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Sites : les aquarelles le Salon des Indépendants au Grand Palais la Biennale de Florence LES OUTILS DU PEINTRE : Les couleurs Elles se placent sur une palette en partant d’en haut à droite et en allant, dans le sens inverse des aiguilles d’une montre, du clair au foncé, commençant par les jaunes, – ou par le blanc pour la peinture à l’huile – en passant par les rouges en haut à gauche puis les verts en redescendant et les bleus en bas, pour finir par les sombres. La raison en est que, en prenant de la couleur avec le pinceau – ou avec le couteau à palette pour la peinture à l’huile –, on va de l’avant de la palette (à droite, près du pouce) vers l’arrière (à gauche, près du coude), donc on risque de faire déborder une couleur placée plus en avant sur la couleur qui est derrière, ce qui n’est pas grave si on fait déborder une couleur claire sur une plus sombre – un jaune sur un rouge ou un brun – mais si c’était l’inverse, on ternirait la couleur claire en l’effleurant d’une couleur plus sombre.

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Sites : les aquarelles

le Salon des Indépendants au Grand Palais

la Biennale de Florence

LES OUTILS DU PEINTRE :

Les couleurs

Elles se placent sur une palette en partant d’en haut à droite et en allant, dans le sens inverse des aiguilles d’une montre, du clair au foncé, commençant par les jaunes, – ou par le blanc pour la peinture à l’huile – en passant par les rouges en haut à gauche puis les verts en redescendant et les bleus en bas, pour finir par les sombres. La raison en est que, en prenant de la couleur avec le pinceau – ou avec le couteau à palette pour la peinture à l’huile –, on va de l’avant de la palette (à droite, près du pouce) vers l’arrière (à gauche, près du coude), donc on risque de faire déborder une couleur placée plus en avant sur la couleur qui est derrière, ce qui n’est pas grave si on fait déborder une couleur claire sur une plus sombre – un jaune sur un rouge ou un brun – mais si c’était l’inverse, on ternirait la couleur claire en l’effleurant d’une couleur plus sombre.

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Les couleurs choisies pour la palette de la page d’accueil le sont pour leurs qualités de

pigments et pour leurs différences de consistance, qui permet de les faire jouer entre elles.

Historique et caractéristiques :

(taille réelle des taches de couleur : environ 3 x 8 cm)

Le jaune de Naples (Naples yellow) :

connu depuis l’Antiquité, issu de minéraux du Vésuve dans ses versions anciennes, et utilisé en peinture depuis la Renaissance

se dilue bien et donne de bons lavis et mélanges avec d’autres couleurs. Fait des auréoles de lumière allant de l’intense sur les empâtements au voile léger sur les lavis.

L’ocre (ochre) :

pigment très ancien, argile avec oxyde fer exploité dans des carrières, utilisé dans les peintures de grottes préhistoriques, puis dans les fresques romanes

couleur épaisse utile pour les volumes et pour des contours précis, par exemple de bâtiments, qui peut aussi faire des transparences ou être utilisée en préparation sous-jacente.

Le rose du potier (potter’s pink) :

inventé au XVIIIe siècle par un potier de la région des « Potteries » en Angleterre, toujours utilisé en céramique, repris actuellement comme peinture par de rares fabricants

donne des nuances variées en mélange et selon sa dilution ; joue bien en frottis avec le grain du papier en donnant du rose foncé dans les creux et un voile clair sur les grains, ce qui permet de rendre les textures, pour des objets ou pour des atmosphères veloutées.

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Le rouge de Venise (Venetian red) :

terre contenant de l’oxyde de fer tirée d’une carrière vénitienne, pigment ancien

pigment épais et donnant du volume, se met facilement en forme à la pointe du pinceau ; colore beaucoup – même une très petite quantité donne une couleur intense ; joue bien avec les autres bruns ou rouges pour faire varier l’ensoleillement (est pour les parties plus vives).

La terre de Sienne brûlée (burnt Sienna) :

obtenue en chauffant la terre de Sienne, terre naturelle à l’origine venant de la région de Sienne, et colorée par l’oxyde de fer (NB : en anglais, on écrit le nom de la ville de Sienne à l’italienne, Siena avec un seul n, mais pour la couleur « burnt Sienna » avec deux n à cause de l’influence du français)

forme de bons contrastes avec l’outremer qui font ressortir les volumes – un quai de bois terre de Sienne sur une mer outremer aura beaucoup de relief.

La terre verte (terre verte) :

utilisé depuis l’Antiquité et la Renaissance, comme préparation pour nuancer les chairs à côté des rouges, de façon presque invisible mais qui donnait imperceptiblement de la vie (type d’effet recommandé de façon plus soulignée par Hogarth)

pigment épais, qui fait de bons frottis et qui donne des verts rompus proches de la réalité.

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La turquoise (turquoise) :

mélange de vert et de bleu, d’après la couleur de la pierre à l’origine venue de Turquie d’où son nom

permet les variations de l’opaque au transparent et les lavis, tendant vers le vert ou vers le bleu, vers la couleur vive ou vers la couleur atténuée ; avec des rouges en mélanges légers, rend les variations de l’eau sous la lumière.

L’outremer (ultramarine) :

au Moyen-Age couleur rare et précieuse faite avec le lapis-lazuli, importée – d’où son nom d’ « outremer » – d’Asie (région actuellement Afghanistan), maintenant rare et utilisée seulement dans les ateliers de restauration des musées ; depuis le XIXe siècle, couleur chimique inventée par l’industriel lyonnais Guimet (père de l’amateur d’antiquités orientales fondateur du musée) pour sa femme peintre et pour répondre à un concours de couleur chimique, ainsi connue en anglais comme « French ultramarine »

a la propriété de provoquer la granulation (effet de précipité), ce qui est utile pour donner de la texture aux ciels ou à la mer.

Le gris de Payne (Payne’s grey) :

couleur utilisée par les aquarellistes romantiques, nommée d’après son inventeur l’aquarelliste William Payne (c.1800)

donne des nuances très variées selon son degré de dilution, ce qui permet les variations atmosphériques, des mélanges nuancés – gammes de violets avec des rouges qui rendent bien le ciel, ou ombres par des mélanges avec les bruns – et que l’on peut utiliser quand on souhaite provoquer des effets de cerne pour envelopper les formes.

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La sépia (sepia) :

d’après la couleur de l’encre de seiche. C’était la teinte des photos anciennes à l’albumine

couleur très forte ; se mélange avec d’autres sombres, par exemple les bleus ou gris, pour donner des nuances aux ombres. En très petite quantité, marque les contours en ressortant avec relief sur des atmosphères claires.

Mélanges :

jaune de Naples formant une atmosphère enveloppante autour de formes violettes (couleur complémentaire, obtenue avec de l’outremer et du rose du potier) et se fondant avec des rouges (de Venise)

rouge Venise à gauche pour les parties éblouies se fondant dans la Sienne brûlée pour les parties en éclairage de couleur naturelle et avec la sépia pour les parties à l’ombre

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volumes Sienne brûlée sur de l’eau outremer

effets de lumière rose potier sur de l’eau turquoise

variations atmosphériques de gris Payne avec rose du potier

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ombre de gris Payne et sépia

En plus de ces couleurs de base qui donnent une grande gamme de nuances principales et de

contrastes pour la composition d’ensemble du tableau, on peut ajouter, suivant les sujets et surtout

si l’on a besoin de tons vifs, des touches de couleurs comme le gris de Davy (fait à partir d’ardoise,

inventé au début du XIXe siècle par le peintre de ce nom) qui est plus clair que la sépia, la turquoise

légère (d’un vert plus brillant que la turquoise), le rose doré (fait à partir de la garance traditionnelle)

plus transparent que le rose du potier, l’écarlate de cadmium (XIXe siècle) qui donne un rouge plus

éclatant que le rouge de Venise.

Les papiers

Les échantillons ci-dessus ont été faits sur du papier grain torchon 640 grammes (le plus épais

et absorbant) pour mettre en valeur les différences à l’intérieur d’une couleur selon son degré de

dilution et de pénétration dans le papier. Les photos des échantillons ont été prises soit en intérieur

(ocre, Sienne, turquoise, sépia) afin de faire apparaître les ombres dans le grain du papier, soit en

extérieur ensoleillé (jaune de Naples, rose du potier, rouge de Venise, terre verte, outremer, gris

Payne, ainsi que les mélanges) pour révéler la texture du pigment.

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Le choix du papier est l’un des facteurs essentiels dans l’effet d’une aquarelle – « Respect

your paper », disait Turner ; deux motifs identiques faits avec les mêmes couleurs mais sur deux

papiers distincts donneront des résultats très différents pour marquer un contraste d’interprétations.

Détail d’une aquarelle sur papier torchon. Voir l’ensemble. voir aussi ci-dessus les échantillons de couleur faits sur ce papier.

Le plus consistant est le grain torchon (rough), où les rugosités du papier permettent de jouer sur différents degrés de pénétration de l’eau contenant la couleur.

Détail d’une aquarelle sur papier à gain fin. Voir l’ensemble.

Ensuite vient le grain fin (ou « pressé à froid », cold pressed ou NOT= not hot-pressed), qui gondole sous l’effet de l’eau, ce qui permet de créer des creux attirant l’eau colorée là où cet effet est souhaité.

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Détail d’une aquarelle sur papier satiné. Voir l’ensemble.

Puis le grain satiné (ou « pressé à chaud », hot pressed), peu absorbant et qui permet donc de laisser la couleur en taches si cet effet est souhaité.

Le premier est plus atmosphérique, le dernier souligne plus les formes, et l’on choisira le

papier qui détermine l’esthétique voulue pour une œuvre donnée. On peut aussi faire un choix en

contradiction délibérée avec le sujet – pour un sujet à formes géométriques comme une vue

d’architecture, lui apporter de la variation floue en choisissant un grain torchon, mais pour un sujet

plus indéterminé comme un paysage avec ruines, prendre un satiné afin d’y dégager des formes

directrices – ce sont les choix qui ont été faits dans les exemples ci-dessus, les tours de Carcassonne

pour le premier et le site de Wuthering Heights pour le dernier ; celui du milieu, une rue de Florence,

est sur grain fin car l’architecture de la Renaissance exige de la finesse de contours.

Toutes les variétés de papier existent dans les grandes feuilles pour travail en atelier ; les petits

carnets de voyage sont généralement en gain fin intermédiaire qui peut tendre vers l’un ou l’autre.

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Les pinceaux

Le pinceau roux en martre (sable brush), pointu, prend bien la couleur et la pose avec nuances (à droite).

Pour faire des lavis sur des surfaces, on prend un pinceau noir en petit-gris (squirrel), en forme de houppe, qui retient beaucoup d’eau (à gauche).

Détail d’une aquarelle peinte avec un pinceau de martre (Amboise le soir, avec les formes des bâtiments éclairés par le couchant). Voir l’ensemble.

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Détail d’une aquarelle peinte avec un pinceau de petit-gris (les forts de l’Esseillon en Savoie, avec de grands aplats pour les pans de montagne) Voir l’ensemble.

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Papier, couleurs et eau

Tout dépend évidemment de la façon de mélanger entre eux ces éléments.

On peut travailler « dans le frais » (wet-in-wet) ou « dans le sec » (wet on dry), c’est-à-dire soit

sur du papier mouillé avant d’y appliquer les couleurs, soit sur du papier sec. En travail « dans le

frais », la couleur peut se diffuser dans l’eau de plusieurs manières, le résultat est un

combiné du pigment et de la manière dont on a choisi de mettre l’eau – ainsi que du coup de

pinceau plus ou moins appuyé

l’eau peut être déjà présente, en trempant la feuille de papier entièrement dans

l’eau avant de peindre ; les touches de couleur une fois posées se diffusent

ou une tache d’eau est placée sur le papier selon la forme voulue, et la couleur se

diffuse selon cette forme, ce qui fixe un contour coloré net

Ou, après avoir déjà peint dans le frais (donc après avoir une première fois

mouillé le papier comme précédemment), on saisit le moment où la peinture est

presque sèche et on ajoute à l’intérieur une touche avec un pinceau très mouillé, pour

provoquer un ‘cerne’ (backrun), les particules de pigment se diffusant vers les bords

de la nouvelle tache et créant ainsi une auréole plus grande que les formes, par le

moyen naturel du séchage sans trait de silhouette, si on veut une atmosphère

enveloppante. On en voit un exemple ci-dessus dans le détail d’aquarelle sur

papier satiné, et on verra d’autres exemples de ces divers types de touches dans le

frais sur l’aquarelle d’Amsterdam.

Le coup de pinceau est définitif, et l’aquarelle procède, non par retouches comme on

peut le faire en peinture à l’huile, mais en développant à partir des premières touches,

nuançant par la dilution plus ou moins grande et par le fondu plus ou moins avancé avec les

touches voisines. C’est une répartition sur l’espace de la feuille certes, mais aussi dans le

temps, car selon que l’on aura posé une deuxième touche quelques secondes après la

première, ou une demi-heure après quand le séchage a commencé, la fusion entre les

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couleurs voisines sera plus ou moins forte, variant de plus selon les jours avec le degré

d’humidité de l’air ambiant.

Ces définitions des formes par l’eau, allant de la silhouette précise à l’auréole floue, sont à

prendre en compte pour équilibrer les volumes et fixer la composition. On peut envisager

toutes les options de contours :

ou l’on considère que les contours à regrouper en composition harmonieuse sont

les silhouettes des volumes pleins (par exemple bâtiments) – le plus évident,

ou l’on harmonise les formes plus larges crées par leur diffusion ou leurs

auréoles, ou même des zones relativement vides de l’atmosphère qui les

enveloppe (zones lumineuses en jour frisant autour des bâtiments ou des arbres,

surfaces nuageuses, reflets …).

On a le choix de grilles de proportions – la plus courante, recommandée aux

dessinateurs depuis le XVIIIe siècle puis aux photographes (elle apparaît comme

guide dans l’écran de visée de l’appareil photo, et elle est donc choisie comme

exemple ici car elle sera familière aux photographes) étant la composition en

tiers. Or, selon que l’on veut insister sur les contours des

objets ou sur l’atmosphère, on peut cadrer son paysage de façon à faire coïncider

les lignes et les points de cette grille soit avec des limites de volumes nets

(bâtiments…), soit avec des auréoles de couleur diffuse (nuages flous…) afin de

mettre en valeur, pour le regard du spectateur, ces effets atmosphériques. Un

exemple sera donné dans le tableau d’Amsterdam.

C’est donc le choix prévu d’une touche de couleur plus ou moins mouillée qui guide la

composition de départ.