Les familles d’accueil Québécoises : travailleurs …...Hélène Bagirishya et Suzanne Gilbert 3...

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1 Les familles d’accueil Québécoises : travailleurs autonomes ou familles de substitution? Rapport soumis à la Fédération des familles d’accueil du Québec Par Hélène Bagirishya Et Suzanne Gilbert Étudiantes au département de Sociologie de l’Université Laval Sous la direction de M. Denys Delâge

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Les familles d’accueil Québécoises :

travailleurs autonomes ou familles de substitution?

Rapport soumis à

la Fédération des familles d’accueil du Québec

Par

Hélène Bagirishya

Et

Suzanne Gilbert

Étudiantes au département de Sociologie de l’Université Laval

Sous la direction de

M. Denys Delâge

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Remerciements

Nous tenons tout d’abord à remercier la Fédération des familles d’accueil du Québec,

dirigée par Huguette Blais, de nous avoir offert la possibilité de mener à bien cette recherche.

Merci aussi à Ginette Dumas qui nous a été dévouée et qui a fait preuve d’une grande

disponibilité à notre égard.

Nous voulons aussi remercier de tout cœur toutes les personnes faisant partie des

associations régionales des familles d’accueil du Québec, qui nous ont supporté et aidé dans

la préparation des groupe de discussion (focus groups) : Micheline Auger, Réal Bizaillon,

Dominique Dubé, Martine Dubois et Michèle Turgeon.

Un gros merci à toute l’équipe qui nous a si bien entourées : Denys Delâge,

Dominique Morin et Marie-Ève Schmouth. Nous remercions aussi nos familles respectives

pour le soutien et la patiente qu’ils nous ont accordé durant tout le temps consacré à cette

recherche.

Nous remercions tout particulièrement toutes les personnes que nous avons

rencontrées et dont nous avons recueilli les propos, lors des groupes de discussion. Le temps

et l’enthousiasme accordés nous furent précieux.

Hélène Bagirishya et Suzanne Gilbert

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En résumé

La Fédération des familles d’accueil du Québec (F.F.A.Q) nous a chargées de

recueillir les perceptions que les familles d’accueil régulières ont d’elles-mêmes et des autres

familles d’accueil. Pour cela, nous avons organisé cinq groupes de discussion (focus groups),

dans les villes de Montréal, Québec, Rivière-du-Loup et Lévis auxquels 57 individus ont

participé.

Au départ, nous avons formulé l’hypothèse selon laquelle les familles d’accueil

régulières entretenaient une opinion négative de leur travail car elles ne se sentaient pas

reconnues par l’ensemble des intervenants. En deuxième hypothèse, nous avons supposé

qu’un manque de communication maintenait l’ensemble de ces familles dans un état

d’insécurité et d’impuissance face au malaise existant. Selon les résultats de notre enquête, il

semble que les familles d’accueil régulières ont une très bonne opinion d’elles mêmes ainsi

que des autres familles d’accueil. En fait, elles ont des difficultés semblables, demeurent

solidaires, et ne portent pas de jugements sur les autres familles. Néanmoins, elles ne

reçoivent aucune reconnaissance de la part des travailleurs sociaux dont certains dénigrent

leur efforts, manquent souvent de professionnalisme et alimentent leur sentiment d’insécurité

en lien avec la perte de la garde des enfants. Ceci contribue à augmenter le climat d’ambiguïté

et de frustration dans lequel elles vivent constamment. Il apparaît aussi que le manque de

communication entre les familles accentue le malaise et l’insécurité auxquels elles sont

confrontées. Tant que les familles d’accueil entretiennent des rapports harmonieux entre elles

et avec leurs intervenants, leurs problèmes sont, de manière générale, réglés plus rapidement.

Les familles d’accueil expriment toutes le besoin d’apporter de l’amour, de la sécurité

et une bonne éducation aux enfants qu’elles prennent en charge. Cependant, elles ne sont pas

considérées comme des familles conventionnelles, ni des travailleurs autonomes. Cette

absence de statut et de reconnaissance crée un paradoxe : elles aiment ce qu’elles font mais

elles ne recommanderaient à personne le choix qu’elles ont fait. Cet acte de don les empêche

de régler leur malaise.

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TABLE DES MATIÈRES Page

Remerciements …………………………………………………………………………... i

En Résumé ……………………………………………………………………………….. ii

Table des matières ………………………………………………………………………... iii

Annexes ...............………………………………………………………………………… 64

INTRODUCTION ……..……………………………………………………………….. 1

1ère PARTIE

CHAPITRE I : Contexte de la recherche ….………………………………………..… 2

1.1 Contexte général et revue de la littérature…..………………………………... 2

1.2 La Fédération des familles d’accueil du Québec (F.F.A.Q) ………………… 5

1.3 Pré-enquête et description du problème ……………………………………… 7

CHAPITRE II : Approche du problème ……………………………………………… 12

2.1 Question générale et objectifs de recherche ………………………………… 12

2.2 Présentation et développement des hypothèses ……………………………... 13

CHAPITRE III : Cadre conceptuel : les représentations sociales …………………... 14

CHAPITRE IV : Méthodologie ……...……………………………………………….... 18

4.1 Présentation générale du groupe de discussion (focus group) ………………. 18

4.2 Déroulement général du groupe de discussion (focus group) .………………. 19

4.3 Terrain d’enquête …………………………………………………………… 20

CHAPITRE V : Limites de la recherche ……………………………………………… 22

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2ème partie

A.Les résultats de l’enquête………….…………………………………………………… 25

CHAPITRE VI : Les représentations que les familles d’accueil ont d’elles-mêmes . 25

6.1 Pourquoi avoir choisi de devenir famille d’accueil? ………………………… 25

6.2 Les principales valeurs véhiculées par les familles d’accueil ……………….. 27

6.3 Opinions sur les services rendus à la société ………………………………… 28

CHAPITRE VII : Les représentations que les familles d’accueil ont des autres

familles d’accueil …………………………………………………… 31

7.1 Influence des médias sur les rapports entre familles d’accueil ……………… 31

7.2 Expériences vécues par les autres familles d’accueil ……………….……….. 31

CHAPITRE VIII : Difficultés et épreuves vécues par les familles d’accueil ……….. 33 8.1 En lien aux autres familles d’accueil …………...……………………………. 33

8.2 En lien aux médias …………………………………..……………………….. 34

8.3 En lien au voisinage et à la parenté .……………………………………..…... 35

8.4 En lien aux enfants recueillis ……………………………………………..…. 36

8.5 En lien aux parents naturels ………………………………………………..… 38

8.6 En lien aux Centres Jeunesse …………………………………………..…...j. 38

8.7 En lien aux travailleurs sociaux et les intervenants …………………………. 40

B. Les résultats de l’analyse …………………………………………………….……….. 44

CHAPITRE IX : À propos des perceptions des familles d’accueil ………………….. 44

9.1 Caractéristiques particulières des groupes de discussion (focus groups)…….. 44

9.2 Vérification des hypothèses ………………………………………………….. 47

CHAPITRE X : Le paradoxe des familles d’accueil …………………………………. 52

10.1 Famille ou travailleur autonome: une énigme ……………………………… 52

10.2 Aimer être famille d’accueil et ne recommander à personne de le devenir … 55

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CONCLUSION ….……………………………………………………………………… 58 BIBLIOGRAPHIE ……………………………………………………………………... 60

A. Ouvrages de référence ………………………………………………………... 61

B. Ouvrages consultés …………………………………………………………... 62

ANNEXES ………………………………………………………………………………. 63

Annexe 1 : Schéma de conceptualisation ……………………………….……….. 64

Annexe 2 : Schéma des groupes de discussion (focus groups) …………….……. 65

Annexe 3 : Échantillon selon les groupes de discussion (focus group)

et selon le type de famille d’accueil …………………………………...… 67

Annexe 4 : Tableau des principaux types de familles d’accueil…………..……... 72

Annexe 5 : Tableau des principales valeurs véhiculées par les familles d’accueil. 73

Annexe 6 : Tableau des principaux problèmes rencontrés par les familles

d’accueil …………………………………………………………….. 75

Annexe 7 : Tableau des opinions que les familles d’accueil ont sur le service

qu’elles rendent à la société …………………………………………. 76

Annexe 8 : Rapports statistiques annuels des Centres Jeunesse années 1999-2001 77

Annexe 9 : Annonces de recrutement des familles d’accueil ……………………. 78

Annexe 10 : Articles de journaux extraits de quotidiens québécois ……………... 80

Annexe 11 : Formulaire d’autorisation de soins médicaux en camp de vacances .. 87

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INTRODUCTION

De manière générale, la Fédération des familles d’accueil du Québec est chargée

d’aider les familles d’accueil dans leurs négociations avec les Centres jeunesse, et, en étroite

collaboration avec ses associations, de faire connaître le rôle des familles d’accueil et de le

revaloriser. Elle nous a mandatées afin de faire le point sur le malaise existant au sein des

familles d’accueil régulières. Ces dernières vivent dans un climat d’ambiguïté et de frustration

causé par divers facteurs, principalement en raison du manque de communication et de

professionnalisme des travailleurs sociaux. Pour comprendre l’origine de ce malaise, il a été

nécessaire de dégager les différentes représentations que les familles d’accueil ont d’elles-

mêmes et des autres familles d’accueil, et cela par le biais d’une méthode appropriée. Le

groupe de discussion (focus group) est une méthode flexible qui nous a permis d’acquérir une

compréhension plus approfondie des réponses fournies, tout en faisant ressortir les opinions,

les croyances, les informations et les attitudes qu’ont les familles d’accueil, en interaction

avec le système social actuel. La Fédération espère, par cette recherche, trouver des facteurs

qui lui permettront d’améliorer le climat d’insécurité dans lequel vivent les familles d’accueil.

La recherche effectuée se divise en deux parties. La première fait l’objet d’une mise en

contexte de la situation générale des familles d’accueil. Suit ensuite à ce volet une description

détaillée du problème, qui permet de comprendre leur situation actuelle. Puis, la question de

recherche est conceptualisée, et la méthode employée ici est décrite. Finalement, les limites de

notre recherche sont explicitées. La seconde partie comporte la description détaillée des

données recueillies lors des focus groups. Une analyse de ces dernières est faite, en observant

dans un premier temps, les caractéristiques de chacun des groupes de discussion, puis dans un

deuxième temps en énonçant les paradoxes dans lesquels vivent les familles d’accueil.

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CHAPITRE I : CONTEXTE DE LA RECHERCHE

Ce chapitre a pour but de présenter le contexte général de la recherche, en s’appuyant

sur une revue des écrits. Cela nous permet d’avoir une meilleure compréhension du sujet ici

traité. Un deuxième volet portera sur la Fédération des familles d’accueil du Québec

(F.F.A.Q), son mandat et son fonctionnement. Suivront les résultats recueillis lors de notre

pré-enquête et une description du malaise dont nous a fait part la Fédération concernant le

climat dans lequel travaillent et vivent les familles d’accueil.

1.1 Contexte général et revue de la littérature

1.1.1 Qu’est-ce qu’une famille d’accueil ? 1

Le placement en ressource de type familial est un service social qui s’est construit

progressivement, en réponse au problème posé par les enfants orphelins, abandonnés ou

présentant des déficiences intellectuelles ou physiques. Par exemple, au Moyen Âge, en

Europe, certains enfants étaient pris en charge par des foyers dits « nourriciers », qui s’en

occupaient bénévolement. Il arrivait, qu’en échange de ces services les enfants aident aux

travaux domestiques, au travail à la ferme ou dans l’entreprise familiale.

Au Québec, dès le milieu du XIXe siècle, des changements importants ont été apportés

sur le plan des lois sociales: la protection de l’enfant prend son autonomie par rapport à la

protection sociale. Dans les années 1930, un processus d’évaluation des familles d’accueil est

mis en place. Ces dernières reçoivent désormais une indemnité selon un mode de paiement à

la journée, couvrant les frais d’entretien.

1 Toutes les informations mentionnées ci-haut ont été tirées du volume du Dr. Sans, Familles d’accueil, un métier, 1991, Éditions Centurion, Paris, p.19-35

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Dès 1950, de nouvelles lois favorisent le placement d’enfants exposés à des dangers

physiques et moraux et accordent alors un statut officiel aux familles d’accueil. Ainsi, sur le

plan juridique,

« Peuvent être reconnues à titre de famille d’accueil, une ou deux personnes qui accueillent chez elles au maximum neuf enfants en difficulté qui leur sont confiés par un établissement public afin de répondre à leurs besoins et leur offrir des conditions de vie favorisant une relation de type parental dans un contexte familial » (article 312 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, alinéa 1).

Mais qu’est-ce qu’une famille, son rôle et ses fonctions?

1.1.2 Revue de la littérature

Selon le Dr. Pierre Sans : « Une famille d’accueil est un ensemble social, constitué

habituellement d’une mère, d’un père et d’enfants d’âges divers, qui accueillent sous leur toit,

à leur table, en lui faisant partager leur vie quotidienne un hôte, un pensionnaire, un accueilli,

enfant, adulte ou personne âgée » (Sans, 1991, p.7). En se basant sur cette définition

sociologique, on note que la famille d’accueil est un ensemble social, une entité, un sous-

système dont le propre est de partager un espace de vie avec une personne.

Dans l’ouvrage La famille d’accueil, un métier (1991), le Dr. Sans précise davantage

certaines caractéristiques de ce type de famille:

« La famille d’accueil n’est pas régie par une organisation statuaire ni réglementaire. En tant que famille, c’est une organisation, mais c’est la plus petite socialement; c’est une micro-société, la plus petite institution. Ses lois tiennent à la personnalité de ses membres et à leurs rapports dans le vécu quotidien de leur association. Et ces rapports reposent donc sur des principes instinctifs tout autant que sur le conditionnement social » (Sans, 1991, p. 29).

En se référant à la définition de la famille donnée par le sociologue Talcott Parsons, il

est possible de constater que les deux définitions précédentes de la famille d’accueil

rejoignent celle d’une la famille conventionnelle.

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Selon Parsons, « la famille est une institution, un système structuré; son but premier est de

répondre à des besoins biologiques et sociaux. C’est en fonction de ces besoins que

s’organisent les comportements sociaux des membres de la famille et ce sont de ces besoins

que découleront des responsabilités qui lui seront propres : mettre les enfants au monde,

veiller à leur bien-être, partager avec l’école leur éducation et leur instruction » (Parsons,

1962, p.23).

Tout comme la famille conventionnelle, la famille d’accueil répond à des besoins

fondamentaux et transmet un système de valeurs essentiel pour l’équilibre des jeunes; on y

retrouve l’honnêteté, le respect, le partage, l’engagement, la responsabilité, l’amour et la

sécurité. Les valeurs et les normes définissent les rôles sociaux que chacun aura à jouer dans

l’institution en question soit, ici, la famille d’accueil. Ainsi, les rôles du père et de la mère

sont déterminés à partir d’un ensemble de valeurs; et les enfants à qui on impose ces valeurs

(que ce soit les enfants propres ou les enfants accueillis) doivent respecter les normes sociales

établies. C’est principalement sur le vécu, la pratique, l’instinct et l’amour que reposent les

échanges relationnels au sein d’une famille conventionnelle ou d’une famille d’accueil et ces

échanges sont le fondement même de la personnalité de chacun.

La différence majeure entre une famille conventionnelle et un famille d’accueil est la

suivante : les parents d’accueil n’ont que des devoirs et aucun droit sur les enfants accueillis.

De plus, les enfants qui y séjournent doivent s’adapter à une nouvelle façon de faire, de se

comporter, d’agir, chaque fois qu’ils intègrent une nouvelle famille d’accueil. Par conséquent,

plus ils auront visité de familles d’accueil différentes, plus cette étape sera difficile pour eux

et pour le milieu qui les accueille.

La famille conventionnelle est considérée comme une institution chargée de répondre

aux besoins quotidiens de ses membres. Elle a droit à des rabais d’impôt, à des allocations

familiales pour enfants en bas âge. Ces avantages sont acceptés et sont intégrés aux mœurs de

la société québécoise. Les familles d’accueil, quant à elles, n’ont pas ces avantages

financiers : et elles ne reçoivent en moyenne que $16 par jour pour s’occuper des enfants dont

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elles ont la charge comparativement aux éducateurs en garderie qui reçoivent en moyenne

$120 par jour pour huit heures de travail.

Les familles d’accueil, tout comme les autres familles possèdent certainement des

forces et des faiblesses, mais elles rendent un service important d’aide et de prise en charge

des jeunes en difficulté. Ce service de placement de type familial, permet d’héberger, de

prendre soin, de superviser et d’accompagner des jeunes en difficulté, ce qui constitue, sans

l’ombre d’un doute, une valeur ajoutée pour notre société. Afin d’assurer le bon

fonctionnement de ce type de service, les familles d’accueil sont encadrées par un ensemble

de réseaux d’intervenants spécialisés, qui ont pour tâche de veiller au placement et au suivi

adéquat des enfants tout au long de leur séjour. Ces réseaux correspondent principalement aux

diverses équipes multidisciplinaires (principalement des travailleurs sociaux) mises à la

disposition par les Centres jeunesse. La Fédération des familles d’accueil du Québec

(F.F.A.Q) est un organisme à but non- lucratif qui aide, soutient et défend souvent les familles

d’accueil. En voici une description détaillée.

1.2 La Fédération des familles d’accueil du Québec (F.F.A.Q) : une ressource pour les

familles d’accueil

La Fédération des familles d’accueil du Québec a vu le jour en 1974. C’est un

organisme provincial qui regroupe les associations régionales dont plusieurs familles

d’accueil sont membres. La Fédération s’est donnée comme mission :

1. de former et d’informer les membres de la corporation;

2. de piloter dans le cadre de son mandat, les dossiers des familles d’accueil

requérant une aide particulière auprès du Ministère de la santé et des services

sociaux (M.S.S.S), de même que des régies régionales;

3. de coopérer avec d’autres organisations qui ont des buts semblables à ceux de la

corporation;

4. et de veiller aux intérêts des membres de la corporation des familles d’accueil du

Québec.

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En l’an 2000, on comptait près de 5545 familles d’accueil au Québec, dont 3500

étaient membres de la Fédération par le biais de leur association régionale (voir tableau en

annexe 3). Quatorze associations régionales sont affiliées à la Fédération, qui, en les

regroupant en une entité, se charge d’aider les familles d’accueil dans leurs négociations avec

les Centres jeunesse. La Fédération, en étroite collaboration avec ses associations, tente de

faire connaître le rôle des familles d’accueil et de le revaloriser. Elle joue également un rôle

de médiateur en cas de litige entre famille d’accueil, Centres jeunesse et des centres de

réadaptation.

Le réseau de prise en charge des jeunes en difficultés définit deux types de familles

d’accueil : les familles « régulières » (permanentes et sans lien quelconque avec l’enfant avant

le placement), et les familles « spécifiques » (issues du réseau de connaissances de la famille

de l’enfant). Selon Mme Auger, présidente du conseil d’administration de l’Association des

familles d’accueil de la région Montréal-Métropole, 40% des familles d’accueil sont

présentement régulières. Ce sont ces dernières qui supportent le réseau de prise en charge des

jeunes en difficulté, car elles continuent, au fil des ans, à accueillir des enfants, ce qui n’est

pas normalement le cas des familles relevant de la deuxième catégorie. Les familles d’accueil

de type régulier sont celles qui constituent l’objet de notre recherche.

En 1960, deux enfants sur trois, éprouvant des difficultés familiales, étaient placés en

institution2. Dix ans plus tard, la situation est toute autre; deux enfants sur trois sont placés en

famille d’accueil. Depuis 1970, le nombre de placements de jeunes a considérablement

diminué mais il n’en demeure pas moins que la ressource de type familial (famille d’accueil)

est celle qui est la plus utilisée. Au 31 mars 1992, il y avait 12 532 jeunes placés et, de ce

nombre, 8354 séjournaient en famille d’accueil3. En l’an 2000, approximativement 8713

jeunes bénéficiaient de ce service (voir tableau en annexe 4).

2 garçon ou fille âgé-e de 0 à 18 ans 3 chiffres donnés par le Dr. Cloutier lors du Congrès des familles d’accueil du 27 octobre 2001

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Lors du Congrès des familles d’accueil, qui a eu lieu le 27 octobre 2001, Richard

Cloutier, psychologue et professeur à l’Université Laval, affirmait que plus de 76 % des

enfants placés au Québec le sont dans une ressource de type familiale, tandis que le 24%

restant se retrouvent en institution spécialisée. Cela répond aux désirs du gouvernement

québécois qui tente de maintenir les jeunes en difficulté dans un milieu familial et leur éviter

le placement en centre de réadaptation. Il est donc possible d’affirmer que le placement de

type familial a un rôle capital à jouer dans notre société.

Les familles d’accueil dépendent et sont contrôlées par des institutions qui

sélectionnent et leur proposent des enfants. Dès qu’un enfant leur est attribué, un travailleur

social se charge, mais ce n’est pas toujours le cas, de veiller au bon déroulement de l’accueil.

Chaque enfant placé en famille d’accueil régulière est catégorisé selon un système de pointage

allant de un à cinq, donnant lieu à une échelle graduée du plus léger (cote=1) au plus lourd

(cote=5). Cette catégorisation, aussi appelée « catégo », entièrement réalisée par les Centres

jeunesse, permet de distinguer des niveaux significatifs d’intensité de services requis. Elle

constitue une étape décisive dans le placement des enfants car elle mesure les difficultés de

chacun et permet de déterminer le niveau de services requis. La catégorisation a aussi une

incidence sur les primes perçues par les familles d’accueil.

Voyons maintenant les résultats de notre pré-enquête.

1.3. Pré-enquête et description du problème

1.3.1 Situation actuelle des familles d’accueil

Le Congrès des familles d’accueil, qui s’est tenu à Ste-Hélène (Québec) en octobre

2001, a permis de mettre en lumière plusieurs problèmes auxquels font face quotidiennement

les familles d’accueil du Québec.

Il semble que le manque de communication entre ces dernières et le réseau

d’intervenants soit au cœur même du problème. En fait, la plupart des familles d’accueil

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souffriraient d’un abus de pouvoir de la part des intervenants, avec qui elles entretiendraient

parfois des rapports tendus et peu fréquents. Certains principes de base élaborés par les

Centres jeunesse, tel que le respect de l’enfant et de sa stabilité affective, le respect des

famille d’accueil ainsi que des droits des parents naturels ou encore le mandat des travailleurs

sociaux, ne semblent pas être respectés en tout temps. Il arriverait aussi, par exemple, que des

enfants soient déplacés sans préavis par ces mêmes travailleurs sociaux, et cela souvent pour

des raisons apparemment inexpliquées.

En outre, les familles d’accueil ne participent pas au choix du placement des enfants et

il arrive fréquemment qu’elles soient en désaccord avec la catégorie attribuée à ceux-ci.

Pourtant, lorsque qu’elle n’est pas adéquate, la «catégo» fait en sorte que l’enfant est privé des

soins spécialisés auxquels il a besoin et cela occasionne des problèmes supplémentaires à ces

jeunes et aux familles. De plus, on demanderait aux familles d’accueil de faire tout le

nécessaire pour que les enfants s’intègrent rapidement, sans qu’elles ne soient informées des

antécédents, médicaux ou familiaux, des enfants qui leur sont confiés. Paradoxalement, les

familles d’accueil n’ont pas le droit de consulter les dossiers des enfants placés chez elles,

alors qu’elles sont directement impliquées.

Le gouvernement a clairement établi un ensemble de règles à l’endroit des familles

d’accueil, mais s’est peu préoccupé des droits de ces dernières. Si un intervenant ou un parent

vient à douter des compétences d’une famille d’accueil, cette dernière perd automatiquement

la charge de tous les enfants accueillis. Même en prouvant son innocence, elle est incapable

de redevenir une famille d’accueil. Par exemple, si un parent d’accueil est soupçonné d’abus

physiques ou sexuels, ou de négligence à l’égard de l’enfant accueilli, on lui retire ce dernier

immédiatement. Malgré la logique et le bien fondé de cette règle, elle peut devenir la cause de

plusieurs problèmes. En effet, certains parents naturels, refusant que leur enfant soit placé,

pourraient abuser d’une telle règle en accusant à tort certaines familles d’accueil de

comportements négligents et/ou abusifs. À l’inverse, nous pourrions retrouver le cas d’un

jeune qui, désirant quitter sa famille d’accueil actuelle, utiliserait le dénigrement des membres

pour atteindre ses buts. Même un travailleur social pourrait, dû à un conflit personnel avec

une famille d’accueil ou l’un des membres, semer le doute quant à l’intégrité de celle-ci et

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retirer l’enfant accueilli. Les familles d’accueil n’ont aucun statut aux yeux de la loi, ce qui

signifie qu’elles n’ont aucun droits et aucune reconnaissance en ce qui a trait au travail

qu’elles accomplissent.

Le statut de non salarié implique qu’après plusieurs années de loyaux services, les

familles d’accueil ne reçoivent aucune pension – elles ne peuvent cotiser à la Régie des rentes

du Québec – elles ne sont pas couvertes par la C.S.S.T, ni régies par la Commission des

normes du travail. Pourtant, en dressant un portrait-type de la famille d’accueil régulière, il

est possible de constater :

1. que la majorité d’entre elles sont des couples âgés entre 45 et 54 ans, ayant terminé

leurs études secondaires;

2. qu’elles sont familles d’accueil depuis au moins six ans;

3. et qu’elles accueillent entre deux et quatre enfants.

En fait, ce sont des personnes faisant partie de la population active, se consacrant

essentiellement à leur tâche de famille d’accueil, dont la scolarité et l’expérience sont

suffisantes pour obtenir le statut de travailleur.

En établissant un parallèle avec les garderies en milieu familial, présentes un peu

partout au Québec, il est possible de constater la situation problématique des familles

d’accueil quant à leur statut de travailleur. Les responsables des garderies en milieu familial,

subventionnées par le gouvernement, reçoivent 125 $ par enfant par semaine pour une

moyenne de 40 heures de travail. Il n’y a personne pour contester le fait que ces responsables,

principalement des mères de famille, perçoivent un salaire pour le travail qu’elles font. Alors

pourquoi serait-il anormal que des femmes et des hommes qui s’occupent d’enfants qui ne

sont pas les leurs, et cela 24 heures par jour, soient reconnus comme des « travailleurs »?

Un autre problème important peut être soulevé : la Fédération des familles d’accueil a

peu de contrôle et n’a aucun pouvoir décisionnel réel en ce qui concerne le choix des familles

d’accueil. C’est le gouvernement qui décide qui sera ou ne sera plus famille d’accueil en

faisant usage de critères de sélection tels que, par exemple : n’avoir aucun but lucratif, aucun

casier judiciaire et être motivé uniquement par l’amour des enfants. En ayant davantage de

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pouvoir, la Fédération pourrait œuvre afin d’améliorer les formations offertes aux familles

d’accueil, vérifier la qualité des services et même établir des critères de sélection étant donné

leur proximité avec les familles d’accueil.

De plus, l’adhésion à la Fédération est facultative ce qui peut causer des préjudices

quant à la formation, l’implication et la qualité des familles d’accueil. Les familles d’accueil

de la province de Québec n’ont alors aucune compétence commune puisque si elles

n’adhèrent pas à la Fédération, elles ne reçoivent aucune formation.

Plusieurs familles d’accueil se forment et se spécialisent à la demande des intervenants

du réseau, en suivant, par exemple, divers cours sur la manière d’interagir avec les jeunes en

difficultés. Malgré cette spécialisation, qui influe sur la qualité des services, les familles

d’accueil sont toutes reconnues au même titre et aucune distinction n’est apportée à celles qui

se sont dotées d’outils, lorsque vient le moment de leur verser leur allocation mensuelle, par

exemple. Non seulement les familles d’accueil ont l’impression que l’on tente de minimiser

l’importance de leur travail et l’impact positif qu’elles peuvent avoir sur notre communauté,

mais dans le réseau même on ne reconnaît pas d’avantage celles qui améliorent leurs

compétences.

L’État a établi un contrat avec les familles d’accueil, mais celui-ci ne semble pas être

appliqué équitablement pour les deux parties. En fait, il ne reconnaît pas la famille d’accueil

comme un travailleur et souvent, cette absence de statut crée des tensions avec les

intervenants. Les familles d’accueil doivent s’engager à respecter des règles précises, mais en

cas de litige, elles ne peuvent compter sur celles-ci pour se défendre. Les familles d’accueil

prennent soin d’enfants qui éprouvent des difficultés propres ou dues à leur milieu familial et

la majorité d’entre elles déplorent le manque de reconnaissance et la très faible compensation

financière allouée pour leurs services. Lors du Congrès, certaines familles d’accueil hésitaient

à parler de l’aspect pécuniaire de leur travail, car lors de leur accréditation les règles semblent

très strictes : l’argent ne peut constituer leurs motivations pour devenir une famille d’accueil.

Devenir famille d’accueil serait considéré comme un privilège que la société leur fait. Même

si elles aiment ce qu’elles font et y mettent tout leur cœur, elles ont besoin d’être reconnues

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autant sur le plan humain que financier ce qui permettrait d’accroître leur efficacité et leur

nombre.

Où réside donc le malaise des familles d’accueil?

1.3.2 Formulation du problème

Selon les représentantes de la Fédération des familles d’accueil du Québec, il y aurait

un malaise important au sein du réseau de prise en charge des jeunes en difficultés en ce qui

concerne les familles d’accueil. Ces dernières se demandent ce qu’elles représentent aux yeux

des intervenants et également aux yeux des autres familles d’accueil. La Fédération nous a fait

part de ses impressions concernant l’origine de ce malaise. En effet, elle se demande si ce

dernier ne se serait pas originellement formé au sein même des familles d’accueil.

Ce questionnement provient en partie du malaise qui croîtrait entre le réseau

d’intervenants et les familles d’accueil. Les familles d’accueil reprochent au réseau

d’intervenants de ne pas suffisamment les encadrer, de prendre des décisions hâtives, pouvant

ainsi facilement engendrer la fermeture d’une famille d’accueil et le retrait des enfants placés

sans informer préalablement les parents d’accueil. L’image sociale des familles d’accueil

souffrirait aussi de nombreux préjugés, alimentés par des idées erronées de tout un chacun.

Par exemple, certains soupçonnent ces familles d’être profiteuses et de jouer leur rôle à des

fins lucratives et sans aucun souci humanitaire. Il semble que les médias nourrissent ces

préjugés. Le rôle et les tâches des familles d’accueil sont donc de plus en plus remis en

question.

Notre recherche servira à faire le point sur la situation des familles d’accueil à

l’intérieur du réseau de prise en charge des jeunes en difficulté. La Fédération espère, avec les

résultats de cette recherche, trouver où se situe et mettre en lumière certaines caractéristiques

du malaise ressenti par l’ensemble des familles d’accueil du Québec. Ensuite, elle pourra

œuvrer à amorcer une prise de conscience au sein de la collectivité, afin que les services

rendus par les familles d’accueil soient reconnus comme un vrai travail.

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CHAPITRE II : APPROCHE DU PROBLÈME

Ce chapitre vise à expliquer la manière dont a été abordé le problème soulevé par la

Fédération des Familles d’accueil du Québec. Tout d’abord, la question générale et les

objectifs de la recherche seront présentés. De ceux-ci découlent deux hypothèses qui seront

ensuite énoncées.

2.1 Question générale et objectifs de recherche

2.1.1 Question générale

Connaissant le mandat que la Fédération nous a attribué, il nous paraît pertinent de se

demander: Comment les familles d’accueil régulières, établies dans quatre régions du

Québec4, se perçoivent elles-mêmes, et quelle est leur perception des autres familles

d’accueil?

2.1.2 Objectifs de la recherche

Notre recherche, vise dans un premier temps, à présenter un tableau général des

perceptions des familles d’accueil régulières de la région de Québec, Montréal, Lévis et

Rivière-du-Loup. On se limite ici à la description des représentations qu’elles ont d’elles-

mêmes, et des autres familles d’accueil. Tout en essayant de comprendre les fondements des

phénomènes observés et en systématisant nos observations nous parviendrons à répondre à

notre question de recherche.

Les différentes représentations dépendent de la famille d’accueil elle-même, de son

histoire et de son vécu, et aussi du système social et idéologique avec laquelle elle interagit.

Diverses opinions, croyances, informations et attitudes en découleront et ainsi nous

permettront de dégager les indicateurs s’y rapportant. De plus, des facteurs démographiques

tels que le sexe, l’âge, le niveau d’instruction, le milieu géographique peuvent influencer les

représentations sociales. Ces dernières pourraient aussi dépendre du milieu social (cadre de

vie, information-communication) dans lequel vivent et interagissent les familles d’accueil. 4 Régions de Québec, Montréal, Lévis et Rivière-du-Loup

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2.2 Présentation des hypothèses

La question de recherche énoncée ci-haut nous a conduit à formuler les hypothèses

suivantes :

- Hypothèse 1 :

Les familles d’accueil perçoivent leur travail de façon négative parce qu’elles ne se sentent

pas reconnues par l’ensemble des intervenants.

- Hypothèse 2:

Le manque de communication maintient l’ensemble des familles d’accueil du Québec dans un

état d’insécurité et d’impuissance face au malaise existant.

Ces deux hypothèses ont été retenues suite à notre pré-enquête qui s’est déroulée lors

du Congrès des familles d’accueil, à Ste-Hélène, en octobre 2001. En écoutant les familles

d’accueil exposer leur situation, les problèmes vécus avec les travailleurs sociaux semblaient

être une préoccupation commune. Ainsi nous nous sommes demandé si le manque de

reconnaissance de la part des intervenants n’influençait pas les perceptions que les familles

d’accueil ont d’elles-mêmes. En commentant la rencontre, les familles d’accueil exprimaient

beaucoup d’enthousiasme au fait qu’elles aient pu communiquer entre-elles et partager leurs

difficultés. Ceci a donné lieu à notre deuxième hypothèse.

Passons maintenant à la présentation de notre cadre conceptuel, soit les représentations

sociales.

CHAPITRE III : CADRE CONCEPTUEL : les représentations sociales

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Notre question de recherche porte sur les perceptions des familles d’accueil, ce qui se

rapporte à leurs représentations. Ces dernières feront l’objet de notre troisième chapitre où

l’on tachera de les définir, de comprendre leur fonctionnement et de voir en quoi elles

s’appliquent à notre recherche.

Jean-Claude Abric propose une définition approfondie de la représentation, inspirée

des travaux de S. Moscovici en psychologie sociale. C’est celle que nous avons retenue dans

le cadre de cette recherche. Selon Abric, une représentation est :

« un ensemble organisé d’opinions, d’attitudes, de croyances et d’informations se référant à un objet ou à une situation. Elle est déterminée à la fois par le sujet lui même (son histoire, son vécu), par le système social et idéologique dans lequel il est inséré, et par la nature des liens que le sujet entretient avec ce système social (Abric, 1991, p.188). »

Se représenter une image quelconque se réfère donc à l’ensemble des connaissances et des

informations reçues, interprétées selon l’expérience et le cadre social dans lequel une

personne s’insère et oriente son action (Abric, 1991, p.189).

Denise Jodelet (1991), dans son ouvrage intitulé Les représentations sociales, affirme

que celles-ci guident tout individu dans la façon de nommer et définir les différents aspects de

la réalité quotidienne, dans la façon de les interpréter, de statuer sur ces derniers et, le cas

échéant, prendre une position à leur égard et la défendre. Par conséquent et de manière

générale, les représentations ont des incidences sur le comportement social. (Jodelet, 1991,

p.31). L’individu se situe par rapport à son environnement, et cherche à le maîtriser. Ce désir

renvoie en partie à l’utilité sociale de la notion de représentation. Les représentations sociales

offrent aux individus « un code pour leurs échanges et un code pour nommer et classer de

manière univoque les parties de leur monde, de leur histoire individuelle et collective »

(Moscovici, 1961, p.267). Une dynamique communication-représentation se met en place.

Ainsi, la communication permet de réguler la dynamique sociale, qui oriente la conduite des

personnes.

La composition des représentations sociales dépend aussi des processus de

transmission et de diffusion des informations. Les idées nouvelles peuvent être diffusées par

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l’intermédiaire des écoles, des médias... L’interaction (les échanges sociaux) joue un rôle

primordial dans la construction d’une représentation sociale. Les représentations circulent

dans les discours, sont portées par les mots, véhiculées dans les messages et les images

médiatiques, cristallisées dans les conduites et les agencements matériels ou spatiaux. Elles

suivent ainsi un déroulement qui définit à ses membres des buts et des procédures spécifiques.

En ce qui concerne la composition des représentations sociales, trois contraintes

peuvent être mises en évidence:

- le manque d’information: face à un choix à faire, nos informations sont souvent très

limitées, nous empêchant souvent d’agir;

- la pression à l’inférence: face à l’absence d’information suffisantes, il faut généraliser, et

agir malgré le peu d’information;

- la focalisation: chaque individu privilégie certaines informations, certains aspects de la

réalité, en fonction de ses intérêts, de sa situation sociale. Le degré d’implication dans des

causes (telles que des associations) est ainsi limité5.

Le contenu de la représentation dépend de la qualité et de la quantité des informations

reçues et retenues, organisées à l’intérieur d’un champ de représentation. Le bagage

intellectuel permet de sélectionner ces informations et de les comprendre. De plus, la culture

conditionne l’univers symbolique (ou le champ de représentation) à partir duquel une image

est attribuée à un élément abstrait. Le contenu renvoie aussi à une attitude « qui exprime

l’orientation générale, positive ou négative, vis-à-vis de l’objet de la représentation »

(Herzlich [sous la direction de Moscovici], 1972, p.311). Cette dimension de la représentation

demeure la plus primitive puisqu’elle peut se produire dans une situation où peu

d’informations sont fournies et sont organisées vaguement.

___________________________________________________________________________5 Ce paragraphe constitue une piste d’analyse des propos tenus par les répondants

Le but de la présente recherche est de comprendre les diverses perceptions qu’ont les

familles d’accueil. En parlant de perception, nous entendons donc les représentations qu’elles

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ont d’elles-mêmes et des autres familles d’accueil. Les représentations sociales expriment en

quelque sorte le rapport de l’acteur (en occurrence les familles d’accueil) avec son

environnement. Ce concept renvoie non seulement aux informations, aux images et aux

attitudes qui façonnent les rapports que les acteurs entretiennent entre eux, mais également

aux décisions et aux comportements des acteurs. On se demande ainsi quels rapports

entretiennent les familles d’accueil avec leur entourage (autres familles d’accueil, les enfants,

leur entourage quotidien etc…).

Le concept de représentation sociale, proposé par J.C Abric, nous aide à comprendre

comment se forme la perception et semble le plus approprié dans le cadre de notre étude.

Nous savons que les familles d’accueil sont sélectionnées, formées et ont des tâches et des

rôles précis à remplir. Des rapports se créent entre les familles et les enfants qu’elles

accueillent. Des rapports existent également entre les familles elles-mêmes, qui se rencontrent

et échangent leurs expériences lors de séances de formation ou d’information. Il existe

également des rapports constants avec les réseaux d’intervenants. Dans l’expérience de ces

rapports des représentations se construisent. Ces représentations peuvent être négatives ( « les

familles d’accueil n’exercent ce rôle qu’à des fins lucratives »), tout comme elles peuvent être

positives (« les familles d’accueil offrent un service incomparable à la société »). L’étude de

ces rapports sera le but de notre recherche.

Deux dimensions ont été retenues en lien avec le concept de représentation : le sujet

lui-même, qui correspond à l’histoire et au vécu des familles d’accueil, et le système social et

idéologique dans lequel les familles d’accueil vivent et interagissent. Nous avons repris les

composantes avancées par J.C Abric dans la définition des représentations sociales citée ci-

haut. Il s’agit des opinions, des croyances, des informations et des attitudes véhiculées entre le

sujet et le système social. Les indicateurs découlant de ces composantes sont les suivants : une

opinion peut être positive ou négative; les croyances peuvent être étudiées au niveau

psychologique (rationnel), et aussi au niveau social (institutions, valeurs); les informations

dépendent des connaissances générales des individus (instruction), de leur interactions et elles

sont véhiculées par les médias (communication); les attitudes correspondent à l’ensemble de

nos comportements avec les autres, elles peuvent être positives ou négatives. Ces indicateurs

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donnent lieu à des questions ouvertes sur l’expérience personnelle des familles d’accueil, sur

le système social et idéologique dans lequel elles vivent (Voir grille du groupe de discussion

en annexe).

CHAPITRE IV : MÉTHODOLOGIE

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Afin de recueillir le plus grand nombre de données, compte-tenu des délais et des

moyens mis à disposition, le groupe de discussion (focus groups) semblait la méthode de

cueillette de données la plus pertinente. Ce chapitre visera à présenter cette méthode, à décrire

son déroulement ainsi que le terrain d’enquête sélectionné.

4.1 Présentation générale du groupe de discussion (focus group)

Qu’est-ce qu’un groupe de discussion et quels sont ses avantages?

Le groupe de discussion est une technique d’entrevue qui réunit de 6 à 10 participants

et un animateur, dans le cadre d’une discussion structurée, sur un sujet particulier. Cette

technique de collecte de données est utilisée dans le cadre d’une recherche qualitative.

L’usage du groupe de discussion s’avère intéressant lorsqu’il s’agit de se demander le

« quoi » ou le « pourquoi » d’une attitude, d’une opinion ou d’un comportement. Il favorise la

spontanéité des personnes et leur permet de communiquer leur vécu, leurs sentiments, leurs

appréhensions. La dynamique de groupe présente lors ce genre de rencontre a un effet

d’entraînement et facilite la communication entre tous les participants.

L’avantage principal de cette méthode est certainement la possibilité pour un groupe

donné de personnes de partager leurs avis dans un environnement neutre. Le but est donc de

constater et d’apprendre davantage sur les facteurs qui dictent une action ou une attitude

particulière. Il facilite la compréhension des comportements et des attitudes d’un groupe qui a

été préalablement ciblé. En essayant de recréer un contexte qui ressemble au milieu social,

une dynamique de groupe est enclenchée, et les individus peuvent alors réagir et entraîner un

échange de connaissances et d’idées. Le groupe de discussion est une méthode très flexible

qui permet d’obtenir rapidement des opinions sur des sujets précis.

Voyons comment se sont déroulés les groupes de discussion.

4.2 Déroulement du groupe de discussion (focus group)

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Cinq groupes de discussion ont été formés : soit un à Québec, un à Lévis, un à Rivière-

du Loup, et deux à Montréal. Cette méthode a permis la confrontation des différents points de

vue qu’ont les familles d’accueil dans ces quatre villes. Chacun des groupes de discussion,

d’une durée d’environ trois heures, a été enregistré. Nous avons prévu une pause-café d’une

vingtaine de minutes au milieu de la rencontre.

Après avoir sélectionné les participants et déterminé le lieu de rencontre, les groupes

de discussion se sont déroulés selon un guide de discussion détaillé (voir en annexe 2). Ce

dernier résume les principaux thèmes de discussion et indique l’ordre et la durée

approximative de la discussion sur chaque sujet. Notre guide est divisé en trois temps :

- l’introduction : après avoir souhaité la bienvenue à tous les participants, le

déroulement du groupe de discussion a été expliqué. Nous avons exposé la raison de

l’enregistrement de la discussion et nous leur avons demandé leur consentement;

- la phase de discussion : le premier sujet, très général, a été abordé, et a permis de

diminuer les tensions normales qui existent entre des étrangers. Cette période a duré

environ une dizaine de minutes. Ensuite, des questions plus précises et plus délicates,

ayant trait au sujet de recherche, ont été abordées;

- la conclusion : cette période de 20 minutes aura servi à vérifier s’il y avait des

questions supplémentaires. Nous avons alors distribué les mini-questionnaires. Il ne

restait plus qu’à remercier les participants pour leur contribution au groupe.

Comme la recherche exploratoire, menée ici, vise à dégager les représentations des

participants sur eux-mêmes et les autres familles d’accueil, huit questions ouvertes invitant au

développement, ont été posées lors des groupes de discussion. Il était crucial que chacun des

participants comprenne le sens de toute les questions. Les participants n’ont pas été limités à

des catégories précises de réponses, et ont pris le temps nécessaire pour nuancer leurs propos.

L’animation a donc été de style « non directif » et l’on s’est assurées que la conversation ne

déviait pas trop des objectifs de la recherche.

Nous avons fait usage d’un mini-questionnaire, rempli à la fin de la rencontre par tous

les participants du groupe de discussion. Les questions posées étaient de type « fermées » (tel

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que le groupe d’âge, le sexe, la région d’habitation etc..). Les réponses ont été très utiles lors

de la transcription et l’interprétation des résultats, car elles nous ont fournis des

renseignements personnels qu’il aurait été difficile d’obtenir autrement. Elles nous ont aussi

permis de faire des liens entre les éléments de réponse et les caractéristiques socio-

démographiques des participants.

Voici une description de notre terrain d’enquête.

4.3 Terrain d’enquête

Nous avons convenu avec la F.F.A.Q de cibler uniquement quatre villes qui seraient

assez représentatives de la population québécoise. Deux grandes villes de la province, Québec

et Montréal, et deux autres de moyenne envergure, Lévis et Rivière-du-Loup, ont été

choisies6. Le fait qu’elles ne soient pas toutes concentrées dans les mêmes régions du Québec

permet de recueillir des informations provenant de milieux diversifiés.

Il aurait été intéressant – mais ce fut impossible – de faire des groupes de discussion

un peu partout dans la province, compte-tenu des exigences du laboratoire de recherche et des

moyens mis à notre disposition. En comparant les diverses villes, nous avons tout de même pu

dégager de manière plus évidente les facteurs qui conditionnent les représentations qu’ont les

familles d’accueil sur elles-mêmes et les autres familles d’accueil.

___________________________________________________________________________ 6L’agglomération de la ville de Québec compte environ 600 000 habitants, celle de Montréal 1 030 678 habitants, tandis que celles de Lévis et Rivière-du-Loup comptent respectivement 42 676 et 14 954 habitants (Dictionnaire Larousse 2000, Paris, Larousse-HER 1999)

L’univers de l’enquête était constitué de l’ensemble des familles d’accueil régulières

actives6 de la province de Québec. La population, quant à elle, était composée des familles

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d’accueil établies dans les quatre villes sélectionnées. Enfin, l’échantillon constitué comptait

57 individus, hommes ou femmes, qui sont accrédités comme familles d’accueil régulières.

Un tableau représentant les participants aux groupes de discussion a été effectué (annexe 3).

Il permet de visualiser rapidement les caractéristiques principales entre les familles d’accueil

interrogées.

Nous avons utilisé le mode d’échantillonnage dit « typique » : les familles d’accueil

ont été choisies en fonction de leur région d’habitation (et non d’origine), dans les

associations de leur ville ou de leur secteur respectif parce que nous croyions qu’elles ne

possédaient aucun trait particulier susceptible d’affecter fortement le phénomène étudié. La

Fédération des familles d’accueil du Québec (F.F.A.Q) s’est chargée de sélectionner et de

nous présenter la liste des familles d’accueil désireuses de participer aux groupes de

discussion . Ainsi la participation s’est faite sur une base tout à fait volontaire, dont dépendait

en partie la disponibilité des participants.

CHAPITRE V : LIMITES DE LA RECHERCHE

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Le groupe de discussion, comme toute méthode de recherche, comporte certains

désavantages. Dans un groupe de discussion, les principes d’échantillonnage aléatoire et une

structure d’entrevue systématisée ne peuvent être utilisés. En effet, tous les participants, qui

forment un groupe restreint, sont soumis à des ambiances pouvant être différentes. Par

conséquent, la quantité et la qualité des réponses vont varier selon les répondants et leurs

caractéristiques personnelles.

On peut aussi préciser que la dynamique de groupe peut avoir ses effets négatifs :

certains participants peuvent être réticents à s’exprimer face à d’autres participants, surtout si

le sujet traité est délicat (par exemple : pour donner un point de vue qui le valorisera un

participant pourrait ne pas communiquer sa réelle pensée). Il faut également garder à l’esprit

que le milieu que l’on tente de recréer dans un groupe de discussion est artificiel : il ne

correspond pas au milieu naturel. Les participants sont en fait soumis à des influences qu’ils

n’auraient pas eu en temps normal (ils sont ici centrés sur une seule question tandis que dans

l’environnement naturel ils sont exposés à davantage de stimuli).

De plus, la discussion a lieu dans un groupe restreint de personnes. Compte-tenu des

situations, il se pourrait que tous les répondants ne donnent pas leur avis. De plus, les

participants ne sont pas statistiquement représentatifs de l’ensemble de la population étudiée:

les résultats obtenus de cette dernière ne peuvent pas être généralisés. Un autre point peut être

soulevé : un animateur, par la manière et l’ordre dans lequel il pose ses questions, peut

involontairement influencer les résultats des groupes de discussion par ses opinions

personnelles.

Comme notre échantillon a été entièrement sélectionné par la Fédération des familles

d’accueil du Québec et que celui-ci a été choisi et non pris au hasard, il pourrait ne pas

représenter le portrait réel des familles d’accueil du Québec. Car pour faire partie d’un groupe

de discussion il fallait être disponible, impliqué, reconnu par la Fédération et résidant dans les

villes ciblées. Toutefois, ces limites ne nous empêchent pas de répondre à notre de question de

recherche, qui a pour but de fournir des éléments clefs dans la compréhension du malaise des

familles d’accueil.

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2ème partie

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Après avoir présenté le contexte général de la recherche, décrit l’approche du

problème, défini un cadre conceptuel et énoncé la méthodologie, il est nécessaire d’analyser et

d’interpréter, les données recueillies sur le terrain.

Dans un premier temps, il sera question de dégager les réponses et principales

tendances exprimées par les familles d’accueil interrogées lors des cinq groupe de discussion

(focus groups) qui ont eu lieu à Montréal, Rivière-du-Loup, Lévis et Québec.

Dans un deuxième temps, une analyse des résultats de l’enquête sera effectuée. Il

s’agira d’apporter une réponse aux deux hypothèses qui ont été formulées au début de la

recherche (conférer au point 1.3 de la première partie). De plus, un paradoxe sera mit en

évidence : les familles d’accueil aiment ce qu’elles font mais ne recommanderaient à personne

de faire pareil.

A. Les résultats de l’enquête

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Cette section sera composée de trois chapitres dégageant les diverses perceptions qu’ont

les familles d’accueil : celles qu’elles ont d’elles-mêmes, des autres familles d’accueil et

enfin, les perceptions qu’elles ont de leurs difficultés et épreuves vécues.

CHAPITRE VI : Les représentations que les familles d’accueil ont d’elles-mêmes

Ce chapitre s’articule en trois sous-parties correspondant aux questions portant sur les

raisons ayant motivé les familles d’accueil à proposer leurs services, les principales valeurs

qu’elles transmettent aux enfants placés et enfin, les opinions qu’elles ont sur leur occupation.

6.1 Pourquoi avoir choisi de devenir famille d’accueil?

À la lumière des cinq groupes de discussion effectués, il nous a été possible de

dégager deux grandes catégories de familles d’accueil : celles qui considèrent leurs actions

comme une activité sociale et celles qui les considèrent comme un travail autonome. En se

basant sur les motivations personnelles les ayant incitées à devenir famille d’accueil, nous

avons regroupé dans la première catégorie les types I (fertilité/adoption), II (accomplissement

personnel) et III (tradition/imitation/service humanitaire); et dans la deuxième catégorie les

types IV (revenu supplémentaire) et V (carrière). Toutefois, indépendamment de leur type,

chacune des familles d’accueil veut aider les jeunes en difficulté en leur procurant un foyer, et

ce parce qu’elles aiment les enfants.

Catégorie 1. Être famille d’accueil : une activité sociale

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Les principales raisons avancées par les familles d’accueil de type I (fertilité/adoption)

sont les suivantes : certains répondants éprouvaient des difficultés à procréer et ont trouvé, en

devenant famille d’accueil, une alternative à leur besoin d’avoir et d’aimer un enfant. D’autres

répondants, s’étant tournés vers l’adoption mais trouvant les procédures trop longues et/ou

trop dispendieuses, se sont alors orientés vers la prise en charge de jeunes en difficulté en

milieu familial. L’une d’entre-elles a par exemple choisi de devenir famille d’accueil à cause

des délais trop longs pour adopter un enfant au Québec, et des coûts trop dispendieux pour

l’adoption d’un enfant venant de l’étranger (Répondant 5.6). Une autre, éprouvant de la

difficulté à procréer mais désirant « avoir une maison remplie de monde » s’est tournée vers

cette ressource (Répondant 3.14).

Les familles d’accueil de type II (accomplissement personnel), quant à elles, ont choisi

de rendre service aux jeunes en difficulté pour diverses raisons. Pour certaines, cela

représentait un rêve de jeunesse; d’autres ressentaient le besoin de se sentir utile dans la

société, et aussi de partager avec les enfants recueillis l’amour et l’appui qu’ils ont eux-

mêmes reçu dans leur enfance. Une répondante affirmait qu’elle avait toujours voulu changer

le monde, et qu’en devenant famille d’accueil elle y parviendrait (Répondant 1.8).

Le type III (tradition/imitation) regroupe les répondants ayant choisi de devenir famille

d’accueil pour rendre service à la société. Grâce à leur entourage, soit leurs parents, leurs

amis ou leurs voisins, ils ont prit conscience de l’intérêt qu’ils portaient et de l’amour qu’ils

vouaient aux jeunes en difficulté. De plus, le fait d’avoir grandi entourés de nombreux frères

et sœurs, ou d’avoir participé avec leurs parents au rôle de famille d’accueil a influencé la

décision de la plupart des répondants. L’un d’entre eux est d’ailleurs devenu famille d’accueil

en voyant son propre père s’occuper de jeunes en difficulté. Ce dernier vivait et avait

l’occasion de participer à la vie de famille d’accueil depuis son enfance (Répondant 4.7).

Catégorie 2. Être famille d’accueil : un travail autonome

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Les familles d’accueil de type IV (revenu supplémentaire) sont principalement des

personnes qui préfèrent demeurer à la maison, tout en étant rémunérées. Elles apprécient tout

particulièrement la flexibilité de leur horaire et surtout le fait de ne pas avoir à se déplacer

tous les matins. Plusieurs d’entre-elles gardaient souvent des enfants à la maison durant la

journée, et se sont rendues compte que l’amour porté aux enfants représentait de plus en plus

d’intérêt. Ainsi, être famille d’accueil constituait la meilleure des solutions pour s’occuper

d’enfants à temps plein, pour bénéficier d’un travail à domicile et offrir leur support et leur

amour à ceux qui en ont besoin (Répondant 1.2).

Enfin, les familles d’accueil de type V (carrière)regroupent ceux et celles qui ont

voulu s’occuper de jeunes en difficulté à temps plein, en laissant tomber l’ensemble de leurs

activités professionnelles lucratives. Elles désirent s’investir complètement dans ce service

particulier d’aide aux jeunes, et en faire une véritable carrière. Une femme décida de laisser

tomber son emploi, rendu de plus en plus exigeant, et de se consacrer uniquement à ce qu’elle

considérait comme une nouvelle orientation de carrière : être famille d’accueil monoparentale

(Répondant 2.8).

De manière générale, nous remarquons une grande diversité quant aux raisons qui ont

incité les hommes et les femmes à devenir famille d’accueil. Toutefois, le fait que l’amour

porté aux enfants se retrouve dans les tous les types de famille d’accueil énumérés ci-haut,

nous démontre l’importance que les participants lui accordent.

6.2 Les principales valeurs véhiculées par les familles d’accueil

Comme toute famille conventionnelle, la famille d’accueil véhicule des valeurs. Ces

dernières rassemblent « les idéaux collectifs qui définissent, dans une société donnée, les

critères du désirable »9.

9 Extrait du dictionnaire de Sociologie (1999), Paris, Hatier, p. 324

À l’aide des groupes de discussion, il nous a été possible de différencier quatre ensembles de

valeurs :

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- Niveau 1 : de l’affectif, où sont regroupés l’ouverture aux autres, l’amitié, la

générosité et la fraternité; ce sont ici des valeurs qui permettent au jeune d’exprimer

plus facilement ses sentiments sans se sentir jugé;

- Niveau 2 : de la vie familiale, où la confiance, la franchise, le respect, l’honnêteté, la

loyauté et l’égalité forment des valeurs favorisant une meilleure cohésion aux sein de

la famille;

- Niveau 3 : de l’estime de soi, où l’hygiène, les bonnes manières, la persévérance et la

dignité permettent au jeune en difficulté d’améliorer son image et donc de se sentir

beaucoup mieux dans sa peau;

- Niveau 4 : de l’accomplissement de soi, où les familles d’accueil focalisent leur

attention sur la coopération, le soutien, le dépassement de soi, l’entraide et l’espoir. Le

jeune en difficulté peut ainsi se projeter dans l’avenir et aspirer à son propre bien-être.

Finalement, toutes les valeurs ci-dessus mentionnées ont été énoncées par les familles

d’accueil comme étant la base dans laquelle ils désirent que les jeunes évoluent. Cependant, le

niveau 2 (de la vie familiale) regroupe des valeurs fondamentales aux yeux des familles

d’accueil. Selon elles, la famille constitue la fondation de tout individu. Il est donc primordial

d’apporter à chaque jeune les éléments nécessaires qui contribueront à la construction de cette

fondation et aussi à celle de son avenir.

6.3 Opinions sur les services rendus à la société

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6.3.1 Opinions positives

Les familles d’accueil considèrent qu’elles offrent un support essentiel et unique aux

enfants. Il s’agit, selon elles, d’un service de grande importance compte tenu qu’elles

s’occupent d’enfants qui ne sont pas les leurs. Elles apportent et redonnent aux enfants le

respect d’eux-mêmes, un cadre de vie stable dans un environnement sain, une chance

d’évoluer et d’acquérir les outils nécessaires pour affronter les difficultés de la vie En fait, les

familles d’accueil sont fières de ce qu’elles accomplissent pour les jeunes. Elles contribuent

positivement à leur développement, et plusieurs d’entre elles se sentent impliquées dans le

réseau de protection de la jeunesse (Répondant 1.3). Ces divers éléments leur donne le goût de

poursuivre leurs efforts pour le bien-être de l’enfant en difficulté. Finalement, les familles

d’accueil pensent qu’elles apportent quelque chose de spécial aux enfants qui vivent dans le

besoin, et leur offrent une certaine « thérapie naturelle ». Elles aident ainsi la société, les

parents naturels et les centres de services sociaux.

Les familles d’accueil, à l’unanimité, pensent qu’elles rendent un énorme service à la

société. Elles s’occupent d’enfants souvent difficiles, et ce en échange d’une compensation

financière minime. En effet, un enfant placé en institution coûte en moyenne près de $100 000

par année à l’État alors que ce même enfant lui coûterait à peine $10 000 en étant placé dans

une famille d’accueil. Ces chiffres peuvent être retrouvés dans le rapport Cloutier (2000). Les

familles d’accueil interrogées affirment qu’elles se sentent frustrées de ne pas être reconnues

pour les économies qu’elles permettent de faire à l’État.

6.3.2 Opinions négatives

Les familles d’accueil croient sincèrement en la valeur de leur services mais elles

pensent que le reste de la société n’y accorde pas autant d’importance. En effet, certaines

familles d’accueil interrogées se sentent perçues comme «des profiteurs» : nombreux seraient

ceux qui croient qu’elles font beaucoup d’argent sur le dos des enfants. Les familles d’accueil

se sentent en marge de la société, qui les juge, ne leur fait pas confiance et ne leur reconnaît

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aucune action humanitaire. Des familles d’accueil pensent aussi qu’elles représentent une

« nuisance » pour la société (Répondant 1.5).

Des personnes interrogées lors des groupes de discussion (focus groups) signalent que

dans de nombreux cas elles représentent un problème pour les responsables d’école. Il en

résulte qu’elles se sentent mal à l’aise chaque fois qu’elles doivent se rendre dans un

établissement scolaire lors de l’inscription d’un enfant. Aux yeux des familles d’accueil, trois

raisons peuvent être dégagées : 1) les familles d’accueil ne savent pas pour combien de temps

elles ont la garde de l’enfant; que ce soit pour une semaine, un mois ou cinq ans, elles doivent

l’inscrire rapidement. L’école ne sait donc pas de manière définitive pour combien de temps

l’enfant y adhèrera; 2) les directeurs d’écoles ne peuvent identifier le niveau scolaire ou la

classe qui serait la plus adéquate pour l’enfant car les familles d’accueil n’ont pas le dossier

académique, ni le profil social de l’enfant; 3) accueillir un enfant issu d’une famille d’accueil

représenterait pour certains directeurs d’école un risque potentiel élevé, par rapport aux

enfants vivant dans leur famille naturelle, de provoquer des problèmes supplémentaires.

Les familles d’accueil s’interrogent sur les valeurs morales véhiculées dans notre

société et se demandent si finalement elles ne sont pas les seules à avoir à cœur le bien-être

des enfants qui ne sont pas les leurs. Elles constatent la montée de l’individualisme où chacun

vit en ne s’occupant pas des autres et déplorent le fait qu’il n’y ait pas grand monde qui se

préoccupe du sort d’enfants en difficulté ayant besoin de support et de services particuliers.

CHAPITRE VII : Les représentations que les familles d’accueil ont des autres familles

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d’accueil

Ce chapitre vise à dégager les perceptions qu’ont les familles d’accueil sur d’autres

familles d’accueil. Pour cela, l’influence des médias et les expériences vécues entre les

familles d’accueil seront traitées.

7.1 Influence des médias sur les rapports entre familles d’accueil

Les familles d’accueil affirment à l’unanimité ne pas être influencées par les propos

tenus dans les médias et prennent rarement en considération ce qui y est véhiculé. En fait, les

médias ont tendance à exagérer les problèmes qui pourraient exister au sein des familles

d’accueil. Toutefois, les familles d’accueil signalent que les services qu’elles rendent aux

jeunes en difficulté ne sont pas assez connus; celles-ci ne peuvent alors pas bénéficier du

soutien de la population.

7.2 Expériences vécues par les autres familles d’accueil

La réponse à la question « Pensez-vous que les autres familles d’accueil vivent les

même expériences que vous? » a été la même pour toutes les familles d’accueil interrogées :

oui, les familles d’accueil ont toutes les mêmes expériences, et surtout les mêmes problèmes.

Malgré le fait que leurs fondements soit similaires des nuances existent : les difficultés varient

d’intensité d’une famille d’accueil à l’autre. Prenons l’exemple des rapports pouvant exister

avec les travailleurs sociaux. Une famille d’accueil peut occasionnellement se confronter avec

son travailleur social au sujet d’un traitement tandis qu’une autre famille d’accueil peut être

incapable d’entretenir une discussion avec son intervenant-ressource.

Des familles d’accueil soulignent qu’elles s’entraident beaucoup dès qu’elles le

peuvent. C’est une des raisons pour lesquelles elles se regroupent en association, et tâchent

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aussi de trouver des moyens d’améliorer leur situation. Cependant, il arrive, dû à leur

éloignement géographique, que des familles d’accueil communiquent peu entre-elles, ne

puissent pas échanger leurs expériences et ainsi s’associer aux autres familles d’accueil en

fonction des difficultés qu’elles ont en commun. Lorsqu’elles peuvent communiquer entre-

elles, les familles d’accueil sont capables d’anticiper des problèmes qui pourraient être

susceptibles de leur arriver. Par exemple, en ayant appris qu’un parent d’accueil fut accusé

injustement d’abus sexuel, une autre famille s’est rendue compte du risque qu’elles couraient

en ayant accueilli l’adolescente en question. (Répondant 3.1). Une autre famille, à la lumière

de ce genre de témoignages, se rendit compte que ce problème pourrait survenir, étant donné

qu’elle recueillait quatre adolescentes (Répondant 3.9).

CHAPITRE VIII : Difficultés et épreuves vécues par les familles d’accueil

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Lors des groupes de discussion (focus group), les familles d’accueil interrogées nous

ont fait part des diverses difficultés auxquelles elles sont régulièrement confrontées. Sept

catégories d’interaction ont ainsi été dégagées :

1) par rapport aux familles d’accueil; 2) aux médias; 3) au voisinage et à la parenté; 4) aux

enfants recueillis; 5) aux parents naturels; 6) aux Centres Jeunesse; 7) aux travailleurs sociaux

et les intervenants. Elles explicitent les tensions existant entre les familles d’accueil et les

autres éléments avec lesquels elles entrent en interaction. Notons que ces différentes

catégories sont ici énumérées et énoncées en fonction de la fréquence des réponses apportées

par les familles d’accueil présentes lors des groupes de discussion (focus group). Ces

problèmes confirment le malaise grandissant qui existe entre les familles d’accueil et le réseau

qui les englobe

8.1 Par rapport aux autres familles d’accueil

Seule une très faible proportion de notre échantillon nous a fait part de difficultés

rencontrées avec d’autres familles d’accueil. Ces difficultés concernent principalement la

jalousie. Selon les personnes interrogées, il arrive que des familles d’accueil éprouvent de

l’envie face aux indemnisations perçues par d’autres familles accueillant des jeunes. En effet,

certains travailleurs sociaux accordent des rétributions supplémentaires, telles que des billets

d’entrée à la Ronde de Montréal, tandis que d’autres les refusent. De plus, plusieurs

intervenants classent les jeunes en difficulté dans la « catégo » II, qui correspond à l’état des

enfants nécessitant une supervision moyenne. Cette catégorisation se ferait indépendamment

des besoins des jeunes et ne reflèterait pas la réalité. Il se produirait parfois la situation

contraire : des intervenants attribuent des catégories trop élevées par rapport aux problèmes

des jeunes. Ce sont ces différences qui alimentent la jalousie chez certaines familles d’accueil

et isolent les familles plus favorisées.

De plus, les familles d’accueil soulignent tout particulièrement la peur de parler que

ressentent certaines d’entre-elles. En insistant fermement sur les principes de confidentialité,

les intervenants empêchent les familles de communiquer entre-elles. En effet, tiraillées par la

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hantise de perdre les enfants accueillis et les menaces des travailleurs sociaux, ces familles

d’accueil préfèrent s’isoler et n’entretenir aucune forme de communication avec les autres.

Une participante disait d’ailleurs à cet effet : « On a la défense de parler entre-nous. Les

intervenants nous imposent ça » (Répondant 3.1).

8.2 Par rapport aux médias

Lorsque la question « Pensez-vous que les médias influencent les interactions que les

familles d’accueil ont les unes envers les autres? » fut posée, les réponses furent

majoritairement unanimes : les médias n’ont aucune incidence sur les rapports entre les

familles d’accueil. Le problème se situe plutôt dans l’image négative véhiculée par les médias

vers la société. Les familles d’accueil interrogées se plaignent des généralisations basées

uniquement sur les scandales rapportés par les médias. Une famille d’accueil mentionnait

d’ailleurs une expérience négative qu’elle avait vécue à la suite d’un événement paru à la Une

des journaux de Montréal (un parent d’accueil aurait abusé sexuellement un jeune qu’il

accueillait). Au lendemain de ce fait marquant, la famille d’accueil interrogée, se rendant chez

son épicier habituel, subissait la froideur et le mépris des commis, qui auparavant lui

démontraient toujours beaucoup de sympathie. Les familles d’accueil ne sont pas reconnues

pour leurs activités réelles. Elles se retrouvent souvent victimes de généralisations,

d’exagérations et de fausses accusations de la part de leur entourage, conséquences de ce qui

est véhiculé par les médias.

À Montréal, certaines familles faisaient remarquer que lors d’émissions télévisées,

certains des présentateurs ne se gênaient pas pour montrer leur mépris à l’endroit des

ressources de type familial. En effet, ces derniers alimentent les préjugés et les opinions

négatives tenus par les participants lors d’émissions en direct. De plus, un répondant faisait

remarquer que la majorité des individus qui donnent leur avis par téléphone et/ou les invités

aux émissions télévisées étaient souvent des travailleurs sociaux ou des intervenants, et

rarement des « gens du peuple » (Répondant 1.4). En regard de toute ces considérations, il est

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possible de conclure que les médias ne représentent en aucun cas un soutien positif : au

contraire, ils nuisent à la réputation et à l’image des familles d’accueil.

8.3 Par rapport au voisinage et à la parenté

Certaines familles d’accueil sont confrontées à l’éloignement, l’incompréhension et

aux préjugés de leurs voisins, de leurs amis et même de leur propre famille (parents, frères et

sœurs etc.). Ces derniers expriment leur désaccord face à la décision des répondants de

devenir famille d’accueil en rejetant et en refusant de recevoir les enfants qu’ils ont accueillis.

Par exemple, l’une d’entres-elles a été victime, lors d’une fête de Noël, d’un manque de

respect de la part d’un membre de sa famille. En effet, celui-ci, en la voyant accompagnée de

ces nombreux enfants accueillis, aurait refusé de partager la même table qu’elle et lui aurait

dit : « Quand je suis invité à une fête, je laisse mon truck dehors ». Cette famille d’accueil

aurait davantage été marquée par ce qu’elle a désigné un « manque total d’humanité »

(Répondant 1.3).

Dans ce genre de situation, la famille d’accueil se voit contrainte de s’éloigner, voire

se distancer de sa parenté. La marginalisation qui en découle est un problème qui affecte une

partie importante des familles d’accueil rassemblées lors des groupes de discussion. Ces

familles désirent l’appui que pourrait leur fournir leurs proches, mais il s’avère souvent

difficile à obtenir et à conserver. Des familles d’accueil auraient également vu leur groupe

d’amis se restreindre à cause de leur décision de devenir famille d’accueil.

L’incompréhension de ces derniers face à leur choix de vie les privent d’amitiés qui existent

depuis déjà très longtemps.

De leur côté, les voisins ne facilitent pas toujours la tâche des familles d’accueil. Une

répondante aurait été contrainte de déménager à cause de son voisinage, qui la harcelait sans

cesse à propos des enfants accueillis. Ces derniers faisaient selon eux beaucoup trop bruit et

donnaient une mauvaise image au quartier.

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8.4 Par rapport aux enfants recueillis

La plupart des familles d’accueil ont mis l’accent sur les divers problèmes qui

apparaissent lorsque des enfants leur sont confiés. La malpropreté serait l’un des problème

prédominant : les enfants n’ont pas appris à se laver régulièrement et ne possèdent que de très

faibles notions d’hygiène. Une famille d’accueil illustrait cela en donnant l’exemple d’un

enfant d’environ quatre ans qui avait peur de l’eau, et qui refusait systématiquement de se

laver (Répondants 5.8 et 5.9).

Deuxièmement, les enfants arrivent en famille d’accueil, munis uniquement des

vêtements qu’ils portent. Un bébé naissant, en intégrant sa nouvelle famille d’accueil, dû se

dévêtir à son arrivée pour restituer ses habits au travailleur social. Heureusement, la famille

d’accueil en question avait déjà quelques vêtements en réserve (Répondant 2.1).

Troisièmement, des maladies allongent la liste des imprévus lors du placement des

enfants en famille d’accueil. En fait, de nombreux enfants arrivent en mauvaises conditions

physiques. Certains ont des poux et/ou des morpions; d’autres souffrent de déformations aux

jambes, de dents cariées, de problèmes de vue non-traités (myopie, presbytie ou strabisme) et

bien d’autres. De plus, de nombreuses familles d’accueil n’ont pas accès à la carte

d’assurance maladie de l’enfant, et/ou des informations de base se rapportant à certains

problèmes de santé. Par exemple, les procédures mises en place lors d’un court séjour en

camp de vacances sont claires : obligation de procurer une fiche de santé complète de chaque

enfant, de signer une autorisation de soins de santé en cas d’urgence et de remettre leur carte

d’assurance maladie (voir annexe 11). Si l’on compare cette situation avec celle des enfants

placés en famille d’accueil, on se rend compte des dysfonctionnements existant dans le

système.

Quatrièmement, des enfants souffrant de troubles mentaux, affectifs ou langagiers sont

recueillis par les familles d’accueil. Ces dernières essayent de les aider dans les meilleures

circonstances et environnement possibles. Mais, certaines d’entre-elles ont de la difficulté à

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traiter les inadaptations affectives (incapacité à s’intégrer, à participer à la vie familiale, à

donner ou à recevoir de l’affection etc.) des enfants qu’elles accueillent. D’autres problèmes

s’avèrent difficiles à contrer, plusieurs familles d’accueil se retrouvent démunies, face aux

fugues ou à la drogue.

Cinquièmement, nombreux sont les enfants qui usent du mensonge et du chantage,

comme moyen de contrôle. Ceux-ci, ayant souvent grandit dans ce genre d’atmosphère, voient

en ces pratiques la seule manière de fonctionner. Ces derniers endommagent aussi l’intérieur

des habitations et en particulier les murs, le mobilier, les draps et autres accessoires ménagers.

Par exemple, une famille d’accueil eut 5000$ de dommages dans son sous-sol à cause d’un

jeune qui n’avait pas accepté l’autorité de ses parents d’accueil (Répondant 2.11). La tâche de

la famille d’accueil se voit ainsi complexifiée : elle doit en plus d’assurer une présence

constante, soutenir les enfants et tolérer des comportements inacceptables pour maintenir leur

sécurité.

Sixièmement, des familles d’accueil vivent des situations stressantes en ce qui a trait à

leur sécurité physique. En effet, elles doivent faire face à l’agressivité et à la violence que

certains jeunes leur démontrent. Une participante aux groupes de discussion, recueillant

quatre adolescents ayant des déficiences mentales légères, a exprimé ses craintes en faisant

part de son vécu quotidien : afin de se sentir en sécurité, elle dort avec la porte de sa chambre

fermée à clef (Répondant 2.8).

Enfin, certaines familles d’accueil évoquent la peine et le déchirement qu’elles

ressentent lors du départ des enfants qu’elles ont recueillis. Cette situation est d’autant plus

difficile lorsque l’enfant est retiré de manière injustifiée. Les Centres Jeunesse mettent

souvent en place « des plans de vie » concernant la durée du placement d’un enfant.

Cependant, ces plans de vie ne seraient pas toujours respectés : des familles d’accueil, ayant

reçu la confirmation d’un placement à long terme, pourrait voir l’enfant retiré avant la fin

officielle de ce placement. De plus, les familles d’accueil se plaignent des délais souvent très

brefs et sans préparation lors du départ des enfants placés. À cet effet, un enfant fut retiré à sa

sortie de l’école par les travailleurs sociaux; sa famille d’accueil ne fut mise au courant

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qu’une fois le fait accompli. Inversement, il arriverait que des familles d’accueil, non-

désireuses de garder un enfant, soient contraintes à attendre durant de longues périodes avant

son transfert.

8.5 Par rapport aux parents naturels

Entretenir de bonnes relations avec les parents biologiques des enfants accueillis

s’avère souvent une tâche difficile à accomplir. Les familles d’accueil sont dans certains cas

victimes de harcèlement. Il est déjà arrivé qu’un parent ne fasse pas confiance à la famille

d’accueil s’occupant de son enfant et que cette dernière fût poursuivie et surveillée par ce

parent jour et nuit.

Il arrive aussi que des parents biologiques accusent des familles d’accueil de mauvais

traitements ou de négligence envers leurs enfants. Par exemple, un enfant placé aurait raconté

à ses parents naturels qu’il ne dînait jamais le samedi. En fait, ses parents d’accueil avaient

l’habitude de faire un brunch de dix heures à midi. Sans se renseigner auprès de la famille

d’accueil, les parents naturels se plaignirent au travailleur social. Les parents naturels ont ainsi

créé de nombreuses difficultés à la famille d’accueil. Celles-ci auraient pu être évitées s’ils

avaient pris la peine de s’informer directement auprès de ceux qui s’occupent de leur enfant.

Les parents naturels redoutent l’attachement que leurs enfants pourraient développer

avec les parents d’accueil. La jalousie et le chantage sont des moyens auxquels des parents

biologiques ont recours. Dans ce genre de situation, les familles d’accueil doivent faire face à

de la violence verbale et à des menaces.

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8.6 Par rapport aux Centres Jeunesse

Les familles d’accueil interrogées se plaignent du budget limité que les Centres

Jeunesse leur accordent. Par exemple, en comparant le Québec et l’Ontario, les rétributions

accordées aux familles d’accueil diffèrent grandement : en Ontario, les familles d’accueil

reçoivent un montant supérieur à celui perçu par les familles d’accueil québécoises pour les

loisirs, les vêtements et l’éducation des enfants; soit 11 dollars par jour en Ontario contre

seulement 56 cents par jour au Québec.

Il est demandé aux familles d’accueil de subvenir à tous les besoins des enfants

accueillis, mais ces derniers arrivent souvent avec peu ou pas de vêtements, et le trousseau qui

leur est accordé ne suffit généralement jamais à couvrir toutes les dépenses. De plus, les

familles d’accueil ont de la difficulté à obtenir de l’argent supplémentaire : « il faut toujours

mendier pour avoir de l’argent , et même des soins» (Répondant 3.13) affirme l’une d’entres-

elles lors du groupe de discussion. « Et quand on en demande un peu plus, on nous menace de

fermeture » renchérit une autre (Répondant 3.4). De manière générale, les familles d’accueil

se voient constamment obligées de solliciter de l’argent auprès des Centres jeunesse en vue de

combler les besoins spécifiques des enfants.

Certaines familles d’accueil, incitées par les Centres Jeunesse, abandonnent parfois

leur emploi régulier pour se consacrer entièrement à leur nouveau rôle. Ces Centres leur

proposent alors de s’investir complètement afin d’accueillir plus d’enfants (neuf enfants

correspond au maximum). Certaines familles d’accueil achètent et/ou rénovent leur

habitation, optent pour des autos spacieuses, en vue d’accueillir le plus grand nombre

d’enfants. Toutefois, il arrive fréquemment, du jour au lendemain, que les services sociaux

retirent ou n’envoient pas le nombre entendu d’enfants à la famille d’accueil. Il arrive que,

malgré ces investissements, les Centres Jeunesse n’en tiennent pas compte alors que, dans la

majorité des cas, ce sont eux-mêmes qui ont suggéré aux familles d’accueil d’adopter cette

voie.

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Les familles d’accueil soulèvent aussi le problème lié au « plan de vie » mis en place

par les Centres Jeunesse. Ces derniers ne respectent pas toujours les plans de vie qu’ils ont

élaborés avec la participation des familles d’accueil. Ceci s’ajoute et aggrave les problèmes

financiers auxquels doivent faire face les familles d’accueil, ayant prévu un budget en

conséquence.

La position des familles d’accueil est précaire : elles ne sont considérées ni comme des

travailleurs, ni comme de véritables familles bénévoles. Elles ne jouissent d’aucun statut,

d’aucune pension, ou encore d’aucun programme d’avantages sociaux. Une famille d’accueil

fit part de l’histoire d’une femme à qui survint un accident qui bouleversa le courant de sa vie.

En fait, une des enfants qu’elle accueillait mit de la poudre à laver dans son sucrier, sans

qu’elle ne s’en rende compte. Celle-ci en ingurgita une certaine quantité, mélangée à son café.

Hospitalisée, elle se retrouva avec des complications qui la rendirent invalide à vie. Elle ne

reçut aucune indemnité forfaitaire, aucune rente d’invalidité de la part des Centres Jeunesse.

Incapable de continuer à exercer son rôle de famille d’accueil, cette femme perdit tous ses

biens et son mari, pour vivre aujourd’hui de l’Aide Sociale.

Nombreuses sont les familles d’accueil qui soulèvent des questions autour de leur

situation ambivalente. D’un côté, elles doivent rendre des comptes aux Centres Jeunesse,

suivre des cours de formation, appliquer des plans d’intervention, constamment rendre compte

de l’évolution de l’enfant et tout ceci sans avoir un salaire et les avantages s’y reportant. D’un

autre côté, elles doivent fournir un cadre familial adéquat aux enfants : les soutenir, les aider,

les aimer; mais n’ont en contre partie aucun pouvoir de décision et ne sont jamais consultées

au sujet de l’avenir de ces enfants.

8.7 Par rapport aux travailleurs sociaux et les intervenants

Les réponses à la question : « Rencontrez-vous des difficultés importantes en tant que

famille d’accueil ? » sont unanimes : les familles d’accueil ont des difficultés majeures avec

les intervenants, qui sont au fait les représentants et portes-parole directs des Centres

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Jeunesse. Lors de leur accréditation, on assure aux familles d’accueil qu’elles auront tout le

support nécessaire au bon déroulement du placement des enfants. Pourtant, il arrive que des

parents d’accueil passent plusieurs mois sans rencontrer leur intervenant-ressource. Ils sont

livrés à eux-même, tout en ayant conscience que si un problème majeur survient, ils seront

tenus pour unique responsables. Par exemple, une famille d’accueil, vivant une grave crise

avec l’adolescente qu’elle accueillait, fut incapable de rejoindre les personnes-ressources à

contacter en cas d’urgence. Elle se retrouvait alors seule et démunie : même les policiers ne

pouvaient pas intervenir prétextant que l’adolescente vivait dans une famille d’accueil

(Répondant 3.14).

Voici un autre exemple concernant le manque de support auquel font face certaines

familles d’accueil. Une famille d’accueil, ayant recueilli deux enfants éprouvant des

difficultés de langage, aurait passé plusieurs mois à attendre que ses enfants puissent

bénéficier de soins appropriés. En effet, leur intervenante n’aurait pas prit en considération les

observations dont lui avait fait part la famille d’accueil sous prétexte que les enfants n’avaient

pas de troubles réels. La parole de la famille d’accueil était mise en doute et elle ne bénéficiait

d’aucun support de la part de l’intervenante (Répondants 5.8 et 5.9).

Les familles d’accueil soulignent le manque de suivi de la part des intervenants au

sujet des enfants, surtout lors du changement d’intervenants. Les enfants, les parents naturels

et les familles d’accueil ont chacun leur propre intervenant. Ainsi, il s’avère difficile de

concilier trois visions afin que le résultat soit un tout cohérent et efficace. De plus, lorsqu’il y

a changement d’intervenant, les méthodes d’intervention, le fonctionnement général, les

visites d’évaluation changent eux-aussi en fonction du caractère du nouveau travailleur social.

Les familles d’accueil se sentent alors perdues et ne savent plus comment répondre à ce que

l’on attend d’elles.

Les familles d’accueil considèrent également que les travailleurs sociaux manquent de

respect à leur égard. Il arrive que ces derniers, lors de leurs visites d’évaluation, nuisent à

l’autorité des parents d’accueil en intervenant à leur place auprès des jeunes. L’intervenant

« défendrait » ainsi l’enfant sans connaître toutes les raisons ayant motivé l’action du parent

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d’accueil. Le manque de respect et le manque de support ne font que démontrer le manque de

collaboration des travailleurs sociaux envers les familles d’accueil.

Les familles d’accueil reprochent aux travailleurs sociaux de les dénigrer. Ce

dénigrement serait dû, aux yeux des familles d’accueil, au fait que la plupart d’entre-elles

n’ont pas accompli de longues études. En discutant avec les intervenants, les familles

d’accueil se rendent compte que quoiqu’elles disent, leur expérience, leur vécu et leurs

opinions ne seront jamais pris en compte. Les intervenants expérimentés ou pas ont très

souvent le dernier mot. Cela crée de nombreuses tensions et frustrations auprès des familles

d’accueil qui ne voient pas reconnues leurs interventions concernant les enfants.

De ces dysfonctionnements découlent plusieurs autres problèmes interreliés. Les

familles d’accueil se sentent souvent incomprises par leurs intervenants car ceux-ci appliquent

les règlements sans se préoccuper du contexte, de la complexité des situations, du caractère de

chaque enfant placé et du fonctionnement des familles d’accueil. Ceci mènerait à des

confrontations entre les familles d’accueil et les travailleurs sociaux. S’il arrive qu’un enfant

sème le doute au sujet de la bienfaisance d’une famille d’accueil, le travailleur social serait

prêt à la fermer tout de suite sans avoir préalablement mené une enquête visant à corroborer

les dires de l’enfant. Les familles d’accueil n’ont ainsi jamais la chance de se défendre : dès

qu’elles sont accusées, elles sont immédiatement reconnues coupables.

Des familles d’accueil reprochent aux intervenants de mal organiser le départ des

enfants. Ils sont soit trop rapides, soit trop lents. Effectivement, des enfants seraient contraints

de quitter leur famille d’accueil sans aucune préparation. Une jeune fille atteinte de

déficiences légères fut d’ailleurs soudainement retirée de sa famille d’accueil, dont elle

bénéficiait des services depuis une dizaine d’années et qui était en voie d’adoption. Cette

séparation brutale fut vécue comme un drame pour l’enfant et la famille d’accueil.

Considérant que la petite fille était surprotégée, les intervenants optèrent pour son transfert

(pour son soi-disant bien-être) vers une autre famille d’accueil. Cet exemple traduit un certain

illogisme et un manque de jugement dont font souvent preuve les intervenants dans leurs

méthodes d’intervention.

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Un autre point est déploré par les familles d’accueil et résume l’ensemble des

dysfonctionnements dont elles nous ont fait part : il s’agit du manque de professionnalisme de

plusieurs intervenants. Il serait effectivement arrivé que des familles d’accueil se voient

démises de leurs fonctions sans raison, sans préavis. L’une d’entre-elles fut d’ailleurs fermée

par l’intermédiaire d’un message laissé sur le répondeur!

Plusieurs familles d’accueil dénoncent la malhonnêteté de certains intervenants. Une

famille d’accueil monoparentale, recueillant trois adolescents, demanda à son intervenante-

ressource un montant supplémentaire d’environ 300$ pour leur acheter des ensembles de ski.

L’intervenante en prit bonne note et lui dit d’attendre. Trois semaines plus tard, la famille

d’accueil était fermée sans aucun préavis, ni justification. Celle-ci regretta amèrement d’avoir

fait confiance à la travailleuse sociale en lui demandant de l’aide. Le chantage et les menaces

sont également des termes souvent mentionnés lors des groupes de discussion. Des familles

d’accueil se sentent harcelées et affirment vivre dans un climat de doute et de stress constant.

La peur fait partie du quotidien : « Nous vivons du chantage affectif, nous avons toujours peur

qu’on nous retire les enfants » (Répondant 3.2).

De nombreuses familles d’accueil se plaignent du mauvais emploi de la loi sur la

confidentialité. En effet, les familles d’accueil n’ont pas accès au dossier de l’enfant accueilli,

ce qui les pénalise sur plusieurs plans. Elles n’ont aucune information quant à la santé, ni la

carte d’assurance maladie des enfants qu’elles accueillent. Par exemple, une famille n’aurait

pas été mise au courant que l’enfant qu’elle accueillait était porteur d’une maladie

contagieuse. C’est en parlant avec l’enfant que la famille d’accueil aurait découvert que sa

mère et son frère étaient malades de cette même maladie. Indignée, la famille d’accueil a

requis le transfert de l’enfant. Selon les familles d’accueil, les intervenants sont souvent prêts

à mettre en jeu le bien-être physique de la famille et des autres enfants accueillis pour

préserver le droit à confidentialité.

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B. Les résultats de l’analyse

Cette section vise à faire l’interprétation des données, présentées antérieurement, à

vérifier nos hypothèses, et à apporter des réponses à notre question de recherche, qui est:

Comment les familles d’accueil régulières, établies dans quatre régions du Québec3, se

perçoivent elles-mêmes, et quelle est leur perception des autres familles d’accueil?

CHAPITRE IX : À propos des perceptions des familles d’accueil

Après avoir décrit les réponses obtenues lors des cinq groupes de discussion, il est

temps de faire un lien entre ce que les participants ont dit, ce que nous avons observé et

l’objectif de notre recherche.

9.1 Caractéristiques particulières des groupes de discussion

Les groupes de discussion nous ont permis de recueillir les perceptions des familles

d’accueil de différentes régions du Québec. Les réactions, les changements d’opinion, les

opinions minoritaires (objections formulées par quelques répondants), le degré d’intérêt et de

conviction des participants, l’intensité des émotions vécues, l’importance accordée à un sujet

et le langage non verbal (sourire, conversations parallèles), observées durant les groupes de

discussion seront analyses de manière détaillée. En effet, en se basant sur ce qui a été dit, il

sera possible de dégager la signification réelle des propos tenus par les familles d’accueil

interrogées. Chacun des groupes de discussion sera traité de manière individuelle afin de faire

ressortir les caractéristiques particulières de chacun des groupes.

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Focus Group 1 : Montréal matin

Le groupe de discussion, comptant 9 individus, s’est déroulé de 9h30 à 12h30, dans un

climat général très détendu. Un certain enthousiasme émanait de familles d’accueil présentes.

De plus, de nombreuses familles d’accueil se connaissaient déjà. Dès les premières questions,

les familles d’accueil n’éprouvaient pas beaucoup de gêne, et laissaient libre cours à leurs

idées. La majorité d’entre-elles n’exprimaient pas de la surprise en entendant les propos des

autres participants. En effet, soit elles étaient déjà au courant de leurs expériences, soit elles

les avaient déjà vécues. De manière générale, beaucoup d’empathie se dégageait du groupe.

D’autant plus, que 6 répondants sur 9 interrogés sont familles d’accueil depuis près de vingt

ans (entre 15 et 25 ans) et 5 répondants sur 9 ont entre 45 et 54 ans.

Toutefois, lorsque la question « Quelle est votre opinion sur les services que vous

rendez à la société ? » fut posée le répondant 1.4 exprima son désaccord avec le reste du

groupe : les autres participants ne la comprenaient pas de la même manière que lui. Mais il en

résulta que son opinion fut approuvée par les autres. L’ensemble des participants donnaient

l’impression de beaucoup aimer les enfants, leur travail en somme, mais, ils répondirent

unanimement haut et fort « NON » lorsqu’on leur demanda si ils étaient prêts à recommander

à quiconque de devenir famille d’accueil (question # 8). Sous l’effet percutant de la surprise,

tout le monde se mit à rire. La question # 3 portant sur les difficultés rencontrées en tant que

famille d’accueil a été la plus importante durant le groupe de discussion. En fait, les

participants y ont accordé beaucoup de temps, et ont fait part de leurs expériences.

Focus Group 2 : Montréal soir

Ce groupe de discussion, comptant 11 participants, a eu lieu de 19h30 à 22h30. Plus

de gêne se dégageait dès le départ de la rencontre. Mais cela s’est estompé dès la question # 3,

qui traitait des principales difficultés qu’ils éprouvaient. La plupart des participants ne se

connaissaient pas et nombreux furent ceux qui exprimèrent leur surprise à l’écoute des

expériences de certaines familles d’accueil. Comme le groupe de discussion précédent, la

question #8 « Recommanderiez-vous à des amis(es), connaissances ou proches de devenir des

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familles d’accueil? » engendra un « NON » unanime et en cœur. Notons que le groupe était

très homogène : la moyenne d’âge est plus jeune que celle du groupe du matin (35-44 ans), 10

participants sur 11 ont atteint le niveau Secondaire, et 8 d’entre eux sont familles d’accueil

depuis moins de 3 ans.

Focus Group 3 : Rivière-du-Loup

Ce groupe de discussion, composée de 14 participants, a duré de 13h30 à 17h30.

L’atmosphère était très lourde: on sentait un climat de méfiance avant et au tout début de la

rencontre entre les participants. Ce manque de confiance s’exprimait aussi par rapport à nous.

La question # 3, l’une des plus importante de notre groupe de discussion, ne suscitait pas

beaucoup d’entrain chez les participants. En effet, leurs réponses étaient très superficielles, et

il était clair que les familles d’accueil craignaient de raconter leur vécu. Après plusieurs

retours sur cette même question et leur avoir assuré que le contenu de la discussion

demeurerait confidentielle, une participante décida de laisser libre cours à ses expériences.

Les autres participants furent alors incitées à se prononcer aussi, et au fur et à mesure que les

histoires s’enchaînaient les familles d’accueil se sentaient à leur tour en confiance.

La question # 7, étant « Pensez-vous que les autres familles d’accueil vivent les

mêmes expériences que vous? », fut un élément révélateur quant à la situation dans laquelle

vivent les familles d’accueil de cette région. Confinées dans un climat de peur et d’isolement,

la majorité des familles d’accueil participantes ce sont rendues compte lors du groupe de

discussion qu’elles n’étaient pas seules à vivre les problèmes exposés. Nombreux furent les

répondants qui en ont profité pour ajouter des éléments concernant leur vécu.

Beaucoup d’émotion fut ressentie tout au long du groupe de discussion : plusieurs

participants ont pleuré ou avaient la larme à l’œil, d’autres exprimaient de la colère, du

découragement et de l’incompréhension. Ce groupe de discussion fut celui qui dura le plus

longtemps (près de 4 heures) : les familles d’accueil avaient besoin de parler davantage. Elles

nous ont d’ailleurs fait part du bien-être que cela leur a procuré de pouvoir partager et discuter

de leurs problèmes. La majorité des participants accueillent des enfants depuis au moins 11

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ans (8 sur 14), et vivent toutes sauf 3 d’entre-elles dans des villages avoisinant Rivière-du-

Loup.

Focus Group 4 : Lévis

Composé de 12 participants, le groupe de discussion s’est étendu sur 2 heures (9h30-

11h30). Un climat particulier se dégageait de ce groupe: quasiment tous les participants se

connaissaient avant la rencontre et vivaient très proches les uns des autres. Certaines

questions n’ont pas pu être approfondies par manque de temps (mauvaise interprétation au

sujet de la durée du groupe de discussion). De manière générale, les familles d’accueil

semblaient plus à l’aise financièrement que celles que nous avions interrogées les jours

précédents à Montréal et Rivière-du-Loup. De plus, à la lumière des réponses qui nous étaient

apportées, nous remarquions qu’ils bénéficiaient de rapports relativement satisfaisants avec

leurs intervenants. Compte-tenu de la proximité géographique des participants, peu d’effets de

surprise avaient lieu lorsque les uns ou les autres racontaient leur vécu.

Focus Group 5 : Québec

Ce groupe de discussion, composé de 11 participants, a eu lieu entre 19h30 à 22h. Une

atmosphère relativement détendue régnait dès le début de la rencontre. La majorité des

familles d’accueil ne se connaissaient pourtant pas. Les groupes d’âge des participants sont à

proportionnels (4 entre 35-44 ans, 4 entre 45-54 ans, et 3 entre 55-64 ans). Et l’ensemble de

ceux-ci apparaît plus scolarisé que ceux des autres groupes de discussion : 4 sont allés au

C.É.G.E.P et 2 à l’Université. Les réponses aux questions posées étaient pour la plupart

unanimes, excepté sur un point particulier où une participante affirmait qu’elle ne désirait pas

s’occuper d’un enfant âgé de plus de 12 ans, même si celui-ci aurait pu y demeurer jusqu’à 18

ans. Ceci provoqua une vive réaction chez les autres participants, qui ne comprenaient pas

comment elle faisait pour se détacher ainsi de l’enfant. À la suite de cette affirmation,

quelques discussions parallèles eurent lieu. Finalement, ce groupe de discussion fit ressortir

une différence existant entre les familles d’accueil de Québec et de Lévis par rapport à celles

interrogées dans les deux autres régions.

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9.2 Vérification des hypothèses

La mise en valeur des multiples caractéristiques des divers groupe de discussion, nous

a permis de dégager de nouvelles tangentes en lien avec les résultats présentés dans la section

A de la deuxième partie. Deux hypothèses avaient été notées au point 2.2 (première partie), il

nous incombe maintenant de les vérifier. Elles seront traitées une à une.

L’hypothèse 1 est la suivante :

« Les familles d’accueil perçoivent leur travail de façon négative parce qu’elles ne se sentent

pas reconnues par l’ensemble des intervenants ». Deux éléments de réponses peuvent être

apportés.

Dans un premier temps, à la lumière des résultats obtenus et de nos observations, il est

clair que les familles d’accueil sont fières de ce qu’elles font. Elles ne perçoivent donc pas

leur travail de manière négative. En effet, malgré toutes les épreuves auxquelles elles doivent

faire face quotidiennement (par rapport aux parents naturels, aux enfants, aux médias, aux

Centres Jeunesse), les familles d’accueil assurent qu’elles tirent de leur travail de nombreux

bienfaits.

Les familles d’accueil ont la conviction qu’elles font du bien aux enfants, qu’elles leur

permettent d’évoluer à leur rythme dans un environnement sain. Elles se considèrent comme

étant essentielles à la société, aux parents naturels et aux enfants car les services qu’elles

rendent ne se comptent pas. La plupart d’entre-elles sont d’ailleurs devenues familles

d’accueil pour des raisons humanitaires. Par exemple, la raison principale, énoncée par la

majorité des participants, est l’amour porté aux enfants. Cet amour, souvent réciproque,

évolue avec le temps en fonction de chaque enfant et de sa famille d’accueil et peut même

mener , si possible, à l’adoption.

De plus, en quittant une famille d’accueil, les enfants placés sont généralement très

reconnaissants et gardent, dans la mesure du possible, des liens avec leurs parents d’accueil.

D’autres raisons ayant également guidé le choix de quelques participantes peuvent être

mentionnées : certaines voulaient changer, voire sauver le monde; d’autres voulaient rendre à

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la société ce qu’elle leur avait donné, ou encore éprouvaient le besoin de se sentir utile,

d’avoir une maison remplie d’enfants ou de s’accomplir.

Des familles d’accueil soulignaient le fait qu’elle permettaient à la société et à l’État

de faire des économies substantielles quant à la prise en charge d’enfants en difficulté en leur

donnant l’occasion d’évoluer dans un milieu familial.

Par contre, dans un deuxième temps, malgré la fierté qui émane de leur travail, elles

pensent aussi qu’elles ne rendent pas de services. En fait, elles pensent que les gens les

perçoivent comme une nuisance aux yeux de la société. Les familles d’accueil ne se sentent

pas comprises et acceptées par leur famille, ni par leurs amis, et encore moins par l’ensemble

de la société. Ce sentiment de rejet est amplifié par les médias qui alimentent la

marginalisation et la dévalorisation des familles d’accueil au sein la société.

Les familles d’accueil se sentent rabaissées par les propos et actions perpétrés par les

intervenants. Elles éprouvent un véritable sentiment d’infériorité par rapport à ces derniers,

accentué par le manque de collaboration et de respect des travailleurs sociaux à leur égard.

Les familles d’accueil ne comprennent pas comment il se fait que personne (même des

professionnels) ne puissent se rendre compte de la charge et des efforts à fournir qu’implique

ce type de ressource familial.

L’hypothèse 2 est la suivante :

« Le manque de communication maintient l’ensemble des familles d’accueil du Québec

dans un état d’insécurité et d’impuissance face au malaise existant ».

Cette hypothèse a été confirmée à la suite des groupes de discussion tenus à Lévis et à

Québec. Il est apparu clairement que l’intensité des problèmes vécus n’est pas comparable à

celle ressentie par des familles d’accueil interrogées à Montréal et à Rivière-du-Loup, et cela

malgré le fait que plusieurs participants vivent des difficultés semblables.

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À Lévis, la proximité et la camaraderie de certains participants facilitent la

communication et l’entraide; ce qui leur permet de mieux s’organiser face aux difficultés, de

connaître davantage le fonctionnement des Centres Jeunesse et de ne pas se laisser mener

aveuglement par les intervenants. De plus, de nombreux participants au groupe de discussion

de Lévis sont à la pré-retraite, voire à la retraite (pour certains) ce qui, d’une manière, les

avantage par rapports aux autres participants de notre échantillon. En effet, ils bénéficient de

plus de temps pour s’occuper des problèmes qui pourraient survenir. Étant donné leur revenu

(retraite), ils sont plus à l’aise financièrement et donc plus indépendants face aux menaces de

certains travailleurs sociaux. Ils nous ont d’ailleurs fait part que le Directeur du Centre

Jeunesse de leur région, était un fervent défenseur des familles d’accueil. Cela les aide

grandement à faire reconnaître la valeur de leurs services et influence favorablement les

opinions des intervenants.

À Québec, on dénote aussi que les familles d’accueil ne vivent pas les difficultés à la

même intensité qu’à Montréal ou à Rivière-du-Loup. Presque aucun participant ne se

connaissait lors de la rencontre, mais il semble y avoir un bonne communication entre les

familles d’accueil. En fait, en cas de problème, elles peuvent parler entre-elles, bénéficier du

support de leur association régionale et aussi celui de la Fédération des familles d’accueil du

Québec (F.F.A.Q.), basée à Québec. La directrice générale de la F.F.A.Q., Mme Huguette

Blais, nous faisait d’ailleurs remarquer qu’un effort considérable de conscientisation du rôle et

des difficultés des familles d’accueil est en marche depuis plus de dix ans. Ainsi, Québec et

ses régions environnants ont tiré profit des retombées positives d’un tel processus.

Les intervenants représenteraient le noyau du problème. Divers exemples illustrent cet

état de fait. Premièrement, les familles d’accueil ressentent un manque de confiance de la part

de leurs travailleurs sociaux. De ce fait, la parole des familles d’accueil est toujours mise en

doute : que ce soit par rapport à l’enfant placé, le parent naturel ou l’intervenant-ressource, les

familles d’accueil subissent toujours les conséquences de ce rapport de force.

Deuxièmement, dans d’autres cas, bien que l’entente avec un travailleur social soit

bonne, la famille d’accueil vit dans un stress constant car celui-ci peut être muté à tout

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moment. L’arrivée d’un nouvel intervenant implique souvent une discontinuité et un

remaniement complet de l’organisation des interventions. Et ce, malgré le fait que l’enfant

soit placé dans sa famille d’accueil depuis plusieurs années et que cette dernière soit une

famille d’accueil d’expérience. Ce manque de continuité crée un plus grand éloignement et

empêche l’établissement de rapports harmonieux entre les familles d’accueil et leur travailleur

social.

Troisièmement, de nombreuses familles d’accueil se sont plaintes du manque de

respect : les ententes prises avec elles ne sont pas respectées. En effet, en devenant famille

d’accueil, les travailleurs sociaux qui les accréditent leurs promettent un nombre déterminé

d’enfants, des placements à long-terme, un support professionnel et les encouragent à

s’investir entièrement. Lors de leur recrutement, les futures familles d’accueil sont

enthousiasmées par les services qu’elles rendront, mais se rendent vite compte de l’écart

important qui existe entre le discours et la réalité.

Quatrièmement, déçues par les fausses promesses qu’on leur avait faites, les familles

d’accueil revendiquent plus de moyens financiers, davantage de services professionnels

spécialisés et de collaboration avec leurs intervenants. Ce climat s’avère propice aux

confrontations entre les travailleurs sociaux et les familles d’accueil. Certains points

conflictuels peuvent amener des intervenants à menacer et faire usage du chantage pour

reprendre le contrôle de la situation. Dans certains cas, des mésententes auraient pour

conséquence la fermeture de familles d’accueil sans raisons valables.

Enfin, des familles d’accueil auraient reçu l’interdiction de la part des intervenants de

communiquer entre-elles. Les travailleurs sociaux concernées justifient souvent cette

interdiction en se rapportant à la loi de la confidentialité. Les familles d’accueil, isolées les

unes des autres et par peur de perdre les enfants qu’elles accueillent, vivent alors dans

l’ambivalence : vaut-il mieux prendre le risque de communiquer ou vaut-il mieux éviter toute

communication avec leur semblables ? Ce climat de peur est justement dénoncé par les

familles d’accueil qui ont accepté de faire partie des groupes de discussion et de bénéficier de

l’expérience des autres.

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L’ensemble des problèmes cités dans les pages précédentes reflètent le malaise qui

existe au sein des familles d’accueil interrogées. Cet état d’inquiétude et de mécontentement

est lié en grande partie à l’attitude adoptée par les intervenants envers les familles d’accueil.

En fait, une grande majorité d’entre eux ne reconnaissent pas les services rendus et manquent

souvent de jugement lors de situations difficiles. Les travailleurs sociaux représentent une

sorte de catalyseur entre les familles d’accueil, les parents naturels et les enfants placés et

influencent les relations que ces derniers peuvent avoir entre eux. Lorsqu’un intervenant

maintient une bonne entente et apporte son soutien à la famille d’accueil, les problèmes entre

les enfants placés ou les parents naturels se règlent généralement plus facilement. Comme les

groupes de discussion l’ont démontré, le malaise ne situe pas principalement au niveau des

difficultés rencontrées avec les enfants, les parents naturels, ou encore les médias, mais au

niveau des rapports négatifs entretenus avec les travailleurs sociaux.

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CHAPITRE X : Le paradoxe des familles d’accueil

Les familles d’accueil vivent de nombreuses ambivalences. Tout d’abord, elles

effectuent les tâches générales d’une famille conventionnelle, et ensuite, elles agissent en tant

que techniciennes en apportant un support favorable au développement de l’enfant. Mais en

réalité elles ne sont ni la vraie famille des enfants, ni de véritables techniciennes. De plus, la

majorité des familles d’accueil ne recommanderaient à quiconque d’exercer un tel métier.

Toutefois elles affirment aimer leur travail et en tirent de la fierté. Ce chapitre tâchera de

mettre en lumière les éléments expliquant les paradoxes vécus par les familles d’accueil.

10.1 Famille ou travailleur autonome : une énigme

L’ethnologue Robert Murdock (1999) proposa la définition suivante de la famille :

« La famille est un groupe caractérisé par la résidence commune et la coopération d’adultes

des deux sexes et des enfants qu’ils ont engendrés ou adoptés » (p.165)8. La famille a des

responsabilités particulières dans le fonctionnement de l’organisation sociale. En effet, elle se

voit attribuer diverses fonctions, dont celles de mettre les enfants au monde, de veiller à leur

bien-être et, en partageant, avec l’école, celle d’assurer leur éducation. La famille

conventionnelle a deux rôles à jouer: premièrement, apporter des soins aux enfants

(physiques, affectifs, éducationnel), et deuxièmement s’occuper des tâches ménagères

(préparation des repas, entretien vestimentaire, organisation de la maison etc.)

À l’aide des groupes de discussion, nous avons noté que les familles d’accueil et les

familles conventionnelles ont des rôles similaires. Les premières accomplissent la majorité

des tâches des familles conventionnelles mais elles n’ont pas les mêmes droits. Elles ne seront

d’ailleurs jamais légalement reconnues, à moins qu’elles aient recours à l’adoption.

8 Définition extraite du Dictionnaire de Sociologie (1999), Éditions Hatier, 352 pages

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De nombreuses familles d’accueil éprouvent un sentiment d’ambivalence qui augmente

continuellement d’intensité. Au fil du temps, elles s’attachent aux enfants qu’elles accueillent,

et souvent, du jour au lendemain, peuvent perdre leur garde. Ces familles, vivant dans un

climat constant de stress, sont alors davantage enclines à céder au chantage et menaces des

intervenants pour conserver la garde des enfants. Elles font d’ailleurs généralement partie des

familles de la Catégorie 1, qui pour la plupart se considèrent comme de vraies familles.

En effet, nous avions dégagé deux catégories, qui regroupaient les raisons ayant

poussé les participants des groupes de discussion à devenir famille d’accueil. Il s’agit de

celles qui considèrent leurs actions comme une activité sociale (Catégorie 1) et de celles qui

les considèrent comme un travail autonome (Catégorie 2).

Des familles d’accueil se voient comme des professionnels qui ont pour objet la garde

et le suivi des enfants en difficulté. Ainsi, malgré le fait qu’elles aiment les enfants, elles

gardent toujours à l’esprit que ceux-ci ne lui sont confiés que de manière temporaire. Cela

n’empêche pas pour autant qu’elles vivent les mêmes problèmes que les familles d’accueil de

la Catégorie 1. Cependant, elles sont plus en mesure de se défendre lors de conflits avec les

intervenants.

Mais qu’est-ce qui laisse donc croire aux familles d’accueil de la Catégorie 2 qu’elles

sont des techniciennes ? Afin de répondre à cette interrogation, comparons les tâches des

familles d’accueil à celles des garderies en milieu familial. En fait, la famille de garde offre

aux enfants, un milieu de vie qui se rapproche du leur. Les membres de la famille de garde et

les lieux physiques contribuent également à composer un environnement naturel. Par ailleurs,

les apprentissages se font à partir des activités quotidiennes. Puisque les relations sont

personnalisées et le service individualisé, cet environnement convient parfois aux enfants qui

ont des besoins particuliers. Ce qui différencie la garde en milieu familial reconnue de toute

autre famille de garde, c’est d’une part la responsabilité conférée par la loi de fournir des

services favorisant le développement global de l’enfant, et d’autre part, le fait que les services

de garde soient supervisée par des agences. Ces familles peuvent accueillir jusqu’à neuf

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enfants (pour 2 adultes), de la naissance jusqu’à 12 ans, de façon régulière et dans une

résidence privée.

Chaque personne responsable de la famille de garde a un statut de travailleur

autonome, est rémunérée, « c’est-à-dire qu’elle est considérée comme un travailleur

indépendant aux fins de l’impôt sur le revenu » (Deslongchamps, 1988, p. 8)9 et est

assujettie à la Loi sur les normes du travail, du Code du travail, et la Commission de la Santé

et Sécurité du Travail (C.S.S.T).

Nous remarquons une fois de plus de nombreuses similitudes dans les tâches des

familles d’accueil et des familles de garde. Bien que leurs tâches soient comparables, les

familles d’accueil ne bénéficient pas des avantages et du statut reliés au travailleur autonome.

Elles ne sont pas couvertes par des lois gouvernementales qui régissent le travail. La charge

de travail n’est pas non plus la même : les familles de garde s’occupent des enfants au

maximum 10 heures par jour et cela cinq jours par semaine. Les familles d’accueil, quant à

elles, doivent travailler 24 heures par jour, et 7 jours par semaine. De plus, elles ne sont pas

rémunérées car ce qu’elles perçoivent n’est rien d’autre que des allocations pour subvenir aux

dépenses supplémentaires engendrées par les enfants accueillis. En considérant leurs

fonctions, les familles d’accueil pourraient être comparées à des familles de garde, soit

comme des travailleurs autonomes. Cependant, ce n’est pas le cas.

Finalement, une famille d’accueil fournit des services officiellement non reconnus,

mais qui sont tout à fait comparables à ceux rendus par des familles conventionnelles. Les

familles d’accueil vivent dans une situation paradoxale (et cela indépendamment des

catégories dans lesquelles elles ont été regroupées) : elles se retrouvent involontairement à la

frontière qui sépare les familles conventionnelles et les familles de garde.

9 Extrait de La mise sur pied d’une agence de services de garde en milieu familial (1988), document officiel, rédigé pour l’Office des services de garde à l’enfance, Québec

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10.2 Aimer être famille d’accueil et ne recommander à personne de le devenir

Les groupes de discussion ont démontré que l’amour porté à l’égard des enfants

qu’elles accueillent est l’élément principal qui pousse les familles d’accueil à le demeurer.

Elles éprouvent de la fierté dans le travail qu’elles réalisent : les familles d’accueil apportent

quelque chose aux enfants en difficulté. Elles accomplissent en fait toutes les tâches,

normalement attribuées aux parents biologiques, mais elles ne constituent qu’un transit pour

ces jeunes qui, à l’âge de 18 ans, seront dans la majorité des cas livrés à eux-mêmes.

Les familles d’accueil déclarent être heureuses grâce aux services qu’elles rendent aux

enfants. En effet, la plupart des jeunes en difficulté accueillis chez elles partent en gardant de

bons souvenirs, et témoignent leur reconnaissance en gardant contact avec elles. Les familles

d’accueil sentent ainsi que leurs efforts et le temps qu’elles ont passé auprès de ces enfants ne

sont pas perdus à leur départ. Enfin, bien qu’elles ne soient pas officiellement reconnues pour

leurs fonctions, cet effet est contrebalancé et les familles d’accueil se sentent valorisées, par le

fait que les enfants sont reconnaissants.

Malgré les divers points mentionnés ci-haut, les familles d’accueil ne seraient guère

prêtes à recommander leur choix à d’autres personnes. Quoiqu’elles aiment ce qu’elles font,

elles sont tiraillées par les problèmes qu’elles ont tout particulièrement avec les travailleurs

sociaux, et dû à leur manque de statut. Plusieurs ne savent si elles peuvent se considérer

comme une véritable famille pour les jeunes qu’elles accueillent, ou si elles ne remplissent

que l’unique fonction de techniciennes. Tel que nous l’avons signalé, les familles d’accueil ne

perçoivent aucun salaire. Ceci fait en sorte qu’elles ne sont pas des travailleurs autonomes

pouvant alors bénéficier d’un statut et d’une couverture légale. Elles ne sont pas non plus

considérées comme les familles naturelles des enfants. C’est en raison de leur position

ambiguë que les familles d’accueil ne recommanderaient à quiconque de choisir la même voie

qu’elles.

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En ayant explicité les difficultés auxquelles font face des familles d’accueil, on

pourrait se demander pourquoi celles qui le sont actuellement le demeurent encore. Afin de

répondre à cette question, il est possible de se référer à Marcel Mauss (1996)10 et les

conclusions qu’il a tirées dans son Essai sur le don . En effet, le travail effectué par les

familles d’accueil peut être comparé à un acte de charité. Le don est « un acte volontaire,

individuel ou collectif, qui peut avoir ou non avoir été sollicité par celui, celles ou ceux qui les

reçoivent » (Godelier, 1996, p.20). De plus, il rapproche les protagonistes par le biais du

partage qui existe entre eux : l’acte de donner, pour être véritablement un don, doit être

volontaire et personnel, sinon il se transforme en autre chose (impôt, don forcé, exaction etc.).

Les familles d’accueil effectuent des dons aux enfants placés, comme les familles

naturelles. Néanmoins, une différence peut être dégagée : un parent naturel donne sans

compter à ses enfants, et il sait que si un jour un événement malencontreux se produit, ils

pourront lui porter secours. Par contre, un parent d’accueil donne aussi aux enfants, mais il

n’a aucun espoir qu’un jour ou l’autre, un des enfants qu’il a accueilli viendra à son aide.

Les familles d’accueil vivent donc dans un deux paradoxes : d’une part, elles aiment

ce qu’elles font et en sont fières, et elles ne désirent pas que leur entourage les imite. Mais,

d’autre part, malgré ce qu’elles peuvent endurer, elles sont incapables de laisser tomber les

services qu’elles rendent. Une ancienne famille d’accueil manifestait d’ailleurs l’arrêt de ses

fonctions comme une victoire sur quelque chose. Ce sentiment de libération apparaît comme

la fin d’une dépendance, probablement affective envers les enfants.

10 Son œuvre, Essai sur le don, est retravaillée par Maurice Godelier dans L’énigme du don (1996), Éditions Fayard, Paris, 315 pages

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CONCLUSION

Ce rapport nous permet de visualiser toutes les démarches suivies depuis le début de

notre recherche, en septembre 2001 et aussi de tirer des conclusions à partir de notre analyse.

Voici nos conclusions.

La Fédération des familles d’accueil du Québec (F.F.A.Q), est un organisme qui vise à

rassembler, accompagner et soutenir les familles d’accueil. Elle leur fournit de l’assistance

quelques soient leurs difficultés, et de manière facultative une formation en vue d’augmenter

leurs compétences. En fait, la F.F.A.Q cherchait à comprendre l’origine de l’important

malaise ressenti par la majorité des familles d’accueil. Afin d’y parvenir, elle nous a confié le

mandat de recueillir les perceptions que les familles d’accueil ont d’elles-mêmes et des autres

familles d’accueil. Nous avons dégagé deux hypothèses: dans un premier temps, nous avons

supposé que les familles d’accueil perçoivent leur travail de façon négative parce qu’elles ne

se sentent pas reconnues par l’ensemble des intervenants. Enfin, nous avons jugé probable que

le manque de communication maintient l’ensemble des familles d’accueil du Québec dans un

état d’insécurité et d’impuissance face au malaise existant.

Les objectifs de l’enquête s’inscrivaient donc dans ces deux hypothèses : notre tâche

était de confirmer ou d’infirmer nos suppositions. Pour cela, nous avons organisé cinq

groupes de discussion (focus groups), dans les villes de Montréal, Québec, Rivière-du-Loup et

Lévis auxquels 57 individus ont participé. Les huit questions posées lors des groupes de

discussion nous ont permis de dégager les représentations, les valeurs et les principales

difficultés vécues par les familles d’accueil interrogées.

Par la suite, en analysant les données recueillies, nous avons été en mesure d’apporter

des éléments de réponse à notre question de recherche, qui est la suivante : « Comment les

familles d’accueil régulières, établies dans quatre régions du Québec, se perçoivent elles-

mêmes, et quelle est leur perception des autres familles d’accueil? ». Les familles

d’accueil ont une opinion positive d’elles-mêmes et des tâches qu’elles accomplissent. La

plupart d’entre-elles ont une histoire qui explique les raisons qui les ont incitées à devenir

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famille d’accueil. Ce besoin de donner à autrui constitue le pilier de la famille d’accueil. Mais

c’est aussi cet acte qui leur nuit, et les fait vivre dans l’ambivalence. Les familles d’accueil

sont donc, d’un côté, fières de ce qu’elles accomplissent, et de l’autre, se demandent si ce

qu’elles font en vaut vraiment la peine. Étant conscientes que leurs semblables vivent les

mêmes situations qu’elles, les familles d’accueil se sentent mal placées pour porter des

jugements ou accusations sur leurs actions. Elles les perçoivent ainsi de manière positive.

Les familles d’accueil vivent deux paradoxes : sont-elles des familles ou des

travailleurs autonomes, et comment se fait-il que l’on peut aimer être famille d’accueil tout en

ne recommandant à personne de le devenir? Une réponse à ces interrogations aiderait

surement les familles d’accueil à mieux se situer et comprendre ce que l’on attend réellement

d’elles. La Fédération des familles d’accueil du Québec et les familles d’accueil elles-mêmes

ont entreprit de nombreuses démarches en vue que ces dernières obtiennent un vrai statut mais

il reste encore plusieurs obstacles à franchir.

Afin de rendre compte du contexte actuel dans lequel vivent les familles d’accueil, des

articles de journaux ont été joints en annexe. Nous recommandons d’en prendre connaissance

car ceux-ci démontrent la situation souvent précaire des familles d’accueil du Québec. Ils

soulignent aussi le manque de reconnaissance auquel ces dernières sont confrontées

quotidiennement. De plus, nous remarquons que les familles d’accueil sont de plus en plus

actives. En se regroupant et en faisant appel aux médias, elles sortent de l’ombre : les familles

d’accueil désirent désormais faire part de leurs difficultés et de leur mécontentement à

l’ensemble du réseau et de la population.

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BIBLIOGRAPHIE

A. Ouvrages de référence

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Denise JODELET (dir.) Les représentations sociales, Paris: PUF, Sociologie d’aujourd’hui

:187-203.

JODELET, Denise (1991), Les représentations sociales, Presses universitaires de France,

Paris, 424 pages

GODELIER, Maurice (1996), L’énigme du don, Éditions Fayard, Paris, 315 pages

OFFICE DES SERVICES DE GARDE À L’ENFANCE (1988), La mise sur pied d’une

agence de services de garde en milieu familial, Québec, 66 pages

MOSCOVICI, Serge (1961), La psychanalyse. Son image et son public, Presses universitaires

de France, Paris, 650 pages

SANS, Pierre, Dr. (1991), Familles d’accueil, un métier, Éditions Centurion, Paris, 264 pages

SANS, Pierre, Dr. (1991), Soins et placements en famille d’accueil, Ottawa, Agence d’Arc

INC. , 346 pages

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67

B. Ouvrages consultés

AUGER, Micheline, Micheline TURGEON et Ghislaine LÉVEILLÉ (2001), Le statut de la

ressource de type familial, Québec, 30 pages

CENTRE DE JEUNESSE (1998), Contrat famille d’accueil, Québec, 17 pages

ÉQUIPE « JEUNES ET FAMILLES EN TRANSITION », (1998). Les familles d’accueil

pour jeunes en difficulté au Québec, Centre de recherche sur les services communautaires,

145 pages

GREENBAUM, Thomas (2000), Moderating focus groups, Thousand Oaks, Californie Sage

Publications, 249 pages

GROUPE DE TRAVAIL SUR LA POLITIQUE DE PLACEMENT EN FAMILLE

D’ACCUEIL (2000), Analyse de la politique de placement en ressource de type familial,

Centre jeunesse de Québec, Bibliothèque Nationale du Québec, 102 pages

MASSICOTTE, Julien (2001), Le degré de satisfaction des familles d’accueil Québécoises,

Québec : Université Laval, Département de Sociologie, 18 pages

MINISTÈRE DE LA SANTÉ ET DES SERVICES SOCIAUX (1993), Guide d’application et

de gestion du Cadre de catégorisation des services dispensés par les ressources de type

familial. Québec, Direction des communications. Bibliothèque Nationale du Québec, 40 pages

MINISTÈRE DE LA SANTÉ ET DES SERVICES SOCIAUX (1992), La pratique

professionnelle et la ressource de type familial. Québec, Direction générale de la prévention

et des services communautaires. Bibliothèque Nationale Du Québec, 71 pages

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68

MINISTÈRE DE LA SANTÉ ET DES SERVICES SOCIAUX (2000), Indicateurs repères

sur l’application de la Loi sur la protection de la jeunesse 1993-1994 à 1997-1999. Québec,

ministère de la Santé et des Services sociaux – Services des indicateurs et mesure de la

performance – Direction de la gestion de l’information, janvier, 70 pages

MORGAN, David L., (1997), Focus groups as qualitative research, Thousand Oaks,

Californie, Sage Publications, 80 pages

MOSCOVICI, Serge (1992), Psychologie sociale, Presses universitaires de France, Paris, 596

pages

RAPPORT D’ANALYSE DE LA SITUATION D’EXERCICE DE LA FONCTION DE

FAMILLE D’ACCUEI, (1993), Techniques d’accueil, Gouvernement du Québec, 53 p.

SAMSON, Claudette (2001), extrait du quotidien Le Soleil du jeudi 04 octobre, «Québec

délaisse les familles d’accueil », p. A 5

SAMSON, Claudette (2002), extrait du quotidien Le Soleil du vendredi 01 février , «Ras-le-

bol chez les familles d’accueil », p. A 1-2

SAMSON, Claudette (2002), extrait du quotidien Le Soleil du samedi 02 février, «Le réseau

des familles d’accueil seraient menacé», p. A 5

SAMSON, Claudette (2002), extrait du quotidien Le Soleil du lundi 4 février, «Pas question

de reculer», p. A 5

STEINHAUER, Paul D. (1996), Le moindre mal : la question du placement de l’enfant,

Montréal, Les Presses de l’Université de Montréal, 463 pages

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ANNEXES

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Annexe 1

Schéma d’opérationnalisation

CONCEPT

DIMENSIONS COMPOSANTES INDICATEURS SOUS-INDICATEURS

Positives

OPINIONS

Négatives

Psychologique (Rationnelle)

SUJET LUI-MÊME (Histoire, vécu)

CROYANCES (Valeurs) Sociale

(Institutionnelle)

Honnêteté Respect Responsabilité Engagement Partage Amour Justice Loyauté Persévérance

Connaissances générales

Instruction Culture Milieu de vie

Médias Internet Télévision Radio Journaux

INFORMATIONS

Interactions entre les individus Positives

REPRÉSENTATIONS

SOCIALES

SYSTÈME SOCIAL ET IDÉOLOGIQUE

ATTITUDES (Comportements) Négatives

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Annexe 2

Schéma des «focus groups »

Objectifs de la recherche

Déroulement de la rencontre Introduction

Présentation

Enregistrement Obligatoire 10 minutes

De 9h00 à 9h10

Mot de bienvenue et présentation des animatrices On demande à chaque participant de se présenter brièvement Questions ?

Qui à proposer ? Acclimatation

Question # 1

Pourquoi ?

Obligatoire 20 minutes

De 9h10 à 9h30

Pourquoi avez-vous choisi de devenir famille d’accueil ? Donnez les principaux

éléments qui ont été pris en considération ?

Quelles valeurs doit posséder une famille d’accueil ? Discussion

réchauffement

Question # 2

Obligatoire 20 minutes De 9h30 à 9h50

Quels sont les valeurs personnelles les plus

importantes pour vous ? Des gens n’ayant pas ces

valeurs, pourraient-ils être de bonnes familles d’accueil ?

Autres familles d’accueil ?

Aux intervenants ? Discussion

développement

Question # 3

Aux parents naturels ?

Facultative 20 minutes De 9h50 à 10h10

Rencontrez-vous des difficultés importantes en tant

que famille d’accueil ?

Si oui, spécifiez Aux enfants recueillis ?

Positive?

Discussion développement

Question # 4

Facultative 20 minutes De10h10 à 10h30

Quelle est votre opinion sur les services que vous rendez à

la société ? Négative ?

Pause café

Obligatoire 20 minutes

Invitez les participants à prendre des rafraîchissements

Se lever et en profiter pour se

dégourdir un peu

Café, eau, jus Beignes

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De 10h30 à 10h50

Discussion confrontation

Question # 5 Expériences positives

Obligatoire 20 minutes De 10h50 à 11h10

Quels sont les épreuves passées ou présentes qui vous ont le plus marqué en tant que

famille d’accueil ? Expériences négatives

Internet ?

Télévisions ? Discussion

confrontation

Question # 6

Journaux ? Facultative 20 minutes

De 11h10 à 11h30

Pensez-vous que les médias influencent les interactions

que les familles d’accueil ont les unes envers les autres?

Radios ?

Discussion confrontation

Question # 7 Expériences positives

Obligatoire 20 minutes De 11h30 à 11h50

Pensez-vous que les autres familles d’accueil vivent les

mêmes expériences que vous?Expériences négatives

Conclusion Question # 8

Donnez les principaux avantages

Facultative 20 minutes De 11h50 à 12h10

Recommanderiez-vous à des amis(es), connaissances ou

proches de devenir des familles d’accueil?

Donnez les principaux inconvénients

Positive ? Remerciement Questionnaire à remplir

Obligatoire 20 minutes De 12h10 à 12h30

Quels sont vos impression sur la rencontre?

Remplir le questionnaire Sur les renseignements

personnels ? Négative ?

Adresse Internet

De 12h30 à 13h00

Leur demander s’ils sont intéressé à recevoir une copie de notre rapport de recherche

en avril 2002 ?

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Annexe 3

Échantillon du « Focus Group » numéro 1

29 janvier 2002 en matinée de 9h30 à 12h30

Secteur de Montréal 9 participants

No Classe d’âge

Lieu de résidence Plus haut niveau de scolarité

Genre de famille

d’accueil

Depuis combien d’années

Nombre d’enfants recueillis

Type

1.1

55-64 ans Montréal x Transition 25 ans + de 5 4

1.2

45-54 ans St-Hubert Secondaire Transition 22 ans + de 5 4

1.3

45-54 ans Montréal Université Régulière 15 ans + de 5 5

1.4

45-54 ans Longueil Secondaire Régulière 24 ans 2 à 4 2

1.5

35-44 ans Lachenaie C.E.G.E.P. Évaluation 16 ans 2 à 4 4

1.6

35-44 ans Lachenaie Secondaire Régulière 7 ans 2 à 4 5

1.7

25-34 ans Montréal Secondaire Régulière 3 ans + de 5 2

1.8

45-54 ans Montréal C.E.G.E.P. Régulière 20 ans + de 5 2

1.9

x x x x x x x

« idéal-types » des familles d’accueil

Type 1 = Problèmes de procréation/ adoption Type 2 = Accomplissement personnel/ sens humanitaire Type 3 = Par tradition/ voisins/ amis /parents Type 4 = Revenu d’appoint/ rester à la maison Type 5 = Avoir un vrai travail

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Échantillon du « Focus Group » numéro 2 29 janvier 2002 en soirée de 19h30 à 22h30

Secteur de Montréal 11 participants

No Classe d’âge

Lieu de résidence Plus haut niveau de scolarité.

Genre de famille

d’accueil

Depuis combien d’années

Nombre d’enfants recueillis

Type

2.1

45-54 ans P.A.T. Secondaire Dépannage 2 ans 2 à 4 2

2.2

35-44 ans Montréal Secondaire Régulière 6 ans 1 2

2.3

35-44 ans Montréal Secondaire Régulière 3 ans + de 5 2

2.4

35-35 ans Montréal Secondaire Régulière 3 ans + de 5 3

2.5

45-54 ans Montréal Secondaire Régulière 2 ans 2 à 4 2

2.6

25-34 ans Verdun Secondaire Régulière 2 ans 2 à 4 2

2.7

25-34 ans Verdun Secondaire Régulière 2 ans 2 à 4 3

2.8

45-54 ans Montréal C.E.G.E.P. Déficient 2 ans 2 à 4 5

2.9

35-44 ans Verdun Secondaire Régulière 2 ans 1 3

2.10

35-44 ans Verdun Secondaire Régulière 2 ans 1 2

2.11

45-54 ans St-Hubert Secondaire Transition 22 ans + de 5 4

« idéal-types » des familles d’accueil

Type 1 = Problèmes de procréation/ adoption Type 2 = Accomplissement personnel/ sens humanitaire Type 3 = Par tradition/ voisins/ amis /parents Type 4 = Revenu d’appoint/ rester à la maison Type 5 = Avoir un vrai travail

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Échantillon du « Focus Group » numéro 3 31 janvier 2002 en après-midi de 13h30 à 17h30

Secteur de Rivière-du-Loup

14 participants

No Classe

d’âge Lieu de résidence Plus haut

niveau de scolarité.

Genre de famille

d’accueil

Depuis combien d’années

Nombre d’enfants recueillis

Type

3.1 35-44 ans

Témiscouata Secondaire Urgence 2-5 ans 0 2

3.2 45-54 ans

Ste-Luce Université Régulière 9 ans 4 2

3.3

45-54 ans Pointe-au-père Université Régulière 11 ans et + 4 1

3.4 45-54 ans

St-Eurisèle Secondaire Régulière 25 ans 0 2

3.5 45-54 ans

Pohénégamook Secondaire Régulière 19 ans 1 2

3.6 25-34 ans

St-Élzéar École de métier

Régulière 2 ans 0 1

3.7 45-54 ans

St-Élzéar Secondaire Régulière 11 ans et + 0 2

3.8 55-64 ans

St-Honoré Primaire Régulière 11 ans et + 2 1

3.9 45-54 ans

Rivière-du-Loup C.E.G.E.P. Régulière 11 an et + 9 2

3.10

35-44 ans Rivière-du-Loup Secondaire Régulière 3 ans 1 1

3.11 55-64 ans

St-Juste-du-Lac Secondaire Régulière 11 ans et + 2 1

3.12 35-44 ans

Amqui Secondaire Régulière 6-10 ans 4 1

3.13 35-44 ans

Cacouna CÉGEP Régulière 11 ans et + 2 1

3.14 35-44 ans

Rivière-du-Loup Secondaire Régulière 6-10 ans 2-4 1

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Échantillon du « Focus Group » numéro 4 12 février 2002 en matinée soit de 9h30 à 11h30

Secteur de Lévis 12 participants

No Classe

d’âge Lieu de résidence Plus haut

niveau de scolarité.

Genre de famille d’accueil

Depuis combien d’années

Nombre d’enfants recueillis

type

4.1 55-64 ans St-Rédempteur Secondaire Réadapta-tion

6-10 ans 2-4 3

4.2 55-64 ans Charny Université Réadapta-tion

10 ans 2-4 2

4.3

45-54 ans St-Rédempteur Secondaire Régulière 6-10 ans 2-4 2

4.4

55-64 ans St-Rédempteur Secondaire Réadapta-tion

6-10 ans 2-4 2

4.5

45-54 ans St-Rédempteur Université Régulière - d’un an 2-4 3

4.6

45-54 ans St-Rédempteur C.E.G.E.P. Régulière 6-10 ans 2-4 2

4.7

25-34 ans St-Rédempteur École de métier

Régulière 2-5 ans 2-4 3

4.8

35-44 ans St-Rédempteur Secondaire Régulière 2-5 ans 2-4 3

4.9

65 ans et + St-Romuald Université Régulière 2-5 ans 1 2

4.10 x x x x x x

x

4.11 x x x x x x

x

4.12

x x x x x x

x

« idéal-types » des familles d’accueil

Type 1 = Problèmes de procréation/ adoption Type 2 = Accomplissement personnel/ sens humanitaire Type 3 = Par tradition/ voisins/ amis /parents Type 4 = Revenu d’appoint/ rester à la maison Type 5 = Avoir un vrai travail

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Échantillon du « Focus Group » numéro 5 12 février 2002 en soirée soit de 19h30 à 22h00

Secteur de Québec

11 participants

No Classe

d’âge Lieu de résidence Plus haut

niveau de scolarité.

Genre de famille d’accueil

Depuis combien d’années

Nombre d’enfants recueillis

type

5.1

55-64 ans Beauport Secondaire Déficient 20 ans 1 2

5.2

35-44 ans St-Émile C.E.G.E.P. Déficient 11 ans 4 5

5.3

45-54 ans St-Émile Secondaire Régulière 6 ans 1 3

5.4

35-44 ans St-Émile Secondaire Régulière 6 ans 1 3

5.5

45-54 ans Charlesbourg C.E.G.E.P. Régulière 3 ans 3 4

5.6

45-54 ans Beauport Universitaire Régulière 8 ans 1 1

5.7

45-54 ans Beauport C.E.G.E.P. Régulière 17 ans 4 1

5.8

35-44 ans Duberger Universitaire Dépannage 5 ans 5 3

5.9

35-44 ans Duberger Secondaire Dépannage 5 ans 3 3

5.10

55-64 ans Duberger Secondaire Régulière 10 ans 2 3

5.11

55-64 ans Duberger C.E.G.E.P. Régulière 10 ans 2 3

« idéal-types » des familles d’accueil

Type 1 = Problèmes de procréation/ adoption Type 2 = Accomplissement personnel/ sens humanitaire Type 3 = Par tradition/ voisins/ amis /parents Type 4 = Revenu d’appoint/ rester à la maison Type 5 = Avoir un vrai travail

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Échantillon selon le type de famille d’accueil

Type de familles d'accueil

19%

39%

25%

9%

8%

1 2 3 4 5

Type 1 = Problèmes de procréation/ adoption Type 2 = Accomplissement personnel/ sens humanitaire Type 3 = Par tradition/ voisins/ amis /parents Type 4 = Revenu d’appoint/ rester à la maison Type 5 = Avoir un vrai travail

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Annexe 4 Tableau des principaux types de famille d’accueil du Québec Catégorie Types de

famille d’accueil

Raisons premières du choix de devenir famille d’accueil

Explications détaillées

Type I Fertilité/ Adoption

Difficulté de procréation Alternative à l’adoption Prise en charge d’un enfant sans l’adopter

Type II Accomplissement personnel

Rêve de jeunesse Besoin de se sentir utile Aimer et aider les enfants en difficulté

Activité sociale

Type III Tradition/ Imitation

Entourage rempli d’enfants Suivre les traces de leurs parents Influencés par le modèle véhiculé des amis ou le voisinage Service humanitaire

Type IV Revenu supplémentaire

Rester à la maison, pré-retraite Flexibilité de l’horaire Aimer les tâches familiales Gardaient déjà des enfants

Travail autonome

Type V Carrière

Choix personnel d’aide aux enfants Abandon de toute autre activité lucrative

Données recueillies dans les focus group de janvier et février 2002 effectués par Hélène Bagirishya et Suzanne Gilbert

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Annexe 5

Tableau des principales valeurs véhiculées par les familles d’accueil du Québec

Niveau I

Niveau II Niveau III Niveau IV

Affectif De la vie familiale De l’estime de soi D’accomplissement

Amour Amour Amour Amour

Ouverture aux autres Confiance Hygiène Coopération

Partage Franchise Bonnes manières Soutien

Amitié Respect Persévérance Dépassement de soi

Générosité Honnêteté Dignité Entraide

Fraternité Loyauté Espoir

Égalité Données recueillies dans les focus groups de janvier et février 2002 effectués par Hélène Bagirishya et Suzanne Gilbert

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Annexe 7 Tableau des opinions que les familles d’accueil ont sur le service qu’elles rendent à la société Opinions

Services rendus aux enfants

Services rendus aux parents naturels

Services rendus à la société

Positives

-Milieu de vie familial et confortable-Sécurité physique et morale -Apport d’outils pour mieux s’adapter -Thérapie naturelle fournie aux enfants

-Prise de responsabilité de leurs enfants -Offrent un plan de vie à long terme à leurs enfants

-Économies d’argent importantes -Enlever une charge à la société -Faire partie du réseau de protection de l’enfance

Négatives

-Pas de feed-back sur le sort des enfants après leur départ

-Peur de la jalousie des parents naturels

-Considérés comme une nuisance par la société -Rejet des familles d’accueil par les institutions scolaires

Données recueillies dans les focus group de janvier et février 2002 effectués par Hélène Bagirishya et Suzanne Gilbert

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83

Annexe 8

Rapports statistiques annuels des Centres Jeunesse années 1999-2001

Tableau du nombre de familles d'accueil et d' enfants placés dans la province de Québec

5602 5545

8703 8713

4224

0

1000

2000

3000

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5000

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2000-2001 1999-2000

Familles d'accueil Enfants placés en familles d'accueil Enfants placés autres ressources

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Annexe 9

Annonces de recrutement des familles d’accueil

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Annexe 10 Le vendredi 01 février 2002 Ras-le-bol chez les familles d'accueil Claudette Samson Le Soleil Québec

À peine nommé, le nouveau ministre à la Protection de la jeunesse, Roger Bertrand, pourrait se retrouver avec une patate chaude dans les mains. Excédées d'être laissées-pour-compte, les familles d'accueil du Québec songent à fermer leurs portes à tout nouvel enfant, sauf si sa sécurité est compromise.

Un tel refus pourrait toucher autour de 25 nouveaux enfants par jour, à l'échelle de la province. Cette mesure draconienne et d'autres moyens de pression sont étudiés ces jours-ci par la quinzaine d'associations régionales de familles d'accueil du Québec, qui ont, semble-t-il, atteint la limite de leur patience. La goutte d'eau qui aurait fait déborder le vase est l'aveu, par l'ex-ministre responsable du dossier, Agnès Maltais, que le remboursement des frais liés à l'éducation et aux loisirs se limiterait pour la troisième année consécutive à la somme de 56 sous par jour, alors que le gouvernement s'était engagé à l'amener à 5 $ en trois ans. Selon une source du SOLEIL, un véritable branle-bas s'est emparé de la Fédération des familles d'accueil, d'où serait partie la proposition de refuser tout nouvel enfant. Une idée qui, semble-t-il, trouverait un écho favorable chez plusieurs membres. Invitées à soumettre leurs propres idées, les associations régionales se réunissent ces jours-ci. D'autres moyens de pression plus classiques sont envisagés, tels les lettres et téléphones aux députés. Certains ont aussi proposé de ne dépenser désormais pour les loisirs et l'éducation que les 56 sous attribués quotidiennement. La mesure serait toutefois décriée par d'autres, parce qu'elle pénaliserait les enfants placés. Sous-financement Le rapport Cloutier sur les familles d'accueil, déposé en 2000, constatait l'état de sous-financement des familles d'accueil qui reçoivent des enfants placés pour leur protection. Contrairement à celles qui accueillent des personnes déficientes ou handicapées, ces familles devaient assumer à même leur gousset les sommes nécessaires à l'éducation et aux loisirs (incluant l'argent de poche), ce qui, dans le jargon, est appelé le « barème éclaté ». Le gouvernement s'était alors engagé à leur remettre 5 $ par jour à cette fin après trois ans. Son investissement s'est toutefois limité à 56 sous pour les deux premières années, et il semble qu'il en sera de même pour la troisième, qui débutera en avril.

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Pour les familles d'accueil, il s'agit d'un manque à gagner annuel de 12 millions $ sur 14. Le sous-financement ne s'arrête par ailleurs pas au « barème éclaté ». Les familles d'accueil du Québec reçoivent une allocation de base quotidienne pour le gîte et le couvert variant d'un peu moins de 16 $ à environ 24 $, selon l'âge de l'enfant et les besoins particuliers qu'il requiert.

Pour être à la hauteur des besoins réels, ces sommes devraient être haussées de 5 $ par jour. Mais alors que l'Ontario et le Nouveau-Brunswick ont reconnu le sous-financement de leurs familles d'accueil et ajusté leur montant de base, le Québec traîne la patte, déplore un interlocuteur du SOLEIL, bien au fait des dossiers. L'apport des 5000 familles d'accueil québécoises au système de protection de l'enfance est indéniable, puisqu'elles hébergent les trois quarts des enfants placés chaque année, soit entre 8000 et 9000. Si elles n'étaient pas là, ces enfants devraient être placés dans des ressources beaucoup plus dispendieuses, tels les foyers de groupe ou les centres de réadaptation. Il y aurait environ 35 à 40 demandes de placement par jour au Québec, dont le quart pour des besoins de protection. Ce sont les autres cas qui pourraient être refusés. Il n'a pas été possible, hier, de parler à la présidente de la Fédération des familles d'accueil du Québec, Huguette Blais.

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Le 4 février 2002 Pas question de reculer faute d’un soutien accru, des moyens de pression Claudette Samson Le Soleil Québec Les familles d’accueil ne reculeront pas. Si le gouvernement ne répond pas positive-ment à leurs demandes de soutiens accru, elles entreprendront des moyens d’action gradués pouvant aller jusqu’à refuser tout nouvel enfant, exception faite de ceux dont la sécurité est menacée. De la rencontre qu’elles auront cette semaine avec le nouveau ministre responsable de leur dossier dépendra la suite des événements. L’urgence des familles est telle que c’est en terme de jours que devra se présenter la solution à leur problème de sous-financement, a indiquer hier la présidente de la Fédération des familles d’accueil du Québec, Huguette Blais. C’est à l’unanimité que les 15 associations régionales réunies en conseil d’administration, en fin de semaine ont convenu de ne pas lâcher le morceau, dit-elle. Dès maintenant, elles entreprennent de sensibiliser l’ensemble des députés provinciaux à leur cause. Elles prennent aussi de l’avance et annoncent qu’elles ne payerons plus la partie non-couverte des frais qui leur sont octroyés pour les rentrées scolaires, soit 54.98$ pour un enfant au primaire et 124,74$ au secondaire. Actuellement, souligne Mme Blais, elles doivent puiser dans leur poches ou dans l’allocation consentie pour le gîte et le couvert pour combler le manque à gagner. En entrevue téléphonique après la rencontre, la présidente a indiqué qu’une série de moyens qui seront appliqués graduellement avaient été choisis pour faire pression sur le gouvernement. L’un de ces moyens consisterait à ne plus débourser davantage que le 56 sous octroyés quotidiennement pour les frais de loisir, d’éducation et de vêtements. Le gouvernement reconnaît que les familles d’accueil n’ont pas à assumer elles-même ces dépenses, mais tarde trop à corriger la situation, selon elle. Et, en dernier recours, si rien ne débloque, elles cesseront d’accueillir de nouveaux enfants Une action dont la portée serait certainement majeure puisque les familles d’accueil hébergent 80% des enfants placés en protection au Québec. En fin de semaine, les membres du conseil ont eu le sous-ministre adjoint Pierre Michaud (Santé et Services sociaux) à leur disposition pendant tout une demi-journée, et ne se sont, semble-t-il pas, gênés pour brosser un portrait complet de leur situation. Au-delà de la situation financière, ils ont longuement abordé leur doléances vis-à-vis du manque de respect dont elles se disent victimes. Abus de pouvoir, représailles, déplacements d’enfants mal préparés, les problèmes abondent et existent dans toutes les régions du Québec, affirme Mme Blais.

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RENCONTRE. Vendredi, à la suite de la publication dans LE SOLEIL d’un article disant le ras-le-bol des familles d’accueils, la présidente de la Fédération a pu parler au nouveau ministre responsable de la Protection de la jeunesse, Roger Bertrand,. Une rencontre a été convenue pour cette semaine. Mme Blais souhaite toutefois que le ministre prenne rapidement acte de ce qui à été reconnu par ses deux prédécesseurs, Gilles Baril, qui à accepté toutes les recommandations au rapport Cloutier en 2000, et Agnès Maltais, dont les « chantiers » en sont venus eux aussi récemment à la conclusion que les familles d’accueil étaient toujours sous-financées, n’avais pas reçu ce qui leur a été promis et vivaient encore dans le désarroi et l’isolement. Finalement, Mme Blais a tenu à répondre au directeur général de l’Association des Centres jeunesse du Québec, Pierre Lamarche, qui disait cette semaine souhaiter que les familles d’accueil n’allaient pas jusqu'à refuser les nouveaux enfants, car il s’agirait d’une mesure trop pénalisante. « Il nous semble que si on ne fait rien, ce sera beaucoup plus pénalisant à long terme parce qu’il sera alors de plus en plus difficile de recruter de nouvelles familles », a-t-elle analysé. ♣

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Le 2 Février 2002 Le réseau des familles d’accueil serait menacé Faute de financement, il est ardu d’en recruter de nouvelles, selon leur association Claudette Samson Le Soleil Québec

Le réseau des familles d’accueil est en danger. Le recrutement de nouvelles familles et la rétention de celles qui sont déjà actives deviennent de plus en plus difficile. C’est pourquoi il devient urgent de rehausser leur soutien financier, selon l’organisation qui les représente. La présidente de la Fédération des familles d'accueil du Québec, Huguette Blais, a confirmé hier le sentiment d'urgence qui anime son organisation face au problème de sous-financement des familles qui perdure, malgré les engagements du gouvernement provincial il y a deux ans. Elle a confirmé l'information publiée hier dans LE SOLEIL, selon laquelle les familles étudient la possibilité de fermer leurs portes à tout nouvel enfant, à moins que sa sécurité ne soit compromise. Elle a toutefois regretté que cette nouvelle ait coulé avant que les administrateurs de la Fédération n'aient pris de décision formelle, ce qui sera fait en fin de semaine. « C'est vrai que ça pourrait aller jusque-là. Mais il y a une graduation avant ça », a-t-elle dit. Ces jours derniers, les familles d'accueil ont perdu patience après avoir appris que la somme accordée pour le remboursement à des loisirs et des frais liés à l'éducation demeurerait probablement à 56 cents par jour pour la troisième année d'affilée, alors que le gouvernement S'était engagé à l'amener à 5 $ en trois ans. Ces frais sont désignés sous le vocable de « barème éclaté », ce qui permet de les distinguer de la rétribution de base, destinée au gîte et au couvert. Mme Blais a indiqué hier en avoir parlé au sous-ministre responsable, Pierre Michaud il y a deux jours. Celui-ci aurait fait valoir que tout n'est peut-être pas aussi arrêté. M. Michaud doit d'ailleurs passer l'après-midi d'aujourd'hui avec le conseil d'administration de la Fédération, a indiqué le ministère, hier. APPUI DE RICHARD CLOUTIER Hier, l'auteur du rapport sur les familles d'accueil produit en 2000, Richard Cloutier, a dit comprendre l’exaspération des familles. « Elles ont raison de sonner l'alerte », a-t-il mentionné. APPUI DE RICHARD CLOUTIER Suite Il est selon lui inacceptable que tout en reconnaissant le sous financement de 10$ par jour des familles - 5 $ pour le « barème éclaté» et 5 $ pour la rétribution de base, le Gouvernement n'ait encore mis que 56 cents dans la cagnotte. « De chantiers en réunions et de plans de travail en comités de suivi, tout le monde s'entend, mais rien ne bouge », souligne-t-il.

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PAS DE RÉACTION Au cabinet du nouveau ministre responsable, Roger Bertrand, il n'a pas été possible hier d'obtenir de réaction. M. Bertrand devait rencontrer son prédécesseur Agnès Maltais en après-midi, pour le transfert des dossiers. Le ministre sait que c'est un dossier prioritaire, a mentionné son attachée de presse, Anne Marcotte, mais il devra en prendre connaissance avant de se prononcer. La Fédération des familles d'accueil se réunit toute la fin de semaine pour étudier notamment quels moyens d'action seront mis de l'avant. Interrogé sur cette question, le directeur général de l’Association des Centres jeunesse, Pierre Lamarche, à dit espérer que les familles d'accueil n'iront pas aussi loin que refuser de prendre les nouveaux enfants, une mesure trop pénalisante selon lui. Il a par contre rappelé que l’association a toujours été entièrement en faveur des propositions du rapport Cloutier pour un relèvement du soutien financier aux familles. M. Lamarche a confirmé que le recrutement de nouvelles familles était de plus en plus difficile, et ce, dans toutes les régions du Québec. À ce sujet, le député libéral Russel Williams a indiqué hier avoir calculé qu'en tenant compte de l'inflation, les familles d'accueil reçoivent aujourd'hui un peu moins qu'elles ne recevaient en 1998.

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Le vendredi 19 avril 2002 Les familles d'accueil recevront plus d'argent Valérie Lesage Le Soleil Québec

Le ministre délégué à la Protection de la jeunesse annoncera sous peu un financement supplémentaire pour les 10 000 familles d'accueil du Québec. Combien ? C'est déjà décidé, nous dit-on dans l'entourage de Rosaire Bertrand, mais ça reste secret pour le moment. Le report des bonnes nouvelles, pourtant très attendues par les familles d'accueil, dont une vingtaine de représentants se sont rendus à l'Assemblée nationale hier, serait causé par l'absence d'une des principales intéressées : la présidente de l'Association des familles d'accueil du Québec. Huguette Blais serait actuellement en vacances à l'extérieur et l'annonce ministérielle aurait été retardée à sa demande. « Mme Blais m'a confirmé qu'elle pourrait être disponible dès la semaine prochaine et sitôt qu'elle sera présente, il me fera plaisir d'annoncer nos intentions », a d'ailleurs indiqué le ministre Bertrand à la période des questions. Il a dû subir les reproches de son adversaire libéral Russell Williams, qui a jugé « aberrant » et « inacceptable » l'inaction du gouvernement dans ce dossier. Et puis les représentants des familles d'accueil lui ont signifié leur incapacité à continuer leur travail dans des conditions « déplorables, voire inacceptables, où la sécurité des enfants est compromise ». Car en plus de manquer d'argent, les familles d'accueil se désolent d'être laissées à elles-mêmes. Elles ont trop peu de soutien de la part des professionnels de la DPJ, eux aussi débordés. Les familles d'accueil réclament une hausse de 20 % du financement qui leur est accordé pour héberger et prendre soin des enfants confiés par la Direction de la protection de la jeunesse. Elles reçoivent une allocation de base variant de 15,80 $ à 24,74 $ par jour par enfant, selon l'âge. Cette somme doit servir à couvrir tous les besoins de l'enfant. Lors de l'étude des crédits budgétaires du ministère de la Santé et des Services sociaux, le ministre François Legault a laissé entendre que les familles ne doivent pas se faire d'illusions, même s'il a reconnu que leur travail mérite davantage. « On va annoncer des augmentations selon nos moyens », a précisé le ministre, ajoutant que la hausse des crédits en général se situait autour de 4 % cette année. Les familles d'accueil disent qu'elles sont sous-payées depuis trop longtemps et qu'il faut rattraper le retard. Depuis une dizaine d'années, leurs allocations n'ont pas beaucoup bougé. En 1998, Gilles Baril, alors responsable de la Protection de la jeunesse, leur avait promis un rattrapage, mais elles n'ont reçu que 56 cents de plus par jour. « S'ils ne sont pas capables de préserver ce réseau-là, ils vont être obligés de payer beaucoup plus cher dans quelques années. Alors, c'est important qu'ils mettent les montants qu'ils auraient dû mettre il y a plusieurs années », a affirmé Louise Chabot, la porte-parole du groupe de familles d'accueil. Les familles envisagent de refuser d'accueillir de nouveaux enfants si elles ne reçoivent pas un meilleur financement rapidement. Cela forcerait le placement des jeunes en Centre jeunesse, au coût de 210 $ par jour.

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Annexe 11

Formulaire d’autorisation de soins médicaux en camp de vacances

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