Livre Boudet

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Télécharger sur http://www.esonews.com LA VRAIE LANGUE CELTIQUE ET Le Cromleck de Rennes-les-Bains PAR l’Abbé H. BOUDET CURÉ DE RENNES-LES-BAINS (AUDE) CARCASSONNE IMPRIMERIE FRANCOIS POMIÈS, RUE DE LA MAIRIE , 50. Droits de traduction et de reproduction réservés.

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    LA VRAIE

    LANGUE CELTIQUE

    ET

    Le Cromleck de Rennes-les-Bains

    PAR

    lAbb H. BOUDET

    CUR DE RENNES-LES-BAINS (AUDE)

    CARCASSONNE

    IMPRIMERIE FRANCOIS POMIS, RUE DE LA MAIRIE , 50.

    Droits de traduction et de reproduction rservs.

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    AVANT-PROPOS

    Le titre donn cet ouvrage semble, au premier

    abord, trop prtentieux pour tre rigoureusement exact. Il est facile , toutefois, d'en dmontrer la vri-t, puisque la langue celtique n'est point une langue morte, disparue, mais une LANGUE VIVANTE, par-le dans l'univers par des millions d'hommes.

    Le langage d'une nation aussi puissante que l'tait la nation Gauloise , aurait-il pu se perdre ainsi sans laisser aucune trace ? Est-il bien surpre-nant qu'un peuple de notre Europe se serve encore, pour exprimer ses penses, des termes sortis de la bouche des hommes aux temps les plus reculs du monde? Sans

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    doute, ce peuple, qui cherche aujourd'hui avec ar-deur renouer le fil de ses traditions interrom-pues , ignore les diverses migrations de ses va-leureux anctres, mais avec le secours de sa langue nationale, il peut se livrer des recherches, qui, certainement, seront couronnes du plus heureux succs La langue vivante, laquelle nous faisons allusion, nous a puissamment aid dcouvrir le magnifique monument celtique existant Rennes-les-Bains, et, de son ct, l'tude de ce monument nous a conduit avec sret des dductions tymologiques qui nous semblent difficiles rfuter. C'est ainsi que le Cromleck de Rennes-les-Bains se trouve intimement li la rsurrection, ou, Si l'on veut, au rveil inattendu de la langue celtique.

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    OBSERVATIONS PRELIMINAIRES

    Proccup de mettre par crit quelques remarques sur la station thermale de Rennes-les-Bains, o Dieu nous avait appel exercer le ministre paroissial, dsireux de faire revivre d'antiques souvenirs, nous pensions, tort ou raison, que le nom de Rennes, renfermant sans doute en lui-mme l'histoire du pays dans les temps celtiques , nous dcouvrirait, par une interprtation exacte, bien des choses int-ressantes au sujet des roches aigus qui couronnent nos montagnes. Deux pierres branlantes, places sur une arte de colline, nous invitaient aussi interro-ger avec persvrance un pass, d'ailleurs, fort tn-breux. Mais comment

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    pntrer le secret d'une histoire locale par l'in-terprtation d'un nom compos dans une langue in-connue, lorsque l'histoire de la Gaule ancienne est encore plonge dans une obscurit dsolante?

    La plupart des peuples de l'antiquit ont laiss des crits : ils ont eu des historiens , des potes, et de leurs rcits, ou fabuleux ou fortement empreints de ce patriotisme orgueilleux qui les exagre, dfaut commun toutes les nations, on peut dgager les certitudes de leur origine et les phases diverses de leur dveloppement.

    Chez les Celtes, rien de pareil : de toutes parts une nuit profonde. Des chercheurs intrpides , des historiens illustres ont pouss le plus loin possible leurs investigations passionnes. Tous les crivains de l'antiquit ont t interrogs. La somme des connaissances acquises reste toujours fort incom-plte. O trouver le flambeau qui dissipera ces tnbres? N'est-ce pas dans le vieux langage que nos pres nous ont lgu?

    Les dialectes , dit J. de Maistre, les noms pro-pres d'hommes et de lieux me semblent des

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    mines presque intactes et dont il est possible de tirer de grandes richesses historiques et philosophi-ques. (I). Le dialecte languedocien parl dans nos contres, ne parat pas une voie bien sre pour que l'on puisse en la suivant, conserver l'espoir d'arriver un rsul-tat important. Nanmoins, cette voie, nous l'avons parcourue avec patience, dans la ferme persuasion que la Providence Divine dirigerait nos pas et nous permettrait d'atteindre au but de nos efforts.

    Lorsque le flambeau que nous cherchions avec anxit, s'est montr nos yeux, son premier rayon est tomb sur le nom des Tectosages, et ce rayon nous a bloui. Il tait ncessaire toutefois de ne pas se livrer pleinement l'imagination, et dans l'inten-tion de nous convaincre nous-mme de la ralit de cette lumire, propre clairer les temps gaulois, nous avons tent de la faire rflchir par les miroirs des langues hbraque, punique, basque et celtique. Le rsultat nous a paru srieux, et avant de nous servir du langage des Tectosages pour expliquer la signification des monu-

    (1) Soires de Saint-Ptersbourg 2e entretien.

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    IV ments mgalithiques de Rennes-les-Bains, objet premier de nos recherches, nous l'avons appliqu l'interprtation des noms propres pris dans ces lan-gues diverses. C'est pourquoi on trouvera, en pre-mier lieu, dans ce travail ces essais d'interprtation; car ils sont destins servir de preuve dcisive.

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    CHAPITRE PREMIER.

    LANGUE CELTIQUE I

    PRCIS DE L'OCCUPATION PREMIRE

    DES GAULES.

    Il n'est pas sans utilit, croyons nous, de faire prcder

    cette tude d'un rapide rsum des connaissances actuelles sur la clbre nation Gauloise. La Gaule a t le point cen-tral de l'tablissement dfinitif de la famille Celtique dans les contres occidentales de l'Europe, et le nom mme de gaule qu'elle a conserv, tmoigne de la domination persis-tante, dans ce pays, de son peuple valeureux. Elle tait comprise entre l'Ocan, les Pyrnes, la Mditerrane, les Alpes et le Rhin. La partie mridionale, depuis le golfe de gascogne jusqu'a la Mditerrane, a t occupe d'abord par les

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    Ibres et les Ligures venus de la pninsule espagnole. Les gals, descendans de gomer, fils de Japheth, partirent

    de l'Asie Mineure une poque que l'on ne peut prciser, se rpandirent dans la Gaule en refoulant les Ibres vers le sud, les ligures vers l'Est, et envahissant l'Espagne, se m-lrent aux Ibres.

    Les Aquitains, tribu ibrienne, rsistrent aux envahis-sements des Gals et conservrent leur position entre l'Ocan, les Pyrnes et la Garonne. Vers le seizime sicle avant Jsus Christ, les Gals taient les matres incontests de la Gaule.

    La conqute de l'Espagne par les Gals fora les Ligures se dplacer, et, vers l'an 1400 avant Jsus-Christ, aprs avoir franchi les Alpes, ces derniers fondrent en Italie la domination des Ambras ou Ombres, 647 ans avant la fon-dation de Rome.

    C'est cette premire branche de la famille gauloise, que, d'aprs Am. Thierry, les anciens historiens appliquent plus particulirement le nom de Celtes.

    Les Kimris formaient la seconde branche de la famille gauloise Les Grecs les nommaient Kimmerioi et les Ro-mains les appelaient Cimbri. En l'an 631 avant Jsus-Christ, les peuples

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    scythiques, au rapport d'Hrodote, fondirent sur les bords du Palus-Motide et poussrent devant eux les Kimris qui se dirigrent vers le soleil couchant sous la conduite de Hu-ar-Bras, remontrent le cours du Danube et envahirent la Gaule par le Rhin. Suivant les traditions Kimriques, Hu-ar-Bras ne s'tablit point dans la gaule, mais il traversa l'Ocan brumeux et conquit sur les Gals l'le d'Albion.

    Pendant ces migrations et ces conqutes des Kimris, ancus roi de Rome, victorieux de ses voisins, Batit la ville d'Ostie l'embouchure du Tibre.

    Cependant de nouvelles tribus de Kimris inondaient suc-cessivement les Gaules, et aprs une immense mle, la Gaule apparat partage entre les Kimris et les Gaels. (1) Les Kimris, l'ouest, occupent les cotes de la mer ainsi que les plaines du nord et du Nord-Est, et les Gaels retiennent l'Est et le centre de la Gaule.

    C'est la suite de ces mouvements des populations que les historiens placent les deux migrations de Sigovse et de Bellovse neveux d'Ambigat, roi ou chef des Bituriges, en l'an 587 avant Jsus-Christ. Bellovse prit le chemin de l'Italie ; Sigovse se dirigea vers le Nord-est,

    (1) Histoire de france par H. Martin.

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    franchit le Rhin, et traversant la fort Hercynienne, vint s'tablir sur les bords du Danube.

    Environ 300 ans avant Jsus Christ, une puissante conf-dration de Kimris, celle des Belges, envahit le nord de la Gaule et s'en empara. Deux tribus belges, les volkes Tecto-sages et, les Volkes Arcomiques traversrent la Gaule, les armes la main, et s'arrtrent dans le Midi, les Volkes Tectosages sur les bords de la Garonne, Toulouse, dont ils firent leur capitale, et les Volkes Arcomiques, l'Est des Cvennes, avec leur centre Nimes.

    Les Volkes Tectosages ne restrent pas longtemps en re-pos dans le pays qu'ils venaient de conqurir. Vers 281 avant Jsus-Christ, une forte migration alla rejoindre, sur les bords du Danube, les tribus gauloises qui descendaient des compagnons de Sigovses. Emports par leur humeur guerrire, tous ces Gaulois se divisrent en trois corps et s'abattirent comme un ouragan dans la Macdoine, l'Epire et la Thrace. Une partie de ces Tectosages, insatiables d'aventures, traversrent l'Asie Mineure, et, prs de leur patrie primitive, fondrent une nouvelle Gaule, la Galatie.

    Les Gaulois remplissaient ainsi du fracas de leurs ar-mes le monde ancien tout entier. L'tendue

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    de leurs possessions directes, le territoire occup en corps de nation par les Gallo-Kimris, tait immense. Si l'on jette un regard sur la carte du monde ancien vers la pre-mire moiti du troisime sicle avant notre re, on voit la race gauloise dploye depuis Erin, (Irlande) jusqu' l'Estonie ( quelques marches de Saint Ptersbourg), de-puis la pointe septentrionale de la presqu'le Cimbrique (Danemark) jusqu'aux Apennins, depuis les trois Finis-terre de Bretagne, de Gaule et d'Espagne jusqu'aux fron-tires du pont et de la Cappadoce, en passant par le Da-nube qu'ils tiennent jusqu'au del de son confluent avec la Save, par les Carpathes, les Alpes Illyriennes, l'Hmus et la Thrace. Les Gaulois planent sur l'Europe, des extrmi-ts de l'Espagne au Pont-Euxin. (1)

    II

    LANGUE CELTIQUE. D'aprs ce rapide expos, on voit que les historiens font

    intervenir dans la possession des Gaules, d'abord les Gals, puis les Kimris et

    (1) Histoire de france par H. Martin.

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    enfin les Belges, dont ils font descendre, sans aucune certi-tude, les Volkes Tectosages et Arcomiques.

    On pourrait se demander pourquoi les historiens moder-nes nomment Gals ou Gaels les premiers habitants de la Gaule, lorsque Jules Csar (1) nous avertit que les Gaulois, dans leur propre langue, s'appelaient Celtae et dans la lan-gue latine Galli. Ces deux appellations sembleraient donc tre synonymes et possder une signification unique, et c'est bien l ce que prouve d'une manire premptoire M. l'abb Bouisset, dans son mmoire sur les trois collges druidiques de Lacaune. Le terme Celtae Kell avait pour ces peuples un sens trs positif dsignant l'homme fait, et l'expression Galli, d'aprs les explications lumineuses de M. l'abb Bouisset, renfermerait la mme ide.

    Dans la mythologie grecque, les Gaulois taient les su-jets de Galats, fils d'Hercule. La rputation guerrire de Galats fut immense, ainsi que celle de sa force et de ses vertus. Nous ne ddaignerons pas de recueillir, au milieu des allgories de la mythologie, ces dtails en apparence fort secondaires, mais en ralit d'une utilit considrable.

    (1) De bello gallico. lib. 1.

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    A l'poque o Csar porta la guerre dans les Gaules, il nous la montre occupe par trois peuples : les Belges, les Aquitains et les Celtes. Ils diffrent tous, dit-il, par le lan-gage. Cependant cette diffrence ne devaient pas tre bien profonde. Dans un mmoire sur l'origine des langues celtique et franaise, Duclos, n Dinan en 1704, secr-taire perptuel de l'acadmie Franaise, s'exprime ainsi : A dfaut de monuments, c'est--dire d'ouvrages crits, nous n'avons d'autre lumires sur la langue celtique que le tmoignage de quelques historiens, desquels il ressort que la langue celtique tait commune toutes les Gaules. Les Gaules taient divises en plusieurs tats (civitates), les tats en pays (pagi) qui tous se gouvernaient par des lois particulires, et ces tats formaient ensemble un corps de rpublique, qui n'avait qu'un mme intrt dans les affaires gnrales. Ils formaient les assembles civiles ou militai-res ; celles-ci appeles comitia armata, ressemblaient l'ar-rire-ban. Donc, ncessit d'une langue commune pour que les dputs pussent confrer, dlibrer et former sur le champ des rsolutions qui devaient tre connues des assis-tants ; et nous ne voyons dans aucun auteur qu'ils eussent besoin d'interprtes. Nous voyons, d'ailleurs, que les Drui-des, faisant la fois fonction de prtres et de juges, avaient coutume

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    de s'assembler, une fois l'anne, auprs de Chartres, pour rendre la justice aux particuliers, qui venaient de toutes parts les consulter. Il fallait donc qu'il y eut une langue g-nrale et que celle des Druides fut familire tous les Gau-lois...

    Il y avait aussi plusieurs nations, dont la langue devait avoir beaucoup de rapports avec la Gaulois. Il y a appa-rence que les Gaulois et les Germains ne devaient point diffrer beaucoup ces peuples ayant la mme origine celti-que ; des Germains taient venus s'tablir dans les Gaules et des Gaulois taient rciproquement pass dans le Ger-manie, o ils avaient occup de vastes contres...

    Ces penses judicieuses conduisent l'auteur du mmoire affirmer que les diffrences de langage observes par Ce-sar taient seulement des diffrences dialectiques. Nous ne le suivrons pas dans ces considrations fort justes sur l'alt-ration considrable produite dans la langue celtique par l'tablissement en Gaule de la famille latine. Nous faisons remarquer nanmoins, que s'il avait tir de ses prmices une consquence rigoureuse, il aurait t amen conclure, que la langue celtique a d conserver une intgrit parfaite dans une contre, dont les Romains n'auront jamais foul le sol.

    Il est bien avr que les Gaulois n'ont point

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    laiss de monuments crits, parce qu'ils avaient peut-tre plus de confiance dans les traditions, et il n'y a pas lieu d'tre tonns de cette manire d'agir, si l'on fait attention la tenacit des traditions chez un certain peuple de l'Eu-rope, que nous dsignerons plus loin avec clart. Cepen-dant, il n'est pas admissible, que la nation celte n'ait point laiss aux sicles futurs le souvenir de ses moeurs, de sa religion et de son industrie. Cette histoire des Gaulois n'est point crite dans les livres ; elle est grave sur le sol mme qu'ils occupaient. Ils ont donn aux tribus, aux terrains, aux montagnes, aux fleuves de la Gaule des noms que le temps lui-mme n'a pu effacer. L est renferme leur vritable histoire.

    Ces appellations possdent certainement un sens prcis, plein de rvlations intressantes, quoique toutes les lan-gues semblent impuissantes expliquer ces nigmes.

    La dcomposition de ces noms propres de lieux, d'hom-mes, de tribus, a proccup srieusement bon nombre d'es-prits : on s'est efforc de rechercher cette langue, qui a rempli notre sol de dnominations indlbiles, dont la si-gnification inconnue jette notre lgitime curiosit un dfi incessant.

    Sir William Jones, fondateur de la socit asiatique de Calcutta, avait remarqu tout d'abord une certaine affinit entre le sanscrit, le grec et

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    le latin. Ils devaient donc avoir une origine commune et, sans oser l'affirmer, il a souponn que le celtique et le go-thique provenaient de la mme source que le sanscrit.

    La grammaire compare des langues europennes de Franois Bopp a expliqu ensuite, comment les lois gram-maticales permettent de dcouvrir dans le sanscrit, le per-san, le grec, le latin et le gothique, non plus une simple af-finit, mais une relle communaut d'origine.

    Tout rcemment encore, M.Tregear a lu devant la so-cit philosophique de Wellington, une tude sur les Maori en Asie. Il a cit la langue Hindostani moderne et la per-sane en regard de la langue Maori, faisant voir nombre d'accords remarquables entre elles. Les mots cits taient en eux-mmes pleins d'histoire et ont fourni la preuve du grand espace de temps coul, depuis que les Maori ont habit l'inde.

    Partant des langues de l'Europe, l'orateur a fait voir que des centaines de mots semblables ceux de la langue Mao-ri se trouvent dans les langues grecque, latine, lithuanienne, celte, etc, etc. Mais la partie la plus intressante de son tude tait celle qui constatait l'identit du Maori et de l'an-glais, en ne tenant pas compte des mots Anglo-Maori, mots fabriqus

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    des deux langues, depuis la conqute du pays par l'Angle-terre. (1).

    Toutes ces observations successives ont conduit penser que la langue sanscrite donnera peut-tre la clef de langue celtique, et on l'a cru avec d'autant plus de raison, que les Celtes sont venus de l'Asie, berceau du genre humain.

    Nous pouvons observer que les dialectes parls dans la France, l'Irlande et l'Ecosse devraient nous donner cette clef plus facilement encore que le sanscrit ; car l'altration du langage n'empche pas, mme aujourd'hui de retrouver les mmes termes celtiques dans les dialectes irlandais, cossais, gallois breton et languedocien. On pourrait faire des citations nombreuses ; mais nous nous bornerons quelques-unes.

    La pellicule du bl moulu et pass au blutoir se nomme, en dialecte languedocien, brn ; en breton bren ; en gallois bran ; en irlandais et cossais bran. La bruyre, si com-mune dans les landes de la Gaule, s'appelle, en languedo-cien brugo ; en breton bruk et brug ; en gallois grug et brwg. Le verbe franais nettoyer se traduit en languedocien par scura ; en cossais par sguradh ; en irlandais par sgu-radh. Le nom franais de l'aune,

    (1) The advocate, 5 sept. 1885, journal de Melbourne, Aus- tralie.

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    essence d'arbres, se dit en languedocien bergn ; en breton et en gallois gwern ; en cossais et irlandais fearn. (1)

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    DIALECTE LANGUEDOCIEN ET LES TECTOSAGES

    Il est donc certain, par quelques exemples, que des mots

    celtiques se retrouvent dans le langage des descendans des Celtes en Bretagne et en languedoc ; aussi nous n'hsite-rons pas faire l'preuve du dialecte languedocien, pour tacher de dcouvrir la vraie langue celtique parle par nos anctres. Nanmoins, il doit paratre bizarre que nous choi-sissions le dialecte languedocien plutt que le breton pour nous mettre sur la voie ; nous invoquerons pour cela une srieuse raison historique, et en examinant de prs les mi-grations des Volkes Tectosages, on se convaincra pleine-ment de la justesse de ce choix. A une poque fort indcise et que les historiens croient pouvoir dterminer, cependant, comme tant le quatrime sicle avant Jsus Christ, deux tribus que l'on dit appartenir aux Belges, les Volkes Tecto-sages et les Volkes Ar-

    (1) Les noms bretons, irlandais, cossais et gallois sont pris de

    l'ouvrage de M. A. de Chevallet : origine et formation de la langue franaise. Ier Vol

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    comiques traversrent la Gaule et vinrent s'tablir dans le midi Gaulois entre la Garonne, les Pyrnes et le Rhne. Les Tectosages firent de Toulouse leur capitale et les Ar-comiques se placrent l'est des Cvennes avec Nimes comme point central de leur domination. Vers l'anne 281 avant Jsus-Christ, une forte migration de Tectosages se dirigea vers le Danube pour rejoindre leurs frres, aussi Tectosages, qui possdaient les rives du fleuve.

    Mettons maintenant en regard de ces faits les indications fournies par Jules Csar.

    Bien avant, il fut un temps o les Gaulois surpassaient les Germains en valeur guerrire et ils leur ont fait la guerre jusque chez eux : les champs ne suffisaient plus nourrir une population trop nombreuse. Ils envoyrent des colonies au-del du Rhin. C'est donc dans les terres de la Germanie les plus fertiles, autour de la fort Hercynie, que les Volkes Tectosages se sont tablis aprs les avoir conquises. Ce peuple jusqu' prsent occupe ce mme territoire. (1)

    Au temps o Cesar crivait ces lignes, les Volkes Tecto-sages taient donc tablis en matres

    (1) Lib. VI. 24. de bello gallico.

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    incontests sur la rive droite du Rhin et autour de la fort Hercynie, c'est--dire, au nord de cette immense fort, de-puis le Rhin jusqu' l'Oder et peut-tre mme au del ; et de plus, ils possdaient la rive gauche du Danube qui coule au sud de la mme fort. Csar ne fixe point l'poque des conqutes des Tectosages ; mais la chose la plus importante observer, c'est que les pays situs sur le rive droite du Rhin et conquis sur les Germains, leur ont toujours appar-tenu.

    Aprs Jules Csar, les auteurs ne font plus mention des Tectosages. Il semblent disparatre du monde, tant le si-lence s'est fait profond autour de leur nom. Nous les re-trouverons cependant bientt, en prenant pour guide l'ty-mologie de Volkes Tectosages et nous pourrons suivre encore la longue trace de leurs expditions guerrires.

    Volkes (Volcae) drive des verbes to vault (vult), volti-ger, faire des sauts et to cow (kaou), intimider ; Tectosages est produit par les deux autres verbes to take to (tke to), se plaire ..., et to sack, piller, saccager. En runissant les qua-tre verbes constituant les deux appellations, nous consta-tons dans leurs significations diverses, que les Volkes Tec-tosages effrayaient les ennemis par la rapidit de leurs volutions dans le combat et se plaisaient dvaster et piller.

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    Ne laissons point passer inaperue cette allure bondis-sante, traditionnelle parmi les voltigeurs des anciennes ar-me Franaises, et conserve encore dans nos rgiments de Zouaves et chasseurs pied, car les Volkes sont anctres des Franks, comme on pourra s'en assurer lorsque nous par-lerons des tribus Frankes.

    Les mouvements guerriers des Volkes se distinguaient donc par une clrit portant avec elle l'effroi, ordinaire-ment couronne par la victoire et suivie de la dvastation et du pillage. En rsumant le nom des Volkes Tectosages, nous voyons en eux de rapides et effrayants pillards.

    Cette appellation n'avait rien que de glorieux pour ce peuple ; car le pillage, c'tait la guerre, et on sait que les cimmriens l'aimaient avec passion. Aussi cette significa-tion honorable du terme pillard s'est-elle conserve intacte dans le pays occup par eux au Midi de la France. Lors-qu'un enfant montre une intelligence vive, une me pleine d'nergie, et lorsque cet esprit nergique est servi par un corps dont les membres sont agiles et nerveux, les parents en parlent avec orgueil et l'appellent un Pillard . Ils vont mme plus loin dans la signification de ce mot ; si on les interroge sur le nombre de leurs enfants, ils rpondent, sans hsitation, qu'ils ont un, deux ou trois Pillards .

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    L'histoire, avons-nous dit, aprs Csar, ne parle plus des Volkes Tectosages, et ce silence est d'autant plus extraordi-naire que le peuple qui avait envoy des colonies au del du Rhin, autour de la fort Hercynie, sur les bords du Da-nube et jusqu'en Asie ne pouvait perdre si rapidement les traditions de son gnie aventureux. Toujours avides d'ex-pditions guerrires, ils reparaissaient avec clat sous le nom de Saxons. Ils dclaraient ainsi ouvertement et la face des nations, qu'ils taient bien les fils, les descendans directs des Tectosages, to sack, piller, son, fils descen-dant. Ils est remarquable que les historiens les appellent toujours les Saxons pillards. Ce qualificatif tait en ralit leur vritable nom, et, d'une manire inconsciente, ces his-toriens expliquent, par le terme de pillards, le sens exact de Saxons.

    Vers l'anne 446 aprs Jsus-christ, le chef des Bretons de l'le de Bretagne, Wor-Tigern, demanda du secours aux Saxons pour le dlivrer des Pictes et des Scots qui cher-chaient l'opprimer. Les Saxons se htrent de voler dans l'le de Bretagne sous la conduite des deux frres Hengis et Horsa, et, aprs avoir battu les Pictes et s'tre rendus les matres de l'le, ils exterminrent les Bretons leurs allis. Les Angles, to angle, pcher la ligne, qui vivaient sur les bords de la mer Baltique, vinrent prendre avec

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    leurs frres Saxons leur part du pillage et, aprs avoir forc la plus grande partie des Bretons chapps au massacre de se rfugier en Armorique, ils fondrent le royaume Anglo-Saxon connu sous le nom d'Angleterre.

    Les Tectosages, suivant les historiens, taient de race Kimrique, et les Cimbres Kimbo, fourchu, to harry, dvaster les dvastateurs fourchus, allusion aux cornes d'urus dont les guerriers ornaient leur tte, les Cimbres disons nous, appartenaient la famille celtique : ils de-vaient donc, Cimbres et Tectosages, parler le langage de leur famille.

    La possession de l'le de Bretagne par les Tectosages a exerc sur eux une influence favorable la conservation de leur langage et de leurs moeurs. L'isolement les a prservs des altrations profondes subies par les langues des autres peuples de l'Europe, tout en leur laissant la libert la plus entire pour les colonisations lointaines, qui sont un trait spcial de leur caractre.

    IV

    DIALECTE LANGUEDOCIEN

    ET LA VRAIE LANGUE CELTIQUE.

    La gnalogie des Anglo-Saxons telle que nous pr-

    sentons, pourrait encore, malgr

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    tout, paratre quelques uns purement hypothtique, mais il est facile de l'appuyer d'une preuve convaincante, puis-que la langue des Tectosages a laiss des traces profondes dans l'idiome languedocien. Une simple comparaison entre quelques termes languedociens et leurs correspondants An-glo-Saxons suffira dmontrer la complte analogie des deux langues. Dsirant cependant viter l'ennui de compa-raisons trop multiplies, nous donnerons seulement les ex-pressions les plus connues et les plus usites.

    Dialecte languedocien.

    Langue Anglo-saxonne (1)

    Alader, arbre vert feuilles persistantes.

    Alder, aune.

    Ander, chenet Andiron (andaeurn),chenet d'Arrou, la file. Array(arr),ordre de ba-

    taille. Bassel, vaisseau, tonneau. Vessel, vaisseau, tonneau. Barata, troquer, changer to Barter, troquer, chan-

    ger. Bouich, buis. Bush (bouch), buisson. Bcka, sommeiller. to Beck, faire un signe de la

    tte. Bolo, une boule. Ball (bul), une boule. Bosk, un bois. Bosky, bois. (1) Les mots saxons sont emprunts au dictionnaire anglais-

    franais de Percy Sadler. Nous tenons ce dictionnaire de l'obligeance de M. William O'Farrel. M. William O'Farrel est auteur d'une gram-maire anglaise, admirable d'ordre et de clart.

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    Dialecte Languedocien.

    Langue Anglo-Saxonne.

    Braou, jeune taureau Braw (braou), front, air. Braza, souder avec du

    cuivre. to Braze (brze), souder

    avec du cuivre. Brn, son. Bran, son. Bugado, lessive. Buck (beuk), lessive. Caicho, caisse. Cash, caisse. Cambo, jambe. Ham, jambe. Catcha, serrer, presser. Catch, capture, crampon. Clapa, frapper. to Clap, frapper. Clouko, poule qui glousse. to Cluck, glousser. Carreto, charreite. Car, chariot. Cost, prix. Cost, prix. Costo, cte, rampe. Coast (kost), cte, rivage. Counta, calculer, compter to Count (kaount), calculer. Crinko, sommet. Crinkle, pli, sinuosit. Drouca, brancher, corcer. to Roughcast (reuffcast), tail-

    ler grossirement. Despatcha, hter. to Despatch, expdier. Escapa, chapper. to Escape (iskepe) chapper. Estret, troit. Strait (strte), troit. Flac, sans force. to Flag, tomber de faiblesse. Flasketo, poire poudre. Flasck, une poire poudre. Franchiman, un Franais. Frenchman, un Franais. Fresco, fracheur. Fresco, fracheur. Frta, frotter. to Fret, frotter. Gat, un chat. Cat, un chat. Godo, nonchalance. Goad (gd), aiguillon. Hai, terme employ pour

    presser le pas des chevaux. to hie (ha), se presser, se

    hter.

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    20

    Dialecte Languedocien.

    Langue Anglo-Saxonn .

    Jouk, perchoir des poules. To Juke (djiouke), percher. Keck, bgue. To Keck, (peu usit) faire des

    efforts pour vomir. Let, couchette, lit. To Lie (La), tre couch. Mat, davantage, plus. Might (mat), pouvoir, force. Mar, lie. Mire (mare), lie. Net, nuit. Night (nat), nuit. Nouz, un noeud. Noose (nouze), noeud cou-

    lant. Panno, pole frire. Pan, pole frire. Pasta, ptrir. To Paste (peste), ptrir. Penteno, filet pour prendre

    les lapins de garenne. Pent, enferm, serr.

    Pickasso, hache, cogne. Te Pick, percer et Axe, hache. Prfathi, mercenaire Prizefighter (prazefateur),

    qui se bat pour de largent. Rat, adv. la bonne heure. Right (rat), adv. la bonne

    heure. Raja, couler. Rash, ruption. Raouba, voler. To Rob, voler. Raspa, limer, rper. To Rasp, limer, rper. Rgna, rendre un son to Ring (rigne), rendre un

    son. Rocko, un rocher. Rock, un rocher. Rodo, une roue. Rod (rde), baie, rade. Round, rond, cercle. Shrank, prtrit de to shrink,

    se raccourcir. Scalfto, chauffe-pieds. To Scald, chauffer, feet, pieds.

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    Dialecte Languedocien.

    Langue Anglo-Saxonne.

    Scaouda, chauder. To Scald (skauld), chauder. Scoutos, espion. Scout (skaout), espion. Scruma, cumer. To Scum, cumer. Scura, nettoyer. Sot cour (skaour), nettoyer. Set, assis. To Sit, sassoir. Sembla, ressembler . to Semble, ressembler . Senshorno, sans intelligence. Sense, intelligence et horn,

    priv de. Shakad, mis en pices. to Shake, tomber en pices. Shankad, dhanch. Shanked, qui des jambes. Shpad, mal ajust. to Shape (chepe), ajuster. Sigur, sr. Secure (sikioure), sr. Sillo, sourcils. to Seel (sil), fermer les yeux. Skasha, cacher, dchirer. to Squash (skouoch), ca-

    cher, craser. Spatarrad, jet terre tout

    de son long. To Spatter, clabousser, cou-

    vrir de boue. Spillo, une pingle. Spill, un petit morceau de

    bois. Tasta, goter dune liqueur. To Taste, goter dune li-

    queur. Trapa, surprendre. To Trap, surprendre. Trounko, tronc darbre. Trunk (treugnk), tronc dar-

    bre. Trullo, amaigrie. Trull, perdue de moeurs. Up, en haut. Up, (eup), en haut. Y, vraiment. Yea (y), oui, certainement.

    ======

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    Cette parent indiscutable entre les termes languedociens et leurs correspondants Anglo-Saxons, dmontre mieux que tous les raisonnements que les Tectosages du midi Gaulois, migrs au del du Rhin, et les Anglo-Saxons sont bien le mme peuple, et elle conduit cette consquence absolue que la langue Anglo-Saxonne est bien la langue parle par la famille Cimmrienne.

    L'explication d'une tradition soi-disant druidique rappor-te par Csar fait ressortir encore cette consquence. Les Gaulois, dit il, se glorifient de descendre tous de pluton et ils assurent tenir cette croyance de l'enseignement des Druides : c'est pourquoi ils comptent le temps, non par les jours, mais par les nuits et ils sont attentifs indiquer les jours de naissances, les commencements de mois et d'an-nes, de telle sorte que le jour suive la nuit. (1) Csar se trompe videmment en disant que les Gaulois se glori-fiaient de descendre de pluton, dont les druides se sou-ciaient aussi peu que de Proserpine : les Cimmriens, en-fants de Gomer, avaient apport de l'Orient cette coutume de compter les jours par le soir et le matin, et les juifs l'ont conserve jusqu' leur dispersion comme corps de nation :

    (1) lib. VI. 18, de bello gallico.

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    l'origine de cette coutume nous est dvoile dans ces paro-les de la Gense : et du soir et du matin se fit le premier jour. (1) Cependant, Csar ne se trompe pas en avanant que les Gaulois comptaient le temps, non par les jours, mais par les nuits ; les descendans des Tectosages disent encore fortnight (fortnat) quatorze nuits, pour exprimer le temps coul en deux semaines, et se'nnight (sennit) sept nuits, pour compter les jours d'une seule semaine.

    V

    LE NEIMHEID. L'identit de la langue celtique avec celle des Tectosages

    devient tout fait vidente par la dcomposition des appel-lations donnes aux diverses parties du sol Gaulois et sur-tout par la dcomposition des noms de tribus transmis par l'histoire ; ces noms renferment, en effet, en les interprtant par la langue Anglo-Saxonne, des indications justes, prci-ses et confirmes par l'histoire.

    Ces dnominations, qui affectent tout le pays celtique, ne sont pas certainement l'oeuvre du peuple ; on ne pouvait point livrer, abandonner la composition srieuse, exacte et fidle de ces

    (1) Gense. chap. I. v. 5.

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    noms essentiels, des caprices sans nombre et sans fonde-ment. Il y avait assurment un corps savant charg de ce soin ; et ce qui le rend manifeste, ce sont les appellations semblables imposes des pays placs aux deux extrmits de la Gaule. Pour en donner quelques exemples assez frap-pants, pourquoi un Aleth existait-il anciennement dans la tribu des Curiosolites, et un autre Aleth existe-t-il encore dans le Languedoc ? Ou ces deux localits exeraient la mme industrie, ou encore elles possdaient un sol bien ressemblant. Pourquoi la ville de Rennes en Bretagne et la station Thermale de Rennes-les-Bains du dpartement de l'aude portent-elles le mme nom ? C'est videmment cause de la similitude qu'offraient les deux pays par leurs mnirs et leurs pierres branlantes. Pourquoi encore la ville de Rennes, portant, d'aprs Strabon, le nom de Condate, trouvait-on un autre Condate dans la tribu des Allobroges, et un troisime chez les Santones, si ce n'est qu'on devait enseigner dans ces villes les mmes traditions ?

    Cela ne dmontre-t-il pas qu'un corps savant et fortement constitu tait charg de donner chaque cit et toutes les parties du terrains celtique des dominations, justifies par la vrit et l'exactitude des objets signifis ?

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    Selon les traditions irlandaises, dit H.Martin, Gadhel ou Gal, personnification de la race, est fils de Neimheidh. Qu'est-ce que ce Neimheidh, cette mystrieuse figure qui plane sur nos origines ? L'histoire ne peut rpondre. (1)

    Neimheidh n'est point le nom d'un chef Gaulois ; il si-gnifie celui qui est la tte, commande, conduit et donne les dnominations, to name (nme), nommer, to head (hd), tre la tte, conduire, et il tait matriellement impossible un seul homme de donner tout le pays celti-que les noms que portent les cits, les tribus, les rivires et les moindres parcelles de terrain : c'tait l l'oeuvre d'un corps savant et le terme de neimheidh, appliqu ce corps d'lite compos des druides, prsente une expression de vrit indniable, puisque les druide taient la fois pr-tres, juges, chefs incontests des Gaulois et chargs de la transmission de toutes les sciences.

    Les druides du Neimheidh savaient former excellem-ment les noms propres d'hommes ou de lieux : ils em-ployaient surtout les termes monosyllabiques de leur lan-gue et les plaaient dans un agencement tel, que les son de ces monosyllabes,

    (1) Histoire de france, note 1 de la page 1.

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    accols les uns aux autres, ne pouvaient blesser l'oreille la plus dlicate. La dcomposition des mots celtique dsi-gnant les villes et les tributs gauloises fera le jour le plus complet sur la manire de faire de ces savants, ainsi que nous le verrons plus loin, lorsque nous parlerons des Armo-ricains et des autres peuples de la Gaule.

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    CHAPITRE II.

    -----

    LANGUE HEBRAIQUE

    -----

    I

    LES NOMS DIVINS.

    Dsirant indiquer les rapports de ressemblance entre les

    langues celtique et hbraque, nous nous voyons expos des longueurs considrables et nanmoins ncessaires. On nous les pardonnera ; les rcits bibliques sont en eux-mmes d'un intrt saisissant, et de nature captiver l'atten-tion la plus rebelle. Les commencements de l'humanit y sont raconts avec une exactitude admirable. L'historien sacr accomplit son oeuvre avec fidlit et sincrit : il n'exagre point les faits gnreux, il ne jette point de voile sur les actions criminelles. Dans son langage concis et grave, les paroles divines apparaissent plaines de grandeur et de majest ; les faits humains s'y droulent avec la plus grande nettet, sans discours, sans digression, prsentant des traits

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    sublimes qui ne sont point tudis et recherchs. Nous au-rions vivement souhait de les faire remarquer ; mais nous avons d nous borner simplement signaler, dans notre essai d'interprtation, la concordance parfaite des rcits bi-bliques avec la signification renferme dans les noms pro-pres des hommes dont ils retracent le caractre et la vie.

    Une pense qui se prsente tout naturellement l'esprit est celle-ci : en supposant le langage des Tectosages comme tant la vraie langue celtique, il semble indispensa-ble que les expressions les plus pures de ce langage se re-trouvent abondantes dans les noms des chefs de cette fa-mille dont l'expansion a presque rempli l'univers. On fait remonter Gomer, fils an de Japheth, la paternit de la nation celtique et cimbrique ; il faudrait donc dans la lan-gue anglo-saxonne, que nous appellerons dsormais la lan-gue celtique, une grande ressemblance avec l'hbreu, et dans les termes monosyllabiques des deux langues, une certaine conformit, au moins pour une grande partie des mots qui composent les noms propres, sinon pour la totalit de la langue. Cette pense a un fondement trop assur pour que nous n'examinions pas si la langue celtique pourra ex-pliquer les noms des premiers hommes cits dans les livres de

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    Mose, et aussi dans quelques-uns des autres livres des H-breux.

    Il est ici ncessaire d'observer que le sjour prolong des hbreux babylone par suite de la captivit avait exerc une influence dsastreuse sur leur langage. Un nombre considrable d'expressions chaldennes s'taient glisses dans la langue hbraque et elle en devint grandement dfi-gure. Aprs la captivit, Esdras, le docteur habile dans la loi de Mose, s'appliquant instruire le peuple dans la loi du seigneur, changea les anciens caractres de l'criture hbraque et leur substitua les caractres chaldens, afin de rendre la lecture de l'Ecriture Sainte plus facile aux juifs dj accoutums ces caractres. Il fut donc oblig non seulement de transcrire l'Ecriture Sainte en caractres con-nus du peuple, mais encore de traduire l'ancien langage purement hbraque que la plupart des juifs ne compre-naient plus, en la langue parle en ce moment et compose d'un mlange d'hbreu et de chalden. Ce qui dmontre la ncessit absolue de cette tradition faite par Esdras, c'est la difficult insurmontable prouve par l'historien Josphe, lorsqu'il a cherch interprter les noms propres hbra-ques par le langage hbreu-chalden : aussi ont-ils rsist ordinairement tous les efforts de sa perspicacit.

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    Avant de faire l'essai de la langue celtique sur ces noms d'hommes qui doivent, ce semble, renfermer l'histoire abr-ge du premier ge du monde, il est juste de s'arrter en premier lieu sur les noms diffrents donnes Dieu, le crateur de l'univers.

    Elohim est le nom, par lequel les hommes ont tout d'abord dsign le Seigneur qui cr la terre, et a daign la bnir en la consacrant sa gloire. L'expression hbraque Elohim, disent les rabbins, est mise au pluriel par respect pour Dieu ; car au singulier on dirait Eloha. Les hbreux le font driver de el, fort et puissant et de ala, obliger, as-treindre, parce que Dieu s'oblige et s'astreint pour ainsi dire faire servir sa puissance la conservation des choses cres. (1)

    S'il nous est permis de parler avec franchise, nous dirons que la langue celtique explique bien mieux le sens d'Elo-him.

    Lorsque Dieu eut cr l'homme et la femme son image et capables, en consquence, de batitude, de connaissance et d'amour surnaturel, il les bnit, leur disant : Croissez et multipliez vous et remplissez la terre. (2)

    C'est donc la multiplication de la race humaine (1) Cornelius a Lapide. (2) Gense, chap. I. 28.

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    que Dieu voulu bnir et le terme Elohim en langue celtique ne dit pas autre chose, Hallow heam, heam (him) re-prsentant l'enfant qui n'a pas encore vu le jour, tandis que le verbe to hallow (hallo) signifie bnir, sanctifier : c'est l'Etre par excellence qui possde le droit de bnir et de sanctifier toutes choses. Cette similitude de sens et d'ex-pression ne nous parat pas devoir tre nglige.

    Dieu tait encore connu sous le nom de Sadda, qui ex-primait l'ide du crateur donnant la nourriture et l'abon-dance des choses ncessaires la vie corporelle par sa lib-ralit, car Sadda signifie large et libral. (1)

    En interprtant Sadda par la langue celtique, nous trou-vons que les hommes sont rassasis par un Dieu soucieux de ses cratures, to sate (ste), rassasier, to eye (a) avoir l'oeil sur ...

    Adona tait encore une autre dnomination donne par les hommes au Tout-Puissant : c'est le Seigneur, le Domi-nus de l'Ecriture Sainte. Les hbreux n'crivant pas, par respect, le nom

    (1) Cornelius a lapide.

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    de Jehova, le remplaaient ordinairement par Adona. Il n'a pas suffi la bont divine de veiller par sa Providence la nourriture de ses cratures, elle leur donn aussi le pou-voir de possder, suivant ces paroles de la Gense : Croissez et multipliez-vous, et dominez sur les poissons de la mer, sur les oiseaux du ciel, et sur tous les animaux qui se meuvent sur la terre. (1)

    Le pouvoir de possder accord par Dieu aux hommes est renferm dans le terme Adona, inexplicable par la lan-gue hbraque, to add, ajouter, to own (n), possder, to eye (a), avoir l'oeil sur.

    Jehova est le nom sacr, le vrai nom du seigneur, rvl par Dieu lui-mme Mose. Les hbreux ne l'crivaient point ; il tait cependant grav sur la lame d'or qui tait at-tache et retenue par un ruban d'hyacinthe la mitre du Grand Prtre. Josphe rapporte que lorsque Alexandre se prsenta devant le Grand Prtre Jaddus revtu en ce mo-ment de tous ses ornement pontificaux, ce conqurant de l'Asie se prosterna pour adorer celui dont le nom redout tait grav sur cette lame d'or brillant au-dessus du front du successeur d'Aaron.

    D'aprs les traditions des Hbreux, Jehova (1) Gense, chap. I. 28.

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    exprimait la trinit des personnes dans l'unit divine. Mais o tait la possibilit d'exprimer par le nom de Jehova la trinit dans l'Unit ? Il fallait, pour atteindre ce but, que ce nom divin renfermt dans sa composition les pronoms per-sonnels de la langue parle par Mose.

    Le moi de la premire personne, en hbreu, se traduit par ani et anci et le nous par anu, nnu ; le toi et le vous de la seconde personne par ate et atm ; le lui de la troisieme per-sonne par eua.

    Les pronoms personnels de la langue hbraque ne se rapportent donc pas aux quatre lettres i, he, u, i, qui for-ment le nom saint de Jehova. Cependant l'i (iod) se trouve parmi les pronoms affixes de la premire personne, qui cor-respondent aux pronoms rflchis et pronoms adjectifs possessifs de la langue franaise.

    Plaons en regard des quatre lettres hbraques i, he, u, i, qui composent le nom divin rvl Mose, les pronoms personnels de la langue celtique I, he, we, ye, et nous pour-rons tre lgitimement tonns du rsultat. Observons en passant que l'alphabet hbreu ne possde pas d'y, tandis que cet y est dment renferm dans l'alphabet celtique. Nous avons donc en ralit dans les pronoms personnels celti-ques les quatre lettres formant le nom divin, c'est--dire deux

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    i, un he et un we qui remplace le ouau de la langue hbra-que.

    Le premier i s'crivant toujours par un I majuscule repr-sente le nominatif singulier de la premire personne je ou Moi et se prononce a.

    Le second i, ye qui se prononce yi, correspond au nomi-natif pluriel de la seconde personne Vous ; le thou ou Toi du singulier, n'exprimant qu'une familiarit peu respec-tueuse, n'est point usit en Anglo-saxon, comme d'ailleurs, en Franais, dans le langage poli.

    Le he, se prononant hi, correspond au nominatif singu-lier de la troisime personne, Lui. Quant au we dont la pro-nonciation est oui et qui remplace le ouau hbraque, c'est le nominatif pluriel de la premire personne, Nous.

    Dans ces quatre lettres se trouve donc la dsignation des trois personnes divines par Moi, Vous et Lui, tandis que le Nous les rassemble, les unit pour en faire un tre unique possdant une substance, une nature, une essence commu-nes aux trois personnes distinctes.

    Ce Nous se retrouve plusieurs fois dans le rcit de l'his-toire des hommes fait par Mose, le serviteur fidle, qui rapportait avec intgrit les instructions divines adresses au peuple hbreu. Le premier Nous apparat la cration

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    de l'homme : Faisons, dit le Seigneur, l'homme notre image et notre ressemblance. (1)

    Aprs la dsobissance et la chute d'Adam et d'Eve, le Nous est encore retrac dans ces paroles empreintes d'une ironie salutaire et vengeresse que Dieu leur adresse : Voi-l Adam devenu comme l'un de Nous, sachant le bien et le mal. (2) Une troisime fois le Nous divin est accentu dans l'arrt port contre l'orgueil des hommes et suivi de la dispersion complte de la famille humaine par la confusion du langage primitif : Venez donc, dit le Tout-Puissant, descendons en ce lieu, et confondons-y tellement leur lan-gage, qu'ils ne s'entendent plus les uns les autres. (3)

    Nous avons crit le nom de Jehova au moyen des lettres i, he, u, i, quoique le texte hbraque porte i, he, u, he. Cor-nelius a Lapide relate ce sujet la formule employe par les juifs quand on les force prter serment ; afin de ne pas prononcer le nom divin et sacr, ils s'expriment ainsi : Je jure par i, he, u, i, et ces lettres ajoute le mme Cornelius, forment le vrai nom de Jhova. La diffrence accuse par la quatrime lettre parat au premier abord fort

    (1) Gen. chap. I. 26. (2) Gen. chap. III. 22. (3) Gen. c. XI. 7.

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    importante, mais en l'examinant avec soin, elle n'offre rien d'embarrassant ; car dans le pronom celtique ye, vous, il y a en mme temps un y et un e, et c'est l, croyons-nous, le noeud d'une difficult que la langue hbraque moderne, rduite ses seules forces, ne saurait rsoudre.

    En dehors d'une transmission traditionnelle, depuis long-temps interrompue, il devient peu prs impossible de re-constituer la prononciation du nom de quatre lettres conte-nant le mystre de la Sainte Trinit. Du reste, les juifs eux-mmes ignorent de qu'elle manire Mose et les prtres juifs le prononaient devant le peuple assembl pour les crmonies religieuses.

    La facilit avec laquelle les pronoms personnels de la langue Anglo-Saxonne expliquent le nom divin de Jehova, nous amne croire que les Celtes taient loin d'ignorer et ce nom et sa vritable signification, puisque les relations de la Gaule avec lAsie taient incessantes par les migrations vers l'Occident de nouvelles peuplades celtiques.

    L'anne 1491 avant Jsus-Christ avait vu la rvlation du nom de Jehova faite Mose. Quarante annes plus tard, la suite de la conqute de la Palestine faite par Josu dans l'espace de six ans, de 1451 1445 avant Jsus-Christ, les brillants faits d'armes des Hbreux

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    avaient port au loin leur rputation guerrire et frapp d'tonnement les peuples asiatiques, qui comprenaient bien la protection divine, dont la force invincible clatait dans les secours surnaturels prodigus aux descendans de Jacob. Les diverses peuplades celtiques, dans leur marche lente et continue vers l'Europe, pouvaient donc connatre, non seu-lement les exploits hbreux, mais encore leur organisation en tribus et le nom de leur puissant protecteur, Jehova. On ne doit pas tre surpris que, possdant le sens de ce nom sacr, les Celtes aient profess une vnration extrme pour le nombre trois, qui reprsentait leur esprit la Trinit sainte dans l'unit divine.

    Le nom sous lequel les Celtes dsignaient le peuple h-breu affirme clairement leur connaissance certaine du nom de Jehova. Pour les enfants de Gomer, un hbreu s'appelait jew (djiou) c'est--dire, un homme devant lequel tait pro-nonc le nom de quatre lettres, et qui se servait de ce nom divin dans ses adorations et les hommages de sa prire. En ralit, les enfants de Gomer avaient appliqu au peuple protg le nom du protecteur, et il nous parat trs vraisem-blable que l'expression jew est bien le nom saint de jehova contenant les quatre lettres rvles Mose.

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    II

    LES PREMIERS HOMMES ADAM JUSQU'A NO. Aprs avoir tent d'interprter les noms divins par la

    langue celtique, nous essaierons aussi cette mme langue dans la dcomposition des noms propres d'hommes et de lieux.

    La souche du genre humain, le premier tre possdant une me raisonnable, unie une substance corporelle, porte le nom d'Adam. Sous ce nom, il faut entendre l'homme et la femme, car Dieu les cra mle et femelle ; il les bnit et il leur donna le nom d'Adam au jour qu'ils furent crs. (1) Ce nom tait donc commun Adam et Eve, et Dieu lui-mme l'avait impos. Les hbrasants veulent qu'Adam d-rive de adama, terrestre, parce que Dieu l'avait form du limon de la terre.

    Interprt par la langue celtique le terme Adam, compo-s de deux mots, prsente pour ainsi dire, un rsum de la cration de nos premiers parents. Parmi les tres crs, Adam n'en avait point trouv qui lui ft semblable. Et

    (1) Bible de Carrires, Gen. c. v. 2. Nous donnons ordinairement

    la traduction de l'Ecriture Sainte d'aprs cette bible, parce qu'elle est fort exacte et trs apprcie. Nous faisons ici cette remarque afin de n'avoir pas y revenir dans toutes nos citations.

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    le seigneur dit : il n'est pas bon que l'homme soit seul ; faisons-lui une aide semblable lui (1) Dieu fit donc la femme et l'amena Adam. D'aprs l'criture sainte, la femme tait une crature ajoute l'homme, semblable lui et son aide pour la multiplication du genre humain, c'est dire, la mre ajoute au pre, et c'est l l'ide offerte par la dcomposition du nom dAdam, to add, ajouter, dam, la mre.

    L'Ecriture Sainte donne au premier des enfants d'Adam, le nom de Can. A sa naissance, Eve, sa mre, s'cria : je possde un homme par la grce de Dieu.

    Can, en hbreu, implique l'ide de possession, et il vient de la racine Kana, possder. Adam et Eve regardaient donc leur fils comme leur bien et leur acquisition particulire ; au reste, la puissance du pre sur son enfant n'est-elle pas de droit naturel ? Eve a eu grandement raison d'appeler son premier fils, Can, sa possession.

    La langue celtique retient, non pas le verbe Kana, poss-der, mais le verbe Can, pouvoir. La signification du nom de Can serait alors le pouvoir, la facult de possder un homme par la grce de Dieu, et cette diffrence n'est point

    (1) Gen. C. II. 18.

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    sensible dans la pense qu'Eve a d attacher aux paroles prononces par elle la naissance de son fils.

    Dans le texte hbraque, Can est crit Qin : en langue Celtique to coin (con) se traduit par battre monnaie, inven-ter. Ne serait-ce pas l le sens vritable de Can qui aurait imagin, invent la valeur conventionnelle des monnaies ? L'amour trop vif de l'or et de l'argent touffe srement les sentiments gnreux, et arme ordinairement du fer meur-trier la main des assassins. Can avait cent seize ans lors-qu'il commit le crime affreux qui le fit maudire. On peut croire avec juste raison que les hommes taient dj nom-breux, puisque Can rpondant la menace divine, disait : Quiconque donc me trouvera, me tuera. La multiplica-tion rapide du genre humain a d faire natre, dans l'esprit de Can, la pense de remplacer les changes par une va-leur conventionnelle attache aux mtaux prcieux, or et argent.

    Abel est le second fils d'Adam et d'Eve, mais sa mre ne lui a point donn ce nom. Josphe le fait driver du mot hbreu ebel deuil ; car, par la mort d'Abel, le deuil a fait sa premire apparition sur la terre. Pour bien saisir le sens du mot Abel, tel que l'indique Josphe, il ne faut point perdre de vue une

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    expression trs frquente dans les livres saints dsignant la mort et le tombeau ; c'est l'expression inferi, les enfers, tandis que le lieu du supplice des rprouvs et des maudit est l'infernus ; et c'est dans le premier sens que David, tant prs de mourir, recommanda Salomon, son fils de punir Joab de se crimes : Vous ferez, dit-il, son gard, selon votre sagesse ; et vous ne permettrez pas qu'aprs avoir vieilli dans l'impunit de son crime, il descende en paix dans le tombeau ; et non deduces canitiem eju ad inferos. (1)

    Abel prsente la premire image de la mort par le crime affreux de son frre an, to ape (pe), imiter, prsenter, l'image de..., hell, enfers.Le terme ebel ou pel serait ainsi appliqu au second fils d'Adam seulement aprs le fratri-cide de Can, et la dsignation de leur fils par une telle ex-pression a d, pendant de longues annes, raviver dans l'me de ses malheureux parents la douleur de sa perte.

    Nous nous sommes attach dans cette interprtation suivre le sens donn par Josphe : toutefois, comme les premiers hommes taient souvent connus sous plusieurs noms prsentant des significations diffrentes, nous croyons pouvoir

    (1) Troisime liv. des Rois, c. II. 6.

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    voir expliquer d'une autre manire le nom d'Abel, en conservant avec rigueur la prononciation donne par l'Ecri-ture Sainte.

    Il est indubitable pour tout esprit srieux qu'Adam avait reu de Dieu les communications les plus prcieuses, non seulement sur les vrits religieuses, mais encore sur les industries humaines ncessaires l'tat social, et Adam transmettait ses enfants et la science religieuse et en mme temps les principes des arts industriels. Le monde disait Origne Celse, ayant t cr par la Providence, il faut ncessairement que le genre humain ait t mis, dans les commencements, sous la tutelle de certains esprits sup-rieurs, et qu'alors Dieu se soit manifest aux hommes. C'est aussi ce que l'Ecriture Sainte atteste... et il convenait, en effet, que dans l'enfance du monde, l'espce humaine reut des secours extraordinaires, jusqu' ce que l'invention des arts l'et mise en tat de se dfendre elle-mme et de n'avoir plus besoin de l'intervention divine. (1)

    Abel tait pasteur ; il offrait Dieu des sacrifices, choi-sissant cet effet les agneaux les plus beaux et les plus gras de son troupeau, et le Seigneur regardait favorablement ses prsents. (2)

    (1) Soires de Saint-Petersbourg, 2e entretient, note VI (2) Gen. c. IV. 2-4.

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    L'Ecriture Sainte, en marquant avec soin la profession pastorale d'Abel, semble indiquer la provenance de son nom. Abel recueillait les belles toisons de son magnifique troupeau ; sa main filait la laine soyeuse, et ces fils entrela-cs, formant et la chane et la trame, lui donnaient un excel-lent tissu dont il se pouvait vtir, abb, trame de laine, to ell, mesurer.

    Un chtiment juste et svre suivit de prs le crime hor-rible de Can. Le Seigneur avait dit au fratricide : Vous serez fugitif et vagabond sur la terre , et le coupable avait rpondu : Vous me chassez aujourd'hui de dessus la terre et j'irai me cacher de devant votre face, et je serai fugitif et vagabond sur la terre. Donc quiconque me rencontrera, me tuera. Le Seigneur lui rpondit : Non, cela ne sera pas ainsi ; mais quiconque tuera Can sera puni sept fois plus. Et le Seigneur mit un signe sur Can, afin que ceux qui le trouveraient ne le Tuassent point. Can, s'tant retir de devant la face du Seigneur, habita en fugitif sur la terre vers la rgion orientale d'Eden. (1)

    Le texte hbraque, au lieu de ces paroles : Can habita en fugitif sur la terre, porte : Can

    (1) Gen. c. IV. 14-16.

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    habita dans la terre Nod. Josphe fait de nod un nom propre de lieu, parce qu'il n'a pu arriver dcouvrir le sens exact de cette expression de la langue primitive. Le terme nod existe dans l'anglo-saxon et il donne la connaissance du signe de la maldiction divine attach Can ; to nod signi-fie, faire un signe de tte, saluer en baissant la tte.

    La note d'infamie, marque sur la personne du fratricide, devait donc consister en un mouvement nerveux et convul-sif de la tte, obligeant Can la baisser honteusement de-vant tous ceux qu'il rencontrerait. D'aprs la tradition, le signe de maldiction port par Can tait un tremblement continuel du corps, tremblement rvlateur de son forfait.

    Abel, l'enfant pieux et pur fut remplac par Seth, et Eve disait : Le Seigneur m'a donn un autre fils au lieu d'Abel que Can a tu. (1) En hbreu suth signifie mettre et pla-cer : dans la langue des Tectosages, le verbe to set retient le mme sens de mettre et placer. Seth tait le remplaant d'Abel et destin devenir le pre des hommes fidles leur Crateur.

    Les tissus de laine fabriqus par Abel ne reparaissent plus dans le nom des premiers hommes et cdent la place la mention des ouvrages de

    (1) Gen. c. IV. 25.

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    fer et de bronze. Il ne faut pas descendre fort longuement dans la gnalogie des enfants d'Adam pour y rencontrer la science des mtaux, car Malaleel, to mall frapper avec un maillet, to allay (all) mlanger les mtaux, to ell, me-surer, tait l'arrire petit-fils de Seth. Suivant la chrono-logie ordinaire, lorsqu' l'ge de soixante-dix ans Malaleel est devenu pre de Jared, les hommes habitaient le monde depuis seulement trois cent quatre-vingt-quinze ans. Adam tait encore au milieu de ses descendans pour les aider de ses conseils et les initier aux travaux industriels. Parce que la science des mtaux est inscrite dans Malaleel, est-ce dire que ceux qui l'avaient prcd ignoraient l'usage du fer et les alliages de cuivre et d'tain constituant le bronze ? Nous sommes bien loin de le croire ; Adam assistait aux travaux de ses enfants, et sa prsence indique suffisamment d'o venaient les connaissances acquises et d'o partait l'impulsion donne aux diverses industries.

    Il n'tait pas possible d'crire dans le nom d'un seul homme la somme des sciences possdes l'origine du monde et on les a graves peu peu dans le nom des chefs de famille. Malaleel nous dnote les ouvrages de fer et de bronze, et afin que les gnrations futures ne se mpren-nent pas et ne voient pas en lui un artisan unique, il

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    appelle son fils Jared, to jar (djar), tinter, cliqueter, to head (hd) tre la tte de, commander, prouvant ainsi qu'il tait la tte de nombreux ouvriers en mtaux.

    Ces noms propres d'hommes, renfermant la mention des connaissances matrielles des premiers temps du monde cr, indiquent ainsi que la marche de la civilisation hu-maine n'a point t ascendante et que l'ge de pierre et de bronze n'ont aucunement prcd l'ge de fer au berceau de l'humanit.

    Le petit-fils de Jared, Mathusalem dont la longvit a surpass celle des autres hommes, nous initie une autre branche d'industrie : les lits moelleux n'taient gure alors en usage, te ces produits d'une civilisation trop avance taient remplacs par des nattes sur lesquelles on prenait un repos ncessaire dans sa demeure, to mat, couvrir de nat-tes, to use (iouse) se servir de, hall, salle, maison.

    Les enfants de Seth ne sont point seuls dvoiler les se-crets des arts parmi les premiers hommes, et en parcourant la brve ligne des descendans de Can, nous remarquons Tubalcan qui fut habile en toutes sortes d'ouvrages d'ai-rain et de fer. (1) Nanmoins cette habilet

    (1) Gen. c. IV. 22.

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    travailler le fer et le bronze n'est point crite dans son nom ; elle y est remplace par la mention d'une autre con-naissance, celle de l'art nautique.

    Les hommes taient en tat de construire de bons vais-seaux et on comprend ainsi comment ils ont prt une m-diocre attention l'arche destine No et faite suivant la forme et les dimensions donnes par Dieu lui-mme. Peut-tre mme ont-ils compt sur eux pour tenter de se sous-traire aux effets des menaces divines. Il y avait cependant une diffrence bien sensible entre la construction de leurs vaisseaux et celle de l'arche dont disposerait No. Celle-ci tait un vrai navire pont, protg contre la pluie du ciel et les grandes lames de la mer, tandis que les vaisseaux ordi-naires, compltement dcouverts, n'taient point dfendus contre les grandes pluies ni contre les hautes lames. Le premier mot qui entre dans la composition du nom de Tu-balcan retrace la forme de ces premiers btiments, tub, vaisseaux dcouvert, cuve, baquet, hall, maison, to coin (con), inventer.

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    III

    NO ET SES ENFANTS. Les sciences possdes parles hommes les entranrent

    la rvolte la plus audacieuse contre Dieu. Les crimes contre nature s'accumulrent, et, fatigu de cette obstination dans le mal, le Seigneur dit No : J'ai rsolu de faire prir tous les hommes : ils ont rempli toute la terre d'iniquits, et je les exterminerai avec tout ce qui vit sur la terre. (1)

    No tait juste, et ayant trouv grce devant Dieu, il tait devenu comme le confident de ses desseins vengeurs. Il construisit l'arche sur l'ordre donn par le seigneur, et s'en-fermant avec sa famille et les animaux qui devaient tre conservs sur la terre dans ce vaisseau plac sous la protec-tion divine, il fut sauv du dluge dans lequel prirent tous les hommes criminels. No proclame qu'il avait la connais-sance du chtiment futur des hommes, de la manire dont il serait inflig et aussi la connaissance de sa propre conser-vation et de celle de sa famille, to know (n), connatre, savoir, how (haou), comment, de quelle manire.

    (1) Gen. c. VI. 13.

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    Aprs la destruction violente du genre humain par le d-luge, Dieu bnit No et ses enfants et leur dit : Croissez et multipliez-vous et remplissez la terre. No avait donc trois fils qui sortirent de l'arche, Sem, Cham et Japheth. Or cham est le pre de Chanaan. Ce sont l les trois fils de No ; et c'est d'eux qu'est sortie toute la race des hommes qui sont sur la terre. (1)

    Le dluge et le salut miraculeux de No et de ses enfants taient des vnements trop considrables dans l'histoire de l'humanit pour que le nom d'un des fils de No n'en repro-duisit point quelque trait essentiel. L'arche ayant flott sur l'eau pendant sept mois avant de toucher le sommet des montagnes d'Armnie, No a voulu crire ce souvenir int-ressant dans le nom de son fils an, Sem, to swim (Souim) flotter sur l'eau.

    Le second de ses enfants, grossier et impudent, attira sur sa postrit la maldiction paternelle par une faute lamen-table demeure jamais sa honte et son opprobre ; aussi son nom Cham to shame, couvrir de honte, redit son acte infme et la maldiction qui l'a suivi.

    L'Ecriture Sainte dit fort clairement que de (1) Gen. c. IX. I. 18. 19.

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    Sem, Cham et japheth est sortie toute la race des hommes qui sont sur la terre.

    On a cru pouvoir abandonner ce point de dpart tout fait historique pour s'attacher un autre ordre d'ides, per-mettant de distinguer les varits humaines d'aprs la cou-leur de la peau et les degr de l'angle facial. Il serait bien long d'numrer toutes les classifications mises en avant, et il nous parat prfrable de s'arrter la division de Cuvier distinguant le varits suivantes : 1 La blanche ou Cauca-sique ; 2 la Jaune ou Mongolique ; 3 la Ngre ou Ethio-pique.

    La varit blanche, Caucasienne, Arabe Europenne se reconnat principalement la forme ovale de la tte, la couleur de la peau plus ou moins blanche, aux lvres peti-tes, aux traits rguliers. Son centre principal serait en Eu-rope et dans l'Asie Mineure, l'Arabie, la Perse et l'Inde jus-qu'au Gange, et l'Afrique jusques et y compris le Sahara.

    La varit Jaune ou Mongolique se reconnat la face carre, aplatie, au nez plus enfonc, aux yeux placs obli-quement, la peau olivtre et basane. Elle aurait en quel-que sorte son foyer sur le plateau de la grande Tartarie et du Thibet.

    La varit Ngre ou Ethiopique a le teint noir ou noir-tre, le crne dprim, le nez pat

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    et les lvres grosses. Elle couvre la plus grande partie de l'Afrique et quelques les de l'Ocanie. (1)

    Nous ne rechercherons pas les inconvnients d'une clas-sification renfermant dans une mme varit les Arabes, les Abyssins, les Egyptiens et les nombreux rameaux celti-ques ; il nous suffit de retrouver en Japheth, troisime fils de No, la souche relle et incontestable de la varit hu-maine la plus blanche. Les enfants de Sem dont le type le mieux conserv est retrac dans les Arabes, ont le teint plus ou moins basan, mais le trait particulier de la famille se montre dans les yeux et les cheveux noirs. Ce ne peut tre toutefois qu'un caractre gnral ; et, parmi les Hbreux, descendans directs de Sem, l'Ecriture Sainte constate une exception en la personne de David dont les cheveux taient roux.

    Dans la famille de Japheth, la peau blanche et aux che-veux ordinairement peu foncs se joignent les yeux bleus ou quelque peu dcolors. Cette couleur plus claire des yeux tait tellement sensible dans le troisime fils de No qu'il en a gard le nom d'oeil dcolor ou Japheth, Iphth, dans le texte hbraque, eye (a) oeil, to fade (fde) se d-colorer.

    (1) Gographie par Maltebrun.

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    Gomer, fils an de Japheth, devait prsenter cette mar-que distinctive de l'oeil dcolor, puisqu'il en a t procla-m le vritable hritier, to come (keume) devenir, heir (r) hritier. Il ne s'agissait point ici des faveurs essentielles confres par le droit d'anesse et permettant l'hritier or-dinaire, au fils an, d'offrir Dieu les sacrifices, de com-mander ses frres et de conserver les biens paternels ; car ces droits appartenaient aux ans de toutes les familles. Ce terme d'hritier s'appliquait plutt aux qualits corporelles remarques dans gomer et transmises sa postrit formant l'immense famille celtique.

    Les hommes s'taient fort multiplis aprs le dluge : Il n'y avait alors qu'une langue et une mme manire de par-ler pour tous les hommes. Obligs qu'ils taient de s'ten-dre par suite de leur rapide accroissement, ils dirent : Ve-nez, faisons-nous une ville et une tour dont le sommet arrive jusqu'au ciel : et rendons notre nom clbre, avant de nous disperser sur la terre. (1)

    Ils tenaient cet orgueilleux langage dans les plaines de Sennaar, et ils se mirent l'oeuvre, se servant de briques la place de pierres et de bitume en guise de ciment.

    (1) Gen. c. XI. 4.

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    Or le Seigneur fut irrit de ce travail insens ; et il dit : Ils ne sont tous maintenant qu'un seul peuple et ils ont un mme langage : ils ont commenc cet ouvrage et n'aban-donneront point leur dessein qu'ils ne l'aient entirement termin. Venez donc, descendons en ce lieu, et confon-dons-y leur langage, de telle sorte qu'ils ne s'entendent plus les uns les autres.

    C'est de cette manire que le Seigneur les dispersa de ce lieu dans tous les pays du monde, et qu'ils cessrent de btir la ville.

    C'est aussi pour cette raison que cette ville fut appele Babel, parce que l fut confondu le langage de toute la terre : et le seigneur les a disperss ensuite dans toutes les parties du monde. (1)

    Babel, d'aprs les termes de l'Ecriture Sainte, porte en soi l'ide de la confusion, et les Hbreux, en recherchant soigneusement Babel dans leur langue, n'ont pu retrouver que balal, confusion, pour expliquer ce Babel qu'ils ne pos-sdent plus. Mais balal est bien loin d'avoir la valeur du verbe celtique to babble, babiller, jaser : babil incohrent, confus, remplissant de honte les hommes qui n'entendent plus le langage qu'ils comprenaient trs bien la veille.

    (1) Gen. c. XI. 6-9.

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    La langue primitive est-elle disparue au milieu de cette confusion ? Nous pouvons dire avec assurance, qu'elle est demeure en usage dans la bouche d'une partie des enfants de Sem et aussi d'une partie des enfants de japheth ; et cette langue primitive est comme le point de dpart des autres langues parles dans le monde, comme une source donnant naissance des ruisseaux sans nombre qui vont dcrire au loin des mandres capricieux. Ce langage s'est perptu dans un tat parfait parmi les hbreux jusqu' ce que le s-jour du peuple de Dieu dans la Chalde l'ait fait modifier d'une manire trs sensible.

    Les enfants de Gomer l'ont-ils transmis intact, au moins dans ses parties essentielles ? Nous essaierons de dmon-trer que l'intgrit de la langue primitive s'est conserve dans la famille de Japheth plus srement que dans la fa-mille de Sem, peut-tre cause de la domination univer-selle promise par Dieu la postrit de Japheteh. Cette d-monstration peut se faire en interprtant par la langue celtique les noms propres des hommes les plus clbres, conservs dans l'histoire du peuple hbreu ; toutefois, il ne faut pas perdre de vue que le nom propre d'un homme, aprs la confusion des langues comme au premier ge du monde, retient ordinairement la mmoire d'une action re-marquable de sa vie,

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    ou bien le pouvoir d'une qualit, d'un dfaut corporels, et quelquefois aussi reprsente l'tat des moeurs de l'poque.

    Nous avons vu par le rcit de la Gense les hommes abandonnant la construction de ville et de la tour de Babel. Dans cette ville inacheve, le farouche Nemrod, petit-fils de Cham, tablit sa demeure et fonda le royaume de baby-lone. Ce violent chasseur devant le Seigneur n'attaquait point les btes fauves ; il tait chasseur d'hommes, oppri-mant ses semblables, semant partout l'pouvante et mri-tant bien le nom sous lequel il tait connu, car Nemrod si-gnifie un pouvantail renomm, name (nme) rputation, rawhead (ruhd) pouvantail.

    La dispersion des hommes est dtermine et fixe par Phaleg dont la traduction, en hbreu, est division, parce que la terre fut divise de son temps entre les peuple par-lant des langues diffrentes. (1) La langue des Tectosages nous reprsente dans Phaleg, les hommes pousss dimi-nuer leur trop grande concentration dans une seule contre du monde, to fall, diminuer, to egg, pousser, exciter.

    Phaleg tait le fils an d'Hber et celui-ci (1) Gen. c. X. 25.

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    leur a laiss son nom, pour tmoigner que ses enfants pos-sdaient par lui l'hritage des bndictions divines promi-ses Sem et sa postrit directe, Heber se dcompose ainsi : to ebb, descendre, heir (r) hritier.

    IV

    ABRAHAM ET LES PATRIARCHES.

    Le grand Abraham appartenait la ligne dHeber et

    l'Ecriture Sainte a soin de l'appeler Abram hbreu, accusant par l l'importance attache ce titre. Abram, premier nom de ce patriarche, est le prcis exact et fidle des ordres re-us de Dieu. Le Seigneur lui avait dit : Sortez de votre pays, de votre parent et de la maison de votre pre et ve-nez en la terre que je vous montrerai.

    Je ferai sortir de vous un grand peuple, je vous bnirai, je rendrai votre nom clbre et vous serez bni.

    Je bnirai ceux qui vous bniront, et je maudirai ceux qui vous maudiront ; et tous les peuples de la terre seront bnis en vous. Abram

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    sortit donc comme le Seigneur le lui avait ordonn, et Loth le suivit. (1)

    Les hbrasants traduisent Abram par le pre illustre ab-ram, et Abraham par le pre illustre d'une multitude ab-ram-a-mon. Cette explication parat un peu obscure quoi-que dtermine par un fait de tous points conforme la v-rit.

    Abram, d'aprs les ordres divins, devait porter ses pas dans une terre trangre qui lui serait montre par Dieu. Abandonnant le sol natal, sa parent et la maison de son pre, il devenait en ralit un tranger pour les habitants des pays qu'il traversait, il imitait le voyageur errant, allant et l, en attendant que le lieu de son sjour fut fix avec certitude, to ape (pe) imiter, to err, errer, aller et l, ham, jambe aperrham. L'expression arabe berrani, tran-ger et le terme Kabyle aberrani, signifiant aussi tranger, viennent confirmer cette interprtation du premier nom d'Abram.

    Obissant la parole du Seigneur, Abram parcourut le pays de Chanaan ; il dut le quitter bientt cause de la fa-mine qui svissait dans la contre : il se retira en Egypte, toujours protg d'une manire visible, et, aprs y tre de-meur

    (1) Gen. c. XII. 1-4.

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    quelque temps, il revint dans le pays de Chanaan, avec sa femme et tout ce qu'il possdait. Il tait fort riche ; l'or et l'argent abondaient dans sa tente. Lot accompagnait Abram, et lui aussi avait des troupeaux de brebis et des troupeaux de boeufs.

    Une querelle s'tant leve entre les pasteurs de Lot et d'Abram, celui-ci dit son neveu : Qu'il n'y ait point, je vous prie, de dispute entre vous et moi, entre vos pasteurs et les miens, parce que nous sommes frres. Vous avez de-vant vous toute la terre : retirez-vous, je vous prie, d'auprs de moi ; si vous allez la gauche, je prendrai la droite ; et si vous choisissez la droite, j'irai la gauche. (1)

    Cette circonstance de la vie d'Abram valut son neveu le nom de Lot to lot, diviser en lots, en portions.Lot choisit le pays qui lui parut le plus fertile et vint s'tablir dans So-dome.

    Les habitants de cette ville et des cits voisines, livrs aux excs de la dbauche la plus honte, avaient irrit contre eux la justice divine. Par un jugement d'une quit redoutable, le seigneur avait condamn la destruction par le feu et les habitants de Sodome et le sol lui-mme qu'ils avaient souill Sod, le sol, to doom (doum) juger, con-damner.

    (1) Gen. c. XIII. 1-9.

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    Cependant Lot tait juste et Dieu ne voulait pas l'enve-lopper dans la punition des coupables. Deux anges lui fu-rent envoys pour l'entraner hors de ce lieu maudit. Le r-cit des Livres Saints nous donnera la raison pour laquelle la petite cit o Lot trouva refuge, a port dans la suite le nom de Segor.

    A la pointe du jour, les anges pressaient Lot de quitter la ville en lui disant : levez-vous, emmenez votre femme et vos deux filles, de crainte que vous ne prissiez vous-mme dans la ruine de la cit.

    Voyant qu'il diffrait toujours, ils le prirent par la main et emmenrent aussi sa femme et ses deux filles, car le Sei-gneur voulait le sauver. Ils le conduisirent ainsi hors de la ville et lui dirent : sauvez votre vie, ne regardez point der-rire vous et ne vous arrtez point dans le pays alentour, mais sauvez-vous sur la montagne, de peur que vous ne soyez envelopp dans la destruction.

    Lot leur rpondit : Seigneur, puisque votre serviteur a trouv grce devant vous, et que vous avez montr envers lui votre grande misricorde en sauvant ma vie, voyez, je vous prie, que je ne puis me sauver sur la montagne, car le danger peut me surprendre auparavant et me faire prir.

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    Mais il y a l, tout prs, une ville dans laquelle je puis me rfugier ; elle est petite et je m'y sauverai ; vous savez qu'elle n'est pas grande ; et elle me sauvera la vie.

    L'ange lui rpondit : j'accorde encore cette grce la prire que vous me faites de ne pas dtruire la ville pour laquelle vous me parlez. Htez-vous et sauvez-vous parce que je ne pourrai rien faire jusqu' ce que vous y soyez en-tr. C'est pour cela qu'on a donn cette ville le nom de Segor. Le soleil s'levait sur la terre, lorsque Lot entra dans Segor. (1)

    La pense essentielle se dgageant de ce rcit peut se traduire ainsi : les anges pressaient Lot de quitter Sodome, car approchait l'heure fixe pour le chtiment, et Lot, de son ct, allguant sa faiblesse, cherchait retarder cette heure de l'expiation suprme. Il a fallu qu'un ange le prit par la main, le forant ainsi le suivre, et alors Lot, voulant tout prix sauver une partie des habitants de la rgion, de-manda se rfugier dans la petite ville nomme Segor : sa prire fut coute ; mais, dit encore l'ange, htez vous !

    Cette insistance de l'ange rpter que l'heure tait pres-sante est parfaitement reproduite dans Sgor to say (s) rpter, to egg, pousser, exciter, hour (haour) heure, moment.

    (1) Gen. c. XIX

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    Lot tait en sret dans Segor, et le Seigneur fit des-cendre du ciel une pluie de souffre et de feu sur Sodome et Gomorrhe. (1) Gomorrhe nous dvoile la transformation de la belle valle en un marais aux eaux stagnantes to come (keume) devenir, moor (mour) un marais. Les eaux de ce lac semblent empoisonnes : elles ont une telle densit que le corps humain ne peut s'y enfoncer compltement ; leur amertume est extrme et le sel dont elles sont satures les rend pesantes ce point que le vent le plus imptueux sem-ble impuissant leur communiquer quelque mouvement. Les rives prsentent une affreuse aridit ; le regard n'y ren-contre point le vert feuillage des arbres pour s'y reposer. l'image de la dsolation y est peinte partout ; la maldiction divine est passe dans la valle.

    Plusieurs voyageurs, entre autres Trolo et d'Arvieux, disent avoir remarqu des dbris de murailles et de palais dans les eaux de la mer Morte. Ce rapport semble confirm par Maundrell et le pre Nau. Les anciens sont plu positifs ce sujet ; Josphe, qui se sert d'une expression potique, dit qu'on aperoit au bord du lac les ombres des cits d-truites. Strabon donne soixante stades de tour aux

    (1) Gen. c. XIX.

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    ruines de Sodome. Tacite parle de ces dbris : comme le lac s'lve ou se retire selon les saisons, il peut cacher ou dcouvrir tour tour les squelettes des villes rprou-ves. (1)

    Quelques annes avant ces vnements redoutables, Abram qui tait sans postrit, fut pri par Sara d'pouser Agar sa servante, afin d'accomplir les promesses divines. Mais Agar, peu reconnaissante, commena mpriser sa matresse : celle-ci indigne de son insolence, se plaignit d'abord Abram et chtia Agar avec tant de svrit, qu'elle la contraignit de prendre la fuite. Cet accident de la vie de Sara a produit ce premier nom to say (s), ra-conter, row (raou) bruit, querelle, high (ha), violent.

    Agar, to hag, tourmenter, harasser to hare (hre), courir et l, se rendait en Egypte par la voie du dsert lorsqu'un ange lui apparut et lui ordonna de retourner sa matresse et de s'humilier sous sa main. Il ajouta : Je mul-tiplierai votre postrit de telle sorte qu'elle sera innombra-ble... Vous enfanterez un fils ; et vous l'appellerez Ismal parce que le seigneur a entendu votre affliction. (2)

    (1) Itinraire de paris jrusalem par le vicomte de chteau

    briand. (2) Gen. c. XVI. 9-11.

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    Ismal marque la fin des froissements produits enter Sa-ra et Agar ; la servante a t dlivre des mauvais traite-ments par sa docilit s'humilier sous la main de sa ma-tresse to ease (ise) dlivrer, to maule (mule) froisser.

    En annonant la naissance d'Ismal, l'ange du Seigneur avait dit Agar : Ce sera un homme fier et sauvage : il lvera la main contre tous et tous lveront la main contre lui ; et il dressera ses tentes vis--vis de tous ses frres. (1) C'est la peinture fidle du caractre des Arabes, descen-dans d'Ismal. D'une nature fougueuse et ardente, aimant avec passion la libert et l'indpendance, ils ont toujours recherch le pillage et les aventures. Leurs tentes de peaux de chvres les abritent peine quelques instants et bientt, dgageant des entraves leurs chevaux toujours sells, ils dvorent dans une course rapide les sables brlants du d-sert. Leur couverture de laine blanche jete sur leur tte comme un voile vient les dsigner au loin aux regards in-quiets des voyageurs qui se hasardent traverser leur pays aride et sans arbres to hare (hre), courir et l abb, trame de laine. Durs la fatigue, supportant facilement la faim et la soif, ddaignant le

    (1) Gen. c. XVI. 12.

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    repos sur un lit moelleux, ils ont mriter le nom de b-douins sous lequel ils sont aussi connus bed, lit, to wean (ouin) priver de.

    Treize ans s'taient couls depuis la naissance d'Ismal ; Dieu apparut Abram et lui dit : Je suis le Dieu tout puissant, marchez en ma prsence et soyez parfait.

    Je ferez alliance avec vous et je multiplierai votre race jusqu' l'infini...

    Vous ne vous appellerez plus Abram, mais Abraham, parce que je vous ai tabli pour tre le pre d'une multitude de nations. (1)

    Le changement opr par Dieu mme dans le nom du grand patriarche porte en entier sur la dernire syllabe d'Abram : c'est dans la composition celtique de ce nom, ham, jambe, qui est transforme en heam (him) l'enfant qui n'a pas encore vue le jour, et cet heam renferme en lui-mme l'assurance de la multiplication de sa famille. Ainsi, Abram, l'tranger est devenu Abraham to ape, imiter, to err, aller et l, heam (him), l'enfant qui n'a pas encore vu le jour, c'est dire l'tranger la nombreuse descen-dance.

    Cette interprtation par la langue celtique fait aisment comprendre pourquoi les Arabes appellent

    (1) Gen. c. XVII. 1-5.

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    65 =

    Ibrahim ce patriarche pre d'Ismal et souche de leur fa-mille.

    Aprs avoir prescrit Abraham la circoncision comme signe de son alliance, Dieu, renouvelant la promesse dj faite d'une magnifique postrit, lui dit : Vous n'appelle-rez plus votre femme Sara, mais Sara. Je la bnirai et je vous donnerai d'elle un fils que je bnirai aussi. Il sera le pre de plusieurs nations, et des roi de peuples sortiront de lui. (1)

    Aprs cet ordre donn par Dieu Abraham d'appeler sa femme Sara, l'criture Sainte la nomme dsormais Sara, qu'elle crit Sar to say (s), dire, to ray (r) rayonner. Ce rayonnement autour de Sara devait provenir de la belle postrit annonce par le seigneur. Abraham tait alors g de cent ans et Sara de quatre-vingt-dix. Le Saint patriarche tait fort tourment la pense que son ge et celui de sa femme seraient sans doute un bien grand obstacle l'ac-complissement de la parole divine : il croyait cependant cette parole dans la persuasion intime que Dieu oprerait pour lui un prodige.

    Pendant qu'il tait livr ces anxits, Dieu lui dit en-core : Sara votre femme vous donnera

    (1) Gen. c. XVII. 15, 16.

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    un fils que vous nommerez Isaac. Je ferai un pacte avec lui et ses descendans afin que mon alliance avec eux soit ter-nelle. (1)

    Sara conut et enfanta un fils en sa vieillesse, dans le temps que Dieu lui avait prdit. Abraham donna le nom d'Isaac son fils qui tait n de Sara.

    Et il le circoncit le huitime jour selon le commande-ment qu'il en avait reu de Dieu... Et Sara dit : Dieu m'a donn de sourire de joie : quiconque le saura, prendra part mon sourire de bonheur. (2)

    En hbreu-chalden, Isaac drive du verbe tsachak, sou-rire de satisfaction, tre flicit, et le sens est en rapport parfait avec le texte sacr. En examinant le terme Isaac dans sa composition celtique, on y dcouvre l'assurance infaillible de l'accomplissement des promesses divines, as-surance qui doit dlivrer Abraham de tous les tourments d'esprit causs par la vue d'une impossibilit naturelle to ease (ise) dlivrer, to hag, tourmenter.

    Isaac hrita, non seulement des grandes richesses de son pre, mais aussi de sa foi et de son obissance au seigneur. Avant leur naissance, ses deux fils Esa et Jacob, to jog,

    (1) Gen. c. XVII. 19. (2) Gen. c. XXI. 2-6.

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    pousser, remuer, up (eup) en haut, par-dessus, s'entre-choquaient dans le sein de leur mre Rebecca, et celle-ci effraye, consulta le seigneur qui lui dit : Deux nations sont dans votre sein, deux peuples diviss l'un contre l'autre en sortiront ; l'un de ces peuples surmontera l'autre peuple et l'an sera assujetti au plus jeune. L'an des deux en-fants tait velu et il fut nomm Esa ; son frre fut appel Jacob.

    Esa portait aussi le nom de Seir to say (s) raconter hair (hr) poil confirmant la remarque contenue dans les livres saints sur le poil trange dont son corps tait couvert. L'appellation d'Esa to Haze (hze) effrayer, how (haou) comment de quelle manire se rapporte la fureur dont il fut saisi lorsque son frre Jacob aprs lui avoir d'abord achet son droit d'anesse, lui ravit la bndiction paternelle. La haine d'Esa devint si violente que Jacob, plein d'effroi, se vit contraint de fuir la maison paternelle et de se rfugier quelque temps chez Laban.

    C'est pouss, excit par l'insistance et les conseils de sa mre Rebecca rape (rpe) l'action de ravir, de transporter, to egg, pousser, exciter que Jacob avait consenti se servir

    (1) Gen. c. XXV. 23.

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    de la ruse maternelle pour enlever la bndiction destine son frre Esa.

    Jacob passa quatorze annes auprs de son oncle Laban to lap, envelopper, entortiller, to hand, se saisir de avant d'pouser Rachel. Ce temps avait t pour lui un vri-table temps de vexations douloureuses qu'il a voulu mar-quer dans le nom de Rachel to rack, harasser, tourmenter to ail (l) causer de la douleur.

    Les tourments multiplis subis dans la maison de Laban permettaient Jacob de dire avec vrit lia et Rachel : Vous savez que j'ai servi votre pre de toutes mes forces. Il a mme us de tromperie envers moi, et a chang dix fois ce que je devais avoir pour rcompense : et cependant Dieu ne lui a pas permis de me nuire. (1)

    On sait par qu'elle suite particulire dvnements Dieu conduisit en Egypte le patriarche Jacob et ses nombreux enfants. Joseph, la joie de sa mre Rachel et l'espoir de sa fcondit, (2) to joy (djo) se rjouir, se fliciter, safe (sfe) sauf, hors pril avait fait donner ses frre la partie orientale de l'Egypte, et les

    (1) Gen. c. XXXI. 6-7. (2) Gen. c. XXX. 23. 24.

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    Hbreux s'taient multiplis tel point que le Pharaon qui gouverna plus tard le pays, ignorant les immenses services rendus par Joseph son royaume, rsolut d'arrter par tous les moyens cette propagation, inquitante pour sa politique ombrageuse. Les mesures les plus iniques furent dcrtes contre les enfants mles des hbreux qui venaient au monde, et ordre fut donn de l