées dans les rues de la ville pour illustrer ce que le gouvernement ap-pelle « l’entreprise du crime». C’est la célèbre «Affiche rouge», qui ins-pirera un poème à Aragon.L’affiche. «Allumez vos ordinateurs, et ouvrez le premier document du dos-sier “l’Affiche rouge”.» La fameuse affiche apparaît bien vite sur le tableauinteractif et sur les écrans des ordinateurs. «Pouvez-vous la décrire?» Lesdoigts se lèvent. Étonnante fulgurance de Thomas, qui a tout compris, di-rectement : la manipulation, la propagande, etc. Le professeur prendacte : «Oui, tu as raison, c’est bien ça. Nous allons reprendre chaque élé-ment qui compose cette image, en essayant de dénoter, c’est-à-dire d’énon-cer littéralement ce que l’on voit…» Toute la classe s’y met : «C’est uneaffiche… Elle est rouge… On distingue des portraits… Dans le bas del’image, des trains, des armes, des corps inanimés… » Le professeuragrandit l’image: «Nous allons fouiller un peu plus.» On détaille chaqueportrait, on repère Manouchian, qualifié de «chef de bande, responsablede 58 attentats»… Un nouveau dialogue établit que, dans cette affiche, lesnazis ont tout mis en œuvre pour convaincre que ces prétendus résistantsne sont que des criminels. «Vous le voyez, conclut le professeur, une af-fiche peut être argurmentative: avec une thèse, des arguments et desexemples.» Un vrai travail d’analyse d’image vient d’être fait, et chacun,dans la classe, en est conscient. Pour en garder trace, le professeur de-mande à ses élèves de prendre quelques notes avec leur ordinateur.Le poème et la lettre. Retour au dossier. On ouvre le deuxième document:l’histoire des dix résistants du groupe Manouchian revit maintenant parles mots d’Aragon1. Vous aviez vos portraits sur les murs de nos villes

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/Noirs de barbe et de nuit hirsutes menaçants /L’affiche qui semblait unetache de sang… Sur une question de Clément – «Pourquoi des étrangerssont-ils venus mourir pour la France?» –, on fait le lien avec le programmed’histoire, la guerre d’Espagne, la récente visite au camp de Gurs… QuandAragon cite Manouchian, le professeur demande d’ouvrir le troisième do-cument: la dernière lettre de Manouchian à sa femme. Au moment de mou-rir, je proclame que je n’ai aucune haine contre le peuple allemand. […]Je te prie de te marier après la guerre sans faute, et d’avoir un enfant…Silence dans la salle. Quelqu’un laisse échapper : « C’est beau quandmême!» Retour au poème, pour souligner le travail de transcription poé-tique d’Aragon.La chanson et le film. Le quatrième document est sonore: la classe entièreécoute maintenant la voix de Léo Ferré2, qui fait résonner autrement lesmots du poète. «On dit ce type de poésie “engagée”. Qui peut me dire pour-quoi?», demande le professeur. Maéva: «Parce que ça défend quelquechose…» Ce qu’il fallait démontrer vient de l’être, brillamment. «Votre dos-sier contient un cinquième document, annonce le professeur: c’est un filmde Jorge Amat3, qui raconte, de manière documentaire, la lutte, la traqueet la chute du groupe de l’affiche rouge.»Ordinateurs. Est dit(e) “multimédia” une application, un service ou un ap-pareil qui utilise plusieurs médias – image, son, vidéo... Jean-Michel Cla-verie, en aparté, prend la mesure du chemin parcouru grâce aux ordina-teurs : « Il y a quinze ans, on ronéotypait les poésies. Et quand j’étaismoi-même élève, nos maîtres les recopiaient au tableau, et nous le faisionsà notre tour dans nos cahiers.»-----

1. L’Affiche rouge, le roman inachevé, 1956

2. L’Affiche rouge, poème de Louis Aragon, mis en musique par Léo Ferré, 1961

3. La traque de l’Affiche rouge, 2006

Ce cours a été filmé en juin 2009, enrichi d’un nouveau document

– la bande annonce du film L’armée du crime, de Robert Guédiguian, 2009.

On peut le visionner sur www.dailymotion.com/user/cg40

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collège d’Albret, à Dax – janvier 2008Cours de français de Lotfi Midouni, avec une classe de 5e

/ / / Poètes, à vos claviers!Pressé par l’urgence, chacun parvient à confierquelques mots à son ordinateur: écrire est un actesolitaire. Relayées par le réseau du collège, cestentatives singulières s’assemblent sur le tableauinteractif, pour construire l’ébauche d’un “poè-me” collectif. À peaufiner, bien sûr!

Prologue. «Aujourd’hui, dit le professeur, nous allons composer un poème.Chacun va écrire un alexandrin sur le thème de la déception amoureuse:vous êtes déçu, ou vous parlez de quelqu’un qui est déçu. Et je vous im-pose la contrainte de trouver une rime en [œr]. »Nous sommes avec une classe de 5e dont les élèves ne disposent pas d’or-dinateurs portables. La classe va donc se déplacer en salle informatique:«…Pour dix minutes seulement, tout juste le temps de trouver votre vers,et puis nous reviendrons ici.»Acte 1, dans la salle informatique. Seul ou avec un camarade, chacun prendplace devant un écran. «Vous allez ouvrir un logiciel de traitement de texte.Souvenez-vous bien du sujet. Qui peut me donner des mots en [œr]?» Lesdoigts se lèvent: cœur, sœur, peur, chaleur, bonheur, vapeur… voilà une pre-mière provision. «Maintenant, c’est à vous de jouer. Et vous le savez, pourfaire de la poésie, il faut du silence…» Le professeur circule entre lestables, se penche sur les écrans, encourage: «Je rappelle à tout le mondequ’un vers, ça tient sur une seule ligne! – Monsieur, c’est dur! – Oui, je lesais ; commence par noter une idée, tu pourras améliorer par la suite…»Sur les écrans, des morceaux de phrases apparaissent, se modifient: iciet là, on “jette” des mots, spontanément… avant de tout effacer, pour re-commencer. Petite confidence d’une élève, visiblement inspirée: «Moi, jeconnais: j’ai déjà vécu un chagrin d’amour…» Chuchotements… «Jeremy,tu as trouvé quoi?» Thomas jubile: «Pour écrire, l’ordinateur, ça inspire!»Tout heureux, il annonce un vers de dix syllabes… Non, en recomptantbien, onze… «Stop! lance le professeur, vous allez maintenant enregistrer

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votre travail. Ceux qui savent le faire peuvent aider les autres…»Acte 2, retour dans la salle de classe. Tous les yeux sont rivés sur le tableauinteractif qui affiche l’écran de l’ordinateur du professeur: «Je vais ouvrirvos travaux, les copier et les coller les uns à la suite des autres, dans ledésordre, dans un même document. Nous verrons ce que va nous donnerle hasard…» Anticipant de probables déceptions, il prévient: «Certains devos envois n’ont peut-être pas été correctement enregistrés sur le réseau.Nous n’allons pas pouvoir les récupérer maintenant. Mais ne vous inquiétezpas, nous retrouverons tout pour la prochaine fois.»Le premier vers arrive à l’écran: c’est celui de Julien. On guette le second…Et voilà finalement une cascade de pleurs, une litanie de malheurs, unelongue plainte à l’âme sœur… «Tu brisas mon cœur en me préférant masœur /Un jour tu partis me laissant dans le malheur/Depuis que je ne tevois plus, mon cœur pleure!…» Bref, un drôle de poème qui frise par mo-ments le cocasse, tout émaillé de savoureuses fôtes d’ortografe, mais quisemble tenir debout… Le professeur: «Qu’en pensez-vous?» Les élèves(unanimes) : «C’est bien!» Avec quelques variantes plus ou moins exo-tiques: «Trop la classe, ce truc!» Et projets grandioses: «Il faudrait le pu-blier dans le journal !» Ou encore : «On va en faire un livre!»La discussion qui suit établit que, si cette écriture collective tient à peu prèsla route, c’est sans doute parce que tous les vers ont la même rime. Onconvient également que le texte mérite bien d’être retravaillé: «Occupons-nous d’abord de l’orthographe…» Les doigts se lèvent : facile avec le ta-bleau interactif! «Voilà, nous avons rectifié le plus gênant, mais ça ne veutpas dire que notre poème est terminé. Son principal défaut, c’est que lesvers ne respectent pas tous le mètre imposé. Nous reprendrons tout ça àla prochaine séance.» À suivre, donc.Épilogue. «C’était bien ce cours? Oui !» Sondage certes non contractuel,mais néanmoins réalisé auprès d’un échantillon particulièrement repré-sentatif des élèves de la classe.

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collège Pierre de Castelnau, à Geaune – novembre 2007Cours de grec d’Anne Gaillot, avec une classe de 3e

/ / / Dorique ou corinthien?À la découverte du Parthénon, où comment allieroutils numériques et culture classique…

Un cours de grec qui file à toute vitesse, suivi par des élèves passionnés,c’est possible? Démonstration avec Anne Gaillot, professeur de lettres clas-siques (français-latin-grec) et ses onze élèves de troisième qui ont choisil’option grec. Dans un premier temps, machines éteintes posées sur les tables, on écouteles consignes du professeur: «Nous allons utiliser les ordinateurs pour fairedes recherches sur le Parthénon. Vous vous servirez des encyclopédies –et notamment Encarta, et d’autre part des sites que vous pourrez consul-ter sur internet. Vérifiez systématiquement vos sources. Vous savez qu’uneinformation trouvée sur Wikipédia n’est pas obligatoirement juste. Jevous distribue un questionnaire; à vous de répondre au plus grand nombrede questions possible : je ramasserai vos copies à la fin de l’heure. Vouspouvez maintenant brancher vos ordinateurs.»Action. Les ordinateurs sont démarrés en un tour de main; la recherchecommence, très vite. Première étape sur Encarta. Mehdi et Gaétan trou-vent une reconstitution en trois dimensions du Parthénon. Les voilà lan-cés dans une promenade virtuelle: sur les écrans, l’architecture se modi-fie, au gré des déplacements des “promeneurs”. Assez vite dans la classe,l’information circule: il y a une astuce pour entrer à l’intérieur du temple.La motivation redouble.Les recherches s’élargissent. La plupart des élèves travaillent en équipede deux, avec un seul ordinateur. L’un actionne clavier et touch pad,l’autre recopie sur papier les informations trouvées. Les écrans se diffé-rencient : ici du texte, là des images. Chuchotements studieux: «Acropole,Périclès, marbre, 5e siècle avant J.-C., statues…» Dès qu’une informationutile est détectée, nos internautes chevronnés stoppent le défilement despages pour surligner le paragraphe, et le secrétaire prend note.Gaétan a trouvé la description des ordres architecturaux dans l’Antiquité,gravure à l’appui. Compare avec l’image du Parthénon… Discute avecson voisin pour savoir si on peut lui affecter l’ordre dorique… Singuliertélescopage entre ce document gravé au 18e siècle, précieusementconservé dans une bibliothèque, mis en ligne, et hébergé sur un serveur

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quelque part dans le monde… et l’écran de l’ordinateur d’un collégienlandais du 21e siècle.Le professeur passe entre les tables, vérifie que personne ne s’égare, lanceun conseil à l’attention de toute la classe: «Si vous êtes un peu bloqués,n’oubliez pas que, dans votre manuel de grec, vous avez aussi des infor-mations sur le Parthénon.»Madame, s’il vous plaît… Un doigt se lève, annonciateur d’une questionparfois étonnante, toujours urgente: «– On répond par des phrases? – Oui,s’il te plaît… – On doit dire le rôle du Parthénon aujourd’hui? – Non, biensûr, il faut se placer à l’époque antique… – C’est quoi, des métopes? – Trèsbonne question; tu as un dictionnaire sur ton ordinateur… – Quand vousdites “sa situation”, c’est géographique? – Oui. – Qu’est-ce que ça veut dire,un ordre? – Tu ne te rappelles pas? En architecture antique, on parle del’ordre dorique, ionique ou corinthien : tu as dû apprendre ça en 6e.Cherche bien, tu vas le trouver quelque part…»Voilà, c’est la fin de l’heure. «Vous enregistrez les documents que vous lou-lez conserver, vous me rendez votre feuille. Il vous reste trois minutes pourconsulter votre messagerie, et envoyer du courrier si vous le souhaitez.»Ils sont bien loin ces cours de langues anciennes, tels que des générationsde collégiens les ont connus! Anne Gaillot le sait bien: «En latin et en grec,nous avons beaucoup de choses à faire avec les ordinateurs. Mes élèvesles utilisent pratiquement à chaque séance, ce qui me permet de varier lesactivités. Ils ne se rendent pas compte, mais c’est fou ce qu’ils lisent surles écrans…»

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collège Lubet Barbon, à Saint-Pierre-du-Mont – avril 2009Cours de latin d’Emmanuel Pallu, avec une classe de 3e

/ / / Virgile dans le texteComment exploiter certaines fonctionnalités dutraitement de texte pour interroger le sens d’untexte ancien.

“Nascetur pulchra Troianus origine Caesar, imperium Oceano…” Lesélèves sont, tour à tour, invités à lire ces vers latins de Virgile, tirés de l’Énéide,projetés sur le tableau. Pour en débusquer le sens, une véritable enquêteva se dérouler sous nos yeux. La classe est active, les élèves motivés. On iden-tifie plusieurs verbes conjugués au futur; on repère les noms propres; ontrouve quelques anachronismes: comment se fait-il que Jupiter parle de per-sonnages – Romulus et Rémus – qui ne sont pas encore nés? «Un Troyennaîtra, César, d’illustre naissance…» Le texte qui s’affiche maintenant estbien du français : il s’agit d’une traduction assez littérale des vers précé-dents. Le professeur surligne certains membres de phrases, faisant appa-raître des liaisons logiques. Il est question d’allégories… «Souvenez-vousde La Liberté guidant le peuple, que nous avons étudiée lors d’un cours pré-cédent.» Un clic dans Wikipédia, et hop, voilà le tableau d’Eugène Delacroixprojeté au tableau. «Ce texte est un poème épique, conclut le professeur.Et ces mots de Jupiter transforment l’épopée en récit argumentatif. – C’estde la propagande!» lance un élève. Pas mal vu… «C’est du réinvestisse-ment de connaissances, nous dira Emmanuel Pallu. Certaines sont lointaines,d’autres plus récentes. Mon cours n’aurait pas fonctionné si les élèves nes’en étaient pas souvenu. En débusquant Octave derrière César, ils par-viennent à faire quasiment un travail d’historien: ce n’est pas mal !»Traduire? Le moment est venu de mettre à contribution les ordinateurs por-tables. Dans cet exercice qui transforme chaque écran en une sorte depierre de Rosette, les élèves disposent simultanément du poème en latinet de sa traduction française. Il s’agit de prélever, dans le texte français,le membre de phrase qui correspond à chaque vers latin, et de venir le col-ler en regard. Mais l’exercice de “copier-coller” n’est pas si simple qu’il yparaît, et nos Champollion en herbe ont quelques pièges à déjouer…«Depuis la réforme de l’enseignement du latin, nous sommes tenus d’abor-der des textes “authentiques” dès la classe de 5e, nous expliquera plus tardEmmanuel Pallu. Je dois dire qu’au début, la tâche m’est apparue insur-

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montable ! Comment étudier Ovide alors que l’on est tout juste capable dedéchiffrer des phrases très simples? L’ordinateur m’a fourni la solutionquand j’ai découvert que le traitement de texte pouvait être une véritablevoie d’accès à la compréhension des documents écrits: en utilisant les ou-tils d’enrichissement typographique (couleur, gras, etc.), je peux mettre enévidence la structure d’une phrase. Je peux souligner, à l’intérieur d’untexte difficile, une partie plus simple que les élèves pourront traduire. Bref,je peux dégager du simple dans du complexe! L’ordinateur nous est éga-lement précieux sur le plan documentaire: tous les documents, toutes lesimages, toutes les traductions sont accessibles…»

-----collège Jean Mermoz, à Biscarrosse, mars 2008

Cours de français de Caroline Gronvold-Brèque, avec une classe de 4e

/ / / Un vrai polarÉcrire avec l’ordinateur libère les imaginations.En classe, on discute ferme pour établir la ver-sion définitive du récit.

«Pendant la nuit, une idée me vint. Je me souvenais qu’à la racine des che-veux, Adrien avait reçu un coup violent, puisque du sang avait séché.»Nous sommes tombés dans un vrai drame: le corps inanimé d’un collégienvient d’être retrouvé dans la chambre froide des cuisines de l’établisse-ment. Meurtre? Accident? Ses copains, bouleversés, décident de menerleur propre enquête… Collège en travaux, le roman policier – «nouvellepolicière serait plus exact», rectifie Caroline Gronvold-Brèque – auquel lesélèves vont aujourd’hui mettre la dernière main, est donc une création col-lective. Mais comment s’y prend-on pour parvenir à écrire ensemble,

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quand on est une classe entière? «J’ai défini un plan de travail en cinqétapes, nous explique le professeur: situation initiale, début du problème,action, évolution du problème, situation finale. Nous avons alors votépour identifier le narrateur, choisir le nombre de personnages et arrêterla trame de l’histoire : qui est tué? où ? quand? comment? Et, pourchaque étape, les élèves ont rédigé un premier brouillon – parfois tout seulsà la maison, d’autres fois à plusieurs en classe. Ils avaient le choix d’écriredirectement avec l’ordinateur, ou bien sur papier. Après avoir corrigé leurstravaux, j’ai proposé une sélection de textes parmi lesquels nous avonschoisi celui qui serait retravaillé collectivement pour établir la version dé-finitive.» Caroline Gronvold-Brèque a déjà mené ce genre de projet avecdes outils traditionnels. «Mais, explique-t-elle, grâce à l’ordinateur, notretâche est facilitée; il libère les élèves qui écrivent très mal à la main – cer-tains sont dyslexiques –, et permet de valoriser d’autres aptitudes que lastricte conformité à l’orthographe et à la grammaire. Et il rend possibleun mode d’expression moins conformiste…»Traitement de texte. Mettre au point la dernière situation du récit, voilà doncl’objectif de cette séance. Le professeur propose d’écouter plusieurs pro-positions, parmi lesquelles on choisira la meilleure. «Adrien, veux-tulire?» On écoute Adrien. De l’avis général, sa version manque un peu desuspense. Au tour de Margot. Incontestablement, la sienne est plus vivante.«Pour quelle raison? demande le professeur. – Les personnages dialo-guent… – Exactement: on passe d’un discours indirect à un discours direct:l’effet est plus vivant…» Chloé accroche un peu sur le passé simple: «Nousen déduimes… Non, nous en déduisîmes…», mais elle a eu la bonne idéed’utiliser un indice – une trace de sang – pour faire avancer la réflexion dulecteur vers la résolution de l’énigme. Reste à peaufiner l’expression.«Quelquefois, l’idée est bonne, mais le texte est maladroit. Je pose laquestion aux élèves: comment pourrait-on dire cela autrement? Alors,comme un sculpteur, on retire de la matière, on en ajoute… on modèle letexte. Tout le monde participe à ce travail, et dans ces moments-là, le trai-tement de texte nous est précieux. On est dans la matière de l’écriture, etles élèves adorent cette manière tangible, concrète, de travailler.»

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collège Jean Rostand, à Capbreton – janvier 2009Cours de français de Véronique Delort-Sarran, avec une classe de 3e

/ / / La langue comme objet…Comment dédramatiser la difficulté apparen-te d’un poème aux références foisonnantes, etconduire, pas à pas, les élèves à entrer dans laconstruction d’une pensée complexe…

«Les mots se gonfleront du suc de toutes choses /de la sève savante et dudocte latex /On parle des bleuets et de la marguerite /alors pourquoi pas dela pechblende pourquoi?» Le professeur lit à haute voix cette Petitecosmogonie portative, de Raymond Queneau, dont on peut suivre le texteprojeté sur le tableau interactif. Un texte particulièrement résistant, tant ilest truffé d’expressions au sens obscur.«Je ne vais pas vous demander de me dire ce que vous n’avez pas compris,annonce le professeur; j’ai découvert moi-même plusieurs mots que je nefréquente pas. Voici quelques définitions que j’ai trouvées dans Encarta,mais nous n’allons pas nous attarder sur chacune. Ce qui nous intéresseplutôt, c’est de comprendre leur point commun: pechblende, par exemple,c’est un oxyde d’uranium; quant à chromosome – vous devez être trèssavants en la matière –, c’est de la biologie… Voilà électromagnétisme,encore un mot compliqué… Quel est leur domaine commun?» Les doigts se lèvent. Julie propose les sciences de la Terre. «Oui, on a lespieds sur terre, il est question du mouvement, de l’observation de laTerre… Et maintenant, si je vous dis “la fille de Minos et de Pasiphaé”? –C’est dans la mythologie grecque… – Ariane? – Non, mais vous brûlez, ils’agit de sa sœur, Phèdre…» Au fur et à mesure de la progression de cettediscussion guidée, le professeur surligne, dans le texte du poème, lesréférences littéraires: «Savez-vous à quoi fait référence cet “albatros auxailes de géant”?» Le texte complet du poème de Baudelaire – L’albatros –s’affiche aussitôt sur le tableau.Documenter. «Mon ambition, nous confiera plus tard Véronique Delort-Sarran, c’est de conduire mes élèves – y compris ceux qui ne sont pas trèsforts – vers la littérature: on entre dans le texte en se posant des questions,et au moyen de recherches finalement assez simples. Tout mon cours est

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basé sur le potentiel documentaire de l’outil informatique: même si je n’aiaucun livre de Baudelaire ou de Rimbaud sous la main, je n’ai qu’à taperquelques mots des vers empruntés par Queneau dans ma barrette Google,pour retrouver les sources de chaque citation.»Retour au cours. «Nous allons faire un petit bilan, indique le professeur.Elle note l’essentiel des idées qui viennent d’être établies: «Le poèmeprend la langue comme objet… À cet objet, s’associent ceux de la Terre etdes sciences… Il devient le lieu où le monde et la chose se rencontrent.»Pablo lève le doigt : «Madame, il reste dix minutes.» – «C’est un codeentre nous, pour éviter de se laisser prendre par le temps», me chuchotema voisine. «D’accord, a répondu le professeur. Eh bien, vous allezmettre à jour vos documents, par le réseau.» Les ordinateurs sortent desous les tables. Et d’un coup, les têtes disparaissent derrière les écrans.«Je vais vous demander de préparer tout seuls, comme des grands futurslycéens que vous serez bientôt, le bilan de notre analyse de ce poème deRaymond Queneau…»Un tableau qui ne s’efface plus. «L’une des choses que l’ordinateur achangées dans mon existence d’enseignante, nous confiera plus tardVéronique Delort-Saran, c’est que je ne crains plus d’effacer un tableau:autrefois, il m’arrivait de poser un petit papier: “prière de ne pas effacer cequi est à l’intérieur”, ce qui faisait enrager mes collègues, évidemment.Aujourd’hui, le tableau ne s’efface plus: on peut conserver un travail enl’état, et, la fois suivante, reprendre la séance au trait près. Et chaque élèverepart chez lui avec l’état du tableau, c’est-à-dire avec tout l’outillage quiva lui permettre de faire un travail de relecture et de synthèse. C’est à lafois une mémoire du cours, et un miroir: il montre exactement l’essentielde ce qui a été fait. Je m’en sers systématiquement pour clore la séance, etparvenir à un tout cohérent, et significatif pour l’élève.»

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Histoire et géographieLa variété et la richesse des documents multimédias disponibles au-jourd’hui grâce aux ordinateurs et à internet, permettent aux en-seignants d’histoire et de géographie de construire des cours parti-culièrement vivants et documentés. On peut ainsi appréhender unesituation historique en étudiant différents documents d’archives(textes, images, vidéos, sons, etc.) ou analyser un territoire avec descartes et des photos aériennes, mais également avec des images sa-tellite ou des bases de données géolocalisées, etc.Les professeurs peuvent, pour cela, puiser dans les malles des deuxsites auxquels le Conseil général a abonné tous les collèges: celui del’Ina – Jalons pour l’histoire du temps présent – est spécialement conçupour l’enseignement de l’histoire du 20e siècle ; et celui de France5– lesite.tv – propose des documentaires vidéo, indexés aux points clésdu programme scolaire.Les ordinateurs personnels permettent aussi de varier les situationsd’enseignement, en alternant cours magistraux et recherches en au-tonomie : seul ou en petit groupe, on analyse, on s’interroge, onmène l’enquête… jusqu’au moment où l’on se sentira capable de li-vrer ses conclusions. Et les élèves apprécient particulièrement cettemanière de faire avec leurs ordinateurs : « Ces démarches inno-vantes devraient permettre un développement du goût de l’effort,de la confiance en soi et de l’autonomie.1 »-----1 Les usages pédagogiques des Tice dans les disciplines d’enseignement, rapport collectif, académie de Nantes, janvier 2008.

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collège des Luys, à Amou – janvier 2008Cours d’histoire de Fabienne Saint-Germain, avec une classe de 3e

/ / / Juin 1940…Lesite.tv sert de support à ce cours, où l’on pas-se avec naturel du tableau interactif qui per-met de profiter de la dynamique de la classe,à l’ordinateur personnel pour organiser sesidées et garder trace de l’essentiel.

«Allumez vos ordinateurs et baissez les écrans!» La première consignede Fabienne Saint-Germain installe une règle du jeu pour ce cours struc-turé en trois temps, avec le soutien du tableau interactif.Acte un : le cours magistral. «La dernière fois – vous vous en souvenez? –nous en étions restés au tout début de la seconde guerre mondiale.» Leprofesseur pianote sur son ordinateur, fait apparaître sur l’écran un siteinternet1 d’où elle tire un extrait des actualités filmées. Celui-ci n’est passimplement projeté, mais véritablement décortiqué: arrêt sur image, sur-charge “à la craie” pour attirer l’attention sur un détail: «Regardez bien:voici les armes des Polonais – on voit des chevaux, des hommes à pied –et maintenant, voilà les armes des Allemands: avions et chars. Vous com-prenez pourquoi on parle de guerre-éclair? En 17 jours, la Pologne est en-vahie.» Sur le tableau interactif apparaît maintenant une carte animée,à l’appui de l’explication des mouvements de l’armée allemande. «Nousvoilà en 1940. L’armée allemande a envahi la France. C’est l’exode: lesFrançais sont sur les routes.» Un nouveau film vient étayer le récit du pro-fesseur: étonnantes images de ces longues cohortes lancées sur les routes.«Je vous rappelle que nous sommes au mois de juin. Regardez bien leursvêtements : ces gens portent tous des manteaux. Qui peut me dire pour-quoi?» Dans la classe, on sèche… on donne sa langue au chat: «Maisparce qu’ils ont sur eux tout ce qu’ils peuvent emporter.»Acte deux : la trace écrite. Que va-t-on écrire maintenant?» lance le pro-fesseur, avant de noter au vol, sur le tableau interactif, les idées énoncéesdans la classe. C’est le moment d’activer les ordinateurs portables. «Créezun nouveau document dans votre traitement de texte…» Cliquetis des cla-viers. Justine écrit: «Les Allemands creusent la ligne Maginot pour se pro-

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téger…» Sa voisine, qui a jeté un coup d’œil: «Non, ce sont les Français…»Justine corrige en un clin d’œil. Le professeur passe derrière chacun, en-courage: «Oui, c’est bien, continue…» Reprend un point du cours: «Je voisplusieurs fois la même erreur; j’ai dû mal me faire comprendre…» Un mo-ment plus tard : «Stop ! Nous allons passer à la correction.»Acte trois : «On est plus intelligent à plusieurs…» C’est le texte d’Alex, af-fiché sur le tableau, qui va servir de base à l’élaboration de la trace écritedéfinitive. Question du professeur: «Êtes-vous d’accord avec ce qu’Alexa écrit?» Axelle, qui a détecté une erreur, propose une première modifi-cation… La discussion apporte une nouvelle précision, puis un autre com-plément. Justine propose d’aller au tableau pour souligner en rouge lesmots importants. On s’approche du résultat: «C’est bien comme ça? –Oui !» On sent la fierté dans la réponse, unanime. Le texte final sera sau-vegardé sur le réseau, et distribué à chacun sur papier. « Cette trace écrite n’est jamais la même d’une classe à l’autre, expliqueFabienne Saint-Germain. En travaillant de la sorte, mes élèves s’aper-çoivent qu’on est plus intelligent à plusieurs. Ils collaborent, ils se cor-rigent mutuellement bien plus volontiers que s’ils travaillaient sur pa-pier. » Avant la fin du cours, elle s’assure que ses élèves ont bien noté,dans la liste de leurs favoris, l’adresse du site qui a servi de support aucours : « C’est un site en accès libre que nous n’avons pas eu le tempsd’explorer en détail, mais ils pourront y revenir tranquillement. Tous lescollèges des Landes ont également librement accès à Jalons pour l’his-toire du temps présent2, la banque d’images et de sons à vocation pé-dagogique de l’INA (Institut national de l’audiovisuel), cela grâce à unabonnement souscrit par le Conseil général. […] J’enregistre égalementtout ce que j’ai fait sur le tableau interactif – les vidéos, les photos, lescartes, les annotations, etc. – pour que les puissent retrouver le coursplus tard, dans sa forme vivante. »-----

1 www.france5.fr/2GM

2 www.ina.fr/fresques/jalons

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collège Henri Scognamiglio, à Morcenx – mars 2008Cours d’histoire d’Olivier Parrot, avec une classe de 3e

/ / / Autonomie participativeCartes et documents historiques ne sont pasles simples illustrations du cours, mais lamatière d’une véritable enquête que les élèvesconduisent avec leurs ordinateurs, dans uneambiance d’atelier.

Visiblement, l’habitude est déjà prise: en un clin d’œil, tous les ordinateursportables sont allumés, et les élèves disposent sur leur écran du documentde travail affiché au tableau. «Je vous laisse dix minutes pour travaillerpar vous-mêmes», annonce le professeur.Documents. Avec cette carte du monde illustrant les grandes étapes de ladécolonisation, on plonge, d’emblée, dans le vif du sujet. Elle soutient lapremière question – Quel est le processus qui débute après la secondeguerre mondiale? – et pose un premier problème: «Monsieur, ça veut direquoi, processus ? – Eh bien, mouvement, phénomène… » Jonathan«sèche», demande à son voisin, qui semble plus inspiré… «On va tra-vailler ensemble!» décident Fabien et Éric. En fait, il s’agit de comprendrepourquoi et comment se généralise, après la fin de la seconde guerre mon-diale, le mouvement de décolonisation. «Confronter les documents, lesanalyser, c’est pour mes élèves accéder à une démarche d’historien,commentera Olivier Parrot. Ce qui m’intéresse avec les ordinateurs por-tables, c’est qu’ils permettent vraiment de centrer le travail sur l’élève –recommandation qui figure dans les programmes. Il serait sans doute ex-cessif de parler d’enseignement individualisé, mais ce type d’activité medonne la possibilité de mieux accompagner l’un ou l’autre, dont je connaisles difficultés de concentration ou de méthode; je peux m’autoriser à pas-ser deux minutes avec un élève, sans pour autant que les autres ne semettent à grimper sur les tables ! »Collaborations. Rassemblez plus de vingt-cinq collégiens dans une sallede classe, et suggérez-leur d’être actifs : l’énergie dégagée est immédia-tement palpable ! «Au début, je leur demandais de travailler individuel-lement, chacun sur son ordinateur… Mais ça ne fonctionnait pas bien. J’ai

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donc changé ma façon de faire ; je les incite maintenant à fonctionner encollaboration : à plusieurs, c’est plus dynamique ! Et ils jouent le jeu…»Ambiance d’atelier, donc. On est loin du cours “classique”: le professeur,qui ne songe pas un instant à s’asseoir derrière son bureau, circuleparmi les élèves, encourage, stimule, accompagne. «Avec ce genre d’ap-prentissage, on ne peut pas espérer entendre les mouches voler ! À tropvouloir mettre la pression du point de vue de la discipline, on risqueraitde stériliser la dynamique. C’est une question de tolérance, d’accord mu-tuel, de confiance et d’autonomie. Et, si ça se passe avec un certain fondsonore, c’est finalement assez normal: on leur demande d’échanger! Cer-tains discutent, quelquefois, un peu à côté… Mais dans l’ensemble, ils tra-vaillent. Je trouve pour ma part que tout cela reste raisonnable, et quechacun peut étudier. »Mise en commun. «Stop! dit le professeur, nous allons faire un premier bi-lan.» Les doigts se lèvent, et les élèves, largement sollicités, ne se priventpas de participer. Chaque document est décortiqué et confronté aux autres:on explicite les sources, on décode le sens, on tire des conclusions… Et onparvient finalement à établir les grandes lignes du processus de décoloni-sation. «Naturellement, commente Olivier Parrot, il n’est pas possible detout expliquer à partir des seuls documents: je dois donc amener descompléments d’information sous une forme un peu plus “magistrale”.»Synthèse. L’heure a filé bien vite, et le cours se termine sans que les élèvesn’aient eu à recopier le moindre résumé dans leurs cahiers. «La trans-mission du cours se fait par voie informatique. Pour moi l’ordinateur por-table, c’est à la fois le manuel et le cahier: il contient les fiches de travailet le cours. Dans un collège, les élèves écrivent, finalement, beaucoup. Àmon avis, la dictée est souvent une activité assez mécanique. Je préfèrevoir travailler les élèves de manière dynamique sur des documents; il mesemble que la mémorisation est meilleure. Après chaque leçon, je leur de-mande de produire un document écrit : c’est un travail de synthèse, obli-gatoire. Ils doivent me remettre un minimum de six travaux de ce type dansle trimestre, et chaque devoir supplémentaire au-delà de la norme comptecomme un bonus qui peut leur permettre de rattraper des points: cela lesencourage à travailler.»Hors les murs… Avant son cours, Olivier Parrot nous annonçait modeste-ment que nous ne verrions «rien d’extraordinaire». Sans doute. Nousavons pourtant l’impression d’avoir rencontré un professeur heureux etdes élèves bien vivants et qui semblent absorber – sans traumatisme ap-parent – une quantité d’informations que d’autres pourraient trouver unbrin rébarbatives… «En termes de résultats, je trouve que ce n’est pas mal.Les élèves qui s’investissent dans ce type d’activité se retrouvent assez

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rapidement en réussite: en fait, au diplôme national du brevet, on va leurdemander de produire un paragraphe en s’appuyant sur des connais-sances et des documents. C’est en partie ce qu’ils font ici.» Nous appren-drons aussi que les outils numériques permettent, au-delà des murs du col-lège, des pratiques plus inattendues: «Au moyen de la messagerie, un lienparticulier s’est instauré avec mes élèves: je leur envoie systématiquementle corrigé de leurs travaux, et s’ils rencontrent une difficulté, ou bien s’ilsont un peu honte de venir me voir à la fin de l’heure, il leur est possible dem’envoyer un courriel, auquel je vais répondre, naturellement… Évidem-ment, la relation directe n’a pas disparu pour autant, bien au contraire!»

-----collège René Soubaigné, à Mugron, mai 2009

Cours d’histoire de Nelly Liarescq-Labourdette, avec une classe de 3e

/ / / Comme à la radio…Chaque élève est invité à cheminer à son ryth-me entre textes, images et archives sonores oufilmées, pour confronter deux versions antago-nistes des mêmes faits historiques.

«Tout ce que vous avez à faire est dans ce document», dit le professeur, enprofitant du temps de mise en route des ordinateurs pour en distribuer unexemplaire aux élèves. Une économie de paroles qui donne bien le ton dece qui va suivre: chacun s’absorbe devant son écran, et le silence quis’installe dans la salle de classe ne sera rompu, jusqu’à la fin de l’heure,que par quelques bribes de son échappées, par inadvertance, du haut-parleur d’un ordinateur…

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La guerre des ondes. Pour comprendre ce qui se passe, pas d’autre moyenque de suivre ce qui s’affiche sur l’écran de l’ordinateur de Laura, mavoisine: elle vient d’ouvrir l’encyclopédie Encarta, à l’article “Radio,histoire de la” : «Dans la zone libre, le gouvernement de Vichy fait peser lacensure sur les radios publiques et privées…» Nous voici donc au cœur dela seconde guerre mondiale: la «guerre des ondes» bat son plein. Lauraprend le temps de décortiquer le texte pour y dénicher les éléments deréponses aux questions qui lui sont posées. Son document de travail estclairement partagé en deux colonnes: à droite “Radio Paris”, à gauche “Radio Londres”. La recherche active dans laquelle les élèves sont engagésfocalise entièrement leur attention: on lit, on se concentre… On se laisseprendre au jeu de cette véritable petite enquête sur pièces (textes, images,documents sonores ou filmés).Comme à la radio. Laura vient de brancher des écouteurs sur sonordinateur portable: «Je souhaite la victoire de l’Allemagne parce que,sans elle, le bolchevisme s’installerait partout…» C’est la voix de PierreLaval, sur Radio Paris, en 1942. Un peu plus tard, le son, crachouillant, deRadio Londres, obligera à tendre l’oreille pour capter le fameux «Radio-Paris ment, Radio-Paris ment, Radio-Paris est allemand», aussitôt suivi dunon moins célèbre «Les Français parlent aux Français», annonçant uneétonnante poésie de messages codés: «Pierrot ressemble à son grand-père. Le facteur s’est endormi. L’éléphant s’est cassé une défense. Il esttemps de cueillir des tomates.» L’émotion est au rendez-vous… «L’archivesonore “met en chair”, nous dira Nelly Liarescq-Labourdette. C’est lagrande puissance d’évocation de la voix à la radio…» Mais quel est donc cemot, qui permet de reconnaître à coup sûr Radio Paris, dans cet extrait desactualités qui relate un attentat contre Hitler? Butant sur cette nouvelleénigme, ma voisine est à deux doigts de renoncer. Elle se ravise… écouteune seconde fois, finit par entendre le speaker dénoncer «un actecriminel…» C’est l’indice recherché!Dans la classe, les ordinateurs affichent maintenant des extraits desactualités filmées: on reconnaît le maréchal Pétain, des antennes radio et –étrange concordance des temps – un écouteur de bakélite sur l’oreille d’unauditeur anonyme.Se taire. Nelly Liarescq-Labourdette, qui arrive cette année dans lesLandes après avoir enseigné dans le Pas-de-Calais, nous confie en être àses premiers pas dans la découverte des outils numériques: «L’idée decette séance m’est venue alors qu’Israël envoyait des obus vers Gaza: surinternet, la version israélienne des faits côtoyait celle des Palestiniens, etcette guerre de l’information, très moderne, m’a fait penser à ce qui se

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passait pendant la seconde guerre mondiale…» Et comme nous nousétonnons de l’ambiance particulièrement studieuse et de la parcimoniedes paroles échangées pendant l’heure que nous venons de vivre: « Il fautparfois savoir se taire, nous expliquera-t-elle. Ce temps de travailindividuel, qui n’oblige personne à s’exposer à tous les regards, c’est bienpour les élèves…»

-----collège Serge Barranx, à Montfort-en-Chalosse, mai 2009

Cours d’histoire de Monique Marrocq, avec une classe de 3e

/ / / Le souffle de l’histoireAlternativement écran de projection et surfacesensible d’enregistrement, le tableau interactifrelié à l’ordinateur du professeur est à la fois levéhicule et la mémoire du cours. Objets inanimés?Il ne leur manque même pas la parole!

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C’est une description de la situation de la France de l’après-guerre:pénurie de charbon, de produits industriels, alimentaires… «Qui peut medire ce qu’est une pénurie?» On débusque les mots importants, et Agnèsvient les surligner sur le tableau interactif. Le professeur, qui a déléguétoutes les tâches de manipulation à ses deux jeunes assistants, anime ledébat depuis le fond de la classe. «L’un des avantages des outilsnumériques, nous dira-t-elle plus tard, c’est de me libérer du tableau ou dela carte pour me permettre d’être au milieu de mes élèves, de sorte querien de ce qui se passe dans la classe ne m’échappe. Quant aux élèves, ilssont plutôt fiers de “squatter” ainsi le territoire du professeur, et c’est aussipour eux une occasion de bouger un peu!»

Notre démarche. On projette maintenant un schéma, encore à l’étatd’ébauche, qui reprend et organise les éléments contenus dans le texte.Pour le compléter, le professeur sollicite la participation active de tous sesélèves: on aide, depuis sa place, les camarades qui se succèdent au tableauinteractif. Ainsi représentées sous une forme différente, les idéesdéveloppées dans le premier texte s’articulent logiquement en causes etconséquences du fait historique étudié. «Vous pourrez récupérer toutenotre démarche à la fin du cours, rappelle le professeur à ses élèves…Jusqu’à présent, tient-elle à préciser à notre intention, on ne pouvait pasemporter le tableau chez soi, pour se remémorer tout le contenu du cours;eh bien, vous le voyez, aujourd’hui, c’est possible!»

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Écrire. «Je vais vous demander de résumer en une phrase ou deux, survotre cahier de brouillon ce que nous venons de voir…» Grande applicationdans la classe. Le professeur circule d’un élève à l’autre. «Écrire, c’est unexercice fondamental qui apprend à organiser ses idées, à être précis dansl’expression de la pensée, à introduire du vocabulaire et à mettre en placeune syntaxe correcte», nous expliquera encore Monique Marrocq. Pourboucler cette phase de travail, Marina viendra noter, toujours depuisl’ordinateur du professeur, la synthèse que l’on élabore en commun.Émotion. Un nouveau texte s’affiche au tableau: c’est un discours. Quiparle? Robert Schuman, le ministre des Affaires étrangères. Une photo dedeux personnes apparaît maintenant: «Vous le voyez ici, le 9 mai 1950, encompagnie de Jean Monnet, haut fonctionnaire, dans le salon de l’Horloge,au ministère des Affaires étrangères. Comme vous pouvez le remarquer, cen’est pas un jeune premier, ce Monsieur Schuman! Nous allons entendre savoix…» Silence. La qualité de l’écoute qui accueille cette archive estimpressionnante. Chacun suit des yeux, “en temps réel”, le texte du discoursaffiché sur le tableau: «Le gouvernement français propose de placerl’ensemble de la production franco-allemande de charbon et d’acier sousune Haute Autorité commune dans une organisation ouverte à laparticipation des autres pays d’Europe…» La gravité contenue dans cesphrases n’échappe à personne. «Ce que nous venons d’entendre, ce sont lesbases de la construction de l’Europe! Savez-vous quelle va être la réponsede l’Allemagne à cette proposition? – Ja!», s’exclame un élève du fond de laclasse – ce qui déclenche l’hilarité générale, et amène un sourire sur levisage du professeur. Comme nous ferons remarquer plus tard à Monique Marrocq qu’il nous asemblé, en écoutant ces quelques phrases, sentir le souffle de l’Histoire dansla classe: «Voilà encore un domaine dans lequel les outils numériques noussont précieux, nous expliquera-t-elle: entendre cette voix, c’est sentir laprésence d’un homme qui a du charisme. Un homme qui donne de l’espoir,parce qu’il croit dans les hommes, dans la paix, dans la possibilité deprogresser; et qui porte un projet à long terme…»

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Éducation à l’informationAujourd’hui, avec le développement d’internet, le problème n’estpas la rareté de l’information, mais plutôt son foisonnement: com-ment s’orienter dans cette masse documentaire non hiérarchisée –les Québécois utilisent le terme “infobésité” – qui tombe en ava-lanche après le moindre clic. L’éducation à l’information est ainsi de-venue une priorité du système éducatif; et si la responsabilité en in-combe à tous les enseignants, les professeurs documentalistes sontici en première ligne, à charge pour eux d’adapter les méthodes clas-siques de la recherche documentaire à ces nouveaux médias.Les ordinateurs sont à la fois le problème et la solution: en démul-tipliant les possibilités d’accès à l’information – encyclopédies, dic-tionnaires, internet, etc. –, ils obligent chacun à en apprendre les en-jeux et les modes de fonctionnement…«Écoutez parler certains enseignants documentalistes et vous ver-rez combien leur rôle de médiateur est important, mais invisible etsurtout pas valorisé. Ce qui est d’autant plus paradoxal qu’au mo-ment où l’on croit pouvoir se passer des professionnels de la docu-mentation, les compétences nouvelles requises par le monde infor-mationnel actuel les rendent de plus en plus importants pour faireface aux nouvelles caractéristiques de l’environnement numériqueet informationnel.1 »

-----1 www.brunodevauchelle.com/blog

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collège Jules Ferry, à Gabarret – mars 2008avec Valérie Coussemacker, professeur documentaliste

/ / / Toute une journée au CDIOù l’on constate qu’ici, le centre de documentationet d’information est aussi centre de vie…

L’espace fluide et baigné de lumière, en rotonde sur la façade du collège,occupe une place de choix au cœur de l’établissement. Il reste bien en-tendu le lieu du livre et, nous le verrons plus loin, celui où l’on découvrele plaisir de flâner entre les rayonnages. Mais les techniques numé-riques – plusieurs ordinateurs fixes, tables équipées de prises deconnexion à internet, scanner, imprimante couleur… et tout récemmenttableau interactif – sont progressivement venues enrichir l’offre, et mul-tiplier les raisons de fréquenter ce qui est un peu la plaque tournante del’établissement. Nous voilà donc pour la journée dans ce lieu polyvalent,vivant et très fréquenté.Culture(s). «Il me semble important qu’en passant la porte du CDI, lesélèves se trouvent directement confrontés à des œuvres qu’ils n’ont pasl’habitude de côtoyer par ailleurs, nous explique Valérie Coussemacker. De-puis que nous sommes équipés d’un tableau interactif, je m’en sers sou-vent pour y afficher un poème. Il m’est arrivé aussi de projeter un DVD deGlenn Gould, jouant les Variations Goldberg de Jean-Sébastien Bach: lesélèves ne savaient pas du tout ce que c’était, mais ils étaient sidérés… Ilsne sont pas du tout réticents à ce que nous appelons “la culture” – bien aucontraire –, dans la mesure où nous ne nous montrons pas complètementhermétiques à la leur… Pour ma part, je ne suis pas très “rap”, ni“manga”, mais pour autant, ce sont des choses que je ne refuse pas.»

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-----11H10/12 HEXTENSION DU DOMAINE DU COLLÈGEDans le cadre de la politique d’éducation prioritaire, le collège accueille cematin, pour une découverte du CDI, les enfants de l’école primaire du villagede Parleboscq accompagnés par leur maître, François Hiquet. Secon deséance d’une série de sept, consacrée aujour d’hui aux livres documentaires.

Un peu intimidés, les jeunes écoliers entrent au CDI en se tenant par lamain et s’en vont poser leurs manteaux avant de s’asseoir, à l’invitationde Valérie Coussemacker, devant le tableau interactif.«Quelle est la signification du mot crépusculaire? Qu’est-ce que la phi-losophie ? Comment fonctionne la justice en France ? Comment seconjugue le verbe coudre, à l’imparfait ? Toutes les réponses à ces ques-tions – et à bien d’autres encore – se trouvent dans les livres documen-taires…» Le tableau interactif soutient la démonstration, en forme dequestionnement, du professeur documentaliste. Fascinés, les enfants nebronchent pas. « Voilà dix questions, vous êtes vingt : vous allez vousmettre par deux, et chaque groupe s’occupera d’une question. Attention,je ne vous demande pas d’y répondre, mais de trouver le livre qui contientprobablement la réponse. »Tout le monde y est? L’exploration du CDI peut commencer… Chaque tan-dem a tôt fait de repérer, parmi les livres spécialement déposés sur unetable, le dictionnaire, l’encyclopédie, l’ouvrage de vulgarisation scientifique

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ou le livre de grammaire susceptible de répondre à sa question. Il s’agitmaintenant d’apporter le précieux document à Valérie Coussemacker,qui se tient là-bas, près du scanner et de l’imprimante. Elle va se chargerde numériser la couverture de l’ouvrage, puis de l’imprimer. Reste encoreà saisir – sans faire de fautes – la question correspondante sur l’ordina-teur, avant de pouvoir envisager de rassembler tous ces éléments sur ungrand poster que l’on ramènera plus tard à l’école. «Nous utilisons beau-coup l’informatique en classe, précise François Hiquet. Mes élèves saventse servir d’un traitement de texte, envoyer des courriels, faire des re-cherches sur internet… et même monter des petits films…»Bilan. Valérie Coussemacker rassemble de nouveau les élèves devant le ta-bleau interactif : «Regardez bien, il y a quelque chose de spécial sur le dosde chaque livre… – Une étiquette? – Oui, à la maison, on l’appelle commeça, mais dans un CDI ou une bibliothèque, cette étiquette porte le nom de“cote”, et elle est bien pratique pour ranger les livres, et surtout pour sa-voir où les retrouver ! » On établit collectivement que les « documen-taires» nous apprennent des choses sur le monde réel; on découvre queles cotes fonctionnent de la même façon dans toutes les bibliothèques dumonde – celle des livres d’histoire et de géographie, par exemple, com-mençant toujours par le numéro neuf… La séance va se terminer. «C’estleur première image du collège, commente Valérie Coussemacker. Plustard, quand ces enfants arriveront en 6e, ils seront déjà familiarisés.»-----13H30/14 HRÉSISTANCE/EXISTENCEAtelier de recherches sur la Résistance, avec Hélène Bulfoni, professeurd’histoire : «Les recherches sur internet, c’est direct, ça va vite, et on peuttrouver des renseignements sur n’importe quel sujet !»

Comme tous les lundis, quelques élèves de 3e passionnés d’histoire ontaujour d’hui rendez-vous avec leur professeur. Nous apprenons qu’unvoyage est en préparation pour le mois d’avril prochain; nos collégiens ontentrepris, en vue d’une communication à leurs camarades, de rassembler

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de l’information sur les différents sites au programme : Oradour-sur-Glane, la fondation André Maginot à Neuvy-sur-Barangeon, les Invalides,le Mémorial de la Shoah (et la tour Eiffel!) à Paris. Un second groupe seréunit de la même façon tous les jeudis pour préparer le Concours natio-nal de la Résistance. Tout cela s’articule autour d’un projet de rechercheet de publication sur les actes de résistance dans le Gabardan entre 1942et 1944: collecte de témoignages, récits, photographies, et rencontres avecles quelques résistants qui vivent encore. «Les élèves sont émus: tout çales concerne, les intéresse!» constate Hélène Bulfoni.Comme dans tout projet de recherche, les ordinateurs portables sont icid’un précieux secours. Corto et Cheyenne anticipent leur visite à Oradour-sur-Glane en visionnant une vidéo sur le village martyr: «On nous a dit quece serait un grand moment d’émotion, explique Corto: plus de 600 per-sonnes ont été tuées! Nous avons trouvé plusieurs vidéos sur le site Dai-lymotion. J’essaie d’en tirer certaines informations que nous n’avons pasencore, ou bien des déclarations de différentes personnes, connues ou in-connues, qui sont venues visiter Oradour-sur-Glane. – Un peu comme si tuétais un journaliste? – Oui, c’est ça, un peu…»-----14 H/15 HCOURS DE GREC!«Nul n’a besoin d’être expert pour se servir des outils numériques…»Cours de grec de Marion Delbousquet, avec une classe de 3e.

Exceptionnellement, la classe de grec se transporte aujourd’hui au CDI.«Mes élèves vont participer à un concours sur l’art grec, explique MarionDelbousquet. Nous avons commencé des recherches depuis maintenantdeux mois, chacun travaillant en autonomie sur son ordinateur. J’aichoisi aujourd’hui de venir faire mon cours au CDI afin de profiter du ta-bleau interactif pour projeter ce DVD1 ; une manière de rassembler ce quiresterait un peu éparpillé, une séance de révision, en quelque sorte.» Ma-rion Delbousquet ne s’en cache pas: la technique n’est pas son fort. Pourautant : «Nul n’a besoin d’être expert pour se servir des outils numé-

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riques», affirme-t-elle. Sébastien, l’assistant d’éducation, l’accompagnedonc pour lancer le DVD; plus tard, le professeur ne se privera pas, à lamoindre hésitation, de solliciter l’aide de ses élèves: «Pour avancer, je faiscomment?» Les (fiers) souffleurs ne manquent pas : «La flèche, en hautà gauche, Madame !» Nous voilà donc partis pour une visite virtuelle de la Grèce antique. Oncommence par le chapitre histoire, avant de se plonger dans l’art… Lesélèves s’empressent de répondre aux questions qui leur sont posées, etfont même joyeusement assaut d’érudition, démontrant qu’ils dominentbien le sujet. «Quel style, les chapiteaux? – Doriques !» Incollables, ilsconnaissent les métopes et les triglyphes, savent que les sculptures col-lées contre les murs sont des bas-reliefs, ont déjà repéré le palais d’Aga-memnon à Mycènes, l’entrée du stade d’Olympie, le trésor des Athéniens,le théâtre de Delphes… Image après image, la beauté s’impose : «C’estsplendide, magique !»Le cours se termine. Voilà quinze élèves fin prêts pour se présenter à leurconcours, et un professeur particulièrement fier d’eux: «Je suis là pourgraver dans leur esprit des images qui resteront pour la vie…»-----15H15/16 HLE CDI DANS UN ÉTAT PLUS CLASSIQUE…«Je garde un œil sur ce qu’ils font,mais je les laisse très libres de mener leur travail à leur guise.»

La classe de grec est repartie; arrivent des élèves qui profitent d’une heured’étude pour venir au CDI, certains avec leurs ordinateurs, d’autres non.Sur les quinze élèves présents, sept ont demandé à se connecter à inter-net. «En étude, les surveillants n’ont aucune prise sur ce que font lesélèves, il n’est donc pas permis de consulter internet. Ici, au CDI, grâce autableau interactif, je peux leur demander de travailler sous Synchron Eyes,j’affiche leur écran sur le tableau interactif, au vu de tout le monde. Ça li-mite les dérives et me permet éventuellement d’intervenir…»Chuut… L’ambiance est au calme. Quelquefois isolés, plus fréquemment

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par petits groupes de trois ou quatre, les élèves ont trouvé leur place, quià une table, qui sur l’un des fauteuils près du rayon BD et magazines. Fa-brice et Guillaume s’entraînent avec leur ordinateur pour l’ASSR (attes-tation scolaire de sécurité routière), sur un site qui les place exactementdans les conditions de l’épreuve qu’ils auront à subir. Cyprien et Auréliesont installés près du rayon Magazines : «C’est plus tranquille pour lire.»L’un d’eux s’est arrêté sur Science et Vie Junior : «Ça parle du futur.» Quia dit que les adolescents n’aiment plus lire? Aurélie, qui est en 5e, a bienaimé l’histoire de la fée du robinet, dans les Contes de la rue Broca, dePierre Gripari. Son amie Camille a dévoré Brooklyn babies de Janet MacDonald en une semaine. Un livre en anglais? «Non, traduit en français.»Visiblement passionnée, elle a décidé d’emprunter la suite. On peut savoirde quoi ça parle? «C’est une adolescente, dans une cité, qui tombe en-ceinte très jeune. Elle cherche à retrouver le père de son enfant, veut re-prendre ses études…» Maïlys et Jade, actuellement en 4e, ont ouvert leursordinateurs pour faire un devoir de mathématiques: « Il faut faire des me-sures, et remplir un tableau. – C’est difficile? – Non, ça va…» Nous n’ensaurons pas plus. Fanny et Laurane sont aussi en 4e. «Nous avons com-mencé un travail sur les écrivains d’avant – enfin, les plus connus. Là, c’estCorneille : nous devons raconter sa vie et son œuvre. – Vous faites des co-pier-coller? – Non! On analyse ce qu’on trouve sur Encarta, ou sur inter-net, et on écrit nous-mêmes. – Ah bon! C’est un sacré boulot, non? – Ben,oui.» Alexandre, lui, peaufine son B2i (Brevet informatique et internet).«Pour valider un item, il faut que j’explique comment je m’y suis pris pourfaire ce qui est demandé, puis l’envoyer à un professeur, et voilà!» Ilmontre l’écran de son ordinateur: un certain nombre de voyants s’affichentdéjà en vert. C’est bien parti !-----17H15: CHRONIQUE LOCALE«J’ai des photos à vous donner, pour illustrer votre article !»Atelier communication, avec Valérie Coussemackeret Sébastien Florence-Courtand, assistant d’éducation.Marine, Laurina et Camille, respectivement en 6e et en 5e, se réunissenttous les lundis soirs pour alimenter le site internet du collège – ainsi quePlume d’école, le journal de la communauté de communes –, en petiteschroniques sur la vie du collège. «Ce sont elles qui choisissent les sujets,nous explique le professeur. Elles travaillent à la rédaction des articles, puisnous les relisons ensemble, et quand tout est prêt, nous les mettons enligne.» Leur dernier article, “Le cdi vu par les élèves”, est maintenant li-sible sur internet. «Nous avons aussi écrit “Une intervention stupéfiante!”,un article qui raconte la visite d’un représentant de la gendarmerie, venu

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nous expliquer le danger des drogues. – Il est bien, votre titre! Commentl’avez-vous trouvé? – On nous a un peu aidées…» Valérie Coussemackerencourage nos deux chroniqueuses à travailler sur leur prochain sujet, au-tour des petits-déjeuners organisés la semaine dernière au collège, dansle cadre de l’éducation à la santé. Marine dicte, Laurina écrit. «J’ai desphotos à vous donner, pour illustrer votre article», annonce Sébastien, l’as-sistant d’éducation, également administrateur du site.-----

1 Merveilles de la Grèce antique, éd. Damalis.

-----collège de Linxe – décembre 2008

Cours de français de Muriel Lagorce, avec une classe de 4e

en compagnie de Myriam Lacrouts, professeur documentaliste

/ / / Le CDI délocaliséComment persuader les élèves de lire tout un ro-man? Tentative, à quatre mains, de résoudre cettequestion récurrente…

«Vous allez aujourd’hui choisir un livre, c’est pourquoi Mme Lacrouts, notreprofesseur documentaliste, est avec nous. Allumez vos ordinateurs, et allezrécupérer les consignes sur le serveur du collège.» Le professeur defrançais vient de lancer la séance dans sa salle de cours habituelle: aucundéplacement ne semble prévu vers le CDI.Les critères du choix. C’est au tour de Myriam Lacrouts d’intervenir: «Quipeut me dire ce qu’est BCDI1 ? C’est le logiciel qui gère les documents duCDI.» C’est donc sans quitter la salle de classe, en se connectant sur BCDI,que chacun va pouvoir, depuis son ordinateur portable, consulter lecatalogue du CDI… «Vous pouvez choisir un livre par critères de genre:roman policier, sentimental, de science-fiction, explique Myriam Lacrouts.Vous pouvez aussi choisir un auteur et savoir quels sont ses livresdisponibles. Ou bien retrouver un ouvrage dont vous ne connaissez qu’unepartie du titre… Ensuite, vous accédez au panier: il fonctionne sur le mêmeprincipe que celui de n’importe quel site commercial – sauf qu’ici, vous nepayez pas! Quand vous avez choisi votre livre, cliquez sur “réserver”; vousn’aurez plus qu’à passer le chercher au CDI.»«Vous allez devoir créer une fiche sur Publisher2, explique maintenant

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Muriel Lagorce. Il vous suffit de suivre la grille que j’ai préparée pourvous. En plus d’un certain nombre de renseignements sur l’auteur et surle livre, vous y noterez vos impressions de lecture. Par la suite, cette fichesera intégrée à BCDI, ce qui veut dire que vos camarades pourront laconsulter.» Le professeur documentaliste montre, sur le tableau interactif,des exemples de fiches réalisées l’an dernier. Et termine son exposé parquelques indications techniques sur le fonctionnement de Publisher:comment écrire un texte, incruster une image, mettre une couleur enarrière-plan, etc.La recherche. Toute la classe est bien vite connectée sur BCDI. Mon voisinPierre, qui aime bien les chiens, présélectionne donc Les clients du BonChien jaune, de Pierre Mac Orlan. Mais la fiche de renseignements luiindique que c’est un livre de niveau 5e… On risque de lui récuser ce choix. Ildécide alors d’élargir sa recherche à «animaux». Son camarade avait jetéson dévolu sur un livre de Titeuf. «Tu ne peux pas choisir ça, lui rétorqueson professeur de français, ça fait vingt pages! Ou alors, tu prends tous lesalbums de Titeuf, pour faire une fiche de lecture sur l’ensemble…» Unautre élève demande s’il peut réserver un Harry Potter… «Oui, répond leprofesseur, mais pas le premier tome: il est trop facile!» Commentaire demon voisin: «Ma sœur, quand elle est là-dedans, elle ne veut même plusjouer avec moi: elle ne fait que lire, lire, lire…» Ma mère m’épuise, c’est letitre du livre qu’a choisi Caroline: «D’après le résumé, ça a l’air bien…»La motivation. «Pour certains élèves, nous expliquera plus tard MurielLagorce, la lecture est vécue comme un supplice. Si je leur impose unroman, ils vont se plaindre! Mais si je les laisse choisir, ils se précipitent surcelui qui compte le moins de pages, même si le sujet ne les intéresse pas.D’où l’intérêt d’une séance comme celle-ci.»-----

1 http://bcdi.crdp2-poitiers.org/site

2 www.microsoft.com

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collège Jean Rostand, à Mont-de-Marsan – mai 2009Entretien avec Christelle Truf, professeur documentaliste

/ / / Cyber-documentationOu comment répertorier et diffuser sur internetune information fiable et adaptée aux besoins descollégiens et professeurs…

«À mon arrivée dans le collège, il y a trois ans, j’ai ressenti la nécessité defaire circuler l’information au-delà du CDI; ma première tentative a étéd’éditer un bulletin “papier”: beaucoup de travail et un prix de revientassez conséquent en photocopies… Plus tard, j’ai décidé de créer un blogsur le site du web pédagogique1 : j’y tiens une revue de presse, je signale lesnouveaux livres que nous recevons, les émissions de télé intéressantes pourles élèves, les expositions du CDI, etc. L’an dernier, j’avais aussi commencéà faire quelques liens sur internet, notamment vers des sites utiles pourpréparer le diplôme national du brevet.J’ai alors entendu parler de Netvibes2 : c’est un “agrégateur”, c’est-à-direun site qui permet de créer une page de liens vers d’autres sites. C’est surcet outil que je propose aujourd’hui une sélection – régulièrementactualisée et enrichie – de liens pertinents3, classés par disciplines ou parthèmes transversaux: un “CDI virtuel” en quelque sorte. Mes sourcesd’information? Les indications de mes collègues, mais aussi les revues etsites professionnels, de documentalistes ou d’éducation…En faisant ce travail de veille adaptée aux besoins des collégiens et desprofesseurs, je suis tout à fait dans mon rôle de documentaliste: indiqueroù trouver une information fiable et adaptée au niveau de chacun. Il y atellement d’informations sur internet qu’une sélection de sites validés etpertinents facilite beaucoup les recherches. Les liens que je sélectionne ysont ciblés comme ceux du fonds “papier” du CDI.Pas question pour autant de conditionner les élèves, ni de leur imposerl’utilisation exclusive de ce portail – je donne d’ailleurs les liens versplusieurs moteurs de recherche.»-----

1 http://lewebpedagogique.com/cdirostblog

2 www.netvibes.com

3 www.netvibes.com/clgjrostandmdm

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SciencesEn collectant les données disponibles en temps réel sur internet,les enseignants de sciences peuvent aujourd’hui nourrir leur pé-dagogie des évènements et des débats scientifiques d’actualité –ce qui est souvent un bon moyen de stimuler la curiosité et l’inté-rêt de leurs élèves. Ils disposent également de documents multimédias, spécifiquementadaptés à leur discipline – comme les vidéos documentaires télé-chargeables sur lesite.tv de France5. Des représentations interactives1

permettent de visualiser des phénomènes complexes, quand le re-cours à l’expérimentation directe est impossible.Pour étudier la géologie dynamique (volcans, séismes et tectoniquedes plaques), les élèves de 4e disposent également du logiciel Sysmologjunior avec lequel ils peuvent directement visualiser, sur leurs ordi-nateurs portables, les grands phénomènes qui agitent notre planète.Via le réseau du collège, les professeurs de sciences sont nombreuxà transférer vers les ordinateurs des élèves tout le contenu du cours,tel qu’il vient d’être élaboré sur le tableau interactif: «L’intérêt, pourl’élève, c’est de pouvoir étudier chez lui, sur son ordinateur, à par-tir des images et des observations faites en classe, par exemple aumicroscope.2 »

-----1 Les animations de type EduMédia ne sont ni des manuels, ni des exerciseurs, mais des modules d’apprentissage – dénommés briquettes (ou granules) pédagogiques ;elles font partie des abonnements souscrits par le Conseil général.2 Pierre Lacueille, inspecteur d’académie, inspecteur pédagogique régional de sciences physiques (académie de Bordeaux).

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collège François Mitterrand, à Soustons – novembre 2008Cours de physique de Sébastien Lochet, avec une classe de 3 e

/ / / De la bobine à la turbineEntre expérimentation et recherche docu-mentaire, pourquoi choisir? Ici, pour com-prendre le principe de fonctionnement d’unecentrale électrique, on a droit aux deux!

«Vous allez travailler en deux groupes, annonce le professeur. Lespremiers devront réaliser une expérimentation et répondre à unquestionnaire, pendant que les autres vont faire une recherche en ligne.Puis nous intervertirons. Attention, vous avez douze minutes devant vousà partir du moment où vous lancez l’exercice; au-delà, vous ne pourrezplus rien faire. Allumez maintenant votre ordinateur, et recopiez, dansvotre navigateur internet, l’adresse affichée au tableau; vous deveztomber sur la page d’accueil du projet Argos1. Là, vous cliquez sur Ilias ;après vous être identifié, vous trouverez un dossier “Sciences physiquesau collège” dans lequel vous choisissez celui des deux tests sur lequel vousallez travailler en premier.»Recherche expérimentale. Les élèves qui se lancent dans l’expérimentationdisposent d’un ordinateur pour deux, avec tout le matériel nécessaire pourréaliser le montage qui s’affiche sur leur écran: deux aimants, une bobine,un voltmètre. Tout le monde est prêt? Action! Le compte à rebours estlancé. Constater un phénomène est une chose, en tirer une réflexion plusgénérale en est une autre. C’est tout l’art de l’exercice qui leur est proposéque d’amener les élèves à le faire. «J’ai fait en sorte, nous indique Sébastien Lochet, que leur pensée évoluepar paliers; au début, on est dans une manipulation classique: on bricoleun peu, on répond à une première question en prise sur l’observationdirecte d’un phénomène électrique: si on fait bouger un aimant devant unebobine, il se produit un courant – le multimètre est là pour en témoigner. Onobserve alors un objet un peu plus technique – une dynamo –, et on essayed’en repérer le fonctionnement. L’objet de la recherche documentaire, c’estde se rendre compte qu’à l’échelle industrielle, une centrale électriquefonctionne exactement sur le même principe.»

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Sur les paillasses carrelées de blanc, les dialogues vont bon train: l’unpense que «c’est la bobine qui se déplace… – Non, rectifie son copain, c’estl’aimant…» Pour Sébastien Lochet, ces moments sont précieux: «Surtoutes les étapes de manipulation, il est fondamental que les élèves passentpar un temps de discussion entre eux, et puissent se corrigermutuellement. Ils sont en phase expérimentale, de découverte, derecherche. Et on ne peut pas tâtonner tout seul!»Recherche documentaire. «Pour ceux qui font la recherche documentaire,vous pouvez utiliser les encyclopédies qui sont sur votre ordinateur, ou bienle moteur de recherche Google, ou encore les animations eduMédia.»Devant moi, Kévin et Florian, lancés sur internet pour essayer de trouverquelle est l’origine du mot dynamo, se désolent: «Oh! là, là, comme c’esttrop dur…» Le prof encourage: «À vous de bien utiliser les mots-clés!» Unpeu plus loin, leur camarade se demande comment faire pour trouverrapidement la part de l’énergie hydraulique en France: «Si je cherchaisdans Wikipédia, à énergie renouvelable?»Gérer le temps. La concentration est impressionnante, la tension palpable:pas moyen de distraire une seconde l’attention des élèves: ils ont bienautre chose en tête que de répondre à nos questions. «Ah, c’est (déjà)fini?» Marie laisse échapper un cri de déception: l’impitoyable couperetest venu clore sa session avant qu’elle n’ait eu le temps de transcrire unedernière réponse. «Pas trop stressée? – Non, ça va… Le plus dur, c’est degérer le temps.»Mise en commun. Le temps imparti est écoulé pour tout le monde etchacun, dans la classe, a effectué le circuit complet des deux tests. «Vousbaissez maintenant les écrans de vos ordinateurs, annonce le professeur,nous allons faire la synthèse.» Sollicitant la participation de ses élèves, ets’appuyant sur un conducteur de cours affiché sur le tableau interactif, ilrefait devant eux le chemin qu’ils viennent de suivre. «Vous allezmaintenant récupérer le document que je viens de projeter sur votreordinateur. Vous devrez le revoir pour la prochaine fois.»«Ce document, ajoutera plus tard Sébastien Lochet à notre intention,contient tout ce que je viens de montrer et d’écrire devant les élèves. Il estconstruit de manière interactive, avec la possibilité de consulter plusieursanimations préalablement téléchargées sur le site d’EDF. On pourrait trèsbien imaginer qu’il soit la trame d’un cours magistral, et à la séanceprochaine, nous allons exploiter cette documentation: en 3e, les élèves nesont pas encore capables de construire un savoir structuré uniquement àpartir d’animations, même si celles-ci sont relativement simples etpédagogiques. Il faut veiller à leur fournir des explications à leur niveau, ets’assurer qu’ils ont bien compris. Pour conclure la leçon, il s’agira de trier

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les informations pertinentes qui constitueront la trace. C’est une choseclairement établie entre nous dès le début de l’année: la trace des leçonsest enregistrée soit dans le cahier, soit dans l’ordinateur, l’une des formesétant aussi légitime que l’autre.»-----

1 Argos est un portail web pédagogique qui offre l'accès à un ensemble d'outils et de res-

sources numériques, l'enseignant ou l'élève se connectant à son espace numérique de travail

depuis n'importe quel ordinateur connecté à internet, à l'aide d'un simple navigateur.

http://catice.ac-bordeaux.fr/fr/ent_argos.html

-----collège d’Albret, à Dax – janvier 2008

Cours de physique de Jean-François Lannes, avec une classe de 3e

/ / / 565 millisecondes!Ça commence un peu comme un jeu vidéo, maisil s’agit bien d’un exercice de révisions, pourpréparer le prochain contrôle…

«Nous allons appliquer ce que nous venons d’apprendre à des questionsde sécurité routière, explique le professeur. Je roule en scooter, je vois unobstacle, je freine: quelle distance va parcourir mon scooter avant de s’im-mobiliser? Allez sur le réseau et copiez le fichier sur votre ordinateur…Vous pouvez tout faire de A à Z; je n’ai pas à intervenir : il vous suffit desuivre les étapes une par une. Lisez attentivement les consignes!»Animation. Jean-François Lannes nous avait prévenus: «Vous verrez, lapremière phase de l’exercice les amuse beaucoup. L’ordinateur mesureleur temps de réaction: ils se croient dans un jeu vidéo, et ils vont cher-cher à améliorer leur score.» Le professeur connaît bien ses élèves: ils ont

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tôt fait de comprendre qu’il leur suffit de relancer l’exercice pour avoirdroit à un nouvel essai… «Je rappelle que le temps de réaction, c’est letemps qui s’écoule entre le moment où vous avez vu l’obstacle, et le mo-ment où vous avez cliqué sur Stop. – Monsieur, j’ai fait 565 millisecondes!– Et moi 422! – Très bien, André, tu as fait un super-score; passe àl’étape suivante.» Le professeur circule entre les tables, observe la pro-gression de chacun, encourage… Une partie de la classe “sèche” sur desproblèmes de conversion. Il reprend alors la main pour réexpliquer ces no-tions à l’aide du tableau interactif.Collaborations. Les calculettes sortent des cartables, des collaborationss’installent spontanément entre les élèves. «Cela ne me dérange pas, aucontraire, nous dira plus tard Jean-François Lannes. Si l’élève explique àun de ses camarades, c’est parce qu’il a, lui-même, bien compris. Le faitque ce soit un copain ou une copine le rendra peut-être plus réceptif. Ensciences, quand on fait des travaux pratiques, on profite du fait qu’ils tra-vaillent en groupe pour les encourager à confronter leurs idées.»Petit à petit, l’exercice avance… Certains élèves en sont maintenant à tra-cer la courbe de freinage. «Monsieur, j’ai fini… – Très bien, tu peux essayerde refaire l’exercice avec l’option “route mouillée”.»Driiiiing… La sonnerie de fin de cours retentit. «Monsieur, on n’a pas d’exercices à faire, pour réviser le contrôle?» Ré-ponse du professeur: «Si tu suis toutes les étapes d’auto-évaluation de cechapitre, et si tu refais l’exercice d’aujourd’hui, je te garantis que tu en sau-ras largement assez pour réussir ton contrôle!»Commentaires. Le professeur analyse le cours auquel nous venons d’as-sister : « Il existe le même type d’exercice dans le manuel scolaire, maisavec les ordinateurs, les élèves travaillent en autonomie, et s’ils parvien-nent à terminer, ils ont forcément juste. Je n’interviens que pour débloquerceux qui en ont besoin : je peux donc insister sur certaines de leurs diffi-cultés. L’autre intérêt, c’est de varier les situations d’apprentissage, et c’estimportant dans l’enseignement. Enfin, ils vont garder cet exercice dansleur ordinateur et ceux qui veulent pourront donc le refaire à la maison,en faisant varier la vitesse, le type de route, etc.»

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collège de Linxe – décembre 2008Cours de physique de Sébastien Orduna, avec une classe de 3e

/ / / InvestigationsPour résoudre les problèmes qui leur sont posés,les élèves conduisent leurs propres expérienceset rédigent le compte rendu de leur démarche.

Le cours commence par un bref rappel des propriétés physiques dequelques métaux courants. Bien vite, les élèves s’organisent par groupesde trois ou quatre, autour d’un ordinateur portable sur lequel ils télé-chargent les documents relatifs à la séance du jour.Première énigme. «Voici quatre échantillons de métaux, annonce le pro-fesseur : fer, aluminium, cuivre et zinc. Vous devez les identifier et m’ex-pliquer votre méthode par écrit. Réfléchissez bien et demandez-moi le ma-tériel que vous voulez. Dans la mesure du possible, je vous le fournirai.»Dans la classe, on se prend vite au jeu, et les discussions vont bon train.Les élèves ont tôt fait de repérer les balances, les éprouvettes graduées etles aimants, disposés à leur intention au fond de la classe. La fonction dela balance est évidente; celle de l’éprouvette beaucoup moins. Le profes-seur circule de groupe en groupe, écoute, encourage. Jordan, Marina etÉmila ont trouvé : «Celui-là, c’est le cuivre: on l’a reconnu à sa couleur!Le plus léger, c’est l’aluminium. Pour trouver le fer, on a pris un aimant.Et le dernier, par élimination, c’est forcément le zinc.» Il ne reste plus qu’àdétailler le raisonnement sur l’ordinateur.Deuxième énigme. Il faut maintenant déterminer la densité de chaque mé-tal. Le professeur glisse quelques indices: «Je vous rappelle que la den-sité, c’est la masse en grammes d’un cm3 de matière. Pour la calculer, vousdevrez donc connaître le volume de votre échantillon.» Jordan tient larègle, Marina est à l’ordinateur. «La longueur, c’est 10 cm; la largeur, 1 cm,et l’épaisseur, 1 mm.» Après avoir harmonisé les unités, on établit le vo-lume de chaque bâtonnet. Il faut maintenant peser. Nos scientifiques enherbe notent scrupuleusement les résultats obtenus, au 1/10e de grammeprès. Mesurer, peser… Gestes élémentaires qui guident l’observation etconduisent le raisonnement.Troisième énigme. Comment identifier le métal dont est faite la spatule quele professeur vient de distribuer? Catherine, Clarisse et Madisson discu-

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tent ferme: «Moi je parie pour l’aluminium!» Oui, mais comment leprouver? Autant il était (relativement) facile de calculer la densité d’un bâ-tonnet parfaitement régulier, autant il paraît insurmontable de connaîtrecelle de cette spatule au volume complexe. Dans le groupe, on sèche… Unpeu plus loin, Zoé, Axelle, Samantha et Lucie ont eu l’intuition de lamarche à suivre : «Nous avons versé de l’eau dans l’éprouvette jusqu’à80 ml, puis plongé la spatule, et nous avons constaté que le volume avaitaugmenté de 3 ml.»«Cette séance était construite sur le principe de la démarche d’investiga-tion, commentera plus tard Sébastien Orduna: les élèves ont un but, ils doi-vent faire appel à leurs acquis pour trouver eux-mêmes les moyens de l’at-teindre. L’un des intérêts de ce type de démarche, c’est d’apprendre àrédiger un protocole expérimental : expliquer ce qu’on cherche, et com-ment on s’y prend. Tous les sujets du programme ne s’y prêtent pas, mais,dès que c’est possible, je pratique ainsi avec les ordinateurs portables, cequi motive davantage les élèves pour la rédaction.»

-----collège Jean Rostand, à Mont-de-Marsan – mai 2009

Cours de sciences de la vie et de la Terre (SVT) de Daniel Castandet, avec une classe de 4e

/ / / Si je veux, quand je veuxLes manuels restent au collège, et ce sont les or-dinateurs portables qui font le lien entre le courset la maison; en début d’année, on apprend àbien organiser les différents contenus.

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Dès les premières minutes du cours, chacun s’affaire à brancher sonordinateur portable: la routine… Daniel Castandet confirme: «À l’arrivéedes ordinateurs au collège, à la rentrée 2002, j’ai fait le pari de les utilisersystématiquement en cours. En début d’année, je montre à mes élèvescomment organiser leur travail: un dossier pour chaque partie duprogramme, avec des sous-dossiers par chapitre. Et à l’intérieur de chaquechapitre, un dossier pour le cours, un autre pour les travaux et un troisièmepour les documents. Je leur apprends à créer des liens entre les fichiers.Pour les élèves qui jouent le jeu – car c’est à eux de faire ce travail personnel–, il sera ainsi très facile de trouver le document qui correspond à ce qui estécrit. Mes élèves n’ont pas de livre à la maison: tous les manuels papierrestent ici! En revanche, comme je dispose d’un CD contenant lesillustrations sous forme numérique, je construis la trame de mon cours avecNotebook et je la transmets à mes élèves, via le réseau.»Choisir le moment d’avoir un enfant. C’est le nom du fichier que chacunvient de télécharger sur son ordinateur. Les illustrations qui s’affichent surles écrans sont celles du manuel, ouvert à la bonne page sur chaque table.La mission qui attend nos élèves va les conduire à explorer en détail lecontenu du cours: il s’agit d’identifier, dans le livre, les renseignementsnécessaires pour compléter les images, schémas et tableaux – muets –, dudocument informatique. «C’est une forme de travail qui leur est familière,nous explique Daniel Castandet. Pour chaque point à traiter, ils ont uneaction à faire: légender une image, remplir un tableau, etc. Ça ressemblebeaucoup à ce qu’ils auraient étudié dans le livre, mais par ce détour, ilss’approprient le savoir.»Stérilet, préservatif, ou contraception d’urgence? On compare les différentesméthodes, on en explique les fonctionnements, on évalue leur fiabilité…Ambiance de travail, calme et studieuse. La méthodologie ne semble poserde problème à personne. Le professeur passe de l’un à l’autre, encourage,répétant inlassablement ses conseils: «Réfléchis bien et respecte laconsigne: qu’est-ce qu’on te demande? Lis jusqu’au bout tous lesrenseignements dont tu disposes dans le livre…» Quelqu’un donne salangue au chat: «Monsieur, je ne trouve pas l’inconvénient du stérilet…»Notre professeur ne se laisse pas fléchir: «Tu veux aller trop vite: relis letexte, et sers-toi de ta tête…»Mise en commun. «Qui vient écrire les légendes de la première image?»Voilà le tournant du cours: le centre d’intérêt va se déplacer de l’écranindividuel à celui du tableau interactif, et la réflexion va devenir collective.Plusieurs doigts se lèvent… «Il n’y a qu’un seul “l” à pilule», fait-onremarquer à celui qui l’avait écrit comme “libellule”… Thomas, puis

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Pierric se chargent de légender une représentation schématique del’implantation de l’embryon sur la paroi de l’utérus. Reste un tableau àcompléter: le pourcentage de fiabilité du préservatif? 95 %, du stérilet?99 %, de la pilule? 99 %. Dans les dernières minutes du cours, le professeurinsiste sur une question de terminologie, moins innocente qu’il y paraît:«Ce que l’on appelle couramment "la pilule du lendemain" est en réalitéune contraception d’urgence. Son avantage? Elle permet de rattrapercertains accidents, mais l’inconvénient, c’est qu’elle n’est fiable qu’à 80 %,et que son dosage en hormones est très fort…»Difficile? «Nous avons la chance, en SVT, de traiter du concret et de chosesque l’on rencontre dans la vie de tous les jours, commente pour nous DanielCastandet. Si je veux fournir une réponse scientifique aux questions qui seposent tous les jours, je suis obligé de faire référence à des notions parfoiscomplexes: oui, c’est difficile, mais on peut difficilement faire autrement!»

-----collège Jules Ferry, à Gabarret – mars 2008

Cours de SVT de Serge Nicolas, avec une classe de 3e

/ / / Ce que disent les imagesSilence absolu dans la classe… Les élèves viennent de télécharger une vidéo.Écouteurs vissés sur les oreilles, chacun mobi-lise son attention: pas question de perdre unemiette de ce qui se passe sur l’écran de sonordinateur.

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N’allez pas croire pour autant que c’est leur feuilleton préféré qui absorbeaussi profondément les élèves… Non, il s’agit d’un documentaire quitraite fort sérieusement de questions de biologie: immunité, mécanismesde défense, antibiotiques… «Ce travail ne pourrait pas être envisagé sansles ordinateurs, souligne Serge Nicolas. L’avantage, ici, c’est que chacunpeut avancer à son rythme: j’ai loupé une information, je reviens en ar-rière pour revoir cette séquence, etc.»Pas question pour autant de traînasser plus que de raison: un vrai travaild’enquête, de compréhension et d’analyse, à la fois sur le fond et sur laforme, attend maintenant nos élèves… «Les vidéos proposées par leSite.tv sont des formats courts, ce qui est un grand avantage pour leur uti-lisation pédagogique en classe. Celle-ci dure six minutes. Elle porte sur unsujet qui correspond à l’avancement actuel de notre programme. Je mesuis rendu compte en la visionnant qu’elle se prêterait bien à une doubleréflexion, puisqu’elle expose d’une manière très intéressante le problèmepurement biologique et médical des antibiotiques, et que l’on peut, parailleurs, en discuter le titre – La France malade des antibiotiques –, un peutrop racoleur, et en décalage avec le contenu.»Le tableau interactif affiche, en temps réel, ce qui se passe sur les ordi-nateurs dans la classe : cette vision globale permet au professeur desuivre la progression de chaque élève. Il n’hésite pas à afficher réguliè-rement en plein écran le travail de l’un ou de l’autre, pour attirer l’atten-tion de tous sur un point particulier, ou stimuler les retardataires. Lesphases de recherche personnelle – ou en petit groupe – alternent aveccelles de mise en commun, pour construire un véritable point de vue cri-tique. «Pourquoi les auteurs du documentaire ont-ils choisi de montrer desenfants? demande le professeur. – Parce que leur système immunitaire estplus faible… – Voilà une réponse scientifique. Elle est juste. Il y a aussi uneraison d’ordre plus journalistique, qui va trouver laquelle? – Parce qu’ilssont mignons, on a pitié d’eux… – Oui, c’est tout à fait ça. Le spectateurva être touché. N’oubliez pas que, derrière un film, une photographie, ily a toujours quelqu’un qui a fait des choix…»

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collège Jacques Prévert, à Mimizan – avril 2009Cours de SVT de Carole Darracq, avec une classe de 4e aide et soutien

/ / / Objectif TerreLe logiciel Sismolog Junior1 permet à ces élèvesde s’initier, chacun avec son ordinateur portable,à la découverte, à la visualisation et à la com-préhension des grands phénomènes sismiquesqui agitent la planète Terre.

Blouse blanche du professeur, paillasses carrelées de blanc…, noussommes ici en territoire scientifique. «Je vous avais demandé de jouer unpeu, chez vous, avec Sismolog Junior, rappelle le professeur. Je supposedonc que vous savez maintenant l’utiliser sans problème…» Dans la classe, les ordinateurs portables affichent bien vite un plani-sphère coloré, très caractéristique de ce logiciel scientifique. Dylan est vo-lontaire pour aller faire une démonstration sur le tableau interactif. Onpasse en revue les différentes fonctionnalités du logiciel: comment navi-guer sur le globe terrestre? zoomer sur une région? faire apparaître lesséismes?Dessiner et écrire. «Prenez la carte que vous avez dessinée; vous allez y su-perposer un papier-calque et y reporter nos observations. Vous ferez lamême chose sur un autre calque, quand nous étudierons le volcanisme.»Feutres et crayons de couleur sortent des cartables. Le professeur circuleentre les tables: «Je ne demande pas de dessiner tous les petits points, maisde déterminer les grandes zones…» Aurélie sera volontaire pour présenter son travail: à l’aide du visualiseur,le professeur projette sa copie au tableau. «Dites-moi si vous êtes d’accordavec ce qu’elle a représenté?» On établit que les principales zones sis-miques sont situées au milieu des océans (on apprendra plus tard à dire “lesdorsales”), sur les bordures des continents et dans les reliefs montagneux.Chacun recopie les réponses sur le document de cours téléchargé en débutde cours dans son ordinateur.Observer et manipuler. «Nous allons maintenant observer plus précisé-ment une zone géographique déterminée…» Zoom, visualisation en troisdimensions : la carte se déforme, le point de vue se déplace, le relief ap-

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paraît. On s’arrête sur une image qui résume le phénomène des trem-blements de terre. Dans la classe, chacun s’applique, sur son ordinateur,à trouver le point de vue qui produira l’image la plus spectaculaire; et l’ony prend visiblement de l’intérêt – il faut bien reconnaître que c’est assezspectaculaire ! Le professeur indique ensuite la procédure permettant de“capturer” cette image pour la placer dans le conducteur de cours :«C’est une chose qui vous servira pour le B2i…»Commentaires. Carole Darracq fait partie des utilisateurs convaincus desordinateurs portables : «Vous l’avez remarqué? Avec un outil comme ce-lui-là entre leurs mains, tous les élèves sont en action! C’est d’autant plusremarquable dans une classe “aide et soutien” comme celle-ci. […] Grâceaux ordinateurs, ils ont tous pu utiliser Sysmolog Junior : c’est une ver-sion simplifiée – et adaptée au niveau du collège – de Sysmolog, un logi-ciel développé par une équipe du CNRS, et utilisé à l’observatoire de Gre-noble. Il nous est très utile pour expliquer le volcanisme, les tremblementsde terre et la tectonique des plaques ; notamment parce qu’il permet devisualiser ces phénomènes complexes. […] J’évolue sans arrêt : il y a tel-lement de supports disponibles que je ne fais jamais la même chose, nid’une année sur l’autre, ni d’une classe à l’autre. Mais comme je n’aimepas jeter, j’accumule des cours, en me disant toujours qu’il y a peut-êtreun document qui me servira à nouveau !»-----

1 www.chrysis.com/site/data/catalog/FicheProd.asp?id=109

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collège Jean Mermoz, à Biscarrosse – mars 2008Cours de SVT de Morgann Caulet, avec une classe de 5e

/ / / À cœur ouvertOn dissèque, on observe, on dessine, on réflé-chit… dans un aller-retour permanent entre l’ex-périmentation sur sa paillasse et le grand spec-tacle projeté en direct sur le tableau interactif.

«Aujourd’hui, nous allons faire la dissection d’un cœur de porc…» À enjuger par les petits cris effarouchés qui accueillent ses premiers mots dansla classe, Morgann Caulet ne s’est pas trompée en nous annonçant «laséance la plus animée de l’année».Chacun est prié d’enfiler des gants en caoutchouc, et de se munir d’unepaire de ciseaux et d’une pince… Tout le monde est équipé? On distribueun cœur de porc par groupe de quatre élèves. «Vous placez le cœur, faceventrale vers le haut.» Clément et Antony sont désignés pour opérer surla paillasse du professeur, en direct sous le visualiseur. Projetée sur le ta-bleau interactif, l’image du cœur n’est qu’une masse informe de chair. Leprofesseur saisit le bac et le fait pivoter. La forme devient instantanémentreconnaissable : c’est un cœur!Action. Le premier travail, c’est de faire un dessin d’observation. «Atten-tion, il ne s’agit pas d’un dessin d’art: nous sommes en sciences.» Chacuns’applique sur sa feuille. «Nous allons maintenant passer au découpage.Oui, c’est épais, oui vous risquez d’avoir du mal…» Les ciseaux attaquentle muscle. Charles ne s’en tire pas trop mal. Deux cavités apparaissent:«Vous allez enfoncer vos doigts pour voir si elles communiquent… Est-ceque vos doigts se rejoignent?» Un peu dégoûtée, Margot s’abstiendra. Re-tour au papier, pour représenter la coupe transversale du cœur. – Commenton dessine? – Eh bien, tu fais une sorte d’ovale, à l’intérieur duquel tuplaces les deux cavités, en montrant bien que la paroi extérieure droite estplus fine que la gauche.»Réflexion. «Vous allez maintenant rincer le matériel et vous laver lesmains.» Tout est bien propre? Avant de finir le cours, je voudrais vousmontrer une animation, que vous pourrez emporter sur une clé USB, sivous voulez.» Représenté en trois dimensions, le cœur qui s’affiche main-

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tenant au tableau interactif pivote à la demande. Tous les regards sonttournés vers cette fascinante image, d’une efficacité didactique indiscu-table. Elle s’anime, et on voit maintenant le sang circuler dans le musclecardiaque. «Votre cœur est un muscle creux; il est programmé pourbattre un certain nombre de fois. Il faut le muscler, c’est pourquoi vous de-vez faire de l’exercice maintenant…»Après le cours. «Nous sommes partis du réel, commentera Morgann Cau-let: d’abord, on observe le cœur, puis on le schématise, et, enfin, on en com-prend le fonctionnement en le replaçant dans le processus de la circula-tion sanguine. C’est vraiment cette série de zooms arrière qui permet auxélèves de décrypter ce qu’ils ont vu. […] En SVT, tableau interactif et vi-sualiseur, c’est l’équipement rêvé! Je me sers souvent du visualiseur pourmanipuler en même temps que les élèves. Ils apprennent par imitation demes gestes, et deviennent ainsi tout de suite très autonomes. Je perds dela sorte beaucoup moins de temps que si je devais aller montrer chaqueétape à chaque groupe. Par ailleurs, le visualiseur est aussi très utile enassociation avec le microscope: je peux faire des captures d’images, pourles projeter ensuite sur le tableau inter actif avant de les légender avec laparticipation de toute la classe.»

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MathématiquesPour l’enseignement des mathématiques – discipline dans laquellel’intégration des machines à calculer est déjà ancienne –, l’utilisationde l’ordinateur autorise nombre de situations pédagogiques parti-culièrement innovantes. Les logiciels de géométrie dynamique per-mettent, par exemple, d’explorer de façon interactive les proprié-tés d’une figure en effectuant des opérations de transformationrespectant certaines contraintes. Les “tableurs” et les “grapheurs”permettent d’alléger certaines tâches fastidieuses, ou de visualiser,en continu, un travail de manipulation de variables. Avec des outilscomme InstrumenPoche1, le professeur peut réaliser et projeter autableau – en boucle et sous forme d’animation – les différentesétapes de construction d’une figure.Grâce à leurs ordinateurs portables, les élèves ont la possibilité – enclasse et à la maison – de faire des exercices interactifs, particuliè-rement utiles pour les révisions: la machine validant les réponses, ouproposant des aides à la correction. Enfin, des sites web, comme Ma-thenpoche2, permettent la mise en œuvre d’une pédagogie réelle-ment adaptée au niveau de chaque élève; ce qui peut être parti-culièrement utile dans des classes de collège où le niveau n’est pastrès homogène.

-----1 http://instrumenpoche.sesamath.net2 http://mathenpoche.sesamath.netLe Conseil général des Landes participe au financement du logiciel Mathenpoche, conjointementavec le Conseil général de Seine-et-Marne et le Centre régional de documentation pédagogiqued’Aquitaine.

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collège George Sand, à Roquefort – mars 2009Cours de mathématiques de Jean-Michel Coussemacker, avec une classe de 3e

/ / / Avec plaisir!Avant de se lancer dans une série d’exercicessur son ordinateur, on ouvre grand ses yeux etses oreilles pour ne pas perdre une miette del’exposé de son prof au tableau interactif.

À peine installés, les élèves se connectent au réseau: une belle collectionde fonds d’écrans personnalisés s’affiche progressivement sur l’écran deSynchronEyes1 projeté au tableau interactif. Juste le temps pour nous dedéguster quelques-unes des citations épinglées sur les murs de la salle:«L’avantage d’être intelligent, c’est qu’on peut toujours faire l’imbécile,alors que l’inverse est totalement impossible… Il y a trois sortes de ma-thématiciens : ceux qui savent compter et ceux qui ne savent pas…»Preuve, s’il en était besoin, que l’enseignement des mathématiques n’estpas incompatible avec l’humour!Action! «Tout le monde est prêt? Je vous montre la révision du chapitresur le calcul littéral.» Debout près du tableau interactif, et face à saclasse, le professeur lance l’animation qui soutient son exposé. Par simpleeffleurement de la surface tactile du tableau, il active la progressiond’une diapositive à l’autre – d’une idée à la suivante –, et déroule le fil deson raisonnement. Les équations se succèdent, dans une progression à lafois implacable et rassurante. Parenthèses, exposants, crochets, barres defraction…, l’écriture mathématique se révèle aussi un bel exercice de ty-pographie ! Surprise : un effet de transition vient de temps à autre relan-cer l’attention. Aussi discret qu’efficace. «Je prépare tous mes cours avec PowerPoint2, nous expliquera-t-il plustard. Et comme les élèves récupèrent les fichiers en fin de séance sur leursordinateurs portables, ils peuvent les visionner chez eux, tranquillement.J’essaie donc de faire des cours un peu distrayants, dynamiques… Je nesais pas si ces animations rigolotes apportent quelque chose du point devue de l’enseignement, mais ça captive les élèves. Ils aiment bien!»Exercices. «Ouvrez maintenant Mathenpoche3, et allez dans la partie “cal-cul littéral-synthèse”. Vous avez une demi-heure pour faire les exercices.Quant à moi je vais faire mon footing dans la classe: n’hésitez pas à m’ap-

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peler si vous êtes bloqués. Bon courage!» Ma voisine Canelle s’attaque aupremier exercice. Pense avoir trouvé: «Je suis trop forte…» Essaie de va-lider son résultat: «Faux!» affiche son ordinateur. Utilise l’aide… Finit parlever le doigt: «Monsieur, j’ai un problème!» Le professeur circule de tableen table pour répondre aux interpellations des uns et des autres. Explique,encourage, repère les étourderies: «Attention à ne pas faire l’erreurclassique: entre deux parenthèses, vous devez multiplier, et non pas ajou-ter !» La fin de l’heure est bien vite arrivée: «Je vous souhaite de bonnesrévisions pour ce soir. N’hésitez pas à regarder à nouveau l’animation quej’ai montrée tout à l’heure. Et bien sûr, je vous recommande d’utiliser Ma-thenpoche pour vous entraîner…»«Le problème dans les classes de 3e, nous expliquera Jean-Michel Cous-semacker, ce sont les disparités de niveau. L’un des intérêts d’un outilcomme Mathenpoche, c’est d’offrir à chacun une sorte de cours particu-lier : quand on se trompe, voilà une partie “cours” qui s’affiche, avec uneexplication qu’il suffit de relire attentivement pour progresser vers la so-lution. L’autre avantage, c’est que les élèves qui marchent bien ne sont pasfrustrés : ils ont la possibilité d’avancer à leur rythme, et d’aller plus loin.[…] Mes élèves travaillent-ils mieux avec les ordinateurs? Je n’en sais rien!Pour ma part, j’espère au minimum ne pas les dégoûter des mathéma-tiques, et leur communiquer un peu de ce plaisir que l’on peut ressentirà trouver une solution!»-----

1 SynchronEyes : logiciel qui permet aux enseignants de contrôler les ordinateurs des élèves, et

éventuellement de prendre la main, par exemple pour projeter le travail de l’un d’eux au tableau.

2 Powerpoint : logiciel de présentation assistée par ordinateur: les textes, images, etc. sont po-

sitionnés sur des pages individuelles, dénommées “slides” (diapositives), en référence au système

de projection.

3 Mathenpoche: logiciel libre composé de centaines d’exercices de mathématiques, développé

par des professeurs de mathématiques en exercice et diffusé par l’association Sésamath.

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collège Marie Curie, à Rion-des-Landes – novembre 2008Cours de mathématiques de Jean-Pierre Gastambide, avec une classe de 4e

/ / / Monsieur, j’ai un petit problèmeUne séance d’exercices en ligne à partir du siteMathenpoche1 : ou comment suivre en tempsréel la progression de la classe, et le travail dechaque élève…

«Dès qu’il est question de se servir de leurs ordinateurs, ils sont partants!»Fort de ce constat, Jean-Pierre Gastambide n’hésite pas à proposer régu-lièrement à ses élèves des exercices à partir du site Mathenpoche. «Je n’aieu qu’à indiquer mon adresse académique à l’association Sésamath pourobtenir un mot de passe. J’ai alors inscrit chacun de mes élèves – nom, pré-nom, date de naissance. Et je peux maintenant définir les séances à maguise, par exemple prévoir une série d’exercices différente pour chacun.»Dans la classe, les élèves suivent les instructions de leur professeur:«Vous vous connectez sur internet, et vous allez sur le site Mathenpoche.Sélectionnez votre établissement et votre nom d’uti lisateur. Vous y trou-verez les exercices d’aujourd’hui. Vous verrez que vous n’avez pas le mêmetravail à faire que votre voisin.» C’est parti ! Il s’agit d’additionner des fractions… Sur le tableau interactif,une représentation de tous les élèves de la classe: au-dessus de chaqueprénom, une icône à tignasse blonde pour les garçons, avec deux couettesbrunes pour les filles. Chacun s’absorbe sur son écran. Quelques doigts selèvent : «Monsieur, j’ai un petit problème… – Tu peux te servir de ton ca-hier, répond le professeur, et tu as également une aide en ligne.»Au fur et à mesure de l’avancement des travaux, le score de réussite s’af-fiche sur chaque silhouette: un élève bloqué, ou qui fait beaucoup d’erreursest repéré instantanément par le professeur, qui circule entre les tables,encourage, réexplique: «Tu as deux fractions. Tu dois trouver leur déno-minateur commun pour pouvoir les additionner. Comment vas-tu faire?»Devant moi, Caroline propose sa réponse pour l’addition qui lui était de-mandée. «Faux!» répond l’ordinateur, qui ajoute: «La fraction n’est passimplifiée au maximum. Encore un essai! Utilise l’aide.» Après réflexion,Caroline valide d’autres chiffres: «Vrai ! Tu as rectifié ton erreur.» Sonscore est pour l’instant à 5 sur 6.

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Des diagrammes s’affichent maintenant sur l’ordinateur du professeur:pour chaque élève et pour chaque série d’exercices, une ligne de petits car-rés bleus, qui virent au vert quand la réponse est juste, en passant par legris pour signaler une erreur corrigée, et le rouge si l’élève n’a pas trouvéle bon résultat. «Toutes les données quantifiables – l’exactitude des ré-ponses, le nombre de tentatives, le temps passé sur chaque exercice – sontenregistrées par le logiciel, et apparaissent sur le bilan de la classe. Letemps mis à résoudre la série d’exercices est comparé à celui que l’on es-time “normal” ; je peux ainsi me rendre compte du niveau de chacun.»Si Jean-Pierre Gastambide se garde bien de toute affirmation trop défini-tive – «On n’est jamais sûr que les élèves aient absolument bien compris,ni qu’ils vont retenir ce qu’ils viennent d’apprendre.» –, il apprécie cettenouvelle manière de pratiquer dans la classe: «L’intérêt de ce type d’ac-tivité, c’est qu’il me permet de me consacrer à ceux qui ont le plus de dif-ficultés. Pendant ce temps-là, ceux qui se débrouillent mieux ne sont pasbloqués : ils ont des exercices assez intéressants à faire, ils peuvent avan-cer tout seuls…»-----

1 http://mathenpoche.sesamath.net

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collège de Labenne – avril 2008Cours de mathématiques de Cécile Sorhaïts, avec une classe de 4e

/ / / Conjectures«Nous allons conjecturer, annonce le professeur.Vous souvenez-vous de ce qu’est une conjecture?– Une explication? – Une conclusion? – Non, c’estplutôt une supposition: nous allons faire une ob-servation; puis nous la démontrerons, et elle de-viendra une propriété.»

On ouvre le logiciel Cabri Géomètre. Le professeur trace une constructionsur le tableau interactif. Pas à pas, les élèves reproduisent la même figuresur leurs ordinateurs. Le professeur circule dans la salle et vérifie que cha-cun suit. «Tout le monde y est? Nous allons mesurer l’angle “ADB”, quenous venons de construire en plaçant son sommet “D” sur le cercle de dia-mètre “AB”. Normalement, vous devez trouver 90°.»Géométrie dynamique. Sur le tableau interactif, le professeur saisit main-tenant le point “D”, pour le faire glisser sur le cercle. Dans ce monde sou-dain en mouvement, les deux points “A” et “B” sont restés solidement ac-crochés à chaque extrémité du diamètre. Amusés, les élèves reproduisentsur leur écran ce moment de géométrie dy na mique. Une étrange beautése dégage de ce glissement de lignes, de ce mouvement géométriquementcontrôlé. «Que remarquez-vous? Si on fait glisser le point “D” sur la cir-conférence du cercle, “ADB” reste toujours un angle droit: vous pouvez levérifier.» Reste à comprendre ce qui vient de se passer. Le professeur pour-suit la démonstration… «C’est formidable, vous disposez maintenant dedeux manières de démontrer qu’un triangle est rectangle: la réciproquedu théorème de Pythagore – mais dans ce cas, il vous faut connaître leslongueurs – et cette propriété, que nous venons de découvrir aujour-d’hui.» [À voir leurs mines, il n’est pas absolument certain que les élèvesapprécient à sa juste valeur le cadeau qui vient de leur être fait…]Mutualisation. «Au collège, sur quatre professeurs de mathématiques, noussommes quatre utilisateurs des outils informatiques, nous explique CécileSorhaïts. Nous mutualisons nos cours via l’intranet, et nous essayons de

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progresser en parallèle quand nous avons des classes de même niveau.Pour ce qui me concerne, l’ordinateur est devenu un outil de travail per-sonnel indispensable… Au début, je me suis un peu forcée à utiliser le ta-bleau interactif, mais finalement, j’y trouve mon compte. Bien entendu, çademande une préparation spécifique, mais dans ce domaine, la mutuali-sation nous aide beaucoup. Le site Sésamath1, notamment, propose unemasse de ressources remarquable.» L’ordinateur portable pour les élèves?«Je fais rarement une heure entière de cours sur l’ordinateur. Je penseimportant que les élèves écrivent: on retient mieux ce que l’on écrit à lamain.Je les encourage à faire, à la maison, les exercices en ligne; en classe,je suis encore assez réservée…» Essayer sans a priori, mais sans volon-tarisme excessif, voilà donc la voie que semblent suivre ici les professeursde mathématiques.-----

1 www.sesamath.net

-----collège du Val d’Adour, à Grenade-sur-l’Adour – mai 2008

10h45, cours de maths de Pierre-Jean Casassus, avec une classe de 4e

/ / / Du tableau au tableur…Où l’on passe naturellement du tableau in-teractif à l’ordinateur portable, et du manuelpapier à l’écran; où l’on aborde quelques no-tions de statistique et apprivoise la logique dutableur.

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«Nous allons essayer de trouver la fréquence des élèves du collège qui ontdeux frères et sœurs», annonce le professeur. Jean-Baptiste est volontairepour venir poser les données de la division au tableau interactif: 110/450.«Ça ne vous rappelle rien?» Angélique : «Nous avons déjà recherché laproportion de filles dans la classe… – Exactement! Fréquence, pourcen-tage, proportion: il s’agit de la même notion.» Dévoilement progressif, surle tableau interactif, du conducteur de cours: on passe naturellement dela théorie à l’application. Le professeur distribue maintenant une photo-copie à chacun: «Pour ne pas perdre de temps, allumez tout de suite vosordinateurs portables pendant que vous traitez ces exercices sur papier.»Le phénomène bien connu va se reproduire: dès qu’il est question de ve-nir pour faire la mise en commun de ce travail au tableau interactif, lesvolontaires ne manquent pas!Tableur. «Prenez vos ordinateurs, et ouvrez les manuels, à la page 108.»Sur les tables, un exemplaire de Mathenpoche pour deux élèves. «Vouschoisissez le tableur pour rentrer les données de l’exercice.» Chacuns’applique sur son clavier, réglant l’écartement des colonnes, choisissantavec soin le dessin et la taille des caractères: ici, visiblement, on aime letravail bien fait ! Aurélie, dont l’ordinateur est en panne, a gagné le droitde se servir de celui du professeur. C’est son travail, projeté sur le tableauinteractif, qui va servir de modèle à la classe.Une palette d’outils. «Le tableau interactif? Pour moi, c’est tout frais, toutneuf, nous confiera Pierre-Jean Casassus après le cours. J’ai fait un stagequi m’a mis en chemin, et je me rends compte aujourd’hui qu’avec cet ou-til, il se passe quelque chose: l’autre jour, un élève, régulièrement mal noté,m’a demandé à passer au tableau: il n’y a pas eu de miracle, mais aumoins, à ce moment-là, il était dans le coup! […] Comme une version nu-mérique du manuel Mathenpoche est installée sur tous les ordinateurs por-tables, je garde les manuels papier pour la classe, et les élèves se serventde la version numérique pour les devoirs à la maison. Ils ont très vite com-pris : en cas de panne, ils passent me voir pour récupérer un livre.»

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Visiblement, notre professeur se montre curieux d’explorer au mieux lapalette d’outils dont il dispose: «Je trouve qu’au bout de dix ans d’ensei-gnement, ça met un peu de piment dans ma pratique: j’en venais à me de-mander si je n’allais pas essayer de passer du collège au lycée, mais main-tenant, je n’y pense plus!»Pas question, pour autant, de virer au “tout numérique”: «Je continue àdemander à mes élèves de faire leurs exercices sur papier: j’ai l’intimeconviction qu’il faut passer par l’écriture pour que “ça rentre” – c’estd’ailleurs, personnellement, comme cela que je fonctionne.»

-----collège Saint-Exupéry, à Parentis-en Born – mars 2009

Cours de mathématiques de Patrick Lalanne, avec une classe de 4e Segpa

/ / / Pédagogie de la réussiteAvec l’aide des ordinateurs portables, et de laconnexion à internet qui leur permet de tra-vailler “dans les conditions du direct”, cesélèves de Segpa1 vont se prendre au jeu, et s’ac-crocher pour s’acquitter de leur mission.

Nous sommes en cours de mathématiques, et il s’agit de résoudre au-jourd’hui une bonne série d’exercices, en application de notions récem-ment acquises sur les nombres relatifs. C’est parti! Dans une ambiance très vivante – exclamations et cris de satis-faction fusent à chaque instant –, la concentration est palpable. Chaque élèveest connecté sur le site Mathenpoche2, qui lui fournit, l’un après l’autre, lesexercices à résoudre. Tout fier, Antony lit à haute voix le message qui vientde s’afficher sur son écran: «Bravo! Tu peux passer à l’exercice suivant.»Le professeur, très sollicité, passe de l’un à l’autre. L’effort demandé, à l’évi-dence, est conséquent. Pourtant, personne ne décroche. «Pour ces élèves en difficulté, commentera plus tard Patrick Lalanne, l’or-dinateur apparaît beaucoup moins rébarbatif que le livre et le cahier. Cetype de travail interactif est sanctionné par une correction automatique, cequi est très différent de la correction au stylo rouge du professeur. L’ordi-nateur est neutre; il permet le recours à une aide. De ce fait, le statut de

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l’erreur est changé: faire l’effort de se corriger permet de progresser.»En direct live. Profitant d’un court moment d’accalmie, le professeur attirel’attention de ses élèves sur la page du site Mathenpoche projetée au ta-bleau interactif : chaque élève de la classe y est représenté – tignasseblonde pour les garçons, couettes brunes pour les filles. Les résultats dechacun s’affichent en temps réel : un petit carré vert si c’est juste, rougesi c’est faux, vert foncé si l’élève s’est corrigé après avoir consulté l’aide.Le professeur commente: «Juan, c’est excellent, tu as fait le premier exer-cice en trois minutes 55, et le second, en une minute 24… Aurélien, tu asabandonné au premier exercice de la première série? Il faudra y revenir…Marc, je vois que tu as utilisé l’aide. C’est bien, il ne faut pas hésiter à s’enservir !» Ses remarques accompagneront les élèves jusqu’à la fin de laséance, leur fournissant une source de motivation supplémentaire…Un retentissant «Déjà !» ponctue la sonnerie qui marque la fin de l’heure.«C’est rare, avec nos élèves, admet Patrick Lalanne, penché sur les sta-tistiques détaillées de la séance écoulée. Je peux vous dire que ce n’est pasmal : ils ont vraiment bien travaillé!»Après le cours. Patrick Lalanne passe en revue les principaux avantages del’utilisation des ordinateurs personnels avec des élèves en difficulté…Neutralité. «Le professeur a un statut de professeur, alors que l’ordina-teur est “neutre”. Cette neutralité accompagne parfaitement ma pédago-gie dans le positionnement de mes élèves par rapport à leur situation dedifficulté ou d’échec. Une correction automatique, notamment, c’est trèsdifférent de la mention du professeur au stylo rouge. Interactivité. Quand la machine vous propose une aide, et qu’après avoirenregistré votre nouvelle réponse, elle la comptabilise comme juste, c’estvraiment intéressant. Avec ces élèves en situation d’échec, le statut de l’er-reur change: c’est une erreur qui permet de progresser.Motivation. L’affichage en temps réel des résultats de chacun sur le tableauinteractif, c’est encore une façon de motiver les élèves, même si ça ne leurplaît pas forcément! Il se trouve que personne, cette fois-ci, n’est passédans le rouge, mais ça peut arriver. Quand c’est le cas, je vais immédia-tement au secours de l’élève concerné: il suffit qu’il réussisse un nouvelexercice pour repasser dans le vert: alors là… c’est la joie! Souvent, il val’annoncer tout fort : “ça y est, vous avez vu?” Personnalisation. Vous ne l’avez pas remarqué, mais certains élèves ontfait des exercices de niveau 5e, ou même de 6e. Ça ne se voit pas, sauf sion est habitué aux codes, et que l’on sait que le 6N352 correspond à telniveau. Cela m’évite de dire: “prenez un exercice dans le livre de 5e”, alorsqu’ici, nous sommes en 4e. Et encore. Avec ce genre de logiciel, il y a encore une autre possibilité, que

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l’on ne pratique pas encore assez de mon point de vue, c’est qu’on peutdonner des devoirs personnalisés, à distance. Et les élèves nous envoientleur réponse par mail. J’ai tenté l’expérience avec une partie d’une classe,pendant les vacances de Noël. Sur huit élèves, deux m’ont répondu. Onpeut penser que c’est peu, mais ces deux-là n’auraient probablement rienfait du tout…»-----

1 La Segpa (section d'enseignement général et professionnel adapté) est un dispositif pédago-

gique pour les collégiens présentant des difficultés scolaires graves et durables.

2 http://mathenpoche.sesamath.net

-----collège François Mitterrand, à Soustons – novembre 2008

Cours de mathématiques de Denis Lescarboura, avec une classe de 3e

/ / / Un mail de mon prof!Une séance d’exercices classiques présentéssous une forme originale, qui permet auxélèves de travailler en autonomie, et à l’en-seignant de moduler la difficulté en fonctiondu niveau de chacun.

Les consignes sont un peu inattendues pour un début de cours de mathé-matiques : «Vous ouvrez votre boîte à lettres personnelle, et vous lisez lemessage électronique que je vous ai envoyé.» Devant moi, Émilie, qui vientde récupérer sa missive, ne cache pas sa surprise: « Il y a même monnom!» Il s’agit pourtant bien d’un devoir: la mission consiste à dévelop-

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per, puis réduire et ordonner une série d’expressions mathématiques.Pas le droit à l’erreur. «Monsieur, on doit vous répondre par mail? – Oui.Et vous pouvez travailler directement dans votre logiciel de messagerie.Ne cherchez pas à copier sur votre voisin: chaque message est différent…Et je ne veux que des bonnes réponses: vous pouvez utiliser le vérificateurd’égalité… » C’est à notre tour d’être surpris : vérificateur d’égalité ?«C’est le moyen pour les élèves de s’assurer de l’exactitude de leurs ré-ponses, nous apprend Denis Lescarboura: erreur sur l’expression globale,sur le calcul… C’est, au même titre que la calculatrice, un outil très inté-ressant, qui procure la satisfaction du résultat juste. Il est maintenant ins-tallé sur tous les ordinateurs portables, à l’intérieur du module123Maths1.» Émilie tâtonne: fausse, sa proposition s’affiche en rouge; juste– Bingo! – elle vire au vert…Dans la classe. «N’hésitez pas à m’appeler si vous coincez trop longtempssur une équation…» Le professeur passe de l’un à l’autre, commente, en-courage: «Allez Marc, le but, c’est de finir… Tu perds du temps parce quetu ne connais pas tes identités remarquables!» Zélie demande à quitterle cours parce qu’elle est malade. Le professeur: «L’exercice est sur tonordinateur. Quand tu iras mieux, tu pourras le finir tranquillement cheztoi, puis me renvoyer le message.»Fin de cours. Fiers – presque surpris – d’entrer de la sorte dans une rela-tion épistolaire directe avec leur professeur, les élèves envoient leur copie.«C’est la première fois que j’utilise ainsi le publipostage, nous indique De-nis Lescarboura. Une forme légère, et beaucoup plus personnelle que celledu document déposé sur le réseau. Avec quatre modules d’exercices dif-férents, j’ai pu faire en sorte que chaque élève soit amené à travailler in-dividuellement.»Le même, ouvrant sa boîte à lettres après la fin du cours: «Ah, j’ai reçuplein de messages!»-----

1 http://pedagogie.ac-amiens.fr/maths/123maths/verif_bis.

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TechnologieUne part importante du programme étant consacrée à l’utilisationraisonnée de l’informatique, les ordinateurs portables ont tout“naturellement” trouvé leur place dans l’enseignement de la tech-nologie : « Il convient de montrer à l’élève que l’utilisation de l’in-formatique recouvre une très grande diversité de domaines qui dé-passe largement le cadre du traitement de texte, du tableur-grapheur et des applications utilisant internet.1 »Ici, on apprend donc à choisir le logiciel adapté au projet que l’onsouhaite entreprendre: expérimentation assistée par ordinateur, nu-mérisation et traitement d’images, exploitation de bases de don-nées, réalisation de mises en pages et de supports de présentationassistés par ordinateur, etc. On pratique également très régulièrement la simulation numé-rique (logiciels de dessin 3D), la conception et le pilotage de sys-tèmes, et la recherche documentaire en ligne…De l’avis largement partagé des enseignants de technologie, le faitque chaque élève dispose d’un ordinateur personnel lui permetd’être beaucoup plus actif.

-----1 BO nº 3 du 20.01.2005

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collège René Soubaigné, à Mugron – mai 2009Cours de technologie, de Jean-François Desorthes, avec une classe de 3e

/ / / C’est moi qui l’ai fait!Réfléchir, planifier et fabriquer : c’est ça “latechno”… Avec, en prime, le plaisir de menerun projet, de A jusqu’à Z.

«Vous allez voir, mes élèves sont assez autonomes!», nous avait prévenusJean-François Desorthes. Dès le début de la séance, en effet, la classe s’or-ganise en trois ateliers, et chacun prend connaissance de la fiche de tra-vail préparée par le professeur. La grande affaire, depuis le début de l’an-née, c’est la réalisation d’une enceinte acoustique. Dans un premiertemps, chaque élève a imaginé une forme; en se développant, le projetaborde différentes problématiques de fabrication. «Souvent, nous ex-plique Jean-François Desorthes, les idées de départ sont un peu trop am-bitieuses. J’essaye de laisser libre cours à la créativité de chacun, tout enlimitant un peu les débordements, pour rester réaliste sur ce qu’il nous estpossible de faire…»Planifier. C’est un travail de réflexion qui attend le groupe “planification dela production”. L’exercice proposé consiste à déterminer l’ordre de sou-dage des composants électroniques. Nous entrons là dans une logique defabrication en série: «Pour chaque action, explique le professeur, vous al-lez vous poser la question: “qu’est-ce qui a été fait avant?”» Ma voisine,d’un coup, vient d’avoir une illumination: «Monsieur, j’ai trop compris!»Dessiner. Un peu plus loin, les ordinateurs portables sont posés en ligne surdeux longues tables, et un atelier de dessin industriel s’organise. L’objec-tif du jour : s’initier au logiciel de dessin 3D SolidWorks. Aucun moded’emploi à lire, la découverte prend un tour très pratique: il s’agit de suivreméthodiquement les étapes de construction d’une figure – ouvrir un nou-veau document… dessiner un carré de 100 mm de côté, etc. «On doit fairetout ça dans une seule séance?» s’inquiète un élève, qui juge visiblementl’entreprise plutôt complexe. Le professeur le rassure: «Je vais vous aider,mais vous avez toutes les explications pour y arriver seuls.» L’appétitd’apprendre est aiguisé par le plaisir d’utiliser l’ordinateur, et les collabo-rations vont bon train: «On s’aide!», me confirme un élève penché surl’écran de son voisin. La satisfaction de réussir stimule les énergies. Versla fin du cours, le dessin en trois dimensions s’affiche sur les écrans, et cha-

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cun s’amuse à faire tourner le volume obtenu, pour l’observer sous tous sesangles : magique! Reste encore à appliquer une texture sur ce tracé, pourlui donner une apparence réaliste. Faux bois ou imitation peluche? Les pos-sibilités sont tellement nombreuses qu’on a envie de les essayer toutes!Assembler. Le troisième groupe d’élèves rassemble le matériel nécessaire:fer à souder, pinces, loupes… Chacun a pris soin de se munir de “son” cir-cuit imprimé: une plaque de résine translucide de quelques centimètres decôté, tatouée d’une fine résille de pistes métalliques, et percée de trous.Fiers, ils détaillent les étapes du procédé de gravure qui les ont conduits àfabriquer le circuit. Le professeur distribue une pochette à chacun: « Vouscommencerez par les résistances…» Chacun fait l’inventaire du contenu deson sachet : plusieurs résistances, des transistors, un condensateur, un in-terrupteur, un “bornier”, etc. Reste à fixer les composants sur le circuit, ensuivant méticuleusement le plan d’assemblage. Je remarque que le ma-niement du fer à souder ne pose aucun problème, ni aux filles, ni aux gar-çons : «Normal, on a appris à le faire en 6e…»Driiing! Avant de donner le signal de la joyeuse dispersion de la classe,le professeur s’assure que chacun a pris soin de ranger ses outils. On vientici de se servir de sa tête, de ses mains et d’un certain nombre d’appa-reils numériques, électriques ou simplement mécaniques… Bref, de fairede la techno !

-----collège des Luys, à Amou – décembre 2007

Cours de technologie de Denis Gatuingt,avec Hugo Storchi, assistant d’éducation, dans une classe de 3e

/ / / Cent fois, sur le métier…Présenter le métier de son choix à ses cama-rades, avec le soutien d’un diaporama préparé

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sur ordinateur et projeté au tableau, voilà unvrai sujet de réflexion et l’occasion d’une re-cherche qui peut se révéler passionnante.

Tandem. «En 3e, tous mes cours sont basés sur la pratique des outils in-formatiques, explique Denis Gatuingt. Et je peux vous dire qu’à la fin del’année, mes élèves les maîtrisent!» La surprise, ici, c’est la présence deHugo Storchi, l’assistant d’éducation du collège: «Dès le début de l’opé-ration, je lui ai proposé de venir, et depuis, nous avons appris à travailleren tandem. Naturellement, je sais qu’à tout moment il peut être appelépour une intervention dans le collège. Nous fonctionnons vraiment à deuxprofesseurs, pour le plus grand bien de nos élèves, qui savent parfaitementauquel de nous deux s’adresser, en fonction du problème qu’ils rencon-trent.» Hugo, de son côté, apprécie cette façon originale d’exercer sa veillesur le matériel et les usages: «C’est l’occasion pour moi de faire le tourde leurs ordinateurs portables, de vérifier si tout va bien, et de régler lespetits problèmes…»Dernières recommandations. La recherche documentaire sur internet étantdéjà bien engagée, on va attaquer aujourd’hui la mise en forme du dia-porama. Pas question, pour autant, de se lancer n’importe comment: uncahier des charges précise chaque étape de l’exposé. Pour chauffer sestroupes, le professeur présente quelques exemples de travaux similaires,réalisés l’année dernière. L’occasion de glisser quelques recommandations,et notamment d’alerter sur les effets de mise en pages hasardeux: atten-tion aux fonds illisibles, par exemple.Architecte, sage-femme, journaliste sportif, hôtesse de l’air… Alex, qui s’en-traîne actuellement quatre heures par semaine, en plus des matches dusamedi, aimerait être joueur de rugby professionnel. Il a repéré la filière“sport-études”. Et si ça ne marche pas? «Dans ce cas-là, je ferai de la cui-sine !» Hugo annonce sans broncher des études à la hauteur de Bac +11pour devenir chirurgien. «Un métier difficile, mais on peut sauver desgens…» Ophélie sait parfaitement qu’il faut faire une première année demédecine suivie de quatre ans d’études spécialisées, pour devenir sage-femme. Thomas veut être basketteur professionnel; il n’aura aucun pro-blème pour illustrer son diaporama: «Des photos? J’en ai déjà pleindans mon ordinateur…» Visiblement passionné: «Je joue au basket de-puis que j’ai quatre ans», il s’est forgé une philosophie: « Il faut savoir ga-gner… et perdre. Quand on perd, ça nous fait progresser…» L’inconvénient

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du métier? «Les critiques des journalistes.» Kévin a choisi le métierd’architecte : «J’aime bien l’architecture moderne, le dessin, tout ce quiest créatif…» Une chose qui l’inquiète un peu, c’est la formation: «Lesétudes, c’est un peu compliqué, non?» Sylvain, lui, sera prof de maths:«J’aime les chiffres, les raisonnements… et le contact avec les autres.» Ilconnaît parfaitement la filière de formation: quatre ans après le bac, unCapes de mathématiques. C’est net et précis dans sa tête.Sondage. Du côté des élèves, la cote des ordinateurs portables est toujoursau beau fixe : «Travailler sur l’ordinateur, c’est mieux que sur papier: çava plus vite…» Mais plus profondément, on sent bien cette fois que l’exer-cice touche juste, dans la forme et dans le fond: «L’ordinateur nous per-met d’avoir de l’information sur les métiers… Ce travail nous aide à ré-fléchir, pour notre orientation. On se sent libre, tout en étant encadré.»

-----Collège Jean Rostand, à Tartas – avril 2008

Cours de technologie de Serge Elisseche, avec une classe de 3e

/ / / Six secondes trente-trois!«Qui se sent capable de faire le slalom?», in-terroge le professeur. Nous serions-nous trom-pés de cours? C’est pourtant bien de techno-logie qu’il va être question!

Serge Elisseche a organisé son enseignement autour de la préparation duconcours Robotek1 qui se déroulera le 11 juin prochain à Bordeaux. Il s’agitde construire des petits robots autonomes et de les programmer pour leurfaire exécuter les différentes épreuves du concours. Pierrick, Julien, et

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deux Maxime sont volontaires pour le slalom. Les quatre élèves se dépla-cent dans une salle voisine où est installé le plateau qui représente, en vraiegrandeur, la situation de compétition. Une ébauche de robot les attend,sorte de véhicule avec deux grosses roues, assemblage improbable dediodes, circuits imprimés, et composants é lec tro niques. Reste à pro-grammer le robot de manière à ce qu’il avance le plus vite possible en sla-lomant entre trois quilles. Un ordinateur va servir à la programmation.«On commence tout de suite, explique le professeur. Vous avez un pro-gramme qui est encore par tiel lement faux, et que vous devrez modifierpour passer.Vous devez partir toujours du même endroit. Observez ce quine va pas et reprogrammez la trajectoire…»Sur l’écran de l’ordinateur, quelques lignes de code informatique décriventla succession des tâches que doit effectuer le robot. Les quatre garçons tâ-tonnent un peu entre l’ordinateur et le robot; la deuxième quille persisteà tomber! «Monsieur, on touche toujours… – Essayez de modifier l’angle!– Monsieur, on ne sait pas faire. – Je vais vous aider un peu…» Nouvel es-sai : super! le robot passe les deux premières quilles sans problème. Il fautencore ajuster la troisième partie de la trajectoire… Encore un essai.«Monsieur, on chronomètre? – Six secondes trente-trois! – Pas mal, maison pourrait peut-être améliorer…»Projet. «C’est un projet que je mène sur deux ans, nous explique Serge Elis-seche. En 4e, les élèves vont concevoir et fabriquer le robot, et l’année sui-vante, ils l’adaptent aux épreuves du concours. C’est un excellent prétextepour aborder tous les aspects du programme de technologie: mécanique,électronique-automatisme-robotique, informatique, gestion ainsi que la no-tion de démarche de projet.»-----

1 http://robotekzone.free.fr

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Éducation physique et sportive (EPS)Que peuvent bien venir faire des outils numériques dans un gym-nase ou au bord d’un terrain de sport? Et à quoi peuvent servir lesordinateurs portables en EPS, discipline qui ne semble guère devoirs’enseigner avec une souris et un clavier?Consultation de banques d’images, suivi des résultats, constructiond’enchaînements ou évaluation à partir de séquences enregistréespendant le cours, etc., les ordinateurs portables rendent pourtant,là aussi, des services tout à fait inédits.Entretiens croisés avec des enseignants convaincus qu’informatiquerime avec gymnastique…

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collège Léon-des-Landes, à Dax – avril 2007Danièle Sarciat, professeur d’EPS

«A priori, les élèves n’ont pas de raison d’utili-ser leurs ordinateurs portables en cours d’EPS!»

Témoignage…Danièle Sarciat : En 2001, quand j’ai appris qu’on allait confier un ordi-nateur portable à chaque élève de troisième, je me suis demandé en quoiils allaient bien pouvoir m’être utiles: le temps du cours est celui de la pra-tique sportive, pas celui de la manipulation de l’ordinateur… A priori, lesélèves n’ont pas de raison d’utiliser leurs ordinateurs portables pendantles cours d’EPS!AcrosportL’ordinateur nous est pourtant très utile, par exemple en acrosport. Cetteactivité consiste à réaliser un enchaînement acrobatique collectif: onmonte une pyramide, on la tient, on la défait, on se déplace, etc. Je de-mande à mes élèves de faire une recherche sur l’internet pour choisir leursfigures et leur musique; à eux de se mettre d’accord. Par la suite, chacundispose du fichier-son pour réécouter le morceau retenu, quand il le sou-haite. En cours, quatre groupes peuvent travailler dans la même salle sansse gêner. Et pour permettre à tout le monde de visualiser le résultat de cetravail collectif, un élève, dans chaque groupe, est chargé de photographierla prestation de ses camarades – ce qui les oblige à tenir leurs figures pen-dant trois secondes, comme c’est la règle. À la fin de la séance, ces pho-tos sont disponibles sur le réseau. Les élèves se voient, ils peuvent éven-tuellement se corriger. Par la suite, je leur demande d’organiser cesimages dans un dossier, en décrivant leur rôle dans l’enchaînement: «Jesuis debout, je fais une roulade… je monte sur la pyramide… voilà com-ment j’en descends… etc.» Au fur et à mesure que ces séances de prisesde vues se banalisent, les attitudes changent. Ce n’est plus : « Je memontre», ou au contraire : «Je me cache», c’est une démarche de travailcomme une autre : l’ordinateur permet de se perfectionner.Athlétisme et sport collectifCertains collègues enseignants d’EPS développent des utilitaires spéci-fiques à nos activités, et nous échangeons par le biais de sites communau-taires. En course de fond, par exemple, pour travailler l’endurance, pen-dant qu’un élève court, son camarade inscrit les temps de passage, quej’énonce à chaque tour. À la fin de la course, on vérifie la régularité. Et je

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tiens compte de cette régularité dans mon évaluation, ce qui permet à ce-lui qui n’est pas très fort – je pense à ceux qui ont une petite ou grande sur-charge pondérale – de gagner des points. Dans leur vie future, ils ne serontpas tous obligés de battre des records, mais si, à quarante ans, ils continuentde courir régulièrement, ça ne sera pas si mal!Au basket, une macro développée dans Excel permet de comptabiliser lesballons conquis et les paniers marqués. À la fin du match, on affiche nonseulement le nombre de points marqués, mais aussi l’efficacité dans la ré-cupération du ballon. Ce qui permet aux élèves d’analyser le match qu’ilsviennent de jouer : «Nous avons récupéré quinze fois le ballon, et nousn’avons marqué qu’une seule fois? Ah! Nous ne sommes pas très effi-caces… il faudrait travailler le tir.» L’expérience prouve que ce genre deconstat est souvent bien plus marquant que le discours du professeur!CommuniquerLe réseau du collège me sert également à communiquer avec mes élèves:je dépose sur le serveur le détail de tout ce que je leur demande, les ba-rèmes de performances, c’est-à-dire la note théorique qu’ils obtiendronts’ils sautent telle hauteur, par exemple, les fichiers sur lesquels ils peu-vent entrer leurs temps et leurs performances. Les élèves se servent eux-mêmes du réseau pour communiquer entre eux : échanger les fichiers-sons des musiques qu’ils ont choisies, par exemple, et les copier sur leursportables.

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collège Cel le Gaucher, à Mont-de-Marsan – avril 2008Claude Pouply, professeur d’EPS et Aude Michelot, professeur stagiaire

«Dans les autres matières, l’ordinateur estessentiellement un outil qui transmet desinformations; en EPS, il renvoie directementà l’activité de l’élève.»«Les enseignants d’EPS réfléchissent aujourd’hui à la façon d’intégrer l’in-formatique à leur pédagogie, constate Claude Pouply. Les ordinateurs por-tables nous sont ainsi très utiles pour tout ce qui est chiffré, chronométré,en course de haies ou d’endurance, par exemple.Nous avons aussi le projet d’utiliser la caméra numérique en gymnastique,pour filmer les élèves et leur permettre d’analyser leur prestation a pos-teriori. Ces méthodes sont utilisées depuis longtemps par le sport de hautniveau; nous essayons de les adapter aux besoins de nos élèves. Ils ont sou-vent bien du mal à se repérer, surtout dans des situations un peu inhabi-tuelles, la tête en bas, par exemple! Et dans ce cas, on le sait bien, l’imageest une stratégie d’apprentissage: maîtriser son corps, oser se présenterdevant l’autre, cela fait partie de nos objectifs.»Inattendu. Professeur stagiaire d’EPS, Aude Michelot utilise également lacaméra numérique pour parfaire sa formation. «Pour mon thème d’étudeet de recherche, j’ai choisi d’observer comment fonctionne une classe unpeu difficile : manque d’écoute des consignes, manque de respect entre lesélèves, etc. Mais, quand on est pris dans le mouvement, on ne voit pas for-cément ce qui se passe derrière. J’ai donc décidé de poser la caméra surpied et de filmer régulièrement mes cours. J’analyserai ensuite ces imagespour m’évaluer et observer l’évolution du comportement des élèves: com-bien d’actes d’incivilité? combien de temps entre la consigne et le fait dese mettre au travail? combien d’élèves n’écoutent pas pendant que jeparle ? etc. La vidéo va me permettre d’établir des points de repèreconcrets, et d’aller un peu plus loin dans l’analyse. Il n’est bien sûr pasquestion de mettre des caméras partout, mais ponctuellement, je pense quecela peut être formateur.»

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Arts plastiqueset éducation musicale

«Accéder aux œuvres – à l’information artistique en général – estune nécessité quotidienne de l’éducation musicale ou des arts plas-tiques au collège. Développer une pédagogie permettant à chaqueélève de comprendre par le “faire” comment une œuvre estconstruite, ce dont elle témoigne, en quoi elle se rattache à cellesqui la précèdent et qui la suivent, en est une autre. Et à ce titre, lesTicce (technologies de l’information, de la communication… et dela “création”) proposent des outils de plus en plus puissants pouratteindre les objectifs qui nous sont assignés.1 »L’ordinateur, pour un professeur d’arts plastiques ou d’éducation mu-sicale, c’est la possibilité de disposer d’une encyclopédie person-nelle – de sa propre banque d’images (ou de sons) –, disponible enpermanence, et toujours en construction. Rien ne l’empêche alors deconvoquer sur l’instant telle ou telle œuvre, et de la documenter;ainsi, l’art peut s’inviter en classe: on écoute la musique dans debonnes conditions, on détaille une peinture projetée “en grand” surle tableau, on visionne l’œuvre vidéo d’un artiste contemporain…Mais les ordinateurs personnels sont aussi de puissants outils decréation mis à la disposition des élèves. En arts plastiques, les logicielsde dessin, de retouche d’image et de montage vidéo permettentd’accéder à une grande variété de modes d’expression. En musique,le chant et la pratique instrumentale s’appuient sur un accompa-gnement orchestral. On peut aussi aborder la création musicale, parexemple au moyen des logiciels de traitement de son.

-----1 Vincent Maestracci, inspecteur général de l’Éducation nationale, EnConnexion #5.

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collège Pierre Blanquie, à Villeneuve-de-Marsan – novembre 200714h10, cours de musique de Christelle Lameignère, avec une classe de 4e

/ / / Un collégien, une flûteet un ordinateur portable…Si le contenu de ce cours reste classique – seconcentrer sur l’écoute, jouer de la flûte à bec–, l’utilisation des ordinateurs permet d’ex-plorer les choses d’une tout autre façon.

«Vous pouvez débrancher votre câble de réseau, mais gardez vos ordi-nateurs allumés.» C’est Christelle Lameignère, professeur de musique quiparle. Ses élèves viennent – via le réseau du collège – de copier sur leurordinateur le dossier préparé à leur intention: manipulation encore un peunouvelle en ce début d’année, mais qui deviendra bien vite familière.Motet. Maintenant, chacun s’absorbe, casque sur les oreilles, dans l’écoutede l’extrait musical qu’il vient de télécharger. Un petit questionnaire aideà poser des mots sur ce que l’on entend. L’exercice reste difficile. Silence…une bribe de phrase musicale s’échappe de quelque casque mal raccordéà son ordinateur… O nobilis nativitas, voilà le titre de l’œuvre que lesélèves écoutent avec une si grande attention. C’est un motet (chantd’église). «Posez maintenant vos casques, indique le professeur. Nous al-lons écouter encore une fois ce morceau, tous ensemble (la salle est équi-pée en fixe pour la diffusion sonore, de même qu’en vidéoprojecteur), etparler de ce que nous avons entendu. Qui commence?» Olivia : «Ce sontdes voix de femmes.» Kevin : «Un chœur a cappella. » Alexandra : «Letempo est lent.» Adrien : « Il y a plusieurs voix.» Quelqu’un n’a pas bienentendu la polyphonie… Le professeur: «Je vais vous faire réentendre l’ex-trait de chant grégorien – monodique – que nous avons écouté la semainedernière, pour faire la différence.»Histogrammes. Deuxième partie du cours. Avec les flûtes à bec. «Nous al-lons reprendre le morceau que vous avez étudié la dernière fois. Ouvrez,dans le logiciel Audacity, le fichier de l’accompagnement musical de cemorceau.» Les yeux s’écarquillent: sur les écrans, de beaux histogrammesbleus s’agitent au fur et à mesure du défilement de l’enregistrement. «Onse concentre : avant de les jouer à la flûte, nous allons d’abord chanter

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toutes les notes du morceau: Mi, sol, la, si. Mi, sol, la, si. Ré, si, la, si, la,mi… Chacun écoute maintenant le morceau en entier… Voilà, tout lemonde y est? On joue maintenant, tous ensemble… Un, deux…» Vingt-sixflûtes, pour une même mélodie… Ça marche! «Parfait. Je vais lancer l’ac-compagnement musical… On se cale sur le tempo…» Résultat saisissant :là, d’un coup, la ligne de la flûte à bec, interprétée sans hésitation parvingt-six souffles, se coule avec une parfaite cohérence dans le morceaumusical diffusé dans toute la salle!Concentration, écoute, sérieux… Le moment que nous sommes en train devivre n’a pas grand-chose à voir avec l’image de la grande récréation quireste encore attachée au souvenir des cours de musique de nos années col-lège. Christelle Lameignère, un peu plus tard, confirmera: «Les outils nu-mériques ont tout changé; ils ont vraiment dépoussiéré l’éducation mu-sicale. Sur les apprentissages traditionnels – la flûte, le chant –, on est loindu cliché: ça va beaucoup plus vite, on rabâche moins, les élèves ne se las-sent pas. Quand ils travaillent avec le casque, ils mobilisent ce qu’on ap-pelle l’écoute mentale. En faisant cela, on a la note dans la tête, dans lesdoigts : c’est essentiel pour la concentration ! D’autre part, c’est plusagréable de jouer avec un accompagnement. Au résultat… ils jouent su-per bien! Grâce aux ordinateurs, on est directement dans la musique: mesélèves ont accès aux œuvres… Musique savante, musique contemporaine,rock… Il n’y a plus trop de barrière: je peux me permettre de leur faireécouter différents styles. De toute façon, ils repartent chez eux avec de lamusique. Même les petits des classes de 6e et de 5e m’en demandent : ilsont souvent une clé USB pour venir chercher leur fichier-son! Par ailleurs,avec les outils numériques, chaque élève dispose d’un véritable petit stu-dio de traitement du son et de l’image. Ce qui lui permet de réaliser desclips. Nous abordons là le champ de la création musicale… Sans les ordi-nateurs, tout ça serait impossible!»Le cours de musique est terminé. À voir leurs mines réjouies, les élèves ontapprécié. Commentaire de l’un d’eux: «Les ordinateurs? C’est la meilleurechose de l’année…»

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collège Jacques Prévert, à Mimizan – avril 2009Cours de musique de Florence Boulley, avec une classe de 3e

/ / / À trois temps…Un cours de musique sur le thème du cinéma,où l’on invite l’image pour une exploration ac-tive du monde sonore.

Roger. Love is all. Ce “tube” de Roger Glover, le bassiste de Deep Purple,fleure bon les années 1970. En voilà les paroles, projetées sur le tableauinteractif. Première écoute; on est tout de suite dans le bain. Ambiance defête ! Le professeur entonne le premier couplet. On essaye? La classe selance, a cappella. On recommence, avec la musique. Pas mal! «Avec lesmains, maintenant : un, deux, trois, un, deux, trois…» Installer le rythmeternaire requiert un peu d’attention, mais chacun se prend bien vite au jeu.Un, deux, trois, un, deux, trois… Le rythme s’accélère. Nous voilà fin prêtspour une interprétation complète. Le plaisir de chanter ensemble est évi-dent. «Merci ! Nous allons maintenant continuer avec une valse.»Amélie. Sur le tableau, trois portées de musique. On écoute les premièresmesures… C’est le thème du film Amélie Poulain. De chaque cartable, estsortie une flûte. Une première répétition – rééé-do-siii-la, rééé-do-siii-la…– tous ensemble. Concentration. Maîtrise du souffle, des gestes… «Mon butn’est pas d’apprendre à mes élèves à lire la musique, nous expliquera plustard Florence Boulley ; la partition est un repère visuel, c’est son intérêt:certaines nuances sonores sont ainsi plus aisées à percevoir à l’audition.»Charlie. Voilà maintenant, sur le tableau interactif, une courte séquencedu film (muet) Les Temps modernes, de Charlie Chaplin. Charlot est oc-cupé à visser des boulons sur une chaîne de montage. Il va fatalementfaire des bêtises et provoquer des catastrophes en cascade… Nous com-prenons bien vite quel projet occupe les élèves : il s’agit de sonoriser cetextrait. Pour les bruitages, on verra plus tard; la question, pour l’instant,c’est de doubler les dialogues. À l’écran, trois personnages. On s’estdonc tout naturellement organisé en groupe de trois. Delphine, Julie etSégolène se sentent prêtes à venir répéter, en direct, le dialogue qu’ellesont imaginé. Le professeur lance encore une fois la séquence. Leur pres-tation leur vaudra les applaudissements de leurs camarades. «Vous êtesau point pour l’enregistrement, indique le professeur. Ouvrez le logicielMusicmaker sur l’un de vos ordinateurs, importez la séquence à doubler

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sur une première piste, et quand vous êtes prêtes, vous lancez l’enregis-trement. » Chuut, silence absolu dans la classe : ça tourne ! Les troisjeunes filles réécoutent leur enregistrement: «Pas trop mal, mais on a unpeu bredouillé… Nous allons le refaire ! »«Je faisais partie des enseignants volontaires, raconte Florence Boulley,quand nous avons demandé à être l’un des trois collèges pilotes pour tes-ter l’opération “un collégien, un ordinateur portable”. Je suis passée, al-ternativement, par de grands moments d’enthousiasme et de décourage-ment. Et j’ai complètement changé ma manière d’enseigner. Aujourd’hui,les outils numériques ont pris leur place dans ma pédagogie, à tel pointque je ne pourrais plus m’en passer. Pour autant, ils ne sont pas toujoursau centre : je ne veux pas faire de la musique uniquement avec l’ordina-teur, je veux aussi que les élèves la vivent, physiquement. Et je suis tou-jours en train de chercher! […] À mon sens, le véritable atout de l’ordi-nateur pour les élèves, c’est qu’il est un fabuleux outil de création musicale.Faire de l’improvisation en chant ou avec une flûte à bec, c’est très diffi-cile, presque impossible! Je me sers souvent des MusicLab de l’Ircam: cesont des petits logiciels qui permettent de travailler les notions de rythme,de mélodie, de hauteurs, d’intensités, etc. Bref, d’être directement de plain-pied dans la création.»

-----collège Jules Ferry, à Gabarret – mars 2008

Cours de musique de Christelle Lameignère avec une classe de 4e

/ / / “Haïkus” d’hiver“Le vent d’hiver ILes rochers déchirent ILebruit de l’eau”I I I“La tempête d’hiverIEnvoie lesgraviers IFaire sonner la cloche.” Joli prétex-

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te pour aborder le domaine de la création so-nore avec les ordinateurs portables.

Christelle Lameignère fait partie de ces enseignants en poste sur deux éta-blissements. Après l’avoir rencontrée au collège Pierre Blanquie, à Ville-neuve-de-Marsan, nous la retrouvons à Gabarret… «Nous avons écoutéen classe un haïku mis en musique par un électroacousticien, nous ex-plique-t-elle. Et j’ai proposé à mes élèves de s’inspirer de cette démarchepour mixer ensemble plusieurs sons que je leur ai transmis sur leurs or-dinateurs, avec le logiciel Audio Studio. L’objectif est d’obtenir une créa-tion sonore d’une minute environ. Quand ce travail sera terminé, ils pour-ront y associer des images…»Démonstration. «Nous allons écouter le travail de Cheyenne…» L’élèvevient brancher son ordinateur portable sur l’amplificateur. On entend descrissements (sur du gravier ?), un rythme (de machine ?), des gongs(cloches?), le vent… Ambiance tempête. Le professeur conduit la discus-sion : «J’aimerais avoir votre avis.» Hugo: «C’est monotone…» Théo: «Àmon avis, pas du tout, au contraire! – C’est vrai, reprend le professeur, toutcela est relativement bien géré. Mais ça se termine trop net. Que pouvons-nous lui conseiller? On réécoute?» C’est maintenant au tour de Valentinde présenter son travail. Les mêmes sonorités sont “mixées” différemment:«Tu as une jolie matière sonore, garde-la. Mais le rythme reste encore unpeu lassant : il ne faut pas hésiter à tailler dans les sons, pour créer dessurprises…» Chacun à son tour, Théo, Thomas et Marine viendronts’exposer ainsi, parfois un peu intimidés, mais visiblement fiers – magiedu travail avec les ordinateurs portables – d’avoir réussi à concrétiserleur première création sonore.-----

Un haïku est un poème classique japonais composé de trois vers.

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collège de Pouillon – avril 2009Cours d’arts plastiques de Marie-Pierre Chanvillard, avec une classe de 3e

/ / / En attendant MadridDos de Mayo, Tres de Mayo, Guernica. Cesœuvres célébrissimes de Goya et de Picassoenvahissent successivement l’écran. Cris, pié-tinements, terreur : c’est toute la force de lapeinture qui entre, d’un coup, dans la salled’arts plastiques.

Le commentaire du professeur lance les élèves sur la piste de la re-cherche qui les attend: «Ne me demandez pas [à propos de Dos de Mayo]de quelle année il s’agit : ça fait partie de ce que vous devez trouver! Vousallez analyser ces peintures, en répondant à mon questionnaire: nom del’artiste, titre de l’œuvre, dimensions, éléments techniques et iconiques…»On fait une petite pause pour rappeler le sens de ces deux dernierstermes. «Allumez maintenant vos ordinateurs, et partez à la pêche aux in-formations dans vos dictionnaires et encyclopédies. Vous travaillez pargroupes de deux: l’un pilote l’ordinateur, l’autre prend des notes.»Préparer un voyage, c’est déjà partir. On le sent bien, la curiosité de la re-cherche est aiguisée par l’avant-goût du voyage en Espagne qui s’annonce,et par la promesse que l’on ira voir ces œuvres, en vrai, à Madrid. Mes voi-sins, Romain et Alexis, n’ont pas eu de problème pour identifier les ca-ractéristiques techniques de Guernica. Mais les mots manquent un peuquand il s’agit de traiter de l’engagement de Picasso… La mise en com-mun s’impose. Retour au tableau. On en arrive aux questions de fond :«Pourquoi l’artiste a-t-il peint ce tableau? demande le professeur. – Ilcompatit ? suggère quelqu’un. – Oui, mais il y a autre chose. Pour vousdonner une piste, je vous rappelle que Picasso disait: “L’œuvre d’art n’estpas faite pour décorer les salons, c’est une arme de lutte et de révolte.”»Nous voilà proches de la fin du cours. «Pour la prochaine fois, vous met-trez votre travail sur le serveur, en n’oubliant pas de noter votre nom.»La dernière recommandation est un peu plus inhabituelle : «Surtout,

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n’oubliez pas de venir à la réunion de la semaine prochaine, pour prépa-rer notre départ.»Commentaires. Si les outils numériques font ici manifestement partie duquotidien, c’est qu’ils présentent, pour Marie-Pierre Chanvillard, biendes atouts complémentaires : «Vous venez de voir l’ordinateur utilisécomme une formidable banque de données. Son intérêt, dans ce cas, estd’être beaucoup plus attractif pour les élèves. Un cours d’arts plastiques,c’est l’articulation entre pratique artistique et référence aux œuvres, surune période très vaste qui va de Lascaux à aujourd’hui. Le recours àl’image y est donc permanent. Grâce à l’ordinateur, je construis monpropre fonds iconographique, mais au-delà de cet aspect purement do-cumentaire, les outils numériques – ordinateur et vidéoprojecteur – chan-gent complètement le rapport aux œuvres, en offrant la possibilité d’agran-dir un détail, de sélectionner certaines parties. […] La plupart des gensignorent complètement l’art contemporain; pourtant, l’art n’est pas uni-quement une affaire du passé! Les artistes mènent aujourd’hui, dans tousles pays, des démarches extrêmement variées. Or, les outils numériquesoffrent un accès direct aux nouvelles formes d’expression artistique – ins-tallations, art vidéo, etc. –, permettant aux élèves d’entrer de plain-pieddans ces œuvres. […] Nous utilisons également l’ordinateur comme outilartistique, au même titre qu’un pinceau ou un crayon – ce qui n’exclut paspour autant la peinture, le volume, et tout ce qui constitue la pratique ar-tistique traditionnelle. […] Je viens enfin de découvrir un autre atout del’ordinateur: Comment amener les élèves à synthétiser une forme, une ré-flexion, sous la forme d’un croquis? C’est un exercice très difficile à maî-triser avec des moyens graphiques. Mais avec le logiciel de dessin le plus“basique” que l’on puisse imaginer – Paint –, ils y parviennent beaucoupmieux : en termes d’opérations mentales, la contrainte liée au côté som-maire du logiciel les oblige à trouver le chemin de la simplification. Par lasuite, quand ils reprennent un support plus traditionnel, ils ont acquis unenouvelle compétence!»

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collège Jean Mermoz, à Biscarrosse – mars 2008Cours d’arts plastiques de Serge Karkoulia, avec une classe de 3e

/ / / Photomontage« Nous allons faire une photo de classe… »Le professeur installe la séance de prise devue ; les élèves se prêtent de bonne grâce àl’exercice bien connu, et le groupe s’orga-nise joyeusement.

Souriez. «Je ne vois pas tout le monde: Pierre, déplace-toi un peu, tu escaché… Voilà, c’est bon.» La prise de vue n’a pris qu’un instant… et hop!miracle de la technique, voilà déjà le résultat affiché sur chaque écran dechaque ordinateur. Passées les rigolades et les interpellations – «Coralie,tu gâches la photo!» –, le professeur utilise le vidéoprojecteur pour mon-trer d’autres images. «Regardez, ce sont les travaux de vos camarades del’année dernière, et qui ressemblent à ce que nous allons faire: vous de-vrez incruster votre portrait en premier plan de la photo de groupe.» Unerévélation, pour plusieurs élèves, qui décodent pour la première fois lefonctionnement d’un “photomontage”, et viennent, sans le savoir, deprendre une leçon de grammaire des signes.Le professeur invite maintenant ses élèves à se photographier mutuelle-ment. «Vous disposez de deux appareils. Vous pouvez choisir de faire desportraits individuels, ou bien à deux ou à trois.» Mathieu et Johan ontchoisi d’être photographiés ensemble; c’est Margot qui s’occupe de la prisede vue. Clément prendra la suite… Pierre et Julien sont d’accord pour po-ser avec Quentin…«J’ai l’habitude de confier du matériel à mes élèves, nous explique SergeKarkoulia. Je leur fais confiance. Ils savent que ces outils sont assez oné-reux, ils ne vont pas faire n’importe quoi.» Et, s’adressant à ses élèves:«Pensez bien que vous cherchez une image de premier plan: choisissezdonc un cadre plutôt serré, et placez-vous devant un fond blanc. N’oubliezpas d’utiliser systématiquement la dragonne; faites attention à ne pasmettre les doigts sur les objectifs!»

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Enregistrez. «Tout le monde est passé?» Les images sont bien vite trans-férées, et chacun peut maintenant les récupérer et les visionner sur sonordinateur. Driiiiing. La sonnerie de fin de cours retentit déjà: la réalisa-tion des photomontages, ce sera pour la semaine prochaine… Eh oui, uneheure passe vite, en arts plastiques!«C’était aujourd’hui leur premier jour de travail avec les outils numé-riques, commente Serge Karkoulia. Sur les trente-trois semaines de tra-vail annuelles, j’ai prévu à peu près dix séances avec l’ordinateur. Au dé-tour de cet exercice les élèves vont apprendre certaines fonctions deslogiciels de traitement d’images. Et, quand on sait faire cela, on sait fairebeaucoup de choses! Du point de vue plastique, ils vont progressivementcomprendre que, dans ce genre de travail, il faut toujours assembler deséléments qui s’opposent: un plan large et un plan serré, par exemple. L’en-jeu, c’est évidemment d’unifier le tout, pour créer l’illusion d’un même es-pace. Un peintre qui place un personnage devant un paysage cherche uneunité, une cohérence de texture, de lumière, etc.»Mais, pour Serge Karkoulia, l’intérêt des outils numériques ne se limite pasà leur seul potentiel technique. «Ce qui m’intéresse également, c’est quemes élèves s’impliquent directement. En travaillant à incruster sa propreimage devant celle de la classe, c’est de sa propre intégration – et au boutdu compte, de citoyenneté – qu’il est question. On touche aussi à des pro-blématiques liées à l’adolescence: apprendre à apprivoiser son image peutaussi faire partie de ce qui se joue dans un cours d’arts plastiques!»

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collège Lubet Barbon, à Saint-Pierre-du-Mont – avril 2009Cours d’arts plastiques de Julien Boisnard, avec une classe de 4e

/ / / Ça déchire!La fréquentation des techniques numériquesles plus sophistiquées ne dispense pas cesélèves d’apprendre à représenter la figurehumaine sans utiliser le moindre outil…

La photographie projetée au tableau de la salle d’arts plastiques noustransporte dans l’atelier de Matisse: le peintre dessine debout, face à unefeuille blanche de format XXL; dans sa main, une longue baguette au boutde laquelle est fixé un morceau de fusain. «De nombreux artistes ont rem-placé la traditionnelle toile, ou la feuille blanche, par d’autres supports,et utilisé de nouveaux outils à la place de l’habituel crayon ou du pin-ceau…» Un dessin de Victor Hugo, une gravure de Dubuffet, une sculp-ture de Calder viennent éclairer cette idée, et ouvrir quelques belles pers-pectives sur le champ infini de la création artistique. «À l’époque où j’étaisélève, nous dira plus tard Julien Boisnard, on utilisait de temps en tempsle projecteur de diapos. Le vidéoprojecteur associé à mon ordinateurm’offre aujourd’hui la possibilité de familiariser les élèves avec une grandevariété de pratiques artistiques, en leur présentant des œuvres en grandformat, dans une qualité de projection très confortable. Nous explorons au-jourd’hui la question de la représentation…»Action ! Il est temps de passer aux travaux pratiques. Chacun reçoitquelques pages de journal. «Vous pouvez ranger vos trousses: je vous de-mande de représenter des silhouettes de personnages qui courent, sim-plement en les déchirant dans le papier journal. Colle, scotch, règle, ci-seaux et crayon sont interdits.» Rien d’autre, donc, que les mains? Rien.Après quelques instants de flottement, Criiichch! des bruits de papier dé-chiré résonnent dans la classe. C’est parti ! L’exercice demande une cer-taine concentration: «Monsieur, j’ai déchiré le bras!» On tourne et re-tourne le papier. On recommence: la “matière première” ne manquepas! Les premières silhouettes apparaissent. Malhabiles, mais pourtant ex-pressives. On progresse. Les formes se précisent, deviennent plus vi-vantes. Quelques exclamations de surprise et de joie à la découverte de lafigure qui vient de surgir…

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«L’objectif, nous indiquera Julien Boisnard, c’est de déstabiliser les élèvespar rapport à leurs habitudes de dessin sur papier, avec un crayon, et detravailler au plus simple. Sans outil, c’est la main qui agit directement; onest obligé d’affiner le geste, et de se repérer dans l’espace…»Maîtrise. S’il revendique l’intérêt de savoir dessiner, Julien Boisnard, dontc’est la première année d’enseignement dans les Landes, n’est pas de ceuxqui tournent le dos aux outils numériques: «En 4e ou en 3e, mes élèveschoisissent la technique qu’ils préfèrent. Et comme ils se sentent très àl’aise avec l’informatique, ils pensent souvent qu’en optant pour l’ordina-teur, ça sera plus facile. Il est vrai que ces machines offrent un potentielassez formidable, mais elles cachent aussi des pièges dont ils n’ont pas tou-jours conscience. On attend d’une production en arts plastiques qu’elle soitbâtie sur une problématique et réponde à certains critères. Or, le manie-ment d’un logiciel de retouche d’images, par exemple, suppose une bonnemaîtrise, une grande rigueur, et pas mal de temps, faute de quoi on s’ex-pose à un résultat décevant. D’un autre côté, les élèves sont animés d’unebelle curiosité, qui les conduit à s’essayer à différentes techniques, parfoisavec un vrai bonheur. Ils ont même réussi à me surprendre, en démon-trant, dans un montage audiovisuel, une maîtrise du son et du rythme àlaquelle je ne m’attendais pas!»

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Unités pédagogiques d’intégrationLes unités pédagogiques d’intégration (UPI) sont des classes un peuparticulières : elles accueillent des élèves handicapés de niveauxdifférents, qui suivent ponctuellement certains cours avec leurs ca-marades du collège, mais ont besoin, dans les autres disciplines, d’unenseignement adapté.Bien que ces élèves ne soient pas, à proprement parler, scolarisés en4e ou en 3e, le Conseil général des Landes a décidé – en accord avecles équipes éducatives – de les doter au même titre que leurs ca-marades. Les cinquante élèves des six classes d’UPI du départementdisposent donc, eux aussi, d’un ordinateur portable qu’ils peuventutiliser aussi bien au collège qu’à la maison; ils en sont tous très fierset se déclarent généralement très motivés pour s’en servir.«C’est une machine, on peut l’utiliser et la régler à loisir et selon sesbesoins ; c’est un répétiteur inlassable, on peut l’arrêter sans levexer, sans se préoccuper de ses réactions. Il est régulier, précis etexact ; il fournit un cadre, un contenant qui soutient la concentra-tion des élèves, l’écran focalisant son attention.1 »L’ordinateur est unanimement reconnu comme outil particulière-ment efficace pour la mise en œuvre d’une pédagogie différenciée,vraiment adaptée au niveau de chaque élève, dans des classes paressence totalement hétérogènes.

-----1 www.lecolepourtous.education.fr

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collège Jacques Prévert, à Mimizan – avril 2009dans la classe d’UPI avec Alain Leclercq, professeur des écoles,Véronique Girardey, assistante de vie scolaireet François Rohfritsch, assistant d’éducation Tice

/ / / On va sur l’ordi?«Avec l'ordi, on peut tout faire! Heureusement que ça existe… sinon on seraitperdus !»

On parle? À peine franchi le seuil de la classe d’UPI (unité pédagogique d’in-tégration), nous sommes accueillis en invités… Aymeric, Bastien, Brandon,Cécilia, Coralie, Lydie, Marina, Denis et Miguel nous attendaient, et la pré-sence d’Alain, leur professeur, sait se faire discrète pour laisser la discus-sion s’engager. Notre curiosité et leur bonne humeur font le reste: leur pointde vue sur l’utilité des ordinateurs portables? Très positif, à l’unanimité!Oui, mais encore? Certains de leurs arguments nous étonnent: «C’estplus facile, et on a moins mal aux mains!» explique Cécilia. «On gaspillemoins de papier», complète Miguel. Brandon: «C’est plus pratique, et onn’a pas besoin de tout le matériel: les stylos, le papier… Avec l’ordi, on peuttout faire!» La conclusion viendra, catégorique: «Les ordinateurs? Heu-reusement que ça existe… sinon on serait perdus!» Alain Leclercq inter-vient à son tour: «J’ai longtemps travaillé en institut médico-éducatif, avecdes enfants autistes beaucoup plus en difficulté que ces élèves, et je sais l’in-térêt formidable de cet outil: avoir un ordinateur, quand on est à l’UPI, c’estêtre comme les autres élèves de 4e et de 3e. L’ordinateur, c’est un média-teur: c’est comme une troisième personne qui dit “oui” ou “non” – ça fonc-tionne, ou ça ne fonctionne pas. Les choses ne se passent pas en face-à-faceavec le professeur. Il n’y a pas d’affect, pas de “allez, vas-y”.»Arrivée de Véronique: «Mon bras droit et mon bras gauche…», souligneAlain avec un sourire, puis de François, l’assistant d’éducation Tice, quivient, comme chaque semaine, passer une heure en classe d’UPI: «C’estlui qui répare notre ordinateur. Il nous apprend des trucs pour envoyer ducourrier, ou bien des raccourcis sur le clavier…»Démonstration. «Maintenant, dit le maître, nous allons voir ce que vousêtes capables de faire.» C’est le signal pour aller s’installer devant les or-dinateurs portables installés au fond de la classe. Tout le monde est prêt?La démonstration va commencer. Il s’agit, à la demande du maître, d’ou-

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vrir successivement un certain nombre de documents ou d’applications.«Êtes-vous capables de trouver le menu de la cantine du collège? Et leConjugueur? Le dictionnaire Petit Robert?» Une petite musique signaleque les opérations sont réussies. «Maintenant nous allons sur GoogleEarth, à Paris. Qui va me trouver la tour Eiffel?» Bravo!«Je leur demande d’accéder à tous les logiciels dont ils ont besoin, au col-lège ou à la maison, nous expliquera Alain Leclercq. Une manière d’ins-crire ces procédures dans les automatismes, pour que cela ne soit pas unproblème dans la vie courante. Nous, les adultes, restons en retrait le plussouvent possible, de manière à développer l’autonomie des élèves, et à fa-voriser l’entraide. Celui qui sait quelque chose peut aider ses camarades.Progressivement, j’essaie de l’amener à dire à l’autre comment procéder,plutôt que de le faire à sa place.»

Aller sur l’ordinateur. Il reste dix minutes avant la fin du cours. Quelqu’undemande: «Alain, on peut aller sur l’ordinateur?» Oui, répond le maître.Nous voilà soudain dans un autre monde. La classe d’UPI, le collègen’existent plus : nous avons devant nous des adolescents qui ont exacte-ment les mêmes centres d’intérêt, le même comportement que les cama-rades de leur âge. Miguel conduit une voiture dans un environnement ur-bain digne des meilleures scènes de poursuite d’une série américaine.Brandon cherche une vidéo du rappeur Sinik Big Ali. Curiosité, envies… «Chaque jour, nous explique Alain Leclercq, ils ont un moment pour fairece qu’ils veulent. Pour eux, “aller sur l’ordinateur”, ce n’est pas travailler,c’est autre chose: YouTube, les jeux, etc.» Comme nous lui faisons remarquer qu’habituellement le monde ludiquene passe pas la porte du collège – officiellement, du moins –, Alain Leclercqnous répond: «Ces élèves ont échoué partout et avec toutes les méthodes.Nous sommes obligés de travailler à partir de ce qui les intéresse. L’ordi-nateur est l’un de ces moyens. Quand j’entends un élève dire: "Brandonm’a passé un jeu", ça veut dire que l’échange est possible. Et si on est ca-pable de dire : "je vais copier le programme sur une clé USB, et le mettredans ton ordinateur", c’est toute une compétence qui se développe. Cet

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échange est éducatif. Comment faire, quand on ne sait pas lire, pour re-connaître ce jeu dans l’ordinateur? Si vous le lui demandez, l’élève vousexplique qu’il a remarqué certains détails qui se ressemblent, d’autres quidiffèrent… Petit à petit, on peut l’amener à voir des lettres, qui veulent direquelque chose. Tout d’un coup, il devient plus attentif. On n’obtient pas cesrésultats avec un crayon et un papier!»

-----collège de Labenne – avril 2008

dans la classe d’UPI, avec Bénédicte Brunet, professeur des écoles,et Stéphanie Darrouzet, auxiliaire de vie scolaire

/ / / “Ski me plaît…”«L’ordinateur a changé ma manière de tra-vailler, il me permet vraiment d’adapter monenseignement aux besoins de chaque élève.»

«Quel jour sommes-nous?» Ludovic, Kévin, David, Aurore, Seymour, Clé-mentine et Florence sont assis face à Bénédicte, leur professeur, qui ins-crit la date au tableau. «Nous allons parler du livre que vous êtes en trainde lire1…» On se remémore l’histoire: Tony et Cybèle, leur papa char-pentier, les Alpes, la neige… «Je vous ai préparé des mots croisés sur l’or-dinateur…» Après un «Ouais !» collectif de satisfaction, chacun s’installedevant son ordinateur portable, toujours prêt à servir sur les tables ins-tallées en périphérie de la salle de classe. Mais, avant de se lancer, il fautd’abord récupérer le document sur le réseau; le professeur rappelle la pro-cédure, répétant encore une fois la formule magique: poste de travail> doc-sur-DC > classe d’UPI > dossier “ski me plaît” > document “mots croi-sés”… «Qui se rappelle comment on fait les mots croisés? – On clique surun numéro, explique Aurore, assez fière d’avoir réussi la premièreépreuve, ça nous donne une définition…» C’est exactement ça. Applica-tion, sérieux, calme et concentration… Ludovic a fini; le professeur lui pro-pose d’enchaîner avec un exercice de Mathenpoche.«Les ordinateurs portables ont changé ma manière de travailler, expliqueBénédicte Brunet, ils me permettent vraiment d’adapter mon enseigne-ment aux besoins de chaque élève. Par rapport à un certain type de han-dicap, c’est un excellent médiateur. Nous l’utilisons quotidiennement, etdans toutes les matières, pour des exercices en autonomie. Le traitement

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de texte permet aux élèves de s’affranchir d’une écriture souvent désor-donnée et insatisfaisante. Plus largement, les outils numériques dans leurensemble nous permettent d’“exploiter” tout ce qui est exploitable: dès quenous faisons une sortie, ou une activité particulière, nous prenons des pho-tos, matière à créer des diaporamas, des albums, des films, etc. Et nousavons un projet de site internet!»-----

1 Ski me plaît, de Daniel Meynard (éd. Syros).

-----collège René Soubaigné, à Mugron – mai 2009

dans la classe d’UPI avec Caroline Pierré, professeur des écoleset Caroline Pierre, auxiliaire de vie scolaire

/ / / Je sais tout faire!« Taper un texte, me servir de MovieMaker,écrire un message dans Courrier électronique,enregistrer des chansons, télécharger, utiliser leréseau, faire des copier-coller… Tout!»

Réflexion. Pour préparer notre venue, Caroline Pierré a demandé à cha-cun de répondre à un petit questionnaire sur ce qu’il sait faire avec sonordinateur portable : «Vous copiez votre document sur le réseau. Tout lemonde y arrive? – Oui, dit Michaël…» Le professeur pianote sur son or-dinateur, et voilà bien vite les réponses affichées et organisées sur le ta-bleau. Avec cet exercice bien connu de la “mise en commun”, c’est laconstruction d’un savoir collectif qui va alors s’organiser sous nos yeux:ainsi “affichée”, chaque idée complète, précise et enrichit la réflexion com-

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mune. Une page entière de texte s’est progressivement élaborée sur le ta-bleau interactif. François s’applique à lire à haute voix la réponse à la ques-tion Que savez-vous faire avec l’ordinateur? : «Je sais tout faire: taper untexte sur l’ordi (traitement de texte), me servir de MovieMaker, écrire unmessage dans Courrier électronique, enregistrer des chansons, téléchar-ger, utiliser le réseau, faire des copier-coller… Tout!» La fierté de voir af-fichée cette production collective est manifeste: «En réfléchissant tous en-semble, conclut la maîtresse, vous avez déjà trouvé pas mal de choses…Je vais corriger les fautes, puis vous pourrez récupérer ce document surle réseau. – Madame, on a tout dit, c’est top!» Action ! «Maintenant, reprend le professeur, vous allez montrer com-ment vous utilisez les ordinateurs…» On convient vite que les travaux sonttellement variés qu’il est indispensable de s’organiser à l’avance, et Ca-roline Pierré distribue un rôle à chacun: Guillaume est chargé de montrersa recherche sur les plantes; Alexandre va continuer à travailler sur salettre au directeur de l’IMP de Mimizan; Flora nous montrera le logicielLecthème; Laura nous expliquera le fonctionnement de la messagerie.Brian écope de la révision des tables de multiplication sur Quizztop; Mi-chaël va nous faire les honneurs du “Goûter de Noël”, l’un de ses projetspersonnels, sur MovieMaker; Aurélien dévoilera un coin de ses talents degraphiste, avec le logiciel Paint, avant de nous montrer une vidéo où onle voit présenter le métier de céréalier, en compagnie de Laura. Dylan nousfera partager sa quête, sur Google Images, d’une illusion d’optique. Fran-çois n’a encore rien décidé. Antony nous organise une visite guidée de sabibliothèque musicale, et de ses multiples montages audiovisuels. Quantà Bilal, il est autorisé à faire une démonstration de téléchargement. «Ma-dame, on y va?» Force est de constater, en passant de l’un à l’autre, queles ordinateurs mobilisent l’attention, canalisent les énergies et dévelop-pent un vrai désir. Et la créativité est souvent au rendez-vous! «Les ordi-nateurs ont vraiment changé ma pédagogie, nous confiera Caroline Pierré,à tel point que j’aurais, aujourd’hui, bien du mal à m’en passer. Ici, ils sonttoujours près de nous. Bien entendu, nous ne faisons pas que cela, maisnous alternons systématiquement travail sur papier et sur informatique.»

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Ateliers, travaux de groupeet classes à projets

Ici, on édite le journal du collège, là on réalise un vrai “jité”, uncourt-métrage ou un diaporama, on découvre les sciences ou on or-ganise un voyage… Dans tous les cas, les ordinateurs portablessont utiles, voire indispensables. C’est sans doute dans ces espacesmoins contraints par les programmes scolaires que peut se déve-lopper plus librement un peu de cette pédagogie “constructiviste”que Seymour Papert avait imaginé possible, grâce à la dotation d’unordinateur pour chaque élève.

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collège Jacques Prévert, à Mimizan – avril 2009Atelier scientifique d’Isabelle Persillon, professeur de physique,Carole Darracq, professeur de SVT,et Jean-Jacques Cahut, professeur de mathématiques, avec des élèves de 4e et de 3e

/ / / L’atelier sciencesIci, on se pose des questions, on cherche surinternet, on fait des expériences, on prend desphotos, on fait des affiches, on alimente unblog… Bref, bien que l’on soit encore “entreles murs” à l’heure où certains camarades quit-tent le collège, on n’a pas le temps de s’ennuyer.

C’est l’effervescence dans la salle de physique. Ambiance d’atelier, sérieuse,et décontractée à la fois. Ici et là, par petits groupes, on s’active autourd’une expérience, on discute ferme… Un premier microsondage nouspermet de prendre la température: «Ce n’est pas du travail comme enclasse, c’est plus “cool”, moins contraignant. ¶ Venir ici, c’est un peu unprivilège : ça nous fait découvrir plein de choses. ¶ Ça m’intéresse: je veuxfaire un doctorat de biologie. ¶ Aux informations, ils racontent des choses,mais ce n’est pas très précis : ici, on apprend plus!»Atelier.Les professeurs sont très sollicités: laisser s’épanouir les initiatives, touten canalisant les énergies n’est pas exactement de tout repos… «Notre ate-lier scientifique en est à sa quatrième année de fonctionnement, nous ex-plique Isabelle Persillon. Nous sommes trois enseignants à nous relayerpour encadrer vingt-cinq élèves pendant deux heures, chaque vendrediaprès-midi. Cette année, nous avons choisi de creuser la question du ré-chauffement climatique. Nous fixons aux élèves des objectifs, avec deséchéances ; et, quand nous serons prêts, ils iront présenter leurs re-cherches aux élèves des écoles primaires.»La parole aux collégiens. Expérimenter. C’est assez intéressant parce qu’on voit ce qui se passe, envrai. ¶ Nous, avec de la glace pilée et du sel, on a créé un nuage… Maisles photos ne sont pas très réussies, alors on recommence! ¶ Pour notre

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expérience, il nous faudrait deux verres, un film plastique, deux thermo-mètres, de l’eau et du soleil. Affiches. Pour faire tenir tous nos documentsdans l’affiche, il a fallu résumer! Chercher. C’est long: un jour, j’ai cher-ché pendant deux heures sans rien trouver! Alerte. Toutes ces îles qui peuvent couler, c’est alarmant. ¶ Ici, on apprendce qu’on pourrait faire pour éviter le pire. ¶ Il faudrait moins utiliser nosvoitures, prendre les transports en commun, et faire attention à la nature.¶ Il faut réduire notre consommation d’énergie. ¶ C’est dur de moins pol-luer, parce qu’on a nos habitudes… ¶ Ce n’est pas impossible, mais il fautréagir maintenant… ¶ Ce n’est pas une classe qui va modifier le monde!On va déjà essayer de sensibiliser le collège, et si les élèves en parlent àleurs parents, les parents à leurs amis… La tempête du 24 janvier 2009. J’étais dans mon lit, je dormais. ¶ Il y a eudes vents jusqu’à 185 km/h et des vagues de 13 m à Biarritz. Dans lesLandes, 60 % de la forêt est détruite. ¶ Nous avons cherché des articlesdans le journal et sur le site de la météo: c’est un cyclone extra-tropical,de type "bombe"; en fait, c’est le chaud et le froid qui se rencontrent. ¶ Cer-tains pensent que cette tempête est due au réchauffement climatique etqu’il y en aura d’autres, plus violentes. Écrire. Quand on aura terminé notre expérience, on la mettra sur le blog. Écouter. L’autre jour, on a eu une conférence d’une personne du Giec(Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat). Outils numériques. Le protocole de l’expérience, on l’a trouvé sur inter-net. ¶ Avec les ordinateurs, nos affiches sont plus lisibles et plus esthé-tiques. ¶ On utilise aussi le visualiseur, pour filmer nos expériences. ¶ Sion n’avait pas les ordis, on ne pourrait pas faire de blog, et les gens nepourraient pas aller voir. ¶ C’est plus intéressant et amusant à faire sur l’or-dinateur que par écrit (sic). ¶ On écrit mieux, et plus vite, avec l’ordina-teur qu’à la main.»

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collège François Truffaut, à Saint-Martin-de-SeignanxClasse de 3e “médias” avec Claudine Haira, professeur documentalisteet Lilly Vogel, professeur de lettres classiques

/ / / La classe médias«Comme les élèves disposaient d’un ordina-teur personnel, l’idée de travailler sur les mé-dias s’est imposée tout naturellement.»

C’est l’une des cinq classes “à PEM” (projet éducation aux médias) de l’aca-démie de Bordeaux1. À ce titre, elle bénéficie du soutien du rectorat et duConseil général des Landes.«Si vous n’avez pas encore mis votre article en ligne, faites-le, et tenezcompte de mes remarques pour en produire une seconde version…» Noussommes dans la classe de 3e médias, c’est Lilly Vogel, professeur de lettresclassiques, qui parle. Elle intervient aujourd’hui en tandem avec ClaudineHaira, professeur documentaliste pour accompagner les élèves qui finali-sent le prochain numéro du journal de la classe – La Gazette du Net – à lireprochainement sur internet. Visite guidée de quelques travaux en cours…Partager ses passions. Nicolas met la dernière main à son article sur lerugby. «Je fais partie de la section rugby du collège, et du club de Saint-Martin-de-Seignanx. Et je suis supporter de Bayonne! Pour ce premier ar-ticle, je vais parler du rugby en général. J’ai écrit un premier texte direc-tement sur l’ordinateur. Mon professeur de français l’a relu et corrigé deuxfois ! Maintenant, c’est bon: on va le mettre sur le site.» Reste encore laquestion de l’illustration: «On nous a conseillé un site où j’ai trouvé desimages libres de droits…»Témoigner. «Chaque année, des centaines de millions de personnes en dé-tresse tentent l’impossible dans le but de trouver une vie meilleure, del’autre côté de la frontière. Mais après leur arrestation, leur situation de-vient compliquée», écrivent Élodie et Clémence. «Le CRA est-il une pri-son?» se demande Pauline en écho. «Le CRA (Centre de rétention admi-nistrative), c’est un lieu où l’on enferme les sans-papiers avant de lesrenvoyer dans leur pays. Quand on nous a parlé d’aller visiter celui d’Hen-daye, nous ne savions même pas ce que c’était, encore moins qu’il y enavait un tout près d’ici! Nous avons rencontré des policiers, des infirmièreset des représentants des associations qui aident les détenus. Nous avions

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préparé des questions, mais leurs réponses nous ont semblé plutôt contra-dictoires : d’un côté, on nous a expliqué que le CRA n’est pas une prison,mais d’un autre les infirmières nous ont dit qu’il y a déjà eu quatre ten-tatives de suicide en six mois!» Nos deux jeunes filles ont décidé d’écrirecet article pour témoigner: «Nous avons réuni nos idées, puis cherché,avec notre professeur de français, des angles de vue qui nous permet-traient de traiter le sujet en plusieurs articles.»Élodie et Clémence ont choisi d’évoquer la vie et les rêves des migrants.Une écriture à quatre mains qui s’est surtout élaborée par téléphone, ex-plique Clémence avec un sourire: «Le soir, on échangeait nos idées, et jenotais au brouillon…»Témoigner (encore). Pour construire son article sur les jeux vidéo, Benja-min s’est appuyé sur son expérience personnelle: «Je ne suis pas “accro”,nous explique-t-il. Mais à un moment, je l’étais un peu. Mon grand frèrem’a parlé; il m’a bien expliqué que la scolarité, c’est quand même plus im-portant, et je me suis calmé… Mais au passage, j’ai pu me rendre compteque c’est assez compliqué d’en sortir!» Pense-t-il pour autant qu’il ne fautpas toucher aux jeux informatiques? «Non, je ne dis pas ça: on peut jouer,mais avec modération!»-----

1 http://www.ac-bordeaux.fr/pedagogie/education-aux-medias.html

http://classe.medias.free.fr

-----LE POURQUOI ET LE COMMENTComment est née cette classe médias?Claudine Haira (CH) : «Après avoir participé à la classe cinéma du collège, nous avions prisl’habitude de travailler ensemble, et nous avions envie, avec Lilly Vogel, de prolonger cet-te expérience sous une autre forme. Nous sommes donc à l’origine du projet, auquel s’estassocié Olivier Hamant, professeur de mathématiques. Comme les élèves disposent d’unordinateur personnel, l’idée de travailler sur les médias s’est imposée tout naturellement.»Lilly Vogel (LV) : «Notre propos, c’est d’offrir à nos élèves une ouverture sur le monde –c’est-à-dire sur un grand nombre de questions – et, à partir de là, mettre en jeu la réflexionet l’esprit critique.»

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Pourquoi un journal en ligne?LV : «Nous ne voulions pas en rester à l’étude des médias, mais amener nos élèves à déve-lopper un certain sens critique par rapport à tout ce qu’ils peuvent entendre ou voir. Qu’ilsen viennent à regarder les médias d’un autre œil. Nous avons donc souhaité les mettreen situation de travailler eux-mêmes comme des journalistes: produire un journal sur inter-net nous permet à la fois de travailler l’écrit et la photo, mais aussi le son et la vidéo.»CH: «Notre propos est de traiter de tous les supports qui véhiculent de l’information. Endébut d’année, nous avons travaillé sur la presse écrite, puis sur le reportage télévisuel.Un peu plus tard, nous nous intéresserons à la radio. Internet, c’est tout le temps!»Comment se font les choix?LV: «Plusieurs sujets viennent des élèves eux-mêmes, et de leurs centres d’intérêt. D’autresleur sont imposés : c’est le cas pour le cross du collège, que nous avons considéré commeun entraînement : tout se passait sur place, il y avait un grand nombre de personnes à quiposer des questions. Nous venons d’attaquer un plus gros morceau avec cette enquêtesur l’immigration. Nous avons commencé par des recherches sur internet, toujours à l’ai-de des ordinateurs portables : qu’est-ce que l’immigration régulière? l’immigration irré-gulière? un centre de rétention administrative (CRA)? Quelles sont ces associations quiinterviennent auprès des immigrés? Ensuite, nous sommes partis à Hendaye – en auto-bus – pour visiter le CRA où ils ont pu rencontrer des policiers, des responsables du centreet des associations, des infirmières, etc. Pour nos élèves, c’est une expérience exception-nelle : ils ont eu un aperçu assez complet de la situation. À eux maintenant de réflé-chir… Plusieurs élèves ont produit de très bons textes sur le sujet. [À propos de l’élève quia repéré des contradictions entre les différents témoignages.] C’est exactement le butrecherché: qu’ils fassent preuve d’esprit critique par rapport à ce qu’ils observent, aux dis-cours des gens qu’ils rencontrent.»Quelle est la place des outils informatiques dans ce projet?LV : «Cette expérience ne serait pas envisageable sans les ordinateurs portables, car celademande beaucoup de travail personnel de la part des élèves ; ils doivent faire desrecherches, rédiger les articles, travailler les vidéos, les photos, le son, mettre en ligne leursarticles… Tout se fait à partir de leur ordinateur ! »Mettre en ligne, c’est compliqué?CH: «Nous n’avions jamais fait de site internet. Ce n’est finalement pas si compliqué, maisça suppose un apprentissage. J’apprécie la méthode de Stéphane, l’assistant d’éduca-tion Tice du collège : il ne fait rien à notre place, mais il est toujours disposé à nous expli-quer comment on doit procéder. Du coup, je suis en apprentissage, et ça me demande dutemps, mais à terme, je serai autonome!»-----Olivier Hamant est professeur de mathématiques : «J’ai accepté de m’associer au projetde classe médias, dans la mesure où les domaines abordés m’intéressent beaucoup. Maiscomment y trouver ma place, en tant que professeur de mathématiques? Mon idée dedépart, c’est qu’il existe une certaine parenté entre la manière dont on tient un raison-nement mathématique et l’analyse critique des médias auxquels nous sommes confron-tés : Il faut, dans les deux cas, avoir une approche rigoureuse du phénomène. Sans for-maliser outre mesure ce rapprochement, je l’ai évoqué avec les élèves. Et maintenant quele site internet est en place, ma contribution va consister à proposer des sujets scientifiques.Nous avons, par exemple, commencé à travailler sur l’histoire des sciences à propos de Thalèset de Pythagore.»

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collège Lubet Barbon, à Saint-Pierre-du-Mont – avril 2009Classe à projet artistique et culturel

/ / / Rêveurs d’IslandeQui a dit que les adolescents d’aujourd’huin’aiment pas lire? Rencontre avec une poi-gnée de professeurs déterminés1 qui ont suconcrétiser un grand rêve collectif, né de lacuriosité de jeunes lecteurs passionnés.

Monique Arbieu: «L’histoire commence il y a trois ans. Nous avons étu-dié Voyage au centre de la Terre, de Jules Verne, avec une classe de 4e.Grâce aux ordinateurs portables, les élèves ont mené une recherche do-cumentaire à partir de ce roman: leur investissement, leur enthousiasme,la qualité de leur travail ont dépassé toutes mes attentes. Je me suis alorsavisée que l’on pourrait fédérer plusieurs enseignements autour de celivre : la géographie (le roman se passe en Islande), les sciences de la vieet de la Terre (c’est en entrant par un volcan éteint, le Sneffel, que les hé-ros entreprennent leur voyage), l’anglais, la musique, etc. De là est né leprojet d’une classe “à PAC” (projet artistique et culturel) que nous mettonsen œuvre cette année, pour deux ans, avec 26 élèves de 4e. […] Grâce auservice culturel de l’ambassade de France, nous sommes entrés en contactavec une collègue islandaise, professeur de français. Chaque élève amaintenant un correspondant avec lequel il a la liberté de communiquerpar mail – en anglais –, et les Islandais projettent de venir nous rendre vi-site en octobre prochain.»Pierre Regazzoni : «Le rectorat a retenu notre projet comme “innovant”,en raison de son interdisciplinarité, de la mise en pratique de l’anglais etde l’utilisation des Tice. En effet, la place des outils informatiques est icitout à fait essentielle. Nous attendons maintenant de savoir si notre can-didature sera retenue au titre du programme Comenius2, ce qui nous per-mettrait d’envisager, à notre tour, un voyage en Islande, en juin 2010.»Christelle Saboureau: «Nous demandons à nos élèves de fournir un grostravail personnel. Dans la mesure du possible, nous infléchissons certainsde nos cours : en SVT, par exemple, nous avons appliqué la volcanologieet la tectonique des plaques à l’exemple de l’Islande…»

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Monique Arbieu : «Les élèves découvrent ainsi naturellement l’intérêtd’étudier la littérature. Ce contexte de projet a libéré des énergies, c’estaussi quelque chose de très fédérateur: en avançant ensemble, le groupese soude, chacun est conduit à porter un autre regard sur lui-même, et surles autres…»

30 septembre 2009. Voilà un nouveau tournant de l’histoire: les Islandaissont arrivés avant-hier! Du côté français, la bonne nouvelle est tombéependant l’été : élu au titre du programme Comenius, le projet va bénéfi-cier d’un soutien financier de l’Union européenne, ce qui va permettre unvoyage en Islande pour toute la classe, au printemps prochain.Huit heures du matin. Le brouillard s’accroche encore, gommant lescontours et les arrière-plans: un vrai temps à l’islandaise… Une petitetroupe d’adolescents plus ou moins bien réveillés se rassemble dans la courdu collège. Un peu à l’écart, des parents d’élèves, qui ont tenu à participerà ce petit déjeuner d’accueil organisé par le collège, entament la discussionavec les professeurs: «Je n’avais encore jamais entendu mon fils parler enanglais ! Parce que vous savez, à la maison, depuis deux jours, on est tousobligés de s’y mettre ! Et ça ne nous fait pas de mal…» Sourires. Visible-ment, les choses se passent plutôt bien, et les outils numériques n’y sontpeut-être pas complètement étrangers: «Avant de se rencontrer, ils seconnaissaient déjà, par Facebook! » Et là aussi, tout le monde s’y met: «Monmari a trouvé un traducteur en anglais sur internet, et nous avons trans-mis un message aux parents de notre correspondant, pour les prévenir queleur fils était bien arrivé. En retour, ils nous ont envoyé des photos de leurmaison. Entièrement en bois! Pour moi, ça ressemble à une datcha, maisje ne crois pas que ça s’appelle comme ça!» Du côté des collégiens, on s’in-terpelle, visiblement heureux de se retrouver. Quelqu'un me glisse: «LesIslandais ? Ils sont faciles à reconnaître: ce sont les blonds.» Puis, avec unsourire espiègle: «sauf exception ! » Rien n’est simple…Pour le moment, le voyage ne fait que commencer, et ces dix jours sem-blent encore une éternité pour ces adolescents qui viennent de si loin, de

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si froid, de si différent… À l’heure où, selon la formule consacrée, nousmettons sous presse, nous ne connaissons pas l’épilogue de l’histoire. Nuldoute que ces découvertes partagées laisseront des traces dans les espritset les cœurs de ces adolescents, et gageons qu’ils se souviendront de JulesVerne… et de leurs enseignants. Quant à savoir ce que viennent faire lesoutils numériques dans l’histoire, la question ne se pose même pas: ils sontlà, et on s’en sert !-----

1 Monique Arbieu enseigne le français, Pierre Regazzoni, l’histoire et la géographie, Christelle

Saboureau, les SVT, Véronique Lhost, l’éducation musicale, et Alain Lucotte, l’anglais.

2 http://www.europe-education-formation.fr/comenius.php

-----collège René Soubaigné, à Mugron – mai 2009

Atelier journal télévisé, de Laetitia Bernizan et Caroline Pierré,avec des élèves de 6e et de 5e

/ / / Les coulisses du “Jit锫J’aime bien passer devant la caméra…Quelquefois, on fait des mauvaises prisesparce qu’on rigole!»

En contrepoint de sa fonction d’assistante d’éducation Tice, Laetitia Ber-nizan a réussi à convaincre Sue Galand, professeur d’anglais, de faire vivre,avec elle, le site internet du collège: «Nous ne voulions pas un site statique,mais du son, des vidéos… de la vie quoi!» L’idée de faire un vrai JT (jour-nal télévisé) était née. C’est alors Caroline Pierré, professeur des écoles,chargée de la classe d’UPI, qui s’est retrouvée embarquée dans l’aventure.Silence, on tourne! Nous avions annoncé notre visite, et l’idée de nous in-terviewer, pour la prochaine édition du JT, sur le thème de la presse, s’estvite imposée. Nous voilà donc installés dans le bureau de Laetitia trans-formé pour l’occasion en plateau de télévision. La caméra est posée surun pied, Alexandre relit ses notes: c’est lui qui va faire le journaliste, pen-dant que Johanna s’occupera de la caméra. Le comment et le pourquoi dujournal En Connexion, la raison de notre présence dans leur atelier: ils veu-lent tout savoir ! Nous essayons de nous prêter au mieux à cette séance del’arroseur arrosé…L’heure du bouclage. Dans la salle informatique voisine, on s’affaire àmettre la dernière main à la prochaine édition du journal. Aux com-

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mandes de logiciels complètement inconnus de la plupart des adultes nonspécialistes, ces jeunes élèves interviennent sur le son et l’image avec au-tant de facilité que s’ils manipulaient un simple traitement de texte! Lae-titia Bernizan et Caroline Pierré ne ménagent pas leurs efforts pour ré-pondre aux questions, aider à réfléchir, valider les choix… On le sent bien,l’heure du bouclage qui approche fait monter la pression, dans cette sallede rédaction un peu particulière. «Il faut couper tous les sons qui ne vontpas, et tous les blancs!», explique Marion, qui peaufine une bande-son surAudacity, avec Lucile et Marina. Un peu plus loin, Lucie, Emma et Cherylevisionnent, via Pinnacle Studio, des rushes tournés dans le gymnase: «Cesont des élèves de 4e, en train de s’échauffer en musique…» Chloé, Clé-mence, Johanna et Mathieu choisissent la police du titre qui annoncera leursujet sur la tempête: «Mon papa, qui est pompier, nous a donné des pho-tos. Et nous sommes allés voir un agriculteur: il nous a montré des serresabîmées, des tôles décrochées, des champs dévastés. Enfin, nous avons prisdes photos de la forêt…» Anaïs, Adrien, Alexandre enregistrent de la mu-sique «pour ajouter par-dessus les images» de leur sujet sur la piscine.Présentateurs. Sandra, Nelly et Alexandre, qui présenteront la prochaineédition du JT, viennent de terminer la rédaction de leurs textes de lance-ment des sujets; ils sont prêts pour une répétition générale: «Aujourd’hui,nous allons vous proposer trois reportages…» Lire un texte tout en res-tant naturel, l’exercice n’est pas si facile qu’il y paraît! «J’aime bien pas-ser devant la caméra, vient de nous déclarer l’un de leurs camarades, pré-sentateur d’une précédente édition. Quelquefois, on fait des mauvaisesprises parce qu’on rigole!»Aimer! Voilà le mot qui revient quand on demande à nos journalistes enherbe pourquoi ils ont choisi cet atelier: «J’aime que notre travail soit vi-sible sur le site du collège. – J’aime préparer les interviews. – J’aime faireles reportages, et aussi le montage. – J’ai aimé travailler sur le club de bas-ket de Saint-Aubin…» Quant au mot de la fin, il revient à Alexandre: « Ilnous manque encore une musique pour notre sujet sur les déchets, et lejournal sera fini ! Et on pourra aller le voir sur internet…»-----

http://webetab.ac-bordeaux.fr/Etablissement/ Mugron/index.htm

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Gestion de la vie scolaireSaisie des notes, édition des bulletins scolaires, rédaction et publi-cation des cahiers de textes sur internet, gestion des absences, re-tards, dispenses, etc., édition de courriers et envoi de SMS aux fa-milles…, il est aujourd’hui tout à fait possible – avec les ordinateursportables – de gérer toute la vie scolaire dans un même environ-nement numérique, accessible à tous – sous certaines conditions –via le réseau du collège ou internet.

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Collège de Linxe – octobre 2008.

/ / / Une initiative qui fait l’unanimitéEn ce début d’année scolaire 2008-2009, la grande affaire, ici, c’est la miseen œuvre d’un logiciel de gestion de la vie scolaire1, avec publication decertaines informations – en direct – sur internet.

-----Le principal…

«Nous diffusons désormais le cahier de textesrempli directement par chaque enseignant, de-puis son ordinateur portable…»

«C’est ma première année au collège de Linxe, nous explique le princi-pal, Philippe Lesca. En arrivant ici, j’ai constaté que la collectivité terri-toriale faisait un effort particulièrement important en terme d’équipementnumérique, et que l’équipe pédagogique était très investie dans l’utilisa-tion de ces outils. Alors, dans la mesure où tous les professeurs sont do-tés d’un ordinateur portable, et toutes les salles câblées, j’ai proposé quel’appel des élèves soit fait de façon électronique. Tout est désormaiscentralisé sur le serveur du collège, et nous pouvons savoir heure parheure qui est absent.Ensuite, comme tous les professeurs ont adhéré à la démarche, nous avonsprogressivement étendu l’utilisation du logiciel de gestion de la vie scolaireà tout ce qui concerne les notes, les bulletins trimestriels, etc., et mis enligne un certain nombre d’informations en utilisant une extension de ce lo-giciel2… Grâce à un identifiant et à un mot de passe, les élèves, parentsou professeurs peuvent avoir accès aux informations les concernant. Lesfamilles disposent d’un nouveau moyen de suivre la scolarité de leurs en-fants (emplois du temps, professeurs absents, agenda de la semaine). Lesprofesseurs peuvent, depuis chez eux, saisir les notes, les apprécia-tions, etc. Et, en accord avec l’équipe pédagogique, nous publions main-tenant le cahier de textes rempli directement par chaque enseignant, de-puis son ordinateur portable: les élèves et leurs parents ont donc accès auxdevoirs qui sont à faire, aux leçons qui sont à apprendre.Et ça marche! Nous avons un taux très important de connexions: depuisla mise en place du système, plus de la moitié des parents (de la 6e à la 3e)se sont connectés au moins une fois; jeudi dernier, par exemple, nous avons

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enregistré 80 connexions, vendredi 62. Côté élèves, le premier mois, il ya eu 1507 connexions – et tous se sont connectés au moins une fois.Je vais maintenant proposer que nous ajoutions un volet à notre projetd’établissement pour essayer de faire du collège de Linxe un pôle d’ex-cellence autour du numérique… Nous ne basculons pas pour autant dansle tout informatique: notre seul objectif, c’est de permettre aux élèves demieux réussir, et aux familles de mieux suivre la scolarité de leurs enfants– celà grâce au matériel mis à disposition par le Conseil général, à la vo-lonté de l’équipe pédagogique, et aux investissements propres au collègenotamment pour les logiciels.»

-----Le conseiller principal d’éducation…

«Nous suivons les relevés de présence en temps réel, heure par heure…»

Florent Bousquet est conseiller principal d’éducation (CPE). «Nous avionsdéjà essayé de nous doter d’une plate-forme pour y installer le cahier detextes électronique. Et voilà qu’à son arrivée, notre nouveau principal nouspropose d’aller plus loin dans cette démarche en systématisant l’usage dulogiciel Pronote ! Cela correspondait vraiment à une attente. Les profes-seurs, les surveillants, tout le monde s’y est mis, et en deux jours le sys-tème était opérationnel ! Aujourd’hui, nous suivons les relevés de présenceen temps réel, heure par heure, et le cahier de textes de chaque classe esttenu à jour systématiquement en fin de cours. Certains enseignants y ins-crivent simplement le travail à faire, d’autres y déposent le contenu ducours, ce qui permet aux absents de se tenir au courant.Pour les parents, l’intérêt, c’est de disposer d’un accès direct à des infor-mations qui leur permettent de mieux suivre la scolarité de leur enfant.Je leur conseille de consulter régulièrement le site, en insistant sur les deuxparties qui me paraissent les plus importantes: le travail à faire et les notes.Je peux vous citer une petite aventure qui vient d’arriver à mon fils, élèveen classe de 6e. À cet âge, on n’est pas encore parfaitement au point surla méthodologie; au moment de faire ses devoirs, il constate qu’il avait écritsur son cahier de textes: “exercice nº 1, p. 84”… Mais dans quelle matière? Impossible de s’en rappeler… Je me suis alors connecté à Pronote et j’aitrouvé qu’il s’agissait d’un cours de musique. Ouf, sauvé![…] Pour définir mon métier, je dis volontiers que je suis parent de troiscents élèves ! Ce qui veut dire que j’adopte exactement la même stratégie

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avec chaque élève du collège qu’avec mon fils, à la différence près qu’aveclui je peux jouer sur la dimension affective. Un enfant, dès l’instant où ilsait que des règles existent, et qu’il les connaît, se sent en sécurité. Si jesanctionne un élève, ce n’est pas pour le plaisir de la sanction, maisparce que je dois le faire. Mon action se définit également dans une dy-namique qui inclut les professeurs, les parents et les autres membres del’administration du collège. Je suis un peu le facilitateur, la charnière quipermet que les choses soient réalisables.Je suis un “accro” de l’informatique. Je considère que l’ordinateur estavant tout un outil de communication. Au collège son usage est devenuquotidien, et cela va très loin: jusqu’en salle d’étude, par exemple, où nousdisposons d’un outil pour visualiser ce que font les élèves: ils peuvent ainsise servir de leur ordinateur portable, et nous sommes assurés qu’ils ne fontpas de bêtises. Aujourd’hui les élèves, parce qu’ils disposent personnelle-ment de cet outil et le maîtrisent, deviennent plus dégourdis. Si, au débutde l’opération, nous avons pu constater quelques dérives, il y en a au-jourd’hui beaucoup moins, dans la mesure où nous avons très fermementréagi. Ces outils nous offrent l’occasion d’apprendre aux collégiens cer-taines règles d’usage, dans un domaine où les familles se sentent quel-quefois démunies. À nous de leur montrer que les adultes gardent la maî-trise dans ce domaine. Heureusement, il existe des gens compétents quinous fournissent les pare-feu adaptés.Je suis convaincu qu’à l’heure actuelle, il n’existe pas de métier sans au-cun lien avec l’informatique. Et si le collège peut apporter des compétencesdans ce domaine, eh bien tant mieux ! Autant mettre le maximum dechances du côté de nos élèves, non ?»

-----L’assistant d’éducation Tice…

«Tout se fait par internet!»Arnaud Micaletti est l’assistant d’éducation Tice (technologies de l’infor-mation et de la communication pour l’éducation) du collège; il a participéà la mise en place de Pronote sur le plan technique, et il est chargé deveiller, au quotidien, à son bon fonctionnement.«Pronote permet de gérer tout un établissement scolaire: des absences,aux bulletins de notes, en passant par les emplois du temps, les rempla-cements de professeurs, etc. Chaque utilisateur – professeur, personnel ad-ministratif, famille, élève, dispose d’un mot de passe qui lui permet de seconnecter sur son espace spécifique.

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C’est magique ! Je suis moi-même surpris par la qualité de ce logiciel etpar toutes les possibilités qu’il offre… […] Tout a pu se mettre en place trèsvite, dans la mesure où les enseignants étaient très demandeurs d’un ca-hier de textes en ligne, et de la possibilité de travailler en ligne depuis leurdomicile, par exemple pour saisir les notes de leurs élèves. Maintenant, ilspeuvent tout faire, de n’importe où – y compris de l’autre bout du monde,s’ils en ont envie, pendant les vacances –, et n’importe quand: tout se faitpar internet. Et tout est parfaitement géré.»

-----Les parents d’élèves…

«Je peux suivre plus facilement les résultats scolaires de mes enfants.»

«C’est une réussite ! Les informations communiquées sont intéressanteset utiles. Les professeurs alimentent avec rigueur ce site et c’est un trèsbon outil complémentaire…» C’est Sylvie Fourgs qui signe ce mel, spon-tanément adressé au principal du collège de Linxe, pour témoigner sa sa-tisfaction. Rencontre avec cette maman de deux enfants: Thomas, en 4e

et Léa, en 6e. «Le logiciel est très facile d’accès. Naturellement, ce qui m’in-téresse au premier chef, c’est de suivre les résultats scolaires de mes en-fants. Pour Thomas, qui est en 4e, j’ai même accès à une courbe de pro-gression de ses moyennes depuis la 6e ! Nous consultons aussi trèsrégulièrement le cahier de textes: très pratique pour éclaircir une ques-tion, retrouver le numéro d’un exercice, etc. On y trouve aussi le contenude certains cours, ce qui est très bien en cas d’absence – et pour moi, c’estintéressant de savoir exactement où ils en sont.Bien entendu, aucun logiciel ne remplacera le contact direct avec les en-seignants. Mais certaines choses peuvent devenir plus simples: jusqu’à pré-sent, par exemple, pour obtenir un rendez-vous, il fallait écrire sur le car-net de liaison, et faire plusieurs navettes avant d’avoir trouvé une date etune heure. Ça prenait facilement plusieurs jours. Sur Pronote, nous avonsla possibilité d’envoyer un mail au collège, qui se charge de le transmettreau professeur concerné.»-----Mayie Gilly s’occupe de la section locale d’une fédération de parentsd’élèves. Sa fille Émila est en 3e : « L’ordinateur ? Non seulement c’estdans l’air du temps, mais c’est devenu indispensable. Ma fille avait déjàconnaissance de cet outil à la maison, mais elle a quelques amis qui n’en

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avaient pas. Nous avons installé un contrôle parental, et nous avons fixédes conditions très précises d’accès sur internet : en semaine, elle peutse connecter une heure, le soir, après les devoirs et avant le dîner, maispas plus. Elle nous dit qu’elle est bien la seule dans ce cas, et se trouvevraiment démodée : beaucoup de ses camarades se connectent le soir,parfois tard…Je me suis rendu compte que depuis l’année dernière, elle a nettementprogressé dans sa façon de se servir de l’ordinateur: elle fait aujourd’huitout naturellement des choses qui lui étaient moins familières. Notam-ment pour les recherches. Alors qu’en 6e et 5e, je devais souvent lui dire“tu devrais chercher…” c’est aujourd’hui devenu automatique : elle sedébrouille sans moi, elle sait tout de suite où aller, dans quel moteur derecherche trouver ; elle suit des voies dont je n’aurais pas forcément eul’idée… Elle a vraiment appris cela, ici, au collège. L’ordinateur, cen’était pas nouveau pour elle, puisque nous sommes équipés depuisqu’elle est toute petite, mais elle a découvert que ça peut être un outilde travail, alors qu’avant, elle le considérait plutôt comme un objet lu-dique (Quand j’ai moi-même appris à m’en servir, il y a plus de dix ans,je n’imaginais même pas que l’on puisse jouer sur un ordinateur !). Jepense sincèrement que nous avons beaucoup de chances que ces outilsaient été confiés à nos enfants. »Et Pronote?«GÉ-NIAL ! Hier, ma fille avait un contrôle de mathématiques dans la ma-tinée. Je consulte Pronote dans l’après-midi, et son professeur avait misle sujet en ligne, dans l’heure qui a suivi le contrôle ! J’ai directement ac-cès à certaines informations que ma fille ne me donnerait pas – non pasqu’elle veuille les cacher, mais qu’elle n’y penserait probablement pas.Quand elle rentre du collège, je ne vais pas me mettre à la questionner sys-tématiquement ! Là, je suis au courant. Et en plus, c’est vraiment bien fait.»Ça pourrait parfois la déranger?« Oui ! Au début, elle n’était pas très contente: qu’elle-même ait accès àtoutes ces informations, parfait, mais que ses parents y aient accès de lamême façon, ça la dérangeait un peu: “On va être fliqués…” C’est main-tenant devenu un fait, un acquis.»Et dans la relation entre le collège et les familles?«Ce qui est bien, avec Pronote, c’est que l’accès à l’information est trèsrapide. Au niveau des associations de parents d’élèves, nous demandonstoutefois que les documents écrits ne disparaissent pas pour autant : lesupport papier reste important pour relayer, ou rappeler les choses im-portantes. »

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-----Les enseignants…

«Je peux comparer la note d’un élève à la moyen-ne de la classe, suivre son évolution d’un devoirà l’autre.»

Nous voici de nouveau à Linxe pour dresser un premier bilan, après un and’utilisation. «L’outil est devenu transparent», nous expliquent ces ensei-gnants3 rencontrés en salle des profs, qui parlent avec une grande simpli-cité d’un fonctionnement maintenant bien installé. À les écouter, on com-prend vite qu’ici, on n’est pas du tout prêt à faire machine arrière!La publication du cahier de textes et des notes sur internet ne présenterait-elle pasquelques effets pervers? On pourrait objecter, par exemple, le risque de culpabiliser lesparents qui ne peuvent pas suivre au jour le jour le travail de leur enfant, ou bien celuid’infantiliser les élèves…– Nous fournissons l’information, c’est aux parents de décider d’aller lachercher ou non. Il peut arriver, dans le cas de familles dont les parentssont divorcés, que certaines données aient un peu de mal à circuler: ce sys-tème permet de mettre tout le monde à égalité. Mais certains parents peu-vent aussi décider de faire confiance à leur enfant, et préférer lui laisserune grande autonomie dans son travail. Ils gardent toujours la possibilitéd’accéder à des données fiables, quand ils le souhaitent.– Si vous voulez parler des familles qui n’ont pas la possibilité de suivreleur enfant comme elles le voudraient, l’existence de ce système ne changepas grand-chose. À l’inverse, j’ai parfois rencontré des parents de bonnevolonté, mais désarmés: à partir du moment où le cahier de textes de leurenfant était mal rempli, ils n’avaient aucun moyen de l’accompagnerdans son travail à la maison. D’autre part, ils ne connaissaient pas toutesles notes, et surtout pas les mauvaises…Vous vous déclarez donc satisfaits après un an de pratique au quotidien?– L’outil nous simplifie la vie. Il rassemble et met à notre disposition un en-semble de ressources que nous n’avions pas forcément sous la main au mo-ment opportun: je pense, par exemple, au trombinoscope de toutes lesclasses, avec les adresses et les numéros de téléphone, au fait de savoirsi l’enfant est demi-pensionnaire ou non, de disposer des emplois dutemps de chaque classe et de chaque professeur…– Les professeurs principaux peuvent accéder, en direct, aux résultats dechaque élève de leur classe, dans toutes les autres matières: très efficace

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et très rapide pour repérer ceux qui ont besoin de soutien. De même, la pos-sibilité de consulter le détail des absences, des retards, des visites à l’in-firmerie, des sanctions, etc., représente une vraie passerelle entre la vie sco-laire et la vie pédagogique: on améliore beaucoup le suivi de chaque élève,on a moins de surprises. Et on évite que certains parviennent à s’installerdans un certain flou, en jouant sur le manque de communication entre l’éta-blissement et les parents, entre les enseignants et la vie scolaire…La mise à jour systématique de votre cahier de textes numérique représente-t-elle unecharge de travail supplémentaire?– Aucune, dans la mesure où nous devions, de toute façon, comme danstous les collèges de France, tenir un cahier de textes papier pour chaqueclasse, de manière à constituer une trace écrite de ce qui a été fait et desdevoirs demandés. L’intérêt du document informatique, c’est que les don-nées enregistrées ne se perdent pas d’une année sur l’autre.Vos élèves continuent-ils à tenir un cahier de textes personnel?– Nous le leur demandons systématiquement, et de toute façon, il reste en-core des familles qui ne sont pas connectées à internet. Les 6e et les 5e lefont assez facilement, mais, si on n’insiste pas, les 4e et les 3e, qui dispo-sent des ordinateurs portables, prennent vite l’habitude de se reposer surle cahier de textes numérique!Par rapport au “sanctuaire” que représente l’école, ce système est tout d’un coup uneporte ouverte sur la pédagogie. N’avez-vous aucune crainte à ce sujet? Pendant l’annéequi vient de s’écouler, une communication directe s’est-elle installée avec les parents?– C’est effectivement la grande peur de nos collègues qui se déclarent ré-fractaires à envisager ce genre de dispositif. Ils nous disent: «Si tout ce quenous faisons en classe devient visible, nous allons être submergés par lesquestions des parents, et par des interrogations de toutes sortes!» Il estvrai que c’est une dérive possible, mais jusqu’à présent, nous n’avons riennoté de désagréable dans ce sens. Si je recevais un mail qui me semble-rait déplacé, ou me demanderait de me justifier sur ma fonction ou lecontenu de mon enseignement, je ne m’engagerais pas dans une polé-mique, mais je répondrais en demandant à mon interlocuteur de s’adres-ser à mon supérieur administratif, le principal, ou pédagogique, l’inspec-teur d’académie.– J’ai, pour ma part, reçu quelques mails de parents, mais il s’agissait es-sentiellement de demandes de rendez-vous…

-----En forme de conclusion (provisoire)

Monsieur le principal, pourquoi avoir fait le choix d’un logiciel privé?Eh bien, parce que, malheureusement, le logiciel que propose l’Éducationnationale de façon gratuite – qui présente un certain nombre de fonctions

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très proches de celui que nous utilisons – est en retard! Honnêtement, çamarche moins bien, et c’est beaucoup moins bien fait du point de vue er-gonomique : un peu plus long, un peu plus lourd, un peu plus compliquéd’utilisation, un peu moins performant…Votre expérience fait école, puisque d’autres collèges landais viennent de s’équiper à leurtour d’un logiciel de vie scolaire?Oui ! À Labenne, Soustons et Mont-de-Marsan (Victor Duruy), on vient des’y mettre… D’autres collègues m’ont appelé pour savoir comment ça fonc-tionne, et je les invite bien volontiers à venir voir directement sur place,car je suis très ouvert à partager notre expérience. J’insiste toujours surle fait que j’ai de la chance d’avoir ici une équipe d’enseignants qui ac-ceptent de me suivre dans cette démarche. Car, pour que ça marche, il fautréunir un ensemble de paramètres, matériels et humains. Vous pouvezavoir la volonté de l’équipe, celle du chef d’établissement, le souhait desfamilles… Mais, sans un équipement minimal (c’est-à-dire un certainnombre d’ordinateurs, les réseaux câblés, etc.), vous n’y parviendrez pas.À l’inverse, tout ce matériel ne fonctionnera jamais sans la volonté deséquipes, ni sans l’impulsion initiale du chef d’établissement.Le chef d’établissement a donc un vrai rôle d’animation et de motivation de son équipe,y compris en matière de Tice?Bien évidemment, et cela fait même partie de notre mission: nous sommeslà pour dynamiser les équipes et les amener vers certaines choses! Je metiens au courant de ce que les enseignants écrivent dans Pronote. Cela faitpartie de ma responsabilité pédagogique, car il est important de rentrertoutes ces informations, pour donner vie au système! À partir du momentoù vous avez une visibilité depuis l’extérieur, sur ce qui se fait à l’intérieurdu collège, ça pousse tout le monde à une plus grande exigence.-----

1 Pronote, logiciel développé par Index Éducation (http://www.index-education.com)

2 Pronote.net est un module complémentaire qui permet de publier sur internet.

3 Yohann Bourille, professeur de technologie, Sébastien Garcia, professeur de sciences physiques

et Xavier Duvignac, professeur de mathématiques.

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#4.CEQU’ILSENDISENT.

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Enquête TNS Sofres 2009En 2008, à l’occasion du renouvellement triennal des ordinateurs por-tables, le Conseil général des Landes a souhaité mener une investigationpoussée auprès des différents acteurs ou observateurs de l’opération “uncollégien, un ordinateur portable” pour connaître la réalité des usages. À l’issue d’un appel d’offres, c’est l’institut TNS Sofres qui a été retenu pourconduire ce travail.-----Les résultats de ces enquêtes sont disponibles sur www.landesinteractives.org. Ils ont été présentés le 26 juin 2009, lors de la réunion annuelle du comité de pilotage de l’opération “un collégien, un ordinateur portable”.

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-----À l’automne 2008, une enquête a étéconduite dans l’ensemble des collègespublics du département, à la deman-de du Conseil général des Landes. Plusde 15000 questionnaires ont été dis-tribués aux enseignants et personnelsd’encadrement, ainsi qu’à tous lesélèves de 4e et de 3e, et à leurs parents. Premier constat: avec 10261 questionnaires remplis, le taux moyen de réponses à l’en-quête est de 65% – ce qui est très satisfaisant –, mais il existe de très grandes disparitésentre les établissements, avec des retours qui s’échelonnent entre 19% et 100%.Dans un second temps, à partir des résultats de cette enquête quantitative, et pourchercher à comprendre pourquoi les enseignants de certaines disciplines du brevetdes collèges étaient assez peu utilisateurs, une investigation plus approfondie, et denature “qualitative”, a été conduite auprès d’un panel d’enseignants (lettres, histoireet géographie, et mathématiques), de huit collèges différents, à raison de dix entre-tiens par établissement.-----Une participation très contrastéeCe sont les personnels d’encadrement et de vie scolaire qui ont été les plus réactifsavec 77% de réponses. La participation des enseignants (56%) est par contre assezdécevante; elle peut même être considérée comme particulièrement faible au regarddes enjeux pédagogiques de l’opération. Avec 55% de réponses, les parents d’élèvesfont pratiquement jeu égal avec les enseignants, ce qui témoigne d’un réel intérêtpour l’opération, et relativise quelques idées reçues quant à leur supposée faible impli-cation dans la vie scolaire. L’excellent taux de réponses des élèves (76%) s’expliquepar le fait que la grande majorité a été invitée à remplir le questionnaire en classe.

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-----Une opération légitime, et en prise sur son époque…L’ambition du projet et son caractère audacieux et volontariste, y compris sa dimen-sion expérimentale, sont quasi unanimement considérés comme une réussite, etcomme une source de fierté pour le département. Autant de facteurs qui entre-tiennent – chez la majorité des personnes interrogées – un fort attachement affec-tif, voire émotionnel, à l’opération dans son ensemble.-----GRAPHIQUE AConsidérez-vous que le prêt d’un ordinateur portable aux collégiens de 4e et de 3e

présente un intérêt déterminant parce que :1. …cela met tous les élèves à égalité du point de vue de leur équipement…“Réduire la fracture numérique”, c’était le premier objectif de l’opération. Que ce soitles personnels d’encadrement et de vie scolaire (93%), les enseignants (91%), ou lesparents (89%), tous estiment, dans une belle unanimité, que l’opération contribue àrelever les défis de l’égalité, en assurant l’égal accès des élèves aux outils informa-tiques.2. …à travers l’utilisation de ces outils, les adolescents sont confrontés à de nouvellesproblématiques, et que l’un des rôles de l’école, c’est de les accompagner face aux défisde la modernité…Les personnels d’éducation (90%) sont les plus nombreux à penser que l’école a sa pla-ce dans ces apprentissages, suivis par les parents (78%). Les enseignants (60%) sont plusréservés.3. …ces techniques ouvrent de nouvelles possibilités d’enseignement dont il seraitdommage de se priver…“Favoriser l’émergence de nouvelles pratiques pédagogiques”, c’était le deuxièmeobjectif de l’opération. Près d’un enseignant sur deux (45%) voit dans le prêt d’un ordi-nateur portable aux collégiens l’opportunité de nouvelles pratiques. Les parents (86%)et les personnels d’encadrement (96%) sont encore plus optimistes.

Un haut niveau d’équipement des familles landaises“Diffuser la culture des nouvelles techniques dans tous les foyers landais”, c’était letroisième objectif de l’opération. Pratiquement toutes les familles ayant un enfantscolarisé en classe de 4e ou de3e (96%) sont aujourd’hui équipées d’un ordinateur àla maison. C’est plus que les enseignants (88%), ou le personnel d’encadrement(91%), et très au-dessus de la moyenne nationale.Autre information: 89% des familles disposent d’une connexion à internet (ADSL pour89% d’entre elles), et 75% des parents se déclarent “très à l’aise ou assez à l’aise”pour utiliser l’ordinateur (72%) et internet (76%) : les enseignants le sont respecti-vement à 76% et 89%.-----GRAPHIQUE BEn dehors de l’ordinateur du Conseil général, y a-t-il un autre ordinateur dans votremaison?

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L’ordinateur du professeurUne majorité d’enseignants (57%) déclare se servir de l’ordinateur portable fournipar le Conseil général, au moins à un cours sur deux – ce qui les classe certainementparmi les utilisateurs les plus assidus des Tice en France. Cette conversion au numé-rique n’allait pourtant pas de soi, et elle s’est faite, pour certains, au prix d’un efforttrès substantiel, comme en témoigne l’enquête qualitative: «L’aspect très positif, c’estd’avoir un peu forcé la main aux enseignants; les salles d’informatique n’étaientpas très utilisées, sauf par les professeurs de technologie… Certains d’entre nous sontvraiment partis de rien, mais entre choisir d’aller en salle informatique et voir arri-ver des élèves équipés d’ordinateurs, il y a vraiment une différence! […] Je pense qu’àpartir du moment où on est équipé, on s’implique; moi je ne l’aurais jamais fait s’iln’y avait pas eu cette opération!»-----GRAPHIQUE CFréquence d’utilisation de l’ordinateur du professeur, selon les disciplines.Une très forte majorité d’enseignants de SVT, technologie, musique, physique et artsplastiques utilise leur ordinateur portable au moins à un cours sur deux, devant leursélèves. Les professeurs de français (39%) le font plus occasionnellement. Ceux d’his-toire et géographie (64 %), et de langues vivantes occupent une position intermé-diaire avec une utilisation nettement plus forte en espagnol (70 %) qu’en anglais(52%). Cette hiérarchie reste assez semblable quel que soit le niveau d’enseignement,avec cependant une utilisation légèrement plus forte en 4e et en 3e, classes dans les-quelles les élèves disposent également d’un ordinateur portable.

À quoi sert l’ordinateur du professeur, pendant le cours?L’ordinateur du professeur est surtout utilisé avec un vidéoprojecteur pour présen-ter des documents (animations, textes, vidéos), conduire le cours, ou pour trans-mettre des documents aux élèves grâce au réseau interne du collège. Les autresusages, comme faire des exercices et des démonstrations, ou corriger les devoirs, sontmoins fréquents.-----GRAPHIQUE DUtilisation de l’ordinateur du professeur, selon les disciplines.La présentation de documents est dominante, notamment en sciences (84 %), enmusique (80%), en arts plastiques (75%) et dans une moindre mesure en espagnol, enhistoire et géographie, et en anglais.On peut noter des écarts de pratiques importants dans le domaine de la conduite descours : les enseignants de musique (88%) et de technologie (75%) utilisent très large-ment leur ordinateur pour cela, à la différence de leurs collègues de français (24%).En langues vivantes, on constate une différence entre les professeurs d’espagnol (51%)et ceux d’anglais (36%).Les professeurs de technologie sont des adeptes du réseau, un peu moins de la pratiquedes exercices ou de la correction de devoirs. Les enseignants d’EPS (éducation phy-sique et sportive) utilisent leur ordinateur pour transmettre des documents aux élèves,faire des corrections d’exercice et, dans une moindre mesure, pour présenter des docu-ments.

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Les atouts et les freins à l’utilisation de l’ordinateur du professeur, pendant le coursPour la plupart des enseignants, le fait de disposer d’un ordinateur portable a étéle moteur d’une refonte plus ou moins complète de leur cours, notamment de sa pré-sentation: iconographie, sites internet spécialisés, vidéos, etc. [fonction esthétique].« J’ai carrément refait mes cours parce que j’avais trouvé tellement de choses inté-ressantes que je n’avais même pas vues dans mes livres de fac…» Le bénéfice, c’estune remotivation de l’enseignant et une restauration profonde de son désir d’en-seigner. En terme de pédagogie, le premier avantage perçu, c’est une concentrationdes élèves renforcée par la variété des documents présentés [fonction distractive] etune plus grande attention [fonction attractive]: une forte proportion d’enseignantss’accorde sur le fait que l’utilisation de l’ordinateur associé au vidéoprojecteur cap-te l’écoute et renforce la motivation à apprendre. Autre atout, l’installation d’un cli-mat de connivence [fonction phatique]: en utilisant son ordinateur, l’enseignant envoieun signe de considération aux élèves qui trouvent, très majoritairement, davanta-ge d’intérêt dans les cours multimédias.La première raison invoquée par les enseignants qui n’utilisent que rarement ou jamaisleur ordinateur pendant le cours, c’est le temps perdu dans l’installation des dispo-sitifs techniques (53%) ; les premiers à s’en plaindre sont les professeurs de mathé-matiques et de français (70%). Soulignons également qu’un non-utilisateur sur cinq(20%) évoque un temps d’apprentissage des outils et des périphériques qui sembletrop important au regard des bénéfices attendus. Toutes matières confondues, ledeuxième frein à l’utilisation, c’est le fait que l’ordinateur perturberait la dyna-mique de la classe. Vient ensuite le manque de formation ou de conseils aux usagespédagogiques, notamment pour les enseignants ayant le moins d’ancienneté dansle collège (41%), de même que le manque de scénarios pédagogiques validés ou tes-tés. Près de 30% des non-utilisateurs ne perçoivent pas d’efficacité pédagogique àl’usage de l’ordinateur, ou ne veulent pas prendre de risques devant les élèves.

L’utilisation de l’ordinateur du professeur, à la maisonTous les enseignants font un usage important et diversifié de leur ordinateur por-table en dehors du collège, et en premier lieu pour préparer leurs cours (94%), fai-re des recherches sur internet (78%) et saisir les notes des élèves (69%). Ils sont unbon tiers à l’utiliser pour communiquer avec leurs collègues, mais à peine 16% à lefaire avec leurs élèves, et seulement 1% avec les parents d’élèves.

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Les ordinateurs des élèvesL’utilisation, pendant le cours, des ordinateurs des élèves est beaucoup plus contras-tée: si 40% des enseignants déclarent y recourir au moins à un cours sur deux, ils sont32% à ne le faire que “rarement ou jamais”. Entre les deux: 29% d’utilisateurs“occasionnels”. Le vécu des élèves est encore plus tranché: ils ont plutôt le sentimentde n’utiliser qu’occasionnellement leur ordinateur en classe, beaucoup plus occa-sionnellement que ne le déclarent leurs professeurs. Ces différences de perceptionsont, dans une certaine mesure, le reflet d’une forte attente assez largement déçue,mais également la conséquence d’une très faible utilisation à tous les cours.-----GRAPHIQUE EFréquence d’utilisation des ordinateurs des élèves, au moins à un cours sur deux.Sans surprise, et selon les déclarations des enseignants, c’est en technologie (88%)que les élèves utilisent le plus régulièrement leurs ordinateurs. En sciences, en espagnol,en histoire et géographie, et en arts plastiques, une légère majorité des enseignantsy recourent au moins à un cours sur deux. Leurs collègues de français (40%), d’anglais(31%) et de mathématiques (23%) sont nettement moins utilisateurs.Les déclarations des élèves confirment à peu près cette hiérarchie, avec des valeurs quisont cependant très en retrait – un peu moins pour l’utilisation en cours de technologie.Les réponses des parents sont dans le même ordre d’idées, sauf pour ce qui concernel’utilisation en mathématiques qui est proportionnellement un peu surestimée.

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À quoi servent les ordinateurs des élèves, pendant les cours?Les élèves déclarent utiliser principalement leurs ordinateurs pour accéder au réseauinterne du collège (86%), à la fois pour récupérer des documents, des cours ou desexercices, et pour remettre leurs devoirs: 40% des élèves déclarent l’utiliser quoti-diennement et plus de 90% au moins une fois par semaine.-----GRAPHIQUE FLes élèves utilisent leurs ordinateurs pour faire des exercices (41%) ou des recherchessur internet (27%), prendre des notes (22%) et présenter des exposés (12%). Il y a peude différences entre les élèves de 4e et ceux de 3e, mis à part une pratique un peu plusimportante des exercices pour les premiers et une utilisation du réseau un peu plus pro-noncée chez les seconds.Pour ce qui est d’internet, 16 % des enseignants déclarent l’utiliser au moins à uncours sur deux. Mais la moitié ne Ie fait que très rarement ou jamais. L’usage est plusfréquent en documentation (71%) et dans une moindre mesure en technologie (48%).Les trois quarts des élèves déclarent ne pas avoir accès librement à internet au collè-ge avec leur ordinateur portable.-----GRAPHIQUE GGlobalement, les enseignants déclarent utiliser davantage leur propre ordinateurqu’ils ne sollicitent ceux des élèves (en moyenne 57% contre 40%). Dans certainesmatières, l’usage du matériel du professeur domine très largement sur celui des élèvescomme en mathématiques, en allemand, en anglais ou en musique. Dans d’autres, lesusages sont concomitants, soit à un niveau élevé (technologie), assez élevé (histoireet géographie) ou faible (français).

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Les atouts et les freins à l’utilisation des ordinateurs des élèves, pendant le coursPremier avantage, selon les enseignants favorables à cette pratique, le plaisir des élèvesà utiliser leurs ordinateurs provoquerait une certaine forme de reconnaissance favo-risant l’attention, la motivation, et l’établissement d’un certain climat d’écoute [fonc-tion phatique]: « Ils se rendent compte que le professeur fait un effort, qu’il n’est pasun dinosaure en pédagogie…» Autres atouts fréquemment cités: les ordinateurs desélèves autorisent l’accès à une grande variété de ressources qui permettent d’abor-der les cours de façon plus vivante [fonction distractive]. Ils donnent les moyens deréaliser des présentations plus claires, soignées, lisibles, etc. [fonction esthétique], etde se communiquer plus facilement des documents entre professeur et élèves (dansles deux sens), grâce au réseau interne du collège [fonction d’échange]. Autre avan-tage, la possibilité, pour les élèves, de conserver l’intégralité des documents dans desdossiers classés par matières [fonction conservative]; et, pour les enseignants, une cer-taine facilité à alterner travail individuel et travail en groupe, et à proposer un tra-vail personnalisé, par exemple avec un choix sélectif d’exercices en fonction duniveau de chacun.-----Abondamment cité par l’ensemble des enseignants, le premier frein à l’utilisation desordinateurs des élèves, c’est le temps d’installation en début de séance, jugé com-me beaucoup trop important comparativement aux 55 minutes de cours. Le secondfrein à l’utilisation, ce sont les dérives possibles : les ordinateurs des élèves sontsources de distractions multiples, avec des échappées possibles sur le réseau: «Je nepeux pas tout faire en même temps: me concentrer sur mon cours et surveiller lesécrans!» [Noter que la plupart des enseignants débranchent le réseau dès les mani-pulations de recherche achevées; d’autres se contentent d’une surveillance visuelleen modifiant leur position dans la classe (derrière les élèves); d’autres enfin utilisentle logiciel SynchronEyes, ou ont recours aux services de l’assistant d’éducation Ticepour les aider dans cette tâche.] Troisième raison, plutôt invoquée par les ensei-gnants non-utilisateurs, des difficultés de manipulation de l’ordinateur par les élèves:une grande disparité de niveau renforçant l’hétérogénéité des classes.

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L’utilisation des ordinateurs des élèves, à la maisonÀ la maison, les élèves déclarent utiliser les ordinateurs portables pour réviser les courset faire des exercices, mais également pour des usages plus personnels. Écouter dela musique arrive en tête des activités les plus fréquemment citées, assez nettementdevant le fait de jouer ou de communiquer avec ses amis. Un collégien sur deux décla-re avoir un blog, qu’il utilise surtout pour diffuser des photos. L’ordinateur portableest un peu utilisé par les frères et sœurs, ou des amis(e) s (20%), pratiquement paspar les parents (6%).-----Les enseignants sollicitent étrangement assez peu leurs élèves pour l’usage scolai-re des ordinateurs à domicile: ils ne sont guère qu’un tiers à en prescrire régulière-ment l’utilisation. Une forte majorité (57 %), surtout en mathématiques (84 %),demande d’ailleurs des devoirs rédigés à la main – seuls 20% optant pour un ren-du avec l’ordinateur ; et ils ne sont que 23% à laisser le choix du support à l’élève.Cet usage scolaire très modéré de l’ordinateur à la maison est d’ailleurs confirmé parles collégiens : ils ne sont qu’un sur deux à déclarer l’avoir utilisé au moins une fois,sur les deux dernières semaines, pour un devoir demandé par un professeur dans samatière.Les enseignants reconnaissent pourtant des avantages à cette manière de faire, àcommencer par la continuité avec l’école («Grâce à l’ordinateur, on a tout avec soi,à disposition…») et l’apparence ludique de certains exercices («Si vous leur don-nez quelque chose à faire avec l’ordinateur, pour eux, ce n’est pas fastidieux; ils nele voient pas comme du travail : quand, dans un exercice de français, il n’y a que desmots à compléter, ils n’ont pas tout le texte à réécrire… Ils ne voient pas la contrain-te, ils ne voient pas que ça va leur prendre du temps, ils ne se disent pas j’ai du fran-çais à faire.»)Les principales réticences des enseignants sont essentiellement liées à la trop gran-de facilité d’échange de fichiers entre les élèves («Dans la pratique, avec une clé USB,c’est tellement facile de demander au copain qui est bon élève!»).

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Ordinateur de l’enseignant et/ou ordinateurs des élèves?Une très forte majorité d’enseignants estime que l’ordinateur a renouvelé ou a faitévoluer la façon d’enseigner leur discipline (93%), et qu’il offre de nouvelles poten-tialités d’enseignement (80%).Par contre, leurs avis sont beaucoup plus mesurés concernant les ordinateurs desélèves : seuls 45% estimant qu’ils ouvrent de nouveaux possibles dont il serait dom-mage de se priver.-----GRAPHIQUE HUne forte majorité d’enseignants (61%) n’accepterait pas de ne plus disposer de leurordinateur portable, en particulier les professeurs de sciences et de musique (80%),d’espagnol (72%) et de technologie (68%). Un quart le ferait avec difficulté ; et seuls12% accepteraient facilement.Ils seraient par contre deux fois plus nombreux (25%) à accepter facilement de voircelui des collégiens supprimé. 30% le feraient avec difficulté.Ce sont les professeurs d’espagnol qui semblent le plus attachés à l’opération, et ceuxde français et de mathématiques, le moins.

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D’un modèle centrifuge à un modèle centripète…L’institut TNS Sofres indique que l’arrivée massive de l’informatique à l’école, etnotamment la dotation des élèves en ordinateurs personnels, modifie, de fait, les repré-sentations traditionnelles du collège, de son fonctionnement, ainsi que les rapportsentre enseignants et élèves.Avec l’utilisation des ordinateurs des élèves, on passerait d’un modèle qualifié de “cen-trifuge” où tout converge vers le collège – le lieu du savoir et de la connaissance (laclasse et le professeur étant à la fois la source de cette connaissance et le point deconvergence des élèves et de leurs questions) –, à un modèle “centripète” danslequel chaque individu-élève est (ou semble être) potentiellement autonome etindépendant, et susceptible de chercher et de trouver la connaissance “ailleurs”qu’à l’école.-----MODÈLE CENTRIFUGE– Sanctuarisation: l’essentiel de la vie scolaire se déroule dans l’enceinte du lieu de sco-larisation, le collège – d’où l’importance accordée au respect des règles de vie communeversus le constat de leur affaiblissement.– Temporalisation : la vie scolaire est scandée en deux séquences bien distinctes (sco-laire et extrascolaire), le temps passé en cours étant considéré comme central par rap-port à un temps de travail personnel qui lui est subordonné, et essentiellement cen-tré sur la consolidation des apprentissages acquis en cours.– Centralité de l’enseignant: en cours, la place centrale est occupée par l’enseignement.– Convergence des élèves : une attention convergente est requise pour l’ensemble desélèves, les séquences de travail individuel restant assez réduites (exercices, contrôles…)MODÈLE CENTRIPÈTE– Déterritorialisation: une enceinte scolaire ouverte aux familles, à l’environnement social,au monde, qui devient un point de regroupement temporaire, où transite une diver-sité de flux d’informations aux accès dédiés.– Continuité temporelle: les limites entre vie scolaire et extrascolaire s’amenuisent. Ducoup, le “temps scolaire” a tendance à se dilater au travers d’une diversité croissanted’activités de découverte et d’ouverture– Enseignant référent : la place de l’enseignant n’en demeure pas moins centrale dansla mesure où elle dépasse largement les limites du temps de cours, et de la matière ensei-gnée… pour s’étendre à un rôle élargi et continu d’éducateur référent, voire qui évo-lue vers une relation s’apparentant à une sorte de tutorat.– Individualisation de l’élève : les techniques offrent la possibilité d’adapter l’ensei-gnement à la personnalité, aux attentes et orientations spécifiques de chaque élève.

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En conclusionL’ampleur de la consultation (10261 réponses) et la précision des questionnairespermettent de disposer de données extrêmement détaillées, et représentatives dela manière dont les différentes catégories d’acteurs vivent cette opération au quo-tidien. Que faut-il en retenir?Côté parents, on peut noter un fort attachement à une opération globalementbien perçue, et surtout jugée comme très utile – la maîtrise de l’ordinateur étant consi-dérée comme indispensable pour l’avenir professionnel de leurs enfants.Côté collégiens, il existe visiblement une certaine insatisfaction par rapport à uneutilisation des ordinateurs portables très majoritairement jugée comme beaucouptrop faible dans toutes les disciplines (mis à part la technologie). Les mesures derestriction mises en œuvre dans la quasi-totalité des établissements concourent éga-lement à une certaine banalisation de l‘ordinateur – celui-ci tendant à n’être plusconsidéré que comme une simple “fourniture scolaire”, au même titre que lesmanuels, par exemple.Côté enseignants, on peut considérer que l’opération a favorisé une “conversionnumérique” qui est maintenant très largement engagée – la quasi-totalité des ensei-gnants (93%) estimant que l’ordinateur a renouvelé, ou fait évoluer, la façon d’en-seigner leur discipline. Toutefois, certains freins subsistent: au-delà de quelques dif-ficultés strictement techniques, l’utilisation effective des ordinateurs des élèves posevisiblement des problèmes à l’école. Les enseignants reconnaissent pourtant trèsmajoritairement (64%) que l’utilisation d’un ordinateur à des fins scolaires appor-te “un plus” à tous les élèves, sans distinction de niveau. Ils notent également, dansdes proportions semblables (66%), qu’avec les ordinateurs portables, la motivationdes élèves s’est accrue.Côté personnel d’encadrement et de vie scolaire, on peut retenir que l’opérationgénère une surcharge de travail globalement bien assumée. À noter une perceptionnettement différente de celle des enseignants quant à l’intérêt potentiel des ordi-nateurs portables des élèves (cf. graphique A) et globalement une conscience aiguëdes enjeux du développement rapide de ces technologies pour l’école.

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TémoignagesPrincipaux de collège, enseignants, conseillers principaux d’éducation, assistants d’éducation Tice, parents d’élèves, ou anciens élèves, témoignent de la manière dont ils ont vécu l’opération.

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«-----L’arrivée des ordinateurs portablesa contribué à changer bien des choseset nous a apporté une nouvelledynamique.»Françoise Louison est principale du collège René Soubaigné, à Mugron-----Un portrait du collège de Mugron au début du printemps 2009?C’est un petit collège rural (210 élèves environ), au cœur de la Chalosse. Nous avonsici une qualité de vie remarquable, une population qui ne pose pas de problème etdes parents très proches de l’institution, ce qui nous permet d’avoir un très bon sui-vi de chacun de nos élèves. Et d’ailleurs, les résultats sont là : l’an dernier, nousn’avons eu qu’un seul échec au brevet des collèges!La tempête de l’hiver dernier, comme partout dans les Landes, a été ici très dou-loureusement ressentie : beaucoup de dégâts – dont le paysage va garder la tracedurablement – avec les fermes isolées, des arbres arrachés, des familles privéesd’électricité pendant près de quinze jours…

Votre regard sur l’opération “un collégien, un ordinateur portable”?À l’évidence, elle nous a apporté une nouvelle dynamique et nous a clairement per-mis d’entrer de plain-pied dans le 21e siècle : aujourd’hui, le collège est très différentde ce qu’il était il y a neuf ans, quand je suis arrivée! Grâce à ces outils, le travail enéquipe s’est développé: nous avons vu plusieurs enseignants motivés du point de vuepédagogique s’en saisir et avancer. Ils ont entraîné leurs collègues. Aujourd’hui dans la salle des profs, il est courant de s’échanger des documents, departager des expériences ; entre ceux qui sont plus “branchés” et ceux qui le sontmoins, la solidarité joue. Par ailleurs, quand certains élèves en savent plus que leurprofesseur sur le maniement des outils informatiques, les relations se modifient. Voilà des choses très positives. D’autres le sont moins: la banalisation de l’outil, parexemple. Au début, l’ordinateur avait quelque chose d’un peu magique, et on y fai-sait très attention, y compris à la maison. Aujourd’hui, les élèves, notamment ceuxde 4e, en prennent beaucoup moins soin. Du côté des familles, la majorité des parents témoignent volontiers de leur satisfaction,mais ils sont de plus en plus nombreux à nous dire que l’ordinateur de leur enfantdevient source de conflit : ils ont beaucoup de mal à contrôler ce qui se passe, ontl’impression que leur fils – ou fille – reste “scotché” sur ses jeux, ou sa messagerie,

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et que les résultats scolaires risquent d’en pâtir… Tout cela n’est pas facile, mais il fautfaire la part des choses: il est normal, je pense, qu’un adolescent cherche à acquérirune certaine indépendance, et je dis souvent que nos propres parents nous ontbeaucoup reproché d’abuser du téléphone!Est-ce que cela vaut vraiment le coup d’avoir des ordinateurs portables qu’on empor-te à la maison? Ne vaudrait-il pas mieux équiper des salles avec des ordinateurs fixes(d’autant plus que les familles sont de plus en plus nombreuses à disposer d’un ordi-nateur familial)? C’est une question que l’on peut se poser aujourd’hui. Je vois bienque les ordinateurs ne sont pas utilisés de manière systématique en cours, et il arri-ve que les élèves les transportent pour rien. Ce qu’il faut bien comprendre, c’estque l’ordinateur est un outil parmi d’autres, et que son utilisation relève légitime-ment du choix de chaque professeur.

Le cas particulier de la classe d’UPI ?Nous avons été le premier établissement landais à ouvrir une classe d’UPI. C’était en2000. L’année suivante, au démarrage de l’opération, nous avons décidé, avec leConseil général, d’équiper les élèves de cette classe au même titre que les autres col-légiens. Et nous nous sommes bien vite rendu compte que, dans ce cas, l’ordinateurportable est un vrai facteur de réussite! En premier lieu, parce que les élèves se sen-tent traités comme leurs camarades – et cette image positive les aide à s’intégrer.D’autre part, parce que l’ordinateur permet de gérer au mieux l’hétérogénéité dela classe – qui accueille des élèves de niveau scolaire très différents –, et la difficultéspécifique de chacun. Ils apprennent à s’en servir avec beaucoup de liberté, d’autantplus qu’ils n’ont pas de programme à respecter, ni d’examen en fin d’année.L’ordinateur permet à chacun de développer sa créativité, en même temps qu’ildéveloppe le goût du travail bien fait : les élèves entreprennent des recherches surinternet, ils font des petits reportages, des montages vidéo… Au bout du compte,ils ont progressé! C’est enfin un outil d’intégration et de reconnaissance: il leur per-met de présenter ce qu’ils ont fait à leurs camarades, à leur famille…

Cette dynamique, dont vous parliez à propos des débuts de l’opération “un collégien,un ordinateur portable”, semble ici continuer à jouer à plein. Avez-vous un secret?Il n’y a pas de secret, ou alors, il est assez simple: il faut être ouvert à tout, et quandvous avez des gens qui ont envie de faire des choses, il faut les aider. Si vous savezrester à l’écoute, et saisir les occasions qui se présentent, alors beaucoup de chosessont possibles. Je pense aussi qu’il faut être vigilant et mettre en place une gestiontrès rigoureuse. Vous en voulez un exemple? Si un ordinateur traîne sans surveillancedans le collège, l’objet arrive directement dans mon bureau. Et on laisse l’élève mijo-ter un peu, jusqu’à ce qu’il vienne lui-même me dire : “J’ai un problème…”Généralement, ils n’aiment pas trop! Notre assistante d’éducation Tice est, elle aussi,très ferme. Bref, nous ne laissons rien passer, et les élèves le savent !

Mugron, mai 2009

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-----Nous avons vécul’arrivée des ordinateurs portablescomme un évènement extraordinaire,un vrai cadeau qui a renduenfants et adultes heureux!»Jean-François Laroumagne et Virginie Gambier-Manceausont conseillers principaux d’éducation au collège Jacques Prévert, à Mimizan-----ÉmerveillementEn 2001, le collège Jacques Prévert s’était porté volontaire pour tester l’opération “uncollégien, un ordinateur portable”, pendant une année et en vraie grandeur, avantsa généralisation à l’ensemble des collèges publics du département. Nous avons vécul’arrivée des ordinateurs portables comme un évènement extraordinaire, un vrai ca-deau qui a rendu enfants et adultes heureux! Le jour où ces appareils ont été dis-tribués reste un très grand souvenir : c’était un moment vraiment très beau, et nousétions tout aussi émerveillés que les élèves… Par la suite, il y a eu très peu d’incidents par rapport à ce qu’on pouvait craindre, etaucun vol la première année. Un jour ou l’autre, quelques élèves ont bien sûr oubliéleur ordinateur dans une salle de classe, mais ils étaient très ennuyés en venant les ré-cupérer. C’est évidemment toujours difficile de juger du sens des responsabilités desélèves, mais je pense qu’ils avaient vraiment conscience de la valeur de ces ordinateurs.Ils étaient très fiers d’avoir des machines aussi performantes, et même ceux dont lesparents étaient déjà équipés percevaient le geste de confiance qui leur était adressé.Huit ans après, il y a un gros changement: l’ordinateur est vraiment rentré dans les faits.Les élèves de 4e ont encore un peu d’enthousiasme, mais ceux de 3e sont vraiment bla-sés. Les premières années, ils étaient vraiment attachés à “leur” ordinateur: pour eux,c’était un vrai cadeau. Maintenant, c’est un dû, et ils l’oublient plus facilement dansles couloirs. Le bon côté, c’est que des usages se sont installés, concrètement. L’une desambitions du Conseil général était la maîtrise de l’outil informatique par les petits Lan-dais. De ce point de vue, les progrès sont considérables: ici, le B2i est devenu une for-malité, notamment depuis que l’ordinateur est introduit dès la classe de 4e.

ÉducationQuand nous nous étions rencontrés, il y a huit ans, nous avions parlé des problèmesque nous rencontrions alors, et de quelques dérives qui étaient assez rapidement ap-

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parues : les jeux notamment. Ces pratiques ne sont d’ailleurs pas forcément répré-hensibles en soi, et elles étaient restées très marginales, même si nous avions surpris,à l’époque, quelques cas de connexions sur des sites illicites. C’était un vrai souci. Lescollégiens ont entre 10 et 16 ans ; ils sont dans une période très importante deconstruction de leur personnalité. Nous nous étions posé la question de savoir s’il étaitbien judicieux de laisser une si grande liberté aux enfants… La tentation est lourde,et on ne peut pas demander aux surveillants d’être toujours derrière les élèves. “L’éducateur est conservateur, disait Hannah Arendt, mais il ne doit pas être réac-tionnaire.” Notre rôle, en effet, c’est de transmettre des valeurs anciennes, et d’ap-prendre aux enfants à vivre dans le monde d’aujourd’hui. Les nouvelles technologiesfont partie de ce monde; c’est pour nous un défi à relever dans notre domaine decompétence : l’éducation, la citoyenneté. D’un côté, il faut que les élèves vivent ensemble, avec leur temps, mais en mêmetemps, nous devons être très vigilants. Et, comme on ne peut pas tout maîtriser, lameilleure réponse, c’est l’éducation, mais avec ses limites… On ne peut pas protégerles enfants de tout: nous faisons juste attention. Et, quand il y a eu dérive, le collègea réagi. Des sanctions ont été prises. Depuis le début, nous surveillons les usages nonscolaires des ordinateurs portables, et nous sommes très attentifs notamment à ceque nous disent les parents. Huit ans après, le problème s’est un peu déplacé, et l’ac-cès généralisé à internet a compliqué les choses: maintenant, les élèves passent,semble-t-il, davantage de temps à jouer, notamment à des jeux en ligne dont ils de-viennent parfois très dépendants. Ils y jouent chez eux, souvent en cachette, et en-suite, au collège, ils essaient par tous les moyens – quitte à le faire en cours – de trou-ver un moment pour le faire… Mais prévention et travail éducatif ne peuvent pas tout, et nous avons été obligésde mettre en œuvre des stratégies, notamment d’interdire l’accès à certains sites dansl’enceinte du collège.

FamillesUn des points extrêmement positifs de cette opération, c’est que l’ordinateur ne pro-fite pas uniquement aux collégiens de 3e et de 4e : il profite aussi aux frères et sœursplus jeunes qui sont parfois encore à l’école primaire. Quand le collégien rentre à lamaison, avec son ordinateur portable, il l’emporte dans sa chambre, et là, il y a le pe-tit frère ou la petite sœur qui viennent, et qui apprennent à faire des choses avec…Et l’on se rend compte, en parlant avec les élèves, que ce genre de pratiques est as-sez répandu… même si ce sont plus fréquemment des jeux que l’on partage, et nonles encyclopédies! Je parle ici en tant que parent d’élève: mon fils de six ans sait de-puis l’an dernier allumer l’ordinateur, entrer un mot de passe, choisir un programme,ce que son frère aîné ne savait pas faire à son âge, bien qu’il y eût déjà un ordina-teur à la maison, à cette époque.De notre point de vue, le bilan de l’opération est très largement positif: l’ordinateurest un outil extraordinaire, maintenant complètement intégré dans la vie du collège.

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Cette démocratisation, le fait que tous les élèves disposent de la même machine, c’estvraiment une bonne chose: nous sommes là pour assurer l’égalité des chances, etl’école a souvent bien du mal à le faire. C’est vrai, il y a encore du travail à faire pourbien utiliser ces nouveaux outils… Mais c’est la première pierre, et elle n’est pas simal posée que ça!

Mimizan, avril 2009

-----Nous faisons un vrai métierqui s’est créé dans chaque collège,en même temps que l’opérationun collégien, un ordinateur portable.»Arnaud Micaletti est assistant d’éducation Tice, au collège de Linxe-----Mon travail consiste à être là tous les jours pour les demandes quotidiennes, diffé-rentes, parfois inattendues. Pour moi, ce n’est pas possible de rester toujours dansmon bureau, je fais partie de la vie du collège, je partage ce que je sais faire… Jepasse plus de temps à discuter avec tout le monde qu’à m’occuper de gérer les pro-blèmes techniques. Ici, tous les profs sont utilisateurs: chaque fois que je rentre dansune salle de classe, le vidéoprojecteur et l’ordinateur de l’enseignant sont en fonc-tionnement…Quel avenir? Je considère avoir de la chance de travailler dans un collège où la cul-ture informatique est partagée et où les outils numériques sont utilisés: c’est vrai-ment motivant. Dommage que nous soyons sur des contrats précaires: je crains fortque tout cela ne soit condamné à s’arrêter. Ça me désole, vraiment. Pourtant, ce quenous faisons, c’est un vrai métier, qui a été créé dans chaque collège par le Conseilgénéral, en même temps que l’opération “un collégien, un ordinateur portable”.Sept ans après, on voit bien que nous avons une vraie utilité: nous aidons tout le mon-de, à tous les niveaux – y compris pour le CRIA1, qui intervient beaucoup moins dansles Landes en raison de notre présence. De la même façon qu’il existe des personnesqui s’occupent de la maintenance du collège, réparent les gouttières, etc., nous fai-sons partie du maintien de tout le système informatique, et nous avons une place àpart entière dans notre collège.

Linxe, janvier 2009-----

1 Les CRIA (centres relais informatiques académiques) assurent des missions de diffusion des logiciels, de

suivi technique, d’assistance technique et fonctionnelle, de formation, auprès des établissements scolaires.

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-----J’ai passé beaucoup de tempsà former les professeurs:ce sont eux qui décidentde l’utilisation des ordinateurs.J’ai envie qu’ils apprennent…et je suis patient!»Philippe Guilbaud est assistant d’éducation Tice au collège de Labenne-----Notre première mission, c’est de gérer le parc informatique mis à disposition des col-lèges par le Conseil général : quand une machine tombe en panne, nous appliquonsune procédure pour la faire réparer. Mais, au-delà de cet aspect purement tech-nique, notre fonction s’est tacitement étendue à l’accompagnement de l’utilisationdes outils informatiques.Quand je suis arrivé ici, il y a quatre ans, les locaux et le matériel étaient tout neufs.J’ai trouvé une équipe nouvelle, très enthousiaste : il y avait de l’envie, et de lademande. Ça m’a plu, et ça a bien fonctionné entre nous! Au début, j’ai passé beau-coup de temps à former les professeurs: ce sont eux qui décident de l’utilisation desordinateurs. J’ai envie qu’ils apprennent… et je suis patient! Même avec eux, il fautêtre pédagogue… En informatique, je sais faire des choses, mais je n’ai pas la scien-ce infuse. Si on me lance un défi, je cherche des solutions, et quand j’ai trouvé, j’es-saie de transmettre ce que j’ai appris. C’est comme cela que nous nous sommes misau montage vidéo, en partant de zéro. Nous avons fonctionné de la même façon pourtout ce qui est multimédia.On dit souvent que les élèves n’ont aucun problème avec les ordinateurs, mais c’estune idée complètement fausse! Ils n’ont pas d’appréhension avec l’outil, mais dès qu’ilsdoivent faire une manipulation précise, comme par exemple créer un dossier à uncertain endroit sur le réseau, il faut tout leur apprendre. Pour eux, avant d’arriveren 4e, l’ordinateur, c’est avant tout un objet ludique: ils savent utiliser MSN, le melet internet – voire installer un jeu –, mais ça se limite à cela! Sur 200 élèves, je diraisqu’ils sont une vingtaine à se débrouiller très bien. En début d’année, je leur apprendsquelques bases… J’aimerais bien aller plus loin, mais ce n’est pas vraiment possible,par manque de temps. Je suis également à l’origine de la mise en place de l’intranet du collège. Au pointde départ, j’avais besoin d’une console de gestion technique du parc machines. J’ai

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donc créé un site interne pour répondre à cette fonction. Puis je me suis rendu comp-te qu’on produit ici beaucoup de choses, qui bien souvent restent invisibles. L’idéem’est donc venue d’étendre ce site et d’en faire une plate-forme d’échanges surlaquelle on pourrait archiver une grande quantité de données. L’un de mes col-lègues m’a alors prêté main-forte, et nous avons mis en place l’intranet du collègeaccessible à tous, professeurs, élèves et personnel administratif. C’est un site parti-cipatif, avec un espace professeur et un espace administrateur. Il présente une syn-thèse de toute cette masse d’informations qui circulent dans le collège: on y trouvetous les liens utiles dans chaque matière, ainsi que tout ce qui concerne le B2i, Illias,bcdi, le Défi lecture, etc. Le responsable de la cantine y publie les menus en tempsréel ; un professeur de géographie y dépose certains travaux de ses élèves; en artsplastiques, nous avons commencé un “musée virtuel”… On y présente aussi tous lesdocuments produits à l’issue des IDD, comme ce “JTL” (journal télévisé de Labenne),que nous avons tourné et monté, dans le cadre du club vidéo. Quant aux statis-tiques, elles affichent plus de 22000 connexions depuis que l’intranet est en ligne,c’est-à-dire un an.Nous cherchions comment convaincre les quelques professeurs encore réticents àutiliser leur ordinateur portable, au moins pour consulter leur courrier électronique.Nous avons décidé que le relevé des absences ne se ferait plus sur un papier que l’onaccroche à la porte, mais en temps réel, sur l’ordinateur. Tous les professeurs doiventdonc apporter leur ordinateur chaque matin. Ça marche, et finalement ils se rendentcompte qu’ils gagnent du temps!

Labenne, avril 2008

-----Quand le projet du Conseil générals’est dessiné, nous avons été une pre-mière équipe d’enseignants à nousporter volontaires aussitôt.»Jean-Marc Darrigan est professeur de SVTau collège Serge Barranx, à Montfort-en-Chalosse-----Vous faites partie des premiers enseignants à avoir utilisé l’ordinateur en cours…Je m’intéressais à l’informatique bien avant que l’opération “un collégien, un ordi-nateur portable” soit mise en place. Quand l’outil est apparu, en 1987, nous avonsété plusieurs collègues à penser que l’important, c’était de travailler sur l’interface:nous cherchions à bran cher des instruments sur l’ordinateur, pour faire des relevés.

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C’était ce que nous appelions l’Exao (expérimentation assistée par ordinateur).Plusieurs de nos expériences de ce type ont été primées… Quand le projet du Conseilgénéral s’est dessiné, nous avons été une première équipe d’enseignants à nous por-ter volontaires aussitôt: nous voyions bien que ces outils per mettaient beaucoup dechoses en pédagogie – ce qui s’est d’ailleurs révélé exact! Huit ans après, je peux direque globalement, ça se passe bien.

Comment utilisez-vous les ordinateurs portables, aujourd’hui?En SVT, l’ordinateur permet l’accès à l’actualité scientifique: aujourd’hui vous trou-vez faci lement sur internet les données du dernier tremblement de terre. Je voismes élèves réaliser des supports de présentation (diaporamas, site web, etc.) degrande qualité. Et ils trouvent tout cela normal! J’incite mes élèves à travailler surDreamweaver (logiciel de conception de site web). C’est d’ailleurs sur ce logiciel quetous mes cours sont préparés. Il est gratuit, et lisi ble sur tous les types d’ordinateurs.Quand ils utilisent Word, les élèves ne se rendent pas compte que quelqu’un a payéune licence : pour eux, c’est gratuit…Quand ils s’engagent sur une recherche, les élèves s’habituent à travailler ensemble.Chacun part dans une direction différente, et à la fin, ils mettent tout en commun.Voilà un autre intérêt des ordinateurs personnels. C’est l’idée du réseau: chacungarde une autonomie, avec la possibilité d’échanger (bien évidemment, ils savent aus-si échanger autre chose que des documents de travail). Avant, les élèves disposaientde leur manuel scolaire et des ressources du CDI. Aujourd’hui, les ordinateurs ouvrentsur une telle masse d’informations qu’il faut absolument apprendre à les sélection-ner. Nous pouvons leur montrer comment repérer celles qui ne sont pas très sûres,leur apprendre à recouper… Ils savent déjà, en cinquième, modifier le contenu dublog du collège.

Quel est votre regard sur l’opération, avec le recul de huit années de pratique?Si je compare avec ce que j’ai vécu il y a huit ans, je peux dire qu’au début, les élèvesn’étaient pas très à l’aise (et d’ailleurs, personne ne l’était vraiment), alors que main-tenant, ils le sont trop! Aujourd’hui, par exemple, les élèves maîtrisent parfaite-ment la logique du réseau: ils vont chercher sans problème des documents sur le ser-veur du collège… C’est une chose qui n’a l’air de rien, mais je me souviens que, dansnotre première salle informatique, nous avions une imprimante par ordinateur! Lebémol, c’est que d’autres problèmes sont apparus. Et tout dépend maintenant de lafaçon dont on va les résoudre. Si l’outil pouvait se scinder en deux parties, l’une quiserait réservée exclusivement à la pédagogie, sous contrôle de l’équipe pédago-gique et du collège, et l’au tre, pour un usage libre, à la maison…

Une double partition, en quelque sorte?Oui, c’est exactement ce qu’il faut faire. Et il faut absolument s’y mettre sans tarder,sous peine de se retrouver devant des problèmes qui vont nous submerger. Le prin-

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cipal frein, non avoué, à l’utilisation des ordinateurs, c’est que les collègues sontconscients de ne pas pouvoir maî triser, sur un groupe de trente, ce que font réelle-ment les élèves. Pour ce qui me concerne, j’aurais besoin, à certains moments, d’unoutil qui me permette de bloquer tous les ordina teurs! Sur huit ans, les élèves ontévolué très rapidement: au début, c’était souvent le premier ordinateur qui entraità la maison. Et même nous, qui avions investi, à cette époque, sur des machines auprix exorbitant, nous ne disposions pas d’ordinateur portable!Par ailleurs, le choix d’employer, dans chaque collège, une personne dédiée à lamaintenance tech nique des ordinateurs et du réseau a été décisif.

La question se pose aujourd’hui de savoir s’il convient ou non de maintenir la miseà dis position d’un ordinateur portable à chaque élève… Qu’en pensez-vous?Selon moi, il ne faut pas lâcher! De toute façon, on ne peut pas revenir en arrière…Mais il faut trouver comment résoudre les problèmes qui surgissent aujourd’hui:ceux qui dirigent l’opération doivent être bien conscients que nous ne pourronsplus gérer certaines dérives… Avec cette technique des doubles bureaux qui s’est main-tenant généralisée, vous ne pouvez rien faire! Vous avez beau circuler dans la clas-se, dès que vous avez le dos tourné, les élèves ne se gênent pas. L’alerte est forte: àpartir du moment où vous sentez que vous ne maîtri sez plus la situation, vous êtesenclin à dire: “Je me mets en danger, donc j’arrête!” Un cer tain nombre d’enseignantsen sont là. Déjà, si vous ne savez pas résoudre les petits problèmes techniques quine manquent pas de surgir ici ou là – un élève ne parvient pas à se connecter sur leréseau, etc. –, vous êtes bloqué. Si, en plus, les élèves décident qu’ils vont faire autrechose… vous n’avez aucun moyen de contrôle.

Montfort-en-Chalosse, mai 2009

-----La réalité est un peu différentede ce que nous avions imaginé,mais tout aussi intéressante.»Monique Marrocq est professeur d’histoire et de géographieau collège Serge Barranx, à Montfort-en-Chalosse-----Pionnier?Oui, c’est un mot qui me convient! Je me souviens de mes premiers pas avec l’ordi-nateur. C’était à peine un an avant la rentrée 2000, je ne savais même pas taper à lamachine! À cette époque, on ne parlait pas encore d’internet. En dix ans, tout a com-

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plètement changé… Nous ne savions pas du tout vers quoi nous allions: à l’aube d’unetechnique nouvelle, on ignore tout de ce qu’elle va provoquer. Ce qui nous sautaitaux yeux, c’est que c’était un formidable outil de communication. Nous pensions pou-voir organiser certains de nos cours de manière décentralisée, avec des objectifsadaptés à chaque groupe d’élèves, peut-être répartis en des lieux différents…

Utopies?Oui, nous avions des rêves… La réalité est un peu différente de ce que nous avionsimaginé, mais tout aussi intéressante. Ces nouvelles technologies ont introduit deschangements que nous avons été les premiers à aborder. Nous avons au début affron-té les difficultés techniques (pas toujours faciles à gérer…) mais très vite nous avonscompris qu’en introduisant largement le monde extérieur à l’intérieur de l’école, cestechnologies amenaient aussi des changements pédagogiques dans les disciplines,et nous avons eu le désir de poursuivre. Cependant, parce que ces techniques ont trans-formé notre manière d’enseigner, elles génèrent aussi de grandes inquiétudes: leurévolution rapide nous bouscule et multiplie nos responsabilités. Si les contraintes quis’imposent à nous ont sans doute freiné certaines expérimentations, ces techniquesrestent toujours porteuses de grands changements potentiels.

L’école est encore un lieu matériellement clos, pourtant tenu d’ouvrir les élèves surla société et le monde. D’où la formidable opportunité offerte par les ordinateurset internet à l’école ! Mais, de même que le monde ouvre les frontières tout enconstruisant des murs, de même que notre société libérale multiplie les interdic-tions, de même nous devons inventer et constamment surveiller un fragile équilibreentre le virtuellement possible et les obligations scolaires. Nous avons été obligés d’im-poser des filtres et des interdits pour éviter des dérives comme la diffusion de vidéospornographiques. Parmi les problèmes qui grossissent aussi comme un levain, il fautévoquer la pratique des jeux pendant la classe: des dispositifs techniques de contrô-le des écrans existent, mais les élèves sont habiles à déjouer la surveillance des adultesy compris par des changements instantanés de bureau… Si la majorité d’une classechoisit de contourner les règles, la tâche de surveillance empiète trop sur le travailpédagogique. Il est urgent actuellement de réfléchir à des parades efficaces et de sedonner les moyens de faire appliquer des règles communes garantes d’un travail pro-fitable. Il faut continuer à dire le droit, à le faire évoluer et à l’appliquer.

C’est l’apprentissage des limites de la liberté individuelle devant la loi qui est en jeumais aussi la nécessaire distinction entre les domaines privés et publics (ici scolaire)..Je suis aussi frappée par le mélange des données personnelles et des documentsscolaires dans les ordinateurs alors qu’il serait si facile de classer! Il y a dix ans, je disaisaux élèves : «Votre cahier de textes est public, je dois pouvoir le consulter sans tom-ber sur la photo de votre copain ou copine, je n’ai pas à donner d’avis sur votre vie

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privée.» Aujourd’hui tout se confond: cela montre peut-être que le travail scolairen’est pas prioritaire pour un certain nombre de collégiens et cela amène surtout laconfusion entre un sentiment ou une opinion et le savoir. L’accès facile à n’importequelle opinion ou information par internet aggrave cette confusion. Parce qu’ils’agit d’un problème qui a gagné l’ensemble de notre société, il est particulière-ment difficile à combattre à l’école.

Le positif ?C’est que nous sommes dans le siècle! Nous utilisons tous les outils dont la plupartdes élèves disposent chez eux, et une adaptation rapide de l’école était indispensable.Si nous nous étions fermés à ces technologies, nous aurions été bien vite dépassés.Le positif, ce sont aussi des avantages pédagogiques, et notamment un accès facili-té au travail collectif : pouvoir compléter son travail par celui d’un camarade, pou-voir projeter au tableau sa production et la corriger en commun, récupérer indivi-duellement un travail réalisé à plusieurs… Les outils numériques permettent aussi àl’enseignant d’être plus disponible dans la classe donc plus proche de chaque élèvedont l’activité devient plus autonome.Enfin, ils améliorent sensiblement la trace des cours: l’élève peut voir et revoir, si besoinest, ce qui a été fait en classe grâce à l’enregistrement des principales étapes de laséquence sur son ordinateur. C’est une mémoire vivante, complète et toujours dis-ponible chez lui.

En Histoire géographie particulièrement, on utilise l’interactivité que permet le cou-plage de l’ordinateur avec le tableau numérique: pouvoir travailler directement surdes photographies facilite la lecture et l’explication des paysages, pouvoir fairerevivre le passé par des vidéos d’archives capte l’attention et facilite la mémorisation,tout en ouvrant de nouveaux horizons pédagogiques: il s’agit d’apprendre à trier dansla masse d’informations accessibles les plus fiables, il s’agit de ne pas rester passifsdevant des quantités d’images qu’il faut parvenir à décrypter.Cet outil, qui permet de naviguer dans le monde avec toutes ses richesses et sesfolies, nous rappelle fortement combien l’adulte doit être présent aux côtés de l’ado-lescent pour l’aider à trouver ses repères et à faire ses choix.Bref, quand on demande aux enseignants: «Accepteriez-vous de ne plus avoir d’or-dinateur?», la réponse est non!

Je voudrais ajouter que le Conseil général nous a offert des outils très performants,en nous donnant accès à l’Ina, à lesite.tv, et en installant sur nos ordinateurs des ency-clopédies très complètes, y compris l’Universalis! Voilà un investissement lourd maistrès utile, dont les collégiens landais ont été les premiers à bénéficier.

Montfort-en-Chalosse, mai 2009

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-----C’est un outil très attractif, qui attireles frères et sœurs plus jeunes; et ilspartagent assez volontiers…»Frédérique Lemont est mère de quatre enfants, dont deux sont au collège de Ro-quefort : l’un en 3e et l’autre en 6e, et représentante de la FCPE (Fédération desconseils de parents d’élèves des écoles publiques) au conseil d’administration del’établissement.-----Quelle perception avez-vous de l’utilisation des ordinateurs au collège?Il me semble que les choses évoluent. Alors que ma fille aînée, maintenant au lycée,ne s’en servait que par intermittence, pour mon fils, ça devient systématique danscertaines matières. Quand c’est le cas, j’ai vraiment un retour positif. Ce qui leur plaîtle plus, ce sont les échanges d’informations et de documents, cette interactivité quis’installe entre élève et professeur. Le réseau du collège, c’est vraiment un lien trèsfort; ils m’en parlent souvent. Mon fils se déclare également très satisfait du nouveaumatériel mis en service cette année: les ordinateurs sont, de son point de vue, plusperformants, et les nouvelles housses plus faciles à utiliser!

Et à la maison?Eh bien, de la même façon que nous avions notre bouquin, ils ont systématiquementleur ordinateur portable ouvert sur le bureau. C’est un outil très attractif, qui attireles frères et sœurs plus jeunes; et ils partagent assez volontiers… Je peux vous direque, dans la famille, les cousins qui ne sont pas dans les Landes regardent tout ça avecenvie. Et, pendant les vacances avec eux, l’ordinateur portable est très sollicité…

Pour vous, le bilan est donc positif?Bien évidemment! Au-delà de mes propres enfants, ce que j’ai beaucoup appréciéavec cette opération, c’est que tous sont maintenant au même niveau d’équipement.Nos enfants sont d’un milieu familial qui leur permettait déjà l’accès à un ordinateur,mais nous avions perçu un très gros décalage par rapport à certains de leurs copainsqui venaient à la maison. Là, en 4e et en 3e, ils se retrouvent à égalité, et c’est unechose que je trouve formidable.Et l’informatique – qu’ils considéraient auparavant un peu comme un jeu – est de-venue pour eux un outil comme un autre; ils ont le réflexe de s’en servir… Quandnotre génération avait le dessin, ils ont maintenant la photo numérique ou le mon-tage vidéo, et ils exploitent tout cela d’une manière très naturelle.

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Faites-vous partie de ces parents qui disent: “c’est une complication de plus à gérerpour nous, et nous ne sommes pas préparés à cela”?Nous devons être conscients du monde dans lequel vivent nos enfants, mais on nepeut pas les mettre sous cloche! C’est à nous de leur apprendre à se gérer de ma-nière raisonnable… Mon seul gros regret, c’est que les ordinateurs n’aient pas en-core diminué le volume de manuels et de cahiers que nos enfants doivent transpor-ter chaque jour dans leur cartable…

Roquefort, mars 2009

-----Nous étions les premiersà avoir un ordinateur portabledans un collège des Landes!»Ils étaient élèves de troisième, en 2001-2002, dans l’un des trois collèges “tests” avant la généralisation de l’opération “un collégien, un ordinateur portable”. Retour sur cette année pas tout à fait comme les autres avec Lisa Poudou qui termine un DUT “Techniques de commercialisation”, et Thomas Mesa qui est en première année de droit.-----Cette première année avec les ordinateurs portables?Lisa Poudou (LP) : Nous étions les premiers à avoir un ordinateur dans un collège desLandes! Je me souviens de Hugo et Charlotte, de Sylvie, d’Anaïs et de Romain…Nous étions contents! À l’époque, il y avait déjà un ordinateur à la maison: j’ai com-mencé à m’en servir quand j’avais dix ans. Mais je me souviens très bien que, pourcertains de mes camarades, celui-là était le premier.Thomas Mesa (TM): Super-excités: c’était une chance terrible! Un ordinateur portable,c’est spécial, très différent d’un fixe. Nous étions très fiers d’avoir un ordinateur à nous,et nous y faisions très attention – surtout au début…Quel usage faisiez-vous de l’ordinateur en classe?LP : Je me souviens qu’en histoire-géographie, nous avons vraiment utilisé l’ordina-teur tout de suite, et beaucoup. On se servait d’un traitement de texte, on allait cher-cher de l’information sur internet. Tout ça rendait le cours très animé. En français,nous avions la possibilité de saisir au clavier et de mettre en pages nos rédactions surl’ordinateur.TM: L’ordinateur servait beaucoup en espagnol. Nous avions un dictionnaire que nouspouvions compléter nous-mêmes. Nous allions chercher dans l’internet des bandesdessinées, comme Mafalda. Nous écoutions des chansons que le professeur nous

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envoyait sur le réseau. En musique, nous nous entraînions à jouer de la flûte avec leson en “play-back”. Nous utilisions aussi un logiciel qui permet de modifier les fré-quences des sons… En histoire-géographie, nous cherchions les éléments pour fairedes exposés. Internet nous fournissait aussi les traductions de nos versions latines…Avez-vous l’impression d’avoir progressé, cette année-là, dans la maîtrise de l’ordi-nateur?LP : Oui ! Le fait de disposer des portables nous a permis de commencer à apprendrepar nous-mêmes: à la fin de l’année, nous avions l’impression de vraiment maîtriserl’outil… même si je me rends compte maintenant que nous étions encore loin d’enavoir exploré toutes les possibilités!Les ordinateurs ont mis de l’ambiance, c’est sûr! On pouvait tout faire, avec…, ilsn’étaient pas bridés. Je garde de cette époque plusieurs CD remplis de tout ce quevous voulez, sauf des cours! À partir du moment où nous avons trouvé comment com-muniquer entre nous en utilisant les adresses IP, c’était terrible ! Quelques profsessayaient bien de gérer plus ou moins tout ça, mais nous avions pigé bien avant eux!C’était “l’année test”, quoi! Et l’informaticien [l’aide-éducateur, ndlr], c’était notrecopain… Maintenant, je ne crois pas que tout ça soit encore possible.Et puis, il y a eu la découverte d’internet… et des jeux. À partir de cette année-là,j’ai commencé à écouter de la musique avec des fichiers MP3, à imprimer des imagespour les coller sur les murs de ma chambre. Bref, on a eu accès à beaucoup de choses.Nous nous sommes familiarisés avec l’outil informatique, en tant que tel et danstoutes ses dimensions! Et, comme c’était un portable, je l’emportais partout avec moi…même en vacances!TM: Ces machines étaient vraiment les nôtres; nous voulions tous les customiser: notrepremier travail, c’était de changer le fond d’écran. Je me souviens de nos échanges:tout le monde “bidouillait” plus ou moins, et comme nous avions tous les mêmes ordi-nateurs, on s’entraidait. Dès que nous étions en étude, hop! on allumait nos portables,et on se mettait en réseau pour faire nos petits trucs entre nous… Nous apprenionsensemble. Le grand jeu, c’était d’essayer de trouver comment passer au travers dusystème pour parvenir à télécharger des musiques… C’était interdit par le règle-ment du collège, bien sûr! Je me souviens avoir farfouillé dans mon ordinateur:j’allais au fin fond du machin, pour voir. C’était génial! C’est là que j’ai vraiment apprisla configuration de l’ordinateur, son maniement, etc.Des effets négatifs sur la qualité de votre travail en classe?LP : Bien entendu, nous parvenions de temps en temps à “bluffer” certains profs età communiquer entre nous pendant leurs cours. Je sais aussi que certains faisaientle choix de jouer à Pacman au lieu d’écouter le cours d’histoire, mais tout ça restaitquand même relativement marginal… En ce qui me concerne, je pense avoir large-ment profité de cet ordinateur, sans pour autant en avoir été pénalisée par la suite.TM: Les effets sur notre travail? Je ne sais pas… D’un côté, je dois dire que plusieursd’entre nous passaient leur temps à jouer pendant les cours, surtout à la fin de l’an-née…, mais d’un autre côté, les ordinateurs rendaient notre travail plus attractif.

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Finalement, l’ordinateur ne m’a pas empêché d’avoir le brevet à la fin de l’année, nide poursuivre mes études plus tard!À l’époque, que pensaient vos parents?LP : Je ne pense pas qu’ils aient été trop inquiets. Mais j’ai entendu bien des fois:“Lâche-le, cet ordi!” Normal, bien sûr : il faut reconnaître que c’est assez prenant!TM: Pendant une certaine période, ça ne leur plaisait pas trop de voir que je préfé-rais jouer en réseau avec mes copains plutôt que d’aller me baigner! Mais je n’ai jamaisété vraiment accro…Que s’est-il passé par la suite?LP: Nous avions de bons ordinateurs, alors forcément, quand je me suis retrouvée avecmon vieux “tracteur” d’avant, le portable m’a quand même manqué… Mais, aulycée, tout change: on a de nouveaux professeurs, une nouvelle manière de faire,on pense à autre chose.TM: Pendant un moment, le bruit a couru que nous aurions la possibilité de rache-ter nos ordinateurs à la fin de l’année. Finalement, nous avons dû les rendre… J’aicontinué à utiliser l’ordinateur de la maison pendant mes années de lycée. Et, depuisque je suis à la fac, j’ai un ordinateur portable: c’est devenu indispensable.Passez-vous encore beaucoup de temps sur l’ordinateur?LP : J’allume systématiquement l’ordinateur le soir, quand je rentre chez moi. Il faitpartie de ma vie, bien au-delà des loisirs. Par exemple, quand j’ai voulu choisir uneorientation à la fin de mes deux années de fac, et savoir quelle formation, dansquelle ville, et dans quelles conditions, puis trouver la description des entreprises aveclesquelles je pouvais envisager un stage…, j’ai tout fait sur l’ordinateur, de A jusqu’àZ, jusqu’au dossier d’inscription. Mais passer un après-midi enfermée devant mon écranalors que j’aurais la possibilité de faire autre chose, ce n’est pas du tout mon genre!TM: Pendant mon année de troisième, j’ai passé une bonne partie de mes soirées surl’ordinateur. À la sortie du collège, nous étions contents de nous retrouver tous,pour tchatter. C’est un peu pareil aujourd’hui : mon portable est très souvent allu-mé! C’est un moyen de communiquer. Je m’en sers tous les jours pour donner ren-dez-vous à mes amis… pour aller faire du sport, par exemple!Quelque chose à ajouter?LP : De mon point de vue, tout ça a été très positif, pour moi et pour tous mes cama-rades de classe. Mais si, aujourd’hui, on bride les ordinateurs au motif que ce sontuniquement des outils de travail, pourquoi ne pas faire des salles d’informatique com-me nous en avons à l’université, avec des ordinateurs fixes, un écran sous le plan detravail, et tout ce qu’il faut pour s’en servir? Si finalement l’ordinateur n’est plus qu’unsimple outil de travail, quel est l’intérêt que chaque collégien dispose de son portable?Quand je vais chercher mon frère au collège, je vois certains de ses camarades quise promènent avec leur ordinateur en vrac… Je me rappelle que moi, je n’avais pasdu tout envie que mon ordinateur tombe en panne, ni que mon disque dur flambe– avec tous les documents personnels qu’il contenait! Et je n’étais pas la seule dansce cas. Maintenant, ça doit leur être bien égal de perdre le manuel de latin!

Saint-Paul-lès-Dax, mai-juin 2007

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Regarder voir…Quand un ordinateur est ouvert devant chaque élève, l’or-ganisation, le fonctionnement et l’ambiance de la classe chan-gent. Forcément… Quelle que soit la matière enseignée, lesgestes, les comportements, les habitudes de travail – et mêmela manière dont le professeur se positionne et se déplace –ne sont plus tout à fait les mêmes. Pourtant, au fil des reportages dans tel ou tel collège, re-viennent les mêmes images, les mêmes situations. Nouvelleset déjà récurrentes… Allumer les ordinateurs, s’absorber de-vant les écrans, collaborer, écrire au clavier… Regarder voir.Voici quelques images de la vie au collège, “avec ordinateursportables”, aujourd’hui dans le département des Landes.

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Vous pouvez allumer vos ordinateurs…»

C’est une évidence: ils aiment! Pour faire chic, on parle d’ap-pétence. De toute façon, elle crève les yeux, cette inclinationparticulière des collégiens à se servir de leurs ordinateurs.À preuve, le moment d’excitation très particulière qui saisitune classe dès que le professeur prononce la formule rituel-le : «Vous pouvez allumer vos ordinateurs!» Instantanément,on s’ébroue. On plonge sous la table pour récupérer l’objet,on farfouille à la recherche d’une borne pour brancher le câbled’alimentation et se connecter au réseau… Parfois, un«glong!» impérieux s’échappe d’une machine, désignant l’élè-ve distrait qui a oublié d’en couper le son. Brouhaha, certes,mais plutôt tonique: l’action libère les énergies. Bien enten-du, le professeur veille: ces quelques instants volés aux tempsordinaires sont toujours surveillés, mais les habitués vous lediront : « ils n’exagèrent pas…» Et d’ailleurs, dans cette ef-fervescence active, le souci d’efficacité est très présent. Non,ce n’est pas le grand bazar redouté, c’est un avant-goût, uneattente. Une joie.

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ConcentrationLes yeux sont fixes. Le regard plonge très loin dans la pro-fondeur de l’écran. Non, ils ne jouent pas: ils travaillent! Im-possible de les distraire de cette tâche qui focalise toute leurattention. Réflexion, interrogation, hésitation, doute… On litsans peine, sur leurs visages, toute une variété d’émotions quise succèdent en vagues, comme des nuages dans le ciel. In-discutablement, il se passe des choses! Dans ces moments-là, hormis quelques exclamations de dépit (ou de jubilation)échappées ici ou là, on pourrait entendre (s’il y en avait) lesmouches voler…«Un des intérêts des ordinateurs personnels, c’est que lesélèves ne subissent pas: ils participent vraiment…», disait unenseignant. Participer: prendre part à l’action. Ou plus exac-tement, dans ce cas précis, à l’interaction entre ce que l’onfait et ce que l’on voit à l’écran. Mais ces instants d’intenseconcentration ont un temps: dans quelques minutes viendracelui, collectif, de la “mise en commun”, nourri de l’expériencesingulière et solitaire de chacun.

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CollaborationsMoi, je sais faire, toi non… Mais dès l’instant que les ordi-nateurs sont en jeu, pas question de laisser mon voisin pa-tauger, et si tu tournes ta machine vers moi pour me demanderde l’aide, je n’hésiterai pas à intervenir sur ton clavier. Spon-tanément, la collaboration s’organise: nous voilà deux à re-garder ensemble le même écran, ce qui se passe là nous amè-ne à parler. On conjecture ensemble, on agit ensemble, on ap-prend l’un par l’autre.L’ambiance de la classe, dans ce genre de situation, devientvite celle d’un atelier, parfois un peu animé… Pourtant les en-seignants apprécient, et même encouragent ce genred’échanges “de pair à pair”, en proposant régulièrement à leursélèves de travailler en autonomie, ou en petits groupes: «Lesélèves qui s’en sortent bien sont des aides précieuses pour moi;ils rayonnent autour d’eux», remarque par exemple ce pro-fesseur d’histoire et de géographie.

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Toujours volontaires!Plus de la moitié de la classe qui lève le doigt pour aller autableau, quelle que soit la discipline, le niveau, le sujet, oumême la difficulté de la question posée… Non, ce n’est pasun rêve de prof, c’est l’effet, bien réel, du “tableau numériqueinteractif”, qui renvoie le classique tableau blanc à sa plateinertie d’objet inanimé.Le tableau interactif, c’est un écran tactile grand format, re-lié à l’ordinateur du professeur. Il tire son nom de son éton-nante faculté à interagir avec n’importe quel utilisateur – etnotamment l’élève désigné pour le piloter – dans une sortede dialogue homme machine très particulier. Écrire, cliquer,pointer, naviguer… Tout ce qu’il est possible de faire du boutdes doigts avec un clavier et une souris l’est aussi sur ce ta-bleau. La différence est une question d’échelle: là, debout dansla lumière et sous le regard de tous, le corps entier est en-gagé, et la moindre action devient une petite performance dontcertains se tirent avec panache. Maladresse? Gaucherie?Manque d’expérience? Les copains sont toujours là pour voustirer d’affaire.«Tout nouveau, tout beau, ne manqueront pas de dire cer-tains Cassandre : ce changement de comportement, qui fa-brique autant de volontaires pour aller au tableau n’auraqu’un temps…» Il semblerait pourtant que ce soit bien lecontraire qui se produise, et les enseignants qui ont adoptécette version numérique du tableau noir depuis plusieurs an-nées attestent que l’appétit de leurs élèves ne faiblit pas…

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ScénographiesQue se passe-t-il, dans une classe, quand tous les élèves tra-vaillent chacun devant son ordinateur? «L’écran fait écran»,disent certains. Le bon mot est commode, tant il fait surgir l’idéed’une coupure de la communication, d’un repli individuel, voi-re d’une perte d’attention. À y regarder de plus près, on com-prend vite que c’est tout autre chose qui se passe: dès que leprofesseur cesse d’être au centre de l’action, il quitte son bu-reau pour aller vers ses élèves. Alors s’engage une série depetites consultations particulières. Quelqu’un lève le doigt ouse signale pour demander de l’aide. La question est toujoursurgente; elle porte ici sur un détail, là sur un problème de fond.Quelque chose de spécifique doit être résolu ou expliqué, iciet maintenant. Dépanner, donc, mais aussi encourager, orien-ter, aiguiller… Toutes les nuances de la psychologie et de lapédagogie trouvent ici matière à s’exprimer. Dialogues sansface-à-face – c’est l’écran qui focalise l’attention – mais situationsintenses, souvent. Avec le changement d’orientation des regards, c’est la scé-nographie de la classe qui a radicalement basculé.

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ClavierC’est leur ordi, et ils l’ont bien en main. Alors, quand ils po-sent leurs doigts sur le clavier, c’est l’infinie variété des per-sonnalités qui s’exprime. L’un place ses poignets bien à platsur le rebord de la table, l’autre préfère laisser ses mains flot-ter au-dessus des touches, tandis que le troisième semble abor-der son clavier en douce, comme par en dessous, poignets etavant-bras enfouis sous le bureau…Mais, par-delà les singularités, le fait générationnel qui unittous ces adolescents, c’est leur dextérité. Rapidité, souples-se des doigts qui connaissent l’emplacement de chaque lettre,chacun maîtrisant une portion du territoire; des doigts quise plient, reculent ou se tendent, sans hésiter, toujours en aler-te, prêts à intervenir, en rafale, à la moindre sollicitation. Lepouce se réserve souvent le toucher – frôler, caresser, glisser…– du trackpad, mais pas systématiquement.Bien loin de la pratique enseignée autrefois dans les écolesde secrétariat, où l’on apprenait “le bon usage” du clavier, cet-te multiplicité de gestes traduit un vrai rapport charnel, nour-ri d’une authentique cohabitation avec la machine. Et une siévidente familiarité, que tout semble parfaitement naturel.

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PersonnalisationEn début d’année scolaire, tous les ordinateurs sont identiques:même marque, même modèle protégé par la même housse…Mais cette banalisation ne va pas durer. C’est mon ordi ! Il estunique, et cela doit se voir. La tâche la plus urgente – pourle reconnaître, et pour s’y reconnaître –, c’est évidemmentd’installer son fond d’écran. L’affaire est d’importance, carun fond d’écran, c’est une petite vitrine ambulante: on en estfier, on le montre aux copains. Quand les ordinateurs dé-marrent, voilà toute une exposition d’images qui se déploie,un instant, dans la classe: images miroirs, où chacun afficheson univers personnel, expose ses passions, ses idoles, ses amis,ses rêves, quelquefois son portrait… Le fond d’écran, c’est lelook de l’ordinateur. C’est aussi celui d’une génération et d’uneépoque. Curieuses correspondances entre graphisme etmode: on s’habille comme son fond d’écran (et inversement).

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#5.DOCU-MENTS.

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École et ordinateurLa relation entre école et ordinateur n’est pas nouvelle: les pre-mières expériences ont lieu aux États-Unis dès 1959, et en France, le“plan calcul” (1967) ambitionne déjà de “promouvoir l’enseigne-ment de l’informatique”. Depuis, chaque gouvernement – oupresque – va y aller de son plan, avec des bonheurs divers: opéra-tion des “58 lycées” (1972), plan pour l’Éducation, dit des “10000 mi-cro-ordinateurs” (1976), plan “Informatique pour tous” (1985)… jus-qu’au dernier en date, le “programme du développement dunumérique dans les écoles rurales”.Mais, au fil des ans, la terminologie évolue, comme le rôle supposéde l’informatique à l’école: au tout début, dans les années 1960, ons’interrogeait sur les potentialités de l’ordinateur comme machineà calculer, classer, organiser, écrire et… enseigner. On parle alorsd’Enseignement assisté par ordinateur. Vient ensuite, dans les an-nées 1970, le temps de l’Informatique que l’école se propose, untemps, d’enseigner comme une discipline à part entière. Avec l’ar-rivée de l’ordinateur multimédia – qui permet de manipuler letexte, l’image, le son, la vidéo, etc. –, apparaît, à la fin des années1980, l’expression de Technologies de l’information, bientôt rem-placée – avec le développement d’internet – par Nouvelles techno-logies de l’information et de la communication. Aujourd’hui, une seule machine, l’ordinateur, répond à nombre debesoins que l’école a définis depuis longtemps : c’est un outil pourécrire, classer, organiser ; c’est un moyen simple pour exploitertoutes les ressources du multimédia ; c’est également une source“infinie” de documentation, et un instrument pour communiqueret échanger toutes sortes de données. Pourtant, en France, l’Édu-cation nationale s’interroge encore sur sa place à l’école…, et cesont des conseils généraux qui conduisent les actions les plus si-gnificatives : l’opération “un collégien, un ordinateur portable” dé-marre dans les Landes en 2001, bientôt suivie par “Ordina13” dansles Bouches-du-Rhône (2003), “Ordi35” en Ille-et-Vilaine (2005),“Ordi60” dans l’Oise et “Ordicollège19” en Corrèze (2009)…

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REPÈRES HISTORIQUES1946 > États-Unis : premier calculateur électro-niqueL’Eniac (Electronic Numerical Integrator Analyser andComputer) est conçu par le laboratoire de re-cherche de l’armée américaine: il se compose de17468 tubes à vide, 7200 diodes, 1500 relais,70000 résistances, 10000 condensateurs et environ5 millions de soudures faites à la main. Il pèse 30tonnes et occupe une surface de 160 m2 ; saconsommation électrique est de 150 kWh.-----1955 > France : ordinateurC’est le professeur de philologie Jacques Perret quipropose le terme “ordinateur”, en réponse à unedemande d’IBM France, dont les dirigeants esti-maient le mot “calculateur” (traduction littérale decomputer) bien trop restrictif en regard des possi-bilités de ces machines: «Cher Monsieur, Que diriez-vous d’“ordinateur”? C’est un mot correctement for-mé, qui se trouve même dans le Littré comme ad-jectif désignant “Dieu qui met de l’ordre dans lemonde”. Un mot de ce genre a l’avantage de don-ner aisément un verbe “ordiner” et un nom d’ac-tion “ordination”…» Jacques Perret, le 16 avril 1955-----1959 > États-Unis : premiers enseignements assistéspar ordinateur dans une école publiqueUn système développé par IBM pour ses propres be-soins de formation est expérimenté dans des écolesde l’État de New York, pour l’enseignement de lamathématique binaire. Les élèves travaillent àpartir de terminaux (télétypes) branchés par lignestéléphoniques sur un ordinateur (Teaching MachinesProject du Watson Research Center d’IBM).-----1962 > France : informatiqueLe terme informatique, forgé à partir des mots “in-formation” et “automatique”, est utilisé pour la pre-mière fois en France en mars 1962, par Philippe Drey-fus, dans la désignation de l’entreprise SIA (Socié-té d’informatique appliquée). L’usage officiel du motest consacré par le président Charles de Gaulle quitranche, en conseil des ministres, entre “informa-tique” et “ordinatique”. Le mot est choisi par l’Aca-démie française en 1966: «L’informatique est lascience du traitement rationnel, notamment par desmoyens automatiques, de l’information considéréecomme le support des connaissances humaines etdes communications dans le domaine technique,économique et social.»-----1963 > États-Unis : invention de la sourisImaginée en 1963 par Douglas Engelbart, au Stan-ford Research Institute, en Californie, la souris estprésentée officiellement lors de la conférence dessociétés d’informatique, en 1968. Elle porte alors lenom d’“indicateur de position X-Y pour systèmed’affichage”. C’est un boîtier en bois contenant deux

disques perpendiculaires, relié à un ordinateur parune paire de fils torsadés. Cette invention permettrade développer de nouvelles interfaces homme-ma-chine, notamment le fameux Desktop – la méta-phore d’un bureau – imaginé par Tim Mott, au PaloAlto Research Center de la société Xerox. C’est Applequi commercialisera, en 1983, le premier ordinateurgrand public disposant d’une souris : le Lisa.-----1967 > France : “plan calcul”L’informatique française se développe réellementà partir du “plan calcul”dont les objectifs sont “dedévelopper une industrie informatique française,d’organiser les équipements informatiques pu-blics et semi-publics, et de promouvoir l’enseigne-ment et la formation”. Les premières expériencespédagogiques se mettent alors en place… Des coursd’informatique générale du CNAM sont télévisés,les exercices étant corrigés par le Centre de calculde l’ENS de Saint-Cloud. À Paris VII-Jussieu, un “or-dinateur pour étudiant” est testé comme répétiteuren sciences physiques.-----1969 > États-Unis : création d’ArpanetConsidéré comme l’ancêtre d’internet, le réseau Ar-panet fonctionne selon la théorie de la transmissionde données par paquets, les messages étant dé-coupés, envoyés par morceaux passant par des voiesdifférentes, et rassemblés par le récepteur final. Lepremier Arpanet est un réseau de quatre ordinateursinstallés à l’université de Columbia, auquel se rac-corderont les universités de Californie, de l’Utah etl’institut de recherche de Stanford.-----1970 > États-Unis : première application éducativede l’hypertexteÀ la Brown University, Andries van Dam propose àses étudiants d’étudier la poésie anglaise à l’aide del’ordinateur. Pour cela, il utilise un système d’hy-pertexte qui comprend des informations biogra-phiques sur les poètes étudiés et des données surleur style, le tout mis en relation avec des com-mentaires du professeur auxquels peuvent se gref-fer ceux des élèves.-----1970 > Suisse (OCDE): introduction de l’informatiquedans l’enseignementC’est le titre du séminaire organisé par le Centred’études et de recherches pour l’innovation dansl’enseignement de l’OCDE (Organisation de co-opération et de développement économiques) :«Une des caractéristiques de l’informatique est decréer chez les élèves une attitude algorithmique,opérationnelle, organisatrice, laquelle est souhai-table pour bien des disciplines.» Les conclusions duséminaire soulignent l’apport de l’informatique àl’enseignement général et incitent les pays membresde l’OCDE à s’engager dans cette direction.-----

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-----1970 > France : formation des enseignants à l’in-formatique.Circulaire ministérielle 70-232 du 21 mai 1970: «L’in-formatique est un phénomène qui est en train debouleverser profondément les pays industriali-sés… [Ses applications] en font un outil scientifique,technique et intellectuel unique. L’enseignement se-condaire tout entier ne peut rester à l’écart de cet-te révolution. Il doit préparer au monde de demaindans lequel ceux qui ignoreront tout de l’infor-matique seront infirmes. Il doit apprendre la por-tée de cet outil pour éviter les enthousiasmes ex-cessifs et les scepticismes étroits. Il doit profiter dela valeur formatrice de l’enseignement de l’infor-matique, de la rigueur et de la logique qu’elle im-pose. […] Enfin, il doit préparer les consciences à af-fronter les responsabilités nouvelles créées par sagénéralisation.»-----1970 > États-Unis : langage LogoLangage de programmation réflexif et fonctionneldéveloppé par Seymour Papert et Marvin Minski,au laboratoire d’intelligence artificielle du Massa-chusetts Institute of Technology (MIT), pour un usa-ge pédagogique mettant l’accent sur la construc-tion par l’élève de son propre savoir. Des expéri-mentations seront menées en France avec des en-fants d’écoles maternelles, d’écoles élémentaires etd’établissements du second degré jusqu’au débutdes années 1980.-----1971 > États-Unis : création du premier microprocesseurLa société américaine Intel réussit à placer tous lestransistors qui constituent un processeur sur un seulcircuit intégré, donnant ainsi naissance au micro-processeur. Cette miniaturisation permet d’aug-menter la vitesse de fonctionnement des proces-seurs, de réduire les coûts, d’augmenter la fiabili-té, et surtout de créer des ordinateurs bien plus pe-tits : les micro-ordinateurs.-----1972 > États-Unis : premier courrier électroniqueLe premier courrier électronique est envoyé par uningénieur de la société BBN, Ray Tomlinson. Pourdéfinir l’adresse, il opte pour l’arobase comme sé-parateur entre le nom et la “résidence” du desti-nataire – ce signe possède le double avantage d’êtreinutilisé et de se prononcer “at” en anglais, ce quidans ce contexte équivaut en français à “chez”.-----1972 > États-Unis : PongSorte de jeu de tennis noir et blanc, Pong est consi-déré comme le premier grand jeu vidéo, marquantle lancement d’une nouvelle industrie du divertis-sement. D’abord conçu comme une “borne d’ar-cade”, Pong sera adapté pour être joué sur un écrande télévision classique.

-----1972 > France : opération dite des “58 lycées”58 établissements sont équipés d’un ordinateur; 500enseignants reçoivent une formation dans les uni-versités ou chez certains fabricants. C’est la premièreexpérimentation d’envergure, si l’on songe qu’àl’époque, l’administration française dispose entout et pour tout de 483 ordinateurs «dont 90 %ont une mémoire centrale inférieure à 256 Ko» (inLes chiffres-clés de l’informatisation, La Documen-tation française, 1980).-----1972 > France: création de l’EPI (Enseignement pu-blic et informatique)«L’association Enseignement public et informatique[…] veut faire de l’informatique, et des technolo-gies de l’information et de la communication en gé-néral, un facteur de progrès et un instrument de dé-mocratisation. Depuis sa création, elle demande quepriorité absolue soit accordée à la formation desmaîtres, inséparable des indispensables recherchespédagogiques et des moyens en matériels et en lo-giciels.»-----1973 > France : le MicralLe premier micro-ordinateur est français: il est dé-veloppé par R2E, jeune société française dirigée parAndré Truong et Paul Magneron pour répondre àune commande de l’INRA, dans le but de réaliser unsystème de mesure et de calcul de l’évapotranspi-ration des sols. Il ne possède ni clavier, ni écran: lesentrées de données sont assurées par des commu-tateur et l’affichage s’effectue sur des voyants.-----1979 > France : plan pour l’Éducation, dit des “dixmille micro-ordinateurs”«L’ordinateur est porteur d’une culture nouvelle.Il peut devenir un véritable outil pédagogique, etl’apprentissage de son langage est aussi l’appren-tissage de la démocratie…» Christian Beullac, mi-nistre de l’Éducation. En cinq ans, tous les lycées doi-vent être équipés d’une “configuration standard àhuit postes de travail”, avec une “formation intensedes personnels pour l’utilisation de l’informatiquecomme outil dans les disciplines”. Pour les collèges,ce plan prévoit une expérimentation visant à la ré-duction des inégalités (rattrapage, aplanissementdes handicaps, options à composante informa-tique, etc.) ; et, pour les écoles, des activités d’éveilpour familiariser les élèves avec l’environnement in-formatique et télématique.-----1980 > France : minitelEn 1978, le gouvernement décide de lancer un vas-te réseau vidéotex (service de télécommunicationspermettant l’envoi de pages composées de texteset de graphismes simples), accessible par un terminalpeu onéreux : le minitel. La phase d’expérimenta-tion se réalise à partir de 1980 à Saint-Malo et en

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Ille-et-Vilaine. Les premiers minitels sont distribuésfin 1982: ils permettent d’accéder à des services enligne dont les plus populaires seront l’annuaire té-léphonique, la vente par correspondance (de billetsde train par exemple) et les sites de rencontres. En1985, on dépasse le million de minitels en service,ainsi que le million d’heures de communicationsmensuelles. Le nombre de terminaux continue deprogresser jusqu’à 6,5 millions d’unités en 1994, puisamorce un lent déclin. Pourtant, selon le groupeFrance Telecom, le réseau minitel enregistre enco-re chaque mois, en 2009, 10 millions de connexionssur 4000 codes de services Vidéotex, dont plusd’un million sur le 3611 (annuaire électronique).-----1981 > Grande-Bretagne: Microelectronics Educa-tion ProgrammeLa quasi-totalité des écoles primaires publiques dupays est équipée d’au moins un ordinateur (27500établissements), avec pour objectifs de «promou-voir, dans les programmes scolaires, l’étude de l’in-formatique et de ses effets, et d’encourager l’uti-lisation de la technologie comme une aide à l’en-seignement et l’apprentissage».-----1982 > internetLe protocole TCP/IP (Transmission Control Proto-col/Internet Protocol) est adopté comme standardpermettant de transmettre des données entredeux ordinateurs. Le protocole de transport TCPprend à sa charge l’ouverture et le contrôle de laliaison entre les ordinateurs. Le protocole d’adres-sage IP assure le routage des paquets de données.TCP/IP est une sorte de langage universel permet-tant à deux machines de communiquer entre elles,quel que soit leur système d’exploitation. Le terme“internet” est employé ici pour la première fois: ilsert alors à désigner un “ensemble de réseaux uti-lisant les protocoles d’échanges TCP/IP”.-----1983 > États-Unis : Apple LisaC’est le premier ordinateur personnel à posséder unesouris et une interface graphique (icônes) permet-tant à l’utilisateur de communiquer aisément avecla machine. Malgré son caractère novateur, le Lisasera un échec commercial, essentiellement en rai-son de son prix. Annoncé un an plus tard, le premier Macintosh sera proposé pour un quart de son prix(2500 $ tout de même!), mais avec des fonction-nalités plus faibles.-----1983 > États-Unis : projet GNURichard Stallman, chercheur au laboratoire d’in-telligence artificielle du Massachusetts Institute ofTechnology, crée le projet GNU avec l’objectif deconstruire un système d’exploitation compatible avecUnix, et dont la totalité des logiciels serait librementpartageable (logiciels libres). Ce projet relevant del’éthique et de la philosophie politique vise à «ne

pas laisser l’homme devenir ni l’esclave de la ma-chine et de ceux qui auraient l’exclusivité de sa pro-grammation, ni de cartels monopolisant des connais-sances en fonction de leurs seuls intérêts». En 1991,l’étudiant finlandais Linus Torvalds écrit le chaînonmanquant, que l’on appellera plus tard “noyau Li-nux”, qui permet d’obtenir un système complet: lesystème libre GNU/Linux.-----1983-1984 > France : plan d’équipement en micro-ordinateurs “grand public” (TO-7)Annoncé par le président de la République, Fran-çois Mitterrand, en janvier 1983, le plan d’équipe-ment en micro-ordinateurs “grand public” permetla fourniture, en 1983 et 1984, de 6000 ordinateursTO-7 de Thomson, aux écoles, collèges et lycées d’en-seignement professionnel de 16 départements(Alpes de Haute-Provence, Hautes-Alpes, Ardennes,Ariège, Drôme, Isère, Landes, Loire-Atlantique,Moselle, Nièvre, Nord, Oise, Pas-de-Calais, Puy-de-Dôme, Seine-Saint-Denis, Haute-Vienne). «L’infor-matique n’est pas une innovation comme n’importelaquelle, car pour la première fois nous avons la pos-sibilité de faire entrer dans l’éducation de base, dansnotre capital culturel, un progrès du savoir auxconséquences universelles…» François Mitterrand,colloque Informatique et enseignement, nov. 1983.-----1981-1986 > France: Centre mondial informatiqueet ressource humaine«Tout commence à l’école. Et si l’informatique vientd’y faire son entrée, elle ne doit pas se trouver à côtéde la lecture, de l’écriture et du calcul, un domai-ne supplémentaire d’enseignement. Elle transfor-me la manière même d’acquérir ces moyens de laconnaissance. Et, tout au long de la formation ini-tiale jusqu’à l’université, elle doit garder cette di-mension. Bien utilisée, elle permettra de maîtriser,comme jamais auparavant – vous entendez, jamaisauparavant – l’apprentissage de chaque savoirparticulier.» François MitterrandLe Centre mondial informatique et ressource hu-maine (CMI) sera présidé par Jean-Jacques Servan-Schreiber et dirigé par Nicholas Negroponte, in-formaticien américain, professeur et chercheur auMIT (Massachusetts Institute of Technology). C’estun centre de recherche, avec une vitrine grand pu-blic : dans le hall d’entrée, les enfants sont invitésà venir apprendre la programmation.Le centre est particulièrement en avance sur sontemps: il a notamment pour projet de servir de baseaux programmes pilotes dans les pays en voie de dé-veloppement, et de mettre au point un nouvel or-dinateur individuel (idée que l’on retrouvera en 2005dans le projet OLPC). Le CMI a également fait émer-ger l’idée d’espaces publics numériques, et a ima-giné, en partenariat avec la société Apple, un pro-jet de “réseau national de 50000 ateliers équipésde micro-ordinateurs professionnels”: «Le gou-

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vernement français entend faire la démonstrationque l’informatique personnalisée peut créer unenouvelle croissance, par la qualification des hommes.Il est alors décisif que l’informatique et ses moyensaillent au-delà des grandes industries pour pénétrerles petites et moyennes entreprises, et jusqu’à l’uni-vers individuel, aussi bien des étudiants que des pro-fessionnels.» (document du CMI, novembre 1984)Le centre sera fermé après les élections de mars 1986.-----1985 > URSS : TetrisTetris est un jeu de puzzle conçu par Alexei Pajit-nov, chercheur en reconnaissance vocale à l’Aca-démie des sciences de Moscou. Alliant simplicité, in-telligence et adresse, il est l’un des jeux vidéo les pluspopulaires au monde. Ce jeu remarquable de sim-plicité par son concept et de difficulté dans la pra-tique est un passe-temps indémodable et particu-lièrement addictif. Un temps livré avec Windows,il sera disponible sur tous les PC du monde et adap-té sur tous les supports possibles, et tout récemmentsur l’iPod.-----1985 > Japon: Super Mario BrosTandis que les premiers jeux vidéo avaient pour seulbut de battre un score, Super Mario Bros proposeau joueur de vivre une vraie aventure et d’évoluerdans une histoire, celle d’un plombier moustachuqui doit délivrer une princesse… Vendu à plus de40 millions d’exemplaires, Super Mario Bros demeurele jeu le plus acheté dans le monde.-----1985 > France : plan “Informatique pour tous”Annoncé par Laurent Fabius, Premier ministre, le25 janvier 1985: «Par l’équipement de tous les éta-blissements publics d’enseignement, ce plan apour objectif d’initier tous les élèves et les étudiantsà l’informatique. […] Ces équipements seront ac-cessibles à tous les citoyens. 120000 micro-ordina-teurs seront installés, 11000 ateliers seront créés dans8000 écoles, 2300 collèges, 350 lycées et 400 uni-versités. 110000 enseignants recevront une for-mation informatique. […] L’informatique va deve-nir de plus en plus une véritable seconde langue.L’objectif du président de la République, le nôtre,est de faire de cette génération la mieux formée denotre histoire. Grâce à ce plan, la France va être, dèscette année, un des premiers pays du monde, pro-bablement le premier, dans l’enseignement de l’in-formatique pour tous.»Le plan “Informatique pour tous” constitue un pariexceptionnel : en moins d’un an, c’est six fois plusd’ordinateurs, six fois plus d’enseignants concernéset vingt fois plus d’établissements équipés que dansle plan précédent. À la fin de l’année, grâce à120000 machines ajoutées aux 40000 déjà instal-lées, un enseignant sur quatre devra avoir reçu uneinitiation. Ce premier projet d’envergure ne connutpas le succès escompté, notamment en raison duchoix, par souci protectionniste, d’un matériel in-

adapté (Thomson MO5 et TO7). Le plan “Informa-tique pour tous” sera interrompu après les électionsde mars 1986.-----1985 > États-Unis : Project HeadlightNicholas Negroponte fonde le Media Lab du MIT(Massachusetts Institute of Technology), avec le pro-jet de créer un environnement de recherche pluri-disciplinaire, établissant des ponts entre arts, design et sciences de l’informatique.Seymour Papert y développe une théorie basée surle constructivisme de Jean Piaget, le “constructio-nisme”, qui part du principe que l’élève est un ac-teur de son apprentissage et qu’il augmente sesconnaissances non pas en recevant un enseignementmais en utilisant des outils et en construisant objetset concepts par lui-même (”learning by making”).Selon lui, l’ordinateur serait l’outil adapté à cettepédagogie qui sera mise en œuvre à l’école Hen-nigan, une école primaire publique à Boston, com-posée d’élèves principalement issus de minorités(Project Headlight), avec un ratio élève-ordinateurparticulièrement élevé.-----1985-1998 > États-Unis : Apple Classrooms of To-morrowLe programme Apple Classrooms of Tomorrow(ACOT) est une collaboration de recherche et de dé-veloppement entre des écoles primaires et secon-daires, des universités, des laboratoires de re-cherche et la firme Apple Computer Inc., avec pourobjectif d’évaluer dans quelle mesure l’usage ré-gulier des Tice peut influencer l’enseignement etl’apprentissage. De 1985 à 1995, les élèves et les en-seignants des classes ACOT furent équipés de deuxordinateurs par personne: un pour l’école et un pourla maison. Les enseignants formés à l’usage des tech-nologies communiquèrent régulièrement les ré-sultats de leur expérience à l’équipe de recherche.-----1989 > Genève : World Wide Web (www)Un physicien du CERN (Conseil européen pour la re-cherche nucléaire), Tim Berners-Lee, imagine un sys-tème permettant de transférer facilement desdonnées sur internet, d’un simple clic, grâce à l’hy-pertexte. En mai 1990, ce système est baptiséWorld Wide Web – la toile mondiale. Info.cern.chsera l’adresse du tout premier site hébergé par unordinateur du CERN, et http://info.cern.ch/hyper-text/www/TheProject.html, la première adresseweb: on y trouve des informations sur l’hypertex-te, la technique permettant de créer sa propre pageweb, et même la recherche d’informations sur la Toi-le. L’adresse est toujours active…-----1993 > États-Unis : MystImages précalculées en 3D, 256 couleurs, décors etbande-son magnifiques… Myst est un jeu vidéo àla première personne, c’est-à-dire que le joueur ala même vision de l’univers exploré que le person-

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nage qu’il incarne. Il n’y a ici ni ennemi, ni mena-ce de mort, ni game over, uniquement des énigmesplus ou moins difficiles à résoudre.-----1997 > France: plan pour les nouvelles technologiesdans l’enseignementPlan présenté par Claude Allègre, ministre de l’Éducation nationale, de la Recherche et de la Tech-nologie, et Ségolène Royal, ministre déléguée à l’En-seignement scolaire : «Le ministère de l’Éducationnationale, de la Recherche et de la Technologie jet-te aujourd’hui les bases d’une nouvelle démarcheéducative s’appuyant sur les ressources du multi-média. L’impulsion donnée à ce plan, prioritaire enmatière d’éducation, prend en compte les atouts im-menses offerts par les nouvelles technologies de l’in-formation et de la communication pour assurer l’en-trée de la société française dans le 21e siècle et ga-gner “la bataille de l’intelligence”, comme le Pre-mier ministre Lionel Jospin l’avait souligné à Hour-tin, le 25 août dernier. Sans négliger les expériencesexistantes en ce domaine, le ministère a décidé demettre en place un vaste dispositif déconcentré etfédérateur d’énergies, favorisant tous les usages pé-dagogiques innovants, le partage des expérienceset la mise en réseau des initiatives enseignantes àtous les niveaux, de la maternelle à l’université, laproduction et la diffusion de multimédias éducatifs.Avec une idée-force : œuvrer à la synthèse fécon-de entre deux modes de pensée – la culture de l’écritet la civilisation de l’image –, porteuse d’autres ma-nières d’échanger, d’apprendre et d’appréhenderle monde.»-----1997 > France : introduction d’internet dans l’en-seignementPublication dans le BO du 24 avril d’une note titréeEnseignement scolaire et développement des tech-nologies de l’information et de la communication:«Les enjeux invitent à passer à une phase plus mar-quée de généralisation des TIC. L’effort prioritairesera porté sur trois points: ¶ Développer les usagesliés aux technologies d’information et de commu-nication en portant un effort particulier sur le dé-veloppement des réseaux numériques. ¶ Informeret former le plus grand nombre de responsables,d’enseignants et de personnels administratifs, en in-tégrant les potentialités offertes par les technolo-gies d’information et de communication elles-mêmes, et ce afin que chacun puisse trouver lemoyen d’améliorer son action quotidienne. ¶ Aiderà la production de ressources pédagogiques de qua-lité, quels que soient les supports, en s’appuyant surles communautés disciplinaires et les opérateurstechniques publics et privés…»-----1998 > États-Unis : création de GoogleLarry Page et Sergey Brin imaginent un logiciel quianalyserait les relations entre les sites web, dans lebut «d’organiser l’information à l’échelle mondiale

et de la rendre universellement accessible et utile»,ce service étant financé par de la publicité ciblée enfonction des mots-clés.-----2001 > États-Unis : Maine Learning TechnologyInitiativeAngus King, gouverneur de l’État du Maine, pro-pose de confier des ordinateurs portables aux37000 élèves de l’équivalent de nos classes de 5e,puis de 4e, de toutes les écoles publiques. Ce pro-gramme, baptisé Maine Learning Technology Ini-tiative, s’inscrit dans une démarche de développe-ment économique et social: le Maine étant un Étattrès rural, le gouverneur est persuadé que les TICpourraient jouer un rôle déterminant dans l’éco-nomie future et que cette opération spectaculaireaurait un écho national susceptible d’attirer des en-treprises innovantes. Le second objectif, c’est detransformer l’éducation pour mieux préparer lesélèves à un monde en mutation rapide. Inspiré parSeymour Papert, le choix d’un ordinateur portablepour chaque élève découle logiquement d’uneorientation “constructiviste” de la pédagogie, fai-sant de l’élève l’acteur central de son apprentissa-ge. Quant au troisième objectif, il vise à réduire lafracture numérique. Huit ans plus tard, en 2009, cesont les élèves de la 3e à la terminale qui vont êtreégalement dotés, ce qui porte à 100000 le nombred’ordinateurs portables déployés dans le cadre duprogramme.-----2001 > WikipédiaWikipédia est un vaste projet d’encyclopédie col-lective établie sur internet, universelle, multi-lingue. Celle-ci a pour objectif d’offrir un contenulibre, neutre et vérifiable que chacun peut éditeret améliorer. Le nom Wikipédia est un mot-valiseformé à partir de wiki, terme désignant un type desite web dont les pages peuvent être modifiées fa-cilement à l’aide d’un navigateur web, et encyclo-pedia, mot anglais pour encyclopédie. Wikipédia estnon seulement disponible gratuitement sur inter-net, mais elle peut aussi être copiée et utilisée li-brement avec la seule mention de la source et desauteurs (licence de documentation libre GNU). En2009, le nombre total d’articles de l’ensemble deséditions de Wikipédia dépasse les 13 millions.-----2003 > États-Unis, Indiana: One2OneLe département de l’éducation de l’Indiana met enœuvre le programme inAccess (Affordable ClassroomComputers for Every Secondary Student), rebapti-sé One2One (pour One to One). L’objectif du pro-jet n’est pas que chaque élève possède un ordina-teur personnel, mais qu’il y ait autant d’ordinateursdisponibles dans chaque classe qu’il y a d’élèves. Lechoix se porte donc sur des ordinateurs fixes, dontles écrans sont encastrés, à l’horizontale, danschaque bureau. Le programme concerne aujourd’hui200000 élèves (de la seconde à la terminale), donc

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200000 ordinateurs. L’État de l’Indiana compteseulement 6,5 millions d’habitants et il est considérécomme l’un des plus pauvres des États-Unis.-----2003 > Magog (Québec) : première initiative d’en-vergure au CanadaLa Commission scolaire Eastern Townships met enœuvre un programme baptisé Stratégie d’appren-tissage amélioré, grâce auquel les 5600 élèves deson réseau d’établissements – de la 3e année du pri-maire à la 5e du secondaire – reçoivent un ordina-teur portable.-----2004 > États-Unis : World of warcraftWorld of Warcraft est sans doute le plus connu desMMORPG (jeu de rôle sur internet massivement mul-tijoueur). Il permet à des milliers de joueurs de serencontrer en ligne et de s’allier contre l’univers dujeu ou de combattre entre eux. Les joueurs en pro-venance du monde entier peuvent ainsi s’évaderdans un monde épique et se lancer dans degrandes quêtes et des exploits héroïques auxconfins d’une terre d’aventures fantastiques.

-----2005 > États-Unis : One laptop per child [un ordi-nateur portable par enfant]En janvier 2005, Nicholas Negroponte, informaticienaméricain d’origine grecque, professeur et chercheurau MIT (Massachusetts Institute of Technology), an-nonce la construction d’un ordinateur portable à100 dollars, destiné aux enfants des pays en voie dedéveloppement, opération dénommée OLPC pourOne Laptop Per Child. Fin 2009, ces portables dé-nommés XO devraient être diffusés à près d’un mil-lion d’exemplaires. «Le projet One Laptop PerChild (OLPC) a pour objectif de fournir des ordina-teurs comme outil éducatif aux enfants des pays envoie de développement. Pourquoi un ordinateurpour un enfant d’un pays en voie de développe-ment? Si vous remplacez “ordinateur” par “édu-cation”, la réponse devient claire. L’accès à l’édu-cation doit être réalisé en même temps que le res-te car c’est une partie importante de la solution auxautres problèmes. Le XO a été conçu spécifiquementpour les enfants. D’où qu’ils soient et quel que soitl’endroit où ils se trouvent, cet ordinateur a les ca-

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-----2001 > France, Landes : “un collégien, un ordinateur portable”Le Conseil général des Landes s’engage dans une opération de grande ampleur de moder-nisation de l’équipement informatique de ses collèges. Avec l’accompagnement de l’Édu-cation nationale sur le plan pédagogique, il décide de doter chaque collégien de 3e etchaque enseignant du département d’un ordinateur personnel portable, de câbler les col-lèges et de les équiper des outils permettant d’intégrer l’utilisation de l’informatique dansla pédagogie. L’opération “un collégien, un ordinateur portable” poursuit quatre objectifscomplémentaires : relever les défis de l’égalité en assurant l’égal accès des élèves à cesnouveaux outils dont la maîtrise leur sera indispensable dans leurs études et leur vie pro-fessionnelle et citoyenne; favoriser de nouvelles pratiques pédagogiques; diffuser la culturedes nouvelles techniques dans tous les foyers landais ; développer l’attractivité des Landesafin d’attirer les opérateurs de télécommunications dans un département rural où la seulelogique économique ne les conduirait pas.L’opération représente un coût de 10 millions d’euros par an pour les deux premières annéesde mise en place et d’investissements. Elle débute en septembre 2001, dans trois collèges-tests : 550 ordinateurs portables équipés de nombreux logiciels et ressources pédagogiques,sont distribués aux élèves et enseignants des classes de 3e. En février 2002, l’Assemblée dépar-tementale vote à l’unanimité la généralisation de l’opération aux 32 collèges publics du dépar-tement : 4200 ordinateurs portables seront ainsi distribués à la rentrée suivante. L’opérationsera généralisée en 2005 à toutes les classes de 4e, à tous les enseignants et personnels descollèges, soit 8500 ordinateurs portables. Mais elle ne se limite pas à la fourniture d’ordi-nateurs portables : elle comprend aussi le câblage intégral des collèges, une dotation pourl’achat de ressources pédagogiques, le financement d’un poste d’assistant d’éducation Ticedans chaque établissement et l’installation de matériels collectifs (serveurs, imprimantes, vidéo-projecteurs, tableaux interactifs, visualiseurs, etc.).Depuis la rentrée 2009, toutes les salles de cours de tous les collèges publics des Landes sontdésormais équipées, en fixe, d’un tableau blanc interactif, d’un vidéoprojecteur et d’unvisualiseur numérique.

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ractéristiques et les logiciels pour que les enfants ado-rent apprendre avec lui.»------2006 > France : Plan en faveur des technologies del’information appliquées à l’éducation“Faire en sorte que tous nos enfants apprennentmieux et plus vite, […] donner aux élèves lesmoyens les plus efficaces de progresser.” Ce plan s’appuie sur trois mesures : le développe-ment des espaces numériques de travail ; l’utilisa-tion des Tice pour l’accompagnement scolaire; la

mise à disposition, pour chaque professeur qui sortde l’IUFM, d’une clé USB comprenant l’essentiel desressources pédagogiques disponibles.-----2007 > France : C2i2eLe C2i2e (certificat informatique et internet niveau2 “enseignant”) vise à attester des compétences pro-fessionnelles communes et nécessaires à tous les en-seignants pour l’exercice de leur métier dans ses di-mensions pédagogique, éducative et citoyenne à tra-vers les champs suivants: les problématiques et les

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-----2003 > France, Bouches-du-Rhône : Ordina 13Sur le modèle de l’opération initiée dans les Landes, le Conseil général des Bouches-du-Rhônelance, à la rentrée scolaire 2003-2004, l’opération “Ordina 13” : chaque élève des classesde 4e, puis de 3e l’année suivante, va disposer, dans le cadre d’un prêt, d’un ordinateur por-table personnel utilisable en classe avec les professeurs, ainsi qu’à domicile. Trois objectifs :réduire la fracture numérique, initier les jeunes à l’informatique et fournir un nouvel outilpédagogique aux enseignants. L’opération représente un parc de 60000 ordinateurs connec-tés à internet haut débit par des technologies sans fil. Les enseignants des classes de 4e et3e, les principaux de collèges, les gestionnaires et conseillers principaux d’éducation sont éga-lement dotés. Des logiciels communs à tous les portables (suite bureautique, encyclopédieet logiciels libres de droits) sont installés sur tous les ordinateurs. Une contribution finan-cière est apportée par le Conseil général pour l’achat de logiciels choisis par les ensei-gnants. Des équipements périphériques complètent la dotation : imprimantes, vidéopro-jecteurs, etc. Des postes d’accompagnateurs techniques informatiques (ATI) sont créés dansles collèges publics, nouveau métier dans les établissements, interface entre les services d’as-sistance technique et les utilisateurs. À la rentrée scolaire 2006, après trois années de fonc-tionnement, le prêt se transforme en don : les ordinateurs portables restent désormais audomicile, et l’élève en devient propriétaire à la fin de ses études au collège.« Ordina13 s’inscrit dans une réflexion et dans un ensemble d’actions menées dans ledépartement depuis 1991. Ce programme est le fruit d’une concertation avec le rectorat,l’académie, les enseignants et parents d’élèves. […] Jusqu’à présent, les ordinateurs portablesétaient prêtés. Le premier problème que nous avons rencontré, c’est que les opérations deprêt – c’est-à-dire de distribution, de récupération en fin d’année et de stockage – étaientlongues, forcément. Du coup, le temps d’utilisation pédagogique était finalement trèscourt. […] Second problème : les enseignants nous disaient, parfois pour justifier le faitqu’ils n’utilisaient pas l’ordinateur portable en classe, que les enfants l’avaient oublié, ouqu’il était en panne, donc que tous les élèves n’avaient pas leur machine en bon état demarche, et qu’il était impossible de faire le cours dans de bonnes conditions. […] Nous avonstenu compte de ces remarques: les établissements sont désormais dotés de classes mobilespermettant une utilisation très souple de l’informatique en classe, et les ordinateurs portablessont donnés chaque année à tous les élèves de 4e et aux élèves nouvellement inscrits en 3e,avec une clef USB pour stocker et transporter facilement les données entre le collège et ledomicile. […] Aujourd’hui, Ordina13, c’est un ordinateur fixe pour cinq élèves, avec des bornesWi-Fi dans au moins 15 emplacements choisis par les équipes enseignantes. C’est égale-ment, dans les collèges publics, 150 assistants techniques informatiques qui permettent lamaintenance au quotidien des ordinateurs. Et c’est bien sûr les 60000 ordinateurs portablesdes élèves et des équipes pédagogiques…» Jeanine Écochard, conseillère générale desBouches-du-Rhône, chargée de l’éducation, des collèges et de l’accompagnement à l’édu-cation, lors du colloque Ordinateurs portables, enseignement et Tice, organisé par le Conseilgénéral des Landes en octobre 2006.

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-----2005 > France, Ille-et-Vilaine : Ordi 35Après les Landes et les Bouches-du-Rhône, le Conseil général d’Ille-et-Vilaine décide, à son tour,de doter les collégiens des classes de 3e d’un ordinateur portable qu’ils peuvent emporter chezeux. Cette opération, baptisée “Ordi 35”, concerne les 11500 élèves des 104 collèges publicset privés du département. L’objectif, c’est d’abord de réduire la “fracture numérique”, en per-mettant l’accès de tous aux technologies de l’information et de la communication; ce qui expliquepourquoi les ordinateurs portables sont, à l’origine, réservés aux seuls collégiens.«Dans un premier temps, nous avions décidé de ne pas doter les enseignants. Dans notre esprit,Ordi 35 s’adresse d’abord aux jeunes – c’était d’ailleurs le terme utilisé –, l’ordinateur portabledevant leur permettre de découvrir puis de maîtriser, en famille, l’informatique… Pourtant, mêmesi l’innovation pédagogique n’était pas notre premier objectif, nous pensions bien que cepourrait être un moyen de lutter contre la démotivation scolaire et faciliter le lien entre le col-lège et la maison. Notre idée était que des élèves un peu “en désamour” avec les apprentis-sages et la chose scolaire pourraient peut-être se retrouver motivés par la maîtrise de l’outil.Nous avons donc souhaité associer les enseignants à notre démarche pour voir comment ilspourraient tirer profit de cette mise à disposition de matériels. Et nous avons eu rapidementune première critique: “Comment demander à nos élèves d’utiliser leur ordinateur, si nous nedisposons pas nous-même de machines semblables?” Nous avons alors décidé de prêter – surprojet – des ordinateurs portables aux équipes qui nous en feraient la demande. Puis nous avonsopté, depuis la rentrée 2008-2009, pour le prêt forfaitaire d’un lot de quatre à six ordinateursdirectement à chaque collège, sous la responsabilité du chef d’établissement; à charge pourlui de les mettre à disposition des équipes pédagogiques. Pour faciliter le travail collectif, tousles ordinateurs ont la même configuration et sont équipés de logiciels identiques: traitementde texte, tableur, encyclopédie, atlas, plusieurs dictionnaires, un antivirus et des logiciels choi-sis en accord avec l’Éducation nationale. Des bornes Wi-Fi ont également été installées danschaque collège pour les connexions à internet sans fil.» Mireille Massot, Première vice-prési-dente du Conseil général d’Ille-et-Vilaine chargée de l’enseignement, de l’éducation, des col-lèges et du Conseil départemental des Jeunes, lors du colloque Ordinateurs portables, ensei-gnement et Tice, organisé par le Conseil général des Landes en octobre 2006.Autre particularité d’Ordi 35, l’attention particulière portée à l’accompagnement des usages:le Conseil général emploie 47 animateurs pour mettre en œuvre l’opération et en assurer lesuivi (à raison d’un pour deux ou trois collèges), avec à la fois un rôle technique et un rôled’éducateurs. Les animateurs Ordi 35 proposent également des initiations à l’informatiqueaux parents qui le souhaitent ; ils peuvent aussi accompagner les enseignants dans l’utilisa-tion de l’ordinateur portable en cours.Des opérations d’accompagnement à la parentalité sont également organisées chaque annéeà l’échelle départementale. Un centre d’assistance téléphonique est mis à disposition des famillesen début d’année scolaire, en soirée, les samedis et pendant les vacances. Chaque ordina-teur est équipé d’un dispositif qui sécurise l’accès à internet et empêche les connexions illé-gales. Toutes les connexions, aussi bien depuis le collège qu’à la maison, transitent en effetpar une plate-forme d’accès sécurisé mise en place par le Conseil général. Cette architectu-re centralisée supporte également un antivirus et la gestion des plages horaires d’utilisation.En septembre 2009, les élus ont adopté un nouveau schéma Ordi 35, prévoyant de privilé-gier l'équipement des collèges: à partir de la rentrée 2010, 8000 ordinateurs portables serontmis à la disposition des établissements, où ils remplaceront et enrichiront l’actuel parc infor-matique. Le prêt d'ordinateurs personnels (3000) est cependant maintenu pour les famillesdes collégiens boursiers.

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enjeux liés aux TIC en général et dans l’éducationen particulier; les gestes pédagogiques liés aux TIC;la recherche et l’utilisation de ressources; le travailen équipe et en réseau; les espaces numériques detravail; l’évaluation et la validation des compétencesTIC dans le cadre des référentiels inscrits dans les pro-grammes d’enseignement. Ce certificat attesteque le professeur stagiaire, au sortir de sa forma-tion initiale, possède les compétences requisespour la maîtrise des TIC.-----2008 > France : Plan de développement de l’éco-nomie numériqueÉric Besson, secrétaire d’État chargé de la pros-pective, de l’évaluation des politiques publiques etdu développement de l’économie numérique, pro-pose d’encourager l’équipement en ordinateurs desécoles primaires notamment grâce au plan Ordi 2.0de recyclage de vieux ordinateurs. Des épreuves uti-lisant les Tice seront mises en place dans les disci-plines techno logiques et scientifiques. Le planpromet un nouveau développement des ENT (en-vironnements numériques de travail) et la créationd’une plate-forme de présentation des ressources,des usages et des bonnes pratiques.-----2008 > Portugal: 500000 ordinateurs portables pourles écoliers de 6 à 11 ansDans le cadre d’un projet baptisé Magellan, les500000 écoliers portugais reçoivent, à la rentrée2008, un ordinateur portable bénéficiant d’un ac-cès à internet et d’outils pédagogiques. L’ordinateur

est gratuit pour les écoliers les plus démunis; il coû-te 20 € pour les autres boursiers, tandis que l’en-semble des élèves du primaire peut l’acheter pour50 €. «Nous voulons que l’ordinateur fasse partie dumatériel scolaire de toutes les écoles. C’est un or-dinateur doté de technologies de dernière géné-ration, spécialement conçu pour les enfants.» (JoséSocrates, Premier ministre portugais) L’ordinateurMagellan – Computador Magalhães – est fabriquéprès de Porto, par l’entreprise portugaise JP Sá Cou-to: c’est une évolution du Classmate PC d’Intel. -----2009 > France : 29 millions d’internautesSelon l’Observatoire des usages d’internet de Mé-diamétrie, le nombre d’internautes a été multipliépar dix en dix ans, passant de 3 millions en 1999 à29 millions en 2009. L’usage du courrier électroniquea connu un développement équivalent. La plus for-te progression concerne l’achat en ligne: les ache-teurs, qui n’étaient guère que 200000 il y a dix ans,sont actuellement 20 millions.-----2009 > France : programme de développement dunumérique dans les écoles ruralesCe programme, doté d’un budget de 50 millionsd’euros, prévoit l’équipement de 5000 écoles situéesdans les communes rurales de moins de 2000 ha-bitants. […] Une école numérique interactive com-prendra nécessairement des ordinateurs en nombresuffisant (classe mobile de plusieurs ordinateurs), untableau blanc interactif, un accès internet de hautdébit, une mise en réseau des équipements, une sé-

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-----2009 > France, Oise : Ordi 60Le département de l’Oise décide à son tour de mettre des ordinateurs portables à la dis-position de tous les collégiens, de la 6e à la 3e. Comme dans les Bouches-du-Rhône, ces ordi-nateurs sont destinés à un usage à domicile. La dotation se fera en trois phases, pour unbudget de l’ordre de 28 millions d’euros sur les trois premières années : en 2009, 24500élèves de 5e et de 4e des 81 collèges de l’Oise (publics et privés) reçoivent les premiers ordi-nateurs. En 2010, ce sera le tour de leurs camarades de 6e et de 5e. Le parc total sera alorsde l’ordre de 50 000 ordinateurs portables. L’opération se poursuivra ensuite, chaqueannée, avec les élèves entrant au collège. Les ordinateurs sont équipés de 60 logiciels édu-catifs choisis en concertation avec le rectorat d’Amiens et l’inspection académique del’Oise. Les collégiens conserveront le même ordinateur durant toute leur scolarité au col-lège, celui-ci devenant leur propriété au bout de six ans. « En dotant chaque collégiend’un ordinateur portable à domicile, le Conseil général se donne les moyens de lutter effi-cacement contre la fracture numérique et de favoriser l’égalité des chances. En entrant dansdeux tiers des familles isariennes, l’ordinateur bénéficiera à environ 200000 personnes.»Yves Rome, président du Conseil général de l’Oise. Ordi 60 fait suite à un plan d’équipe-ment des collèges (câblage, fibre optique ou couverture Wi-Fi). Chaque établissement a reçuun tableau blanc interactif, six vidéoprojecteurs et six ordinateurs portables, et 22 d’entreeux sont dotés d’une classe mobile informatique d’une capacité de 24 élèves. Des postesd’assistants techniques ont été créés pour les 66 collèges publics.

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-----2009 > France, Corrèze : Ordicollège19Le Conseil général de la Corrèze, en collaboration avec l’Éducation nationale, distribue 750ordinateurs aux professeurs des collèges corréziens, puis 2300 machines identiques auxélèves des classes de 5e, dans le public comme dans le privé. Le coût de l’investissement pour2009 est de 1,52 million d’euros. L’opération sera renouvelée de manière à ce qu’au boutde trois ans, tous les collégiens de la 5e à la 3e soient dotés d’ordinateurs portables. Les ordi-nateurs seront donnés aux élèves à l’issue de leurs études au collège. Pour les professeurs,le renouvellement du matériel se fera tous les trois ans. «L’ordinateur est un outil indispen-sable pour l’avenir des enfants. […] Cette dotation constitue un atout pour les jeunes de notredépartement. En effet, l’usage de l’ordinateur est devenu une nécessité dans le monde d’au-jourd’hui. C’est une porte d’entrée vers le savoir et vers l’emploi. […] Grâce à Ordicollège19,les enfants des familles modestes auront ainsi accès à ces outils qui favorisent l’ouverture versle monde, la réussite scolaire, ainsi que l’intégration sociale et la formation professionnelle.»François Hollande, le président du Conseil général, Corrèze magazine #66.La première singularité de l’opération corrézienne, c’est d’être pilotée par deux chefs deprojet : Bernard Roussely travaille au Conseil général, et Pierre Mathieu au CRDP du Limousin.Cette conduite à quatre mains illustre bien la nécessité d’un partenariat entre l’Éducation natio-nale et le Conseil général, dans le cadre de la répartition des compétences héritées des loisde décentralisation de 1982: la collectivité territoriale étant responsable de l’équipement descollèges, et l’Éducation nationale en charge de la pédagogie. «Nous avons commencé parétudier ce qui s’était fait ailleurs, notamment dans les Landes, expliquent les chefs de pro-jet. Nous avons également fait le constat qu’en matière d’équipement des ménages et deconnexion à internet, les choses évoluent rapidement, mais il y a une grande différenceentre équipement familial et équipement individuel: nous faisons partie de ceux qui pensentqu’une utilisation pédagogique de l’informatique suppose que chaque élève dispose d’un ordi-nateur personnel et qu’il est fondamental de doter tous les enseignants avec le même typede matériel, de les former et d’impliquer l’Éducation nationale, à tous les niveaux.»Seconde singularité de l’opération corrézienne, le choix d’un ordinateur ultra-mobile doté d’unécran de 12 pouces, et particulièrement léger (1,2 kg), avec un lecteur-graveur CD-DVDexterne que les élèves n’ont pas besoin d’apporter au collège. «Nous souhaitions une machi-ne compacte, légère, et qui ne prenne pas trop de place sur les tables, mais avec un écranpermettant de travailler confortablement. Nous avons donc consulté le chef du service oph-talmologie du CHU de Limoges, qui nous a conseillé un écran 12 pouces comme étant lemeilleur compromis ergonomique.»Troisième particularité de l’opération corrézienne: c’est la première, et pour l’instant la seu-le, à faire le choix d’un environnement logiciel “libre”, à commencer par le système d’ex-ploitation Ubuntu [ancien mot africain qui signifie “Humanité”], basé sur GNU-Linux. «Nousn’avons pas opté pour la facilité, et certains nous l’ont vite fait comprendre: “Comment? Iln’y a ni Windows, ni Word, ni Excel? Mais qu’est-ce qu’on va bien pouvoir faire avec cesmachines?” Par contre, en choisissant Ubuntu, nous disposons d’une interface très simpleet très accessible, et surtout d’une stabilité exceptionnelle, et nous nous épargnons bien desproblèmes, de virus, par exemple. L’intérêt pour la suite, c’est que les communautés du“libre”, qui avaient jusqu’à présent un peu de mal avec l’éducation, commencent à se mobi-liser : d’ici trois ans, nous aurons amené 9000 à 10000 utilisateurs du “libre” en Corrèze,ce qui n’est pas rien pour un département comme le nôtre…»

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curisation des accès internet, des ressources nu-mériques reconnues de qualité pédagogique.-----2009 > Danemark : les lycéens autorisés à accéderà internet pendant leurs examensLe Danemark décide d’autoriser, à titre expéri-mental, les lycéens à accéder à internet pendantleurs examens ; une mesure qui pourrait être gé-néralisée en 2011. «La collecte des informationsétant désormais, en grande partie, confiée aux or-dinateurs, pourquoi demander aux élèves de mé-moriser par cœur des données que l’on peut rela-tivement facilement retrouver sur l’internet? En au-torisant les élèves à aller sur internet pendant leursexamens, le Danemark parie sur leur capacitéd’analyse et de synthèse, et donc sur leur intelli-gence, plutôt que de continuer à faire reposer l’éva-luation sur leurs capacités à régurgiter, ou “co-pier/coller” de mémoire, ce qu’ils ont appris parcœur. Certes, l’un n’empêche pas l’autre, et le pariest osé, mais il a le mérite de s’adapter à la réalitéquotidienne des élèves, plutôt que de continuer àfaire comme s’ils vivaient encore au temps où l’ac-cès à l’information était une ressource rare.»-----2009 > Angleterre : les nouveaux programmes duprimaire s’ouvrent à TwitterLes nouveaux programmes de l’école primaireprécisent que les enfants doivent quitter l’école fa-miliarisés avec les blogs, les podcasts, Wikipedia etTwitter comme sources d’information et outils decommunication. Ils doivent savoir écrire aussi bienavec un clavier qu’à la main. Ils doivent, dès le pri-maire, être capables d’utiliser un correcteur or-thographique dans un traitement de texte. Pourl’auteur du programme, il s’agit d’atteindre le ni-veau de compétences Tice demandé actuellementdans le secondaire. Il faut dire que les enseignantsanglais se déclarent déjà utilisateurs “fréquents etintensifs” des Tice : 96 % d’entre eux utilisent l’or-dinateur en classe, et un enseignant sur quatre leferait dans la majorité de ses cours (contre 3 % enFrance).-----2009 > France : internet est une composante de laliberté d’expressionSuite au recours formé par les députés socialistes,verts et communistes, contre le projet de loi Créa-tion et Internet, dite loi Hadopi (Haute autorité pourla diffusion des œuvres et la protection des droitssur internet), le juge constitutionnel reconnaît in-directement que l’accès à internet est une libertéfondamentale : «La libre communication des pen-sées et des opinions est un des droits les plus pré-cieux de l’homme; […] eu égard au développementgénéralisé des services de communication au publicen ligne ainsi qu’à l’importance prise par ces servicespour la participation à la vie démocratique et l’ex-pression des idées et des opinions, ce droit implique

la liberté d’accéder à ces services (point 12); eu égardà la nature de la liberté garantie par l’article 11 dela Déclaration de 1789, le législateur ne pouvait […]confier les pouvoirs (de restreindre ou d’empêcherl’accès à internet) à une autorité administrative dansle but de protéger les droits des titulaires du droitd’auteur et de droits voisins…»-----2009 > Grèce : un coupon de 450 €Tous les élèves de la première année de collège del'enseignement secondaire (correspondant à la 5e

du collège français) peuvent se procurer gratuite-ment un ordinateur portable équipé de logiciels etressources pédagogiques, en échange d’un couponde 450€, subventionné par des fonds européens.-----2009 > Uruguay : un ordinateur portable pourchaque élève du primaireL’Uruguay vient d’achever un programme de dis-tribution d’ordinateurs portables à tous les élèvesdu primaire dans les écoles publiques, une opéra-tion qui aura duré deux ans et concerné 362000élèves et 18 000 enseignants (pour une popula-tion de 3477770 habitants). Le plan mis en placepar l’Uruguay s’inscrit dans le cadre du program-me mondial “One laptop per child”. Chaque machi-ne livrée aux écoliers uruguayens coûte environ175 €, en prenant en compte les frais de mainte-nance, la formation des enseignants et lesconnexions internet. Au total, les sommes consa-crées représentent moins de 5% du budget de l’É-ducation nationale. -----sourceshttp://www.epi.asso.frhttp://www.a-brest.nethttp://www.hissabe.comhttp://www.tact.fse.ulaval.cahttp://www.infobourg.qc.cahttp://www.internetactu.nethttp://www.educnet.education.frhttp://www.etsb.qc.cahttp://www.laptop.orghttp ://francenumerique2012.frhttp://lusitanie.frhttp://fr.wikipedia.orghttp://mcaswiki.mcas.k12.in.us/Technology/One_to_One_Projecthttp://www.landesinteractives.nethttp://www.ordina13.comhttp://www.ordi35.orghttp://www.oise.fr/Ordi_60.1589.0.html

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un collégien, un ordinateur portable

Le 17 septembre 2001, les élèves de 3e du collège Jean Moulin, à Saint-Paul-lès-Dax, et leurs professeurs, reçoivent les ordinateurs portablesque le Conseil général des Landes a décidé de leur confier pour tou-te la durée de l’année scolaire… Ils sont les premiers bénéficiairesde l’opération “un collégien, un ordinateur portable”, qui va doterchaque élève de 3e (puis de 4e à partir de la rentrée 2004) d’un or-dinateur personnel pour un usage au collège et à la maison. «Vousallez avoir de nouveaux moyens pour travailler, apprendre, vous in-former, communiquer ou vous distraire, et votre famille pourra éga-lement utiliser cet ordinateur», déclarait alors le président du Conseilgénéral, Henri Emmanuelli.Depuis cette journée très particulière, près de 40000 collégiens lan-dais ont pu disposer d’un ordinateur personnel portable pendanttoute la durée d’une année scolaire, voire de deux pour la majori-té d’entre eux.

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HISTORIQUE DE L’OPÉRATION-----«Attaché à promouvoir l’égalité de tous et conscientdu rôle de l’École dans la réalisation de cet objec-tif, le Conseil général des Landes s’est engagé, de-puis la rentrée de septembre 2001, dans une opé-ration de grande ampleur de modernisation del’équipement informatique de ses collèges. Avec l’ac-compagnement des diverses structures de l’Éduca-tion nationale sur le plan pédagogique, il décide:– de doter chaque collégien de 4e et de 3e, et chaqueenseignant de collège, d’un ordinateur personnelportable ;– de câbler intégralement tous les collèges publicsdont il a la charge;– d’acquérir, en accord avec le rectorat, des res-sources et contenus numériques (logiciels, anima-tions, manuels scolaires, etc.), et de les intégrer auxordinateurs portables ;– de cofinancer le poste d’un assistant d’éducationpar collège, afin d’assurer le premier niveau de sup-port technique, au plus près des utilisateurs;– d’équiper les collèges des outils permettant d’in-tégrer l’utilisation de l’informatique dans la péda-gogie (serveurs, vidéoprojecteurs, tableaux numé-riques interactifs, visualiseurs, scanners, impri-mantes, appareils photo, etc.).Les élèves de 4e et de 3e peuvent ainsi bénéficier gra-tuitement, pendant la durée de l’année scolaire,d’un ordinateur personnel portable dont la maîtriseleur sera indispensable dans leur future vie per-sonnelle et professionnelle. Les enseignants dis-posent de nouvelles possibilités pour enrichir leurspratiques pédagogiques.»www.landesinteractives.net

C’est en 2000 que naît l’idée de l’opération “un col-légien, un ordinateur portable”. Le constat est alorssans appel : une réelle fracture numérique est entrain de se développer, qui renforce les inégalitéssociales. La pratique et l’équipement informatiquedes familles dépendent du niveau de revenu, de lacatégorie socioprofessionnelle et de la densité depopulation du lieu de résidence.Après une analyse économique, c’est l’hypothèse dedoter chaque collégien d’un ordinateur personnelportable qui prévaut aux yeux du président duConseil général des Landes et des élus de la majo-rité départementale; des contacts sont alors pris avec l’Édu ca tion nationale, et des réunions de travail sontmises en place, notamment à l’initiative de l’ins-pection académique des Landes.En février 2001, les élus du Conseil général votentà l’unanimité le principe de l’opération, et sa miseen œuvre, pour les classes de 3e, dans trois collèges“tests”, pendant une année.-----Année scolaire 2001-2002: une année de test.En concertation permanente avec les professeurs etle personnel d’encadrement de trois collèges vo-lontaires (Mimizan, Saint-Paul-lès-Dax et Mont-fort-en-Chalosse), cette année de test permet de pré-ciser le dispositif technique et de tracer les premièrespistes pédagogiques dans cette configuration, inéditeen France, d’équipement en ordinateurs portablesde l’ensemble des élèves et de leurs professeurs.Une convention signée entre les éditeurs de manuelsscolaires et le ministère de l’Éducation nationale per-met de disposer (à partir de janvier 2002) de 14 ma-nuels numériques, pour le niveau 3e.En février 2002, le Conseil général vote, à l’unani-mité, la généralisation de l’opération à l’ensembledes collèges publics du département.L’année scolaire est mise à profit pour mener un tra-vail d’information des parents et des enseignants.Près de 800 enseignants reçoivent une formation dis-pensée par le centre académique aux Tice du rectoratde Bordeaux (Catice) pendant 6 jours.Le câblage de l’ensemble des collèges sera réalisépendant les vacances scolaires.-----Année scolaire 2002-2003: généralisation à tous lescollèges landais, pour le niveau 3e.La rentrée scolaire peut se dérouler, bien sûr dansla fébrilité de la nouveauté, mais avec la sérénitérésultant de l’expérience partagée des trois collègestests : plus de 4200 ordinateurs portables sont dé-ployés aux collégiens de 3e et à leurs enseignants.Des matériels collectifs (300 vidéoprojecteurs, 64 ser-veurs, 110 tableaux interactifs, 500 imprimantes,scanners-numériseurs, appareils photographi -ques, etc.) sont distribués dans tous les collèges afinde faciliter l’utilisation des ordinateurs en classe.L’année scolaire 2002-2003 sera celle de l’appro-priation des outils en situation d’enseignement. Une

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évaluation effectuée par l’inspection pédago-gique régionale confirme, au printemps 2003,l’intérêt de l’opération.-----Année scolaire 2003-2004 : les usages pédago-giques se confortent.En mai 2004, à Moliets-et-Maâ, les premiers bilanssont tirés notamment par Patrick Gérard, recteur del’académie de Bordeaux lors du premier colloqueLandes interactives 2004, organisé par le Conseil gé-néral et l’inspection académique, ainsi que dans uneenquête, parue en juin 2004, réalisée pour lecompte du ministère de l’Éducation nationale et del’association des éditeurs de manuels scolaires, Sa-voir-Livre. La satisfaction des acteurs de l’opération,en particulier enseignants et élèves, est avérée, ain-si que les apports pédagogiques d’une utilisationraisonnée de l’outil informatique.Deux autres départements se lancent dans des opé-rations similaires : l’Isère et les Bouches-du-Rhône.-----Année scolaire 2004-2005.L’exploration des usages pédagogiques se poursuit,notamment sous l’impulsion du Catice, selon lesquatre axes prioritaires définis par le recteur PatrickGérard au colloque de Moliets, et par Pierre LacueilleIA-IPR, conseiller pour les Tice, devant les principauxdes collèges landais, en septembre 2004 :– l’enseignement des langues vivantes et en parti-culier la maîtrise de l’oral ;– l’usage des ressources du multimédia, notammenten sciences ;– le travail personnel de l’élève;– l’accompagnement à la recherche documentaire.Tous les enseignants de collèges (1200) sont dotésd’un ordinateur portable, indépendamment du faitqu’ils enseignent ou non en classe de 3e.Deux nouveaux collèges ouvrent leurs portes, à La-benne et à Linxe.Le Conseil général d’Ille-et-Vilaine décide d’équiperses collégiens de 3e.-----Année scolaire 2005-2006: extension de l’opérationaux classes de 4e.À l’occasion du renouvellement triennal des ordi-nateurs portables, le Conseil général des Landes dé-cide d’étendre l’opération aux collégiens des classesde 4e : depuis lors, ce sont donc 8500 ordinateursportables qui équipent les ±7200 collégiens landaisrépartis dans ±125 classes de 3e et ±145 classes de4e, ainsi que leurs professeurs et le personnel d’en-cadrement des 34 collèges publics du département.-----Année scolaire 2006-2007.Le Conseil général décide de financer un poste d’as-sistant d’éducation Tice dans chaque collège, char-ge que l’État ne pouvait plus assurer.Nouvelle dotation de 100 tableaux numériques etd’un vidéoprojecteur pour deux salles de classe.

Édition du journal En Connexion, pour observer etrelayer les utilisations pédagogiques des ordinateursportables et des différents outils numériques, à l’in-tention des enseignants, des personnels de collègeset des familles.Nouveau colloque organisé en octobre 2006 par leConseil général des Landes, afin de faire le point surles usages pédagogiques et sur les opérations si-milaires conduites dans les Bouches-du-Rhône et enIlle-et Vilaine.-----Année scolaire 2007-2008: test de 50 visualiseurs nu-mériques dans une vingtaine de collèges.L’utilisation des ordinateurs portables se banaliseet de nouveaux équipements de visualisation col-lective – des visualiseurs numériques [sortes d’épi-scopes modernes] – sont déployés dans les collègespour être testés en situation pédagogique, no-tamment en cours de sciences.Plus de 600 vidéoprojecteurs sont en fonctionne-ment dans les collèges; ils sont renouvelés lorsqu’ilssont hors d’usage.Chaque établissement dispose d’une connexion in-ternet en SDSL à 1,6 Mb/s.Réalisation de reportages vidéos sur les usages pé-dagogiques des outils numériques, sur la base duvolontariat, dans huit collèges du département.-----Année scolaire 2008-2009.Second renouvellement triennal des ordinateurs por-tables. À cette occasion, le Conseil général décidede mener une investigation poussée auprès des dif-férents acteurs ou observateurs de l’opérationpour connaître la réalité des usages. À l’issue d’unappel d’offres, c’est l’institut TNS Sofres qui est re-tenu pour conduire cette enquête.Le département de l’Oise équipe ses collégiens de5e et de 4e, et celui de la Corrèze ceux de 5e.-----Année scolaire 2009-2010: équipement, en fixe, detoutes les salles de cours d’un visualiseur, d’un vi-déoprojecteur et d’un tableau interactif.L’opération “un collégien, un ordinateur portable”franchit un nouveau cap: en complément de la do-tation en ordinateurs portables, toutes les salles decours de tous les collèges publics des Landes sontdésormais équipées, en fixe, d’un tableau blanc in-teractif, d’un vidéoprojecteur et d’un visualiseur nu-mérique.

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LES MOYENS-----Les équipements individuels– Les ordinateurs portablesC’est la partie la plus visible de l’opération: ellecompte aujourd’hui environ 8500 ordinateurs por-tables qui sont prêtés aux élèves pour la durée del’année scolaire, et aux enseignants qui les conser-vent pendant trois ans, avec un petit stock “tam-pon” de machines disponibles en cas de change-ments d’effectifs, et en dépannage en cas de vol oude casse matérielle.Tous ces ordinateurs sont achetés avec une garan-tie de trois années, exercée sur site, c’est-à-dire queles réparations ont lieu uniquement dans les collègesaux jours et heures d’ouvertures de ceux-ci.À l’issue des trois années d’utilisation, les ordina-teurs sont revendus «aux meilleurs intérêts du dé-partement», en l’état et en un lot unique. Il n’y apas de vente aux particuliers.-----8420 ordinateurs portables– 3278 élèves de 3e répartis dans 135 classes,– 3913 élèves de 4e répartis dans 156 classes,– 50 élèves d’UPI répartis dans 5 classes,– 1219 enseignants,– 125 administratifs,– 40 assistants d’éducation Tice.-----

-----– Les logicielsL’opération “un collégien, un ordinateur portable”ne prend tout son sens que grâce aux nombreuxlogiciels et ressources pédagogiques qui sont ins-tallés sur les machines.-----Windows XPsystème d’exploitation,TapTouch Garfieldapprentissage et maîtrise du clavier,Inspirationorganiseur d’idées, en schémas et en mode plan,ActivInspirelogiciel pour tableau interactif Promethean,Notebooklogiciel pour tableau interactif Smart,VisionAPlogiciel pour visualiseur numérique Avermedia,SynchronEyessurveillance des ordinateurs des élèves,prise de contrôle et blocage,HotPotatoesélaboration de Quizz, QCM, mots croisés,textes à trousOpenOfficesuite bureautique : traitement de texte, tableur, préAO, dessin vectoriel, mathématiques,base de données,MS Wordtraitement de texte,MS PowerPoint visionneusepour lire les fichiers Microsoft powerpoint,MS Excel Visionneusepour lire les fichiers Microsoft Excel,MS Publisherlogiciel de mise en pages (modèles déterminés),Scribuslogiciel de mise en pages,Sunbirdagenda et calendrier,Post-it stickercréation et gestion de notes,ALZipcompresseur/décompresseur de fichiers,MS Document Scanningnumérisation de documents et reconnaissance decaractères,Foxit Readerlecteur de fichier pdf,PDFcreatorimprimante virtuelle pour la création de pdf,Trend officescanantivirus,Internet ExplorerMozilla Firefoxnavigateurs Internet,AM-DeadLinkvérificateur de favoris et bookmarks,

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Outlook Expressmessagerie électronique,Windows Live Messengermessagerie instantanée,KompoZerDreamweavercréation de site Internet,Paint.netGimptraitement d’image et retouche photo,PhotoFiltreapplication de filtres graphiques sur des images,MS PhotorécitLanterne magiquecréation de diaporamas, insertion de fond sonore,Picasaconsultation, organisation,retouche et mise en ligne de photos et images,XnViewvisualisation et conversion des formats graphiques,ArtRageArtWaeverpeinture et création graphique bitmap,Inkscapedessin vectoriel,Diacréation de diagrammes et schémas vectoriels,Paintdessin bitmap,Disc Creatorcréation et gravure de CD audio,et de CD/DVD de données,CDBurnerXPcréation et gravure de CD audio, CD/DVDde données, image ISO, copie de disque, etc.,Free Easy Burnercréation et gravure de CD audio,CD/DVD de données, ripe les CD en MP3, etc.iTunesgestion de fichiers audio MP3, AAC et vidéo,Free Video to DVDcréation de DVD vidéo,InterVideo WinDVDlecteur de DVD,MediaPlayerClassicVLC Media Playerlecteur de fichiers vidéo, audio, multimédias,SWD Openerlecteur de fichiers au format Flash,Quicktime PlayerWindows Media Playerlecteur vidéo,Real alternativecodec vidéo,Audacitycréer, enregistrer, convertir des sons,Magnétophoneenregistrer sa voix,

Magix Music Makertable de montage audio,Magix Music Studioplateforme d’enregistrement audio multipistes,arrangement et édition,Free MP3 WMA converterconvertisseur audio dans plusieurs formats,Free CD Ripper“ripper” les pistes son des CD-audiopour les copier sur le disque dur,Windows Movie Makermontage vidéo,Magix Video Deluxetable de montage audio/vidéo, synchroniser,mixer, ajouter des sous-titres…,Magix TV Videorecordercapture vidéoFree Videos to DVDconvertir et graver des vidéos vers le format DVDFLV Playerlecteur pour des fichiers en Flash vidéo,Free FLV Converterconvertisseur de vidéos en flashpour diffusion en streaming,Free Video ConverterCodeur Windows Mediaencodeur vidéo pour différents typesde supports téléphone, internet, télévision, etc.,Windows Media Encoderenregistrer une vidéo, la convertir en WMA.-----Le Petit Robertdictionnaire de français,MS EncartaEncyclopædia Universalisencyclopédies multimédias,Google Earthphotographies satellite, photos au sol,Atlas Magnard Collège-Lycéeatlas historique et géographique,IRCAM Musique Lab 1construction rythmique, échelle et mode,polycyles, montage, nuages,hauteur et intensité, musicologie,IRCAM Musique Lab Maquettemusicologie,OPI Spring 4e (Hachette),OPI Spring 3e (Hachette),New Step In 4e (Hatier)New Step In 3e (Hatier)manuels numériques d’anglais,Le Site.tv de France 5vidéos pour sept disciplines,FreeLangdictionnaire bilingue anglais-français,Juntos 4e (Nathan)Juntos 3e (Nathan)manuels numériques d’espagnol.

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MaxiPlus Le Robert & Collinsdictionnaire bilingue espagnol-français,El conjudadorconjugueur de verbes en espagnol,Lexibarcaractères spéciaux employés en espagnol,Objectif Françaisméthodologie en français,Grammaire numérique MagnardBréviaire d’orthographe française,aide-mémoire sur l’orthographe,Le Conjugueurconjugaison des verbes en français,J’ai vécu au 18e siècledocuments lexicaux, littéraires et historiques,Cartes et croquiscréation de cartes et chorèmes en géographie,Jalons pour l’histoire du temps présentvidéos de l’INA, pour le programmed’histoire contemporaine de 3e,Objectif Landesinstruction civique autour des missionsdu Conseil général des Landes,Cabri II pluslogiciel de géométrie en 2D,Cabri 3Dlogiciel de géométrie en 3D,Edumedia en mathématiquesanimations pédagogiques multimédias,Manuel de mathématiques de Sesamath en 4e

Manuel de mathématiques de Sesamath en 3e

MathEnPoche 6e, 5e, 4e, 3e

exerciseurs en mathématiques,Ebep’sanales du brevet des collèges, et corrigés,Sine Qua Nontraceur de courbes, logiciel de mathématiques,CalculatricePluscalculatrice scientifiqueet convertisseur d’unité de mesure,123Mathsexerciceurs en mathématiquesde la 6e à la terminale,EduMedia en sciences physiquesanimations pédagogiques multimédias,Stellariumlogiciel d’astronomie,Sismolog Juniorlogiciel de géologie, vulcanologie,tectonique des plaques,Edumedia en SVTanimations pédagogiques multimédias en flash,Transmission de la vie de Carré MultimédiaSciences animées de Carré Multimédiaanimations pédagogiques multimédias en SVT,Apprendre le surflogiciel d’apprentissage de ce sport,ASSR, éducation à la sécurité routière.

-----Les matériels collectifsDepuis septembre 2009, toutes les salles de coursde tous les collèges publics des Landes sont désor-mais équipées, en fixe, d’un tableau blanc interactif,d’un vidéoprojecteur, et d’un visualiseur numérique.Cet équipement contribue à alléger le poids des car-tables en dispensant les élèves d’apporter les ma-nuels scolaires en cours, quel que soit le niveau d’en-seignement.– Les vidéoprojecteursIls permettent de projeter une source vidéo (dite vi-déogramme) ou informatique, sur un écran ou surune surface murale blanche.– Les tableaux numériques interactifsCe sont des dispositifs alliant les avantages d’unécran tactile et de la vidéoprojection: un écran blanctactile est relié à un ordinateur via un câble (gé-néralement USB); il lui transmet, par simple toucher,diverses informations, comme la position du poin-teur de la souris. Un vidéoprojecteur se charge d’af-ficher l’écran de l’ordinateur sur ce tableau: il estdonc possible d’effectuer à la main (ou à l’aide d’unstylet selon le modèle) et sur un format d’écran as-sez important (jusqu’à plus de 2 m de diagonale),tout ce qu’il est possible de réaliser à l’aide d’unesouris. Le tableau interactif est fourni avec un lo-giciel dédié, qui permet de tirer parti des possibi-lités nouvelles de cette technologie.– Les visualiseurs numériquesÉgalement connu sous les noms de rétroprojecteurnumérique, épiscope, visualisateur, visionneuse ouencore banc-titre, le visualiseur est un peu la ver-sion numérique du rétroprojecteur. Il s’agit d’unecaméra montée sur un bras articulé, avec pour fonc-tions de capturer des images de textes, d’objets,d’images, de lamelles de microscope, de radiogra-phies, d’objets en mouvement, etc. Les images sontensuite affichées par le biais d’un vidéoprojecteur.-----876 vidéoprojecteurs,795 tableaux interactifs,798 visualiseurs numériques,347 imprimantes laser noir et blanc,134 scanners-numériseurs,121 graveurs de CD-DVD,95 imprimantes laser couleur,66 appareils photo numériques,35 disques durs USB…-----

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-----Les réseaux des collèges– Le câblageAvant de distribuer les ordinateurs portables, tousles collèges ont été câblés, c’est-à-dire que toutesles tables de toutes les salles de classe de tous lescollèges publics des Landes (soit environ 22000points, avec une moyenne de 620 par collège) sontreliées aux réseaux électrique et informatique del’établissement.Le Conseil général a choisi d’installer un réseau fi-laire plutôt qu’un réseau Wi-Fi sans fil, pour des rai-sons de coûts et pour une qualité de service plus per-formante (un réseau filaire à 100 Mb/s est 10 foisplus rapide qu’un réseau Wi-Fi). Le débat sur la no-civité supposée des “micro-ondes” a également jouéun rôle dans cette décision.Ce réseau informatique, interne à chaque établis-sement, dessert donc toutes les salles de classe, ycompris les salles de permanence, le CDI et la salledes professeurs. C’est sur ce réseau que sontconnectés tous les matériels informatiques (ordi-nateurs portables des enseignants et des élèves, vi-déoprojecteurs, imprimantes, etc.).– Les serveurs et leurs logicielsToutes ces connexions convergent vers deux serveursinstallés dans chaque collège: le premier est un ser-veur de messagerie (utilisé pour stocker et trans-mettre du courrier électronique); le second est unserveur d’applications pédagogiques et de stocka-ge, sur lequel élèves et professeurs peuvent dépo-ser et échanger leurs documents de travail.Ces deux serveurs sont équipés de leurs logiciels: sys-tème d’exploitation, logiciel de messagerie, serveurweb, logiciel antivirus, etc.– Le serveur internet sécuriséSon rôle est d’empêcher les accès non autorisés auréseau du collège (firewall/proxy), de supprimer lesvirus contenus dans les messages provenant d’in-ternet, d’interdire l’accès aux sites sensibles (filtra-ge d’URL).-----300 kilomètres de câble électriqueet de fibre optique,35 concentrateurs centraux (un par collège),620 répartiteurs (un par classe),35 serveurs pédagogiques d’établissement,35 plateformes de sécurité,68 onduleurs.-----

-----Les moyens humains– Les assistants d’éducation TiceIls sont là pour veiller au bon déroulement techniquede l’opération, pour aider les utilisateurs enseignantsou élèves, et pour gérer les matériels, les réparationset les pièces détachées.Suite au remplacement des “emplois jeunes” ou des“aides éducateurs”, financés par l’État par descontrats moins adaptés à un suivi de qualité, leConseil général a décidé, en novembre 2006, de fi-nancer l’emploi d’un assistant d’éducation dans lesétablissements dont les contrats “aides éduca-teurs” arrivent à échéance. En septembre 2007, 23collèges ont d’ores et déjà bénéficié de ce mode derecrutement. Comme prévu dans la convention demise à disposition, le Département donne aux chefsd’établissements les mêmes garanties que l’Étatquand il finance ces contrats. Il assure leur forma-tion. Enfin, il peut également les conseiller pour unchoix de recrutement si les principaux le souhaitent.– Les professeurs-ressourcesDans chaque collège, au moins un professeur- ressource est dédommagé à hauteur de deuxheures hebdomadaires. Ce sont des pédagogues ex-périmentés dans leur matière et dans l’usage desTice. Ils sont là pour apporter conseils, soutien et re-commandations aux enseignants de la même ma-tière. Motivé par les aspects pédagogiques de l’in-formatique et par la communication avec ses col-lègues, le professeur-ressource sert de lien entre lesenseignants de son collège et le Catice, diffusant oufaisant remonter les informations. Mais son rôle estsurtout d’inciter ses collègues à utiliser les outils in-formatiques.

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LA LOGISTIQUE-----Trois services du Conseil général travaillent à l’opé-ration “un collégien, un ordinateur portable”.– Le service des TIC (technologies de l’informationet de la communication) s’occupe de tout ce qui estlié à l’informatique des réseaux à l’extérieur des mursdu Conseil général. C’est le service référent de tou-te l’opération “un collégien, un ordinateur por-table”, depuis la rédaction et la gestion des mar-chés publics, et le choix des prestataires, en passantpar la sélection des ressources logicielles et la lo-gistique (stockage, conditionnement, livraison et ins-tallation dans les collèges), jusqu’à la gestion du parcmachines tout au long de l’année. Et cela, tant pourles ordinateurs portables que pour les imprimantes,les vidéoprojecteurs, les tableaux interactifs, les scan-ners, etc. installés dans les collèges.L’équipe est constituée de six techniciens de très bonniveau qui interviennent rapidement dans les col-lèges pour des pannes de serveur, de réseaux ou desproblèmes de sécurité, par exemple. C’est égalementcette équipe qui assure la gestion du parc infor-matique (gestion de stock, gestion d’incident, etc.)qui demande beaucoup d’organisation et de rigueur.Une application informatique est d’ailleurs spéci-fiquement dédiée à cette gestion; elle est centra-lisée, mais chaque collège peut aussi avoir accès auxinformations qui le concernent.Le service des TIC s’occupe également de la logis-tique des ateliers multiservices informatiques (AMI)mis en place dans différentes communautés de com-munes du département. Il suit également le dé-ploiement de l’ADSL, de la téléphonie mobile, etmaintenant la mise en œuvre du WiMax.– La direction de l’Éducation, de la Jeunesse et desSports suit et accompagne les collèges tout au longde l’année. Ce service traite des actions du Conseilgénéral dans le cadre de la compétence que lui confè-rent les lois de décentralisation en matière d’édu-cation: les collèges (fonctionnement et contrôle desactes administratifs et budgétaires) à l’exclusion dela réalisation des travaux en régie directe sur les bâ-timents des collèges et de l’organisation des servicesde transport scolaire confiés à la direction del’Aménagement. Ce service qui comprend quinzeagents regroupe également toutes les actions vo-lontaristes du Département pour l’aide aux famillesen matière d’éducation et de loisirs, l’aide aux com-munes dans leurs efforts de modernisation de l’ac-cueil des élèves en école primaire, l’action éducati-ve des associations ainsi que le développement dusport, principalement auprès des jeunes.

– La direction de l’Aménagement, cellule “bâti-ments”, prend notamment à son compte la construc-tion des nouveaux collèges, les études et travaux decâblage, ainsi que leur maintenance dans desconditions particulières puisqu’elle ne peut inter-venir que lorsque les cours sont terminés, ou pen-dant les vacances scolaires. C’est également elle quise charge de l’achat des mobiliers et notamment descasiers pour entreposer, dans la journée, les ordi-nateurs portables.Doté d’un parc immobilier de 300000 m² de plan-cher, le Département construit, rénove et entretientde nombreux équipements publics : collèges, bâti-ments administratifs, gendarmeries, équipementssanitaires, sociaux et culturels, patrimoine historique.La cellule “bâtiments” qui assure ces missionscompte neuf agents, dont les tâches recouvrent lapréparation des programmes d’interventions, l’éla-boration des programmes d’opérations, la condui-te générale des opérations en liaison avec les ar-chitectes, la préparation et le suivi des marchés, lamaîtrise d’œuvre de l’entretien courant.

-----LE COMITÉ DE PILOTAGE-----Depuis les débuts de l’opération “un collégien, unordinateur portable”, un comité de pilotage, ins-tance paritaire comprenant des représentants del’Édu cation nationale et du Conseil général desLandes, se réunit régulièrement pour abordertoutes les questions pratiques liées à sa mise enœuvre. Ce comité est constitué des conseillers gé-néraux chargés de l’Éducation et des Tice, des re-présentants des principaux de collèges et des en-seignants, de l’inspection académique des Landes,du délégué académique des Tice du rectorat de Bor-deaux, ainsi que des membres des services “ad hoc”du Conseil général.

-----LE JOURNAL DE L’OPÉRATION-----De septembre 2006 à décembre 2009, dix-sept nu-méros d’En Connexion, – le journal dédié à l’opé-ration “un collégien, un ordinateur portable” – ontété édités par le Conseil général des Landes: l’oc-casion de visiter chacun des collèges publics du dé-partement, et d’y observer, en situation pédago-gique, l’utilisation des différents outils numériquesmis à la disposition des enseignants et des élèves.

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Année scolaire2007-2008

#7LE JOURNAL DE L’OPÉRATION ”UN COLLÉGIEN, UN ORDINATEUR PORTABLE”CONSEIL GÉNÉRAL DES LANDES / NOVEMBRE 2007

VILLENEUVE-DE-MARSAN,GEAUNE, HAGETMAU.

#8LE JOURNAL DE L’OPÉRATION ”UN COLLÉGIEN, UN ORDINATEUR PORTABLE”CONSEIL GÉNÉRAL DES LANDES / JANVIER 2008

AMOU, DAX, ST-VINCENT-DE-TYROSSE

#9LE JOURNAL DE L’OPÉRATION ”UN COLLÉGIEN, UN ORDINATEUR PORTABLE”CONSEIL GÉNÉRAL DES LANDES / MARS 2008

BISCARROSSE, MORCENX, GABARRET

#10LE JOURNAL DE L’OPÉRATION ”UN COLLÉGIEN, UN ORDINATEUR PORTABLE”CONSEIL GÉNÉRAL DES LANDES / AVRIL 2008

LABENNE, MONT-DE-MARSAN, TARTAS

#13LE JOURNAL DE L’OPÉRATION ”UN COLLÉGIEN, UN ORDINATEUR PORTABLE”CONSEIL GÉNÉRAL DES LANDES / JANVIER 2009

CAPBRETON, SAINT-MARTIN-DE-SEIGNANX,LINXE

#11LE JOURNAL DE L’OPÉRATION ”UN COLLÉGIEN, UN ORDINATEUR PORTABLE”CONSEIL GÉNÉRAL DES LANDES / JUIN 2008

PEYREHORADE, GRENADE-SUR-L’ADOUR, DAX

Année scolaire2008-2009

#12LE JOURNAL DE L’OPÉRATION ”UN COLLÉGIEN, UN ORDINATEUR PORTABLE”CONSEIL GÉNÉRAL DES LANDES / NOVEMBRE 2008

SOUSTONS, RION-DES-LANDES,LOGISTIQUE

#17LE JOURNAL DE L’OPÉRATION ”UN COLLÉGIEN, UN ORDINATEUR PORTABLE”CONSEIL GÉNÉRAL DES LANDES / DÉCEMBRE 2009

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Tous les numéros du journal En Connexion

sont disponibles, sous forme numérique,

sur http://issuu.com/1collegien1ordinateurportable

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LIENS SUR INTERNET ET BIBLIOGRAPHIE SOMMAIRE-----Le site de l’opération “un collégien, un ordinateur portable” :http://www.landesinteractives.net-----En Connexion, le journal de l’opération, est disponible, sous forme numérique,sur http://issuu.com/1collegien1ordinateurportable-----Les photos réalisées par Vincent Monthiers pour les couverturessont sur http://www.flickr.com/photos/cg40/sets-----Certains cours ont été filmés à la demande du Conseil général en 2008 et 2009.On peut les visionner sur http://www.dailymotion.com/cg40/1-----Le CRDP Aquitaine a également réalisé deux reportages sous la directionde Pierre Lacueille IA IPR de physique :http://crdp.ac-bordeaux.fr/sciences/reforme/physique/investigation.asphttp://crdp.ac-bordeaux.fr/sciences/reforme/tice/tice02.asp-----Les dossiers de l’ingénierie éducative ont publié, en décembre 2007, une série d’ar-ticles sur des opérations menées dans les départements français avec des ordinateursportables. L'article concernant l'opération landaise a été rédigé par Pierre Lacueille,conseiller TICE du recteur de l’académie de Bordeaux.On peut le consulter sur http://www.sceren.fr/dossiersie/60/ptidos60.aspLes dossiers de l’ingénierie éducative ont également publié, en juillet 2009, une séried’articles, dont l’un d’eux fait un bilan sur l’utilisation, dans les Landes, des manuelsnumériques en langues vivantes.On peut le consulter sur http://www.sceren.fr/dossiersie/66/ptidos66.asp-----L’enquête réalisée par l’institut TNS Sofres en 2009 est téléchargeable_sur http://www.landesinteractives.net-----Mario Asselin a commenté cette enquête sur son blog :http://carnets.opossum.ca/mario/archives/2009/07/enquete_un_collegien_un_portable_landes_tns-sofres.htmlDe même que Bruno Devauchelle :http://www.brunodevauchelle.com/blog/?p=378http://www.brunodevauchelle.com/blog/?page_id = 387http://www.brunodevauchelle.com/blog/?page_id = 382-----

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Lyonel Kaufmann a fait de même sur le sien :http://lyonelkaufmann.ch/histoire/2009/07/26/landes-les-ordinateurs-en-classe-tou-jours-surestimes-et-sous-utilises/http://lyonelkaufmann.ch/histoire/2009/08/27/links-for-2009-08-26/-----Caroline Jouneau-Sion a également son analyse :http://pedagotice.blogspot.com/2009_08_01_archive.html-----L’équipe du Café pédagogique suit l’opération landaise depuis ses débuts; elle a relayéles colloques organisés en 2004 et 2006 ; elle a également commenté l’enquête :http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2009/07/15072009Accueil.aspxhttp://www.cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/landes06_index.aspxhttp://www.cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/landes04_index.aspx-----Anne Svirmickas a publié un article en janvier 2007 dans le n° 3 de Mathématice quel’on peut retrouver http://www.revue.sesamath.net/spip.php?article48-----Mehdi Khaneboubi a publié, en 2007, une thèse de doctorat en sciences de l’édu-cation, à l’université Victor Ségalen Bordeaux-II, sous la direction du professeurPierre Clanché : Usages de l’informatique au collège et habitus professionnels desenseignants : exemple de l’opération “un collégien, un ordinateur portable” dansle département des Landes.Mehdi Khaneboubi s’est exprimé, en 2008, dans le troisième colloque DidaPro. Lecompte rendu de son intervention est disponible sur http://edutice.archives-ouvertes.fr/docs/00/35/90/25/HTML/a0806e.htm-----Hervé Daguet, Alain Jaillet et Xavier D’Aleo, Un collégien, un ordinateur portable,ULP multimédia/laboratoire des sciences de l’éducation, université Louis Pasteur deStrasbourg, 2002.-----Hervé Daguet et Alain Jaillet, Quels modèles pédagogiques pour un cartable numé-rique?, VIe biennale de l’éducation et de la formation, Paris, 2002.Hervé Daguet a publié un article en février 2007 dans L’Actualité éducative n° 450disponible sur http://www.cahiers-pedagogiques.com/article.php3?id_article = 2882Alain Jaillet, L’école à l’ère numérique, des espaces numériques pour l’éducation àl’enseignement à distance, éd. de L’Harmattan, collection Savoir et formation, 2004.-----

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REMERCIEMENTSAUX COLLÉGIENS, ANCIENS COLLÉGIENS, PARENTS D’ÉLÈVESENSEIGNANTS,PERSONNELS D’ENCADREMENT ET DE VIE SCOLAIREDES 34 COLLÈGES PUBLICS DES LANDES

COLLÈGE GASTON CRAMPE, À AIRE-SUR-ADOURCOLLÈGE DU PAYS DES LUYS, À AMOUCOLLÈGE JEAN MERMOZ, À BISCARROSSECOLLÈGE DE BISCARROSSE 2COLLÈGE JEAN ROSTAND, À CAPBRETONCOLLÈGE D’ALBRET, À DAXCOLLÈGE LÉON-DES-LANDES, À DAXCOLLÈGE JULES FERRY, À GABARRETCOLLÈGE PIERRE DE CASTELNAU, À GEAUNECOLLÈGE VAL D’ADOUR, À GRENADE-SUR-L’ADOURCOLLÈGE JEAN-MARIE LONNÉ, À HAGETMAUCOLLÈGE DE LABENNECOLLÈGE FÉLIX ARNAUDIN, À LABOUHEYRECOLLÈGE DE LINXECOLLÈGE JACQUES PRÉVERT, À MIMIZANCOLLÈGE CEL LE GAUCHER, À MONT-DE-MARSANCOLLÈGE JEAN ROSTAND, À MONT-DE-MARSANCOLLÈGE VICTOR DURUY, À MONT-DE-MARSANCOLLÈGE SERGE BARRANX, À MONTFORT-EN-CHALOSSECOLLÈGE HENRI SCOGNAMIGLIO, À MORCENXCOLLÈGE RENÉ SOUBAIGNÉ, À MUGRONCOLLÈGE SAINT-EXUPÉRY, À PARENTIS-EN BORNCOLLÈGE DU PAYS D’ORTHE, À PEYREHORADECOLLÈGE DE POUILLONCOLLÈGE MARIE CURIE, À RION-DES-LANDESCOLLÈGE GEORGE SAND, À ROQUEFORTCOLLÈGE FRANÇOIS TRUFFAUT, À SAINT-MARTIN-DE-SEIGNANXCOLLÈGE JEAN MOULIN, À SAINT-PAUL-LÈS-DAXCOLLÈGE LUBET BARBON, À SAINT-PIERRE-DU-MONTCOLLÈGE CAP DE GASCOGNE, À SAINT-SEVERCOLLÈGE DE SAINT-VINCENT-DE-TYROSSECOLLÈGE FRANÇOIS MITTERRAND, À SOUSTONSCOLLÈGE LANGEVIN WALLON, À TARNOSCOLLÈGE JEAN ROSTAND, À TARTASCOLLÈGE PIERRE BLANQUIE, À VILLENEUVE-DE-MARSAN

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REMERCIEMENTS PARTICULIERS AUX INSPECTEURS D’ACADÉMIE, INSPECTEURS PÉDAGOGIQUES RÉGIONAUX, POUR LE TEMPS QU’ILS NOUS ONT CONSACRÉ,

À MARIO ASSELIN,BRUNO DEVAUCHELLE,PIERRE LACUEILLE,CÉLINE METTON-GAYON, ET SEYMOUR PAPERT,POUR LEUR CONTRIBUTION À CET OUVRAGE,

ET À TOUS LES ENSEIGNANTS QUI ONT BIEN VOULU NOUS ACCEPTER DANS LEURS COURS.

QUE TOUS CEUX DONT NOUS N’AVONS PAS PU PUBLIER LE TÉMOIGNAGE VEUILLENT BIEN NOUS EN EXCUSER.

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Conseil général des LandesHôtel du département23, rue Victor Hugo40025 Mont-de-Marsan Cedextél. : 05 58 05 40 40www.landes.orgwww.landesinteractives.net

Service des technologies de l’information et de la communicationPierre-Louis Ghavam

-----conception éditoriale,textes, conduites d’entretiens,reportages dans les collèges,photographies (sauf mentions contraires),design graphique:Marie Bruneau et Bertrand Genierwww.pressepapier.fr

photographies de couverture,et pp. 87, 131, 133, 134, 135, 190, 303 à 307:Vincent Monthiers

relecture :Sylvie Barras, Hélène Baron

----Ouvrage composé en Frutiger, Helvetica et Centenial, dans leurs différents dessins

Achevé d’imprimer le 20 décembre 2009

sur les presses de l’imprimerie BM – F-33610 ZI Canéjan

Ce document est imprimé dans une imprimerie Imprim’vert avec des encres végétales

sur du papier recyclé à partir de fibres issues de la collecte sélective

et blanchi sans utilisation de chlore.

Dépôt légal : 4e trimestre 2009

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Depuis 2001, avec l’accompagnement de l’Éducation nationale sur le plan pédagogique, le Conseil général des Landes confie un ordinateur personnel portable à chaque collégien de 4e et de 3e, et à chaque enseignant des 34 collèges publics du département.Cette opération – nommée “un collégien, un ordinateur portable” –, est historiquement la première de ce type à avoir été conduite en France.Retour sur huit années d’innovations.

-----L’opération ne se résume pas au prêt de 8500 ordinateurs portables ;le Conseil général des Landes met également en œuvretous les moyens permettant d’intégrer l’informatique dans la pédagogie :câblage intégral des collèges, dotation pour l’achat de ressources pédagogiques, financement d’un poste d’assistant d’éducation dédié à l’opération dans chaque établissement, installation de matériels collectifs (serveurs, imprimantes, vidéoprojecteurs, tableaux interactifs, visualiseurs, etc.).