LES PUBLICAaTIONS ÉCONnOMIQUES DEo … · des autorités qui n’hésitent pas/ à aller...

21
panorama LES PUBLICATIONS ÉCONOMIQUES DE COFACE Juillet 2013 Panorama Brésil Septième économie mondiale (et deuxième émergente) par la taille de son PIB, le Brésil est le pays émergent par excellence. Il a brillamment passé l'épreuve de la grande crise de 2009, démontrant la solidité de ses fondamentaux économiques et la maturité de ses institutions politiques. Mais depuis deux ans, l'optimisme légendaire des Brésiliens est mis à rude épreuve : faiblesse de la croissance, perte de compétitivité industrielle et, plus récemment, manifestations massives d'une population qui s'impatiente… Le moteur brésilien peut-il être réparé ? Ce panorama propose un focus global, abordant les défis économiques, les enjeux sociopolitiques et l’analyse sectorielle. La panne de croissance et les tensions sociales sont le résultat de problèmes structurels qui relèvent moins des politiques économiques classiques que de réformes touchant aux infrastructures et à l’édu- cation. Autant de questions, comme le souligne Cristiano Souza de Santander, « qui ne peuvent pas être résolues à court terme ». Dans ce contexte de croissance faible, le taux de défaut de paiement des entreprises ne pourra pas baisser, selon Luiz Rabi de Serasa. D’un côté, les entreprises profitent de la bonne tenue de la demande des ménages. Mais de l’autre, les taux d’intérêt et la faiblesse de l’activité globale pèsent sur leurs performances. Dans toutes les analyses sectorielles présentées dans ce panorama (chimie, sidérurgie, automobile, distribution, agroalimentaire), le fameux « coût Brésil » revient comme un handicap déterminant. Par exemple, le coût de l’énergie pèse sur la sidérurgie ; les pressions haussières sur les salaires érodent la compétitivité de l’industrie chimique. Les petits producteurs du secteur agricole souffrent du manque d’accès aux nouvelles technologies. Toutefois, le tissu entrepreneurial du Brésil bénéficie de deux points forts. Le premier est l’implication forte et constante des autorités qui n’hésitent pas à aller jusqu’au protectionnisme. Fernando Figueiredo, Président de l’Association de l’industrie chimique, analyse le conseil de compétitivité consacré à la chimie, initié par l’exécutif, comme « un coup de pouce final » à la reprise. Le second point fort est le dynamisme des revenus de la classe moyenne qui participe certes à la hausse des coûts mais qui soutient l’automobile et le commerce de détail, deux secteurs phares. La classe moyenne brésilienne qui s’équipe attire les convoitises des investisseurs internationaux, en témoigne l’intérêt des constructeurs automobiles coréens et chinois. Bref, le pays a de sérieuses cartes en main pour espérer le redémarrage de cet immense marché… SOMMAIRE /02 Economie brésilienne : la panne ? Par Rémy Carasse et Yves Zlotowski /06 Une société sous tension Par Dominique Fruchter INTERVIEWS /10 Cristiano Souza Economiste, Santander /12 Luiz Rabi Economiste, Serasa Experian /13 Fernando Figueiredo Président, Abiquim FOCUS SECTORIEL Par Patricia Krause /16 Chimie : un essor impressionnant, mais une compétitivité fragile /17 Sidérurgie : des atouts pour inverser des résultats décevants /18 Automobile : le quatrième marché du monde attise les convoitises /20 Distribution : force motrice de l’économie /21 Agroalimentaire : un nouveau plan de relance après le revers de 2012 LES PUBLICATIONS ÉCONOMIQUES DE COFACE 1 RESERVE Le présent document reflète l’opinion de la direction de la recherche économique de Coface, à la date de sa rédaction et en fonction des informations disponibles; il pourra être modifié à tout moment. Les informations, analyses et opinions qu’il contient ont été établies sur la base de multiples sources jugées fiables et sérieuses ; toutefois, Coface ne garantit en aucun cas l’exactitude, l’exhaustivité ou la réalité des données contenues dans le présent document. Les informations, analyses et opinions sont communiquées à titre d’information et ne constituent qu’un complément aux renseignements dont le lecteur dispose par ailleurs. Coface n’a aucune obligation de résultat mais une obligation de moyens et n’assumera aucune responsabilité pour les éventuelles pertes subies par le lecteur découlant de l’utilisation des informations, analyses et opinions contenues dans le présent document. Ce document ainsi que les analyses et opinions qui y sont exprimées appartiennent exclusivement à Coface ; le lecteur est autorisé à les consulter ou les reproduire à des fins d’utilisation interne uniquement sous réserve de porter la mention apparente de Coface et de ne pas altérer ou modifier les données. Toute utilisation, extraction, reproduction à des fins d’utilisation publique ou commerciale est interdite sans l’accord préalable de Coface. Le lecteur est invité à se reporter aux mentions légales présentes sur le site de Coface.

Transcript of LES PUBLICAaTIONS ÉCONnOMIQUES DEo … · des autorités qui n’hésitent pas/ à aller...

Page 1: LES PUBLICAaTIONS ÉCONnOMIQUES DEo … · des autorités qui n’hésitent pas/ à aller jusqu’au protectionnisme. Fernando Figueiredo, Président de l’Association de l’industrie

pano ramaLES PUBLICATIONS ÉCONOMIQUES DE COFACE

Juillet 2013

Panorama

Brésil

Septième économie mondiale (et deuxième émergente) par la taille de son PIB, leBrésil est le pays émergent par excellence. Il a brillamment passé l'épreuve de lagrande crise de 2009, démontrant la solidité de ses fondamentaux économiqueset la maturité de ses institutions politiques. Mais depuis deux ans, l'optimismelégendaire des Brésiliens est mis à rude épreuve : faiblesse de la croissance, pertede compétitivité industrielle et, plus récemment, manifestations massives d'unepopulation qui s'impatiente… Le moteur brésilien peut-il être réparé ?

Ce panorama propose un focus global, abordant les défis économiques, les enjeuxsociopolitiques et l’analyse sectorielle. La panne de croissance et les tensionssociales sont le résultat de problèmes structurels qui relèvent moins des politiqueséconomiques classiques que de réformes touchant aux infrastructures et à l’édu-cation. Autant de questions, comme le souligne Cristiano Souza de Santander, «qui ne peuvent pas être résolues à court terme». Dans ce contexte de croissancefaible, le taux de défaut de paiement des entreprises ne pourra pas baisser, selonLuiz Rabi de Serasa. D’un côté, les entreprises profitent de la bonne tenue de lademande des ménages. Mais de l’autre, les taux d’intérêt et la faiblesse de l’activitéglobale pèsent sur leurs performances.

Dans toutes les analyses sectorielles présentées dans ce panorama (chimie,sidérurgie, automobile, distribution, agroalimentaire), le fameux « coût Brésil »revient comme un handicap déterminant. Par exemple, le coût de l’énergie pèsesur la sidérurgie ; les pressions haussières sur les salaires érodent la compétitivitéde l’industrie chimique. Les petits producteurs du secteur agricole souffrent dumanque d’accès aux nouvelles technologies. Toutefois, le tissu entrepreneurial duBrésil bénéficie de deux points forts. Le premier est l’implication forte et constantedes autorités qui n’hésitent pas à aller jusqu’au protectionnisme. FernandoFigueiredo, Président de l’Association de l’industrie chimique, analyse le conseil decompétitivité consacré à la chimie, initié par l’exécutif, comme « un coup de poucefinal » à la reprise. Le second point fort est le dynamisme des revenus de la classemoyenne qui participe certes à la hausse des coûts mais qui soutient l’automobile etle commerce de détail, deux secteurs phares. La classe moyenne brésilienne quis’équipe attire les convoitises des investisseurs internationaux, en témoigne l’intérêtdes constructeurs automobiles coréens et chinois. Bref, le pays a de sérieuses cartesen main pour espérer le redémarrage de cet immense marché…

SOMMAIRE

/02 Economie brésilienne : la panne ?Par Rémy Carasse et Yves Zlotowski

/06 Une société sous tensionPar Dominique Fruchter

INTERVIEWS

/10 Cristiano SouzaEconomiste, Santander

/12 Luiz RabiEconomiste, Serasa Experian

/13 Fernando FigueiredoPrésident, Abiquim

FOCUS SECTORIELPar Patricia Krause

/16 Chimie : un essor impressionnant, mais une compétitivité fragile

/17 Sidérurgie : des atouts pour inverser des résultats décevants

/18 Automobile : le quatrième marché du mondeattise les convoitises

/20 Distribution : force motrice de l’économie

/21 Agroalimentaire : un nouveau plan de relanceaprès le revers de 2012

LES PUBLICATIONS ÉCONOMIQUES DE COFACE 1

RESERVELe présent document reflète l’opinion de la direction de la recherche économique de Coface, à la date de sa rédaction et en fonction des informations disponibles ; il pourra être modifié à tout moment. Les informations, analyses et opinions qu’il contient ont été établies sur la base de multiples sources jugées fiables et sérieuses ; toutefois, Cofacene garantit en aucun cas l’exactitude, l’exhaustivité ou la réalité des données contenues dans le présent document. Les informations, analyses et opinions sont communiquées à titred’information et ne constituent qu’un complément aux renseignements dont le lecteur dispose par ailleurs. Coface n’a aucune obligation de résultat mais une obligation de moyens etn’assumera aucune responsabilité pour les éventuelles pertes subies par le lecteur découlant de l’utilisation des informations, analyses et opinions contenues dans le présent document.Ce document ainsi que les analyses et opinions qui y sont exprimées appartiennent exclusivement à Coface ; le lecteur est autorisé à les consulter ou les reproduire à des fins d’utilisationinterne uniquement sous réserve de porter la mention apparente de Coface et de ne pas altérer ou modifier les données. Toute utilisation, extraction, reproduction à des fins d’utilisationpublique ou commerciale est interdite sans l’accord préalable de Coface. Le lecteur est invité à se reporter aux mentions légales présentes sur le site de Coface.

Page 2: LES PUBLICAaTIONS ÉCONnOMIQUES DEo … · des autorités qui n’hésitent pas/ à aller jusqu’au protectionnisme. Fernando Figueiredo, Président de l’Association de l’industrie

LES PUBLICATIONS ÉCONOMIQUES DE COFACE 2

Les chiffres de la croissance ne cessent de décourager l’optimisme légendaire des Brésiliens. En 2012, l’activité a été la plusfaible enregistrée des BRICS(1) (0,9% contre une moyenne de 4,8% pour l’ensemble des pays émergents). Le premier trimestre2013 a de nouveau déçu alors que tous les observateurs tablaient sur une reprise franche : l’activité n’aura crû que de 1,9% sur un an. A ces déceptions du côté de la croissance, s’ajoute une inflation persistante : la hausse des prix à laconsommation a encore atteint 6,5% en mai 2013. Cette quasi-stagflation est une des causes, parmi d’autres, des mouvementssociaux de grande ampleur que connaît le pays à la mi-juin 2013. Or la stagflation pose un dilemme à la politique monétaire.Faut-il privilégier la reprise et donc baisser les taux d’intérêt ? Ou, ne vaut-il pas mieux, au contraire, les remonter pour luttercontre l’inflation, particulièrement mal ressentie par la population d’un pays dont l’historique est douloureux en matière dehausse des prix ? Finalement, la stagflation brésilienne relève de facteurs structurels, le fameux « coût Brésil », qui sontdevenus des questions conjoncturelles : tensions sur le marché du travail, perte de compétitivité, infrastructures défaillantes…Telles sont les causes de la « panne brésilienne ».

Contrairement à la légende et surtout comparé aux autresgrands pays émergents, le Brésil se caractérise par unecroissance potentielle contrainte : le PIB n’a progressé quede 3,6% en moyenne entre 2000 et 2011, loin, bien sûr, dela Chine (10,2%) mais également de la Russie (5,3%). Cetteperformance relativement modeste tient à des facteurs struc-turels typiques de l’Amérique latine : un taux d’investissementfaible comparativement aux économies asiatiques (18% du PIB, contre 45% en Chine), et une croissance volatile, ledynamisme de la demande interne ayant tendance à creuser

le déficit courant qui s’ajuste ensuite violemment. Bref, le Brésil est habitué à des booms and busts, comme l’illustrele graphique 1 sur le taux de croissance du PIB et le soldecourant depuis les années 1980. Après un boom record en2010 – la croissance a frôlé les 8%, ce qui s’apparentait à unenette surchauffe – 2011 et 2012 ont été, comme attendu, desannées de ralentissement. En somme, une composantecyclique typiquement brésilienne explique la décélérationobservée.

(1) Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud

Economie brésilienne : la panne ?Juin 2013

Cet inquiétant cocktail, la stagflation

GRAPHIQUE 1 :Croissance du PIB (%) et solde courant (% du PIB)

Source : FMI

10

8

6

4

2

0

-2

-4

-6

-8

-10

PIB (taux de croissance)

Solde courant (% PIB)

1980

1982

1984

1986

1988

1990

1992

1994

1996

1998

2000

2002

2004

2006

2008

2010

2012

Analyse macro-économique

Par Rémy CarasseEconomiste, Coface

Yves ZlotowskiEconomiste en Chef, Coface

Page 3: LES PUBLICAaTIONS ÉCONnOMIQUES DEo … · des autorités qui n’hésitent pas/ à aller jusqu’au protectionnisme. Fernando Figueiredo, Président de l’Association de l’industrie

LES PUBLICATIONS ÉCONOMIQUES DE COFACE 3

(2) Lors de la période de la grande appréciation entre 2009 et 2011, les autorités ont réagien mettant en place une taxe sur les entrées de capitaux dont l’impact sur le taux dechange en tant que tel a été finalement limité. On estime toutefois que cette taxe a permisde modifier le type de capitaux entrant, au profit d’investissements directs étrangers, moinsspéculatifs. Ce point est traité en détail dans Panorama risques pays Coface, Les transfor-mations du risque pays émergents, mars 2013, voir pages 7 et 8 sur les contrôles de capitaux au Brésil.

Néanmoins, les performances brésiliennes inquiètent : malgréle mouvement impressionnant de baisse des taux d’intérêtopéré par la Banque centrale, l’activité ne repart pas. Entreaoût 2011 et octobre 2012, la Banque du Brésil a pu abaisserson taux directeur de 12 à 7,25%, un effort remarquableavec un résultat plutôt décevant. Au quatrième trimestre2012, l’activité affichait un rythme annuel de croissance de1,4% et surtout une persistante contraction de l’investisse-ment. L’inflation, quant à elle, franchissait allégrement labarre des 6%. Derrière cet échec à relancer l’activité, secache un problème de fond pour la croissance brésilienne.Durant toute l’année 2012, la consommation des ménagesest restée allante, – dynamisée par la réduction du taux de chômage et la hausse continue des revenus réels desménages – et a soutenu l’activité. Mais l’investissement des entreprises s’est contracté et l’offre n’a pas suivi. Ce dilemme est bien illustré par le graphique 2 qui met en rela-tion les ventes de détail (qui traduit l’appétit de consomma-tion des Brésiliens) et la production industrielle (qui illustre lesmultiples contraintes pesant sur l’offre). Les premières sontrestées résilientes en 2011 et 2012, tandis que la seconde étaiten recul. Ce déphasage entre l’offre et la demande est typiquedes situations de stagflation. Les données du PIB, au premiertrimestre 2013, montrent une inversion de la tendance : la consommation s’affaisse, l’investissement repart. Mais il est difficile de dire s’il s’agit d’un changement durable du régimede croissance, dont le rythme reste décevant.

Faut-il blâmer la Banque centrale et le real ?

Une grande partie des problèmes de la croissance brésiliennea été imputée à la politique monétaire : des taux d’intérêtréputés trop élevés et une insupportable appréciation du tauxde change. Pour relancer l’activité en 2013, il ne faudra pluscompter sur les taux d’intérêt. La Banque centrale considèrequ’elle en a fait assez et l’inflation a dépassé les limites accep-tables : sa cible est de 4,5% avec une marge de +/-2% et à6,5%, elle a atteint la borne haute. Aussi l’institut d’émission arepris un cycle haussier depuis avril 2013 (avec une secondehausse en mai), les taux se situant aujourd’hui à 8%. Le créditbancaire a été extrêmement dynamique depuis 2009 : il a crûde 15 à 20% en rythme annuel. Le rythme était encore de +17%en avril 2013 ! En stock, le crédit est limité par rapport au PIB(autour de 50%, contre 130% en Chine) mais il est indéniableque l’intermédiation financière progresse sensiblement. L’offrede crédit a cependant une particularité qui relativise l’appétitdes banques. Ce sont en fait les banques publiques qui sont àl’origine de ce remarquable dynamisme. En effet, le rythme decroissance du crédit des entités publiques était de 41% en avril2013, contre 7% pour les entités privées (soit proche de zéroen termes réels). Aujourd’hui, le crédit de banques publiquesreprésente 47% du stock, dont 20% pour la seule BNDES(Banque de développement du Brésil). Ce rôle majeur ducrédit public a des inconvénients. Pour certains observateurs,la BNDES a trop prêté aux grands champions de l’industrie,sans réellement jouer son rôle de substitut aux insuffisancesdu marché. En outre, le gonflement de son bilan est un contin-gent liability (engagement conditionnel) pour l’Etat. Restequ’en tout état de cause et compte tenu de son dynamisme inin-terrompu, le crédit a soutenu l’activité depuis la crise.

Le taux de change, objet d’un intense débat au Brésil, a connuune trajectoire très étonnante. Entre le 21 novembre 2009 etla fin juillet 2011, la devise brésilienne s’est appréciée depresque 60% contre le dollar. On comprend mieux pourquoiles autorités brésiliennes ont multiplié les déclarations con-tre « la guerre des monnaies » et l’action jugée dévastatricede la Réserve fédérale américaine (2). Cependant depuis juillet2011, le real a perdu 30% contre le dollar. A la mi-juin 2013, sousl’influence des annonces de modifications de la politiquemonétaire américaine et des manifestations sociales mas-sives, le rythme de baisse de la devise brésilienne est mêmedevenu préoccupant. La question du taux de change estultra-sensible au Brésil : l’industrie pèse pour près de 23%du PIB et 40% des exportations. Automobile, aéronautique,chimie ou jus d’orange… le pays est présent dans de nom-breux secteurs. La menace de la désindustrialisation est unenjeu tant pour l’emploi que pour la soutenabilité de la crois-sance. Or le solde commercial brésilien affiche des résultats deplus en plus décevants. Selon les prévisions de Santander, l’excédent passerait de 19,4 milliards de dollars en 2012 à 1,8 en2013 et deviendrait déficitaire en 2014. Le solde courant, défici-taire depuis 2007, ne cesse de se creuser. Il devrait se situerlégèrement en-dessous de -3% du PIB en 2013.

GRAPHIQUE 2 :Ventes de détail et production industrielle (glissement annuel, %)

Source : IBGE (Institut Brésilien de Géographie et de Statistiques)

Ventes de détail (GA, %)

Production industrielle (GA, %)

Page 4: LES PUBLICAaTIONS ÉCONnOMIQUES DEo … · des autorités qui n’hésitent pas/ à aller jusqu’au protectionnisme. Fernando Figueiredo, Président de l’Association de l’industrie

Le marché du travail est tendu…

Le taux de chômage au Brésil a remarquablement chutédepuis le début des années 2000, passant de 12,4% en2003 à seulement 5,5% en 2012 pour se stabiliser à 5,8%en mai 2013 (cf. graphique 3). Certes, cette situation dequasi plein emploi soutient la consommation des ménages(cf. graphique 2). Mais elle risque de continuer de pousserles salaires à la hausse et d’entretenir les pressions infla-tionnistes tout en pesant sur les profits des entreprises. De plus, le salaire minimum a, de nouveau, augmenté de9% le 1er janvier 2013. Le taux de chômage continue d’êtreen deçà du taux dit naturel (c’est-à-dire compatible avecune inflation faible) estimé à environ 6%. Et les tensions surle marché du travail ne semblent pas se réduire, malgré la croissance affaiblie que connaît le pays depuis la mi-2011. La productivité demeure également décevante en raison,notamment, d’une pénurie de main d’œuvre qualifiée et desemplois créés, pour la plus part, dans des activités de servicespeu productives (4), contribuant donc peu à la croissance dupays.

… les coûts augmentent…

Cette montée des salaires a eu un impact majeur sur lescoûts. On observe effectivement une tendance longue dehausse des coûts au Brésil, qui s’est significativementrépercutée sur l’industrie. La production industrielle a ainsireculé de 0,8% en 2012 (et s’est une nouvelle fois contractéede 0,3% T/T en mai 2013) alors que le secteur des servicesa progressé de 1,7%. La raison est simple : les activités deservices non échangeables sont plus aptes à s’adapter àune montée des salaires, puisqu’elles ont une capacité plusforte pour transférer des coûts plus importants en prix plus élevés. Or l’expérience passée du Brésil montrebien que les périodes de croissance soutenue du pays sont souvent accompagnées d’un dynamisme important del’industrie (cf. graphiques 1 et 2). De nombreuses mesuresadoptées en 2012, tant sur le plan fiscal que monétaire (5),avaient pour objectif de limiter les pertes de compétitivitédu secteur industriel. Cependant, cette montée significativedes coûts unitaires du travail de 83% entre 2003 et 2012(cf. graphique 4) a indéniablement fait perdre le pays encompétitivité face à ses voisins et aux autres grands paysémergents. La différence entre les coûts horaires du travailest assez spectaculaire : en 2012, alors qu’ils se limitent àseulement 2,2 dollars au Mexique, 4,7 au Chili et 3,17 en Chine,ils s’élèvent à 11,1 au Brésil ! Cette dynamique défavorable alourdement pesé sur la productivité et la croissance dupays, ralenties de plus par des infrastructures clairementinsuffisantes.

Or, s’il y a bien une perte de compétitivité de l’industriebrésilienne, le taux de change ne peut en être tenu pour seulresponsable puisque sa course folle à la hausse est inter-rompue depuis près de deux ans. Il faut en effet regarderailleurs : depuis la mi-2010, les coûts unitaires du travailexplosent (+10% sur un an en avril 2013). La productivité del’industrie décline (-0,5% sur la même période) (3). La forteappréciation du taux de change a eu au total le désavantaged’accentuer la perte de compétitivité de l’industrie. Aujour-d’hui, sa baisse peut contribuer à alimenter les pressionsinflationnistes. Toutefois, la hausse des prix et la mollesse del’activité sont le résultat de facteurs plus profonds que lesexcessifs mouvements du real. C’est ce qu’on appelle le « coût Brésil », à commencer par le coût du travail.

LES PUBLICATIONS ÉCONOMIQUES DE COFACE 4

(3) Pinheiro T. (2013), Brazil: exchange rate regime under pressure, Santander, StrictlyMacro, June 20.

(4) Le secteur des services a notamment bénéficié de la réduction de l’emploi informel,les emplois formels ayant atteint 66% du total des emplois en 2012 contre 57% en 2005.

(5) Réduction de la TVA sur les équipements domestiques et les automobiles, diminutiondes charges salariales dans les secteurs intensifs en main d’œuvre, stimulus monétaire,dépréciation du real, etc.

GRAPHIQUE 3 :Taux de chômage (%) et salaires réels (Janv-03 = 100)

GRAPHIQUE 4 :Coûts salariaux unitaires (Janv-03 = 100)

Source : IBGE

Source : OCDE

Taux de chômage (%)

Salaires réels mensuels moyens (Janv-03 = 100)

% Janv-03 = 100

Brésil

Chine

Chili

Mexique

Inde

Russie

Afrique du Sud

Page 5: LES PUBLICAaTIONS ÉCONnOMIQUES DEo … · des autorités qui n’hésitent pas/ à aller jusqu’au protectionnisme. Fernando Figueiredo, Président de l’Association de l’industrie

Conclusion

Le fameux « coût brésil » est devenu un problème brûlant pour le pays : une situation tenduedu marché du travail, une industrie fragilisée par son manque de compétitivité et des infra-structures qui peinent à se développer. Le modèle de croissance brésilien tiré par la consom-mation est en panne ; au point que la vie de plus en plus chère et les blocages en matièred’infrastructures ont provoqué un immense mécontentement, illustré par les manifestationsde masse de la mi-juin 2013. Les remèdes à la stagflation brésilienne ne se situent pas dans la politique économique, mais bien dans des réformes pour améliorer l’éducation etaugmenter ainsi le nombre de travailleurs qualifiés. En outre, un effort d’amélioration desinfrastructures est indispensable pour lutter contre les goulots d’étranglement. Mais ce sontlà des traitements difficiles à mettre en place et les résultats ne se verront qu’à long terme.En attendant, la population s’impatiente….

… et les infrastructures sont déficientes

Le coût du travail ne constitue pas le seul obstacle à lacroissance brésilienne. Dernier élève de la classe des BRICSen matière de qualité des infrastructures (cf. graphique 5),le Brésil peine à les améliorer malgré les nombreux projetsen vue de la Coupe du monde de football de 2014 et desJeux olympiques de 2016. En effet, la qualité des routes, desinfrastructures portuaires, aériennes et ferroviaires demeuredéfaillante. Les autorités se sont engagées à augmenter leursdépenses, tentant d’encourager les investissements enmatière de grandes infrastructures – liés surtout aux deuxgrands événements sportifs à venir. La présidente DilmaRousseff a dévoilé, en août 2012, un plan de relance colossalreposant sur des partenariats public-privé et l’ouverture deconcessions sur des routes, des voies ferrées et des aéroports.Les investisseurs restent cependant hésitants face à une forte bureaucratie, des procédures administratives lourdes,une fiscalité excessive et inefficace, auxquelles s’ajoute unevolonté de contrôle accrue de l’Etat sur l’économie. Un doutepersiste donc sur la capacité interne du pays à mettre enœuvre les investissements annoncés, d’autant plus que lesgrands projets d’investissement n’ont, jusque là, pas été réa-lisés au rythme espéré, comme en témoigne le retard qu’ontpris les grands travaux lancés par l’ancien président Lula ou encore la poursuite du Programme d’accélération de lacroissance (6) (PAC2) qui n’a décaissé que 30% du budgetprévu en 2012. Ce déficit chronique d’infrastructures continueainsi d’handicaper considérablement la croissance du pays.

LES PUBLICATIONS ÉCONOMIQUES DE COFACE 5

(6) Le PAC2, lancé en 2010, est la continuité du premier Programme d’accélération de lacroissance inauguré par Lula en 2007, visant à investir dans les infrastructures, les grandstravaux et l’achat d’équipements.

Argentine 112

Pérou 111

Colombie 108

Russie 101

Inde 87

Chine 69

Mexique 65

Afrique du Sud 41

Turquie 34

Chili 31

Brésil 107

0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 110

GRAPHIQUE 5 :Classement des infrastructures sur 144 pays

Source : World Economic Forum

Page 6: LES PUBLICAaTIONS ÉCONnOMIQUES DEo … · des autorités qui n’hésitent pas/ à aller jusqu’au protectionnisme. Fernando Figueiredo, Président de l’Association de l’industrie

Une société sous tension

Juin 2013

La pauvreté et les inégalités se sont réduites au Brésil au cours des années 1990 et 2000. Cependant, les grandes manifes-tations qui ont commencé à la mi-juin 2013 montrent que les motifs de mécontentement n’ont pas disparu. Les inégalitésdemeurent, en effet, importantes. Les partis politiques peinent à fournir une réponse aux exigences de la classe moyennequi ne se satisfait plus de la seule société de consommation. Dans la perspective de plusieurs manifestations internationalesmajeures (Journées mondiales de la jeunesse, Coupe du monde, Jeux olympiques), la présidente Dilma Roussef fait preuved’écoute. Elle dispose d’une popularité suffisante, notamment au sein d’une classe moyenne devenue incontournable, pourlui permettre d’imposer à sa majorité les inflexions nécessaires pour répondre, au moins partiellement, aux attentes.

Le net recul des inégalités et de la pauvreté…

La hausse du PIB par habitant, passé de 7 221 $ en 2007 à11 490 $ en 2012, a été remarquable au Brésil. Cet essorreflète notamment une augmentation substantielle dessalaires réels (+11% en moyenne annuelle entre 2007 et2011), celle encore plus forte (+66%) du salaire minimum,la progression de l’emploi formel, le développement de lasécurité sociale et la stabilité macro-économique. L’expan-sion rapide du crédit a également joué un rôle capital.L’amélioration a été plus forte pour les régions et lesgroupes qui affichaient le retard le plus important : leNordeste, les paysans, les familles nombreuses et les noirs. La réduction des inégalités a été significative : l’indice de Gini(mesurant les inégalités de revenu) s’est nettement amélioré,passant de 0,57 en 2000 à 0,51 en 2012. Elle permet désormais l’accès à la consommation à une partie plus largede la population.

La réduction de la pauvreté a débuté il y a 12 ans en 2001avec les premières mesures adoptées pendant la présidenceCardoso. Le programme phare d’aide conditionnelle « BolsaFamilia », institué en 2003 par le président Lula, a ensuite per-mis aux familles les plus pauvres de recevoir une sommemoyenne de 120 réaux chaque mois (entre 32 et 306 réauxsuivant le revenu et la composition du foyer), à la conditionque les enfants soient scolarisés et suivent les programmes devaccination obligatoire. Les sommes allouées ont été accruesen 2011 par la présidente Roussef dans le cadre du programme« Brasil sem Miseria », puis en 2012 avec « Brasil Carinhoso »,un plan de lutte contre la pauvreté de la première enfance. Lenombre de personnes bénéficiaires est estimé à 36 millions en2013, soit le cinquième de la population. Un autre programme,le « Beneficio de Prestacao Continuada » est une pension non contributive versée aux personnes âgées pauvres et auxhandicapés.

L’extrême pauvreté (les personnes vivant avec moins de70 réaux par mois) a très nettement reculé. En 2002, selonl’institut brésilien de recherche économique IPEA, 14% desBrésiliens vivaient dans cette situation ; ils n’étaient plusque 8% en 2009. Avec l’élargissement des programmesd’aide, le gouvernement estime que l’ensemble des person-nes recensées grâce au Cadastro Unico, autre mesurephare de la lutte contre la pauvreté, est sortie de l’extrêmepauvreté. Il y aurait toutefois encore 700 000 familles nonrecensées dans cette situation. Les deux-tiers d’entre ellesvivraient dans le Nordeste et la moitié serait des jeunes.

La dernière décennie a vu l’émergence d'une large classemoyenne appelée « classe C », ou classe moyenne inférieure(on raisonne au Brésil sur cinq tranches de revenu classéesde A à E). Entre 2003 et 2012, quelque 35 millions de

LES PUBLICATIONS ÉCONOMIQUES DE COFACE 6

Sources : SEDLAC, Banque mondiale

0,62

0,60

0,58

0,56

0,54

0,52

0,50

0,48

1981

1990

2000

2006

2008

2010

2012

GRAPHIQUE 1 :Réduction des inégalités de revenu Evolution du coefficient de Gini

Analyse socio-économique

Par Dominique FruchterEconomiste Senior, Coface

Page 7: LES PUBLICAaTIONS ÉCONnOMIQUES DEo … · des autorités qui n’hésitent pas/ à aller jusqu’au protectionnisme. Fernando Figueiredo, Président de l’Association de l’industrie

LES PUBLICATIONS ÉCONOMIQUES DE COFACE 7

Brésiliens sont passés des tranches de revenu D et E à latranche C. Cette dernière catégorie représente 55% (contre34% en 2005) de la population du pays, affichant un revenufamilial mensuel compris entre 500 à 1 000 euros, quand le salaire minimum n'atteint que 230 euros (678 réaux).L’essor de l’emploi a été décisif, le taux de chômage officiela baissé et s’est stabilisé légèrement au dessus de 5% dela population active. En outre, le programme de logementsà bas coût dénommé « Minha casa, minha vida » (Ma maison,ma vie), mis en place fin 2009, vise à réduire le déficitd’habitations. Il est destiné aux ménages gagnant moins de 5 000 réaux par mois. La subvention dépend du niveaude revenu. A la fin de 2012, un million de familles avait emmé-nagé dans des logements financés par ce programme.

… n’a pas apaisé les motifs de mécontentement social

Pourtant, les manifestations qui ont commencé à la mi-juin2013 illustrent bien la persistance des tensions sociales.Elles ont réuni plusieurs millions de personnes dans lesprincipales villes du pays, ont été les plus importantesdepuis celles qui avaient conduit au départ du présidentCollor de Mello en 1992, et montrent bien la persistance destensions sociales. Le calme traditionnel des Brésiliens, leuracceptation supposée des inégalités et leur bonne humeurà toute épreuve avaient donc des limites. Des activistesd’extrême gauche étaient bien présents, mais l’immensemajorité des manifestants appartenaient à la classemoyenne, devenue majoritaire dans le pays. Et les étudiantsétaient largement représentés.

Le plein emploi, l’accession à la société de consommation,les spectacles sportifs ne suffisent plus face à une situationqui se détériore : la croissance ralentit ; l’endettement desménages atteint ses limites et l’inflation, ce très mauvais sou-venir des années 1990, accélère. C’est au point que certainsrevenus parviennent difficilement à suivre l’augmentation desprix, particulièrement forte pour l’alimentation et les services.Des infrastructures publiques déficientes – les transports aupremier chef – concourent en outre à gâcher le quotidien desclasses moyennes et ont constitué un des éléments majeursdes revendications.

L’augmentation du prix des transports publics à Sao Paulo(de 3 à 3,2 réaux) et Rio a joué un rôle d’étincelle. La duretéde la répression policière des premiers jours avec l’utilisa-tion de gaz lacrymogènes, de balles en caoutchouc et decanons à eau a renforcé la détermination des manifestantsqui ont poursuivi leur action, en dépit de l’abandon decette hausse du prix des transports. Le coût (17 milliardsde dollars) de la construction des équipements nécessitéspar la Coupe du monde de football en 2014 et les JeuxOlympiques de 2016 est jugé faramineux. Ils s’interrogentsur l’utilité de grands stades qui pourraient se révéler deséléphants blancs, à l’instar de celui de Manaus prévu pour63 000 spectateurs, alors que les rencontres locales defootball ne réunissent que quelques centaines de personnes ;d’autant que les services publics de l’éducation et de lasanté manquent cruellement de moyens.

L’enseignement supérieur public, qui draine une large partde l’argent public consacré à l’éducation, est de qualité ettrès sélectif. Mais pour pouvoir y accéder, il est nécessairede recevoir une solide éducation primaire et secondaire. Or,le système public primaire et secondaire est médiocre. Sesenseignants sont mal payés, ce qui n’attire pas les talents.Les résultats des élèves brésiliens aux tests effectués dansle cadre d’enquêtes internationales ne sont pas concluants.Quant aux écoles privées, elles sont trop onéreuses pourla plupart des familles. Le système public de santé estaffecté des mêmes maux. Ces insuffisances sont d’autantplus surprenantes que la dépense publique représente prèsde 40% du PIB, ce qui est élevé pour un pays émergent.Ceci conduit à s’interroger sur l’efficacité des dépensespubliques.

Un autre motif de mécontentement est la corruption et, pluslargement, dans les insuffisances de la gouvernance. Les per-formances du pays ne sont que légèrement supérieures à lamoyenne mondiale. Après s’être amélioré, son classements’est stabilisé dans une position intermédiaire. La corruptiona régressé, mais n’en demeure pas moins prégnante. Ainsi,malgré les contrôles, le programme « Minha casa minha vida» n’est pas exempt de corruption, de défauts de construction,de médiocrité des emplacements et de manque de qualifica-tion de la main d’œuvre. Les politiciens de haut rang con-damnés en novembre 2012 dans le cadre du scandale de potsde vin dits « mensalao » ne sont toujours pas incarcérés.

1993 2003 2009 2011 2014

230

180

130

80

30

-20

8,8

45,6

92,9

13,3

65,9

96,2

20

95

73

22,5

106

63,6

31

113

56

GRAPHIQUE 2 :Répartition de la population par classes de revenus (en millions)

Sources : IBGE, Ministère des finances

Classe A et B (>2 400 USD par mois)

Classe C (entre 550 et 2 400 USD par mois

Classe D et E (en-dessous de 550 USD par mois)

Page 8: LES PUBLICAaTIONS ÉCONnOMIQUES DEo … · des autorités qui n’hésitent pas/ à aller jusqu’au protectionnisme. Fernando Figueiredo, Président de l’Association de l’industrie

LES PUBLICATIONS ÉCONOMIQUES DE COFACE 8

Indicateurs 2012 Liberté Stabilité Efficacité du Qualité de la Respect CorruptionBanque mondiale politique politique gouvernement réglementation des lois

BRÉSIL 78 115 95 94 96 79

CHILI 41 75 35 15 26 18

URUGUAY 34 50 65 76 63 30

MEXIQUE 100 159 78 84 131 116

COLOMBIE 119 187 80 83 112 114

ARGENTINE 91 99 109 159 143 123

INDE 88 186 97 127 102 138

Enfin, malgré leur réduction, les inégalités demeurentimportantes. Le coefficient de Gini, même s’il a améliorée,reste l’un des plus élevés des pays émergents. Les 10% lesplus riches perçoivent 45% des revenus. Alors que les 10%les plus pauvres doivent se contenter de 1%. Les inégalitésexistent à la fois dans le secteur privé et dans la fonctionpublique où certains hauts fonctionnaires ont des revenussupérieurs à ceux de leurs homologues des pays avancés.Une large part (38% en 2012) des prélèvements obligatoires(TVA, charges sociales) n’est pas progressive, et même régres-sive pour la première. Et les plus pauvres profitent peu du pro-gramme de logement social « Minha Casa mihna Vida », ce quiexplique que 11 millions de personnes habitent toujours dansdes favelas. Seuls 45% des conventions concernent des famillesgagnant moins de 1 600 réaux par mois. Les inégalités ali-mentent une violence significative dans les zones urbaines,largement liée au narcotrafic. Elle ne se limite plus aux favelasde São Paulo et Rio de Janeiro, où, d’ailleurs elle a nettementrégressé (sans doute faut-il y voir un lien avec l’interventionpolicière dans les favelas les plus proches des zones touris-tiques dans la perspective de la Coupe du monde et des Jeuxolympiques), et gagne le Nordeste moins développé écono-miquement et où le taux d’homicide pour 100 000 habitantspeut atteindre 50 ou 60, contre une moyenne nationale de 26.

Les tensions restent également fortesdans les zones rurales et forestières

Des conflits épisodiques interviennent entre les milicesarmées des propriétaires terriens et les paysans appar-tenant au Mouvement des paysans sans terre (MST). Larecherche de nouvelles terres dans le Nord, proches desfuturs ports, alors que celles situées dans le centre-Ouestsont chères et déjà occupées par les éleveurs de bovins estune cause supplémentaire de querelle. Les velléités chinoisesd’acheter des terres afin d’y cultiver du soja et du maïs quiseraient transformés en Chine pourrait encore envenimer lasituation. Toutefois, jusqu’à présent, les autorités fédérales etlocales se montrent réticentes, car soucieuses de conserverla transformation des matières premières.

L’arrivée des exploitants agricoles et des compagniesminières en Amazonie où se concentrent les 900 000indigènes que compte le Brésil provoque des conflits.Leurs réserves qui couvrent 100 millions d’hectares (1/8 dela surface du pays) sont très convoitées. La déforestation,galopante jusqu’alors, a pourtant nettement ralenti depuis2009 et l’adoption d’une législation est plus protectrice. La protection est encore relative, car, si une exploitation n’atteint pas son quota obligatoire de terres laissées vierges,

Chine

Inde

Pérou

Argentine

Uruguay

Mexique

Colombie

Chili

Brésil

Suède

Allemagne

France

Italie

Royaume-Uni

Espagne

Etats-Unis

0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5

GRAPHIQUE 3 :Inégalités de revenus - Coefficient de Gini

Sources : SEDLAC, Banque mondiale

Page 9: LES PUBLICAaTIONS ÉCONnOMIQUES DEo … · des autorités qui n’hésitent pas/ à aller jusqu’au protectionnisme. Fernando Figueiredo, Président de l’Association de l’industrie

LES PUBLICATIONS ÉCONOMIQUES DE COFACE 9

elle peut combler la différence en achetant un certificat à une autre exploitation disposant d’un surplus. Ce commerceaboutit à de fortes disparités entre états fédérés.

Une réponse politique laborieuse mais réelle

Spontanées, les manifestations ne répondent à aucune consignepolitique. Aucun leader ni organisation ne semble se dégager.Leur ampleur croissante s’explique par l’utilisation des réseauxsociaux de communication. Les manifestants y expriment,notamment, leur désillusion envers les institutions administra-tives, politiques et financières, accusées de favoriser les élites.En dépit de l’arrivée au pouvoir d’un gouvernement de centregauche en 2003 et de la nomination d’anciens syndicalistes etde femmes au gouvernement, le personnel politique ne s’estguère renouvelé. L’immobilisme trouve sa source dans le sys-tème électoral (scrutin proportionnel de liste pour les députés)et le financement privé des campagnes qui favorisent les per-sonnes disposant de moyens financiers importants ou d’appuisfamiliaux. Aucun parti ne semble susceptible de profiter dumouvement ; au point que les réactions, y compris au sein del’opposition, sont embarrassées et discrètes.

Dilma Rousseff, élue au second tour de l’élection présiden-tielle du 31 octobre 2010 avec 56,05% des voix, a rapidementdit comprendre le désarroi des manifestants et elle a affichésa détermination à prendre en compte leurs revendications.Au-delà des convictions de l’ancienne guerillera de la guerrecivile, la tenue fin juillet 2013 à Rio des Journées mondialesde la jeunesse (JMJ) organisées par l’église catholique avecses cohortes de jeunes venus du monde entier peut avoir jouéun rôle dans son attitude. La présidente s’est engagée à pren-dre des mesures pour calmer les esprits : les redevancespétrolières seront consacrées à l’éducation et le système desanté renforcé par l’appel à plus de praticiens étrangers.Avant les manifestations, les autorités avaient déjà fait partde leur volonté d’engager 6 000 médecins cubains pourassurer des postes non pourvus dans le Nordeste et en Ama-zonie. 50 milliards de réaux seront consacrés aux transportspublics. Un plébiscite devrait être organisé à propos deréformes institutionnelles à adopter par le Congrès, notam-ment en matière électorale. Reste à savoir si la coalition aupouvoir soutiendra ces nouvelles orientations qui sont assezfloues. Pour l’instant, seul le premier engagement a fait l’objetd’un vote positif au Sénat.

Dilma Rousseff dispose d’une large majorité dans les deuxchambres du Congrès : 72% à la Chambre des députés (soit 373 sièges sur 513) et de 76% au Sénat (62 sénateurssur 81), dans le cadre d’une coalition de 11 partis, dont celui

de la Présidente, le parti des travailleurs (PT), le PMDB etle PSD. L’opposition est réduite au Parti de la SocialeDémocratie Brésilienne (PSDB), aux Démocrates (DEM) et au Parti Populaire Socialiste (PPS) représentant à euxtrois 111 députés et 18 sénateurs. Le Parti des Verts, dont lacandidate Marina Silva est arrivée en troisième position au premier tour de l’élection présidentielle avec 20% dessuffrages, reste indépendant. La majorité présidentielledirige 16 Etats fédérés sur 27. L’opposition a cependantconservé ceux de São Paulo et du Minas Gerais. Les électionsmunicipales d’octobre 2012 n’ont pas remis en cause cettesituation. La mairie de Sao Paulo a même été conquise parFernando Haddad (PT) sur Jose Serra.

Une majorité présidentielle fragmentée,mais Dilma reste populaire

Après un début de mandat tranquille, la présidente a enre-gistré une série de revers. Le plus significatif est le procès dit des « Mensalão » devant la Cour suprême, où étaientpoursuivis une quarantaine de responsables du Parti des Travailleurs, devenus parfois parlementaires ou ministres. Laplupart d’entre eux ayant été convaincus courant octobre2012 d’avoir acheté des votes de parlementaires grâce à del’argent provenant d’entreprises publiques sous la présidencede Lula, Dilma Roussef a dû se séparer de plusieurs ministresimpliqués. Cependant, fin juin 2013, aucun n’a encore étéemprisonné.

La présidente a également fort à faire pour conserver l’unitéde sa coalition, où la discipline est limitée et la participationdes femmes infime. Elle doit ménager les susceptibilités enrépartissant les postes au sein de son gouvernement. Les lobbys, notamment agricoles, sont puissants. Le passage deslois est souvent laborieux. Cela a été le cas récemment avecle code forestier et la nouvelle répartition des redevancespétrolières entre les collectivités locales. Or, cette dernièredevra être modifiée pour répondre au nouvel engagement dela présidente.

Dilma Roussef pourra-t-elle utiliser sa popularité person-nelle pour convaincre ? Sa cote a chuté avec la montée dela fronde sociale. Mais elle devrait pouvoir encore compter,lors de la prochaine élection présidentielle d’octobre 2014,sur le soutien de la classe moyenne qui lui doit une bonnepart de son enrichissement. Et l’opposition ne dispose pasde candidats crédibles. Le risque de voir un concurrent surgirau sein de sa coalition est également faible dans la mesureoù, pour l’heure, l’actuelle présidente reste le meilleur atoutdont dispose le PT pour être reconduit aux affaires.

Conclusion

Les revendications des manifestants sont de nature qualitative et quantitative. Elles concernentla pratique politique, l’éducation, la santé, le transport et le logement. Même si la présidenteDilma Roussef se dit déterminée à en tenir compte, les réponses qu’elle apportera prendrontnécessairement du temps à se concrétiser et à porter leurs fruits.

Page 10: LES PUBLICAaTIONS ÉCONnOMIQUES DEo … · des autorités qui n’hésitent pas/ à aller jusqu’au protectionnisme. Fernando Figueiredo, Président de l’Association de l’industrie

INTERVIEWCristiano SouzaÉconomiste, Santander

Le PIB brésilien a progressé au faible rythme de 0,9%en 2012 et de 0,6% au premier trimestre 2013 parrapport au trimestre précédent. Comment expliquercette médiocre performance ?

La croissance du PIB a été affectée par la faiblesse dedeux éléments : les investissements et la consommationdes ménages. Les investissements se sont contractés de4% en 2012 en raison du recul de la confiance desinvestisseurs et de la hausse du coût de l’importation desmachines due à la dépréciation du taux de change.Quant à la consommation des ménages, elle a souffertdu ralentissement de la croissance du crédit (à cause dela hausse du taux de défauts) et a montré une certaineperte de vitesse en 2012. Les investissements ont pro-gressé début 2013, conséquence du rétablissement de laproduction de poids lourds. En revanche, la consomma-tion des ménages a davantage ralenti compte tenu de lahausse de l’inflation. Parallèlement, les importations ontaugmenté, affectant la croissance du PIB.

Que prévoyez-vous en termes de croissance du PIB pour 2013 et 2014 ?

Nous prévoyons une croissance de 2,3% en 2013 et de 2,1%en 2014.

L’inflation a dépassé l’objectif (6,5%) plusieurs foiscette année. Quelle perspective pour le secondsemestre 2013 et pour 2014 ? Comment expliquercette évolution ?

L’inflation devrait ralentir au second trimestre 2013, lesprix de l’alimentation continuant de baisser. Cependant,la demande de services pèsera encore sur les prix indus-triels, un phénomène qui pourrait être amplifié par ladépréciation de la devise. Ces deux effets devraientassurer une inflation à 6% cette année et à 6,4% en 2014.

En matière de politique macroéconomique, le gouver-nement intervient dans l’économie (protectionnismecommercial et mesures d’allègement fiscal dans les secteurs sensibles). Ces politiques sont-elles efficaces pour stimuler les investissements ?

Ces interventions récentes ont créé des incertitudes,provoquant un recul de la confiance des investisseurs. Enrevanche, des signes montrent que le gouvernement al’intention de soutenir les investissements dans les infra-structures par l’intermédiaire du secteur privé (conces-sions). Ce serait un mécanisme efficace à moyen et longterme pour réduire les coûts au Brésil et encourager laproductivité.

Quelles politiques macroéconomiques le gouverne-ment va-t-il suivre, selon vous, au second semestre2013 et en 2014 ?

Le gouvernement doit se concentrer sur la politiquemonétaire, en relevant le taux Selic (taux de référence) à9% à la fin de l’année, afin de tenter de contenir l’inflation.Au vu des effets des exemptions fiscales sur l’impôt surle revenu, la politique budgétaire ne devrait pas revenirsur sa tendance expansionniste. Dans ce scénario, lesconcessions devraient jouer un rôle important pour lesinvestissements, car elles sont gérées de la manière laplus efficace possible.

Le ratio investissements/PIB a clôturé 2012 à seulement 18,1%, un niveau inférieur à celui de 2011.Qu’est-ce qui explique cette contraction ?

Les investissements ont baissé de 4% en 2012, face aurecul de la confiance des investisseurs et à la hausse descoûts des importations de machines, liée à la déprécia-tion des taux de change.

Quel serait le ratio d’investissement idéal pour que le pays puisse se développer à un rythme plusélevé et durable ?

Nos études montrent que chaque fois que le ratioinvestissements/PIB augmente de 4 points de pourcen-tage, la production potentielle croît d’un point. Si nousvoulons afficher les mêmes performances que nos voisinsd’Amérique latine, qui connaissent une croissance régu-lièrement de 5 à 6% ces dernières années, nous avons doncbesoin d’un taux d’investissement de 25 à 26% du PIB.

Le manque de travailleurs qualifiés est une plainterécurrente des entrepreneurs. Comment élever leniveau d’éducation à court terme ?

L’éducation n’est pas une question qui peut être résolueà court terme. Il a fallu deux décennies aux pays qui ontconnu une accélération de leur croissance grâce auxinvestissements dans l’éducation, comme la Corée duSud et Taïwan, pour récolter les fruits de ces investisse-ments. Pour pallier, à court terme, le manque de tra-vailleurs qualifiés, il faut organiser des formations sur lelieu de travail, ce qui est couteux pour les entreprises.

« Une crise de la balance des paiementssemble exclue »

L’inflation devrait ralentir

au second trimestre 2013

LES PUBLICATIONS ÉCONOMIQUES DE COFACE 10

Page 11: LES PUBLICAaTIONS ÉCONnOMIQUES DEo … · des autorités qui n’hésitent pas/ à aller jusqu’au protectionnisme. Fernando Figueiredo, Président de l’Association de l’industrie

Quels sont les principaux secteurs prometteurs de l’économie à court terme ?

Les secteurs les plus protégés de la concurrence interna-tionale, comme les services, peuvent rester rentable. Parailleurs, un marché du travail en surchauffe pourrait êtreson principal moteur de la croissance. Si les projets d’in-frastructures sont bien menés, les secteurs qui y sont liésdevraient également afficher de meilleures performances.

Quels sont les secteurs potentiellement en difficulté ?

Face aux incertitudes extérieures et au ralentissement de la croissance chinoise, les secteurs les plus en diffi-cultés sont ceux qui dépendent le plus des exportationsou des industries qui subissent une concurrence férocedes produits importés.

L’excédent de la balance commerciale recule ces derniers mois, à cause d’une croissance desimportations plus forte que celle des exportations.Quelle en est la principale raison ? Par ailleurs, le déficit lié aux services s’est accentuéprovoquant des déficits record de la balancecourante. Selon vous, une crise de la balance despaiements est-elle possible ?

Trois raisons expliquent la chute de l’excédent commer-cial. La première, c’est la faiblesse de la croissance chinoise, qui a participé à la baisse des prix des matièrespremières et à la stagnation des termes de l’échange(ratio des prix d’exportation et des prix d’importation)du Brésil. Ensuite, la demande en produits brésiliens n’estpas très solide, en raison de la faiblesse de la croissancemondiale. Il y a en outre le cas particulier de l’Argentine,qui a érigé des barrières à l’importation. Enfin, lademande interne reste robuste, en dépit de la faiblecroissance du PIB. L’absorption intérieure (somme de laconsommation des ménages, de la consommation dugouvernement et des investissements) continuant

d’augmenter plus vite que le PIB, une partie est effacéepar les importations. Ces trois facteurs ont contribué auxplus mauvais résultats de la balance commerciale depuisplus de dix ans.

Même avec des déficits plus élevés dans les transactionscourantes et la crainte d’une inversion de la politiquemonétaire aux États-Unis, une crise de la balance despaiements ne me semble pas réaliste. Les flux d’investis-sement continuent de compenser largement le déficitcourant actuel et les réserves en devises étrangèresrestent à des niveaux historiquement élevés.

Finalement, quelle sera l’évolution du taux de change au second semestre 2013 et en 2014 ?

Nous estimons que le taux de change clôturera l’année2013 à 2,10 R$/US$ et à 2,30 R$/US$ en 2014. Une partiede cette pression vient des comptes extérieurs. Bien quece ne soit pas le signe d’une crise de la balance despaiements, les comptes extérieurs n’affichent plus l’abon-dance de ressources de ces dernières années. Le change-ment de direction de la politique monétaire américainecontribue également à la dépréciation : le dollar pourraitpoursuivre sa hausse à mesure que la Réserve fédéraleréduira ses rachats d’actifs.

Pour assurer une croissance

régulière de 5 à 6%, il nous

faudrait un taux d’investissement

de 25 à 26% du PIB

LES PUBLICATIONS ÉCONOMIQUES DE COFACE 11

INTERVIEW

Page 12: LES PUBLICAaTIONS ÉCONnOMIQUES DEo … · des autorités qui n’hésitent pas/ à aller jusqu’au protectionnisme. Fernando Figueiredo, Président de l’Association de l’industrie

INTERVIEWLuiz Rabi,Économiste, Serasa Experian*

Après sa progression en 2012, le taux de défaut depaiement des particuliers a reculé au cours des pre-miers mois de 2013. Comment explique-t-on cetteévolution ?

Le taux de défaut de paiement des particuliers a atteintun sommet en octobre 2012 à 8,2 %. Il est revenu depuislors à 7,5 % en avril 2013. En 2010, l’accès au crédit étaitparticulièrement facile et les particuliers se sont beau-coup endettés. Au bout d’un moment, les défauts depaiement ont considérablement augmenté, conduisantle système financier à devenir plus restrictif. Ce nouveaucontexte, en plus de l’état du marché de l’emploi marquépar la faiblesse du chômage et la stabilité des salairesréels, a permis au taux d’évoluer à la baisse.

Cette baisse implique-t-elle également une dinimu-tion du taux de défaut de paiement des entreprises ?

La baisse des défauts de paiement pour les particuliersse répercute sur les entreprises, mais la moyenne his-torique de cet indicateur est de 7 %. Nous ne nous atten-dons pas à ce qu’il diminue beaucoup plus. D’autresindicateurs affectent davantage le taux de défaut depaiement des entreprises, comme la croissance écono-mique et le coût du crédit (taux d’intérêt). La croissances’améliore par rapport à l’année dernière, mais elle estencore faible. Et les taux d’intérêt progressent cesderniers mois, en raison de la hausse du taux Selic (letaux de référence du gouvernement brésilien). Pourrésumer, il n’y a pas beaucoup de marge pour une nou-velle baisse du taux de défaut de paiement. Un effet tendà annuler l’autre.

Les défauts de paiement se concentrent-ils sur unetaille d’entreprise en particulier ?

Les micro-entreprises et les petites entreprises représen-tent 90 % des défauts de paiement enregistrés par Serasa.Ce sont celles dont le chiffre d’affaires est inférieur à 4 millions de réaux (1,8 million de dollars) par an.

Serasa a récemment lancé un nouvel indice, EducaçãoFinanceira do consumidor (Éducation financière du consommateur). Quels en sont les principaux résultats ?

L’indice, établi par le biais d’entretiens, est composé de 3 éléments : a – la connaissance du crédit, l’éducationfinancière ; b – l’attitude que la personne dit avoir, sonpositionnement ; c – le comportement réel. Entre 0 à 10,c’est la connaissance (a) qui a obtenu la meilleure note,avec 7,5. L’attitude (b) a obtenu 6 et le comportement (c)a été noté 5. Par ailleurs, certains résultats intéressants ontété observés : ainsi, les hommes et les femmes ont lemême comportement, indépendamment de la fourchette

de salaire. Enfin, la surconsommation est associée à la culture brésilienne.

Le marché brésilien du crédit, très récent, a explosé après 2005. Le pourcentage du revenu engagé dansle financement (rapport salaire/échéances du crédit)est-il encore acceptable ?

Non, ce pourcentage est très élevé, autour de 21 %, d’aprèsla Banque centrale brésilienne. En ce qui concerne lesemprunts des particuliers, ils ont doublé après 2005. C’estle résultat de la hausse des échéances de paiement et detaux d’intérêt plus faibles. Le pic de défauts de paiementobservé en 2011-2012 a été causé par la hausse de troispoints de pourcentage de l’engagement des salaires. Celaa alerté la Banque centrale, qui a compris avoir atteint lemaximum acceptable. En d’autres termes, qu’il était déjàtemps de durcir les conditions de crédit.

Actuellement, nous savons seulement si un particulierest en défaut de paiement ou non. Cependant, avec lelancement de Cadastro Positivo (Register Plus), il serapossible d’observer l’endettement d’un consomma-teur. Quels en seront les principaux avantages ?

Avec Cadastro Positivo, nous connaitrons le pourcentagedu salaire déjà engagé. L’exigence du bulletin de salairesera remplacée et profitera aux personnes qui ne sontpas en mesure de prouver leur revenu. La personnepourra suivre son score et l’écart a tendance à baisserpour les bons payeurs.

Quels ont été les effets observés dans les pays ayantadopté un outil similaire ?

Parmi les 20 pays les plus riches du monde, le Brésil étaitle seul qui ne disposait pas d’un outil de type RegisterPlus. Ce produit est déjà au point dans de nombreux payset cela changera la culture brésilienne du crédit. Les per-sonnes extérieures suivent ce score régulièrement afin decontracter des prêts aux taux les plus faibles, et cela a uneffet positif sur la ponctualité du paiement.

Enfin, le taux de défaut moyen en 2013 sera-t-il plusfaible que celui observé en 2012 ?

Le taux de défaut de paiement des particuliers pourraitdescendre jusqu’à 7 % d’ici la fin de l’année, clôturantl’année 2013 avec un taux moyen de 7,3 %. Quant audéfaut des entreprises, la marge est limitée : il sera diffi-cile de passer en-deçà des 3,6 % actuels.

« Il sera difficile de passer en deçà des3,6% actuels pour le taux de défaut depaiement (1) des entreprises »

Le taux de défaut de paiement des

particuliers, de 7%, en moyenne

ne devrait pas baisser beaucoup

LES PUBLICATIONS ÉCONOMIQUES DE COFACE 12

* Société de services d’information (1) Uniquement sur les crédits bancaires

Page 13: LES PUBLICAaTIONS ÉCONnOMIQUES DEo … · des autorités qui n’hésitent pas/ à aller jusqu’au protectionnisme. Fernando Figueiredo, Président de l’Association de l’industrie

INTERVIEWFernando FigueiredoPrésident, Abiquim*

Quelle est le poids de l’industrie chimique au Brésil etsa position dans le contexte mondial ?

Les derniers chiffres consolidés sur le plan mondialremontent à 2011. L’industrie chimique brésilienne, forted’un chiffre d’affaires de 157 milliards de dollars, occupela 6ème position dans le monde. A cette date, le marchélocal (la production plus les importations, moins lesexpor-tations) avait une valeur estimée de 183 millionsde dollars. La différence entre la production et lademande avait créé un déficit de 26,5 millions de dollars.En 2012, ce déficit atteignait 28,1 millions, et devraitdépasser 30 millions en 2013. Aujourd’hui, les importa-tions représentent environ un tiers du marché chimique.

Quels sont les grands défis de l’industrie chimique ?

L’industrie chimique est confrontée à quatre grands défis :le prix des matières premières, le coût de l’énergie, le coût élevé de l’investissement (dans les machines,l’équipement et les services d’ingénierie) et la faiblessedes investissements en recherche et développement.

Le principal défi de l’industrie chimique tient certaine-ment au coût élevé des matières premières. Le gaz auBrésil coûte, par exemple, quatre fois plus cher qu’auxÉtats-Unis, et près de 50% de plus que sur le marchéeuropéen. Par ailleurs, on estime que l’investissementdans une nouvelle usine au Brésil coûte 25% plus cherqu’en Asie et 10% de plus qu’aux Etats-Unis. Enfin, lessociétés brésiliennes n’investissent environ que 0,7% de leur chiffre d’affaires en R&D, alors que la moyennemondiale est d’environ 2%.

Quelles devraient être les performances du secteuren 2013 ?

Au cours des 20 dernières années, et à quelques excep-tions près, le marché de la chimie au Brésil a progressé25% plus vite que le PIB national. En 2012, le marchéstagnait, mais la production a gagné 2,8 %, remplaçantune partie du volume importé. Cependant, au premiertrimestre 2013, le marché a bondi au rythme impression-nant de 7,1% (en dépit d’une faible croissance du PIB),tandis que la production reculait de 1,3%. Nous nousattendons à un retour à des niveaux normaux en 2013 et à une progression supérieure de 25 % au PIB, la production accompagnant cette performance.

L’industrie chimique est connue pour être très gour-mande en énergie. La réduction récente des tarifsdouaniers sur l’électricité consentie par le gouverne-ment a-t-elle eu un impact sensible sur les coûts desentreprises ?

Oui, le coût de l’énergie a baissé de 17 à 25%, cependant,comme je l’ai dit auparavant, il est toujours 50% plusélevé qu’aux États-Unis.

Les États-Unis ont encore renforcé leur position deleader grâce à l’exploration du gaz de schiste, qui afait baisser le coût de l’énergie. L’adoption de cemodèle pourrait-elle améliorer la compétitivité localeau Brésil ?

Les progrès technologiques qui ont permis l’exploitationéconomique du gaz de schiste aux États-Unis ont révo-lutionné l’industrie pétrochimique dans le monde. Lesexperts sont divisés, certains estiment que cela pourraitse développer dans d’autres régions du monde. D’autrespensent que le gaz de schiste est un phénomène exclu-sivement américain.

De nombreux articles ont été écrits sur le sujet, d’autresle seront, mais une chose est absolument certaine : legaz de schiste américain a révolutionné l’industriepétrochimique mondiale.

Les nouvelles sont bonnes au Brésil : nous ne savons passi nous avons du gaz de schiste, mais l’agence nationaledu pétrole (ANP) procèdera en octobre à la mise envente des premières parcelles d’exploration aux compag-nies intéressées.

Mais la vraie bonne nouvelle vient de la production de gaz naturel issu du « pré-sel » (1) : les experts estiment quela production de gaz naturel fera plus que doubler d’ici2020, si les champs repérés dans la couche « pré-sel » sontexploités.

« Nous sommes en train de construirel’industrie chimique de 2030 »

LES PUBLICATIONS ÉCONOMIQUES DE COFACE 13

Notre principal défi est le coût des

matières premières : le gaz coûte au Brésil

quatre fois plus cher qu’aux Etats-Unis

et près de 50% de plus qu’en Europe

(1) Pré-sel : découverte en 2007, la couche pré-sel est une importante réserve pétrolière située sous leplancher océanique, d’un volume d’environ 50 milliards de barils. Elle occupe 800 km entre les Etatsd’Espírito Santo et de Santa Catarina, à 100-300 km des côtes.

* Association de l’industrie chimique au Brésil

Page 14: LES PUBLICAaTIONS ÉCONnOMIQUES DEo … · des autorités qui n’hésitent pas/ à aller jusqu’au protectionnisme. Fernando Figueiredo, Président de l’Association de l’industrie

Le Brésil doit suivre l’exemple américain : utiliser le gazdécouvert pour encourager la production de produitschimiques qui apportent de la valeur ajoutée, correspon-dant à 6-7 fois la quantité de gaz.

Les Etats-Unis ne cherchent pas à simplement exporterdu gaz et ce ne doit pas être l’objectif du Brésil.

En ce qui concerne l’Europe, une idée paranoïaque veutque l’exploitation du gaz de schiste nuise à l’environ-nement. Son exploitation est donc toujours en discussion,alors que les Américains ont montré que les questionsenvironnementales pouvaient être résolues. De plus, lesinvestissements dans le secteur de l’environnement sesont beaucoup développés aux États-Unis. Je ne seraispas surpris qu’un jour, la Pologne commence à produiredu gaz de schiste, puisque le pays dispose de cetteressource naturelle, ce qui la rendra indépendante de laRussie.

Au-delà du coût élevé de l’électricité et du gaz naturel,la pénurie de travailleurs qualifiés est également uneréalité au Brésil. Selon vous, quel serait le meilleurmoyen d’y remédier ?

Dans la configuration actuelle de l’industrie chimique, iln’y a pas de pénurie de travailleurs spécialisés au Brésil.Le problème ne se poserait que si les investissementsprévus par le Pacto Nacional da Indústria Química (2)

(Pacte national de l’industrie chimique) de 167 milliardsde dollars se concrétisaient. L’industrie chimique emploieactuellement 400 000 personnes. Si ces investissementssont réalisés, nous aurons besoin de plus de deux foisplus de travailleurs que le marché ne peut pas fournir.

Nous sommes en discussion avec Senai (3) et l’Agencebrésilienne pour le développement industriel pourréaliser une étude détaillée de la demande réelle et duprofil des professionnels qualifiés nécessaires pour y répondre. En outre, les ressources financières nemanquent pas pour mettre en œuvre un programme deformation de cette ampleur, car le gouvernementfédéral a alloué des fonds et Senai est techniquementtrès bien préparé à la mise en place d’un tel pro-gramme. C’est un grand défi, mais je pense que nouspouvons le relever.

Le 23 avril, le gouvernement a annoncé une réductiondes taxes sur les matières premières. Cette mesurepourrait-elle stimuler les investissements ou la reprisede projets qui avaient été ajournés ?

L’exemption fiscale sur l’achat de matières premières de la première et deuxième génération de produitspétrochimiques a été une décision cruciale pour l’industriechimique. Cependant, elle ne devrait pas avoir d’effetimmédiat sur les investissements. Je m’explique : l’indus-trie chimique opère à un faible taux d’utilisation des capa-cités (environ 80% ces six dernières années), quand l’idéalest d’opérer à 95%. Cette décision fiscale augmentera l’utilisation des capacités à des niveaux supérieurs à 90%qui, lorsqu’ils seront atteints, encourageront les sociétés àenvisager de nouveaux investissements.

Dans quelle mesure le manque de compétitivité, les tauxd’intérêt élevés et la montée en flèche des importationsont-ils affecté les bilans des sociétés ?

Ils ont été affectés de plusieurs manières. Il est de plus enplus difficile de gérer les hausses de coûts liées au main-tien d’activités productives, et la marge d’exploitation aégalement été mise sous pression. Quant aux taux d’in-térêt, dans la mesure où l’industrie présente une forteintensité de capital, ils sont devenus une variable trèsimportante et préoccupante sur deux points, en accablantceux qui ont réalisé des investissements récemment et endécourageant les nouveaux investissements.

L’industrie chimique étant contrainte d’opérer à pleinecapacité, au-delà de 90%, et le monde ne s’étant pasencore remis de la crise financière de 2008, il y a beau-coup d’excédents. Cela s’est traduit au Brésil par descoûts marginaux, une hausse des importations et la miseen péril de la position financière des sociétés sur lemarché national.

Pourriez-vous évaluer le taux de défaut du secteur et son évolution ?

ABIQUIM ne surveille pas le taux de défaut dans lesecteur.

Le gaz de schiste américain

a révolutionné l’industrie

pétrochimique mondiale

Le Brésil, comme les Etats-Unis,

ne doit pas simplement chercher

à exporter du gaz

LES PUBLICATIONS ÉCONOMIQUES DE COFACE 14

(2) Pacto Nacional da indústria Química- étude réalisée en 2010 par Abiquim. Il définit les engagementsde l’industrie dans le développement économique et social du pays et recense les principaux obstaclesqui ralentissent les décisions des investisseurs, brésiliens comme étrangers, en matière d’expansioncommerciale dans l’industrie chimique brésilienne.

(3) Senai est un organisme privé au Brésil, mais d’intérêt public. Son principal objectif est de développeret de mettre en place des programmes de formation professionnelle pour mieux préparer les individusau marché.

INTERVIEW

Page 15: LES PUBLICAaTIONS ÉCONnOMIQUES DEo … · des autorités qui n’hésitent pas/ à aller jusqu’au protectionnisme. Fernando Figueiredo, Président de l’Association de l’industrie

Les entrepreneurs ont demandé une exemption fiscale pour les investissements (en réduisant lestaxes sur l’ingénierie, les machines et l’équipement).Où en est cette proposition ?

Lorsque la Présidente, Dilma Roussef, a ordonné la créationdu Plano Brasil Maior, organisé en Conseils de compétiti-vité, l’un d’entre eux a été consacré aux produits chimi-ques, pétrochimiques et plastiques.

Le travail était coordonné par la Banque nationale de développement économique et social (BNDES) et leMinistère brésilien du développement, de l’industrie et ducommerce extérieur (MDIC), dans le cadre de réunionsavec les employeurs, les travailleurs et les représentantsdu gouvernement. Le rapport couvrait tous les pro-blèmes concrets de l’industrie chimique et récemment,la Présidente a dirigé la publication du Programme PlanoBrasil Maior.

Objectifs stratégiques à court terme

• Exemption sur les matières premières : déjà mise enplace.

• Soutien aux investissements : mise en place prévue d’iciaoût 2013.

• Soutien à l’innovation : mise en place prévue d’ici août2013.

• Politique d’utilisation du gaz en tant que matière première : à définir en décembre 2013.

Echéancier structurel

• Préparation du secteur technologique aux produitsissus de sources renouvelables – en cours, en discussionavec les employeurs, les employés et les membres del’académie.

• Formation des ressources humaines : en voie de lance-ment par l’intermédiaire de discussions avec Senai etl’Agence brésilienne pour le développement industriel.

• Amélioration des infrastructures : le retour à la privati-sation des voies de chemin de fer et des autoroutesconstitue une avancée significative, tandis que le nou-veau cadre réglementaire pour les ports nous permetd’assurer des améliorations substantielles à moyenterme.

• Réglementation des pesticides : une réunion va être programmée rapidement avec des représentants dugouvernement et du secteur pour en parler.

• Étude de la diversification de l’industrie chimique : laBNDES a formalisé le recours au consortium BAINCompany / Gas Energy et l’étude a été lancée. Elledevrait être finalisée d’ici 12 mois, à compter du 1er mai.

Je suis certain que ce sera le coup de pouce final à lareprise des investissements dans l’industrie chimique.Comme vous pouvez le voir, beaucoup de choses avan-cent, mais nous avons besoin de temps pour les concré-tiser. Ce n’est cependant pas un problème pour l’industriechimique qui est une activité de long terme. Je suis certainque nous sommes en train de construire l’industrie de2030.

Nous, les Brésiliens, nous aimons que tout soit prêt pourhier, l’industrie chimique pense à demain

LES PUBLICATIONS ÉCONOMIQUES DE COFACE 15

INTERVIEW

Page 16: LES PUBLICAaTIONS ÉCONnOMIQUES DEo … · des autorités qui n’hésitent pas/ à aller jusqu’au protectionnisme. Fernando Figueiredo, Président de l’Association de l’industrie

Chimie : un essor impressionnant, mais une compétitivité fragile

L’industrie chimique est la 4e plus grande industrie du pays.En 2012, elle représentait 9 % du PIB industriel du Brésil et 2,3 % de son PIB global. Le secteur est spécialisé dans quatredomaines : les produits chimiques utilisés dans le secteurindustriel (principalement pour l’automobile, l’électronique et le textile), les produits pharmaceutiques, les produits chimiques utilisés dans l’agriculture et les cosmétiques. Lechiffre d’affaires net a progressé de 236 % en 10 ans, ce qui apermis au Brésil de devenir le 6e plus grand producteur deproduits chimiques dans le monde. Malgré cela, la croissancedu secteur ralentit depuis 2011, en raison de la fragilité de sa compétitivité sur la scène internationale.

Le gaz est une matière première essentielle, mais son coûtn’est pas compétitif. Les prix sont environ 33 % plus élevésqu’aux États-Unis ou au Canada. La situation s’est encoreaggravée avec la hausse de la consommation de gaz naturelliée à l’utilisation des centrales thermiques dans le pays, afin d’économiser l’eau dans les réservoirs des centraleshydroélectriques. D’après l’Agence nationale du pétrole, les importations de gaz naturel ont augmenté, en valeur, de 77 % entre janvier et avril 2013 par rapport à la même périodeen 2012. Les achats étant effectués sur le marché au comp-tant, le pays est dépendant de la volatilité des cours inter-nationaux (le Brésil ne dispose pas de contrat à long terme). Par ailleurs, la récente appréciation du dollar a tendanceà affecter le prix du gaz naturel importé. Il faut égalementrappeler que l’exploitation par les Etats-Unis du gaz deschiste, qui coûte beaucoup moins cher que toute autreressource disponible, a également eu un impact sur le secteurau niveau mondial.

L’industrie chimique, connue pour être très gourmande enénergie, est affectée par ces prix élevés au Brésil. Début2013, le gouvernement a décidé de réduire les taxesdouanières sur l’électricité entre 17 % et 25 %. Mais cestaxes restent supérieures à celles d’autres pays, comme lesÉtats-Unis, où l’électricité coûte environ 50 % moins cher.Le manque de travailleurs qualifiés est un autre problème :il crée une pression haussière sur les salaires et affectedonc la rentabilité des entreprises. Les infrastructures sontaussi sous-développées, le coût d’investissement dans lepays étant encore très important (le Brésil présentaitencore récemment les taux d’intérêt les plus élevés aumonde).

À la lumière de ces faits, la balance commerciale du secteursuit une tendance dangereuse. Aujourd’hui, 30 % des produitsconsommés au Brésil sont importés. Et si les exportationsbrésiliennes de produits chimiques ont augmenté de 41 %entre 2007 et 2012, ses importations (voir tableau ci-contre)ont progressé presque deux fois plus vite sur la même période,avec un bond de 81 %. Le pays a clôturé l’année 2012 avec un

déficit commercial de 28 milliards de dollars. D’après les estimations, il devrait dépasser les 30 milliards en 2013.

Le gouvernement est conscient de cette menace et travaille encollaboration avec les acteurs du secteur pour y répondre. Unconseil baptisé « Plano Brasil Maior », a été créé pour recenserles éléments qui entravent le développement de la chimie, de lapétrochimie et du plastique. Les premiers résultats apparaissentdéjà : le gouvernement a réduit les taxes sur les matières pre-mières, et beaucoup d’autres points vont être soumis au vote.

Il convient également de souligner que le segment des engraiset pesticides est très vulnérable aux conditions du marchéagricole. En effet, il fonctionne en général avec des échéancesde paiement plus longues et présente un haut niveau derisque dans la mesure où un choc négatif sur l’offre peut seproduire inopinément (comme une sécheresse). Ces événe-ments impliquent le plus souvent une nouvelle planification àlong terme.

Les perspectives de l’industrie chimique sont difficiles. Selonune étude réalisée par l’Association brésilienne de l’industriechimique (Abiquim), il faudrait investir 167 milliards de dollarsd’ici 2020 pour répondre à la demande nationale croissante etaméliorer la balance commerciale. Or, les investissementsdevraient atteindre seulement 2,3 milliards d’ici 2015. Pourréduire ce décalage dans un contexte de taux d’intérêt élevés,le gouvernement doit vraiment s’engager à atteindre cetobjectif. En revanche, en 2007, il a annoncé la découverte d’unimportant gisement de pétrole situé sous le plancherocéanique, sur une bande de 800 km entre les États d’EspíritoSanto et de Santa Catarina, à 100-300 km au large des côtes.L’exploitation de ce champ baptisé « Pré-sel » pourrait consi-dérablement accroître la production de gaz naturel, et doncréduire son prix.

LES PUBLICATIONS ÉCONOMIQUES DE COFACE 16

DescriptionMillions %

d’USD du total

Inorganiques 11 623 27

Produits pharmaceutiques 9537 22

Organiques 8335 19

Résines et élastomères 5371 12

Pesticides 3308 8

Produits chimiques divers 2457 6

Fibre artificielle ou synthétique,

fil métallique, câbles et filaments 984 2

Savon, détergent, produits

d’entretien et parfums 853 2

Peinture et vernis

(dont émaux et laques) 514 1

Importations brésiliennes de produits chimiques en 2012

Focussectoriel

Par Patricia KrauseEconomiste, Coface Brazil

Page 17: LES PUBLICAaTIONS ÉCONnOMIQUES DEo … · des autorités qui n’hésitent pas/ à aller jusqu’au protectionnisme. Fernando Figueiredo, Président de l’Association de l’industrie

LES PUBLICATIONS ÉCONOMIQUES DE COFACE 17

GRAPHIQUE 1 :Production d’acier (en tonnes)

2009 2010 2011 2012

35 000

30 000

25 000

20 000

15 000

10 000

5 000

26 344

32 846

35 026 34 932

Source : IBS

Sidérurgie : des atouts pour inverser des résultats décevants

Le Brésil est le premier producteur d’acier d’Amériquelatine et le 9ème mondial. Ce secteur, fortement concentrédans le sud-est du pays (94 %), essentiellement autour deMinas Gerais et de Rio de Janeiro, est composé de 29usines appartenant à 11 groupes commerciaux. L’immo-bilier, l’automobile, les machines et l’équipement représen-tent 80 % de la consommation d’acier du Brésil. Entre 2009et 2011, la production a progressé au taux annuel moyen de8 %, mais depuis mi-2012, la production et le chiffre d’af-faires ralentissent. En 2012, la production s’est même con-tractée de 1,5 %.

Les quatre principaux producteurs représentent, à euxseuls, plus de 80 % du marché. Le groupe indien ArcelorMitall, le plus grand producteur au monde, occupe uneposition de leader au niveau local. Viennent ensuite dessociétés brésiliennes, Gerdau, Usiminas et CompanhiaSiderurgica Nacional. En 2012, la production intérieured’acier se répartit entre acier plat (45 %), acier long (32 %)et demi-produits (23 %). Ces dernières années, l’acier longa gagné du terrain grâce au développement du marchébrésilien de l’immobilier.

Les mauvaises performances de 2012 tiennent à une con-joncture mondiale marquée par une croissance plus faibleen Chine, un niveau d’activité modéré aux États-Unis et unclimat récessionniste persistant en Europe. Le PIB brésilienn’a, en partie de ce fait, progressé que de 0,9 %. Au total,le secteur a reculé de 2,7 %. Conséquence, une offre excé-dentaire d’acier a tiré les prix vers le bas. La consommationau Brésil n’a augmenté que de 0,5 % l’an dernier. La pro-duction automobile s’est quant à elle contractée de 2 %,l’immobilier n’a gagné que 1,4 % et les machines etéquipements ont cédé du terrain en 2012 (la formationbrute de capital fixe a chuté de 4 % en glissement annuel).

Par ailleurs, les principales matières premières pour l’acier plat,le charbon et le minerai de fer, ont connu une tendance baissière. Le fait que le Brésil importe 100 % du charbon qu’ilconsomme explique la forte vulnérabilité des coûts structurelsdes usines face aux variations des taux de change. En 2012, lereal a perdu 17 % de sa valeur par rapport au dollar, avant uneappréciation notable, ces dernières semaines. Heureusement,le minerai de fer n’est pas un problème, le Brésil étant un grandproducteur.

Il faut rappeler que les usines ne peuvent pas répercuterimmédiatement la hausse des prix des matières premièressur les consommateurs, en raison de la vive concurrencedes produits importés qui exercent une pression sur lesmarges du secteur. De nombreux producteurs d’aciervenant de pays qui, comme en Europe, sont confrontés àune faible activité essaient en effet de conquérir des partsde marché à l’étranger, pour compenser leurs mauvaisesperformances chez eux. Sous la pression des producteurslocaux, le gouvernement brésilien a donc relevé de 25 %les taxes d’importation de plusieurs produits de l’acier enseptembre 2012.

La sidérurgie brésilienne exporte 30% de sa production.Mais en dépit de la dépréciation du real, les exportations ontreculé de 10 % en 2012. Historiquement, ce sont les demi-produits qui sont les plus exportés (68 % en 2012), suivis parl’acier plat et, enfin l’acier long. En revanche, l’acier plat estle plus importé.

La banque brésilienne de développement (BNDES) estimeque le secteur de l’acier investira 14 milliards de dollars surla période 2013-2016, soit 20 % de moins qu’entre 2008 et2011. Cela s’explique par la surcapacité de 526 millions detonnes d’acier dans le monde. Les sociétés d’explorationminière et les producteurs d’acier concentrent donc leursinvestissements sur la production de minerai de fer qui,malgré la baisse récente de ses prix, présente toujours unemarge bénéficiaire très positive. Le Brésil est un producteurde minerai de fer de premier plan.

Page 18: LES PUBLICAaTIONS ÉCONnOMIQUES DEo … · des autorités qui n’hésitent pas/ à aller jusqu’au protectionnisme. Fernando Figueiredo, Président de l’Association de l’industrie

Immobilier35,4%

Machine etéquipement20,7%

Pour résumer, les performances de la sidérurgie sont mau-vaises, mais les opportunités existent pour renverser cettetendance. L’économie brésilienne pourrait croître à unrythme modéré en 2013 (2,7 % d’après la Banque centralebrésilienne), ce qui est déjà mieux que la progression minimede 2012. Au premier trimestre 2013, les investissements ontaugmenté de 4,6 % par rapport au trimestre précédent. D’importants investissements dans les infrastructures sontégalement attendus dans les mois à venir, grâce au « Pro-gramme d’accélération de la croissance au Brésil », à la Coupedu monde et aux Jeux olympiques. Par ailleurs, les perspec-tives sont bonnes pour l’automobile : le gouvernement arécemment annoncé un programme incitatif, qui devrait stimuler les investissements dans le secteur et faire progressersa production. Quant au scénario à l’étranger, nous n’attendonspas d’amélioration significative à court terme.

GRAPHIQUE 2 :Consommation d’acier par secteur (en %)

Source : Institut brésilien de l’acier

Autres8,3%

Automobile24,7%

Tubes4,4%

Electroménager6,5%

LES PUBLICATIONS ÉCONOMIQUES DE COFACE 18

Automobile :le quatrième marché du monde attise les convoitises

Le Brésil a terminé l’année 2012 en quatrième position dansle classement des plus grands marchés intérieurs dumonde, et en septième position en termes de production.Le secteur représentait alors 21 % du PIB industriel ou 5 %du PIB total brésilien et employait 1,5 million de personnes.Le développement de la classe moyenne, associé à unfaible ratio d’habitants par véhicule, a contribué à la hausserégulière de la production. Entre 2003 et 2012, le nombred’unités produites par an a progressé de 88 %. Les impôtsconstituant 30 % du prix de vente, la proportion la plusélevée au monde : il n’est pas étonnant que le gouverne-ment suive toujours de très près ce secteur.

Les principaux acteurs sur le marché, en termes de produc-tion, sont, dans l’ordre, Volkswagen, Fiat, General Motorset Ford qui représentent ensemble 75 % du volume total.Au niveau des ventes locales, les mêmes, constructeurss’arrogent 68% de parts de marché, seules les positions de Volkswagen et Fiat s’inversant. Par ailleurs, le pays attirede plus en plus d’investisseurs et l’automobile se place en 2eme

position des investissements directs étrangers dans le secteurindustriel brésilien. Entre 2002 et 2012, le cumul des investis-sements s’élève à près de 27 milliards de dollars.

� � � � � ��

�� �

� �

2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012

30 000

20 000

10 000

0

-10 000

-20 000

GRAPHIQUE 1 :Balance commerciale (en millions d’USD)

Source : Alice Web Mercosul

Importations

Exportations

Balance commerciale

Page 19: LES PUBLICAaTIONS ÉCONnOMIQUES DEo … · des autorités qui n’hésitent pas/ à aller jusqu’au protectionnisme. Fernando Figueiredo, Président de l’Association de l’industrie

Pour encourager les nouveaux investissements dans lesusines, la modernisation, la mise au point de nouveauxvéhicules, l’efficacité énergétique et le contenu tech-nologique, le gouvernement a récemment mis en place unplan de relance, baptisé « Inovar-Auto ». Ce plan qui prévoitplus de 23 milliards de dollars d’investissements entre 2013et 2017 a déjà séduit certains. En juin, Fiat a annoncé dans lecadre de ce programme 7 milliards de dollars d’investissements,d’ici 2016, afin de développer de nouveaux produits et tech-nologies. Volkswagen s’est également engagée à investir 4 milliards sur la même période. Les marques japonaises,comme Toyota et Honda, ont aussi décidé de donner un coupd’accélérateur à leurs projets de développement, grâce auxnouvelles mesures incitatives.

Les grands constructeurs installés au Brésil depuis longtempsne sont pas les seuls à s’intéresser à ce marché. Depuis 2010,de plus en plus de constructeurs chinois et sud-coréensarrivent avec des prix compétitifs, menaçant à la fois lesgrands noms et les marques moins connues. Inquiet de lacroissance des importations de véhicules, le gouvernement adécidé, fin 2011, d’ériger des barrières. Il a relevé de 30 pointsde pourcentage à 65% minimum la taxe sur les produitsindustrialisés pour les voitures qui ne sont pas produites auBrésil (l’Argentine, le Mexique et l’Uruguay en sont dispen-sés). Les marques chinoises (comme Cherry et Jac Motors)construisent d’ores et déjà leurs premières usines au Brésiltandis que d’autres (comme Geely) envisagent cette possi-bilité.

Situé sur l’axe sud-sud-est du pays, l’industrie automobilese concentre sur la production de voitures et de véhiculescommerciaux légers. L’année dernière, leurs ventes ontprogressé de 6,1 % en volume, grâce à l’ajournement deshausses d’impôt, à un marché du travail favorable, aux

conditions de crédit (taux d’intérêt plus faibles), à une con-currence féroce entre les constructeurs et à des hausses desalaires. Les perspectives se sont cependant légèrementdégradées et les ventes devraient donc augmenter à unrythme plus lent cette année. D’après Tendências, un célèbrecabinet de conseil économique brésilien, la branche devraitmalgré tout gagner 3,2 % en 2013.

Les ventes de bus et de poids lourds, en revanche, ont con-sidérablement baissé au cours de la même période. Onconsidère qu’il s’agit de l’effet naturel temporaire de la miseen œuvre de la norme Euro 5 instaurée début 2012 pourréduire les niveaux d’émission de substances polluantesdans l’atmosphère. Le secteur a d’ores et déjà montré dessignes de rétablissement dans les premiers mois de 2013,avec une progression de 8,97 % entre janvier et mai.

Enfin, le Brésil concentre ses exportations sur la région du Mercosur, qui absorbe plus de 60 % de ses ventes. L’Argentineest son principal partenaire commercial. Cette relation a étéaffectée par de nouvelles règles sur les importations, mises enplace par le gouvernement argentin en 2012 mais la balancecommerciale entre les deux pays reste positive pour le Brésil.L’Asie, en revanche, est responsable du déficit brésilien, dansla mesure où 41 % des véhicules importés viennent de cetterégion et que le Brésil n’y exporte pas.

Globalement, les perspectives sont positives, sur la base dela situation locale et du ratio toujours faible d’habitants parvéhicule. Les investissements resteront solides et la produc-tion devrait par conséquent augmenter. Reste que les impor-tations ralentiront au vu de taxes douanières élevées, et lesexportations continueront de stagner, en raison des barrièresmises en place par l’Argentine et du ralentissement de l’activité économique mondiale.

LES PUBLICATIONS ÉCONOMIQUES DE COFACE 19

3 500

3 000

2 500

2 000

1 500

1 000

GRAPHIQUE 2 :Production de véhicules par an / Production de véhicules (en millions d’unités)

GRAPHIQUE 3 :Investissements par an / Investissements (en millions d’USD)

Source : Anfavea Source : Anfavea

2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012

1 685

2 124

2 357 2 404

2 825

3 051 3 076

3 3873 382 3 417 3 500

3 000

2 500

2 000

1 500

1 000

2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012

748 8201 180

1 572

2 136

3 197

2 721

3 872

5 339 5 347

Page 20: LES PUBLICAaTIONS ÉCONnOMIQUES DEo … · des autorités qui n’hésitent pas/ à aller jusqu’au protectionnisme. Fernando Figueiredo, Président de l’Association de l’industrie

LES PUBLICATIONS ÉCONOMIQUES DE COFACE 20

115 -110 -105 -100 -95 - 90 -85 -80 -75 -70 -65 -60 -55 -50 -45 -40 -35 -30 -

Distribution : force motrice de l’économie

Avec l’apparition d’une nouvelle classe moyenne, une forte pro-gression des revenus et le recours croissant au crédit, la venteau détail est devenue l’un des moteurs de l’économie brésilienne.Mais si les prévisions restent positives, de premiers signes desaturation se font jour.

Avec une croissance bien plus rapide que l’activité générale, lavente au détail est l’une des forces motrices de l’économie. Elle a progressé, en 2012, de 8,4% au sens strict, et de 8% ausens large, c’est-à-dire en prenant en compte les véhicules et laconstruction. La vente au détail est avant tout liée au revenuréel et aux conditions de crédit, deux paramètres qui se sontfortement améliorés dans l’histoire récente du Brésil, mais quidonnent désormais des signes de ralentissement.

Au cours de la dernière décennie, une nouvelle classe moyenneest apparue au Brésil, 38 % de la population entrant dans cettecatégorie en 2003, contre 55 % en 2011. De nombreuses per-sonnes sont donc arrivées sur le marché de la consommation.Par ailleurs, le revenu réel a considérablement progressé et lechômage a chuté, atteignant un taux annuel moyen de seule-ment 5,5 % en 2012.

Les hausses de salaires ont tendance à constituer la variable la plus influente sur la consommation des ménages, mais dansce cas précis, c’est le crédit qui a joué un rôle primordial. En une décennie, le ratio encours total du crédit/PIB est passé de24,4 % à 53,8 % en décembre 2012.

Et le crédit aux particuliers est celui qui a le plus progressé alorsque le taux d’intérêt réel, qui était le plus élevé au monde, aatteint son plus bas historique, à 7,25 % par an, fin 2012.

Les prêts immobiliers affichent de meilleurs résultats depuisquelques années. Ils ont contribué à stimuler les ventes demeubles et d’électroménager (voir graphique ci-contre), à telpoint que ce segment a connu des performances supérieuresaux autres. Le gouvernement a également procédé à une réduc-tion d’impôts temporaire sur les produits industrialisés de cegroupe, mais repousse toujours le retour au taux initial.

Les prévisions pour 2013 et 2014 sont positives, mais la croissancedevrait être plus lente. Nous estimons que la consommation desménages devrait ralentir en raison de plusieurs facteurs :

• le crédit devrait réduire son rythme d’expansion (les famillessont très endettées et la faillite individuelle a progressé en2012) ;

• le chômage reste bas, mais les hausses de salaire ont décéléré ;

• le réajustement annuel du salaire minimum en 2013 a été beau-coup plus limité (autour de 9 %) qu’en 2012 (14,13 %) ;

• la pression sur les prix de détail, que l’on observe depuis mi-2012, a gagné en vigueur au premier trimestre 2013(essentiellement dans les aliments et les services). Les agentss’attendent à ce que les ventes de détail progressent de 4,5 %cette année et de 4,3 % pour la vente au détail au sens large.

Après un bon début d’année, de nombreux segments ontenregistré une décélération au deuxième trimestre 2013, à l’instar des supermarchés, des restaurants, des textiles et desaccessoires personnels. La confiance des consommateurs a suiviune tendance à la baisse, une part considérable de leurs revenusétant déjà engagée dans les échéances de prêts. En effet, bienque la hausse récente des taux de référence ne se fasse pasencore sentir, c’est déjà une préoccupation.

En dépit de cette évolution, certains groupes devraientconnaître de meilleures performances que la moyenne. L’élec-tronique aura probablement une croissance considérable,notamment dans les produits numériques, les ordinateurs, lestéléviseurs LCD, les smartphones et les tablettes. Par ailleurs, lavente en ligne représente toujours 5 % des ventes, mais devraitbondir de 25 % en 2013, grâce à la progression constante desconnexions internet et de la pénétration des cartes de crédit.

Dernier point, et non des moindres, le gouvernement a annoncé,le 12 juin 2013, une aide au crédit pour l’achat de meubles et deproduits électroniques par les emprunteurs de « Minha Casa,Minha Vida », ce programme fédéral qui favorise l’achat d’unlogement de la population à faible revenu.

Si le marché de la vente au détail se porte globalement bien, sonmodèle de croissance fondé sur l’octroi de crédits montre déjàdes signes de saturation. Les distributeurs pourraient avoir desdifficultés à concurrencer les produits importés, parfois moinschers et/ou de meilleure qualité. En revanche, si l’appréciationdu dollar se poursuit, les produits locaux deviendront plusattractifs. L’inflation doit également être maîtrisée, notammentdans l’alimentation, car elle affecte directement les ventes dessupermarchés. La prolongation des réductions fiscales pourraitégalement approcher de la fin, le gouvernement ayant besoind’équilibrer son budget. Enfin, le récent accord d’aide au créditpour « Minha Casa, Minha Vida » ne devrait avoir qu’un effetpositif marginal sur les distributeurs.

Ventes réelles au détail (moyenne d’indice = 2011)

2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013

Ventes au détail au sens large

Ventes de meubles et d’électroménager

Vente des supermarchés

Vente au détail ai sens strict

Source : IBGE

Page 21: LES PUBLICAaTIONS ÉCONnOMIQUES DEo … · des autorités qui n’hésitent pas/ à aller jusqu’au protectionnisme. Fernando Figueiredo, Président de l’Association de l’industrie

LES PUBLICATIONS ÉCONOMIQUES DE COFACE 21

Agroalimentaire : un nouveau plan de relance après le revers de 2012

Grâce à son immense étendue de terres arables, le Brésil estun grand producteur de matières premières agricoles. Ellesreprésentent 4,5 % du PIB brésilien d’après les chiffres de 2012et assurent 40% des exportations du pays. Les principaux produits exportés sont, dans l’ordre, le soja, la viande, le sucreet l’éthanol, le café (66 % des exportations agricoles). Le PIBde l’agriculture brésilienne s’est contracté de 2,3 % l’an dernier,notamment en raison de la chute de la production de soja(pertes importantes dans le sud du pays) et de la baisse desprix de plusieurs cultures.

Les performances du secteur agricole brésilien dépendent del’activité économique mondiale et des récoltes des autres paysspécialisés dans les mêmes cultures. Par exemple, les produc-teurs de maïs ont bénéficié, en 2012, des mauvaises récoltesaux États-Unis. Et l’agriculture a bondi de 9,7 % au premiertrimestre 2013 grâce au rétablissement de la production desoja et aux bonnes récoltes de maïs, de tabac et de riz. Il n’em-pêche que les prévisions de la Banque centrale brésilienne qui table sur une croissance de 8,4 % en 2013, paraissent trèsoptimistes. Cette hypothèse pourrait être battue en brèchepar la tendance baissière des prix mondiaux. Au cours destrois premières semaines de juin, les prix de 16 des 23 matièrespremières brésiliennes les plus exportées ont en effet chuté.

De bonnes perspectives pour les récoltes américaines pour-raient présager une offre excédentaire et des stocks élevés.Et la croissance chinoise, principale destination des exporta-tions, tend à se ralentir. Pendant de nombreuses années, leBrésil a bénéficié de la forte demande alimentaire chinoise,mais cette phase semble désormais révolue. Grâce à l’impor-tante dépréciation du real de ces dernières semaines, la baissedes prix n’a, pour le moment, pas beaucoup affecté le chiffred’affaires des exportateurs.

Il convient également de rappeler que seuls quelques grandsproducteurs ont pu profiter des politiques agricoles et accéderaux nouvelles technologies. Le faible niveau d’éducation despetits producteurs constitue un sérieux frein à l’adoption denouvelles technologies et à l’accès aux politiques publiques,notamment l’aide au crédit. Ces petits exploitants, peu à mêmed’utiliser les politiques de prix garantis et d’achat anticipé desrécoltes, vendent donc leur production à un prix bien inférieuret achètent leurs intrants à des prix plus élevés. Les coûts dépas-sant les gains, les technologies ne sont pas rentables. Sansbénéfice, rien ne permet aux exploitants de se moderniser. Legouvernement doit leur venir en aide, mais le nouveau pro-gramme annoncé ne semble pas tenir compte de cette priorité.

Début juin 2013, la présidente Dilma Rousseff a annoncé le « Plano Agrícola e Pecuário 2013/2014 » qui dégagera environ68 milliards de dollars. Cette somme se répartit en 49 milliardsd’USD de coûts de financement et de transactions et 19 milliards de programmes d’investissement. Il se concentreégalement sur la logistique et les infrastructures, en four-nissant 13 milliards de dollars pour la construction de serresprivées dans les cinq prochaines années, avec une période depaiement échelonnée sur 15 ans.

Enfin, l’agriculture du pays est également affectée par sadépendance vis-à-vis des importations d’engrais. Le potassium,le nutriment de base pour la production de pesticides, présenteun indice d’importation de 95 % tandis que celui de l’azote estautour de 50 %. C’est l’un des secteurs qui affiche le plus lourddéficit commercial de l’économie et qui manque de nouveauxinvestissements. La Banque brésilienne de développementenvisage d’ores et déjà la possibilité d’augmenter le finance-ment des projets pour trois intrants – le potassium, le phos-phore et l’azote – pour passer de 125 millions de dollars par an actuellement à environ 1 milliard d’ici 2015. Le Brésil est lequatrième plus grand consommateur d’engrais dans le monde,derrière les États-Unis, l’Inde et la Chine.

APERÇUS DU MARCHÉ :

Soja : le pays est le deuxième producteur mondial. La récolte2012/2013 devrait atteindre un volume record de 81,5 millionsde tonnes, soit 22,8 % de plus que la précédente. Le prix dusoja a récemment montré une certaine volatilité, en raison desincertitudes entourant la production américaine.Café : c’est le premier producteur mondial. La récolte 2013/2014devrait atteindre un record pour une « petite année » dans lecycle de production biennal. Les prix devraient rester bas, sousla pression de l’excédent de la période 2012/2013.Sucre et éthanol : la canne à sucre produite au Brésil sert à laproduction de sucre à 46 % et à la production d’éthanol à 54 %(d’après les récoltes 2001-2012). Le pays est le plus grandproducteur et exportateur de sucre au monde et occupe ladeuxième place dans la production d’éthanol, derrière les États-Unis. Les récoltes record exercent des pressions à la baisse surles prix, et le niveau plancher dépendra des coûts de pro-duction. Éthanol : les prix devraient baisser avec l’entrée de lanouvelle récolte, mais ont tendance à progresser plus tard, enraison d’une demande intérieure et étrangère plus forte.Viande : le Brésil est le principal exportateur, avec 20 % departs de marché. Le début de la saison sèche pendant la période creuse fera grimper les prix du bœuf, une hausse quisera toutefois limitée par la forte stabilisation de la demandeintérieure en raison de la concurrence du poulet.

Prévisions de récolte de céréales 2012/2013 (en milliers de tonnes)

Soja44%

Autres7%

Blé3%

Riz6%

Maïs40%

Source : Conab, juin 2013