Sans peur et sans pleurs

La peur d’aller dormir, du noir, de l'abandon, des inconnus, des monstres, de la solitude, des chiens… La peur de l’école, la peur de grandir, de la mort, la peur que papa et maman divorcent…

Il est d’autant plus difficile de cerner l’origine de ces peurs que les enfants ont du mal à les exprimer. Qu’elles soient liées à son développement ou à des changements intervenus dans son cadre de vie, elles sont bien réelles pour l'enfant et inquiétantes pour le parent qui ne sait pas comment les apaiser. Faut-il éliminer les facteurs anxiogènes ou au contraire encourager l’enfant à affronter les situations qu’il redoute ? Patricia Chalon passe en revue toutes les peurs que l’enfant peut rencontrer jusqu’à 8 ans. Elle donne aux parents les clefs pour comprendre ses frayeurs et les outils pour lui permettre de les dépasser.

Patricia Chalon est psychologue-psychothérapeute, présidente d’Enfance majuscule et auteur. Elle a publié Mon enfant tape (Eyrolles) et L'adoption bientraitante (Belin).

Les consuLtations du PédoPsy Les réponses pragmatiques de pédopsychiatres

aux petits soucis psy de l'enfant.

Les consuLtations du PédoPsy

Patricia Chalon

Les peursde l'enfant

Comprendre et rassurer

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Couverture : Amber Norris / Getty Images © éditions Eyrolles

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Sans peur et sans pleurs

La peur d’aller dormir, du noir, de l'abandon, des inconnus, des monstres, de la solitude, des chiens… La peur de l’école, la peur de grandir, de la mort, la peur que papa et maman divorcent…

Il est d’autant plus difficile de cerner l’origine de ces peurs que les enfants ont du mal à les exprimer. Qu’elles soient liées à son développement ou à des changements intervenus dans son cadre de vie, elles sont bien réelles pour l'enfant et inquiétantes pour le parent qui ne sait pas comment les apaiser. Faut-il éliminer les facteurs anxiogènes ou au contraire encourager l’enfant à affronter les situations qu’il redoute ? Patricia Chalon passe en revue toutes les peurs que l’enfant peut rencontrer jusqu’à 8 ans. Elle donne aux parents les clefs pour comprendre ses frayeurs et les outils pour lui permettre de les dépasser.

Patricia Chalon est psychologue-psychothérapeute, présidente d’Enfance majuscule et auteur. Elle a publié Mon enfant tape (Eyrolles) et L'adoption bientraitante (Belin).

LES CONSU LTATIONS DU PÉDOPSY Les réponses pragmatiques de pédopsychiatres

aux petits soucis psy de l'enfant.

LES CONSU LTATIONS DU PÉDOPSY

Patricia Chalon

Les peursde l'enfant

Comprendre et rassurer

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Couverture : Amber Norris / Getty Images © Éditions Eyrolles

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Les peurs de l’enfantComprendre et rassurer

Groupe Eyrolles 61, bd Saint-Germain75240 Paris Cedex 05

www.editions-eyrolles.com

Conception (intérieur et première de couverture) : Caleïdo ÉditionsMise en pages : PCA

En application de la loi du 11 mars 1957, il est interdit de reproduire intégralement ou partiel-lement le présent ouvrage, sur quelque support que ce soit, sans autorisation de l’éditeur ou du Centre français d’exploitation du droit de copie, 20, rue des Grands-Augustins, 75006 Paris.

© Groupe Eyrolles, 2015ISBN : 978-2-212-55159-4

Patricia Chalon

Les peurs de l’enfantComprendre et rassurer

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Gisèle George, J’en ai marre de crier !

Laurence Haurat, C’est l’enfer à table !

Didier Pleux, Petits Caprices et grosses colères

Patricia Chalon, Mon enfant tape

Laurence Lalande, Au secours, mon enfant est précoce !

Philippe Grandsenne, Comprendre les pleurs de bébé

Didier Pleux, Frères, sœurs…

Claire-Lucie Cziffra, Au secours, mon enfant rame à l’école !

Véronique Maciejak, Il me pousse à bout !

Patricia ChalonPsychologue-psychothérapeute, rédactrice en chef d’Enfance majuscule et auteur, Patricia Chalon est présidente de l’asso-ciation Enfance majuscule qui œuvre au quotidien pour la défense des droits de l’enfant.

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Table des matières

Introduction ............................................................................ 1

Chapitre 1Le nourrisson, concentré d’émotions�� Fœtus et bébé : les mêmes ressentis ................................. 11�� Accueil bientraitant et résilience du nouveau-né ............ 12�� Le bébé est une personne .................................................. 14�� Un petit très compétent, capable de dialoguer ............... 16�� Les papas aussi… ............................................................... 17�� Présence émotionnelle et vertus du face-à-face .............. 19

Chapitre 2La peur à la tombée de la nuit ou « angoisse du soir »�� Évacuer les tensions de la journée .................................... 23�� Attention bébés secoués ! ................................................... 24�� Oser demander de l’aide .................................................... 26

Chapitre 3Peur d’aller dormir et peur du noir�� Un rituel à toute épreuve ................................................... 32�� Une peur partagée ? ........................................................... 33�� Un besoin de repères stables ............................................. 34�� Confusions possibles .......................................................... 36�� Mettre des mots sur les peurs ........................................... 37

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Chapitre 4La peur des inconnus et de la séparation�� Permettre à l’enfant de tisser de nouveaux liens ............ 46�� Un moment délicat pour les parents aussi ....................... 48�� Autour de six ans : une séparation bénéfique .................. 50

Chapitre 5La peur de perdre son doudou�� Une « maman de secours » irremplaçable ........................ 57�� En route vers l’autonomie .................................................. 59

Chapitre 6La peur des monstres�� Un monstre horrible mais bien utile… ............................ 65�� Prendre le pouvoir sur les monstres ................................ 67

Chapitre 7La peur des cauchemars et les terreurs nocturnes�� L’imagination au pouvoir .................................................. 73�� Le cauchemar comme signal d’alarme ............................. 75�� La terreur nocturne, une très grande peur ..................... 76�� Des épisodes très spectaculaires mais sans danger ....... 78

Chapitre 8La peur des animaux�� Le rapport à l’animal, un apprentissage progressif ....... 85�� Des peurs transmises ou induites par les parents .......... 87�� Face aux animaux, des enfants tout sauf indifférents ... 88

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Chapitre 9La peur des éléments naturels�� Des orages effrayants ........................................................ 95�� Apprivoiser l’eau en douceur ............................................ 96�� Au feu ! ................................................................................. 98�� Comprendre la nature pour en avoir moins peur ........... 99

Chapitre 10La peur de la mort�� Une perception qui évolue progressivement ................... 106�� L’enfant confronté à la mort « pour de vrai » .................. 108

Chapitre 11La peur de l’école�� Refus ou phobie ? ................................................................ 115�� Une peur peut en cacher une autre .................................. 116�� Harcèlement et racket ....................................................... 118

Chapitre 12Peur de l’échec, peur de grandir�� Enfants sous pression ........................................................ 123�� Une course à la perfection ................................................. 124�� Des petits privés de leur droit à l’erreur ......................... 126�� Des responsabilités trop pesantes .................................... 127�� Maux d’enfants ................................................................... 129�� Retrouver l’envie de grandir ............................................. 130

Chapitre 13La peur du ridicule�� Une peur qui peut empoisonner le quotidien .................. 137�� Un regard bienveillant qui donne confiance en soi ........ 139

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�� La revanche du timide ....................................................... 140

Chapitre 14La peur du divorce�� « Ils ne s’aiment plus ! » ....................................................... 147�� Un avenir inquiétant .......................................................... 149�� Mettre en place une garde « bientraitante » ..................... 149

Chapitre 15La peur de la violence�� Maltraitance : la peur au quotidien .................................. 155�� L’enfant face à la violence conjugale ................................ 157�� Quand les enfants sont violents entre eux… .................. 158�� La guerre en héritage ........................................................ 159�� Télévision et impact des images violentes ....................... 160�� Le pouvoir des livres pour canaliser la peur .................. 161�� L’apprentissage des jeux vidéo .......................................... 162

Chapitre 16Peur de tout, peur de rien…�� Protéger son enfant de tout : mission impossible ! .......... 169�� Même pas peur ! .................................................................. 171�� La peur d’avoir peur .......................................................... 173

Conclusion .............................................................................. 175

Bibliographie .......................................................................... 181

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« Je suis enceinte de 7 mois. Mon mari et moi nous disputons beaucoup, est-ce que cela peut faire peur à mon bébé ? »

Cette question prouve déjà l’intérêt de cette jeune « presque » maman pour le ressenti du bébé qu’elle porte. À partir du troisième trimestre de gestation, le fœtus perçoit particulière-ment bien la voix de sa mère, puisqu’elle demeure à distance constante de ses oreilles. Il distingue aussi la vibration plus grave de la voix paternelle. En s’approchant et s’éloignant tour à tour, celle-ci lui donne déjà la notion d’un espace diffé-rent du ventre maternel, ainsi qu’un sentiment de sécurité : il comprend que cette voix, qui disparaît souvent, finit toujours par revenir. Mais, quand ses parents se disputent, non seu-lement il entend leurs voix qui montent en désaccord, mais il capte aussi le stress de sa mère via l’accélération des batte-ments de son cœur – et peut-être aussi, plus chimiquement, via l’adrénaline sécrétée pour répondre à cet état de stress.

��Fœtus et bébé : les mêmes ressentis

À ce jour, personne n’a pu interviewer un bébé pendant la gestation. Toutefois, les techniques d’imagerie médicale nous aident à comprendre ce que ressent le fœtus en montrant ses postures et mimiques, qui ressemblent beaucoup à celles adoptées par n’importe quel nouveau-né. Les jeunes mères savent lire, sur le visage et les mouvements corporels de leur nourrisson, l’étonnement, la satisfaction, la tristesse, la colère

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ou la peur. Or, ce que l’on peut voir sur les images en trois dimensions du bébé à naître s’apparente sinon aux mêmes sentiments, du moins aux mêmes sensations, notamment pour ce qui est des crispations habituellement générées par la peur ou le stress.

Aussi, cette femme a raison de s’inquiéter : la naissance de son enfant, prévue deux mois plus tard, ne mettra pas fin miraculeusement aux disputes. Le nouveau-né les percevra avec encore plus d’acuité tandis que sa mère, inapaisable donc en difficulté pour être elle-même apaisante, ne pourra le rassurer. Un grand nombre de violences conjugales com-mencent au moment où certains hommes se sentent dépos-sédés de l’amour exclusif de leur compagne par une grossesse ou une naissance. On connaît désormais les effets délétères de ces violences sur les enfants, même s’ils n’en sont pas victimes directement. Ces futurs parents devraient avoir le bon réflexe de consulter tous les deux pour apaiser leur rela-tion avant la naissance, et ainsi devenir des parents aptes à accueillir leur enfant dans de bonnes conditions.

��Accueil bientraitant et résilience du nouveau-né

Bien qu’impondérables et non mesurables, des liens autres que physiologiques existent entre le fœtus et la femme qui le porte. En même temps que son corps l’héberge et le pro-tège contre un monde extérieur qu’il n’est pas encore prêt à affronter, la mère, sans s’en rendre compte, renseigne le

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futur bébé sur ce monde. Elle est l’intermédiaire entre le petit être en formation et ce dans quoi il sera bientôt immergé. En plus de ses paroles et de ses caresses à travers son ventre, elle transmet à son insu les échos de la vie extérieure, ce qui, vraisemblablement, optimise déjà les capacités d’adaptation et d’interaction du futur enfant. On peut d’ailleurs constater l’importance de ce dialogue subtil en observant les déficits dont souffrent les prématurés en couveuses, alors qu’ils sont l’objet d’une attention constante et d’une infrastructure de pointe dont l’objectif est d’assurer leur survie physiologique. Le personnel soignant est compétent et le protocole de soins est respecté, mais cela ne suffit pas.

À l’instant de sa naissance, on prétend que les hurlements du bébé sont surtout le signe d’une bonne ventilation pulmo-naire… mais qu’en sait-on vraiment ? Même si nos connais-sances sont encore limitées, on a le droit d’imaginer que le nouveau-né peut ressentir de la peur, qu’il peut éprouver un sentiment d’insécurité. On a alors le devoir de les prendre en compte et de tout faire pour apaiser ce petit être. Peu importe si nos efforts en ce sens sont un jour invalidés par un futur savoir ; en attendant, au moins ces précautions ne sont-elles pas nuisibles.

À l’inverse, s’il est bientôt démontré de façon certaine que nous avions raison, il faudra en informer les parents, et aussi déculpabiliser ceux qui, s’imaginant coupables de désinvol-ture, se décourageraient et oublieraient qu’il n’est jamais trop tard pour être bientraitant. À celles et ceux qui s’inquiètent après coup des mauvaises conditions de ce temps de gesta-tion, par exemple les parents adoptifs, les mères en déni de

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grossesse ou en grande difficulté, il faut dire et redire que rien n’est définitif ni rédhibitoire. Cela s’appelle la résilience !

Les bienfaits de l’haptonomieLe thérapeute hollandais Frans Veldman (1921-2010) a élaboré une approche nouvelle des interactions affectives : l’haptonomie, ou « science de l’affectivité ». Son but : optimiser le développement des potentialités de l’être dès sa conception, notamment par des paroles et des contacts manuels avec le ventre maternel. Les convictions de Veldman sont aujourd’hui légitimées en grande partie par les neurosciences. Toutefois, ses conseils étaient déjà appliqués depuis longtemps par l’immense majorité des mères du monde, sous la forme de rituels instinctifs et intuitifs (se masser le ventre en chantonnant une mélopée, murmurer des phrases tendres, etc.). En France, l’haptonomie a été développée par le psychiatre et psychanalyste Bernard This (né en 1928), également promoteur de l’accouchement dit « sans douleur ». Ses interven-tions consistent notamment à sécuriser par l’haptonomie les mères et leurs enfants (à naître ou déjà nés).

��Le bébé est une personne1

En 1975, Simone Veil, alors ministre de la Santé et de la Famille, visionne Enfants en pouponnière demandent assistance, un

1. Titre d’un documentaire en trois parties réalisé en 1984 par Bernard Martino pour TF1, qui eut un retentissement très important auprès de milliers de téléspectateurs.

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documentaire réalisé dans les années 19601. Horrifiée, elle y découvre des enfants retirés à leurs familles respectives pour diverses raisons, à l’évidence maltraités dans un lieu sensé les protéger, et ce, avec les meilleures intentions du monde. Entre autres abominations infligées en toute candeur, l’élection de la « meilleure puéricultrice » dans une pouponnière d’État, à Paris. La lauréate réussit à langer en un temps record l’enfant qu’on lui a confié, devançant sa « dauphine » de quelques pré-cieuses secondes. Pas un mot, pas un regard n’est échangé avec le bébé, et c’est pourtant sous les applaudissements de toute l’équipe que la jeune fille, très fière, est félicitée par sa direc-tion. Une autre de ces jeunes femmes accomplit l’« exploit » de nourrir à la cuillère trois petits à la fois, en très peu de temps… Et c’est de la terreur qu’on lit dans les yeux de ces enfants. Bouleversée par ce film, décidée à imposer une refonte de ces établissements, Simone Veil lance l’Opération pouponnières, dont le but est l’humanisation de la pédiatrie. Aujourd’hui, pour les professionnels de la petite enfance comme pour la majorité du grand public, il va de soi que « le bébé est une personne ». Ce n’est pourtant qu’au prix d’un travail acharné et passionné que Françoise Dolto a réussi à transmettre ce concept, comme on perfuse un liquide goutte à goutte…

Néanmoins, l’enfant n’est pas encore une « grande per-sonne » : il a un long chemin à parcourir avant de parvenir à maîtriser ses émotions, donc ses peurs. Heureusement, face à un petit terrorisé, notre capacité d’empathie et la mémoire des peurs vécues au cours de notre propre enfance représentent

1. Documentaire réalisé par Danielle Rapoport et Jeanine Lévy.

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une précieuse source de savoir. Il est également utile de se souvenir que telle peur ressentie par un adulte est démulti-pliée par l’enfant. En effet, celui-ci est encore une « éponge à absorber les sensations et les émotions » sans recul ni filtre modérateur, donc de façon disproportionnée.

��Un petit très compétent, capable de dialoguer

Vu par un néophyte, cet humain minuscule et fragile est seu-lement capable de boire, manger, évacuer, dormir, pleurer et recommencer. Malgré les formidables progrès réalisés en matière de psychologie de l’enfant, malgré les connaissances de plus en plus précises sur son développement, trop de parents insuffisamment renseignés attendent encore, impa-tients, que leur enfant « soit plus grand » pour communiquer avec lui. Dans l’intervalle, ils se contentent d’assurer ses besoins primaires : l’abreuver, le nourrir, le laver, le coucher et le bercer. Pire : parfois tentés de gazouiller d’affectueuses onomatopées à l’intention du bébé, certains se l’interdisent « pour ne pas avoir l’air idiot en parlant à quelqu’un qui ne comprend pas ce qu’on dit » ! En s’obstinant ainsi à ignorer les compétences innombrables et variées du nourrisson, notam-ment sa capacité à capter et ressentir les humeurs parentales, ces parents privent leur enfant et se privent eux-mêmes de moments très précieux !

Car devant eux se tient un être pourvu de tous ses systèmes sensitifs (vue, ouïe, goût, odorat, sensibilité tactile), qui va

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leur adresser une large gamme de mimiques, de postures et de sons en guise de langage. Il veut ainsi leur faire com-prendre ses sensations, émotions et sentiments, et il attend en retour des réponses à sa demande de communication. Contrairement à une idée encore très répandue, deux jours après sa naissance, le bébé peut ainsi reconnaître le visage de sa mère, même s’il voit encore flou. Il est aussi capable de res-sentir et de comprendre non pas les mots mais les intentions de ses parents, par les inflexions de leurs voix respectives, le bruit et la cadence de leurs pas, leur odeur, leurs caresses sur sa peau. Et plus vite ses parents comprendront qu’ils ne sont pas dans un monologue mais dans un dialogue avec lui, plus vite leur enfant affinera son propre mode d’expression. Sensible aux modes interactifs respectifs de sa mère, de son père, de ses frères et sœurs, il s’adressera même à chacun d’une façon un peu différente.

��Les papas aussi…

Entrer en communication avec son bébé, c’est d’abord l’as-surer dès sa naissance qu’on l’attendait et que son arrivée est une grande joie : « Bonjour et bienvenue parmi nous ! » C’est en général de cette manière que l’on accueille un invité ; pourquoi en priverions-nous le nouveau-né ? C’est ensuite prendre le temps de le regarder vraiment, de l’écouter, de le toucher, et bien sûr de lui parler, car son potentiel de communication ne demande qu’à être utilisé et magnifié. Tous les parents du monde savent communiquer avec leur

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tout-petit, surtout quand ils sont seuls avec lui… Il est très important de savoir que ce n’est pas bêtifier mais sécuriser un enfant que de faire appel à tous ses sens, même s’ils ne sont pas totalement opérationnels. Chacun des moments où le nouveau-né est sollicité avec bienveillance et confiance est assurément un moment d’expérience positive de la vie, qui lui permet de construire des liens sécures et d’éloigner la peur.

Les mères peuvent mettre en place instinctivement une com-munication de qualité avec leur bébé. Invités à partager avec leur petit des moments d’échange « les yeux dans les yeux », au moment du bain ou du biberon par exemple, les papas savent aussi créer du lien et avoir une réelle incidence sur le développement de leur nourrisson. On peut ainsi espérer que les nouveaux pères vont se donner le droit d’être des papas, et que les mamans vont les y autoriser…

Une évaluation bientraitanteLe pédiatre et pédopsychiatre américain Terry B. Brazelton (né en 1918) a développé le concept des « points forts ». Ces périodes précèdent une phase déterminante du développement moteur, cognitif ou émotionnel de l’enfant, et sont susceptibles de per-turber à la fois son évolution et celle de sa cellule familiale. Terry B. Brazelton enseigne aux parents les moyens d’anticiper l’immi-nence des « points forts », pour accompagner et sécuriser l’en-fant. Afin d’aider les pères, les mères et le personnel pédiatrique à intervenir auprès des bébés en les traitant mieux, il a aussi mis au point dès 1973 un outil d’évaluation du comportement,

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l’échelle de Brazelton. Utilisé dans le monde entier, ce procédé permet d’évaluer les comportements particuliers de chaque nou-veau-né et de cataloguer son comportement interrelationnel, à partir de 27 questions et 20 réactions. On peut ainsi en déduire quels seront sa future personnalité et son développement cognitif, sous forme d’hypothèses vraisemblables. Cet outil est vraiment bientraitant : il fonde le score de l’enfant sur sa réaction la plus performante, au lieu de se baser sur une moyenne comme d’autres méthodes d’évaluation.

��Présence émotionnelle et vertus du face-à-face

Tout changement de l’expression d’une personne qui fait face à un nourrisson entraîne un ajustement émotionnel et compor-temental de ce dernier. Pour illustrer la réalité de cette inter-action, le Pr Brazelton demande à une maman de regarder son nouveau-né de façon totalement inexpressive, comme si son visage était un masque. Au début de l’expérience, le bébé essaie d’attirer l’attention de sa mère et de la faire réagir par des mimiques et des mouvements de bras. La mère ne réagit toujours pas. Rapidement, le bébé exprime son inquié-tude, puis, saisi de terreur, éclate en sanglots. D’autres bébés tournent la tête pour ne plus voir ce visage qui les effraie. Ce que l’on retient de cette expérience, c’est que si tous les bébés expriment la peur, c’est qu’ils la ressentent…

Au quotidien, de nombreux parents s’amusent aussi à tirer la langue à leur enfant pour le voir faire de même, et se

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réjouissent de constater sa capacité à reproduire un acte. Ils observent eux-mêmes que les possibilités de perception et d’interaction de leur bébé sont particulièrement évidentes et efficaces quand celui-ci est vraiment en face-à-face. Dans le prolongement de cette observation, une étude menée par René A. Spitz1 tend à démontrer que c’est l’ensemble « deux yeux/un nez/une bouche » qui suscite le sourire chez l’enfant. En effet, si on ne montre que le profil, le nourrisson cesse de sourire.

1. Psychiatre et psychanalyste américain d’origine hongroise (1887-1974).