Livre des résumés - Uppsala University

46
1 Colloque international La reformulation : à la recherche d’une frontière 8-9 juin 2017 Université d’Uppsala, Suède Livre des résumés Communications orales

Transcript of Livre des résumés - Uppsala University

1

Colloque international

La reformulation : à la recherche d’une frontière 8-9 juin 2017

Université d’Uppsala, Suède

Livre des résumés Communications orales

2

3

Contexte et subordonnée participiale au participe passé en français : une

reformulation qui joue un rôle dans la structuration du discours

Ali ABDOULHAMID

Université des Comores

Les travaux descriptifs réalisés sur les propositions subordonnées circonstancielles concernent

essentiellement celles qui ont un verbe conjugué à un mode personnel. Ils font abstraction des

subordonnées participiales, qui sont reconnues dans : le chat parti, les souris dansent. Beaucoup

de grammaires de référence ignorent cette construction (Wagner et Pinchon, 1991), d’autres la

méconnaissent (Wilmet, 1997). Celles qui l’évoquent l’expliquent en la mettant en équivalence

avec une subordonnée circonstancielle conjonctive en dès que ou lorsque : dès que le chat est

parti, les souris dansent (Grevisse 1993 ; Riegel et al 1994).

Dans leur analyse, les grammaires qui parlent de la construction avancent l’idée que son procès

est antérieur à celui de la proposition qui l’héberge, en précisant que la construction peut être

indifféremment précédée par des éléments comme une fois, sitôt, aussitôt, et que le participe

peut être précédé de l’auxiliaire étant. C’est également la position d’A. Borillo (2006 : 5) dans

son étude sur les structures participiales à prédication seconde.

Cependant, en observant ce type de subordonnée dans un corpus qui tient compte de son

contexte d’apparition, on peut dire que l’analyse de cette construction n’est pas aussi simple

que ce que veulent nous faire croire les grammaires de référence. En effet, cette construction

n’est pas équivalente à une subordonnée conjonctive, et elle ne reçoit pas indifféremment les

marqueurs temporels une fois, sitôt, aussitôt. Mais ce qui est plus important, c’est que le

contexte antérieur révèle que la subordonnée participiale au participe passé, lorsqu’elle ne

contient pas l’auxiliaire étant, constitue toujours une reformulation, comme dans les exemples

suivants :

(1) Elle supposa qu’un jeune homme nouvellement venu dans la maison, et logé dans cette

mansarde à louer depuis trois ans se suicidait. Elle monta rapidement, enfonça la porte

avec sa force de Lorraine en y pratiquant une pesée, et trouva le locataire se roulant sur un

lit de sangle dans les convulsions de l’agonie. Elle éteignit le réchaud. La porte ouverte,

l’air afflua, l’exilé fut sauvé (Balzac, La Cousine Bette)

(2) A peine nommé à la tête du conseil général, Patrick Devedjian, également secrétaire général

délégué de l'UMP depuis le 22 mai dernier, a voulu poser sa griffe sur l'organisation des

lieux. Nicolas Sarkozy parti, le nouveau patron du département a en effet adopté quelques

mesures immédiates pour libérer l'hôtel du département de certains carcans, parfois

générateurs de conflits avec le personnel, imposés par son prédécesseur alors ministre de

l'Intérieur (Le Parisien, 11-06-07).

Après une typologie de cette construction, l’objectif de notre communication est de montrer

qu’elle peut jouer un double rôle dans le discours : un connecteur argumentatif et un

introducteur de cadres du discours.

4

Bibliographie indicative :

ABDOULHAMID A. (2008) : Typologie des propositions subordonnées au participe passé.

Actes du premier Congrès Mondial de Linguistique Française, 9-12 juillet 2008, Paris.

www.linguistiquefrancaise.org

ADAM J.M. (2005) : La linguistique textuelle : introduction à l’analyse textuelle des discours.

Paris, A. Colin.

BORILLO A. (2006) : Quelques structures participiales à valeur temporelle en prédication

seconde, Travaux linguistiques du CERLICO 18. p.1-16

CHAROLLES M. (1997) : L’encadrement du discours : univers, champs, domaines et espaces.

www.lattice.cnrs.fr

NOLKE H. (1993) : Le regard du locuteur. Paris, Kimé.

RIEGEL M, PELLAT J.C, RIOUL R. (1994) : Grammaire méthodique du français, Paris, PUF.

ROSSARI C. (1998) : Les relations de discours avec ou sans connecteurs. Cahiers de

linguistique française 21, P. 181-192.

ROSSARI C. (2000) : Connecteurs et relations de discours : des liens entre cognition et

signification. Nancy, Presses Universitaires de Nancy.

WAGNER R, PINCHON J. (1991) : Grammaire du français classique et moderne, Paris,

Hachette.

WILMET M. (1997) : Grammaire critique du français. Paris, Hachette.

5

Les enjeux argumentatifs de la reformulation Cas du discours politique algérien

Ferhat BALOULI

Université Bouira - Algérie

Résumé

Il est conventionnellement admis que le discours politique vise à proposer des solutions ; mais

aussi à convaincre, une activité que les politiciens exercent tout au long de leur parcours en

développant plusieurs stratégies discursives ; entre autres, la stratégie de reformulation, dans ce

sens, les reformulations du discours politique ne peuvent s’inscrire que dans les processus

d’argumentations.

Les problématiques

Quelle sont les éléments du contexte (Linguistique et pragmatique) qui interviennent dans

l’explication des reformulations et de leurs visées argumentatifs ? Quelles sont les visées

argumentatives des segments de reformulation dans les discours politiques ? Autrement dit ;

quelles sont les fonctions des segments de reformulation dans les discours politiques ? et, enfin,

quelle définition de la reformulation peut-on déduire de ces investigations ?

La méthodologie

Le corpus de notre travail sera les discours politiques qui seront produit lors de la compagne

électorale des élections législatives 2017 en Algérie, nous allons nous concentrer, notamment,

sur les interventions des responsables politiques ; principalement dans les Média en français

(Radio Algérie 03, chaîne de télévision algérienne « Canal Algérie », les journaux

francophones).

Le travail sera, au début, un inventaire des reformulations, puis une analyse qualitative de

ces reformulations ; qui va se pencher sur les visées argumentatives des discours. Nos

instruments méthodologiques seront les concepts de l’analyse du discours et de la pragmatique ;

à l’image des travaux de P. Chareaudeau, O. Ducrot. Il sera question de relier segments de

reformulations aux aspects linguistiques qui orientent vers la compréhension des visées

argumentatives, mais aussi aux aspects contextuelles (pragmatiques) qui font la même chose.

Les principaux résultats qui seront développés

Nous estimons que notre travail va relever dans les discours politiques un certain nombre de

processus discursifs récurrents qui utilisent la reformulation pour des visées argumentatives

divers, on pourra distinguer des fonctions récurrentes, mais qui ne peuvent s’expliquer que

localement. Il sera possible, aussi, de constater que la reformulation peut être une explication

ou une réitération des propos… ceci dit que la reformulation est un carrefour de beaucoup de

phénomènes ; ce qui nous incite à ne définir la reformulation qu’en fonction des contextes.

6

Bibliographie

Agnès Steuckardt, « Décrire la reformulation : le paramètre rhétorique », Cahiers de

praxématique [En ligne], 52 | 2009, mis en ligne le 10 novembre 2013, consulté le 15

février 2017. URL : http://praxematique.revues.org/1415

Martine Schuwer, Marie-Claude, Le Bot et Élisabeth Richard (dir.) : Pragmatique de la

reformulation : Types de discours, interactions didactiques, Collection : Rivages

linguistiques, PUR, 2008.

Oswald Ducrot : Les échelles argumentatives, Paris, Ed. Minuit, 1980.

Patrick CHARAUDEAU, Dominique MAINGUENEAU (dir.), Dictionnaire d’analyse du

discours, Paris, Éd. du Seuil, 2002.

Philippe Breton, Gilles Gauthier : Histoire des théories de l’argumentation, Paris, La

découverte, 2000.

7

La pratique de la reformulation dans l’écriture de recherche en formation :

une problématique didactique

Lahlou BELKESSA

Université des Frères Mentouri, Constantine 1- Algérie

Résumé de la communication

Nous nous intéressons dans nos recherches à la problématique de l’affiliation des étudiants, en

phase de rédaction de leurs mémoires de master, à la communauté de chercheurs. Cette

affiliation passe inévitablement par la maitrise des normes rhétoriques régissant les genres

scripturaux de recherche. Ceci nous a amené à interroger la pratique de la reformulation dans

les écrits scientifiques produits par les étudiants et à réfléchir sur les moyens didactiques à

mettre en œuvre afin d’amener ces étudiants à adapter leurs pratiques de reformulation à la

dimension argumentative des discours de recherche.

L’écriture de recherche est une écriture polyphonique (Boch et Grossmann, 2001 ; Grossmann

et Rinck, 2004 ; Rinck, 2011, 2012) et problématisante (Nonnon, 2002), qui a pour objectif

principal le développement de la connaissance scientifique. Elle se définit à cet effet comme

une écriture à valeur euristique où la reformulation joue un rôle primordial. Reformuler n’est

pas chose aisée pour les apprenti-chercheurs, qui, prudents, ont tendance à privilégier la reprise

linéaire de l’information, moins risquée disent-ils, à la reformulation qui exige un effort

intellectuel assez important et une bonne maitrise disciplinaire.

Pour traiter cette problématique complexe, nous avons privilégié deux outils méthodologiques

complémentaires : l’enquête par questionnaire et l’analyse de productions. Notre enquête a

concerné 117 étudiants inscrits dans une université algérienne et pour qui le français est langue

étrangère. En nous basant sur les travaux de Barré-De Miniac (2000, 2011), nous nous sommes

demandé au cours de cette enquête sur le rapport des étudiants à la pratique de la reformulation

et la relation qu’elle entretient avec la lecture. Les habitudes lectorales des étudiants soulignent

la relégation de la pratique de reformulation au détriment de la simple notation de mots-clés ou

de passages pertinents.

Pour ce qui est de l’analyse de productions, 31 mémoires de recherche ont été analysés. En nous

référant aux théories linguistiques de l’énonciation (Nølke, Fløttum et Norén, 2004), nous nous

sommes intéressé plus spécifiquement aux difficultés scripturales rencontrées par les étudiants

dans la reformulation des discours d’autrui qu’ils intègrent à leurs propres discours. La pratique

de la reformulation est capitale dans l’écriture de recherche du fait qu’elle permet de faire

avancer le raisonnement et contribue ainsi à la création de nouvelles connaissances. Et quand

elle fonctionne bien, elle est un gage d’une bonne maitrise disciplinaire (Rinck, 2011). Mais

dans le corpus que nous avons analysé, les reformulations se présentent d’une manière assez

rudimentaire qui s’apparenterait facilement à de la reproduction. Aussi, les reformulations

observées sont-elles dans la majorité écrasante des cas des reformulations paraphrastiques

(Kara, 2004) qui ne dépassent pas le cadre de la reprise de l’information, et ne risquent, en

aucun cas, des interprétations. De surcroit, la reprise de l’information est complète, voire

linéaire sans aucune hiérarchisation, ni mise en relief.

Ces quelques, entres autres, nous ont amené à proposer des pistes de réflexions dans le but de

didactiser la reformulation dans le cas de la formation à l’écriture de recherche.

8

Bibliographie

Barré-De Miniac, C. (2011). Le rapport à l'écriture: une notion heuristique ou un nouveau

concept ? Dans B. Daunay, Y. Reuter, & B. Schneuwly (éd.), Les concepts et les

méthodes en didactique du français (pp. 213-224). Namur, Belgique: Presses

universitaires de Namur.

Barré-De Miniac, M.-C. (2000). Le rapport à l'écriture : aspects théoriques et didactiques.

Villeneuve d'Ascq: Presses universitaires du Septentrion, Col. Savoirs mieux.

Boch, F., & Grossmann, F. (2001). De l’usage des citations dans le discours théorique : des

constats aux propositions didactiques. Lidil 24, pp. 91-112.

Grossmann, F., & Rinck, F. (2004). La surénonciation comme norme du genre : l'exemple

del'article de recherche et du dictionnaire en linguistique. Langages(156), pp. 34-50.

Kara, M. (2004). Pratiques de la citation dans les mémoires de maîtrise. Pratiques (121/122),

pp. 111-142.

Nølke, H., Fløttum, K., & Norén, C. (2004). ScaPoLine - théorie scandinave de la polyphonie.

Paris : Kimé.

Rinck, F. (2011). Former à (et par) l’écrit de recherche. Quels enjeux, quelles exigences ? Le

français aujourd’hui(174), pp. 79-89.

Rinck, F. (2012). Réflexivité et écrits de recherche. Propositions pour une formation

universitaire à et par la littératie. Diptyque(24), pp. 79-91.

9

La reformulation entre re-dit et non dit

Houda BEN HAMADI

Institut Supérieur des Langues de Tunis

Université de Carthage

Nous nous proposons de traiter la question de la reformulation en tant que stratégie de

communication qui peut prendre la forme d’un côté de la répétition, de l’autre de la paraphrase.

Dans le premier cas, le locuteur reprend mot à mot les propos de son interlocuteur, alors que

dans le second cas, il essaie de paraphraser, c’est-à-dire de garder le sens tout en utilisant

d’autres mots qui pourraient parfois ne pas correspondre à ce qui a été déjà dit. A cet effet, il

ne s’agit plus de reformulation paraphrastique, mais de « reprise interprétative », telle qu’elle a

été définie par Murât et Cartier-Bresson (1987).

Notre objectif est d’étudier les marqueurs de reformulation de l’arabe dialectal tunisien, tels

que « macnȃhȃ » avec sa variante « macnithȃ » (c’est-à-dire) et « ẖasȋlu » (bref), afin de les

comparer à leurs équivalents du français, et ce en essayant de voir s’ils sont soumis aux mêmes

conditions sémantico-argumentatives. Les propriétés de chaque marqueur aidant, nous

essaierons de vérifier si l’on peut les classer, selon qu’ils introduisent des segments

paraphrastiques ou des segments interprétatifs.

Notre corpus comparable sera constitué de séquences d’interactions verbales tirées d’émissions

télévisées : « ça se discute » diffusée sur F2 et « ẖikayyȃt tounisiyya (Histoires tunisiennes) »,

réalisée à la manière de l’émission française et diffusée sur la chaîne privée « El-hiwar

ettounsi ».

Notre approche de l’analyse conversationnelle tiendra compte du fait que le discours est

constitué « de suites illocutoires » et s’inscrira ainsi dans le cadre des travaux de Moeschler

(1996).

10

Références bibliographiques

Gülich. E et Kotschi. T (1983), « Les marqueurs de reformulation paraphrastique », Cahiers de

linguistique française, n°5, pp. 305- 346.

Kanaan. L (2011), Reformulation, contacts de langues et compétence de communication :

analyse linguistique et interactionnelle dans des discussions entre jeunes libanais

francophones, Université d’Orléans, (thèse en ligne : htpps : //halshs.archives-ouvertes.fr)

Moeschler J. (1996), « Les connecteurs pragmatiques et la cohérence conversationnelle »,

Etudes romanes, n° 35, pp. 15-32.

Moeshler J. (1989), « Signification et interprétation dans la conversation », Verbum, XII,

pp.193-206.

Montagne C. (2008), « La reformulation : une stratégie en situation de débat politique ? » in

Schuwer M., Le Bot M. C. et Rchard E. (éd.), Pragmatique de la reformulation, Presses

universitaires de Rennes, pp. 91-103.

Murât. M et Carlier-Bresson. B (1987), « C’est-à-dire ou la reprise interprétative », Langue

française, n°73. La reformulation du sens dans le discours. pp. 5-15.

11

La représentation de la parole de l’adversaire dans les débats politiques

télévisés : de l’indispensable reprise à la reformulation orientée.

Domitille CAILLAT

Université Lumière Lyon 2 / ICAR

Lors des débats de l’entre-deux-tours des présidentielles françaises, interactions au déroulement

relativement normé, les échanges se présentent souvent comme une succession de longues tirades

monologales ne laissant pas la possibilité aux candidats de réagir immédiatement aux propos de

leur adversaire. Il leur est alors indispensable, lorsqu’ils reprennent la parole, de resituer ce sur quoi

ils souhaitent réagir, opération réalisée le plus souvent par le recours à différentes formes de

discours rapportés (DR). Si ces reprises assurent ainsi lors des débats une fonction primordiale dans

la dynamique même des échanges, il ne s’agit pas pour autant pour les candidats de reprendre

l’intégralité des propos énoncés par leur adversaire. Non seulement ces reprises témoignent alors

en soi de la sélection opérée par les candidats au sein du discours de leur adversaire —véritable

« marché de la récupération » (Torck 1994 : 29) —, mais encore elles constituent d’incontestables

reformulations. De fait : il est aujourd’hui communément admis qu’il est moins question lors de DR

de reproduire un discours que d’en représenter les points saillants — et ce, pour des raisons aussi

bien mémorielles (il n’est pas toujours possible de se rappeler des propos tels qu’ils ont été dits)

que communicatives (il faut aller au plus pratique).

Dans le cadre des débats, les reformulations du discours de l’adversaire présentent encore des

caractéristiques particulières : dans la mesure où il s’agit pour les candidats, par leur discours, de

montrer qu’ils sont plus aptes que leur adversaire à briguer la fonction présidentielle — entreprise

simultanée d’auto-valorisation et d’hétéro-dévalorisation —, ces reprises se trouvent être intégrées

à un programme argumentatif. On constate alors que la sélection comme la reformulation même du

discours représenté sont le plus souvent orientées de manière à servir les besoins argumentatifs des

candidats. Bien sûr, les candidats ne peuvent jamais complètement s’éloigner, si ce n’est de la

forme, tout du moins de la teneur des propos d’origine (la ressemblance étant une des conditions

sine qua non pour qu’il y ait « DR »), mais force est de constater combien le vocabulaire, la syntaxe,

l’intonation et la gestuelle mobilisés lors des « reprises » sont autant de composantes participant,

sous couvert de la représentativité que prétend garantir l’énoncé attributif « vous dites », à donner

à voir une version biaisée (car souvent caricaturale) du discours de l’autre.

C’est donc sur la base d’un corpus composé des six débats de l’entre-deux-tours des présidentielles

françaises ayant eu lieu à ce jour et dans le cadre d’une approche d’analyse du discours en

interaction (Kerbrat-Orecchioni 2005) que nous proposons d’étudier les différentes formes de

reformulation opérées par les candidats lorsqu’ils reprennent les propos de leur adversaire. Nous

tâcherons ainsi de démontrer comment, tout en assurant la continuité et la cohérence d’une

intervention par rapport à celle qui la précède sur la base de la similarité de quelques points saillants,

ces reprises constituent pour la plupart des reformulations réinterprétées servant les objectifs

argumentatifs particuliers des candidats.

12

Bibliographie sélective :

CAILLAT, D. (2013), « Le traitement multimodal des discours rapportés (en style direct) à l’oral :

procédés énonciatifs et argumentatifs du recours aux émotions », Semen n° 35, Les émotions

en débat : modes de sémiotisation et fonctions argumentatives, 83-99.

CONSTANTIN DE CHANAY, H. (2006) : « Dialogisme, polyphonie, diaphonie : approche interactive

et multimodale », dans L. PERRIN (éd.) Le sens et ses voix. Dialogisme et polyphonie en langue

et en discours, Metz : Publications de l’Université Paul Verlaine, 49-75.

KERBRAT-ORECCHIONI, C. (2005), Le discours en interaction, Paris : Armand Colin.

KERBRAT-ORECCHIONI, C. (2012), « Analyser du discours : le cas des débats politiques télévisés »,

acte du 3e Congrès Mondial de Linguistique Française, http://www.shs-conferences.org

ROULET, E., AUCHLIN, A., MOESCHLER, J., RUBATTEL C., SCHELLING M (1985), L’articulation du

discours en français contemporain, Berne : Peter Lang.

SANDRE, M. (2012) « Discours rapportés et stratégies argumentatives : Royal et Sarkozy lors du

débat de l'entre-deux tours », Langage et société n°140, 71-87.

TORCK, D. (1994), « Diaphonie et interaction dans le débat politique », in Littérature n°93, Le

partage de la parole, 15-30.

VINCENT, D., TURBIDE, O. (2006), « Le discours rapporté dans le débat politique : une arme de

séduction », in J.M. LOPEZ MUÑOZ, S. MARNETTE, L. ROSIER (éd.), Dans la jungle des discours.

Genre de discours et discours rapporté, Cadix : Servicio de Publicaciones de la Universidad,

307-318.

13

La reformulation en classe de français langue étrangère : considérations

syntaxico-sémantiques

Sewoenam CHACHU

Université de Ghana

La problématique

La plupart des travaux existants sur la reformulation concerne principalement la reformulation

en Langue Maternelle. Dans les situations de l’apprentissage d’une langue étrangère, la

reformulation semble se concentrer sur la reprise de ce qui est dit par l’enseignant en réponse à

une production de l’apprenant avec pour objectif de guider l’apprenant ou de corriger

l’apprenant. Cependant, nous postulons que les apprenants d’une langue étrangère effectuent

très souvent des reformulations. Notre communication s’insère dans un projet plus large de

Claire Martinot (1994, 1996, 2000, 2009, 2013, 2015) qui travaillent sur la reformulation et

l’acquisition depuis plus de deux décennies. Ce projet cherche à étudier le rôle de la

reformulation dans l’appropriation des langues parmi les enfants de 6 à 14 ans. Cependant, il

existe aussi un volet qui traite de la reformulation dans l’apprentissage des langues étrangères.

Nous nous intéressons au rôle de la reformulation dans l’apprentissage du Français Langue

Etrangère par des apprenants anglophones. En sachant que la reformulation des prédications

dépend de la plasticité paraphrastique, nous nous intéressons à savoir les types de paraphrases

produites par les apprenants et aussi à savoir si des différences vont se manifester selon le

niveau des apprenants – démontrant une différence des niveaux de compétence des apprenants.

La méthodologie

30 étudiants du Département de Français à l’Université du Ghana se portent volontaire pour

une expérience. 15 d’entre ces étudiants sont en première année de la licence et les 15 autres

sont en deuxième année. Après une lecture deux fois de l’histoire de Tom et Julie, on demande

aux apprenants du Français Langue Etrangère à l’Université du Ghana de raconter l’histoire

qu’ils ont entendue. Leurs réponses sont enregistrées et transcrites. Ensuite, on entreprendre

une analyse des productions des apprenants. La démarche que nous suivons pour l’analyse des

productions des apprenants est la démarche universelle du projet : une comparaison entre le

Texte source et la production de l’apprenant des différentes séquences, c’est-à-dire le texte

reformulé. Ensuite, nous présentons et une analyse qualitative et une analyse qualitative des

séquences analysées, (1, 4, 6 et 11) en commentant les différentes procédures utilisées par les

deux groupes d’étudiants.

Les principaux résultats qui seront développés.

Dans cette étude, nous analyserons les données de la manière suivante : Nous allons considérer

trois aspects de la complexité dans la production des apprenants. En premier lieu, nous allons

nous concentrer sur les reformulations des verbes complexes des séquences 4, 6 et 11. Ensuite,

nous allons discuter de la complexité prédicative attestée lors de la restitution des quatre

séquences. Finalement, nous allons présenter la complexité des procédures de reformulation

mises en œuvre par les apprenants.

14

Références bibliographiques

Ellis N.C., 2005. At the Interface: Dynamic Interactions of Explicit and Implicit Language

Knowledge, SSLA, 27, 305–352, Cambridge University Press

Ellis N. C., 2006. Selective Attention and Transfer Phenomena in L2 Acquisition: Contingency,

Cue, Competition, Salience, Interference, Overshadowing, Blocking, and Perceptual

Learning. Applied Linguistics 27(2). 164-194.

Ellis, N.C., 2008. Implicit and Explicit knowledge about language, J. Cenoz and N. H.

Hornberger (eds), Encyclopedia of Language and Education, 2nd Edition, Volume 6:

Knowledge about Language, 1–13. Springer Science+Business Media LLC.

Gerolimich, S., (forthcoming), Reformulation et acquisition d’une langue étrangère : De la

reformulation en langue maternelle à la reformulation en langue étrangère.

Gülich, E. Kotschi (1983). Les marqueurs de la reformulation paraphrastique. Cahiers de

Linguistique.

Harris, Z. S., (1988, 2007), Language and information, trad. Amr H. Ibrahim and Claire

Martinot. Paris : CRL.

Ibrahim, A. H., Martinot, C., 2003, Les reformulations lacunaires des enfants, La reformulation

un principe universel d’acquisition (sous la direction de Claire Martinot & Amr H.

Ibrahim), Paris : Kimé, 15-35

Martinot, C., 1994, La reformulation dans les productions orales de définitions et d'explications,

Thèse NR (sous dir. Blanche-Noëlle Grünig), Université Paris VIII.

Martinot, C., 2000a, Présentation acquisition et reformulation. In: Langages, 34ᵉ année, n°140,

Acquisition et reformulation.pp.3-8.

Martinot, C., 2000b, Étude comparative des processus de reformulation chez des enfants de 5

à 11 ans. In: Langages, 34ᵉ année, n°140, Acquisition et reformulation. pp. 92-123;

Martinot, C., 2009, Reformulations paraphrastiques et stades d’acquisition en français langue

maternelle, Cahiers de praxématique 52, 29-57.

Martinot C., 2015, La reformulation: de la construction du sens à la construction des

apprentissages en langue et sur la langue, Corela [online], HS-18 | 2015, placed online on

15th November 2015, consulted on 17th January 2017.

15

De l’usage des hashtags sur Instagram :

commenter l’image, classer le discours, le reformuler ?

Oriane DESEILLIGNY

Université Paris 13 – GRIPIC

Université Paris Sorbonne

Sur le réseau social Instagram, les images ou les photos sont mises à l’honneur, mais ne

prennent pleinement leur sens qu’accompagnées d’un court texte rédigé par l’individu,

l’institution, l’entreprise ou la marque détenteurs du compte. Outre ces quelques mots – parfois

plusieurs phrases – qui constituent (apparemment) une légende de l’image, les instagrameurs

ont l’habitude de clore la publication par un ou plusieurs mots-clefs – parfois des phrases

également, signalés par le recours à un ou plusieurs hashtags (#).

Massivement utilisé sur Twitter, le hashtag s’est également déployé dans d’autres espaces

discursifs numériques. Comme toute pratique d’écriture numérique, l’utilisation du hashtag

permet de mettre en œuvre plusieurs pratiques, qui relèvent de la simple documentation de

contenu en contextualisant l’image ou le discours publiés, en l’associant par un mot-clef à

d’autres contenus semblables, ou en détournant cette fonction d’archive au profit d’usages

politiques, idéologiques, humoristiques notamment. Marie-Anne Paveau1 a ainsi bien montré

les différents usages de ces « technomorphèmes » sur Twitter (depuis l’usage idéologique,

ludique des hashtags jusqu’à des formes de modalisation du discours).

Dans le cadre de cette proposition de communication, nous souhaitons nous intéresser à la

relation entre les trois éléments d’un post sur Instagram : l’image, l’énoncé associé à l’image et

le(s) hashtag(s) qui rendent le contenu investigable et l’associent, selon le processus de la

conscription2, à des mots clefs déjà utilisés ou nouvellement créés. À partir d’un corpus d’une

centaine de publications (issues de comptes essentiellement privés qui seront anonymisés, mais

aussi de comptes de marques au service de leur branding) sur Instagram, nous souhaitons

analyser cette relation à l’aune de la notion de reformulation qui constitue une bonne entrée

pour saisir la construction du sens au sein de ces pratiques textuelles feuilletées. L’énoncé

associé à la photo peut-il être considéré comme une légende – et donc une reformulation, de

l’image ? Et le(s) hashtag(s) constituent-il des reformulations, des dérivations ou des

compléments de l’énoncé et de l’image ?

Ces pratiques textuelles diverses – on considère ici le texte dans une extension large 3 -

interrogent la relation sémantique et sémiotique du discours à l’image et la relation

interactionnelle de l’énonciateur (individu, organisation ou marque) à ses affiliés : énoncés

destinés à décrire l’image, à l’archiver, à capter l’attention4 du public, à compléter le discours,

les hashtags permettent de poser la question de la relation entre énoncé et image, entre

reformulation et équivalence, entre reformulation et déjà-dit, mais aussi entre reformulation et

1 Marie- Anne Paveau,, 2013, “ Technodiscursivités natives sur Twitter. Une écologie du discours numérique”,

Epistémé (Revue internationale de sciences humaines et sociales appliquées, Séoul), n°9, p.139-176. 2 Gustavo Gomez Mejia, Les fabriques de soi ? Identité et industrie sur le web, MKF éditions, 2016. L’auteur

entend par conscription le fait d’écrire ensemble sur le web : lorsque les instagrameurs choisissent des hashtags,

ils empruntent des mots clefs déjà référencés ou en créent de nouveaux. Lorsqu’ils sont déjà utilisés par d’autres,

les contenus sont ainsi archivés et associés. 3 Yves Jeanneret et Emmanuël Souchier, « Pour une poétique de l’écrit d’écran », in Xoana, n° 6, 1999, p. 97-107 ;

Yves Jeanneret, Joëlle Le Marec, Emmanuël Souchier (dir.), Lire, écrire, récrire, Objets, signes et pratiques des

médias informatisés, Paris, BPI, 2003. 4 Yves Citton, Pour une écologie de l’attention, Paris, Seuil, 2014.

16

pragmatique. Le hashtag peut-il être considéré comme un connecteur sémiotique ou

typographique qui introduirait la reformulation ? Nous analyserons à cet égard les marqueurs

de la reformulation (le caractère typographique du hashtag, le dièse, mais aussi l’usage des

lettres majuscules dans le cas des hashtags très longs - proches de phrases, qui facilitent la saisie

de cette séquence discursive) en tant qu’ils inaugurent une autre séquence du discours et

signalent une rupture sémantique. Dans quelle mesure, en outre, le hashtag introduit-il des

segments documentaires (entrées d’archives du discours reformulant l’énoncé) ou plutôt, pour

reprendre les termes d’A. Seuckardt, des « discordances » ? Peut-il également être considéré

comme un opérateur de « double-jeu » ? 5 . Analyser ces relations suppose d’examiner les

stratégies textuelles et/ou communicationnelles dans lesquelles elles s’inscrivent. Notre

approche sera ainsi communicationnelle, sémiotique et discursive pour tenter de comprendre

les relations complexes qui unissent les trois pôles composant une publication sur Instagram et

pour essayer de définir les enjeux du hashtag au prisme de la notion de reformulation entendue

ici dans une acception large.

5 Agnès Steuckardt, « Décrire la reformulation : le paramètre rhétorique », Cahiers de praxématique, 52, p. 159-

172.

17

Caractérisation et marquage de reformulations

Iris ESHKOL-TARAVELLA (1) et Natalia GRABAR (2)

(1) CNRS, Université d’Orléans

(2) CNRS, Université Lille 3

Le phénomène de reformulation est abordé dans de nombreux travaux selon une dimension

donnée : syntaxique [Bouamor, 2012], sémantique [Vezin, 1976; Beeching, 2007], pragmatique

[Flottum, 1995; Fuchs, 1994], etc. Nous concevons la reformulation comme un processus

complexe et multidimensionnel [Eshkol & Grabar, 2014, 2016]. Au sein de la reformulation, le

segment source, qui est reformulé, et le segment cible, qui correspond à la reformulation sont

distingués. Un schéma d'annotation de la relation entre ces deux segments combine plusieurs

dimensions: syntaxe (rôle syntaxique des segments cible et source), transformation syntaxique

et/ou morphologique (par exemple, temps et modes verbaux, composition morphologique,

flexion, dérivation, etc.), relation lexicale (synonymie, hyperonymie, méronymie, instanciation,

etc.), fonction pragmatique ou raison pour laquelle la reformulation a été effectuée (paraphrase,

exemplification, explication, dénomination, résultat, etc.). Cette classification est inspirée des

travaux existants [Rossari, 1990; Flotum, 1995; Kanaan, 2011] et des observations de deux

corpus analysés : corpus oral transcrit et corpus dialogique du Web.

Nos travaux sont interdisciplinaires et s’inscrivent dans deux domaines : linguistique de corpus

et traitement automatique des langues. Une attention particulière est dédiée à l'identification de

la reformulation. Ainsi, la présence de marqueurs fournit un indice assez fiable [Gulich &

Kotschi, 1983, 1987; Roulet, 1987; Hwang, 1993], surtout lorsque la nature reformulative du

contexte peut être vérifiée et désambiguïsée [Teston-Bonnard, 2008; Eshkol & Grabar, 2014,

2016]. Cependant, la reformulation peut également apparaître sans marqueurs typiques. Ainsi,

plusieurs unités linguistiques peuvent jouer ce rôle : les marqueurs de reformulation comme

dans "des morceaux nobles ce qu'ils appellent quoi c'est à dire les rosbifs les biftecks et tout ça",

les marqueurs de disfluence, comme dans "dont deux vraiment minables euh infects", les

organisateurs textuels comme dans "c'était les années quatre-vingt donc c'était les années euh

Mitterrand", les marqueurs de glose ou d'exemplification comme dans "des choses un peu plus

sympa genre guinguette", ou bien sans aucun marqueur linguistique comme dans "je suis très

polar j'aime beaucoup les polars". Dans ce dernier cas, un marquage prosodique pourrait être

présent à l'oral.

L’analyse des corpus a permis de constater un lien entre la reformulation et les genres discursifs :

les genres discursifs peuvent avoir une influence sur les types et caractéristiques de

reformulations et la reformulation, à son tour, peut être typique de certains genres.

Notre travail s'inscrit dans plusieurs axes qui structurent le colloque : configurations

syntaxiques et caractéristiques sémantiques (identification et qualification des segments source

et cible, processus souvent réglés par un travail ad hoc sur le contexte) ; marqueurs de

reformulation (unités linguistiques qui peuvent jouer le rôle de marqueurs de même que

l'absence de tout marquage) ; caractéristiques pragmatiques et valeurs argumentatives

(difficulté de délimiter ce phénomène aux frontières strictes). L’objectif de la communication

proposée est de montrer la multidimensionnalité de la reformulation et la typologie des éléments

pouvant introduire ce processus.

18

Références :

K. Beeching, La co-variation des marqueurs discursifs bon, c’est-à-dire, enfin, hein, quand

même, quoi et si vous voulez : une question d’identité ? Langue française, 154(2), p. 78-

93, (2007).

H. Bouamor, Étude de la paraphrase sous-phrastique en traitement automatique des langues.

Thèse de doctorat, Université Paris Sud, Paris, (2012).

I. Eshkol-Taravella, N. Grabar, Repérage et analyse de la reformulation paraphrastique dans les

corpus oraux. TALN2014, (2014).

I. Eshkol-Taravella, N. Grabar, Reformulation à l’oral et dans le forum Web. CMLF2016,

(2016).

K. Flottum, Dire et redire. La reformulation introduite par "c’est-à-dire". Thèse de doctorat,

Hogskolen i Stavanger, Stavanger, (1995).

C. Fuchs, Paraphrase et énonciation. Paris : Orphys, (1994).

E. Gulich, T. Kotschi, Les marqueurs de la reformulation paraphrastique. Cahiers de

linguistique française, 5, p. 305-351, (1983).

E. Gülich, T. Kotschi, Les actes de reformulation dans la consultation La dame de Caluire. In

P. Bange, (ed.), L’analyse des interactions verbales. La dame de Caluire : une consultation,

P Lang, Berne, pp. 15–81, (1987).

Y. Hwang, Eh bien, alors, enfin et disons en français parlé contemporain. L’Information

Grammaticale, 57, p. 46-48, (1993).

L. Kanaan, Reformulations, contacts de langues et compétence de communication : analyse

linguistique et interactionnelle dans des discussions entre jeunes Libanais francophones.

Thèse de doctorat, Université d’Orléans, Orléans, (2011).

C. Rossari, Projet pour une typologie des opérations de reformulation. Cahiers de linguistique

française, 11, p. 345-359, (1990).

E. Roulet, Complétude interactive et connecteurs reformulatifs. Cahiers de linguistique

française, 8, p. 111-140, (1987).

S. Teston-Bonnard, Je veux dire est-il toujours une marque de reformulation ? In M. L. Bot, M.

Schuwer, E. Richard, Eds., Rivages linguistiques. La Reformulation. Marqueurs

linguistiques. Stratégies énonciatives, p. 51-69. Rennes : PUR, (2008).

L. Vezin, Les paraphrases : étude sémantique, leur rôle dans l’apprentissage. L’année

psychologique, 76(1), p. 177-197, (1976).

19

Quelles reformulations pour construire un discours explicatif chez le jeune

enfant ? Exemple de reformulations en situation de jeu

Natacha ESPINOSA

Université Paris Nanterre

Problématique :

Nous appuyant sur les travaux de Vion (1992, 2000 : 219), qui définit la reformulation comme

une « reprise avec modification de propos antérieurement tenus » et de Rabatel (2007 : 87),

pour qui la caractéristique principale de la reformulation réside dans ce qu’elle a pour fonction

de « construire le sens des énoncés », nous souhaitons étudier la fonction et les formes de

reformulations utilisées par les enseignants de maternelle dans la perspective du développement

du langage, mais aussi le développement général des enfants, reprenant l’idée que c’est « dans

les énoncés que l’enfant entend – qui le concernent et qu’il retient – que l’enfant cherche à

savoir comment il va dire ce qu’il veut dire » (Martinot 2010 : 69).

A partir d’une recherche sur le type de discours spécifique des situations de jeux à règles et les

interactions langagières proposées dans des classes de maternelle, nous avons montré comment

les interactions éducatives peuvent favoriser l’apprentissage du langage oral de l’enfant (Canut

et Espinosa 2016). Nous souhaitons dans cette communication présenter une analyse

linguistique des reformulations offertes par l’adulte et produites par l’enfant pour observer

comment peut se construire dans ces situations langagières un discours narratif et explicatif

complet et structuré qui aide l’enfant à expliquer les règles du jeu auquel il joue.

La méthodologie

L’analyse linguistique d’échanges adulte-enfants en situation scolaire portera principalement

sur les constructions syntaxiques des reformulations de l’adulte adressées aux élèves dans trois

moments de jeu (au début, pendant et à la fin). Nous montrerons ainsi que les formes de

reformulation varient selon le type de discours utilisé mais aussi, dans le cadre de l’explication

de règle de jeu, selon les étapes du jeu lui-même.

Les principaux résultats exposés

- Description des formes variées de reformulations qui constituent le discours narratif et

explicatif que l’adulte peut proposer aux jeunes élèves pour les aider à expliquer une

règle de jeu.

- Description des reformulations que les élèves sont capables de produire en s’appuyant

sur les offres langagières des adultes dans ces situations de jeu.

L’objectif de cette communication sera d’amorcer une étude descriptive des formes de

reformulation dans les situations d’apprentissage en milieu scolaire et d’envisager un éclairage

didactique qui permette aux enseignants, et aux éducateurs, de poursuivre une réflexion

formative sur les interactions langagières et la diversité des formes linguistiques nécessaires au

développement des capacités linguistiques des élèves (Canut, Espinosa et Vertalier, 2013).

20

Pistes bibliographiques

Canut, E., Espinosa, N. (2016). Jouer pour apprendre à parler à l’école maternelle. Regard sur

la posture langagière de l’enseignant, Le français aujourd’hui, 195, 93-104.

Canut, E., Espinosa, N. & Vertalier, M. (2013). Corpus et prise de conscience des processus

interactionnels d’apprentissage du langage pour repenser les pratiques enseignantes en

maternelle, LINX, 68-69, 69-94. Martinot, C. (2010). Reformulation et acquisition de la complexité linguistique. Travaux de

linguistique, 61, 63-96. Rabatel, A., (2007), « Répétitions et reformulations dans l’Exode : coénonciation entre Dieu,

ses représentants et le narrateur », in : M. Kara (éd.), Usage et analyse de la

reformulation, Recherches linguistiques 29, 75-96.

Vion, R. (1992, 2000), La communication verbale. Analyse des interactions, Paris, Hachette.

21

La vulgarisation scientifique comme reformulation du discours scientifique

Hend GHIDHAOUI

Université de Salamanque, Espagne

Notre proposition s’introduit dans l’axe de La reformulation : caractéristiques pragmatiques et

valeurs argumentatives.

Le projet de notre communication est de comparer la reformulation des discours scientifiques

hautement spécialisées dans la presse et ce, à partir d’une perspective multilingue.

Nous partons de définitions comme celle de Peytard, de Jacobi ou de Loffler-Laurian. Pour

Peytard la reformulation est « l’ensemble des transformations qu’un discours (littéraire,

scientifique) admet d’une même et unique source, pour devenir « autrement » équivalent »

(1984 : 17). Jacobi affirme que « les vulgarisateurs s’efforcent de reformuler le discours

ésotérique que les spécialistes mobilisent pour présenter et décrire cette théorie complexe, afin

qu’elle devienne compréhensible pour le public des non-initiés » (1999 : 82). Pour Loffler-

Laurian « La vulgarisation scientifique est une reformulation par un chercheur ou un enseignant

scientifique lui-même, ou par un journaliste dit scientifique » (1984 : 124).

Nous nous proposons de comparer des titres d’articles de vulgarisation scientifique parus dans

la presse, comme reformulation des discours savants et de démontrer que le contexte social est

largement impliqué dans leur reformulation.

De nombreuses recherches ont été menées sur des corpus de discours spécialisés et de

reformulations (Mortureux 1983, Candel 1984, Jacobi 1984). Nous proposons une vision

multilingue et multiculturelle.

Nous avons réuni un corpus d’articles de vulgarisation scientifique parus dans

différents journaux se rapportant à une découverte publiée online par la revue spécialisée

Nature, le 29 août 2014. Il s’agit d’une expérience faite sur des singes qui prouve l’efficacité

d’un médicament -ZMapp- contre le virus Ebola :

- Des journaux en langue espagnole :

El Mundo Un espaldarazo para ZMapp

El País El fármaco experimental cura el ébola en monos (Science)

Un nuevo ensayo del suero ZMapp en monos tiene una eficacia del 100%

(Société)

ABC El fármaco contra el ébola ZMapp demuestra su efectividad en primates

- Des journaux en langue française :

Le Figaro L’espoir des premiers traitements expérimentaux

Le Monde L’espoir d’un traitement contre Ebola conforté par de nouvelles études

La Presse (Canada) Lueur d’espoir canadienne au bout d’un tunnel qui s’obscurcit

Nous avons soumis ce corpus à une analyse comparative tout en tenant compte du contexte

sociolinguistique. Nous avons observé que les titres des articles en espagnol sont plus rassurants

et plus convaincants que les titres français ou canadiens qui parlent d’espoir. L’Espagne a été

touché par le virus Ebola. Par conséquent, les espagnols ont besoin d’être rassurer et de savoir

qu’il y a enfin un remède.

Nous pensons qu’une vision multilingue et multiculturelle de la reformulation est nécessaire,

afin d’établir une définition plus ample de la reformulation.

22

Bibliographie

Candel, D. (1984). Une approche de la langue des physiciens. Langue française(64), 93-108.

Jacobi, D. (1984). Recherches Sociolinguistiques et interdiscursives sur la diffusion et la

vulgarisation des connaissances scientifiques (Thèse d'Etat). Besançon.

Jacobi, D. (1999). La communication scientifique : Discours, figures, modèles. Grenoble:

Presses Universitaires de Grenoble.

Loffler-Laurian, A.-M. (1984). Vulgarisation scientifique: formulation, reformulation,

traduction. Langue française(64), 109-125.

Mortureux, M.-F. (1983). La formation et le fonctionnement d'un discours de la V. S. au

XVIIIe siècle à travers l'œuvre de Fontenelle. Didier érudiation.

Peytard, J. (1984). Problématique de l'altération des discours: reformulation et transcodage.

Langue française(64), 17-28.

23

Reformulation des séquences figées dans le discours journalistique

Anna KRZYZANOWSKA

Université Marie Curie-Skłodowska, Lublin - Pologne

Notre proposition s’inscrit dans l’axe du colloque dédié à l’identification et la description

formelle, sémantique et pragmatique des segments reformulé et reformulant dans différents

genres discursifs. La reformulation, produit de stratégies interprétatives au niveau textuel, est

vue comme un instrument de l’activité ludique visant un effet expressif, émotif et esthétique,

dont le décodage implique des compétences linguistiques et culturelles de la part de l’émetteur

et du récepteur (Galisson 1994, Schapira 1999, Gréciano 2000)6. Il est intéressant d’observer

qu’elle peut être fondée sur une déformation plus ou moins grande des phraséologismes, qui va

de la reformulation minime jusqu’à la désintégration syntaxique totale. Nous voulons montrer

qu’au plan sémantique, la desémantisation apparente de la séquence figée conduit à son

réinterprétation d’où emergent des effets de sens nouveaux. Ainsi, dans la suite de cette étude,

nous aborderons successivement les cas suivants :

- l’affaiblissement ou renforcement du sens métaphorique de la séquence figée sous

l’impact du facteur se trouvant dans le contexte antécedent ou subséquent

- la remotivation du sens du constituant nominal (y inclus celle s’expliquant par la

pratique étymologique spontanée (Béguelin Marie-José 2002).

- la coexistence du sens littéral et global ayant pour effet un enrichissement sémantique

- la concrétisation du contenu métaphorique de la séquence figée à la suite du mélange de

deux codes : linguistique et iconique

- le fractionnement de la séquence figée, accompagné de combinaison de plusieurs

procédés (reprises, substitutions, ajouts)

- l’intensification sémantique (grâce à diverses associations ou imbrications de sens

dénotatifs, de connotations stylistiques, contextuelles et culturelles dans l’espace du

texte).

Les effets de la reformlation sont assurés par des mécanismes dus à la transgression de

restrictions syntaxiques et lexico-sémantiques qui caractérisent habituellement les séquences

figées. Cela permet aux composantes de libérer des potentialités sémantiques jusque-là

neutralisées par le figement, et aussi de tester leur pouvoir métaphorisant (Mejri 1999). Ce qui

est intéressant, c’est qu’on assiste constamment aux tentatives cherchant à retrouver la

motivation initiale. Dans cette perspective, la reconstruction du sens n’apparaît pas seulement

comme un outil de création discursive, mais aussi comme un procédé à travers lequel le sujet

énonciateur exprime sa prise de position à l’égard du thème traité (Gréciano 1983, Sullet-

Nylander 2005, Ben Hamida, Ben Amor 2012). Le discours journalistique de par sa spécificité

se prête bien à ce type d’activité. La valeur sémantique de la séquence figée est étroitement liée

à l’emploi stratégique que le sujet énonciateur en fait.

6 Le corpus est constitué d’exemples tirés de la presse des années 1995-2015, celle-ci étant dépouillée de façon

non régulière (Le Point, Le Nouvel Observateur, Le Figaro, Libération, France Soir).

24

Bibliographie

Adam J.-M. (1997), « Unités rédactionnelles et genres discursifs : cadre général pour une

approche de la presse écrite », Pratiques, nº 94/1997, p. 3-18

Béguelin, M.-J. (2002), « Étymologie ‘populaire’, jeu de langage et construction du savoir

lexical », SEMEN , n° 15/ 2002, 155-169.

Galisson (1994), « Les palimpsestes verbaux : des révélateurs culturels remarquables mais peu

remarqués », Repères, n° 8, 1994, p. 41-62.

Gréciano G. (1983), Signification et dénotation en allemand. La sémantique des expressions

idiomatiques, Paris, Klincksieck.

Gréciano G. (2000), « L’idiome comme icône », Verbum, n° 1-2-3/1993, 35-43.

Mejri S. (1999), « Unité lexicale et polylexicalité », LINX, 40 (1999), 79-93.

Nyckees V. (2000), « Changement de sens et détermination socio-culturel », in J. François (éd.)

Théories contemporaines du changement sémantique, Leuven : Peeters, 31-58.

Perrin L. (2011), « Figement, énonciation et lexicalisation citative », in J.-C. Anscombre & S.

Mejri (dir.), Le figement linguistique : la parole entravée, Paris : Honoré Champion, 81-

94.

Rey A. (1976), « Structure sémantique des locutions françaises », in M. Boudreault, F. Möhren,

Actes du XIII Congrès International de linguistique et Philologie Romane, Québec, Les

Presses de l’Université Laval, p. 831-842.

Schapira Ch. (1999), Les stéréotypes en français : proverbes et autres formules, Ophrys.

Sullet-Nylander F. (2005), « Jeux de mots et défigements à La Une de Libération », Langage et

société, n° 112, p. 111-139.

25

Au seuil de la reformulation

À savoir ou le pouvoir de l’explicitation

Houda LANDOLSI

Université d’Uppsala

Que pourrait introduire le marqueur à savoir ? une énumération ? une nomination ? une

explication ? un commentaire métalinguistique ? une glose ? une interprétation ? une

réinterprétation ?

Les segments introduits par ce marqueur polyfonctionnel sont en effet susceptibles d’avoir l’une

de toutes ces valeurs argumentatives. Or, il est légitime de se demander ce que ces différentes

valeurs ont commun et c’est précisément à l’étude de cette problématique que sera consacrée

la présente intervention. Notre recherche vise en effet à discerner les caractéristiques formelles,

sémantiques et surtout argumentatives des segments introduits par à savoir dans l’objectif de

comprendre, dans un premier moment, le genre de contribution sémantique que le marqueur

peut véhiculer au sein des constructions dans lesquelles il est intégré et de montrer, dans un

second moment, que d’un point de vue argumentatif, à savoir établit, dans tout contexte, une

relation d’explicitation.

Nous essaierons également de mettre en lumière l’influence du genre auquel appartient le texte

sur l’emploi et les caractéristiques du marqueur. Par conséquent, nous analyserons les fonctions

du segment introduit par à savoir dans deux genres différents :

- Dans un corpus composé de récits fictionnels en prose tirés de la base textuelle Frantext.

Les œuvres choisies sont publiées durant une période qui s’étend sur soixante ans (de

1950 jusqu’à 2010) et catégorisées comme des romans, contes et nouvelles. Le nombre

total de mots dans ce corpus de travail est de 2 835 893.

- Dans un corpus nommé C-ParaFraSe-HumSam, constitué de vingt-trois livres de

littérature spécialisée et composé par Svensson (2010). Les ouvrages appartiennent à

différents domaines des sciences humaines et sociales. Le nombre total de mots est

1 956 974.

26

Bibliographie indicative

Fløttum, K. (1996), La reformulation introduite par c’est-à-dire, Stavanger, Hegskolesenterct i

Rogaland.

Fuchs, C. (1994), Paraphrase et énonciation, Paris, Ophrys.

Gülich, E. et Kotschi, T. (1983), « Les marqueurs de la reformulation paraphrastique », Cahiers

de Linguistique Française, 5, p. 305-351.

Steuckardt, A. (2009), « Décrire la reformulation : le paramètre rhétorique », Cahiers de

praxématique, 52, p. 159-172.

Vassiliadou, H. (2008), « Quand les voies de la reformulation se croisent pour mieux se

séparer : à savoir, autrement dit, c’est-à-dire, en d’autres termes ». In M.-C. Le Bot, M.

Schuwer & E. Richard (éds), La reformulation : marqueurs linguistiques, stratégies

énonciatives, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 35-50.

27

De quelques formes non canoniques de reformulation dans les

conversations électroniques en français et en allemand

Céline LARGIER VIE

Université Sorbonne Nouvelle Paris 3

Cette communication reprend une partie des résultats obtenus dans le cadre de ma thèse de

doctorat (Largier, 2005) portant sur la reformulation dans les forums de discussion de la presse

allemande et française en ligne, qui sont plus précisément des forums de débat. L’objectif de

cette thèse était de répertorier l’ensemble des forme identifiables de reprise du discours autre

– des plus explicites, comme la citation dûment marquée, aux plus implicites – observable dans

ce corpus et de déterminer la fonction de ces reformulation dans un contexte de communication

polémique dans lequel le discours argumentatif tenait une place majeure.

Il existe déjà de nombreux travaux sur la reprise du discours autre dans les genres électroniques

(Mondada, 1999 ; von Münchow, 2004 ; von Münchow/Rakotoelina, 2006 ; Marcoccia, 2010 ;

Devilla, 2014). Reprenant deux des axes proposés – celui des formes syntaxiques de la

reformulation et celui de ses caractéristiques pragmatiques – cette communication portera sur

ce que j’ai considéré dans mon travail comme étant des formes non canoniques de reprise d’un

discours autre. L’analyse du corpus montre en effet qu’il arrive que le locuteur ait recours, pour

signaler qu’il reprend un discours dont il n’est pas l’auteur, à des structures syntaxiques d’usage

courant utilisées, en quelque sorte, comme des marqueurs indirects de reformulation. Ces

formes, plus rares, sont généralement plus difficilement identifiables que les formes évidentes

de reprise, comme la citation sous forme de copier-coller, par exemple, très fréquente dans les

genres électroniques. Elles font partie des modalités de reprise du discours qui peuvent être

rapprochées de ce que l’on observe dans les conversations ordinaires à l’oral (Devilla, 2014).

Nous présenterons trois de ces structures : le recours à la négation, appelée « négation

polyphonique » (« Avoir un enfant n'est pas qu'une histoire de femmes, il faut etre deux, de sexe

oppose, pour avoir un enfant ») ; le recours à une complétive en tête d’énoncé (« Que tu sois

énervée par cette "morale à deux balles" soit. Qu'elle n'ait aucun fondement, je ne te suis

plus ») ; le recours à une structure hypothétique (« Si le canabis n'est pas mauvais ou moins

mauvais que l'alcool et le tabac pourquoi l'interdire et vendre de l'alcool et du tabac ? »). A

partir de cas dans lesquels le recours à ces structures correspond effectivement à la reprise de

propos antérieurs attestés, nous montrerons que ces structures peuvent également être utilisées

pour réagir à des éléments discursifs qui n’ont pas été produits dans l’interaction que constitue

le forum de discussion, voire relevant davantage de la doxa.

Dans tous les cas, nous montrerons que le recours à ces formes de reprise du discours s’inscrit

dans une visée pragmatique assez univoque : il s’agit pour les locuteurs de se positionner, dans

un discours à forte dimension argumentative et polémique, par rapport à un discours autre. La

reprise sert alors de support pour manifester son accord ou, plus fréquemment, son désaccord

avec ce qui a été énoncé par un autre locuteur.

28

Travaillant dans une perspective contrastive sur l’allemand et le français, nous montrerons que

le recours à ces structures s’observe dans les deux langues avec une visée pragmatique

semblable.

Bibliographie :

Devilla, L. (2014) : « La reprise du discours des autres dans les interactions pédagogiques

plurilingues en ligne : une affaire de genre(s) ? », Congrès Mondial de Linguistique

Française – CMLF 2014 SHS Web of Conferences

Largier, C. (2005) : Le travail de la reprise discursive dans un genre émergent : les forums de

débat de la presse allemand et française en ligne, Université Sorbonne Nouvelle – Paris

3

Marcoccia, M. (2010). « Formes et fonctions de la citation et du copier-coller dans les

discussions en ligne. » In Communications du IVe Ci-dit.

http://revel.unice.fr/symposia/cidit/index.html?id=550.

Mondada, L. (1999). « Formes de séquentialité dans les courriels et les forums de discussion.

Une approche conversationnelle de l'interaction sur Internet. Apprentissage des Langues

et Systèmes d'Information et de Communication (Alsic) », Vol. 2, 1, 3-25. http://alsic.u-

strasbg.fr/Num3/mondada/alsic_n03-rec1.htm

Von Münchow, P. (2004). « Le discours rapporté dans un forum de discussion sur l’internet. »

Les Carnets du CEDISCOR, 8, 91-112.

Von Münchow, P. et Rakotoelina, F. (2006). « L’interrogation et le discours rapporté dans les

forums de discussion sur l’environnement en français et en anglo-américain. » Les

Carnets du CEDISCOR, 9, 93-112.

29

Marqueurs d’exemplification et de reformulation

Entre fonctions cognitives et pragmatiques

Simona MARINO

Université de Palerme

Cette recherche se concentre sur les notions d’exemplification et de reformulation, et sur ce qui

à la fois distingue et apparente les deux procédés langagiers et cognitifs. D’ailleurs, du point de

vue textuel, l’exemplification et la reformulation partagent la même nature de fonction

discursive selon laquelle une seconde unité est une réaffirmation ou une élaboration d’une

première unité avec des mots différents, pour présenter ce qui a été énoncé, d’un point de vue

différent et pour renforcer le message véhiculé (Hyland 2007: 269). L’objectif visé est de

décrire et d’analyser les fonctions cognitives et pragmatiques de quatre marqueurs ayant une

valeur d’exemplification ou de reformulation – mettons, disons, par exemple et genre. Deux

corpora de français parlé (plus de 5 millions de mots) et un corpus de Newsgroup UseNet

(environ 174 millions de token) ont été examinés selon une approche hybride corpus-based et

corpus-driven, s’appuyant sur une analyse quantitative des corpora et une analyse qualitative

du discours. Cette recherche a donc exploré la connexion entre les procédés de catégorisation

(Barsalou 1983 ; Mauri & Ramat 2015), le vague (Channell 1994) et la référentialité, afin

d’illustrer le processus de pragmaticalisation des quatre marqueurs, qui finissent souvent par

développer des valeurs subjectives (Traugott 1995) en tant que hedge exprimant l’attitude du

locuteur par rapport au dégrée d’information dans l’énoncé (Fleischman & Yaguello 2004), ou

en tant qu’approximateurs.

Au niveau cognitif, la reformulation est un important outil linguistique qui permet au locuteur

de spécifier des catégories communes ou de se référer à des catégories qui pourraient créer des

problèmes de conceptualisation ou de dénomination. Les locuteurs ont recours à la

reformulation ainsi qu’à l’exemplification pour dénoter des catégories qui manquent d’une

étiquette spécifique mais qui ont une réalité conceptuelle : les énoncés reformulés peuvent être

considérés comme des membres potentiels d’une catégorie ouverte ou même d’une catégorie

ad hoc. Dans les phrases (1) et (2), le locuteur peut inférer, en suivant un raisonnement

analogique basé sur le contexte, d’autres instances potentielles, aboutissant ainsi à la

construction d’une catégorie inférée par le locuteur. Au niveau pragmatique, les quatre

marqueurs permettent au locuteur de ne pas imposer son opinion à son interlocuteur, donc ils

limitent la force assertive de l’acte de parole et dans ce cas on parle de hedging devices. En tant

que tels, ils présentent l’énoncé reformulé comme une option par rapport à un ensemble idéal

de choix, afin de réduire l’engagement du locuteur envers ce qu’il dit, comme on le voit dans

l’exemple (3).

(1) Je n’ai pas la moindre idée de ce que je dois faire. Mon but est de transférer mes

documents (mettons des PDF) pour pouvoir les imprimer depuis le Mac.

(2) Je suis à la recherche d’un bâtiment à acheter genre grande grange, entrepôt, hangar,

friche industrielle d’environ 200 m² sur la région de Boulogne au sens large (disons

entre la baie de la Canche et Wissant).

(3) Je vais vous demander quelque chose de… disons quelque chose d’inhabituel. C’est

assez embarrassant et auparavant, je voudrais que vous me promettiez de garder ça

secret

30

Bibliographie

Barsalou, L. W. (1983). Ad hoc categories. Memory & cognition, 11(3), 211-227.

Brown, P., & Levinson, S. C. (1987). Politeness: Some universals in language usage (Vol. 4).

Cambridge University Press.

Channell, J. (1994). Vague language. Oxford University Press.

Diewald, G. (2011). Pragmaticalization (defined) as grammaticalization of discourse

functions. Linguistics, 49(2), 365-390.

Fleischman, S., & Yaguello, M. (2004). Discourse markers across languages. In Ed. by Moder

C. L. & Martinovic-Zic A., Discourse across languages and cultures, John Benjamins

Publishing, 129-148.

Hyland, K. (2007). Applying a gloss: Exemplifying and reformulating in academic

discourse. Applied linguistics, 28(2), 266-285.

Mauri, C., & Ramat, A. G. (2015). "Piuttosto che": dalla preferenza all’esemplificazione di

alternative. Cuadernos de Filología Italiana, 22, 49-72.

Tognini-Bonelli, E. (2001). Corpus linguistics at work (Vol. 6). John Benjamins Publishing.

Traugott, E. C. (1995). Subjectification in grammaticalization. In Stein D. & Wright S.

(Eds.). Subjectivity and subjectivisation. Cambridge University Press, 31-54.

Vincent, D. (2005). The journey of non-standard discourse markers in Quebec French:

Networks based on exemplification. Journal of Historical pragmatics, 6(2), 188-210.

31

LA REFORMULATION

dans les entretiens non-directifs de recherche

Corinne MARTIN

Université de Lorraine

Notre proposition s’inscrit dans l’axe 4 : « En-deçà et au-delà de la reformulation ». En nous

situant hors des frontières de la linguistique, et pour apporter un regard complémentaire aux

tentatives de définition de la reformulation par la linguistique, notre proposition souhaite

revisiter l’approche de la reformulation de Carl Rogers (1942/2008), telle qu’elle a été

prioritairement définie dans une perspective psychothérapeutique. Puis nous montrerons

comment cette approche rogérienne a permis à d’autres auteurs (Alain Blanchet, 1986 ; Alain

Blanchet et Anne Gotman, 1992 ; Magioglu, 2008) de définir et caractériser la notion

d’entretien non-directif de recherche. Il est ainsi question d’une écoute à différents niveaux, au

niveau du contenu, au niveau du contexte de la communication (le cadre de la communication,

cf. école de Palo Alto) et au niveau des sentiments/émotions, et ce dans des situations

d’entretien oral en face à face. La reformulation doit ainsi être envisagée comme indissociable

d’une attitude compréhensive et d’une certaine empathie6, ouvrant ainsi à une réelle sensibilité

à la communication non-verbale.

Notre corpus est constitué de près d’une centaine d’entretiens : ces entretiens sont issus d’une

part de l’enquête de terrain de notre thèse de doctorat en sciences de l’information et de la

communication sur les usages et représentations du téléphone portable chez de jeunes

adolescents et leur famille (Martin, 2007), entretiens d’1h à 1h30 avec le jeune adolescent, puis

avec chacun de ses deux parents. D’autre part, d’autres enquêtes conduites ultérieurement, sur

la photographie mobile, sur les pratiques médiatiques numériques (actualités sur médias

numériques via smartphones, tablettes, dans un contexte transfrontalier), conduites auprès de

publics différents – jeunes étudiants, salariés frontaliers français au Luxembourg – constituent

l’autre partie de ce corpus. A partir de l’ensemble de ce corpus, nous montrerons combien des

reformulations permettent à l’interviewé de se sentir en confiance et de dérouler, voire

reconstruire son histoire, son récit de vie, dans une perspective narrative.

A l’inverse, par comparaison, par une mise en tension, nous analyserons des tentatives de

reformulation manquée, – attitudes non compréhensives, sans empathie –, et leurs effets

potentiels sur l’interaction. Nous espérons ainsi apporter quelques éléments de réponse à la

volonté de définir et caractériser la reformulation.

32

Bibliographie

BLANCHET, Alain, 1985. L’entretien dans les sciences sociales. L’écoute, la parole et le sens.

Paris : Dunod.

BLANCHET, Alain et GOTMAN, Anne, 1992. L’enquête et ses méthodes : l’entretien. Paris :

Nathan.

HALL, Edouard T., 1978. La dimension cachée. Paris : Points. (1re éd. 1971, 1re éd. en anglais,

The Hidden Dimension, New York : Double Day, 1966).

ROGERS, Carl, 2008. La relation d’aide et la psychothérapie. Paris : ESF. (15e éd., 1re éd. en

anglais, Counseling and Psychotherapy, 1942).

MAGIOGLU, Thalia, 2008. L’entretien non directif comme modèle génératif d’interactions, In

: Cahiers Internationaux de psychologie ; 2008. vol. 2, n° 78, p. 51-65.

MARTIN, Corinne, 2007. Le téléphone portable et nous. En famille, entre amis, au travail.

Paris : L’Harmattan.

WAAL, de Frans, 2010. L’âge de l’empathie. Leçons de la nature pour une société solidaire.

Paris : Ed. Les liens qui libèrent. (1re éd. en anglais, 2010. The Age of Empathy. Nature’s

Lessons for a Kinder Society. New York: The Crown Publishing Group).

WATZLAWICK, Paul, BEAVIN, Janet H., JACKSON, Don-D, 1972. Une logique de la

communication. Paris : Seuil.

33

Collision des sources de savoir

La répétition et la reformulation dans le transfert du savoir référentiel

Le corpus viatique

Afsaneh POURMAZAHERI

Université de Téhéran - Iran

Dans le récit de voyage, toute forme qui incarne la présence d’une entité autre que « le référent »

réel peut altérer la représentation de ce celui-ci et perturber l’ekphrasis et son élaboration. Le

récit viatique a souvent tendance à mettre son lecteur en difficulté, et ce, en raison du nombre

de référents nouveaux qu’il fait intervenir manière exogène. Il s’agit d’un type de texte dont la

grande capacité d’intégration de diverses formes morphosémantiques est susceptible d’en

rendre difficile l’ « intellection ». Un brouillage ou une incertitude sémantico-textuel localisé

(Bakhtine, Volochinov, 1977 : 136) peut alors se produire. L’insertion du discours « autre »,

issue des phénomènes d’hétérogénéité (hétérogénéité montrés (Authier-Revuz, 1982 : 91)),

confère donc un caractère polymorphe au discours par le biais d’un échange entre les locuteurs.

La dialectique entre l’interaction verbale et le dialogisme confirme qu’un énoncé est tourné vers

le discours d’autrui » portant sur l’objet dont il parle. (Bakhtine, 1984 : 302) Le récit de voyage

est constitué de discours antérieurs qui forment l’arrière-plan culturel et idéologique dont « une

bonne moitié nous vient d'autrui ». (Bakhtine, 1978 : 158) dont une meilleure saisie nous amène

déceler la distinction entre les trois ordres de manifestation de l’interaction dialogique

(interdiscursif, interlocutif, intralocutif). L’intertextualité peut offrir à un énoncé un supplément

de consistance culturelle. L’intérêt de ces énoncés est qu’ils convoquent un énoncé antérieur

dans une double lecture. Il est question donc d’une double énonciation qui autorise tout un jeu

d’influences réciproques (Grésillon, Maingueneau, 1984 : 115).

La conception de la transmission du savoir basée sur la perception et l’observation n’est donc

pas toujours celle qui prévaut dans le récit de voyage car le fait attesté par la pure observation

du locuteur entre parfois en contradiction avec les propos des devanciers. « L’image qu’un

énonciateur construit de son propre discours est très fortement liée à celle qu’il construit

d’autres énonciateurs auxquels il s’oppose » (Authier-Revuz, 1985 : 19). Le récit viatique,

imprégnés d’intertextualité, est confronté aux textes précédemment rédigés dans les mêmes

régions. Il doit donc faire face à de nombreuses contradictions. Ces passages critiques sont dotés,

dans la plupart des cas, des structures canoniques telle que X a dit que… mais c’est faux… j’ai

au contraire remarqué que, dont la forme peut varier selon les auteurs mais qui dans tous les

cas, est la formulation d’une négation polémique typiquement dialogique (Bres, 1999). Par le

rejet des propos d’autrui, la négation s’octroie un surplus de légitimité.

Nous allons relever des formules de répétition ou de reformulation de la gestion des bribes de

textes où l’auteur-voyageur adopte deux attitudes différentes : Il peut transmettre une répétition

des données antérieures en y apportant son approbation ou, au contraire, donner la primauté à

ses propres observations en réfutant catégoriquement d’autres textes qui préexistent au moment

de la relation. Ces contradictions sont majoritairement dues au changement d’époque et à

l’évolution culturelle, sociétale et démographique qui constituent des facteurs majeurs de

sémantisation des référents. Le sens critique du narrateur-voyageur l’aide à effectuer

efficacement ses analyses comparées. Il se permet donc d’évoquer les données produites par les

voyageurs antérieurs, qui lui paraissent justes, et d’annoncer comme non-fondées ou erronées,

celles qui lui paraissent problématiques en les remplaçants par d’autres propos du même ou

d’un autre texte. L’article comprendra une réflexion sur le traitement du savoir via le dialogisme

interdiscursif et la place occupée par ce même savoir dans la production de l’écart sémantique.

Diverses sources de savoir (attestées et empruntées) et leur impact sur notre problématique y

34

seront donc étudiés en tenant compte du pacte référentiel proposé par Philippe Lejeune.

Précisons que si le savoir emprunté a ici retenu notre attention, c’est pour la bonne raison que

la modalisation en discours second ( la reformulation et la répétition) et la présence des éléments

hétéroclites dans le texte discriminent le référent concret, nous le constateront, au profit du

potentiel interprétatif.

Nous tenons également à souligner que d’après Dendale (1993 :174) le principe du discours

emprunté introduit tout naturellement de l’incertitude et du brouillage dans le discours d’accueil

car « une information empruntée est par définition une information qui n'est pas créée par le

locuteur lui-même, qui ne provient pas de lui », d’où son caractère incertain. Par conséquent,

le discours second sous-tend que le procès est donné à voir comme non intégré à la réalité du

locuteur. Cela montre tout simplement que le locuteur formule des propos sans les garantir. Les

informations provenant des connaissances de seconde main sont donc perçues par les

énonciateurs comme peu sûres. On peut même parfois parler d’excès de références aux sources

déjà existantes, d’analyses intertextuelles ou de critiques qui ont de quoi rendre le lecteur

perplexe, en lui fournissant trop peu d’information, en l’abandonnant dans un méandre

d’hypothèses et de thèses qui demandent à être confirmées.

Les phénomènes de cet ordre constituent des facteurs majeurs d’écart dans les textes

« viatiques ». La quasi-absence de travaux d’analyse concernant les récits de voyage français

et iraniens sur l’Iran du XIXe siècle a tout naturellement attiré notre attention de par la profusion

des publications sur la Perse de l’époque et la nouvelle vision du « mondialisme » qu’apportait

cette altérité Orientale. Notre corpus est évidemment non-discriminatoire. Cela pour la simple

raison qu’il a pour vocation de rendre compte dans son ensemble des modalités de

représentation de l'autre dans les textes concernant l'Iran du XIXe siècle. Certains des ouvrages

riches en occurrences constituent naturellement notre corpus restreint. Pour effectuer nos

analyses, nous nous sommes majoritairement intéressés aux travaux effectués par J. Kristeva

(1969) (dialogue interdiscursif), de G. Genette (1982) ainsi que ceux d’Authier-Revuz (1982),

de Bres (1999) et de Bakhtine (1978).

Mots clés : récit viatique, répétition et reformulation, brouillage sémantico-référentiel,

dialogisme interdiscursif, altérité, savoir, référent

35

Du statut des marqueurs donc et c'est-à-dire dans un cours magistral en L1

Sciences du Langage

Marie-France ROQUELAURE

Université de Poitiers

Résumé

À l’Université, l’exposé magistral est le mode de communication principal (Bouchard et

Parpette, 2007, 2009), les reformulations y occupent une place importante (Gülich, Kotschi,

1987). Notre recherche porte sur l'enseignement-apprentissage du lexique à l'université en

français langue maternelle. Elle a pour but de déterminer quelle est le statut et la fonction des

mots-outils donc et c'est-à-dire dans les reformulations orales de l'enseignant dans un cours de

première année de Sciences du Langage. Nous nous centrerons spécifiquement sur les

reformulations de l'enseignant au niveau de la transmission de la terminologie lexicale

(définitions et exemples de notions). Le corpus que nous nous proposons d’analyser est

composé de huit séances encadrées par deux enseignants expérimentés et par deux enseignants

débutants. Les enseignants s’appuient sur différents supports pédagogiques : supports

technologiques (PowerPoint) ou traditionnels (polycopiés et inscription au tableau). Sur la base

des travaux de Coltier (1988) sur les reformulations introduisant un exemple et en nous référant

à la typologie de Riegel (1990) et Rebeyrolle (2000), nous allons tenter de caractériser et de

comprendre dans quelle mesure donc et c'est-à-dire peuvent être considérés comme marqueur

de reformulation. L’étude de la reformulation dans l’enseignement supérieur nous permet, par

la proposition de nouvelles catégories d’analyse, d’affiner les modèles d’analyse théorique de

la définition et des exemples utilisés et de dégager les spécificités du discours enseignant à

l’université. Les questions que nous nous poserons seront les suivantes : Peut-on appréhender

donc comme une particule énonciative et/ou connecteur de structuration du discours ? Que

pouvons-nous apprendre du statut de c'est-à-dire comme marqueur paraphrastique utilisé par

l'enseignant pour introduire des exemples liés à l'explicitation d'une notion ?

Mots clefs : discours enseignant, reformulations, exemplification, définition, enseignement

supérieur.

36

Bibliographie :

BOUCHARD R., (2001) « Alors,donc,mais...,"particules énonciatives" et/ou "connecteurs"?

Quelques considérations sur leur emploi et leur acquisition », Syntaxe et sémantique,

1/2002 (N° 3), p. 63-73.

BOUCHARD R., (2007) : « Les appuis iconiques (type powerpoint) pendant les Cours

Magistraux : quelle aide à la compréhension des étudiants étrangers ? », Cahiers du CLA,

Besançon.

BOUCHARD R., PARPETTE C., (2010) : «Plurisémioticité et multimodalité dans un cours

magistral scientifique » in Rabatel A., (éd.) Reformulations pluri-sémiotiques en situation

de formation didactique et professionnelle. Besançon : Presses Universitaires de Franche-

Comté, pp.97-116.

BOUCHARD R., PARPETTE C., (2012) : Littéracie universitaire et oralographique : le cours

magistral entre écrit et oral. Revue Pratiques, 153.

COLTIER D., (1988) Introduction et gestion des exemples dans les textes à thèse, Pratiques,

n°58, p.23-41.

GÜLICH E., KOTSCHI T., (1986) : « Les actes de reformulation dans la consultation La Dame

de Caluire » in BANGE P., (Ed) L’analyse des interactions verbales, La Dame de

Caluire. Berne, Peter Lang, pp.15-81.

MOURAD G., DESCLES J.-P., (2002) : « Citation textuelle : identification automatique par

Exploration Contextuelle », Faits de Langue, n°19. Le discours Rapporté : formes et

frontières, pp.179-189.

REBEYROLLE J., (2000) : « Formes et fonction de la définition en discours » Thèse de

Doctorat Nouveau Régime.

RIEGEL M., (1990) : La définition, acte du langage ordinaire – De la forme aux interprétations.

In J. Chaurand & F. Mazières (eds), La définition, pp.97-110.

STEUCKARDT, A. (2009), « Décrire la reformulation : le paramètre rhétorique », Cahiers de

praxématique, 52, p. 159-172.

37

La reformulation didactique en milieu rural ivoirien : un outil d’aide à la

médiation interculturelle au cycle primaire

Bénédicte Larissa Hervée TECHTI

Université Félix Houphouët Boigny- Côte d’Ivoire

Problématique

Des travaux de recherche (Garcia-Debanc 2015 ; Martinot 2009 ; Noyau 2010 ; Volteau 2016)

prouvent que l’objet «reformulation», constitue un processus qui s’adapte au contexte dans

lequel il est mis en oeuvre. Ainsi, en contexte didactique bi-plurilingue, Noyau (2010a: 556)

fait remarquer que : « Lorsque plusieurs langues sont en présence, chaque langue peut servir à

interpréter l’autre, constituant un troisième système de communication où les reformulations

interlangue peuvent se déployer avec des valeurs spécifiques ».

Ce phénomène décrit par cet auteur est particulièrement avéré en contexte d’enseignement-

apprentissage du français en milieu rural ivoirien.

En effet comme le faisait remarquer Boutin (2004), le contact de l’apprenant du milieu rural à

la langue française se fait selon un mode d’apprentissage du français par l’école ; les langues

locales ivoiriennes étant celles de première socialisation des apprenants.

De ce profil sociolinguistique propre à l’apprenant de cette sphère géographique, l’enseignant

du cycle primaire est de plus en plus amené à user du type de reformulation interlangue.

Ainsi cette étude se fonde sur l’hypothèse selon laquelle, l’enseignant du milieu rural ivoirien

développe une compétence à la reformulation interlangue (français/langues ivoiriennes) qui est

observable au travers des pratiques de médiation qu’il met en oeuvre en discipline «français».

D’où l’intérêt d’articuler cette étude autour des questions suivantes :

Comment les pratiques de reformulation didactique de l’enseignant se présentent-elles en

milieu rural ivoirien ?

A quelles fins sont-elles mises en oeuvre ?

Quelles en sont les retombées didactiques pour l’appropriation des savoirs de la discipline

«français»?

Méthodologie

Notre analyse se fondera sur un corpus oral issu d’observations de classe in situ, notamment au

niveau 1 du cycle primaire (CP1). Des séquences d’interactions didactiques et discours

d’enseignants, enregistrées lors d’une séquence d’enseignement-apprentissage « d’expression

orale », nous permettront de décrire la spécificité du processus de reformulation mis en oeuvre,

tout en analysant les stratégies de reformulations mises en oeuvre par l’enseignant pour amener

l’apprenant à s’approprier l’objet «français». Ainsi le geste professionnel de reformulation de

l’enseignant du niveau 1 à valeur interculturelle sera appréhendé au travers d’une approche

d’analyse interactionniste.

Résultats

Pour ce qui ressort des formes de reformulation dont l’enseignant fait usage dans sa classe, elles

sont soit de le forme français exogène (énoncé source) vers français endogène (énoncé

reformulé), soit la forme français endogène (énoncé source) vers langues premières des

apprenants (énoncé reformulé).

38

Aussi l’analyse des reformulations perçues au travers du discours didactique de l’enseignant

dévoile que le processus reformulation s’intègre à une médiation linguistique interculturelle

mise en oeuvre pour répondre prioritairement à l’intercompréhension didactique. Prouvant ainsi

que le recours au répertoire linguistique des apprenants est un impératif dans le processus de

reformulation didactique en contexte bi-plurilingue.

Bibliographie

CAUSA Maria (1996), « L’alternance codique dans le discours de l’enseignant », in Les

Carnets du Cediscor, Presse Sorbonne Nouvelle, pp.111-129

CICUREL Francine et RIVIERE Véronique (2008), «De l'interaction en classe à l'action

revécue : le clair-obscur de l'action enseignante, in Processus interactionnels et situations

éducatives, De Boeck, pp.255-273

DELORME Vera (2012), « Explication du sens en classe de langue : le rôle du contexte » in

Shs web of conférences, volume 1, 3ème congrès de linguistique française, pp. 261-275

GARCIA-DEBANC Claudine et VOLTEAU Stéphanie (2007), « Formes linguistiques et

fonctions des reformulations dans les interactions scolaires », in Recherches linguistiques

n° 29, pp. 309-340.

GARCIA-DEBANC Claudine et VOLTEAU Stéphanie (2008), « Chapitre 2. Gérer les

reformulations : un geste professionnel. Influence des objets enseignés sur les types de

reformulation», in Le développement des gestes professionnels dans l'enseignement du

français, De Boeck Supérieur, pp. 191-212.

LUDI Georges et PY Bernard (1986), «Etre bilingue», P. Lang, New York, 181p.

MARTINOT Claire et ROMERO Clara (2009) « La reformulation : acquisition et diversité des

discours », in Les cahiers de praxématique, pp.7-18.

NUMA-BOCAGE Line (2007), « La médiation didactique : un concept pour penser les registres

d'aide de l'enseignant », in Carrefours de l'éducation n° 23, p. 55-70

NOYAU C. (2006), « Linguistique acquisitionnelle et intervention sur les apprentissages :

appropriation de la langue seconde et évaluation des connaissances à l’école de base en

situation diglossique », in Les enjeux sociaux de la linguistique appliquée, Neuchâtel

(Suisse), pp.93-106.

NOYAU C. (2010), « Développer les capacités de reformulation chez les maîtres de l'école

bilingue en contexte subsaharien », Congrès Mondial de Linguistique Française, pp.

TOULOU Simon, (2011), « Chapitre 7. Les consignes et leurs reformulations dans des

dispositifs didactiques : des gestes révélateurs de l'objet enseigné dans la classe de

français », in Les gestes de régulation des apprentissages dans la classe de français, De

Boeck Supérieur, pp. 149-166.

VOLTEAU Stéphanie, « Analyse des reformulations dans les interactions orales : l'exemple

d'une séquence portant sur l'écosystème en CM2 », Corela [En ligne], HS-18 | 2015, mis

en ligne le 15 novembre 2015, consulté le 16 décembre 2016 sur

http://corela.revues.org/4045

39

Hétéro-répétitions « à l’identique » (ou presque) dans des contextes

interactionnels : identification pragmatico-syntaxique d’un sous type de

reformulation Sandra TESTON-BONNARD

Université Lyon 2

Les réalisations répétitives à l’oral non préparé sont produites selon différents formats : des auto

ou hétéro-répétitions à l’identique, ou avec modifications - modalisations, expansions -, de

manière contingente ou différée, ou encore des auto ou hétéro-reformulations paraphrastiques

et synonymiques.

1) Méthodologie et corpus

Nous choisissons ici de décrire les contextes d’apparition de différentes productions de

répétitions7 de segments identiques (ou presque) par un interlocuteur -vs locuteur- dans le cadre

d’une syntaxe à deux modules en articulation avec les approches interactionnelles.

Les occurrences traitées sont issues de la base Clapi8 et recueillies avec l’outil concordancier

associé.

2) Problématique

En définissant plus précisément ce qu’est la répétition à l’identique, on posera qu’elle est

sûrement impossible. Comme le souligne Prak-Derrington (2008 : 252) : « le seul fait de répéter

implique un changement de perspective énonciative ».

Par ailleurs, il est évident que le changement d’intonation et toute autre modification prosodique

réalisée presqu’obligatoirement lors de la répétition d’un segment verbal, induit que le segment

répété n’est plus vraiment le même que le segment source.

Prak-Derrington estime que « Il existe deux types fondamentaux de répétition verbale : la

répétition comme reprise du sens et la répétition comme reprise du matériau formel » (id.) Il

est en fait difficile de distinguer ces deux « types » puisque la reprise du sens peut être

compatible avec la reprise du matériau formel. L’auteure précise bien qu’il existe

la répétition comme reprise du sens avec un autre matériau formel, et la répétition comme reprise du matériau

formel. Répéter, c’est soit redire autrement (avec d’autres mots), soit ne pas redire autrement, mais au contraire

à l’identique (avec les mêmes mots).(id.)

Cependant, nos analyses sur des corpus de la langue parlée montrent que le critère « même

matériau formel ou figural » est malaisé à valider : non seulement l’intonation et le plan

énonciatif sont modifiés, mais en outre le matériau formel n’est jamais (ou presque jamais)

absolument identique. Nous montrerons que dans de très nombreux cas (ou est-ce tous les cas?)

la répétition « simple » « à l’identique » correspond à quelque chose qu’on re-dit autrement.

La problématique envisagée ici conduit à poser certaines questions cruciales :

Les répétitions à l’identique sont-elles compatibles avec des opérations de reformulation au

sens de Clinquart 9 (1996 : 153) ce qui, selon Prak-Derrington, « suspend la dichotomie

reprise/reformulation ». (Prak-Derrington 2008 : 2) et va dans le sens de ce que nous suggérons.

Les extraits de nos corpus montrent bien qu’il s’agit de redire autrement chaque fois, pourtant

avec les mêmes mots. La répétition « à l’identique », ne serait qu’une catégorie de

reformulation.

7 Voir annexes 8 http://clapi.ish-lyon.cnrs.fr/ : banque de données orales en interaction outillée et annotée, conçue et développée par ICAR. 9 « […] la reformulation (ou la reprise) est le phénomène par lequel une séquence discursive antérieure est reprise au cours

d'une même interaction, inférant ainsi un changement de perspective énonciative. »,

40

Par exemple, il est envisageable d’observer dans le phénomène de répétition à l’identique, des

synthèses d’énumérations, des segments à valeur conclusive, des résomption d’information

(Bertrand, Chanet, 2005).10

Résultats envisagés

Selon nous, il est plus intéressant de considérer le phénomène de reformulation constitué de

différents sous groupes, dont l’un se réalise par la répétition simple, « à l’identique ».

Il est donc important d’examiner les rôles spécifiques que joue ce sous-type de reformulation :

produit dans un format particulier avec un matériau formel (presque) identique, sa réalisation

induit une intentionnalité accompagnée d’effets singuliers qui sont à distinguer des autres sous

types de reformulation.

Cette contribution donnera à observer les marqueurs, constructions syntaxiques et phénomènes

interactionnels combinés qui autorisent à discriminer ce sous type de reformulation.

Bibliographie citée dans ce résumé

Bertrand, Roxane et Catherine Chanet, (2005) Fonctions pragmatiques et prosodie de enfin en français

spontané. Revue de Sémantique et Pragmatique, Presses de l'Université d'Orléans, pp.41-68.<hal-

00353742>

Clinquart, Anne-Marie. (1996). « Fonctions rhétoriques des reformulations ». Cahiers du français

contemporain, Hétérogénéités en discours, 151-175.

Henry, S. (2002). « Quelles répétitions à l’oral ? Esquisse d’une typologie », Actes des 2èmes Journées

de Linguistique de Corpus, Lorient. [http://www.univ-provence.fr/delic/papiers/Henry-

2002lorient.pdf].

Henry, S. (2002). « Étude des répétitions en français parlé spontané pour les technologies de la parole »,

Actes de RÉCITAL 2002, Nancy, 24-27 juin 2002, pp. 467-476.

Pallaud, B., Henry, S. (2004), « Amorces de mots et répétitions : des hésitations plus que des erreurs en

français parlé » ; PUL, p. 848-858., « Étude des répétitions en français parlé spontané pour les

technologies de la parole », p. 467-476.

Kara, Mohamed (dir.), (2007). Usages et analyses de la reformulation, Metz, Université Paul-Verlaine.

Picoche, Jacqueline, (2007.) : La reformulation, base de l'enseignement du vocabulaire, In Kara, p. 296

Prak-Derrington (2008), Emmanuelle, « Thomas Bernhard, la répétition impertinente ou le refus de

reformulation : l'exemple du récit autobiographique 'La cave' », in Le Bot, Marie-Claude,

Schuwer, Martine, Richard, Elisabeth (eds.), La reformulation, marqueurs linguistiques, stratégies

énonciatives, Presses universitaires de Rennes, 2008, p. 251-264.

Teston-Bonnard, Sandra, Colon de Carvajal, Isabel, Markaki-Lothe, Vassili, (2015). « Etudes des

interactions dans les lieux de vie d’un patient aphasique. Auto-répétitions, répétitions

collaboratives, et reformulations des aidants » in LOPEZ MUÑOZ, Juan Manuel (éds.), Aux

marges du discours. Personnes, temps, lieux, objets, Paris, Editions Lambert-Lucas, p. 337-349.

10 voir le concept de gestion des tâches discursives développé par Bertrand et Chanet à propos de « enfin ».

41

Toutes sortes de reformulations : doit-on et/ou peut-on atteindre un

consensus terminologique ?

Hélène VASSILIADOU

Université de Strasbourg

L’objectif de notre contribution est de retracer les différentes acceptions de la notion de

reformulation, de son émergence jusqu’à nos jours. Il s’agit de pointer les difficultés qui

traversent plus ou moins les époques et les genres littéraires. Toutefois, il n’y a rien d’original

dans le constat que ce terme renvoie à l’heure actuelle à des réalités différentes selon le cadre

d’analyse ou le point de vue choisi (cf. Garcia-Debanc 2015). S’agit-il pour autant d’un faux

problème terminologique ? L’idée est de parcourir les situations linguistiques dans lesquelles

le concept de reformulation est employé et/ou mentionné afin de tracer les liens avec les autres

termes auxquels il est souvent associé, à savoir, entre autres, commentaire métalinguistique,

reprise, ajout, paraphrase, glose, réinterprétation, rephrasage (Jakobson 1963 ; Fuchs 1982).

Le flou terminologique concerne chacun de ces termes qui, même s’ils désignent « une méthode

spécifique, bien souvent ils paraissent interchangeables » (Jeanneret, 2006 : 1026).Quelles sont

alors les caractéristiques propres à ces termes et les restrictions qui peuvent expliquer, justifier

et distinguer les différences d’emploi ?

Nous répondrons à ces questions en recourant dans un premier temps à des exemples issus de

plusieurs articles de linguistique à propos desquels nous montrerons, avec des critères

sémantiques, que tout travail métalinguistique et/ou mouvement de retour sur le dire et le dit

(Rossari 1994 ; Authier-Revuz 1995 ; Julia 2001 ; Colombat & Savelli 2001), n’est pas une

reformulation (Vassiliadou 2016).Ceci nous permettra d’écarter du champ de la reformulation

toute sorte d’ajout qui facilite la progression textuelle et surtout toutes les opérations de

nomination, désignation et dénomination (voir aussi Pons-Borderia 2013).

Dans un deuxième temps, nous exploiterons l’hypothèse générale selon laquelle la

reformulation peut être abordée par le biais de ses marques (cf. Gülich & Kotschi

1983 ; Steuckardt 2003, par exemple). Mais si on ne sait pas ce qu’est au juste une

reformulation stricto sensu (qu’elle soit paraphrastique ou non-paraphrastique), dans quelle

mesure un indicateur et/ou une marque linguistique pourra signaler sa présence ? On verra dans

cette étude que les multiples facettes de la reformulation se retrouvent dans la grande variété de

ses marques. Aussi essayer de saisir la notion par le biais de ses « instruments » peut-il avoir

pour effet de biaiser à la fois son repérage et l’étendue de sa définition.

Dans cette perspective, distinguer la reformulation des opérations qui la sous-tendent ainsi que

les frontières de ces activités (mots, choses, phrases, interaction, etc.) peut être une mission

délicate, mais nécessaire à toute modélisation linguistique (comme par exemple le domaine du

TAL avec les patrons d’extraction, les taxinomies, etc. ; Mela 2004 ; Grabar & Eshkol-

Taravella 2015). Des critères syntaxiques de repérage des segments reformulés complèteront

notre périple terminologique.

42

Références bibliographiques

AUTHIER-REVUZ, J., (1995), Ces mots qui ne vont pas de soi : Boucles réflexives et non-

coïncidences du dire, t. 1 et 2, Paris : Larousse, collection Sciences du Langage.

COLOMBAT, B., SAVELLI, M., (éds), (2001), Métalangage et terminologie linguistiques,

Actes du colloque international de Grenoble, Université Stendhal - Grenoble III, 14-16

mai 1998, Louvain : Peeters, coll. Orbis Supplementa, vols.1 et 2.

FUCHS, C., (1982), La paraphrase, Paris : PUF.

GARCIA-DEBANC, C., (2015), « La reformulation : usages et contextes », Corela [En ligne],

HS-18, consulté le 17 janvier 2017, URL : http://corela.revues.org/4032

GRABAR, N. & ESHKOL-TARAVELLA, I., (2015), « ...des conférences enfin disons des

causeries... Détection automatique de segments en relation de paraphrase dans les

reformulations de corpus oraux », TALN2015, Caen, France.

GÜLICH, E. & KOTSCHI, T., (1983), « Les marqueurs de la reformulation paraphrastique ».

Cahiers de linguistique française 5, 305-351.

JAKOBSON, R., (1963), Essais de linguistique générale, (trad. N. Ruwet), Minuit.

JEANNERET, M., (2006), « La glose, le commentaire, l’essai à la Renaissance », in F.

Lestringant & M. Zink (éds), Histroire de la France littéraire, Paris : PUF, 1025-1053.

JULIA, C., (2001), Fixer le sens ? La sémantique spontanée des gloses de spécification du sens,

Presses de la Sorbonne Nouvelle.

MELA, A., (2004), « Linguistes et "talistes" peuvent coopérer : repérage et analyse des gloses »,

Revue Française de Linguistique Appliquée IX (1), 63-82.

PONS-BORDERIA, S., (2013), “Un solo tipo de reformulación”, Cuadernos Aispi 2, 151-170.

ROSSARI, C., (1994), Les opérations de reformulation : analyse du processus et des marques

dans une perspective contrastive français-italien, Berne : Lang.

STEUCKARDT, A., (2003), « C’est-à-dire au XVIIIe siècle », in A. Steuckardt, et A. Niklas-

Salminen, (éds), Le mot et sa glose, Publications de l’Université de Provence, 223-244.

VASSILIADOU, H., (2016), « Mouvements de réflexion sur le dire et le dit : c’est-à-dire,

autrement dit, ça veut dire », in L. Rouanne & J.-C. Anscombre (éds), Histoires de dire.

Petit glossaire des marqueurs formés sur le verbe dire, Berne : Peter Lang, 339-364.

43

Genre en français, like en anglais : des marqueurs de reformulation ?

Jeanne VIGNERON-BOSBACH

Université de Poitiers

La reformulation peut être définie comme un « retour sur un segment afin d’en modifier l’un

des aspects syntaxiques ou sémantiques » comme le proposent les organisateurs de ce colloque,

ou bien plus largement comme une « succession en discours de deux segments qui visent le

même état de chose » (Steuckardt, 2007 : 59). Notre étude s’intéresse à deux marqueurs, genre

en français et like en anglais dans des corpus d’oral spontané, afin de voir si, dans certaines

configurations, ils peuvent être envisagés comme des marqueurs de reformulation.

Dans les exemples ci-dessous, on voit que ces deux marqueurs peuvent s’insérer entre deux

segments :

(1) en plus c'était en altitude c'était genre à deux mille mètres comme ça (OFROM,

unine12-avb)

(2) KARE: &=in And I said

oka:y

(..) we're closed .

KARE: (..) Out .

KARE: &=laugh &=laugh

And [% laugh]

(..) so I was moving them

like making them go o⌈ut .

SCOT: ⌊ Mhm ⌋ . KARE: an⌉d they were (.) trying to be cute

and (.) say sweet things

(SBCSAE, 34)

En (1) comme en (2), les deux segments soulignés décrivent le même référent de deux façons

différentes. La relation entre ces deux segments peut être matérialisée sur l’axe paradigmatique

par une représentation en « grille » (Blanche-Benveniste et Jeanjean, 1987) :

c’était en altitude

c’était genre à deux mille mètres

so I was moving them out

like making them go out

En (1), en altitude et à deux mille mètres sont tous deux régis par le prédicat c'était. On note ici

que ce prédicat est répété et dans le deuxième cas le segment à deux mille mètres est précédé

de genre. On voit que à deux mille mètres peut être envisagé comme une explicitation du

syntagme en altitude. Cette relation semble pouvoir être décrite comme un cas de reformulation

44

au sens de Martinot (2010) : « Tout processus de reprise d’un énoncé antérieur qui maintient,

dans l’énoncé reformulé, une partie invariante à laquelle s’articule le reste de l’énoncé, partie

variante par rapport à l’énoncé source, est une reformulation ». En (2) like introduit le segment

making them go out qui semble être une reformulation du segment précédent moving them out.

Les deux formes en -ing sont toutes deux à rattacher à I was. La position charnière de genre et

like nous incitent alors à les analyser comme des marqueurs de reformulation.

En nous appuyant sur un corpus d’occurrences issues d’interactions présentant un faible degré

de planification, nous proposons de décrire comment genre et like s’insèrent entre deux

segments d’un point de vue syntaxique et prosodique, et de montrer les relations sémantiques

qui sont à l’oeuvre. Pour ce faire, nous aurons recours à des approches syntaxiques par « mise

en grille » et par « entassement » (Kahane et Pietrandrea, 2012), en interface avec une analyse

prosodique. Cette étude contrastive nous amènera à envisager genre et like comme des

marqueurs de reformulation et à questionner la notion de frontière entre segment source et

segment reformulé.

Bibliographie indicative :

BLANCHE-BENVENISTE, Claire, BILGER, Mireille, ROUGET, Chrisitine, VAN DEN EYNDE, Karel,

MERTENS, Piet, 1990, Le Français parlé : Études grammaticales, Paris : CNRS.

BLANCHE-BENVENISTE, Claire, JEANJEAN, Colette, 1987, Le français parlé : transcription et

édition, Publication du Trésor de la langue française, INALF, Didier Érudition, 155-171.

HANOTE, Sylvie, VIGNERON-BOSBACH, Jeanne, 2016, « Genre, like, so, du micro au macro et

vice et versa », revue Modèles linguistiques Tome XXXVII, vol.73, Toulon : Éditions des

Dauphins, 77-108.

KAHANE, Sylvain, 2012 « De l’analyse en grille à la modélisation des entassements », in

Sandrine CADDEO, Marie-Noëlle ROUBAUD, Magali ROUQUIER, Frédéric SABIO (eds.),

Penser les langues avec Claire Blanche-Benveniste, Presses de l’université de Provence,

101-116.

KAHANE, Sylvain, PIETRANDREA, Paola, 2012, « La typologie des entassements en français »,

in Franck NEVEU, Valelia MUNI TOKE, Peter BLUMENTHAL, Thomas KLINGLER, Pierluigi

LIGAS, Sophie PREVOST, Sandra TESTON-BONNARD (éds.), Congrès Mondial de

Linguistique Française – CMLF 12, Paris : Institut de linguistique française, 1809-1828.

MARTINOT, Claire, 2010, « Reformulation et acquisition de la complexité linguistique »,

Travaux de linguistique, n° 61, 63-96.

PALLAUD, Berthille, 2006, « Troncations de mots, reprises et interruption syntaxique en français

parlé spontané », JADT 2006, 8èmes Journées internationales d’Analyse statistique des

Données Textuelles, Besançon : Presses Universitaires de Franche-Comté, 707-715.

STEUCKARDT, Agnès, 2007, « Usages polémiques de la reformulation », in : M. Kara (éd.),

Usages et analyse de la reformulation, Recherches linguistiques 29, 55-74.

VIGNERON-BOSBACH, Jeanne, 2016, Analyse contrastive des marqueurs genre en français, like

en anglais et so en allemand dans des corpus d’oral et d’écrit présentant un faible degré

de planification, Thèse de doctorat, dir. Sylvie Hanote et Hermine Penz, Université de

Poitiers.

45

La citation dans le discours de controverse religieuse : un cas particulier de

reformulation ?

Sophie YVERT-HAMON

Université de Stockholm

Se donnant pour cadre méthodologique l’analyse du discours, cette recherche porte sur la place

de la citation dans le discours de controverse religieuse opposant catholiques et protestants en

France aux XVIème et XVIIème siècles, et examine la possibilité de considérer celle-ci comme

un cas particulier de reformulation.

Retraçant l’évolution du discours théologal au fil des siècles, Compagnon (1979 : 159)

rappelle que celui-ci a pour principe la répétition. En l’expliquant, en l’interprétant, en la

paraphrasant, le théologien redit la Bible. À l’origine commentaire expliquant les textes sacrés

de façon linéaire (gloses), le discours théologal a peu à peu évolué vers la compilation (chaînes,

sommes) induisant une fragmentation des textes commentés. Au cours du XVIème siècle,

l’opposition entre l’Église catholique et les différents mouvements réformateurs favorise une

autonomisation du discours théologal, en particulier lorsqu’il traite de questions controversées :

les ouvrages de controverse recourent à la citation qui, utilisée comme argument en faveur des

propos du théologien, en épouse la démarche. Ce basculement, essentiel dans la perspective qui

nous intéresse ici, confère à la citation un rôle de reformulation du discours de l’auteur citant.

Le régime de coexistence religieuse instauré par l’Édit de Nantes (1598) est marqué par une

augmentation importante des publications de controverse, la plume prenant la place de l’épée.

Le corpus retenu pour cette recherche est constitué de passages extraits du Traité de

l’eucharistie (édition de 1604) du théologien protestant Philippe Duplessis-Mornay. Ouvrage

de controverse majeur publié dès 1598, le Traité suscite une vive polémique obligeant son

auteur à se repositionner, ce qui se traduit par la publication de réponses et de nouvelles éditions.

Notre première question de travail porte sur la dimension spatio-temporelle de la

reformulation. La reformulation peut être définie comme un autrement-dit suivant une

formulation initiale. Or, selon le principe protestant de la sola scriptura, la Bible doit être

considérée comme seule autorité, texte-source guidant le chrétien dans sa foi. Nous nous

intéresserons donc à la façon dont le théologien gère cette inversion de principe plaçant la

citation biblique en situation de dépendance par rapport à son propre discours. Dans la lignée

de cette première question, nous examinerons la dimension stratégique de la reformulation.

L’objectif du controversiste est de convaincre. Ses propres mots n’ayant aucune valeur aux

yeux de ses adversaires, il recourt à l’argument d’autorité, mettant en scène auteurs bibliques

et autres auteurs reconnus par les catholiques, et utilisant en cela les armes adverses pour

atteindre son objectif. Nous nous interrogerons enfin sur le métadiscours du théologien

concernant l’acte de reformulation.

Notre étude s’inscrit donc essentiellement dans l’axe des caractéristiques pragmatiques et

des valeurs argumentatives de la reformulation. Cependant nous réfléchirons aussi à la question

plus générale de la définition de la reformulation afin de la distinguer de procédés proches

(exemplification, glose, réinterprétation…). Nous examinerons l’emploi des citations dans le

corpus choisi en distinguant plusieurs cas afin de mettre en évidence différentes fonctions et

ainsi les stratégies discursives de l’auteur. Nous espérons ainsi contribuer à une délimitation

plus précise de la reformulation.

46

Nos Adversaires pour fonder la Messe en l’Escriture saincte, la nous veulent deriver de

l’Institution de la saincte Cene de nostre Seigneur : Et marquent ordinairement auiourd’hui sur les

passages esquelles elle nous est instituée ; Ici est l’Institution dela Messe : au lieu que leurs

predecesseurs, & nommément la Glosse ordinaire souloient noter ; Ici est instituée l’Eucharistie,

le Sacrement pour mémoire de la Passion du Seigneur.

Traité de l’eucharistie, chapitre 1, page 1.

Références bibliographiques

AMOSSY, R. (2012), L’argumentation dans le discours. Paris, Armand Colin.

COMPAGNON, A. (1979). La seconde main ou le travail de la citation. Paris, Seuil.

DESGRAVES, L. (1980), « Les controverses sur la Messe à la fin du XVIe siècle et au début

du XVIIe siècle », in : Histoire de la messe (XVII-XIXe siècles), Actes de la troisième

rencontre d’Histoire Religieuse organisée à Fontevraud le 6 octobre 1979 par le Centre

de Recherches d’Histoire Religieuse et d’Histoire des Idées (Université d’Angers) et le

Centre Culturel de l’Ouest, Nantes, CID Éditions, p. 37-50.

DUBAIL, I. (1998), « L’éthos du controversiste (1560-1600) : d’un sophiste à l’autre » in : M.

Clément (éd.), Les Fruits de la dissension religieuse : fin XVe – début XVIIIe siècle,

Travaux de l’UPRES-A CNRS 5037, Saint-Étienne, Publications de l’Université de

Saint-Étienne, p. 29-42.

FUCHS, C. (1983), « La paraphrase linguistique : équivalence, synonymie ou reformulation ?

», Le Français dans le Monde, 178, p. 129-132.

GARCIA-DEBANC, C. (2015), « La reformulation : usages et contextes », in : Corela [Online],

HS-18.

JAUBERT, A., LOPEZ, J. M., MARNETTE, S., ROSIER, L. et STOLZ, C. (éd.) (2011), Citer

pour quoi faire ? Pragmatique de la citation, Louvain-la-Neuve, Academia.

LE BOT, M.C., SCHUWER, M., RICHARD, É. (éd.) (2008). La Reformulation. Marqueurs

linguistiques – Stratégies énonciatives. Rennes, PUR.

MARTINOT, C. et ROMERO, C. (2009), « La reformulation : acquisition et diversité des

discours », Cahiers de praxématique, 52, p. 7-18.

PETIT, G. (2002), « Reformulation », in : P. Charaudeau et D. Maingueneau (éd.), Dictionnaire

d’analyse du discours, Paris, Éditions du Seuil, p. 490-492.

RABATEL, A. (2007), « Répétitions et reformulations dans l’Exode : coénonciation entre Dieu,

ses représentants et le narrateur », in : M. Kara (éd.), Usage et analyse de la reformulation,

Recherches linguistiques 29, p. 75-96.

SALLIOT, N. (2009), Philippe Duplessis-Mornay. La rhétorique dans la théologie, Thèse de

doctorat en littérature française, Paris, Éditions classiques Garnier.

STEUCKARDT, A. (2007), « Usages polémiques de la reformulation », in : M. Kara (éd.),

Usage et analyse de la reformulation, Recherches linguistiques 29, p. 55-74.

STEUCKARDT, A. (2009), « Décrire la reformulation : le paramètre rhétorique », in : Cahiers

de praxématique, 52, p. 159-172.

YVERT-HAMON, S. (2015), « L’emploi des pronoms je, nous et vous dans le discours de

controverse religieuse en France après les guerres de religion », in : Studii de Lingvistica,

nr 5, p. 129-154.