Les troubles dapprentissage chez l enfant Un problème … · avenir des jeunes qui préoccupe...

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adsp n° 26 mars 1999 23 Les troubles d’apprentissage chez l’enfant Un problème de santé publique ? coordonné par Laurence Vaivre-Douret Docteur en psychologie, neuropsychologue du développement et psychomotri- cienne DE Cadre de santé maternité et PMI du Groupe Hospitalier Cochin et Inserm U483, Paris. Anne Tursz Pédiatre, épidémiologiste, directeur de recherche, Inserm U502, Paris pouvoirs publics se joue dans la petite enfance. Les troubles d’apprentissage sont le prélude à des échecs scolaires parfois irrémédiables, responsables d’une insertion sociale impossible. Pourtant une telle situation peut être évitée si les difficultés rencontrées par les enfants dès l’âge préscolaire sont identifiées et prises en charge précocement et de façon adaptée. En effet les troubles d’appren- tissage peuvent être grandement amélio- rés par des mesures préventives ou rééducatives appropriées. Ces troubles, bien reconnus de façon relativement récente par les profession- nels spécialisés, sont méconnus d’une large partie des professionnels chargés de la santé et de l’éducation, et du grand public. Seules les familles qui vivent personnellement et douloureusement le problème se sentent concernées sans savoir toujours où s’adresser. Ce dossier se propose d’aborder les troubles des apprentissages comme un véritable problème de santé publique. En effet, il en démontre la magnitude grâce à des données épidémiologiques françai- ses et internationales >p. 24. Il donne des informations détaillées sur les catégories de troubles et leurs définitions >p. 30. Celles-ci indiquent bien la nécessité d’outils de dépistage particu- liers maniés par des professionnels spécialement formés. C’est ainsi que la discipline de la neuropsychologie chez l’enfant actuellement peu développée en France est ici décrite >p. 28. Sont abordées les conditions de dépistage et de prise en charge. Le dépistage en population générale (PMI, milieu scolaire) devrait être une des clefs du problème mais ses failles sont nombreuses notam- ment du fait du manque de ressources humaines et financières et du déficit en outils standardisés au niveau national >p. 45. Ce dossier examine la situation actuelle en France de la prise en charge de ces enfants, problématique à bien des égards >p. 38. Il présente les institutions existantes, le rôle des commissions départementales de l’éducation spéciale (CDES) >p. 44, de la protection mater- nelle et infantile (PMI) >p. 52, de l’école, des associations >p. 62 qui peuvent agir pour une formation, un dépistage et une orientation. Dans certains pays, les troubles d’apprentissage bénéficient d’une prise en charge plus avancée >p. 55, en France, les expériences innovantes restent encore trop rares >p. 42 & 59. Il existe un besoin criant de formation des professionnels chargés de l’enfance et notamment des médecins en formation initiale et continue >p. 64. L’évolution développementale de l’enfant et ses apprentissages ultérieurs dépen- dent de la précocité du diagnostic et de la qualité de la prise en charge. L’ avenir des jeunes qui préoccupe actuellement la société et les

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adsp n° 26 mars 1999 23

Les troublesd’apprentissagechez l’enfant

Un problème de santé publique ?coordonné par

LaurenceVaivre-Douret

Docteur enpsychologie,

neuropsychologuedu développement

et psychomotri-cienne DE Cadre

de santé maternitéet PMI du GroupeHospitalier Cochin

et Inserm U483,Paris.

Anne TurszPédiatre,

épidémiologiste,directeur de

recherche,Inserm U502,

Paris

pouvoirs publics se joue dans la petiteenfance. Les troubles d’apprentissagesont le prélude à des échecs scolairesparfois irrémédiables, responsables d’uneinsertion sociale impossible. Pourtant unetelle situation peut être évitée si lesdifficultés rencontrées par les enfants dèsl’âge préscolaire sont identifiées et prisesen charge précocement et de façonadaptée. En effet les troubles d’appren-tissage peuvent être grandement amélio-rés par des mesures préventives ourééducatives appropriées.Ces troubles, bien reconnus de façonrelativement récente par les profession-nels spécialisés, sont méconnus d’unelarge partie des professionnels chargésde la santé et de l’éducation, et du grandpublic. Seules les familles qui viventpersonnellement et douloureusement leproblème se sentent concernées sanssavoir toujours où s’adresser.Ce dossier se propose d’aborder lestroubles des apprentissages comme unvéritable problème de santé publique. Eneffet, il en démontre la magnitude grâce àdes données épidémiologiques françai-ses et internationales >p. 24. Il donnedes informations détaillées sur lescatégories de troubles et leurs définitions>p. 30. Celles-ci indiquent bien lanécessité d’outils de dépistage particu-liers maniés par des professionnels

spécialement formés. C’est ainsi que ladiscipline de la neuropsychologie chezl’enfant actuellement peu développée enFrance est ici décrite >p. 28. Sontabordées les conditions de dépistage etde prise en charge. Le dépistage enpopulation générale (PMI, milieu scolaire)devrait être une des clefs du problèmemais ses failles sont nombreuses notam-ment du fait du manque de ressourceshumaines et financières et du déficit enoutils standardisés au niveau national>p. 45. Ce dossier examine la situationactuelle en France de la prise en chargede ces enfants, problématique à bien deségards >p. 38. Il présente les institutionsexistantes, le rôle des commissionsdépartementales de l’éducation spéciale(CDES) >p. 44, de la protection mater-nelle et infantile (PMI) >p. 52, de l’école,des associations >p. 62 qui peuvent agirpour une formation, un dépistage et uneorientation. Dans certains pays, lestroubles d’apprentissage bénéficientd’une prise en charge plus avancée>p. 55, en France, les expériencesinnovantes restent encore trop rares>p. 42 & 59. Il existe un besoin criant deformation des professionnels chargés del’enfance et notamment des médecins enformation initiale et continue >p. 64.L’évolution développementale de l’enfantet ses apprentissages ultérieurs dépen-dent de la précocité du diagnostic et dela qualité de la prise en charge.

L’ avenir des jeunes qui préoccupeactuellement la société et les

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Les troubles d’apprentissage chez l’enfant

L’ampleur du problème

LaurenceVaivre-Douret

Lucien CastagnéraPraticien hospitalier,

CHU Bordeaux

Des enfants d’intelligence normale ou supérieure sonten situation d’échec scolaire. Les troublesd’apprentissage étant mal connus, ces enfants privés dediagnostic échappent à une prise en charge adaptée.

présentant des difficultés d’apprentissage sont répartisen trois catégories en fonction de l’origine principalesupposée de leurs difficultés :l ceux dont l’essentiel des troubles d’apprentissage

provient d’une déficience avérée, qu’elle soit senso-rielle, motrice ou mentale, d’un traumatisme ou d’untrouble envahissant du développement (2 à 3 % de lapopulation scolaire) ;l ceux qui, ne relevant pas de la catégorie précé-

dente, présentent des désordres ou des déficiencesdes apprentissages. Inspirée par la classification amé-ricaine DSM-IV, l’étude utilise l’expression : « troublesdéveloppementaux spécifiques des apprentissages »et les termes de « dysphasie », « dyslexie », « dyspraxie ».Ces troubles concerneraient de 4 à 6 % de la popula-tion scolaire ;l ceux dont les difficultés ne proviennent pas des

deux causes précédentes mais sont d’origines cultu-relles, sociales, économiques, pédagogiques et/ou psy-chologiques (10 à 15 % de la population scolaire).

Il existe un consensus international qui consiste, d’unepart, à réserver les termes « dysphasie », « dyslexie »,« dysorthographie » et « dyscalculie » à la désignation detroubles primaires dont l’origine est supposée essentiel-lement « développementale » (donc indépendante del’environnement socioculturel) et, d’autre part à en faireune catégorie à part qui représenterait environ un quart

L’ échec scolaire concerne 16 à 24 % des élè-ves européens, selon une étude de l’EuropeanAssociation for special education. Ces enfants

des enfants en échec scolaire. Ce sont ces troubles quiferont l’objet de ce dossier, puisqu’il s’agit d’un problèmede santé ayant des répercussions sur la scolarisationvoire l’intégration sociale des enfants atteints.

En France, la prévalence des troubles des appren-tissages est comprise entre 2 % et 10 %, selon lesmodalités d’évaluation et les définitions employées.

Chaque année, on estime à plus de 40 000 enfants,ceux qui vont présenter des formes graves de troublesdu langage, sources de troubles d’apprentissage dura-bles et seront en échec précoce faute d’une prise en chargeappropriée [5, 16].

D’après les statistiques établies en classe de sixièmepar l’Éducation nationale, de 5 à 8 % des élèves sonten grande difficulté scolaire et ne maîtrisent pas lesbases de la lecture ni celles du calcul. Comme la majoritédes élèves accueillis dans le système spécialisé neparticipe pas à ces évaluations, on peut ajouter envi-ron 2 % à cette fourchette. Ce qui donne un pourcen-tage de 7 à 10 % d’élèves ne maîtrisant pas les con-naissances de base.

Les enfants présentant des dysfonctionnementsneuropsychologiques à l’origine de troubles du langageoral et écrit sont des enfants normalement voire su-périeurement intelligents mais qui ont un problèmed’ordre « technique », c’est-à-dire un problème cogni-tif sur lequel se sont parfois greffés des problèmes psy-chologiques secondaires. Ils sont indemnes de toutedéficience intellectuelle, visuelle, auditive ou d’autresanomalies sévères qui nécessitent la prise en chargeen « milieu médical spécialisé ». Leur problème est doncqu’ils sont à la fois trop « handicapés » pour suivre uncursus scolaire « normal » ou aussi rapide que le restede la population, et pas assez « handicapés » pour êtrereconnus comme tels.

Portant souvent l’étiquette de paresseux ou de bonà rien, ces enfants souffrent et peuvent être atteints detroubles du comportement, de blocages ou d’inhibitions

DSM-IVManuel diagnostique etstatistique des troubles

mentaux, de l’Associationaméricaine de psychiatrie

[10]

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L’ampleur du problème

semble hétérogène de troubles cau-sés par une dysfonction, détectéeou non, du système nerveux cen-tral mais n’ayant pas pour origineun handicap visuel, auditif ou mo-teur, une arriération mentale, untrouble affectif ou un milieu défa-vorisé » (National Joint Comittee oflearning disabilities, États-Unis). Ilspeuvent cependant coexister avecl’un ou l’autre de ces problèmes.« Ces troubles peuvent se manifes-ter par des retards dans le déve-loppement, des difficultés au niveaude la concentration, de la mémoire,du raisonnement, des difficultés auniveau de la coordination, de lacommunication, de la lecture, del’écriture, de l’épellation, du calcul,et par des difficultés touchant lasociabilité et la maturité affective ».Ils interfèrent de manière significa-tive avec la réussite scolaire ou lesactivités de la vie courante quinécessitent de savoir parler, lire,compter ou écrire. Il en résulte desdifficultés persistantes dans l’acqui-sition des stratégies d’apprentis-

qui mènent à l’échec scolaire, et parfois à l’illettrisme.Les mêmes situations d’échec se retrouvant en appren-tissage professionnel ou au poste de travail entraînentsouvent chômage et exclusion. Ces enfants arrivant àl’âge adulte, s’ils ne sont pas traités, pourront présen-ter les mêmes carences structurales cognitives et lin-guistiques sur lesquelles se seront greffés des problè-mes d’ordre psychoaffectif, social et familial. Ces carencessemblent en effet se figer à un certain moment sans espoirapparent de les voir se compenser.

Par insuffisance du dépistage, les enfants sont prisen charge de façon inadaptée, sans solution pour leurtrouble, et coûteuse pour la société.

Il existe en France un manque d’information et deformation à propos des troubles d’apprentissage quece soit pour les professionnels de santé ou les ensei-gnants. De plus, le transfert des connaissances scien-tifiques émanant de la recherche vers ces profession-nels reste encore insuffisant.

Quand ces troubles ont été diagnostiqués, se posele problème de l’orientation pour laquelle l’Éducation

nationale propose peu de solutions, malgré les textes,faute de moyens et parfois de compétences.

La méconnaissance du problèmeDepuis 1989, la majorité des élèves bénéficient d’éva-luations en lecture et en calcul à l’entrée du cours élé-mentaire 2 et en sixième des collèges. Ce qui permetà la direction de la Prospective et du Développementdu ministère de l’Éducation nationale, qui traite et analyseles résultats, de constater qu’une proportion constante,de 5 à 8 % des élèves, est en grande difficulté scolaire.

On peut ajouter quelques éléments d’appréciationsupplémentaires. Le suivi du quart des élèves de collègequi ont eu les résultats les plus faibles aux évaluationsde sixième en 1989 montre que, s’ils n’ont eu que 2chances sur 10 de parvenir en seconde générale outechnologique, ils sont 87 % à poursuivre leurs études(majoritairement en lycée professionnel). On notera aussique les poursuites d’études semblent essentiellementdépendre d’influences environnementales (niveau so-cioculturel des parents, souhait des parents pour des

Qu’est ce qu’un trouble d’apprentissage ?

sage, empêchant les enfants des’adapter à un environnement sco-laire standard. Ceci constitue un vé-ritable handicap compromettant lavie future de l’enfant et qui a conduità créer, dans un certain nombre depays, des écoles et universitésouvertes à ce type de pathologie.Le « trouble d’apprentissage » doitêtre distingué de la simple difficultéd’apprentissage (phénomène tran-sitoire dans la vie de l’enfant ou del’adulte) et de difficultés scolairesdues à l’absence des conditions né-cessaires au travail, à un mauvaisenseignement ou à des facteurs cul-turels. En effet, il est permanent. Detels troubles sont intrinsèques à lapersonne et peuvent influer sur l’ap-prentissage et le comportement detout individu possédant aussi bienun potentiel intellectuel moyenqu’une intelligence supérieure.Chez l’enfant, les troubles d’appren-tissage selon le DSM-IV concernentles troubles d’apprentissage sco-laires : les troubles du langage oralet écrit, les troubles du calcul, lestroubles associés (déficits de l’at-tention avec ou sans hyperactivité,

troubles de la coordination, trou-bles psychomoteurs spécifiques,enfants surdoués).Les troubles d’apprentissage caté-gorisés dans le DSM-IV, regroupentdes affections classées par l’OMSdans la CIM 10 (Classification in-ternationale des maladies et desproblèmes de santé connexes, 10e

révision) sous les codes F 80 à F 90,comprenant les troubles spécifiquesde la parole et du langage (F 80),les troubles spécifiques du déve-loppement des acquisitions scolai-res (F 81), les troubles spécifiquesmixtes du développement (F 83).On peut aussi y inclure les troubleshyperkinétiques (F 90), c’est-à-direceux que l’on retrouve chez les« hyperactifs » chez lesquels il y asouvent une altération des fonctionscognitives et un retard spécifiquedu développement de la motricité(trouble de l’acquisition de la coor-dination, F 82) et du langage. De-puis 1997, ils sont reconnus enFrance comme une affection d’ori-gine neurologique. LVD

L es troubles d’apprentissagesont définis comme « un en-

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Les troubles d’apprentissage chez l’enfant

études longues, etc.). Pour l’année scolaire 1995-1996,92,4 % d’une classe d’âge ont accédé à un niveau V(CAP-BEP) et 67,9 à un niveau IV (Bac professionnelou brevet professionnel). Il n’en reste pas moins queles enfants qui n’acquièrent jamais le langage écrit (entre5 et 10 % de population scolaire) se retrouvent en quasi-totalité au chômage et que globalement les personnesqui ont les plus faibles capacités de lecture et d’écri-ture sont de 4 à 12 fois plus exposées au chômageque les autres. De plus, sur un plan comportemental,il est noté un état dépressif réactionnel plus ou moinssérieux, des conflits avec le milieu familial et avec l’en-vironnement scolaire et social.

La catégorie « déficiences de la parole et du langage »apparaît dans les statistiques concernant, en France,les enseignements adaptés et spécialisés de l’annéescolaire 1994-1995. Elle concerne 1906 enfants soit1,1 % des élèves accueillis dans des classes, écolesou établissements spécialisés (dont l’ensemble repré-sente moins de 2 % de la population scolaire en pri-maire et 2,5 % dans le secondaire) mais ce pourcen-tage tient compte des enfants dont les troubles ne sontpas uniquement développementaux. En revanche, desenfants chez qui des services spécialisés ont diagnos-tiqué des « dysphasies » ou des « dyslexies » ou sontreconnus « en grandes difficultés d’apprentissage » parles personnels de l’Éducation nationale, sont accueillisen classe ordinaire et éventuellement suivis soit pardes réseaux d’aides, des services de soins ou desorthophonistes en libéral (et donc n’entrent pas dansles statistiques précédentes). De plus, certains enfantsqui dans les établissements spécialisés sont considéréscomme relevant de la déficience intellectuelle ou detroubles psychoaffectifs, sont en fait atteints de trou-bles sévères du langage. Enfin chez d’autres enfants,les troubles ne sont pas du tout diagnostiqués.

C’est en prenant en compte ces enfants que danscertains pays on estime que près de 5 % de la popu-lation scolaire est concernée. En revanche, le taux de10 % de dyslexiques avancé parfois est peu plausibleet relève sans doute, soit d’une confusion entre trou-bles spécifiques du langage et troubles non spécifiques(induisant néanmoins parfois des retards très impor-tants), soit de critères trop souples dans la fixation d’unefrontière entre ce qui relève de troubles pénalisantnotablement les apprentissages et ce qui en accroîtsimplement la difficulté.

Le dépistageLe dépistage fait à l’âge de 4 ans par les médecins dePMI ou plus tardivement, à l’âge de 6 ans, de façonsystématique et obligatoire par les médecins scolairesne permet pas toujours l’identification des troublesd’apprentissage. En effet, les troubles dépistés restentsouvent catégorisés de manière très globale sous destermes comme retard psychomoteur, troubles du dé-veloppement, du comportement, du langage etc.

Beaucoup d’enfants présentant des troubles du lan-

gage oral et écrit n’intègrent pas ou ne restent pas dansle circuit scolaire normal car leur pathologie n’est pasdiagnostiquée ni traitée à temps. Ces enfants vont êtreorientés de manière inadéquate.

Les démarches éducatives ne sont que rarement enadéquation avec le handicap en question généralementdu fait d’un diagnostic initial erroné voire d’une absencede diagnostic. Le manque d’évaluation est dû en pre-mier lieu à l’insuffisance de l’utilisation des outils àvisée diagnostique existants (examen neurologique etneuropsychologique). Aucun enseignement spécifiqueconcernant les troubles d’apprentissage chez l’enfantn’est dispensé à ce titre tant dans les facultés demédecine que dans les instituts universitaires de for-mation des maîtres d’école (IUFM). Les enseignants,les médecins généralistes, les pédiatres n’ont pas étéformés sur de tels troubles au cours de leur formationinitiale. Si bien que les troubles d’apprentissage sontsouvent assimilés à des problèmes socio-affectifs.

L’observation subjective prime souvent sur une évalua-tion objective, rejetant par là même les apports de l’exa-men neurologique et neuropsychologique. Aujourd’hui cesont souvent les psychologues et les paramédicaux (ortho-phonistes, psychomotriciens) qui, par leur complémentarité,évaluent les dysfonctionnements neuropsychologiques.

Ainsi, il existe un renversement de situation : les fa-milles s’adressent à un paramédical avant de s’adresserà un médecin alors que cela devrait être l’inverse se-lon les décrets régissant ces professions.

Face à un enfant en échec scolaire, le médecin pourraitassurer son rôle de coordination en demandant diffé-rents bilans (ORL, visuel, neurologique, psychologique,neuropsychologique, orthophonique, psychomoteur,psychiatrique) de façon à étayer son diagnostic commes’il demandait un examen biologique complémentaireavant de proposer un traitement. Les médecins devraintêtre formés à la prescription et à l’analyse des bilanseffectués par les paramédicaux.

Cela éviterait que des enfants porteurs de troublesd’apprentissage restent encore sans soins aujourd’huiou que des familles vulnérables, à la recherche de lasolution miracle pour leur enfant, se tournent vers dessolutions inefficaces qui font perdre du temps à l’en-fant. Une autre évaluation devrait être effectuée au coursdu traitement afin d’en déterminer l’efficacité.

La prise en chargeLa réglementation a prévu un certain nombre de dis-positions :l La circulaire n° 82-2 et n° 82-48 du 29 janvier 1982

prévoyait la mise en œuvre et posait les grandes lignesd’une politique d’intégration en faveur des enfants etadolescents handicapés.l La circulaire n° 83-082, 83-4 et 3/83/S du 29 jan-

vier 1983 proposait la « mise en place d’actions de sou-tien et de soins spécialisés en vue de l’intégration dansles établissements scolaires ordinaires des enfants etadolescents handicapés, ou en difficulté en raison d’une

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L’ampleur du problème

maladie, de troubles de la personnalité ou de troublesgraves du comportement », tout en insistant sur « l’im-portance des mesures de prévention dans le systèmeintégratif » et précisant, en outre, que « les services deprotection maternelle et infantile sont également enmesure d’apporter une contribution essentielle sur leplan médical et social ».

Ces textes prévoient que des intervenants extérieursnon enseignants — personnels médicaux, paramédi-caux, sociaux et éducatifs — peuvent intervenir au seinde l’établissement. Associés aux enseignants dans lecadre d’équipes multidisciplinaires, ils apportent auxélèves handicapés ou en difficulté des soins, des réé-ducations ou des soutiens spécialisés. Ces personnelsqui peuvent être mis à la disposition des établissementsscolaires par des administrations, des services hospi-taliers ou des associations, interviennent auprès desélèves en difficulté dans le cadre de conventions pas-sées entre l’établissement scolaire d’accueil et leurorganisme employeur.

En outre il peut être envisagé l’intervention des spé-cialistes auxquels les familles, à leur initiative, ont recoursen particulier lorsque aucun service existant n’estsusceptible d’apporter son concours à l’établissementscolaire et que la création d’une nouvelle structure nese justifie pas, compte tenu, par exemple du nombretrop faible d’enfants concernés. Tout est prévu quantau financement de l’assistance particulière, de l’adap-tation des locaux, du matériel, des transports, de l’hé-bergement, des repas.

Si, à l’époque de la mise au point de ces circulaires,le dysfonctionnement neuropsychologique grave n’avaitpas encore été assimilé à un handicap ou à une pa-thologie, aujourd’hui les enfants atteints peuvent bé-néficier de l’application de ces mesures.

Les troubles spécifiques du développement de la paroleet du langage chez l’enfant sont reconnus en France parl’Éducation nationale depuis 1989. Ils entrent en effetdans le cadre de l’arrêté du 9 janvier 1989, publié auBO de l’Éducation nationale, qui fixe la « nomenclaturedes déficiences, incapacités et désavantages », inspi-rée étroitement de la classification internationale deshandicaps, à laquelle ils appartiennent. Dans ce texte,les troubles dont nous nous occupons ici sont inclus dansles « déficiences du langage et de la parole ». Reconnuscomme une affection handicapante, ces troubles peu-vent, depuis 1993, donner droit à l’attribution de l’allo-cation d’éducation spéciale (AES). Celle-ci est fixée selonle taux d’incapacité déterminé d’après un guide-barèmepour l’évaluation des déficiences et incapacités despersonnes handicapées, guide publié à cet effet par leCTNERHI (Centre technique national d’études et de re-cherches sur les handicaps et les inadaptations) via lacirculaire n° 93-36-B du 23 novembre 1993 d’applica-tion du décret n° 93-1216 du 4 novembre 1993. Ce décretrenouvelant le guide-barème utilisé par les commissionsspécialisées reprend cette terminologie en la précisantun peu plus. Si le terme « dysphasie » n’apparaît pasexplicitement, il est question, sous la rubrique « troublesimportants de l’acquisition du langage oral et écrit per-turbant notablement les apprentissages et la socialisation »(déficiences importantes : 50 à 75 %), des « troubles dulangage et de la parole congénitaux ou acquis avant oupendant l’acquisition de la lecture et de l’écriture ». Les« dyslexie », « dyscalculie », « dysorthographie » sont, elles,explicitement incluses dans les « déficiences moyennes(20 à 45 %) perturbant notablement les apprentissages,notamment scolaires, mais pas la socialisation » tandisque les « retards simples » font partie des « déficienceslégères » (15 %).

Le cercle vicieux des troubles d’apprentissage

Échec scolaire

Troublesde la scolarisation

Troubles d’apprentissage

Complexe d’échec

Sentiment d’infériorité(dévalorisation du moi)

Troublesde la personnalité

Langage oral

Lecture

Calcul

Écriture Anxiété

Sentiment de culpabilité

Agressivité réactionnelle

État dépressif réactionnel

Blocages (inhibition intellectuelle)

Manque de motivation (désinvestissement)

Conduite de fuite (indiscipline, agitation, opposition)

Conflits avecl’environnement

Milieu familial

Milieu scolaire

Milieu social

LVD

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Les troubles d’apprentissage chez l’enfant

but, au sens large, l’examen des relations entreles processus psychologiques et le fonctionne-ment cérébral correspondant. On distingue ha-bituellement trois branches de la neuropsycho-logie : la neuropsychologie expérimentale (surtoutchez l’animal, étude de la relation cerveau-com-portement) ; la neurologie du comportement etla neuropsychologie clinique. L’idée que les con-duites et les processus mentaux sont sous-ten-dus par des événements physicochimiques sur-venant dans le cerveau constitue le siège et lepostulat général de la neuropsychologie.Ainsi la neuropsychologie clinique se définitcomme la science des relations entre les mala-dies mentales et instrumentales d’une part, etle cerveau d’autre part. Elle vise à étudier lesperturbations cognitives et émotionnelles, lesdésordres de la personnalité provoqués par undysfonctionnement cérébral avéré (lésion céré-brale) ou non (signe neurologique minime). Elleconstitue un domaine particulier de la neurolo-gie corticale et réunit, outre les neurologues cli-niciens, les psychiatres, les psychologues etparamédicaux, les psychophysiologistes, lesneurophysiologistes et les spécialistes de la psy-chologie cognitiviste. Dans la neuropsychologieclinique, on distingue plus particulièrement la neu-ropsychologie du développement qui envisage,dans leurs rapports réciproques, les problèmesde maturation et les organisations fonctionnel-les. La prise en compte des processus de ma-turation s’appuie sur les résultats de rechercheneurophysiologique concernant la maturation dusystème nerveux, et sur des résultats récents del’imagerie cérébrale et des sciences cognitives.L’étude des fonctionnements psychologiques s’ap-

L e terme de neuropsychologie a été utiliséen 1913 par Osler. Cette discipline a pour

Discipline à l’origine d’une nouvellemodélisation des troublesd’apprentissage.

Depuis 1984, le Groupe interministériel permanentde lutte contre l’illettrisme (GPLI) a pour mission laprévention, l’impulsion et la coordination des actionsde lutte contre l’illettrisme.

Plus récemment, un texte relatif à la prise en charged’enfants et d’adolescents présentant des troubles dulangage oral et écrit a été publié.

Un nouveau contrat pour l’école dont la généralisa-tion était prévue pour la rentrée 1995 précisait que « laprévention de la difficulté scolaire est une missionfondamentale de l’école qui doit assurer la détectionprécoce, le dépistage et le suivi des enfants en diffi-culté. Pour chaque élève concerné, il est proposé desréponses individualisées, en liaison avec les familleset les enseignants ». Mais toutes ces préconisationsne se sont pas traduites fortement dans la réalité.

Dans notre pays, le terme de trouble d’apprentissageest méconnu par beaucoup de médecins et d’enseignants,par défaut d’information et de formation, et l’enfant estsouvent orienté vers des structures inadaptées.

Les enfants ne pouvant suivre un cursus scolairenormal peuvent être orientés :l dans des instituts médico-éducatifs (IME) ou des

instituts de rééducation (IR) qui prennent normalementen charge les enfants et adolescents présentant desdéficiences intellectuelles, ou inadaptés, avec éventuel-lement des troubles associés (troubles de la person-nalité, troubles comitiaux, troubles moteurs et senso-riels, troubles graves de la communication, maladieschroniques compatibles avec une vie collective). Uneétude réalisée dans ces instituts retrouve 14,8 % d’en-fants normalement intelligents et ne présentant nidéficience mentale, ni déficience motrice aucune. Cesenfants ont, là aussi, intégré ces structures dont untiers d’entre eux directement, uniquement parce qu’ilsprésentaient un retard scolaire important et ne dépas-serait qu’avec difficulté le niveau du cours préparatoire.l dans les classes d’intégration spécialisées (Clis) qui

répondent à un souci d’intégration scolaire d’enfantshandicapés et qui accueillent aussi bien des enfants sansretard scolaire mais avec des troubles du comportementque des enfants trisomiques ou des enfants ne maîtrisantpas bien le français, voire des enfants psychotiques.

Ces établissements ne sont pas spécialisés dans lestroubles d’apprentissage et n’apportent donc pas uneaide circonstanciée à ces enfants.

Les enfants pourront être adressés à un centre médico-psycho-pédagogique (CMPP) où les consultations, sou-vent à visée psychothérapeutique ne répondront pasforcément au problème, puisque dans la majorité descas seul un bilan psychologique, à l’exclusion du bilanpsychoneurologique, aura été demandé.

Il est donc urgent de proposer des structures adap-tées à ces enfants, car dépistés précocement, cestroubles d’origine neurologique peuvent être corrigés(pour les cas modérés) par une rééducation appropriée.

En France, la prise en charge de ces troubles d’ap-prentissage en est à ses débuts grâce à l’initiative de

quelques équipes qui ont permis l’ouverture d’unitésde consultation plus particulièrement spécialisées dansle diagnostic des troubles du langage.

Certaines de ces équipes ont permis l’ouverture d’uni-tés médico-éducatives, véritables classes où un ensei-gnement spécifique est dispensé conjointement à unerééducation spécifique. Il apparaît aujourd’hui des ré-sultats encourageants qui pourraient encore être amé-liorés dans le cas de prises en charges plus longueset à l’évidence, aucun de ces enfants n’aurait pu évo-luer de la sorte dans le cadre existant.

Note de servicen° 90-023 du 25 janvier

1990 publiée au BO n° 6de l’Éducation nationale

du 8 février 1990

La neuropsychologie

adsp n° 26 mars 1999 29

L’ampleur du problème

puie sur les résultats des recherches dans diversdomaines tels que la motricité, la sensorialité,les processus cognitifs et l’affectivité.Si la neuropsychologie a pour objectif général d’éta-blir le rôle fonctionnel de la structure cérébrale con-cernée, dans le cadre du développement de l’en-fant, elle a pour but de définir plus particulièrementla nature des désordres cognitifs qui sous-tendentles troubles d’apprentissage. Cependant la com-plexité et la variabilité des phénomènes observésdans leur expression clinique, comme dans leursdéterminants biologiques, et la récupération fonc-tionnelle dont font preuve certains sujets, amè-nent aujourd’hui les chercheurs et cliniciens à en-visager des restructurations dynamiques del’organisation cérébrale (plasticité cérébrale, ré-gions compensatrices, etc.). De plus, par compa-raison avec l’adulte chez qui les syndromes sontindividualisés à la fois au plan lésionnel et clini-que, il est opportun d’étudier la spécificité éven-tuelle des troubles observés chez l’enfant, afin d’endéfinir la signification quant à l’organisation fonc-tionnelle hémisphérique cérébrale.

Le bilan neuropyschologique ?La neuropsychologie développementale qui resteencore un domaine peu développé en France,a pour but de contribuer à la connaissance desprocessus de développement et de mettre en évi-dence les indicateurs prédictifs du développe-ment de l’enfant. De plus, elle permet la miseen place d’évaluations à but diagnostique. Ellea aussi pour objet et conséquence de permet-tre la mise au point des procédures fonctionnellesprophylactiques des retards et troubles de dé-veloppement.Le bilan neuropsychologique consiste à établirun profil neuropsychologique grâce à :l l’identification et la localisation des fonctionsou secteurs de fonctions touchées ou perturbées ;l le repérage des fonctions ou compétences in-tactes et surdéveloppées.

Il permet ainsi :l d’analyser les composantes des fonctions per-turbées ;l de comprendre les mécanismes sous-jacentsaux symptômes, afin de définir, d’orienter ou deréorienter la prise en charge éducative, rééducativeou thérapeutique proposée à l’enfant.Le bilan neuropsychologique s’appuie d’une partsur des éléments du parcours de l’enfant et deson histoire (anamnèse), et sur les résultats detests standardisés (issus des évaluations psy-chométriques) ou non, évaluant de façon diffé-rentielle les principales fonctions neuropsycho-logiques :l le langage ;l l’attention ;l la mémoire, à court terme, de travail, à longterme ;l la capacité de raisonnement ;l les fonctions visuo-spatiales ;l les fonctions praxiques (motricité).La qualité du bilan neuropsychologique résidedans le fait qu’il met en œuvre différentes épreuvesdont les tâches sont souvent multifactorielles,sollicitant les compétences de différentes fonc-tions. Et tout l’art est de regrouper les facteursqui permettent au clinicien de se prononcer à lafois sur les déficits des fonctions et le niveaud’efficience de l’enfant dans les secteurs nonatteints, dans un but diagnostique.On peut regretter qu’actuellement, en France, iln’existe pas de batteries de tests d’évaluationneuropsychologique plus ou moins exhaustivesstandardisées sur une population d’enfants, alorsqu’il existe déjà en Europe du Nord et aux États-Unis une batterie spécifique appelée la Nepsy [15].Cette batterie s’adresse aux enfants de 0 à 12 anset se propose d’évaluer cinq domaines importantsdu développement : l’attention et les fonctionsd’exécution, le langage, les fonctions sensori-motrices, les fonctions visuo-spatiales, la mémoireet les apprentissages. Elle sera prochainement

adaptée et étalonnée en France. L’adoption d’unetelle batterie au niveau international pourra êtred’un apport important en vue d’une harmonisa-tion des politiques de santé européennes dansle domaine des troubles d’apprentissage. Cepen-dant, le bilan neuropsychologique chez l’enfantpour être complet ne doit pas omettre de pren-dre en compte l’évaluation neuropsychomotrice(neuro-sensori-motricité, schéma corporel, laté-ralité, espace et temps) et l’évaluation neurovisuelle,ainsi que l’apport d’autres évaluations neurosen-sorielles (auditives, tactiles, olfactives…).En conclusion, la neuropsychologie semble cons-tituer un lieu original d’élaboration de nouveauxmodèles pour la compréhension fine des patho-logies et dysfonctionnements, surtout lorsque lesmodèles cognitifs du normal sont insuffisants.Cela témoigne de l’importance que peut avoir l’ap-proche neuropsychologique dans l’investigationdes troubles d’apprentissage. En effet, elle montreque les troubles apparaissent, pour des raisonsde structuration singulière du cerveau, souventde manière associée. Il en résulte que l’analysede cas individuels est une source de perspecti-ves méthodologiques probantes, autant pour lediagnostic que pour la prise en charge. Cela estcompréhensible dans la mesure où il est impos-sible de sélectionner a priori des sujets présentantexactement les mêmes déficits. C’est pourquoila neuropsychologie se base essentiellement surl’analyse de cas individuels pour coordonner lesinformations de diverses origines concernant lessujets, afin de constituer le profil cognitif qu’onpeut en dégager.L’essor de la neuropsychologie fait apparaître,à travers ses diagnostics et résultats de prise encharge, que cette dernière doit être envisagéeet encouragée le plus précocement possible parrapport à l’événement de la lésion ou le plus tôtpossible au cours du développement de l’enfantau regard d’un dépistage précoce de sesdysfonctionnements. LVD

Il est intéressant de constater que si la neuropsy-chologie de l’adulte est en plein essor (grâce notam-ment aux progrès réalisés sur les personnes sortantdu coma ou ayant eu des accidents cérébraux), pourl’enfant ces recherches sont moins importantes et peuvalorisées. Il existe donc un retard notable en matièrede transfert de l’information et de formation pour tousles intervenants, avec une difficulté à définir spécifi-quement et consensuellement les différents troublespropres au développement de l’enfant, si bien que lesdonnées que l’on peut recueillir sur ces troubles d’ap-

prentissage restent très globales, d’où une majora-tion des troubles du comportement ou du développe-ment observés et des retards de développement, vraisfourre-tout d’un manque de diagnostic. Il serait néces-saire de mettre en œuvre des recueils de donnéesépidémiologiques, en France, concernant ces troubles.En effet, on peut constater qu’il n’existe pas de sys-tématisation des évaluations utilisées, d’une part pourle dépistage et d’autre part pour l’état des lieux, etpas de coordination pour mener de réelles enquêteslongitudinales du développement de l’enfant.

30 adsp n° 26 mars 1999

Les troubles d’apprentissage chez l’enfant

Monique TouzinOrthophoniste,

Hôpital Robert Debréet Hôpital Necker-Enfants Malades,

ParisLaurence

Vaivre-Douret

Les troubles d’apprentissage scolaire concernent lestroubles de langage oral et écrit, les troubles du calculet les troubles associés de l’attention, de lacoordination ou psychomoteurs.

Les différents troublesd’apprentissage

turber les processus attentionnels, la mémoire immé-diate verbale puis les aptitudes phonologiques, visuo-attentionnelles, gestuelles mises en jeu dans l’acqui-sition du langage oral, de la lecture, de l’orthographe,du graphisme et des praxies. L’atteinte de telles com-pétences peut avoir pour conséquences des dysfonc-tionnements de type dysphasique, dyslexique, dysor-thographique, dysgraphique, dyspraxique et des troublesde l’attention avec ou sans hyperactivité. Ces troublespeuvent être spécifiques et ne toucher, par exemple,que l’apprentissage de la lecture : c’est la « dyslexie ».Les troubles du langage oral et/ou écrit chez l’enfantont donc pour conséquence des troubles d’apprentis-sage scolaire.

Le langage oralLes troubles du langage oral chez l’enfant peuvent avoirdiverses origines. Certains sont associés à des syn-dromes comme les déficiences intellectuelles, l’autisme,la surdité, le manque de stimulation (privation psycho-sociale) ou à des atteintes neurologiques. Toutefois,des enfants présentent un trouble grave du dévelop-pement du langage sans qu’aucune cause évidente ne

soit trouvée alors que leur développement dans les autresdomaines est normal et qu’ils ont des capacités intel-lectuelles préservées.

Ces troubles englobent un ensemble de perturbationslangagières qui peuvent toucher les différents niveauxde langage à savoir la phonologie, le lexique et la syn-taxe. Ils vont se manifester dès l’apprentissage dulangage, chez des enfants d’âge préscolaire mais peuventpersister beaucoup plus tard. Les niveaux et les degrésd’atteinte peuvent être variés. Ces troubles du déve-loppement se répartissent en deux groupes :l troubles fonctionnels, ou retards simples, qui ne

touchent pas la structure même du langage et sont doncréversibles, en des temps variables, constituant uni-quement un retard plus ou moins important dans le dé-veloppement du langage,l troubles structurels, ou dysphasies, qui compor-

tent de véritables déviances.

Troubles fonctionnels

Trouble articulatoireL’articulation est du domaine de la phonétique : on étudiechaque phonème isolément. Le trouble d’articulationconcerne l’émission phonétique, c’est une erreur per-manente, systématique dans l’exécution du mouvementqu’exige la production d’un phonème quelle que soitsa position dans le mot ou dans la phrase. Les trou-bles d’articulation sont causés par des positions incor-rectes, une imprécision dans l’exécution du mouvementou une constitution anormale des organes.

Le bégaiementLe bégaiement est une perturbation de la fluence nor-male et du rythme de la parole et est souvent associéà des manifestations motrices : tics, syncinésies, mou-vements ayant pour but de faciliter le débit élocutoire.On peut également observer des phénomènes vasomo-

L es troubles du langage oral ou écrit chez l’en-fant sont des troubles spécifiques du dévelop-pement cérébral. Ils peuvent être globaux et per-

SyncinésiesContractions coordonnées

et involontairesapparaissant dans ungroupe de muscles àl’occasion de mouve-ments volontaires ou

réflexes d’un autre groupemusculaire.

adsp n° 26 mars 1999 31

Les différents troubles d’apprentissage

teurs et sécrétoires. La respiration est souvent malutilisée.

Il existe une forme particulière de bégaiement diteprimaire, physiologique avec répétition de syllabes sanstension spasmodique ou tonique, apparaissant vers troisans et qui se trouve fréquemment chez des enfants quicommencent à utiliser couramment des phrases. Cetype de bégaiement ne nécessite aucun traitement etdisparaît spontanément.

Le bégaiement en tant qu’atteinte du débit élocutoirese manifeste de différentes façons. On distingue :l le bégaiement clonique (répétition saccadée invo-

lontaire d’une syllabe),l le bégaiement tonique (impossibilité d’émettre cer-

tains mots),l le bégaiement tonico-clonique associe, à des de-

grés divers, les deux aspects précédents et constituela forme la plus fréquente,l le bégaiement par inhibition (suspension de la parole

pendant un laps de temps plus ou moins important, sansaucune agitation, ni crispation, ni syncinésie).

Retard simple de paroleLa parole est du domaine du mot. C’est l’étude des com-binaisons des différents éléments signifiants qui don-neront le mot. Au cours de son apprentissage, on trouvedes altérations qui vont dans le sens d’une simplification.On note des simplifications de phonèmes en finale ouà l’intérieur d’un groupe complexe (arbre prononcé ab),des substitutions de phonèmes résultant d’une éco-nomie articulatoire (train prononcé crin), une absencede modification de point d’articulation d’une syllabe àl’autre (couteau prononcé touto), et donc une écono-mie des mouvements articulatoires.

Le mot ne peut être reproduit dans son ensemble alorsque chaque phonème l’est séparément. Ces déforma-tions sont normales chez l’enfant qui apprend à par-ler. Leur persistance au-delà de 5-6 ans nécessite untraitement avant l’entrée au cours préparatoire.

Retard simple de langageIl y a retard simple quand il existe un décalage dansl’élaboration du langage et la chronologie normale desacquisitions. Dans ces cas :l l’apparition du premier mot est tardive (après 2

ans au lieu d’apparaître entre 10 et 18 mois),l le mot-phrase ou l’assemblage de 2 mots appa-

raît vers 3 ans au lieu d’être utilisé entre 12 et 15 mois,l les pronoms et notamment le « je » sont utilisés

vers 4 ans au lieu de 3,l le vocabulaire est réduit,l l’enfant n’utilise pas de phrases complexes, ne

respecte pas l’ordre des mots, utilise la troisième per-sonne au lieu du « je ».

Du fait de ces difficultés l’informativité est mauvaise.Mais la compréhension est meilleure que l’expression.

Quand on est en présence d’un retard simple dulangage, l’évolution est spontanément favorable, et

le retard est comblé avant 6 ans. Mais, généralement,ces difficultés rendent difficile l’insertion scolaire, leretentissement se faisant sentir dans les autres sec-teurs d’acquisition. Les difficultés risquent donc des’aggraver et il faut prévenir les difficultés scolairesultérieures.

Les troubles structurels : les dysphasies

Les dysphasies de développement constituent un troublestructurel, c’est-à-dire touchant la partie reconnue commeinnée, biologiquement dépendante de l’équipementlinguistique. Ce sont des troubles graves, durables etdéviants de la fonction linguistique. Elle se traduit parun décalage d’au moins 20 points entre le QI verbalet le QI de performance normal ou supérieur, chez desenfants dont l’audition, l’efficience intellectuelle, lecontexte affectif et linguistique, l’appareil bucco-pho-natoire sont normaux. Ces troubles concernent envi-ron 1 % de la population scolaire.

Les troubles atteignent soit le versant expressif, avecpeu ou pas d’atteinte de la compréhension, soit le versantréceptif avec atteinte de tous les niveaux de la com-préhension, soit les deux versants. Les degrés de sévéritédu trouble sont variables, allant parfois jusqu’à la quasiabsence de production de langage intelligible. Les dif-férents niveaux linguistiques ne sont pas tous atteintsde la même façon chez l’enfant.

Classifications des dysphasiesPlusieurs classifications ont été faites pour différencierles types de dysphasies, en recherchant le niveau dedysfonctionnement.

La classification française fait référence au modèleneuropsychologique de Crosson [8] établi pour l’adultequi décrit la relation réciproque entre trois groupes decentres (cf. encadré p. 32).

ConclusionLes études rétrospectives et prospectives indiquent quele langage est très lié à l’apprentissage. Il n’est doncpas surprenant que les enfants qui présentent un troubledu langage soient à risque pour le développement d’untrouble d’app ntissage.

En 1980, une étude d’Aram et Nation sur 63 enfantspréscolaires présentant un retard de langage a mon-tré que 4-5 ans plus tard, 40 % se situaient sous lamoyenne en lecture, 24 % sous la moyenne en trans-cription et 28 % sous la moyenne en maths. D’autresétudes ont confirmé que des enfants en difficultés dansle développement du langage oral à l’âge de 4-5 ansprésentent encore pour la plupart des difficultés impor-tantes dans le langage oral et dans le langage écritplusieurs années plus tard. Les troubles du langage oralsont souvent des prédicteurs de troubles du langageécrit. Ainsi, Barkley rapporte en 1981 que 60 % desenfants ayant des troubles de la lecture ont un trou-ble du langage.

32 adsp n° 26 mars 1999

Les troubles d’apprentissage chez l’enfant

groupes de centres du cerveau :l les centres corticaux antérieurs où seprend la décision du contenu sémantiqueet syntaxique du langage, et qui permet-tent aussi la programmation des opéra-tions effectrices et motrices nécessairespour dire, répéter et dénommer. Ils per-mettent donc la réalisation de ce qui a étéconçu.l les centres corticaux postérieurs qui per-mettent le décodage, c’est-à-dire qu’ilsmettent en rapport les segments de motsavec les éléments de signification ;l les centres sous-corticaux qui contrô-lent la cohérence de l’action des centresprécédents tant au niveau de la program-mation que réalisation de l’acte langagier.Ce modèle distingue différents niveaux decontrôle où sont réalisés :l la formulation du contenu sémantiqueet syntaxique du langage pour que celui-ci remplisse ses fonctions pragmatiquesnécessaires dans les tâches d’expressionet de réception ;l la programmation motrice de l’acte lan-gagier, c’est-à-dire le niveau d’organisa-tion de la mise en chaîne verbale, situéeen aval de la formulation ;l les aspects phonologiques contrôlés parle faisceau arqué qui lie les régions pos-térieures aux lieux de programmation ;l l’activation de la formulation, amenéeen fonction du niveau de vigilance par unelevée de l’inhibition qui n’a lieu que lors-que l’adéquation de l’encodage séman-tique a été vérifiée (régulation dynamique).Il existe plusieurs connexions entre cescentres ; les atteintes de ces différentesconnexions définissent différents troubles :trouble phonologique-syntaxique ; troublede la production phonologique ; troublelexical-syntaxique ; trouble sémantique-pragmatique ; trouble réceptif.

La dysphasie phonologique-syntaxiqueC’est un trouble touchant essentiellementles capacités expressives.Ce trouble se caractérise par :l une grande réduction verbale, avec uneincitation verbale faible ;l une mauvaise intelligibilité avec beau-

La classification française des dysphasiescoup de déformations phonologiques quine sont pas toujours des simplifications ;l un trouble de l’encodage syntaxique avecsouvent un agrammatisme, c’est-à-dire laproduction de mots isolés, sans mots fonction,les verbes ne sont pas conjugués alors quela conscience syntaxique est préservée ;l un lexique réduit mais sans manque dumot ;l des difficultés associées témoignantd’un trouble de la programmation motrice(antécédents de bavage, difficultés psy-chomotrices…).

Le trouble de productionphonologiqueCe trouble est dû à une atteinte du con-trôle phonologique.Les sujets restent fluents, mais leur dis-cours est marqué par un trouble de laparole qui a la caractéristique d’être ag-gravé par la répétition. Les déformationsde la parole ne vont pas systématiquementdans le sens d’une simplification. On trouveaussi dans leur discours un trouble del’encodage syntaxique de type dyssyntaxierésultant de ces mêmes difficultés de con-trôle de la mise en chaîne. Ils éprouventaussi des difficultés dans la constructiondu récit, avec des troubles de la chrono-logie : ils font des retours en arrière, desoublis. Ils présentent également un impor-tant trouble de l’évocation avec un man-que du mot car ils ne peuvent retrouverl’enchaînement des phonèmes qui aboutitau mot : ils ont donc des conduites d’ap-proche phonémique et une importante dis-sociation automatico-volontaire.

Le trouble lexical-syntaxiqueCe trouble se situe au niveau du contrôlesémantique.Il est caractérisé par un important trou-ble de l’évocation, apparaissant danstoutes les situations et peu sensible auxfacilitations. Les difficultés mnésiques sontimportantes. Les troubles apparaisssentplus majeurs quand la longueur des énon-cés augmente. On note alors une dyssyn-taxie, des difficultés de construction durécit.Ce trouble touche aussi le versant réceptifpuisque la compréhension s’altère avecla longueur des énoncés.

Le langage écrit est lui aussi perturbé avecun trouble de la segmentation, des téles-copages, des omissions et une mauvaisetranscription grapho-phonémique.

Le trouble réceptifCe trouble touche les capacités de déco-dage.L’atteinte du décodage est très primaire ettouche même le non verbal. Ce sont en effetdes enfants qui ont de grosses difficultésà identifier les bruits familiers. Ils ont doncaussi des difficultés dans la discriminationphonémique et dans la répétition de mots,ainsi que dans les exercices de segmen-tation. Ces enfants arrivent toutefois à dé-velopper un langage qui peut faire illusion,le français fondamental, mais leur discoursdevient rapidement dyssyntaxique quandils sont placés dans une situation dirigée,avec également un trouble de l’évocationlexicale, des paraphasies phonétiques. L’ac-quisition du langage écrit est très difficileen raison de leurs difficultés de discrimi-nation phonétique et il n’est pas rare queces enfants consultent pour une dyslexie-dysorthographie massive, et que ce n’estqu’au cours des investigations qu’on dé-couvre qu’il existe une atteinte importantedu langage oral.

Le trouble sémantique-pragmatiqueC’est un trouble caractérisé par une atteintede la fonction de formulation.Ces enfants ne présentant pas de troublephonologique ni de trouble syntaxique ensituation de langage spontané, le dépis-tage n’est généralement pas fait au dé-but de l’apprentissage du langage oral, etils peuvent donc commencer une scola-rité normale. Toutefois, en situation diri-gée, ils présentent un manque du mot etdes paraphasies en situation de dénomi-nation, et un important trouble del’informativité : ils construisent des phrasescorrectes, mais qui ne décrivent rien(« cocktail party syndrome »). De mêmedans l’utilisation du langage écrit, on trouveune mauvaise segmentation de mots, l’em-ploi de formules standardisées et recher-chées mais qui n’aboutissent pas à un récitconstruit. MT, LVD

L e modèle de langage de Crosson [8]décrit la relation réciproque entre trois

adsp n° 26 mars 1999 33

Les différents troubles d’apprentissage

La première phase, qui est en fait une phase de pré-lecture, permet à l’enfant de reconnaître un nombre limitéde mots (jusqu’à une centaine) qu’il a en quelque sorte« photographiés » et qu’il identifie à partir de quelquesindices visuels. Cette phase est appelée « logographi-que » car l’enfant a une approche très globale et trèsapproximative des mots, dont il ne connaît pas les unités(lettres et syllabes).

La deuxième phase consiste pour l’enfant à apprendreles correspondances entre les lettres ou groupes delettres et les sons, à identifier et associer consonneset voyelles, à séparer et lier les syllabes. Cette deuxièmephase, qui est appelée « alphabétique », est très im-portante dans le cadre des langues alphabétiques commele français, car elle donne à l’enfant la possibilité dedécouvrir le code qui lui permettra de déchiffrer, et detranscrire, la plupart des mots de la langue.

La troisième phase consiste pour l’enfant, qui maî-trise les préalables de la stratégie alphabétique, àidentifier, stocker et transcrire les mots sous la formestable d’unités orthographiques. Elle est appelée « phaseorthographique ».

Les travaux neuropsychologiques concernant l’acqui-sition de la lecture et de l’orthographe ont montré, d’unemanière tout à fait convergente avec cette théoriedéveloppementale, que nous utilisons deux voies pourlire et transcrire des mots.

La première voie consiste à identifier les correspon-dances entre les lettres et les sons, à segmenter lesmots en petites unités, puis à les assembler. Cette voie,ou stratégie de lecture, est appelée l’« assemblage ».Pour la tester chez des enfants ou chez des adultes(qui ont perdu la compétence en lecture après des lésionsou des accidents affectant le cerveau) on leur fait liredes mots qui n’existent pas et qu’ils n’ont donc pustocker en mémoire (on les appelle des « logatomes »).On ne peut lire ces mots sans utiliser les correspon-dances lettres/sons et utiliser la voie de l’assemblage.

La deuxième voie consiste à identifier le mot commeune forme précise et stable, sans passer par l’assem-blage. Cette voie est appelée l’« adressage », car l’ons’adresse en quelque sorte directement au mot stockédans le lexique orthographique. Pour la tester, on pré-sente à l’enfant ou à l’adulte des mots irréguliers quiéchappent à la correspondance entre les lettres et lessons (« femme » se lit [fam]). Les enfants et adultesqui passent par la voie de l’assemblage lisent ces motssans les reconnaître, comme s’il s’agissait de motsn’existant pas.

Lorsque la phase alphabétique et la voie de l’assem-blage ne sont pas maîtrisées, l’enfant ne parvient pasà automatiser les règles de fonctionnement du codealphabétique et, du même coup, il accède avec diffi-culté à la phase orthographique et à la voie de l’adres-sage. Lorsqu’il déchiffre des mots, il tente de fairecorrespondre lettres et sons, à associer consonnes etvoyelles, mais comme il maîtrise mal le code de réfé-rence, il fait des erreurs. La plupart du temps, il essaie

Monique Plazapsychologue,

chargée de recher-ches CNRS, Hôpital

de la Salpêtrière,Paris

LaurenceVaivre-Douret

C’est pourquoi les troubles du langage non traitésprécocement participent à l’échec scolaire de l’enfant,avec toutes ses conséquences aux plans non seule-ment scolaire mais aussi familial et social.

De plus, les troubles graves du langage chez l’enfantont pour conséquence d’altérer la communication en-travant ainsi l’intégration familiale, scolaire et sociale.L’enfant en souffrance dans sa communication en estconscient et peut développer des troubles du compor-tement ou des troubles affectifs secondaires, et avoirnotamment une mauvaise estime de lui-même.

Il est donc important de dépister tôt les troubles dulangage. La prise en charge précoce des troubles fonc-tionnels limite le risque de trouble d’apprentissageultérieur. Quant aux troubles dysphasiques, ils entra-vent généralement la scolarité, du fait des difficultésde maniement du langage oral ou de sa compréhen-sion et des difficultés d’acquisition du langage écrit.De ce fait, l’entrée dans les apprentissages est diffi-cile et il convient de leur permettre cet accès par desmoyens adaptés. Les troubles étant durables, il fautrapidement mettre en place une rééducation intensive,ainsi qu’une pédagogie adaptée tenant compte de leursdéficits langagiers, afin d’aider les enfants dans leursapprentissages.

Le langage écritLes troubles du langage écrit peuvent être qualifiés despécifiques ou de non spécifiques. Ils ne sont pas spé-cifiques lorsqu’ils apparaissent chez des enfants quiprésentent des retards de développement dus à desdéficiences intellectuelles, à des troubles neuropsycho-logiques d’étiologie cérébrale, sensorielle ou métabo-lique, à des troubles psychopathologiques sévères, oulorsqu’ils sont associés à une sévère déprivation so-ciale et culturelle.

Ils sont spécifiques lorsqu’ils apparaissent chez desenfants qui ne présentent ni déficience intellectuelle,ni problèmes psychopathologiques, ni trouble senso-riel, ni déprivation socio-culturelle. C’est la deuxièmecatégorie, celle des troubles spécifiques, que nousévoquerons ici.

Les dyslexies et dysorthographiesLes troubles spécifiques du langage écrit ont été défi-nis ces dernières années grâce à l’avancée des sciencescognitives, de la neuropsychologie, et des connaissancessur le développement de l’enfant. Ils peuvent prendreplusieurs formes, selon le domaine ou la stratégie qu’ilsaffectent.

La théorie du développement de la lecture la pluscommunément admise par les chercheurs décrit troisphases dans l’acquisition de la lecture et de l’ortho-graphe.

34 adsp n° 26 mars 1999

Les troubles d’apprentissage chez l’enfant

Ils ont aussi des troubles d’apprentissage

de « deviner » le mot à partir des quelques indices qu’ila constitués et il accède au sens des phrases en s’ap-puyant sur ce décodage partiel. Lorsqu’il écrit des mots,soit il tente de se souvenir des formes qu’il a en mé-moire, soit il cherche à transcrire phonétiquement cequ’il entend. Ses écrits sont souvent peu intelligibles.Ce type de trouble est appelé « dyslexie-dysorthogra-phie phonologique » ou « dysphonétique » puisque c’estla voie phonétique qui est affectée. C’est le troubledyslexique le plus fréquent (il représenterait environ 60 %des difficultés).

Certains enfants parviennent à maîtriser la voie del’assemblage et la phase alphabétique, mais ils res-tent comme « fixés » à ce mode de lecture. Pour eux,les mots sont des agrégats de lettres et de sons, dontils ne sont pas toujours capables de reconnaître le sens.La voie de l’adressage et la phase orthographique leur

demeurent inaccessibles, entravant fortement la com-préhension des énoncés. Ce type de trouble est appelé« dyslexie-dysorthographie dyséidétique » ou « de sur-face ». C’est un trouble moins fréquent (environ 20 %).

Certains enfants, enfin, présentent des déficiencesdes deux voies de la lecture (assemblage et adressage).Leurs difficultés de lecture sont majeures, aboutissantà des tableaux de véritable « alexie ». Ce type de trou-ble est appelé « dyslexie-dysorthographie mixte ».

Les rééducations permettent à ces enfants de dé-velopper les secteurs défaillants, de renforcer les pointsforts et ainsi d’accéder à un certain mode de lectureefficace, mais elles ne suffisent pas. Les enfants quiprésentent des troubles dyslexiques-dysorthographiquesauraient aussi besoin de trouver, à l’intérieur de l’école,des soutiens pédagogiques spécifiques, ce qui n’estpas prévu en France pour le moment. Pour les cas les

res, les enfants dits « surdoués » (ou« enfants précoces » ou intellectuelle-ment précoces, ou enfants à « haut po-tentiel » car un certain nombre d’entreeux vont vers l’échec scolaire) ont unniveau intellectuel (évalué aux tests psy-chométriques) avec un QI supérieur ouégal à 130, avec une prévalence supé-rieure de garçons que de filles quel quesoit le niveau socio-économique (cepoint parmi d’autres soulève la ques-tion d’un biais statistique introduit parle fait qu’il y aurait beaucoup plus deparents qui s’inquiètent pour l’avenir deleur fils que de celui de leur fille et doncplus de garçons que de filles seraientamenés à être testés). Plutôt que de par-ler de surdoués ou de précoces, ondevrait parler d’enfants aux « aptitudeshautement performantes » (AHP). L’ap-titude est définie comme un dispositifnaturel, c’est-à-dire antérieurement àun exercice, un apprentissage ou uneéducation, qui se manifeste par une ca-pacité. On estime à 400 000 le nom-bre d’enfants surdoués en France en âgede scolarité (de 6 à 16 ans), soit 4 %de la population, mais seuls 3 à 5 %d’entre eux seraient détectés. Si l’en-tourage ne les aide pas parce qu’ils n’ontpas été repérés en tant qu’enfants pos-sédant un haut potentiel intellectuel pré-coce, avec des aptitudes particulières

Les surdoués

excellentes en langage, une rapidité dela compréhension, une excellente mé-moire (aussi bien à court terme qu’à longterme) et des aptitudes visuo-spatialeset à la résolution de problèmes, ilsdéveloppent alors des mécanismesd’échec scolaire avec une valeur signi-ficative de « réaction ».Ces enfants présentent souvent des trou-bles du comportement, tels que l’ins-tabilité, l’inhibition, l’isolement, des trou-bles du caractère, ou de la personnalité,avec une certaine asociabilité, une im-maturité affective et un aspect anxieux.Des troubles instrumentaux peuventapparaître tels que la dysgraphie, untrouble de la coordination motrice, unehyperactivité, etc. Ils déroutent, s’inté-ressent précocement à différents domai-nes des sciences de la vie et de la terre ;ils dérangent, ils ont le goût du défi ets’ennuient vite en classe, recherchantla compagnie des grandes personneset éprouvent souvent des difficultés faceà l’effort.Selon l’étude relatée dans Le Quotidiendu Médecin du 22 février 1999, menéeauprès de 145 surdoués, et suivis surune période de 10 à 20 ans, il appa-raît que ces enfants ont suivi un cur-sus scolaire chaotique : 40 % d’entreeux ont atteint ou dépassé le niveauBac + 2 ; 9 % se sont arrêtés au Bac,et 43 % n’ont décroché qu’un BEP ouun CAP.

Ce naufrage scolaire peut être aussi ac-compagné d’un échec dans la vie so-ciale et affective. Ceci est le résultatd’une non identification des aptitudesprécoces de l’enfant qui se manifestepar des symptômes, voire des dysfonc-tionnements neuropsychologiques. Lemilieu environnant, que ce soit l’école,l’entourage ou la famille, peut avoir unimpact important sur une certaine vul-nérabilité existante au niveau du cer-veau de ces enfants. En effet, ces der-niers peuvent « hypertrophier » dès leurplus jeune âge des zones ou fonctionsdu cerveau (au détriment d’autres zo-nes qui sont pourtant dans une période« sensible » du développement), par lerenforcement d’indices positifs ou né-gatifs issus de l’environnement qui netiendrait pas compte d’un maintienhoméostasique du développement desdifférentes fonctions (mentales, instru-mentales, affectives). Ainsi, ces enfantsapparaissent d’une sensibilité psycho-affective extrême, d’autant plus accen-tuée que l’importance de la discordanceentre la maturité intellectuelle et affectiveest grande, d’où la nécessité de favo-riser une prise en charge adaptée. Ce-pendant, il n’existe encore en France quedeux structures adaptées pour l’épa-nouissement de ces enfants dits sur-doués. Alors que dans d’autres pays,des classes spéciales ont été créées.LVD

P orteurs de troubles associés auxtroubles d’apprentissage scolai-

adsp n° 26 mars 1999 35

Les différents troubles d’apprentissage

plus graves, des institutions pédagogiques spécialiséessont nécessaires, mais elles sont très rares, et doncen liste d’attente.

La dyscalculieL’acquisition des concepts numériques s’effectue enmême temps que l’exploration des propriétés physiqueset des caractéristiques spatiales des objets. En outre,la maîtrise de la sériation et des quantités rend pos-sible l’établissement de notions logico-mathématiques,des relations logiques pour les opérations spatiales.L’évaluation spatiale semble poser problème car l’en-fant accède plus tard au stade analytique lui permet-tant de faire une évaluation globale. Cependant, il peutarriver que les critères logiques et spatiaux se diffé-rencient tardivement, c’est-à-dire après trois ans. Se-lon le DSM-IV, la caractéristique essentielle des trou-bles du calcul est une faiblesse des aptitudes enmathématiques, évaluées par des tests standardisésexplorant le calcul ou le raisonnement qui sont nette-ment au-dessous du niveau escompté compte tenu del’âge chronologique du sujet, de son niveau intellectuel(mesuré par des tests) et d’un enseignement appro-prié à son âge. Bien que les symptômes d’une difficultéen mathématiques telle que confusion de chiffres, in-capacité à compter correctement, puissent survenir dèsla maternelle, ou le début du cours préparatoire, le troubledu calcul est rarement diagnostiqué avant le CE1, voiremême souvent pas avant le cours moyen deuxièmeannée, étant donné les capacités d’intelligence normaleou subnormale de l’enfant. La prévalence du troubledu calcul est difficile à établir en raison d’un manquede différenciation parmi les troubles spécifiques dulangage oral et écrit. On estime donc à 1 % les enfantsd’âge scolaire présentant un trouble du calcul isolé, c’est-à-dire non associé à d’autres troubles des apprentis-sages (DSM-IV, [10]).

La désintégration lésionnelle des capacités de cal-cul et l’absence de progression des acquis causent etrenforcent les dyscalculies développementales. Ainsila difficulté de manipuler les concepts spatiaux, unemauvaise coordination motrice (difficultés motrices,troubles des praxies constructives, de l’image corpo-relle, etc.), des déficits en dessin et en représentationdes détails corporels constituent les caractères mar-quants des dyscalculiques. En outre, ils peuvent aussiprésenter des problèmes de langage et de lecture (com-prendre ou nommer les termes et opérations ; traduireles problèmes écrits en symboles mathématiques…) ;des difficultés perceptives (reconnaître ou lire des sym-boles numériques ou des signes arithmétiques ; regrou-per des objets ensembles…) ainsi que des difficultésattentionnelles (respecter les signes dans une opéra-tion ; copier correctement les chiffres ou figures ; nepas oublier d’additionner les retenues…) ou des diffi-cultés mathématiques (suivre un raisonnement mathé-matique ; apprendre les tables de multiplication ; dé-nombrer…). Cette classification regroupe plusieurs

critères hétérogènes ; néanmoins on peut retenir ladyscalculie spatiale, telle que Badian [4] en rend compte,à savoir : des confusions dans l’agencement de pro-cédures successives pour réaliser des opérations écrites,des difficultés de disposition des nombres, des diffi-cultés à lire l’heure (confusions dans le sens de la rotationdes aiguilles) et des éléments dysgraphiques, commela forme représentative des dyscalculies. Bien queprésentant un certain nombre de troubles, les enfantsdyscalculiques mémorisent bien les tables et les faitsarithmétiques. Dès lors, il devient compréhensible queles difficultés en calcul se traduisent par d’autres dif-ficultés, notamment en lecture et en graphisme, du faitde l’omission, de l’adjonction ou de l’inversion deschiffres et des signes opératoires.

Troubles associésTroubles de l’acquisition de la coordinationLa caractéristique essentielle des troubles de l’acqui-sition de la coordination est une perturbation marquéedu développement de la coordination motrice. Ceci excluttoute affection médicale générale et les troubles en-vahissants du développement, tout retard mental oumoteur important. Les difficultés de coordination mo-trice chez l’enfant ont été décrites depuis longtempssous des terminologies diverses, telles que le tableaude débilité motrice de Dupré, les apraxies du dévelop-pement, les dyspraxies de développement, ou encoreles maladresses développementales et, plus récemment,selon le DSM-IV [10], les troubles de l’acquisition dela coordination. La prévalence peut atteindre 6 à 7 %des enfants âgés de 5 à 11 ans. Les manifestationsdu trouble varient en fonction de l’âge et du niveau dedéveloppement. En effet, les enfants les plus jeunespeuvent présenter un certain retard au niveau desacquisitions du développement posturo-moteur, tellesque s’assoir, marcher, courir, et de la coordination visuo-manuelle telles que boutonner ses habits, lacer seschaussures, jouer au ballon, assembler des cubes, écrireà la main, etc. Il existe souvent une lenteur dans lesdifférentes activités motrices et une perturbation de ladextérité. Le trouble de l’acquisition de la coordinationne reste pas souvent isolé : il est souvent associé àdes troubles du langage oral ou écrit, trouble du cal-cul, ou avoir pour conséquence une dysgraphie, ou encoreêtre associé à un déficit de l’attention, avec ou sanshyperactivité. Ainsi, les troubles de l’acquisition de lacoordination sont fortement corrélés avec les troublesd’apprentissage. Cependant, nous pouvons faire leconstat qu’il n’existe pratiquement pas d’évaluationsfines de la coordination motrice chez l’enfant. Ce do-maine reste encore peu exploré aujourd’hui par les pra-ticiens, en dehors des psychomotriciens. Étant donné

LaurenceVaivre-Douret

ApraxiePerte de la compréhen-sion de l’usage des objetsusuels qui se traduit pardes actes plus ou moinsabsurdes et impossiblitéde conformer lesmouvements au butproposé. L’apraxie esttoujours provoquée pardes lésions du lobepariétal.

36 adsp n° 26 mars 1999

Les troubles d’apprentissage chez l’enfant

la méconnaissance de ce domaine par les différentsintervenants de santé, les tableaux cliniques décritsdans les troubles d’apprentissage, tels que les trou-bles du langage oral et écrit, mériteraient une meilleureexploration et une considération de cette composantequ’est la motricité. On trouverait peut-être là des signesqui témoignent d’un trouble de la maturation neuro-motrice, que peut bien mettre en évidence l’examen

neuropsychomoteur. À travers cette évaluation, dessignes neurologiques mineurs, appelés « soft signs »,peuvent être mis en évidence et témoigner par là d’undysfonctionnement cérébral a minima.

On trouvera parmi les troubles de la coordinationmotrice, les dyspraxies développementales : la dyspraxieest définie par une dissociation entre le QI verbal et leQI de performance, au profit du verbal.

tention (ADHD) ou troubles hyperkinétiquesavec déficit de l’attention (Thada) touchententre 3 et 5 % de la population prépu-bertaire, soit un enfant par classe d’uneécole primaire. Il existe une incidence fa-miliale élevée lorsqu’il y a déjà des frèreset sœurs en difficulté d’apprentissage. Maisaucune corrélation n’existerait avec les don-nées socio-économiques, le niveau édu-catif, etc. Ils sont souvent dépistés maispas avant l’âge de 6 ans, car jusque-là c’estl’hyperactivité motrice qui est dominante.L’hyperactivité ou instabilité psychomotriceest un des motifs les plus fréquents de trou-bles scolaires. Il s’agit de différencier l’ins-tabilité d’origine constitutionnelle, liéenotamment à un déficit d’attention et l’ins-tabilité plutôt réactionnelle, secondaire àun trouble psychopathologique individuelou familial.Dans le cadre des troubles déficitaires del’attention, avec hyperactivité, on distingueselon le DSM-IV trois composantes : lestroubles de l’attention, l’hyperactivité et l’im-pulsivité. Ces composantes sont définiespar des critères qui mettent en évidencedes symptômes. Il est nécessaire que ledébut de ces symptômes soit apparu avant7 ans et que la durée de ces symptômessoit supérieure à 6 mois. De plus, la gênefonctionnelle liée aux symptômes doit êtremanifeste dans au moins deux types d’en-vironnement différents (maison, école ouau travail).Avec l’âge, l’hyperactivité tend à être mi-nimisée (il reste souvent des contorsionsou tortillements plus ou moins incessants)au profit de l’impulsivité, notamment chezl’adolescent, ceci s’accompagnant souventd’un trouble de comportement avec agres-sivité qui peut aller jusqu’à conduire au rejetdu milieu social ou scolaire.Selon la nature des symptômes prédomi-

d’usage (oubli des s, t…), une dysgraphiec’est-à-dire la perte de capacité d’écrire surla ligne après quelques secondes ou quel-ques minutes suivi de nombreuses hési-tations (ratures) qui augmentent avec lenombre de lignes ;l troubles de la mémoire à court termeavec des trous de mémoire d’où les trou-bles d’apprentissage par déficit de l’atten-tion ou par mauvais fonctionnement de lamémoire à court terme ;l troubles émotionnels dans 25 à 30 %des cas : il s’agit surtout de troubles an-xieux (anxiété généralisée ou phobies) oude troubles dépressifs. Des troubles du som-meil sont caractérisés par une insomnie quiperturbe la qualité du sommeil et peutaltérer le système de mémorisation quis’établit au cours du sommeil paradoxal.L’enfant présente souvent des difficultésd’endormissement, des réveils nocturnes,une hyperactivité motrice nocturne, un ron-flement, des apnées ;l troubles du comportement perturbateurtel un trouble oppositionnel (comportementsd’opposition, d’intolérance à la frustrationet de refus de participer aux tâches collec-tives) ; troubles des conduites (agressivité,difficultés relationnelles, transgression desrègles sociales voire conduites délinquan-tes).Les conséquences immédiates sont :l l’échec scolaire : moins de 20 % desadolescents ayant présenté ce trouble pour-suivent une scolarité. Ces difficultés sontliées en grande partie aux troubles demémorisation et de l’apprentissage, maisaussi aux difficultés relationnelles ;l une mauvaise intégration sociale : l’en-fant est mal accepté par son environnement,exaspérant parents et enseignants ; sesrelations avec ses condisciples et frères etsœurs en font un « marginal » ;l un sentiment d’autodépréciation : l’en-fant, mal intégré dans sa famille et dans

Les troubles déficitaires de l’attention/hyperactiviténants au cours des six derniers mois, troissyndrômes sont distingués (DSM-IV) :l les troubles de l’attention/hyperactivitéavec hyperactivité/impulsivité prédomi-nante, ou syndrome hyperkinétique : pré-sence d’au moins six symptômes d’hyper-activité/impulsivité mais moins de sixsymptômes de troubles de l’attention.l les troubles de l’attention/ hyperactivitéavec inattention prédominante : présenced’au moins six symptômes de troubles del’attention mais moins de six symptômesd’hyperactivité/impulsivité.l les troubles de l’attention/hyperactivité,type mixte : présence d’au moins six symp-tômes de troubles de l’attention et d’aumoins six symptômes d’hyperactivité/im-pulsivité.Le diagnostic des troubles de l’attentionavec hyperactivité, outre les critères clini-ques indiquées ci-dessus, repose aussi surdifférents questionnaires (Conners, Yale,Barlkey,…) qui sont proposés à l’usage desparents et enseignants.Les troubles déficitaires de l’attention avechyperactivité peuvent être purs ; ils peu-vent évoluer vers la dépression et assezsouvent vers les troubles des conduites. Ilspeuvent entraîner souvent des troublesd’apprentissage qui sont eux-mêmes destroubles de l’attention.Les troubles associés sont fréquents :l troubles des apprentissages dans 50 %des cas : on retrouve des troubles spéci-fiques du langage oral (retard de langageou dysphasie) ou du langage écrit (dyslexie-dysorthographie). Pour exemple, le retardde développement du langage oral fait quel’enfant ne peut suivre le fil conducteur d’unrécit, a tendance à raconter les événementsdans le mauvais ordre. Un retard de lec-ture se manifeste par des erreurs d’inver-sion de lettres ou de syllabes, une omis-sion de lettres, la présence de paralexies(manteau pour marteau), des fautes

H uit fois plus fréquents chez les gar-çons, les troubles déficitaires de l’at-

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Les différents troubles d’apprentissage

Les dyspraxies relèvent des problèmes sur les mou-vements et gestes coordonnés et finalisés en fonctiond’un but ou d’une intention. La dyspraxie ne relève pasd’une mauvaise perception de l’acte à accomplir, maisplutôt d’une difficulté à initier un projet moteur global(et non séquentiel) de l’acte volontaire, c’est-à-dire qu’onse situe au niveau de la planification, en anticipant despréprogrammes automatisés sensori-moteurs intégrant

son groupe scolaire, subit les réprimandesde ses proches et de ses enseignants. Cons-cient de son « exclusion », il est souventanxieux, souffre parfois d’un authentiqueeffondrement dépressif.Le traitement repose d’abord sur la réédu-cation des désordres cognitifs, une approcheéducative pour parents et enseignants, unepsychothérapie. Il doit être mis en placepar une équipe pluridisciplinaire compé-tente comportant des neuropédiatres, despédopsychiatres, des neuropsychologueset des paramédicaux. LVD

Les troubles de l’attentionEnfant facilement distractible (esprit souventailleurs) ; ayant des difficultés de concentration surune activité nécessitant une application soutenue(scolaire, ludique, etc.) ; n’écoute pas ce qu’on luidit ; perdant facilement ses objets personnels (quece soit pour son travail scolaire ou pour tout autreactivité) ; ne finissant pas toujours ce qu’ilcommence, passant souvent d’une activité à l’autreet ayant du mal à se conformer aux directivesd’autrui (celles-ci n’étant pas oppositionnelles) ;son travail est souvent brouillon ; il fait des fautesd’étourderie et a du mal à organiser ses activités.

L’hyperactivitéL’enfant court ou grimpe partout dans des situa-tions inappropriées ; a du mal à rester en place ;s’agite, a « la bougeotte » ; il a du mal à resterassis sur ordre, à jouer en silence ; il a desdifficultés à se tenir tranquille dans les activités dejeu et de loisir.

L’impulsivitéL’enfant a du mal à attendre son tour dans lesactivité de groupe ; se précipite souvent pourrépondre aux questions ; interrompt souvent autruiou impose sa présence. L’impulsivité peut êtresource d’accidents (renverser des objets…) etconduire le sujet à se lancer dans des activitésphysiques dangereuses, sans conscience dudanger.

les données spatio-temporelles. Ce sont ces préprogram-mes qui étant partiellement disponibles ou défectueuxsemblent être à l’origine du trouble. Ainsi le mouvementest qualifié de maladroit, mal adapté et peu précis,exécuté avec lenteur et avec une dépense d’énergieimportante.

On distingue classiquement différents types dedyspraxies :l la dyspraxie idéomotrice qui concerne des gestes

à réaliser en l’absence de manipulation réelle d’objet ;ce sont des gestes à visée symbolique ou mimés (sa-lut militaire, imiter le geste réalisé par l’autre) ;l la dyspraxie idéatoire qui concerne les difficultés

d’utilisation et de manipulation d’objet, telles qu’allu-mer une allumette, plier une feuille de papier et la glisserdans une enveloppe, etc. ;l la dyspraxie de l’habillage qui relève de la difficulté

à mettre ses habits (en mettant les habits à l’envers,en effectuant un mauvais repérage et enfilage du vê-tement), à se boutonner, etc. ;l la dyspraxie visuo-spatiale ou constructive qui

concerne les activités d’assemblage de divers élé-ments : construction de cubes… Dans ce dernier typede dyspraxie, plus spécifique chez l’enfant atteint delésions cérébrales précoces (IMC), il ne faut pas omettrede négliger les troubles du regard, tels qu’un troublede l’oculo-motricité.

Ainsi il ne faut pas négliger l’intérêt clinique de telstroubles sachant que différents types dyspraxiquespeuvent s’associer. Les répercussions scolaires ne sontpas négligeables sur le plan aussi bien de la lectureque des mathématiques ou de l’écriture.

Troubles psychomoteurs spécifiquesCes troubles psychomoteurs spécifiques sont relatifsà la mise en place de la neuro-sensori-motricité ; del’intégration de la connaissance du corps propre(schéma corporel) ; de l’organisation spatiale (corpsstatique et dynamique dans son environnement, ac-quisition des notions de base, devant/derrière, haut/bas, gauche/droite etc.) et temporelle (prise de cons-cience progressive de la succession dans le temps,de la notion de rapide/lent, de rythme, des notionsavant/après, passé/avenir etc.) ; de la latéralisationchez l’enfant (utilisation préférentielle d’un hémicorpspar rapport à l’autre). Ces différents éléments sontessentiels pour l’accès aux apprentissages scolaires,ils en constituent les fondements sur lequel s’orga-nise le cerveau.

Ces troubles sont dépistés lors de l’examen psycho-moteur effectué par un psychomotricien. Cet examenest peu sollicité par les prescripteurs, notamment parcequ’il n’est pas systématiquement remboursé par la sé-curité sociale. Ainsi, ces troubles qui accompagnent sou-vent les troubles d’apprentissage ne sont ni dépistésni pris en charge alors que l’on sait que ceci aurait poureffet une diminution de la durée globale des prises encharge.

38 adsp n° 26 mars 1999

Les troubles d’apprentissage chez l’enfant

teur peuvent s’adresser au Réseau d’aide spécialiséaux élèves en difficulté (Rased) dont relève l’école. Unmaître spécialisé (mais non spécialisé en neuropsycho-logie) ou un psychologue scolaire intervient pour con-cevoir avec l’institutrice, l’enfant et ses parents quelleaide spécialisée est souhaitable, avant de la mettreen œuvre dans l’école même. Le Rased peut égalementconseiller la consultation par l’enfant d’une structureextérieure, d’un centre médico-psychologique (CMP) oud’un centre médico-psycho-pédagogique (CMPP) dont70 % du recrutement vient de l’Éducation nationale. Oubien, il peut saisir la commission départementale del’éducation spéciale (CDES) à la recherche de la meilleureprise en charge possible. La CDES peut orienter un enfantou un adolescent en difficulté d’apprentissage vers unedes structures mises en place par l’Éducation natio-nale. Cette commission peut déléguer en partie sescompétences à la commission de circonscription del’enseignement pré-scolaire et élémentaire (CCPE) ouà la commission de circonscription du second degré(CCSD). Dans chaque département, il existe une tellecommission qui est compétente à l’égard de tous lesenfants handicapés physiques, sensoriels ou mentauxde leur naissance jusqu’à leur entrée dans la vie ac-tive ou au moins jusqu’à l’âge de 20 ans. Son rôle estdouble :l orienter les enfants et adolescents vers les éta-

blissements ou les services dispensant l’éducation spé-ciale correspondant à leurs besoins ;l statuer sur l’attribution de l’allocation d’éduca-

tion spéciale (AES) par les caisses d’allocation familia-les (CAF) selon les données du certificat médical surlequel figure au chapitre « déficiences » le sous cha-pitre « déficiences du langage, de la parole et de l’écrit ».La CDES utilise donc les termes du guide-barème pourl’évaluation des déficiences et incapacités des per-sonnes handicapées et doit en appliquer les directi-ves.

Le recours contre les décisions de la CDES est pos-sible par les parents de l’enfant en matière de place-ment en établissement : recours gracieux d’abord puisrecours contentieux devant les juridictions du conten-tieux technique de la sécurité sociale, adaptées pource faire par les décrets n° 76-493 et 76-494 du 3 juin1976.

La commission plénière de la CDES comprend desreprésentants de différentes institutions : Ddass avecau moins un médecin, inspection académique, caisserégionale d’assurance maladie (Cram), caisse d’allo-cation familiale (Caf), et une personne ayant des res-ponsabilités dans un établissement privé accueillantdes enfants handicapés, mais aussi des représentantsdes familles d’enfants et adolescents handicapés, deuxassistances sociales, la secrétaire de la CDES, unpsychologue scolaire. Ici non plus, il n’y a pas d’ortho-phoniste, de pédiatre ou neuropédiatre, de psycho-motricien, ni de neuropsychologue qui sont les profes-sionnels de disciplines déterminantes pour la conduitediagnostique et thérapeutique. Mais cela n’est pas prévudans la loi d’orientation de 1975. Si un diagnostic detroubles d’apprentissage est posé, la CDES peut pro-poser une orientation. Cependant, il faut voir que la plu-part des structures existantes sont souvent inadaptéesà la prise en charge de tels enfants, hormis certainesrares structures médico-éducatives.

LaurenceVaivre-Douret

Lucien CastagnéraPraticien hospitalier,

CHU Bordeauxet le soutien de

l’Afepp

La prise en charge

La prise en charge des enfants souffrant de troublesd’apprentissage dépend essentiellement d’un diagnosticprécis. Seul celui-ci permet l’adaptation de la scolaritéaccompagnée de rééducation.

Q uand un enfant est en difficulté scolaire, lorsqu’ilprésente des troubles du comportement quidérangent la classe, l’instituteur ou le direc-

adsp n° 26 mars 1999 39

La prise en charge

Les filières de l’Éducation nationaleLes filières proposées par l’Éducation nationale et visantà faciliter l’intégration scolaire des élèves handicapéssont multiples : pour le primaire, les réseaux d’aidesspécialisés aux élèves en difficulté (Rased), les Clis ;pour le secondaire les sections d’enseignement géné-ral et professionnel adapté (Segpa), les établissementsrégionaux d’enseignement adapté (Erea), des unitéspédagogiques d’intégration (UPI), ces derniers s’adres-sant aux adolescents présentant un handicap mental.

Les Rased, nés en 1990, succédant aux groupesd’aide psycho-pédagogique (GAPP) (circulaire n° 90-082du 9 avril), comprennent des intervenants spécialisésayant pour mission une action d’aide à dominante « pé-dagogique » ou à dominante « rééducative ». Les per-sonnels qui participent à l’activité d’un réseau sont despsychologues scolaires, des instituteurs chargés de réé-ducations et titulaires du Certificat d’aptitude aux ac-tions pédagogiques spécialisées d’adaptation et d’in-tégration scolaires (CAPSAIS) des instituteurs spécialiséschargés de l’enseignement et de l’aide pédagogiqueauprès des enfants en difficulté à l’école préélémentaireet élémentaire, titulaires du CAPSAIS lorsqu’ils exer-cent leurs fonctions dans une des classes d’adapta-tion (15 élèves au maximum) ou sont responsables deregroupements d’adaptation.Ces réseaux ne disposentpas de professionnels de santé spécialisés en réédu-cation (psychomotriciens, orthophonistes…).

Les classes d’intégration scolaire (Clis) sont néesde l’application de la circulaire n° 91-304 du 18 novem-bre 1991. Elles accueillent un maximum de 12 enfantsdont le handicap a été reconnu par une commissionde l’éducation spéciale. Le handicap peut être moteur,sensoriel (visuel, auditif) ou mental et « l’action péda-gogique entreprise dans les Clis a pour objectif le dé-veloppement optimal des capacités cognitives, de lasensibilité, du sens de la coopération, de la solidaritéet du civisme ». Il n’est malheureusement pas prévude Clis pour les enfants ayant un trouble du langage,trouble pourtant reconnu par l’Éducation nationale.

Les sections d’enseignement général et professionneladapté (Segpa) sont issues de la circulaire n° 96-167du 20 juin 1996. Ils accueillent des élèves qui, à la finde l’école élémentaire connaissent « des difficultés graveset persistantes et qui, sans relever du retard mental, selonles critères définis par l’Organisation mondiale de la santé,se traduisent par des incapacités et des désavantagestels qu’ils peuvent être décrits dans la nomenclature desdéficiences, incapacités et désavantages (arrêté du 9janvier 1989) ». Les enseignements « sont assurés prin-cipalement par des professeurs d’école spécialisés, ti-tulaires de l’option F du CAPSAIS, et par des professeursdu lycée professionnel ». Les élèves des Segpa et desErea sont, d’une manière générale, de mauvais lecteursou des non-lecteurs et peut-être faudrait-il rééduquer s’ily a lieu les authentiques troubles du langage qui néces-sitent une véritable prise en charge médico-éducative.

Les unités pédagogiques d’intégration (UPI) permet-

Structures existantes adaptées

Les structures et établissements

Les centres de diagnostic, en France,il existe 23 unitésde consultation spécialisées :l Hôpital de Garches (Hauts-de-

Seine), AP Paris (Pr Lacert),l CHU de Montpellier (Hérault)

(Pr Echenne),l CHU de Tours (Indre-et-Loire)

(Dr Billard),l Hôpital Robert Debré, AP Paris

(Dr Gérard),l Hôpital de la Timone, au CHU de

Marseille (Bouches-du-Rhône)(Dr Habib),

l Hôpital Purpan, CHU Toulouse(Haute-Garonne) (Dr Demonnet),

l CH de Tarbes (Ille-et-Vilaine)(Dr Netter),

l CMP de Linselles (Nord),l Hôpital de Palavas-les-Flots

(Hérault),l Hôpital Kremlin-Bicêtre, Paris,l Hôpital Sainte-Anne, Paris,l Établissements pour déficients

auditifs : CROP Saint-Hippolyte duFort (Gard), École Borel-MaisonnyParis, Institut A. Bellé Chartres(Drôme),

l Établissements pour déficientsmoteurs : EREA Garches (Hauts-de-Seine), CRFE Flavigny-sur-Moselle(Meurthe-et-Moselle),

Ce sont des unités médico-éducatives,véritables classes où un enseignementspécifique est dispensé conjointementà une rééducation spécifique :

Structures institutionnelles,publiquesl une Clis pour dysphasiques à Tours

(Indre-et-Loire) sur l’initiative duDr Billard,

l un Sessad pour dysphasiques àMontpellier (Hérault) sur l’initiativedu Pr Echenne,

l un Erea de l’hôpital RaymondPoincaré à Garches (Hauts-de-Seine) sur l’initiative du Pr Lacert,

l Établissements pour déficientsauditifs : Crop Saint-Hippolyte duFort (Gard), École Borel-Maisonny

l Établissements polyvalents : ClosChauveau Dijon (Côte-d’Or), IrecovTours (Indre-et-Loire),

l Établissements pour dyslexiques :Institut Saint-Charles Schiltigheim(Bas-Rhin),

l CMPP Chalons-sur-Saône (Saône-et-Loire),

l CMP Linselles (Nord),l CAMSP Calais (Pas-de-Calais),l MCSS « Les Lavandes « à Orpierre

(Hautes-Alpes).

Des services de soins (Sessad ouSSEFIS), des établissements, descentres de ressources (Paris) suiventles enfants en intégration individuelleou collective grâce à des conventionset projets individualisés signés avecl’Éducation nationale :l Institut A Bellé, Irecov Tours (Indre-

et-Loire), Laval (Mayenne),l Classe intégrée de Garches (Hauts-

de-Seine),l Clis 1 de Tours (Indre-et-Loire) ou

de Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme),

l Clis 4 à Angers (Maine-et-Loire) etLyon (Rhône),

l Classes de perfectionnement Calais(Pas-de-Calais),

l École intégrée de Massy (Essonne).

Paris, Institut A. Bellé Chartres(Drôme),

l Établissements pour déficientsmoteurs : Erea Garches (Hauts-de-Seine), CRFE Flavigny-sur-Moselle(Meurthe-et-Moselle),

l Établissements polyvalents : ClosChauveau Dijon (Côte-d’Or), IrecovTours (Indre-et-Loire)

Structures privéesIl n’existe que deux établissementsspécialisés accueillant des enfantssouffrant de troubles spécifiques dulangagel L’Institut Saint-Charles de Schilti-gheim (Bas-Rhin),l MCSS « les lavandes « à Orpierre(Hautes-Alpes).

40 adsp n° 26 mars 1999

Les troubles d’apprentissage chez l’enfant

tent les regroupements pédagogiques d’adolescentsprésentant un handicap mental (circulaire n° 95-125du 17 mai 1995).

Les établissements médico-sociauxLes établissements médico-sociaux comprennent :l les instituts médico-pédagogiques (IMP) assurant

la prise en charge de 0 à 14 ans,l les instituts médico-professionnels (IMPro) assu-

rent la continuité de prise en charge de 14 à 20 ans,

l les instituts médico-éducatifs (IME) qui réunissenten un seul établissement les deux catégories précédentes,l les instituts de rééducation (IR) destinés aux en-

fants présentant des troubles du caractère et du com-portement, susceptibles d’une rééducation psychothéra-peutique sous contrôle médical,l les centres d’action médico-sociale précoce

(CAMSP),l les centres médico-psychopédagogiques (CMPP).

ments et près de 8 000 enfants et ado-lescents résidant dans des établisse-ments relevant des annexes XXIV, a étéréalisée en 1997 en Aquitaine par leservice médical de la Caisse régionaled’assurance maladie et par les direc-tions départementales des Affairessanitaires et Sociales (Ddass).Les résultats de l’étude mentionnée icine portent que sur le département dela Gironde et sont tirés d’un documentde travail qui n’a pas encore fait l’ob-jet de publication. Ils sont en cours devalidation par les établissements con-cernés.Il est d’abord noté que 36 % et 27 %d’enfants sont respectivement entrésdirectement en institut de rééducationet en institut médico-éducatif sans avoireu de suivi médical préalable, mêmelibéral. L’âge moyen d’admission, pources enfants, est de 10 ans. L’internatest un mode d’accueil très développé(alors que l’éloignement familial est leplus souvent peu souhaitable).

Les instituts de rééducationConcernant les IR, l’analyse porte sur25 établissements comprenant unepopulation de 1 394 enfants et adoles-cents pour lesquels la CDES est respon-sable des orientations dans 91,4 % descas. Rappelons que relèvent des IR lesenfants et adolescents aux capacitésintellectuelles normales ou subnormalesmais qui présentent des troubles ducomportement. La prise en chargeambulatoire est quasi inexistante ici. Cesétablissements ont un profil de popu-

Aquitaine : étude sur les enfants des établissements spécialisés

lation très divers (48,6 % de troublesde la personnalité hors névrose et psy-chose, 23,8 % de troubles névrotiques,16 % de psychose, 8,7 % de retardmental léger). Le temps moyen de sco-larité hebdomadaire est de 18 heures,le retard scolaire varie de 2 à 6 ans selonles établissements pour les enfantsayant 15 ans, ce retard scolaire nefaisant par ailleurs que s’accroître. À lasortie de ces établissements, il faut noterl’absence de suivi des jeunes (ce quiest pourtant prévu par la réglementa-tion) et seuls 20 % des jeunes âgés de18 ans et plus ont une fin de prise encharge. On peut s’interroger sur la co-habitation d’enfants structurés sur unmode psychopathique ou de perversionavec des enfants psychotiques et surla présence d’enfants ayant un retardmental dans ces établissements. Lesrythmes de prise en charge éducativeet pédagogique sont alors très différentset rendent difficile pour ces établisse-ments l’accomplissement d’une de leurmission essentielle qui est la réintégra-tion des enfants dans un milieu scolaireordinaire.Des enfants normalement intelligentsont intégré ces structures parce qu’ilsprésentaient un retard scolaire impor-tant. On retrouve ainsi 228 enfants(16,3 %) qui ne présentent qu’un troubleléger du comportement et surtout 141enfants (10,1 %) qui ne présentent nitroubles du comportement, ni déficience,ni psychose, ni retard mental.

Les instituts médico-éducatifsPour les IME (accueillant des enfantset adolescents présentant des déficien-

ces intellectuelles ou inadaptés, éven-tuellement avec troubles associés : trou-bles de la personnalité, troubles comi-tiaux, troubles moteurs et sensoriels,troubles graves de la communication,maladies chroniques compatibles avecune vie collective), l’analyse porte sur24 établissements comprenant une po-pulation de 1 309 enfants et adoles-cents. On retrouve, entre autres, 42enfants polyhandicapés (3,2 %), 293enfants psychotiques (22,4 %) et 82autistes (6,2 %) chez lesquels un retardmental était fréquemment noté, 187 en-fants (14,2 %) présentant des patho-logies organiques dont 122 ont uneaffection chromosomique…La surprise provient du nombre consi-dérable d’enfants ne présentant nidéficience mentale ni déficience motrice.En effet 194 enfants (14,8 %) ont in-tégré ces structures (un tiers d’entre euxest entré directement dans cette struc-ture, alors que 26 proviennent d’IR)uniquement parce qu’ils présentaientun retard scolaire important, ne dépas-sant qu’avec difficulté le niveau de CP.Autre fait : il existe en Aquitaine au moins106 enfants présentant des troubles dulangage et/ou des troubles hyperki-nétiques (classés en F 80, F 81, F 83et F 90 tel que définis par l’OMS) sansretard mental et qui ont intégré un IRdans 63,2 %, un IME dans 31,1 % descas et un institut pour déficients audi-tifs dans 3,7 % des cas. Ces enfants sontentrés en institution entre 5 et 7 ans pour46,5 % d’entre eux. Enfin, il apparaît que32 enfants (30,1 %) n’ont eu aupara-vant aucune prise en charge, mêmelibérale. LVD

U ne étude transversale et descrip-tive, portant sur 152 établisse-

Quels sontles troublesdes enfants

présentsdans les

structuresde prise en

charge enAquitaine ?

suite page 32

adsp n° 26 mars 1999 41

La prise en charge

Quelques pistes pour améliorer la prise en chargeLa prise en charge pourrait être nettement plus efficace siquelques mesures, dont certaines existent déjà de façonexpérimentale, étaient mises en œuvre. Les clefs pour unetelle amélioration sont :l Dépister précocement les dysfonctionnements neuropsycho-

logiques : c’est le rôle des médecins et notamment despédiatres de PMI (mais seulement 10 % des enfants enFrance sont suivis en PMI, la plupart vont chez les géné-ralistes) avec l’aide d’une équipe pluridisciplinaire. Cesprofessionnels doivent communiquer leur conclusions auxmédecins scolaires. En cas de dépistage systématique,les résultats pourraient parvenir à un centre de ressour-ces collectant les données, assurant une part diagnosti-que, guidant les familles vers des professionnels compé-tents, via un réseau, et assurant le suivi longitudinal desenfants affectés.

l Diagnostiquer le trouble : c’est le rôle des unités de con-sultation spécialisées mais aussi celui d’un centre de res-sources. Trop peu d’équipes ont permis l’ouverture d’unitésde consultation spécialisées dans le diagnostic de trou-bles d’apprentissage et en général uniquement sur initiativepersonnelle. Il faut favoriser ce type d’initiative.

l Encourager des équipes de recherche à développer denouveaux outils diagnostiques plus fins et valider des trai-tements de remédiation pour une meilleure compréhen-sion des troubles.

l Informer et former le corps médical, les paramédicaux etle corps enseignant tant au niveau de l’Éducation natio-nale qu’au niveau de l’action sociale (tous devraient bé-néficier d’une formation continue obligatoire). C’est là qu’uncentre de ressources trouve sa place. Il met à la disposi-tion des professionnels une bibliothèque de données écrites,audiovisuelles et informatiques permettant d’accéder entemps réél au maximum de connaissances sur les trou-bles d’apprentissage chez l’enfant ainsi que des program-mes d’assistance éducative informatisés. Il peut ainsi per-mettre d’établir un diagnostic, de favoriser l’enseignementet de guider une rééducation et ceci, à distance.

l Développer la coordination entre les différentes équipes,notamment entre le médecin traitant, le service de mé-decine scolaire et les équipes spécialisées chargées dela prise en charge.

l Traiter le trouble en favorisant :l l’adoption des grandes lignes de la proposition de loi

n° 1044 tendant à la reconnaissance et à la préven-tion des diffcultés spécifiques d’apprentissage, dépo-sée à l’Assemblée nationale en 1987. Un groupe dedéputés demandait que soit instauré un dépistage pourdéceler l’existence de facteurs de risque dès la mater-nelle, au cours du primaire, en secondaire, et que soientprises des mesures de soutien pédagogique adaptées,personnalisées pour les dyslexiques après établisse-ment d’un diagnostic précis par un médecin compétentet conduisant à l’élaboration pluridisciplinaire d’un trai-

tement rééducatif en cohérence avec l’enseignementdispensé en milieu scolaire. Ces députés préconisaientune formation continue des maîtres sur les difficultésspécifiques d’apprentissage ainsi que l’étude de tech-niques pédagogiques adaptées, un cadre spécifique d’ap-préciation du niveau des élèves affectés, un allonge-ment de la limite d’âge pour certains examens, unallongement du temps de composition d’un tiers selonles dispositions en vigueur pour les candidats handi-capés physiques, moteurs ou sensoriels ;

l l’application des dispositions des nombreuses circulairesayant trait à l’intégration scolaire des enfants handicapés ;

l le développement, pour les troubles les plus sévères,d’unités pédagogiques rééducatives, véritables classesoù un enseignement spécifique est dispensé conjoin-tement à une rééducation appropriée. Ces unités pour-raient fonctionner en réseaux cliniques et de recherche,se connectant à une banque centrale de données ausein d’un centre de ressources et permettant ainsi l’éva-luation des thérapeutiques sur une grande échelle ;

l l’intégration au sein de l’Éducation nationale de profes-sionnels de santé formés à ces troubles (psychologues,psychomotriciens, orthophonistes) ;

l le développement du préceptorat et d’une prise en chargeindividualisée de l’enfant dans le cadre d’un contrat adap-tation à l’intégration scolaire (AIS), tout en ne négligeantpas l’apport des nouvelles technologies comme sup-port d’accès au savoir ;

l l’accès à une prise en charge psychomotrice pour toutenfant qui en nécessite, par le biais de l’établissementd’une nomenclature des actes, donnant lieu à un rem-boursement des actes en libéral au même titre que lesautres professions de rééducation. LVD

Un dépistage et un diagnostic accessibles, une orientation correcte ac-compagnée d’une évaluation régulière du traitement prescrit, permet-traient de réaliser de larges économies en diminuant :l le coût enduré par les familles à la recherche de méthodes « miracles »,l le coût du temps perdu par les acteurs de l’Éducation nationale à tenterde rééduquer ces enfants,l le coût supporté par la société par le maintien de tels enfants en structuresscolaires « normales » avec les redoublements et orientations inadap-tées (Rased, Clis) : rappelons qu’en 1987, 25 milliards par an étaientconsacrés au seul redoublement et 8 milliards de francs correspondaientau surcoût entraîné par les prolongations de scolarité et l’ensemble desformations.l le coût supporté par la société lors de prises en charge médicalescoûteuses et inefficaces : orientation vers des structures médico-psycho-logiques ou médico-psychopédagogiques (de 521 à 1 148 francs parjour, selon les données d’Infodas, n° 60, mars 1997).l le coût des conséquences : par référence aux études des pays étrangers,la majorité de ces populations est absente du système économique avecun taux de chômage très élevé et de très longue durée.

42 adsp n° 26 mars 1999

Les troubles d’apprentissage chez l’enfant

Ces établissements sont composés d’équipes plu-ridisciplinaires regroupant psychiatres, psychologues,orthophonistes, psychomotriciens, éducateurs, ensei-gnants spécialisés, assistantes sociales etc. Leurs

Les troublesd’apprentissagedu langage écritde l’enfantintelligent sont denature etd’intensité trèsvariables. Lesréponsesthérapeutiquessont différentessuivant leurimportance. Faceà des troublesglobalementclassables en« légers »,« moyens », et« sévères »,doivent existerdes réponseselles-mêmes plusou moins largeset intensivessuivant les cas.

Une expérience française

qu’au degré de gravité « moyen » sonthabituellement prises en charge dansla formule ambulatoire. Mais, à partird’un certain degré de complexité et/oude gravité de ces troubles, une struc-ture institutionnelle spécialisée dans larééducation intensive et pluridisciplinairepeut apparaître tout à fait indiquée etpréférable.C’est pour répondre à cette catégoriede troubles et d’enjeux majeurs qu’existeun type de structure peu connu, et mal-heureusement en nombre très limité enFrance. Il s’agit de la catégorie desMaisons d’enfants à caractère sanitairespécialisé (MCSS), établissementsmédicaux* du secteur « soins de réa-daptation », offrant en intégration l’en-semble des prestations, prises en chargerééducatives multiples et scolarisationsadaptées correspondant à ce type d’en-fants.Un exemple en est représenté par laMCSS « Les Lavandes » (Association loi1901), à Orpierre (Hautes-Alpes), quiaccueille depuis plus de 20 ans, en in-ternat hebdomadaire, des enfants d’in-telligence normale en grande difficultéd’apprentissage du langage écrit, adres-sés par différentes consultations spé-cialisées des CHU de Paris et Marseille.

Des spécificités inhérentes à uncadre institutionnel spécialiséUne institution type MCSS est conçuepour présenter un certain nombre despécificités :l d’une part, disposer effectivement detoutes les prises en charge nécessai-res, et plus seulement de l’une ou l’autred’entre elles. En effet, l’un des problè-mes fréquemment posés par l’ambula-toire face aux cas sévères est qu’il estsouvent impossible de bénéficier de l’en-

semble des disciplines dont la conjonc-tion permettrait une meilleure remé-diation : ainsi des rééducateurs tels quepsychomotricien, neuropsychologue,psychologue cogniticien sont souventbien plus difficiles à trouver que l’ortho-phoniste, ou sont même carrément ab-sents.l d’autre part, pratiquer une fréquencedes séances (7 à 9 par semaine sui-vant les cas) qui soit en rapport avecles nécessités de remédiation, par dif-férence avec la prise en charge ambu-latoire où souvent deux séances par se-maine vont représenter un maximumpossible concrètement. Dans l’institu-tion spécialisée, la présence quotidienneaussi bien des intervenants que des en-fants sur le même lieu permet une or-ganisation harmonieuse entre la fré-quence optimale souhaitable desrééducations nécessaires, et les con-traintes horaires de la scolarité oud’autres domaines de la vie de l’enfant.l également, travailler dans une réellepluridisciplinarité, seul moyen d’assu-rer une démarche globale et une cohé-rence permanente autour de l’enfanttraité. Ce mode de travail est rendu pos-sible par la concentration en unité delieu et de temps de l’ensemble des équi-pes éducatives, rééducatives, et péda-gogiques. Les temps et structures deconcertation sont inclus dans le fonc-tionnement interne institutionnel.l assurer aussi à l’enfant, par son in-sertion temporaire en milieu nouveauet spécialisé, un certain nombre d’ap-ports psychologiques et éducatifs denature à aider puissamment à sa reprisede dynamique fondamentale dans legrandir, et l’acquérir. En effet, la trèsgrande majorité de ces enfants vientd’années marquées par l’échec, l’an-goisse, la culpabilité, vécus renforcésau sein de la cellule familiale par

* Catégorie d’établisse-ments régie par les

annexes XIV du décretgénéral de 1956, sous

tutelle administrative etbudgétaire de l’agencerégionale de l’hospitali-sation, conventionnée

avec les Caisses régio-nales d’assurance

maladie

objectifs sont « d’assurer une prise en charge globale,cohérente et convergente, pour mettre en œuvre tousles moyens pédagogiques, éducatifs et thérapeutiquescontribuant à l’épanouissement, l’autonomie socialeet professionnelle, la réalisation de toutes les poten-tialités (intellectuelles, affectives, corporelles), l’inté-

Philippe RouxDirecteur du centremédical et scolaire

spécialisé « LesLavandes », Orpierre

B eaucoup de dyslexies, dysortho-graphies, ou dyscalculies jus-

suite de la page 30

l’arrivée, avec l’âge, d’échéancesexcluantes. Plongés dans un contexteneuf de compréhension, de bien-veillance, de prises en charge globalede leur handicap et de recherche de leur« autre valeur » personnelle que celled’écolier marginalisé, ils peuvent béné-ficier de l’apport psycho-éducatif impor-tant indispensable à la réussite de toutprojet rééducatif. De l’expérience sur en-viron un millier d’enfants accueillis aux« Lavandes », se dégage nettement pourun enfant en long échec antérieur lebienfait psycho-dynamique du fait dese retrouver avec des « pairs » ayant lesmêmes difficultés que lui. À ce titre, etaussi parce que les séjours sont tou-jours en « contrat » temporaire, on estassez loin de vécus de « ghetto ». Lesenfants « soufflent » réellement avantde reprendre des forces et de faire desprogrès. Leur témoignage est que leghetto réel est plutôt celui d’avoir étémarginalisé pendant des années commele « mauvais en tout » dès qu’il y a lan-gage écrit : celui qui est inférieur auxautres, constamment dévalorisé par rap-port à ses camarades comme par rap-port à sa famille…l enfin, rendre possible le déroulementde l’ensemble des prises en charge touten conservant à l’enfant un minimumde « vie personnelle », de façon à ce quele temps à consacrer aux nécessités dudéveloppement personnel ne soit pas« dévoré » par le temps cumulé des réé-ducations et autres actions. En ambu-latoire, dans les cas de troubles impor-tants, il peut être très difficile (ouimpossible) pour un enfant de cumu-ler ces prises en charge, consommatricesnon seulement du temps des séancesen surcharge, mais aussi de temps pé-riphérique d’accès : déplacements, at-tentes, etc. sans compter les difficul-tés pour beaucoup de parents à passer

adsp n° 26 mars 1999 43

La prise en charge

L’annexe XXIV concerne les établissements et ser-vices prenant en charge les enfants et adolescentsprésentant des déficiences intellectuelles ou inadap-tés éventuellement avec troubles associés : troublesde la personnalité, troubles comitiaux, troubles moteurset sensoriels, troubles graves de la communication,maladies chroniques compatibles avec une vie collec-tive. Sont aussi concernés par cette annexe les enfantset adolescents aux capacités intellectuelles normalesou subnormales mais qui présentent des troubles ducomportement et qui relèvent alors des instituts derééducation.

L’annexe XXIV bis concerne les établissements etservices prenant en charge les enfants et adolescentsprésentant une déficience motrice congénitale ou acquise.

L’annexe XXIV ter concerne les établissements etservices prenant en charge les enfants et adolescentspolyhandicapés, présentant un handicap grave à expres-sion multiple associant déficience motrice et déficiencementale sévère ou profonde.

L’annexe XXIV quater concerne les établissementset services prenant en charge les enfants et adoles-cents présentant une déficience auditive grave.

L’annexe XXIV quinquiès concerne les établissementset services prenant en charge les enfants et adoles-cents présentant une déficience visuelle grave ou unecécité.

Les CAMSP (centre d’action médico-sociale précoce)et les CMPP (centres médico- psycho-pédagogiques) sontdes structures de dépistage et de soins ambulatoirespour enfants inadaptés et handicapés. Les CAMSP crééspar l’annexe XXXII bis du décret n° 76-389 du 15 avril1976, ont pour objet le dépistage, en cure ambulatoireet le traitement des enfants de 0 à 6 ans présentantdes déficits sensoriels, moteurs ou mentaux. Ils sontsouvent rattachés aux CMPP, qui continuent la priseen charge des enfants après 6 ans jusqu’à 20 ans, etils peuvent fonctionner dans les mêmes locaux.

Le CMPP a des conditions techniques d’agrément etde fonctionnement définies par l’annexe XXXII du dé-cret n° 56-284 du 9 mai 1956 ajoutée par décretn° 63-146 du 18 février 1963. Il a pour rôle le diagnosticet le traitement, en cure ambulatoire ou à domicile, desenfants et adolescents dont l’inadaptation est liée àdes troubles psychologiques, des troubles du compor-tement, du langage et autres susceptibles d’une thé-rapeutique médicale, d’une rééducation médico-psycho-logique ou d’une rééducation psychothérapique oupsycho-pédagogique sous autorité médicale. L’objec-tif est de permettre une adaptation de l’enfant à sonmilieu familial, scolaire ou professionnel et social enl’y maintenant. Mais, il y a d’importants délais d’attentepour une prise en charge dans un CMPP, et certainsparents entreprennent avec difficulté une telle démar-che pour des troubles d’apprentissage scolaires iso-lés. Les décisions de prise en charge en CMPP relè-vent des avis émis par les médecins conseils au niveaudes centres de sécurité sociale concernés.

gration dans la vie active…» Les conditions techniquesd’agrément et de fonctionnement de ces établissementset services sont actuellement régies par les annexesXXIV, XXIV bis, XXIV ter, XXIV quater et XXIV quinquièsdu décret du 9 mars 1956 modifié par le décret du27 octobre 1989 et la circulaire du 30 octobre 1989.

autant de temps à accompagner et/ouattendre leur enfant aux différents lieuxde rééducations…

Des résultats encourageantsÀ l’issue de leur prise en charge auxLavandes, les enfants présentent uneréduction moyenne des troubles de53 %. La majorité d’entre euxréintègreront le cursus scolaire ou d’ap-prentissage normal.Pour avoir les meilleures chances d’ef-ficacité d’un séjour rééducatif, un cer-tain nombre de conditions doivent êtreréunies, à la fois sur le plan des prin-cipes et sur le plan des pratiques. L’actede décider d’avoir recours à une solu-tion temporaire en centre spécialisé estune nouvelle page importante qui ap-porte beaucoup de changements dansla vie de l’enfant et de sa famille, et quid’autre part s’inscrit dans le cadre desoins financés par la collectivité. Il estdonc intéressant de connaître les pointsqui favorisent ou compromettent les ré-sultats attendus. On peut résumer lesconditions de réussite par la nécessité :l d’un diagnostic différentiel rigoureux(bilans et examens pluri-disciplinairespar consultation spécialisée) ;l d’un état psychologique, comporte-mental, et motivationnel de l’enfant quisoit minimalement compatible avec ladisponibilité mentale et l’investissementindispensables pour un projet rééducatifsoutenu ;l d’un accompagnement parental actif,à partir d’un travail de réassurance etde mobilisation positive des parents ;l d’une prise en compte du travail deséquipes extérieures aval/amont, dansune perspective de continuité et decohérence ;l d’une préparation attentive du séjouren lui-même, et de ses suites.

44 adsp n° 26 mars 1999

Les troubles d’apprentissage chez l’enfant

structuration déviante, lente et dysharmonieuse du lan-gage, ainsi que des difficultés de manipulation du codeentraînant des altérations durables dans l’organisationdu langage à différents niveaux : phonologique, lexical,syntaxique, sémantique et pragmatique, sans qu’il sembleexister à l’origine de causes apparentes. Il s’agit d’untrouble grave mettant l’enfant dysphasique en difficultéà la fois sur le plan familial, scolaire et social bien avantl’âge de 6 ans.La difficulté de l’orientation des enfants dysphasiquespar la CDES est double. D’une part, la reconnaissancede la dysphasie en tant que handicap « principal » n’ap-paraît pas toujours dans les dossiers adressés à la CDES.D’autre part, les capacités de la prise en charge spéci-fique des enfants dysphasiques en France n’est pas ho-mogène. Ceci est lié au problème diagnostique de ladysphasie (définitions, classifications, déficiences as-sociées).Plusieurs définitions ont été proposées, ce qui montrebien la difficulté de cerner la dysphasie [17]. Pour cer-tains, il s’agirait d’un diagnostic d’élimination. Toutefois,on peut s’appuyer sur la définition suivante : l’existenced’un déficit durable des performances verbales, signi-ficatif au regard des normes établies pour l’âge. Cettecondition n’est pas liée à un déficit auditif, à une mal-formation des organes phonatoires, à une insuffisanceintellectuelle, à une lésion cérébrale acquise au coursde l’enfance, à un trouble envahissant du développe-ment, à une carence grave affective ou éducative [13].Il faut différencier la dysphasie des retards de langageen raison de son retentissement majeur sur l’appren-tissage et la socialisation.La classification des syndromes dysphasiques est com-plexe, essentiellement fondée sur des modèles neuro-psychologiques [13]. On distingue : le syndromephonologique-syntaxique (trouble de la jonction formu-lation-programmation), la dysphasie kinesthésique af-férente (trouble au niveau du contrôle phonologique),la dysphasie réceptive (trouble du décodage), la dysphasiemnésique (trouble du contrôle sémantique), la dysphasiesémantique-pragmatique (trouble de la formulation).La définition de la dysphasie n’exclut pas l’existence d’unedéficience associée, rendant le diagnostic plus difficileencore. Il faut insister sur la fréquence des troubles psy-chiques présents chez ces enfants, pouvant aller jus-qu’à la psychose, secondaires aux troubles précoces etprofonds de la communication. Il en est de même dela déficience intellectuelle qui peut être en rapport avecle défaut d’apprentissage ou le manque d’intérêt du faitde l’incommunicabilité. Dans ce cas, bien que le résultatglobal du quotient intellectuel puisse se situer dans lazone de la déficience, l’étude approfondie du QI mon-

Marie-FlorenceBaille

Médecin à laCDES de la

Haute-Garonne

CDES et prise en charge de l’enfant dysphasique

La commissiondépartementalede l’éducationspéciale (CDES)a pour rôled’orienter lesenfants déficientsvers desstructures deprise en chargemédico-éducativesadaptées auhandicap del’enfant.

trera un niveau normal des performances avec un ef-fondrement de la partie verbale. Ainsi, ces déficiencespeuvent passer au premier plan et faire proposer uneprise en charge autre que celle de la dysphasie.L’enfant dysphasique ne pouvant accéder à l’apprentis-sage éducatif et scolaire basé sur l’oralisme (lecture, écriture,calcul), il a été proposé d’utiliser des techniques augmen-tatives (langage parlé complété, méthodes des jetons…),voire alternatives (langue des signes, pictogrammes…)comme support et complément au langage oral. Ainsi parexemple, dans un premier temps, l’enfant apprend un signe,puis dans un deuxième temps il associe le signe au mot.Lorsqu’il possède bien le mot et sa signification, il va aban-donner le geste de lui-même [13]. L’apprentissage d’uneméthode alternative permet également à l’enfant d’ac-céder plus vite et plus facilement à la communication età la socialisation, avec parallèlement une améliorationdes troubles du comportement.Cette prise en charge spécifique est assurée en Haute-Garonne, depuis trois à quatre ans, par des établisse-ments pour enfants déficients auditifs avec une intégrationscolaire en milieu ordinaire lorsqu’elle est possible. C’està ce niveau que la CDES peut intervenir lorsqu’une de-mande d’orientation en milieu spécialisé lui est adres-sée.Voici un exemple qui illustre les difficultés de diagnos-tic et de prise en charge de l’enfant dysphasique. Mi-chel a 9 ans lorsque l’hôpital de jour de psychiatrie infanto-juvénile qui le prenait en charge adresse à la CDES undossier d’orientation vers un établissement du secteurmédico-éducatif. Le diagnostic évoqué est celui d’unedysphasie. Michel est entré à l’hôpital de jour à l’âgede 4 ans pour mutisme et troubles du comportementévoquant une psychose (il pouvait se mutiler lorsqu’onne le comprenait pas), rendant impossible la poursuitede la scolarité en classe maternelle. Les soins mis enplace ont permis une amélioration des troubles psycho-tiques, permettant une scolarisation partielle, la dysphasiedevenant alors la déficience principale. Le bilan a confirméla dysphasie de type phonologique-syntaxique. Michela été admis dans un centre où il bénéficie d’un appren-tissage gestuel et oral. Très vite, on a pu noter une amé-lioration du comportement, un important désir de con-naissance et un grand plaisir à communiquer, les gestesvenant suppléer les mots manquants.Ceci pose le problème du dépistage précoce de ladysphasie chez l’enfant afin de ne pas laisser s’instal-ler les troubles secondaires psychologiques et intellectuels,de la reconnaissance de la prise en charge actuelle as-surée le plus souvent par des centres pour enfants dé-ficients auditifs, ainsi que la question de la prise en chargeconjointe entre deux structures en cas de trouble graveassocié.

L a dysphasie correspond à un trouble dévelop-pemental grave du langage se manifestant par une

adsp n° 26 mars 1999 45

Les troubles d’apprentissage chez l’enfant

Anne TurszPédiatre, épidémiologiste,

directeur de recherche,Inserm U502, Paris

FrançoiseConte-Grégoire

Médecin de l’Éducationnationale, centre médico-

scolaire de Floirac, GirondeFrançoise Fassio

Médecin, directeur duservice de protection

maternelle et infantile,Conseil général de l’Hérault,

MontpellierYves Lehingue

Pédiatre, épidémiologiste,ingénieur de recherche

Inserm, service de biostatis-tiques, Hospices civils de

LyonMarie-Claude Romano

Médecin, conseiller techni-que du directeur de l’ensei-gnement scolaire, ministère

de l’Éducation nationaleMichel Zorman

Médecin de santé publique,conseiller technique auprès

du recteur, laboratoire cogni-sciences et apprentissages

IUFM, Académie de Grenoble

Ce n’est pas à l’école que

l’on peut poser un diagnostic

fin du trouble

d’apprentissage, mais ce

n’est qu’à l’école que l’on

peut, sur l’ensemble de la

population scolarisée,

effectuer un dépistage et

préconiser une orientation

des enfants suspectibles de

présenter de tels troubles,

vers des professionnels

spécialisés. C’est pourquoi un

tel dépistage doit être réalisé

le plus tôt possible à l’aide

d’outils performants et par

des professionnels formés.

jeunes enfants, d’autant que le recueil obligatoire dedonnées sanitaires pour les certificats de santé s’ar-rête après le 24e mois. Actuellement, dès l’âge de 3 ans,99 % des enfants sont scolarisés [11]. Du fait de cettescolarisation précoce, du fait aussi d’exigences sco-laires sans cesse grandissantes, l’école est souventle premier lieu où sont détectés des troubles du com-portement et se révèlent des troubles des apprentis-sages. Le rôle du service de la promotion de la santéen faveur des élèves est donc essentiel, d’autant quele médecin de l’Éducation nationale est considéré commeun référent auprès de nombreuses instances, notam-ment la commission départementale de l’éducationspéciale (CDES), auprès de laquelle il exerce un rôlede conseil dans ses prises de décision concernant lesélèves présentant des inadaptations. C’est dire l’im-portance du bilan de santé obligatoire de la sixième année[1] qui vise à dépister les troubles physiques, psycho-logiques et sociaux qui pourraient entraver la bonneintégration scolaire d’un enfant. La nécessité des dé-pistages précoces a été récemment rappelée par le HautComité de la santé publique (HCSP) dans son rapportà la Conférence nationale de santé 1997 et au Parle-ment [14]. Le HCSP évoque le bilan de 6 ans, mais aussiceux effectués à un âge plus précoce, ceci étant d’autantplus justifié que, bien souvent, on retrouve, durant lasixième année, des anomalies ayant des taux deprévalence identiques à ceux observés lors d’examenspratiqués à l’âge de 3 ou 4 ans [22]. Les bilans de santéeffectués par la PMI en école maternelle seront doncégalement abordés ici.

Qu’il s’agisse des données émanant de l’Éducation

L’ école est le seul lieu, en France, dans lequelon puisse avoir accès à l’ensemble de la popu-lation enfantine et évaluer l’état de santé des

Le dépistage enpopulation générale

46 adsp n° 26 mars 1999

Les troubles d’apprentissage chez l’enfant

nationale ou de celles de la PMI, il n’existe aucune pu-blication au niveau national, la production de rapportsd’études ou d’articles scientifiques ne relevant finalementque de l’intérêt particulier pour la santé du jeune en-fant de tel ou tel médecin ou autre professionnel con-cerné. Il n’existe pas non plus de systématisation, d’unlieu à un autre, des outils employés pour le dépistageet des modalités de présentation des résultats.

On exposera donc ici une synthèse de plusieurs études,études qui ont le double mérite de proposer des don-nées récentes et de provenir de plusieurs régions fran-çaises assez contrastées. Les sources sont les suivan-tes : le rapport d’activité du service médical de promotionde la santé en faveur des élèves, établi pour les an-nées 1996-1997 et 1997-1998 par le médecin con-seiller auprès du recteur de l’Académie de Créteil (aca-démie couvrant les trois départements de Seine-et-Marne,Seine-Saint-Denis et Val-de-Marne, soit environ 475 000élèves d’écoles maternelles et élémentaires) ; une étudemenée en 1996-1997 et 1997-1998 sur les problèmesde santé chez 195 enfants de grande section de ma-ternelle dans trois écoles d’une zone d’éducation prio-ritaire (Zep) de Floirac en Gironde ; les résultats de deuxenquêtes menées à cinq ans d’intervalle (1987-1988et 1992-1993) sur la santé d’environ 1 500 enfantsâgés de 4-5 ans, examinés par la PMI dans des éco-les maternelles du département de l’Hérault ; enfin lesrésultats du suivi sur trois ans (de la grande sectionde maternelle au CE1) d’une cohorte de plus de 2 200élèves, identifiés dans 118 classes des cinq départe-ments de l’Académie de Grenoble.

Les outils

Le bilan de la sixième annéeIl doit obligatoirement s’effectuer en présence desparents et ne demande aucune participation financièrede leur part. Les résultats doivent être consignés dansle carnet de santé. Ce bilan comporte un entretien avecla famille, un examen clinique de l’enfant, un dépistagesensoriel (vision, audition), une étude du langage, unexamen de la psychomotricité (orientation temporo-spatiale, latéralisation, schéma corporel, motricité glo-bale, motricité fine, graphisme), un bilan du compor-tement.

Les outils employés pour les dépistages sensorielssont généralement validés et standardisés, mais va-rient éventuellement selon les lieux. Le problème estplus complexe encore pour les grilles d’analyse dulangage (les épreuves étalonnées en français étant rares).Notons, par exemple, que, dans l’étude menée en 1992-1993 dans l’Hérault et dans le suivi de cohorte de l’Aca-démie de Grenoble, l’étude du langage a été particu-lièrement développée ainsi que des outils très détailléset précis qui, néanmoins, ne sont pas les mêmes.

Des améliorations par rapport au contenu classiquedu bilan sont éventuellement apportées. Ainsi dans l’Aca-démie de Grenoble, il a été décidé de confier une par-

tie du bilan à l’enseignant, afin d’alléger le bilan mé-dical lui-même, mais aussi d’utiliser au mieux les com-pétences de l’enseignant. Celui-ci, en « situation declasse », peut observer l’enfant. Le bilan a donc étédécoupé en deux parties, la première consistant en uneobservation, par l’enseignant, du langage (discoursspontané) et de la perception visuelle, un documentstandardisé ayant été mis au point dans ce but.

Le bilan est suivi d’avis aux familles en cas de dé-tection d’une anomalie. Si la famille a reçu le conseilde consulter un spécialiste, on cherche à savoir cequi a été fait et à calculer le pourcentage d’avis sui-vis d’effet. Ce point est important pour l’enfant biensûr, mais aussi pour l’équipe médicale, qui peut ainsiprendre connaissance de la confirmation ou non del’anomalie dépistée et donc évaluer le pouvoir prédictifdu dépistage.

Si le bilan de six ans est obligatoire, il n’est pas pourautant pratiqué de façon exhaustive. Ainsi, dans l’Aca-démie de Créteil en 1996-1997, il n’a concerné que75 % des enfants de la tranche d’âge, avec de gran-des disparités selon les départements (83 % en Seine-et-Marne et 80 % en Seine-Saint-Denis, mais seulement59 % dans le Val-de-Marne). La situation était meilleureen 1997-1998, avec des pourcentages respectivementde 85 % pour l’ensemble de l’Académie et de 95 %,85 % et 75 % pour les trois départements. En mater-nelle également, il peut être difficile pour la PMI d’ob-tenir l’exhaustivité ; ainsi dans l’Hérault le taux decouverture n’était que de 50 % avant 1987-1988.

Les bilans pratiqués en école maternelleActuellement, la PMI effectue des bilans dans les éco-les maternelles de 80 % des départements français en-viron. Leur contenu et leurs procédures sont variables.Dans le département de l’Hérault, la faible couverture,constatée lorsque le bilan se voulait à la fois completet systématique, a poussé les responsables à modifierleurs procédures. Depuis 1987-1988, tous les enfantsde 4 ans font l’objet d’un bilan sensoriel. À celui-ci vients’ajouter un bilan complet effectué en présence desparents, si l’enfant a été identifié comme en difficulté.Ce repérage des enfants en difficulté se fait grâce à unentretien avec les enseignants au sujet de tous les enfants.Par ailleurs des enquêtes épidémiologiques sont prati-quées à intervalle régulier. Les résultats des enquêtesde 1987-1998 et 1992-1993 seront présentés ici.

L’enrichissement du bilan standard par des éléments derechercheDans l’Hérault, deux enquêtes épidémiologiques ontdonc été menées sur des échantillons représentatifsd’environ 1 500 élèves d’écoles maternelles, âgés de4-5 ans, par une technique de sondage en grappe, en1987-1988 et 1992-1993. Lors de la deuxième enquête,ont été inclus une rencontre préalable avec l’enfant,visant notamment à évaluer son langage spontané dansune atmosphère plus propice à lever les inhibitions que

adsp n° 26 mars 1999 47

Le dépistage en population générale

programme financé par le contrat dedéveloppement urbain est mené de-puis plus de trois ans par l’inspectiond’académie, l’assurance maladie etla Ddass.Un des objectifs de ce programme delutte contre l’échec scolaire est de fa-voriser l’accès aux soins des enfantsrepérés porteurs de troubles du langage.

Descriptif du dispositifLorsque qu’un trouble du langage estrepéré lors du bilan systématiqueeffectué par la santé scolaire (en courspréparatoire à Beauvais, en grandesection de maternelle à Creil) la fa-mille en est avisée. Celle-ci est sys-tématiquement orientée vers un pro-fessionnel de santé. Grâce àl’instauration d’un système d’informa-tion spécifique, il est possible devérifier si cette orientation a donné lieu,ou non, à un recours aux soins. En casde non-recours, un « accompagnant-santé » intervient auprès de la famille,procède avec elle à une analyse dela situation et lui propose selon le cas

Un problème de santé publique, une réalité de terrain !

une aide financière et/ou administra-tive, ou une aide à la démarche desoins.Une démarche rigoureuse d’évaluationdes procédures et des résultats apermis d’affiner ce dispositif. Les pre-miers résultats sont tout à fait encou-rageants. L’impact positif sur la mo-bilisation des familles, des équipesmédico-pédagogiques de l’Éducationnationale et des professionnels desoins améliore effectivement, d’annéeen année, l’accès aux soins de cesenfants.

Impacts du programmeAu vu de ces résultats, les ministèresde l’Éducation nationale et de la Santéont décidé d’officialiser et d’étendreà la Seine-Saint-Denis ce programme.La validation et la réalisation d’unprotocole dans l’Oise et son extensiondans la Seine-Saint-Denis devraientpermettre la mise en place de ce dis-positif sur tout le territoire national.Dans le même élan, les services dé-partementaux de PMI ont décidé d’in-tégrer le dispositif. Cette intégrationest effective depuis la rentrée 1998-

1999 et permet de réduire le délaientre le repérage du trouble enmoyenne section maternelle et l’ac-cès aux soins.Cette action est désormais intégréedans le programme régional de santé« santé des jeunes » et devrait l’êtredans le programme régional d’accèsà la prévention et aux soins.

PerspectivesL’implication plus active des profes-sionnels de soins sera recherchée.La mobilisation de l’ensemble despartenaires et des familles sur l’im-portance d’une prise en charge pré-coce et d’un suivi régulier s’effectuerapar des actions d’éducation et de pro-motion de la santé beaucoup plus ci-blées.Il restera ensuite à affiner et harmo-niser les méthodes de dépistage maisaussi à évaluer la pertinence de la priseen charge et son impact sur l’échecscolaire. Mais cela est une autre his-toire… qu’il faudra cependant abor-der.

Enfants dépistés durant l’année scolaire 1997-1998. Résultats au 1er janvier 1999

Beauvais Creil(n=482) (n=682)

Prévalence des troubles du langage 16 % 18 %Enfants ayant un trouble et en cours de soins au moment du repérage 47 % 44 %Accès aux soins réalisés grâce à la santé scolaire 32 % 54 %Accès aux soins réalisés suite à l’intervention de l’accompagnant-santé 29 % 24 %Total d’enfants ayant un trouble et ayant accédé aux soins grâce au dispositif 61 % 78 %

le bilan lui-même, et un entretien préalable avec l’en-seignant, portant notamment sur les problèmes éven-tuels de comportement.

À Grenoble, est menée actuellement une étude decohorte, à partir de grandes sections de maternelle,portant sur la conscience phonologique et sur son rôledans l’apprentissage de la lecture. Il s’agit donc d’unvéritable travail de recherche, mené en association avecun laboratoire de psychologie expérimentale du CNRSà l’Université Pierre Mendès France. On évalue les progrèsréalisés entre deux tests par des groupes d’enfants,soumis ou non à un entraînement. Les épreuves des

tests comportent des reconnaissances de rimes, desconsonnes et des syllabes à nommer ; on analyse aussila connaissance des lettres et de l’alphabet ainsi quela compréhension du langage oral et la richesse duvocabulaire. Un outil pour le bilan de la 6e année, cen-tré sur l’évaluation des « habiletés » nécessaires auxapprentissages, est en cours de mise au point (étalon-nage, sensibilité, spécificité, reproductibilité, prédictibi-lité).

Ces activités de recherche permettent d’obtenir desinformations très détaillées dans des domaines cléspour l’apprentissage.

D ans les agglomérations deBeauvais et de Creil (Oise), un

ConsciencephonologiqueAptitude à percevoir et sereprésenter les unités desegmentation nonsignifiantes de la langueorale, telles que lessyllabes, les rimes, lesphonèmes.

Dr Frédéric TissotMédecin inspecteurde santé publique,

Ddass de l’Oise

48 adsp n° 26 mars 1999

Les troubles d’apprentissage chez l’enfant

Les examens à la demandeIl peuvent être réalisés à la demande de la famille, del’élève lui-même, du médecin, de l’infirmière, de l’as-sistante sociale ou de tout membre de l’équipe édu-cative [11]. Au niveau de l’enseignement élémentaire,ces demandes sont le plus souvent formulées pourdifficultés scolaires, troubles du comportement, problè-mes sociaux, suspicion de maltraitance ou intégrationpour maladie ou handicap. Ces examens peuvent con-tribuer, dans certains cas, à la constitution d’un dos-sier destiné à être soumis à la CDES.

Ces examens sont suivis d’avis aux familles ; là encoreon évalue le pourcentage d’avis suivis d’effet.

Les données épidémiologiquesOn s’intéressera plus particulièrement ici aux troublesdu langage et à ceux de la motricité. En effet on nerapportera pas l’ensemble des résultats issus de cesbilans et examens, et on ne décrira notamment pas lesdonnées relatives aux pathologies somatiques et auxdéficiences sensorielles. Toutefois, du fait de la grandefréquence des associations entre les divers types detroubles (des apprentissages, somatiques, sensoriels,psychologiques), on sera amené à décrire certaines deces associations et, notamment, à évoquer les trou-bles du comportement, très souvent associés aux dif-ficultés scolaires. Les termes employés ici (troubles dulangage, de la motricité) sont généraux et les catégo-ries, larges ; on est assez loin, du fait des conditionsd’un dépistage de masse, par comparaison avec l’exa-men neuropédiatrique pratiqué par un spécialiste, dela nosologie fine exposée dans le chapitre d’introduc-tion et dans celui sur les définitions des divers trou-bles des apprentissages. Des écarts de chiffres entreces divers chapitres ne doivent donc pas surprendre.

Les données issues des bilans de la sixième annéeEn 1997-1998, dans l’Académie de Créteil, on a constatéque 7 % des enfants présentaient des troubles ou desretards du langage et 6 % des anomalies motrices etdu comportement. Ces chiffres sont largement inférieursà ceux observés dans la Zep de Floirac. Ceci peut no-tamment être lié, d’une part aux problèmes de taux decouverture préalablement signalés à Créteil, et d’autrepart à la définition même des Zep, qui ont été crééesdans le but de renforcer l’action éducative dans les zoneset milieux sociaux où le taux d’échec scolaire était leplus élevé. À Floirac, lors du bilan de six ans on a dé-pisté 20 % de troubles du langage, 24 % de troublespsychomoteurs et 25 % de troubles du comportement.Parmi les enfants présentant des difficultés scolaires(difficultés d’expression, troubles du graphisme, fac-teurs de risque de dyslexie, mauvais résultats lors desévaluations), seuls 0,6 % ne présentaient pas de pro-blème de santé associé. Ce sont les troubles du com-portement qui sont apparus le plus souvent associésà des pathologies somatiques, suivis des problèmesde graphisme, des troubles de l’orientation spatiale et

de la latéralité, et enfin des troubles du langage. Il n’apas toujours été aisé de déterminer si les troubles ducomportement engendrent les difficultés scolaires ousi c’est le contraire. Les pourcentages très élevés quiviennent d’être cités ne sont pas retrouvés dans lesZep du Val-de-Marne. Dans ce département, en 1997-1998, les pourcentages de « retards psychomoteurs »étaient identiques en Zep et non-Zep (2 %), et la diffé-rence pour les troubles du langage, minime (7 % en Zep,

a été largement étudié et a donné lieuà l’établissement de nombreuses échel-les d’évaluation [23]. Il existe en Franceencore trop peu ou pas d’échelles dansles différents domaines du développe-ment du jeune enfant, qui ont une per-tinence fonctionnelle bien définie et quisoient prédictives du comportement ul-térieur, servant de base aussi bien àl’évaluation qu’à l’établissement du pro-jet thérapeutique. Au-delà de la petiteenfance, c’est-à-dire à l’âge préscolaire,il existe beaucoup d’évaluations encorenon standardisées, notamment dans lasphère neuromotrice, motrice (globaleet fine) et temporo-spatiale.Si ces méthodes d’évaluation étaientréalisées à cette période, il apparaîtraitde façon évidente qu’il n’existe pas depériode « silencieuse » de l’âge présco-laire, et on mettrait en évidence pources mêmes enfants à l’âge scolaire destroubles d’apprentissage ou de dysfonc-tionnements neuropsychologiques.Toute l’évaluation dans la petite enfancerepose aussi principalement sur la col-lecte des données de l’examen neuro-logique et des données de l’histoire pé-rinatale de l’enfant trop souvent ignorée.En ce qui concerne l’évaluation neuro-logique, celle-ci reste encore peu réa-lisée dans la période néonatale de l’en-fant qu’il soit prématuré ou à terme etdans ses premières années de vie. Cesméthodes d’évaluation ont été très biendécrites par les travaux d’Amiel-Tisonet de Grenier, dans les années quatre-vingt en France. Ces auteurs ont eu lemérite de remettre au goût du jour laneurologie du développement dans lalignée des bases de la neurologie fran-

Les troubles du bébé, prédictifs

LaurenceVaivre-Douret

L e développement psychomoteurdu nourrisson et du jeune enfant

Bien avant4 ans, uneétude finedu dévelop-pementpeutpermettrede dépisterles troublesfutursd’appren-tissages.

adsp n° 26 mars 1999 49

Le dépistage en population générale

4 % en non-Zep). Ces écarts de chiffres entre Zep dezones géographiques différentes peuvent être liés àd’éventuelles différences dans les critères de diagnosticet les outils de mesure.

Dans l’Académie de Créteil, en 1996-1997, 29 % desenfants (28 % en 1997-1998) ont été adressés enconsultation à l’issue du bilan (tous troubles confon-dus) et le pourcentage d’avis suivi d’effet est de 40 %.Il a encore diminué l’année scolaire suivante (33 %).

À Floirac, en ce qui concerne les troubles du langage,la politique générale a été une surveillance et unereconvocation l’année suivante, sauf en cas de trou-bles sévères, les enfants étant alors adressés à unorthophoniste. Lors du bilan, 42 % des enfants étaientporteurs de pathologies déjà connues de la famille, eton a estimé que le fait que, dans la moitié des cas,l’état sanitaire n’était pas amélioré malgré un diagnosticfait, était un indicateur de mauvais suivi.

çaise. On peut s’étonner que de telles éva-luations ne soient pas systématisées pourtout nouveau-né. En effet, elles sont le filconducteur de l’histoire périnatale de l’en-fant, mettant en évidence des anomaliesneuromotrices, dites transitoires de la pre-mière année de vie. Ces anomaliesneuromotrices peuvent avoir un retentis-sement direct sur l’acquisition d’une fonc-tion motrice. Par exemple, une hyperto-nie des muscles extenseurs de la nuqueva empêcher le contrôle de la tête avant4 mois de vie (le contrôle de la tête enmoyenne est acquis à 2 mois de vie, avecune dispersion jusqu’à 4 mois).L’enfant qui est porteur d’anomalies mo-dérées finira par accéder à ces différen-tes acquisitions psychomotrices dans leslimites de la normale ; par contre le pé-diatre ne pointera pas cela comme un vé-ritable dysfonctionnement, mais parleraplutôt de retard du développement. C’estainsi que l’on voit des enfants dans la pre-mière année de vie décrits comme présen-tant des retards de développement (sta-tion assise, station debout) et que lesmédecins laissent sans prise en chargesous le prétexte que « cela va se mettreen place ». Cependant, si l’enfant a dé-passé l’âge extrême d’acquisition de lamarche, au-delà notamment de 18 mois,et qu’il ne marche toujours pas vers 2 ans,cela va commencer à affoler le pédiatrequi finalement va réaliser des investiga-tions complémentaires. C’est ainsi que l’onva peut-être découvrir que l’enfant est in-firme moteur cérébral. Dans le cas où l’en-fant finit par marcher à un âge situé dansles limites de la normale ou un peu au-delà, le médecin aura parfois tendance àmettre en cause beaucoup plus le contextepsycho-affectif qu’un réel dysfonctionne-ment dû à des anomalies neuromotrices

des troubles à l’âge scolaire

(notamment au niveau du tonus de l’en-fant), que l’on aurait pu repérer dansla première année de vie de celui-ci.Ainsi, en fonction du degré de ces ano-malies, Amiel-Tison a établi une clas-sification à visée diagnostique et pro-nostique.À partir des travaux pionniers de Drillienen 1972 [9] et d’Amiel-Tison [2], il estclairement établi une corrélation entreanomalies transitoires et difficultés àl’âge scolaire. D’autres études longitu-dinales, même si elles restent rares, con-firment cette relation entre anomaliesneuromotrices et risque de troubles àl’âge scolaire, dont l’étude d’Amiel-Ti-son, Njiokiktjien, Vaivre-Douret et al.,1996, qui atteste d’une relation entresignes neuromoteurs et devenir neuro-psychologique à 4 ans. Il a été mis enévidence la valeur prédictive de signesneuromoteurs dépistés avant 18 moisde vie et retrouvés à l’âge de 3 à 5 ans,ces signes apparaissant comme desmarqueurs ou indicateurs neurodévelop-pementaux nécessaires au dépisage pré-coce. La prise en considération de l’in-térêt de cette évaluation neurologiquede la première année pour l’enfantpermettrait de trouver une explicationà certains de ces troubles qui arriventapparemment inopinément à l’âge sco-laire et de proposer une prise en chargeadaptée dans un but préventif et édu-catif afin d’éviter que ces enfants dé-vient fortement dans leurs dysfonction-nements.Bien souvent, lors des consultations pourdifficultés scolaires, il va être observédes troubles d’apprentissage dans lasphère du langage, de la cognition, dela sociabilité, mais rarement dans lasphère de la motricité, parce que cette

dernière reste peu évaluée. Pourtant, sile médecin recherche ces signesneuromoteurs et neuropsychomoteursà l’âge scolaire, des signes mineurs,révélateurs d’une infirmité motrice cé-rébrale a minima, pourront être iden-tifiés et sont significativement corrélablesavec l’existence des troubles d’appren-tissage.L’introduction de telles évaluations peri-et postnatales permettent de mieux com-prendre l’étiologie de ces dysfonction-nements neuropsychologiques à l’âgescolaire : cela évite de retrouver des en-fants encore sans diagnostic, ou avecdes diagnostics erronnés à des âges tar-difs (au-delà de 9 ans) et porteurs detroubles qu’on a attribués à des cau-ses uniquement psychogènes et doncde ne proposer à l’enfant qu’une priseen charge psychothérapique. Celle-ci nelui permettra malheureusement pasd’améliorer son problème de fond. À ceproblème de fond non pris en chargepeut se rajouter des problèmes psycho-affectifs à tous les niveaux : famille,école, etc., du fait même que cet en-fant n’a pas été compris (il apparaît dansnotre consultation que ces enfants com-prennent très rapidement qu’ils ont unproblème. Étant intelligents, ils vont toutfaire pour contourner le problème, si bienque certains vont dévier vers l’instabi-lité, ou tout autre trouble du compor-tement). D’autre part une stratégie adap-tée permettra d’introduire des actionsde prévention ou de prise en chargeadéquate empêchant l’enfant de dévier.Étant donné les connaissances actuellessur la plasticité cérébrale, on pourraitainsi minimiser un coût économique deprise en charge rééducative souvent mul-tiple à des âges tardifs.

50 adsp n° 26 mars 1999

Les troubles d’apprentissage chez l’enfant

Les données des examens à la demandeÀ Créteil, ils ont concerné 6 633 élèves des écoles en1997-1998 (38 % des élèves), et 8 055 en 1997-1998(32 %). Le phénomène est donc numériquement impor-tant : un tiers des élèves ont besoin d’un examen médicalen plus du bilan prévu, mais on peut s’interroger surl’utilité pour l’enfant de cet examen, car le pourcentaged’avis suivi d’effet est bas et stable au cours des deuxannées considérées (36 % ; 35 %).

La comparaison Zep/non-Zep (dans le Val-de-Marne)montre des différences d’importance variable selon lestroubles : on a enregistré en 1997-1998, 1,3 % detroubles du langage dans les Zep et 4 % dans les non-Zep, 1,5 % et 2 % de « retards psychomoteurs », 5 %de troubles du comportement dans les Zep et 15 % dansles non-Zep. L’hypothèse est faite que les enfants desZep sont mieux suivis que les autres, comme l’indiquela comparaison des taux de couverture vaccinale dansles deux types de zones. Par ailleurs on a constaté uneévolution importante dans le temps ; en effet en 1991,le pourcentage de troubles du langage était de 19 %dans les deux types de zones réunis. Ceci pose à nouveaula question des critères de diagnostic et de leur stabi-lité dans le temps et entre examinateurs.

Les données des enquêtes épidémiologiques de l’HéraultL’enquête menée en 1987-1988 a enregistré 26,8 %de troubles du langage, dont 7,8 % de retards de lan-gage, et 22,4 % de troubles de la motricité (dont : troublesdu graphisme : 14,8 % ; de la motricité globale : 8,3 % ;de la motricité fine : 6,6 % ; et de l’orientation spatiale :5,4 %). Il n’est pas très aisé de comparer les deuxenquêtes réalisées à 5 ans d’intervalle bien qu’ellesaient eu une méthodologie commune, car on sait qu’en1992-1993, par rapport à la précédente enquête, letaux de couverture a augmenté et la participation desenseignants au bilan s’est développée. Les chiffresenregistrés en 1992-1993 sont toutefois assez voisinsde ceux de 1987-1988. Sur une population de 1 576enfants âgés en moyenne de 4 ans 8 mois, on a constatél’existence de 24,9 % de troubles du langage. Uneanalyse plus fine de ces troubles indique qu’il existedes troubles de l’articulation dans 20,5 % des cas, del’expression dans 10,2 % des cas, de la parole dans7,7 % des cas et de la compréhension dans 4,8 % descas. Ces troubles sont associés entre eux, sauf lestroubles de l’articulation qui restent isolés dans 56 %des cas. 8 % des enfants présentent des troublessévères et ont une association de troubles de l’articu-lation, de la parole, de l’expression et de la compré-hension. Ces pourcentages paraissent d’autant plusélevés et inquiétants que, dans cette deuxième enquête,un effort important avait été fait pour lever les inhibi-tions de l’enfant et améliorer de ce fait son langagespontané, et pour s’entretenir avec l’enseignant dudiscours spontané de l’enfant. Un phénomène estimportant : la fréquence significativement plus grandedes troubles dans le sexe masculin : 29,5 % (de trou-

bles du langage dans leur ensemble) chez les garçons,20,4 % chez les filles. Ces troubles du langage ont faitl’objet d’un conseil sur place dans 36 % des cas, d’unereconvocation dans 31 % et d’un envoi à un spécialistedans 33 % des cas. Les troubles isolés sont plus ra-rement orientés que les troubles associés.

En 1992-1993, on a retrouvé 18,3 % de troubles dela motricité (dont : troubles du graphisme : 10,2 % ; dela motricité globale : 7,1 % ; de la motricité fine : 7,2 % ;de l’orientation temporo-spatiale : 10,1 % ; et du schémacorporel : 3,0 %). On note ici une nette diminution destroubles du graphisme par rapport à la précédenteenquête. Ces troubles sont associés entre eux et onpeut parler de « retard psychomoteur global » dans 1 %des cas. Là encore les garçons sont significativementplus touchés : 20,9 % pour l’ensemble des troubles dela motricité chez les garçons, 14,7 % chez les filles.51 % des troubles de la motricité n’ont fait l’objet qued’un conseil sur place, 28 % d’une reconvocation et 21 %d’un envoi à un spécialiste. Les troubles isolés dugraphisme n’ont jamais été référés.

L’association entre les divers types de troubles estfréquente. Les troubles psychomoteurs (troubles del’orientation temporo-spatiale, de la motricité globaleet fine) sont quatre fois plus fréquents chez les enfantsporteurs d’un trouble du langage. Chez 25 % des en-fants ayant des troubles du langage on note des diffi-cultés de graphisme. 38 % des enfants porteurs d’untrouble du langage ont aussi des problèmes de com-portement (immaturité, inhibition).

Ces troubles du comportement sont présents chez22,8 % des enfants (29,8 % des garçons, 16,5 % desfilles). Ils sont catégorisés en : immaturité (14 %), in-hibition (7,8 %), instabilité (6,8 %), troubles du carac-tère (4,8 %) et manifestations pathologiques (3,4 %).Les associations entre ces divers troubles sont nom-breuses. Par ailleurs, 6 % des enfants présentent à lafois des troubles du langage, de la motricité et ducomportement ; 11 % présentent deux types de trou-bles. 19 % des enfants sont porteurs à la fois de trou-bles visuels et de troubles de la motricité fine.

Dans les deux enquêtes menées dans l’Hérault, ona analysé la prévalence des troubles en relation avecles caractéristiques éducatives, socio-économiques etculturelles des familles. Les résultats des deux étudessont globalement convergents (même si, dans ladeuxième, certaines relations significatives ne s’obser-vent qu’à l’intérieur d’une seule catégorie de niveausocial). Globalement les troubles du langage sont plusfréquents lorsque la mère n’a pas d’activité profession-nelle, et en cas de bilinguisme (mais, en 1992-1993,cette caractéristique s’efface derrière le bas niveau socio-économique). Les troubles de la motricité s’observentchez les enfants des classes sociales les plus défa-vorisées.

De nombreuses difficultés méthodologiques rendentcomplexe la comparaison entre ces données enregis-trées chez des enfants de 4-5 ans et celles des bilans

adsp n° 26 mars 1999 51

Le dépistage en population générale

de six ans menés dans d’autres populations. Certai-nes données proviennent de rapports d’activité, d’autresde travaux de recherche spécifiques. Il existe sans nuldoute des problèmes de définition : que recouvre, suivantles études, le terme « retard psychomoteur » ? Les outilsde mesure diffèrent de même que les examinateurs,et les contextes socio-économiques peuvent être trèsdifférents. Ainsi à Floirac, lors de l’étude, le taux dechômage dans la population générale de la Zep étaitde 14,4 % ; il était, dans les familles de la deuxièmeenquête de l’Hérault, de 8,1 % chez les pères et de 4 %chez les mères, mais le niveau social était considérécomme faible ou très faible dans 18,4 % des cas. Lapopulation d’origine étrangère représentait 7 % de lapopulation générale dans l’étude de Floirac et 15 % desmères de la deuxième enquête de l’Hérault étaientd’origine étrangère. Il paraît toutefois difficile de ne pasrelever la similitude de certains chiffres. Ainsi, à Floi-rac comme dans l’Hérault, les pourcentages de trou-bles du langage et de ceux de la motricité sont de l’ordrede 20 %. Le pourcentage de retards psychomoteurs estde 1 % dans l’Hérault, de 2 % dans le Val-de-Marne. Ilne paraît donc pas abusif de dire que nombre des troublesdes apprentissages constatés lors du bilan de six ansétaient présents depuis plusieurs mois déjà, et auraientpu faire l’objet d’un dépistage plus précoce.

Le suivi de cohorte dans l’Académie de GrenobleLe suivi de 2 265 élèves depuis la grande section dematernelle dans l’Académie de Grenoble a permis deconstater que la conscience phonologique augmenteavec l’âge, que les capacités de l’enfant sont plus liéesaux activités de langage qu’au développement indivi-duel de l’enfant (c’est dire le rôle de stimulation del’école) et que les progrès entre deux tests sont signi-ficativement plus importants chez les enfants entraî-nés. Par ailleurs il existe une relation significative en-tre le niveau de conscience phonologique et devocabulaire et le niveau de diplômes de la mère. Lesscores de conscience bas s’observent chez les enfantsne parlant pas le français à la maison, chez ceux quiont des frères et soeurs ayant ou ayant eu des problèmesd’apprentissage de la lecture, enfin chez les enfantsqui ont eu le moins de lecture le soir lors de leur en-dormissement. Un des résultats essentiels de ce tra-vail concerne le lien entre les performances de lecture(au bout de 3 ans, en fin de CE1) et le niveau de cons-cience phonologique (évaluée durant la sixième année),celui-ci expliquant plus de 20 % du niveau de perfor-mance.

Dans le cadre d’une expérimentation sur l’intégra-tion des dyslexiques dans l’école, réalisée dans troisécoles de Chambéry (400 élèves du CP au CM2), uneévaluation neuropsychologique du langage et des voiesde lecture a montré que 11 % des élèves scolarisésdans ces écoles de Zep présentaient des performan-ces qui font poser le diagnostic de trouble spécifiquedu langage écrit (dyslexie).

Selon la définition de laClassification internatio-nale des maladies del’OMS, 10e révision.

Synthèse et discussionMalgré, on l’a vu, des difficultés méthodologiques di-verses et l’analyse conjointe de données provenant depopulations et de contextes différents, rendant desextrapolations nationales hasardeuses, les chiffresexposés ci-dessus frappent par la magnitude du pro-blème qu’ils laissent entrevoir : entre 15 et 30 % (se-lon le sexe) des enfants de 4 à 5 ans présentent destroubles du langage ou de la motricité. Ces troublessont souvent associés entre eux et à des troubles ducomportement rendant les prises en charge complexes.11 % des enfants présentent un trouble du langage écrit.La situation est particulièrement délicate pour les en-fants dont les parents font partie des classes les plusdéfavorisées, à la fois sur le plan socio-économique etculturel (d’où une pauvreté des interactions par le lan-gage) et pour ceux qui ne peuvent pas, dès leur toutepetite enfance, vivre dans un bain de langage (celui quisera l’outil de communication à l’école), notamment parceque leur mère ne parle pas ou mal le français.

Les variations dans les taux de prévalence rappor-tés ici font apparaître le besoin de clarification dansles définitions des troubles et retards ainsi que lanécessité de mettre au point des outils validés pourévaluer le langage et la psychomotricité.

Le travail de dépistage est, dans les études rappor-tées ici, de qualité. Ainsi, dans l’Hérault (en 1992-1993),le pouvoir prédictif du dépistage s’est avéré bon commel’indique l’habituelle confirmation par le spécialiste deréférence (en 1987-1988, dans 95 % des cas pour lestroubles de l’audition, 82 % pour les troubles visuels).62 % des troubles du langage ont été dépistés par laPMI, et, parmi les 38 % de cas connus, la majorité avaitété identifiée l’année précédente par le médecin de PMI.

Le suivi des bilans est parfois décevant comme l’at-testent certains faibles pourcentages d’avis suivis d’effet.De nombreux obstacles existent à ce suivi : des pro-blèmes d’accessibilité financière pour ces famillesdémunies qu’on adresse à un spécialiste, des problè-mes d’offre de soins (pas de Centre d’hygiène mentaleinfantile ni de CMP à Floirac par exemple), des problè-mes d’organisation pratique pour les mères. Ils sonttout particulièrement bien décrits dans l’étude de Floirac :en cas de prise en charge dans une structure de santémentale, la mère doit prendre deux autobus et assu-rer la garde de ses autres enfants une à deux fois parsemaine pendant deux ans au minimum. Beaucoup sedécouragent d’autant qu’il faut parfois attendre deuxà trois mois pour être pris en charge du fait du man-que de personnel et de moyens, et que les parents ontd’autres problèmes qu’ils jugent souvent plus graves(problèmes financiers, d’emploi, d’insertion…). Parailleurs les familles ont fréquemment des réticencesà consulter un psychologue ou un psychiatre. Enfin lesdispositifs de prise en charge sont parfois inconnus desfamilles, voire des professionnels.

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52 adsp n° 26 mars 1999

Les troubles d’apprentissage chez l’enfant

de moins de 6 ans qui présentent des troubles importantsde la relation, du comportement, du développement et, pourlesquels la scolarisation à l’école maternelle est présentéecomme difficile, voire impossible.Les signes cliniques que présentent ces enfants s’inscriventdans un tableau polymorphe. Il n’est pas possible pour nousde différencier à ce moment là, parmi ces troubles, lesquelss’apparentent davantage à des troubles d’apprentissage.Les actions de la PMI en matière de dépistage et d’accom-pagnement des parents dans leurs démarches de bilan-dia-gnostic et de prise en charge thérapeutique pour leur enfantsont une contribution essentielle à l’épanouissement des jeunesenfants.Il serait toutefois important que les partenaires de la PMI dis-posent de moyens supplémentaires en terme de bilan dia-gnostique et de prise en charge thérapeutique car ceux-cis’avèrent bien souvent insuffisants.

De quels moyens dispose-t-on durant les troispremières années de vie de l’enfant ?Le dépistage précoce des troubles du développement chezun jeune enfant est possible lorsque les parents consultentavec leur enfant :l un médecin libéral ;l le médecin d’une équipe du service de PMI dans le cen-tre de son quartier ;l l’équipe hospitalière lorsque l’enfant est reçu en consul-tation ou hospitalisation pour un autre problème de santé.Ce dépistage peut aussi être effectué à partir de l’observa-tion quotidienne des professionnels de la petite enfance :l en crèche collective ou familiale ;l à la halte-garderie ;l au jardin d’enfants ;l ou par l’assistante maternelle.Des signes d’appel peuvent également susciter l’inter-rogation d’autres professionnels de la petite enfance comme :l des puéricultrices de PMI de secteur qui se rendent au do-micile de la famille ;l des auxiliaires de puériculture et des éducatrices de jeu-nes enfants qui reçoivent la famille au cours des accueils ;l les lieux d’accueil adultes-enfants, les haltes-jeux dans lescentres de PMI et les salles d’attente avant la consultationmédicale.En règle générale, seuls les troubles de développement in-tégrés dans un tableau clinique complexe peuvent être re-pérés avant 4 ans par les équipes de PMI.Du fait de la proximité et de la relation « privilégiée » entreles parents et le professionnel de la petite enfance, ce der-

nier sera à même de recueillir le point de vue des parentssur ce qu’eux-mêmes ont pu observer dans le développementde leur enfant. Il pourra également évaluer le moment le plusapproprié pour échanger avec eux à ce sujet en fonction ducontexte familial, de leur attitude et de leurs réactions. Il prépareainsi, lors de cette première annonce, la nécessaire relationde confiance à partir de laquelle les autres partenaires solli-cités pourront poursuivre la démarche engagée auprès desparents et de l’enfant.L’enjeu du dépistage précoce réside non seulement dans lacapacité des professionnels à repérer les signes d’appel, maiségalement dans leurs capacités à « co-construire » avec lesparents cette préoccupation commune autour de la santé del’enfant, en mobilisant suffisamment leurs compétencesparentales.Pour ce faire, les professionnels doivent pouvoir rester attentifs,présents, répondre aux questionnements des parents, lesorienter de la façon la plus adéquate, les accompagner toutau long de leur cheminement et respecter les mouvementsd’aller-retour éventuels qui témoignent de l’impact psychoaffectifde l’annonce de difficultés chez leur enfant.Nous constatons qu’il est souvent difficile de réunir toutes lesconditions professionnelles requises pour effectuer au mieuxun accompagnement des parents vers les structures de bi-lan et de diagnostic, et vers les structures de soins et depédagogie adaptée, de façon continue et durable.En outre, le délai de réponse de ces partenaires introduit souventune rupture dans le cheminement des parents. Alors qu’ilsont pu avoir des difficultés à faire la démarche pour prendrerendez-vous auprès d’une consultation hospitalière, d’un centremédico-psychologique, plusieurs semaines peuvent s’écou-ler avant qu’une première rencontre ait lieu. Puis il leur fau-dra attendre les résultats des différentes investigations. Etsouvent un ou deux mois s’écoulent avant qu’une actionéducative et thérapeutique puisse être entreprise.

De quels moyens dispose-t-on durant la période des3 à 6 ans de l’enfant ?Conformément à l’article L 149 de la loi du 18 décembre 1989relative à la protection et à la promotion de la santé de lafamille et de l’enfance, le service de PMI doit organiser desconsultations et des actions de prévention médico-socialesen faveur des enfants de moins de 6 ans, notamment dansles écoles maternelles.L’assemblée départementale des élus du conseil général desHauts-de-Seine, par délibération du 23 juin 1989, s’est pro-noncée en faveur de la généralisation des bilans de santé ef-fectués par les médecins de PMI à tous les enfants de 4 ansscolarisés sur le département (jusque-là seuls 50 % des enfantsen bénéficiaient).Environ 17 000 enfants d’une classe d’âge (enfants nés lamême année) sont ainsi vus dans le cadre des bilans de santéde la quatrième année.Lors de l’examen de l’enfant, en présence de ses parents,

Le rôle de la protection maternelle et infantile

Anne-MarieAsencio

PsychologuePaulette Leblanc

PuéricultriceJean-Claude

OrlowskiHélène Siavellis

PédiatresPMI-Petite

enfance Conseilgénéral des

Hauts-de-Seine

C haque année, le service de Protection maternelle etinfantile (PMI) est interpellé sur la situation d’enfants

Les services de la protection maternelle et infantile sont de plus enplus impliqués dans le diagnostic et l’orientation d’enfants présentantdes troubles du développement.

adsp n° 26 mars 1999 53

Le dépistage en population générale

pendant une durée de 30 minutes, le médecin observe le com-portement de l’enfant, mène un entretien avec les parents etdispose également d’éléments complémentaires transmis parl’équipe pédagogique. Il utilise le test du bonhomme, la re-production des figures géométriques, étudie le repérage duschéma corporel par l’enfant et son organisation dans l’es-pace et le temps. Concernant l’examen du langage le médecinutilise l’ERTL 4 (épreuves de repérage des troubles du lan-gage de l’enfant de 4 ans).L’entretien avec les parents et l’enfant est complété par unexamen clinique y compris, de façon plus approfondie, surle plan neurologique, lorsqu’il y a des signes d’appel.Outre cet examen clinique en présence des parents, en casde troubles du comportement ou troubles du développementpsychomoteur, l’enfant sera observé dans ses interactions avecles autres enfants en classe et en cour de récréation, lieu d’ob-servation particulièrement intéressant.Les données recueillies à l’occasion des bilans en école ma-ternelle permettent d’estimer à 7 %, soit environ 1 000 en-fants par an, la proportiond’enfants orientés pour un re-tard de développement, untrouble psychomoteur, untrouble du comportement et/ou un trouble du langage.Lorsque l’enfant présente destroubles, le médecin se meten relation avec le médecintraitant et explique aux pa-rents l’intérêt d’une prise encharge spécialisée pour per-mettre une évaluation plus fine et pertinente et, éventuelle-ment poser un diagnostic.Très souvent, l’équipe pédagogique confrontée quotidiennementaux troubles de l’enfant, sera un vecteur important dans laprise de conscience des parents de la nécessité d’une priseen charge pour leur enfant.Les situations les plus préoccupantes feront l’objet d’une pro-position d’accompagnement :l d’une visite à domicile d’une puéricultrice ;l d’une rencontre avec l’équipe de PMI (puéricultrice, auxi-liaire, psychologue, médecin) ;l d’un accompagnement d’une équipe interdisciplinaire PMI–Handicap petite enfance, mise à disposition des enfants han-dicapés et de leur famille.Il faut préciser qu’en juin 1989, les élus du conseil généralont également délibéré en faveur du développement d’uneautre mission de la PMI, à savoir les actions de préventionet de dépistage des handicaps chez les enfants de moins de6 ans ainsi que le conseil aux familles pour leur prise en charge.Cette politique départementale en faveur des enfants han-dicapés et de leur famille s’articule à différents niveaux :l une étude épidémiologique rétrospective concernant l’étio-logie des handicaps chez l’enfant, réalisée à partir des dos-

sier de la Commission départementale d’éducation spéciale(CDES) qui permettra d’évaluer les possibilités d’actions deprévention ;l une action globale auprès des enfants et de leur famille(équipes PMI–Handicap petite enfance) ;l le diagnostic, le soin et la prise en charge globale des enfants(centre d’action médico-sociale précoce) ;l l’accueil des enfants dans des structures traditionnellesou dans des structures adaptées (jardin d’enfants adaptés) ;l la scolarisation des enfants dans les écoles maternelles(soutien en personnel lorsque celui-ci ne peut pas être ef-fectué par les municipalités ou par l’Éducation nationale).Du fait de cette action départementale menée par la PMI enfaveur des enfants handicapés, un travail en réseau s’est par-ticulièrement développé sur les Hauts-de-Seine entre les pro-fessionnels du service PMI et les professionnels de l’Éduca-tion nationale.Ce travail en réseau permet d’identifier un plus grand nom-bre d’enfants en difficultés, au sujet desquels les enseignants,

les directeurs d’école et les secrétaires des centres commu-naux de la petite enfance font appel aux professionnels PMI.

En conclusionLe service de PMI est de plus en plus sollicité pour des en-fants qui présentent des difficultés importantes dans leur dé-veloppement et qui se retrouvent devant un risque d’exclu-sion des structures d’accueil ordinaires (modes d’accueil etécole maternelle).Dans le même temps nous constatons que le développementd’un travail en réseau permettant d’articuler le dépistage surle lieu de vie et de scolarité de l’enfant et l’accompagnementde l’information auprès des parents par des professionnelsde la petite enfance de proximité, permet aux parents de s’en-gager dans une démarche de diagnostic et de prise en chargemalgré les difficultés inhérentes au délai d’attente et au fai-ble taux de prise en charge possible.L’axe qui reste à développer au sein de ce réseau nous sembledonc être les possibilités de consultations de bilan et de dia-gnostic des troubles des enfants et les possibilités de priseen charge thérapeutique des enfants.

Proportion d’enfants orientés pour un retard de développement, un trouble psychomoteur,un trouble du comportement et/ou un trouble du langage

Années 1994-1995 1995-1996 1996-1997

Enfants nés en 1991 1992 1993Nombre d’enfants vus 15 759 92,21 % 16 398 92,46 % 16 962 95,50 %Nombre d’enfants orientés 1 034 7,29 % 1 017 6,92 % 1 057 6,78 %

54 adsp n° 26 mars 1999

Les troubles d’apprentissage chez l’enfant

Le cloisonnement des dispositifs sanitaires et sociaux,les logiques institutionnelles et corporatistes contribuentà rendre la recherche de solutions complexe. Les rap-ports d’activité du service médical de promotion de lasanté en faveur des élèves de l’Académie de Créteilsoulignent que les relations interinstitutionnelles en-tre les établissements scolaires et la CDES ou le cen-tre d’action médico-sociale précoce (CAMSP) ne sontpas coordonnées mais relèvent du cas par cas et quela coordination entre le bilan de PMI et le bilan de sixans, assurée grâce à une fiche de liaison, n’est pasencore réellement établie. Le rapport de 1997-1998propose un cas clinique très illustratif : « Thibaut, 3 ans,présente des troubles du langage et du comportement ;il est suivi pendant trois mois, en pédo-psychiatrie, à l’hô-pital de jour à plein temps. Son état progresse et le mé-decin hospitalier contacte le médecin de l’éducation na-tionale pour une intégration à l’école à temps partiel.En accord avec l’équipe éducative, il est convenu queThibaut se rendra à l’école deux matinées par semaineet qu’il passera deux journées à l’hôpital. Au bout d’unmois et demi, l’hôpital décide d’interrompre son suivi sansaucune concertation avec l’école et sans rechercher destructure thérapeutique relais. L’état de Thibaut se dé-grade rapidement. Apparaissent une angoisse et uneagitation qui remettent en cause le début d’intégrationl’école. »

Conclusions et perspectivesOn fera ici brièvement quelques propositions concrè-tes visant à améliorer la connaissance épidémiologi-que, la pratique du dépistage en population généraleet les relations entre acteurs. Il s’agit :l de rendre le dépistage aussi précoce que possible ;l d’améliorer la qualité des données épidémiologi-

ques par une amélioration des procédures de dépis-tage : diminution de l’hétérogénéité des résultats, liéenotamment au nombre des médecins (scolaires et dePMI) concernés et à leurs interprétations personnelles,par une meilleure validation et standardisation des outilset par des actions de formation ;l de tenter de rassembler des données à un niveau

national, notamment grâce à l’utilisation d’outils com-muns ;l de favoriser les activités de recherche greffées sur

les bilans systématiques ;l de mettre au point, dans le bilan de la sixième an-

née, un outil qui soit centré sur les capacités sous-jacentes de l’apprentissage de la lecture et de formerles médecins mais aussi les enseignants à l’utilisationd’un tel outil ;l de développer les partenariats avec les ensei-

gnants qui sont de bons évaluateurs des enfants àrisque ;l de renforcer le rôle du médecin de l’Éducation na-

tionale auprès des nombreuses instances locales, auprès

des parents (explications en début d’année sur l’inté-rêt du bilan) ;l de renforcer les liens entre PMI et Éducation na-

tionale.Finalement des actions d’information et de formation

auprès de tous ceux qui conseillent les parents (mé-decins de PMI et généralistes notamment) doivent êtremenées, afin que leur soit expliquée l’importance dela « stimulation linguistique », qui ressort bien de tou-tes les données exposées ici comme la clé de l’appren-tissage du langage, parlé, lu et écrit.

Enfin, il convient de ne pas oublier que le bilan desix ans n’aboutit pas à un diagnostic, mais dépiste desdéficits qui peuvent être liés à des difficulté adaptati-ves par inadéquation de la stimulation et des relationséducatives, à un simple retard de développement, ouà des troubles psychologiques. La réparation de cesdéficits est le plus souvent possible, à condition tou-tefois qu’ils soient reconnus le plus précocement possibleet pris en charge avec des moyens qui sont loin d’êtretoujours disponibles actuellement.

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Les troubles d’apprentissage chez l’enfant

fronter le fait évident que l’apprentissage est plus fa-cile pour certains élèves que pour d’autres. La plupartdes enseignants reconnaissent qu’une minorité d’en-fants éprouve des difficultés inattendues en ce qui con-cerne l’acquisition des données de base. Les troublesd’apprentissage spécifiques, non connectés à un dys-fonctionnement cognitif général, mais apparaissant dansdes domaines particuliers de l’apprentissage et du dé-veloppement, ont été décrits d’une façon assez scien-tifique dès le XIXe siècle (par exemple la description de« cécité aux mots » par Morgan, 1896). Les enseignantsont tenté d’ajuster, jusqu’à un certain point, leurs effortséducatifs à la capacité d’apprendre de leurs élèves.

Ce n’est cependant pas avant la deuxième moitié dece siècle que la conviction s’est répandue au plan in-ternational, que les enfants souffrant de troubles spé-cifiques d’apprentissage ont droit à une éducationspécialisée afin de surmonter les obstacles qu’ils ren-contrent, et pour les aider à s’exprimer et à utiliser leurscapacités cognitives. La prise en charge éducative desenfants atteints de ces troubles en est encore à sesdébuts. En conséquence, on observe de grandes va-riations entre pays, ainsi qu’à l’intérieur des pays c’est-à-dire entre régions et même entre établissements. Lesexemples présentés ici décriront les types de prise encharge des enfants présentant des dyslexies et d’autrestroubles d’apprentissage aux Pays-Bas, aux États-Unis

d’Amérique et en Finlande. Seront ensuite abordés quel-ques principes et formes d’intervention qui sont large-ment adoptés au plan international.

La prise en charge des enfants dyslexiquesaux Pays-Bas, aux États-Unis et en FinlandeAux Pays-Bas, l’éducation spécialisée est proposée defaçon systématique et approfondie. Les enfants néer-landais passent des examens annuels au niveau na-tional dans les disciplines classiques : lecture, ortho-graphe et mathématiques. Les enfants qui prennent duretard dans ces matières reçoivent un enseignementrenforcé, individuellement ou en petits groupes. Quandle soutien scolaire ne fournit pas une aide suffisante,l’enfant est envoyé à une unité psycho-éducative de l’éta-blissement, où des évaluations psychologiques et édu-catives sont réalisées, et des conseils en termes derééducation donnés à l’école. Si nécessaire, l’enfantpeut être dirigé vers des évaluations plus poussées,réalisées par une équipe multidisciplinaire dans un centrespécialisé en dyslexie ou dans un institut d’éducation,qui fonctionne au sein du système de santé. Les ré-sultats et les recommandations sont alors soumis àun comité officiel qui élabore un programme de priseen charge pour chaque enfant. Ce programme peut pré-coniser une prise en charge spécialisée supplémentaireou recommander l’intégration dans une classe ou écolespécialisée pour enfants présentant des troubles d’ap-prentissage. Des écoles spécialisées existent pour lesenfants d’intelligence normale présentant des troubles

Marit KorkmanProfesseur en

neuropsychologie del’enfant à l’Académie

universitaire d’Åbo,Finlande

Sonia Baudoin-ChialDocteur en neuropsy-

chologie, service deneurochirurgie,

Hôpital Sainte-Anne,Paris

Traduit de l’anglaispar

Geneviève Guérin

L es troubles d’apprentissage sont probablementconnus depuis que l’éducation scolaire existe.Tout professeur ayant plus d’un élève doit af-

Plusieurs pays étrangers dont les États-Unis d’Amérique, les Pays-Bas et laScandinavie développent des programmes spécifiques de dépistage et de priseen charge des troubles d’apprentissage.

La prise en chargeà l’étranger

56 adsp n° 26 mars 1999

Les troubles d’apprentissage chez l’enfant

d’apprentissage et/ou des troubles du comportement,pour des enfants avec des problèmes graves de con-duite, et pour des enfants se situant en deçà de lacapacité cognitive moyenne. Ces établissements sontaccessibles et en nombre suffisant dans tout le pays.La nouvelle politique gouvernementale vise cependantà maintenir les élèves aussi longtemps que possibledans les classes traditionnelles, avec une prise en chargeen éducation spéciale, en essayant d’éviter le place-ment en établissement spécialisé.

Aux États-Unis, le droit des enfants présentant destroubles d’apprentissage à accéder à des servicesspécifiques est régi par la loi. Cependant, l’applicationde la loi varie selon les États. L’évaluation des élèvesen difficulté peut être réalisée par une équipe scolairequi inclut des professeurs d’éducation spécialisée, unpsychologue scolaire, quelquefois un neuropsychologue,un orthophoniste, un ergothérapeute et un médecin.L’enfant bénéficie d’un diagnostic, et un programmed’éducation spéciale est proposé. La plupart des Étatsprécisent les critères nécessaires à la prise en chargede l’éducation spécialisée. Un enfant peut, par exem-ple, avoir à présenter un écart de 1,5 entre son QI etles résultats dans les tests de lecture et d’écriture ;la prise en charge de la rééducation est alors financéepar l’État.

La forme la plus habituelle de prise en charge édu-cative est le tutorat ou un enseignement spécifiquedispensé aux enfants en difficulté dans le cadre declasses traditionnelles. Les enfants peuvent suivre unprogramme d’éducation spécifique (par exemple lesprogrammes pour dyslexiques d’Orton Gillinham ouLindamood Bell). Dans des cas extrêmes, l’orientationdans des classes ou écoles spéciales peut être envi-sagée. C’est le cas des enfants qui présentent unedyslexie et un trouble déficitaire de l’attention avechyperactivité.

La Finlande est un exemple de pays dans lequel laprise en charge des difficultés d’apprentissage a été

organisée de façon assez sporadique, mais qui a pro-gressé au cours des années récentes. Les enfantsprésentant des difficultés peuvent bénéficier d’un en-seignement spécialisé individuellement ou par petitsgroupes. L’intervention peut être déclenchée par le cons-tat que l’enfant a du mal à suivre, sans qu’une déci-sion formelle soit nécessaire. Cependant, certains dia-gnostics, comme par exemple un dysfonctionnementcérébral minimal, délivré dans un contexte médical, exigeune prise en charge dans le cadre de programmes in-dividuels, élaborés par un comité scolaire. Il existe peude classes spéciales pour les enfants présentant unedyslexie, des troubles du langage, un déficit de l’attentionou une hyperactivité et des problèmes de comportement.Le placement dans ce type de classe est soumis à l’éva-luation et à la recommandation d’un psychologue.

En Finlande, l’offre d’éducation spécialisée ne répondpas à l’ensemble de la demande. Dans la région d’Hel-sinki, de nombreux enfants ont donc été pris en chargeà titre individuel par des neuropsychologues spéciali-sés. Les résultats sont encourageants et indiquent quece type d’intervention peut être un complément utilede l’éducation spécialisée. En particulier, les élèves plusâgés avec des problèmes émotionnels et de motiva-tion causés par un échec scolaire persistant ont tiréprofit d’une intervention neuropsychologique. La voied’accès à cette intervention a été d’adresser l’enfantau système de santé, plus particulièrement aux servi-ces de neuropsychologie spécialisée, fonctionnant surdes crédits de la ville. Il existe aussi des centres uni-versitaires dans lesquels des professeurs d’éducationspécialisée et des psychologues cognitivistes ou desneuropsychologues spécialistes des troubles d’appren-tissage collaborent avec les établissements scolairespour un coût modéré, intervenant surtout pour évalueret superviser l’enseignement spécialisé.

Ainsi ces trois pays ont quelques traits communs :les enfants présentant des problèmes d’apprentissage,légers ou modérés, peuvent bénéficier d’un tutorat oud’une prise en charge en éducation spéciale dans leurcursus au sein de classes classiques. La prise en chargeen éducation spéciale varie selon les besoins de l’élève,mais dépend aussi du niveau et des compétences duprofesseur. Les programmes d’éducation pré-organisés,qu’ils soient ou non informatisés, peuvent égalementêtre utiles. Les enfants ayant des difficultés importantespeuvent nécessiter un placement dans des classesspéciales, sur la base d’une évaluation et d’une déci-sion officielle. Cependant, les classes spécialisées nesont pas nécessairement présentes dans tous les pays.

En Suède, même les enfants à la marge en termescognitifs sont intégrés dans des classes normales, plutôtque d’être « ségrégués » dans des classes spéciales.Il va sans dire que l’intégration d’élèves ayant desbesoins spécifiques soumet les écoles et les profes-seurs à des exigences importantes.

On constate dans la plupart des pays l’émergencede centres spécialisés pour les troubles d’apprentis-

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La prise en charge à l’étranger

sage, un développement probablement favorisé par lesimportants progrès scientifiques intervenus dans lechamp des troubles d’apprentissage. Dans ces centres,les enfants présentant des troubles sévères ou com-plexes peuvent bénéficier d’évaluations plus approfondieset d’une prise en charge à l’aide de programmes indi-vidualisés, qui peuvent être suivis dans le centre oudans l’école de l’enfant. L’équipe des centres est com-posée souvent au minimum de professionnels de l’édu-cation spécialisée, de psychologues cognitivistes oudes neuropsychologues, quelquefois d’un neuropédiatreet des professionnels paramédicaux. Outre la prise encharge individuelle des élèves, les centres peuvent aussiêtre des centres de ressources pour la collecte de pro-grammes informatisés d’éducation, de littérature spé-cialisée, pour la formation de professeurs, d’élèves etde parents. Ce dernier type d’activité est égalementassuré par de nombreuses associations agissant pourles personnes en difficulté d’apprentissage. L’associationbritannique de lutte contre la dyslexie (British DyslexiaAssociation), par exemple, est d’une activité remarquabledans la collecte et la diffusion de savoir-faire [21].

La prise en charge des enfants présentant d’autrestypes de difficultés d’apprentissageLes problèmes spécifiques d’apprentissage sont géné-ralement entendus comme une incapacité concernantun aspect particulier de l’apprentissage scolaire, lacapacité cognitive générale de l’enfant étant dans deslimites normales (Association psychiatrique américaine,1994). Cependant, dans un sens plus large, les trou-bles spécifiques d’apprentissage peuvent égalementêtre considérés comme étant associés à d’autres as-pects du développement cognitif et non directement liésaux apprentissages académiques.

Un aspect particulièrement important du développe-ment cognitif qui peut être spécifiquement atteint estcelui du développement du langage. Les problèmes dedéveloppement du langage sont importants puisque,d’une part, ils sont liés à un haut risque de problèmesd’apprentissage scolaire et que, d’autre part, ils appa-raissent chez les jeunes enfants, ce qui invite à essayerde réduire le risque de problèmes d’apprentissageultérieurs.

Dans de nombreux pays, les enfants présentant desproblèmes de développement du langage sont pris encharge par le système de santé. Par exemple en Fin-lande, tous les enfants subissent un dépistage du dé-veloppement psychomoteur et du langage dans descentres de santé infantiles, à l’âge de 5 ans. Les en-fants dont le développement éveille l’inquiétude ou lesenfants en bas âge ayant des difficultés d’acquisitiondu langage bénéficient d’évaluation approfondie et sontorientés vers un programme d’intervention réalisé parune équipe multidisciplinaire, soit au centre de santé,soit dans un centre de guidance infantile, ou dans unestructure spécialisée, ambulatoire ou non. Les équipespeuvent varier mais on y trouve le plus souvent un

orthophoniste, un pédiatre ou un neuropédiatre, unpsychologue ou un neuropsychologue, et une assistantesociale. Les équipes hospitalières ont également unphysiothérapeute et un ergothérapeute. Dans ce typed’intervention la thérapie du langage est primordiale,mais d’autres thérapies peuvent également être misesen œuvre, par exemple le traitement préventif de la dys-lexie proposé à l’école maternelle ou inclu dans la priseen charge de l’orthophoniste. Le report de la scolarité,des classes spéciales en école maternelle et une édu-cation spéciale à l’école sont prescrits si nécessaireset disponibles, et l’intervention est régulièrement ac-tualisée jusqu’à l’âge scolaire.

Aux Pays-Bas, les enfants présentant des problèmesde développement du langage sont repérés lors de testsde développement mais aussi à l’école (les enfants vontà l’école maternelle dès l’âge de 4 ans). Les enfantsavec des problèmes de langage peuvent bénéficier nonseulement d’une rééducation du langage mais ausside la prise en charge en éducation spéciale en incluantdes séances de conscience phonologique et un appuilinguistique à cet âge précoce.

Le trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivitéest un problème classique et les enseignants ont souventdes moyens pratiques pour y faire face (en plaçant ungarçon présentant ce trouble à côté d’une fille plustranquille ou devant le professeur, en fournissant as-sez d’occasions d’activités variées ou de pauses, endonnant des renforcements positifs ou négatifs selonles besoins). Les problèmes plus sévères peuventnécessiter des évaluations et un programme d’inter-vention de la part d’une équipe multidisciplinaire telleque décrite pour les problèmes d’acquisition du langage.Le corps médical est spécialement motivé parce qu’untraitement médicamenteux peut être envisagé. Si leproblème est sérieux et lié à des troubles du compor-tement, des classes spéciales pour ces enfants peu-vent être nécessaires. Les programmes de renforcement(positifs ou négatifs) se sont révélés plus utiles quela psychothérapie.

Les incapacités d’apprentissage non verbales ren-voient à des problèmes spécifiques qui relèvent desinteractions sociales. Ces incapacités sont un « nou-veau venu » parmi les problèmes d’apprentissage et

58 adsp n° 26 mars 1999

Les troubles d’apprentissage chez l’enfant

aucune stratégie d’intervention communément appli-quée n’a été établie. Elles ressemblent aux désordresdu spectre autistique et il est possible que certains desprincipes d’éducation spécialisée de l’autisme s’appli-quent aux enfants présentant des incapacités d’appren-tissage non verbales [18]. Un autre désordre spécifiquenouvellement défini est celui des fonctions exécutives,qui signifie des problèmes d’organisation et d’appren-tissage. Les enfants présentant ces problèmes ne sontpas encore systématiquement détectés ou traités. Dansquelques pays, des enfants très incohérents et inor-ganisés ont bénéficié du tutorat individuel, d’un édu-cateur spécialisé ou d’une intervention neuropsycho-logique individuelle.

Quelques principes d’intervention communsComme l’a montré ce qui précède, la prise en chargedes enfants présentant des problèmes d’apprentissagevarie selon les besoins individuels des enfants, et selonl’existence de services dans le pays ou la région où résidel’enfant. Pourtant, en dépit de ces variations, quelquesprincipes sont communément adoptés dans de nom-breux pays.

Un principe généralement appliqué est de renforcerla capacité d’analyse phonologique des enfants dys-lexiques. Le principe repose sur des résultats suggé-rant que les enfants dyslexiques éprouvent des diffi-cultés à analyser la composition sonore des mots etdu discours. De jeunes enfants dyslexiques peuvent êtreformés à percevoir les rimes, les allitérations, les pho-nèmes spécifiques dans les mots, etc. Cette stratégies’applique aussi aux enfants en risque de difficultésd’apprentissage qui ne sont pas encore scolarisés [6].Les enfants ayant une certaine capacité de lecture peu-vent s’entraîner à la vitesse et la justesse dans l’iden-tification des phonèmes dans les mots et le décodagedes mots écrits et des non-mots (mots sans sens). Desélèves plus âgés peuvent développer la capacité à l’ana-lyse de texte et à la compréhension.

Un autre principe est d’automatiser à travers lesurapprentissage des bases de la lecture et de l’écri-ture. Ces bases incluent les conversions phonème-graphème pour les jeunes enfants apprenant de quellesfaçons différentes les phonèmes spécifiques sontépelés dans les différents mots, et pour les enfantsplus âgés la reconnaissance visuelle autant que l’épel-lation de mots réguliers ou irréguliers. Nombreux sontles enfants présentant des troubles d’apprentissagequi apprennent leurs leçons et les oublient le lende-main. Cette tendance à la fluctuation dans la perfor-mance peut être causée par des problèmes d’atten-tion, par une surcharge de la capacité d’apprentissage,etc. Cependant, la recherche récente a aussi montréque l’un des problèmes à la base de la dyslexie peutêtre la dysnomie, c’est-à-dire la difficulté à retrouverun mot ou un phonème spécifique dans le stock mné-sique [25]. L’apprentissage accéléré de la correspon-dance lettre-graphème peut être rendu attractif par l’uti-

lisation de lotos de lettres et syllabes et des jeux demémoire, l’apprentissage de l’épellation peut être renduplus gratifiant à l’aide de courbes d’apprentissage,etc.

Pour les enfants présentant des troubles de l’attentionavec hyperactivité, l’action médicamenteuse s’est ré-vélée utile mais la politique de santé varie notablementselon les pays. Dans quelques pays comme les États-Unis et la Norvège la médication est très répandue, alorsque d’autres pays sont plus restrictifs et exigent uneautorisation spéciale pour prescrire le médicament leplus communément employé, le méthylphénidate.

Les défis du futurBien que la prise en charge des troubles d’apprentis-sage, et de la dyslexie en particulier, se soit dévelop-pée au cours des années récentes, des progrès res-tent à accomplir. En dépit de tous les efforts, les troublesd’apprentissage continuent à présenter une menacesérieuse pour le futur des enfants concernés. Une in-tervention plus précoce pourrait être un moyen d’amé-liorer la capacité à surmonter ce handicap. Ceci demandeun dépistage précoce. Le problème est que tous lesenfants qui deviennent dyslexiques ne présentent pasnécessairement des signes évidents de troubles dudéveloppement du langage. Le dépistage des enfantsdevrait inclure des tests de capacités linguistiquessubtiles, telles que l’analyse phonologique et la capa-cité à nommer rapidement. Un tel dépistage orientélinguistiquement pourrait peut-être remplacer les dé-pistages actuels orientés vers la psychomotricité, pra-tiqués dans de nombreux pays.

L’accent pourrait également être mis sur l’appui auxcentres de ressources spécialisés qui peuvent se tenirà jour des nouvelles avancées, et créer, collecter, faireconnaître ces avancées. De plus, une plus grandedisponibilité des compétences et des ressources pour-rait être assurée à travers la formation continue et laspécialisation, pour augmenter le nombre des profes-sionnels bien informés dans le domaine des troublesde l’apprentissage. Cette obligation concerne de nom-breux professionnels, mais peut-être plus particuliè-rement les psychologues car la plupart des évaluationsdes troubles de l’apprentissage comprennent uneévaluation des capacités et des faiblesses dans ledomaine cognitif. Cependant, la formation des psycho-logues n’inclut que depuis quelques années, les trou-bles d’apprentissage et leurs mécanismes cognitifset neurocognitifs.

Tous les enfants présentant des troubles d’appren-tissage durables ont besoin d’une évaluation indivi-duelle de leurs capacités cognitives et de leurs dé-ficits, d’un programme et d’un suivi personnalisé etd’une éducation spécialisée. Ces enfants sont nom-breux — en moyenne un par classe. Un objectif pourle futur pourrait être de permettre à toutes les éco-les d’avoir accès à une équipe multidisciplinaire etspécialisée.

adsp n° 26 mars 1999 59

Les troubles d’apprentissage chez l’enfant

trib

unes

Il est temps d’agir

pluridisciplinaires intensives des enfants d’in-telligence normale atteints de troubles sévè-res d’apprentissage du langage écrit (dyslexies,dysorthographies, dyscalculies). Il accueilleraen fin de cette année son millième jeune pen-sionnaire, après plus de vingt ans de prati-ques spécialisées.

Mille enfants, c’est millefamilles, mille histoires, milletrajectoires racontées et par-tagées, profondément mar-quées par un handicap sévèrede l’écrit, qui concerne biend’autres dizaines de milliersd’enfants, en France commedans tous les autres pays.

On retire évidemment deces rencontres fortes, avec untel nombre d’enfants et deparents en détresse, bien desenseignements étayés au fil dutemps sur le fonctionnementde notre système de santé dans ce domainedes pathologies neurocognitives… Dans notrecas, cela nous a conduits à de fortes inquié-tudes, qui fondent autant de vives attentesquant à l’urgence d’un bien meilleur traite-ment, dans notre pays, des troubles d’appren-tissage du langage d’origine neuro-fonction-nelle, chez l’enfant par ailleurs trèsnormalement intelligent… D’où les quelquesréflexions qui suivent, mais dont il ne fau-dra pas oublier qu’elles sont issues de la pra-tique auprès d’enfants en grande ou trèsgrande difficulté d’apprentissage de l’écrit.

Un dispositif qui n’est pas à la hauteurdes connaissancesLe premier champ de dysfonctionnement trèsfréquemment évoqué provient des considé-rables lacunes du dispositif de prévention, dediagnostic spécifique, et de réponses théra-peutiques, dispositif bien peu en adéquationavec le niveau des connaissances actuelles surla nature, les types différents et les degrés de

gravité des troubles de l’écrit.Ainsi, faute de structures et

de réseaux existants ou suffi-sants, beaucoup trop d’enfantsen difficultés spécifiques1

d’apprentissage ne bénéficientpas au plus tôt des dépistages,des diagnostics différentiels, etdes projets rééducatifs et sco-laires globaux qui leur évite-raient de si longues « galères »destructrices sur un plan per-sonnel, familial, scolaire. Ilsn’ont pu avoir que des dia-gnostics superficiels, et desprescriptions rééducatives très

insuffisantes en intensité2 ou lacunaires ennature de disciplines rééducatives pourtantindispensables comme complément de l’or-thophonie3.

Le résultat est dramatique. Il nous est

Réflexion du directeurdes Lavandes,

établissement pilotepour enfants souffrantde troubles du langageécrit, sur un handicap

encore insuffisammentpris en charge.

Philippe RouxDirecteur du centre médical et

scolaire spécialisé« Les Lavandes », Orpierre

(Hautes-Alpes)

L e centre médical et scolaire spécia-lisé « Les Lavandes » reçoit pour desséjours temporaires de rééducations

1. C’est-à-dire dont l’origine des troubles sévères estprincipalement de nature neurofonctionnelle, et nonpas due à des problématiques psycho-affectives.2. Par exemple le « standard » fréquent d’une à deuxséances de 45 minutes seulement d’orthophonie parsemaine quelle que soit la gravité réelle des troubles.3. Comme la neuropsychologie, la psychomotricité,ou la psychothérapie.

Au CP ma mèreelle me disait detoujours sortir del’école le premier ;elle voulait pasque les autresenfants me mon-trent à leur mèreà eux parce que

60 adsp n° 26 mars 1999

Les troubles d’apprentissage chez l’enfant

exprimé identiquement pardes centaines de parents dontle contexte local ou régional esttel que décrit ci-dessus… c’est-à-dire la majorité de ceux quenous avons connus. En effet,sauf rares exceptions, tous cesenfants ont été durablementvictimes d’un échec d’appren-tissage réactivé chaque jour, del’angoisse devant une impos-sibilité trop longtemps nonnommée d’acquérir l’écritmalgré leur motivation ini-tiale. Ils se sont progressive-ment infériorisés gravementpar rapport à leurs pairs, et ontété fixés dans des erreurs d’in-terprétation du milieu scolaireou professionnel non spécia-lisé, qui s’est exclusivementfocalisé sur des interprétations implicitesd’ordres psycho-affectif, social ou compor-temental. Dès lors, les réponses scolaires, thé-rapeutiques, et même psycho-éducatives ontété corrélativement largement dominées pardes données erronées, partielles et des objectifsinadéquats, qui ajoutent à la perte d’un tempstrès précieux à ces âges là.

Ainsi, sur un plan personnel d’abord : l’en-fant qui, au cours préparatoire, n’avait pourproblème principal — important, mais dé-limité — qu’un trouble sévère de l’appren-tissage du pouvoir-lire et du pouvoir-écrire,va au fil du temps, développer d’autres pro-blématiques ramifiées, issues de sa souffranceet de sa marginalisation progressive. Là oùon n’aurait eu à traiter initialement qu’untrouble neuro-acquisitif, on va devoir plus tardajouter les traitements de difficultés psycho-logiques secondaires croissantes (auto-déva-lorisation, névrose d’échec profond perma-nent, impuissance apprise, dépression,somatisations, troubles comportementauxréactionnels, etc.), de difficultés familialesaccrues (dégradation du climat familial en lienavec l’anxiété parentale, « obsessionnalisa-tion » sur le scolaire, dépression, conflits, etc.),et de difficultés sociales aggravées (vécus demarginalisation, réactions déviantes compor-tementales, cursus scolaire en zig-zag, etc.).

À l’inverse, on a largement vérifié combienla minorité d’enfants qui ont pu être à tempscorrectement diagnostiqués et pris en charge,dans les quelques régions (ou grandes villes)où se trouvent structures et spécialistes com-pétents (notamment services spécialisés deCHU), ont eu un parcours infiniment moins

pénible et pénalisant. Pourtous les autres, notre actuelsystème est bien défectueux etpénalisant…

Ainsi, ces insuffisances denotre équipement, sur unplan humain, génèrent uneforte détresse, sur de longuesannées, chez enfant et famille.Outre les réactions déjà décri-tes, cette détresse prive beau-coup d’enfants d’une grandepartie de ce droit à un « bon-heur d’enfance » qui fondepsychologiquement, on lesait, l’équilibre du futuradulte. C’est un souvenir decauchemar véritable qui nousest si souvent exprimé par les« anciens ».

Un deuxième et vaste champde lacunes et de dysfonctionnements par rap-port au type d’enfants dont nous parlons ici,est celui de la structure et du lieu où se vitl’essentiel de la manifestation des troubles,et où s’exerce leur sanction par rapport à lanorme : l’école. Nous ne développerons pasce sujet ici, mais son importance est telle qu’onne peut pas ne pas le citer…

Changer notre regardsur le handicap de l’écritAu total, le traitement global médical,rééducatif, et scolaire de ces troubles majeursde l’écrit chez des enfants par ailleurs « nor-maux » se révèle un des gros problèmes denotre société actuelle. La lecture n’est pas unematière scolaire, mais bel et bien une fonc-tion fondamentale pour toutes les acquisi-tions, expressions, communications.

Beaucoup des aménagements et novationsconcrètes qui sont indispen-sables aussi bien dans le sec-teur Santé que dans celui del’Éducation nationale sontdepuis plusieurs années biencernés et exprimés par diffé-rentes associations parentalesou professionnelles de France(par exemple Coridys, lesApedys régionales, l’Apedys-France, et d’autres…).

Mais les témoignages si sou-vent dramatiques des familles,dans ces années récentes,montrent la difficulté et lalenteur avec laquelle les struc-tures et les moyens sont créés

ou évoluent. Il paraît très urgent que desouvertures et des novations conceptuellesautant que techniques prennent enfin placedans notre actuelle culture dominante sur lestroubles du langage écrit.

C’est aussi notre regard sur le handicap dela lecture qu’il faut aussi remettre en cause,en cette fin de siècle où les neurosciences sontvenues nous donner des éclairages scientifi-ques essentiels sur la nature de ces affectionsneurocognitives handicapantes.

En effet, pour les enfants ressortissantd’étiologies neurofonctionnelles, il faut direhaut et fort que nous savons maintenant quedes faiblesses même importantes en lectureou orthographe peuvent être sans aucun rap-port avec un déficit dans l’intelligence, lavolonté, la richesse, la créativité, la dynami-que. Il faut sortir de notre automatisme pre-mier à fixer la valeur personnelle et techni-que de « l’autre » en proportion de sescapacités à l’écrit. Se défaire de cet automa-tisme, c’est rétablir des chances pour une largecatégorie d’enfants de vivre à la hauteur deleur validité globale personnelle, si nous lesaidons tôt, vite et bien sur le champ précisde leur handicap véritablement ravageur.

D’autre part, il est urgent que les secteursSanté et Éducation nationale intègrent offi-ciellement la reconnaissance de ces troublesspécifiques de l’apprentissage du langage écrit,et activent la mise en place de dispositifs ef-ficaces et cohérents de dépistage, de diagnosticdifférentiel, de thérapeutiques complètes,avec, en parallèle, des enchaînements scolairestemporairement spécifiques. Face à ces dizai-nes de milliers de familles concernées, il estgrand temps de réduire le décalage entre l’ap-port considérable, ces dernières décennies, desnouvelles connaissances bien plus précises surles pathologies neurofonctionnelles d’acqui-

sition du langage écrit, et lesréponses de notre société en-vers les enfants en détresse. Ilest grand temps aussi, au nomde ces immenses attentes d’en-fants jouant leur destin sco-laire, psychologique, puis so-cial, de surmonter notretendance au compartimen-tage, cloisonnement entre dis-ciplines et secteurs. En effet,de nombreuses résistances« psychologiques » (et souventsystématiques) aux avancéesscientifiques d’ordre neuro-fonctionnel s’ajoutent à l’ab-sence (ou l’insuffisance) de

En CE2 et CM1,j’ai détesté moncartable parcequ’on était obligésd’y conserver toutle temps tous noscahiers et copiesavec pour moirien que des zéroset du rouge. Alorsj’ai essayé deuxfois de le perdre,mais on me l’arapporté chezmoi. Alors j’aipensé à le noyer…

Je me souviensque plus j’avais deretard de lecturede classe en classe,plus je me disaisque j’aurai unmétier formida-ble. En CM2,j’avais un niveaude CE à l’écrit,mais je disaispartout que je

adsp n° 26 mars 1999 61

Tribunes

formation spécifique d’unegrande partie du corps médi-cal, rééducatif et scolaire deterrain, malgré de fortes atten-tes en la matière exprimées deplus en plus par eux-mêmes.

Quels progrès ferions-nousnous-mêmes pour nosenfants !Si l’on cessait de s’arc-boutersur des exclusives entre secteurmédical et secteur scolairealors que les pathologies lan-gagières neuro-acquisitivessont au carrefour de ces do-maines !

Si l’on arrêtait d’opposerapproches neuropsychologi-que et psycho-affective, alorsque la reconnaissance (enfin !)de l’existence d’étiologies neurofonctionnellesn’a jamais signifié la disparition des causali-tés du versant psychologique et affectif pourune autre partie des enfants en difficulté, sanscompter les cas où la conjugaison des deuxapproches est tout à fait nécessaire. L’immenseprogrès n’est-il pas de traiter enfin chacun enfonction de diagnostics différentiels, désor-mais capables d’éviter de stériles amalgames ?

Si à l’intérieur même du système de santé,il était reconnu et financé l’utilité primordialede temps de liaison et de concertations en-tre rééducateurs du secteur ambulatoire, destemps entre eux-mêmes et les services spécia-lisés hospitaliers, des temps entre eux-mêmeset le secteur scolaire, des temps entre eux-mêmes et ceux des parents en aussi mauvaisétat que leur enfant et qui bénéficieraient tantd’une guidance psycho-éducative temporaire,au bénéfice de favoriser activement l’évolu-tion de leur enfant. C’est-à-dire, face à destroubles aussi sévères, de nature et de traite-ment aussi complexe, d’œuvrer enfin tous ensynergie.

Si l’on cessait d’opposer prises en chargeen ambulatoire et prises en charge en insti-tution, au bénéfice de les considérer commecomplémentaires dans l’éventail des ressour-ces, et non pas concurrentes idéologiques outechniques, face à un enjeu de pathologies telqu’il faut associer chacune des prises en chargeau moment éventuellement nécessaire, pourcréer un cursus de soins cohérent et bienmaillé.

Si l’on voulait bien, à partir de dispositifsà développer en secteurs Santé et Éducationnationale, accorder une bien plus grande place

à la prévention précoce quiéviterait des parcours doulou-reux aux enfants et à leur fa-mille. Techniquement, denombreux outils sont aupoint, et l’on sait mêmedépister des risques de diffi-cultés ultérieures dès la scola-risation en maternelle, dépis-tage qui peut bien sûr fonderune attention discrète au mo-ment du cours préparatoire.Mais seule une prise encompte généralisée, par desmoyens associant partenairesspécialisés, structures internesà l’éducation (PMI, médecinescolaire et réseaux d’aide enparticulier) et spécialistes ex-térieurs appropriés peut êtreà la dimension épidémiologi-

que du problème…Si en termes de coûts pour la collectivité,

on prenait conscience de l’aggravation con-sidérable des coûts des prises en charge deces troubles lorsqu’ils sont abordés tard pardéfaut ou erreur de diagnostic en tempsutile ! Car il va revenir infiniment plus cherd’avoir à traiter alors des champs patholo-giques devenus multiples, complexes et in-crustés, à financer des régimes scolaires etsociaux d’assistance et de compensation…Et que dire du coût pour lasociété de ceux qui auront étévictimes d’absences totales deprise en charge ou d’erreursgraves d’orientation, et qui nepourront aller au bout d’au-cun cursus scolaire ou forma-tif. Ils viendront grossir lesrangs des illettrés non inté-grés, et iront vers la mar-ginalisation, l’exclusion, àcharge intégrale de la sociétépour plusieurs dizaines d’an-nées.

Bien sûr, ces évolutionsconcrètes passent d’abord parune évolution de l’informa-tion, de la formation, de l’étatd’esprit de tous. Certes, celaimplique des remises en causesouvent difficiles, des boule-versements dans les concepts,les approches et les méthodes,des révisions des conservatis-mes et des exclusives, à par-tir d’un regard nouveau sur ce

handicap particulier des apprentissages del’écrit.

Face à des troubles dont les neurosciencesmontrent à la fois la nature exacte mais aussila complexité, c’est d’un système global per-formant et cohérent que nous avons besoinà un niveau national. On ne peut plus en res-ter, pour les enfants de France, à l’aléatoirequi par chance, a fait habiter un enfant dansune région ou une ville où ponctuellement,existent des ressources actualisées tels que ser-vice hospitalier spécialisé, médecins formés,rééducateurs et enseignants spécialisés.

Enfin, face à ces enfants dont la réductiondes troubles de l’écrit va être la clef de l’ac-cès à des chances de construction et de so-cialisation, notre responsabilité fondamen-tale pour leur éviter la souffrance et l’exclusionn’est-elle pas de nous demander si notre so-ciété, compétitive, égoïste et pressée, ne doitpas d’urgence aller vers eux pour leur don-ner leur deuxième ou troisième réelle chance,compte tenu de leur intelligence et leursaptitudes par ailleurs normales.

Ce ne sont pas eux qui sont fautifs d’êtredifférents. C’est nous qui n’avons pas encoresu, sauf trop rares exceptions constituantautant de petites lumières vertes significati-ves dans un horizon encore bien trop som-bre, admettre ou comprendre leur différenced’apprentissage de l’écrit, et été capable d’yrépondre.

Mon prof defrançais desixième étaitvraiment super.Au fil des mois,avec les rééduca-tions, je faisaismoins de fautes,même s’il y enavait toujoursbeaucoup trop.Mais pour m’évi-ter des zéros endictée, il notaitaussi mes progrès

Actuellement,David va mal. Àla maison, lesdevoirs sont trèsdifficiles à faire,jusques tardaprès-manger. Ildemande toujourss’il y a école lelendemain. Ilvoudrait souventêtre malade ou secasser une jambe.Il se lève trèsdifficilement lesjours d’école. Jepense que Davidserait un enfanttrès épanoui sil’école n’existaitpas

62 adsp n° 26 mars 1999

Les troubles d’apprentissage chez l’enfant

trib

unes

Dans la dynamiqueassociative

taines sont regroupées en fédérations (Asso-ciation des parents d’enfants dyslexiques,Apedys ; Fédération française des troubles dulangage et des apprentissages, FLA ; Unionnationale France dyslexie dysphasie, UNFDD),d’autres entretiennent, entre elles, des liensplus informels.

Ces associations essayent d’agir depuis long-temps et, malheureusement, comme cela a étéle cas dans d’autres domaines du handicap oude la santé, beaucoup de temps se passe avantqu’elles n’arrivent à se faire entendre. Les en-fants souffrant de troubles d’apprentissagerencontrent aujourd’hui l’incompréhensionqu’ont rencontrée les sourds (autre « handi-cap invisible »), pendant de longues années.

C’est en octobre 1987 qu’est enregistréeune proposition de loi n° 1044, tendant à lareconnaissance et à la prévention des diffi-cultés spécifiques d’apprentissage. Cette loine sera pas votée pour défaut de constitutiond’une commission spéciale dans les délaisprévus (dans l’exposé des motifs, il est indi-qué que des centaines de milliers d’enfantssont en souffrance).

À l’occasion du troisième Colloque inter-national de l’UNFD (Union nationale Francedyslexie), en janvier 1991, au ministère dela Santé, est publié un manifeste demandantla reconnaissance, dans l’éducation spécialisée,des troubles spécifiques neuropsychologiqueset la création d’un certificat d’études com-plémentaire abordant la neuropsychologie del’enfant pour les professionnels de la santé etde l’éducation.

Pour les enseignants, une formation estdemandée dans les IUFM, et une formationintégrée au cursus universitaire pour le corpsmédical et paramédical. Ce manifeste n’aurapratiquement pas de suites.

En janvier 1994, a lieu le quatrième Col-loque international européen de l’UNFD(Troubles d’apprentissage, langage oral et écrit,reconnaissance et prise en charge précoce) auministère de la Santé. Il apparaît clairementque, si les troubles du langage sont bien con-nus par un certain nombre de praticiens etde chercheurs, ils sont toujours ignorés parla plupart des enseignants, psychologues etmédecins, ainsi que par les responsables po-litiques et administratifs.

Il devient indispensable de créer une ins-tance complémentaire des associations deparents pour effectuer un travail techniqueet décloisonner le monde professionnel : l’as-sociation Coridys (Coordination des inter-venants auprès des personnes souffrant dedysfonctionnements neuropsychologiques)est créée en juillet 1994. Elle rassemble despraticiens hospitaliers, des chercheurs, desprofessionnels de la Santé et de l’Éducationainsi que des parents engagés dans ses pro-jets. Des institutions spécialisées, des grou-pements professionnels et des associations deparents sont également membres de Coridyset de nombreux chercheurs étrangers soutien-nent son action.

L’association travaille pour la reconnais-sance des troubles, la mise en place d’outilsde diagnostic et de rééducation. Son objec-tif est de devenir un organisme de coordina-tion, de formation, d’information et de re-cherche, animé par des permanents.

Créée en 1994,l’association

Coordination desintervenants auprès

des personnessouffrant de

dysfonctionnementsneuropsychologiques

(Coridys) travaille pourla reconnaissance des

troublesd’apprentissage,

l’amélioration desoutils de diagnostic et

de rééducation.

Ariel ContePrésident de l’association Coridys

www.Coridys.asso.fr

Il existe de nombreuses associations quise préoccupent des troubles du lan-gage et des troubles apparentés. Cer-

adsp n° 26 mars 1999 63

Tribunes

C’est la situation des dyslexiques et desdysphasiques qui a motivé la création deCoridys, mais il faut savoir que la liste de ceuxqui ont besoin de diagnostics neuropsycho-logiques précis et de rééducations bien ciblées(associés à d’autres modes de prise en charge)est très longue : les dyspraxiques, dyscalcu-liques, hyperactifs, traumatisés crâniens, in-firmes moteurs cérébraux, diabétiques, insuf-fisants rénaux, épileptiques, ainsi que lesautistes et bien d’autres encore qui souffrentd’atteintes cérébrales plus ou moins graves enraison de maladies ou d’accidents vasculai-res cérébraux, etc. D’autre part des étudesrécentes montrent qu’une importante pro-portion des enfants prématurés (que les pro-grès de la médecine sauvent de plus en plustôt), se révèle avoir des troubles d’apprentis-sage. De même des atteintes du système ner-veux, dues à des causes de toxicité de l’envi-ronnement ou à l’usage de drogues lors dela grossesse sont de plus en plus fréquentes.

La prise de conscience de l’ampleur de lapolitique à mener commence à se faire : cer-tains responsables de l’enseignement se pré-occupent d’intégrer, depuis peu, à la forma-tion de leur personnel, des connaissancesscientifiques sur le fonctionnement cérébral,mais une grande partie de la population etsurtout des professionnels, demeure dansl’ignorance des causes de ces troubles ce quiprovoque de grands retards et souvent l’absencede prise en charge avec des conséquences psy-chologiques et sociales dramatiques. Il fautinsister sur ce fait : un nombre considérabled’enfants et d’adolescents souffrent actuelle-ment d’un défaut de soins et de maltraitancepar ignorance. On peut s’attendre de la partdes familles à des demandes croissantes de soinset d’enseignement adapté, puis à de vives réac-tions quand l’étendue du désastre apparaîtra.

Ceux qui luttent contre l’illettrisme n’ontpas encore tous compris qu’une importanteproportion des « illettrés » est composée depersonnes qui cumulent des dysfonctionne-ments neuropsychologiques et des difficul-tés sociales et psychologiques.

De bons tests de dépistage précoce destroubles du langage existent et leur utilisa-tion est en train de s’étendre. Cela est uneexcellente chose, mais va très vite mettre enlumière une situation, pour le moment,impossible à gérer. En effet, le diagnosticprécis et la rééducation de ces troubles de-mandent des outils, une organisation desprises en charge et des formations qui sonttrès loin de pouvoir répondre aux besoinspotentiels.

L’extrême cloisonnement des savoirs et despratiques thérapeutiques et éducatives a renduimpossible, jusque-là, la perception du pro-blème. Aucune grande étude épidémiologi-que n’a jamais été faite en France dans lechamp des dysfonctionnements neuropsycho-logiques. Nous sommes en présence d’unphénomène qui est encore mal identifiémalgré son ampleur en raison de sa com-plexité et de l’extrême morcellement des élé-ments qui le composent. Cette situation estmoralement inacceptable, d’autant qu’elle ades conséquences économiques et sociales surl’ensemble de la société.

Informer et décloisonnerLes avancées dans ce domaine ne serontpossibles que si une prise de conscience a lieuà tous les échelons. C’est pour cette raisonque l’association travaille, avec beaucoupd’autres, à informer et à décloisonner leschamps professionnels par tous les moyensà sa disposition.

Des réseaux sont en train de se construiredans de nombreuses régions. Ces réseauxs’articulent peu à peu à des centres de ressour-ces qui seront bientôt à la disposition desfamilles et des professionnels (information,écoute et orientation dans un premier temps,puis formation dépistage et diagnostic). Lepremier de ces centres fonctionne à Aix-en-Provence et deux autres ouvriront très pro-chainement à Paris et dans le Sud-ouest.

Un travail théorique de mise en communde connaissances complémentaires mais ac-tuellement séparées les unes des autres estdevenu nécessaire. Un institut de recherched’un nouveau type devrait en avoir la charge.L’association est sollicitée pour participer àl’élaboration de formations universitaires àParis et à Aix-Marseille.

Sans les moyens modernes d’information,le combat serait perdu d’avance. Aussi l’as-sociation se préoccupe-t-elle de créer des do-cuments audiovisuels de façon à transmet-tre au plus grand nombre le savoir dequelques-uns, en tenant compte de la diversitédes besoins. Il s’agit de produire, en plus desmanuels, de nombreux films et CD-Rom,pour transmettre les connaissances théoriqueset pratiques en complément de l’enseigne-ment traditionnel.

Coridys s’applique également à dévelop-per un site Internet (qui est déjà consulté parplus de mille personnes chaque mois). Il estnécessaire, en effet, de proposer à tous ceuxqui en ont besoin un accès rapide aux infor-mations indispensables (articles, répertoire des

associations, informations sur la recherche etles institutions, bibliographie, fiches techni-ques, etc.). Ce site devra être relié à ceux quiexistent déjà dans des domaines apparentés.La base documentaire et le réseau de com-munication serviront également à recenser lesexpériences de terrain, les méthodes pédago-giques et rééducatives existantes afin de lesfaire connaître.

Une des priorités consiste à réaliser unesynthèse, communicable aux responsablespolitiques et administratifs, des données duproblème, tant au niveau scientifique qu’auniveau des statistiques et des expériences deterrain.

Coridys est le maître d’œuvre d’un groupede travail, où se rencontrent une cinquantained’experts et de partenaires et qui rédige ac-tuellement un « rapport sur les troubles dulangage et troubles apparentés ». Ce rapport,qui devrait être terminé dans quelques mois,est attendu par les ministères concernés. Cettesynthèse pourra, bien évidemment, servir àl’information des professionnels concernés etdu public.

L’ensemble de ce programme se met enroute trop lentement car Coridys, commetoutes les associations à leur début, manqueencore des vrais moyens de sa politique.

64 adsp n° 26 mars 1999

Les troubles d’apprentissage chez l’enfant

trib

unes Les pédiatres

face aux troublesd’apprentissage

Alors que l’on connaîtles conséquences des

troubles du langage surla scolarité, aucune

information n’estspécifiquementdispensée aux

pédiatres durant leurcursus universitaire.

Isabelle Moreau-GaudryCatherine Panconi

PédiatresGroupe des pédiatres de la

Gironde et de l’AFPA

en quatre années après le tronc commun demédecine de six ans. L’accès est contrôlé parle concours de l’internat de spécialité ; laformation est essentiellement pratique etuniquement hospitalière. Elle se partage ensemestres dans les diverses sous-spécialités dela pédiatrie hospitalière : néonatalogie, réa-nimation, pneumologie, gastro-entérologie,endocrinologie, hémato-cancérologie….

En fonction des centres hospitaliers, il existeaussi des séances de formation théorique engénéral en rapport avec la pratique hospitalière.

Pendant les quatre années de formation,l’interne gère le quotidien hospitalier (serviced’hospitalisation, gardes d’urgence…).

Aucun enseignement sur les troubles d’ap-prentissage n’est dispensé à la faculté quiporterait sur les troubles du langage chez l’en-fant sur ses versants neuropsychologiques, surle développement cognitif de l’enfant alorsque l’on sait depuis bien longtemps que cestroubles ont pour conséquences des troublesd’apprentissage scolaires et qu’ils affectent cha-que année 10 % de la population.

La formation est donc inexistante pour lesfuturs médecins tout au long du cursus uni-versitaire.

La formation est aussi inexistante pour lesfuturs pédiatres tout au long de leur forma-tion hospitalière et universitaire.

Certes, ces problèmes ont pu être évoquésdans les services de neurologie pédiatrique àl’occasion d’un dossier, ou bien en consul-tation, mais on ne peut pas parler de forma-tion pour un sujet aussi complexe et vaste.

Il faut également signaler que l’internat despécialité n’existant que depuis 1985, pro-fessent toujours dans notre pays des pédia-tres formés par le CES (certificat d’étudesspécialisées). La formation n’était pas beau-coup plus importante. Le module de pédia-trie sociale leur donnait quelques connaissan-ces très théoriques sur le sujet.

Lorsque l’on devient pédiatre libéral, onest tout d’abord frappé par le nombre d’en-fants en difficulté scolaire dans nos consul-tations, par la gêne des parents pour nous enparler, car c’est souvent incidemment, aprèsune vaccination ou lors d’une angine que l’onapprend que l’enfant présente des problèmesà l’école. Ce réel problème nous remet encause. Il est exceptionnel que le motif de laconsultation porte sur ces troubles du lan-gage qui sont avant tout un problème médicalet un grave problème de santé publique quideviendra un problème socio-éducatif.

La prise en charge est tout à fait parcellaireet non codifiée : pour une population d’en-fants présentant des troubles d’apprentissagescolaires, une partie sera parfois suivi en or-thophonie depuis un an et ceci quelquefoissur les seuls conseils de l’institutrice, et l’autreen psychothérapie depuis deux ans… et biensouvent sans grand résultat et pour un coûtmajeur pour la société.

La prise en charge est pratiquement tou-jours inadaptée, les enfants sont mal orien-tés, ce problème étant encore, en France,considéré comme d’origine psychologiquevoire psychiatrique. Et pourtant nous savonsqu’une psychothérapie isolée est totalementinefficace sur ce type de troubles.

C’est là que depuis des années, on voit qu’il

L e pédiatre est le médecin de l’enfant,de la naissance à 18 ans. La formationde pédiatrie se déroule actuellement

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Tribunes

y a eu une certaine dérive et que bon nom-bre de difficultés scolaires ne sont abordéeset traitées que sur le plan psychiatrique. Ainsiles centres médicaux de prévention (typeCMPP) n’ont généralement pas de médecinneuropédiatre en leur sein, ni de neuro-psychologue pourtant spécialiste de ces trou-bles.

Pourtant nous, pédiatres mal formés dansnotre cursus initial, nous sommes très cons-cients de notre rôle de prévention dès lespremiers mois de la vie et c’est tous les jours,dans nos consultations, que nous sensibili-sons les parents à l’importance du bain delangage et aux signes qui doivent les alarmerconcernant l’audition, les premiers mots,l’orientation spatio-temporelle, la psycho-motricité fine… tous les jours aussi, nouspratiquons bilans auditifs, bilans visuels,dépistage des troubles du langage oral.

Le pédiatre peut être le coordonateur duréseauDès qu’un trouble est découvert, nous nousorganisons en envoyant les enfants à de ra-res correspondants locaux dont on sait qu’ilsse sont personnellement investis dans les trou-bles des apprentissages scolaires. Tout cecireste un mode de travail très empirique et cer-tainement pas d’une extrême efficacité. Deplus, les bilans et les prises en charge despsychomotriciens et des psychologues quisont souvent essentiels dans les difficultésscolaires ne sont pas remboursés par les caissesd’assurance maladie. La prise en charge parles psychologues libéraux pose le même pro-blème.

Que penser des sommes importantes de-mandées à des familles souvent aussi en dif-ficulté financière ? Ainsi, des bilans ne sontpas pratiqués pour raisons financières, les fa-milles abandonnent et les enfants sont orientésvers des structures inadaptées.

Devant la nécessité de combler le vide deformation existant, il s’est organisé au seinde l’AFPA (association française de pédiatrieambulatoire) un groupe de travail et de ré-flexion sur les difficultés scolaires qui orga-nise des journées de formation sur le plannational regroupant les différents acteurs s’in-téressant au problème (pédiatres, médecinsde PMI, médecins scolaires, neuropédiatres,pédopsychiatres, psychologues, orthopho-nistes, psychomotriciens, kinésithérapeutesenseignants, associations de parents). Cesconfrontations sont toujours très enrichis-santes et nous confortent dans l’idée qu’il estimpératif de travailler ensemble.

Actuellement, on voit donc s’ébaucher uneformation qu’il faudra sûrement institution-naliser, intensifier et étendre bien évidemmentau cursus universitaire.

Il manque totalement de réseaux locauxpermettant des diagnostics et des prises encharge précoces et rapides.

Pour pallier ces carences, il faut instaurerun travail d’équipe avec des réseaux effica-ces. C’est ainsi que l’on accueille avec beau-coup d’enthousiasme tout projet allant dansce sens. Restent à définir les modalités defonctionnement et le rôle de chacun des ac-teurs : médecins de PMI, médecins scolaires,médecins libéraux. Mais nous sommes per-suadés que le pédiatre doit être un des élé-ments clé du réseau.

Chaque enfant doit pouvoir bénéficier d’undépistage systématique lors de l’examen des3-4 ans fait par les médecins de PMI et lesmédecins scolaires à 5-6 ans avant l’entrée aucours préparatoire. Ces examens se doiventd’être complets et standardisés.

Ces enfants dépistés « en difficulté » doi-vent pouvoir être adressés à un pédiatre forméqui pose le diagnostic et organise une priseen charge ou bien adresse à un centre de ré-férence pour les cas les plus difficiles.

Mais malheureusement il s’agit encore d’unvœu, il faudrait restructurer la prise en chargede ces enfants en difficulté scolaire. Le pé-diatre formé doit être le coordinateur d’unréseau efficace.

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Les troubles d’apprentissage chez l’enfant

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Association des parents d’enfants dyslexi-ques (Apedys)55, domaine de Villepreux-Cantelaude33160 Saint-Aubin-de-Médoc

Coordination des intervenants auprès despersonnes souffrant de dysfonctionnementsneuropsychologiques (Coridys)44, rue Poussin75016 Paris

Fédération française des troubles du langageet des apprentissages (FLA)52, rue du Ranelagh75116 Paris

Union nationale France dyslexie dysphasie(UNFDD)Hôpital Armand Trousseau26, avenue du Docteur Arnold Netter75012 Paris