Les Crimes de l Éducation Française, par Pierre-Sébastien Laurentie

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  • 8/16/2019 Les Crimes de l Éducation Française, par Pierre-Sébastien Laurentie

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    https://books.google.fr/books?id=iTNNAAAAcAAJ&hl=frhttps://books.google.fr/books?id=iTNNAAAAcAAJ&hl=fr

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    » - . r - w ä f ‘ . * fi w fl v - = - - -

    V W Ÿ Ë

    a fi g â

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    , Lus CRIMFS

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    UEDUGATION

    FRANGAISE

    PÄR

    U

    LAURENTIE

    HFNRI PLOV IMPRIMEUR IDITEÄR

    ID KLH GHIIR\CIIIRI‘

    1812

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    ‘LES CRIMES

    DE

    UÉDUGÀTION

    FRANÇAISE

    a

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    L’auteur et

    l’éditeur déclarent se

    réserver

    leurs d r o i t s

    d e traduction

    e t

    d e reproduction à

    l’étranger.

    v

    Cet

    ouvrage

    a

    é t é déposé a u m i n i s t è r e de

    [ i n t é r i e u r

    ( s e c t i o n

    de l a

    l i b r a i r i e )

    en

    décembre

    1871.

     

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    rams . -‘ rv vo cn nr nm u n HBNRI rum, nus anmxciùnu, 8 .

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    (LES CRIMES

    DE

    UÉDUGATION

    FRANÇAISE

    PAR

    M.

    LAURENTIE

    PARIS

    HENRI

    PLON,

    IMPRlMEUR-ÉDITEUR

    1 o , RUE GARANCIËRI‘

    1871

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    Les mots é ducation, instruction, ensei gnement, o nt

    chacun

    un

    sens

    propre

    e t

    d i s t i n c t ;

    n é a n m o i n s

    tous

    t r o i s s e rapportent à u n e même idée, qu e l e

    l a t i n

    é n o n c e par

    u n

    seul

    mot, l e mot i n s t i t u t i o n , lequel

    f a i t

    entendre

    u n e

    s o r t e

    d e formation, d e création d e

    l’homme é l e v é , i n s t r u i t , e n s e i g n é .

    C ’ e s t pourquoi,

    s i

    ces mots

    semblent parfois en

    c e t

    é c r i t

    ê t r e

    p r i s

    l’un

    pour

    l ’ a u t r e ,

    j e

    prie

    l e

    lecteur

    d e

    ne

    s e point arrêter à des

    nua nce s

    qu i

    paraîtraient

    manquer

    d e

    l o g i q u e .

    Quand j e parle d e l’éducation f r a n ç a i s e ,

    j’embrasse

    en

    ma pensée tout ce qu i s e

    rapporte

    à c e t t e i n s t i

    t u t i o n

    morale d e l’homme , s a i n t

    devoir

    d e l a société

    dome st ique, devoir

    n o n m o i n s

    sacré

    d e

    l a

    société

    c i v i l e o u politique , d o ubl e ministère hors d uque l l e s

    meilleures lois ne peuvent r i e n pour l ’ o r d r e et l e

    bonheur p u b l i c .

    i

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    LES

    CRIMES

    DE

    UÉDUGATION FRANÇAISE

    u I

    J e c r o y a i s a v o i r

    t o u t

    d i t s u r l ’ é d u c a t i o n ;

    j e ,

    n ’ a i

    rien d i t .

    J ’ a i parlé

    au

    père,

    j ’ a i

    parlé

    à

    l a

    mère,

    j ’ a i parlé

    à

    l ’ i n s l i t u t e u r , j ’ a i parlé à l ’ É t a t ; à tous j ’ a i d i t l e s d e

    v o i r s

    d e

    l’éducation;

    à n u l j e n ’ a i d i t l e s

    .crimes d e

    l’éducation.

    Aujourd’hui j e l e s d é n o n c e ; qui

    m’écoutera‘?

    L es crimes

    d e l’éducation

    française s e

    ré sument

    en

    u n

    crime

    c a p i t a l ,

    qu i

    e s t

    d’avoir

    v o u l u

    f a i r e

    d e

    l a

    France u n e

    nation

    sceptique, r a i l l e u s e

    , ignorante,

    antichrétienne, athée en

    un

    mot, dest-à-dire i n g o u

    vernable,

    dest-à-dire v o u é e

    au x

    a l t e r n a t i v e s d e l ’ a n a r

    chie e t d u despotisme.

    Qu i

    m’écoutera‘? d i s - j e .

    L e

    crime c a p i t a l d e

    l’éducation e s t l e crime

    d e

    t o u t

    l e

    m o n d e .

    L es

    pères,

    l e s

    maîtres,

    l e s

    l é g i s l a t e u r s ,

    l e s écrivains, l e s politiques, l e s

    poëtes,

    l e s mora

    l i s t e s ,

    y ont

    p r i s part

    à

    l ’ e n v i . C e t t e immense

    compli

    l .

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    l i - LES CRIMES

    c i t é

    es t

    écrite

    d a n s

    l a

    littérature,

    d a n s

    l a

    philosophie,

    e t

    jusque

    dans l e s l o i s de l a F r a n c e .

    Aussi l ’ a c t e d’accusation contre l’éducation f r a n

    ç a i s e s e dresse d e l u i-m ê m e dans l ’ h i s t o i r e

    d e nos

    révolutions; c ’ e s t

    comme

    un l i e u

    commun d e r em u e r

    ces souvenirs; je n e v a i s l e s toucher qu’autant q u ’ i l

    l e f a u t pour en f a i r e

    j a i l l i r

    quelque

    l umière sur

    l a

    cause

    e t

    l e

    caractère

    d es

    maux

    p r é s e n t s .

    Tout e s t d ’ a i l l e u r s r é s u m é

    en quelques l i v r e s , qu e

    l’étourderie n’a pas en trevu s o u

    bien

    qu e l a haine

    a

    é t o u f f é s ,

    témoins implacables n é a n m o i n s q u ’ i l f a u t

    entendre, même

    quan d

    l a plainte y

    aurait p r i s

    par

    f o i s

    un accent

    d e

    passion.

    J ’ a i

    l à tous

    ces l i v r e s

    :

    i l s

    reflètent u n e l u eur

    s i n i s

    tre;

    une conjuration d e cent c inq uante

    a n s contre l e

    christianisme y e s t é t a l é e , n o n point avec d es bana

    l i t é s

    d’induction

    , ma is

    avec_des

    énonciations d e plans

    préméd ités, e t

    mi s

    à

    exécution

    t a n t ô t

    par

    d es a r r ê t s

    d e

    proscription

    sanglante, t a n t ô t par d es formules d e

    l o i s philosophiques

    pires

    qu e l e meurtre.

    I l

    Jean-Jacques

    Rousseau avait

    écrit

    l a

    théorie

    de

    l’éducation antichrétienne;

    tout u n s i è c l e d e

    f r i v o

    l i t é débauchée s’éprit d e cette théorie comme d ’ u n e

    r é fo rme mi rac u l eu se d e

    l’humanité.

    La Révolution, d ès son

    premier jour,

    s’appliqua à

    l a r é a l i s e r

    par

    l e s l o i s .

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    DE UÉDUCATIQN FRANÇAISE.

    5

    Cela e s t

    connu.

    Nous avons l a c o l l e c t i o n

    d es

    décrets

    portés par l e s Assemblées e t par l e s pouvoirs d e l a

    Révolution,

    à

    dater d u rapport d e M. d e

    Talleyrand

    en

    1’789; l a théorie d’éducation d e R o u s s e a u y e s t

    vivante ; tous ont pour o b j e t

    d’abolir

    jusqu’à

    l a

    trace

    e t au

    souvenir

    d es i n s t i t u t i o n s

    catholiques qu e d o uze

    s i è c l e s avaient

    enracinées

    dans l e s o l français p o u r l a

    direction

    e t

    l ’ens ei g nement d es

    générations

    n a t i o

    n a l e s .

    l l

    n’y a point à ar g u m en ter sur ce t r a v a i l concerté

    d e

    démolition;

    l’œuvre accomplie

    s ’ é t a l e

    au gr a n d

    s o l e i l ; tout ce qu ’avai en t construit l e s

    s i è c l e s

    a é t é

    e x t i r p é , tout e s t

    évanoui :

    Etiam periere ruinæ.

    Et

    pourtant sur

    c e t t e t a b l e rase improvisée en

    quelques

    moments

    o n

    a v a i t t o u t a u s s i t ô t

    s e n t i

    l e

    he

    soin

    d e tenter

    quelque

    reconstruction.

    Même l e s f o r

    c en és d é mo l is seu rs nïma g ina ie nt

    pas

    qu e l e s g é n é

    rations pussent ê t r e sans u n e conduite quelc onque;

    i l s l e s enlevaient à l a

    seule

    pu is sance qu i a i t empire

    sur

    l a pensée e t

    sur l’âme huma i n e, qui e s t l a Reli

    g ion

    ; i l s crurent avoir l a force d e l e s s a i s i r ,

    d e

    l e s

    maîtriser e t d e l e s assouplir, rien qu’au moyen d ’ une

    déclaration en

    vertu d e laquelle IÎÉTAT, c e t

    ê t r e

    i d é a l ,

    s e r a i t maître

    d e

    l ’ i n s t r u ‘ c t i o n

    publique,

    partant

    maître d e l’homme, partant

    maître

    d e s on

    i n t e l l i

    gence, c ’ e s t - à - d i r e

    d e ce qu i l e f a i t homme.

    C e f u t l à toute l a raison d es l é g i s l a t i o n s criminelles

    d e

    l’éducation.

    Or, i l me f a u t r em ar qu e r qu e ce n ’ e s t pas d e prime

    abord

    qu e

    l a

    Révolution

    française é n o n g a l e dessein

    l

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    s

    LES

    cmMEs

    d e s’emparer

    d es

    générations au moyen

    d’une

    f o r

    m u l e

    unique

    d’éducation

    n a t i o n a l e .

    L es premiers l é g i s l a t e u r s r e s t a i e n t sous

    l’impres

    sion subsistante d e l a l i b e r t é universelle promise à l a

    t e r r e

    par

    l e s

    p h i l o s o p h e s .

    «

    S i

    chacun, d i s a i t Talleyrand

    a

    l’Assemblée

    con

    s t i t u a n t e , a

    l e

    d r o i t d e

    recevoir

    l e s

    b i e n f a i t s

    d e l ’ i n

    struction,

    chacun

    a

    réciproquement

    l e

    d r o i t

    d e c on

    courir

    à

    l a répandre,

    car

    c ’ e s t d u concours e t d e l a

    r i v a l i t é d es

    e f f o r t s

    individuels

    qu e

    naîtra toujours

    l e

    plus

    g ran d . b i e n . L a

    confiance

    d o i t seule

    déterminer

    l e choix pour l e s fonctions i n s t r u c t i v e s . To u s l e s t a

    l e n t s sont appelés à

    disputer

    l e prix

    d e l’estime

    pu

    blique.

    Tout privilège

    e s t ,

    par sa nature,

    o d ieux:

    un privilège

    en

    matière

    d’instruction

    s e r a i t

    plus

    absurde

    e t

    plus

    o d i eu x enc ore l . »

    L e

    projet

    d e

    l o i , conséquent à ces

    déclarations,

    pronongait

    en

    ces

    termes

    l a l i b e r t é Œen se i g n emen t:

    « I l

    sera

    l i b r e

    à tout p a r t i c u l i e r ,

    en s e

    soumettant

    au x

    l o i s générales s ur l’enseignement public, d e f o r

    mer d es établissements

    d ’ i n s t r u c t i o n .

    I l s

    seront

    tenus

    d’en

    i n s t r u i r e

    l e s

    municipalités

    e t

    d e

    publier

    leurs

    rè g l ements . » v

    S e u l e m e n t l a l o i ne

    f u t pas

    votée; l’Assemblée

    constituante

    n’eut qu e l e

    temps d’approuver l e rapport

    e t

    d e transmettre

    à

    d’autres

    l e

    dessein

    dont

    i l é t a i t

    l e

    préambule.

    Mais l’Assemblée l é g i s l a t i v e c o u r a i t à son t o u r à

    1

    Rapport, 1 0 e t U. s e pt em br e 1 7 89 .

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    16/97

    DE

    UÉDUCATION

    FRANÇAISE. 7

    d ’ a u t r e s t h é o r i e s ;

    l a

    l i b e r t é

    u n i v e r s e l l e

    s ’ o f f r a i t

    d é j à

    avec une si gnification d e révolte u n i versel l econtre les

    l o i s naturelles d e

    l’éducation.

    C ’ e s t Con d orcet qui formula l a théorie nouvelle:

    «

    L ’ in d épen dance

    absol ue d es opinions, d i s a i t - i l ,

    dans tout ce qu i s ’ é l è v e au-dessus d e l ’ i n s t r u c t i o n

    élémentaire,

    f a i t

    en qu el qu e s o r t e partie

    d es d r o i t s

    d e

    l’espèce

    humaine.

    n

    La l a n g ue française n ’ a v a i t

    plus

    sa c l a r t é d’autre

    f o i s ; l e

    v a g u e d es mots

    annonçait l’avénement d’idées

    inconnues; e t

    depuis,

    ce courant,

    hélas d u r e

    tou

    jours.

    Maisenfin l a formule d u P R I V I L È G E absolu en matière

    d ’ é d u c a t i o n

    n ’ é t a i t

    pas trouvée;

    e t même lorsque

    parut

    l a

    Convention,

    ce

    monstre

    d e

    tyrannie,

    i l

    resta

    quelque h é s i t a t i o n encore

    sur

    l ’ a c t i o n

    à

    exercer au

    nom d e l a

    puissance

    publique, au s u j e t d ’ une l i b e r t é

    dont l e s mœurs séculaires avaient f a i t

    l e

    d r o i t

    e t

    comme un s a i n t d o m a i n e du foyer

    domestique.

    Lakanal, ce chanoine régicide, fit introduire dans

    l a

    l o i

    sur

    l ’ i n s t r u c t i o n

    publique

    un

    a r t i c l e

    a i n s i

    c on ç u :

    « La l o i n e peut porter a t t e i n t e

    au

    d r o i t qu’ont l e s

    c itoyens d’ouvrir d es cours e t écoles

    particulières e t

    libres,sur

    toutes

    l e s p a r t i e s d e l ’ i n s t r u c t i o n , e t

    d e

    l e s

    diriger comme bo n leur semble. E l l e s seront seule

    ment

    soumises à

    l a

    surveillance d es

    bureaux d ’ i n

    spection

    e t

    d ’ une

    c o m m i s s i o n

    c e n t r a l e .

    J )

    Ainsi l ’ i d é e d e l a liberté.d’éducation, d e quelque

    façon

    q u ’ e l l e f û t entendue

    par

    l e s l é g i s l a t e u r s , subsis

  • 8/16/2019 Les Crimes de l Éducation Française, par Pierre-Sébastien Laurentie

    17/97

    8 LES CRIMES

    t a i t

    encore,

    e t l a

    Révolution

    semblait

    hésiter

    à

    l ’ a b o

    l i r ,

    après

    avoir abolitout

    l e r e s t e .

    C e ne f u t

    qu e par

    degrés

    qu e s on g é nie i n s t i n c t i f s e

    d é v o i l a . Elle

    venait

    d e s’exercer

    à l a tyrannie par l e s

    proscriptions, l e s confiscations e t l e s massacres; l e

    sang r u i s s e l a i t d es échafauds; l a France a v a i t vu s e s

    autels renversés, s e s prêtres é g or g é s, D i e u chassé

    d es

    temples,

    e t

    enfin

    un

    c u l t e

    n o u vea u,

    l e

    c u l t e

    d e

    l a Raison, i n s t i t u é

    sur l e s ruines

    d e l a nation l a plus

    chrétienne

    qu e l e

    monde eûtjamais connue.

    Alors

    commença d e

    se

    formuler l ’ h o r r i b l e

    théorie,

    comme

    pour

    a t t e s t e r qu e l à o ù cesse l’empire d e

    D i e u, commence l’empire

    d e

    l ’homme, e t l’empire

    d e l’homme c ’ e s t l a servitude.

    «

    Dans

    c e

    moment,

    v i n t

    d i r e

    l a

    v o i x

    l a

    p l u s

    f a

    rouche d e l a

    Révolution,

    l a voix d e Danton,

    dans ce

    moment (on venait d e proclamer l e g o uvernement

    r é v o l u t i o n n a i r e

    e t

    l e

    c u l t e de

    l a

    Raison), dans c e

    mo

    ment où

    l a

    superstition s u c c o m b e pour

    f a i r e

    place à

    l a raison, vous

    devez

    d o n n e r u n e CENTRALITÉ

    à l ’ i n

    struction publique,

    comme

    vou s en

    avez

    d o n n é u n e

    au

    gouvernement.

    n

    Voilà,

    d i s - j e , l ’ i d é e maîtresse d e l a

    R évolution qui

    apparaît, l a

    CENTRALITÉ, à ,

    savoir

    l e despotisme i n

    s t i n c t i f d e l ’ É t a t

    sur

    l ’ i n s t r u c t i o n

    publique ,

    o u plutôt

    sur l’éducation, sur l a pensée, sur l a conscience,

    s ur

    l a

    v i e moralede tout l e

    peuple.

    .

  • 8/16/2019 Les Crimes de l Éducation Française, par Pierre-Sébastien Laurentie

    18/97

  • 8/16/2019 Les Crimes de l Éducation Française, par Pierre-Sébastien Laurentie

    19/97

    10

    LES

    CRIMES

    ne

    s ’ a g i s s a i t

    qu e

    d es écoles primaires , l’enseiguement

    v r a i n ’ é t a i t pas en

    question.

    C e n ’ e s t pas s ans d es sei n qu e j e f a i s c e t t e remarque;

    t o u t

    à

    l’heure e l l e va s e d érou ler d’el|e-même

    comme

    u n e aggravation

    d es c ri mes d e

    l’éducation, q u ’ i l

    n o u s

    f a u t connaître.

    L a théorie d e l a CENTRALITÉ

    é t a i t ,

    d i s - j e , formulée,

    ma is

    r e s t a i t

    comme

    suspendue.

    f

    Et

    bien

    plus, d ès

    qu e Robespierre

    e t Danton sont

    précipités, leur théorie même semble quelque temps

    evanouie.

    C e

    n ’ e s t

    pas qu e l a l i b e r t é véritable apparaisse

    alors;

    l a l i b e r t é

    v é r i t a b l e ,

    en

    matière

    d’éducation,

    ne

    s’entend qu e comme c o r o l l a i r e d e l a l i b e r t é d e l a

    f o i ,

    d e

    l a

    conscience,

    d e

    l a

    r e l i g i o n ,

    e _ n

    un

    mot.

    Et

    en

    ces

    jours d e f u r i e , qu e

    Robespierre

    e t Danton vivent

    o u _meurent,

    l a religion

    r e s t e

    proscrite,

    l e s

    é g l i s e s

    sont

    s o u i l l é e s

    o u fermées; l e

    clergé

    chrétien o u

    bien

    a

    péri

    sur l e s échafauds, o u

    bien

    a f u i l o i n d e l a

    p a t r i e , - o u bien

    cache

    s on ministère en

    des

    a s i l e s où

    l ’ h o s p i t a l i t é , d o n n é e ou reçue, e s t u n a r r ê t d e mort.

    Toutes l e s fondations

    d’écoles

    e t

    d’universités sont

    abolies;

    ce

    qu e n o u s avons appelé, d e nos

    jours,

    d u

    nom de

    l i b e r t é

    L f e n s e i g n e m e n t , ne p o u v a i t donc

    p o i n d r e ,

    même

    comme

    doctrine l é g a l i s é e , en d es jours où l ’ e n

    s a i g nement chrétien é t a i t

    l e

    crime c a p i t a l par excel

    l e n c e ’ , subsistant

    dans toutes l e s l o i s .

  • 8/16/2019 Les Crimes de l Éducation Française, par Pierre-Sébastien Laurentie

    20/97

    DE

    L’ÉDUCATION

    FRANÇAISE. i l

    1

    I V .

    Non , n e c he rc ho ns pas l a l i b e r t é dans l e s formules

    qu e

    des

    législateurs

    m o i n s farouches

    qu e D an t o n

    firent

    introduire dans

    l e s l o i s ,

    par

    un v a g u e ressou

    venir d e

    l’éducation

    e t d es coutumes

    d’ u n

    monde

    qu’ils

    s’amusa ie nt

    à

    englout ir

    d a n s

    les

    ru i nes

    e t

    d a n s

    l e sang.

    Mais enfin l e s l o i s ne prononçaient

    pas

    d e

    prescrip

    t i o n s conformes à ce dogme

    farouche qu e Dan to n

    a v a i t

    comme

    montré

    à

    d’autres sous l e nom barbare

    d e C E N T R A L I T É . ‘

    Lakanal

    reparut

    même

    avec

    s a doctrine inverse,

    e t i l fit décréter derechef « qu e l a l o i ne pouvait

    porter

    a u c u n e a t t e i n t e au d r o i t

    qu’ont

    l e s citoyens

    d’ouvrir d es écoles particulières

    e t l i b r e s

    sous

    l a

    sur

    veillance

    d es

    autorités

    constituées

    ‘ . » Se u lement

    i l y

    a v a i t

    a l o r s d es

    multitudes d e citoyens proscrits o u

    c a p t i f s , e t

    c ’ é t a i e n t ceux-là même

    qu e

    leurs études

    e t

    leurs

    vertus

    avaient

    comme

    pr é de s t in é s

    à

    ce

    droit

    d’ouvrir d es é c o l e s , par u n e vocation qu e l a l o i n e f a i t

    pas, mais

    qu i

    s e manifeste

    par

    l e d é v o u e m e n t

    e t

    l e

    sacrifice; d e

    t e l l e s o r t e

    qu e l e

    d r o i t

    proclamé n ’ é t a i t

    qu’une mortelle i r o n i e .

    I l en

    f u t a i n s i du

    droit

    introduit

    d an s

    l a

    constitu

    t i o n d e l ’ a n I I I .

    L ’ a r t .

    300

    p o r t a i t

    :

    «Les

    p a r t i c u l i e r s

    ont

    l e

    d r o i t

    1 Dernier a r t i c l e d e l a l o i

    du

    27 brumaire an I I I .

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    1 2

    LES

    CRIAIES

    7

    d e f a i r e d es établissements p a r t i c u l i e r s

    d

    é ducation

    e t d’instruction; n e t e l l e ajouta, a r t . 355 : « I l n’y

    a ni privilège, ni jurande, ni maîtrise, n i limi

    t a t i o n

    à

    l’exercice d e l ’ i n d u s t r i e e t

    d es

    a r t s d e toute

    espèce. »

    _

    La

    R évolution proclamait l a l i b e r t é comme u n d r o i t

    d e t a b l e r a s e .

    Quoi

    q u ’ i l

    en

    s o i t , l a

    théorie

    d e

    l a

    CENTRALITÉ

    n’en

    t r a i t pas dans l a

    l o i , e l l e r e s t a i t comme u n e vision

    d e

    despotisme, d ont l a Révolution

    même se

    détournait

    avec u n e

    s o r t e

    d e frémissement e t d e peur.

    Et lorsque,

    pe u

    après, l a c omm i s s i o n d es Onze, qu i

    7

    a v a i t rédig é c e t t e constitution d e l an

    I I I ,

    proposa l a

    l o i d’organisation d e

    l ’ i n s t r u c t i o n

    publique

    , D a u n o u,

    reprenant

    l e

    rapport

    quelque

    peu

    oublié

    d e

    Talley

    rand, a i n s i

    qu e d’autres

    projets

    é g a lement délaissés

    dans l a fermentation des-crimes, n’eut g ard e d e

    l a i s

    ser entrevoir

    d an s

    s e s

    conceptions

    d es

    e s s a i s

    d e

    tyrannie à exercer sur l’éducation; peu s’en f a l l u t

    même qu e l e docte

    oratorien

    ne l a i s s â t échapper

    d es

    souvenirs

    qu i

    semblaient ê t r e l e regret d ’ une l i b e r t é

    disparue.

    « En

    1 7 8 9 , d i s a i t - i l ,

    l’éducation é t a i t vicieuse

    sans doute, mais

    e l l e é t a i t

    organisée. L es

    é t a b l i s s e

    ments supérieurs, t o u t ce qu i formait, pour a i n s i d i r e ,

    l e sommet d e l’instruction, les

    a c a d é m i e s ,

    l e s sociétés,

    l e s l y c é e s , l e s t h é â t r e s , avaient

    honoré

    l a nation fran

    gaise

    au x

    y e u x

    d e

    tous

    l e s

    peuples

    c i v i l i s é s .

    «

    Là, d es

    h é r i t i e r s

    toujours dignes

    d e leurs préd é

    cesseurs recevaient

    depuis plus d’un s i è c l e ,

    e t por

    \

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    DE IJÉDUCATION

    FRANÇAISE.

    15

    Vra iment c ’ e s t

    u n e surprise, après soixante-dix

    ans,

    d’ouïr

    d e t e l l e s

    paroles,

    e t

    involontairement

    ma p l u m e

    s ’ a r r ê t e . . .

    Mais

    l e s

    réflexions viendront

    t o u t à

    l ’ h e u r e .

    « Ainsi,

    continuait

    Chaptal, i l dérive d e

    l a

    néces

    s i t é d’assurer l ’ i n s t r u c t i o n e t d e l a rendre g én érale e t

    accessible à tous,

    qu e

    l e g o u v e r neme nt doit créer

    partout des

    écoles publiques.

    Ma i s i l

    appartient au x

    d r o i t s

    d ’ un

    chacun

    d’ouvrir

    aussi

    d es

    écoles et d’y

    admettre l e s enfants d e tous c e ux qui

    n’auront

    pas

    pour l ’ i n s t i t u t e u r public l e d eg ré d e confiance néces

    s a i r e .

    De l a l i b e r t é

    d e l’enseignement d o i t naître c e t t e

    r i v a l i t é

    précieuse

    entre

    l e s i n s t i t u t e u r s , qu i

    tourne

    toujours

    au

    profit d e l a

    morale

    e t d e l ’ i n s t r u c t i o n . »

    « Le gouvernement, d i s a i t - i l enfin, maître

    ab so l u

    d e

    l ’ i n s t r u c t i o n

    ,

    pourrait

    t ô t

    o u

    tard

    l a

    diriger

    au

    g ré

    d e

    s on ambi ti on;

    ce

    l e v i e r , l e pl us pu is sant d e

    tous,

    deviendrait peut-être d an s s e s main s l e premier

    mob i le

    d e l a servitude; toute émulation s e r a i t é t e i n t e , toute

    pens ée l i b r e s e r a i t u n

    crime;

    e t peu à peu

    l ’ i n s t r u c

    tion,

    qu i pa r s a nature doit éclairer, bientôt dégé

    né r é e dans l a m a i n d e quelques

    i n s t i t u t e u r s

    timides,

    façonnerait toute

    u n e

    génération

    à

    l ’ e s c l a v a g e .   n

    l

    N’eùt:on pas d i t u n p r é amb u l e d e l é g i s l a t i o n p o u r

    un peuple à qu i

    ne s e r a i t

    r e s t é d e s e s révolutions

    qu e

    l e c u l t e d e l a l i b e r t é e t l’émulation du savoir e t des

    vertus? .

    L a l o i d u 11 floréal an X, 1 ° ’

    mai

    1802 , présentée

    par Fourcroy,

    ne

    sacrifia

    po i nt ces d é cl arati on s

    d e

    d r o i t

    politique; mai s l a surveillance

    exercée

    par l ’ É t a t sur

    toutes l e s

    écoles

    commença d e

    paraître

    avec

    u n e

    J

  • 8/16/2019 Les Crimes de l Éducation Française, par Pierre-Sébastien Laurentie

    25/97

    16

    LES

    CRIMES

    signification

    qui, sans a l l e r jusqu’à

    l a

    c n m T R A u T r ’ : d e

    Danton,

    pouvait

    devenir

    l e

    point

    d e

    départ

    d ’ u ne

    théorie d’État plus

    prérnéditée

    e t plus l o n g temps

    formidable.

    Bref,

    c e t t e doctrine farouche

    d e

    l ’ E t a t

    maître

    d e

    l ’ e n f a n t e t d u

    père,

    n ’ a v a i t f a i t ,

    dans ces

    d o u z e

    ans

    d e

    ravage

    e t

    d e

    d é l i r e , qu e

    se montrer

    comme vœu

    i n s t i n c t i f

    d e

    l a

    Révolution

    française;

    e l l e

    n ’ a v a i t

    pu

    f a i r e irruption

    dans l e s l oi s ; toutes l e s

    usurpations

    ,

    .

    avaient é t é p o s s i b l e s , excepté c e l l e

    qui

    f a i s a i t violence

    à l a nature d e l’homme , e t à c e t t e s a i n t e s oc i ét équ i

    brave

    tous

    l e s

    a t t e n t a t s

    e t

    toutes l e s f o l i e s ,

    e t qu’on

    appelle l a f a m i l l e .

    V .

    I c i

    j e m’arrête

    quelques

    moments .

    On

    va dire

    : Comment

    l a

    Révolution a v a i t - e l l e

    d o n c

    espoir d e mettre l a

    m a i n sur

    l e s

    générations,

    si e l l e

    n e

    l ’ o s a i t

    tenter

    par

    un

    crime

    d’usurpation imité d es

    l o i s d e Sparte,

    ce type

    immortel d e

    tyrannie

    d an s l a

    République‘?

    Je

    répon d s :

    L a Révolution française n ’ a v a i t

    pu

    s e d é g a g e r en

    un moment d es c o u t u m e s e t d es

    i n s t i n c t s d e

    l a nation;

    el l e-mê me en r e s t a i t

    comme i m p r é g n é e , Elle courait

    à

    d es n o u v e a u t é s

    m o n s t r u e u s e s , mais

    qu i

    n’étaient

    pas

    toujours définies; i l

    y

    a v a i t

    du

    v a g u e d an s ses

    aspirations d e subversion

    universelle; pour e l l e l e plus

    f a c i l e

    e t

    l e

    pl us pressé é t a i t d e t o u t abattre, comme

  • 8/16/2019 Les Crimes de l Éducation Française, par Pierre-Sébastien Laurentie

    26/97

    DE

    UÉDUCATION

    FRANÇAISE. 17

    ï

    dans un accès

    d e frénésie o ù

    l e sens moral n’a plus

    s on rayon

    du c i e l .

    Alors l’empire

    révolutionnaire consista

    dans u n cer

    t a i n a r t d e fascination exercé

    par

    l a nouveauté

    d es

    mots

    , n o n

    par l a précision d es i d é e s .

    On

    f a i s a i t

    d e l a

    destruction u n e f ê t e , u n e pompe, u n e poésie, e t o n

    put

    se croi re maître d es générations , s i o n l e s exal

    t a i t

    par l’enthou s iasme

    d es

    f o l i e s

    comme

    d es

    a t r o c i t é s .

    C e f u t

    l à

    tout l e prosélytisme d es l o i s e t d es

    actes

    d e l a

    R évolution

    en matière d’éducation publique;

    l a définition

    doctrinale

    d es d r o i t s d e l a famille é t a i t

    inaperçue : pure

    théorie l a i s s é e

    au x philosophes; l a

    gr a n de œ u v r e

    é t a i t

    d’entraîner l e s vastes

    foules,

    sans

    savoir

    o ù

    o n courait

    avec

    e l l e s . ‘

    I l

    y

    a v a i t

    eu

    d ès

    l e

    début,

    d an s

    l e s

    assemblées

    d e

    l a

    Révolution, u n comité c f i n s t r u c t i o n publ ique charg é

    d e

    diriger

    e t d’exciter

    ce t r a v a i l

    d’enthousiasme : u n e

    exaltation d e sycopbantes f u t tout l e prosélytisme.

    On se

    sent humilié

    à suivre c e t t e l o n g u e

    s é r i e

    d’actes délibérés

    par d es hommes'

    d ont plusieurs

    avaient é t é

    formé s au x

    gran des cultures morales, e t

    qu i

    t o u t à

    c o u p

    s ’ é t a i e n t j e t é s en dehors

    d es

    pensées

    e t d es é tud es qu i avaient s e r v i d e

    préparation

    au

    d é ve l oppement d e

    leur e s p r i t .

    Barère

    f u t un

    d e

    ces

    l e t t r é s

    qu i

    s’appliquèrent

    à

    s a i s i r l’imagination pu bl iqu e par l’enthousiasme

    d es

    utopies.

    I l

    proposa

    u n

    plan

    tout à

    f a i t

    n e u f

    d’éducation,

    qu i

    c o n s i s t a i t

    à révolutionner la langue,

    e t

    l e

    8

    pluviôse

    an I l

    i l

    l u t

    à

    l a

    Convention un rapport

    solennel

    sur

    l a

    2

  • 8/16/2019 Les Crimes de l Éducation Française, par Pierre-Sébastien Laurentie

    27/97

    18

    LES CRIMES

    n é c e s s i t é d’improviser c e t t e révolution véritablement

    . i n o u ï e .

    Quelques

    passages

    d e

    ce

    t r a v a i l

    mettent

    à

    découvert

    l’étonnant

    besoin d’utopie qu i tourmentait

    l e s

    âmes perdues

    dans

    l e v i d e .

    « Citoyens, d i s a i t

    l’étrange

    inventeur d’éducation,

    l e s tyrans c o a l i s é s ont d i t :

    L’ignorance

    f u t

    toujours

    notre a u x i l i a i r e l a

    pl u s pu i ss an te;

    maintenons l ’ i g n o

    rance, e l l e f a i t les fanatiques, e l l e multipl ie les contre

    révolutionnaires; f a i s o n s rétrograder l e s Français vers

    l a barbarie, s er vo ns -n ou s d es peuples ma l i n s t r u i t s ,

    o u d e ceux

    qu i

    parlent

    un

    i d i ô m e d i f f é r e n t d e

    c e l u i

    d e

    Pinstruction publique.

    « L e comité a entendu ce comp lot d e l’ignorance

    e t du

    despotisme.

    «

    Je

    viens

    appeler aujourd’hui

    votre attention

    sur

    l a plus b e l l e l a n g ue degl’Europe, c e l l e

    qui l a

    première

    a

    consacré franchement l e s d r o i t s d e

    l’homme

    e t d u

    citoyen, c e l l e

    qui e s t

    chargée d e

    transmettre au monde

    l e s plus s ubl imes pens ées

    d e

    l a l i b e r t é e t l e s plus

    grandes

    spéculations

    d e l a p o l i t i q u e .

    .

    « L o n g t e m p s e l l e f u t esclave; e l l e flatta l e s r o i s ,

    corrompit

    l e s

    cours

    e t

    a s s e r v i t

    l e s

    peuples;

    lon gtemps

    e l l e f u t

    d é shon or ée

    dans l e s écoles, e t

    m e n s o n g è r e

    dans l e s l i v r e s d e l’éducation publique, astucieuse

    d an s

    l e s

    tribunaux, fanatique d an s

    l e s templ es , bar

    bare dans l e s d i p l ôme s,

    amollie

    par l e s

    poëles,

    cor

    ruptrice sur l e s t h é â t r e s ; e l l e semblait attendre o u

    plutôt désirer u n e

    plus b e l l e destinée.

    « Épur ée enfin, e t adoucie

    par

    quelques auteurs

    dramatiques, ennoblie

    e t b r i l l a n t e

    d an s l e s discours

  • 8/16/2019 Les Crimes de l Éducation Française, par Pierre-Sébastien Laurentie

    28/97

    DE L’ÉDUCATION

    FRANÇAISE. 1 9

    d e qu el qu es

    orateurs,

    e l l e

    venait

    d e

    reprend re d e

    l’énergie, d e l a raison, d e l a l i b e r t é sous l a p l u m e d e

    quelques philosophes qu e l a persécution a v a i t

    honorés

    avant l a Révolution d e 1789 .

    t : Mais e l l e

    p a r a i s s a i t

    encore n’appartenir qu’à cer

    t a i n e s c l a s s e s

    d e

    l a

    s o c i é t é ;

    e l l e

    a v a i t p r i s l a t e i n t e

    d e s distinctions nobiliaires, e t l e

    courtisan,

    non c o n

    t e n t

    d ’ ê t r e

    distingué

    par

    s e s v i c e s e t s e s

    dépravations,

    cherchait

    encore

    à

    s e distinguer

    dans

    l e même pays

    par un autre langage. On eût d i t q u ’ i l y a v a i t plu

    sieurs nations d a n s une seule.

    «

    Cela

    devait

    ê t r e

    dans u n g o u v e r neme nt monar

    chique, où l ’ o n f a i s a i t s e s preuves pour entrer dans u n e

    ma i s o n

    d’éducation

    ,

    dans

    u n

    pays

    o ù

    i l

    f a l l a i t

    un

    cer

    t a i n

    r ama ge p o u r

    ê t r e

    d e ce qu e l ’ u n appelait l a bonne

    compagnie, e t où

    i l f a l l a i t s i f f l e r

    l a

    l a n g u e

    d ’ u n e

    ma

    n i è r e

    p a r t i c u l i è r e

    pour ê t r e u n homme

    comme

    i l f a u t .

    »

    Te l é t a i t l e d é but d u rapport

    d e Barère

    sur l a

    nécessité

    d e

    r év o l u t i o n n er

    cette l a n g u e

    sifilée,

    d i s a i t - i l ,

    par l a bo nn e c ompag ni e, e t

    qu i

    attendait u n e

    pl u s

    b e l l e

    d e s t i n é e .

    L e plan, après

    ce

    bruit d e

    paroles,

    s e r é d u i s a i t

    à

    a b o l i r

    par l a l o i t o u s l e s

    idiômes

    p o p u l a i r e s .

    a

    Parmi

    les

    i d i ô m e s anc i en s ,

    disait

    l e

    r a v a g e u r

    en

    sa pompeuse naïveté, parmi l e s i d i ôme s anciens,

    Welches, gascons, celtiques,

    visigoths,

    phoc éen s o u

    orientaux,

    qui forment

    quelques

    nuances

    dans l e s

    c ommun i cat i on s

    d es

    divers

    citoyens

    e t

    d es

    pays

    f o r

    mant

    l e t e r r i t o i r e d e l a R ép ublique, n o u s

    avons

    observé ( e t l e s rapports

    d es

    représentants s e ré u

    2.

  • 8/16/2019 Les Crimes de l Éducation Française, par Pierre-Sébastien Laurentie

    29/97

    20

    LES

    CRIMES

    nissent

    sur

    ce

    point

    avec

    ce ux

    d es

    divers

    agents

    envoyés dans l e s départements)

    qu e l’idiôme

    appelé

    bas

    breton, l’idiôme basque, l e s langues al leman de

    e t i t a l i e n n e , ont perpé-tué l e règne d u fanatisme e t d e

    l a superstition, assuré l a

    domination

    d es

    prêtres,

    d es

    nobles e t d es

    praticiens,

    empêché l a

    Révolution d e

    pénétrer dans neufdépartements importants, e t

    peuvent

    favoriser

    l e s

    en n em i s

    d e

    l a

    France.

    »

    R évolutionner la langue,

    c ’ é t a i t

    d o n c abolir l e s

    langues locales qu e

    parlaient

    l e s

    peuples divers

    :

    un

    a r t i c l e d e l o i devait s u f f i r e à ce s o u da in cha n ge me nt

    du langage

    d e tous l e s

    f o y e r s .

    «

    Je

    commence

    par

    l e

    bas bre to n, d i s a i t Barère; i l

    e s t

    parlé

    exc l u si vemen t d a ns l a presque t o t a l i t é d es

    départements d u Morbihan, d u Finistère, d es

    Côtes

    du-Nord, d ’ I l l e - e t - V i l a i n e , e t

    dans u n e g ran de partie

    d e l a Loire-Inférieure. L à l’ignorance perpétue l e

    j o u g i m p o s é par l e s prêtres

    e t

    l e s

    n o b l e s . ;

    l à l e s

    citoyens naissent

    e t

    me ur e nt dans

    l ’ e r r e u r .

    I l s ignorent

    s ’ i l e x i s t e encore

    d es

    l o i s nouvelles.

    «

    L es

    habitants

    d es

    c ampa g n e s

    n’entendent

    qu e

    l e

    bas breton; c ’ e s t avec c e t

    i n s trument barbare

    d e leurs

    pensées superstitieuses qu e l e s prêtres e t

    l e s i n t r i

    gants l e s

    tiennent

    sous leur empire, dirigent leurs

    consciences

    e t empêchent l e s citoyens d e connaître l e s

    l o i s e t d’aimer l a R épublique. V o s travaux leur sont

    inconnus , vos e f f o r t s pour leur affranchissement sont

    ignores.

    «

    Ué d u c at i o n publique

    ne peut

    s ’ y

    é t a b l i r ; l a

    régénération y

    e s t impossible. »

    \

  • 8/16/2019 Les Crimes de l Éducation Française, par Pierre-Sébastien Laurentie

    30/97

    DE UEDUCATION FRANÇAISE. ‘ i l

    C ’ é ta i t

    tout

    d i r e

    en

    un mot

    : t t

    Je

    commence

    par

    l e

    bas bretonl »

    comme s ’ i l

    eût d i t

    :

    Je

    commence

    par

    l a

    l ang ue d e

    l a

    servitude par excellence;

    c ’ é t a i t l a

    première

    q u ’ i l

    f a l l a i t

    abolir;

    e t

    avec

    l e

    bas breton

    Barère a b o l i s s a i t

    à

    l a f o i s l e basque,

    c e t t e

    l a n g u e

    originale

    e t mystérieuse, e t avec l e basque

    enfin tous

    l e s i d i ôme s locaux, langues dérivées qui sont comme

    l a

    phys ionomie

    pittoresque

    d e

    chaque

    région,

    e t

    s ou

    vent disent

    l e

    secret

    d es

    origines communes

    d u

    peuple

    entier.

    L’idée é t a i t f o l l e ;

    mais i l

    f a u t v b i r

    l’accent

    d’inspiré

    qu i s e mêlait à l’utopie; car c ’ e s t i c i l a révélation pre

    m ière d u

    g é n i e révolutionnaire

    au

    point

    d e vu e d e

    l’éducation publique.

    «

    I l

    f a u t , d i s a i t Barère, populariser

    l a

    l an g u e; i l

    f a u t détruire

    c e t t e a r i s t o c r a t i e

    d e

    langage qu i

    semble

    é t a b l i r u n e n a t i o n ‘

    policée

    au

    milieu d’une nation

    barbare.  

    «

    Nou s avons

    révolutionné l e g o uvernement, l e s

    lois, les u s a g e s , les mœurs, les coutumes, l e com

    merce,

    e t l a

    pensée

    même;

    r é v o l u t i o n n o n s

    aussi

    l a

    l ang ue, qu i

    en

    e s t

    l’instrumentjournalier.

    »

    Et

    plus l o i n :

    «

    L e

    fédéralisme e t l a

    superstition parlent

    _ t o u s

    breton; l’émigration e t

    l a

    haine d e

    l a R épub l ique

    parlent a l l e m a n d ;

    l a

    contre-révolution

    parle l ’ i t a l i e n

    e t l e

    fanatisme

    parle

    basque

    : cassons

    ces

    instruments

    de

    dommage

    e t

    d ’ e r r e u r .

    »

    Telle

    é t a i t l ’ e x a l t a t i o n d u philosophe poële , car i l

    é t a i t poële, ce ni vel eur d’idiômes; maislil o u b l i a i t ,

  • 8/16/2019 Les Crimes de l Éducation Française, par Pierre-Sébastien Laurentie

    31/97

    22’ LES CRIMES

    o u

    bien i l couvrait

    d ’ un certain v o i l e s on premier

    patois,

    l e

    béarn a i s, l e p l u s

    doux

    e t l e

    p l u s

    aristocra

    tique

    d e tous, c e l u i qu’avait parlé

    Henri IV,

    e t qu e

    n e d é daignait

    pas

    l e Parlement d e Pa u d an s l a fami

    l i a r i t é

    d e s e s

    audiences.

    I l

    y a v a i t , d i s - j e , dans ce langage

    u n accent d e

    dithyrambe, avec lequel o n étourdissait l ’ i n 1 a g i n a t i o n

    d es

    foules,

    e t

    a i n s i

    l a

    Révolution,

    tout

    entière

    à

    l ’ e n

    thousiasme d es

    ravagesfse

    l a i s s a i t aisément

    d i s t r a i r e

    d e

    ce qu i

    é t a i t d o g m a t i q ue ;

    pour

    quelques rontiniers

    d’école, l’instructionpublique é t a i t u n e question d e

    doctrine;

    p o u r

    l e s f o u g u e u x e t p o u r

    l e s

    poëles,

    e l l e

    é t a i t u n e

    f a n t a i s i e d e

    nouveauté

    e t

    d e

    nivellement.

    Ch é n i e r, un

    autre

    lettré, mais s u p é r i e u r à

    B a r è r e

    par

    l a

    distinction

    d e

    l ’ e s p r i t ,

    f u t

    d e

    c e ux

    qu i

    firent

    d e

    c e t t e

    question d’instruction publique u n e fascina

    t i o n

    d u peuple en l’appliquant n o n

    à d es

    nouveautés

    d e système, ma is à d es inventions d e f ê t e s t h é â t r a l e s ,

    o ù

    l ’ a r t s ’ e x e r ç a i t à

    n ’ ê t r e qu e d e

    l a p u é r i l i t é .

    C ’ e s t

    u n e

    ét u de

    curieuse

    à f a i r e

    qu e

    c e l l e d es

    f ê t e s

    d e l a R évolution au point d e vu e d e l’éducation pu

    blique.

    «C itoyen s représentants, v i n t dire Chénier à l a

    Convention,

    l e

    7

    vendémiaire an I I I ,

    quan d

    l ’ i n s t r u c

    t i o n

    publique peut espérer

    de

    r e n a î t r e , i l

    e s t i n s t a n t

    d’ impr imer au x

    f ê t e s

    nationales

    un caractère solennel;

    c ’ e s t l à

    votre

    vœu, représentants, e t

    votre

    comité

    d’instruction

    p u b l i q u e

    est animé

    du

    même

    d é s i r ;

    mai s chargé

    par

    vous

    d e

    f a i r e célébrer, l e 10 vend é

    miaire, u n e f ê t e r e l a t i v e au x v i c t o i r e s rapides d e no s

  • 8/16/2019 Les Crimes de l Éducation Française, par Pierre-Sébastien Laurentie

    32/97

    DEUEDUCATION

    FRANÇAISE.

    23

    arm é e s

    e t

    à

    l ’ e n t i è r e

    évacuation

    d u

    t e r r i t o i r e

    répu

    blicain ,

    i l

    d o i t v o u s rendre un compte fid èl e d es en

    traves q u ’ i l

    rencontre

    d an s sa marche.....

    « Au

    milieu

    d e

    t a n t

    d e prodiges, i l

    a

    vu

    d es

    a r t s

    paralysés, d es

    t a l e n t s

    rebutés

    par un long

    d é d a i n,

    nuls monuments durables e t f o r t s comme l a l i b e r t é ,

    mais

    d es m a t é r i a u x

    sans cohérence,des e squ i ss es s an s

    dignité

    ,

    d es

    inscriptions

    o ù

    l a

    raison

    e t l a

    l a n g ue

    fran

    çaise sont é ga lement

    d é g ra d ées,

    un despotisme capri

    cieux e t

    puéril

    enchaînant

    l a

    pensée d es a r t i s t e s ;

    d es plans

    bizarres sans

    o r i g i n a l i t é , d u rs

    sans

    énergie ,

    fastueux sans

    véritable

    richesse, mon ot one s sans

    unité; d es f ê t e s , en un

    mot,

    colossales

    d an s

    leur o b j e t ,

    p e t i t e s d an s leur exécution, e t n ’ o f f r a n t d’imposant

    qu e

    l a

    présence

    d u

    peuple

    souverain. »

    I c i Chénier accusait « l e s sectateurs du nouvel

    Omar, qu i ont t o u t c omb i n é, d i s a i t - i l , pour anéantir

    l ’ i n s t r u c t i o n publique en France

    u,

    e t

    i l

    concluait

    s on

    rapport en d e m a n d a n t l’ajournement d e l a f ê t e

    au 30 vendémiaire,

    afin qu e

    l e

    comité

    eût l e

    temps

    d e

    f a i r e

    «

    u n

    t r a v a i l

    p l u s

    c o n s i d é r a b l e

    e t

    mûri

    par

    d es études

    préliminaires

    e t profondes. »

    L a - Convention

    vota

    l e décret ‘ .

    Quinze jours après Chénier rendait compte d u t r a

    v a i l d e

    l a

    c omm i s s i o n

    d’instruction

    publique. «

    Une

    c o m m i s s i o n sage,

    d i s a i t - i l ,

    éclairée, laborieuse, am i e

    d e

    l a philosophie

    e t par

    conséquent d es hommes,

    puisque

    l a

    philosophie

    l e s

    rend

    meilleurs,

    a

    remplacé

    1 Moniteur d u 8 V e n d é m i a i r e

    an

    I I I .

  • 8/16/2019 Les Crimes de l Éducation Française, par Pierre-Sébastien Laurentie

    33/97

    2 1 4 LES CRIMES

    c e t t e

    c o m m i s s i o n

    imbécile,

    qu i sous

    l e

    j o u g

    sanglant

    d e

    Robespierre, organisait avec t a n t

    d e

    soin l ’ i g n o

    rance e t l a b a r b a r i e . . . . .

    «Tandis

    que

    l e comité d ’ i n s t r u c t i o n , a j o u t a i t - i l ,

    marchant avec

    vous_et

    fort de votre volonté

    , rappelle

    autou r d e l a représentation nationale tous l e s

    a r t s ,

    toutes

    l e s sciences,

    toutes

    l e s

    f a c u l t é s i n t e l l e c t u e l l e s ,

    tandis

    q u ’ i l

    s’occupe

    sans

    relâche

    d e

    d o n n er

    au x

    hommes

    ‘ e t

    a u x instituteurs

    leurs proport i o ns natu

    r e l l e s (leurs PROPORTIONS l ) e t l a l i b e r t é qu i leur man

    que, déjà

    l e s f ê t e s publiques, plus sagement

    d i r i g é e s ,

    moins chargées d’oripeaux c i v i q u e s e t de

    g u e n i l l e s

    à

    prétention, é c ha pp an t a u despotisme

    d es imaginations

    bizarrement

    s t é r i l e s

    e t d u caprice en d é l i r e ,

    com

    m e n c e n t

    à

    porter,

    j e

    ne

    crains

    pas

    d e

    l e

    dire,

    u n

    caractère

    conforme

    au g é n i e d u

    peuple, un caractère

    à

    l a

    f o i s simple e t grand.

    » 7

    Et comment

    enfin

    a l l a i t se révéler ce caractère

    simple e t

    grand

    d es

    f ê t e s

    publiques,

    sons l ’ i n s p i r a t i o n

    d e

    c e t t e

    c o m m i s s i o n

    « amie

    d e

    l a philosophie,

    par

    c on s équent

    d es

    hommes, puisque l a philosophie l e s

    rend meilleurs »

    On a l l a i t l’apprendre par

    un

    troisième

    rapport

    d u

    même

    Ch énier,

    au

    nom

    du

    même c o m i t é d’instruction

    publique, «

    sur

    l e s moyens d e remplacer l e s céré

    m o n i e s religieuses‘.

    » C ’ é t a i t i c i l a manifestation d u

    g é n i e révolutionnaire, d é g a g é d e toute thé orie légale

    s u r

    l a

    l i b e r t é

    d e

    l’éducation.

    Ï S é ance d u i nivôse an

    I I I .

    t

  • 8/16/2019 Les Crimes de l Éducation Française, par Pierre-Sébastien Laurentie

    34/97

    ne

    L’ÉDUCATION

    raauçaisn‘.

    2 5

    «

    La

    l i b e r t é

    c on qu i se par

    l a

    puissante

    énergie

    du

    peuple,

    d i s a i t Chénier, n e s ’ a f l e r m i t

    qu e

    par d es l o i s

    sages

    , ne

    s ’ é t e r n i s e

    qu e par l e s

    m œ u r s . Tou s

    l e s p r é - _

    jugés tendent à l a d é t r u i r e , e t l e s p l u s redoutables

    sont

    ceux qui,

    fond és s ur d es idées mystiques,

    s’em

    parent d e I’imagination

    sans

    d o nn er au cu ne prise

    à

    l ’ i n t e l l i g e n c e humaine. Ainsi, sur l e s d e u x c o n t i

    nents,

    les

    nations

    se

    sont

    é g o r g é e s

    pour

    d es

    rel i g i o ns

    r i v a l e s , mai s é ga lement ennem ies

    d es

    nations, e t l e

    sa n g d es hommes a coulé pour d es opinions

    qu e

    l e s

    hommes n e comprenaient p a s . C ’ e s t avec u n e raison

    active e t pratique,

    c ’ e s t avec d es

    i n s t i t u t i o n s t u t é

    l a i r e s d e l a l i b e r t é , q u ’ i l

    f a u t

    attaquer

    d es

    i n s t i t u t i o n s

    tyranniques

    e t

    a n t i s o c i a l e s . L a philosophie

    n e

    com

    mande

    pas d e croire;

    l e s

    d o g m e s ,

    l e s

    mystères,

    l e s

    miracles l u i s on t é tran ge rs ; e l l e s u i t l a nature, e t

    n’a

    pas

    l a f o l l e prétention

    d e changer ses

    l o i s i m m ua b l e s,

    d’interrompre

    s on

    cours

    é t e r n e l . Aussitôt qu e l’im

    posture d o m i n e , e l l e étend s on

    jou g

    d e f e r sur l e s

    consciences; mais l a v é r i t é n e d o i t pas avoir s e s

    inquisiteurs

    comme

    l’imposture.

    Quand

    l e

    fanati sme

    persécuté, i l avance sa perte; quan d i l e s t

    persécuté

    par

    un

    fanatisme contraire,

    i l

    s e prépare

    à

    d es

    triom

    phes, e t dans l e s matières religieuses, dans l e s ma

    t i è r e s politiques même, l’édifice d e l’erreurn’a jamais

    été cimenté

    qu e

    par

    l e

    sang d es

    martyrs.

    _ « C ’ e s t d’après ces réflexions préliminaires, qu i

    peut-être

    auraient

    d u

    g u i der

    c on s t amme nt

    l e s

    l é g i s

    lateurs, e t d ont l’examen sérieux importe plus qu e

    jamais

    dans l e s circonstances a c t u e l l e s ,

    qu e

    votre

  • 8/16/2019 Les Crimes de l Éducation Française, par Pierre-Sébastien Laurentie

    35/97

    ‘ Z 6 LES CRIMES

    1

    7

    comité d

    instruction

    publique

    vient

    aujourd’hui par

    mon

    or gane

    présenter à votre méditation quelques

    idées

    s ur l e s f ê t e s décadaires. »

      Te l é t a i t

    l e p r é amb u l e d u législateur

    poëte;

    i l

    n’y

    a v a i t

    l a

    qu e

    d es

    banalités,

    écho d es d é c l ama ti o ns d u

    s i è c l e à

    peine

    écou lé contre l e fanatisme,

    sans l e

    m o i n d r e indice d’ u n

    plan

    philosophique

    sur

    l a direc

    t i o n

    à

    d o n n er

    à

    l a

    pensée

    nationale,

    au

    moyen

    d e

    l’éducation.

    Ma i s

    l’œuvre é t a i t

    assez

    féconde s i e l l e

    s a i s i s s a i t

    l e s imaginations

    par

    l a pompe d es f ê t e s

    d e

    l a

    Répu

    blique, e t

    s i

    e l l e e f f a ç a i t jusqu’au souvenir

    d es

    f ê t e s

    d e l a superstition; aussi t o u t l e rapport porte l’em

    preinte d ’ u n

    e nt ho us i as me d e

    visionnaire, mai s rien

    qui

    s o i t

    un

    indice

    d e

    l é g i s l a t i o n

    p r ém é d i t é e

    sur

    l ’ o r

    g a n i s a t i o n des études

    humaines.

    «

    Tout

    pouvoir fondé

    sur l a violence

    d o i t

    p é r i r ,

    d i s a i t

    Chénier à

    l a

    fin

    d e s on

    rapport;

    l a rai son s eu le

    e s t éternelle; l’opinion publique peut suivre quelque

    f o i s

    u n e

    direction dangereuse, a l o r s un g o u v e r neme nt

    habile

    lève

    d es

    philosophes,

    e t non d es

    armées.

    Quand

    l’opinion e s t foulée au x pieds, i l

    y a

    oppres-

    sion,

    e t quand i l y a oppression, l a force ins urg é

    en

    plein jour, l a f a i b l e s s e assassine pendant l a nuit, l e s

    crimes

    appellent l e s

    crimes

    , e t n e l e s

    appellentjamais

    en v a i n .

    S i l a tyrannie f a i t l a Saint-Barthélemy e t l a

    guerre

    d es Camisar ds,

    l a

    ven geance

    f a i t

    l e s

    Vêpres.

    siciliennes

    e t

    les massacres

    d’Irlande. i

    « Certes

    d es

    législateurs ne doivent. jamais perdre

    d e vu e qu e

    l e sceptre e t l a t i a r e sont

    unis

    par

    u n e

  • 8/16/2019 Les Crimes de l Éducation Française, par Pierre-Sébastien Laurentie

    36/97

    .

    DE

    UÉDUCATION

    FRANÇAISE.

    27

    chaîne

    qu i

    pèse

    sur

    l e s

    peu pl es . C ertes

    l e s

    r o i s

    e t

    l e s

    prêtres ont toujours é t é d es

    a l l i é s

    naturels;

    e t l a

    Con

    vention

    nationale

    a besoin

    d e toute s on énergie p o u r

    anéantir l e s s c é l é r a t s qui voudraient f a i r e d e l ’ a u t e l l e

    piédestal d e

    leur

    statue, o u l a première

    marche

    d e

    leur trône; ma is s i

    l ’ u n

    n e veut perdre l a chose pu

    b l i u e i l f a u t

    bien

    s e arder

    d’écouter

    encore

    ces

    l a

    d éclamateurs

    é n e r g u m è n e s ,

    qu i

    d a n s .

    leurs

    d é b a u

    ches d ’athé i sme renant l ’ i v r e s s e o u r d e

    l’euthou

    P P

    siasme

    voudraient é arer l a raison d u eu

    l e

    d an s

    g P

    P

    l e chaos d e l eurs abstracti ons d é l i r a n t e s , e t trop

    pe u

    politiques pour savoir attendre, trop pe u penseurs

    pour savoir douter, dénonceraient F é n e l o n e t

    L as

    Casas comme d es pers écu teurs fanatiques,

    Jean

    Jacques

    R o u s s ea u

    comme

    u n

    dévot,

    Voltaire

    comme

    un homme

    à préjugés,

    Bayle e t Montai g ne,

    ces

    scep

    tiques célèbres, comme d es m o d é r é s en philosophie.»

    C’était là

    toujours, on

    l e voit, de la d é c l a m a t i o n ,

    e t qu i v i s a i t à rattacher l a l i b e r t é révolutionnaire à

    l’œuvre

    d es

    sceptiques d u

    dix-huitième

    s i è c l e

    qui

    en

    avaient é t é l e s i n i t i a t e u r s , comme pour échapper à ce

    rief de

    fanatisme,

    ui

    avait

    été

    toute

    l ’ i n s iration et

    3 ‘ I

    P

    t o u t e

    l a

    raison d e

    leurs i m

    i é t é s l

    -

    Bref, Chénier, au nom d e l ’ i n s t r u c t i o n publique,

    proposait à l a

    Convention

    un projet

    d e décret

    d o nt l e

    remier a r t i c l e o r t a i t : « Une f ê t e c i v i

    u e

    sera c é l é

    P P ‘ I

    brée

    chaque

    d écadi dans toutes l e s communes d e l a

    République.

    n

    Suivaient

    d es

    prescriptions

    sur

    ces

    solennités décadaires, comme p a r l a i t l e décret, l e s

    quelles devaient

    remplacer e t abolir à jamais l e s

    f ê t e s

  • 8/16/2019 Les Crimes de l Éducation Française, par Pierre-Sébastien Laurentie

    37/97

    28 LES

    CRIMES

    d e

    l a

    r e l i g i o n .

    L es

    sexagénaires

    d es

    d e u x

    sexes

    avaient

    u n e

    place d ’honneur d an s

    l a solennité;

    l a journée

    s ’ o u v r a i t

    par

    u n e instruction morale adressée au

    peuple, c e t t e instruction devait

    ê t r e c o n fi é e

    à d es

    pères d e famille;

    e l l e é t a i t s u i v i e

    d e

    l a lecture d es

    décrets

    envoyés

    par

    l a

    C on ven ti o n d an s l e courant d e

    l a d é c a d e ;

    puis

    venaient

    d es

    chants patriotiques, e t

    enfin

    d es

    danses

    e t

    «

    autres

    exercices

    adaptés

    au x

    mœurs républicaines » . Un a r t i c l e

    p o r t a i t

    qu e « l e

    comité

    d’instruction

    publique

    é t a i t

    autorisé à

    em

    ployer l e s gens

    d e

    l e t t r e s

    e t

    l e s a r t i s t e s l e s plus d i s

    tingu és par leurs

    t a l e n t s e t par leur civisme,

    afin

    d’accélérer l a composition d ’ un

    cours . d ’ i n s t r u c t i o n s

    morales e t d ’ u n recueil

    d e

    chants patriotiques » pour

    l a

    mise

    en

    p r a t i q u e

    d u

    d é c r e t ; l e

    c o u r s de danses

    patriotiques é t a i t

    o u b l i é .

    Je n’imag ine

    pas

    qu e l a b ê t i s e

    humaine

    s e f û t en

    a u c u n temps prise assez au sérieux pour formuler en

    dispositions d e

    l o i s d es

    f a n t a i s i e s d e c e t t e

    s o r t e

    en

    matière d’éducation; e t c ’ e s t u n

    poële, ayant eu

    son

    heu re d e

    renommée,

    qui

    propo sa it c e

    moyen

    roma

    nesque d e chasser l e fanatisme e t l a superstition

    L’enthousiasme,

    dan s

    l a Révolution, n e

    f u t

    tour

    à

    tour qu e d u d é l i r e e t d e l a p u é r i l i t é .

  • 8/16/2019 Les Crimes de l Éducation Française, par Pierre-Sébastien Laurentie

    38/97

    DE L’EDUCA’I‘ION

    FRANÇAISE.

    29

    VI.

    Disons qu e

    l a

    Convention

    ju gea intempestif l e

    plan

    d u

    poë le; son

    d é c r e t f u t ajourné; mais l a décade n ’ e u t

    pas

    moins ses fêtes bo uf f o nne s; l a C o n v e n t i o n , .

    deux

    ans

    p l u s tard, les f a i s a i t entrer

    comme

    partie inté

    grante

    d e l’éducation publique dans c e t t e l o i

    qu’avait

    présentée Daunou avec u n a r t s i n o u vea u d e modé

    r a t i o n e t de s t y l e .

    A

    Cette

    l o i organisait l ’ i n s t r u c t i o n publique

    d an s

    son

    vaste

    en semb le

    d’études, d’écoles e t , d ’ i n s t i t u t i o n s

    savantes : l e s écoles

    primaires,

    l e s

    écoles centrales

    ,

    les écoles

    spéciales

    ,

    l ’ I n s t i t u t

    national

    d es

    sciences

    e t

    d es arts, les encouragements, récompenses e t

    hon

    neurs publics, e t enfin l e s f ê t e s nationales; c ’ é t a i t

    comme

    un

    vaste

    réseau

    o ù devait

    ê t r e

    embrassée l ’ i n

    t e l l i g e n c e d u peuple e n t i e r .

    Et c ’ e s t a l o r s qu e f u t repris l e plan d e Ché ni er sur

    l a

    nécessité d e rempl acer

    l e

    spectacle

    populaire d es

    so lenn it és

    de

    l a

    rel i g i o n

    par d es

    fêtes

    civiques,

    -

    civiques é t a i t un terme nouveau, e t

    par

    ma lhe ur i l e s t

    r e s t é d an s l a lan g u e _ t comme ces

    f ê t e s

    entraient

    dans

    l e système

    d ’ é d u c a t i o n p u b l i q u e ‘ , qu i d e v a i t

    renouveler l e peuple, i l me f a u t d i r e l e t e x t e de l a

    l o i qu i

    en

    p r e s c r i v a i t ’

    l a célébration

    comme u n s a i n t

    devoir

    : l a p o s t é r i t é aura peine

    à croire

    qu’une nation

    sérieuse, après avoir é t é

    façonnée

    à tous l e s a r t s

    d e

    l ’ e s p r i t par l e s cultures l e s plus

    savantes,

    a i t pu

    d é l a i s

  • 8/16/2019 Les Crimes de l Éducation Française, par Pierre-Sébastien Laurentie

    39/97

    30 LES CRIMES

    ser

    l e s

    choses

    graves e t s a i n t e s d e

    l’éducation pour

    s’exercer, en

    d es

    solennités ridicules, à l ’ o u b l i d es

    f ê t e s

    chrétiennes

    qui

    avaient pendant quinze

    s i è c l e s

    bercé

    s on

    imagination e t charmé sa f o i .

    Voici d o n c l e t i t r e V I

    d e

    l a l o i d’instruction publique :

    rËTns NATIONALES.

    A r t .

    1 ° ’ .

    D an s

    chaque

    canton

    d e

    l a

    R épub l ique

    i l

    sera célébré chaque

    a n n é e

    sept f ê t e s

    nationales

    ,

    savoir :

    Celle

    d e l a

    fondation

    d e l a R é p ub l i q ue , l e 1 " ven

    démiaire;

    Celle d e

    l a

    Jeunesse,

    l e

    10

    germinal;

    C e l l e

    d es Époux,

    l e 1 0 floréal;

    Celle d e l a Reconnaissance, l e

    10

    p r a i r i a l ;

    C e l l e d e l’Agriculture,

    l e

    l _ ( ) mes s i d or;

    Celle d es

    Vieillards,

    l e 10 fructidor.

    A r t . 2 . L a célébration

    d es f ê t e s

    nationales d e canton

    consiste :

    En chants patriotiques;

    En

    discours

    sur

    l a

    mora le

    du

    citoyen;

    En

    banquets

    f r a t e r n e l s ;

    En divers jeux propres à

    chaque l o c a l i t é ;

    Et dans l a

    d i s t r i b u t i o n

    d es

    récompenses.

    A r t . 3 . L’ or donnance

    d es

    f ê t e s nationales, en chaque

    canton, est arrêtée e t annoncée

    par

    les autorités

    municipales.

    C ’ é t a i t l à , d i s - j e , l ’ a r t i fi c e principal d u g é n i e d e l a

    R é v o l u t i o n

    pour

    l a s é d u c t i o n du peuple.

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    32

    LES CRIMES

    de c o n q u ê t e pour leurs utopies, e t tous,

    sans

    excep

    tion,

    e urent

    l’ambition

    d e

    faire

    servir

    leurs

    d e s s e in s

    à

    l ’ é t a b l i s s e m e n t d’une éducation nationale, comme

    s i l’ éducation qu i avait formé les g é n é r a t i o n s fran

    çaises depuis Cha r le ma g ne a v a i t é t é

    n o n

    pas

    natio

    nale, ma is étrangère e t barbare

    V l l .

    F

    Un écrivain qu e j e nomme avec respect, mais dont

    l a f r i v o l i t é contemporaine n’a pas ouï

    l e

    nom, Fabry,

    a f a i t avant moi cette remarque.

    Fabry

    fut, d è s

    1814-, l e p l u s

    l a b o r i e u x col lecteur

    d e d o c ume nt s sur l a R évolution française, p a r t i c u l i è

    rement sur l ’ h i s t o i r e d e l ’ U n i v e r s i t é . L e t i t r e

    d e

    s e s

    J l l é n t o i r e s ‘ f e r a i t croire à un

    p a r t i

    p r i s

    d’accusation

    e t d e colère; mais

    l e l i v r e

    e s t t o u t

    bourré

    d e pièces,

    d’actes o f f i c i e l s ,

    d’opinions,

    d e

    rapports, d e

    l o i s

    e t d e

    décrets,

    e t i l marche parallèlement

    à

    c e t t e autre

    com

    p i l a t i o n

    d e pi è ces ad mi ni strati ves, v a s t e arsenal d e

    l é g i s l a t i o n

    o ù

    s ’ é t a l e

    à

    p l a i s i r

    l e

    g é nie

    inspirateur

    d e

    tous les po uvo irs d epu i s 1789, relativement à l ’ é d u

    cation publique ‘ i .

    1 Mémoires

    p o ur

    servir

    à

    l ’ h i s t o i r e d e

    l’éducation

    publique depuis

    1789 jusqu’à

    no s jours, o u l e g é n i e

    d e

    l a

    R é vo l u ti o n c o ns i d é ré d a n s

    l ’ é d u c a t i o n , où l ’ o n v o i t l e s e f f or t s d e l a l é g i s l a t i o n e t d e l a philosophie

    d u dix-hu itième s i è c l e p o u r anéantir

    l e

    christianisme; par M. F ssur .

    3

    gros

    v o l Î

    in-8°.

    1821.

    2 Recueil d e

    l o i s

    e t

    règlement: concernant

    l ’ i n s t r u c t i o n publique

    depuis

    l ’ é d i t d e Henri

    l V

    en 1598 j u s q u ’ à

    cejour.

    -hez

    Brunot-Labbe.

    À

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    DE

    UÉDUCATION FRANÇAISE. 33

    I l

    n’y

    a

    d o n c

    point

    d e

    contradiction

    possible

    sur

    l e s

    actes avérés qui ont

    perverti l ’é d u cati o n f ran çai se;

    tout au plus

    Fabry, qu i

    l e s r e c u e i l l e , a parfois

    d es

    i r o

    nies

    o ù

    s e montre encore

    plus

    l’amour

    d e

    l a v é r i t é

    qu e l e

    goût d es

    persifflages.

    A i n s i , à l’occasion d e c e t t e désignation d’éducation

    nationale qu’avaient a f f e c t é e tous

    l e s

    pouvoirs,

    Fabry

    passe

    en

    revue

    l e s

    plans

    e t

    l e s

    e s s a i s

    d es

    inventeurs

    ,

    e t ce tableau n ’ a v a i t pas besoi n d ’ u n gr a n d a r t d e

    malice pour

    ê t r e

    i n s t r u c t i f .

    «

    M .

    de Ta l le yrand, d i t - i l ,

    o f f r a i t

    à l ’A s s e m b l é e

    constituante u n plan d’éducation nationale; Con d orcet

    présenta

    à l’Assemblée l é g i s l a t i v e u n pl an d ’é d u ca ti o n

    n a t i o n a l e .

    «

    L e p e l l e t i e r

    et

    Roberspierre

    ( i l

    écr it

    a i n s i

    ce

    nom

    d’enfer) présentèrent

    à

    l a Convention un plan

    d ’ é d u

    cation nationale

    et

    v r a i me n t

    nationale,

    car i l s vou

    l a i e n t é l ever to us l e s enfants e t

    toutes

    l e s fi l l e s d e l a

    nation au x d é pen s d e l a nation, e t dans d es m a i s o n s

    appartenant

    à

    l a n a t i o n . Je n e sais s ’ i l

    y eut

    jamais

    d’idée plus nationale; j e ne trouve rien qui e n a pp ro c he

    autant

    qu e

    l ’ U n i v e r s i t é

    impériale; ma is avant d’en

    venir à ce vaste plan, L ak an al pr opo s a s on plan d ’ é d u

    cation

    nationale;

    Dupuis proposa s e s vues s ur un plan

    d ’ é d u c a t i o n

    nationale;

    Daunou propo sa,

    e t l a

    Conven

    t i o n

    décréta

    son

    plan d’éducation nationale; R o g e r

    Martin proposa son plan

    d’éducation nationale;

    Lumi

    nais

    proposa

    son

    pl an d ’é d uc ati on

    n a t i o n a l e .

    I l

    y

    eut

    encore bien d’autres plans d’éducation nationale pro

    posés sous

    l a

    Convention e t

    l e Directoire. Après l a

    3

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    43/97

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    44/97

    on L’ÉDUCATION FRANÇAISE. a s

    négations,

    d e

    renonciations, e t

    l e

    plan

    l e

    plus na

    t i o n a l

    e s t

    c e l u i

    l a

    nation

    s e

    renie

    l e

    plus

    e l l e

    même l .

    »

    Telle

    é t a i t d o n c l a

    vu e

    principale

    d e

    tous l e s inven

    teurs d e l o i s sur l’éducation; i l s voulaient l’éducation

    nationale; ces mots n ’ é n o n ç a i e n t

    rien

    d e défini; mais

    l e

    v a g u e é t a i t

    u n e

    s o r t e

    d e

    fascination;

    l’imagination

    voyait apparaître u n monde n o u v e a u ; l a

    nouveauté

    d e l a l an g u e

    s e r v a i t

    au x i l l u s i o n s d e l’enthousiasme ,

    e t

    parce qu e

    tout semblait

    devenir

    national,

    o n crut

    qu e l a nation e n t r a i t

    pour

    l a première f o i s dans

    l a v i e .

    C ’ e s t a i n s i

    qu e notamment

    dans l e s choses d e l’édu

    c a t i o n ,

    l e s l é g i s l a t e u r s se sentirent dispensés

    d e

    formu

    l e r

    d es

    doctrines;

    i l s

    avaient

    détruit

    e t

    saccagé

    l e s

    uni

    versités; i l s avaient chassé e t é g o r g é l e s savants, l e s

    l e t t r é s , l e s

    religieux,

    qui

    é c l a i r a i e n t e t gouvernaient

    l e s générations; i l s s e c ru ren t aprè s cela assez ma î

    t r e s d e l’éducation publique. La p u é r i l i t é m é taphy

    sique d e l’enseignement dans l e s écoles, l a p u é r i l i t é

    fastueuse

    d es

    f ê t e s

    dans

    l a

    place publique, f u t

    l e

    gr a n d

    artifice

    d e

    leur

    d om inati on ;

    e t

    c ’ e s t

    pourquoi

    l a

    formule farouche d e Danton

    e t d e

    Robespierre

    g l i s s a

    sur

    l’imagination

    d es

    l é g i s l a t e u r s , e t aussi

    pourquoi i l s ne

    songèrent ni àapprofondir

    ni à

    d éfinir

    l e s

    réserves

    d e l i b e r t é é n on c ées dans l e s projets d e

    Lakanal e t

    d e

    Daunou

    :

    étourdir l e s

    foules

    f u t

    tout

    l ’ a r t d e l e s a s s e r v i r .

    1 Tome l l l , pag. 283 e t s u i v .

    s‘

    3.

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    36 LES CRIMES

    VIII

    Pourtant

    i l

    v i n t un moment où l ’ e s p r i t public, f a t i

    gué de ces artifices, se laissa a l l e r , s o u s la main d e

    conducteurs

    m o i n s

    épris

    d e

    rêverie, à

    l a recherche

    d e

    formules

    précises

    d’organisation;

    e t

    c ’ e s t

    a l o r s

    qu e

    commencèrent

    à

    reparaître, sinon l e s théories d an

    toniennes d e

    l ’ É t a t

    maî tre d es pères comme d es

    en

    f a n t s ,

    au

    m o i n s d es plans d e discipline souveraine sur

    l’éducation e t

    s ur

    l’enseignement d e

    tout

    l e peuple.

    I c i

    d o n c

    j e s u i s

    ramené

    au x plans techniques

    qu i

    vinrent d ès l e s premiers jours du s i è c l e n o u vea u

    mettre

    fin

    au x

    fictions

    d’éducation

    publique

    qu i

    d an s

    l e cours d e l a R évolution n’avaient é t é qu’une

    succes

    sion

    d’emphatiques

    r ê v e r i e s .

    C e

    n ’ e s t pas

    l e l i e u d e reprendre l’ordre

    d es

    e s s a i s

    d ’ i n s t i t u t i o n ,

    t e l s

    q u ’ i l s furent

    é n o n c é s par Bou la y

    e t

    par

    Chaptal en

    l ’ a n IX,

    e t puis formulés en l ’ a n X

    (1802) par l a l o i de Fourcroy.

    Arrivons

    d r o i t

    à

    l a

    création

    d e

    l’Université

    impé

    r i a l e parla l o i de 1806,

    e t

    par l e d é c r e t d e 1808.

    Cette f o i s , l ’ e s p r i t d’organisation ,

    déjà

    révélé

    dans

    l e r en ou v el l e me nt d e toutes l e s parties d e l a l é g i s l a

    t i o n ,

    par

    u n e

    préméditation d’unité,

    où s’absorbait l a

    v i e

    entière

    d e l a France, c e t e s p r i t d’organisation

    savante e t

    universelle put s e

    s e n t i r

    à

    l ’ a i s e en regard

    du vaste d é s o r d r e où les fantaisies d es

    niveleurs ,

    e t

    l e s

    conceptions

    d es

    sceptiques,

    e t l e s

    rêveries

    d es

  • 8/16/2019 Les Crimes de l Éducation Française, par Pierre-Sébastien Laurentie

    46/97

    DE

    UÉDUCATION

    FRANÇAISE. 37

    poëtes,

    avaient

    mi s

    l’éducation

    publique.

    L e

    g é nie

    d e

    Bonaparte n e supportait ni l’anarchie

    d es

    u n s, ni

    l ’ u t o p i e d es autres; tou t l ’ord re

    é t a i t

    pour l u i l ’ u n i t é

    d e

    l a domination.

    Et

    d’autre

    p a r t

    l a France,

    déshabi

    tuée

    d e s e s

    vieux usages d e l i b e r t é

    dans l e s

    choses d e

    l ’ é d u c at io n

    comme

    d a n s tout

    l e

    reste,

    s’accommodait

    volontiers d e ce qui l u i promettait un retour d e d i s

    cipline

    e t

    un

    renouvellement

    d es

    t r a d i t i o n s

    d e

    ré g ula

    r i t é n o n

    encore

    tout

    à

    f a i t perdues.

    J ’ a i vu ce temps;

    j ’ é t a i s écolier

    d e rhétorique d an s

    un

    collége o ù

    quelques prêtres admirables, échappés

    au x proscriptions, s ’ é t a i e n t g r o u p é s comme u n e f a

    mille d e maîtres pour f a i r e

    revivre

    l e s vieux

    exemples

    d’éducation

    à l a s u i t e d es e s s a i s

    d’instruction

    m éta

    physique

    c o n fi é s à

    l’improvisation

    étourdie

    d es

    écoles

    c e n t r a l e s . L ’ â m e

    d e

    ces d o u x

    maîtres

    s’épanouit

    d’es

    pérance

    à ce nom

    d ’ u n i v e r s i t e ’ ,

    qu i

    semblait ann oncer

    l a

    renaissance

    d es bonnes

    études.

    On

    s a i t

    qu e Napoléon, d e ven u empereur, a v a i t mi s

    a u s s i t ô t u n e application

    singulière à

    rechercher l e s

    souvenirs d e l a s o c i é t é ancienne comme u n e s é d u c

    t i o n

    p o u r

    l a société nouvelle;

    i l semblait

    ne vouloir

    garder

    dela Révolution qu e l a puissance dérivée d e

    s e s

    dogmes

    comme d e ses actes,

    e t

    cela même n ’ é t a i t

    pas u n s u j e t d ’ e f f r o i , d ès qu’on imaginait qu e c e t t e

    force

    i nu si té e d evai t

    s e r v i r

    à

    l a réparation d es ruines

    d e l a France.

    C ’ e s t

    a i n s i

    que

    l e s ‘ a c t e s

    de

    1806

    e t

    de

    1808

    t r o u

    vèrent u n s i f a c i l e accueil auprès des gardiens

    fidèles

    d es

    bonnes

    méthodes d’éducation.

  • 8/16/2019 Les Crimes de l Éducation Française, par Pierre-Sébastien Laurentie

    47/97

    38 LES

    CRIMES

    Tout

    d’ailleurs

    tendait

    en

    France

    à

    un

    mouvement

    d e

    renaissance

    d ont

    Chateaubriand ,

    par

    son Génie du

    Chr i s t ia n i s me,

    avai t é té l e

    brillant initiateur.

    Nu l n’échappa

    à ce puissant t r a v a i l d’opinion;

    i l

    devait s e f a i r e s e n t i r dans

    l e

    renouvellement d es l o i s

    s u r l ’ é d u c a t i o n .

     

    Aussi l’exposé d es motifs d e l a l o i présentée au

    Corps

    l é g i s l a t i f

    l e

    6

    ma i

    1806

    s’appliqua à

    apaiser

    à c e t é g ar d l e s scrupules

    subsistants d e

    l a conscience

    chrétienne

    e t

    d e l a raison publique ,

    tout en

    combat

    t a n t l a contradiction d e ceu x qu’on appelait ennemis

    personnels, parce

    qu e leur

    conscience h é s i t a i t encore.

    « L es lycées, disaient l e s auteurs d u rapport, sont

    principalement

    en

    butte à leur haine e t à leurs c a l o m

    n i e s .

    Quand

    i l s

    ne peuvent

    pas

    l e s

    attaquer

    sous

    l e

    rapport d e l ’ i n s t r u c t i o n , - i l s s e r e j e t t e n t sur l a

    religion

    e t l e s mœurs.

    «

    A

    les en croire, ces deux

    bases

    f on d ame nt al e s d e

    l’éducation d e l a jeunesse

    sont

    c omptées

    pour

    r i e n

    d a n s

    l e s

    écoles nouvelles.

    Tou s l e s

    reproches qu’on

    peut

    f a i r e dans

    ce g enre au x i n s t i t u t i o n s révolution

    naires, qu i sacrifièrent plus o u m o i n s au d é l i r e d u

    moment,

    i l s

    l e s a c c um u l e n t p o