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LES DESSOUS D’UNE GUERRE Tout ce que l’on n’apprend pas dans les manuels d’Histoire Par Francis AGOSTINI Ancien des Commandos Nord Vietnam Président départemental de l'Union Fédérale des Bouches-du-Rhône Président du Comité de Coordination des associations d'Anciens Combattants et Victimes de Guerre de Marseille et des Bouches-du-Rhône.

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LES DESSOUS D’UNE GUERRE

Tout ce que l’on n’apprend pas dans les manuels d’Histoire

Par Francis AGOSTINI Ancien des Commandos Nord Vietnam

Président départemental de l'Union Fédérale des Bouches-du-Rhône Président du Comité de Coordination des associations d'Anciens Combattants et Victimes de Guerre de Marseille et des Bouches-du-Rhône.

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AVERTISSEMENT

La seconde guerre mondiale a sonné le glas des empires coloniaux, qui peut aujourd’hui le nier ?

Toutes les guerres ont des répercussions et des conséquences et malheureusement notre pays en a fait la triste expérience lors de notre défaite face à l’Allemagne hitlérienne en juin 1940. Cette défaite certes n’a pas marqué profondément à l’époque nos colonies d’Afrique, les protectorats du Maroc et de Tunisie et nos départements d’Algérie, mais par contre elle va laisser des traces profondes en Indochine, particulièrement éloignée de la métropole et surtout aux prises avec un des partenaires de l’Axe, l’empire du Japon, qui à partir de juillet 1940 va occuper peu à peu la péninsule indochinoise, la souveraineté française étant respectée et ce jusqu’au 9 mars 1945.

Reste néanmoins que l’autorité morale de la France est fortement ébranlée et les annamites- On ne parle pas encore trop de vietnamiens- vont avoir la conviction que la domination coloniale va bientôt prendre fin.

Cette domination coloniale dont la fin se traduira par des années de guerre, aurait pu, si nos gouvernants avaient un tant soit peu compris que le monde asiatique avait derrière lui des siècles de civilisations, et qu’il aurait fallu faire les réformes qui s’imposaient, comme l’a dénoncé au début du siècle dernier le général PENNEQUIN- En 1911- tout en reprenant les propos du gouverneur général KLOBUKOWSKI, je cite « La France a transformé les indigènes en éponge à impôts. »-Il ajoute également que sur 11.000 fonctionnaires en poste à ce moment là sur le territoire indochinois à peine 2500 sont des asiatiques, il stigmatise comme le fera en juin 1939 René CASSIN, le fait que les postes importants sont tous tenus par des européens et que de nombreux refus sont émis quand des autochtones demandent à entrer dans l’administration, même diplômés de haut niveau,- Que les européens sont crispés sur leurs avantages et peu disposés à admettre que le plus instruits des indigènes puisse avoir sous ses ordres les plus ignorant des français et il rajoute « Nous avons conquis l’Indochine, nous l’avons pacifié, mais nous n’avons pas gagné les âmes »

Il n’est d’ailleurs pas le seul à raisonner de la sorte puisque des personnalités de haut rang comme le ministre DOUMERGUE, le gouverneur général BEAU, le général GALLIENI et le colonel MANGIN et peut-être même Albert SARRAULT semblent avoir des vues identiques ; plus tard le gouverneur Alexandre VARENNE, libéral, préconisera l’admission d’autochtones au sein de l’administration, mais également au sein des instances gouvernantes de la colonie, et sera désavoué par Paris.

En 1914, le militant nationaliste, PHAN CHAU TINH écrivait « Il ne convient pas que les annamites s’éloignent des français, mais il convient que ces derniers modifient leurs procédés d’administration et qu’ils aident les annamites dans leur ascension ; les représentants des deux races pourraient alors vivre en bonne intelligence d’une façon durable »

Or l’administration coloniale et les gouvernants de la III° République ne tiendront aucun compte de ce qui a été émis ci-dessus, pas plus d’ailleurs que ceux du gouvernement provisoire de la République du général de GAULLE et de leurs successeurs de la IV° République.

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La guerre enclenchée le 19 décembre 1946 par le coup de force du Vietminh va être marquée non seulement par une défaite militaire et politique de notre pays, mais également par une série de scandales qui marqueront le monde parlementaire et des affaires de l’époque d’une manière indélébile.

Au cours de cette étude destinée, comme je l’écris à chaque fois à nos jeunes présidents d’associations, on pourra trouver :

Un avant propos historique sur l’Indochine et un sommaire des évènements militaires.

L’attitude du général de GAULLE vis-à-vis de l’Indochine en 1944-1945.

Le rôle joué par l’amiral Thierry d’ARGENLIEU et celui du général LECLERC

L’attitude des différents gouvernements et notamment des Socialistes dans la conduite de la guerre.

le rôle du Parti Communiste Français.

Les affaires : les scandales des piastres et l’affaire des généraux - le rapport REVERS.

Un dossier dont on parle peu, celui des prisonniers du Vietminh.

Le Vietminh.

La position des Etats d’Indochine, Laos, Cambodge et Annam face à l’indépendance octroyée par le japon.

Une note concernant les pertes, les effectifs et les commandants en chefs ainsi que les hauts commissaires.

*

Nos guerres coloniales sont particulièrement occultées et le grand public et surtout nos jeunes, étudiants, lycéens ou collégiens apprennent bien souvent dans les manuels d’Histoire des faits totalement déformés et inexacts et se font ainsi une idée fausse de ce que représentent ces guerres. Il faut aussi rajouter que certains enseignants, pas tous bien sur, se complaisent à dénaturer l’action de notre pays et de notre armée, la plupart d’ailleurs de nos grands chefs militaires avaient participé à la création de l’empire colonial français, et ils avaient été nombreux à dénoncer certains abus de l’administration coloniale, et les remèdes à y apporter ; d’autres comme LYAUTEY ou le général PETREQUIN avaient particulièrement bien réussi leur mission civilisatrice, nous pourrions y ajouter également le général GALLIENI.

C’est pour cela qu’il est difficile de porter un jugement abrupt comme le font certains sur l’action de la France Outre-Mer. Les hommes d’affaires ont fait certes des fortunes, certains politiciens aussi, mais d’autres ont apporté leur savoir et leurs connaissances, leur amour de l’homme, comme Yersin, aujourd’hui vénéré comme un dieu à Nha trang. L’Armée, elle y a laissé des milliers de morts pour les résultats que l’on connaît, bien souvent trahie par ceux-là même qui l’envoyaient se battre.

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AVANT- PROPOS

Le 7 mai 1954, l’Armée française subissait une terrible défaite à Dien Bien Phu. Ce drame allait conduire et à accélérer les négociations qui étaient déjà en cours depuis le 26 avril à Genève et à signer le 20 juillet un cessez le feu général qui allait s’étendre jusqu’au 11 août. La France allait être totalement éliminée du Sud-est asiatique.

Le 9 mars 1945, le coup de force japonais balaie tout ce qui pouvait rester de la souveraineté française en Indochine après la défaite de juin 1940, et la proclamation de l’indépendance des peuples de la péninsule indochinoise en avril 1945, firent s’écrouler les derniers pans de l’édifice impérial français en Asie.

Voilà deux dates particulièrement marquantes parmi d’autres qui ont scellé le destin de l’Indochine française, considérée à juste titre comme la perle de l’empire colonial français.

Comment en-est-on arrivé là ?

Il faut bien pourtant parler même d’une manière sommaire de cette Indochine des français avant 1939 pour comprendre l’évolution des évènements.

L’Indochine est une création de l’administration coloniale regroupant le Tonkin, l’Annam, le Laos, le Cambodge et la Cochinchine. Je ne reviendrai pas sur l’histoire de la conquête, ni sur les protectorats, mais en rappelant simplement que l’Indochine au contraire de l’Algérie n’a jamais été une terre de peuplement européen, mais une colonie d’exploitation.

C’est en 1897 que Paul DOUMER, alors gouverneur général mit sur pied les structures administratives du territoire- Véritable état colonial avec ses services généraux et leurs annexes, doté d’un budget général afin que la colonie ne pèse pas sur les finances métropolitaines ; les mises en valeur débutèrent en même temps pratiquement que la fin de la conquête, aidées en cela par de grands groupes financiers et milieux d’affaires. Plus tard Albert SARRAULT gouverneur général de 1911 à 1914, puis de 1916 à 1919, et enfin ministre des colonies, établit un plan d’équipement de la péninsule indochinoise.

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D’autres gouverneurs généraux s’intéressèrent plus spécialement au plan de la santé et de l’éducation comme Paul BERT et Jean Marie LANESSAN.

Alexandre VARENNE- 1925-1927- s’orienta vers une politique coloniale humaniste et envisageait d’associer les élites indochinoises à un self-gouvernement menant à terme à l’abolition de la relation coloniale.

Sur le plan de la santé des efforts très importants furent fait comme les grandes campagnes anti- paludéennes, création de l’Institut Pasteur à Saigon et Nha trang, découverte du vaccin contre la peste par YERSIN et ouvertures d’autres annexes de l’Institut Pasteur à Hanoï et Pnom Penh.

La variole et le choléra sont en recul, mais la malaria reste invaincue.

Plus tard l’école, puis la faculté de médecine furent créées ; en 1930 il existait 10.000 lits d’hôpitaux et des dispensaires pratiquement dans chaque localité ; ainsi l’amélioration des soins contribua nettement à la croissance démographique.

Le développement de l’enseignement par lequel on voyait la conquête des cœurs et de l’esprit, se concrétisa surtout en direction du primaire et du secondaire et à un degré moindre vers l’enseignement supérieur : université indochinoise à Hanoï, mais il faut bien dire que malgré l’action d’Alexandre VARENNE, les étudiants d’origine asiatique se voyaient bien souvent refuser des places qui auraient dû leur revenir. Ce fait sera signalé par René CASSIN, en 1939, revenant d’une mission en Orient à Georges MANDEL, sans grande répercussion d’ailleurs, le ministre arguant qu’il avait d’autres priorités et notamment de défendre l’Indochine contre les visées économiques du Japon……

Et pourtant on aurait pu encore à l’époque remédier à beaucoup d’erreurs et se rendre compte que le fait colonial était déjà dépassé et qu’il fallait penser à l’avenir en mettant en route des réformes profondes ; or comme pour l’Algérie rien ne sera fait, même sous les gouvernements de gauche ou si peu…….

*

En Indochine il y a toujours eu des poussées nationalistes et il n’est point besoin de rappeler ici quelques épisodes douloureux comme l’affaire de Yen Bay notamment en 1930, du 22 novembre 1940 à Bac Son ou de la manifestation des ombrelles à Pnom Pen le 20 juillet 1942 et bien d’autres incidents sévèrement réprimés par l’administration coloniale et le bagne de Poulo Condor était là pour que l’on s’en souvienne, d’autres prisons existant également sur tout le territoire indochinois. Il est vrai d’autre part que depuis la fin de la conquête la paix régnait en Indochine, ce qui n’empêchait pas quelques nationalistes d’agir malgré les risques encourus.

A la fin de 1887, la rébellion armée n’existe plus, mais dans l’ombre les nationalistes cherchent leur voie ; ainsi PHAM BOI CHAU, CUONG DE, PHAN CHU TRINH sont les plus connus, mais d’autres plus actifs vont les remplacer rapidement.

Un sera connu mondialement et c’est celui que l’Histoire retiendra sous le nom d’HÔ CHI MINH ; sa vie, exil, prison, clandestinité, petits boulots, maquis, responsabilités suprêmes, honneurs officiels……

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Ayant plusieurs fois changé de nom, il est né dans le Nghé An, en province de Nord Annam, son père un lettré fut révoqué étant un fonctionnaire pour menées contre le protectorat.

En 1911 il s’embarque sur un paquebot comme aide cuisinier et passe plusieurs mois à bourlinguer sur toutes les mers et finalement se fixe en France à la fin de la guerre 1914-1918. Il devient alors NGUYEN AI QUOC, NGUYEN le patriote, adhère à la ligue des droits de l’homme et au Parti Socialiste : profondément épris d’idéalisme, il plaide pour ses compatriotes dont il dénonce les conditions sociales, leur vie et leur travail… Il adresse même au moment de la conférence de Versailles en 1919 un mémoire aux quatre grands de l’époque, où il réclame des améliorations pour la vie et la liberté des indochinois restés au pays, et cela demeure sans écho, sans même le soutien du Parti Socialiste sur lequel il comptait ! Ce dernier semblant se désintéresser des problèmes coloniaux.

Il se tourne alors vers le Marxisme-léninisme et en décembre 1920 rallie au congrès de Tours le Parti Communiste. Dès lors, il ne quittera plus la voie qu’il vient de choisir. En 1923, il est désigné pour représenter les colonies françaises au congrès de l’Internationale paysanne à Moscou et y reste jusqu’en 1924, où il rejoint la Chine qu’il fuit d’ailleurs en 1925. Par contre il semble être totalement étranger aux troubles qui se produisent en Indochine en 1930 à Yen Bay, Hanoï Hung Hoa, Lam Thao, Bac Ninh et Thaibinh, suscités par le VNQDD, mouvement qui est rapidement décimé par la répression.

HÔ CHI MINH est à ce moment là à Hong kong et il va tenter d’imposer l’unité des mouvements nationalistes particulièrement divisés : il fonde alors le Parti Communiste indochinois. A la même époque le Parti Communiste tente, profitant d’une mauvaise récolte de riz de soulever le Nghé An, ainsi que la Cochinchine, sans grand succès puisque 10.000 arrestations brisent le mouvement, HÔ CHI MINH lui-même étant arrêté par les britanniques, puis libéré il rejoint Moscou.

Mais en Indochine les bagnes et les pénitenciers se transforment en foyers de haine contre la France et deviennent pour la plupart des centres d’actions révolutionnaires. A noter que l’épouse de VO NGUYEN GIAP, incarcérée à Poulo Condor y meurt.

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LA GUERRE DE 1939-1945 EN INDOCHINE

Elle est caractérisée par la main mise progressive du territoire par le Japon, l’empire du Soleil Levant profitant de notre défaite en Europe à partir de juin 1940 pour imposer ses vues.

A la suite du pacte germano-soviétique du 23 août 1939, le général CATROUX, alors gouverneur général, prend des mesures énergiques contre le Parti Communiste indochinois, mais Hô CHI MINH est à Moscou, PHAM VAN DONG et VO NGUYEN GIAP en Chine, mais ils vont très vite se réunir à Kumming.

Dès le 19 juin 1940, le gouvernement japonais adresse au général CATROUX un ultimatum lui enjoignant d’interdire tout trafic avec la Chine de TCHANG KAI CHEK à partir du port d’Haiphong et de Saigon ; la menace est clair, et le gouverneur général

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connaissant la faiblesse de nos forces armées s’incline, il est désavoué par le gouvernement du maréchal PETAIN et il est relevé par l’amiral DECOUX.

Une ère nouvelle va s’ouvrir pour l’Indochine, coupée complètement de la métropole après l’avènement du gouvernement de Vichy et par le blocus progressif que les anglais vont mettre en place.

L’amiral DECOUX n’aura de cesse de maintenir malgré la pression japonaise, le drapeau français sur la péninsule indochinoise, ces derniers reconnaissant même la souveraineté de la France sur ce territoire et en respectant son intégrité jusqu’à un certain point il faut bien le dire, le Japon intervenant dans un premier temps lors de la guerre avec la Thaïlande, puis le 9 mars 1945 et donnant ensuite l’indépendance aux états indochinois, Le Cambodge, l’Annam et le Laos, indépendances issues non pas d’une initiative des alliés vainqueurs, mais du vaincu l’empire japonais.

La cohabitation Franco-japonaise ne se passe pas d’ailleurs sans heurts graves puisque des incidents et des combats se déroulent à Langson le 6 septembre 1940 puis le 22 où les combats font rage entre soldats français et japonais.

A partir de l’automne 1940 d’autres incidents vont se produire avec la Thaïlande sur la frontière, incidents qui se transforment vite en conflits armés en décembre et janvier 1941, la bataille navale de Koh Chang permettant aux forces navales françaises de remporter une brillante victoire.

Le Japon intervient alors pour imposer au gouverneur général DECOUX à traiter avec le gouvernement siamois, le territoire indochinois Etant amputé de zones importantes au Laos et au Cambodge cédées à la Thaïlande.

L’entrée en guerre des Etats-Unis d’Amérique après l’agression japonaise de Pearl Harbor le 7 décembre 1941 va changer le cours de l’histoire dans le Pacifique, mais aggraver le sort de l’Indochine.

A noter que profitant de la présence japonaise certains mouvements nationalistes renaissent tant au Tonkin, qu’en Cochinchine, mais ils sont rapidement réprimés, poursuivis par les autorités coloniales et n’ayant aucune assise populaire, ces mouvements disparaissent au prix de plusieurs centaines d’arrestations, de 54 condamnations à mort, 64 aux travaux forcés et 331 emprisonnements à temps.

Le Vietminh va apparaître à partir de 1941 et son premier manifeste est clair « Union de toutes les couches sociales, de toutes les organisations révolutionnaires, de toutes les minorités ethniques, alliance avec tous les éléments anti- fascistes français ; un but la destruction du colonialisme et de l’impérialisme fasciste ».

Le Vietminh qui s’organise, sous couvert de participer à la lutte contre l’occupant japonais, cachant l’intégralité de son jeu, va trouver les appuis nécessaires de la Chine, mais surtout des Etats-Unis, car ROOSEVELT, fidèle à son anti- colonialisme primaire ne tardera pas à l’aider matériellement et politiquement, déclarant ouvertement le 22 janvier 1944 dans un Mémorandum adressé à Winston CHURCHILL « L’Indochine de devait pas redevenir française, mais elle devait être administrée par un conseil de tutelle sous l’égide de la future ONU. »

Les nationalistes levés derrière HÔ CHI MINH ne peuvent être soutenus que par l’Oncle Sam…….

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LE COUP DE FORCE JAPONAIS DU 9 MARS 1945

Le coup de force japonais surprend les autorités françaises encore que des informations sur le déclenchement de l’agression soient parvenues au haut commandement et même à Paris via l’Australie.

Point n’est besoin de rappeler ici la sauvagerie des combats ; les forces françaises surprises se défendent, mais rapidement surclassées par le nombre et le manque de munitions doivent se rendre, elles sont massacrées de même que les femmes et les enfants, les tirailleurs fidèles à la France le sont aussi ainsi que les cadres autochtones ; quelques unités réussissent à gagner la brousse et les colonnes commandées par le général ALESSANDRI tout en se battant rejoignent la Chine sans aucune aide extérieure, les Etats-Unis refusant même de parachuter des vivres et des munitions, de même qu’aucune intervention aérienne en faveur des colonialistes français…. !

1262 tués et 857 européens disparus soit un total de 2119 dont 199 officiers, 598 sous-officiers et 465 hommes de troupe.

Dès le 10 mars la population européenne est regroupée, dirigée vers des camps comme celui d’Hoa Binh où jusqu à la capitulation japonaise elle sera en butte aux maladies tropicales, à la malnutrition, aux vexations des gardiens quand ce n’est pas aux exécutions.

Par ailleurs certains maquis ont été constitués, par des parachutages d’équipes de la DGER en janvier 1945 notamment au Laos et dans le Nord de la Cochinchine et sont bien accueillis par les populations locales, mais ne peuvent pas intervenir efficacement contre les troupes japonaises.

Quelle explication peut-on donner concernant le coup de force japonais alors que la présence française était tolérée depuis près de cinq ans ?

La mise en place d’une résistance assez peu discrète ?

La peur d’un débarquement allié en Indochine coupant les lignes de ravitaillement japonaise vers la Birmanie ?

Se sentant perdus, les japonais ont-ils voulu gommer la présence de l’homme blanc en Asie, puisque quelques jours à peine, après le 9 mars, en avril, l’empire du Soleil Levant confère l’indépendance à tous les peuples de la péninsule indochinoise ?

Il est à noter que le 11 mars, le conseil des ministres de l’empereur BAO DAI fit une déclaration nettement orientée politiquement vers les japonais.

Quant à HÔ CHI MINH, il déclare « le loup Impérialiste français a été dévoré par l’hyène fasciste japonaise ».

Seul l’Etat du Laos et notamment SISAVANG VONG demande aux laotiens d’aider les français et de se joindre à eux contre le Japon.

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LA POSITION DES ETATS INDOCHINOIS APRES LE 9 MARS 1945

Au Vietnam.

L'empereur Bao dai s'empresse d'adresser ses félicitations aux japonais concernant le succès militaire qu'ils viennent de remporter et se déclare libre de la tutelle étrangère -Française-,

D'ailleurs le 11 mars le conseil des ministres de l'empereur publie un communiqué ainsi rédigé :

« Vu la situation mondiale, et celle de l'Asie en particulier, le gouvernement du Vietnam proclame publiquement qu'à dater de ce jour, le traité de protectorat avec la France est aboli et que le pays reprend ses droits à l'indépendance.

Le Vietnam s'efforcera par ses propres moyens de se développer pour mériter la condition d'un Etat indépendant et suivra les directives du manifeste connu de la grande Asie orientale, pour apporter l'aide de ses ressources à la prospérité commune. Aussi le gouvernement du Vietnam fait-il confiance à la loyauté du japon et est-il déterminé à collaborer avec ce pays pour atteindre le but précis »

Hué, 27° jour du 1° mois de la 20° année BaoDaï -(11 mars 1945).

L'empereur du Vietnam s'aligne donc sur la politique japonaise..... .et ce ne sera pas le dernier de ses retournements, puisqu'il deviendra conseiller d'Hô Chi Minh, puis reviendra en 1948 comme empereur du Vietnam......

Le 20 août 1945, de façon plus courtoise que ce que clame déjà Hô Chi Minh, ne dira-t-il pas à la France :

« Vous avez trop souffert pendant quatre mortelles années pour ne pas comprendre que le peuple annamite qui a vingt siècles d'histoire, et un passé souvent glorieux, ne veut plus, ne peut plus supporter aucune domination ni aucune administration étrangère. Vous comprendriez encore mieux si vous pouviez voir ce qui se passe ici, si vous pouviez sentir cette volonté d'indépendance qui couvait au fond de tous les cœurs et qu'aucune force humaine ne peut plus comprimer. Même si vous arriviez à rétablir ici une administration française, elle ne serait plus obéie ; chaque village serait un nid de résistance ; chaque ancien collaborateur un ennemi; et vos fonctionnaires et vos colons eux-mêmes demanderaient à sortir de cette atmosphère irrespirable... »

Au Cambodge :

Le roi Norodom Sihanouk, sous la pression des japonais signe le décret d'indépendance le 12 mars et se déclare favorable à la politique menée par le Japon. Mais dès la capitulation de l'Empire du Soleil Levant, Sihanouk cherche une voie pour se rapprocher de la France-(Il a besoin de l'aile protectrice de la France pour récupérer les provinces perdues lors de la guerre contre la Thaïlande en 1941).

Au Laos :

Le 8 avril le Japon impose au roi du Laos de parapher la déclaration d'indépendance ; par contre le roi Sisavang Vong, contrairement à son premier ministre le prince Petsarah, se considère comme prisonnier des japonais, et demande à son peuple d'aider les français ; dès la capitulation des japonais, le roi confirme son loyalisme absolu à la

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France-(Les principaux centres du Laos sont tenus par la résistance et les missions françaises parachutées).

MAIS QUE SE PASSE-T-IL EN FRANCE

PENDANT CE TEMPS LA ?

Depuis 1944 la France se libère de ses chaînes et deux déclarations importantes du général de GAULLE sont à prendre en compte : celle de Constantine et celle de Brazzaville que l’on trouvera en annexes, ainsi que la déclaration du gouvernement provisoire de la République en date du 24 mars 1945, ces deux textes feront date dans les annales, car ils vont orienter la politique coloniale française et notamment vis-à-vis de l’Indochine pendant plus de trois ans. Avant 1939, ils auraient été particulièrement bien accueillis, après le 9 mars 1945, le mot indépendance - DOC LAP- lancé par les japonais, puis par le Vietminh, font mouche, d’autant plus que depuis 1940 les élites annamites ou plutôt vietnamiennes, de même qu’une certaine partie du peuple et surtout de la jeunesse sentent que la domination coloniale va toucher à sa fin. En effet, la France n’est plus en état d’ordonner quoique ce soit, sortant d’une guerre totalement affaiblie, détruite en grande partie, et surtout avec un personnel politique peu enclin à comprendre que le monde a changé.

On ne doit pas oublier non plus que les dirigeants français, ceux de gauche comme ceux de droite, étaient ainsi que tous nos compatriotes profondément imprégnés de cette idée de l’empire, conçu comme la plus grande France, seule manière pensait-on de donner à notre pays des dimensions, une influence et une puissance à l’échelon mondial.

Pour les français de 1945, le patriotisme exigeait que les territoires d’Outre-mer fussent sauvegardés dans leur intégrité au même titre que les provinces métropolitaines, car c’était de ces territoires qu’était venue la libération ; il était donc hors de question d’abandonner l’Indochine ainsi que le reste !

Rétablir la souveraineté française en Indochine, voilà les premières directives données par le général de GAULLE à la fois au général LECLERC et à l’amiral THIERRY D’ARGENLIEU On peut rêver… alors que la Grande Bretagne se prépare à donner l’indépendance à l’Inde et à la Malaisie, et que les Hollandais vont être contraints de la donner à l’Indonésie.

Erreurs manifestes par manque de renseignements, vision utopiste de l’avenir par l’homme du 18 juin ? On peut se poser la question et pourtant la conférence de Potsdam nous avait déjà bien évincé de l’Indochine, la France n’y ayant pas la moindre place, la question indochinoise y étant traitée le plus rapidement possible, occupation chinoise au Nord à partir du 16° parallèle, anglaise au Sud.

D’autre part le général LECLERC, qui avait rencontré le Vice-roi des Indes l’amiral Lord Louis MOUNTBATTEN s’était rendu compte assez rapidement que le problème de l’Indochine était éminemment politique et ne pourrait se résoudre en aucune manière par la force, se traduisant par des opérations militaires menées à plus de 12.000 kilomètres de la métropole. Néanmoins en tant que soldat, il va exécuter les ordres reçus et conduire les opérations de ce que certains historiens ont appelé la reconquête avec un corps expéditionnaire composé :

De la 9° Division d’Infanterie Coloniale

De la 3° Division d’Infanterie Coloniale

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Un groupement de la 2° Division Blindée.

En septembre 1945 le vietminh, qui s’est considérablement renforcé après la proclamation de l’indépendance par l’apport d’armes prises aux troupes françaises, à la garde indochinoise et aux japonais sans compter celles fournies par les américains, va procéder à des massacres notamment à la cité Heyraud à Saigon et à bien d’autres endroits ; partout le Vietminh règne en maître avec la complicité avérée des japonais non encore désarmés et a constitué le premier gouvernement de la République démocratique du Vietnam.

HÔ CHI MINH Président

VO NGUYEN GIAP à l’Intérieur

CHU VAN TAN à la Défense

PHAM VAN DONG aux Finances

L’ex-empereur BAO DAI devenant conseiller suprême du gouvernement.

LE RETOUR DE LA FRANCE

Grâce à l’aide des britanniques le débarquement des forces françaises peut avoir lieu au Sud, ce qui permet non sans mal la réoccupation progressive de la Cochinchine au fur et à mesure de l’arrivée des renforts, le retour du Tonkin s’effectuant seulement le 6 mars 1946 après accord des autorités chinoises d’occupation et d’un accord avec HÔ CHI MINH signé de justesse, et sans qu’un grave incident ait lieu à Haiphong occasionnant de nombreuses victimes et des dégâts matériels importants, tant du côté français que du côté chinois, ces derniers ayant ouvert le feu sur nos navires dans le Cua Cam : bilan 39 morts et 100 blessés parmi les troupes françaises. Mais le 18 septembre les premiers éléments du corps expéditionnaire entrent à Hanoï. (Les accords du 6 mars sont en annexes).

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LE GENERAL DE GAULLE ET L’INDOCHINE

Le 8 décembre 1941, le Comité National Français du général de GAULLE se déclarait en état de guerre avec le japon, et le 8 décembre 1943 le Comité fait une nouvelle déclaration par laquelle « il répudie au nom de la France tous les actes et abandons qui ont pu être consentis au mépris de ses droits et intérêts ; liée aux Nations Unies, la France poursuivra, à leurs côtés, la lutte jusqu’à la défaite de l’agresseur et la libération totale de tous les territoires de l’Union indochinoise »

Le Comité s’engage compte tenu de sa fidélité et de leur attachement à la communauté française, à donner à ces territoires un statut politique nouveau, dans le cadre d’une organisation fédérale et où les indochinois enfin auront accès à tous les emplois et fonctions de l’Etat.

Mais il faut bien remarquer que dans cette déclaration particulièrement libérale par rapport au statut colonial antérieur, il n’est nullement question d’indépendance.

Lors de la conférence de Brazzaville du 30 janvier au 8 février 1944, le préambule du texte final est fort clair ; rédigé conformément au souhait du général de GAULLE « La conférence africaine française de Brazzaville, avant d’aborder cette partie du programme général qui était proposée à son examen- Il s’agit bien sûr de l’organisation politique de l’empire- A cru devoir poser le principe ci-après :les fins de l’œuvre de colonisation accomplie par la France dans les colonies écartent toute idée d’autonomie, toute possibilités d’évolution hors du bloc français de l’empire, la constitution éventuelle, même lointaine de self-government dans les colonies est à écarter.

Il y a là une distance infinie avec ce que HÔ CHI MINH veut et voudra à tout prix, même au prix d’une guerre avec la France.

A la veille du coup de force japonais en Indochine le 9 mars 1945, les services d’écoute australiens avaient capté des informations radios japonaises qui donnaient des renseignements sûrs concernant la préparation de cette opération, l’heure et la date y étaient mentionnées, ce renseignement retransmis à Paris par message atterrit obligatoirement sur le bureau du chef d’état-major de l’Armée, le général JUIN et bien entendu transmis au chef du gouvernement provisoire….. Machiavélisme de la part de l’homme du 18 juin ou bien oubli, ce message n’est ni retransmis à l’amiral DECOUX, ni à la Résistance indochinoise qui peu à peu s’implante à travers le pays….

D’ailleurs à lire les mémoires de guerre du général le doute n’est plus de mise, je cite, page 197 « Pour pénible que dû être localement cet aboutissement, je dois dire que, du point de vue de l’intérêt national, j’envisageais volontiers qu’on en vînt aux mains en Indochine »- Le général se rend-t-il compte de ce représentaient les forces françaises en Indochine face aux japonais ? et plus loin il poursuit « Connaissant la malveillance des alliés, surtout des Américains, à l’égard de notre position en Extrême- Orient, je tenais pour essentiel que le conflit ne s’y achevât pas sans que nous fussions, là aussi devenus belligérants. Faute de quoi, toutes les politiques, toutes les armées, toutes les opinions se trouveraient résolument d’accord pour exiger notre abdication. Au contraire, si nous prenions part à la lutte -Fut–elle près de son terme- Le sang français versé sur le sol de l’Indochine ne faisait pas, pour moi, le moindre doute, je voulais donc que nos troupes se battent, en dépit de ce que leur situation aurait été désespérée» Je crois que l’on ne peut être plus clair.

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Il faut bien avouer que tout laissait présager en Indochine une opération japonaise de grande envergure de par les renseignements recueillis, mais là aussi négligence, laisser aller, ont conduit au triste bilan que l’on connaît.

Le 24 mars 1945, le gouvernement provisoire à Paris, qui ne se rend pas bien compte de la situation dans les états d’Indochine et du désastre qui vient de s’abattre là-bas, publie un nouveau communiqué concernant l’avenir de l’Indochine reprenant en gros les idées la concernant telles que la conférence de Brazzaville en avait décidé.

« Confirmé par les évènements dans ses intensions antérieures, le gouvernement estime devoir, dès à présent, définir ce que sera le Statut de l’Indochine lorsqu’elle aura été libérée de l’envahisseur.

La fédération indochinoise formera avec la France et avec les autres parties de la communauté une « Union française » dont les intérêts extérieurs seront représentés par la France. L’Indochine jouira au sein de cette Union, d’une liberté propre.

Les ressortissants de la fédération indochinoise seront citoyens indochinois et citoyens de l’Union française. A ce titre, sans discrimination de race, de religion ou d’origine et à égalité de mérite, ils auront accès à tous les postes et emplois fédéraux, en Indochine et dans l’Union.

L’Indochine aura un gouvernement fédéral propre présidé par le gouverneur général et composé de ministres responsables devant lui qui seront choisis aussi bien parmi les indochinois que parmi les français résidant en Indochine. Auprès du gouverneur général, un conseil d’état composé des plus hautes personnalités de la fédération, sera chargé de la préparation des lois et des règlements fédéraux. Une assemblée élue selon le mode de suffrage le mieux adapté à chacun des pays de la fédération, et où les intérêts français seront représentés, votera les taxes de toutes natures, ainsi que le budget fédéral, et délibèrera des projets de lois. Les traités de commerce et de bon voisinage intéressant la fédération indochinoise seront soumis à son examen.

La liberté de pensée et de croyance, la liberté de la presse, la liberté d’association, la liberté de réunion, et d’une façon générale, les libertés démocratiques formeront la base des lois indochinoises.

Les cinq pays qui composent la fédération indochinoise et qui se distinguent entre eux par la civilisation, la race et les traditions garderont leur caractère propre à l’intérieur de la fédération.

Le gouvernement général sera, dans l’intérêt de chacun, l’arbitre de tous. Les gouvernements locaux seront perfectionnés ou réformés : les postes et emplois de chacun de ces pays y seront spécialement ouverts à ses ressortissants.

Avec l’aide de la métropole et à l’intérieur du système de défense général de l’union française, la fédération indochinoise constituera des forces de terre, de mer et de l’air, dans lesquelles les indochinois auront accès à tous les grades à égalité de qualifications avec le personnel provenant de la métropole ou d’autres parties de l’Union française.

La fédération indochinoise jouira dans le cadre de l’union française d’une autonomie économique lui permettant d’atteindre son plein développement agricole, industriel et commercial et de réaliser en particulier l’industrialisation qui permettra à l’Indochine de faire face à la situation démographique….

Le statut de l’Indochine, tel qu’il vient d’être ainsi examiné, sera mis au point après consultation des organes qualifiés de l’Indochine libérée….. »

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Il est certain que ce texte là émanant du gouvernement provisoire fera date et va pratiquement orienter la politique coloniale menée par la France en Asie du Sud- Est et touchera les différents états Cambodge et Laos, pendant des années encore, conduisant non seulement à la guerre, mais plus tard à l’impasse vis-à-vis des négociations futures engagées par les différents gouvernements français tant avec HÔ CHI MINH qu’avec BAO DAI plus tard.

La position du général de GAULLE est donc très claire « la position de la France est très simple, la France prétend recouvrer sa souveraineté sur l’Indochine » L’amiral THIERRY D’ARGENLIEU qui sera le premier haut commissaire en Indochine ne démordra pas de cette position et fera échouer pratiquement toutes les négociations envisageables avec HÔ CHI MINH et ses amis.

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LE RÔLE DE L’AMIRAL THIERRY D’ARGENLIEU

Le 14 août 1945 une décision émanant du conseil des ministres désignait l’amiral Thierry D’ARGENLIEU comme haut commissaire de France en Indochine.

Le général LECLERC lui est désigné comme commandant supérieur des troupes françaises en Extrême- Orient; c’est d’ailleurs à ce titre là qu’il va participer à bord du cuirassé US Missouri en baie de Tokyo à la signature de la capitulation du Japon.

Quant à l’amiral Thierry d’ARGENLIEU, il était peu connu en dehors des cercles gaullistes et surtout des néo-calédoniens qui avaient dû le subir durant la guerre comme haut commissaire de la France dans le Pacifique-(Tahiti - Nouvelles Hébrides - Nouvelle Calédonie et Wallis et Futuna.)

L’amiral âgé de 56 ans, originaire de Navale était entré dans les Ordres en 1920-(Ordre provincial des Carmes).

Rappelé à l’activité en 1939 à la déclaration de guerre comme capitaine de corvette, il est fait prisonnier en juin 1940, réussit à s’évader et passe en Angleterre où il se présente au général de GAULLE : il participe à l’affaire de Dakar où il est blessé.

Particulièrement sectaire, il n’admet autour de lui que des hommes ayant combattu durant la seconde guerre mondiale sous l’égide de la croix de Lorraine et fait donc une nette différence avec les autres, en particulier lorsqu’il arrivera en Indochine comme haut commissaire en pratiquant une épuration sauvage des fonctionnaires ou militaires ayant servi le régime abhorré de Vichy sous les ordres de l’amiral DECOUX, ce qui conduira à un grande désorganisation de l’administration en général et à des évènements très graves. Cela lui; vaudra aussi beaucoup d’inimitiés et le desservira profondément lors de son mandat en Indochine et ses relations ave le général LECLERC en seront très altérées.

Recevant comme mission du général de GAULLE de rétablir la souveraineté française dans les territoires de l’Union Indochinoise, il appliquera cette directive à la lettre, et toute sa politique future s’expliquera par sa fidélité à l’homme du 18 juin.

Beaucoup d’erreurs vont se greffer sur le retour des gaullistes qui comme l’administrateur des colonies, délégué du haut commissaire en Indochine Jean CEDILLE vont considérer les français d’Indochine comme d’affreux collaborateurs…. Ce en quoi ils se trompent lourdement, compte tenu de la conjoncture des années 40-45.

Le 31 octobre 1945, l’amiral Thierry d’ARGENLIEU s’installe à Saigon où l’épuration bat son plein et de nombreux fonctionnaires et cadres sont renvoyés en France pour y être jugés.

La situation est peu brillante, le Vietminh est partout, surtout en Annam et au Tonkin, qui plus est les troupes chinoises occupent une grande partie de l’Indochine

Ces derniers évacueront les territoires occupés après la signature d’un traité, le 28 février 1946, la France abandonnant les concessions de Shanghai, Tien Tsin, Hankéou, Canton et la cession de Kwang Tchéou Van, non sans que le sang français ne coule lors de l’affaire d’Haiphong le 6 mars 1946, lors de la réoccupation du Tonkin.

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Lors de l’absence de l’amiral, haut commissaire, trois hommes ont conduit avec habileté sous la houlette du général LECLERC toutes les négociations tant avec les chinois qu’avec HÔ CHI MINH, d’abord pour l’évacuation de ces derniers, puis avec HÔ CHI MINH pour notre retour au Nord Vietnam. -Ces trois hommes étant- Le général Raoul SALAN, Jean SAINTENY et Pierre MESMER.

L’amiral Thierry d’ARGENLIEU dès son retour critique sévèrement les militaires, qui dit-il « Préfèrent traiter que de se battre ». Le personnage est d’ailleurs tout à fait à l’opposé de ce que représente le général LECLERC, qui a compris dès le début que l’affaire indochinoise était éminemment politique et qu’il fallait traiter ce problème sur ce plan et non par les armes, car la France pourrait difficilement s’engager dans une guerre de reconquête à 12.000 kilomètres de la mère patrie.

Néanmoins plusieurs conférences issues des accords du 6 mars 1946 sont prévues.

HÔ CHI MINH pour des raisons de politique interne préférait Paris, l’amiral lui voyant mieux Dalat et en fait les deux parties s’entendent sur les deux.

Une préparatoire à Dalat en avril dont les travaux serviront de base à celle de Paris prévue un mois plus tard, et la délégation du Vietminh entend bien y jouer son rôle et arriver à ses fins, c'est-à-dire obtenir l’indépendance totale du pays après la réunification des trois Ky - Annam – Tonkin - Cochinchine.

L’ouverture de la première conférence a lieu à Dalat dans l’enceinte du lycée YERSIN et dès les premiers contacts, les représentants vietnamiens dont la majorité membres du Vietminh, demandent que l’Indochine soit unifiée, comme ils l’avaient toujours voulu avec l’indépendance à la clé…..

Cela ne convient pas du tout à la fois à la délégation française et bien entendu à l’amiral Thierry d’ARGENLIEU qui va s’en tenir farouchement à la déclaration du général de GAULLE du 24 mars 1945, qui à l’époque et sans trop connaître la situation en Indochine et les conséquences du 9 mars 1945, avait pris position pour la constitution d’une fédération indochinoise, composée de cinq pays distincts, fédération dirigée par un gouverneur général….

Le 11 mai la conférence se termine sur une impasse, chacun restant sur ses positions, pensant que tout se règlera à Paris.

La conférence de Paris ou plutôt de Fontainebleau s’ouvre le 6 juillet dans un climat exécrable, HÔ CHI MINH étant arrivé depuis le 11 juin en France, avait été « baladé » un peu partout en France en compagnie du général SALAN, la France n’ayant pas de gouvernement, lequel ne sera formé à la va vite que le 24 juin 1946.

Sur ces entrefaites la délégation Vietnamienne apprend que l’amiral aurait fait proclamé, sans l’aval de Paris et d’ailleurs sans aucune réaction d’un quelconque haut responsable politique français, une république autonome de Cochinchine, ayant à sa tête le docteur THINH et qu’en plus le corps expéditionnaire français avait réoccupé une grande partie du centre Annam et des hauts plateaux.

Du côté français -Naïveté oblige- On découvre bien tardivement les contacts entre les membres de la délégation vietnamienne et le Parti communiste…. Il y a de quoi rêver !

Les divergences sont trop grandes pour qu’un accord puisse être conclu ; d’un côté, les vietnamiens s’en tiennent à la réunion des trois Ky et à l’indépendance complète du Vietnam ; du côté français, personne n’est prêt à lâcher l’Indochine, perle de l’Empire colonial français.

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Durant plus de trois semaines, réunions après réunions les discussions s’enlisent et en plus on apprend à Paris qu’une nouvelle conférence a été organisée par l’amiral Thierry d’ARGENLIEU le 1° août, conférence regroupant la Cochinchine, le Cambodge et le Laos afin de débattre du futur statut de la fédération indochinoise.

Là encore le haut commissaire a agi de son propre chef sans consultation aucune de Paris et sans réaction non plus des instances gouvernementales.

Georges BIDAULT alors, Président du conseil, ainsi que Marius MOUTTET et Alexandre VARENNE ne sont pas dupes du jeu joué par HÔ CHI MINH et sa délégation, mais la délégation française n’est pas non plus sans reproche.

Néanmoins le 14 septembre 1946, le ministre de la France d’Outre-mer, Marius MOUTTET, qui fut par le passé l’avocat d’HÔ CHI MINH, et le Président de la république démocratique du Vietnam, signent un Modus- Vivendi.

Mais il faut savoir que pendant que se déroulaient les conférences de Dalat et de Fontainebleau, des incidents graves, meurtres d’opposants au Vietminh, vietnamiens profrançais, attentats contre les forces françaises tant à Saigon qu’au Nord Vietnam. A Langson on eut à déplorer des évènements sanglants avec 9 morts du côté français et 9 blessés et 50 vietminh de tués.

Le 20 novembre à Haiphong l’arraisonnement d’une jonque de contrebande conduit à des affrontements meurtriers entre Vietminh et forces françaises, ainsi qu’à Bac Ninh.

Le 19 décembre 1946 c’est le coup de force Vietminh à travers toute l’Indochine. Le haut commissaire Thierry d’ARGENLIEU ne sera relevé de ses fonctions que le 5 mars 1947 et est remplacé par monsieur Emile BOLLAERT, ancien haut fonctionnaire et ancien résistant, mais le problème de l’Indochine reste entier et ne sera pas réglé pour autant, même avec l’arrivée d’un socialiste au nouveau gouvernement.

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LES PRINCIPALES CLAUSES DU MODUS VIVENDI DU 14 SEPTEMBRE 1946

A. Les gouvernements français et vietnamien « sont fermement décidés à poursuivre, dans un esprit de confiance réciproque, la politique d’accords et de collaboration instaurée par la convention préliminaire du 6 mars 1946 », et précisée à Dalat et Fontainebleau.

« Persuadés que cette politique correspond seule aux intérêts communs des deux pays et aux traditions démocratiques dont ils se réclament, les deux gouvernements… estiment le moment venu de marquer un nouveau progrès dans le développement des relations entre la France et le Vietnam, en attendant que les circonstances permettent de conclure un accord total et définitif… »

Le modus vivendi doit apporter « dans le cadre d’accords limités, des solutions provisoires aux principales questions d’intérêt immédiat qui se posent entre la France et le Vietnam », contribuer « à établir dans un proche avenir un climat de calme et de confiance permettant la poursuite prochaine des négociations » pour un traité général définitif. Ces négociations seront reprises « aussitôt que possible et au plus tard au mois de janvier 1947 ».

B. Le Vietnam accepte le principe de l’unité monétaire et douanière de l’Indochine. La piastre indochinoise fera partie de la zone franc.

Des commissions mixtes étudieront le statut de l’Institut d’Emission à créer et prépareront l’organisation des douanes de l’Indochine.

Une autre commission mixte étudiera les mesures propres à rétablir les communications entre le Vietnam et les autres pays de la Fédération indochinoise et de l’Union Française.

En attendant la conclusion d’un accord définitif réglant la question des relations diplomatiques du Vietnam avec les pays étrangers, une commission mixte « fixera les arrangements à prendre pour assurer la représentation consulaire du Vietnam dans les pays voisins ».

C. le Vietnam s’engage à faire appel « par priorité aux ressortissants français chaque fois qu’il aura besoin de conseillers, de techniciens ou d’experts » Cette priorité ne cessera de jouer qu’en cas d’impossibilité pour la France de fournir le personnel demandé.

Le Vietnam s’engage, sous réserve de réciprocité, à ne pas soumettre les biens et entreprises françaises au Vietnam à un régime plus rigoureux que les biens et entreprises vietnamiennes. Le statut des biens et entreprises françaises au Vietnam ne pourra être modifié que d’un commun accord entre les deux gouvernements. Les biens réquisitionnés par le gouvernement du Vietnam seront rendus à leurs propriétaires. L’Institut Pasteur sera rétabli dans ses droits et biens.

D. Les ressortissants français au Vietnam jouiront de la même liberté d’établissement et des mêmes droits démocratiques que les nationaux. Les ressortissants vietnamiens en France jouiront des mêmes droits.

Avec la même réciprocité, la recherche scientifique, l’établissement et le fonctionnement d’instituts scientifiques sont libres au Vietnam pour les ressortissants français. De même, des établissements français d’enseignement des divers degrés pourront fonctionner librement au Vietnam.

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E. Les deux gouvernements décident de mettre fin de part et d’autre aux « actes d’hostilité et de violence » en Cochinchine et Sud Annam. Des accords d’état-major règleront les conditions d’application et de contrôle de cette décision. Les prisonniers politiques et militaires seront libérés. Il sera mis fin aux propagandes inamicales de part et d’autre.

La jouissance des libertés démocratiques sera réciproquement garantie. Les deux gouvernements garantissent qu’aucune poursuite ne sera engagée, et qu’aucun acte de violence ne sera toléré, contre toute personne en raison de son attachement à la France ou au Vietnam.

« En ce qui concerne le référendum prévu par la Convention préliminaire du 6 mars, les deux gouvernements se réservent d’en fixer ultérieurement la date et les modalités »

F. Le modus vivendi entrera en vigueur le 30 octobre 1946.

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LA CONVENTION DU 6 MARS 1946

Le 6 mars, au matin, HÔ CHI MINH fait savoir qu’il donne son accord aux conditions envisagées. Le jour même, à 17 heures, en présence de représentants britanniques, américains et chinois, est signée la convention préliminaire franco-vietnamienne.

Le gouvernement français reconnaît la République du Vietnam comme un Etat libre, ayant son gouvernement, son parlement, son armée et ses finances, faisant partie de la Fédération Indochinoise et de l’Union française. En ce qui concerne la réunion des trois Ky, le gouvernement français s’engage à entériner les décisions prises par les populations consultées par référendum.

2/ Le gouvernement du Vietnam se déclare prêt à accueillir amicalement l’armée française lorsque, conformément aux accords internationaux, elle relèvera les troupes chinoises. Un accord annexe joint à la présente Convention préliminaire fixera les modalités selon lesquelles s’effectueront les opérations de relève.

3/ les stipulations ci-dessus formulées entreront immédiatement en vigueur. Aussitôt après l’échange des signatures, chacune des Hautes Parties contractantes prendra toutes mesures nécessaires pour faire cessez, sur le champ, les hostilités, maintenir les troupes sur leurs positions respectives et créer un climat favorable nécessaire à l’ouverture immédiate de négociations amicales et franches. Ces négociations porteront notamment sur :

a) les relations diplomatiques du Vietnam avec les Etats étrangers ;

b) le statut futur de l’Indochine ;

c) les intérêts économiques et culturels français au Vietnam.

Hanoi, Saigon ou Paris pourront être choisis comme siège de la conférence.

Fait à Hanoï, le 6 mars 1946. Signé : HÔ CHI MINH et VU KHANH Signé SAINTENY. »

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A PROPOS DU MODUS VIVENDI

Il est à noter que le socialiste Marius MOUTET et le communiste NGUYEN AI QUOC se connaissent de longue date, puisque l’un était l’avocat de l’autre. Il y a une grande différence entre les deux hommes, MOUTET, humaniste voudrait éviter la guerre qu’il prévoit à brève échéance en Indochine ; il est même sensible aux propos d’HÔ CHI MINH qui lui fait valoir sa position inconfortable s’il rentre à Hanoï sans garantie et joue même sur la corde sensible de son interlocuteur en lui disant « Ne me laissez pas repartir ainsi ; armez mon bras contre ceux qui cherchent à me dépasser. Vous n’aurez pas à le regretter ».

Donc le 14 septembre ce modus vivendi est signé par les deux parties : ce document en fait écarte l’essentiel pour les français, l’indépendance du Vietnam et le sort de la Cochinchine, mais en fait il ne règle rien, même si le général Raoul SALAN a mis en avant toute sa diplomatie et son savoir militaire pour rédiger et faire accepter aux vietnamiens le protocole d’accord militaire.

En fait les deux parties politiques et notamment les français s’estiment satisfaites, sans se rendre compte qu’à Hanoï se prépare lentement l’agression du 19 décembre 1946.

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LES SOCIALISTES ET LA GUERRE D'INDOCHINE Le 18 décembre 1946, Léon Blum obtient l'investiture et le 22 décembre demande

au général Leclerc de retourner au Vietnam et d'enquêter sur place.

Léon Blum intervient à l'Assemblée nationale. « Le vieux système colonial qui fondait la possession sur la conquête et son

maintien sur la contrainte , qui tendait à l'exploitation des terres et des peuples conquis, est aujourd'hui chose révolue. Il ne peut exister là-dessus la moindre divergence de vues entre l'Assemblée et nous. Dans notre doctrine républicaine, la colonisation n'atteint son but final et ne trouve sa véritable justification que le jour où elle cesse, c'est-à-dire le jour où le peuple colonial a été rendu pleinement capable de vivre émancipé, de se gouverner lui-même. La récompense du peuple colonisateur est alors d'avoir suscité dans le peuple colonisé des sentiments de gratitude et d'affection, d'avoir créé la pénétration et la solidarité de pensée, de culture, d'intérêts, qui permettent à l'un et à l'autre de s'unir librement. Une fois cette crise surmontée, notre but restera donc toujours le même. Il ne s'agit pas de satisfaire des intérêts privés ; il s'agit encore moins de revenir sur nos principes et sur nos engagements ; il s'agit de reprendre avec loyauté l'œuvre interrompue : c'est-à-dire l'organisation d'un Vietnam libre dans une Union indochinoise librement associée à l'Union française.

Mais avant tout doit être rétabli l'ordre pacifique, qui sert nécessairement de base à l'exécution des contrats »

Léon Blum reprend pratiquement mot pour mot ce que voulait le général de Gaulle, mais peut-être avec plus de naïveté..... ..Sans se rendre compte de ce que veut le Vietminh !

*

A la même époque, le comité directeur du parti Socialiste se préoccupe de la situation en Indochine, notamment lors de la réunion du 23 décembre 1946

II y a là une prise de position nettement ambiguë. D'un côté on fait confiance à Léon Blum, de l'autre c'est un acte de méfiance envers l'armée.

Guy Mollet déclare d'ailleurs :

« II ne faut pas méconnaître l'attitude réelle de Léon Blum qui, dès la première heure, s'est montré ferme sur une position correspondant à celle, unanime du parti. L'objectif de Léon Blum était d'éviter la guerre (...) Nous devons souligner les fautes graves de l'armée et signaler les coïncidences des dates, auxquelles se sont déclenchés les événements, avec naissance du gouvernement Blum »

En janvier 1947 Paul Ramadier, qui va expulser les communistes du gouvernement, pense lui aussi qu'il faut préparer l'intégration de l'Union indochinoise dans l'Union française, sur les bases de l'indépendance du pays avec toutefois la sauvegarde des intérêts français et avec présence des forces française dans des bases stratégiques essentielles

Emile Bollaert, lui aussi comme Léon Boutbien, ancien résistant et déporté, radical-socialiste, est nommé haut-commissaire en Indochine en remplacement de l'amiral Thierry d'Argenlieu, relevé de ses fonctions-(Mars avril 1947)

II reçoit d'ailleurs les dernières recommandations du général Leclerc : « Encore une fois, monsieur le haut-Commissaire, traitez, traitez à tous prix ! »

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En fait au comité directeur de la SFIO, personne ne veut d'un affrontement militaire, mais personne n'entend que la France abandonne l'Indochine...

Salomon Grunbach résume ainsi la situation : « Pour l'avenir de la République et le rôle du socialisme français, il est délicat de

choisir entre les deux solutions possibles. Je me sens personnellement troublé en ce qui concerne la personnalité d'Hô Chi Minh. J'ai l'impression que nous avons trop confiance en lui et dans ses méthodes. Pratiquement nous devrions proclamer notre désir de rechercher des négociations, mais devons-nous renoncer à envoyer des troupes ? Nous ne pouvons pas abandonner l'Indochine .... »

Et pendant ce temps là les combats continuent...

Les 19 et 20 mars 1947, Guy Mollet, cite Ferhat Abbas « Ni tutelle, ni nouveaux maîtres, ni séparatisme »

Et Léon Boutbien qui ne cache pas ses inquiétudes pour l'avenir renchérit : « C'est la tâche de notre Parti de faire comprendre aux peuples d'Outre-mer qu'un

mouvement de sécession n'aboutirait pas, pour eux à une véritable libération, mais tout au plus, dans le cas le plus favorable, à déplacer l'injustice en faveur des catégories privilégiées des territoires colonisés et même en faveur des nationalistes étrangers. Ils n'arriveraient dans le monde moderne qu'à changer de maître, à une exploitation dont le caractère fondamental ne serait pas modifié ».

Plus tard, la solution Bao Daï interviendra, mais compte tenu de la corruption qui régnait autour de l'empereur, les intrigues de palais, et les erreurs commises par nos gouvernants, la guerre ne pouvait que conduire à l'enlisement, malgré les succès du général Lattre en 1951, envoyé en Indochine, à la fois comme Haut-commissaire et commandant en chef.

En fait si l'on en croit monsieur Guy Mollet, c'est l'armée qui elle a déclenché le coup de force Vietminh du 19 décembre 1946.......

Le député du parti socialiste semblait bien mal renseigné, ce que certains de ses confrères et non des moindres le feront quelques temps après....... Notamment le docteur Léon Boutbien !

Yves Dechezelles intervient également au cours de ce débat fustigeant l'Année, sans connaître lui aussi, réellement ce qu'il vient de se passer en Indochine.

« Le commandement français en Indochine agit comme une force autonome ayant un plan concerté des militaires pour réduire à néant la politique des accords. Les événements ont pris cette proportion à partir de la formation du gouvernement socialiste. La première difficulté sera de prendre contact avec Hô Chi Minh au Vietnam où il se trouve actuellement discuté ; il est considéré par les extrémistes comme un collaborateur »

On peut se demander si ce monsieur ne rêve pas ?

Le 12 janvier 1947, lors du comité directeur, Léon Boutbien, ancien résistant et déporté, nuance nettement les propos tenus ci-dessus , car chose étrange , il était en Indochine au moment des événements de décembre 1946 en compagnie d'ailleurs de Marius Moutet.

« Je crois la responsabilité partagée. Il est urgent de prendre une décision. Le conflit ne peut être réglé par une politique de force contre tout un peuple, ce qui nous ferait courir le risque de perdre l'Indochine. La politique d'abandon n'est pas non plus souhaitable...... »

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On ne peut être plus clair ; mais que veut-on exactement pendant que nos soldats et les vietnamiens non communistes se font tuer ?

Mais continuant sur sa lancée, Léon Boutbien rajoute « D'Argenlieu a tout raté. Il n'a fait aucune politique, ni celle de la souveraineté, ni celle des accords, ni celle du gouvernement de Cochinchine. Pour déplacer d'Argenlieu, il faut d'abord convaincre ceux de qui dépend la décision, trouver un remplaçant, l'objet de ma mission et celle du général Leclerc était de trouver les raisons d'un renvoi »

Marius Moutet, Ministre de la France d'outre-mer, dont on connaît les liens avec Hô Chi Minh n'est pas du tout d'accord avec les déclarations de Guy Mollet et d'Yves Dechezelles , et interviendra lors du conseil national du Parti Socialiste à Puteaux au mois de mars 1947 , en ces termes :

« L'épreuve de force, j'affirme qu'elle a été voulue par le Vietnam ; quelque erreur, quelque faute qui puissent être reprochées à notre politique, je suis convaincu qu'elles ne sont pas liées à cette épreuve de force.. »

II rajoute d'ailleurs : « L'attaque du 19 décembre, sa nature, sa préméditation, et ses développements

nous contraignent à une action militaire. Lorsque l'armée aura rétabli l'ordre, il sera alors possible d'examiner à nouveau les problèmes politiques »

La situation se résume à : Commençons à nous battre et par la suite nous verrons venir les événements !

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LE FRONT DE L'INDEPENDANCE DU VIETNAM

(VIETNAM DOC LAP DONG MINH)

Créé officiellement le 8 septembre 1941 par Nguyen Ai Quoc, pour lutter contre le fascisme français et japonais, jusqu'à la libération totale du Vietnam.

Le premier manifeste lancé le 1 ° octobre précise « union de toutes les couches sociales, de toutes les organisations révolutionnaires, de toutes les minorités ethniques. Alliance avec tous les éléments antifascistes français.

Un but : la destruction du colonialisme et de l'impérialiste fasciste.»

On retrouve là le vocabulaire connu de Moscou

*

Le 4 juin 1944, le Vietminh s'en prend à la déclaration faite par le générai de Gaulle à Constantine le 8 décembre 1943.

« Ainsi les Français qui luttent contre la domination allemande prétendent maintenir leur domination sur d'autres peuples. Nous communistes Indochinois, protestons de la façon la plus énergique contre l'inconséquence du Comité d'Alger....

Le Comité de libération d'Alger a tort de croire que les peuples Indochinois se contentent de flatteries, des assurances, des promesses.

L'avenir de notre pays, c'est nous qui le préparons. Notre liberté, nous la voulons entière.... »

Le 6 août 1944, une nouvelle déclaration, parait sous forme de tract et montre le vrai visage du Vietminh.

«Notre principe est d'éliminer nos ennemis les uns par les autres. Il s'agit d'exploiter les autres sans se laisser exploiter soi-même.

A l'intérieur nous avons besoin de pactiser avec les Gaullistes et les Chinois. Les Gaullistes luttent en effet contre les fascistes français. Les Chinois se dresseront contre les japonais et les Français dès que l'armée chinoise entrera en Indochine....

Tous les mouvements (Insurrectionnels précédents) ont échoué par manque ou insuffisance de préparatifs, absence de direction et de coordination parce qu'aucun gouvernement provisoire ne s'était formé pour remplacer le gouvernement impérialiste.

II faut développer la guérilla pour la transformer en soulèvement général. Il faut harceler l'ennemi par des attaques continuelles et mener le jeu nous-mêmes. Il faut saboter le front arrière de l'ennemi aidé pour cela par les masses…Notre but est de créer des zones de gouvernement révolutionnaire pour arriver peu à peu à l’établissement d'un pouvoir unique dans tout le pays.

L'insurrection armée de notre peuple sera déclenchée vers la dernière phase de la guerre mondiale, lorsque l’Angleterre, l’Amérique et la Chine viendront s’emparer de l’Indochine, lorsque gaullistes et fascistes français s’affronteront en Indochine, que les

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français et les japonais se battront et que les fascistes franco-japonais entreront en conflit avec les démocraties.

L'heure H est proche.... L'Allemagne est presque battue et sa défaite va provoquer celle du Japon qui ne pourra résister à l'offensive générale.

Alors les Américains et les Chinois pénétreront en Indochine, tandis que les Gaullistes se lèveront contre les japs. Ceux-ci renverseront peut-être avant les fascistes français afin de former un gouvernement militaire.

Tous les gouvernements fantoches, incapables et faibles tomberont. L'Indochine tombera dans l'anarchie. Nous n'aurons pas besoin alors de nous emparer du pouvoir, puisqu'il n'y aura plus de pouvoir. Nous formerons un gouvernement qui régnera partout où nos ennemis, français et japonais, seront absents, incapables de maintenir leur prestige à cause de leur faiblesse militaire...... »

Il est à noter que l'ennemi désigné est la France et que le Japon n'est jamais trop désigné comme tel......

Cette déclaration laisse entrevoir l'avenir et la duplicité du Vietminh......

*

Le 2 septembre 1945, le gouvernement d'Hô Chi Minh proclame solennellement l'indépendance du Vietnam. Le gouvernement provisoire a été formé le 19 août ; l'ex-empereur Bao Daï devenant le conseiller suprême du gouvernement, sous le nom de Vinh Thuy.'.....

« Notre peuple a brisé toutes les chaînes qui ont pesé sur nous pendant près de cent ans pour faire de notre Vietnam un Etat indépendant. Nous membres du gouvernement provisoire, représentant la population entière du Vietnam, déclarons n'avoir désormais aucun rapport avec la France impérialiste, annuler tous les traités que la France a signé au sujet du Vietnam , abolir tous les privilèges que les Français se sont arrogés sur notre territoire...... »

Le 11 septembre 1945 : Le parti, prend à lui seul, la direction du front Vietminh.....

Le 18 octobre 1946: Hô Chi Minh : «Je suis convaincu, qu'en appliquant loyalement le Modus Vivendi,

nous améliorerons considérablement nos relations. Il y aura beaucoup de difficultés, mais nous les vaincrons en commun »

La suite fut moins évidente.......

La voix du Vietnam - Radio d'Hô Chi Minh Nuit du 20 au 21 décembre 1946. « Compatriotes ! Debout ! Que tous les vietnamiens, hommes et femmes, jeunes et

vieux, sans distinction de religion, de parti, de nationalité, se dressent pour combattre les colonialistes français, pour sauver la patrie ! Entrez dans la lutte avec tous les moyens dont vous disposez. Que celui qui a un fusil se serve de son fusil, que celui qui a une épée se serve de son épée ! et si l'on a pas d'épée, qu'on prenne des pioches et des bâtons ».

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LE PARTI COMMUNISTE FRANÇAIS ET LA GUERRE D’INDOCHINE

Le Parti Communiste Français participe dès la fin de la seconde guerre mondiale à la constitution du premier gouvernement de la république en France et certains ministres vont y jouer un rôle non négligeable.

Au début de la crise indochinoise, il soutient prudemment les nationalistes vietnamiens se lançant dans des déclarations dialectiques dont seuls les communistes en connaissent les secrets, soit à travers la presse, soit lors de meetings du Parti.

Ce n’est qu’à partir de 1947 que les choses vont se brusquer puisque déjà le 28 mars 1947, François BILLOUX, ministre communiste, refuse de s’associer à l’Assemblée Nationale à un hommage aux soldats du corps expéditionnaire en Extrême-Orient, Maurice THOREZ quittant ostensiblement l’hémicycle.

Le 5 mai 1947, les communistes sont chassés du gouvernement RAMADIER, après avoir voter contre les crédits militaires pour l’Indochine le 21 mars, puis contre le gouvernement auquel ils appartiennent, sur le gel des salaires.

Dans la nuit du 2 au 3 décembre 1947, la cellule communiste d’Arras, sabote la voie ferrée Paris - Lille et dans déraillement qui s’ensuit on dénombre 16 morts et 30 blessés.

A partir de 1949, la guerre froide battant son plein, le PCF lance plusieurs offensives contre la «sale guerre» empruntant ce slogan au journal Le Monde qui en avait fait son titre principal dans son édition du 17 janvier 1948.

Bien entendu les courroies de transmission du Parti ne sont pas en reste, CGT, comités locaux etc…intellectuels de gauche rejoignant le Parti comme Jean Paul SARTRE, Simone de BEAUVOIR, PICASSO, Paul MUS, Paul ELUARD, Jacques PREVERT, Gérard PHILIPPE, ARAGON, Elsa TRIOLET etc…

Sont également déclenchées des grèves dans les ports, les dockers refusant d’embarquer les matériels et munitions destinés au CFEO, à la SNCF on assiste non seulement à des grèves répétées, mais également à des sabotages dans l’embarquement des matériels notamment à Grenoble, sabotages des matériels militaires dans les arsenaux et établissements régionaux du matériel, sabotages de munitions, opposition systématique dans les communes gérées par les communistes des collectes publiques de sang frais pour les blessés…..

L’affaire Henri MARTIN ou Raymonde DIEN, enfin tous ces sabotages ne sont pas sans rappeler ceux que le PCF commanditait en 1939-1940 alors qu’il était l’allié objectif des Nazis après la signature du Pacte de non-agression germano-soviétique d’août 1939.

En outre n’est-ce-pas Jacques DUCLOS, secrétaire général du Parti Communiste qui déclarait « Nous travaillons pour la défaite de l’armée française en Corée et en Indochine ? »

Et chose abjecte au possible, l’action de militants communistes dans certaines gares, comme Avignon, où des blessés d’un train sanitaire furent molestés et insultés.

Peut-on évoquer les visites faites en Indochine par des cadres du Parti à de hauts responsables du Vietminh ? Et si l’on parlait de l’affaire BOUDAREL ?

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LES COMMUNISTES ET LA GUERRE D'INDOCHINE

L'Humanité en mai 1949

« Plus un homme, plus un sou pour la guerre du Vietnam »

*

1952

Jacques Duclos, secrétaire général du parti Communiste :

« Nous travaillons pour la défaite de l'Armée française en Corée, en Indochine... »

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L’AFFAIRE DES PIASTRES

Cette affaire appelée, affaire des piastres, trafic de piastres ou scandale des piastres a éclaboussé nombre de personnages illustres de la IV° République et venant s’ajouter à d’autres scandales touchant la guerre d’Indochine, a profondément marqué l’opinion publique de l’époque.

***

Quelques explications sont nécessaires pour comprendre le problème :

La piastre était la monnaie ou plutôt l’unité de compte monétaire de l’Indochine française, monnaie frappée par la Banque d’Indochine qui en avait le monopole.

Sur le plan administratif son cours était lié au franc métropolitain, tout comme l’étaient d’ailleurs le franc CFA et le franc CFP.

En 1945, le taux de change de la piastre avait été fixé à 17 francs, alors qu’en fait sa valeur était bien moindre sur les marchés et notamment ceux d’Asie du Sud-est (10 francs et même moins)

En fait la différence de change était supportée par le contribuable français.

Un trafic florissant est donc né à partir de 1947–1948, basé sur de fausses exportations, fausses factures - (Déjà !) - ou marchandises surfacturées……

Comme cela est écrit en début d’article, plusieurs hauts personnages de la IV° République y trempent et des noms sont avancés comme l’empereur BAO DAI, des ministres de son entourage, Emile BOLLAERT, ancien haut commissaire, les généraux REVERS et MAST qui seront impliqués dans l’affaire des fuites, l’ancien ministre Paul GIACCOBI, François MITTERRAND étant alors ministre des colonies et René BOUSQUET directeur de la Banque d’Indochine.

L’affaire fut dévoilée en 1950, - Mauvaise année pour l’Indochine - mais à l’époque n’éveilla que peu d’intérêt et pour cause.

Par contre elle rebondit en 1952-1953, quand un groupe de parlementaires se rendit compte, à la suite de révélations journalistiques que le Vietminh profitait également de ce trafic et lui permettait ainsi d’acquérir à l’étranger des armes de plus en plus sophistiquées qui allaient servir contre les soldats du corps expéditionnaire en Extrême-Orient.

L’opinion publique, qui pourtant ne prêtait pas grande attention à la guerre d’Indochine fut particulièrement troublée d’autant plus que la sortie d’un livre signé par Jacques DESPUECH mit le feu aux poudres.

Ainsi était démontré que la poursuite de la guerre en Indochine permettait à un nombre important de firmes d’import-export, à des hommes politiques et à des escrocs de bas étage de s’enrichir sur le dos des soldats français !

Une commission parlementaire fut constituée le 2 juillet 1953 : il faut noter qu’auparavant, le président du conseil René MAYER avait de son propre chef ramené le taux de change de la piastre à 10 francs, mais ceci en violation des accords du 8 mars 1949 et de

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ceux de Pau en 1950, sans que les Etats dits associés de l’Indochine soient consultés, ni avertis.

L’Assemblée Nationale décida le 12 décembre 1953 de ne pas divulguer les travaux de la commission parlementaire ; une équipe de spécialistes membres de cette commission envoyé en Indochine pour conforter les preuves déjà acquises, prit l’avion pour Saigon le 1° septembre 1953, et comme par hasard leur avion s’écrasa dans les Alpes et il n’y eut aucun survivant…….

L’affaire des piastres s’éteignit d’elle-même avec les accords de Genève et le retrait de la France de la péninsule indochinoise en juillet 1954.

Aucune suite judiciaire n’y fut donnée, le rapport fut définitivement enterré, le président de la commission Jacques MONDON l’ayant déposé sur le bureau de l’Assemblée le 28 janvier 1955 fut nommé le lendemain Secrétaire d’Etat à l’Intérieur, il n’y eut donc aucune discussion, l’affaire des piastres était bien finie !

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L’AFFAIRE REVERS

OU

L’AFFAIRE DES GENERAUX

Le 16 février 1950, le général REVERS, ancien chef d’Etat-major des forces terrestres françaises, comparait devant une commission parlementaire ; il y est convoqué pour s’expliquer sur l’Indochine et de son rapport ultra secret qui pourtant circule dans tout Paris… et même au Vietnam !

Cette commission d’enquête parlementaire est composée de trois élus socialistes, de trois M.R.P - (Démocrates chrétiens), un radical-socialiste, un républicain indépendant, un R.P.F - (Gaulliste), un U.D.S.R, un P.R.S. et un élu communiste.

C’est une affaire qui a priori paraît très grave et que la presse de l’époque qualifie d’affaire des fuites ou d’affaire des généraux, car en fait deux généraux y sont mêlés.

Un incident banal qui commence sur la plateforme d’un autobus parisien à proximité de la gare de Lyon le 18 septembre 1949, où un soldat du corps expéditionnaire en Indochine, rapatrié, Thomas PEREZ, va prendre le train pour partir en convalescence sur la Côte d’Azur ; il va se prendre de querelle avec deux ressortissants vietnamiens, et la police intervenant, embarque les protagonistes pour un contrôle d’identité, et découvre alors une serviette en cuir dans laquelle se trouvent des copies du rapport du général REVERS, copies traitant de la situation en Indochine, d’où il vient de rentrer de mission.

Ce rapport fait état non seulement de la situation en Indochine, qui est loin d’être brillante, de nos forces armées engagées là-bas, mais également de l’ambiance qui règne autour de l’empereur BAO DAI, de la corruption latente de son entourage, émet aussi une critique importante sur la politique menée par notre gouvernement, et fait très important, il y est proposé la future évacuation des postes tenus par nos forces sur la route coloniale n°4 - La RC4 -. Dans cette sacoche les policiers trouvent aussi un carnet de chèques dont les souches paraissent assez éloquentes, ainsi qu’un carnet d’adresses…..

On s’aperçoit encore que ce rapport a été monnayé par des vietnamiens dont un au moins est le représentant en France du général XUAN, alors premier ministre de l’empereur BAO DAI….. Un second personnage, agent du vietminh, celui- là, DO DAI PHUC est arrêté à la gare Saint Lazare par la D.S.T.

L’enquête menée par la D.S.T. conduira rapidement à un individu nommé PEYRE, repris de justice et trafiquant, que le S.D.E.C.E Service de documentation et de contre espionnage utilisait occasionnellement, puis au général MAST, qui lui, ambitionnait d’être nommé au poste de commandant militaire en Indochine, et qui avait reçu du général REVERS un des exemplaires du dossier; on s’aperçut également que des sommes importantes avaient été allouées au général MAST - un million de francs de l’époque- Au général REVERS et à André LE TROQUER, vice-président socialiste de l’Assemblée Nationale.

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Malgré l’enquête diligentée par un magistrat militaire, le gouvernement de l’époque tenta d’étouffer l’affaire, et un non-lieu sembla la clôturer. Mais la presse mise au courant par des fuites fit éclater le scandale.

Les travaux de la commission parlementaire vont durer un mois, sans que l’on sache à quoi s’en tenir…

Entre temps le gouvernement QUEUILLE qui est tombé est remplacé par un nouveau gouvernement dirigé par Georges BIDAULT, et des incidents assez vifs éclatent à l’Assemblée Nationale.

Puis finalement la commission d’enquête dépose ses conclusions et décide d’envoyer les deux généraux devant une instance disciplinaire. Le 7 avril 1950, le Conseil Supérieur de la guerre est officiellement saisi de l’affaire des deux généraux ; le 21 mai le général REVERS et le général MAST sont mis à la retraite d’office par le Conseil des Ministres appliquant les conclusions du Conseil Supérieur de la guerre.

Entre temps de nouveaux incidents se déroulent à l’Assemblée Nationale où d’anciens ministres du président QUEUILLE sont accusés d’avoir touché des pots de vin…..

Le gouvernement de Georges BIDAULT tombe…

Le dénommé PEYRE, comme par hasard s’embarque avec toute sa famille le 30 novembre pour le Brésil.

En octobre 1950, c’est le désastre de la RC 4……

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LES PRISONNIERS FRANÇAIS EN INDOCHINE

AVANT PROPOS

On aborde là un sujet excessivement délicat, car personne, ni les médias, ni les gouvernements successifs n’ont fait état des souffrances endurées, des crimes commis par nos adversaires qu’ils soient japonais ou vietminh durant la seconde guerre mondiale, notamment lors du coup de force japonais du 9 mars 1945 ou de celui du Vietminh le 19 décembre 1946. Mais il y a aussi la suite, c'est-à-dire l’incarcération de nos soldats et de nos ressortissants dans les camps de prisonniers jusqu’à la capitulation du Japon et celle de nos prisonniers par les viets jusqu’en septembre 1954.

PRISONNIERS DES JAPONAIS (Mars 1945-Septembre 1945)

La captivité des prisonniers français détenus par le Japon entre le coup de force du 9 mars 1945 et la capitulation de l’Empire du Soleil Levant le 2 septembre 1945 est beaucoup moins connue que celle subie par les autres prisonniers en Europe .

La seule source de renseignement est constituée par les comptes-rendus établis par les prisonniers eux-mêmes, car en 1945, les autorités françaises prenant la relève de l’amiral DECOUX considéraient les français d’Indochine comme d’affreux collaborateurs et notamment la commission d’épuration mis en place par l’amiral Thierry d’ARGENLIEU.

Les différents mode d’internement que les japonais ont réalisé du mois de mars au mois de septembre 1945 ont profondément modifié l’idée que l’on pouvait se faire des camps de prisonniers et il est heureux que nos prisonniers hommes, femmes et enfants ne soient restés qu’un laps de temps relativement court dans ces camps, sinon la mortalité aurait atteint les tristes pourcentages que l’on retrouve dans les camps ayant abrités les prisonniers britanniques, australiens, néo-zélandais ou américains faits prisonniers dans les tous premiers mois de la seconde guerre mondiale après Pearl harbor.

A la condition de vie excessivement précaire des camps, la malnutrition, la chaleur, les maladies tropicales, sont venues s’ajouter les conditions de travail imposées par les japonais soucieux de ne pas ménager les prisonniers qu’ils considéraient comme des soldats sans honneur puisqu’ils s’étaient rendus, en oubliant ceux qu’ils avaient massacrés à Langson, à Ha-Giang et ailleurs.

A tout cela il faut aussi ajouter les sévices, bastonnades, coups de baïonnette, exposition pendant des heures au soleil les mains liées derrière le dos à genoux, quelquefois enterré vivant la tête sortant à peine et à proximité immédiate d’un nid de fourmis….

Ou alors une exécution capitale au sabre où le condamné était décapité devant les prisonniers réunis.

Plusieurs camps furent dénombrés en Indochine : Paksé Pakson Hoa Binh et ses calcaires.

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Certains prisonniers ont été incarcérés dans des prisons ou des bâtiments transformés :

Hanoi - Les cellules de l’immeuble Shell, de la sûreté et de la maison centrale.

Haiphong - Les cellules de la sûreté, l’Ecole Henri Rivière et de la prison civile

Nam dinh - La prison.

Saigon - La prison civile et les cellules à la chambre de commerce.

Vinh - Les cellules de la garde Indochinoise et de la sûreté.

Pnom Penh - Les cellules de la Kampétai, de la sûreté et du commissariat central.

Mais le véritable scandale réside dans le fait que l’administration française a toujours entravé la reconnaissance des droits de nos militaires prisonniers des japonais, faisant traîner en longueur les démarches, ce lourd retard ayant pratiquement réglé le problème, puisque les 9/10° des quelques milliers de prisonniers qui auraient pu bénéficier d’une loi reconnaissant leurs droits sont aujourd’hui décédés.

Actuellement, il reste moins de cinq cent survivants qui n’ont droit pratiquement à rien en vertu des fameuses lois :

Du 6 août 1948-Déportés et internés résistants.

Du 9 septembre 1948- Déportés et internés politiques.

Ainsi toutes les demandes au titre de déporté ou interné par les prisonniers des japonais ont été déboutées pour les motifs suivants :

Ayant été capturé par les japonais et incarcéré comme prisonnier de guerre, l’intéressé n’a pas droit au titre de déporté, ni d’interné.

L’intéressé résistant à l’attaque japonaise par les armes n’a fait que son devoir ; il n’a pas fait acte de résistance et ne peut prétendre de ce fait au titre de déporté ou interné résistant.

L’intéressé n’a pas été incarcéré durant plus de 90 jours dans le lieu de déportation figurant sur l’arrêté ministériel du 22 janvier 1951, il ne peut donc prétendre au titre de déporté politique.

Jusqu’en 1993, les instances gouvernementales ont toujours répondu « Les cas des anciens prisonniers des japonais sont déjà régis par les lois d’août et septembre 1948 ; il n’y a donc pas lieu de légiférer à nouveau ».

En 1982, un arrêt du Conseil d’Etat, dit arrêt LAFFARGUE a exclu tous les anciens militaires prisonniers des japonais du bénéfice de la loi du 6 août 1948.

Ce n’est que grâce à l’intervention de monsieur Philippe MESTRE, ministre des anciens combattants que le titre de déporté politique a été conféré aux seuls anciens prisonniers déportés à Hoa Binh et à Pakson.

Aujourd’hui près de 180 anciens prisonniers des japonais ont pu obtenir grâce à l’assouplissement de la loi et à une interprétation libérale de cette dernière ce titre, mais on s’aperçoit alors que les militaires de tous grades sont devenus des victimes civiles de la guerre et c’est là d’ailleurs un comble…. !

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Voilà encore un scandale qui touche principalement encore la IV° République qui n’a pas su reconnaître ce qu’elle devait à ses enfants, qui de 1940 à 1945 avaient permis au drapeau français de flotter sur l’Indochine.

PRISONNIERS DU VIETMINH

Depuis près de soixante et un an, un voile de silence a couvert les conditions inhumaines des prisonniers français détenus, hommes femmes enfants, par les forces du Vietminh après le 19 décembre 1946.

Pratiquement jamais, le grand public n’a été informé du calvaire de ceux qui sont tombés aux mains des forces de l’Armée Populaire de la république du Vietnam.

Avant le désastre de la route coloniale n°4 - RC4 - en octobre 1950, il n’ y avait pour ainsi dire pas de prisonniers dans les camps vietminh, pour la bonne raison que les unités de guérilla , les Tu-Vé, les Du-Kich faisaient rarement des prisonniers. En langage clair, ces derniers étaient torturés et mouraient des suites de leurs blessures ou étaient simplement abattus. C’est ce qu’aucun gouvernement en France n’a jamais voulu faire connaître, comme plus tard on cachera les crimes du FLN en Algérie mais que l’on parlera davantage de la torture infligée aux terroristes comparant bien souvent l’Armée française aux nazis en oubliant BOUDAREL…..

De même personne ne s’est soucié des européens enlevés lors des évènements du 19 décembre 1946 et dont on n’a jamais plus entendu parler…

En octobre 1950, la situation change car l’armée populaire vietnamienne fait 3000 prisonniers sur la RC4 et doit donc improviser des camps, situés au départ en haute région, zone tenue par les forces vietminh ; les viets semblent d’ailleurs avoir adopté - Ils ont eu dans leurs rangs des cadres japonais dès le début des opérations contre les forces françaises - la technique copiée sur celle des japonais, c'est-à-dire affaiblissement des prisonniers par des marches forcées dans la montagne de 500 à 600 kilomètres, puis la construction des camps par les prisonniers eux-mêmes, dans des conditions sanitaires épouvantables et dans des lieux particulièrement insalubres.

Puis vinrent les conditions de vie qui se caractérisent par une malnutrition, sans médicaments, ni médecins avec une mortalité élevée.

Il faut aussi rajouter à cela les brimades, les exécutions sommaires et enfin les tentatives d’endoctrinement politique.

Il est maintenant établi que le traitement politique des prisonniers - Modèle classique du communisme, aurait été conseillé par le général chinois CHEN GENG, chef de la mission militaire chinoise auprès de l’armée populaire vietnamienne - Rééducation morale, lavage de cerveau avec promesse de libération, par la grande clémence de l’oncle HO.

Ces actions sont menées en fonction de la population carcérale suivant que les commissaires politiques s’adressent à des européens, à des nord-africains ou à des sénégalais, voire à des asiatiques ; pour ces derniers les libérations sont rares et l’on a vu des vietnamiens non communistes être gardés en camp de rééducation entre 8 et 20 ans, certains n’étant libérés qu’en 1973…

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Nos prisonniers libérés, compte tenu des tentatives d’endoctrinement subies, se verront par la suite soumis à des enquêtes excessivement serrées de la part de la Sécurité Militaire française, ce qui ajoute encore davantage au traumatisme moral et corporel.

Peut-on parler d’une volonté délibérée de « génocide » de la part des cadres du Vietminh, comme le colonel Robert BONNEFOUS auteur d’une thèse sur les prisonniers de guerre du CFEO dans les camps vietminh en 2000 ?

On ne peut réfuter totalement une telle idée lorsque l’on sait que les viets ont «lanterner» pendant longtemps les missions du CICR - Comité International de la Croix Rouge - et n’ont jamais distribué ni vivres, ni médicaments parachutés sur ordre du commandement français sur les lieux d’affrontements après la bataille….

Le commandement français avait recensé 39.888 prisonniers comme étant détenus dans les camps viets au 14 juillet 1954 (4744 ayant été libérés par anticipation avant cette date), 9934 seulement ont été libérés à la fin des hostilités, c'est-à-dire un sur quatre. 6132 ont dû être hospitalisés d’urgence et 61 sont décédés dans la première semaine de leur libération.

En résumé sur les 45.000 prisonniers et internés ayant séjourné dans les camps entre 1945 et 1954, 15.000 à peine ont recouvré la liberté. A l’heure actuelle, au moment où ces lignes sont rédigées, il ne resterait que 2000 survivants et dans quel état physique et moral ?

Quelques exemples sont nécessaires pour comprendre non seulement la vie dans les camps, mais aussi pour saisir la mentalité des gardiens communistes et des commissaires politiques.

Ainsi en octobre 1950 sur la RC4 des parachutistes du 3° bataillon colonial de parachutistes sont faits prisonniers et internés dans un camp en haute région :

16 ont été exécutés en captivité.

77 sont morts au camp.

17 ont disparu

Dans le même camp on dénombre 110 morts en captivité. Il faut aussi se souvenir que le 3° bataillon de parachutistes coloniaux lorsqu’il a été parachuté ne comportait que deux compagnies, c'est-à-dire avec des effectifs très réduits, cette unité étant sur le point d’être rapatriée en France pour fin de séjour.

Il a fallu en outre une lutte incessante des survivants pour qu’enfin soit reconnu leurs conditions, grâce d’ailleurs à l’ANAPI - Association Nationale des Anciens Prisonniers en Indochine-

Les français dans leur grande majorité n’ont donc eu jamais connaissance de l’existence des camps que ce soit japonais ou vietminh.

Quant à l’affaire BOUDAREL, qui sera rappelée plus loin, on a vu comment le problème a été rapidement réglé par la justice française et ce en fonction de la loi d’amnistie votée généreusement par nos propres députés.

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Une extermination Sans précédent

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DÉCÈS DES PRISONNIERS DU CAMP N° 1 (1951 ET 1952) (Selon les notes du capitaine Morichère)

LIEU DATE NOM Grade Unité

Ban Cong 27/04/51 Rasez Adjt chef 1er Tabor

26/06/51 Bouvet Capitaine 7e RTA 21/06/51 Bricout Adjudant FI Cao Bang Ban Viet 30/07/51 Loup Médecin Lt 2/3REI 29/07/51 Rueff Capitaine EM GTM 10/09/51 Moquais Lieutenant 1/3REI 17/09/51 De Labrouhe Lieutenant 1ER BEP 25/09/51 Casterez Adjudant 8e GSAP Ban Ça (Bong Son) 09/10/51 Cazaux Capitaine 3e BCCP 25/10/51 Mathieu Capitaine 1er Tabor 20/10/51 Feuillet Capitaine 8e RTM 25/10/51 Hippert Lieutenant 1er BEP 27/10/51 Silbert Adjudant 3/6RIC 28/10/51 Béraud-Sudreau Lieutenant 11e Tabor 18/12/51 Denechaud Adjudant 3/3REI 25/12/51 Poumeroulie Adjudant 1er Tabor 01/01/52 Ouen Adjudant 8e RTM Tapit 04/02/52 Gingré Adjudant 1er BEP

TOTAL 18 décès Effectif total : RC4 et Vinh Yen 98

Libérés en décembre 1951 5 Adjudants + 3 officiers + 2 médecins 10

Libérés en juillet 1952 13 Officiers + 2 adjudants 15

Effectifs restants après libération 73

Proportion de décès sur total des entrées 18/98 = 18,36 %

sur effectif restant prisonnier 18/73 = 24,00 %

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LE SCANDALE DE L’AFFAIRE BOUDAREL

BOUDAREL, sinistre Kapo du camp 113 est mort le 26 décembre 2003 et cela clôt une triste affaire qui pourtant aurait dû éclairer quelques bonnes consciences parlementaires, mais les choses étant ce qu’elles sont, on a préféré et notamment la justice française, puis la cour européenne des droits de l’homme argumenter sur autre chose que le fond.

L’affaire elle-même :

En février 1991, Jean jacques BEUCLER, président du comité d’entente des anciens d’Indochine, ancien Secrétaire d’Etat aux anciens combattants et ancien officier prisonnier du camp n°1 au Tonkin démasque publiquement lors d’un colloque à la Sorbonne, le commissaire politique du camp 113, Georges BOUDAREL, universitaire et militant communiste, ancien enseignant en Cochinchine en 1948, déserteur passé au service du Vietminh.

L’ex-sergent Wladislas SOBANSKI, qui avait été fait prisonnier au Tonkin, et détenu au camp 113, président de l’amicale des rescapés de ce camp, dépose une plainte contre Georges BOUDAREL, l’ANAPI se portant partie civile pour «crime contre l’humanité»

S’en suivent une succession de procès qui amène la Cour de cassation, le 1° avril 1993 à rejeter la plainte ainsi que le pourvoi, arguant du fait que ce qui était reproché à Georges BOUDAREL ne pouvait plus être retenu contre lui, la loi d’amnistie votée par nos députés le 18 juin 1966 gommant tous les crimes liés à la guerre d’Indochine ; ainsi la justice française mettait un terme à cette plainte.

En janvier 1998, Georges BOUDAREL déposait à son tour une plainte contre Wladislas SOBANSKI pour «dénonciation calomnieuse». Mal lui en prit car une enquête diligentée par le juge d’instruction recueillit des plaintes accablantes pour lui, cela se traduisant d’ailleurs par la constitution de 23 volumes de dépositions.

Là encore, bien que Georges BOUDAREL ait retiré sa plainte et 4 ans après le dépôt de la plainte, le juge d’instruction concluait cette nouvelle affaire par un non lieu - Janvier 1996 - S’appuyant une nouvelle fois sur la loi d’amnistie votée par 110 députés le 18 juin 1966.

Une nouvelle plainte fut déposée par l’ANAPI et Wladislas SOBANSKI auprès du tribunal correctionnel de Paris pour «Dénonciation calomnieuse» et en mai 1997 nouveau rejet se basant encore sur la loi d’amnistie.

Enfin la Cour de cassation rejeta définitivement le dossier le 7 juillet 1999.

Une nouvelle tentative de Wladislas SOBANSKI eut lieu devant la Cour européenne des droits de l’homme de Strasbourg - Création de René CASSIN, prix Nobel de la Paix -, et là de nouveau la Cour européenne déclara irrecevable cette nouvelle plainte.

Georges BOUDAREL n’a jamais eu un geste qui pouvait admettre un regret quelconque et si l’on considère ce que les prisonniers français ont subi sous sa coupe, il y a de quoi frissonner d’horreur. Avec une absence totale de sentiment, de compassion et d’humanité il va durant sa présence au camp 113 :

Abreuver de cours de rééducation politique des hommes blessés, malades, éreintés soumis à une malnutrition poussée à l’extrême.

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Obliger les moribonds à se lever pour assister aux séances de rééducation, les amenant peu à peu à une mort certaine.

Créer la discorde et déclencher la méfiance entre les prisonniers lors des séances d’autocritiques.

Détourner au profit du Vietminh les médicaments parachutés par la Croix Rouge, refusant ainsi d’apporter les soins nécessaires aux malades.

Choisir lui-même ceux qui devant être libérés et ceux qui devant rester au camp, ce qui équivalait à s’attribuer le droit de vie ou de mort.

Livrer les évadés repris à la vindicte des viets.

Faire renvoyer au camp de prisonniers des libérés en cours de transfert vers les lignes françaises

Enfin dans son camp Georges BOUDAREL détenait le record de mortalité puisque l’on constatait de 1 à 8 décès par jour pour un camp pouvant contenir 800 prisonniers….

Cette affaire aurait du attirer l’attention du grand public sur le sort des anciens combattants d’Indochine et faire partie des scandales qui ont émaillé ce que le Parti Communiste Français, après le journal Le Monde, avait appelé la sale guerre.

Mais la question que l’on doit se poser «Où sont les traîtres dans tout cela et depuis combien de temps oeuvrent-ils contre notre Pays, mais aussi le leur, la France ? »

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RENSEIGNEMENTS D’ARCHIVES

LES HAUTS COMMISSAIRES EN INDOCHINE

Amiral Thierry d’ARGENLIEU Septembre 1945 - Mars 1947

Emile BOLLAERT Mars 1947 - Octobre 1948

Léon PIGNON Octobre 1948 – Décembre 1950

Général Jean de LATTRE de TASSIGNY Décembre 1950 - Janvier 1952, Gouverneur général GAUTIER Adjoint civil

Jean LETOURNEAU Février 1952 - juin 1953.

Maurice DEJEAN Juin 1953 - Juillet 1954.

Général Paul ELY Juillet 1954 - juin 1955.

LES COMMANDANTS EN CHEF

Général LECLERC Septembre 1945 - Juin 1946

Général VALLUY Juin 1945 – Février 1948

Général SALAN Février 1948 - Avril 1948.

Général BLAIZOT Avril 1948 - Septembre 1949. Le général ALESSANDRI assume le commandement des Forces terrestres

Général CARPENTIER Septembre 1949 - Décembre 1950

Général de LATTRE Décembre 1950 - Janvier 1952. Adjoint le Général SALAN

Général SALAN Janvier 1952 - Mai 1953.

Général NAVARRE Mai 1953 - Juillet 1954.

Général ELY Juillet 1954 - Juin 1955.

Général JACQUOT Juin 1955 - Février 1956. Adjoint le Général SALAN.

Par ailleurs ont notamment commandé :

Le Tonkin :

Général SALAN Mai 1947 - Février 1948.

Général CHANSON Août 1948 - Septembre 1949

Général ALESSANDRI Septembre 1949 - Novembre 1950.

Général de LINARES Février 1951 - Mai 1953.

Général COGNY Juin 1953 - Octobre 1954.

Le Sud :

Général NYO Décembre 1946 -Février 1948

Général BOYER de La TOUR Février 1948 - Septembre 1949.

Général CHANSON Septembre 1949 - Juillet 1951.

Général BONDIS Septembre 1951 - Juin 1953.

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LES EFFECTIFS DU CORPS EXPEDITIONNAIRE-(1951-1954)-

1951

Forces régulières 159.213 dont 130.000 au Vietnam

Forces des Etats associés 42.004.

1952

Forces régulières 200.993 dont : 69.513 métropolitains français 20.082 Légionnaires 25.323 Africains et Nord Africains. 59.075 autochtones

Armées des Etats Associés : 40.000

Supplétifs 50.000

1953

Forces régulières 190.000

Supplétifs 55.000

Armées des Etats Associés 175.000

Supplétifs 50.000

1954

Forces régulières 240.000 dont : 53.000 autochtones 4650 fournis aux Etats Associés pour

l’encadrement.

Supplétifs 55.000

Armées des Etats Associés 257.067 Vietnam : 170.424 réguliers 46.882 supplétifs.

Laos : 20.245.

Cambodge : 16642 réguliers 2874 Supplétifs

Note : Les effectifs des combattants français métropolitains n’excéderont pas 70.000 hommes. D’autre part, ceux atteints par les forces toutes confondues françaises, Etats Associés et supplétifs compris ont été de 510.000 hommes. En comparaison, les Américains et notamment en 1968 alignaient 544.000 hommes, auxquels s’ajouteront environ 800.000 hommes de l’armée vietnamienne - Un total de 1.350.000 hommes pour le seul Vietnam - Quant au matériel, l’armée française disposait après 1951 de 250 avions et d’une vingtaine d’hélicoptères, bien plus tard d’ailleurs. Une nette différence avec les Américains qui eux disposaient en 1968 de 2000 avions et de 3500 hélicoptères.

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LES PERTES DU CORPS EXPEDITIONNAIRE EN EXTREME ORIENT

Tués Disparus Blessés

Généraux 3 Colonels 8 Lt-Colonels 18 1 Chefs de Bataillons 69 5 20.899 tous grades Capitaines 341 134 confondus Lieutenants et S/L 1140 Total 1579 200 Sous-officiers 2683 2755 Soldats français 6008 Légionnaires 12019 5781 34.347 Nord Africains – Africains -

15200

Autochtones 14.093 12830 26.924 Total général : 51.582 21.566 72.150 73.148 Armée vietnamienne pertes globales 58.877

PERTES DU VIETMINH

Batailles Tués Prisonniers Blessés Vinh Yen 1500 450 3000 Dong Trieu 600 Day 1159 154 287 Hoa Binh 3500 307 7000 OPS Mercure 700 700 OPS Turco-Polo 870 1067 Nasan 1000 Dien Bien Phu 8000 15000