Les confessions de Shimon Pérès la Séfarade · AU SOMMAIRE D’ Editorialiste : Josy Eisenberg...

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N°325 - SEPTEMBRE 2012 - 3€N°325 - SEPTEMBRE 2012 - 3€

Au souffle du chofarAu souffle du chofar

Les confessions de Shimon PérèsLes confessions de Shimon Pérès

Cordouela SéfaradeCordouela Séfarade

Juifs en pays arabes

Un entretien avec Georges Bensoussan

L'inventiondes nationsL'invention

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AU SOMMAIRE D’

Editorialiste : Josy Eisenberg

Chroniqueur : Guy Konopnicki

Comité de rédaction : Josy Eisenberg, Michel Gurfinkiel, Victor Malka, Joël Mergui, Philippe Meyer, Clément Weill-Raynal.

Collaborateurs : Armand Abécassis, Albert Bensoussan, Hélène Hadas-Lebel,Carol Iancu, Gérard Israël, André Kaspi, Naïm Kattan, Elie Korchia, Odette Lang, Annie Lelièvre, Daniel Sibony.

Administration : Jessica Toledano

Régie publicitaire : Média 5 - Tél. : 06 60 43 08 14Maquette : Mike CohenPhotographies : Alain Azria

Edité par S.a.r.l. Information Juive le journal des communautésau capital de 304,90 €Durée de la société : 99 ans

Commission paritaire des journaux et publications : 0708K83580

Dépôt légal n° 2270. N°ISSN : 1282-7363

Impression : SPEI Imprimeur - Tél. : 03 83 29 31 84

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INFORMATION JUIVE17, rue Saint-Georges75009 Paris

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Fondateur :Jacques Lazarus

Gérant de la SARL, directeur de la publication :Philippe Meyer

Directeur :Victor Malka

N°325 - SEPTEMBRE 2012

NOTRE OPINION

4- Les juifs et l'Europe : état d'alerte par Philippe Meyer

EDITO

5- Pour la défense d’une alliance plurimillénaire par Joël Mergui

TICHRI

6- Au souffle du chofar par le rabbin Jacky Milewski

8- REPÈRES

ENQUÊTE

12- Les Etats-Unis, Israël et les menaces iraniennes par André Kaspi

HISTOIRE

17- Juifs en pays arabes par Georges Bensoussan

31- LA VIE DU CONSISTOIRE

LA CHRONIQUE DE GUY KONOPNICKI

36- L'invention des nations

JUDAÏSME

38- La fille de Jephté par Janine Elkoubi

40- Cordoue la Séfarade par Robert Lanquar

ISRAËL

42- Les confessions de Shimon Pérès

CULTURE

44 - Quand Juifs et Arabes parlaient d'une même voix par Yehouda Ratzabi

LIVRES

47- De la coexistence à Jérusalem par Naïm Kattan

48- Les perpétuels étrangers par N.K.

CINÉMA

49- Une rentrée réussie pour Noémie Lvovsky par Elie Korchia

50- VERBATIM / CARNET

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4 INFORMATION JUIVE Septembre 2012

Les juifs et l'Europe : état d'alerte

PAR PHILIPPE MEYER*

NOTRE OPINION

Londres quarante après, dans le silenceabsolu des dirigeants européens ?

Tous ces évènements se sont déroulésen 2012. Agressions, menaces, violences,se multiplient à l'encontre des juifs partouten Europe. Qu'il se réveille d'une extrêmedroite traditionnellement anti-juive, ousurgisse d'une extrême gauche acquise àla haine antisioniste, l'antisémitismeeuropéen sévit à nouveau comme jamaisdepuis des décennies et menace désormaisouvertement le juif dans l'exercice de sonculte, dans sa vie quotidienne, dans sonexistence même. Il se banalisetranquillement, et infiltre sournoisementtoutes les couches de la sociétéeuropéenne, qu'elles soient politiques,économiques, sociales ou même sportives.

A l'heure où l'Europe est empêtrée dansune crise financière, économique et socialed'une gravité extrême, ses fondementspolitiques vacillent et c'est finalementl'ensemble de ses valeurs morales qui estmenacé d'écroulement si ce regaind'antisémitisme n'était pas stoppéimmédiatement. Comment ? Par lapédagogie intelligente de nos enseignants,de nos intellectuels, de nos élites, par desparoles fortes de nos dirigeants, par dessanctions exemplaires contre les actes oupropos anti-juifs, par une prise deconscience de tous. Il ne suffit pas de

commémorer les barbaries passées et des'incliner devant les juifs morts, il faut avanttout s'attaquer à la haine présente etdéfendre le judaïsme vivant.

Le Premier ministre français vientd'annoncer un plan d'action contrel'antisémitisme et le racisme. C'est unebonne nouvelle. Mais le mal va bien au-delà de nos frontières et c'est une actionsur l'ensemble du continent européen quiest désormais nécessaire. Dans notremonde moderne, tous les fléaux sontdevenus globaux. L'antisémitismeégalement.

L'Europe n'a donc toujours pasréglé son problème avec sesjuifs. Jadis terre de buchers etde pogroms, elle a constituéau 20ème siècle le plus granddes cimetières juif que

l'humanité ait connu dans lequel sixmillions d'enfants, d'adultes et de vieillardsjuifs ont été ensevelis morts ou vifs dansun souci d'extermination industrielle auxyeux de tous. Et comme si cela ne suffisaitpas, comme si la bonne consciencecherchant à sauvegarder une mémoireaussi douloureuse s'éteignait progres-sivement 70 ans après, comme si les vieuxdémons européens se réveillaient d'unsommeil qu'on croyait définitif, voilà lesjuifs européens pris à nouveau commecible de la barbarie, de la haine, de labêtise.

Comment aurait-on pu imaginer quedes enfants juifs puissent être massacrésdans une école française juste parce quejuifs ? Comment aurait-on pu imaginerqu'après cette atrocité sans précédentdepuis la guerre, les actes antisémites enFrance puissent exploser en nombre, loinde s'atténuer ? Comment aurait on puimaginer que le fait de manger cacherpuisse être remis en question dans denombreux pays européens par seule raison“officielle” de ne pas faire souffrir les bêtesque l'on abat ? Comment aurait-on puimaginer que la circoncision puisse êtreinterdite par des tribunaux en Allemagnealors qu'elle est un constituant du Peuplejuif depuis des millénaires ? Commentaurait-on pu imaginer que des rabbinspuissent être agressés à Berlin ou enAutriche, symboles éternels du cauchemarjuif ? Comment aurait-on pu imaginer quedes écoliers juifs puissent être en dangerà Villeurbanne, à Marseille ou à Parissimplement parce qu'ils portent la kippa ?Comment aurait-on pu imaginer qued'anciens nazis puissent être officiellementréhabilités en Hongrie ? Comment aurait-on pu imaginer que des tombes juivespuissent être profanées dans tant de payseuropéens ? Comment aurait-on puimaginer qu'une minute de silence à lamémoire des athlètes israéliens assassinésaux JO de Munich en 1972 puisse êtrerefusée par le Comité InternationalOlympique à l'ouverture des JO de

Dirigeants européens de tous pays,levez-vous, parlez-vous, agissezensemble avant qu’il ne soit trop tard.Parallèlement aux nombreuses, longueset indispensables réunions que vousmenez depuis des mois pour défendrela monnaie européenne, une actionforte et coordonnée ne serait-elle pasenfin justifiée pour défendre les juifseuropéens ? Les deux combats ne sontévidement pas comparables. Et bienjustement. Comment prendre lemoindre risque pour le second quandon sait tous les efforts qui sont faits lepremier ?

C'est un cri d'alarme, un appel ausecours, que les juifs européens, maisplus généralement les défenseurs desvaleurs de démocratie, de liberté, dejustice que l'Europe a tant défendu aucours des siècles, lancent avec force.Au vu de l'histoire, il y a urgence àouvrir les yeux et à agir.

Les mois à venir seront sans nuldoute marqués par de grands défis pourIsraël et le Peuple juif. A l'heure oùl'Iran est devenu une menaceimminente et où les regards se tournentvers les Etats-Unis, l'Europe doitprendre sa part de responsabilité etoffrir sa contribution dans un combatglobal contre l'antijudaïsme en agissant

sur son sol face à un mal endémiquedont elle ne se défait pas. Ce sera là undes enjeux capitaux de cette année5773 qui s'ouvre. Qu'il me soit permis,au nom de toute l'équipe d'InformationJuive et en mon nom, de vous adresserainsi qu'à vos proches tous nosmeilleurs vœux de santé, de réussite etde prospérité. Chana Tova Oumetouka.Que vous soyez tous inscrits dans leLivre de la Vie.

--*Directeur de la publication

Il ne suffit pas de commémorer les barbariespassées et de s'incliner devant les juifs morts, il faut avant tout s'attaquer à la haine présente

et défendre le judaïsme vivant.

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EDITO

Pour la défense d’unealliance plurimillénaire

PAR JOËL MERGUI*

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ailleurs, et à juste titre, comme les signesdu progrès et des lumières.

Lorsqu’ils n’ont pas recours à l’arsenallégislatif, pour exiger de fonder uneprétendue égalité entre les hommes et lesanimaux, entre les mineurs et les majeurs,entre les règles de consommation ou laliberté de culte, ces « anti-religion » seregroupent derrière la bannière de laLaïcité suprême comme étendard de luttecontre ce qui n’est en fait que l’expressionde leurs peurs.

Or, à y bien regarder, et quelle que soitla légitimité de ces peurs, avouées,instrumentalisées ou fantasmées, il importeaux responsables des cultes et dirigeantsd’institution confessionnelle dont je suis,de tirer le signal d’alarme sur au moinstrois sujets qui risqueraient d’entraîner nossociétés vers la perte d’un statut quo, àsavoir : le risque d’une limitation de laliberté religieuse, l’illusion que le judaïsme-qui me concerne ici- serait opposé à la

laïcité et, enfin, la pensée à contre-senshistorique que vivre son identité juive serait« anti-moderne » ou à l’arrière-garde denos sociétés occidentales.

Or, l’histoire de nos démocratiesmontrent que ces illusions sont fausses etque l’on trouve par exemple maints prixNobel, politiciens, médecins, avocats,hommes d’affaires, inventeurs, porteursde kipa, qui mangent casher et sont biensûr circoncis ! L’histoire montre aussi quec’est lorsque l’Etat perd sa neutralité vis-à-vis des religions que le Judaïsme eststigmatisé et que la laïcité républicaineadossée sur la devise Liberté, Egalité,Fraternité disparait au profit de Travail,Famille Patrie en France ou en Allemagne« Ein Reich, Ein Volk, Ein Führer » (unEmpire, un peuple, un guide) dont les juifsont payé le prix le plus lourd !

Aussi, pour différents qu’ils apparaissent,des sujets tels que l’alimentation, lacirconcision ou le respect du chabbat et

Condamnation de lacirconcision, remise encause de l’abattagereligieux, restrictions pourles étudiants pratiquants,la société pousse-t-elle ses

dirigeants politiques à des excèsintempestifs de laïcité et leur État à moinsde neutralité vis à vis des religions ? Telleest, en effet, la question que l’on peut seposer à observer les récents débats quiagitent monde politique et société civilepartout en Europe depuis plusieurs mois.

Pour les besoins d’une cause qui nes’embarrasse pas des différencesfondamentales entre l’Islam et le Judaïsme,confondues à tort, ces deux religions sontles deux seules subjectivement visées parles détracteurs de la religion qui y voientinjustement les ennemis de la laïcité.

Qu’il s’agisse de la shehita -notreabattage religieux- qui commande depuis

plusieurs millénaires que l’on ne fasse passouffrir un animal avant sa mort pour enconsommer sa chair, ou de la Brit Mila -l’ablation du prépuce comme signecorporel d’une appartenance à une identitéplurimillénaire-, les arguments employéspour les faire interdire se fondent sur lesrègles démocratiques et, ce faisant,concourent à créer l’illusion qu’ellesserraient des pratiques illégales ouancestrales d’un autre âge !

De fait, forts d’une alliance subjectived’intérêts particuliers très différents, tousles arguments sont bons pour s’opposeraux pratiques religieuses qui, pour lesjuifs, portent toutes, la marque d’unealliance éternelle.

Ainsi pêle-mêle, utilisés commeétendard de lutte contre les dangers d’unretour de l’obscurantisme porté par lesreligions, invoque t-on à grand renfort deprédications ou d’anathèmes, la laïcité, ledroit ou la médecine, tous considérés par

des jours de fêtes, aboutissent, sansexception, au même résultat dès lors qu’ily a volonté de les limiter ou de les interdire,à savoir : la dilution de l’intérêt général auprofit d’intérêts, dont les motivations et larhétorique peuvent être très discutables.

Je préfère largement, aux dangers d’uninefficace repli sur soi, les peurs d’unmodèle républicain qui doit affronter denouveaux enjeux, mais qui dispose de laLoi, de la Laïcité et de la Liberté pour faireface aux défis majeurs que lui oppose lamondialisation des échanges, des flux etdes relations.

J’ai espoir que nos sociétés sont assezfortes et matures pour comprendre que ledéni du fait religieux n’est pas la solutionà nos problèmes. J’ai espoir que nosRépubliques sauront rester démocratiqueset laïques. J’ai espoir que ce jugement enAllemagne contre la circoncision, assimiléeà une mutilation, réveillera les conscienceseuropéennes et provoquera un sursautdémocratique fort de nos vieilles nations.

J’ai espoir parce que la confiance estindissociable du Judaïsme, persécutédepuis des millénaires mais toujours vivantet dynamique. J’ai espoir parce que c’esten Allemagne que l’irréparable fut commiset c’est aujourd’hui à l’Allemagned’affirmer haut et fort que la plus petite deses minorités, l’identité qui la composedepuis deux millénaires doit être nonseulement sauvegardée mais cultivée enson sein et sur son sol. A défaut de protégeraujourd’hui partout la circoncision,demain, l’Europe devra faire face à desinterdictions nauséabondes qui utiliserontle même argument de mutilation et debarbarie contre -pourquoi pas- les porteursde tatouages, de piercings et de bouclesd’oreilles.

Des sociétés et des États quis’immisceraient à ce point dans ce quirelève d’une identité, de sa transmission,de la liberté individuelle pourraient-ellesencore demain être qualifiées de neutreset de démocratiques ? C’est aujourd’huiqu’il nous appartient à tous d’en juger.

--*Président du Consistoire

J’ai espoir que nos sociétés sont assez fortes etmatures pour comprendre que le déni du fait religieux

n’est pas la solution à nos problèmes

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En fait, cette voix de la consciencejuive tente de se frayer un cheminjusqu’à nous. Elle cherche une voie, uneissu, une porte pour s’échapper à l’instarde Joseph. Or, le chofar représenteparfaitement le passage de l’étroitesse,de la prison existentielle et spirituelle, àla dimension de l’étendu et du large,c’est-à-dire à la reconnaissance par lejuif de la vocation qui l’habite.

La forme du chofar fait d’ailleursréférence au verset des Psaumes(118, 5): “De l’étroitesse (minehametssar), j’ai invoqué Dieu ; Il m’arépondu en me mettant au large”. En

effet, le chofar est une corne de bélierdont une extrémité est étroite et petite.C’est sur celle-ci que le sonneur place sabouche alors que par l’extrémité large,sortent les sons. De l’étroitesse au large,la conscience juive n’a plus honte, ellene se cache plus, elle se montre au grandjour (cf. Likouté Halakhot, Ora’h ‘Haim,hilkhot Roch Hachana 1, p. 402).

Ce cheminement de l’âme juive,s’initiant dans la nuit et aboutissant à la

C’est un jour de RochHachana que Joseph aété libéré des prisonségyptiennes où ilcroupissait depuis treizeans. C’est donc un jour de

Roch Hachana que le personnagebiblique qui incarne la fidélité à latradition de ses ancêtres, malgrél’adversité, a quitté les ténèbres pour lalumière. Or, Roch Hachana en tant quejour de jugement porte en lui la volontéd’abandonner la nuit pour l’aurorepuisqu’il est un jour de vérité, jour où cequi était dissimulé jusque là se manifesteau grand jour. A l’instar de Joseph quiapparait à la lumière, la vérité que l’onporte en soi et la vérité sur soi sontconvoquées à Roch Hachana (cf. ChemmiChemouel Moadim, Roch Hachana5673, p. 48).

En ce sens, le chofar joue un rôleessentiel : il catalyse la mystérieusenostalgie pour le divin et la profondeaspiration vers le ciel, souvent étouffée,et les dévoile. Les sons produits par lechofar traduisent les pleurs silencieux del’âme du juif. Le chofar révèle lesgémissements de notre être qui désirereconnaitre sa source. Ils dévoilent, auxyeux de tous, la voix silencieuse, la voixde l’âme que l’on fait taire tout au longde l’année et qui ne demande qu’à surgirtelles les vagues franchissant des digues

lumière, s’observe lors de la sortied’Egypte, Mitsraïm dont la racine tsarsignifie étroit et dans l’installation desenfants d’Israël au pays promis auxpatriarches, pays désigné par lestextes de la tradition juive de “terrelarge (re’hava)”, c’est-à-dire une terrequi permet d’accéder à desdimensions de l’esprit inaccessiblesailleurs. De l’étroitesse au large.

De même, les trois semaines dedeuil rappelant la destruction duTemple de Jérusalem, et culminantavec Ticha Beav, s’appellent “benhamétsarim, entre les détroits”,

expression tirée du livre desLamentations. Après ces troissemaines qui marquent la situation dupeuple juif en exil, surgit la fête deRoch Hachana et sa leçon du passagede l’étroitesse à l’étendue et au large.

On comprend alors que la fin del’exil sera annoncée au son du chofar,symbole même du passage de l’exiguà l’aisance.

C’est aussi dans cette perspectiveque nous éclairons le rite de Tachlikhqui consiste à se rendre près d’unfleuve, l’après-midi du premier jourde Roch Hachana. “Tous les fleuvesvont à la mer” rappelle l’Ecclésiaste,de l’étroitesse à l’immensité.

C’est exactement ce phénomène quise produit lors d’un accouchement etsi le passage de la Torah, lu aupremier jour de Roch Hachana, relatela naissance d’Isaac, c’est bien pourinviter notre judéité et notre judaïsmeà se développer et à s’épanouir. Ensomme, cette Torah qui, parfois, estlaissée à l’abandon, dans un obscurrecoin de l’esprit, demande àapparaitre, à surgir du plus profondde nous pour nous éclairer.

Au souffle du chofarPAR LE RABBIN JACKY MILEWSKI

TICHRI

Le chofar joue un rôle essentiel : il catalyse lamystérieuse nostalgie pour le divin et la profonde

aspiration vers le ciel

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Deux questions se posentnaturellement à la lecture de ce récit: leprophète avance que le peuple compte80 justes et n’en comptabilise que 77.Moché n’a-t-il pas pris la précaution decompter les hommes vertueux avant d’enparler à Dieu ? Comment expliquer qu’ilse soit tellement avancé ? De plus,pourquoi l’évocation des trois patriarchesprécipite-t-elle le pardon divin ?

Quand Moché intercède auprès deDieu, il le fait en représentant toutel’assemblée d’Israël. Lui-même s’efface

complètement. Preuve en est : il ne secomptabilise pas parmi les 80 justes.Moché est l’émissaire d’Israël c’est-à-direson porte parole. C’est la voix d’Israël qu’ilformule.

Le fait que Moché rappelle le souvenirdes patriarches indique que la mémoiredes ancêtres habite encore lesdescendants. Si cette mémoire est encorevivante, elle peut fructifier et convoquerle peuple à marcher sur la voie de sesancêtres, suivant le cheminementd’Avraham, de sa foi et de sa bonté, leparcours d’Yits’hak pétri de crainte deDieu et de détermination face àl’adversité, la route de Yaacov en exil maistoujours attaché à Dieu et confiant dansla promesse de l’alliance.

Vivre Roch Hachana, c’est rendre à laTorah la place qui lui revientnaturellement dans nos vies, c’est-à-direune place centrale. De l’étroitesse aularge, de l’obscurité à la lumière. Telle estl’une des vibrantes leçons du chofar.

Sur le chemin de nos pères

Quand Moché a intercédé auprès deDieu en faveur des enfants d’Israël quise sont abandonnés à l’idolâtrie, au cultedu veau d’or, il utilisa différentsarguments. L’un d’eux était le suivant :

“Considère les enfants d’Israël comme laville de Sodom à propos de laquelle Tuas déclaré que si elle comptait dix justes,Tu l’épargnerais. Considère-les ainsi caren Israël, je peux compter jusqu’à 80hommes justes : les 70 Anciens, Aharon,Nadav, Avihou, Eléazar, Itamar, Pin’haset Kalev, voilà 77.

Dieu lui répond : “Où sont les troismanquants ?”

Moché ne les trouvait pas. Alors ils’exclama : “Si ces hommes vivants nepeuvent calmer Ta colère, que les mortsse lèvent ! Considère Avraham, Yits’haket Yaacov, voilà 80 !”. Et Dieu déclaraaussitôt : “Je pardonne selon ta parole”(Devarim Rabba 3, 15).

Tant que le peuple juif parled’Avraham, de Yits’hak et de Yaacov,de ses lointains aïeux, ayant découvertet servi Dieu, et contracté l’alliance defidélité ave Lui, alors il peut revenirsur la voie de la Torah. C’est pourquoien entendant Moché prononcer lesnoms des trois patriarches, Dieupardonne et offre une nouvelle chancede fidélité.

Moché, représentant Israël, n’avaitpas conscience que l’exemple et levécu de ses pères l’habitaient encore.Il ne pense pas à eux immédiatement.Inconsciemment, il les sent présentspuisqu’il les a intégrés au compte des80 justes mais consciemment, il n’ypense pas. Les origines d’Israël secachent, s’enfouissent et semanifestent progressivement.

C’est là l’enjeu de Kippour : faireémerger l’identité juive qui réside ennous, cette identité qui parfois se logedans les coins les plus reculés de notrepersonnalité mais qui ne demandequ’à éclore pour fleurir.

Dans ce sens, la prière nous aideconsidérablement : la ‘amida estintroduite par les mots : “Notre Dieu,le Dieu de nos pères, le Dieud’Avraham, le Dieu de Yts’hak et leDieu de Yaacov”. Le lien de filiationest rétabli. Le juif est fils d’Avrahamqui a propagé la foi en un Dieuunique, Créateur de l’univers etLégislateur pour Son peuple etl’humanité. Le juif est fils de Yts’hakqui a pleinement assuré sa vocationen consacrant sa force et son énergiepour la réussite du projet divin. Le juifest fils de Yaacov, l’homme de l’étudede la Torah et de la construction de lagrande famille d’Israël.

Le grand rabbin Lau qui fut le plusjeune enfant rescapé de Buchenwald,et qui devint plus tard, grand rabbind’Israël, expliqua que le nom d’Israëlest composé des initiales despatriarches et des matriarches : leyoud de Yits’hak et de Yaacov, le sinede Sara, le rech de Rivka et de Ra’hel,le aleph d’Avraham et le lamed de Léa.

Le juif est celui qui se revendique deses lointains ancêtres et qui assumepleinement son identité en observantun judaïsme authentique et vivant,celui de nos pères qui demain, seracelui de nos enfants.

TICHRI

Le juif est celui qui se revendique de ses lointainsancêtres et qui assume pleinement son identité en

observant un judaïsme authentique et vivant, celui denos pères qui demain, sera celui de nos enfants.

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REPÈRES

Les universitésisraéliennes à l'honneur

Trois universités israéliennesfigurent sur la liste des cent meilleuresuniversités dans le monde. Il s'agiftde l'université hébraïque de Jérusalemplacée à la 53ème place, du Technionde Haïfa placé à la 78ème place et del'Institut Weizmann ( 93ème place ).Dans ce classement qui est dressé tousles ans par l'Institut de Shanghai JiaoTong University in China, une seuleuniversité israélienne - l'Universitéhébraïque de Jérusalem - figurait l'andernier." Je suis fier - a dit le président del'Université hébraïque, le professeurMenahem Ben Sasson - de voir un

certain nombre de nos universitésfigurer dans de bonnes places dans cehit parade des meilleurs centres derecherche ".Il faut signaler qu'en mathématiques,l'université hébraïque est placée à la16ème place et celle de Tel Aviv à la30ème. Dans les études agricoles,l'université de Jérusalem figure à, la38èmeplace et le Technion à la 39ème.Aux premiers postes des meilleuresuniversités figurent Harward,Stanford et MIT

Le souvenir de Shamir

Trois moisaprès sa mort àl'âge de 96 ans,Itzhak Shamir,l'ancien chef degouvernement,fait son " entrée "dans les écolesdu pays. Ladécision a étéprise de faireétudier, tout aulong de l'année solaire qui vient des'ouvrir, son œuvre. Le ministèreisraélien de l'éducation demande auxresponsables des écoles de " rappelerla mémoire de M.Shamir, d'évoquer sabiographie et les valeurs qui ontprévalu à son action à la tête dugouvernement ".On signale que dès les lendemains deRoch Hachana, une conférence serafaite dans les écoles sur le thème del'œuvre sioniste de Shamir.Yaïr Shamir, le fils de l'ancien chef degouvernement, a fait part de sasatisfaction : " Je ne doute pas, a-t-ildit, que l'œuvre de mon père seraétudiée dans le même esprit que l'onétudie aujourd'hui l'époque de BenGourion et de Begin "

Yitzhak Shamir

La Jordanie et Israël

" Le roi Abdallah est d'abord unpatriote jordanien et sa priorité est lebien-être de son propre pays " C'est ceque déclare entre autres Méir Dagan,l'ancien directeur du Mossad dans unentretien qu'il a accordé à PolitiqueInternationale, le journal que dirigenotre ami Patrick Wajsman. M.Dagan ajoute : " Pour le reste, je diraisimplement que notre pays fait face àune situation nouvelle plutôt positive:la Ligue arabe lui est moins hostileparce que la majorité des éléments lesplus radicaux ont disparu : SaddamHussein et Mouammar Kadhafi nesont plus de ce monde ; Bachar elAssad est empêtré dans ses problèmesinternes ; et le reste du monde arabeest aux prises avec un conflit entre lessunnites et les chiites. Dans la mesureoù l'Iran soutient les éléments chiites,nous nous retrouvons à poursuivre lesmêmes intérêts que les Etats arabespragmatiques "

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REPÈRES

Le point de vue de Bernard Lewis

" Comment dit-on " démocratie " en arabe ? Le motn'existe pas ! La dictature est entrée dans le mondearabe au 19ème siècle et ce sont les Occidentaux quil'y ont introduite " : c'est le professeur Bernard Lewis,le grand expert du monde arabo-islamique qui parleainsi. Invité à donner son avis sur l'évolution du mondearabe, il ajoute : " J'avoue ne pas comprendre pourquoinous tenons absolument à imposer à ces pays desélections. Il s'agit là d'un concept occidental. En Islam,il existe d'autres façons de prendre des décisions ".

A propos de l'Iran, Lewis déclare : " Je ne sais pas ceque cherchent à faire les Iraniens dans le monde arabe.Mais je sais de quoi les Egyptiens ont peur. La menaceiranienne est une plus grande menace pour les paysarabes que pour Israël…Le grand problème avec lesfanatiques religieux en Iran est que parfois, ils ne sontpas rationnels. Ils considèrent que nous sommes àl'ère de l'apocalypse…Je pense cependant qu'il y adésormais un espoir : il y a dans le monde arabe latélévision et Internet . Les hommes peuventcommuniquer entre eux, ce qui est important. Lesgens au Moyen Orient ne sont pas heureux, lasituation économique est catastrophique et lesgouvernements ne font rien. Par le passé on rejetaittout sur Israël. Aujourd'hui cela ne peut convaincreplus personne. …

" Il y a quelque temps j'avais reçu une invitationpersonnelle du leader libyen Khadafi. Il m'a dit : toutle monde ne parle que de l'Iran. Mais ce n'est pas làque se trouve le véritable problème. Le problème c'estl'Arabie Saoudite qui finance des organisationsterroristes. Puis il me demanda s'il était vrai que lesArabes vivaient tranquilles en Israël. Je lui répondis" oui ". Alors, il me dit : pourquoi dans ce cas ne pascréer un Etat qu'on appellerait " Isratine ". Je luirépondis que cela ne pouvait pas marcher ".

La destruction de la centraleatomique syrienne

C'est en mars 2007 que le Premierministre d'alors Ehud Olmert fut informépar les chefs du Mossad que leprogramme atomique des Syriens étaittrès avancé. " Que devons-nous faire ? "demande le chef du gouvernement. Peude temps après, la décision était prise dedétruire le site atomique des Syriens.

Selon des documents rendus publics en Israël, dans le livrede Yossi Melman et de Dan Raviv consacré à " la guerre desombres ", c'est en 2003 que les chefs du renseignement israélienfurent frappés de stupeur en entendant le leader libyen déclarerqu'il était prêt à abandonner son programme nucléaire : " Nousne savions rien de ce programme. Qu'est-ce que nous ne savonspas encore ? "

Après enquête, on découvrit que les responsables syriensavaient considérablement développé leurs relations avec laCorée du Nord. Le Mossad demande alors aux servicesaméricains et français s'ils avaient des informations sur la

question. La réponse fut négative . Les Israéliens décidèrentqu'ils ne pouvaient compter que sur eux-mêmes. Le chef dugouvernement israélien autorisa alors que l'on mette " le paquet

" sur les informations concernant la Syrie. Lestéléphones des responsables de Damas furentécoutés . Quelque temps après, on parvint àidentifier les lieux où l'activité atomiquesyrienne était centralisée. La question à laquelleil fallait répondre était alors la suivante : danscombien de temps la Syrie aurait sa bombe ?

La réponse à la question fut trouvée, à encroire les deux auteurs, quand des agents du

Mossad réussirent à entrer dans une capitale européenne dansla chambre d'un des responsables de la commission de l'énergieatomique de Syrie. Les documents dont il était porteur furentcopiés. " C'était là, "écrivent les auteurs, un trésor d'informations" Dans la valise du fonctionnaire syrien, il y avait également denombreuses photos .Les responsables israéliens parvinrent à laconclusion qu'à la fin de l'année 2008, la Syrie allait être lepremier pays arabe à posséder l'arme atomique.La décision fut prise d'attaquer le 6 septembre. L'attaque eut

lieu après minuit. Elle dura deux minutes. La centrale futtotalement détruite.

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Il faut commencer par chasser lesidées fausses. Des commentateurs, plusou moins bien informés, des polémistes,voire quelques politologues attribuentune influence démesurée au " lobbyjuif". Tout politique aux États-Unisdevrait se plier à ses oukases, souspeine de perdre les financementsindispensables aux campagnesélectorales et d'être abandonné par les

électeurs. Le président lui-même serait,pieds et poings liés, soumis aux diktatsde la communauté juive. Bref, les Sagesde Sion seraient les maîtres des États-Unis, peut-être même les maîtres dumonde. Autant d'absurdités.

Il est malaisé de savoir combien deJuifs vivent aux États-Unis. Lesestimations varient entre 5 et 7 millions,car on doit tenir compte des mariagesmixtes - entre conjoints de confessionsdifférentes dont les enfants exprimentou non une identité juive. Quoi qu'il ensoit, il est évident que 305 millionsd'Américains ne sont pas juifs. Ajoutonsque beaucoup de Juifs américains n'ontjamais visité Israël, ne manifestentaucun intérêt pour le Proche-Orient etse désintéressent des négociations entre

C'est dans le discours duCaire que le présidentObama annonce sapolitique pour résoudreun conflit qui, avec deshauts et des bas, dure

depuis au moins 65 ans. Il rappellel'antisémitisme qui a sévi pendant dessiècles, la shoah, " les liens forts " quiunissent son pays avec Israël. Puis, ilévoque les souffrances des Palestiniens,leurs aspirations à un État indépendant,les camps de réfugiés. Conclusion : ilfaut que les négociations entre les deuxpeuples aboutissent à la création d'unÉtat palestinien. Les Israéliens, lesPalestiniens, les Arabes et lesAméricains y ont intérêt. Là encore, lesbonnes intentions n'ont pas donné lesrésultats escomptés.

les Israéliens et les Palestiniens.Pourtant, il faut reconnaître que lelobby " pro-israélien " existe, qu'il estsoumis à la loi comme tous les lobbiesaux États-Unis et qu'il est influent.L'Aipac (American Israeli Public AffairsCommittee) est né en 1953 au sein duConseil sioniste américain. Il a pris sonessor sous la présidence de RonaldReagan et regroupe aujourd'hui 100

000 membres dans les 50 États del'Union. Les experts nous apprennentqu'il occupe la deuxième place, justeaprès le lobby des retraités, parmi leslobbies les plus puissants. Ce n'est pasun État dans l'État. Il permet augouvernement fédéral de savoir ce quesouhaitent les institutions juives et l'Étatd'Israël, sert de canal decommunication, ne finance pasdirectement les campagnes électorales,mais soutient publiquement lescandidats qui lui sont favorables. Enun mot, il agit en groupe de pressiondans un pays où les groupes depression ont droit de cité, n'ont rien àcacher et sont connus de tous.

L'Aipac n'obtient pas satisfaction surtous les dossiers. Il lui arrive de subir

Les Etats-Unis, Israël et les menaces iraniennes

PAR ANDRÉ KASPI

ENQUÊTE

"Barack Obama, la grandedésillusion" : c'est le titre du livre quepublie (Editions Plon) notre amil'historien et professeur d'universitéAndré Kaspi.

Kaspi observe que le présidentObama n'a réalisé son programme

que partiellement et imparfaitement et qu'il n'a pasmis un terme à la crise économique, financière etsociale. L'expert de l'histoire de la civilisation

américaine ajoute qu'en politiqueétrangère, "quelques succèsspectacu-laires comme l'exécutiond'Oussama Ben Laden, dissimulentbien des échecs, comme face àl'Iranou dans le conflit israélo-palestinien"

Avec l'accord des Editions Plon -que nous remercions- nous publions ci-dessous unextrait du chapitre sur “les Etats-Unis, Israël et lesmenaces iraniennes"

Il est malaisé de savoir combien de Juifs vivent aux États-Unis. Les estimations varient

entre 5 et 7 millions

Barack Obama

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les autres avant de prendre ou derecommander une décision. En outre,la plupart des Juifs américains ne sereconnaissent pas dans l'Aipac et luireprochent de suivre, trop fidèlement,sans esprit critique, le gouvernementisraélien, qu'il soit de droite ou degauche. Il n'est pas étonnant que, tout

récemment, un autre lobby soit apparudans la galaxie washingtonienne. Il apris le nom de J Street, non seulementparce que le J rappelle ses originesjuives, mais aussi parce que la rue J àWashington n'existe pas et devrait êtreà deux pas de la rue K dans laquellesiègent bon nombre de lobbies. J Streetdéfend des positions libérales, lacréation d'un État palestinien, ladestruction de la plupart desimplantations dans les Territoiresoccupés et le soutien, discret et réel, àBarack Obama. En revanche, l'Aipacpeut compter sur l'appui d'un lobby pro-israélien qui plonge ses racines dansle monde des protestants évangéliques,surtout parmi les fondamentalistes. Ila pu s'appuyer aussi sur les néo-conservateurs qui, depuis le début duXXIe siècle, ont perdu de leurentregent et de leur influenceintellectuelle.

80 %

Les Juifs américains votent, dans laproportion de 80 %, en faveur descandidats démocrates. Ils sontprofondément sensibles aux causes

libérales, que ce soit le droit àl'avortement, le mariage des gays, ou lerôle prédominant du pouvoir fédéraldans les affaires économiques et dansla défense des droits de l'homme, auxÉtats-Unis comme à l'étranger. Dans lesprimaires qui opposaient Hillary Clinton

à Barack Obama, ils inclinaient du côtéde la première et soupçon-naient lesecond ou bien d'être un musulmancaché ou bien d'avoir des sympathiesexcessives pour l'islam. Obama a toutfait pour les rassurer. Il s'est rendu enIsraël en 2006 et en 2008. Il y a mêmedéclaré qu'il souhaitait que Jérusalemne soit plus divisée. Et, du coup, il a dûpréciser qu'il ne s'agissait pas dereconnaître dans la Ville sainte "lacapitale éternelle de l'État d'Israël", maissimplement d'espérer que Jérusalem neconnaîtrait plus les fils de fer barbelésqui, jusqu'en juin 1967, séparait la villejordanienne et la ville israélienne. AuxÉtats-Unis, dans la campagne desprimaires, il a multiplié les signes desympathie à l'égard d'Israël. Le 4 juin

2008, il a prononcé un discours devantl'Aipac. Il est, a-il dit " un véritable amid'Israël ". Il connaît, depuis l'âge de 11ans, l'histoire du peuple juif. Il comprendl'" idée sioniste ". Il sait ce qu'a été l'"horreur de l'holocauste ". Il a survoléIsraël et découvert ce que veut direl'exiguïté du territoire. " Notre alliancese fonde sur des intérêts communs etdes valeurs communes. " Il faut qu'Israël

conserve sa supériorité militaire,continue de bénéficier de l'aide, militaireet économique, des États-Unis. Lasolution des deux États est inévitable, sil'on veut parvenir à établir la paix auProche-Orient. Barack Obama est alorslonguement applaudi. Aux élections

des échecs, surtout lorsque les positionsqu'il défend ne correspondent pas auxintérêts des États-Unis, tels qu'ils sontdéfinis par la Maison Blanche et leCongrès. Deux obstacles au moinslimitent son influence. Une loi nonécrite de la vie politique fait que toutlobby engendre un contre lobby.

L'Aipac n'échappe pas à la règle. LesÉtats arabes, les institutions desAméricains d'origine arabe, lesindustriels, les pétroliers et lesentrepreneurs de tout poil quicommercent avec les États arabesforment, eux aussi, un groupe depression qui fait contrepoids à l'Aipac.Ce lobby arabe ne manque pas demoyens financiers ni de relais auprèsdes décideurs. Les représentants et lessénateurs au Congrès, l'Exécutif fédéraltout comme les Exécutifs fédérésn'oublient pas de consulter les uns et

ENQUÊTE

Un désastre ?Dans un livre qu'il publie à

l'occasion de l'élection présiden-tielle américaine, le 6 novembreprochain, le politologue etéconomiste Guy Millière dénoncece qu'il appelle "Le désastreObama" ( Editions Tatamis ). Après avoir noté qu'Israël a pris "lamesure des choses", Guy Millièreajoute : "Les dirigeants israéliensn'ont pu que constater l'isolementcroissant du pays dans la région,l'hostilité grandissante. Ils n'ont puque regarder avec effarement etinquiétude la politique suivis àWashington. Ils ont d$u constaterce qui pourrait sembler unparadoxe et n'en est pas un :Israëlest devenu le seul allié des Etats-Unis, subsistant au Proche Orient,et c'est aussi le pays quel'administration Obama a incriminéplus que tout autre, et continued'incriminer"

Les Juifs américains votent, dans la proportion de80%, en faveur des candidats démocrates. Ils sont

profondément sensibles aux causes libérales

Mitt Romney

Une attaque aérienne, navale ou terrestre sur lescentrales iraniennes paraît, selon les uns,

de plus en plus exclue, selon les autres, la seule solution valable.

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qu'une majorité d'Iraniens, y comprisparmi ceux qui combattent le régimedes ayatollahs, approuvent l'accès deleur pays au nucléaire, civil et militaire.En un mot, une action militaire seraitinefficace et contre-productive. Ni ladestruction du réacteur irakien d'Osiraken 1981 ni celle d'une usine syrienneen 2007 ne peuvent servir de modèles.

Les partisans d'une frappepréventive ne sont évidemment pasconvaincus. Ils rappellent qu'endétruisant la centrale Osirak, lesIsraéliens ont empêché SaddamHussein d'accéder à la puissance

nucléaire, qu'en bombardant unecentrale syrienne, ils ont contraint lesSyriens à y renoncer à leur tour, queles Israéliens pourraient seuls, avectoutefois la complicité des États-Unisou sans même avertir leurs alliés deWashington, retarder de quelquesannées le programme nucléaire del'Iran. On murmure que les Israéliensont conclu un accord avecl'Azerbaïdjan, ce qui permettrait àleurs avions de ne pas dépendre desÉtats-Unis pour leur ravitaillement etleur itinéraire. Quant aux sanctions,elles exercent une pression morale,parfois économique. Il semblerait

même qu'elles soient plus efficacesqu'on ne le croit. Mais elles ne ferontpas plier Ahmadinedjad et les autresresponsables iraniens.

Reste deux possibilités. La premièrerelève du politique. L'opposition aurégime grandit. Parviendra-t-elle àl'emporter ? Pour le moment, la réponseà cette question est négative, mais unjour, peut-être… Quelle que soitl'éventualité, est-il pensable que leMoyen-Orient, l'Europe occidentale etles États-Unis puissent vivre en paixavec un Iran qui disposerait del'armement nucléaire ? De bons espritsfont observer qu'au temps de la guerre

froide, la dissuasion l'a emporté surl'affrontement, que l'Union soviétiqueet les États-Unis auraient pu anéantirla planète. Au contraire, les deuxsuperpuissances ont su mettre en placeune co-existence relativementpacifique. Sans oublier que d'autresÉtats possèdent, dans leur arsenal, dequoi détruire leurs voisins, ce quin'empêche pas la terre de tourner.

La seconde possibilité nous ramèneà la réalité quotidienne, loin deshypothèses plus ou moins fondées. Unecyberattaque n'est pas exclue. À la finde l'année 2010, on a appris l'existence

présidentielles de novembre 2008, ilrecevra le soutien sans réserves du votejuif (…)

Comment contrer la politique nucléaire de l'Iran ?

Pendant ce temps, l'Iran poursuit soncheminement. Les experts sont diviséssur la date à partir de laquelle ildeviendra une puissance nucléaire.Peut-être même a-t-il pris du retard etdevra-t-il attendre 2015, ou plus tardencore. Qui sait vraiment ? Enrevanche, une attaque aérienne, navaleou terrestre sur les centrales iraniennesparaît, selon les uns, de plus en plusexclue, selon les autres, la seulesolution valable. Si elle était décidée,les effets seraient incalculables,soutiennent les premiers. Rien neprouve que toutes les centrales seraienttouchées. L'Iran n'a pas manqué dedisséminer les centres de recherches etde les protéger autant que possible. Lenombre des morts seraitparticulièrement élevé. On peut, sansgrand effort d'imagination, prévoir desréactions très fortes dans le mondecontre les agresseurs, des attentats quiseraient préparés et finiraient parfrapper les États-Unis, l'Europeoccidentale et Israël. Il est probable

ENQUÊTE

“Un coup rude”Dans un éditorial (voir Le Figaro

du 7 septembre 2012), Le NewYork Times écrit notamment àpropos de la crise avec l'Iran : " Laseule chance de sortir de l'impasse,c'est de rester tous unis pourgarantir l'application des sanctionset l'isolement de l'Iran. Voilàpourquoi le sommet des pays non-alignés, tenu récemment àTéhéran, est un coup rude. Les paysréellement intéressés par la paixauraient dû boycotter cetterencontre. Pourtant 120 nations yétaient représentées….Pis encore,le secrétaire général des NationsUnies Ban Ki-moon, a décidé departiciper au sommet, alors quedepuis presque six ans, Téhéranfait fi des résolutions du Conseil desécurité "

Est-il pensable que le Moyen-Orient, l'Europe occidentale et les États-Unis puissent vivre

en paix avec un Iran qui disposerait de l'armement nucléaire ?

Centrale nucléaire de Bushehr en Iran

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d'autant que l'attaqueinformatique ne rend pasinutiles les assassinatsciblés de scientifiquesiraniens et l'applicationdes sanctions. Si cettestratégie remplace lerecours aux armes tradi-tionnelles, l'Iran seracontraint de prendre duretard et le monde auraévité un bain de sang.

On est loin, malgrétout, de "la main tendue"

qu'Obama offrait aux Iraniens au débutde son mandat. Depuis janvier 2009, lapolitique iranienne des États-Unis achangé du tout au tout. Plus de maintendue, plus d'appels à la négociation.

Barack Obama regrette-t-il sespropositions ? En une année électorale,il ne peut pas se permettre d'hésiter, detergiverser, de témoigner d'une attitudeque bon nombre de ses compatriotesassimileraient à de la faiblesse.

Somme toute, du Pakistan à laPalestine, les États-Unis n'ont pas réussià faire avancer la paix. Certes, ils

continuent de tenir un rôle important,mais ne font pas la pluie et le beautemps. Ils sont contraints de mettre aupoint une nouvelle diplomatie, quitranche avec celle qu'ils ont appliquéedepuis la fin de la Seconde Guerremondiale. Pendant quarante ans,Washington accordait son soutien auxresponsables politiques qui tenaienttête à l'Union soviétique. Peuimportaient les méthodes qu'utilisaientleurs protégés. À partir de 1967, ils sontdevenus les principaux alliés d'Israël.À Tel Aviv et à Jérusalem, les États-Unisdéfendaient, haut et fort, les valeurs dela démocratie, la liberté d'opinion, laliberté religieuse, les libertés politiques,les droits de l'homme. Ailleurs auMoyen-Orient, ils n'en tenaient pascompte. Leur objectif principal était de

résister à l'influence de l'URSS. Aprèsla chute du Mur de Berlin et ladisparition de l'Union soviétique,aucune révision de la stratégiediplomatique n'a été entreprise. BarackObama a défini sa vision du mondedans son discours du Caire. Desévénements inattendus ont balayé lesbelles idées et les plans grandioses. LesÉtats-Unis aspiraient à être mieux

compris, sinon àprovoquer la sympa-thie. Ils voulaientnouer des amitiéssolides avec le mondemusulman. Aucun deces objectifs n'a étéatteint. Les États-Unisde Barack Obaman'occupent pas despositions plus favora-bles que les États-Unis de George W.Bush. Ils sont toujours,dans le mondemusulman, détestésou suspectés denourrir les piresintentions. L'Orient n'apas cessé d'être"compliqué ".

(Copyright Editions Plon)

de l'opération Stuxnet. Ce n'est plus dela science-fiction. À Dimona, la villeisraélienne qui consacre une grandepartie de ses activités aux recherchesnucléaires, des chercheurs israélienset américains ont mis au point un "verinformatique" qui, introduit dans l'unedes centrales iraniennes, a détruit oubouleversé des programmes, perturbégravement le fonctionnement descentrifugeuses et, du coup, retardé dequelques années la fabrication d'unarmement nucléaire. Du côtéaméricain, l'opération a été décidée parle président George W. Bush etaccélérée par le président BarackObama. C'est aussi une manière pourles Américains de découvrir les moyensde protéger leurs propres systèmesinformatiques. Les détails de l'opérationStuxnet sont encore entourés demystères, de rumeurs et de faussesnouvelles. Rien de plus normal,

Depuis janvier 2009, la politique iranienne des États-Unis a changé du tout au tout. Plus de main

tendue, plus d'appels à la négociation.

ENQUÊTE

Ban Ki-moon et M. Morsi, Président égyptien

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INFORMATION JUIVE Septembre 2012 17

Sinon enjolivé et instrumentalisé (chezGraetz en particulier). De là aussi quedans de grands musées du judaïsme, enparticulier quand les directions sontd’origine ashkénaze, c’est bien un regardorientaliste qui a longtemps été porté surles Juifs d’Orient.

I.J. : Ce champ d’histoire est, selon vous, “unchamp idéologique où se projettent fantasmes,illusions et reconstructions mémorielles”Qu’appelez-vous ainsi ?

G.B. : La question des Juifs du mondearabo-musulman est hélas aujourd’huidifficilement distincte du conflit israélo-arabe. C’est devenu un champidéologique. Pour les uns, optimistes, quiveulent croire à la possibilité d’une paixdurable entre Arabes et Israéliens, onaura tendance à minimiser les violencesde ce passé. Pour les autres, aveuglés parle conflit, ce passé là n’aurait été quenoirceur et oppression.

Fragiles reconstructions mémorielles :c’est sans doute là l’un des domaines oùs’illustrent le mieux les illusions de lamémoire collective. Pour des raisons

diverses, ici, les uns enjolivent et lesautres assombrissent. Y compris les Juifsd’Orient eux-mêmes, qui, souvent déçuspar l’État d’Israël à dominante ashkénaze,embellissent un passé qui fut aussi celuide leur jeunesse.

Reconstruction mémorielle aussi quecelle à laquelle procèdent ces classesjuives privilégiées (qui détiennent unquasi monopole de la parole) et dontla mémoire est socialement stratifiée.C’est net dans le cas des Juifs du Maroc

Information Juive : Pourquoi considérez-vousque ces communautés que vous étudiez ont“été réduites souvent à l’état de folklore”?

Georges Bensoussan : Des communautésréduites “souvent à l’état de folklore”, c’estun constat, celui de cultures appartenantà des zones géographiques qu’on alongtemps désignées sous le terme de“tiers-monde” et qui ont tout simplementsubi le regard supérieur et occidentalo-centré du monde riche. À cet égard, lescommunautés juives du monde arabe ontsouffert de la même dévalorisation quel’ensemble des cultures de la région.

Après un déracinement opéré en moinsd’une génération, on peut dire que lescultures juives de l’Orient arabe aurontété triplement colonisées : par le mondearabe, par le dominateur européen, parle monde ashkénaze enfin dont le regardaura été longtemps dévalorisant, réduisantce monde juif à l’état d’une religiositésuperstitieuse, sinon fanatique (enoubliant au passage le fanatisme dumonde religieux ashkénaze en particulierdans le Yishouv d’avant 1914), d’une“cuisine succulente” et de “mœurs

pittoresques”. Comme si la culturesavante, en particulier dans le domainede la Torah, était de leur seule exclusive.Au point que l’Europe orientale etl’Agence juive en Palestine n’ontvéritablement considéré le judaïsme dumonde arabo- musulman qu’à partir dugrand désastre européen.

De là que dans les grandes histoires dupeuple juif rédigées avant 1945 (Graetzet Doubnov par exemple), le monde juifd’Orient est réduit à quelques pages.

: pour eux, qui ont souvent encore unepropriété dans ce pays, la mémoireparait apaisée, elle semble ignorerl’horreur du mellah et la précaritéquotidienne.

I.J. : Le premier temps de l’islam a été,selon vous, un âge tranquille pour les juifs.Pour quelle raison ?

G.B. : Le premier temps de l’islam (duVIIe siècle au XIe siècle), estrelativement apaisé pour les Juifs. Enpremier lieu parce que l’arrivée del’islam marque pour eux la délivrancedu rude joug des Byzantins. En secondlieu parce qu’il n’y a pas entre islam etjudaïsme cette querelle native entrereligion mère et religion fille qui vaempoisonner, deux mille ans durant, lesrapports entre le judaïsme et sa branchedissidente, le christianisme.

Les relations sont apaisées surtoutparce que l’islam, alors, ne se sent pasen situation d’agression. Or, à partir dela fin du XIe siècle, le mondemusulman subit l’assaut des Croiséschrétiens, puis deux siècles plus tard,celui des invasions mongoles. Quandl’islam est en difficulté, le sort desminorités s’aggrave. Un schéma qui sevérifiera jusqu’au cœur du XXe siècle: au fur et à mesure qu’il se sent cerné,le monde musulman se fait de plus enplus dur vis-à-vis de sa minorité juiveen particulier parce qu’elle seule,souvent, est dépourvue de protectionétatique.

I.J. : Une des idées essentielles de votretravail est qu’il y a, dans cette histoire, undouble mythe : celui de l’âge d’or et celui del’horreur absolue.

G.B. : Un double mythe ? Oui, parceque le mythe de l’âge d’or et celui del’horreur absolue sont des reconstructionshistoriques. Il n’y eut jamais d’âge d’or

Juifs en pays arabesLe grand déracinement

UN ENTRETIEN AVEC GEORGES BENSOUSSAN

L'historien Georges Bensoussan vient de consacrer unelongue recherche à l'histoire des communautés juivesd'Afrique du Nord et du Proche et Moyen Orient,certaines vieilles, comme on sait, de deux millénaires.Le livre qu'il publie sur le sujet (Juifs en pays arabes. Legrand déracinement.1850-1975. Editions Tallandier.

34€90) s'appuie sur une largedocumentation inédite. Bensoussan envisage ce phénomènedans toute son épaisseur.Voici l'entretien que l'historien a accordéà la rédaction d'Information juive.

HISTOIRE

Sur la longue durée de la colonisation, lescommunautés juives virent dans l'Européen la

promesse d'une libération de l'oppression arabe.

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ne trouve guère dans l’Europe chrétienne.Comment expliquez-vous cela ?

G.B. : Le dialogue interreligieux en terrearabo- musulmane fut une réalité dont ontrouve peu d’équivalent dans l’Europechrétienne du Moyen Âge et des Tempsmodernes. L’islam ne fait pas preuve d’uneplus grande “tolérance”, simplement iln’y a pas entre islam et judaïsme larelation piégée de la religion fille quiprétend se substituer à la religion mère,le passage d’”Israël selon la chair” à“Israël selon l’esprit”. De là des relationsplus apaisées qu’en terre chrétienne. Delà, une grande proximité culturelle commele montrent pratiques et dogmes. Au

Maroc, comme aussi en Algérie, enTunisie, en Libye, en Irak, de nombreuxtombeaux de saints juifs étaient vénéréségalement par des musulmans. L’inverseétait vrai aussi mais dans une moindreproportion.

I.J. : Comment va se traduire la modernitédans ces communautés juives ?

G.B. : Dans des communautés juivesminorées par le “statut de tolérance”,l’irruption de la “modernité” va conduireau divorce. A rebours de la légende, il n’yeut jamais symbiose mais seulementcoexistence. Mais le constat est banal, ilest vrai alors de toutes les communautés,tant on oublie que multiculturalisme etmétissage sont des notionscontemporaines. La convivialité et latolérance constituent des thèmesanachroniques dans le XIXe siècle arabecomme cinq siècles plus tôt en terrechrétienne.

La modernité fut véhiculée essentiel-lement par l’ouverture commerciale (delà le plus fort développement des zones

littorales), l’arrivée du colonisateurpresque partout accueilli par lescommunautés juives en libérateur, mêmes’il y eut ici et là des résistances juives al’arrivée des Européens comme en Algériepar exemple. Reste que sur la longuedurée de la colonisation, les communautésjuives virent dans l’Européen la promessed’une libération de l’oppression arabe.

Le troisième vecteur de la modernité,le plus crucial sans doute, est lascolarisation, laquelle va engendrer unmouvement d’émancipation semblable àcette “révolution scolaire” qui vabouleverser la France d’avant la GrandeGuerre.

L’Alliance israélite universelle est unagent essentiel de cette modernité.Fondée à Paris en 1860, elle est d’embléeportée par les valeurs du siècle desLumières, comme par le saint-simonisme. A l’origine, c’est l’œuvred’une poignée d’israélites françaiscomme on disait alors, qui entendprotéger les communautés juives en untemps ou 20% d’entre elles à peinebénéficient d’une véritableémancipation.

L’Alliance israélite universelle vaopérer dans le monde méditerranéen,arabe et non arabe, et même au delà(Irak et Iran actuels) en construisant àpartir de 1862 un immense réseauscolaire, présent en 1914 dans 15 paysà travers 184 écoles scolarisant cetteannée là près de 44 000 enfants. Mêmesi l’Alliance israélite universelle nescolarisera jamais qu’une minorité de lajeunesse juive, cette institution demeurele fer de lance de la modernité. En dépitdes reproches qu’on pourra aussi luiadresser, en particulier dit-on, le regardcondescendant, voire colonial porté surles Juifs indigènes. Mais pourquoi uneinstitution européenne, banalement fillede son temps, aurait- elle été exemptede ce regard alors communémentpartagé ?

L’Alliance ne relève toutefois pas d’unedémarche orientaliste. Elle entend aiderà se redresser des hommes soumis pourleur permettre de se considérer enfin. Etce dans des sociétés arabes où lasoumission demeure la clé de voûte del’économie psychique.

Car pour entendre les raisonsprofondes de l’éviction brutale du mondejuif de l’Orient arabe, il faut pénétrer lesarcanes de cette économie mentale. Lamodernisation, synonyme d’occidenta-lisation, allait rendre inéluctable undivorce qui était déjà en germe.

Penser que la naissance de l’Etatd’Israël serait l’origine directe de la fin deces communautés juives est une vue del’esprit. Mais aussi une vision idéologiquenon dépourvue d’arrière-pensées

parce qu’il n’y eut jamais d’égalité, unenotion anachronique, y compris enEurope, dans le monde d’avant lesLumières. A fortiori donc dans le mondearabo-musulman.

I.J. : Quel serait, selon vous, le dénominateurcommun de la vie des juifs en terre d’islam ?

G.B. : Le dénominateur commun de lavie des Juifs en terre d’islam ? Jedistinguerai d’abord la “terre arabe” de la“terre d’islam”. A l’intérieur du mondemusulman, la différence est de surcroitconsidérable entre le sunnisme turc et lesunnisme arabe par exemple. Et plusencore entre l’islam sunnite et l’islam

chiite. J’ai centré mon livre sur les Juifsen terre arabe, non sur les Juifs en terred’islam, mais l’immense majorité des Juifsen terre d’islam ont vécu sous la loi arabe.

Le statut réservé aux Juifs dans lasociété arabo-musulmane est sans doutece dénominateur commun. Pour les Juifsdu monde arabe, dans la période crucialequi va de 1850 à la fin, la vie juive pourraitse résumer par ces trois mots : le mépristoujours, la peur souvent, la violenceparfois. Cela n’a pas empêché despériodes de convivialité, voire d’amitié,mais toujours teintée de la distancecondescendante du supérieur vis à vis du“toléré”. Convivialité brutalementinterrompue par des bouffées de violence,le durcissement du statut du dhimmisurtout dans les pays où l’influenceottomane fut absente (comme le Marocet la Perse), ou quasi nulle comme leYémen.

I.J. : Vous ne manquez pas d’observer quemalgré tout cela, le dialogue religieux a étéen terre arabo- musulmane une réalité qu’on

HISTOIRE

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20 INFORMATION JUIVE Septembre 2012

HISTOIRE

pensaient appartenir (cf. l’Egypte du Wafd,l’Irak, la Tunisie, le Maroc). Cetteévolution fait étrangement penser aunationalisme fermé de l’Allemagned’avant 1945. Mais elle est ici d’autantplus dramatique que ces communautésétaient, à une seule exception près,profondément arabisées, de langue, demœurs et de coutumes. Pour autant, cen’étaient pas des Juifs arabes comme lenationalisme arabe allait le leurdémontrer, mais des Juifs en terre arabe.

Ce qui touche à l’économie desoumission qui a longtemps caractériséle monde arabo musulman est sans doutece qui m’a le plus appris. Une cascade demépris et de sujétions, analysée souventavec brio par des historiens et des

sociologues arabes mais qui demeurentpeu entendus dans leurs propres pays, etécoutés moins encore. Je pense à ceuxétudiés par Emmanuel Sivan dans sonbeau livre Mythes politiques arabes(Fayard, 1995).

Prenons l’exemple le plus courammentcommenté, celui de l’histoire des Juifs duMaroc vue du côté arabe. En France, onmet en avant l’universitaire marocainMohamed Kenbib dont la version del’histoire des relations judéo musulmanesau Maroc (c’est sa thèse, soutenue en1994) constitue, hélas, pour qui a pris lapeine de lire chaque ligne de ses 750pages, une véritable entorse (litote) aumétier d’historien. Mais commel’ignorance est la règle en ce domaine, ycompris dans un monde juif où l’on neprend pas toujours la peine de lire ceuxqu’on encense, Kenbib est célébré. Car,dit-on, il serait dans le monde glacé desrelations judéo-arabes d’aujourd’hui, celuiqui “s’intéresse à nous” quand sescollègues arabes, le fait est avéré, “sontsi peu nombreux” à le faire… Certes.Mais c’est là un raisonnement étonnantplus d’un siècle après la naissance dusionisme qui prétendait désaliénerl’homme juif.

Avec l’introduction de la modernitéoccidentale, l’économie psychique dumonde arabo-musulman constitue la cléde l’exil du judaïsme en terre arabe. Pourune conscience traditionnelle, à cetteépoque, un Juif émancipé est toujoursqualifié d’”arrogant”, un mot récurrent,sinon obsédant dans les rapports de policedes années 1920-1950. Mais ce mot làn’a rien à voir avec son acception actuelle.Ici, il signifie simplement la prétention àêtre votre égal. Ainsi, au fur et à mesureque par l’école, par l’influence occidentale,par la présence du colonisateur et le lentapprentissage des Lumières, la soumissiontraditionnelle s’effritait et que ce qui enrestait devenait insupportable plus encore,l’économie psychique du monde arabo-

musulman (dont la pierre d’angle était lasoumission, tel est d’ailleurs le sens littéraldu mot islam) en était ébranlée.

Telle est l’une des clés principales, sinonLA clé d’un conflit israélo-judéo-arabeenkysté depuis plus d’un siècle alors qu’ilconcerne une superficie grande commequatre départements français, et un effectifdémographique israélo-palestinien égalà celui de l’Ile de France…. La terre, l’eau,les réfugiés, des droits nationaux quis’entrechoquent, ce sont là des facteursclassiques de conflit qui tous peuvent êtrerésolus le jour venu. Mais quand ons’attaque à un non- dit psychique decette ampleur, la nécessaire soumissionde l’autre pour que je puisse exister, onredoute que le conflit ne soit pas près detrouver une issue. Encore moins si lescommentateurs pressés évitent d’inter-roger à la fois le temps long de l’histoireet l’anthropologie arabe qui seulepermettraient de comprendre ce refuspersistant d’un fait national juifindépendant sur la terre des ancêtres.Celle qui a porté la Bible, l’hébreu, et quinourrit l’imaginaire de ce que l’on peutappeler une nation juive. À mille lieuesde ce que la doxa appelle aujourd’hui unfait colonial.

destinées à entretenir la légende d’un âged’or judéo-arabe que le sionisme seraitvenu briser. Ce thème est d’ailleursaujourd’hui l’une des clés de voute de larhétorique arabe, laquelle cherche àprouver que Juifs et Arabes ayant“toujours vécu en paix”, seule l’émergencedu sionisme aurait brisé cette idylle, et,partant, aurait déraciné ces communautés.Cette niaiserie a-historique est reprisedans notre pays par la bien-pensancecomme l’a récemment montrél’hebdomadaire Télérama à propos desJuifs du Maroc. Car cette “thèse” rassureet conforte, elle apaise, elle est à l’imagedu conformisme ambiant. La bien-pensance change de visage (à la fin duXIXe siècle, en France, elle avait celui dela “Bonne presse”), elle mute, elle passedu Dictionnaire des idées reçues deFlaubert à Télérama, mais elle ne changepas de nature : c’est l’école duconformisme. Et dans le domaine del’histoire des Juifs en terre arabe, le terrainest favorable aux clichés rassurants.Malheur à celui qui viendrait troubler cebonheur tranquille. L’anathème lemenace, sinon l’excommunication : racisteet islamophobe aujourd’hui. Réaction-naire hier. Jadis, hérétique.

Au début de cette recherche, il y a huitans, une seule question m’animait :pourquoi ces communautés bimillénaires,antérieures à la conquête arabe et àl’arrivée de l’islam, et qui comptaient prèsd’un million d’âmes en 1945, s’étaient-elles évanouies en 25 ans à peine ?

Pourquoi ce départ, forcé dans laplupart des cas, et accompagné d’un volà grande échelle, n’a-t-il quasiment laisséaucune trace ? Si on laisse de côté lapensée complotiste qui évite d’avoir àanalyser, on essaie de comprendre. Encommençant par la quête, difficile, desarchives.

La fin de ce monde a commencé dès lemilieu du XIXe siècle. Ce naufrage nes’explique pas seulement parl’antijudaïsme arabe et l’atmosphère deprécarité et de violence sourde quicaractérise ce monde tout entier, ni mêmepar le seul conflit judéo-arabe en Palestine/Eretz Israël, même si tous ces facteursconjugués ont évidemment joué un grandrôle.

Au bout du compte, il me semble quela modernité fut le plus puissant agent dedissolution des sociétés juives tradition-nelles, un effritement qui a poussé audépart.

Par ailleurs, la colonisation puisl’émergence du nationalisme arabe et sonévolution vers une conception de la nationde plus en plus ethnicisée (et basée sur lesang), a contribué à exclure les Juifs dela nation arabe à laquelle beaucoup

Famille juive d’Algérie

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CHANA TOVA

MMoonnssiieeuurr llee GGrraanndd RRaabbbbiinn AAllaaiinn GGoollddmmaann

aaddrreessssee aauuxx GGrraanndd--RRaabbbbiinnss,, RRaabbbbiinnss,, PPrrééssiiddeennttss,,

MMeemmbbrreess ddeess CCoonnssiissttooiirreess,, ddeess CCoommmmiissssiioonnss

aaddmmiinniissttrraattiivveess eett àà ttoouuss lleess ffiiddèèlleess,, sseess vvooeeuuxx lleess

pplluuss cchhaalleeuurreeuuxx ddee CChhaannaa TToovvaa..

QQuuee 55777733 ssooiitt ppoouurr nnoouuss eett nnooss ffrrèèrreess eenn IIssrraaëëll uunnee aannnnééee ddee ppaaiixx eett ddee sséérréénniittéé..

TToouuttee ll''ééqquuiippee dd''IInnffoorrmmaattiioonn JJuuiivveeaaddrreessssee àà sseess lleecctteeuurrss,, àà sseess aannnnoonncceeuurrss

eett àà ttoouuttee llaa ccoommmmuunnaauuttéé jjuuiivvee sseessmmeeiilllleeuurrss vvooeeuuxx ddee CChhaannaa TToovvaa àà

ll''ooccccaassiioonn ddee ll''aannnnééee 55777733..

www.informationjuive.fr

Israël est aujourd'hui plus que jamais disposé à fairede vos vacances, en toutes saisons, un souvenir aussimémorable que précieux. Sillonnez les lieux empruntéspar nos ancêtres, laisser sa trace là où le passé rejointnotre futur, rencontrer nos frères ; c'est une magnifiquesymbiose autour de valeurs et d'héritage communs,d'avenir en partage.

Il reste tant à découvrir !Meilleurs vœux, Shana Tova 5773Dorit Livshin, Directrice Générale de l'Office National Israélien du Tourisme

www.otisrael.com

Vœux de Gilles Bernheim

L'année qui s'achève fut éprouvante. Une campagneélectorale qui a chauffé à blanc notre pays avec latentation d'instrumentaliser les religions sur l'abattagerituel. Une crise économique qui n'en finit pas, sapeles espérances et frappe, chez nous, les familles deplus de trois millions de chômeurs. Enfin et surtout,les drames de Toulouse et de Montauban, le meurtrede trois enfants et d'un professeur parce que juifs dans

une école juive et les émules nauséabonds du tueur dans d'autres villes etsur Internet.A l'international, comment ne pas être saisi d'effroi face aux massacres enSyrie et face à la menace de plus en plus pressante de l'arme nucléaireiranienne ?"Puisse l'année qui s'achève emporter avec elle ses malédictions ! Puissel'année qui commence apporter avec elle ses bénédictions ! ", comme celaest écrit dans le merveilleux poème Ahot Ketana, qui résonne dans toutesnos synagogues pendant Rosh Hachana.Si un seul jour ne suffira pas pour réparer le monde, nous avons l'impérieuxdevoir de nous atteler chaque jour à la tâche par nos actes, nos paroles etnos mitsvot car ils portent notre éthique et notre identité.A l'aube de cette nouvelle année, je vous invite à ne rien céder sur notreidentité juive parce qu'elle est belle, parce qu'elle est forte et parce qu'elleest empreinte d'une sagesse unique, ciselée à travers l'Histoire pendantdes millénaires.Ne rien céder parce que des âmes bien-pensantes s'arrogeant un monopolesur l'intérêt général, la modernité et la laïcité, continueront de remettreen question nos rites, voire d'essayer de les interdire. Je pense, enparticulier, à la Shehita et à la Brit Mila.Notre mobilisation doit être sans faille car il s'agit d'intérêts vitaux. Ellene peut pas se permettre le luxe de dysfonctionnements et de conflits ausein même de notre communauté.Le mandat de Grand Rabbin de France qui m'a été confié est d'être ledéfenseur des intérêts consistoriaux et, au-delà, le garant du bonfonctionnement et de l'exemplarité de l'ensemble de notre communauté.Avec l'aide de D-ieu, le soutien des Rabbins, du Consistoire et votre appui,je m'attache, chaque jour, à remplir cette mission par l'affirmation et lapromotion du judaïsme de France, ce judaïsme à la fois strict et républicain,source de sagesse et de fierté, ouvert sur son temps, sur la société, surl'ensemble des Juifs et sur les autres religions.Pendant, hélas, plusieurs années, nous avons évoqué Guilad Shalit àl'occasion de nos fêtes. Aujourd'hui, alors que nous rendons grâce à D-ieud'avoir exaucé nos prières, je souhaite qu'à l'occasion des grandes fêtes,soient évoqués dans nos synagogues nos concitoyens qui continuent d'êtreretenus en otage en particulier dans le Sahel, ainsi que le souvenir desvictimes des tueries de Toulouse et de Montauban.Puissent la haine et la barbarie reculer dans le monde en 5773. Puissiez-vous, tous, être inscrits dans le Livre de la Vie et des Bénédictions.ChanaTova.

Gilles BernheimGrand Rabbin de France

Vœux de Joël Mergui

Par les temps troublés que nous venons de vivreet à l'orée de cette nouvelle année, je voudraissouhaiter à la communauté juive française lecourage et la détermination d'entreprendre demainles luttes qui seront les nôtres pour garantir notreidentité juive et améliorer le lien social fraternelqui nous unit à nos concitoyens.

Par la vertu de l'exemple, de la rigueur morale et de l'engagement solidaire,notre communauté a toujours su surmonter les épreuves et forger sondestin dans le respect des lois et des hommes. Héritiers et continuateursd'une Loi morale depuis des millénaires, je forme le vœux que noussachions être encore plus nombreux à la faire nôtre, à en partager lesvaleurs, les espoirs et la beauté avec les plus lointains ou hésitants d'entrenous. A tous, à nos frères et à nos sœurs en Israël dont nous partageons lesangoisses et les succès, je souhaite une bonne santé, une année pleineet entière faite de joies et de partages, riche de projets et de réussites touten continuant de préserver le trésor de notre identité commune, en dépitdes difficultés et des tentations qui n'existent que pour nous permettrede les surmonter et d'améliorer notre monde. Chana tova, que votre nom soit inscrit dans le Livre de la Vie.

Joël Mergui Président du Consistoire

Vœux de Michel Gugenheim

Aux lectrices et aux lecteurs d'Information Juiveainsi qu'à toute la Communauté, j'adresse messouhaits fervents de bonne et heureuse année.Que cette nouvelle année soit propice. Qu'ellenous apporte réconfort et consolation, apaisementet sérénité, santé et prospérité ; sécurité etprotection vis-à-vis de ceux qui cherchent à nous

nuire, régression de l'antisémitisme et de la judéophobie; améliorationde l'image de l'Etat d'Israël, reconnaissance de son authentique volontéde paix, et de la nécessité dans laquelle il se trouve depuis sa créationde lutter pour sa survie face à des ennemis qui n'ont d'autre ambitionque de le détruire.Que cette année voit se développer l'étude de la Tora, la pratique desMitsvot, et la vie communautaire sous toutes ses formes. Qu'elle contribueà la solution de nos problèmes, et à la réalisation de nos désirs.En un mot, que les événements qui la jalonneront ne se reflètent dansles colonnes d'Information Juive que par des articles et des analysesplacés sous le signe de l'optimisme et de l'espérance.

Michel GugenheimGrand Rabbin de Paris

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Le Grand Rabbin de France, Gilles BERNHEIM,le Grand Rabbin de Paris, Michel GUGENHEIM,

le Rabbin Moshé SEBBAG, le Président Jacques CANET et les membres de la commission administrative de la

Grande synagogue de la Victoireadressent à toutes les familles de la communauté leurs meilleurs vœux

de Chana Tova à l'occasion de la nouvelle année [email protected] - Tél. :01 45 26 95 36

BONNE ANNÉE

Le Grand Rabbin de Paris, le Président et

les Administrateurs du Consistoire Israélite de Paris

Ile de France

adressent à la Communauté juive de Paris et sa région ainsi qu’à

l’Etat d’Israël leurs vœux les pluschaleureux de Chana Tova

que 5773 soit une année de paix et de sérénité

“Léchana Tova Tikatévou Vétihatémou”

17, rue Saint-Georges - 75009 PARISTél. 01 40 82 26 26www.consistoire.org

Le Grand Rabbin de France et lePrésident du Consistoire Central

adressent à toute la communautéjuive leurs meilleurs voeux de Chana Tova à l'occasion de la nouvelle année 5773.

Qu'elle soit placée sous le signede la paix pour Israël et

le peuple juif et que chacun soit inscrit dans le livre de la vie.

19, rue Saint-Georges75009 PARIS

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CHANA TOVA

L’Emprunt de l’Etat d’Israël(Bonds d’Israël)

« L’Economie au Service de la Paix »

vous présente ses meilleurs vœuxpour l’année 5773.

A.C.E.F.I.Association de Coopération Economique France Israël

43, rue Le Peletier - 75009 PARIS

Tél. : 01 42 85 85 50 Fax : 01 42 80 48 39

Joëlle LEZMI, Présidente de WIZO-FranceLes Membres du Conseil d'Administration

La Directrice, les Membres du Personnel et toute l'équipe WIZO France

Bientôt nous célébrons Roch Hachana !

Pour WIZO France, une nouvelle année est synonyme de défis à relever !

Construire par exemple à Réhovot le gymnase nécessaire àl’épanouissement de 750 adolescents ou encore redonner aux 110

tout-petits de la crèche Bourla près de Tel Aviv des lieux d’éveilmieux adaptés encore, plus performants et sécurisés.

A vous tous qui, depuis plus près d’un siècle, nous permettez d’agirpar votre engagement et votre générosité, WIZO FRANCE souhaiteSHANA TOVA TIKATEVOU, que vous soyez inscrits dans le livre de

la vie pour une année douce comme le miel !

Joëlle Lezmi, Présidente WIZO FRANCE

Le Présidentet le Comité Directeur

de la FÉDÉRATION FRANCAISESPORTIVE ET CULTURELLE

MACCABI adressent à l’ensemble

de la Communauté et auMouvement Sportif Juif Françaisleurs Meilleurs Vœux pour 5773.

149 boulevard Voltaire - 75011 PARISTél. : 01 43 67 07 62

CHANA TOVA

Les Rabbins, le Président et le Comité de la Synagogue

OR HAHAÏMprésentent à la communauté

et à leurs compatriotes leurs meilleurs vœux

de CHANA TOVA OUMTOUKA.120, Boulevard de Belleville - 75020 PARIS

5773

O D A S E JL’ Œ U V R E D ’A S S I S TA N C E S O C I A L E A L’ E N FA N C E J U I V Eest une association reconnue d’utilité publique par décret du 28 mai 1919

est heureuse d’adresser à laCommunauté juive de France

ses meilleurs vœux à l’occasion de la nouvelle année 5773.39, rue Broca - 75005 PARIS

Tél. : 01 42 17 11 92 – Fax : 01 42 17 11 73

Le Crifprésente à la communauté juive de France et à Israël ses vœux

chaleureux de Chana Tova.Espace Rachi – 39 rue Broca - 75005 PARISTél. : 01 42 17 11 11 - Fax : 01 42 17 11 50

email : infocrif @crif.orgwww.crif.org

Le Centre Israélite de Montmartreet les 150 enfants accueillis à :

la Crèche Israélitela Crèche Marcel Bleustein-Blanchet

au Jardin Maternel

Les 75 personnes (25 à 30 familles) bénéficiant de l’hospitalité du Centre d’hébergement et réinsertion sociale.

Les 450 à 500 usagers qui prennent leurs repas chaque jourdans sa cantine sociale cachère

Forment des voeux pour la paix au Moyen-Orientet dans le monde entier

16, rue Lamarck 75018 PARIS

Le President, le Conseil d’Administration, la Direction, les Professeurs, les Educateurs, le Personnel

et tous les Enfants de LAVERSINEprésentent leurs vœux de

Chana Tovaà tous les anciens élèves ainsi qu’à lacommunauté avec le désir fervent que

l’année 5773 soit l’année de paix pour Israël et le monde entier.

Tél. : 03 44 25 03 29

Monsieur le Grand Rabbin deFrance Gilles Bernheim et Madame

adressent à l'ensemble de la Communauté Juivede France tous leurs vœux

de Chana Tova Oumétouka

Que cette année 5773 apporte la Paix pour lepeuple d'Israël.

Que le Tout Puissant bénisse et protège l'ensemblede la Communauté Juive de France

La Synagogue Don Isaac Abravanel " La Roquette", Le comité administratif

et son Président Serge Benhaïm,

vous souhaient à tous "CHANA TOVA OUMTOUKA, VE HAG SAMEAH".

Que les voeux de chacun se réalisent dans la paix dans la joie en bonne santé avec l'aide de D...

Amen

JOYEUSES FÊTES A TOUS ET GMAR HATIMA TOVA.

MARBRERIE FUNERAIRE - POMPES FUNEBRES

ETS L. BARBIER & FILSface au Cimetière Parisien de Bagneux

122, avenue Marx Dormoy - 92120 MontrougeTél. : 01 46 57 97 77 - Fax : 01 47 46 89 30

Cimetière Parisien de THIAIS13, Esplanade Auguste Perret - 94320 THIAIS

Tél. : 01 46 86 73 80Vous présentent

leurs meilleurs vœux

La Coopération Fémininevous souhaite une excellente année 5773

Pour vous, votre famille et vos amis

Vœux de paix dans le monde pour Israël

39, rue Broca - 75005 PARISTél. : 01 42 17 10 90 – Fax : 01 42 17 10 89

www.cooperation-feminine.fremail : [email protected]

LA FONDATIONCASIP-COJASOR

adresse à toute la communauté ses meilleurs vœux de bonne

et heureuse année 5773 en particulier aux plus démunis.

8, rue de Pali-Kao 75020 PARIS

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BONNE ANNÉEORT FRANCE

EDUCATION ET FORMATION

présente ses meilleurs vœux à la communauté à l’occasion

de la nouvelle année.

Le Rabbin, le Président et les Membres de la Commissionadministrative de la Communauté

Chasseloup-Laubatadressent leurs meilleurs vœux à tous leursfidèles, à tous leurs amis et aux jeunes couples qu’ils ont eu la joie demarier dans leur synagogue.

14, rue Chasseloup-Laubat, 75015 PARIS

A l’occasion de Roch Hachana 5773,

Monsieur le Rabbin, le Président et lesMembres du Conseil D’Administration

ont le plaisir et la joie d’offrir à tous les fidèles et leurs familles et auxsympathisants, leurs meilleurs voeux desanté, de bonheur et de joie.5, impasse Copernic, 44000 NANTES

Tél. : 02 40 73 48 92 - Fax : 02 40 73 96 44

M. le rabbin Jonathan GUEZLe président Michel DLUTO La commission administrative

de la communauté israélite de la VARENNE-SAINT-HILAIRE

souhaitent à tous leurs fidèles et amis leurs meilleursvœux de bonheur, santé et prospérité pour l’annéenouvelle 5773.

10 bis, avenue du Château94210 LA VARENNE-SAINT-HILAIRE

Le Grand Rabbin, Rav SeniorLe Dayan, Rav Charbit

Le Roch Kollel, Rav Zeev Paperman ChlitaLe Rabbin du Beth Habad, Rav Mellul

Les Rabbanins de la Communauté de CréteilLe président de la Communauté de Créteil

M. Albert Elharrar Les Membres du Conseil d’Administration

Les Président(e)(s) d’Association

adressent leurs voeux les plus chaleureuxde bonheur, de prospérité, de réussite et

de santé à tous les membres de leur communauté et souhaitent au pays et àl’Etat d’ISRAËL dont ils sont solidaires

une année de paix.Communauté Juive de Créteil

Rue du 8-mai 1945 - 94000 CRÉTEILTél. : 01 43 77 01 70

M. Zvi AMMAR, Président du Consistoire Israélite de Marseille,M. Bruno BENJAMIN, Président Délégué

du Consistoire Israélite de Marseille

Rav Reouven OHANA, Grand Rabbin de Marseille,Rav Shmouel MELLOUL, Dayane de Marseille,

M. Elie BERREBI, Directeur Général,et l'Ensemble des Permanents Rabbiniques et Administratifs

vous adressent leurs voeux les plus chaleureux de Chana Tova 5773,

De Paix, Santé et Bonheur, pour toute la Communauté et le Peuple Juif.

Consistoire Israélite de Marseille117-119, rue de Breteuil - 13006 Marseille - Tél. : 04 91 37 49 64 - Fax : 04 91 37 83 90

LA COMMUNAUTÉ JUIVEDE NIMES

- L’Acing- Le Centre Communautaire- Wizo- Réseau Ezra de Nimes- BBYO- Cercle A. Cremieux- Association France-Israël- AUJF- CRIF

vous adressent leursmeilleurs vœux pour la nouvelle année.

vmtctv vbtkt hbve hnwl40, rue Roussy, 30000 NIMES

Monsieur Eric de Rothschild, PrésidentLes Membres du Conseil d'Administration,

La Direction Généralede la Fondation de Rothschild

adressent leurs vœux les plus chaleureux aux résidents de leurs établissements, à leurs

familles et au personnel en ce début d'année 5773et leur souhaitent de passer les fêtes de Tichri

dans la joie et le bonheur familial.76, rue de Picpus - 75012 PARIS

Tél. : 01 44 68 72 98

Les Fils et Filles des Déportés Juifs de France

vous souhaitent une heureuse nouvelleannée et rappellent que ce sera celle du 70è anniversaire de la déportation

des Juifs de France en 1942.

32, rue La Boétie - 75008 PARIS

Tél. : 01 45 61 18 78

A.C.I.P. TOURNELLESLa Commission Administrative

Le Rabbin et les Hazanimadressent leurs vœux

cordiaux et chaleureux à toute la Communauté.

21 bis rue des Tournelles - 75004 ParisTél. : 01.42.74.32.80

Email : [email protected]

La Solidaritéprésente ses meilleurs vœux à ses membres et à ses amis

ainsi qu'à toute la communautépour l'année 5773.

14, rue Saint-Lazare - 75009 PARIS

LE NOUVEAU CENTRE COMMUNAUTAIRE DE PARIS

présente à tous ses membres et amis ses meilleurs vœux de santé

et bonheur à l’occasion de la nouvelle année, et les informe de la reprise de toutes les activités.119, rue Lafayette - 75010 PARIS

Tél. : 01 53 20 52 52

15, rue Malher - 20, rue Pavée - Paris 4ème

24-26, avenue Cimetière Parisien - 93500 PANTIN

La direction de la société WARGAet ses collaborateurs

vous présentent ses bons vœux

pour la nouvelle année.

OHR HANNA

Organisation de Justice et de BontéToute l’équipe d’OHR HANNA adresse à tous

ses amis et à toute la communauté sesmeilleurs vœux de Chana Tova.

Réfoua chelema à tous nos malades.Etre au service des pauvres et des malades

est le combat de OHR HANNA. Ensemble nous continuerons à agir au service des nôtres.

14 villa Bel-Air - 75012 PARISTél. : 01 43 43 40 70

vmtctv vbtkt hbve hnwl

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CHANA TOVA

Le Rabbin Mikaël JOURNO,Alexandre SEBBAN,

Président de la communauté de Fontenay aux Roses, Sceaux,

Plessis-Robinson, Chatenay-Malabry et Bourg-la-Reine

et les membres du Conseil d'Administration

adressent leurs vœux de Chana Tovaà toute la communauté.17, avenue Paul Langevin

92260 FONTENAY-AUX-ROSES

Tél. / Fax : 01 46 60 75 94Le Président Isaac Perez, le Rabbin Kotiel Berdugo, les Membres de la Commission Administrative

souhaitent à tous leurs fidèles, amis et à l'Etat d'Israël, leurs meilleurs vœux de Chana Tova, de paix et de prospérité à l'occasion de cette nouvelle année 5773.

vmtctv vbtkt hbve hnwlles offices de Kippour se dérouleront au gymnase

14 rue Auguste Renoir - Alain Fournier - 75014 Paris

Métro porte de Vanves

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et Etan PinskyOnt le plaisir de présenter à leurs

famille et amisLeurs meilleurs vœux de

CHANA TOVAThonon les Bains : 1 chemin de Bellevue

Lausanne et Jérusalem

ASI – ABSI – KEREN’ORGil et Karen TAÏEB ainsi que toute leur

équipe remercient les généreux donateurs qui soutiennent leurs actions

en faveur d’Israël et tout particulièrement de TSAHAL et leur présentent leurs meilleurs vœux à l’occasion des fêtes

de ROCH HACHANA 5773.

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Stefa Skurnik, Présidente d’HonneurHenry Battner, Président

Le Conseil d’Administration du

FARBANDUNION DES SOCIETES JUIVES DE FRANCE

adressent à l’Etat d’Israël et à toute lacommunauté leurs voeux de bonheur et de paix.

5, rue des Messageries - 75010 PARISTél. 01 75 50 55 94 - Fax : 01 42 06 62 88

Le rabbin Moshé SEBBAG,Mme Haya PRYS, Directrice du Talmud Torah

"J.P. et Paulette BADER"

de la Grande synagogue de la Victoireadressent à tous les enfants et à leurs familles

leurs meilleurs vœux de Chana Tova pour la nouvelle année 5773.Ils espèrent qu'ils seront présents à la rentrée de septembre.

Renseignements auprès de Mme PRYS : 06 61 91 61 93 - [email protected]él. : 01 45 26 95 36 (le matin) - Entrée : 17, rue Saint-Georges - 75009 Paris

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ses vœux les plus sincères. 3, rue de la Cigogne - 68000 COLMAR

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présente à tous ses membres etamis ses meilleurs vœux de bonheur

pour l’année 5773.vmtctv vbtkt hbve hnwl

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Tél. : 01 45 00 49 44

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Son Président

Maurice SkornikLe conseil d’administration

et toute son équipe

adressent à toute la communauté

de France leurs meilleurs vœux

pour la nouvelle année 5773.

Fédération des Sociétés

Juives de France70, rue Turbigo - 75003 PARIS

Tél. 01 44 61 29 15

L’œuvre de Protection des Enfants Juifs

présente ses meilleurs vœux pour l’année 5773 à la communauté juive de France, à Israël et au peuple juif

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BONNE ANNÉE

Le Président,Le Conseil d’Administration

souhaitent à tous les membres de la communauté d’Evian

et à tous ses visiteurs,leurs meilleurs voeux de

Roch Hachana

Le Président Dr David ROUAH, le Rabbin M. David ELFASSI,l’Association Médicaleet la Commission Administrative

vous adressent tous leurs vœuxpour l’année 5773.

A.C.I.V. – 127, av. Rouget de L’Isle,94400 Vitry - Tél. 01 46 80 67 54

La Commission Administrative de laCommunauté de Meudon-Clamart

le Bureau de l’A.C.P. Meudon

présentent à toute la communauté et à la ville jumelle Mazkeret Batya

leurs voeux de Chana Tova.

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vous présentent leurs vœux les meilleurs

pour cette Nouvelle année11 rue Notre Dame de Nazareth

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présentent leurs bons vœux pour lanouvelle année

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Que cette nouvelle année vous apportejoie, bonheur, santé et paix. Que cette

année soit remplie d’événéments heureux et festifs.

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vous souhaitent une bonne année 5773.

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A l’occasion de la nouvelle année 5773

Le RabbinLe Président Robert Attia

La Commission Administrative deROISSY-EN-BRIE

souhaitent une bonne et heureuse année, pleine de santé, de joie et de prospérité à toute

la Communauté de ROISSY-EN-BRIE et de ses environs.

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Le Rabbin, le Président, les Membres de la Commission

Administrative de la COMMUNAUTÉ DE CHELLES

présentent leurs meilleurs vœux à l'occasion de cette nouvelle année 5773 à

tous ses membres, ainsi qu'à la CommunautéJuive de France.

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LA CENTRE COMMUNAUTAIRE

ISRAÉLITE DU VESINET

C.C.I.V.

souhaite à la Communauté Juive de Franceet au peuple d’Israël ses meilleurs vœux dePaix, de Bonheur et de Prospérité pourl’année 5773.

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LE RABBIN, LE PRESIDENTET LE COMITÉ PARISIEN

DES ISRAÉLITES DE L’ALGÉROIS, LA COMMISSION ADMINISTRATIVE

DE LA SYNAGOGUE

BERITH CHALOMsont heureux d’adresser

au grand rabbin de France, au Président du Consistoire Central,

au grand rabbin de Paris, au président du Consistoire de Paris

ainsi qu’à leurs nombreux fidèles leurs vœux

de bonne et heureuse année 5773.18, rue Saint-Lazare, 75009 PARIS

[email protected]

Le Rabbin et les Presidentsdes associations de

L’ACIP RIS-ORANGISC.E.D.E.R., D.P.M. et A.J.M.F.

adressent leurs meilleurs vœux deChana Tova à leurs adhérents et amis.

1, rue Jean-Moulin - 91130 RIS-ORANGIS

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CHANA TOVA

Monsieur le Rabbin Raphaël EDERYMonsieur le Président Edmond NADAMEt la Commission Administrative d’Antony

présente à toute la communauté Juiveleurs voeux les plus chaleureux de

CHANA TOVAQue 5773 soit une année de Paix et Sérénité

M. René Khalifa, PrésidentM. Abraham Dahan, Ministre-officiant,

les Membres de la CommissionAdministrative

adressent aux fidèles de la

FONDATION FLEISCHMANet à leurs familles leurs meilleurs vœux

pour la nouvelle année 5773.18, rue des Ecouffes - 75004 PARIS

Tél. : 01 48 87 97 86

ACIP - Communauté ANTONY La Commission Administrativede l’ACIP SEVRAN

Présente à ses fidèles et à toute la communauté juive ses meilleurs

voeux pour l’année 5773 et souhaitePaix et sécurité à l’État d’Israël.

25, bis Rue du Docteur Roux BP 11193270 SEVRAN

M. Jacob DAHAN, Président,Le Rabbin et les membres dela commission administrativeprésentent leurs meilleurs voeux à

l'occasion de cette nouvelle année 5773à tous ces membres, ainsi qu'à

la communauté juive de France et au peuple d'Israël

SYNAGOGUE ACIP“YISMAH MOCHÉ”

42 Rue des Saules - 75018 Paris

Le Rabbin, le Président de la communauté de

CHOISY-ORLY-THIAISadressent leurs meilleurs vœux

à toute la communauté juive de France et au peuple d'Israël, particulièrement

à la ville d'OR Yehouda.28, avenue de Newburn 94600 CHOISY-LE-ROI

Tél. : 01 48 92 68 68

L'aumônerie générale Israelite des hôpitaux de Paris,

L'aumônerie générale Israelite des hôpitaux de France,

Le Rabbin Mikael Journo,Souhaitent à l'ensemble de la Communauté Juive de France ses

vœux de bonne et heureuse année.A celles et à ceux qui sont malades et qui souffrent ils adressent

leur vœux de prompt rétablissement et de bonne santé. Ils remercient les aumôniers hospitaliers pour leur dévouement

et leur soutien auprès des malades.

Le Rabbin, le Président, le Comité, Les Membres de

la Synagogue BETH DAVIDprésentent à toute la communauté juive deFrance ainsi qu'à l'État d'Israël leurs vœux

les plus Chaleureux pour cette nouvelle année 5773.

vmtctv vbtkt hbve hnwl25, Avenue du Général de Gaulle 94500 CHAMPIGNY SUR MARNE

Chrétiens et Juifs de

l’Amitié Judéo-Chrétiennede France

présentent à toute la communauté juiveleurs vœux les meilleurs à l’occasion

de Roch Hachana.

60, rue de Rome, 75008 PARISTél. : 01 45 22 12 38

Denis Ktorza, Bernard Musicant

et toute l’équipe de Connec’ Sionvous présentent

leurs meilleurs voeux de Chana Tova

e-mail : [email protected]

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BONNE ANNÉE

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CHANA TOVA

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BONNE ANNÉE

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LA VIE DU CONSISTOIRE

INFORMATION JUIVE Septembre 2012 31

Cérémonie du souvenir à la Victoire70 ans après le premier convoi de Drancy vers Auschwitz et la rafle du Vel’d’Hiv, s’est tenue en la Grande Synagogue de la Victoire le 9 septembre dernier,la cérémonie du Souvenir créée à la fin de la guerre par le Consistoire enmémoire des déportés et des victimes de la Shoah.

Le Président du Consistoire Joël Mergui, le Grand Rabbin de France GillesBernheim, le Grand Rabbin de Paris Michel Guguenheim, Samuel Pisarrescapé d’Auschwitz, André Chomand déporté de 1942 se sont adressés à unefoule très nombreuse et recueillie en présence notamment de : Mme ChristianeTaubira Ministre de la Justice et Garde des Sceaux, M. Manuel Valls Ministrede l’Intérieur, M. Stéphane Le Foll Ministre de l’Agriculture, M. Benoît HamonMinistre chargé de l’économie sociale et de la Consommation, Mme Dominique Bertinotti Ministre chargée de la Famille, MmeHélène Conway Ministre chargée des Français à l'étranger, Monseigneur André Vingt Trois, M. Jean-Paul Huchon Présidentde la Région Île-de-France, M. Bernard Boucault Préfet de Police de Paris, Mme Anne Hidalgo 1e Maire adjoint au Maire deParis, M. François Weil Recteur de l’Académie de Paris, Mme et M. Klarsfeld, des présidents des grandes institutions juives etdes autorités civiles, religieuses et militaires et des jeunes des mouvements de Jeunesse Juive.

Nous reproduisons ci-dessous les interventions de Joël Mergui et du Grand Rabbin de France.

Intervention du président du ConsistoireJoël MerguiLa plus grande communauté juive d’Europe vous accueilleaujourd’hui dans ce haut lieu du Judaïsme français- la GrandeSynagogue de la Victoire- que des miliciens ont vandalisé, il ya 70 ans, pendant la rafle du Vel d’Hiv, détruisant et lacérantles plus saints de nos livres, les rouleaux de la Torah.Il y a 70 ans, être juif voulait dire être raflé, vivre en sursis, résister,errer de cache en cache, être séparé de ceux que l'on aime,porter une étoile d'infamie, être dénoncé, pourchassé, spolié,exclu, arrêté, affamé, torturé, fusillé, gazé, brûlé, ignoré : juif.Oublié de tous, sauf des Justes.Six millions de Juifs que la mort a privé à jamais de postéritéont manqué à l’appel de la reconstruction de l’Europe, à sa viequotidienne, à sa richesse, à son avenir et aussi bien sûr à sonJudaïsme.Pour eux, pour nous, je remercie les plus hauts représentants

de l’État d’être aujourd’hui à nos côtés et d’inaugurer demaindes musées et des lieux de mémoire - au Camp des Milles ouà Drancy-, ces antichambres françaises de la mort industrielle,de 76 000 juifs de France exterminés sans prière ni sépulture.Mais dans 10 ans, dans 20 ans, dans 30 ans, quand la voix dudernier témoin se sera éteinte, et que tous les musées aurontété inaugurés, qu’en sera-t-il ?Qui viendra témoigner pour les déportés, pour les survivants,les Justes ?

Qui ? Sinon nous tous ?Il nous appartient à tous de prendre le relais, de garder lamémoire de tous les rouages d'une idéologie qui voulait rayerd'Europe une présence juive vieille de 2000 ans.Il nous appartient à tous d’éduquer la jeunesse, de marquer laconscience collective de tout ce que l’homme est capable depire comme de meilleur.Il nous appartient à tous, de dénoncer le nouveau visage de lahaine antisémite qui, par haine des Juifs et d’Israël, tue enFrance des petits enfants juifs, parce que Juifs, des touristesisraéliens en Bulgarie parce que juifs, ou qui veut anéantir l’Étatjuif parce que berceau des Juifs.Le premier meurtre idéologique d’enfants juifs depuis la Shoaha été perpétré cette année à Toulouse malgré des années derépétitions de “plus jamais ça !”.Malgré l’alerte donnée chaque année ici, nous venons de vivreun tournant grave.Il y a 70 ans, l’Europe nazie exterminait sa population juivepour éradiquer le judaïsme.Il nous appartient à tous, juifs comme non Juifs que l’Europedes Droits de l’Homme ne devienne pas :- le continent perdu de la diversité religieuse et culturelle,l’espace clos d’une histoire jonchée de musées, de plaquescommémoratives et de cimetières juifs, sans Juif,- le territoire abandonné d'une fraternité qui aura sacrifié saplus petite minorité sur l'autel de la facilité et de l’indifférence.A côté du travail de mémoire, je veux croire à la volonté dela France de tout mettre en œuvre pour conserver sur son solune communauté juive vivante et active.Il nous appartient à tous, de permettre aux descendants etaux continuateurs des juifs d’Europe, de mener en sécuritéune vie juive, sans que soient stigmatisés, entachés ouentravés notre liberté de culte et ce qui appartient à notreidentité et notre patrimoine : l’alimentation casher, lacirconcision, le respect du Shabbat et de nos fêtes, et la dignitépour nos morts.Chaque semaine, Chabbat, les juifs chantent « Chamor » et“Zahor”, souviens-toi et préserve, parce que le devoir demémoire est indissociable du devoir d’avenir.Sachons tous nous souvenir et préserver, en donnant -au seulculte que l’Europe du 20e siècle voulut anéantir-, toutes lesconditions d’existence et d’épanouissement qui permettrontà tous les juifs de déployer sereine identité au 21e siècle.

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LA VIE DU CONSISTOIRE

32 INFORMATION JUIVE Septembre 2012

Intervention du Grand Rabbin de France Gilles Bernheim

Au sortir de la guerre, la révélation du génocide commiscontre le peuple juif a plongé dans la stupeur le mondeoccidental. Ce qui a provoqué cette stupeur, ce n’est pas seulement que les juifs aient été les victimesdésignées : nous le savons, les nations d’Europe avaientquelques mauvaises habitudes, et jamais la Shoahn’aurait été possible sans les vingt siècles de persécutionset de haine antijuive qui, partout, ont préparé le terrain.

De fait, la stupeur est née de la découverte insoutenableque l’antisémitisme a pu aboutir à une pareille extrémitésans précédent dans l’histoire de l’Humanité. Si lapassion antijuive a conduit à Auschwitz, alorsl’antisémitisme doit être banni à jamais et doit être renduimpossible.

A travers le massacre organisé, planifié, bureaucratiquede six millions de juifs, l’espèce humaine a pris la mesurevertigineuse des possibilités criminelles que l’être humainest capable de commettre contre lui-même. Et c’est bien

l’espèce humaine – en tant que telle – qui est atteinteen son cœur par le crime monstrueux perpétré par lesnazis contre le peuple juif. Pour juger de ce qui s’est passéà Auschwitz, aucune loi ordinaire et déjà existante n’étaitadéquate. Alors il a fallu recourir à un conceptentièrement nouveau : celui de Crime contre l’Humanité.

Il s’agit bien d’un crime contre l’essence humaine, d’uncrime métaphysique, commis contre l’Être même del’Homme sur la personne de chaque juif assassiné. Lecri qui montera jusqu’à la fin du monde dans le cield’Auschwitz et de Treblinka témoigne de la limiteindépassable d’inhumanité que l’homme est capabled’atteindre.

Près de 70 ans après la Shoah, on assiste à unextraordinaire phénomène de rejet. L’antisémitisme renaitun peu partout de ses cendres sous ses masques anciens,ou celui – plus moderne et, disons-le, plus facile – del’antisionisme. A l’Est comme à l’Ouest, on cherche à sedélivrer de la culpabilité dont l’antisémitisme a infectéles nations. Infection dont l’historien Raül Hilberg arappelé la nature dans une formule sèche. Je le cite : «Les missionnaires de la chrétienté disaient trop souventaux juifs : vous n’avez pas le droit de vivre parmi nousen tant que juifs. Les chefs séculiers qui suivirent avaientproclamé : vous n’avez pas le droit de vivre parmi nous». A la fin, les nazis décrétèrent : « vous n’avez pas ledroit de vivre ». Voici où nous en sommes 70 ans plustard. La question n’est pas seulement comment Auschwitza été possible, mais comment est-il possible, moins de70 ans après, qu’on tue aujourd’hui en France,froidement, des juifs parce qu’ils sont juifs : Ilan Halimi,Myriam Monsonego, Jonathan, Arieh et GabrielSandler…

Qu’est devenu le «plus jamais ça», ce serment sacréauquel nous avions cru, après Auschwitz, quesouscriraient les nations? Qu’est devenu ce serment ?

Réunion des Présidents en présence du Préfet de Police de ParisAprès un Dvar Torah du Grand Rabbin de Paris et unpremier échange avec les nombreux Présidents présents,le Président Mergui accueille le Préfet de Police MonsieurBernard Boucault qui expose les dispositifs mis en placepour assurer la sécurité et la tranquillité des fidèles pourles fêtes de Tichri.Cela lui donne l’occasion de rappeler combien il attachede l’importance au maintien et au développement desrelations de proximité entre les responsables descommunautés et les autorités locales de police, afind’optimiser ce dispositif. Il rend d’ailleurs hommage à laprécieuse collaboration du SPCJ en ce domaine.Il évoque l’aspect prévention des actes antisémites enfaisant référence à la circulaire du Ministre de l’Intérieuret rappelle la volonté d’assurer un meilleur accueil desvictimes et un meilleur traitement des plaintes. Il encouraged’ailleurs les responsables communautaires à signaler à

leur commissariat tout fait même semblant mineur. Lesrecoupements d’informations pouvant constituer unesource précieuse pour le renseignement et la prévention.Le Préfet confirme enfin combien la coopération entre lesservices du Consistoire et les services de police constitueune garantie d’efficacité.Le Président à son tour remercie le Préfet ainsi que sesservices d’avoir pris à bras le corps les préoccupations dela Communauté Juive en cette rentrée.Il tient à rappeler combien nous pouvons féliciter nosjeunes qui grâce aux éducateurs, aux Rabbins, auxenseignants, ont su depuis les années 2000 et la montéedes incidents antisémites conserver leur sang froid, éviterdes ripostes ou vengeances, les valeurs de la Républiqueset le vivre ensemble faisant partie intégrante del’enseignement et du climat régnant dans noscommunautés.Il demande avec insistance que nos communautés fassentplus de place à nos jeunes, notamment en les intégrantdans les Commissions Administratives et de préparer ainsila relève.

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LA VIE DU CONSISTOIRE

INFORMATION JUIVE Septembre 2012 33

Le Grand Rabbin de France à LensLe Grand Rabbin a participé à la cérémonie de commémorationde la rafle des Juifs de Lens, le 11 septembre, en présence denombreuses personnalités politiques, civiles et associatives.A la synagogue de Lens, Gilles Bernheim a lu la prière desmorts selon un rite ancestral, au pied de la plaque des 528 nomsde juifs de Lens et de sa région, dont une grande majorité venuede Pologne. Le Maire de Lens, Guy Delcourt, a déclaré : « Le 11 septembre1942, l'occupant allemand aidé de l'administration françaiseorganise la rafle de 528 Juifs de Lens et alentour : 117 hommes,

123 femmes, 288 enfants cueillis au petit matin, rassemblésplace Roger-Salengro puis sur le quai n° 1 de la gare et misdans un train pour Lille puis Malines... le Drancy belge. Le plusjeune avait un mois et demi, le plus âgé 79 ans ». Le Grand Rabbin de France a rappelé: « Pour que les trainsarrivent à l'heure, il fallait beaucoup de moyens, des responsablesde locomotive, des chefs de gare, et des ingénieurs depuis Lensjusqu'à Auschwitz pour que le travail soit bien fait. Plus la tâcheétait technique, moins les gens réfléchissaient », exprimantalors son inquiétude face aux derniers actes antisémites.La cérémonie a été ponctuée par une conférence dans la salledu Millenium, église catholique polonaise de Lens, oùl'association Millenium 2000 est une des principales chevillesouvrières de cette commémoration.

Consultations avec le gouvernementSuite à sa réélection à la présidence du Consistoire Central,M. Joël Mergui a rencontré tous les membres dugouvernement auprès desquels des dossiers, des projetsou des arbitrages sont en cours. En effet, composanteminoritaire mais active de l'identité française, l'identitéjuive et son culte n'en nécessitent pas moins, pour leurbonne administration et organisation, des contacts réguliersaux plus hauts niveaux de l'État.

L'objectif de ces rencontres, notamment avec le premierministre M. Jean-Marc Ayrault, était de présenter et dedéfendre les différents sujets de préoccupation actuels dela communauté juive. Outre les problèmes de sécurité àl'approche des Fêtes juives, et les questions relatives auxrelations entre laïcité et liberté religieuse, le dialogue avecle premier ministre a essentiellement porté sur lesdispositions concrètes qu'entend prendre le gouvernementpour maintenir en France, une communauté juive activeet vivante.

Avec le ministre de l'Education Nationale, M. VincentPeillon, Joël Mergui a défendu le calendrier des concourset examens les jours de chabbat et de fêtes.Reçu par le Ministre du Travail et du Dialogue Social, M. Michel Sapin, le Président du Consistoire a fait valoirle nombre et la diversité des emplois que nos communautéset nos synagogues génèrent chaque année et soulevé laquestion de l'interdiction de travail le dimanche.

Auprès du Ministre de l'Agriculture, M. Stéphane Le Foll, avec le Grand Rabbin de France GillesBernheim, il a continué de défendre l'abattage religieuxet condamné la stigmatisation de notre alimentation.

Avec la Ministre des Droits de la Femme et Porte Paroledu Gouvernement, Mme Najat Vallaud Belkacem, et laMinistre de la Famille, Mme Dominique Bertinotti, Joël Mergui s'est entretenu à propos de la famille juive,du “mariage pour tous” et de la question délicate desAgounot pour lesquelles des dispositions pourraient veniren aide.

Le président du Consistoire a tenu a confier différentsdossiers sensibles à Mme le Garde des Sceaux et ministrede la Justice, Mme Christiane Taubira, parmi lesquels leproblème récurant de la nourriture casher en prison, dontsont privés les détenus et les agressions antisémites dontils font de plus en plus l’objet durant leur détention, ainsique la qualification des crimes et délits antisémites.

Le Centre Européen du Judaïsme, projet majeur de lacommunauté juive française et européenne a été présentéet soutenu devant de nombreux ministres, et notammentle ministère de la Culture auprès de qui Joël Merguientendait défendre la richesse du patrimoine juif françaisdans toute sa diversité.

Les règles de fonctionnement de l'institution consistorialefurent au centre des discussions du président duConsistoire avec le ministère du Budget, tandis qu'Israël,les relations particulières qu'entretiennent les juifs deFrance avec sa capitale Jérusalem, les risques pour lacommunauté juive française d'une importation en France,des conflits du monde Arabe, et la question des cimetièresjuifs en Algérie, furent au cœur de l'entretien avec leMinistre des Affaires Etrangères, Laurent Fabius, et leMinistre de la Défense, Jean-Yves Le Drian.

Des cellules de travail on été mises en place pour lesdossiers abordés lors de ces rencontres. Enfin, denombreux échanges ont eu lieu avec le Ministre del'Intérieur, M. Manuel Valls, à propos notamment desquestions clé relatives à la liberté du culte. MonsieurValls se rendra à la traditionnelle cérémonie des voeuxqui se déroulera le dimanche 23 septembre à lasynagogue de la Victoire.

Le Premier ministre Jean-Marc Ayrault reçoit Joël Mergui

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LA VIE DU CONSISTOIRE

34 INFORMATION JUIVE Septembre 2012

Nouveau Bureau du Consistoire Central

Le Conseil du Consistoire Central - Union desCommunautés Juives de France, s’est réuni à Paris le 11septembre 2012. A l’ordre du jour, figurait notamment laconstitution du Bureau du Consistoire Central, suite à laréélection de Joël Mergui à la présidence du Consistoire,le 24 juin dernier. Le Bureau a été proposé par le Présidentdu Consistoire et a été élu par le Conseil à l'unanimité moinsune voix contre et deux abstentions.

COMPOSITION DU NOUVEAU BUREAU

Président :Joël MERGUI

Conseiller du Président :Philippe MEYER (Vice-président du Consistoire de Paris)

Vice-Présidents :Bruno BENJAMIN (Président délégué du Consistoire de Marseille)Jack-Yves BOHBOT (Administrateur du Consistoire de Paris)Francis LEVY (Président du Consistoire du Bas-Rhin)Alain SEBBAN (Président du Consistoire du Rhône-Alpes)Charles SULMAN (Président du Consistoire du Nord)

Secrétaire Rapporteur :Elie KORCHIA (Vice-président du Consistoire de Paris)

Secrétaire Rapporteur Adjoint : Ivan GEISMAR (Président d’honneur du Consistoire du Haut Rhin)

Trésorier :David AMAR (Vice-président du Consistoire de Paris)

Trésorier Adjoint :Jean-Claude MICHEL (Président du Consistoire de Moselle)

Ordonnateur des dépenses :Maurice NIDDAM (Président du Consistoire de Nice)

Ordonnateur des dépenses Adjoint : Alain ZYLBERMAN (Président délégué du Consistoire du Languedoc)

Le Grand Rabbin de France, Gilles BERNHEIM, est membre de droit du Bureau.

Inauguration de la synagogue de Mulhouse

Suite à l’incendie survenu le 10 Avril 2010 qui avaitendommagé l’édifice et après plus d’un an et demide travaux, la Synagogue de Mulhouse retrouve sonlustre d’antan. Devant près de 500 personnes,Monsieur Patrick Hirschhorn, Président de laCommunauté de Mulhouse et Monsieur JacquesBanner, Président du Consistoire du Haut-Rhin ontaccueilli le Dimanche 2 Septembre dernier,Monsieur Manuel Valls, Ministre de l’Intérieur,Monsieur Gilles Bernheim, Grand Rabbin de France,et Monsieur Joël Mergui, Président du ConsistoireCentral, à l’occasion de l’inauguration de laSynagogue après sa restauration.

On notait aussi la présence de Monsieur JeanRottner, Maire de Mulhouse, Monsieur CharlesButtner, Président du Conseil Général du Haut-Rhin,de Madame Arlette Grosskost, Vice-présidente duConseil Régional d’Alsace, ainsi que de Monsieurle Député Francis Hillmeyer, qui ont chacuncontribué financièrement à la réalisation de ceprojet.

Le Président de la Communauté et le Président duConsistoire ont ouvert la cérémonie en faisant unbref rappel historique des événements et en saluantet remerciant toutes les personnalités présentes.Après les interventions du Président Mergui et duGrand Rabbin de France Gilles Bernheim, c’est avecune grande émotion que Monsieur le MinistreManuel Valls a fait partager les sentiments qui l’ontanimé au cours de cet après-midi, ainsi quel’attachement et le rôle essentiel du Concordat dansla vie de notre région.Une plaque commémorant cet événement et apposésur la Synagogue a été dévoilée. Dans le cadre desJournées Européennes de la Culture Juive, uneconférence sur l’humour du Grand Rabbin de Francea conclu cette journée.

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Cérémonie d'hommage au Grand Rabbin David Messas

M. Claude Goasguen AncienMinistre, Député-Maire du 16emearrondissement a organisé mardi4 septembre une cérémonied’hommage au Grand RabbinDavid Messas zatsal, dans leslocaux de sa mairie, au cours delaquelle il a remis à Madame DollyMessas, le livre d’or dédicace parles habitants du 16eme. Plus dedeux cents personnes ont assisté àcette cérémonie. Claude Goasguena ouvert les allocutions par undiscours très émouvant. Puis cefurent, son Excellence l’Ambas-sadeur d’Israël M. Yossi Gal et leGrand Rabbin de France GillesBernheim, et les fils du GrandRabbin Messas, le ProfesseurEmmanuel Messas et le Rav ArielMessas, qui s'exprimèrent enrappelant la mémoire du GrandRabbin.

Fin des travaux de rénovation pour la synagogue de la Roquette Inaugurée en 1962, la synagogue qui fête son

cinquantenaire cette année s'est lancée dans d'importantstravaux de rénovation.

La nature des travaux réponds à des demandessouvent répétées de la part des fidèles de disposer parexemple d'une allée centrale pour accueillir les mariageset d'autres aménagements qui permettront pour lacommunauté d'avoir un lieu polyvalent et moderne pourdes activités extra-liturgiques (conférences, concerts…).

L'éclairage, la disposition des sièges, le systèmed'aération et l'accès pour les personnesà mobilité réduite ont été revu etamélioré.

Le dallage de la synagogue a étéréalisé par 48 tonnes de pierre enprovenance de la veine qui passe sousles collines de Jérusalem et qui sepoursuit sous le Sinaï.

Totalement fermée au public aulendemain de Chavouot, les offices ontété transférés au centre Popincourtsituée à quelques pas de la synagogue.

Ce centre, brulé par un incendie criminel en 2004 etfermée depuis a été entièrement rénové pour l'occasion.Popincourt servira ensuite de lieu de mémoire et detransmission de la culture judéo-espagnole et recevrarégulièrement des classes scolaires dans le cadre dudevoir de mémoire.

Après 3 mois de rénovation, la synagogue de laRoquette rouvrira ses portes pour les fêtes de Tichri.

Une inauguration est prévue dans les semaines à venir.L'occasion pour nous, d'y revenir plus longuement dansune prochaine édition.

Le détail du projet est disponible sur le site internetde la communauté (www.laroquette.org)

Cérémonie des Vœux du Consistoire RégionalRhône-Alpes et CentrePour la seconde année consécutive,le Consistoire Régional Rhône-Alpeset Centre, présidé par Alain Sebbanqui était nommé le jour même vice-président du Consistoire Central, aorganisé sa Cérémonie des Vœux enprésence des plus hautespersonnalités religieuses et civiles.La Cérémonie a été inaugurée par leGrand Rabbin d’Israël, Rav ShlomoAmar qui effectuait une visite officiellede deux jours à Lyon.Plus de 700 personnes de la communauté juive régionale ont assisté à la cérémonieau cours de laquelle le Président Sebban a rappelé les actions mises en place parle Consistoire Régional.Le Président du Consistoire Central Joël Mergui a prononcé un discours concernantla défense de la liberté de culte en France. Puis, le Président de la Région Rhône-Alpes, Jean-Jack Queyranne qui, cette année, présidait la Cérémonie des Vœux, aadressé un fort message de soutien à la communauté juive et à Israël, en rappelantque la lutte contre l’antisémitisme et le radicalisme religieux passait par des actionséducatives soutenues par la Région.Le Grand Rabbin Wertenschlag s’est adressé avec beaucoup d’humour aux élus età la communauté pour leur rappeler la concorde existante en Région avec les autrescultes. Le Grand Rabbin d’Israël a conclu par un discours insistant sur la dualité del’identité humaine, matérielle et spirituelle, avant de bénir toute l’assemblée présente.

LA VIE DU CONSISTOIRE

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Ce n'est pas la moindre dessingularités d'Israël que dedevoir à tout momentjustifier sa légitimité et cellede son peuple. Cettenégation répétitive pourrait,

à elle seule, constituer une caractéristiquenationale, puisque l'on s'obstine, depuis lanuit des temps, à dénier aux juifs tout cequi les caractérise. L'antisémitisme deséglises romaine et byzantine se fondaitdéjà sur ce principe : les juifs n'étaient plusIsraël, peuple de l'alliance, puisqu'iln'avaient pas reconnu Jésus-Christ. Leséglises chrétiennes étaient donc, chacune,le nouvel Israël et il ne pouvait en existerd'autre. L'Islam, à son tour, revendiqual'exclusivité de l'alliance, affirmant savocation à établir sa domination exclusiveau nom du Tout-Puissant. Or, au long des

siècles, dans le monde du christianismeorthodoxe, dans celui du catholicismeromain, comme en terre d'Islam les juifsont persisté, alors que la plupart despeuples du Moyen- Age ont disparu entant que tels, se fondant en permanencedans de nouveaux ensembles. S'il est unmystère pour les historiens, c'est bien celuide la permanence du judaïsme, de ladétermination de ce peuple, qui demeure,en dépit des persécutions, des massacreset de toutes les tentatives de conversionsmassives. Ce mystère a tant d'implicationsqu'il en devient insupportable pour les juifs.Petit-fils de rabbin, Karl Marx tenta dedémontrer que le juif n'était qu'une créationéconomique. Il réduisait son existence auxbesoins de la société marchande etassociait son universalité à celle de l'argent.L'origine et l'histoire du peuple juif nel'intéressaient guère plus que lesrésurgences païennes du romantismeallemand. Pour Marx, tout cela n'était quefadaises et croyances, il cherchait, lui, àétablir une histoire économique, socialeet politique de l'humanité.

L'invention des nations

La Question juive n'est, dans l'œuvre deMarx, qu'un petit texte polémique, destinéà nier l'existence d'une problématiqueparticulière, au moment où l'antisémitismemoderne prenait corps en Europe. C'étaitaussi le moyen de ne jamais s'interrogersur ce qu'il était lui-même, en dépit de laconversion de son père et de son propreathéisme. Lui, le prophète du socialisme,dont la doctrine émancipatrice trouva unerésonance singulière parmi les juifsd'Europe, comme en témoigne lacomposition des partis qui s'en réclamèrentau début du siècle passé, les sociaux-démocrates allemands, autrichiens, etrusses.

La négation marxiste de la nation juives'inscrivait dans un projet d'émancipationdu prolétariat mondial, qui impliquait ledépassement de toutes les nations. La

négation d'aujourd'hui ne vise qu'un seulpeuple, qu'une seule nation. Elle est denouveau, portée par un juif, un historienisraélien : Shlomo Sand.

Shlomo Sand ne s'interroge pas surl'adéquation des autres nations avec leterritoire qu'elles occupent. Tout Etat, est,par nature légitime, à l'exception d'Israël.Autour d'Israël, les frontières ont été tracéesà la fin de la Première guerre mondiale,lorsque les Britanniques et les Français separtagèrent les dépouilles de l'empireOttoman. Les Turcs ne considéraient pasla Palestine comme une entité spécifique,ils avaient découpé administrativement leterritoire, en se gardant bien d'installer uneautorité centrale à Jérusalem. La Palestineavait disparu depuis la fin des Croisades.Cette terre avait un peuplement composite,le Sultan avait, par exemple, installé dansla vallée du Jourdain, des Algériens qui,pour l'avoir servi loyalement, avaient étécontraints de quitter leurs terres lorsquel'Algérie devint française. Cela ne signifienullement qu'il n'y a pas, aujourd'hui, de

peuple palestinien, ce n'est pas parcequ'une identité nationale s'est constituéerécemment que l'on peut nier l'existenced'une nation.

Or toute la démonstration de ShlomoSand repose sur ce postulat : lerécit biblique n'a pas été écrit à

l'époque des rois d'Israël, l'année que nousnous souhaitons, 5773, ne correspond àrien, toute cette histoire n'est qu'unelégende inventée ultérieurement. Lejudaïsme daterait, en fait, de l'époque deBabylone et ne serait arrivé à Jérusalemqu'au retour de l'exil, avec le secondTemple. Quand bien même cette théoriene serait pas dénuée de fondement, oùtrouvera-t-on une nation aussi ancienneque le peuple juif ? Sans nul doute dansles civilisations asiatiques, et cependant,d'invasions en bouleversements, aucunefrontière contemporaine ne correspond àcelles des anciens royaumes et empiresqui marquèrent l'Inde, la Chine etl'Indochine. Nul ne s'interroge sur lalégitimité de la présence des Chinoiscontemporains au pied de la GrandeMuraille. On s'attachera cependant àdémontrer que les juifs n'ont rien à faire àJérusalem. Ce peuple, nous répète ShlomoSand a été inventé. Il aurait même fini pars'inventer lui-même, au point derevendiquer une terre dont il n'était pasissu. Il faut croire que des rabbins deBabylone ont posé, au hasard, un doigt surune carte. Les cartes de géographien'étaient pas très courantes à l'époque,mais nos rabbins, ayant entendu parlerd'un Dieu unique, découvert par un autrepeuple, auraient jeté leur dévolu sur unebourgade, pour y enraciner le peuple qu'ilsvenaient d'inventer et qui n'avait pasd'origine.

En fait, rien ne vient des juifs, ni la Tora,ni le monothéisme, ni Jérusalem. Lespremiers sionistes, les Hébreux quipartirent de Babylone pour la Judée étaientdéjà de grands pervers, qui avaient inventétoute une histoire pour s'accaparer uneterre. On comprend, dans ces conditions,que tout le monde est légitime sur cetteterre, les descendants des soldats grecs etromains, les bâtards laissés par les croisés

LA CHRONIQUE DE

Shlomo Sand nous démontre que les juifs ne viennentde nulle part ! Belle découverte : c'est le leitmotiv de

l'antisémitisme depuis deux siècles.

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GUY KONOPNICKI

et les armées de Saladin, les populationsissues des brassages de l'empire Ottoman,les serviteurs algériens du Sultan installésdans la vallée du Jourdain lorsque l'Algériedevint française, les Levantins, lesBédouins, les communautés chrétiennesfuyant l'Egypte à l'époque des Mameluks,bref, tout ce qui est issu du brassage depeuples nomades et d'envahisseurs aulong de deux millénaire est légitime, seulsles juifs ne le sont pas. Shlomo Sand nousdémontre que les juifs ne viennent de nullepart ! Belle découverte : c'est le leitmotivde l'antisémitisme depuis deux siècles.

Les juifs conspirent, ils ont toutinventé. Ils ne viennent pas de cetteterre. Jérusalem n'est qu'un mythe.

En ce cas, on ne comprend pas commentJésus-Christ a pris une telle importance,si l'histoire dont il se réclamait venait toutjuste de sortir du cerveau obscur dequelque importance. Et pourquoiMohamed tenait-il tant à poser le sabot deson cheval sur le Mont du Temple ?

Ce n'était rien encore. Non seulementla terre promise n'existe pas, mais ladiaspora elle-même n'est qu'une fiction.Selon Shlomo Sand, les ashkénazesdescendent en fait des Khazars convertisau judaïsme, tout comme les sépharadesseraient des Berbères, datant de l'époquede la Kahina. D'un côté comme de l'autre,nous serions issus de conversionsmassives, entre le VIè et VIIè siècle de l'èrechrétienne. Comment ce peuple inventéa-t-il pu faire tant de conversions massives,sans quitter sa terre d'origine, ou toujoursselon Shlomo Sand, les Hébreux seseraient massivement convertis auchristianisme puis à l'Islam, afin de devenirles ancêtres des Palestiniens !

Arthur Koestler avait, en son temps,réfuté la théorie de l'origine Khazar. S'iln'est pas contestable que des Khazars etdes Berbères convertis se soient intégrésau peuple juif, tout comme les Falashas,la volonté de réduire les origines du peuplejuif à ces conversions nous ramène, unefois de plus, à l'obsession de Shlomo Sand,qui est de délégitimer Israël. Commentcomprendre que des populations duCaucase et des Aurès n'aient eu de cessede prier, pendant des siècles, pour queSion retrouve sa splendeur ?

Le complot n'a cessé de se renouveler: la minorité obscure, qui a inventéle peuple juif a réussi à convaincre

des millions de Khazars et de Berbères,elle a éradiqué de leurs mémoires leursorigines réelles. Ces descendants deKhazars et de Berbères se sont installés en

Palestine, ils ont asséché des marais etirrigué des déserts, ils ont affronté desvoisins hostiles et subi le terrorisme, alorsmême qu'ils venaient de régions plusattrayantes ! Les Khazars avaient vécu enCrimée, région épatante pour y installerun Etat juif ! Et pourquoi pas la Tunisie oule Maroc, terre d'origine de notre judaïsmeberbère ?

Fort curieusement, la langue de cesashkénazes qui seraient essentiellementdes Khazars, n'a conservé aucune tracedes idiomes transcaucasiens. Ce peuple

parlait une langue voisine du turc, ce quiest, pour le moins, éloigné du yiddish. Ilfaut donc croire qu'une minoritéaudacieuse est parvenue à prendrel'hégémonie sur une population que lapoussée mongole venait de disperser. Etces mystérieux inventeurs du peuple juifauraient imposé un allemand rhénan duXIème siècle, à une population venued'Asie centrale pour descendre jusqu'à lamer Noire, avant de se disperser desCarpates à la Baltique. Autant dire que lescarpes remontent toutesfarcies du Danube à la Volga.

Sur cette terre, peu depeuples se trouvent sur leurterritoire d'origine. LaSeconde guerre mondiale etla décolonisation sur lesfrontières coloniale ontdessiné, en Europe et enAfrique, des frontièresarbitraires et souventabsurdes. On a déplacé, ondéplace encore, des dizainesde millions d'individus. LaPrusse a été partagée entrela Pologne et la Russie, lacapitale de la Lituanie étaitjadis une ville polonaise àmajorité juive, l'Ukraineoccupe d'immense territoirespolonais, slovaques etroumains, sans même parlerde la Crimée, conquise etreconquise par la Russie.

L'OTAN a bombardéBelgrade, pour contraindrela Serbie à abandonner saprovince historique duKossovo, parce que les

Albanais y sont devenus majoritaires dansles années 70 du vingtième siècle. LeSoudan écrase les peuples du Sud, lesislamistes ravagent les tombeauxmusulmans de Tombouctou…

Mais il n'y a qu'un pays artificiel etmaléfique, l'Etat d'Israël. Il n'y a qu'un seulpeuple inventé de toutes pièces, le peuplejuif, qui n'est même pas juif, mais berbéro-khazar.

Le juif ment, il a toujours menti.

Il suffit de regarder autour d'Israël… Oncomprend qu'il y a un peuple syriencomme il y a un peuple libanais, cesnations homogènes, unies, offrent uncontraste saisissant quand on songequ'elles vivent aux frontières d'une terreoccupée, à force de mensonges, par unprétendu peuple juif, illégitime depuisdeux millénaires. Heureusement, il y auratoujours des Shlomo Sand pour débusquerle mensonge du juif.

Les ashkénazes descendent en fait des Khazarsconvertis au judaïsme, tout comme les sépharades

seraient des Berbères, datant de l'époque de la Kahina.

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JUDAÏSME

j'ai juré, et je ne peux revenir sur mon serment !"

Puis il s'est enfermé dans lemutisme.

Mon père, Jephté, du sein dudésespoir qui l'accable, garde lesilence. Un silence qui m'écrase. Unsilence qui m'achève. Un silence quifait basculer le monde qui m'entoure,le monde que je croyais mien, lemonde rassurant et connu où rien nepeut arriver aux enfants abritésderrière la muraille de l'amourpaternel, dans une étrangeté blafardeet glacée.

Horreur et terreur…

"Laisse-moi deux mois pour meretirer dans la montagne et pleurersur ma virginité avec mes compa-gnes".

Je suis face à Jephté. Autour denous, des visages aux contours flous,

à l'existence incertaine, interchan-geables et lointains, noyés dans labrume et le silence.

N'est-ce pas, cependant, le fantômede ma mère à ses côtés, qui a surgi,immatériel, des profondeurs du passéet de la mort ? Ne va-t-elle pasdéchirer le silence de sa voix d'outre-tombe pour m'arracher aux griffes de la mort qui s'apprêtent àm'emporter ?

"Laisse-moi deux moispour me retirer dansla montagne etpleurer sur mavirginité avec mescompagnes". Mon

père, Jephté, est l'image même dudésespoir. Pâle. Les yeux cernés. Lestraits tirés. Le désordre de son cœurinscrit dans ses cheveux hirsutes, sabarbe à l'abandon, ses mains qui setordent, son visage creusé de tics.

L'univers vient de s'écrouler.Englouti dans une faille du temps,dans une fissure de la création.

En une fraction de seconde, lestrompettes tonitruantes ont versé dansl'abîme du silence opaque, l'ivresse dela victoire a fait place à la désolationdu deuil : car le vœu de mon père,cette parole imprudemment lancée àla face du ciel, doit s'accomplir surmoi, sa fille ! " Si Tu m'accordes lavictoire sur l'ennemi ammonite, jeT'offrirai en sacrifice la première

créature qui sortira de ma maison ".Pourquoi suis-je sortie au-devant delui ? Pourquoi juste à ce moment-là ?

"Laisse-moi deux mois pour meretirer dans la montagne et pleurersur ma virginité avec mescompagnes".

Mon père, Jephté, a, d'abord,déchiré ses vêtements, puis il a gémi: "Hélas, ma fille, tu m'accables ! Mais

N'est-ce pas, cependant, l'ombred'Isaac qui plane au-dessus de lui,Isaac miraculé de l'autel, Isaac que lavoix divine elle-même a sauvé ducouteau prêt à dévorer sa chairtendre, au moment où son père,Abraham, allait l'égorger, croyantobéir à l'injonction divine ?

N'est-ce pas, cependant, au cœurdu silence épais qui s'est saisi dumonde, qui a asséché la source vivede la parole et qui broie les hommessous une chape mortelle, n'est-ce pasla voix d'un silence ténu qui sefaufilerait, victorieuse et vivante,musique tendre et têtue de la vie quitriompherait de la mort ?

N'est-ce pas, cependant, Pin'has, legrand prêtre, fils d'Elazar, le grandprêtre, qui derrière lui, dans sablanche tenue de cérémonie, fronthaut, tiare en tête, ephod placardé surla poitrine, détourne le regard ? Neva-t-il pas s'avancer, lancer une parolede secours au-dessus de l'abîme desolitude où Jephté est tombé,l'arracher au précipice de mort danslequel son vœu inconsidéré l'a jeté ?

Jephté, au sein du désespoir quisemble l'accabler, reste immobile.Garde le silence, hautain. Derrièrelui, ses généraux fièrement campés,ses officiers chamarrés, ses soldatsimmobilisés, tous pétrifiés, tousbrutalement bloqués dans leurmarche triomphale, jambières etcasques et cuirasses renvoyant leséclats d'un soleil indifférent. Ne va-t-il pas, cependant, dans un effort detout son corps, de tout son cœur, detoute son âme, rassembler ses forcesdéfaillantes, mobiliser son esprit,

La fille de Jephté

PAR JANINE ELKOUBY

Et j'ai prié, le cœur brisé, remuant les lèvres, à voixbasse, comme une femme ivre de chagrin.

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JUDAÏSME

sacrifice de ta fille, Luiqui a interdit à tout jamaisqu'on Lui offre desvictimes humaines ?Quand Jacob a fait le vœud'offrir la dîme de tous lesbiens qu'il acquerraitgrâce à la protectiondivine, a-t-il pour autantsacrifié l'un de ses fils ?Quand 'Hanna, un jour,fera le vœu de consacrerson enfant à Dieu,l'offrira-t-elle pour autanten holocauste ? Père,Pin'has, le grand prêtre,peut te délier de ton vœu! Père, ne m'abandonnepas ! Père, sauve-moi !Père, je ne veux pasmourir !

Jephté est restéimmobile. Raide. Muet.

Je me suis tournée versle ciel d'où l'été déverse

sa lumière et sa chaleur. Et j'ai prié,le cœur brisé, remuant les lèvres, àvoix basse, comme unefemme ivre de chagrin. ODieu tout puissant, Dieu demes pères Abraham, Isaac etJacob, Toi qui as sauvé notrepère Isaac du couteaudévorant, Toi qui as arrêté lebras d'Abraham, Toi qui, auseuil de la mort, as substituéun bélier à l'enfantqu'aveuglaient les larmesdes anges, sauve-moi ! Toiqui as su répondre au vœud'Eliezer en lui envoyantRébecca, quand il cherchaitune femme pour le fils deson maître, Toi quiexauceras un jour le vœu deSaül en plaçant sur sa routeDavid, quand il cherchera unépoux pour sa fille Mikhal,Toi qui sais préserver les unset les autres desconséquences de leurs vœuximprudents, Tu n'as pasvoulu exempter Jephté du

prix de sa légèreté et le voicicondamné à sacrifier sa fille unique.Mais considère, Dieu tout-puissant,Toi notre Père, Toi qui es lent à lacolère et prompt à pardonner, Toi quit'émeus pour la plus humble de tescréatures, considère que je ne saisrien encore de la vie, que je n'ai pasconnu la joie d'aimer un homme, queje connaîtrai pas le bonheur de mettreau monde un enfant ! O Dieu de mespères, sauve-moi !

Le ciel, d'azur et de feu, s'est tu.

Silence des anges. Silence de Dieu.Humble et résignée, je m'incline.

Mais le silence de mon père, maisle silence du grand prêtre, empêtrésdans leur orgueil et leur soifd'honneurs, le silence du monde,témoin muet de l'injustice et del'horreur, ne sont-ce pas eux quiaffûtent le couteau du sacrifice?

"Laisse-moi deux mois pour meretirer dans la montagne et pleurersur ma virginité avec mescompagnes".

avancer un pied puis l'autre, ouvrir lesbras, élever la voix, libérer les motsque lamuraille d'acier de sa fiertéretient prisonniers ?

Je suis face à Jephté, mon père,engoncé dans son orgueil et sondésespoir. Face à Pin'has, le grandprêtre, engoncé dans son rutilantcostume d'apparat. Théâtre demarionnettes figées et muettes, surlesquelles planent, impuissantes, lesombres des héros de jadis, qui avaientmérité que la voix divine s'élève enleur faveur.

Je me suis tournée vers Pin'has. J'aisupplié. Mes mains tremblaient.Délie-le de son vœu. Ne le laisse pascommettre ce crime.

Pin'has est resté figé. Hautain.Muet.

Je me suis tournée vers mon père.J'ai joint les mains. J'ai argumenté.J'ai supplié. Père, je suis sortie à tarencontre, au son des tambourins dela victoire, et tu vas m'égorger ? LeDieu de nos pères demanderait-il le

La fille de Jephté (Alexandre CABANEL, 1879)

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JUDAÏSME

dans cette ville de poètes et dephilosophes, le Bet Midrash était parmiles plus réputés du monde juif. Lors del’invasion almohade, son élite partitpour Tolède fonder l’école destraducteurs, et pour Narbonne et Lunelcomme la famille Tibbonide avec Judaibn Tibbon (né à Grenade) qui permit àl’Université de Montpellier d’accéderà des traités médicaux écrits en arabeet que Benjamin de Tudèle rencontreraaprès 1173.

Lucena est seulement depuis le 12juillet 2012 dans le Réseau desquartiers juifs des villes espagnoles.Pourquoi a-t-on tant tardé pour l’yinscrire? On dit ne pas avoir bienidentifié le quartier juif de Lucena.Comment est-ce possible quand toutela ville était juive ? La découverte en2006, lors des travaux pour la

Rien ne concorde àCordoue, l’Andalouse sevoulant paradigme de lacoexistence harmonieuseentre les trois culturesissues des monothéismes.

Nous trouvons sur la Place deTibériade : au centre, depuis le 7 juin1964, une statue assise de Maimonide,le Rambam (1138-1204), selon unereprésentation artistique de son auteur,le sculpteur Ruiz Olmo ; au fond,accolée à la muraille, la porte de lamaison qui aurait été propriété, au11ème et début du 12ème siècle, de lafamille Maimonide. Le père Maïmonben Yossef haDayan, rabbin, exégète etjuge du tribunal rabbinique de lacapitale du Califat d’Occident,prétendait descendre de Juda Hanassi.Lors de la prise de la ville par lesAlmohades, Maimonide, avec safamille, fuit vers Fès à l’âge de 13 ans(certains disent vers Almeria, puis Fès),et n’aurait jamais voulu s’appeler leCordouan : il préférait le titre deSéfarade ; peut-être aussi parce qu’ilétudia longtemps à Lucena, à 67kilomètres au sud, dans le fameux BetMidrash de Yossef ben Rabbi MeïrHalevi ibn Migash, dit Rabbi Migash(1077-1141), disciple d’Isaac Alfassi.

Lucena, la perle de Séfarade : onpeut en discuter l’appellation. Il n’enreste pas moins vrai qu’elle fut l’uniqueville libre juive andalouse. Créée au8ème siècle dans la vallée du Génilpar des marchands juifs de la Route del’Encens, elle était un entrepôtprincipal de marchandises rares etchères comme les épices, l’encens,l’or… avant Cordoue, depuis le portd’Almeria. Les familles vivaientprotégées entre des murailles que lesmusulmans et chrétiens ne pouvaientfranchir après le soir. Son nom est –dit-on - la contraction espagnolisée deEli ‘Ossana, de l’hébreu Dieu noussauve. Durant près de trois siècles,

construction de la rocade sud de laville, d’une nécropole médiévale juive,change la donne. Là se trouvent prèsde 350 tombes creusées orientées versJérusalem, selon des rites funérairestraditionnels très soignés. Plus loindans la vallée, on identifie plus d’unecinquantaine de tombes encore. Selonl’excellent Daniel Botella, l’archéologuemunicipal qui permit de démontrer lepassé entièrement juif de Lucena ,“aucune structure funéraire n’affecteses voisines ; il n’y a donc pas desuperpositions. On peut déduire unentretien soigné, durant au moins unsiècle, de la délimitation de chaquefosse, par les parents du défunt, ou pardes personnes affectées à l’entretien ducimetière et à la réalisation destombes.”

Le mythe de l’âge d’or séfarade

A-t-on vraiment connu un Âge d’orséfarade ? Les chercheursaméricains et israéliens en doutent,comme S.D. Goitein et MordechaïFriedman, se référant à des lettresretrouvées dans les documents de laGenizah de Fostat (Le Caire). Sousles Fatimides, les Juifs avaient plusde libertés. Maimonide s’y réfugia.Les commerçants de la route desIndes pouvaient exercer leur métier.Rapidement, après les fitna - guerresciviles musulmanes - de Cordoue etde Grenade, les juifs furentpersécutés, durent fuir ou seconvertir à l’islam, puis après laReconquête au christianisme.Aujourd’hui beaucoup rappellent àLucena leur descendance juive. Onnous raconte aussi comment lesnobles de Lucena, la plupart“conversos” - convertis - ont achetéleurs titres et certificats de pureté desang au 16ème siècle.

Depuis la création de l’Étatd’Israël, Cordoue n’a pas montré unréel intérêt pour son passé juif, sauf

Cordoue la Séfarade ?

PAR ROBERT LANQUAR*

Place Maïmonide à Cordoue

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association intitulée “Paradigma deCordoba”, rappelle qu’elle fut conçuepar Garaudy et qu’une bonne partiede son financement provient du Qatar.

La Fondation des Trois Culturessous la coprésidence espagnole,marocaine et israélienne s’installa à

Séville après 1992. Et puis, il y eut laConférence internationale sur leTourisme et les Religions, organiséepar l’OMT, agence spécialisée des

Nations Unies, fin octobre 2007. L’idéeétait de comprendre pourquoi letourisme religieux et spirituel est siimportant dans le monde, avec plusde 600 millions de pèlerins et devisiteurs du patrimoine religieux etsacré. La Conférence de l’OMTmontra que le tourisme est un apportindispensable au dialogue entrereligions et cultures.

--* Rédacteur du Rapport de base de

la Conférence des Nations Unies surle Tourisme et les Religions. RobertLanquar est également président del’Association des Amis de la CordoueSéfarade.

pour des raisons de promotiontouristique. Grâce à quelques hommesde grande qualité, elle a produit leFestival international de MusiqueSéfarade qui se déroule fin juin etparticipe à la Semaine européenne deculture juive, début septembre dechaque année. Cet intérêt pour le

“marché des juifs” rappelle de mauvaissouvenirs qui ont coûté son nom à laCasa Séfarade – Israël, institution decoopération entre l’Espagne et l’Étatd’Israël, obligée par jugement des’appeler Centre Séfarade – Israël quia préféré alors installer son siègeandalou dans la Juderia de Jaén plutôtque de celle de Cordoue.

Durant plus de vingt-cinq ans, ontéchoué toutes les tentatives de jumelerCordoue à Tibériade où reposent leRambam et son père. Pour d’autresvilles comme Bethléem ou Nuremberg,cela s’est fait très vite, en quelquesmois. Combien de conférencesinternationales, réunissant chercheurset rabbins depuis un demi-siècle, ontdemandé la création d’un musée oucentre d’études Maimonide ! Une desdernières rencontres se tint en octobre2004 : deux grands rabbins d’Israël,Yonah Metzger et Shlomo MosheAmar, signent, avec la Maire deCordoue, un accord pour la créationd’un tel centre, la Casa Maimonide -la Maison séfarade. Moins de cinqans plus tard, le même corps debâtiments est cédé à l’Institutinternational d’Études arabes. Il y aeu l’affaire du négationniste RogerGaraudy vivant à Cordoue et soutenupar sa Municipalité, plusieurs foiscondamné en France dans les années1990, débouté par la CourEuropéenne des Droits de l’Hommedu Conseil de l’Europe en 2003.L’omerta a peut-être conduit Cordoueà oublier la présence, derrière lesymbole des Omeyyades, fondateursde Medina Al-Zahra, des servicessecrets syriens auprès d’un Garaudyà qui . Kadhafi en 2002 fit remettreson prix des Droits de l’Homme !Aujourd’hui, la Bibliothèque Al-Andalous, centre de réflexion sur laCordoue de la coexistence entre lestrois religions et siège d’une

Le tourisme est un apport indispensable au dialogueentre religions et cultures.

JUDAÏSME

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ISRAËL

Sionisme : C'est comme la sortie d'Egypte. Un voyage quin'est pas encore fini. Nous ne sommes pas encore arrivés àla Terre promise…

Politique : Quand on me demande ce que j'aimeraislaisser dans les mémoires, je réponds ; je voudraisqu'on se rappelle de moi comme de quelqu'un qui aréussi à sauver la vie d'au moins un enfant.

Présidence : S'il s'agit de servir le peuple, c'est une bonnechose ; s'il s'agit de tenter de dominer le peuple, c'est uneerreur.

Femmes : Toute femme est en elle-même unecivilisation. Toute femme naît comme mère et touthomme meurt commebébé. Quiconque seconduit mal avec lafemme s'en prend àl'avenir de son peuple.

Chauvinisme : C'est comme l'amour de soi. Quiconque lepratique ne sait pas ce qu'est l'amour.

Guerre : La bonne guerre c'est celle que nousparvenons à éviter… Je n'appartiens pas aux gensqui sont heureux d'aller en guerre.

Paix : La guerre dure peut-être peu, la paix, elle, peut durerlongtemps. Elle participe pour une grande part au parfumde la vie. Cela vaut la peine d'investir dans la paix autantque ce que l'on investit dans la guerre. Il est clair quequand votre pays est attaqué, vous êtes tenu à vousprotéger. Mais quand apparaissent des signes de paix, ilfaut les encourager. L'Etat d'Israël n'a eu, durant la moitiéde son histoire, que le choix de défendre son existence…J'ai été un faucon quand il n'y avait pas d'autre choix. Jesuis désormais un homme tourné vers la paix parce qu'elleest possible.

Nobel : Le rôle d'un tel prix n'est pas de vous féliciterpour ce que vous avez fait mais de vous encouragerà poursuivre vos efforts pour la paix.

Corruption : Je suis fier que dans l'Etat d'Israël, tous les citoyenssoient égaux devant la loi.

Iran : Le peuple iranien n'est pas notre ennemi. Ce sontles dirigeants du pays qui ont fait de l'Iran un dangerpour le monde et un danger pour notre pays. Ce sontles seuls dirigeants du 21ème siècle qui veulent imposer une hégémonie religieuse extrémiste sur leMoyen Orient, et qui menacent d'exterminer unpeuple…

Ben Gourion : Le plus grand homme d'Etat de l'Histoire juive…Mon maître et mon modèle. Il a été un leader avant d'avoireu un peuple et avant d'avoir eu un pays…Je peux résumerd'une phrase sa doctrine : il n'est rien de plus sage dans le

monde que d'être moral.

Facebook : Il a inventé unenouvelle langue : brève,intéressante. Facebook aaussi créé une nouvelle

société - démocratique, égalitaire, sans frontières.Zuckerberg a réalisé une révolution plus grande quecelle de Lénine et de Staline. Facebook me permet d'être en contact direct avec de nombreux amis nouveaux. Je vous invite à vous joindre à mesamis.

Mère : Ma mère m'a entouré d'un amour infini. C'est d'elle quej'ai appris l'amour du mot écrit et celui des livres. Depuis, dèsque je me réveille et jusqu'au moment où je vais me coucher,je lis des livres. Ma mère me lisait des livres, quand j'avaisquatre ans. Quand elle me lisait Cholem Aleikhem, je ne savaispas s'il fallait rire avec lui ou bien s'il se riait de nous. A lamême époque, mon grand père maternel Zvi Meltzer m'aenseigné la Bible, le Talmud et la Guemara.

Père : Mon père avait consacré sa vie à sauver des juifsdes camps d'extermination. Son image m'a accompagnétoute ma vie.

Expérience : Si on en tire une leçon, c'est une bénédiction.Si elle devient une habitude, c'est une erreur.

Les confessions de Shimon PérèsA l'occasion du 89ème anniversaire de sanaissance, le président Shimon Pérès a publié, le10 août dernier, dans les colonnes du quotidienà grand tirage Yedioth Aharonot ce qu'il a appelé

les 89 choses qu'il a apprises tout au long de sa vie.Voici la traduction de quelques extraits de cesconfessions du chef de l'Etat d'Israël.

Dieu : Je crois en son existence au cielet dans le cœur.

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Bible : C'est l'ADN des juifs… Nous avons été etcontinuons d'être un peuple peu nombreux maisimportant.

Intellectuel : Un homme qui a le courage de penser par sespropres moyen.

Ignorance : La différence entrel'ignorance et la myopie c'estque dans le second cas, onpeut mettre des lunettes.

Tolérance : J'ai appris dans ma viecombien elle est importante. Selonmoi, la tolérance consiste àpardonner à ton prochain dans lamême mesure où tu pardonnes à toi-même.

Vengeance : Je lui préfère lepardon.

Repos : Je préfère le travail. Je necomprends pas pourquoi les genscherchent à se reposer. De mon pointde vue, c'est dommage. Nous avonsun nombre précis de minutes dans lavie : il faut les mettre à profit d'unemanière positive.

Gauche : La gauche a bon cœurmais il faut de temps en tempslui faire subir un examencardiologique.

Arabes d'Israël : ils peuvent être unpont entre Israël et ses voisins. Nousavons le devoir d'agir pour l'égalitéet combattre les fossés économiqueset sociaux qu'il y a entre nous.

Nouveaux Israéliens : Je suis fier d'eux et je les aime.Ils préfèrent l'avenir au passé.

Richesse : Un moyen , pas un but.

Bonheur : L'aspiration au bonheur c'est du bonheur.

Réussite : Ce n'est pas une notion objective maissubjective. Si vous voulez réussir, il vous faut aimer ceque vous faites.

Echec : Il est inévitable et la seule question est desavoir comment l'accueillir. Dans ma jeunesse, j'aipris la décision d'oser entreprendre à nouveau etne pas avoir peur d'échouer.

Violence : C'est le refuge des faibles.

Amérique : L'amie la plus proche et la plusimportante de l'Etat d'Israël… Sa grandeur tient non pas à ce qu'elle prend mais à ce qu'elle donne. De ce point de vue, elle est unique dans l'histoire.

Shimon Pérès

O D A S E JL’ Œ U V R E D ’A S S I S TA N C E S O C I A L E A L’ E N FA N C E J U I V Eest une association reconnue d’utilité publique par décret du 28 mai 1919

Pour un rendez-vous confidentiel Appelez Tony SULTAN

Tél. : 01 42 17 11 92 • Fax : 01 42 17 11 73

ODASEJ ESPACE RACHI, 39, RUE BROCA, 75005 PARIS

L’ODASEJ a pour missiond’aider les enfants et les adolescents défavorisés ou

en difficulté sur le territoire national

L e u r a v e n i re s t e n t r e v o s m a i n s

Parce qu ’un enfant heureuxdev ient un adul te qu i a de mei l leures chances

de const ru i re son aveni r e t ce lu i de la communauté

Transmettez votre nom à un programme

de solidarité…

Perpétuez la mémoire de vos parents…

… Faites un legs ou une donation à l’ODASEJ

Que vous ayez des héritiers ou non, vous pouvez faire un legs ou une donation en faveur de l’ODASEJ

en exonération des droits de succession ou de mutation

ISRAËL

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et la littérature arabe à l'université Bar Ilan.Il a publié des dizaines de livresnotamment sur la littérature juive enEspagne. Il a été lauréat du Prix Israël,la distinction la plus prestigieuse - et laplus courue - de l'Etat d'Israël.

Dans son livre "Motivim chéoulimbésifrout Israël" (Motifs empruntés dansla littérature juive "), Ratzaby a enquêtéà l'intérieur de la littérature arabe duMoyen Age sur les thèmes arabes queles poètes juifs ont intégrés à leursœuvres. Enquête passionnante de bouten bout dont le lecteur ne peut cependantapprécier l'apport et la subtilité que s'il aaccès à la fois à l'hébreu et à l'arabe.

Ratzaby repère les idées nomades quivoyagent d'une culture à l'autre. Il arriveaussi que les textes eux-mêmes formulésdans la culture juive - dans la Bible maisaussi dans les récits du Talmud - seretrouvent tels quels chez les poètes etles philosophes de l'islam. Mais il arriveaussi, plus souvent qu'on ne le croit, quece soit le contraire.

Ratzaby observe d'entrée de jeu queplus qu'aucune autre, la productionlittéraire arabe au Moyen Age a inspiréles écrits juifs. Cette influence s'est exercéedans la poésie, les chants, la morale, lareligion et la philosophie. Les penseursjuifs - et d'abord le premier d'entre eusChmouél Hanaguid - ne se sont pas

Mon cœur est enOrient et moi-mêmeje suis au fin fond del'Occident": de touttemps, nous avonstous, vous et moi,

pensé que cette formule était, parce qu'onnous l'a répétée mille fois, du prince de lapoésie hébraïque Yehouda Halévy. C'estau point que la formule était devenue, aufil des siècles, une proclamation et unsymbole de la fidélité des juifs à leur terred'origine. Une sorte de credo oud'affirmation d'appartenance.

Savez-vous cependant que ce n'est pasl'immortel auteur des Sionides qui en estl'auteur ? Il n'a fait que l'emprunter - lachose était courante à son époque - à unpoète arabe d'Andalousie, AbderrahmanIer . Vivant en Espagne, ce calife semourait de nostalgie pour sa Syrie natale.Il écrivait ainsi à sa sœur : "Tu sais quemon corps est sur une terre et mon cœurest dans une autre terre".

On doit cette révélation littéraire et pourle coup historique - parmi des centainesd'autres - à l'exceptionnelle rechercheentreprise par Yehouda Ratzaby,professeur à l'Université de Jérusalem etmembre de l'Académie de la languehébraïque. Né au Yémen, il a enseignédurant des décennies, la littérature juive

gênés de faire ces emprunts. Hanaguidétait un homme politique qui entretenaitune correspondance avec des hommesd'Etats arabes. Un des grands écrivainsarabes d'Andalousie a dit de lui qu'ilexcellait dans la maîtrise des deuxlangues.

Sorcellerie ?

Les éléments religieux gênaient-ils lespoètes juifs dans leurs emprunts ? SelonRatzaby, pas le moins du monde quandils n'y trouvaient rien qui s'opposât aupoint de vue juif. Les poètes juifss'intéressaient à ce qui était dit , non àl'origine ou à la religion de l'auteur. Ainsi,leur arrivait-il d'écrire, quand il s'agissaitde citer des paroles de sagesse arabes : "Un sage a dit " ou bien encore "On a dit"

Ratzaby repère dans ce travail les idéescommunes aux Juifs et aux Arabes. C'estle cas des propos de morale destinés àéduquer ou à enseigner des vertus.

De même apprend-on quels sont lespoètes arabes pour lesquels les maîtresjuifs avaient respect, admiration etconsidération. On rencontre parfois despoèmes hébreux qui ne sont que latraduction fidèle de poèmes ou de chantsarabes connus et populaires. Parfois l'idéeest juive mais l'expression arabe. Et ilarrive qu'un poème d'amour arabedevienne - sans crier gare - sous la plumede Yehouda Halévy, encore lui, chirkodech (un texte saint ). Il arriveégalement qu'à propos du personnagebiblique de Joseph , il y ait pur plagiatentre d'une part Ibn Hasdaï et d'autre partTa'albi. Ibn Ezra et Ibn Gabirols'inspireront de leur côté - à en croireRatzabi - de poètes arabes tels queMoutanabi, Abou Nouass et Abu AlRoumi. Halévy et Ibn Gabirol évoquerontl'un et l'autre à propos de la beautéféminine l'idée de la sorcellerie commel'avait fait, avant eux, Abou Tammam.Mais il est vrai - note Ratzaby - que leprophète Nahoum avait, le premier,invoqué cette comparaison . Et il n'est pasétonnant que ces emprunts, d'un côté etde l'autre, touchent d'abord le domainede l'amour.

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CULTURE

Yehouda Ratzaby Le livre de Ratzaby

Quand Juifs et Arabesparlaient d'une même voix

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voir leur père Jacob en pleurant et ce aprèsqu'ils eurent vendu leur frère Joseph". Lesproverbes en usage dans la sociétéandalouse de l'époque sont repris toutnaturellement par les uns et par les autres : "Trois ne se rassasient pas de trois : l'oreille d'entendre, la terre des pluies

et la femelle de l'homme" .Ou encore :"Trois choses sont inguérissables : lapauvreté coexistant avec la fainéantise, lahaine conséquence de la jalousie et lamaladie qui vient à l'heure de la vieillesse".Ceux qui sont un peu familiers avec lesmaîtres du Talmud reconnaîtront aisémentleur style dans ces formules de sapience.

Un autre texte du Talmud (Sanhédrin17 b) a inspiré les poètes de l'islam : "Onne doit pas habiter une ville où il n'y a pasun bon juge et un médecin". On trouverades paroles identiques chez les uns et lesautres : "Quand tu parles la nuit, baisse lavoix, si c'est le jour, regarde autour de toiavant de parler" ; "Tais-toi, tu auras la paix!

Ratzaby relève que des propos duTalmud se retrouvent presque stricto-sensu, dans des écrits de poètes arabes.C'est le cas d'un texte d'Al Harizi qui secontente de s'inspirer d'une parole dutraité Chabbat à propos des femmes : "tous leur courent après ". Un autre textedu traité talmudique Guittine (70 a) seretrouvera dans un écrit du poète HassanEl Basri : "O homme, mange le tiers de ceque peut contenir ton estomac, bois letiers… et laisse un tiers à la réflexion, aurepos et à la respiration"

A propos des plaisirs de la table, ontrouve chez les uns et chez les autres l'idée-empruntée pour le coup à Hippocrate -qu'il vaut mieux arrêter de manger alorsqu'on a encore un peu faim.

Un bon juge

Comment reconnaître l'ami de l'enne-mi ? Poètes juifs et arabes observentcomme une évidence que la véritableamitié est chose rare. Quant aux larmes,elles ne doivent surtout pas impressionner.Taalabi cite l'épisode biblique que chacunconnaît : " Les frères de Joseph sont venus

Ecoute, tu apprendras !". Et la sagesseandalouse insistait déjà sur le fait qu'onest esclave de la parole que l'on aprononcée tandis qu'on reste maître decelle que l'on a tue. La prudence de lalangue est un des thèmes classiques dansce genre de littérature : Juifs et Arabes

conjugueront à leur façon la parole deSocrate - à moins qu'il ne s'agisse de Platon- selon laquelle l'homme a une langue etdeux oreilles pour qu'il écoute plus qu'ilne parle. Ibn A'bd Rabba reprendra unpropos du psalmiste (Ps. 111) qui affirmeque "le début de toute sagesse est lacrainte de Dieu".

Le signataire doit avouer son énormesurprise de voir que le célébrissime propos(qu'est-ce qu'il m'a fait pleurer, dans monadolescence, celui-là !) d'Abraham IbnEzra qui, pour décrire sa pauvreté etsurtout son manque de baraka (sashkoumoune, quoi), disait notamment ques'il vendait des suaires, plus personne ne

Poètes juifs et arabes ont une haute idée d'eux-mêmes. Ils sont des aristocrates de la pensée.

CULTURE

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riche dans les deux cultures ! Moshé IbnEzra et Abou Nouass en parlent avectalent. Boire ? Oui ! Mais à la conditionque ce soit du bon vin . Et puis il faut éviterde le faire avec des hommes lourds ouvulgaires, chante Abou Elhassine Gbiri.

Autre observation de Ratzabi : poètesjuifs et arabes ont une haute idée d'eux-mêmes. Ils sont des aristocrates de la

mourrait, n'était au total que lareprise d'un vieux proverbe arabecité par Al Midani !

Et quand dans la Bible et dansle Midrach on compare labrièveté de la vie à une ombre quipasse (Ps. 102) pour les maîtresarabes elle est comparée à un rêvedont l'explication est la mort. IbnHasdaï et Ta'alabi diront d'unemême voix que la mort,justement, "est une porte versl'autre monde". Quant auxcimetières, Juifs et Arabesobservent de concert qu'on n'y voitpas la moindre différence entreles tombes des maîtres et cellesdes esclaves.

Et puis il y a la beauté de la nature, lesfleurs, le printemps, la pluie, les étoiles, larose (reine des fleurs selon Moshé IbnEzra, princesse seulement selonElhachmi), et les oiseaux qui chantent, etles nuages qui pleurent…Et, par-dessustout, la beauté des femmes ; Yossef benYehochoua Hacohen d'un côté, Asbahanide l'autre évoquent les 33 repères qui fontla beauté d'une femme. Le vin ? Un thème

pensée. Et de la poésie. ChlomoIbn Gabirol et El Moutanabi - quin'aiment guère la société au seinde laquelle ils vivent - disent sesentir comme des étrangers parmiles ignorants. "Mon âme à moi estun diamant" dit le premier ; "jesuis comme de l'or dans de laterre" chante le second.

La vieillesse, maladieinguérissable? Yehouda Halévyla conjugue à sa façon : "Uncheveu blanc, quand il fut seul surma tête, je l'ai tiré de ma main. Ilm'a répondu : je suis seul et tum'as battu, mais que feras-tuquand je serai suivi de monarmée ?"

Quand on finit de lire (d'étudier seraitplus exact) cette œuvre de 500 pages , onse prend à rêver d'un temps où poètes etphilosophes juifs et arabes se respectaientet n'avaient pour souci que celui decomprendre le monde et d'acquérir lasagesse. Le seul défaut de ce livre est den'être accessible en vérité qu'à ceux quilisent l'hébreu et l'arabe.

V.M

CULTURE

Une page du livre

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LIVRES

ci. Il soupçonne le subterfuge, ce quiconduit le jeune Arabe à se confier. Il avaitcertes connu Leïla quand ils étaient l’unet l’autre étudiants et l’avait accompagnéeà une soirée. Il était parti avant la fin et n’ajamais revu la jeune fille qu’il aurait dumal à reconnaître. La boucle est boucléeet Tareq est libéré de son obsession. Amir,avec l’accord de la mère, endosse l’identitéde Yonatan et expose ses photos commejuif ashkénaze.

On peut lire ce roman comme undocument sur la vie quotidienne desArabes israéliens mais l’intrigue indique,me semble-t-il, une autre dimension. Laséparation entre les deux communautés

Sayed Kashua, est un Israélienarabe qui écrit en hébreu,Auteur de plusieurs romanstraduits en français, il estchroniqueur au quotidienHaaretz. L’intrigue de son

dernier roman, La deuxième personnenous retient par des parcours complexeset inattendus des personnages et par laréflexion sur le rapport entre Juifs et Arabesen Israël. Deux hommes, des Israéliensarabes : Tareq et Amir. Le premier, unavocat recherché surtout par des clientsarabes, exhibe tous les signes de réussite.Il habite dans un beau quartier deJérusalem, essentiellement juif, se déplacedans une grande voiture luxueuse ; safemme Leïla, arabe comme lui, est belle etcultivée. Il est père d’une fille et d’ungarçon.

Le roman abonde en détails sur la viequotidienne des Arabes qui font face à desdiscriminations, des ennuis, des interditset des empêchements dans leur viequotidienne. Tareq a franchi les obstacleset sait qu’il est privilégié. Kashua fait étatnon seulement des conflits entre Arabeset Juifs mais également ceux qui divisentles différentes classes des Arabes.

Tareq cherche à se cultiver. Il achètelivres usagés dont la Sonate à Kreutzer deTolstoï qui appartenait à un certainYonatan. Coup accablant, l’avocat y tombesur un billet d’amour, en arabe, de la mainde sa femme. Sa jalousie est sans bornes.Il est obsédé par la trahison de sa femmeet, ce qui approfondit le mal : son rival estun Arabe. Leïla a beau nier, rien n’y fait,rien ne peut l’arrêter. Il s’évertue àrechercher le coupable et finit par tombersur le deuxième personnage : Amir.

Orphelin d’un père assassiné pourcollaboration, celui-ci est élevé par sa mère,une enseignante qui est forcée de quitterson village. Amir, travailleur social,s’occupe la nuit d’un tétraplégique :Yonatan, un juif ashkénaze. Il découvredans son armoire un appareilphotographique et se met lui-même à fairedes photos. La mère du malade accueillebien Amir et ferme les yeux quand ilemprunte l’identité de son fils pour fairedes études de photo. C’est au moment oùYonatan meurt et est enterré sous le nomd’Amir que Tareq finit par aborder celui-

est étanche. Les Arabes traînent destraditions surannées, désuètes, en dépitdes apparences de modernité qu’ilsempruntent aux Juifs. Ceux-ci les tolèrentavec, parfois, des relents de mépris. Amirentend se rehausser au statut de juif maisne peut le faire qu’en endossant l’identitéd’un cadavre. Et cela ne le dispense pasde se déclarer arabe face à un autre arabe.A l’intérieur des deux communautés, onn’est reconnu que par les siens. On est loindu règne de l’optimisme.

-( La deuxième personne, roman par

Sayed Kashua, traduit de l’hébreu parJean-Luc Allouche, Editions de l’Olivier,Paris 2012, 356 pages )

De la coexistence à JérusalemPAR NAÏM KATTAN

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bourses et surtout à son acharnement,le jeune homme fait de brillantesétudes qu'il met en pratique pouramasser des millions. Il s'installe enCalifornie, épouse Margaret quiappartient à une notable familleprotestante et espère que son filsJulian et sa fille Iris suivront sonexemple. Sa sœur Doris est institutrice.Son mariage avec Leo, qui croit êtreun grand compositeur, ne dure paslongtemps. Elle croit en son destin même si elle est fermée à lamusique.

Le monde de tous ces personnagesest fragile, branlant et ils finissent tous

Romancière et nouvellisteremarquable, CynthiaOzick a décrit dans seslivres, le destin complexeet difficile des juifsaméricains et des

survivants da la Shoah. Dans sondernier roman, Corps étrangers, elleanalyse le déracinement del'immigrant en Amérique comme enEurope. Marvin Nachtigall est le filsd'un immigrant juif qui gagne trèssobrement sa vie dans unequincaillerie qu'il dirige avec safemme à New York. Dans l'attente desclients, il passe des heurs à lire desromans populaires. Grâce à des

dans des échecs, des chutesprofondes. Julian, ne supportant pasl'autorité aveugle de son père, se rendà Paris, se croit poète et gagne sasubsistance comme serveur. Il épouseLili, une rescapée de la guerre. Elleest juive mais ne le dit pas. Iris, sasœur, part à sa recherche. Elle décideelle-même d'échapper au père. Elledevient la compagne d'un escrocaméricain bien plus âgé, qui seprétend médecin et elle devient sonassistante dans sa fausse clinique.Supportant mal l'oppression de sonmari, Margaret délire, est internée etfinit par mourir écrasée par unevoiture.

Le Paris que décrit Ozick estinsupportable. Ainsi le retour desenfants des déracinés à la vieillecivilisation leur révèle qu'ils sont etdemeurent des corps étrangers. Leo,le mari de Doris obtient la célébrité etla richesse comme compositeur demusiques de films. Le rêve américainne fonctionne pour personne et Parisn'est point à la hauteur de sa légende.La forteresse matérielle de Marvins'écroule. Sa fille, choisit la solitude etrentre en Californie pouraccompagner celle de son père. Julianet Lilli choisissent de vivre au Texas,étrangers dans une terre étrangère.Leo compose finalement unesymphonie qu'il envoie à Doris qui nepeut ni la déchiffrer ni l'écouter. Sonrêve est intact, dans une ultimeillusion.

Tous les personnages de ce romansont juifs à l'exception de Margaret.La romancière ne fait que l'indiquer.

Le roman de Cynthia Ozick sedéroule dans un rythme haletant,empoignant le lecteur qui se demandeoù conduit cette fermeture hautementpessimiste de l'Amérique et del'Europe. La seule lueur serait sansdoute de l'exposer, de la décrire dansune œuvre d'art, fût-elle en partierêvée.

Naïm Kattan(Corps étrangers, roman par Cynthia

Ozick, traduit de l'anglais par AgnèsDesarthe, Editions de l'Olivier, Paris2012, 306 pages)

Les perpétuels étrangers

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seulement une brillante actrice, maisaussi une réalisatrice qui compte.

Tout d'abord, en délaissant avecintelligence les données purementfantastiques du scénario (qui ne sont iciqu'un moyen et nullement une fin),Noémie Lvovsky entend constammentprivilégier l'émotion et crée une œuvrequi est dans la parfaite continuité de sesprécédents films.

Ensuite, l'une des idée les plussavoureuses du film vient du fait queCamille conserve son apparence d'adultelorsqu'elle est projetée dans le temps, cequi nous donne des séquencesjubilatoires, avec une Noémie Lvovskytout à la fois adolescente et femme mûre.

Enfin, fidèle à ses thèmes deprédilection et à son universcinématographique (entre cinémad'auteur et cinéma grand public), laréalisatrice dirige un casting de hautevolée, dans lequel on croise nombred'excellents acteurs comme MathieuAmalric, Denis Podalydès, Jean-PierreLéaud et Samir Guesmi, qui interprèteavec justesse le rôle d'Eric, le futur ex-mari de Camille.

Primé au Festival de Cannesaprès avoir été sélectionné àla Quinzaine des réalisa-teurs, le nouveau film deNoémie Lvovsky s'avère êtreun concentré d'humour, de

fantaisie et d'émotion qu'il serait vraimentdommage de rater en cette rentrée deseptembre.

En effet, en décidant de réaliser uneœuvre dans la lignée de Peggy Sue s'estmariée (petit chef-d'œuvre de Coppolasorti en 1986), Noémie Lvovsky ne s'estpas contentée d'un agréable exercicecinéphilique mais a réussi la prouessede concocter un petit bijou de comédie douce-amère, qui se situerait à la frontière entre le cinéma d'Arnaud Desplechin et celui de RobertZemeckis !

Reconnaissons toutefois que le sujetde départ était particulièrement risqué,puisque la classe que Camille redoubleen 1985, c'est 25 ans après que la jeunequadra y retourne, alors même qu'ellevient de rompre de façon brutale avec lepère de sa fille, qu'elle avait connu aucollège et qu'elle croyait être l'homme desa vie.

A l'image d'un Retour vers le futur,Camille Vaillant est ainsi une femmedélaissée, dépressive et quelque peualcoolique, qui se retrouve projetée, aprèsune soirée de réveillon très arrosée, dansle corps de l'adolescente qu'elle était à16 ans, et de retour auprès de ses parents(interprétés avec justesse par MichelWuillermoz et la géniale YolandeMoreau).

Dès lors, sous ses aspects de comédiesympathique et transgénérationnelle, cecinquième long métrage de la réalisatricede La vie ne me fait pas peur (sonpremier film, sorti en 1999, qui abordaitdéjà le thème de la fin de l'adolescence),parvient à éviter tous les clichés que l'onpouvait craindre et démontre, plus quejamais, que Noémie Lvovsky est non

Outre la scène d'ouverture, qui donneau film son tempo et peut faire penserà l'audace d'un Almodovar par son côtéaussi décalé que réussi, une autre scènese révèle marquante, celle où Camilleenregistre avec un magnétophone lavoix de sa mère, puis celle de ses deuxparents, qui chantent ensemble " Unepetite cantate " de Barbara.

En effet, alors que Camille sait que samère mourra quelques jours plus tardd'une rupture d'anévrisme, cette idée demise en scène démontre que loin detoute nostalgie outrancière, ce film nousparle avant tout de la perte et de la façond'y faire face, la morale de l'histoire étantselon Noémie Lvovsky que " les chosesde la vie sont mouvantes, aléatoires etpérissables… et c'est une bonnenouvelle".

Au moyen d'une mise en scène subtileet efficace, qui fait ressortir au mieuxdes sentiments poignants et universels,Noémie Lvovsky nous offre donc ici une ballade sentimentale quis'apparente à un bilan existentiel, voiremétaphysique.

Florence Seyvos (qui l'accompagnedepuis quinze ans et la sortie de leurpremière œuvre, Petites) dira ainsi quele synopsis s'interroge sur " ce noyauirréductible qui survit chez l'adulte qu'ondevient ", le prénom de l'héroïne n'ayantd'ailleurs pas été choisi au hasardpuisqu'il fait référence à la Camille deMusset dans " On ne badine pas avecl'amour ", un texte dans lequel, à forcede rechercher l'amour absolu, Camillefinit par passer à côté de l'homme qu'elleaime.

Après avoir été nommée cinq fois auxCésars, au titre de meilleur second rôleféminin, nul doute que Noémie Lvovskya donc réussi sa rentrée en parvenant ànous faire rire et réfléchir sur des thèmesaussi forts que le passage à l'âge adulte,la difficulté de vieillir et les affres del'amour.

Une rentrée réussiepour Noémie Lvovsky

PAR ELIE KORCHIA

CINÉMA

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50 INFORMATION JUIVE Septembre 2012

MYRIAM REVAULT D'ALLONES.Philosophe :" La question essentielle de l'éducation estde permettre aux nouvelles générationsd'innover à l'intérieur du monde ancien "

ANDRÉ BERCOFF. Ecrivain :" Il y a trente ans, on n'avait pas le droitd'être anticommuniste, au nom du ' on nedoit pas désespérer Billancourt ' ;aujourd'hui, on n'a pas le droit de dénoncerl'islamisme - qui n'a rien à voir avec lapratique de l'islam - au nom du 'on ne doitpas désespérer le 9-3' "

ALAIN MINC. Economiste : " La croissance c'est un esprit, c'est unemanière d'être, c'est une volonté. C'est vivredans un pays où l'air est électrique "

ALBERT JACQUARD.Généticien :" Pendant la guerre, ma famille était dansle déni. " Juif ", je ne savais même pas ceque signifiait ce mot "

ERRI DE LUCA. Ecrivain :" Le peuple juif me fascine par sa résistanceà l'effacement et à l'assimilation "

STÉPHANE DENIS.Chroniqueur :" Les hommes de droite restent peu dansle souvenir ; ceux de gauche demeurentdans la légende "

ALAIN JUPPÉ. Ancien Premier ministre :" M. Mélenchon entretient des affinitéssulfureuses avec des personnalités qui sedisent antisémites "

YEMINI BEN DROR. Editorialiste au quotidienisraélien Maariv :" Abraham Burg aime Israël comme unhomme aime sa femme et la frappe "

FRANÇOIS BOUSQUET. Chroniqueur à ValeursActuelles :" A bien y réfléchir, notre vie ressemble àune addition d'interdits…Cela fait songerau mot de Churchill : 'En Angleterre, toutest permis, sauf ce qui est interdit. En

VERBATIM

VALÉRIE TRIERWEILER. Journaliste :

" Il est des époques où naître juif est un combat "

NécrologieRoger Saïd

Mon frère, Me Roger Saïd, est décédé le 6 août 2012 à l'âge

de 84 ans, et a été inhumé le 9 août au cimetière d'Antony.Une longue maladie "orpheline" l'avait progressivement privéde la capacité de se mouvoir mais pas de la lucidité d'espritdont il a fait preuve toute sa vie.

Il fut élu président du Consistoire d'Algérie à l'unanimité desmembres réunis le 7 mars 1970 à Alger. Cette fonction,plus qu'un honneur, comportait la lourde charge de résoudre,outre les problèmes internes, une multitude de difficultésliées aux conjonctures propres à l'Algérie.

Avocat à Blida, marié, père de deux filles élevées en Algériecomme le furent mes enfants, il réussissait à assumer avecefficacité et générosité les différents aspects de sa vie. Notreproximité, notre cohésion familiale l'aidaient à faire face auxmultiples obligations de ses fonctions.

Impliquée de plus en plus dans la nécessité de maintenir unsemblant d'équilibre au sein de la communauté juive d'Algérieen déclin progressif, je lui ai apporté mon soutien tant qu'ila pu conserver son rôle de timonier, avant de tenter de gérerseule des problèmes encore en suspens.

Line Meller-Saïd

Allemagne, tout est interdit sauf ce qui estpermis. En URSS, tout est interdit, mêmece qui est permis' "

WOODY ALLEN. Cinéaste (à propos du racismeet de l'antisémitisme aux Etats-Unis) :"C'est une maladie contre laquellepersonne n'a encore découvert detraitement. L'être humain a autant besoinde haïr que d'aimer et, en temps de crise,les boucs émissaires calment lesfrustrations. S'il n'y avait plus de Juifs, deNoirs ou d'Arabes, on se déchaîneraitcontre un autre peuple",

RICHARD GUÉDON. Docteur en médecine (dans unarticle intitulé "Il ne faut pasinterdire la circoncision". LeMonde 29 août 2012) :" C'est comme si on remettait en questionla pratique du carême, de la cachrout oudu ramadan pour des raisonsnutritionnelles "

CARNET

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