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37 Les polypes glandulaires fundiques (PGF) La prévalence des PGF est en nette augmentation depuis leur première description en 1977 par Elster. Les PGF sont formés de glandes fun- diques microkystiques et siègent exclusivement en muqueuse fun- dique. Parfois uniques, ils sont le plus souvent multiples, de forme sessile, de surface lisse, ou irrégulière, mesu- rant moins de 1 cm ; leur couleur est identique à celle de la muqueuse avoisinante [6-8]. Ils ont la particula- rité de se détacher en morceaux lors- qu’on les biopsie en retirant la pince latéralement [8]. Ces formations sont considérées comme bénignes, n’ayant aucune potentialité à dégé- nérer. Cependant, quelques cas de dysplasie ont été décrits au sein de ces polypes principalement lorsqu’ils survenaient dans un contexte de poly-adénomatose familiale (PAF) [7, 9]. Le caractère exceptionnel des dysplasies en dehors de la PAF [10], conduit à ne pas remettre en cause les recommandations actuelles qui Les polypes gastriques considèrent que ces polypes peuvent être laissés en place sans risque [1, 7]. Fait marquant, les muqueuses fun- dique et antrale sont habituellement normales [6]. De ce fait, les PGF ne sont pas associés à un état pré-cancé- reux de la muqueuse gastrique. [7] La prévalence de l’infection par Helicobacter pylori (Hp) est beaucoup moins fréquente que dans une popu- lation témoin [6]. La régression des PGF au moment de l’apparition d’une infection par Hp dans 2 cas rapportés par Watanabe [11] suggère qu’il y aurait même incompatibilité entre l’infection par Hp et la présence de PGF. L’évolution des polypes au moment d’une infection par Hp serait généti- quement déterminée puisque dans ces deux cas, seuls les polypes ne com- portant pas de mutation du gène de la béta-catenine, régressaient. [11]. Ces polypes surviennent soit dans un contexte de PAF, soit, dans la majo- rité des cas, de façon sporadique [7]. Plusieurs auteurs [7, 12] ont attiré l’attention sur l’apparition de PGF chez les malades sous inhibiteurs de pompes à protons (IPP), avec possibi- lité de disparition à l’arrêt du traite- ment et réapparition lors de la reprise du traitement [12). Dans l’étude de Choudry et al. [12] chez 2 303 malades, la prévalence des PGF était plus élevée chez les malades traités par IPP (7,3 %) que chez ceux non traités (0,6 %). Cette différence pourrait être liée à un biais de recru- tement puisque les auteurs ne tenaient pas compte du statut Hp des malades. Dans un travail [13] réalisé uniquement chez des malades Hp négatif, aucune différence n’était observée mais l’influence de la durée du traitement IPP ne pouvait être totalement écartée. L’évolution des Formations saillantes sessiles ou pédiculées, les polypes gastriques sont observés au cours de 2 à 5 % des endoscopies hautes. Histologiquement, ces formations se développent aux dépens de l’épithélium, du tissu endo- crine ou des cellules mésenchymateuses [1]. Selon leur nature, les polypes gas- triques peuvent être potentiellement malins et/ou être associés à des alté- rations de la muqueuse gastrique reconnues comme états pré-cancéreux. Dans une grande série [2] portant sur 5 515 polypes gastriques collectés chez 4 852 patients entre 1969 et 1989, 81 % des polypes étaient de nature non tumorale, et 19 % étaient néoplasiques (Tableau I). Les polypes glandulo-kystiques aussi appelés polypes des glandes fundiques (PGF), étaient les plus fréquents (47 %), sui- vis par les polypes hyperplasiques (28,3 %), les adénomes (10,2 %), les adénocarcinomes (7,2 %) ; venaient ensuite les polypes fibro-inflamma- toires (3.1 %), les carcinoïdes (1,7 %) et les hétérotopies des glandes de Brunner ou pancréatiques (1,2 %). Les biopsies suffisent, en pratique, pour préciser la nature de la lésion [1]. Les résultats sont concor- dants avec ceux de l’analyse de la totalité du polype dans plus de 97 % des cas [3]. En revanche, les biopsies sont insuffisantes pour s’assurer de la totale bénignité des polypes hyper- plasiques ou adénomateux de plus de 5 mm [3-5]. En cas de polypes mul- tiples, on ne peut écarter la coexis- tence de polypes de nature différente surtout lorsqu’ils siègent en des terri- toires différents (antre et fundus). Les polypes d’origine épithéliale L’origine épithéliale des polypes est de loin la plus fréquente (Tableau I). Th. VALLOT (Paris) Tirés à part : Thierry VALLOT, Service d’Hépato-gastroentérologie, CHU Bichat Claude Bernard, 46, Rue Henri Huchard - 75018 Paris. TABLEAU I PRÉVALENCE DES POLYPES SELON LEUR NATURE (N =3588) À L’EXCLUSION DES POLYPES GLANDULAIRES FUNDIQUES, MÉSENCHYMATEUX ET LYMPHOMATEUX (D’après Stolte et al.) Polypes néoplasiques N = 1 215 adénome 697 Adénocarcinome 423 Tumeur carcinoïde 95 Polypes non néoplasiques N = 2 373 Polype hyperplasique 2 036 Polype fibro inflammatoire 192 Hétérotopie 111 Polype de Peutz Jeghers 21 Polype juvénile 11 Polype de Cronkhite-Canada 2

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Les polypes glandulairesfundiques (PGF)

La prévalence des PGF est en netteaugmentation depuis leur premièredescription en 1977 par Elster. LesPGF sont formés de glandes fun-diques microkystiques et siègentexclusivement en muqueuse fun-dique. Parfois uniques, ils sont le plussouvent multiples, de forme sessile,de surface lisse, ou irrégulière, mesu-rant moins de 1 cm ; leur couleur estidentique à celle de la muqueuseavoisinante [6-8]. Ils ont la particula-rité de se détacher en morceaux lors-qu’on les biopsie en retirant la pincelatéralement [8]. Ces formationssont considérées comme bénignes,n’ayant aucune potentialité à dégé-nérer. Cependant, quelques casde dysplasie ont été décrits au sein deces polypes principalement lorsqu’ilssurvenaient dans un contexte depoly-adénomatose familiale (PAF)[7, 9]. Le caractère exceptionnel desdysplasies en dehors de la PAF [10],conduit à ne pas remettre en causeles recommandations actuelles qui

Les polypes gastriques

considèrent que ces polypes peuventêtre laissés en place sans risque [1, 7].Fait marquant, les muqueuses fun-dique et antrale sont habituellementnormales [6]. De ce fait, les PGF nesont pas associés à un état pré-cancé-reux de la muqueuse gastrique. [7]La prévalence de l’infection parHelicobacter pylori (Hp) est beaucoupmoins fréquente que dans une popu-lation témoin [6]. La régression desPGF au moment de l’apparition d’uneinfection par Hp dans 2 cas rapportéspar Watanabe [11] suggère qu’il y auraitmême incompatibilité entre l’infectionpar Hp et la présence de PGF.L’évolution des polypes au momentd’une infection par Hp serait généti-quement déterminée puisque dans cesdeux cas, seuls les polypes ne com-portant pas de mutation du gène de labéta-catenine, régressaient. [11].Ces polypes surviennent soit dans uncontexte de PAF, soit, dans la majo-rité des cas, de façon sporadique [7].Plusieurs auteurs [7, 12] ont attirél’attention sur l’apparition de PGFchez les malades sous inhibiteurs depompes à protons (IPP), avec possibi-lité de disparition à l’arrêt du traite-ment et réapparition lors de la reprisedu traitement [12). Dans l’étudede Choudry et al. [12] chez2303 malades, la prévalence des PGFétait plus élevée chez les maladestraités par IPP (7,3%) que chez ceuxnon traités (0,6 %). Cette différencepourrait être liée à un biais de recru-tement puisque les auteurs netenaient pas compte du statut Hp desmalades. Dans un travail [13] réaliséuniquement chez des malades Hpnégatif, aucune différence n’étaitobservée mais l’influence de la duréedu traitement IPP ne pouvait êtretotalement écartée. L’évolution des

Formations saillantes sessiles oupédiculées, les polypes gastriques sontobservés au cours de 2 à 5 % desendoscopies hautes. Histologiquement,ces formations se développent auxdépens de l’épithélium, du tissu endo-crine ou des cellules mésenchymateuses[1]. Selon leur nature, les polypes gas-triques peuvent être potentiellementmalins et/ou être associés à des alté-rations de la muqueuse gastriquereconnues comme états pré-cancéreux.Dans une grande série [2] portant sur5 515 polypes gastriques collectéschez 4 852 patients entre 1969 et1989, 81 % des polypes étaient denature non tumorale, et 19% étaientnéoplasiques (Tableau I). Les polypesglandulo-kystiques aussi appeléspolypes des glandes fundiques (PGF),étaient les plus fréquents (47%), sui-vis par les polypes hyperplasiques(28,3 %), les adénomes (10,2 %), lesadénocarcinomes (7,2 %) ; venaientensuite les polypes fibro-inflamma-toires (3.1%), les carcinoïdes (1,7%)et les hétérotopies des glandes deBrunner ou pancréatiques (1,2%).Les biopsies suffisent, en pratique,pour préciser la nature de lalésion [1]. Les résultats sont concor-dants avec ceux de l’analyse de latotalité du polype dans plus de 97%des cas [3]. En revanche, les biopsiessont insuffisantes pour s’assurer de latotale bénignité des polypes hyper-plasiques ou adénomateux de plus de5 mm [3-5]. En cas de polypes mul-tiples, on ne peut écarter la coexis-tence de polypes de nature différentesurtout lorsqu’ils siègent en des terri-toires différents (antre et fundus).

Les polypes d’origineépithélialeL’origine épithéliale des polypes estde loin la plus fréquente (Tableau I).

Th. VALLOT (Paris)

Tirés à part : Thierry VALLOT, Service d’Hépato-gastroentérologie, CHU Bichat ClaudeBernard, 46, Rue Henri Huchard - 75018 Paris.

TABLEAU IPRÉVALENCE DES POLYPES SELON LEURNATURE (N = 3588) À L’EXCLUSION DESPOLYPES GLANDULAIRES FUNDIQUES,

MÉSENCHYMATEUX ET LYMPHOMATEUX(D’après Stolte et al.)

Polypes néoplasiques N = 1 215

adénome 697

Adénocarcinome 423

Tumeur carcinoïde 95

Polypes non néoplasiques N = 2 373

Polype hyperplasique 2 036

Polype fibro inflammatoire 192

Hétérotopie 111

Polype de Peutz Jeghers 21

Polype juvénile 11

Polype de Cronkhite-Canada 2

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Les PH sont localisés dans le corpsgastrique dans 45 à 90 % des cas[1, 6]. Dans près de 40% des cas, leurnombre est supérieur à 10 [6]. La pré-valence des microcancers ou des dys-plasies au sein des PH est rare et infé-rieure à 1% [1, 6]. Les carcinomes oules lésions dysplasiques ne sontobservés que dans les polypes >5mmet ne sont pas toujours détectés surde simples biopsies [4].

Les PH sont associés de façon prati-quement constante à des altérationsdes muqueuses antrale et fun-dique [17]. Sur 244 malades, l’atro-phie fundique de type auto-immunavec muqueuse antrale normale étaitobservée dans 51% des cas. Les PHsont trouvés au moment du diagnos-tic ou au cours de la surveillance dela gastrite atrophique de type auto-immun chez près de 50 % desmalades et représentent plus de 80%des polypes observés dans cettesituation [18, 19]. Ils ne doivent pasêtre confondus avec les pseudo-polypes décrits par Krasinskas etal. [20]. Ces formations polypoïdessouvent nombreuses, correspondenten fait à la présence d’îlots demuqueuse fundique conservée ausein d’une muqueuse atrophique. LesPH peuvent s’associer à des polypesd’autre nature : carcinoïdes fundiquesou adénomes [18, 19].

Une gastrite non atrophique étaitnotée dans 37 % des cas, avec uneprédominance fundique dans 57 %des cas [17]. Ces altérations secon-daires à l’infection par Hp constituentun état à plus haut risque de cancergastrique et une indication à l’éradi-cation de Hp [21]. On ne connaît pasprécisément l’impact de l’éradicationde Hp, à ce stade, sur le risque néo-plasique, en particulier en Europe, oùl’incidence de ce cancer est basse.

La présence de PH doit être considé-rée dans plus de 80% des cas, commele témoin d’un état précancéreuxgastrique [17]. L’incidence synchroneou métachrone du cancer gastrique,chez ces patients, varie entre 1,2% et28% et serait encore plus élevée encas de polypose gastrique [1]. Dans lasérie de Stolte [1] 3,3% des maladesavec PH avaient un cancer gastriquesynchrone. Sur 229 malades porteurs

de PH, Hp positifs, et suivis pour unedurée moyenne de 7,8 ans, Uemara etal. [21] ont observé 5 cancers gas-triques (2,2%).

Au total, en cas de polype hyperpla-sique, il est recommandé d’en réaliserl’exérèse si le diamètre est supérieur à5 mm [1, 3, 4], de faire un examenendoscopique attentif de tout l’esto-mac et de préciser par des biopsiesantrales et fundiques, l’état de lamuqueuse gastrique. En cas de gas-trite à prédominance fundique, il fautéradiquer Hp. L’utilité et la périodicitéde la surveillance endoscopique aprèséradication ne sont pas établies dansles populations à bas risque de can-cer. Un examen endoscopique tousles 3 ans pourrait être proposé. En casde gastrite atrophique fundique detype auto-immun, l’utilité de la sur-veillance endoscopique est aussicontroversée [22). Elle dépend del’association éventuelle à d’autrespolypes (carcinoïde, adénome) et duterrain.

Les adénomes

Les polypes gastriques adénomateuxreprésentent 7 à 10 % des polypesgastriques [2]. Rappelons qu’environ25 % des adénomes se présententsous une forme protubérante. L’adé-nome siège indifféremment dans lefundus ou l’antre [5, 23, 24], est soli-taire dans 82% des cas, de taille infé-rieure à 2 cm dans environ 80% descas et de type tubuleux dans 80 à96% des cas [5, 24].

Les adénomes sont considérés commedes lésions précancéreuses. La fré-quence de la dégénérescence rappor-tée dans la littérature varie considé-rablement, comprise entre 4 et 60%mais généralement autour de 10% [1,5, 6]. Le risque de retrouver dessignes de dégénérescence dans unadénome dépend de son type histolo-gique [24], de sa taille, et de sonaspect en surface [5]. Des foyers decancer invasif sont observés dans 33à 55% des adénomes de plus de 2 cmversus 1 à 5 % dans des polypes demoins de 2 cm [5] ; mais ils peuventaussi être trouvés dans des polypes demoins de 5 mm [5]. Dans l’étudede Park [5], 15 % des adénomes

PGF apparaissant sous IPP estvariable [7]. Ils peuvent régresser àl’arrêt du traitement [14] mais aussimalgré sa poursuite [15] ; le plus sou-vent, ils persistent. Les auteurs s’ac-cordent pour considérer ces anoma-lies comme bénignes qui n’imposentaucune mesure particulière et en touscas, pas l’arrêt des IPP [7].

Les PGF peuvent survenir dans uncontexte de PAF. Dans ces cas, ilspeuvent s’associer à des polypes adé-nomateux siégeant aussi dans l’antre.Les PGF se rencontrent aussi dans lesformes atténuées de PAF à révélationplus tardive [7]. Indépendamment dela PAF, plusieurs études ont montré lafréquence élevée de l’association PGFet adénomes coliques (35-50 %) [2,8, 16]. Une coloscopie est recomman-dée par certains auteurs lors du dia-gnostic de PGF, avec un niveau depreuve assez faible. La découverted’adénomes coliques en petit nombresoulève deux hypothèses : s’agit-ild’adénomes sporadiques ou d’unePAF atténuée [7]? L’enquête familialeest ici déterminante pour discuter del’indication d’une recherche géné-tique de la mutation de la PAF. Rap-pelons toutefois que cette mutationest absente chez près de 10 % desmalades atteints de PAF [7].

Au total, lorsque le diagnostic depolypes glandulaires kystiques estétabli, il n’est pas nécessaire de réali-ser leur exérèse complète ni derecommander une surveillance endehors du cas particulier de la PAF.En revanche, il est recommandé deréaliser une coloscopie et de discuterle diagnostic d’une PAF atténuée encas de découverte de polypes.

Les polypes hyperplasiques

Dans la série de Stolte [2], les polypeshyperplasiques (PH) représentaient28% des polypes. Dans la littératurela proportion est très variable d’uneétude à l’autre, allant de 30 à 93 %des polypes [1]. Cette dispersion estliée en partie à la confusion quirégnait dans l’ancienne classificationinternationale des tumeurs gas-triques, qui pouvait inclure l’hyper-plasie fovéolaire focale ou non dansce groupe [1].

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d’adénome, il faut réaliser l’exérèsecomplète, rechercher et éradiquer Hp.La surveillance recommandée aprèsl’ablation d’un adénome comprend uncontrôle à 1 an puis tous les 3 ans [1].

Les adénocarcinomespolypoïdesLes adénocarcinomes de forme poly-poïde (type I de la classificationinternationale) représentaient 7,2 %des lésions polypoïdes de l’esto-mac [2]. Cette forme ne représenteque 3% des cancers gastriques super-ficiels. Elle s’accompagne d’uneatteinte de la sous-muqueuse dans57% des cas. Une exérèse endosco-pique par mucosectomie peut êtreproposée si la lésion est non ulcéréede diamètre inférieur à 2 cm et sesoulève bien lors de l’injection sous-muqueuse [29]. Si l’analyse de lapièce permet d’affirmer qu’il s’agitd’une lésion limitée à la muqueuse,bien ou modérément différenciée, etsi la zone de résection respecte lesmarges de sécurité (2 mm), le traite-ment endoscopique peut être consi-déré comme suffisant [1, 29]. En casde tumeur à cellules indépendantesou peu différenciées (ce qui est trèsrare dans ces adénocarcinomes type I),ou lorsque l’infiltration atteint lasous-muqueuse, une interventionchirurgicale doit être proposée [1].En cas d’exérèse endoscopique, larecherche de Hp s’impose en vued’une éradication. Uerama et al. [27]ont en effet montré que l’éradicationpermettait de réduire le risque derécidive après exérèse endoscopiqued’un cancer superficiel.

Les polypes fibro-inflammatoires ou polypes épithéliauxLes polypes fibro-inflammatoiresreprésentent 3,1 % des polypes gas-triques [1], siègent dans l’antre ou larégion prépylorique, le plus souventsemi-sessiles recouverts d’unemuqueuse en apparence normale.Lorsqu’ils dépassent 1 cm, ils sontparfois déprimés ou ulcérés à leursommet. Les biopsies sont peu contri-butives car ils siègent en profondeur,plutôt dans la sous-muqueuse [30] ;

déprimés en surface étaient dégéné-rés. La couleur rouge, les érosions ensurface étaient aussi des signes évo-cateurs de malignité. Les biopsiessont insuffisantes pour établir ledegré de malignité du polype [1, 5].Dans l’étude de Stolte [1], 10 % despatients qui avaient un adénometubuleux, bénin sur les biopsies,avaient en fait un carcinome surl’examen de la pièce totale de poly-pectomie. Ceci justifie la polypecto-mie quels que soient l’aspect et lataille d’un polype adénomateux.L’évolution naturelle des adénomesest cependant mal connue. Yamada etal. [25] ont suivi en moyenne 4,7 ans,48 patients porteurs d’adénomesgastriques. Aucun des adénomes avecdysplasie de bas grade n’évoluait versun stade invasif ; aucune modifica-tion de taille n’était décelée dans plusde 80 % des cas. En revanche, 10 %des adénomes avec dysplasie de hautgrade évoluaient vers un stade inva-sif et leur taille augmentait dans 60%des cas. L’éradication de Hp pourraitavoir un effet bénéfique sur les adé-nomes en réduisant leur potentiel dedégénérescence [26]. Il est aussi pos-sible que l’éradication réduise lerisque de récidive après exérèse [27].

Les adénomes surviennent toujoursau sein d’une muqueuse patholo-gique. Parmi 118 malades étudiés parMeining [23], 58 avaient une atrophiefundique de nature auto-immune,sans infection par Hp. La liaison estmoins forte que pour les polypeshyperplasiques. En revanche, la fré-quence des métaplasies et de la gas-trite atrophique avec extension aufundus est élevée, comprise entre50 [23] et 86% [6], témoignant d’uneinfection par Hp ancienne ou toujoursactive. Ces lésions de la muqueusesont identiques à celles associées auxcancers gastriques superficiels [23].Chez 11% des patients avec un adé-nome, on peut détecter un cancer gas-trique synchrone. Le rôle du refluxbiliaire a également été soulevé, enparticulier après gastrectomie par-tielle. Les adénomes peuvent se ren-contrer au cours de la PAF en casd’infection par Hp (2 à 10% des PAFen Europe et jusqu’à 40 à 50 % desPAF en Asie) [28]. Au total, en cas

en revanche, l’échoendoscopie estplus évocatrice en montrant desimages homogènes, hypoéchogènessans limite nette, dans les 2e et3e couches, biens détachées de la4e couche. Ces caractéristiques per-mettent de les différencier des autreslésions polypoïdes sous-muqueuses(pancréas aberrant, léiomyome) [31].L’utilité de leur exérèse est discutablelorsqu’ils sont asymptomatiquespuisqu’ils sont toujours bénins.

Les tumeurs d’origineendocrine (carcinoïdes)

Les tumeurs carcinoïdes (TC) à cel-lules enterochromaffin-like (ECL-omes) sont les plus fréquentes etreprésentent 1,7 % des polypes gas-triques [2]. Elles sont associées soità une hypergastrinémie d’origineantrale (gastrite fundique atrophiquede type auto-immune) ou tumorale(syndrome de Zollinger Ellison- NEMI) et constitueraient alors la consé-quence ultime de l’hyperplasie descellules argyrophiles endocrines fun-diques, soit sporadique sans hyper-plasie des cellules ECL et hypergastri-némie [32].

Parmi les 95 TC de la série deStolte [1], 89 % étaient retrouvéesdans un contexte de gastrite atro-phique fundique auto-immune. Dansune revue de la littérature, les TC gas-triques sur gastrite atrophique fun-dique représentaient en moyenne42,5% des TC gastriques [33] et 62%d’entre elles étaient découvertes chezdes sujets atteints de maladie de Bier-mer. La prévalence des TC fundiquesdans la maladie de Biermer est selonles études comprise entre 1,25 et7,8%. Les TC ne représentent cepen-dant que 6 à 8% des polypes associésà la gastrite atrophique de type A[34]. Les TC sur gastrite atrophiquefundique sont souvent détectées lorsde la première endoscopie, multiplesdans 50% des cas, d’une taille égaleou inférieure à 1 cm dans 79% descas, avec pour les tumeurs de plusd’1 cm, possibilité de métastases gan-glionnaires ou hépatiques dans 2 %[32] à 7 % des cas. Elles sont

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Dans les tumeurs carcinoïdes spora-diques sans gastrite atrophique fun-dique, la chirurgie s’impose comptetenu du potentiel malin de cestumeurs [34].

Conclusion

La découverte endoscopique d’unpolype gastrique impose dans un pre-mier temps de préciser par des biop-sies multiples, sa nature histologique,l’état de la muqueuse gastriqueantrale et fundique. La nécessitéd’une exérèse complète endoscopiquevoire chirurgicale, dépend de lanature du polype. L’influence de l’in-fection par Hp sur l’histoire naturellede certains polypes ou des lésionsmuqueuses associées impose sarecherche et son éradication danstous les cas afin de réduire le risquede cancer ou de récidive après exé-rèse. Le bénéfice et les modalitésoptimales de la surveillance endosco-pique ne sont pas pour l’instant clai-rement établis, en particulier pour lespopulations à faible incidence decancer gastrique, comme c’est le casen France.

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d’évolution très lente, jamais mor-telles ni responsables de syndromeendocrinien carcinoïde [33, 34].

Les TC fundiques décrites au cours dusyndrome de Zollinger Ellison sur-viennent électivement chez les SZEs’intégrant dans le cadre d’une néo-plasie endocrine de Type I. [34]. CesTC sont rares, Stolte n’en retrouvaitaucune dans sa série [1], elles consti-tuaient 8,6% des TC gastriques dansla série de Rindi portant sur 199 TCgastriques [32].

Les TC survenant en dehors de la gas-trite atrophique fundique et du SZEreprésentent 11% à 24% des TC gas-triques [1, 32]. Elles siègent dans lefundus (60 %) ou l’antre, sont rare-ment multiples (5 à 14 % des cas),avec une taille de plus d’1 cm dansplus de 84 % des cas et selon lesétudes des métastases dans 38 à 55%des cas ; 6 à 10 % donnent un syn-drome carcinoïde ; le taux de survieest de 50% à 5 ans [33].

Le diagnostic de TC doit êtrecomplété par un bilan d’extensionen profondeur (échoendoscopie) etmétastatique ganglionnaire et hépa-tique (écho-endoscopie, scanogra-phie) [34].

La prise en charge thérapeutiquedépend surtout du contexte danslequel la TC survient [34). En cas deTC sur gastrite atrophique fundique,le traitement doit prendre en comptela « bénignité » de l’affection etl’absence d’influence sur l’espérancede vie de ces malades souvent âgés.Plusieurs options ont été proposéeschez les sujets de moins de 70 ans[34] : simple surveillance annuelle ;exérèse endoscopique pour lestumeurs de petite taille et peu nom-breuses ; antrectomie (pour contrôlerl’hypergastrinémie) avec excision destumeurs fundiques, ou gastrectomietotale logique mais disproportionnéepar rapport au risque opératoire.Dans la série de Stolte [1], 95% desmalades ont simplement été sur-veillés ; aucune métastase n’étaitobservée sur une période de plus20 ans. A noter cependant la décou-verte de cancers métachrones dans5,4% des cas.

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