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Mise au point : La Mesure de Fonction Motrice 2 - avril 2010 Les cahiers de myologie

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La Mesurede FonctionMotrice

N° 2 - avril 2010

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Les cahiers demyologie

N° 2 AVRIL 2010

COMITÉ ÉDITORIAL Jean-Christophe AntoineJulie AudrenGuillaume BassezGisèle BonneSerge BraunGillian Butler-BrowneFrançoise ChaponJamel ChellyBernard ClairJean-Marie CuissetIsabelle DesguerreChristian DevauxBrigitte EstournetBruno EymardLéonard FéassonXavier FerrerMarcela GargiuloRomain GherardiFrédéric GottrandJean-Yves HogrelJean-Claude KaplanNathalie KoulmannMartin KrahnLeïla LazaroFrance LeturcqJoël LunardiJudith MelkiNadine PellegriniIsabelle Pénisson-BesnierYann PéréonJean PougetPascale RichardHélène RivièreNorma RomeroEmmanuelle Uro-CosteJean-Thomas VilquinLouis ViolletKarim Wahbi

Rédaction

Directeurs de publicationLaurence Tiennot-HermentClaude Desnuelle

Directeurs de la rédactionMichel FardeauJ. Andoni Urtizberea

Rédactrices en chefTuy Nga BrignolEdwige Biard

DocumentationNathalie Russo

Réseaux des correspondants

Algérie : Meriem Tazir

Belgique : Peter Van den Bergh

Canada : Jean-Pierre Bouchard

Liban : André Mégarbané

Maroc : Ilham Slassi

Suisse : Thierry Kuntzer

Tunisie : Fayçal Hentati

Correspondance

SFMCentre de référenceMaladies Neuromusculaires(Professeur Desnuelle)Hôpital ArchetCHU de Nice - BP 307906202 Nice cedex [email protected]

AFM1, rue de l’Internationale - BP 5991002 Evry [email protected]

Siège socialInstitut de Myologie47-83, boulevard de l’Hôpital75651 Paris cedex 13

ConceptionSequoia (Makheia Group)

Mise en pageImpression Kremlin-Lino01 46 63 18 36

Parution3 numéros/anPrix du numéro : 18 €ISSN 2108-2219

Mise au point :

La Mesurede FonctionMotrice

N° 2 - avril 2010

Les cahiers demyologie

Représentation de la structuretridimensionnelle de la calpaïne 3(H. Sorimachi)

Les recommandations aux auteurs sont consultables sur le site internet de la Société Française de Myologiewww.sfmyologie.org

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Les VIIes Journées Annuelles de la Société Française deMyologie (SFM) se sont tenues à Hendaye, en octobredernier avec pour thème « calpaïnes et calpaïnopa-

thies ». En 2006, pour commémorer l’anniversaire des 200ans de la naissance de Duchenne de Boulogne, la SociétéFrançaise de Myologie avait organisé ses Journées Annuel-les à Boulogne-sur-Mer. Ce fut tout naturellement l’occasionde faire un point d’actualité sur les dystrophinopathies.A Hendaye, le thème retenu « calpaïnes et calpaïnopathie »coulait de source. En effet, le Pays Basque représente unisolat génétique de cette myopathie observé égalementdans d’autres zones comme l’Ile de la Réunion ou parmi lescommunautés Amish d’Amérique du Nord,mais dont l’accès est moins facile.Outre la douceur du climat ence mois d’octobre 2009, lasuperbe plage dominée parla montagne de la Rhune, lepetit port à l’embouchure de laBidassoa, l’Espagne à un jetde pierres et la convivialitétoujours retrouvée de cesréunions, l’intérêt scientifiquen’était pas des moindres.Le concept de myopathie desceintures (LGMD) est apparudans la littérature dans lesannées 1950. Décrite pour lapremière fois en 1884, la dys-trophie musculaire des ceintu-res de type « Erb » ou calpaïnopathie(LGMD2A), de transmission autosomique récessive,a été localisée sur le chromosome 15 (15q15.1-q15.3) en1991. Le gène en cause CAPN3 a été identifié en 1995.Il code la calpaïne 3, enzyme protéolytique du muscle squelet-tique. Sur le plan moléculaire, cette myopathie se distinguedes autres dystrophies musculaires de même type, car lacalpaïne 3 n’est pas une protéine de structure comme c’estgénéralement le cas. Il s’agit d’une protéase non lysosomale,capable de cliver (au niveau des acides aminés de typecystéine) les protéines en multiples polypeptides. Elle pos-sède également une forte affinité pour la titine, une protéinestabilisatrice de l’actine dans la structure du sarcomère.La tendance générale est de se représenter le musclesquelettique comme « figé » dans sa structure striée.Cependant, la prise en compte de l’approche fonctionnelle

de la calpaïne 3 mène à une vision dynamique de son organisa-tion structurelle. En effet, la calpaïne 3 ayant une demi-vie trèscourte (de l’ordre de 20 minutes) intervient dans un remodelagepermanent de la strie Z. Selon le type de mutation affectant le gène codant la calpaïne 3,l’effet fonctionnel n’est pas le même : réduction de l’action pro-téolytique, réduction des capacités d’autolyse ou encore réduc-tion de l’affinité pour la titine. Plus de 150 mutations différentesont été décrites à ce jour, 70 % sont dites privées c’est-à-dire neconcernant qu’une seule famille ou individu. Il s’agit le plus sou-vent de la modification d’une seule paire de bases entraînantune mutation non-sens avec production d’une protéine tron-

quée. L’exon 21 est une région génique particulièrementtouchée par ce type de mutation. Quant aux

mutations ponctuelles ou aux mutationsde type délétion ou insertion, ellesconcernent surtout les exons 15, 17 et 22. Il n’y a pas réellement de relationphénotype/génotype. La maladie peutparfois être découverte à l’occasion del’exploration d’une simple hyperCKé-mie. Ailleurs le phénotype peut donnerle change avec une dystrophie muscu-laire facio-scapulo-humérale (FSH),mais l’atteinte pelvienne est plusmarquée voire franchement scapulo-péronière, associée à une atteinte dutronc ou encore à des rétractionstendineuses.

Si l’étude des calpaïnopathies apporteun peu plus d’éléments pour appréhender la

physiologie du muscle, la physiopathologie de cettemaladie reste encore insuffisamment comprise. Au demeurant,l’espoir thérapeutique pourrait venir des nouvelles thérapeuti-ques facilitatrices de la translation des ARN messagers(ARNm) susceptibles de corriger la lecture des mutations non-sens et de ce fait, efficientes quelle que soit la physiopathologie.Les avancées en myologie sont rapides. Nul doute qu’auxprochaines Journées de la Société Française de Myologie, les24 et 25 novembre prochains à Nice, le thème « dystrophiemusculaire facio-scapulo-humérale (FSH) » nous réserveraaussi des surprises !

Claude DesnuellePrésident de la Société Française de Myologie

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LU POUR VOUS/LITERATURE REVIEW35-36 Préclinique/Preclinical Research

Jean-Thomas Vilquin37-38 Thérapeutique/Therapeutics

Leïla Lazaro, Norma Romero39-40 Génétique/Genetics

Gisèle Bonne, Valérie Allamand41-42 Psychologies/Psychology

Christian Réveillère

MYOLOGIE DANS LE MONDE/MYOLOGY AROUND THE WORLD

43-44 MyoSuisse, un réseau de spécialistes etd'organisations dédiés aux MNMMyoSuisse, a network of specialists andorganizations dedicated to NMDThierry Kuntzer

PARTENARIATS/PARTNERSHIPS45 TREAT-NMD, Conférence Internationale en

collaboration avec le NIHTREAT-NMD, the International Conference inpartnership with the NIHFrançoise Rouault

CLIN D’ŒIL/AT A GLANCE46 Le point de vue du "dinosaure"

Génomique et Médecine : l'heure du bilanThe point of view of a "dinosaurus" Genomics and Medecine : the time of assessment Jean-Claude Kaplan

INFOS/NEWS47 Le premier Plan National Maladies Rares

est mort... Vive le deuxième !The first National Rare Diseases Plan is dead...Long live the second one !Jean Pouget

LA PAGE DE LA SFM/SFM NEWS48 Prix Master de la SFM

The SFM Master PriceClaude Desnuelle

LA PAGE DE L’AFM/AFM NEWS49 L'AFM et les consultations collaborent

AFM and specialized neuromuscular clinics worktogetherSylvie Marion

50 COURRIER/READERS’ LETTERS

51 AGENDA/FORTHCOMING MEETINGS

3 ÉDITORIAL

4 SOMMAIRE/CONTENTS

HISTORIQUE/HISTORICAL NOTES5-10 Une contribution à l'histoire de la découverte

des calpaïnopathiesHistorical notes on the discovery of calpainopathiesMichel Fardeau, Jacques S. Beckmann, Hiroyuki Sorimachi,Andoni Urtizberea

PHYSIOLOGIE/PHYSIOLOGY11-13 Le muscle endocrine

The endocrine muscleSébastien Banzet, Nathalie Koulmann

CAS CLINIQUES/CASE REPORTS14-15 Déficit en thymidine kinase de type 2 :

un diagnostic à évoquer aussi chez l'adulteTK2 deficiency : a diagnosis to think of in adults tooAntony Béhin, Claude Jardel, Kristl Claeys, Norma Romero,Bruno Eymard, Anne Lombès

16-17 Amyotrophie spinale : une cause d'hypomobilitéfœtale pouvant être trompeuseSpinal muscular atrophy : a misleading causeof fetal hypomobility Isabelle Desguerre, Marjolaine Wilhems, Itxaso Marty

PRISE EN CHARGE/MANAGEMENT18-19 Grippe A [H1N1], la vaccination chez les

patients neuromusculairesSwine flu immunization in neuromuscular patientsGroupe d'experts MNM et infection pandémique

20-21 Le positionnement en fauteuil roulant : unedynamique complexeWheelchair positioning : a complex dynamicsElise Dupitier

22-23 Dystrophie myotonique de Steinert (DM1) : lafatigue, plainte principale Fatigue is a main complaint in MyotonicDystrophy type 1 (DM1)Benjamin Gallais

FICHE PRATIQUE/SHORT CLINICAL GUIDELINES24-25 Accès de paralysie périodique : orientation

diagnostique Bouts of Periodic Paralysis : diagnostic flowchartSavine Vicart

MISE AU POINT/REVIEW26-34 La Mesure de Fonction Motrice, une échelle

validée pour les MNMThe Motor Function Measure, a validated scale forneuromuscular diseasesCarole Bérard, Carole Vuillerot, Françoise Girardot,Dalil Hamroun, Christine Payan

SOMMAIRE N° 2 - avril 2010 CONTENTS Number 2 - April 2010

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HISTORIQUE

Une contribution à l’histoirede la découverte des calpaïnopathies

MICHEL FARDEAU, JACQUES S. BECKMANN, HIROYUKI SORIMACHI, J. ANDONI URTIZBEREA

« Histoire » est sans doute un bien grand mot. Il s’agit ici, plus simplement des témoignagesde quatre des principaux acteurs de cette découverte. La dernière réunion annuelle dela Société Française de Myologie les avait réunis à Hendaye. Il a donc semblé opportunde recueillir leurs témoignages dans la genèse d’une découverte qui a profondémentmarqué l’histoire des dystrophies musculaires des ceintures et par là-même l’histoiredes myopathies héréditaires humaines.

l’île, à l’hôpital de Saint-Pierre, accueilli par ledocteur Claude Mignard. Le choc fut grand lorsquecelle-ci m’amena à la consultation de son service,où m’attendaient une quinzaine de patients. L’ana-lyse clinique immédiate permettait de penser qu’ilsétaient tous atteints de dystrophie des ceinturesdans sa forme classique, décrite initialement parW. Erb un siècle plus tôt (1884) et individualiséequelques décennies plus tard par J. N. Walton et F. J.Nattrass dans un papier classique de Brain (1954).Malgré la qualité de sa description, cette entitéconnut par la suite bien des vicissitudes, sans douteen raison de sa relative rareté, de l’absence d’uneformule histologique particulière (en témoignait lavariété des lésions rencontrées dans les biopsiespratiquées chez ces patients) et de la facilité exces-sive avec laquelle ce diagnostic était porté. Si bienque certains cliniciens, parmi les plus rigoureux,ne voulaient même plus entendre parler de cediagnostic qu’ils trouvaient trop imprécis et facteurde confusion (Brooke).Ce n’était cependant pas mon opinion, car j’avaissuivi dans ma consultation parisienne quelquespatients généralement jeunes, pour lesquels, aprèsexamens clinique et histologique approfondis, jen’avais pas d’autre diagnostic possible que celui dedystrophie des ceintures. Mais ce n’était là quequelques patients isolés et ma grande surpriseétait de trouver réunies, en cette fin d’après-midi, unensemble de personnes qui apparemment seconnaissaient et dont la sémiologie était de ce type.Je leur demandais la permission de prendre unephoto, pour moi historique, de leur groupe danscette salle d’attente.Les données cliniques de ces patients étaientremarquablement homogènes : une grande sélecti-vité d’atteinte des muscles des épaules, des bras, dutronc et des membres inférieurs ; un respect duvisage, des muscles oculomoteurs et vélo-pharyn-

Dystrophie des ceintures à La RéunionM. FardeauTout a commencé un matin d’octobre 1986 parl’irruption, dans le couloir de l’Unité de RechercheInserm que je dirigeais alors rue du Fer à Moulin, dedeux personnes appartenant à l’Association Réu-nionnaise de lutte contre les Myopathies. Elles medemandèrent de façon pressante de venir dans leurîle examiner des patients atteints de myopathie et enparticulier la troisième sœur de l’un d’entre eux,l’une étant déjà morte et l’autre étant en phaseterminale et hospitalisée. Quelques semaines plustard, j’étais dans l’avion pour Saint-Denis de LaRéunion et accueilli par cette famille.

Le diagnostic exact de la forme de myopathie queprésentaient ces jeunes femmes, appartenant à lacommunauté musulmane, ne viendra que quelquesannées plus tard avec la découverte des gènesresponsables des sarcoglycanopathies (dontl’analyse avait été entreprise en collaboration avecM. Ben Hamida et son équipe de l’Institut deNeurologie de Tunis). Mais les collègues réunionnaissouhaitaient profiter de ma présence pour memontrer les nombreux autres cas de myopathiequ’ils suivaient. C’est ainsi que je me suis retrouvé,quelques jours après mon arrivée, dans le sud de

Michel Fardeau Professeur honoraire auCNAMFondateur de la SociétéFrançaise de [email protected] S. BeckmannDépartement deGénétique Médicale,CHUV, Lausanne, [email protected] SorimachiCalpain project,Tokyo MetropolitanInstitute of MedicalScience (Rinshoken),Tokyo, [email protected]. Andoni Urtizberea Praticien Hospitalier, MPRA.P.H.P. Hôpital Marinde Hendaye, [email protected]

1987, à l’île de La Réunion

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gés ; une absence de toute hypertrophie ; la pré-sence de rétractions modérées, en particulier achil-léennes ; un déficit modéré de la fonction respira-toire et une intégrité de la fonction cardiaque.Ces personnes n’avaient pas été longuementscolarisées, mais leur développement intellectuelapparaissait tout à fait satisfaisant. Leur faiblessemusculaire s’était manifestée initialement vers l’âgede 10 ans en moyenne et avait progressé régulière-ment, plusieurs personnes ayant perdu la marcheautour de vingt ans se trouvaient en fauteuil roulant :une évolution conforme à la description proposéepar J.N. Walton en 1954.Dresser leurs arbres généalogiques ne fut pas aisé,car les mêmes patronymes se retrouvaient trèssouvent chez leurs ascendants et il existait à l’évi-dence entre ces personnes une forte consanguinitéà chaque génération. Toutes appartenaient à lacommunauté dite des « Petits Blancs des Hauts »,initialement composée de personnes qui, en raisondes modalités de transmission et de division desterres familiales, avaient été confinées dans lesrégions accidentées sur les pentes montagneusesde l’île. Ces personnes avaient, dit-on, aussi sou-haité se soustraire à la loi de 1848 sur l’abolition del’esclavage. Elles avaient cherché à reproduire, surles pentes des montagnes de l’île, les modes de vieet de propriété qu’elles avaient connus le long dela Côte Océane. Mais cette tentative fut un échecéconomique. Elles vécurent dans des conditionsprécaires, quelquefois misérables, se marièrententre elles (fratries souvent très nombreuses). Enremontant la généalogie de ces familles, il paraissaitmême possible qu’elles aient toutes un ancêtrecommun, un certain Antoine Payet, lequel avaitdébarqué dans l’île en 1647.Cinq personnes acceptèrent une biopsie de leurmuscle deltoïde. Les lésions étaient celles d’unedystrophie musculaire, sans grande particularité

morphologique, mais étudiées à des stades diffé-rents de la maladie, elles permettaient de dessinerà grands traits l’évolution histologique de cettedystrophie. Pour prendre date, un abstract fut rédigépour le Congrès International de Neurologie qui setint à New Delhi (Fardeau et al, 1989). L’analysedétaillée de ces familles ne sera publiée quequelques années plus tard dans la revue Brain,après obtention de la solution génétique de cetteénigme (Fardeau et al, 1996).

Initiation des études de génétique moléculaireJ.S. Beckmann, M. FardeauToutes ces données plaidaient en faveur du lance-ment rapide d’une étude de liaison génétique.Les outils pour de telles analyses étaient en pleinessor. De nouveaux marqueurs, de type RLP, étaientdécrits régulièrement. La carte génétique s’étoffait.Mais pour cela, il fallait d’abord collecter les ADN.La chance voulait qu’une collègue, DominiqueHillaire, ingénieur de recherche à l’Inserm, vienned’obtenir sa mutation au Centre Départemental deTransfusion Sanguine (CDTS) de St-Denis de LaRéunion avec pour mission l’étude de la pathologiehéréditaire propre à cette île. Aussitôt contactée, ellese dit très motivée pour aborder ce nouveau travail.Elle constitua rapidement un premier registre despersonnes atteintes. Avec l’aide du Cercle généalo-gique de Bourbon (Mme Thazard), elle reconstituales généalogies sur treize générations (soitjusqu’aux premiers arrivants). Aidée par le réseaude bénévoles qu’elle avait créé, elle collecta lesprélèvements sanguins des personnes atteintes etde leurs proches vivant dans les petits bourgsdispersés autour de Saint-Pierre et sur les flancs dela Fournaise : le Tampon, Petite Ile, l’Entre-Deux…

Il fallait souvent se fier à de simples indicationsorales pour découvrir l’emplacement exact dudomicile de ces personnes… L’ADN et les cultures

Découverte à La Réunion d’un groupe de patients atteints d’une dystrophiemusculaire de type Erb

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cellulaires de cette première collecte furent prépa-rés dans le petit laboratoire installé par D. Hillaire auCDTS. Malheureusement, une rupture d’approvi-sionnement en azote liquide provoqua la perte de cematériel. La période des cyclones passée, il fallut,l’année suivante, reprendre la collecte. Grâce àla mobilisation des familles et des bénévoles, ausoutien du service de neurologie de l’hôpital deSaint-Pierre (dirigé par le docteur Claude Mignard),la quasi totalité des prélèvements furent collectésen une journée. Cette fois, le matériel recueilli futconvoyé en métropole « sous bonne escorte ».Des contacts informels avaient été pris par D.Hillaire et M. Fardeau avec l’équipe de génétiquemoléculaire animée par Daniel Cohen au Centred’Etude du Polymorphisme Humain (CEPH). Celui-cien parla à ses collaboratrices qui elles-mêmes endirent quelques mots à un généticien moléculairenouvellement arrivé au CEPH, Jacques S. Beck-mann, venu se familiariser avec les techniques degénétique statistique auprès de Marc Lathrop.Jacques S. Beckmann souhaitait ardemment s’en-gager dans un travail personnel. Le hasard fit qu’ense rendant au Brésil à Belo Horizonte pour uneconférence, il soit tombé sur un article de la pressegrand public parlant d’un projet « Génome », où étaitévoqué le problème des dystrophies des ceintures.Il put rapidement remonter le fil jusqu’à deuxcollègues brésiliennes, Mayana Zatz et Maria-RitaPassos-Bueno en charge de cette étude. Maria-RitaPassos-Bueno devait ensuite rejoindre Jacques S.Beckmann au CEPH. Rendez-vous était donc prisavec l’équipe de Jean Dausset et Daniel Cohen auCEPH situé à l’Hôpital Saint-Louis. Etaient présents,autour de Daniel Cohen et de ses collaboratrices,Odile Broux et Isabelle Richard, Jacques S. Beck-mann et Maria Rita Passos-Bueno, DominiqueHillaire et Michel Fardeau. Devant l’importance dumatériel recueilli à l’île de La Réunion et la trèsprobable consanguinité existant entre ces familles,l’affaire fut vite conclue et le travail entrepris parl’équipe de Jacques S. Beckmann. L’étude de cartographie fut lancée sur les famillesréunionnaises et quelques familles brésiliennes àl’aide de marqueurs RFLP, visualisés par SouthernBlot : travail lent et fastidieux. Jacques S. Beckmannbénéficiait dans cette tâche d’un secours apprécia-ble : un coaching patient et généreux de HowardCann. A la 40e sonde utilisée, D15S25, le résultatescompté arriva : des plages d’homozygotie étaientdétectées sur le chromosome 15 (pour lequel unlodscore de 5,52 était obtenu). Le gène de ladystrophie des ceintures réunionnaise était localisé !Certaines familles brésiliennes confirmaient cette

localisation, d’autres non : premier témoignage del’hétérogénéité du concept de « dystrophie desceintures ». Le résultat fut publié à la demandeexpresse de Daniel Cohen et de Jean Dausset, dansles Comptes-Rendus de l’Académie des Sciences(Beckmann et al).Fort de ce premier succès, Jacques S. Beckmannétait entré en contact avec quelques uns de sescollègues américains. Avec l’équipe de MargaretPericak-Vance, ils démontrèrent que les famillesaméricaines présentées comme « dystrophie desceintures » à transmission autosomique dominanten’impliquaient pas le même gène. Ensuite unecollaboration fut lancée avec Mike Conneally, quitravaillait sur un autre foyer de dystrophie desceintures, initialement décrit dans les annéessoixante par les généticiens de Detroit autour de C.E.Jackson (Jackson et Carey; Jackson et Strehler)dans la communauté Amish de l’Etat d’Indiana. Avec l’aide de Jay Tischfield, autre généticiend’Indianapolis, les ADN de ces familles furentapportés au Généthon, où l’équipe de Jacques S.Beckmann venait de s’installer, et passés au crible dugénotypage. On était passé cette fois des RFLP auxmicrosatellites, plus faciles à automatiser et plusinformatifs : la localisation sur le chromosome 15 futconfirmée pour la plupart mais, résultat inattendu,pas pour toutes les familles Amish étudiées.Craignant une erreur humaine dans le traitementdes échantillons, Valérie Allamand, une étudianteen thèse qui avait rejoint l’équipe de Jacques S.Beckmann en 1992, fut envoyée deux mois dans lelaboratoire de Jay Tischfield, afin de génotyper denouveaux échantillons d’ADN de ces patients et dedémêler ainsi cet imbroglio. Elle y vérifia égalementles arbres généalogiques et confirma les résultatsinitiaux : les familles Amish du Nord et du Sud del’Indiana n’étaient pas atteintes de la même patholo-gie. Celles du Sud ne pouvaient donc pas contribuer àl’identification de ce gène et posaient en même tempsun nouveau problème : celui d’une autre localisationet identification à poursuivre.La suite des évènements doit être resituée dans lecontexte scientifique de l’époque. Le programme« génome humain » venait de prendre un nouvelenvol, en grande partie grâce à l’équipe de JeanWeissenbach. Celui-ci prit le monde entier parsurprise en établissant, au laboratoire Généthon, lapremière carte génétique détaillée du génomehumain.La localisation sur le chromosome 15 tombait en faitau milieu d’une sorte de désert, c'est-à-dire quepratiquement aucun autre gène ou presque n’avaitencore été localisé dans cette zone. Il fallut donc

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entreprendre une étude très exigeante et très fasti-dieuse de clonage positionnel dans cet intervalle. Ilfallait aussi tenter d’augmenter le matériel clinique,en s’assurant de son homogénéité clinique et généti-que. C’est dans ce sens que, guidés par Gene Jack-son, M. Fardeau et F. Tomé se rendirent dans le Nordde l’Etat d’Indiana dans la communauté Amish dite« du Vieil ordre ». Il s’agissait de confirmer qu’il n’yavait aucune différence clinique entre ces patientsAmish et ceux qui avaient été repérés à l’île de LaRéunion. Ceci était exact, mais seulement pour lapartie de la communauté située dans le Nord de l’Etatd’Indiana. En effet dans le Sud du même Etat, d’autrespatients, appartenant aussi à la communauté Amish,avaient un tableau clinique un peu différent avec enparticulier une macroglossie et des gros mollets.

Ces familles devaient être identifiées comme nonliées au chromosome 15. Grâce à une collaborationastucieuse avec Kevin Campbell, elles furent locali-sées sur le chromosome 4 et se révélèrent porteusesde mutations dans le gène de la bêta-sarcoglycane. Ilest tout à fait remarquable que deux gènes différents,ayant une expression neuromusculaire aussi voisine,aient pu être détectés dans une communauté Amishaussi fortement consanguine.

Découverte du gène de la calpaïne 3J. S. Beckmann, H. SorimachiLes outils de cartographie génétique, physique etgénique de l’époque étaient rudimentaires. Il fallaitdonc les inventer et les créer tout en avançant. Nousavions certes un accès privilégié à la banque demicrosatellites développée par Jean Weissenbach etson équipe, mais nous devions générer parallèle-

ment la cartographie de la région chromosomiqueconcernée. Quelques cinquante années-personnesfurent ainsi requises pour ce travail, avec la partici-pation importante d’Isabelle Richard, Françoise Fou-gerousse, Valérie Allamand, Nuchanard Chiannilkul-chai, Anete Pereira de Souza et Charles Auffray.L’analyse des déséquilibres de liaison suggérait unelocalisation du gène de la dystrophie des ceinturesdans la partie proximale de l’intervalle incriminé,permettant la restriction de celui-ci de 4 à 1,6 méga-base. Mais c’était encore énorme ! Nous sommesalors partis du postulat que le gène en questiondevait s’exprimer dans le tissu musculaire. Ainsiles 17 gènes identifiés dans cette zone, par N.Chiannilkulchai, furent tous caractérisés pour leurspécificité d’expression, avec un intérêt évident pourceux qui s’exprimaient essentiellement dans le tissumusculaire squelettique (Chiannilkulchai et al).Deux étaient en tête de liste : l’un était inconnu,l’autre codait une protéase, la calpaïne 3 ouCAPN3 découverte six ans plus tôt par HiroyukiSorimachi dans le laboratoire de K. Suzuki, à Tokyo(Sorimachi et al).Il fut décidé d’examiner le gène de la calpaïne 3(CAPN3) en premier. La recherche de mutationsdans ce gène s’avéra heureusement positive : surl’ensemble des patients étudiés, 15 mutationsdifférentes furent identifiées. Parmi les patients del’île de La Réunion, il n’y avait pas qu’une seulemutation mais six mutations différentes (Richard etal, 1995), ce fut la première surprise. La deuxième,peut-être encore plus remarquable, touchait à lanature de la protéine codée, une enzyme de typeprotéase dont l’absence s’avérait pathogène.En janvier 1996, à l’occasion d’un voyage à Tokyo,J. S. Beckmann sera amené à partager confidentiel-lement cette découverte avec H. Sorimachi et K.Suzuki. Cette conversation sera à nouveau détermi-nante dans la relation de confiance et d’amitié quis’établira entre tous les acteurs de cette entreprise.Des échanges de chercheurs interviendront entre lesdeux équipes. C’est ensemble qu’ils modélisèrent ettestèrent l’impact de plusieurs mutations faux-senssur l’activité protéolytique de la calpaïne 3.Par ailleurs, deux équipes, l’une canadienne etl’autre japonaise (celle de H. Sorimachi), purentmodéliser la structure tridimensionnelle de laprotéase (cf : la figure en couverture du numéro).Hiroyuki Sorimachi et ses collaborateurs ont ensuiteétabli que la calpaïne 3 interagissait avec uneprotéine sarcomérique, la titine, ouvrant ainsi denouvelles pistes pour les explorations structurelleset fonctionnelles (Ojima et al, Hayashi et al).

Illustration du travail de clonagepositionnel (par J. S. Beckmannet son équipe) de l'intervalleq15.1-q21.1 dans lequel le gèneCAPN3 était localisé.

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effectuait alors des interventions régulières auprèsdes résidents myopathes du Nid Marin, un centre derééducation de la Croix-Rouge situé à Hendaye etfondé en partie par Jean Demos. Au cours de l’uned’entre elles, il entra en contact avec deux collèguesde San Sebastien, Adolfo Lopez de Munain et AnaMaria Cobo. Ils confirmèrent l’existence de cettegrande cohorte de patients (Urtasun et al) et mani-festèrent leur souhait d’engager une collaborationavec les équipes françaises. Ceci devait permettred’identifier rapidement une mutation très fréquenteen Pays Basque, dont la prévalence était du mêmeordre que celle de la mutation 946-1, présente à l’îlede La Réunion. Des études cliniques et en imageriefurent entreprises. Elles montrèrent que le phéno-type clinique était tout à fait semblable à celui trouvéà l’île de La Réunion. Les Basques ayant été degrands voyageurs, il n’a pas été très surprenant deretrouver cette mutation fondatrice un peu partoutdans le monde, en particulier dans les pays d’Amé-rique Latine et même … à l’île de La Réunion.Une amitié indéfectible se noua entre les équipesespagnole et française. Elle conduisit à deséchanges de collaborateurs et à l’élaboration, avecles collègues réunionnais et parisiens, d’un proto-cole d’évaluation de l’atteinte musculaire de cespatients. D’autres foyers ont depuis été repérés etanalysés, en particulier en Croatie (Canki-Klain etal) et en Turquie, avec à nouveau une mutationparticulière par sa fréquence. En fait, le diagnosticde calpaïnopathies a été établi dans tous les paysoù les moyens de détection sont disponibles,permettant ainsi une réévaluation à la hausse de laprévalence de cette atteinte.

Les calpaïnopathies dans le mondeA. UrtizbereaUne fois le gène identifié, enfin en possession d’unoutil diagnostique déterminant, le nombre depatients et de familles présentant une myopathiedes ceintures classique avec anomalies de lacalpaïne n’a cessé de croître (Richard et al, 1995).A la génétique moléculaire, arme a priori sansfaille, mais limitée à quelques grands centres, s’estajoutée, grâce aux travaux de Louise Anderson(Anderson et al), la possibilité de mettre en évidencele déficit en calpaïne 3 sur les biopsies musculairesen utilisant la technique de western blot. L’immuno-fluorescence ne peut pas, en effet, être utiliséeen pratique courante pour cette détection. Ces tech-niques devaient permettre de déceler des déficitssecondaires en CAPN3 non liés à une mutation dugène CAPN3, mais en lien avec d’autres déficiencesprotéiques, en particulier les déficiences en titine eten dysferline.Grâce à ces nouveaux outils,les diagnostics de dystro-phie des ceintures furentrapidement validés, d’abordchez les patients de Francemétropolitaine (Fardeau etal, 1996), puis en Italie, auRoyaume Uni, au Japon… Denouveaux isolats furent ainsidétectés, en particulier auPays Basque. Andoni Urtiz-berea avait eu vent par uncollègue, Jean de Recondo,qu’il y avait beaucoup de for-mes récessives de myopa-thies des ceintures dans lesprovinces basques situéesen territoire espagnol. Il

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L’équipe transpyrénéenne.

Soixantepersonnes

concernées auPays Basque,

surtout en Guipuzcoa.

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Conclusion La découverte de l’implication de la calpaïne 3dans les dystrophies musculaires des ceintures acertainement marqué un tournant majeur dansl’histoire des myopathies. Depuis l’obtention de cesrésultats initiaux, les travaux sur les calpaïnopathiesn’ont cessé de se développer schématiquementselon quatre axes principaux.Etudes épidémiologiques : il apparaît aujourd’huique les calpaïnopathies forment le groupe le plusimportant de dystrophies des ceintures, leur préva-lence variant entre 30 et 60 % de ce groupe selon lesrégions et les pays.

Structure et physiologie du gène CAPN3 : onnote en particulier l’identification de séquences spé-cifiques à ce gène, la modélisation de la structuretridimensionnelle de la protéine et sa cristallisation.Ont également été précisés les modes d’épissagealternatif (une dizaine de transcrits différents ayant

été identifiés) ainsi que le pattern d’expressionspatio-temporel de la protéine au cours du dévelop-pement embryonnaire. Physiopathologie des désordres musculaires :plusieurs sites de fixation de la calpaïne 3 ont faitl’objet d’études intensives dont un site intranuclé-aire et plusieurs sites intra-sarcomériques. Le siteintranucléaire a été identifié à la suite des travauxde Baghdiguian et al, au cours desquels il a puêtre démontré qu’un déficit en calpaïne 3 pouvaitinduire une apoptose des fibres musculaires et ce,du fait d’une interaction entre IKappa B alpha etNfKappa B. Les sites de fixation intra-sarcomériquese situent, quant à eux, au voisinage de la ligne M(en relation directe d’une part avec la titine et avec larégion N2A de la calpaïne 3). La CAPN3 a pu ainsiêtre considérée comme assurant un « mécanismede surveillance » de la longueur sarcomérique(Ojima et al).Production de modèles animaux : Isabelle Richardfut la première à mettre au point un modèle murinde cette pathologie (Richard et al, 2000), bientôtsuivie par d’autres groupes au Japon et aux Etats-Unis. Il a été ainsi possible de reproduire les lésionsmusculaires avec leur sélectivité, d’en étudier lesmécanismes et enfin d’entreprendre leur correctionpar thérapie génique.De nouvelles connaissances ne cessent de s’accu-muler sur la calpaïne 3, ainsi qu’en témoignent lescommunications faites aux Journées de la SociétéFrançaise de Myologie à Hendaye. Mais cetteprotéine garde encore bien des secrets. Sa fonctionbiologique, quinze ans après la démonstration deson rôle dans l’étiologie de la forme classique dedystrophie des ceintures, reste encore en grandepartie à découvrir (Beckmann et Spencer).

NOTESCet article a été mis enforme par M. Fardeau.Des remerciements vont :à D. Hillaire pour larelecture des deuxpremières parties de cetarticle,au Dr C. Mignard pour sonaccueil et son soutien àLa Réunion,au Pr B. Eymard poursa participation auxexpéditions réunionnaiseset à l’analyse des famillesde France métropolitaine,au Dr Gene Jackson pourl’analyse des famillesAmish,aux personnes de LaRéunion concernées,pour leur contributionenthousiaste et enparticulier à la familleCadjee.

REFERENCES Anderson L.V. et al, Am J Path, 1998, 153 : 1169-79Baghdiguian S. et al, Nat Med, 1999, 5 : 503-11Beckmann J. S. et al, CR Acad Sci (Paris), 1991, 312 : 141-8Beckmann J. S. et Spencer M., Neuromusc Disord, 2008, 18 : 913-21Brooke M. H., Adv Neurol, 1977, 17 : 25-39Canki-Klain N. et al, Am J Hum Genet, 2004, 125A : 152-6Chiannilkulchai N. et al, Hum Mol Genet, 1995, 4 : 717-25Erb W., Deutsch Archiv Klin Med, 1884, 34 : 467-519Fardeau M. et al, Neurology India, 1989, 37 (supplt) : 7Fardeau M. et al, Brain, 1996, 119 : 295-308

Fardeau M. et al, Neuromusc Disord, 1996, 6 : 447-53Hayashi C. et al, J Biol Chem, 2008, 283 : 14801-14Jackson C. E. et Carey J. H., Pediatrics, 1961, 28 : 77-84Jackson C. E. et Strehler D. A., Pediatrics, 1968, 41 : 495-502Ojima K. et al, J Biol Chem, 2007, 282 : 14493-504Richard I. et al, Cell, 1995, 81 : 27-40Richard I. et al, J Cell Biol, 2000, 151 : 1583-90Sorimachi H. et al, Biol Chem, 1989, 264 : 20106-11Urtasun M. et al, Brain, 2005, 128 : 732-42Walton J.N. et Nattrass F. J., Brain, 1954, 77 : 169-231

Représentation tridimensionnellede la calpaïne 3 musculaire

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PHYSIOLOGIE

Le muscle endocrine

SÉBASTIEN BANZET, NATHALIE KOULMANN

La rencontre de la physiologie de l’exercice et de l’immunologie a fait naître le conceptinattendu de « muscle endocrine ». Afin d’assurer sa contraction, le muscle squelettiquedégrade du glucose pour synthétiser de l’ATP. Quand le glycogène musculaire diminue, leglucose est fourni par le foie, principalement sous contrôle des hormones hyperglycémiantes(glucagon, cortisol). Cependant à l’exercice prolongé, les fibres musculaires activesproduisent de l’interleukine-6, cytokine libérée dans le sang qui se lie à ses récepteurshépatiques et favorise la production de glucose, agissant comme une véritable hormoned’origine musculaire.

res et survient indépendamment de toute lésionmusculaire objectivable. Quelle peut être alors lasignification biologique de cet événement ?

L'interleukine-6, une "myokine"Les grandes variations systémiques de l'interleu-kine-6 (IL-6) sont classiquement dues à une libéra-tion massive par les cellules immunocompétentes,notamment monocytaires, mais à l’exercice aucuneproduction d’IL-6 n’a été retrouvée dans ces derniè-res. L’origine de l’IL-6 plasmatique a été mise enévidence par des mesures de différence artério-veineuse fémorale qui ont montré que la moléculeest libérée dans le sang par les muscles (Steensberget al, 2000). L’augmentation des ARNm codant IL-6dans des biopsies musculaires au décours d’unexercice est venue conforter cette donnée. Mais ausein du tissu musculaire, de nombreux typescellulaires comme les cellules musculaires lisses,cellules endothéliales, fibroblastes, myocytes oumonocytes infiltrants sont capables de produire del’IL-6 en grande quantité et la question de l’originecellulaire de l’IL-6 a longtemps été posée. C’est fina-lement la présence de la protéine dans les fibresmusculaires (immuno-histochimie) (Penkowa et al,2003) et l’augmentation considérable des ARNmdans des fibres isolées au décours d’un exercice(Banzet et al, 2005) qui ont déterminé l’originecellulaire plutôt inattendue de cette cytokine, ou« myokine », qui circule dans tout l’organisme.

Les déterminants de la production d’IL-6Les études menées sur des cellules musculairesen culture (C2C12, L6 ou myotubes humains) mon-traient que de nombreux stimuli et voies de signali-sation cellulaires peuvent induire la productiond’IL-6. Stress oxydant, adrénaline, cytokines pro-

Les années 1980-90 ont vu l’essor des sports d’ultra-endurance comme les marathons et triathlons. A lamême période, loin des compétitions, les immuno-logistes décrivaient le rôle clé des cytokines dans lescommunications intercellulaires au sein du systèmeimmunitaire. La physiologie de l’exercice s’est alorsattachée à décrypter les interactions complexes quiexistent entre l’exercice physique et les fonctionsimmunitaires. Les exercices intenses et prolongés,très contraignants pour l’organisme, étaient sus-pectés d’engendrer des lésions musculaires avecdes réactions inflammatoires locales ou systémi-ques plus ou moins marquées. En effet, de nom-breux événements immunitaires ont été décritsau cours ou au décours de l’exercice, en particulierdes variations des concentrations plasmatiquesde diverses cytokines (Pedersen et Hoffman-Goetz,2000). Pour nombre d’entre elles, ces variationsétaient modestes et observées de manière trèsinconstante, mais l’interleukine-6 (IL-6) a rapide-ment fait figure d’exception car ses concentrationsplasmatiques augmentaient dès lors que l’exerciceétait de durée prolongée et d’intensité élevée. L’élé-vation des concentrations d’IL-6 dans le plasmapeut être considérable (jusqu’à X 100) et est propor-tionnelle à l’intensité de l’exercice réalisé. S’agit-il,comme le postulaient les premiers auteurs, du refletd’une réaction inflammatoire systémique, dontl’IL-6 est un pivot bien connu ? Telle était la questioninitialement posée et en quelques années, denombreuses données expérimentales ont conduità réfuter cette hypothèse. L’augmentation de laconcentration plasmatique d’IL-6 à l’exercice n’estpas d’origine inflammatoire car elle est extrême-ment transitoire (retour aux valeurs de repos2 heures après l’arrêt de l’exercice), ne s’accompa-gne pas de variations de cytokines pro-inflammatoi-

Sébastien BanzetNathalie KoulmannInstitut de RechercheBiomédicale des ArméesDépartement desenvironnementsopérationnelsBrétigny-sur-Orge, [email protected]@crssa.net

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inflammatoires ou variations des concentrationscytosoliques de calcium étaient autant de pistesà explorer in vivo. Deux déterminants importantsde la production d’IL-6 sont rapidement apparus :la contraction musculaire et la disponibilité englucides.L’importance de la contraction a été montrée par lefait que seuls les muscles actifs produisent de l’IL-6,excluant l’implication de facteurs systémiques.Ainsi, si un sujet réalise un exercice avec un seulmembre inférieur, ce dernier produit et libère del’IL-6 alors que ce n’est pas le cas du membre aurepos (Steensberg et al, 2000). Les mouvements ducalcium entre le réticulum sarcoplasmique et lecytosol sont des événements clés de la contractionmusculaire, susceptibles d’activer diverses voies designalisation cellulaires. La calcineurine est unephosphatase activée par des augmentations faiblesmais durables des concentrations cytosoliques decalcium, comme celles observées lors de la contrac-tion des fibres sur un mode tonique. Son implicationdans le contrôle de la transcription d’IL-6 à l’exercicea été proposée car elle appartient à une voie designalisation de première importance dans lesréponses et adaptations du muscle à l’exercice etqu’elle contrôle la production de plusieurs cytokinesdans le système immunitaire. Dans des fibres mus-culaires de rats isolées à l’arrêt d’un exerciceprolongé, la transcription d’IL-6 est plus marquéedans les fibres à forte activité calcineurine (Banzet etal, 2005). Par ailleurs, l’administration de ciclospo-rine A, un inhibiteur de la calcineurine, réduit lesniveaux d’ARNm codant IL-6 dans le muscle et de laprotéine dans le plasma à l’arrêt de l’exercice,confirmant l’implication de cette voie dans lecontrôle de l’expression du gène (Banzet et al, 2007). Lorsque des sujets ingèrent du glucose en coursd’effort, les concentrations plasmatiques d’IL-6 sontplus basses que chez les sujets qui n’ingèrentque de l’eau. Par ailleurs, le niveau des réserveslocales en glycogène module la production d’IL-6.Lorsqu’un sujet réalise un exercice de pédalage avecles muscles préalablement appauvris en glycogène(par un exercice et des mesures diététiques), lesvariations d’ARNm dans le muscle et de protéinedans le plasma sont plus précoces et plus amplesque si l’exercice est réalisé avec des réserves englycogène normales (Keller et al, 2001). De plus, siun seul des membres inférieurs est appauvri englycogène, il libère plus d’IL-6 que l’autre membrepourtant soumis au même exercice et aux mêmesstimuli circulants, signant un contrôle par ladisponibilité locale du glycogène, indépendamment

de tout facteur systémique. La phosphorylation de laMAP kinase p38 (MAP : Mitogen-activated protein)est modifiée dans le muscle par la déplétion duglycogène et semble être la voie de signalisationimpliquée dans l’augmentation de l’expressiond’IL-6. Ainsi chez des rongeurs réalisant un exer-cice, le traitement par FK506 inhibe la calcineurinemais aussi p38 et la transcription du gène IL-6 dansles muscles actifs est bloquée.En somme, l’IL-6 est produite par les fibres muscu-laires, indépendamment de toute réaction inflam-matoire, en réponse aux deux stimuli locaux quesont la contraction musculaire (via la calcineurine)et la baisse des réserves en glycogène (via la MAPkinase p38). Mais quel rôle physiologique cettecytokine peut-elle remplir ?

IL-6, une molécule signaldes réserves énergétiquesL’absence de réaction inflammatoire, l’originemyocytaire et le lien étroit observé entre productiond’IL-6 et disponibilité du glycogène ont conduit àexplorer la piste d’un ou plusieurs rôles métabo-liques. Le glucose est un substrat énergétiqueessentiel pour la production d’ATP par le muscle àl’exercice et si les réserves locales (glycogène) sont

Glycogène

MAPK p38

Gène IL-6

Néoglucogenèse

Glucose

Calcineurine

IL-6

Contraction

FOIE

MUSCLE

LA SIGNALISATION IL-6 A L’EXERCICE

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des réserves énergétiques musculaires et le musclese comporte alors comme un organe endocrinecapable de moduler la production hépatique deglucose lors d’exercices prolongés et intenses(Pedersen et Febbraio, 2008). Des polymorphismes décrits dans la région promo-trice du gène codant IL-6 pourraient, dans certainscas, affecter les niveaux d’expression d’IL-6. L’und’entre eux, qui concerne la zone promotrice dugène (-174G/C), a été assez largement étudié etdes génotypes ont été associés à un risque accrud’apparition ou d’évolution péjorative de pathologiesinfectieuses, métaboliques ou tumorales. A ce jour,il n’existe pas d’argument pour penser que desdifférences interindividuelles de tolérance ou deréponse aiguë à l’exercice puissent reposer sur desvariations génotypiques du gène IL-6. Cependantune question importante en physiologie est lagrande disparité observée dans les capacités deréponse à l’entraînement des individus. L’étude deces variations (et bien d’autres) contribuera à mieuxcomprendre pourquoi un individu est plus ou moins« entraînable ». D’autres protéines ou peptides sécrétés par lemuscle ont été décrits, dont certains comme l’IL-15ont des actions endocrines, à distance du tissumusculaire. Le muscle strié squelettique a long-temps été considéré simplement comme « destina-taire » d’un certain nombre de signaux nerveux,hormonaux et métaboliques visant à assurer safonction, son ravitaillement en substrats et satrophicité. L’ensemble des connaissances récentessur IL-6 et plus largement sur la fonction sécrétoiredu muscle strié squelettique suggère maintenantque ce dernier est véritablement au cœur d’unréseau de communications entre le foie, le tissuadipeux et peut-être le système nerveux central. Cesconnaissances physiologiques nouvelles font alorss’interroger sur l’existence de pathologies du mus-cle endocrine, ayant pour support des déficits de cesmyokines ou de leurs récepteurs et qui pourraientavoir des expressions cliniques extrêmementvariées, tant musculaires que métaboliques.

REFERENCES Banzet S. et al, J Cell Physiol, 2007, 210 : 596-601. Banzet S. et al, J Physiol, 2005, 566 : 839-47. Banzet S. et al, J Appl Physiol, 2009, 107 : 1830-9.Febbraio M. A. et al, Diabetes, 2004, 53 : 1643-8.Keller C. et al, FASEB J, 2001, 15 : 2748-50.Pedersen B. K. & Febbraio M. A., Physiol Rev, 2008, 88 : 1379-406.Pedersen B. K. & Hoffman-Goetz L., Physiol Rev, 2000, 80 : 1055-81.Penkowa M. et al, FASEB J, 2003, 17 : 2166-8.Steensberg A. et al, J Physiol, 2000, 529 : 237-42.

taries, le plasma devient l’unique source de glucosedu muscle. L’IL-6 pourrait avoir d’abord un effetautocrine sur les fibres elles-mêmes, en favorisantla captation du glucose par translocation membra-naire de transporteurs spécifiques. Mais quel rôleenvisager pour l’IL-6 plasmatique ? En l’absenced’ingestion de glucides, le glucose plasmatique estissu du foie qui le libère soit à partir d’un stockrapidement mobilisable mais limité (glycogènehépatique) soit par synthèse de novo à partir desubstrats non glucidiques (néoglucogenèse). Cetteproduction hépatique de glucose est fortementcontrôlée par voie hormonale (insuline, glucagon etcortisol), mais des auteurs ont proposé que l’IL-6issue du muscle puisse contribuer au maintien de laglycémie en favorisant la libération de glucose par lefoie. En effet, la littérature suggère qu’indépendam-ment de l’exercice, IL-6 est capable d’augmenter lalibération de glucose par les hépatocytes in vitro oupar le foie in vivo. Ces effets, pas constammentretrouvés, dépendent de temps de stimulation longs(plusieurs dizaines d’heures) ou à de concentrationstrès supérieures à celles observées durant l’exer-cice. Une expérimentation a abordé cette questionen mesurant la production endogène de glucose(par le foie) chez des sujets réalisant un exerciced’intensité modérée ou élevée. Bien sûr, la produc-tion de glucose et la libération d’IL-6 étaient plusfaibles dans l’exercice modéré, mais si au cours decette épreuve les sujets recevaient une perfusiond’IL-6 mimant les concentrations plasmatiquesmesurées dans l’épreuve à haute intensité, laproduction de glucose augmentait très significative-ment (Febbraio et al, 2004). Ainsi, il a été démontréque l’IL-6 peut augmenter la production hépatiquede glucose à l’exercice.Plus récemment, il a été montré que cet effet estindépendant des hormones glucorégulatrices etrepose sur une action directe de l’IL-6 sur le tissuhépatique, où l’IL-6 favorise la transcription d’ungène clé de la néoglucogenèse, étape limitante decette voie métabolique (Banzet et al, 2009). Ainsi se dessine une signalisation originale issuedes fibres musculaires. Celles-ci se contractentalors que leurs réserves énergétiques localess’amenuisent. Pour maintenir leur approvisionne-ment en glucose, elles libèrent de l’IL-6 en grandequantité dans la circulation. Cette cytokine agitlocalement en augmentant la captation de glucosepar les fibres, mais elle agit aussi à distance surle foie, seul organe capable de mettre à dispositionce glucose pour l’ensemble de l’organisme.L’IL-6 apparaît donc comme une molécule signal

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Figure A Figure B

Biopsie musculaire deltoïdienne colorée en SDH (A) montrant de nombreusesfibres présentant des anomalies mitochondriales (flèches) et en COX (B)

montrant des fibres dépourvues d’activité cytochrome oxydase.

CAS CLINIQUE

Déficit en thymidine kinase de type 2 : un diagnostic à évoquer aussi chez l’adulte

ANTHONY BEHIN, CLAUDE JARDEL, KRISTL CLAEYS, NORMA ROMERO, BRUNO EYMARD, ANNE LOMBÈS

Le déficit en thymidine kinase de type 2, codée par le gène TK2, est responsable d’unemyopathie mitochondriale à début pédiatrique précoce, d’évolution extrêmement sévère,associée à une déplétion profonde de l’ADN mitochondrial (ADNmt) musculaire. Nousprésentons ici le cas d’un adulte ambulatoire atteint d’une myopathie mitochondrialeavec déplétion de l’ADNmt consécutive à deux mutations du gène TK2. Cette observationélargit le spectre des déficits en TK2 et souligne l’importance de la biopsie musculaire pourorienter le diagnostic.

Anthony BehinBruno EymardClaude JardelKristl ClaeysNorma RomeroAnne LombèsGH Pitié-Salpêtrière,[email protected]

ObservationLe patient, âgé de 31 ans, consulta en raison d’unptosis et d’une faiblesse musculaire progressive. Sanaissance et son enfance s’étaient déroulées sansdifficulté, en dehors d’une tendance à dormir lesyeux entr’ouverts. Il avait pu mener des étudessecondaires et obtenir un travail. Il n’y avait aucunenotion d’épilepsie, de baisse d’audition, de neuropa-thie périphérique ou d’ataxie, ni de consanguinité

évidente. Les deux frères aînés du patient ainsi queses parents ne présentaient pas de symptômes neu-romusculaires. L’histoire commença par un ptosisvers l’âge de 13 ans, une dysarthrie sans trouble dedéglutition vers l’âge de 15 ans, puis un déficit mus-culaire proximal des membres inférieurs vers l’âgede 25 ans, avec des difficultés pour se lever d’unsiège bas, pour monter les escaliers en l’absence derampe ou pour marcher sur terrain inégal et uneintolérance à l’effort modérée. A l’âge de 31 ans, leptosis était bilatéral, symétrique et non fluctuant,avec une limitation du regard vers le haut. Lepatient, à la voix hypophonique et rauque, présentaitun morphotype grêle. Au testing musculaire, le défi-cit était axial, prédominant sur les fléchisseurs du

cou avec impossibilité de soulever la tête du plan dulit et les abdominaux. Il atteignait, avec une faiblessemodérée, les muscles distaux des quatre membres(extenseurs des doigts et releveurs du pied à 3/5) etles muscles proximaux des membres inférieurs(psoas et ischiojambiers à 4/5). Les autres muscles,de force normale ou subnormale, permettaient unebonne qualité de vie. Il n’y avait pas d'atteinte cardia-que. Par contre, il existait une insuffisance respira-toire restrictive avec une capacité vitale forcéemesurée à 62% de la normale théorique (2,86 litres).Les CPK sériques étaient à 3 fois la normale et lalactacidémie à 2 mmol/l à jeun (n < 1.8). La créatini-némie était basse à 30 µmol/l (n > 62), témoignantd’une diminution globale de la masse musculaire.L’EMG montrait des tracés myogènes en détection etaucune anomalie en stimulodétection. Une biopsie musculaire deltoïdienne révéla desanomalies mitochondriales patentes, comportant ungrand nombre de fibres rouges déchiquetées (RRF)au trichrome de Gomori et 4% de fibres COX négati-ves. De nombreuses fibres anormales étaient visi-bles en SDH, avec des anomalies non spécifiques :variation de la taille des fibres, augmentation dunombre des noyaux internalisés, fibres segmentées,prédominance des fibres de type 1 et une fibre ennécrose. L’analyse spectrophotométrique de lachaîne respiratoire sur un fragment musculairecongelé montrait des valeurs dans la limite de lanormale. L’analyse des gènes d’ARN de transfertde la leucine et de la lysine montra l’absence desmutations MERRF et MELAS. La quantification del’ADNmt par PCR quantitative révéla une déplétionmodérée, à environ 30% de la valeur normale(3 500 copies d’ADNmt/cellule), accompagnée dedélétions multiples de l’ADNmt mises en évidencepar PCR longue. Le séquençage direct du gène TK2montra que le patient était hétérozygote composite.

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CAS C

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Une duplication en position 134 du cDNA (c.134dup,p.Trp46ValfsX40) dans l’exon 1 était d’origine pater-nelle et entraînait à la fois mutations faux-sens etcodon stop prématuré. Une transition en position394 (c.394C>T, p.Arg132Cys) dans l’exon 4, d’originematernelle, entraînait un faux-sens avec change-ment important de l’acide aminé 132. L’analyseparallèle du gène PEO1 ne révéla aucune anomalie.L’activité thymidine kinase de type 2 des fibroblastescutanés en culture était effondrée avec un tauxde thymidine phosphorylée de 0.3 pmol/mn/mg deprotéine, contre 10.1 pmoles chez deux contrôlesanalysés en parallèle (2,9%).

Commentaire Les mutations du gène TK2, au nombre de 24(Poulton et al) sont une cause classique de myo-

pathie avec déplétionde l’ADNmt. Ellesreprésentent 46% descas de déplétion del’ADNmt chez 13enfants (Spinazzola etal). Dans un contextepédiatrique (37 cas),avec début précoceavant 1 an dans lamajorité des cas, letableau est caracté-risé par la survenue,après un développe-ment psychomoteurse déroulant norma-

lement, d’un déficit musculaire progressif, surtoutproximal. Il peut prendre le masque d’une amyotro-phie spinale évoluant vers un déficit complet desquatre membres, incluant un déficit axial et facialavec possible ptosis et diplégie faciale. Une atteintecentrale (troubles cognitifs, épilepsie), toujours ausecond plan, a été décrite chez moins de 20% desenfants.Le pronostic dépend de l’atteinte de la déglutition etde la ventilation. Une insuffisance respiratoire est leplus souvent cause de décès survenant avant l’âgede 5 ans dans environ 2/3 des cas. Quelques patientsont survécu jusqu’à l’adolescence. Notre patient présente un tableau beaucoup moinssévère, plutôt évocateur en première instance demyopathie congénitale, notamment centronucléaire.Toutefois, l’atteinte oculomotrice, compatible avecce diagnostic, apparaissait inhabituellement sévèrepour ce type de myopathie. L’association à un ptosismarqué faisait aussi évoquer d’emblée une mito-chondriopathie.

Une élévation parfois importante des CPK (pouvantaller jusqu’à plusieurs dizaines de fois la normale)est fréquente dans les déficits en TK2 où elle témoi-gne de la souffrance musculaire qui est inhabituel-lement sévère pour une mitochondriopathie. Le tauxde CPK diminue secondairement, probablement enrapport avec la perte massive de masse musculairedont témoigne également la diminution de lacréatininémie.La biopsie musculaire montre toujours des anoma-lies caractéristiques de myopathie mitochondrialeassociant fibres RRF et fibres totalement dépour-vues d’activité cytochrome c oxydase. Chez notrepatient, elle a conduit au diagnostic. Cet aspectcaractéristique est rare chez l’enfant et doit faired’emblée suspecter une déplétion de l’ADNmt. La thymidine kinase de type 2 participe à la préser-vation du pool des désoxynucléotides mitochon-driaux qui sont essentiels au renouvellementpermanent de l’ADNmt dans le muscle. L’enzymeprésente dans le foie et le cerveau semble moinslimitante puisque les patients développent essen-tiellement une myopathie squelettique. Par contre,les souris invalidées pour TK2 développent unedéfaillance multiviscérale précoce. Malgré un déficitprofond de l’activité de TK2, notre patient n’adéveloppé qu’une atteinte clinique relativementmodérée et a pu maintenir un taux résiduel moyend’ADNmt musculaire. Il a donc pu mettre en œuvredes mécanismes compensateurs dont l’élucidationserait importante dans la perspective de traitementdes formes beaucoup plus sévères de l’enfant. Trois grandes présentations cliniques sont asso-ciées à une déplétion sévère de l’ADNmt. La formemyopathique (Moraes et al) est caractérisée parune atteinte le plus souvent isolée du musclesquelettique. Les deux autres (Mandel et al)comportent une atteinte neurologique centralegénéralement sévère et précoce avec atteintehépatique (forme hépatocérébrale) ou une atteintemusculaire (forme encéphalomyopathique). Unedizaine de gènes sont associés à ces différentesmaladies. Ils codent des protéines impliquées dansla réplication de l’ADNmt, comme l’ADN polyméraseγ (POLG) ou l’hélicase Twinkle (PEO1), ou dans lemétabolisme des nucléotides nécessaires pourla réplication de l’ADNmt dans le compartimentmitochondrial, comme la thymidine kinase 2 (TK2).

REFERENCES Mandel H. et al, Nat Genet, 2001, 29(3) : 337-41Moraes C.T. et al, Am J Hum Genet, 1991, 48 : 492-501Poulton J. et al, Biochim Biophys Acta, 2009, 1792 : 1109-12Spunazzola A. et al, J Inherit Metab Dis, 2009, 32 : 143-58

Principaux gènes responsables des syndromesde déplétion de l’ADNmt

Forme Gènes impliquésForme • Thymidine kinase de type 2

myopathique (TK2)Forme • Succinate synthase A (SUCLA2)

encéphalo(myo)- • Succinate synthase B pathique (SUCLG1)Forme • Twinkle (PEO1)

hépatocérébrale • Polymerase-gamma (POLG1)• Deoxyguanosine kinase (DGUOK)• MPV17 (MPV17)

Forme • Sous-unité B de la ribonucléotide« généralisée » réductase induite par

(atteinte musculaire, p53 (RRM2B)rénale, digestive,...)

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CAS CLINIQUE

Amyotrophie spinale : une cause trompeused'hypomobilité fœtale

ISABELLE DESGUERRE, MARJOLAINE WILHEMS, ITXASO MARTI

L'hypomobilité fœtale avec arthrogrypose reste encore un diagnostic étiologique difficile pourles neuropédiatres et généticiens. L'atteinte de la corne antérieure avec mutationdans le gène SMN est une cause classiquement citée mais rare. Elle peut s'associer à unedysmorphie faciale trompeuse et à une malformation cardiaque qui peuvent faire errer lediagnostic. Dans les huit dernières années, sur 40 cas d'hypomobilité foetale d'origine neuro-musculaire avec arthrogrypose admis en réanimation néonatale, ce diagnostic a été établidans trois cas. Ces trois patients présentaient une abolition des réflexes ostéotendineux, uneamimie faciale complète avec micrognathisme et des fasciculations linguales, une absencetotale d'autonomie respiratoire et une malformation cardiaque dans deux tiers des cas.

Isabelle DesguerreNeuropédiatre PH,Hôpital Necker, [email protected] WilhemsGénétique(service du Pr Munnich),Hôpital Necker, [email protected] MartiPédiatrie,Hospital Donostia,San Sebastian,[email protected]

L’hypomobilité fœtale peutconduire à des limitationsarticulaires et même desdéformations articulairesfixées ou arthrogrypose.Différents mécanismes sontà l’origine de cette hypomo-bilité et trois grands grou-pes sont classiquementdistingués : les causes neu-rologiques centrales, lescauses neuromusculaireset un groupe indéterminéoù persiste malgré tout unrisque de récurrence géné-tique. Les atteintes articu-laires sont distales, proxi-males et parfois diffuses. Laprésentation par le siège estplus fréquente au momentde la naissance (BonillaMisoles et al).

ObservationIl s'agit de la première enfant d'un couple de parentsjeunes non consanguins. La grossesse s'est dérou-lée sans problème particulier, mais la mamansignale un enfant bougeant moins le dernier mois degrossesse. L’enfant naît à terme par voie basse. Elleest intubée d'emblée pour hypotonie majeure etabsence de ventilation spontanée. Elle présente unemicrocéphalie relative (PC = 32cm), un microgna-thisme, un flessum de hanches non réductible, unedéformation des mains avec un coup de vent cubital,une absence complète de mobilité spontanée ouprovoquée, une absence de déglutition.

L’abolition des réflexes ostéotendineux est associéeà une amyotrophie musculaire globale. Il n'y aaucun mouvement respiratoire spontané et ladépendance ventilatoire va persister. L'imageriecérébromédullaire est normale ainsi que l'élec-troencéphalogramme (EEG). Les radiographies dusquelette sont normales et l'échographie cardiaqueretrouve une petite communication inter-ventricu-laire (CIV). Les fasciculations linguales sont obser-vées au 3e jour avec une amimie complète sanstrismus. Il existe une ouverture spontanée des yeuxsans mouvement oculaire. La biopsie musculaireréalisée au niveau du deltoïde met en évidence unprocessus neurogène et une prédominance massivedes fibres de type 2 avec une protéolyse myofila-mentaire. L'étude du gène SMN permet d’identifierune délétion homozygote de l'exon 7 du gène SMN1avec une copie unique du gène SMN2. Devant l'ab-sence d'autonomie, la réanimation est interrompueau 15e jour. Le caryotype et l'analyse génomique enCGH-Array (hybridation génomique comparative surdes puces à ADN), réalisés devant la dysmorphie etles éléments malformatifs, sont normaux.

CommentaireLes causes neurologiques classiques d'hypomobi-lité foetale se répartissent en deux groupes : lesatteintes centrales et/ou cytogénétiques (75%) etles causes neuromusculaires (25%). L’existence d’une microcéphalie, argument enfaveur d’une cause cérébrale, est très inconstante. Ilpeut s’agir d’anomalies de la gyration sus-tentoriel-les dont l’étiologie est ischémique, virale (cytoméga-lovirus) ou génétique, d'agénésie du corps calleuxavec corne antérieure (syndrome d'Anderman)(Takano et al). Des hypoplasies ponto-cérébelleuses

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associées à une atteinte de la corne antérieure ontété rapportées (Fedrizzi et al). Certaines malforma-tions cérébrales intègrent un tableau malformatifplus complexe d’origine génétique de type syndro-mique ou lié à une anomalie chromosomique iden-tifiée. Les atteintes médullaires seront évoquées sil’atteinte prédomine aux membres inférieurs. Derares maladies métaboliques, en particulier certai-nes mucolipidoses, peuvent conduire à un tableaud’arthrogrypose associée à un anasarque avec unehépato-splénomégalie (Tabartel et al, Moses et al).Les causes neuromusculaires sont plus rares etdifficiles à explorer (25%). L’existence d’une atteinterespiratoire (intercostaux, diaphragme) doit fairerechercher en priorité une pathologie neuromuscu-laire. Celle-ci peut concerner le muscle (myopathiecongénitale, Steinert congénital étant la cause laplus fréquente), le nerf périphérique (neuropathiecongénitale), le motoneurone (amyotrophie spinale)ou la plaque neuromusculaire (syndromes myasthé-niques congénitaux). L’atteinte faciale est quasiconstante avec, en anténatal, un défaut de succion,déglutition possible et surtout, en postnatal, uneamimie faciale plus ou moins sévère avec des trou-bles de succion et de déglutition, parfois un trismus,une paralysie oculomotrice et un ptosis. La biopsiemusculaire est contributive, dans environ 50 % descas, en révélant des anomalies structurellestypiques : némaline, central core, multiminicore,myotubulaire ou neurogène (gène SMN). Les dystrophies musculaires congénitales repré-sentent un autre groupe. Elles sont associées, dansla moitié des cas, à des anomalies cérébrales à typed’anomalies de la substance blanche, des anoma-lies de gyration ou des malformations de la fossepostérieure. Un défaut de la O-glycosylation avecanomalie de l'alpha-dystroglycane à la biopsie estrecherché. Les syndromes myasthéniques congénitaux sontdes pathologies de la jonction neuromusculaired’origine génétique. La forme la plus fréquente, àrévélation anténatale ou néonatale, est de transmis-sion autosomique récessive. Elle est caractériséepar de possibles déformations articulaires anténata-les, un ptosis, une ophtalmoplégie, des troubles bul-baires, des malaises et une hypotonie globale (gènerapsyn). La myasthénie autoimmune maternellepeut conduire à une hypomobilité fœtale pouvantêtre sévère et qui n’est absolument pas corrélée à lagravité de la myasthénie maternelle. La mère peutêtre pauci et même asymptomatique (dosage desanticorps antirécepteurs à l’acétylcholine). Il existedes cas de mort fœtale in utero, des arthrogryposes

sévères avec une atteinte faciale constante et desformes plus modestes avec hypotonie néonatale,une détresse respiratoire transitoire et des troublesde déglutition.Dans notre expérience, sur 40 cas d'hypomobilitéfoetale d’origine neuromusculaire probable, uneétiologie a été trouvée dans 50% des cas :Steinert congénital (3 cas), myopathie congénitalestructurelle (4 dont 2 myopathies à central core et2 myopathies à némaline), dystrophie musculairecongénitale (2), syndrome myasthénique congénitalavec mutation (2), amyotrophie spinale avecmutation SMN1 (3), corne antérieure avec atrophieolivopontocérébelleuse (4), syndrome de Marfan (1).Dans 2 des 3 cas d'amyotrophie spinale, il existaitun déficit cardiaque septal et la dysmorphie facialeétait constante. La biopsie musculaire montrait unaspect neurogène et éliminait une myopathiestructurelle souvent évoquée devant la sévérité del'atteinte faciale.L'amyotrophie spinale est donc une cause rare, maisqui doit être reconnue, d'hypomobilité foetale avecarthrogrypose. Dans la série de Rudnik-Schöne-born, sur 65 cas d'amyotrophie spinale type 1 avecdélétion homozygote de l'exon 7 du gène SMN1,4 cas avaient une copie unique du gène SMN2 etprésentaient une forme sévère anténatale avec desrétractions et une dépendance ventilatoire totale.Trois des 4 cas étaient atteints d’une malformationcardiaque avec une CIV ou une anomalie atrioventri-culaire (Rudnik-Schöneborn et al). Dans deux cas,l'étude cytogénétique réalisée devant la malforma-tion cardiaque et une dysmorphie faciale étaitnormale. La survie était de 15 jours en moyenne.La revue de la littérature plus générale retrouve19 cas d'hypomobilité sévère avec arthrogryposeet malformations cardiaques. Il s'agit toujours dedéfaut septal ventriculaire, atrial ou de persistanced'un canal atrioventriculaire. Ces cas anciens necomportent pas d'analyse du nombre de copies dugène SMN2 dans 17 cas. L'impact du gène SMNdans la cardiogénèse n'est pas connu.

Le diagnostic d'amyotrophie spinale ne doit pasêtre méconnu devant un tableau d'arthrogryposeavec hypotonie paralytique complète et atteintefaciale, même s'il existe une impression de dys-morphie faciale et/ou un défaut septal cardiaque.

REFERENCES Bonilla Misoles F et al, J Perinat Med, 2002, 30 : 99-104Fedrizzi E et al, Pediatr Neurol, 1993, 152 : 343-8Moses SW et al, Curr Mol Med, 2002, 2 : 177-188.Rudnik-Schöneborn S et al, J Med Genet, 2008, 45(10) : 635-8Takano T et al, Pediatr Neurol, 2001, 3 : 247-9Tabartel Y et al, Arch F Pediatr, 1989, 46 : 737-40.

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Neuraminidase(N1-9)

Hémagglutinine(H1-16)

Virus A rencontrés chez l'homme actuellement : H1N1, H3N2Virus A rencontrés chez les oiseaux actuellement : H5N1, H7N7

PRISE EN CHARGE

Grippe A(H1N1), la vaccination chezles patients neuromusculaires

GROUPE D’EXPERTS MNM ET INFECTION PANDÉMIQUE

Brigitte ChabrolNeuropédiatre,Hôpital de la Timone,MarseilleStéphane DebelleixPneumopédiatre,Hôpital de Bordeaux-Groupe hospitalier sudEl Hadi HammoudaActions Médicales,AFM, EvryBrigitte EstournetPneumopédiatre,Hôpital RaymondPoincaré, GarchesJ. Andoni UrtizbereaPraticien Hospitalier,MPR, APHP,Hôpital Marin de HendayeLouis ViolletNeuropédiatre,Hôpital Necker, ParisContact : [email protected]

La grippe A(H1N1) résulte de recombinaisons duvirus de la grippe à partir de souches porcine,humaine et aviaire. Le virus en cause est différent duvirus de la grippe saisonnière qui est exclusivementd’origine humaine. La transmission se fait d’humainà humain principalement par voie aérienne maispeut également être manu portée. L’Institut deVeille sanitaire (INVS) définit un cas possible degrippe A(H1N1) selon les critères suivants : troublesrespiratoires à début brutal avec fièvre > à 38°C ou

courbatures, toux ou essoufflement. D’autres signespeuvent s’ajouter tels que fatigue, diarrhées, vomis-sements… La période d’incubation est de 24 à 48heures et peut aller jusqu’à 7 jours. La durée decontagiosité d’une personne atteinte du virus de lagrippe A est de 24 à 48 heures avant le début dessymptômes et pendant 7 jours après le début dessymptômes chez l’adulte, 10 jours après le débutdes symptômes chez l’enfant. Ce délai est raccourcipar le traitement antiviral spécifique.Le Haut Conseil de la Santé Publique (HCSP), aprèsavis du comité technique des vaccinations et de lacommission spécialisée Maladies transmissibles,a défini ainsi les objectifs de la vaccination : « laréduction du risque d’apparition des formes graveset du risque de décès de grippe, beaucoup plus quela maîtrise épidémique ».Pour l’élaboration du vaccin A(H1N1), l’AgenceEuropéenne du Médicament (EMEA) et l’AgenceAméricaine du Médicament (Food and Drug Admi-

nistration ou FDA) ont adopté une procédured’évaluation accélérée dite « de prototype » fondéesur un raisonnement par extrapolation. En Europe,on a utilisé le prototype du vaccin H5N1 (de la grippeaviaire), lequel est prédictif du vaccin A(H1N1) enterme d’immunogénécité et de tolérance.

Un vaccin avec ou sans adjuvantDeux vaccins avec adjuvant ont reçu un avis favora-ble de l’EMEA : le Pandemrix® (GlaxoSmithKline) etle Forcetria® (Novartis). Seule la souche virale a étéremplacée par la nouvelle souche A(H1N1). L’intérêtdes adjuvants est de « booster » la réponse immuni-taire et, dans le cas où le virus mute, d’assurer uneimmunité croisée entraînant une meilleure protec-tion. Les adjuvants type squalène contenus dans lesvaccins Pandemrix® et Forcetria® ont été suspectésde donner des complications type Guillain-Barré.Or, ces adjuvants sont des émulsions lipidiquescontenues dans l’alimentation (un litre d’huile d’olivecontient 7 grammes de squalène). Selon l’Afssaps(Agence française de sécurité sanitaire des produitsde santé), le syndrome de Guillain-Barré seraitdavantage lié au virus de la grippe qu’au vaccinlui-même. Dans deux tiers des cas, sa survenue estprécédée d’une infection bactérienne ou virale (unsimple rhume, une grippe ou une gastro-entérite).Dans un tiers des cas, l’origine de ce syndrome n’estpas connue. L’incidence du syndrome de Guillain-Barré post-vaccinal (lors de vaccination contrela grippe saisonnière) est estimée à un cas sur unmillion de personnes vaccinées. Alors que l’inci-dence du syndrome de Guillain-Barré post-grippalest estimée à 7 fois plus. Plus de 45 millions de personnes ont été vaccinées,dans le monde, avec le Gripguard, un vaccin contrela grippe saisonnière contenant un adjuvant typesqualène, sans qu’il y ait d’alerte de pharmacovigi-lance.En vertu du principe de précaution (inscrit dans laConstitution), le Haut Conseil de la Santé Publique

Les patients atteints de maladies neuromusculaires font partie des personnes prioritairespour la vaccination contre la grippe A(H1N1). Dans la plupart des cas, les effets secondairessont mineurs et temporaires. Le bénéfice de la vaccination (protection contre la grippe etprévention des complications associées) est nettement supérieur aux risques encourus lorsd’une contamination par le virus A(H1N1).

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(HCSP) recommande l’utilisation d’un vaccin sansadjuvant pour certaines catégories de personnes :les femmes enceintes, les enfants âgés de 6 à 23mois et les sujets porteurs de maladies de systèmeou d’une immunodépression (transplantés, splénec-tomisés et personnes atteintes de maladies auto-immunes sévères). Deux vaccins ont obtenu uneautorisation de mise sur le marché (AMM) et sontmis à disposition de certains établissements :Panenza® (Sanofi-Pasteur) et Celvapan® (Baxter).Panenza®, vaccin non adjuvé produit sur œuf etfragmenté, est homologué pour l'immunisationactive contre la grippe A(H1N1) des adultes et desenfants de plus de 6 mois. Celvapan®, vaccin nonadjuvé préparé sur cultures de cellules, est exclusi-vement réservé aux personnes âgées de plus de sixmois, présentant une allergie de type anaphylacti-que aux protéines aviaires.Le HCSP ne recommande pas l’utilisation d’unvaccin avec adjuvant, en l’absence de donnéescliniques, chez les sujets porteurs de maladiessystémiques ou d’une immunodépression associéeà une affection sévère susceptible d’être réactivée etchez les nourrissons de 6 à 23 mois sans facteur derisque. Le HCSP recommande alors de vaccinerl’entourage.

Deux vaccins avec adjuvant ont reçu un avisfavorable de l’EMEA : le Pandemrix® (GlaxoSmith-Kline) et le Forcetria® (Novartis). Deux autresvaccins ont reçu l’AMM : le Panenza®, vaccin nonadjuvé (Sanofi-Pasteur) et le Celpavan®, vaccin necontenant pas de protéines aviaires (Baxter).

Un vaccin avec ou sans conservateurLes conservateurs type Thiomersal ont pour rôle dediminuer le risque de contamination bactérienne.S’ils ont été suspectés de donner des syndromesautistiques, cette suspicion n’a jamais été prouvée.Par ailleurs, la quantité de mercure entrant dans lacomposition du Thiomersal est infinitésimale.

La vaccination chez le patient neuromusculaireLa vaccination contre la grippe A(H1N1) est préconi-sée chez les patients atteints de maladies neuro-musculaires. Les éventuels effets secondairessont en général mineurs et temporaires (réactionslocales : érythème, gonflement, douleur au sited’injection ; myalgies, céphalées et ce, pendant 48heures environ). Le bénéfice de la vaccination est

nettement supérieur aux risques encourus. TREAT-NMD, réseau européen dédié aux maladies neuro-musculaires, recommande, notamment, que lespatients atteints de dystrophie musculaire deDuchenne ou d’amyotrophie spinale soient vaccinéscontre la grippe A(H1N1).Il n’y a pas de contre-indication à la vaccination anti-grippale A(H1N1), même chez les patients (enfantsou adultes) atteints de maladies inflammatoires ouautoimmunes et traités par des corticoïdes ou desimmunosuppresseurs. Par mesure de précaution,les patients atteints de myasthénie ou de dermato-polymyosite, traités ou non par immunosuppres-seurs, doivent bénéficier d’un vaccin non adjuvé. Levaccin Panenza® est ainsi recommandé à partir del’âge de 6 mois. Il est aussi recommandé de vaccinerl’entourage.Une seule injection (intramusculaire) est effectuée,sauf pour les enfants de moins de 9 ans et chez lespersonnes atteintes d’un dysfonctionnement dusystème immunitaire inné ou acquis pour lesquellesdeux injections sont recommandées. Un sujet pourlequel l’administration de deux doses est nécessairedoit recevoir deux doses du même vaccin. Si l’injec-tion intramusculaire s’avère impossible (atrophiemusculaire importante), le vaccin Panenza® peutêtre utilisé par voie sous-cutanée.La vaccination dirigée contre la grippe saisonnièredoit être effectuée chez les personnes à risqueciblées par les recommandations antérieures. LeHaut Conseil de la santé publique recommande unintervalle minimal de 21 jours (intervalle minimalpour la stabilisation de la réponse immunitaire)entre l’administration des deux vaccins : saisonnieret pandémique A(H1N1). Chez les enfants de moinsde 3 ans n’ayant jamais été vaccinés ou n’ayantjamais eu la grippe saisonnière, le schéma vaccinalest de deux demi-doses à un mois d’intervalle.La grippe A(H1N1) et la grippe saisonnière peuventfavoriser, chez les personnes à risque, des surinfec-tions pulmonaires à pneumocoques. Le vaccin anti-pneumococcique est donc recommandé pour lespatients atteints de maladies neuromusculaires àrisque de complications respiratoires. Un traitementimmunosuppresseur ou une corticothérapie au longcours ne sont pas une contre-indication à cette vac-cination anti-pneumococcique. Il n’y a pas de délai àrespecter entre les vaccinations anti-grippales etcelle contre le pneumocoque, mais elles doivent êtreeffectuées à des sites d’injection différents.

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Positionnement en fauteuil roulant : 4 étapes

1- EvaluationDes déficiences, aptitudes, déformationsorthopédiques, habitudes de vie, environne-ment, besoins et priorités de l’utilisateur

2- EssaisSi moulage : fabrication du système d’assiseSi modulaire : essais des coussins et dossiersavec les éléments de maintien et soutien

3- InstallationInstallation des ATP sur le fauteuil roulant del’utilisateur

4 - Suivi post attribution, ajustements

PRISE EN CHARGE

Le positionnement en fauteuil roulant :une dynamique complexe

ELISE DUPITIER

Le positionnement en fauteuil roulant s’intègre doncdans une démarche de réadaptation et se traduitcomme un processus visant à placer une personnedans une position requise. Ce processus est unedynamique complexe exigeant un encadrement parune équipe pluridisciplinaire formée. Un protocole etdes outils d’évaluation pertinents sont nécessairesafin de proposer un service de qualité.

Une équipe pluridisciplinaire structurée Le temps clinique dédié au positionnement enfauteuil roulant doit être mené par un médecinspécialisé en médecine physique et de réadaptation,un ergothérapeute et un technicien ou un orthopro-thésiste. Ceux-ci constituent le trio de base néces-saire à l’expertise du positionnement. Ils ont encharge l’évaluation des aptitudes de la personne etde ses habitudes de vie, ainsi que l’analyse posturaleet environnementale. Ils élaborent un rapport d’ex-pertise entraînant la prescription et la réalisationdes Aides Techniques à la Posture (ATP). Autour dece trio, gravitent les différents professionnels desanté permettant de compléter le bilan médical etfonctionnel (kinésithérapeute, neuropsychologue,éventuellement orthophoniste, nutritionniste...).Le processus de positionnement doit être standar-

Le positionnement en fauteuil roulant participe à la prévention et au traitement des troublesorthopédiques de l’utilisateur pour garantir sa qualité de vie. Veiller à l’installation posturalede la personne consiste à l’orienter vers des choix de fauteuils roulants appropriés, à propo-ser des fonctions électriques judicieuses et à vérifier les réglages. L’installation peut êtrecomplétée par des aides techniques à la posture adaptées et ajustées. Ceci ne va pas sansune éducation aux techniques de positionnement, tant de l’utilisateur que de son entourage.

Elise DupitierErgothérapeute,Projet Positi’F,Service Aides Techniques,AFM, [email protected]

Installation avec dossiersouple réglable en

tension, cales troncs etappui-tête avec appuis

nucal et occipitalaccompagné d’appuis

latéraux faciaux.

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A ce jour, les éléments liés à la propulsion et à lamaniabilité du fauteuil roulant n’ont cessé d’évoluerpour améliorer le confort des déplacements. Toute-fois, le confort postural a souvent été négligé, lefauteuil roulant étant considéré comme un simplemoyen de déplacement. Au demeurant, la premièredémarche pour s’installer dans un fauteuil roulantest de s’y asseoir. La deuxième étape est de sedéplacer et de participer au mieux aux activités dela vie quotidienne. Être bien positionné dans unfauteuil roulant permet de prévenir, corriger oupallier les troubles posturaux. Conséquences d’uneaffection neurologique, musculaire ou articulaire,ces troubles peuvent également être causés par unmauvais ajustement des éléments de l’aide techni-que à la mobilité. Être installé confortablement dansson fauteuil roulant produit des effets bénéfiquestant sur l’état clinique et fonctionnel que sur laqualité de vie de l’usager.

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disé. Pour ce faire, il doit suivre quatre étapes où lesintervenants et leur rôle respectif sont bien définis.L’absence d’une démarche reposant sur des critèreset des paramètres objectivables bien établis peutmener à des prises de décisions non adaptées etcoûteuses.

Les Aides Techniques à la Posture (ATP)Les Aides Techniques à la Posture se définissentcomme les moyens permettant à la personned’adopter ou de maintenir une attitude particulièredu corps. Elles visent à prévenir, à diminuer ou àcompenser les vices posturaux provoquant unesituation de handicap ou une aggravation des attein-tes (scoliose, atteinte respiratoire, digestive…). Cesont soit des systèmes d’appareillages (corset,sièges coquilles), soit des éléments de soutien(module siège/dossier), des éléments de maintien(cales tronc, butée d’abduction/adduction, harnais…)ou bien certaines fonctions du fauteuil roulant(inclinaison électrique du dossier, bascule d’assiseélectrique, verticalisation…).

Le positionnement en FranceActuellement, le nombre de personnes ayant reçuune formation spécifique sur les techniquesd’installation au fauteuil est encore restreint. Deplus, ces professionnels se trouvent souvent isoléset manquent de moyens. Quelques services deréadaptation ont développé un secteur uniquementdestiné à la résolution des problématiques depositionnement et/ou d’aide au choix du fauteuilroulant. A noter que beaucoup d’utilisateurs n’ontpas conscience que leur installation en fauteuil

roulant pourrait être améliorée. Il faut aussi savoirque l’évaluation et la prise en charge financièredes aides techniques à la posture s’avèrent maladaptées.De ce fait, l’Association Française contre les Myopa-thies a décidé de répondre plus globalement à cetteproblématique, en instaurant un nouveau processusautour des prestations de positionnement enfauteuil roulant. Cette réponse s’inspire du modèlequébécois de « clinique du positionnement ».L’objectif est de développer le concept de « tempsclinique du positionnement » au sein des consulta-tions spécialisées pour les maladies neuromuscu-laires. Ce temps clinique devrait être testé, aucours de l’année 2010, par quelques consultationsneuromusculaires.

De l’importance de la préventionUne installation posturale bien étudiée (au cas parcas) dès la première acquisition du fauteuil roulantou lors de chaque étape de l’évolution de la maladieest primordiale.Pour l’utilisateur, elle est bénéfique à différentsniveaux. En effet, elle permet de ralentir ou de maî-triser l’apparition de déformations orthopédiquesd’origine neuromusculaire. Les douleurs sontatténuées voire même inhibées. Les capacitésfonctionnelles motrices, respiratoires ou digestivespar exemple, sont optimisées. De ce fait, la qualitéd’utilisation du fauteuil roulant est meilleurepuisqu’elle est sécurisée et confortable.Grâce à un positionnement correct dès les premiersjours d’utilisation du fauteuil, l’apparition de défor-mations orthopédiques et/ou de phénomènes dou-loureux directement causés par une configurationd’assise inadaptée (origine environnementale) estégalement évitée. Il peut s’agir d’un simple défaut deprofondeur d’assise et/ou d’une mauvaise hauteurd’accoudoir qui seront initialement corrigés en tra-vaillant sur les réglages, les formes et les matériauxappropriés aux besoins de la personne.Ce processus de prévention, au cœur du projetPositi’F (développé par l’AFM), induit une prise encharge paramédicale voire médicale moins« lourde », car faisant appel à des réponses techni-ques plus simples, moins chronophages et doncmoins coûteuses.

Il est proposé différentestailles de dossier, en

fonction des besoins demaintien, de l’utilisateur,avec ou sans cale-tronc. ©

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PRISE EN CHARGE

Dystrophie Myotonique de Steinert (DM1) :la fatigue, plainte principale

BENJAMIN GALLAIS

La fatigue est l’une des plaintes principales des patients atteints de DM1. Sa fréquence etson intensité peuvent majorer les difficultés physiques, sociales, cognitives et émotionnellesrencontrées par le patient dans la vie quotidienne. Son étiologie multifactorielle doit conduireà une prise en charge pluridisciplinaire comprenant des approches diverses telles que lestraitements médicamenteux, le réentraînement à l’exercice, l’amélioration de la qualité dusommeil et une prise en charge psychologique adaptée.

Quels sont les facteurs en jeu ?Des altérations cognitives spécifiques sont asso-ciées à la DM1, notamment des troubles de lamémoire, des fonctions exécutives, de l’attention etun ralentissement psychomoteur. L’hypothèse ducoping (Belmont et al) comme source de fatiguecognitive peut être posée. La fatigue serait due àl’effort supplémentaire fourni par les patients pourmaintenir un bon niveau de performance dans la viequotidienne, malgré leurs déficits et leur ralentisse-ment cognitifs. La réalisation d’une tâche cognitive(lire le journal, se concentrer au travail) nécessiteraitune mobilisation importante, un « hyper-effort »,pouvant entraîner une sensation de fatigue. Le handicap fonctionnel induit par la maladieprogressivement invalidante, nécessite des effortsmusculaires pour de nombreux gestes et déplace-ments (sources de fatigue physique). Il suscite uneattention soutenue pour prévenir les chutes, ainsiqu’une mobilisation mentale accrue afin d'anticiperles risques potentiels de chaque activité (sources defatigue mentale). Prévoir une sortie entre amis peutparaître un fait anodin, mais il requiert, de la part dela personne malade, d’anticiper l’accessibilité deslocaux, de prévoir le transport, de s’assurer qu’ilpourra s’asseoir ou au contraire rester deboutavec appuis… Autant de pensées qui « coûtent » del’énergie et polluent le plaisir de la spontanéité. Lafatigue « adaptative » est la conséquence des effortsnécessaires, qu’ils soient physiques et/ou cognitifs,pour compenser le handicap.La plainte de fatigue peut masquer une dépressionet/ou un trouble de l’anxiété. Chez la personnedéprimée, la fatigue traduit le plus souvent unelassitude, une inappétence à l’action. Dans lestroubles anxieux, la fatigue peut apparaîtredirectement comme la conséquence des perturba-tions du sommeil (difficultés d’endormissement,agitations nocturnes) ou indirectement, comme laconséquence d’une « hypervigilance » aux stimuli de

La fatigue est une plainte psychophysiologiquefréquemment exprimée dans les pathologies neuro-musculaires, que ce soit dans sa dimension objec-tive ou subjective. Chez les sujets sains, elle apparaîtsuite à un effort musculaire prolongé ou à une atten-tion soutenue. Elle est alors naturellement réversi-

ble par le repos et/ou par le sommeil. Elle peutêtre le renforcement positif d’un effort

coûteux mais productif. Elle valo-rise alors l’activité et disparaîtra

naturellement après celle-ci. Al’inverse, la fatigue peut êtreinduite par l’ennui ou unediminution de la motivation.Chez certains sujets, la fatigue

« pathologique » a pour princi-pales caractéristiques d’appa-

raître d’emblée, même sans effort(fatigue « chronique »), sans disparaî-

tre après le repos ; chez d’autres, ce sontses manifestations excessives, conséquence d’uneactivité, qui sont problématiques (fatigue « aiguë »,immédiatement après ou à distance de l’activité).La fatigue toucherait 74% des sujets atteints de DM1(Kalkman et al) provoquant chez eux des change-ments du comportement et une souffrance psycho-sociale. Il est notamment observé une diminutiondes activités pouvant conduire au retrait social, uneréduction de la capacité à maintenir son attentionpouvant entraîner des difficultés scolaires ou pro-fessionnelles et une perte de motivation et d’initia-tive ayant des conséquences sur les relations inti-mes et amicales. Une étude en cours chez 40 sujetsadultes atteints de DM1 montre que la fatigue est laplainte principale. Elle est excessive pour 68% d’en-tre eux et considérée comme l’un des trois symptô-mes les plus invalidants de leur maladie par 79%des patients évalués. Une meilleure compréhensionde celle-ci pourrait améliorer la prise en charge despatients.

Benjamin GallaisPsychologue clinicienA.T.E.R. Laboratoire dePsychopathologie etNeuropsychologie(EA 2027)Université Paris 8Institut de Myologie, GHPitié-Salpêtrière, [email protected]

32,50%

20%

20%

17,50%

15%

7,50%5%

FatigueDouleursLimite fonctionnelleMyotonieSomnolenceFaiblesse musculaireCognitif

Plainte principale des patientsatteints de DM1 (n = 40)

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FatigueDouleursLimite fonctionnelleMyotonieSomnolenceFaiblesse musculaireCognitif

Plainte principale des patientsatteints de DM1 (n = 40)

Plainte despatients atteintsde DM1 (n = 40).

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Principaux outils d’évaluation de la fatigue

Nombre TypeOutil Dimensions

d’items d’échelle

CIS-Fatigue 20 7-point Likert - FatigueChecklist subjectiveIndividual - ConcentrationStrength - Motivation

- Activité motrice

FSS 9 7-point Likert - Multi-Fatigue dimensionnelleSeverity mais unScale seul score

CFS 11 oui/non - Fatigue physiqueChalder 4-point Likert - Fatigue mentaleFatigueScale

Les cahiers de myologie N°2 AVRIL 2010 23

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l’environnement (état d’alerte cognitif et de tensionsomatique).

La prise en charge pluridisciplinaireLa prise en charge (PEC) pluridisciplinaire de lafatigue nécessite la participation associée desmédecins, rééducateurs et psychologues. Ellerequiert plusieurs étapes. D’abord, l’évaluation de lafatigue qui est réalisée à l’aide d’outils spécifiques etd’un entretien. Puis, l’évaluation des aspects physio-logiques (atteintes respiratoires, endocriniennes,infectieuses, troubles du sommeil…) qui peuventêtre les facteurs étiologiques de la fatigue et leurprise en charge. Des techniques de réentraînementà l’exercice peuvent être proposées (Féasson et al).Si des scores importants subsistent aux échelles defatigue malgré la PEC des éventuels aspects physio-logiques, il peut s’avérer nécessaire de proposer une

PEC psycho-comportementale personnalisée. Eneffet, l’entretien avec le patient est d’une importancecapitale. Il permet d’interpréter le sens des symptô-mes de la fatigue subjective, selon le vécu etl’histoire du patient. La fatigue est fréquemmentassociée au stress chronique, à l’anxiété ou à ladépression. Si la fatigue s’avère être le signerévélateur d’un trouble de l’humeur masqué, ellenécessitera un traitement par psychotrope. De plus,il s’agira de travailler les sentiments de honte, deculpabilité ressentis par le patient autour de lafatigue et de restaurer la confiance et l’estime de cecorps fragilisé et limité.

Les thérapies comportementales et cognitives Les thérapies comportementales et cognitives ontfait leurs preuves dans la PEC de la fatigue associéeau cancer, à la sclérose en plaques ou dans lesyndrome de fatigue chronique.Dans la DM1, la réalité du handicap fonctionnelconduit à des renoncements successifs et à unisolement progressif, accentués par la tendance despatients à être phobiques, anxieux, évitants. Ce replisur soi sera vécu sous la forme d’un sentiment defatigue, accompagné de pensées négatives (perted’estime de soi, dévalorisation, sentiment d’incapa-cité). Ces pensées vont mener à une anticipationnégative de toute activité potentielle, pouvant allerjusqu’à l’évitement et la passivité excessive. Unmoyen de lutter contre ce cercle vicieux serait lamise en place d’un programme cognitif. Il a pourobjectif de modifier les pensées automatiquesnégatives accompagnant la fatigue, ainsi que lesémotions qui en découlent telles que la monotonieet la lassitude.Il convient également d’accompagner le patientdans la gestion des comportements, selon sesmodes de pensée. Les activités seront augmentéesde manière progressive, luttant contre le décondi-tionnement et la solitude. Par exemple, le théra-peute va aider le patient à visualiser son potentielénergétique (par des représentations graphiques ouà l’aide de jetons). Avec sa participation, ce potentielva être géré comme des « actions en bourse », enévaluant les gains et les pertes sur investissement :combien cette activité m’a-t-elle apporté en termesde plaisir ? En termes de fatigue ? Combien est-ceque je peux miser le lendemain ? A noter que lesactivités doivent être proposées graduellement ettoujours liées au plaisir, l’hédonie étant souvent lemeilleur remède contre la fatigue ! Il s’agit ici d’unesensibilisation progressive à l’effort. Une thérapie de type relaxation peut aussi êtreproposée au patient. Celle-ci peut agir sur lesruminations anxieuses. De plus, elle favorisera lamaîtrise et l’investissement corporel. L’associationd’une thérapie comportementale et cognitive etd’une thérapie par la relaxation peut être envisagée.Cependant, les données actuelles ne permettentpas encore d’évaluer l’apport de ces différentesinterventions.

REFERENCES Belmont et al, Ann Readapt Med Phys, 2006, 49(6) : 283-8, 370-4Féasson et al, Rev Neurol, 2009, Epub ahead of print 2009, p 1-10Kalkman et al, J Neurol Neurosurg Psychiatry, 2005, 76(10) : 1406-9

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CAS FAMILIAUXet début < 30 ans

• syndrome dysmorphiqueet/ou • anomalies ECG

KALIÉMIE PERCRITIQUE

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ou

ANDERSENKCNJ2

HOP familialeCACN1AS ou

SCN4Aou

ANDERSEN

normokaliémie ou kaliémie non connuehyperkaliémie hypokaliémie

• accès < 2het/ou

• accès principalement diurneset/ou

• déclenchés par :- Jeûne- Froid- Ingestion de K+

et/ou• myotonie clinique ou EMG

et/ou• incrément au test d’exercice bref répété

• accès > 2het/ou

• accès nocturneset/ou

• déclenchés par :- RRHC

et/ou• pas de modification au

test d’effort bref répété

NKP familialeSCN4A

HYP familialeSCN4A

(ou ANDERSEN)

NON

CMAP : Compound Muscle Action Potential - IP : immobilité prolongée - HOP : paralysie périodique hypokaliémique - HYP : paralysiepériodique hyperkaliémique - NKP : paralysie périodique normokaliémique - RAE : repos après un effort soutenu - RRHC : repas richeen hydrate de carbone - SCN4A : gène codant la sous-unité du canal sodium musculaire - CACN1AS : gène codant le canal calciummusculaire - KCNJ2 : gène codant le canal potassium modificateur interne Kir2.1 - TSH : hormone thyroïdienne - TPP : paralysiepériodique thyrotoxique

REFERENCE Venance SL et al, The primary periodic paralyses : diagnosis, pathogenesis and treatment, Brain, 2006 ; 129 (Pt 1 ) : 8-17

A évoquer devant des accès (récurrents) de paraparésie /quadriparésie d’installation rapide, déclenchéspar RAE et/ou IP sans autre atteinte neurologique associée au moment des accès, avec un décrémentdu CMAP >30% au test d’effort long.

FICHE PRATIQUE

Accès de paralysie périodique :orientation diagnostique

SAVINE VICART

Savine VicartCentre de RéférenceMaladies Rares« CanalopathiesMusculaires »Département deNeurologieHôpital Pitié-Salpêtrière [email protected]

SOURCEAtelier « Paralysiespériodiques » des2e Journées de RechercheClinique 2009 (Marseille).

24 N°2 AVRIL 2010 Les cahiers de myologie

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CAS SPORADIQUEou début > 30 ans

• syndrome dysmorphiqueet/ou • anomalies ECG

KALIÉMIE PERCRITIQUE

Dosage deTSH +++

OUI

si si

ou

Nthyrotoxicose

ANDERSENKCNJ2

HOPsecondaire

normokaliémie ou kaliémie non connuehyperkaliémie hypokaliémie

• accès < 2het/ou

• accès principalement diurneset/ou

• déclenchés par :- Jeûne- Froid- Ingestion de K+

et/ou• myotonie clinique ou EMG

et/ou• incrément au test d’exercice bref répété

• accès > 2het/ou

• accès nocturneset/ou

• déclenchés par :- RRHC

et/ou• pas de modification au

test d’effort bref répété

Autres causes • acidose tubulaire• hyperaldosteronisme

primaire• perte gastro-

intestinale de K+

• traitement hypokaliémant• intoxication barium,

réglisse, caféine

HYP secondaire• médicaments : épargneurs de K+

• insuffisance surrénalienne

TPP • accès récurrents

sur courte périodeet de + en + sévère

• homme, asiatique+ fréquent

si poursuitedes accèsparalytiquesaprèstraitement dela thyroïde

HOP familialeCACN1AS ou SCN4A

ouANDERSEN

NKP familialeSCN4A

HYP familialeSCN4A

(ou ANDERSEN)

NON

NON NON

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MISE AU POINT

La Mesure de Fonction Motrice,une échelle validée pour les MNM

CAROLE BÉRARD, CAROLE VUILLEROT, FRANÇOISE GIRARDOT, DALIL HAMROUN, CHRISTINE PAYAN

La Mesure de Fonction Motrice (MFM) évalue la fonction motrice des enfants et des adultesporteurs d’une maladie neuromusculaire (MNM) quel que soit le niveau de sévérité de lamaladie. L’étude de validation a distingué 3 dimensions : D1 station debout et transferts,D2 motricité axiale et proximale, D3 motricité distale. Avec la passation de 32 items ouseulement de 20 items chez l’enfant de moins de 7 ans, un score total et un score pardimension objectivent la sévérité de l’atteinte chez les patients ayant ou non la possibilité demarcher. Cet outil permet de suivre l’évolution des patients, de prévoir certains événementscomme la perte de la marche et d’évaluer le retentissement des thérapeutiques. Le grandnombre de MFM collecté grâce à la banque de données doit permettre d’affiner ladescription de l’histoire naturelle des maladies.

est parfois délicate. De plus, le testing peut êtrestable alors que la fonction motrice se détériore[Iannacone]. Inversement, la fonction motrice peutêtre inchangée et la force d’un ou de plusieursmuscles modifiée. Les mesures de capacité vitale enlien avec la force des muscles respiratoires sontdépendantes des mesures thérapeutiques mises enœuvre [Barois et al]. En complément des mesuresde force musculaire, les mesures de fonctionmotrice sont donc indispensables pour étudierl’évolutivité des MNM [Scott et al, 2006].Ces 20 dernières années, suite aux travaux deVignos et Brooke, de nombreux outils d’évaluationde la fonction motrice ont été développés. La MFMou Mesure de Fonction Motrice [Bérard et al, 2005 et2006], utilisable chez tous les patients atteints d’uneMNM quel que soit leur statut fonctionnel, a étédéveloppée à partir de 1998.

Outils de mesure de la fonction motrice• Les scores fonctionnelsLes travaux de Vignos en 1963 puis de Brooke en1981 ont permis d’établir les premiers scoresfonctionnels ou functional rating scales. Ces outilspermettent une description simple relativementimagée du patient. Ils donnent rapidement un gradeou un stade évolutif plus qu’une réelle mesure des-criptive quantitative des limitations fonctionnellesmotrices. Ils manquent de précision et de sensibilitéau changement, le changement de fonction motricenécessaire pour passer d’un niveau à un autre étanttrop important. Ces outils sont surtout intéressantsen recherche clinique pour une description de lapopulation d’étude ou pour servir de référence dansdes études de validation d’outils de mesure, mais

Le profil évolutif naturel de nombreuses maladiesneuromusculaires (MNM), qu’elles débutent dansl’enfance ou à l’âge adulte, consiste en une réductionprogressive de la force musculaire entraînant unedégradation des capacités fonctionnelles motricesdes patients. Une meilleure connaissance del’histoire naturelle des maladies et l’appréciation del’effet éventuel des traitements dans le cadre d’es-sais thérapeutiques imposent de disposer d’outilscapables de mesurer de façon précise, fiable etsensible la faiblesse musculaire et son retentisse-ment. Les études de l’histoire naturelle permettentd’améliorer la connaissance des cliniciens, de mieuxinformer les familles en vue de l’aménagement deleur environnement et parfois de prévenir les consé-quences délétères de l’évolution de la maladie. En dehors des mesures de mobilité articulaire,d’activités de vie quotidienne [Vandervelde et al] oude qualité de vie qui ne sont liées qu’indirectement àla force musculaire et dépendent d’autres facteursenvironnementaux ou personnels [Vuillerot et al,2010a], deux types d’outils d’évaluation sont en liendirect avec la faiblesse musculaire : les mesures deforce musculaire et les mesures dites fonctionnel-les. En termes de Classification Internationale duFonctionnement et de la santé (CIF), si les mesuresde force (testing manuel ou quantifié et épreuvesdynamométriques) évaluent la déficience, les mesu-res de fonction motrice permettent une évaluationdes limitations d’activité. Il n’y a pas toujours decorrélation franche entre le testing musculaireet les capacités fonctionnelles [Iannacone]. Chezl’enfant encore plus que chez l’adulte, les mesuresde force sont peu reproductibles dans le cadre d’uneétude multicentrique et la coopération des patients

Carole Bérard [email protected] Vuillerot Françoise GirardotHospices civils de Lyon,Hôpital Femme MèreEnfant, service derééducation pédiatrique Dalil Hamroun Laboratoire degénétique moléculaire,CHU de Montpellier,Inserm U827 Christine Payan Hôpital Pitié Salpétrière,Institut de Myologie, Paris

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sont insuffisamment précis pour être utilisés seulsdans un essai thérapeutique.

• Les tests chronométrésLes tests chronométrés sont un autre type demesure fonctionnelle motrice, actuellement utilisésdans les essais thérapeutiques. Ils consistent àmesurer le temps nécessaire pour passer d’uneposition (assise ou couchée) à une autre (debout) oupour parcourir une distance donnée (10 mètres).Il peut s’agir aussi de mesurer la distance maximaleparcourue par le patient pendant un temps donnépar exemple le « 12 minutes walk test » ou le« 6 minutes walk test » [McDonald et al, 2008 et2009]. Un des inconvénients majeurs de ces testschronométrés est qu’ils ne s’adressent qu’auxpatients pouvant marcher ou capables de réaliserles activités motrices demandées. Ils ne permettentdonc pas de suivre le patient durant toute l’évolutionde sa maladie. Ils apparaissent aussi très dépen-dants de la compliance du patient. Scott et alrapportent une mauvaise reproductibilité « test-retest » liée aux possibles erreurs de mesures dutemps, même si les positions de départ et d’arrivéesont parfaitement définies [Scott et al, 2006].

• Les échelles fonctionnellesLes échelles de mesure quantitative de la fonctionmotrice ont été développées ces 10 dernièresannées. Le patient est soumis à une série d’exerci-ces, la qualité de réalisation de chaque exercice (ouitem) étant cotée sur une échelle de valeur allant deparfaitement réalisé à totalement échoué. Cetteéchelle de valeur ou échelle de Likert peut être auminimum binaire (0 pour échoué et 1 pour réussi) etau maximum décrire très précisément en différentsniveaux la qualité du mouvement. Une cotationdétaillée permet une estimation plus précise etgarantit une meilleure sensibilité au changementsi la reproductibilité est bonne [Bérard et al, 2008].Le nombre d’items constitutifs de l’outil est aussiun critère important. Il détermine la faisabilité del’échelle (temps de passation) mais participe aussià la validité de l’outil.Certaines échelles ne s’adressent qu’aux patientsambulants [O’Hagen et al ; Scott et al, 1982 ; Mazzoneet al]. Elles sont donc difficilement utilisables pour lesuivi de l’évolution de certaines MNM au cours delaquelle certains patients peuvent perdre la marche.

La MFM, une construction par étapes La construction de la MFM s’est inspirée des princi-pes ayant présidé à la construction de la GMFM

(Gross Motor Function Measure) : échelle de Likerten 4 niveaux, manuel de l’utilisateur avec consignesde cotation détaillées, précision des positions dedépart.

• Selon l’âge des patientsLa « MFM-32 », de 6 à 60 ans

Une cinquantaine d’équipes de 10 pays européens etnord-américains ont coopéré, initialement, au projeten commentant une version provisoire de 75 items.Un groupe d’étude francophone fut alors constituépour la rédaction d’une 1re version de la MFM(51 items). Celle-ci fut testée chez 376 patientsadultes et enfants (entre 2000 et 2001). A l’analysedes résultats, les items de cette version se regrou-paient en 3 dimensions : D1, appelée station deboutet transferts ; D2, motricité axiale et proximale et D3,motricité distale. La 2e version réduite à 32 items futla version définitive, validée entre 2002 et 2003 parl’étude de 303 patients âgés de 6 à 60 ans [Bérard etal, 2005]. La sensibilité au changement de cetteversion définitive fut testée en 2003-2004 chez152 patients [Bérard et al, 2006].

La « MFM-20 », pour les jeunes enfantsLa durée de passation de la MFM-32 et la complexitéde certains items n’étaient pas adaptées à de jeunespatients. L’étude initiale n’avait pas pris en comptele développement psychomoteur du jeune enfant.La MFM-32 a été testée chez 191 enfants validesâgés de moins de 7 ans. Ont été retenus pour laconstruction de la MFM-20 les items pour lesquelsau moins 80% des enfants avaient obtenu un scoremaximal [De Lattre et al]. La validation de cette ver-sion courte a été réalisée, entre mars 2008 et mars2009, avec la participation de 88 enfants atteints demaladie neuromusculaire et âgés de 2 à 7 ans.

• Selon la pathologie Les maladies significativement représentées lorsde l’étude de validation de la MFM-32 étaient :dystrophie musculaire de Duchenne et de Becker(DMD/DMB), myopathie facio-scapulo-humérale(FSH), dystrophie myotonique de Steinert (DM1),myopathie des ceintures, amyotrophie spinale infan-tile, dystrophie musculaire congénitale, myopathiecongénitale et neuropathies héréditaires. A ce jour,l’utilisation de la MFM dans d’autres pathologiescaractérisées par une faiblesse musculaire a permisde confirmer son intérêt dans le suivi de ces patho-logies (exemple : la maladie de Pompe).En pratique, toute affection se caractérisant princi-palement par une faiblesse musculaire peut êtreévaluée par la MFM.

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Différentes échelles fonctionnelles motrices avec leurs principales caractéristiques

HAMMERSMITH HAMMERSMITH MODIFIED EXPANDED MOTOR NORTH STARMOTOR FUNCTIONAL HAMMERSMITH HAMMERSMITH FUNCTION AMBULATORYABILITY SCALE MOTOR FUNCTIONAL FUNCTIONAL MEASURE ASSESSMENT(HMAS) SCALE (HFMS) MOTOR SCALE MOTOR SCALE (MFM) (NSAA)

Population concernée Enfants Enfants Enfants Enfants Enfants et adultes Enfants

Pathologies concernées DMD DMD DMD

ASI II & III ASI II & III ASI III ASI

Autres pathologiesneuromusculaires

Statut fonctionnel Ambulant Non ambulant Non ambulant Ambulant Ambulant et Ambulantnon ambulant

DESCRIPTION

Formation à l'utilisation Non Non Non Non Oui Ouiconseillée

Nombre d'items 20 20 20 33 32 (> 7 ans) 17de l'échelle 20 (<7 ans)

Durée de la passation 10-15 minutes 15-30 minutes 36 minutesen moyenne mais aucune (MFM 32)

moyenne 20-30 minutes 10 minutesexacte notée (MFM 20)

Cotation 0-1-2 0-1-2 0-1-2 0-1-2 0-1-2-3 0-1-2

versions disponibles anglais anglais anglais anglais français, anglais, portugais anglaishollandais, espagnol

QUALITÉS MÉTROLOGIQUES

Tous les items ont été Adaptation depassés à des enfants Modifications de l'échelle auxcontrôles sains à partir l'HFMS pour qu'elle Association 20 patients DMDde 10 mois pour déterminer soit utilisable en items HFMS sous corticoïdes: l'âge de 30 mois puis à une multicentrique chez + 13 items identification de

méthodologie de population d'enfants les enfants séléctionnés quelques itemsconstruction atteints d'ASI < 30 mois dans la GMFM Cf texte de l’article supplémentaires +

items de la HMASCorrélation Corrélation Spearman Spearman = pour le score total: Scores0,97 (GMFM 75) EVA médecin (0,88), chronométrés= 0,90 (grades EVA kiné (0,91), cités mais fonctionnels Vignos (0,91), aucune

Validité contre critère non validés) Brooke (0,85), MIF (0,91) publicationAnalyse en composantesprincipales avec rotationvarimax. Identificationdes 3 dimensions expliquant 75% de lavariance. Cohérenceinterne = coefficient deCronbach entre 0,89 et 0,98

Analyse factorielle pour les dimensions etValidité de construit 0,99 pour le score total

Population de 35 enfantsICC > 0,99Coefficient de corrélation

Fiabilité interobservateur entre 0,9 et 1 ICC=0,953 (95%CI) ICC=0,96 (95%CI) ICC=0,995(95%CI)

Fiabilité intraobservateur ICC=0,986 (95%CI) ICC=0,99 (95%CI) ICC=0,99 (95%CI) ICC=0,95(95%CI)

Sensibilité au changement Cf texte de l’article

RÉFÉRENCES [Scott 1982] [Main 2003] [Krosschell 2006] [O'Hagen 2007] [Bérard 2005] [Mazzone 2009][Vuillerot ASI 2009-2010]

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Qualité métrologique des MFM-32 et 20Le travail de validation a été mené en collaborationavec des spécialistes de la méthodologie. L’étudestatistique des données recueillies, lors de l’étudede validation de la MFM, a confirmé les propriétésmétrologiques suivantes : bonne reproductibilitéinter et intra-observateur de tous les items, scoresdimensionnels et score total ; validité du construitavec analyse factorielle (identification des 3 dimen-sions), validité convergente (corrélations avec d’au-tres critères de mesure : Grades de Brooke etVignos, MIF ou Mesure d’Indépendance Fonction-nelle, l’impression clinique globale des thérapeutesCGI-sévérité), validité discriminante (selon les diag-nostics, la sévérité) ; sensibilité au changement(comparaison des variations des scores selon lesappréciations des patients, médecins et kinésithéra-peutes sur l’évolution de l’atteinte motrice).Ces propriétés restent inchangées lorsqu’on réduitl’échelle aux 20 items sélectionnés pour la versionenfant. Elles sont confirmées dans la populationd’enfants (présentant les mêmes pathologies,excepté la FSH, que celles étudiées lors de la valida-tion de la MFM-32) ayant participé à sa validation.Les résultats préliminaires montrent une bonnereproductibilité inter et intra-observateur de tous lesitems sauf un et l’identification des trois dimensionspar analyse factorielle.

La MFM en pratique Un manuel de l’utilisateur de la MFM, détaillé et pré-cis, facilite la cotation des performances de chaquepatient. L’utilisation de la MFM chez les marchantset les non marchants permet de garder le mêmeoutil de suivi pour un patient atteint de DMD oud’amyotrophie spinale type III, même après la pertede la marche. En France et à l’étranger, de nom-breuses consultations assurant le suivi des patientsatteints de MNM utilisent la MFM en routine. C’est,le plus souvent, le kinésithérapeute qui évalueannuellement les capacités motrices du patient.Ceci permet de suivre l’évolution de la maladie ainsique le retentissement d’événements intercurrentsou thérapeutiques. Dans le cadre d’une consultationpour adultes, Bénaïm apprécie l’outil en particulierpour les patients atteints de dystrophie myotoniqueet de myopathie facio-scapulo-humérale. Il proposede compléter l’évaluation fonctionnelle fournie parla MFM avec un testing de la face [Bénaïm et al].Dans le cadre d’une étude spécifique, une seuledimension peut être examinée : Pangalila utilise les6 items distaux des membres supérieurs dans unepopulation d’adultes DMD.

• Une formation nécessaireAfin de se familiariser à l’utilisation de la MFM et àses principes de passation rigoureuse, une forma-tion est préconisée. Elle peut se faire auprès d’uncollègue déjà formé ou en participant à une journéede formation. Durant cette journée, les précisionsapportées par le formateur et les discussions entreles participants améliorent les compétences del’utilisateur et concourent à l’amélioration de l’outil.Le contrôle du bon usage de la MFM est effectué avecla passation d’un test de validation en fin de sessionde formation. De juin 2004 à novembre 2009, plus de470 thérapeutes ont bénéficié d’une formation à laMFM, principalement des kinésithérapeutes, desmédecins et des ergothérapeutes. La formation estégalement proposée aux psychomotriciens. EnFrance métropolitaine et outremer, en Angleterre, enHollande et au Liban, la formation a été dispenséepar le même professionnel. En pratique clinique, laformation est souhaitable et il est recommandé des’entraîner avec au moins deux sujets avant de pren-dre en compte les cotations attribuées. Dans uncontexte de recherche, elle est indispensable et uneréussite au test de validation (de fin de session) estimpérative pour la pratique de la MFM. Une actualisation des compétences de l’utilisateurde la MFM est possible par l’analyse de clips vidéodisponibles sur le site www.mfm-nmd.org. Le théra-peute peut réaliser autant de sessions « Quizz »qu’il le souhaite et vérifier ainsi ses compétences.En amont de la participation à une recherche clini-que, il peut être demandé aux investigateurs d’obte-nir une note minimale de huit à deux sessions du« Quizz compétences ». Une actualisation des com-pétences est également proposée aux investigateurslors d’études cliniques pour lesquelles la MFM estun des critères d’évaluation.Un DVD d’autoformation sera disponible courant2010 permettant ainsi aux thérapeutes isolés de seformer avec rigueur. Un CD d’initiation à l’utilisationde la MFM est disponible pour les instituts de forma-tion en masso-kinésithérapie.

• La passation et la cotationLe matériel nécessaire à la passation de la MFM setrouve habituellement dans une salle de kinésithé-rapie. Quelques instruments sont nécessaires : unchronomètre, un CD collé sur une feuille cartonnée,dix pièces de monnaie, une balle de tennis, une tableet une chaise réglables en hauteur ou des modèlesde tailles différentes si l’on évalue des enfants. Lepatient évalué par la MFM doit être dans une tenuene gênant pas les mouvements et pieds nus. Si le

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Items MFM 32 (de 6 à 60 ans)Items MFM 20 (enfant de moins de 7 ans)1 COUCHE SUR LE DOS, TÊTE DANS L'AXE : maintient la tête dans l'axe puis la tourne complètement

d'un côté puis de l'autre. 2 COUCHE SUR LE DOS : soulève la tête et la maintient soulevée.3 COUCHE SUR LE DOS : fléchit la hanche et le genou de plus de 90° en soulevant le pied du tapis

durant tout le mouvement.4 COUCHE SUR LE DOS, JAMBE SOUTENUE PAR L'EXAMINATEUR : de la position pied en flexion

plantaire, réalise une flexion dorsale du pied à 90° par rapport à la jambe.5 COUCHE SUR LE DOS : soulève la main et la porte jusqu'à l'épaule opposée.6 COUCHE SUR LE DOS, MEMBRES INFERIEURS DEMI FLECHIS, ROTULES AU ZENITH, PIEDS SUR

LE TAPIS LEGEREMENT ECARTES : soulève le bassin ; la colonne lombaire, le bassin et les cuissessont alignés et les pieds légèrement écartés.

7 COUCHE SUR LE DOS : se retourne sur le ventre et dégage les membres supérieurs de dessous letronc.

8 COUCHE SUR LE DOS : sans appui des membres supérieurs s'assied.9 ASSIS SUR LE TAPIS : sans appui des membres supérieurs, maintient 5 secondes la position assise

puis maintient 5 secondes un contact entre les 2 mains.10 ASSIS SUR LE TAPIS, LA BALLE DE TENNIS DEVANT LE SUJET : sans appui des membres

supérieurs se penche en avant, touche la balle puis se redresse.11 ASSIS SUR LE TAPIS : sans appui des membres supérieurs, se met debout.12 DEBOUT : sans appui des membres supérieurs, s’assied sur la chaise en gardant les pieds

légèrement écartés.13 ASSIS SUR LA CHAISE : sans appui des membres supérieurs et sans appui contre le dossier de la

chaise, maintient 5 secondes la position assise, tête et tronc dans l’axe.14 ASSIS SUR LA CHAISE OU DANS SON FAUTEUIL, TETE POSITIONNEE EN FLEXION : de la position

tête fléchie complètement, relève la tête puis la maintient relevée 5 secondes, le mouvement et lemaintien se faisant tête dans l’axe.

15 ASSIS SUR LA CHAISE OU DANS SON FAUTEUIL, AVANT-BRAS POSES SUR LA TABLE, COUDESEN DEHORS DE LA TABLE : porte en même temps les 2 mains sur le sommet du crâne, la tête etle tronc restant dans l’axe.

16 ASSIS SUR LA CHAISE OU DANS SON FAUTEUIL, LE CRAYON SUR LA TABLE : sans bouger le tronc,atteint le crayon avec la main, avant-bras et main soulevés de la table, coude en extension complèteen fin de mouvement.

17 ASSIS SUR LA CHAISE OU DANS SON FAUTEUIL, 10 PIECES DE MONNAIE SUR LA TABLE : prendsuccessivement et stocke 10 pièces dans une main au bout de 20 secondes.

18 ASSIS SUR LA CHAISE OU DANS SON FAUTEUIL, UN DOIGT POSE AU CENTRE D'UN CD FIXE : faitle tour du CD avec le doigt, sans appui de la main.

19 ASSIS SUR LA CHAISE OU DANS SON FAUTEUIL, LE CRAYON SUR LA TABLE : prend le crayon puisdessine une série continue de boucles sur toute la longueur du cadre touchant les bords supérieuret inférieur du cadre.

20 ASSIS SUR LA CHAISE OU DANS SON FAUTEUIL, LA FEUILLE DE PAPIER DANS LES MAINS :déchire la feuille pliée en 4 en commençant par le pli.

21 ASSIS SUR LA CHAISE OU DANS SON FAUTEUIL, LA BALLE DE TENNIS SUR LA TABLE : soulèvela balle puis retourne la main complètement en tenant la balle.

22 ASSIS SUR LA CHAISE OU DANS SON FAUTEUIL, UN DOIGT POSE AU CENTRE DU CARRE : sou-lève le doigt puis le pose successivement sur les 8 dessins de la figure sans toucher le quadrillage.

23 ASSIS SUR LA CHAISE OU DANS SON FAUTEUIL, MEMBRES SUPERIEURS LE LONG DU CORPS :pose en même temps les 2 avant-bras et/ou les mains sur la table sans bouger le tronc.

24 ASSIS SUR LA CHAISE : sans appui des membres supérieurs, se met debout les pieds rapprochés.25 DEBOUT AVEC APPUI DES MEMBRES SUPERIEURS SUR UN MATERIEL : sans appui des membres

supérieurs maintient 5 secondes la position debout pieds légèrement écartés, tête, tronc et mem-bres inférieurs dans l’axe.

26 DEBOUT, AVEC APPUI DES MEMBRES SUPERIEURS SUR UN MATERIEL : sans appui des membressupérieurs, lève un pied 10 secondes.

27 DEBOUT : sans appui, touche le sol avec une main puis se relève.28 DEBOUT SANS APPUI : fait 10 pas en avant sur les 2 talons.29 DEBOUT SANS APPUI : fait 10 pas en avant sur une ligne droite.30 DEBOUT SANS APPUI : court 10 mètres.31 DEBOUT SUR UN PIED SANS APPUI : saute sur un pied 10 fois de suite sur place.32 DEBOUT SANS APPUI : sans appui des membres supérieurs, atteint la position accroupie puis se

relève 2 fois de suite.

Dimension

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port du corset est indispensable, la cotation est 0pour certains items. Selon les items, le sujet estinstallé en position couchée sur le dos, assise oudebout. Pour la passation de certains items, le sujetpeut être assis dans son fauteuil roulant.Pour chaque item, le manuel de l’utilisateur définitla position de départ et la « tâche à accomplir » quiindique l’action testée. Le thérapeute donne uneconsigne en fonction des différents niveaux de cota-tion, des performances attendues, de l’âge et duniveau de compréhension du sujet. Pour la cotationde chaque item, le sujet peut réaliser deux essais.Un 2e essai est proposé dans la mesure où l’exami-nateur pense que le sujet peut obtenir un meilleurscore que celui obtenu au 1er essai, le meilleur desdeux résultats est gardé. Si l’examinateur hésiteentre deux cotations, il retient la plus basse. Pour lesitems concernant un côté, le sujet choisit le côtétesté avant de passer l’item. Si l’examinateur ledemande ou si le sujet le désire, deux essais peuventêtre réalisés de chaque côté. La meilleure perfor-mance réalisée est prise en compte pour le calculdes scores.Sauf précision spécifique, la MFM doit être passéesans aide manuelle apportée par l’examinateur ouune tierce personne. En revanche, l’examinateurencourage le patient afin qu’il obtienne la meilleurecotation possible. Tout au long du test, l’examinateurdoit être vigilant au risque de chute d’un sujet quitenterait des performances motrices au-delà de sespossibilités. L’étude de validation a montré que laplupart des sujets ont une bonne connaissance deleurs capacités motrices et refusent de passercertains items ou certaines cotations qui lesmettraient en danger. Il est néanmoins nécessaired’encourager les sujets à tenter des items. Au coursde l’étude de validation, la passation de l’échelle apermis de révéler des possibilités motrices insoup-çonnées dans 14% des cas.La passation de l’échelle doit se dérouler en uneseule séance si possible ou en deux séances espa-cées au maximum de 7 jours. Le temps de passationde la MFM est de 30 à 40 minutes pour la MFM-32 etde 20 à 30 minutes pour la MFM-20. Le tempsmoyen de passation de 36 minutes, calculé lors del’étude de validation de la MFM-32, apparaît tropimportant à certaines équipes qui privilégient dansleur pratique des échelles plus rapidement passées.Plusieurs critères essentiels à la reproductibilité età la sensibilité au changement d’une échelle entraî-nent un temps de passation non compressible.Il s’agit de la précision de la position de départ, desconsignes et du détail des cotations. Respecter ces

critères exige un investissement en temps pour lethérapeute et le patient [Bérard et al, 2008]. La feuille de cotation visualise la dimension de cha-que item et facilite la transcription des cotationsainsi que les calculs des scores pour la MFM-32 etla MFM-20. Les lignes « commentaires » de lafeuille de cotation et l’espace de saisie de la banquede données MFM permettent de noter toutes lesparticularités observées lors de la passation.Certains commentaires renseignent sur la cotationdonnée et sont utiles pour l’interprétation des scoreset leur évolution dans le temps. Les scores pardimension et le score total sont exprimés enpourcentage par rapport à la cotation maximalereprésentant ainsi un score de réussite (100% =aucun déficit). Pour les MFM enregistrées dans laBanque de données, le calcul des scores et leurreprésentation graphique sont automatiques.

• La banque de données MFMDepuis 2007, la banque de données MFM recueilleles résultats des MFM passées chez tout sujetenfant ou adulte présentant une maladie neuromus-culaire identifiée ou suspectée. La création s’estfaite en collaboration avec D. Hamroun et C. Béroudà Montpellier (Inserm U827, directeur M. Claustres)qui coordonnent la mise en place des banques dedonnées UMD (Universal Mutation Database). Labanque de données MFM est accessible gratuite-ment aux différents centres d’évaluation français etétrangers. Elle permet à tout praticien identifié,rééducateur ou médecin, de recueillir et de consul-ter ses données. La banque de données a fait l’objetd’une déclaration à la CNIL (Commission Nationalede l’Informatique et des Libertés) (N° 1255105,septembre 2007). Son fonctionnement est régi parune charte et un règlement intérieur.

• Le comité de pilotage Le comité de pilotage MFM est le garant de laqualité scientifique de la MFM. Il veille à la rigueurdes études utilisant les données de la banque.Il s’occupe de la diffusion de l’outil sur le plan interna-tional. Il assure la qualité des traductions du manuelde l’utilisateur et diffuse les outils de formation.

La MFM en recherche clinique• Dystrophie musculaire de Duchenne (DMD)Soixante douze patients atteints de DMD [Vuillerot etal, 2010b], non traités par corticoïdes, ont participéà l’étude de validation de la 2e version. Il apparaîtune décroissance exponentielle et progressive dela fonction motrice des patients en fonction de l’âge,

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0

ne marchant pasmarchant

Agey = 185,82eR2 = 0,6354

Score total de MFM en fonction de l’âge chez 72 patients avec DMD

0 10 20 30 40 50 60 70

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■ γ - 0,6713x + 82,652

γ - 0,8477x + 49,77

■ SMA IISMA IIILinéaire (SMA II)Linéaire (SMA III)

Score total de MFM en fonction de l’âge dans les trois types d’amyotrophie spinale infantile

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confirmant les données connues concernant l’évolu-tion motrice dans la DMD. La représentation graphi-que des scores totaux en fonction de l’âge permetde définir, à un âge donné, un degré de sévérité« moyen » et des écart-types. Cette classificationpeut être utile pour définir et comparer des petitsgroupes de patients dans des essais cliniques.Dans l’étude de sensibilité au changement, 41patients (14,1 ± 5,4 ans), sans corticoïdes, ont étéinclus et évalués par la MFM à deux reprises (inter-valle d’un 1 an entre les deux). Treize patientségalement non traités (11,7 ± 1,9 ans) ont été incluset évalués à deux reprises avec un intervalle detrois mois. Enfin, 12 patients traités par corticoïdes(10,1 ± 2,1 ans) ont été comparés en terme de scoretotal de MFM à 12 patients non traités appariésselon l’âge et la fonction motrice.Sur une période de trois mois, le seul score MFMmontrant une diminution significative est le score D1(station debout et transferts). Sur une période d’unan, les scores D1, D2 (motricité axiale et proximale),D3 (motricité distale) et le score total MFM montrent

une diminution significative. Durant l’étude, sixpatients ont perdu la marche à un âge moyen de 9,4ans. Sur une période d’un an, il existe une différencesignificative de l’évolution de la fonction motricemesurée par la MFM dans le groupe de 12 patientstraités par corticoïdes avec une stabilisation de lafonction motrice, contrairement au groupe non traitédont la fonction motrice continue à diminuer.

• Amyotrophie spinale infantile (ASI) Une étude rétrospective a été réalisée dans unepopulation de patients atteints d’une ASI ayantbénéficié d’au moins une MFM durant leur suivi[Vuillerot et al, 2009]. Quatre-vingt-quatorze patientsatteints d’une ASI (ASI de type I, de type II et de typeIII), âgés de plus de 6 ans, ont été inclus dans cetteétude. Celle-ci a été menée, en France, en Belgiqueet en Suisse, dans 18 services spécialisés dans lesuivi de patients atteints d’une maladie neuromus-culaire. Un total de 164 MFM a été réalisé chez cespatients. Quarante patients ont été évalués au moinsdeux fois par la MFM avec un intervalle allant de

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Score total de MFM en fonction de l’âge dans les trois types d’amyotrophie spinale infantile

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1 mois à 5 ans et demi (28 patients ont bénéficié d’unsuivi supérieur à un an).En terme d’évolution de fonction motrice mesuréepar la MFM, l’ASI apparaît comme une seule etmême maladie avec une gravité variable. Une clas-sification de sévérité peut être établie à partir de laMFM. De même, il existe une relation inverse entrela fonction motrice et l’âge des patients atteintsd’ASI de types II et III. En effet, il est observé unediminution de la fonction motrice chez les patientsles plus âgés. Chez les patients ayant eu un suiviinférieur à six mois, il n’existe pas de différencesignificative entre les scores MFM. Par contre pourles patients ayant bénéficié de deux MFM à plus desix mois d’intervalle, il est observé une diminutionsignificative (-3,05% par an) pour la dimension D2dans l’ASI de type II et pour la dimension D1 (-6,22%par an) dans l’ASI de type III (âge 10 à 15 ans). Cesrésultats confirment la dégradation dans le temps descapacités motrices des patients quels que soient letype de l’ASI et l’âge (Barois et al).

• Dans d’autres pathologies Lors de la mise en place d’études de l’histoire natu-relle de maladie, la MFM a été retenue pour le suivide patients présentant une forme à début tardif de lamaladie de Pompe (glycogénose de type II) ou uneforme de déficit en calpaïne 3, formes caractériséespar une progression très lente de la myopathie. Cesétudes permettent de comparer les résultats obte-nus avec la MFM et d’autres mesures, telles que desmesures de force quantifiée (QMT), de testingmanuel (MMT) et de tests chronométrés. Dans lamaladie de Pompe, les résultats préliminaires mon-trent une corrélation entre la durée de la maladie etles scores de la MFM, notamment pour le score D1.Une corrélation modérée a été observée avec lescore total ou MMT : certains patients présentantdes atteintes respiratoire et motrice très sévèresayant des scores préservés sur un certain nombrede muscles testés mais un score total à la MFM trèsfaible. Sur une période de douze mois, la diminutiondu score total MFM (chez des patients non traitéspar enzymothérapie substitutive) était en moyennede trois points (pour un score initial de 70%). Chezles patients présentant une calpaïnopathie, il a aussiété montré une bonne corrélation du score total avecla durée de la maladie et une corrélation importanteavec le score total du MMT. En terme d’évolution, lespentes calculées sur deux ans des différents scores(Total, D1, D2) étaient faibles mais significatives(environ 2% par an pour le score total pour un scoreinitial de 55).

Une diffusion internationaleSuite à la publication des résultats de l’étude devalidation et à la présentation de l’échelle dansplusieurs congrès internationaux, de nombreuxcontacts ont été établis dans les cinq continents etplusieurs traductions ont été réalisées. Pour validerune traduction, outre une traduction reverse, unworkshop de validation est proposé. Au cours de ceworkshop, les textes des items sont contrôlés àl’aide de clips vidéo. Un copyright protège les textes.Parmi les non-francophones, les néerlandais et lesbrésiliens ont été les plus intéressés et ils ont dif-fusé la MFM dans leurs pays respectifs (Iwabe et al).L’adoption de la MFM par de nombreuses équipesdoit faciliter le suivi des patients et les travauxmulticentriques de recherche clinique. L’identifica-tion d’un référent, dans chaque pays utilisateur, doitfaciliter la diffusion de l’échelle et permettre uneformation homogène.

Les référents internationaux Royaume Uni (UK) : Marion Main, Pays Bas :Imelda de Groot, Belgique : Nathalie Goemans(partie flamande) et Anne Renders (partie fran-cophone), Brésil : Cristina Iwabe, Turquie : InalSerap, Portugal : José Corte Real, Espagne :David Salicio, Liban : Rayan Bou Serhal.

Une réunion annuelle à l’Institut de Myologie, enlien par visioconférence avec les pays les pluséloignés, doit assurer une cohésion de l’ensembledes professionnels et le partage des connaissances.La 1re réunion a eu lieu en juillet 2009.Depuis 2007, un site internet facilite la diffusion desinformations concernant la MFM et son développe-ment. Il est développé en trois langues : français,anglais et espagnol.

Sur le site www.mfm-nmd.org se trouvent tou-tes les informations concernant l’historique de laMFM, les publications, les projets de recherche,les possibilités de formation (avec les dates etlieux des différentes sessions) et l’accès au quizzpermettant l’actualisation des compétences. Le Manuel de l’utilisateur et la feuille de cotationsont téléchargeables gratuitement dans lesdifférentes langues. Enfin, il est possible de s’inscrire à la newsletterpour recevoir deux ou trois fois par an les actua-lités concernant la MFM.

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McDonald C. M. et al, Neuromuscul Disord, 2009, 19(8-9) : 601-2Main M. et al, Eur J Paediatr Neurol, 2003, 7(4) : 155-9Mazzone E. S. et al; Neuromuscul Disord, 2009, 19(7) : 458–61.O'Hagen J. M. et al, Neuromuscul Disord, 2007, 17(9-10) : 693-7Scott E. et al, Dev Med Child Neurol, 2006, 48(6) : 540-4Scott O. M. et al, Muscle Nerve,1982, 5(4) : 291-301 Vandervelde L. et al, Neuromuscul disord, 2007, 17(6) : 459-69 Vignos P. J. et al, J Am Med Assoc, 1963, 184 : 89-96.Vuillerot C. et al, J Adol Health, 2010a, 46(1) : 70-6Vuillerot C. et al, Dev Med Child Neurol, 2010b, 52 : 60-65Vuillerot C. et al, Neuromuscul disord, 2009, 19(8-9) : 573

Abstract The MFM is a generic tool measuring the impactof muscular weakness on posture (head posture,sitting position, upright position) and motion (head,trunk, upper and lower limbs) in neuromuscularpatients. The MFM can be used in ambulant andnon-ambulant patients irrespective of diseaseseverity. Specific movements with a rigorouslydefined starting position are carried out by thepatient without any outside assistance and arescored from 0 (failed) to 3 (normal). A user’smanual describes the possible compensations andappropriate scoring of each situation. The validatedversion MFM-32 for patients from 6 to 60 years oldand the validated version MFM-20 for children from2 to 6 years old follow 3 dimensions : D1 (uprightposition and transfers), D2 (axial and proximalmotricity) and D3 (distal motricity). A global scoreand a score for each dimension are expressedin percentages. A multilingual website (www.mfm-nmd.org) facilitates dissemination of theinformation and developments related to the MFM.

Keywords : measure - scale - evaluation – motorfunction – neuromuscular disease

Résumé La MFM est une mesure générique évaluant leretentissement de la faiblesse musculaire sur laposture (tenue de tête, station assise, positiondebout) et le mouvement (tête, tronc, membressupérieurs et inférieurs) dans les maladies neuro-musculaires. La MFM est utilisable pour les patientsayant ou non conservé la marche quelle que soit lasévérité de la maladie. Des exercices précis avecune position de départ définie de façon rigoureusesont exécutés par le patient sans aide extérieure etsont cotés de 0 (échoué) à 3 (réalisation normale).Un manuel de l’utilisateur décrit les compensationspossibles et la cotation de chaque situation. Laversion MFM-32, validée de 6 à 60 ans et la versionMFM-20, validée de 2 à 6 ans sont composées detrois dimensions : D1 (station debout et transferts),D2 (motricité axiale et proximale) et D3 (motricitédistale). Un score total et un score par dimensionsont exprimés en pourcentage. Un site www.mfm-nmd.org, en anglais, espagnol et français, facilite ladiffusion des informations concernant la MFM et sondéveloppement.

Mots clés : mesure - échelle – évaluation - fonctionmotrice – maladie neuromusculaire

REFERENCESBarois A. et al, Bull Acad Natle Méd, 2005,189(6) : 1181-99Bénaïm C. et al, Rev neurol (Paris), 2010, 166(1) : 49-53Bérard C. et al, Neuromuscul Disord, 2005, 15(7) : 463-70Bérard C. et al, Rev Neurol (Paris), 2006, 162(4) : 485?93Bérard C. et al, Neuromuscul Disord, 2008,18(7) : 593-4Brooke M. H., Muscle Nerve, 1981, 4(3) : 186-97De Lattre C. et al, Neuromuscul disord, 2009,19(8-9) : 571Iannaccone S. T., Arch Neurol, 2002, 59(9) : 1445-50Iwabe C. et al, Rev Bras Fisioter, 2008, 12(5) : 417-24Krosschell K. J. et al, Neuromuscul Disord, 2006, 16(7) : 417-26McDonald C. M. et al, Neuromuscul Disord, 2008, 18(9-10) : 739

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LU POUR VOUS

SMA : un nouvel aminoglycoside pour franchir le codon stopJEAN-THOMAS VILQUIN COMMENTAIRE

Plusieurs stratégies moléculaires sont dévelop-pées afin de parvenir à la production de messa-gers utiles à partir du gène SMN2 (trans-épis-sage, actions sur des séquences enhancers ousilencers situées dans l’exon 7). Le concept pro-posé relève indirectement du mécanisme connuconsistant à "court-circuiter" un codon stop al’aide de molécules de la classe des aminosidesou ayant des propriétés stériques similaires(Welch EM et al, Nature, 2007, 447 : 87-91).Habituellement, ce court-circuit est utilisé pourrétablir une protéine dans son intégrité, à l’excep-tion d’un acide aminé aléatoire intégré à la placede l’information de terminaison. Dans cette étude,ce court-circuit est mis à profit en aval de lamutation, afin d’obtenir un produit hétérologue delongueur supérieure. La protéine SMN naturelleparticipe à l’assemblage et au transport decomplexes ribonucléoprotéiques nucléaires et laraison pour laquelle les motoneurones sont parti-culièrement sensibles au défaut de SMN n’est pasdéterminée. Le mécanisme de la fonctionnalitédes protéines SMN hétérologues n’est, à plusforte raison, pas élucidé. Cependant, leurqualité thérapeutique mérite d’être approfondie.Les réserves que l’on peut émettre concernent latoxicité “moléculaire” de ce nouvel aminoglyco-side. Il est proposé de court-circuiter un codonstop naturel, probablement stabilisé, ce qui peutamener des questionnements quand à l’effet decette molécule sur tous les autres codons stopnaturels.

Un nouvel aminoglycoside TC007 est utilisé dans des modèlescellulaires et animaux de l’amyotrophie spinale (SMA). Dansdes cultures de motoneurones dérivés à partir de cellules iPSde patients atteints de SMA, une augmentation des niveaux deSMN intracellulaires (comptage des inclusions appelées“gems”) a été observée. Dans un modèle murin de SMA, aprèsadministration directe du TC007 dans le système nerveuxcentral, la production de SMN dans le cerveau et la moelleépinière ainsi que le nombre de cellules dans la corne ventraleont augmenté. De même, l’espérance de vie a été amélioréede 27%. Dans ce modèle à courte durée de vie (deux semaines),les injections intracérébrales répétées n’ont pas présenté detoxicité. L’amyotrophie spinale est due à la perte de fonctionnalité dugène SMN1. Une copie quasi identique de ce gène (SMN2) estprésente chez l’Homme, mais contient une simple transitionC-T dans l’exon 7 qui bloque la fonction d’un site enhancernaturel et entraîne la formation d’une isoforme majoritairetronquée et intrinsèquement instable. Tel quel, le gène SMN2ne peut donc suppléer le déficit en protéine SMN normale, carla protéine SMN tronquée est rapidement dégradée. Desséquences hétérologues, allongées, peuvent compenser par-tiellement le déficit initial. Ainsi, des molécules de la familledes aminoglycosides permettent d’augmenter le taux d’uneprotéine SMN fonctionnelle dans des fibroblastes de patientsen culture. Ces molécules agiraient sur le premier codon stopsitué dans l’exon 8 et ne tenant pas compte du signal d’arrêt,favoriseraient l’élongation de la protéine tronquée en lui ajou-tant cinq acides aminés.

Mattis VB, Ebert AD, Fosso MY, Chang CW, Lorson CL, Delivery of aread-through inducing compound, TC007, lessens the severity of a spinalmuscular atrophy model, Hum Mol Genet , 2009, 18 : 3906-13

Préclinique

Jean-Thomas Vilquin Institut de MyologieInserm U974 - UPMCUMR S974CNRS UMR 7215Hôpital Pitié-Salpêtrière,[email protected]

Administration locorégionale de plasmides par voie veineuseJEAN-THOMAS VILQUIN COMMENTAIRE

Un plasmide contenant le cDNA complet de la dystrophinemurine a été administré à des souris mdx et à des souriscontrôles par voie veineuse sous légère pression hydrodyna-mique. Différentes combinaisons ont été testées (âge dessouris, volume d’injectat et vitesse d’injection, promoteurs).L’injection dans une patte postérieure est réalisée par voiepercutanée dans la veine saphène. Elle dure une dizaine deminutes, le rythme et le volume final dépendant de la taille desanimaux et de celle des loges musculaires. Ce protocolen’entraîne pas de dommages musculaires et l’efficacité estsimilaire qu’il s’agisse de souris jeunes ou âgées, mdx ou

Les approches de complémentation génique doi-vent inclure la problématique de l’administrationdes vecteurs ou molécules, particulièrement cru-ciale lorsqu’il s’agit de particules physiques nonsolubles, même de très petite taille. Les vecteursdiffusent faiblement lors d’une injection intramus-culaire directe, alors qu’un adressage plus largeserait souhaitable dans la plupart des maladiesneuromusculaires. Cette étude s’inscrit parmi lesdéveloppements de l’administration locorégionale,envisagée par voie artérielle ou veineuse sous dif-férentes conditions dans plusieurs espèces ani-

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DM1 : un oligonucléotide antisens réduit les agrégatsJEAN-THOMAS VILQUIN COMMENTAIRE

Cet article propose un usage alternatif desméthodes dites “antisens”. La molécule PS58 uti-lisée inhibe, de manière directe ou indirecte, desinteractions délétères entre des protéines nor-males et un ARN pathogène contenant ces expan-sions de triplet. Cette méthode assez généraleagirait sur la toxicité dans son ensemble : en avalde la formation de RNAs toxiques, puis en cas-cade. Des résultats analogues ont été obtenus pard’autres équipes (Wheeler et al, Science , 2009,325 :336-9), en utilisant des modèles cellulaireset animaux différents. Ils soulignent le côté dyna-mique de la formation (et de la résorption éven-tuelle) des agrégats ribonucléaires. Le principepourrait être étendu à d’autres maladies liées àdes expansions de triplets, telles que la dystro-phie myotonique de type 2 (DM2), le syndromede l'X fragile (FRAXA), la dystrophie musculaireoculopharyngée. L’un des défis est de concevoiret de délivrer des oligonucléotides antisensadaptés à la voie systémique. Dans cette étude, ils’agissait de transfecter des cellules à l’aide devecteurs non viraux ou de transduire les musclessquelettiques par électroporation de plasmidesin vivo. Les progrès récents concernant la biodis-ponibilité de nouvelles classes d’oligonucléotidespermettent d’espérer l’identification de molécu-les adaptées à l’usage systémique. Enfin, desétudes devront porter sur les doses activespermettant une interaction efficace avec lescibles mutées sans affecter les séquences CUGnaturellement présentes.

La dystrophie myotonique de type 1 (DM1), maladie à trans-mission dominante, est liée à la toxicité d’une expansion d’untriplet localisé dans les transcrits de la protéine DMPK (expan-sion CUG). Ce long segment serait impliqué notamment dansla séquestration de la protéine Muscleblind (Mbnl1), formantdes agrégats ribonucléaires ainsi que dans la stabilisation deCUGBP1 (CUG binding protein 1). Ceci induit des déséquilibresentre facteurs de transcription et facteurs d’épissage provo-quant des épissages aberrants de nombreux pré-messagers.Les effets toxiques de ces transcrits sont cependant réversi-bles dans des modèles cellulaires et animaux. Un nouveau modèle murin est décrit, la souris DM300, quiexprime un gène DMPK humain mutant contenant (CUG)300.En utilisant des myoblastes et des myotubes issus de cenouveau modèle murin ainsi que des cellules de patientsatteints de DM1, un oligonucléotide antisens (le composéPS58) a été mis au point. Il contient une séquence (CAG)7capable de réduire au silence l’expression du transcrit DMPKmutant et de réduire le nombre d’agrégats ribonucléaires. Ceteffet est rapide, persistant dans le temps et n’empêche pas lefonctionnement des transcrits normaux du gène DMPK. Invivo, l’administration intramusculaire de cet oligonucléotidedans le modèle murin réduit la toxicité de l’expansion mutée.Ceci se traduit par une diminution du nombre et de la taille desagrégats ribonucléaires et par la normalisation de l’épissagede pré-messagers, notamment l’élimination des épissages detypes embryonnaires.

Mulders SA, van den Broek WJ, Wheeler TM, Croes HJ, van Kuik-RomeijnP, de Kimpe SJ, Furling D, Platenburg GJ, Gourdon G, Thornton CA,Wieringa B, Wansink DG, Triplet-repeat oligonucleotide-mediatedreversal of RNA toxicity in myotonic dystrophy, Proc Natl Acad Sci USA,2009, 33 :13915-20

contrôles. Des injections répétées sont possibles, bien tolé-rées et améliorent les rendements finaux de transduction. Desexamens histologiques et des tests fonctionnels mettent enévidence une protection des fibres musculaires des souristraitées (d’un facteur 2.5 à 5 par rapport aux souris nontraitées) et une amélioration des performances mécaniques.L’expression quantitative de la dystrophine, à un niveau de18 à 20% ou par 11 à 16% des fibres musculaires, suffit àconférer cette protection importante et persistante. La naturede la construction conditionne l’intensité de l’expression dutransgène. Enfin, la production de dystrophine provoque uneréaction immunologique de type humoral qui n’entraînecependant pas l’élimination des fibres transduites.

Zhang G, Wooddell CI, Hegge JO, Griffin JB, Huss T, Braun S, Wolff JA,Functional efficacy of dystrophin expression from plasmids delivered tomdx mice by hydrodynamic limb vein injection, Hum Gene Ther, 2009, doi: 10.1089/hum.133, In Press

males (Hagstrom et al, Mol Ther, 2004,10 : 386-98;Zhang et al, Hum Gene Ther, 2001,12 : 427-38;Rodino-Klapac et al, 2007, J Transl Med., 5 : 45).La technique présentée allie des avantages derapidité, de simplicité, d’efficacité et de bonnetolérance, lorsqu’on la compare aux techniquesd’injection artérielle, à l’utilisation d’agentsvasoactifs, voire même à l’électroporation intra-musculaire in vivo. A ce titre, il s’agit certainementd’un outil expérimental précieux pour le dévelop-pement préclinique et la recherche fondamentale.En outre, cette étude repositionne l’utilisation desplasmides nus dans l’arsenal des vecteurs de thé-rapie génique. Elle suggère également des seuilsde transduction nécessaires à l’obtention d’uneprotection significative et durable des fibres mus-culaires. Cette méthodologie reste encore limitéeà la transduction locorégionale.

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CMT1A : confirmation de l’inefficacité de la vitamine CLEÏLA LAZARO COMMENTAIRE

La CMT1A, maladie autosomique dominante, estla plus fréquente des neuropathies héréditaires(1/5 000 personnes). Elle est due à une duplicationsur le chromosome 17 conduisant à 3 copies dugène et de la protéine PMP22. Elle se manifeste parune démyélinisation, les premières années de vie,suivie d’une atteinte axonale. Tout traitementpermettant de restaurer la myéline chez les jeunespatients a donc pour objectif la prévention del’atteinte axonale secondaire. Les auteurs de cetessai de phase II se sont donc appuyés sur uneétude sérieuse réalisée sur le modèle animal(Passage et al, Nat Med, 2004, 10(4) : 396-401).Celle-ci avait montré que de fortes doses d’acideascorbique in vitro réprimaient l’expression dugène PMP22, entraînant une remyélinisation et uneamélioration des performances motrices chez lemodèle souris. L’essai néerlandais, mené chez dessujets jeunes, n’a pas démontré l’efficacité cliniqueet électrophysiologique attendue. Il semble que lemodèle animal souris utilisé soit, sur le plan physio-pathologique, très différent de l’être humain. Cemodèle a 7 copies supplémentaires du gène PMP22contre un chez l’homme, d’où une démyélinisationbeaucoup plus sévère. Par ailleurs le métabolismede l’acide ascorbique est aussi très différent chez lasouris et chez l’homme, la souris synthétisant sonpropre acide ascorbique. Les effets des intermédiai-res métaboliques sur les tissus et cellules ne sontpas non plus comparables. Cet essai confirme lesdonnées d’une étude récemment publiée (Burns etal, Lancet Neurol, 2009, 8(6) : 537-44). Ceci pose laquestion de la validité du modèle souris utilisé pourles études précliniques.

Sur la base des effets bénéfiques de l’acide ascorbique(vitamine C) obtenus sur le modèle animal de la maladie deCharcot-Marie-Tooth de type 1A (CMT1A), plusieurs équipescliniques ont récemment lancé différents essais thérapeuti-ques chez l’homme. Dans un article publié en novembre 2009,une équipe néerlandaise rapporte les résultats d’un essaimené en double aveugle contre placebo chez onze personnesde moins de 25 ans, atteintes de CMT1A. Ces patients ont reçude fortes doses de vitamine C per os (un gramme deux fois parjour pendant un an). Si le traitement a été relativement bientoléré (un seul patient a arrêté le traitement en raison d’uneéruption cutanée), l’efficacité sur les différents critères clini-ques et électrophysiologiques (vitesse de conduction du nerfmédian) testés, y compris sur les paramètres secondaires(comme le score composite CMT), n’a pas été statistiquementprouvée. Ces résultats négatifs confirment que, même à raisonde deux grammes par jour, l’acide ascorbique ne produit pasl’effet escompté et qu’il ne peut donc pas être recommandécomme traitement dans la CMT1A pour le moment.

Verhamme C, de Haan RJ, Vermeulen M, Baas F, de Visser M, van SchaikIN, Oral high dose ascorbic acid treatment for one year in young CMT1Apatients : a randomised, double-blind, placebo-controlled phase II trial,BMC Med, 2009, 7(1) : 70

Thérapeutique

Leïla Lazaro Service de Pédiatrie,Centre Hospitalier de laCôte Basque, [email protected]

Myasthénie : de l’innocuité du vaccin anti-grippalLEÏLA LAZARO COMMENTAIRE

Du fait du caractère auto-immun de la myasthénie et destraitements immunosuppresseurs prescrits aux patients, lavaccination anti-grippale n’a pas toujours fait l’objet d’unconsensus. Cette vaccination est associée à des effets secon-daires comme le syndrome de Guillain-Barré. Pour ces rai-sons, certains médecins ne la proposent pas à leurs patientsatteints de myasthénie. Une équipe canadienne a étudiél’incidence des éventuelles complications consécutives à unevaccination anti-grippale chez les patients atteints de myas-thénie suivis, de 1992 à 2006, dans la province d’Ontario. Sur3667 hospitalisations pour crises myasthéniques, seules 513étaient survenues dans les 42 semaines suivant la vaccination

La myasthénie est une affection neuromusculaired’origine auto-immune, entraînant, dans les casles moins sévères, des paralysies oculomotriceset une fatigabilité caractérisée par de grandesfluctuations. Le dysfonctionnement de la jonctionneuromusculaire, à l’origine de ces troubles, estdû à la production non contrôlée d’auto-anticorpsdirigés contre le récepteur à l’acétylcholine (RAch)ou la protéine MuSK. Ces derniers mois les ris-ques de la vaccination anti-grippale, notammentla survenue dans la population générale de mala-dies neurodysimmunitaires comme le syndromede Guillain-Barré, ont été largement débattus. Au

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Déficit sévère en COX : récupération spontanée expliquéeNORMA BEATRIZ ROMERO COMMENTAIRE

Jusqu’à la publication des résultats des travauxde Horvath et collaborateurs en août 2009, il n’yavait pas possibilité de distinguer les enfantsatteints d’une myopathie mitochondriale avecdéficit en cytochrome c oxydase (COX) ayant unbon pronostic de ceux ayant une maladie rapide-ment fatale. De ce fait, la décision de poursuivreou non les soins intensifs chez ces nouveaux nésétait extrêmement difficile à prendre. Ces travauxrécemment publiés apportent la preuve par desétudes fonctionnelles du pouvoir pathogène d’unemutation homoplasmique dans un gène mito-chondrial codant un ARN de transfert (ARNt). Ilssuggèrent également que des mécanismes liés àla tissu-spécificité du muscle pourraient expli-quer la guérison spontanée. Cette étude sérieusefournit la preuve qu’une analyse moléculaire, apriori simple à réaliser, permet d’identifier lesnourrissons atteints d'une myopathie mitochon-driale avec déficit en COX de bon pronostic. Cetteidentification est extrêmement importante, carles myopathies mitochondriales sévères chezl’enfant sont généralement irréversibles. Ellesobligent les cliniciens et les parents à faire face àde situations relatives aux soins des enfants trèsdifficiles. Ainsi, Il semble judicieux de proposerle criblage de cette mutation chez les enfants àrisque de myopathie mitochondriale sévère avecdéficit en COX.

Les encéphalomyopathies mitochondriales à début précocesont généralement très sévères, rapidement progressives avecune issue fatale vraisemblable. Toutefois, S. Di Mauro décrivit, ily a presque 30 ans, une maladie musculaire infantile qui laissaitperplexe. En effet après une période initiale marquée par unprofond déficit enzymatique, elle évoluait vers une guérisonspontanée. Les enfants atteints survivaient les 1ers mois de vie etatteignaient l’adolescence voire au-delà. Cette myopathie mito-chondriale est une exception et a été longtemps reconnuecomme «benign cytochrome c oxidase deficiency myopathy».Horvath et collaborateurs décrivent les bases moléculaires dela forme réversible de la myopathie mitochondriale avec déficiten cytochrome c oxydase (COX), en identifiant une mutationhomoplasmique m.14674T>C mt-tRNA (Glu), chez 17 patientsissus de 12 familles. Cette mutation a été héritée de la mère.Les auteurs suggèrent que le processus séquentiel du dévelop-pement tissu-spécifique devrait jouer un rôle à la fois dansl’expression âge-dépendante et dans la réversibilité du déficitenzymatique. Une des hypothèses émise est que l'augmentationdu nombre de copies de l'ADN mitochondrial et donc la haussedu nombre des molécules d’ARNt (Glu) pourrait compenser ledéfaut enzymatique et ainsi compenser les conséquences fonc-tionnelles de la mutation homoplasmique ARNt dans le musclesquelettique. Une autre explication tente de relier la reprisede l’activité enzymatique aux effets des gènes modificateursspécifiques du muscle, régulés au cours du développement.

Horvath R, Kemp JP, Tuppen HA, Hudson G, Oldfors A, Marie SK, MoslemiAR, Servidei S et al, Molecular basis of infantile reversible cytochrome coxidase deficiency myopathy, Brain, 2009, 132(Pt 11) : 3165-74

Norma Beatriz Romero Unité de MorphologieNeuromusculaireInstitut de Myologie,Inserm UMRS 974,CNRS UMR 7215,Université Paris 6C.H.U. Pitié-SalpêtrièreParis, [email protected]

anti-grippale (celles survenant dans les 6 premières étantconsidérées comme significatives). Il n’a pas été noté detendance saisonnière aux hospitalisations pour crises myas-théniques. Parmi elles, 52% concernaient des hommes, lamoyenne d’âge était de 74 ans et 17% avaient eu une thymec-tomie. Aucun caractère saisonnier à ces poussées n’a été misen évidence. Des études comparatives plus approfondies ontmontré que le risque de poussées n’était pas plus élevé quedans une population comparable, non vaccinée, de personnesatteintes de myasthénie. Ces résultats permettent de souli-gner l’intérêt de la vaccination chez ces patients.

Zinman L, Thoma J, Kwong JC, Kopp A, Stukel TA, Juurlink DN, Safety ofinfluenza vaccination in patients with myasthenia gravis : a population-based study, Muscle Nerve, 2009, 40(6) : 947-51

demeurant, cette étude ne confirme pas d’asso-ciation entre la vaccination anti-grippale chez lessujets atteints de myasthénie auto-immune et descomplications telles que le syndrome de Guillain-Barré. Des analyses ont même permis une asso-ciation entre la vaccination et une diminution àcourt terme du risque d’hospitalisation pour crisemyasthénique. La solidité de cette étude vient desa durée (plus d’une dizaine d’années), de sa réa-lisation dans un même hôpital et dans une régionoù les campagnes de vaccination ont été les plusimportantes au monde. Cependant, les patientsayant éventuellement présenté, après vaccination,une décompensation modérée de la maladiemyasthénique sans nécessité d’hospitalisation nesont pas comptabilisés, d’où un biais. Par ailleurs,cette étude ne permet pas d’analyser les sous-groupes de patients (thymectomie ou pas, formegénéralisée ou oculaire). Quoiqu’il en soit, lesconclusions permettent de proposer la vaccinationanti-grippale aux patients atteints de myasthénie.

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Séquençage de l’exome et identification de gènesGISÈLE BONNE COMMENTAIRE

Malgré les avancées de la biologie moléculaire etnotamment des approches de génétique inverse(ou clonage positionnel), plus de la moitié desbases génétiques des maladies monogéniquesreste inconnue à ce jour, en particulier pour lesmaladies rares. Des approches plus globales tellesque le séquençage massif des gènes humains oude façon plus pertinente de leurs régions codantessont maintenant disponibles. L’obstacle majeur àl’identification et à la validation de mutations patho-gènes dans les maladies rares est la difficulté àconstituer des cohortes homogènes de patients, etce, à cause de leur nombre réduit. Le travail pré-senté, en combinant une approche basée sur unepuce ADN et l’utilisation d’outils bioinformatiquespermettant de restreindre le nombre de variantspotentiellement intéressants, a permis d’identifierle gène responsable du syndrome de Miller à partirde 4 patients seulement. Ceci n’aurait pas pu êtreenvisagé avec des approches « classiques ». Parailleurs une publication récente rapportant l’identi-fication d’un autre gène responsable d’une maladierare, la diarrhée chlorée congénitale (Choi et al,PNAS 2009 Nov 10 ; 106(45) : 19096-101), confirmedonc l’efficacité et la puissance de cette approche.Dans ce contexte, il faut souligner l’existence duréseau européen NMD-Chip dont l’objectif est demettre en place des puces ADN à visée diagnosti-que pour les maladies neuromusculaires, projetfinancé dans le cadre du 7e PCRDT (Programmes-cadre pour la recherche et le développement tech-nologique) et coordonné par N. Lévy (Marseille).

Une première application réussie de séquençage d'exomevisant à découvrir le gène responsable d’une maladie généti-que, a été réalisée pour le syndrome de Miller (MIM 263750). Apartir de l’ADN des quatre patients atteints de syndrome deMiller, issus de trois familles indépendantes, l’ensemble desrégions codantes du génome c'est-à-dire la totalité des exons(exome) a été capturé. Et ce, à l’aide d’une puce ADN detrès grande capacité. Puis l'exome a été séquencé avec unecouverture moyenne de 40 exemplaires du génome et une"profondeur" ou précision suffisante pour détecter des variantsdans 97% environ de chaque exome ciblé. L’analyse des résul-tats obtenus pour les gènes avec deux variants, jusque-làinconnus chez chacun des quatre patients en utilisantdifférents filtres et comparaisons avec les bases de donnéespubliques des SNP (Single Nucleotide Polymorphisms) et huitexomes HapMap (exomes de références), a identifié un gènecandidat unique. Il s'agit du gène DHODH qui code une enzymeclé de la voie de biosynthèse de novo pyrimidique, la dihydroo-rotate deshydrogénase. Le séquençage a confirmé la présencede mutations DHODH dans trois familles supplémentaires pré-sentant un syndrome de Miller. Le séquençage de l’exome d'unpetit nombre de personnes affectées indépendantes est unestratégie puissante et efficace pour identifier les gènes respon-sables d’affections mendéliennes rares et transformera proba-blement l'analyse génétique des maladies monogéniques.

Ng SB, Buckingham KJ, Lee C, Bigham AW, Tabor HK, Dent KM, Huff CD,Shannon PT, Jabs EW, Nickerson DA, Shendure J, Bamshad MJ, Exomesequencing identifies the cause of a mendelian disorder, Nat Genet, 2010,42(1) : 30-5

Dystrophinopathies : élargissement du spectre des mutations VALÉRIE ALLAMAND COMMENTAIRE

L’identification de mutations dans des gènes degrande taille tels que DMD (79 exons répartis sur2.2 Mb d’ADN génomique) est un processus com-plexe et d’interprétation difficile. Grâce à l’évolu-tion des techniques de détection, notamment laPCR multiplexe (permettant l’amplification deplusieurs fragments en une seule réaction) etplus récemment l’analyse de type SCAIP (single-condition amplification/internal primer), tous lestypes de mutations responsables de dystrophino-pathies peuvent maintenant être détectés defaçon routinière. Le travail présenté porte surune très grande cohorte de 1286 patients et apermis d'identifier 1 111 mutations, en combinant

Les dystrophies musculaires de Duchenne (DMD) et Becker(BMD) ainsi que la cardiomyopathie dilatée liée à l’X (XLDC)sont dues à des mutations dans le gène DMD, codant la dystro-phine. Une étude menée dans le cadre du consortium multi-centrique américain « United Dystrophinopathy Project » apermis d’identifier 1 111 mutations dans le gène DMD dont 891associées à un phénotype clinique. Parmi celles-ci, 506 sontdes mutations ponctuelles (n’affectant qu’un seul nucléotide)et comprennent 294 mutations non-sens conduisant à descodons stop prématurés. Ces résultats ont permis d’élargir lenombre de mutations responsables de dystrophinopathies etdémontrent l’utilité de techniques modernes de diagnostic.Cette étude confirme la propension accrue des mutations

Génétique

Gisèle Bonne Valérie Allamand Institut de MyologieUMRS 974 -UPMC / U974 -Inserm / UMR7215 -CNRSHôpital Pitié-Salpêtrière [email protected]@institut-myologie.org

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la technique SCAIP et d’autres approches moder-nes de détection de mutations (MLPA pour multi-plex ligation-dependent probe amplification). Lamajorité des mutations identifiées était des muta-tions ponctuelles (46% dont 26,5% conduisant àdes codons stop prématurés), des délétions (43%)et des duplications (11%). Ces données confir-ment la présence de régions préférentielles dedélétion et duplication, ce qui n’est pas le cas pourles mutations ponctuelles. Les auteurs mettenten garde contre la surinterprétation des résultatsgénétiques, lesquels considérés de façon isolée,ne peuvent prédire le phénotype de façon fiable.Cette étude met aussi l’accent sur le fort taux devariations du locus DMD et suggère l’existence de8 variants de l’isoforme musculaire pouvant jouerun éventuel rôle dans la modulation du phénotypeclinique des patients.

CGA>TGA, établit la fréquence des isoformes protéiquesmusculaires polymorphes (Dp427m) et révèle des haplotypes(association de génotypes sur un même allèle) génomiquesuniques associés à des mutations privées (identifiées chez unseul individu ou famille). Les auteurs notent que 60% despatients inclus dans cette étude pourraient a priori bénéficierde l’épissage d’un seul exon du gène DMD par l’utilisationd’une approche basée sur les oligonucléotides antisens et 62%d’une approche plus large permettant l’épissage de plusieursexons, notamment les exons 45 à 55.

Flanigan KM, Dunn DM, von Niederhausern A, Soltanzadeh P, GappmaierE, Howard MT, Sampson JB, Mendell JR, Wall C, King WM, Pestronk A,Florence JM, Connolly AM, Mathews KD, Stephan CM, Laubenthal KS,Wong BL, Morehart PJ, Meyer A, Finkel RS, Bonnemann CG, Medne L,Day JW, Dalton JC, Margolis MK, Hinton VJ, United DystrophinopathyProject Consortium, Weiss RB, Mutational spectrum of DMD mutations indystrophinopathy patients : application of modern diagnostic techniquesto a large cohort, Hum Mutat, 2009, 30(12) : 1657-66

Syndrome myasthénique congénital : l’agrine en causeVALÉRIE ALLAMAND COMMENTAIRE

Les SMC sont un groupe hétérogène clinique-ment et génétiquement caractérisé par un dys-fonctionnement de la jonction neuromusculaire(JNM) conduisant à une faiblesse musculaireaccentuée par l’effort. Depuis 1996 et la premièreidentification d’un gène impliqué dans ces patho-logies, le spectre étiologique des SMC s’est élargiet le travail présenté en est une illustration. Eneffet, il décrit le 12e gène impliqué dans une formeautosomique récessive de SMC par une approchegène candidat. Une mutation faux-sens a étéidentifiée chez 2 patients à l’état homozygote dansle gène AGRN (localisé en 1p36.33) codantl’agrine, une glycoprotéine extracellulaire inter-agissant avec les laminines, LRP4 et l’ -dystro-glycane. L’expression de la protéine mutée in vitrodans des modèles cellulaires ainsi qu’in vivo dansle muscle soléaire de rat a évalué les conséquen-ces pathogéniques de la mutation et a démontréses effets délétères sur l’intégrité de la JNM. Eneffet, les observations effectuées à partir dumuscle de rat injecté et de la biopsie musculairedu patient sont très similaires. Elles mettent enévidence que la fonction primaire de l’agrine quiest d’induire la formation du compartimentpost-synaptique n’est pas affectée. Par contre, lesJNM nouvellement formées sont fragmentées,souvent dénervées et comportent des terminai-sons axonales modifiées. Ce travail identifie, nonseulement un nouveau gène pour les SMC, maisrévèle aussi des fonctions jusque-là méconnuesde l’agrine.

Un cas de syndrome myasthénique congénital (SMC) dû à unemutation faux-sens homozygote (c.5125G>C conduisant auchangement d’acide aminé p.Gly1709Arg) dans le gène AGRNest présenté. Ce gène code l’agrine, une molécule extracellu-laire sécrétée par le nerf jouant un rôle primordial dans laformation de la jonction neuromusculaire (JNM). La biopsiemusculaire montrait une désorganisation importante de laJNM ainsi que des modifications du cytosquelette de la termi-naison nerveuse et la fragmentation des gouttières synapti-ques. Des expériences menées sur des cultures de cellulesnon musculaires ou des myotubes C2C12, utilisant uneprotéine recombinante mini-agrine sauvage ou mutée, ontmontré que cette dernière n’altérait pas l’activation de MuSKou le nombre total d’agrégats de récepteurs à l’acétylcholine.Cette mutation n’affectait pas non plus la liaison de l’agrine àl’ -dystroglycane. L’injection d’agrine sauvage ou mutée dansle muscle soléaire de rat a permis d’induire la formationd’agrégats non synaptiques de récepteurs à l’acétylcholine,mais la protéine mutante déstabilisait spécifiquement lesJNM endogènes. De plus, les changements observés dansle muscle de rat injecté avec l’agrine mutée reproduisentles modifications détectées chez le patient aux niveaux pré- etpost-synaptiques. Ces résultats suggèrent que la mutationn’interfère pas avec la capacité de l’agrine à induire desstructures post-synaptiques mais qu’elle perturbe de façondramatique l’intégrité de la JNM.

Huzé C, Bauché S, Richard P, Chevessier F, Goillot E, Gaudon K, BenAmmar A, Chaboud A, Grosjean I, Lecuyer HA, Bernard V, Rouche A,Alexandri N, Kuntzer T, Fardeau M, Fournier E, Brancaccio A, Rüegg MA,Koenig J, Eymard B, Schaeffer L, Hantaï D, Identification of an agrinmutation that causes congenital myasthenia and affects synapsefunction, 2009, Am J Hum Genet, 85(2) : 155-67

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Qualité de vie dans la myasthénie auto-immuneCHRISTIAN RÉVEILLÈRE COMMENTAIRE

L'intérêt de cette étude est de mettre en évidence,chez les patients myasthéniques asymptomati-ques, l'existence d'une qualité de vie (QdV) globalecomparable à celle de la population générale.Comme attendu, les limitations dues à l'altérationde l’état physique et aux douleurs affectent ladimension physique de la QdV. Le phénomènedouloureux (niveau sévère) a été rapporté chez38 % des patients myasthéniques dans l'étude deGuy-Coichard et al (J Pain and Symptom Manage,2008, 35, 1 : 40-50). A noter le poids des signesbulbaires sur la QdV générale, donnée confirméedans la littérature sur ce point particulier. RostedtA. et al (Eur J of Neurol, 2006, 13 : 191-3) onteffectivement montré l’effet délétère de ladysarthrie et de la dysphagie sur la vie sociale etplus particulièrement sur la QdV mentale. Pointégalement en accord avec les travaux utilisant lequestionnaire SF-36, la QdV mentale varie avecdes facteurs contextuels, la participation socialeen est un. Ce point suggère l’intérêt de l’utilisationd’outils d’évaluation à la fois spécifiques à unemaladie (proches de sa symptomatologie) maisaussi génériques. Ces derniers évaluent plusprécisément l’impact du contexte général de viequotidienne (activités, relations sociales et fami-liales) sur la QdV.

La myasthénie auto-immune est caractérisée par une fatigabi-lité et une faiblesse musculaire fluctuantes. Due à la présenced'auto-anticorps au niveau de la jonction post-synaptique de laplaque musculaire, elle affecte davantage les femmes (75%)avec deux pics d'âges (20-40 ans et 60-80 ans). Une étude italienne a inclu 102 personnes atteintes de myas-thénie dont 70 femmes, d'âge moyen 47, 2 ans (écart-type 15,7)afin d' évaluer leur qualité de vie liée à la santé (QdV). L'échelle de l’OMS, WHO-DAS II (World Health Organisation-Disability Assessment Schedule II) a été utilisée pour l’évalua-tion des incapacités et le questionnaire SF-36 pour celle de laqualité de vie. Les scores obtenus chez les patients ont étécomparés à ceux de la population générale italienne. Lesrésultats ont montré le poids de la sévérité des incapacitéssur la qualité de vie en général (corrélations négatives signifi-catives) et plus particulièrement sur la QdV physique (moindrecorrélation pour la QdV mentale). En cas d’absence de symptô-mes, la QdV est semblable à celle de la population générale.Chez les patients présentant des degrés différents d'atteintesmusculaires, des différences significatives ont été observéesdans les scores par le questionnaire de qualité de vie physiqueSF-36 et de WHO-DAS II, alors qu'aucune différence n'a éténotée avec le questionnaire de qualité de vie mentale SF-36.L’étude met particulièrement en évidence l’impact des symptô-mes bulbaires sur la QdV générale.

Leonardi M, Raggi; A, Antozzi C, Confalonieri P, Maggi L, Cornelio F,Mantegazza R, The relationship between health, disability and quality oflife in Myasthenia Gravis : results from an Italian study, J Neurol, 2009,Aug 8 [Epub ahead of print]

Qualité de vie dans la myopathie facio-scapulo-humérale CHRISTIAN RÉVEILLÈRE COMMENTAIRE

Cette étude présente un double intérêt. Si les étu-des de qualité de vie sont de plus en plus fréquen-tes dans le domaine neuromusculaire, elles per-mettent rarement une comparaison à la popula-tion générale, faute de normes établies. Le ques-tionnaire SF-36 est un outil générique internatio-nal et validé dans de nombreuses pathologies.Ces résultats peuvent, par conséquent, être utilespour des études transculturelles et des compa-raisons inter-pathologies. Les résultats mettenten exergue que si la sévérité clinique est évolutive(évolution également liée à l’âge) et altère la qua-lité de vie dans le domaine physique quel quesoit le sexe, pour la qualité de vie psychique(fonctionnement social, composante émotion-

La dystrophie musculaire facio-scapulo-humérale (FSHD) estdue à une anomalie génétique localisée dans la région 4q35. Lasévérité de la maladie est inversement corrélée au nombre derépétitions KpnI. Selon l'atteinte musculaire, la gêne fonction-nelle est variable d'une personne à une autre. Les tableauxcliniques sont variés, allant de formes très discrètes à desatteintes sévères. L'évolution est généralement lente et l'espé-rance de vie normale.Une étude prospective sur la qualité de vie utilisant un proto-cole multidimensionnel a été réalisée par une équipe italiennechez 65 personnes atteintes de FSHD. L'analyse a été faiteselon des critères cliniques (échelle de gravité clinique Rev1),génétiques (p13E-11 EcoRI fragments Rev1), de qualité de vie(questionnaire SF-36), de douleur (échelle visuelle analogique

Psychologies

Christian Réveillère PsychologueAttaché Centre deRéférence MaladiesNeuromusculaires,CHU Henri Mondor,Créteil AFM, Evry Professeur UniversitéTours [email protected]

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42 N°2 AVRIL 2010 Les cahiers de myologie

LU POUR VOUS

nelle), cela concerne plus particulièrement lesfemmes. L’indépendance de lien entre la sévéritéclinique et la qualité de vie psychique montre quecette dernière est sous l’effet de déterminantsautres que physiques. Enfin, l’importance du phé-nomène douloureux sur la qualité de vie est miseen évidence chez plus de 50% des patients FSHD.Il a un impact négatif sur le moral (score BDI).Cela confirme l’intérêt croissant suscité par ceproblème, d'autant plus important qu’il gênela vie sociale, influant notamment sur le nombrede jours d’inactivité (Guy-Coichard C et al, J. Painand Symptom Manage, 2008, 35, 1 : 40-50). Cette étude de Padua confirme l'importance de laprise en charge de la douleur chez les personnesatteintes de FSHD. Des mesures préventives oucuratives appropriées doivent être instaurées.

EVA et questionnaire Douleur Portenoy-6) et de dépression(inventaire de dépression de Beck, BDI). Les mesures de qualité de vie (QdV) des patients atteints deFSHD ont été comparées avec celles de la population généraleitalienne. La QdV est diminuée de façon significative parrapport à la population générale, plus particulièrement pourles aspects physiques et à un degré moindre pour la santépsychique. La QdV physique est d'autant plus médiocre que lessignes cliniques sont marqués, lien non retrouvé pour lacomposante psychique. La perception de la détérioration de laQdV sous ses aspects psychiques est plus accentuée chez lesfemmes que chez les hommes. Cette étude a aussi montréque la douleur est fréquente chez les patients FSHD. Plus dela moitié des patients a rapporté au moins l'existence d'unedouleur d'intensité modérée.

Padua L, Aprile I, Frusciante R, Iannaccone E, Rossi M, Renna R, MessinaS, Frasca G, Ricci E, Quality of life and pain in patients with facioscapulo-humeral muscular dystrophy, Muscle Nerve, 2009, 40 : 200-5

SMA : module d'évaluation PedsQL dans les essais cliniques CHRISTIAN RÉVEILLÈRE COMMENTAIRE

Cet article est important dans le cadre d’essaiscliniques auprès de la population d’enfantsatteints de SMA. Il permet de disposer d’un outilvalidé et adapté à cette population. En cela, ilrépond à la recommandation de la Food and DrugAdministration (FDA) en cas d’essai clinique :inclure dans le protocole un outil d’évaluation dela qualité de vie, outil qui doit être fiable et validéen fonction de l’âge des patients. Plus précisé-ment, cette étude répond à une autre exigence : lanécessité d’utiliser des mesures dans le cadred’un essai clinique de phases II et III. Ce modulespécifique SMA, composé de 25 items, abordeles domaines suivants : maladie et symptomato-logie, communication et famille. Il complète lesdomaines d’évaluation de l’outil générique(PedsQL) : physique, émotionnel, social et sco-laire. La bonne fiabilité de l’échelle générique etdu module spécifique auprès de cette populationaméricaine permet d’envisager leur validationdans d’autres pays.En Europe, l'Agence européenne du médicamentEMEA (European Medicines Evaluation Agency)a également insisté sur l'évaluation de la QdVdans les essais thérapeutiques, lors de la réunionentre l'EMEA et TREAT-NMD sur les essaiscliniques dans l’amyotrophie spinale (2008) etdans la dystrophie musculaire de Duchenne surl'exon skipping (2009). L’EMEA a particulièrementsouligné l’importance des échelles de qualitéde vie pertinentes corrélées à des échelles demesures fonctionnelles.

Aux USA, en 2000, l’American Spinal Muscular Atrophy Rando-mized Trials (AmSMART) a constitué un groupe de recherchemulticentrique (13 centres) dans le but d’établir des mesurescliniques, fiables et valides, pour les enfants âgés de 2 à 18 ans,atteints d'amyotrophie spinale (SMA). Leur travail a donné lieuà plusieurs publications (Wong et al, J Clin Neuromuscul Dis,2007, 8 : 101-10 ; Iannaccone et al, Arch Neurol, 2003,60 : 1130-6; Nelson et al, Neuromuscul Disord, 2006, 16 : 374-80). Lesdomaines évalués sont la force musculaire et les fonctionsmotrice et respiratoire. Ce groupe a ensuite étendu son travailà la qualité de vie, souhaitant disposer d’un outil adapté à lapopulation pédiatrique SMA. Ils ont utilisé un outil largementreconnu par la communauté scientifique, le PedsQL. Cet inven-taire de qualité de vie pédiatrique a donné lieu à plus de 350publications depuis 2001. C’est un outil d’autoévaluation validédans la population générale et chez les personnes malades. Ilintègre des mesures à la fois génériques et spécifiques à unemaladie. La présente étude vise à valider un module adaptéaux enfants atteints de SMA : PedsQL NM (Pediatric Quality ofLife InventoryTM Neuromuscular Module). Cent soixante-seize enfants (moyenne d’âge : 8,5 ans et écart-type : 4,75 ans) atteints de SMA issus des 13 centres et leursparents ont participé à cette étude. Les résultats ont démontréla bonne faisabilité (ou acceptabilité), la cohérence interne, lafiabilité et la validité de construction du module PedsQL NMpour cette population.

Iannaccone ST, Hynan LS, Morton A, Buchanan R, Limbers CA, Varni JW,AmSMART Group, The PedsQL in pediatric patients with Spinal MuscularAtrophy: feasibility, reliability, and validity of the Pediatric Quality of LifeInventory Generic Core Scales and Neuromuscular Module, NeuromusculDisord, 2009 Dec, 19, 12 : 805-12

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DANS

LE M

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MYOLOGIE DANS LE MONDE

MyoSuisse, un réseau de spécialisteset d’organisations dédiés aux MNM

THIERRY KUNTZER

En Suisse, la Myologie s’est développée petit à petit à partir de différentes unités,scientifiques et cliniques, dans un pays où les structures, la culture et la monnaie sontfarouchement décentralisées. Depuis peu, les structures interagissent grâce au travailréalisé par les associations de patients atteints de maladies musculaires. Leur action etleur soutien financier permettent le développement d’une nouvelle organisation nomméeMyoSuisse (MyoSuisse dans toutes les langues !).

La Myologie en Suisse, toute une histoireLa Suisse est une Confédération de vingt-six can-tons qui jouissent d'une grande autonomie. Seulesles écoles polytechniques, de Zürich et de Lausanne,relèvent de la compétence de la Confédération quilégifère sur la formation professionnelle et encou-rage la recherche. Le pays est petit, comptant 7,6millions d’habitants et la société est multiculturelle.Quatre langues sont officialisées ne facilitant pasforcément la communication ! L’Allemand est parléau Centre et à l’Est, le Français à l’Ouest, l’Italien auSud et le Romanche dans les Grisons. L'Allemandparlé forme un groupe de dialectes, le Schwyzer-dütsch. Les médecins s’intéressant aux maladies neurologi-ques ont créé la Société Suisse de Neurologie en1908, consécutivement à l’ouverture (en 1887) dela première clinique neurologique à Zurich parConstantin von Monakov. Par la suite, d’autrescliniques universitaires se sont ouvertes à Bâle,Berne, Genève et Lausanne. Plusieurs noms vien-nent à l’esprit pour illustrer la renommée suissedans le domaine des maladies neuromusculaires :Felix Jerusalem de Zürich et son livre, « Muskeler-krankungen : Klinik, Therapie », paru en 1979 ;Marco Mumenthaler de Berne, remarquable ensei-gnant et auteur de multiples écrits pédagogiques ;le pathologiste Claus Meier, le neuropédiatre HansMoser, la généticienne Sabrina Liechti-Gallati, tous

trois de Berne. Le syndrome de Kaeser (Heinrich PKaeser de Bâle), qui décrivait une myopathiescapulo-humérale, a ultérieurement été étiquetédesminopathie ou mutation du gène DES. Lesyndrome de Roussy et Lévy (Gustave Roussy etGabrielle Lévy), qui rapportait une neuropathieataxiante avec tremor (Maladie de Charcot-Marie-Tooth ou CMT), a été ultérieurement lié à unemutation du gène MPZ codant la protéine P0 de lamyéline (CMT1B). L’isolement relatif de certaines vallées a favorisé,non seulement l’émergence de plusieurs foyers demaladies neuromusculaires génétiques, commecertaines formes d’amylose (Omim 176300), d’hy-perthermie maligne (Omim 180901), de myasthéniecongénitale (Omim 254300), de dystrophie muscu-laire de type LGMD2A (Omim 253600), de myoglobi-nurie familiale mitochondriale (Omim 160010), defibrose familiale des muscles extraoculaires (Omim608283), de myopathie myotubulaire (Omim 310400)et de maladie de Danon (Omim 300257), mais aussicelle de modèles animaux d’amyotrophies spinalesde bovins (Omim 253300). Des travaux fondamentaux ont été développés àZürich par Ueli Suter (sur des souris KO) démon-trant le rôle de gènes modulant la myélinisation desnerfs périphériques, à Genève par Charles Bader etLaurent Bernheim, dans les mécanismes de régé-nérescence musculaire, à Lausanne et Genève par

Thierry KuntzerUnité nerf-muscle,service de neurologie,CHU Vaudois, Lausanne,[email protected]

Journées Annuelles de la Société Française de Myologie,organisées au Musée Olympique de Lausanne en octobre 2008.

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DANS

LE M

ONDE

Urs Ruegg, dans l’homéostasie musculaire ducalcium, à Bâle par Markus Rüegg, dans l’étude dela formation des synapses neuromusculaires, àBerne par Hans Hoppeler, dans la plasticité du tissumusculaire à l’exercice, parmi d’autres scientifiquesde renom.

Actuellement, qui fait quoi ?Aujourd'hui, la tendance est à la spécialisation,comme partout dans le monde. Les premièresconsultations neuromusculaires ont été introduitesdans les années 80, en pédiatrie, à Berne, puis dansles années 90, à Genève et à Lausanne pour lesadultes. Aujourd’hui, des unités spécialisées sontimplantées dans les services de neurologie et deneuropédiatrie attachées aux universités de Zurich,Bâle, Genève, Lausanne et Berne. Des consultationssont réalisées (plus rarement) dans les hôpitauxcantonaux à St-Gall, Aarau, Lugano, Lucerne etSion. Depuis 15 ans, des regroupements linguisti-ques ont permis la présentation d’observations depatients, puis la tenue de vidéoconférences.Après la création, en 1985, de la Fondation Suisse deRecherche sur les Maladies Musculaires (FSRMM,www.fsrmm.ch), Jacques Rognon et ses proches ontlancé le téléthon suisse (3 ans plus tard). Leurs acti-vités ont été récompensées par un prix de l'Univer-sité de Lausanne en 1999. La FSRMM, par l’octroi debourses d’études fondamentales, allait permettrel’organisation de réunions annuelles, véritablesbouillons de culture d’idées pour les récipiendaires.Petit à petit, les synergies et les échanges d’infor-mations ont cristallisé les efforts de regroupementet la spécialisation « à la française » de plusieursmédecins actuellement en charge des consulta-tions, lesquels ont effectué un passage à Paris àl’Institut de Myologie.Ces dernières années, deux réunions « phares » enmyologie ont été organisée en Suisse. En 2008, les6e Journées Annuelles de la Société Française deMyologie (thème central, contrôle de la massemusculaire, voir www.sfmyologie.org) se sonttenues au Musée Olympique de Lausanne. En 2009,c’est à Genève que le 14e Congrès International de la

World Muscle Society a eu lieu (www.worldmuscle-society.org). Ce congrès incluant une réunionsatellite d’enseignement, celle-ci s’est déroulée àLausanne.

MyoSuisse, un réseau en action Dès les années 70, l’ASRIM (Association SuisseRomande et Italienne contre les Myopathies,www.asrim.ch) et la SGMK (Schweizerische Gesell-schaft für Muskelkranke, www.muskelkrank.ch) sesont impliquées dans l’aide directe aux patientsatteints d’un handicap moteur. Les objectifs étaientd’améliorer la vie au quotidien, de créer des campsde vacances, de soutenir financièrement leursmembres (actuellement près de 1700), d’aider aurespect du droit dans la jungle des assurancessociales des vingt-six cantons et de promouvoirl’information. Le financement des associationsprovient essentiellement du Téléthon suisse. Au fildes années, d’autres projets ont vu le jour, visantnotamment à l’essor des consultations neuromus-culaires des hôpitaux, au financement d’un projet deconduite automobile assistée par joystick, à la parti-cipation à l’établissement d’un registre de patientsatteints de dystrophie musculaire de Duchenne(DMD) et d’amyotrophie spinale (ASI) dans le cadredu programme européen TREAT-NMD (www.treat-nmd.eu) et au soutien des activités de l’EuropeanNeuromuscular Center (www.enmc.org).Récemment, les 3 associations que sont l’ASRIM, laSGMK et la FSRMM se sont regroupées pour mettreen place MyoSuisse, un réseau incluant tous lesspécialistes et organisations qui interviennent enSuisse en faveur des patients atteints d’une maladieneuromusculaire. Le réseau veut garantir l’exis-tence des consultations avec une réadaptation spé-cialisée pour ces maladies dans toutes les régionsde Suisse. C’est ainsi que des centres régionaux ontété inaugurés à St-Gall, Berne, Bâle, Zürich, Lau-sanne, Genève et Lugano et qu’un financementextraordinaire soutient la venue, à la Faculté deMédecine de l’Université de Bâle, de Michael Sinn-reich, formé au Montreal Neurological Institute. Myologiquement suisse, vous êtes les bienvenus !

RelecturePierre-Yves Jeannet,Paulette Wyss,Emmanuel Dubochet,Jacques Rognon,Charles Bader, Urs Ruegg,Jacques Beckmann

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PART

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TREAT-NMD, Conférence Internationaleen collaboration avec le NIH

FRANÇOISE ROUAULT

Plus de 350 participants, originaires d’une trentaine de pays, se sont réunis à Bruxellesen novembre dernier sous l’égide de TREAT-NMD. L’objectif de cette première ConférenceInternationale était de favoriser la recherche collaborative sur les maladiesneuromusculaires. Au cours de cette réunion très interactive, l’accent a notamment étémis sur les questions clés concernant le passage aux essais cliniques dans le domaineneuromusculaire.

essais cliniques, a été structurée autour des diffé-rentes étapes conduisant de la recherche préclini-que aux outils cliniques pour le passage aux essaiscliniques : identification des cibles thérapeutiqueset des candidats ; validation de modèles animauxselon des protocoles établis ; critères de sélectiondes candidats thérapeutiques les plus appropriés ;considérations éthiques liées à la mise en placed’essais cliniques ; établissement des registresinternationaux de patients ; outils d’évaluation desrésultats cliniques ; effets thérapeutiques à longterme. Ces différents thèmes ont été traités à la foisde façon synthétique et très interactive. Pour chaquesujet abordé, une présentation par un expert faisaitle point de la situation actuelle. Elle était systémati-quement suivie d’un débat entre un panel d’expertset les participants au congrès.Les problèmes éthiques liés aux essais cliniquesincluant de jeunes patients ont représenté un tempsfort. Une proposition, soumise comme base deréflexion, a été à l’origine d’un débat passionné aucours duquel les différences culturelles, les par-cours personnels ou professionnels des participantsfurent exposés. En dehors des questions éthiques,d’autres points de divergence potentielle furentdiscutés lors de ce congrès et ce, afin d’accélérerl’élaboration (par des comités d’experts) de consen-sus indispensables à la mise en place d’essaiscliniques internationaux. La dimension internatio-nale est particulièrement nécessaire pour lesmaladies rares dont les patients potentiels sont dis-persés dans des pays aux traditions thérapeutiquesdifférentes.

Pour en savoir plus : www.treat-nmd.eu/about/treat-nmd-conference/introduction/

La prochaine Conférence Internationale organi-sée par le réseau TREAT-NMD se tiendra àBarcelone du 7 au 9 juin 2010.

En novembre 2009, a eu lieu la première conférenceinternationale de TREAT-NMD à Bruxelles, villesymbolique du rapprochement européen. L’objectifdéclaré de cette conférence était double : favoriserla collaboration entre les différents laboratoires derecherche préclinique, notamment pour les travauxsur les animaux modèles des maladies neuromus-culaires ; renforcer les liens communautaires afinde pérenniser le réseau TREAT-NMD et ce, au-delàdu financement accordé (jusque fin 2011) par laCommission Européenne pour sa mise en place.Bien que ce réseau soit à l’origine européen, il estouvert autant à l’Est qu’à l’Ouest, le grand nombrede participants venus d’Europe de l’Est et le Co-sponsoring de la conférence par le NIH (InstitutNational américain de Santé) en témoigne.

La conférence bruxelloise a rassemblé la commu-nauté scientifique et médicale, des patients ou desassociations les représentant (tel que l’AFM), maisaussi des industriels. Effectivement, plusieursessais cliniques sont en cours actuellement etd’autres, faisant appel à des principes thérapeuti-ques différents, sont maintenant envisageables.Cette rencontre, axée sur la réduction des freins aux

Françoise RouaultAFMAffaires scientifiquesinternationalesCorrespondantTREAT-NMDfrouault@afm.genethon.fr

Vote sur les questions éthiques liées aux essais cliniques enrôlant de jeunes patients

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« Les trente glorieuses » (1979-2009) ont vu l’acqui-sition progressive des outils conceptuels et métho-dologiques de la génétique moléculaire avec enacmé, la reconstitution de la séquence des 3 mil-liards de paires de bases du génome humain. Lerecul est suffisant pour examiner si les retombéesmédicales ont correspondu aux espérances. Si l’on considère uniquement la médecine comme lascience des maladies, le bilan est enthousiasmant.Plus de 2000 gènes de maladies ont été identifiés

dont 272 gènes différents pour la myologie(500 phénotypes pathologiques distincts)(1).La nosologie phénotypique classique aéclaté et elle est désormais confrontée à lanosologie moléculaire, fondatrice d’unemédecine des causes. Plus généralement,l’enrichissement fabuleux de nos connais-sances en matière de protéomique estporteur d’immenses espoirs thérapeuti-ques. Et ce, grâce à la reconstruction pro-gressive du puzzle des interactions protéi-ques (interactome) et à ses implicationsphysio-pathologiques.

En revanche si l’on considère la médecine commel’art de soigner voire de guérir, il faut reconnaîtreque le bilan est moins glorieux. En effet, force est dereconnaître qu’en dehors de leurs applicationsimmédiates en matière de diagnostic et de conseilgénétique, les immenses progrès cognitifs n’ont pasencore débouché sur des stratégies thérapeutiquessalvatrices. Ceci est particulièrement cuisant pourles myopathies. Puisque 23 ans après la découvertedu gène DMD, le « retour thérapeutique sur investis-sement » est encore modeste. C’est à dessein quej’emploie cette figure de style à la mode, car on peutassimiler les familles de malades à une assembléed’actionnaires qui demanderaient des comptes àceux qui leur ont tenu le langage suivant dès 1986(2) :« Vous allez voir ce que vous allez voir ! Une fois lecoupable démasqué (le gène DMD) les stratégiesthérapeutiques en découleront automatiquement,tant il est vrai qu’il est plus facile de combattre unemaladie dont on a élucidé la cause ». Ce langageque nous, médecins et chercheurs, avons tous tenuet de bonne foi, était le credo de l’époque. Tout étaitexact dans cette profession de foi, mais l’adverbe« automatiquement » est trompeur car il impliquaitune immédiateté qui n’a pas été au rendez-vous. Cediscours relevait d’un angélisme compréhensible

après coup. En effet, novices dans le champ nouvel-lement exploré, nous étions galvanisés par le succèsrencontré dans la chasse aux gènes de maladie etconvaincus que l’élaboration de schémas thérapeu-tiques ne serait pas plus ardue que l’identification dugène en cause par clonage positionnel. Comment expliquer ce « déficit thérapeutique » ? Ila fallu près de 20 ans pour se rendre compte quel’ADN n’est pas un médicament et que la thérapiegénique de première génération (la correction desmaladies génétiques par « simple » apport d’uneversion normale du gène en cause) n’est ni la seuleni la plus prometteuse des stratégies. Apporter uneversion fonctionnelle du gène de la dystrophine danstoutes les cellules de la musculature striée ou prio-ritairement dans les muscles vitaux est une gageuredont la difficulté n’a pas été suffisamment mesuréeau départ. On sait aujourd’hui que les seuls résultatscliniquement encourageants ont été obtenus dansdeux catégories particulières : les cas où la grefferétrovirale d’ADN correcteur confère aux cellules unpouvoir prolifératif assurant la colonisation dusystème hématopoïétique (SCID, adrénoleucodys-trophie) et la thérapie génique topique (la rétinedans l’amaurose de Leber).Depuis peu, les approches thérapeutiques se sontheureusement diversifiées en élargissant le champd’investigation à toutes les cibles possibles. Commeelles dérivent de la connaissance du gène défec-tueux, on parle de gene-based therapy. Pour repren-dre l’exemple des dystrophinopathies, on peut sché-matiquement identifier trois types de cibles : lescibles situées en amont de la dystrophine, non pastant le génome que le post-génome, soit au niveaudu transcrit primaire du gène DMD (épissothérapiepar saut d’exon pour rétablir le cadre de lecture), soitau niveau de la traduction (translecture des codonsnon-sens prématurés). Ces cibles sont par définitionallèles-spécifiques, elles reposent sur la connais-sance de la mutation chez chaque malade ; lescibles situées en aval de la dystrophine, c’est-à-direla cascade des perturbations physio-pathologiques,au niveau du protéome et au niveau de la cellule.De très nombreuses molécules sont à l’étudedans cette approche pharmacologique ; les cellulesà capacité myogénique capables de recoloniser lemuscle malade (cytothérapie).

A suivre...

Jean-Claude KaplanBiologiste généticien,Hôpital Cochin-Maternité,[email protected]

NOTES (1) http://www.musclege

netable.org

(2) Date de l’identificationdu gène DMD,défectueux dans lesmyopathies deDuchenne/Becker

Génomique et Médecine : l’heure du bilanJEAN-CLAUDE KAPLAN

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Le point de vue du « dinosaure »

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Le premier Plan National Maladies Raresest mort... Vive le deuxième !

JEAN POUGET

dien, d’une formalisation de nos pratiques et d’unengagement dans une démarche prospectiveobligeant à prendre le recul nécessaire. Elle peutirriter par ses contraintes méthodologiques très« administratives » et son caractère formel si éloignéde notre activité de terrain et de la véritable qualitédes soins que nous essayons d’optimiser. Elle est detoute façon indispensable et, si nous n’avons pas lechoix, essayons de nous en servir…

Des bases communesLes objectifs prioritaires du PNMR2, non encoreofficialisés mais qui ressortent des conclusions desgroupes de travail préparatoires, sont fort logique-ment de combler les principaux manques du PNMR1.L’un d’entre eux concerne le développement desbases de données visant à mieux évaluer l’épidémio-logie des pathologies rares que nous prenons encharge. La réflexion a été faite, a posteriori hélas, dese doter, autant que faire se peut, d’un outil communpour l’ensemble des CR Maladies Rares. La base dedonnées Cemara est indiscutablement apparuecomme l’outil de référence. Félicitons-nous de notrechoix (un peu long et difficile certes) et du travailaccompli permettant d’utiliser Cemara depuis début2010. Remercions le groupe de travail qui a accompliun important travail d’harmonisation de notre thésau-rus neuromusculaire avec celui d’Orphanet. Ceci étaitune étape préliminaire indispensable. Par ailleurs, lesbases de données maladie spécifique continuent àprogresser et seront un élément important pour laconduite des protocoles de recherche clinique. Ellesont démontré leur utilité pour l’identification despatients porteurs d’une mutation du gène de ladystrophine pouvant être inclus dans certains essaisthérapeutiques mutation-dépendants. L’étape ulté-rieure sera la constitution de collections biologiquesadossées à ces bases de données phénotypiques. Cetobjectif ambitieux nécessitera beaucoup de réflexionet de travail, mais il est à notre portée.

Le premier Plan National Maladies Rares (PNMR)2004-2009 a indiscutablement structuré la prise encharge des maladies rares en France. L’importancede la prévalence cumulée de l’ensemble des maladiesneuromusculaires a permis une distribution territo-riale homogène si l’on tient compte des Centres deRéférence (CR) et des Centres de Compétence neuro-musculaires. Les premiers CR neuromusculaires,labellisés en 2004, ont été évalués au bout de leurscinq ans de fonctionnement en 2009. Ce fût pour euxl’occasion d’en tirer des enseignements importantspour l’avenir de leur fonctionnement et pour les CRqui seront évalués dans les années à venir.

Certaines recommandations peuvent être proposéespour la future évaluation de ces CR : ne pas avoird’objectifs trop nombreux ou trop ambitieux lorsde l’auto-évaluation, anticiper la visite du CR parl’établissement d’un calendrier d’actions précis eten impliquant l’institution hospitalière (cellule qualitéet direction générale), établir un rapport annueld’activité qui fait partie du cahier des charges del’évaluation, avoir un représentant de chaque siteet des membres paramédicaux dans le comité depilotage, préparation partagée entre les différentssites avec affichage d’une bonne entente entre leséquipes, souligner l’intrication clinique/recherche,entrer dans une procédure d’EPP et penser auxenquêtes d’évaluation patients. Cette culture del’évaluation a les conséquences positives d’uneréflexion commune sur notre fonctionnement quoti-

Jean PougetCentre de Référencedes MaladiesNeuromusculaireset de la SLA,Hôpital La Timone, AP-HM,[email protected]

Né du Plan National Maladies Rares 1, le label « Centre de Référence » est obtenu pour unedurée de cinq ans. Les premiers Centres labellisés, en 2004, ont été soumis l’an passé àévaluation. Une procédure contraignante, mais riche d’enseignements collectifs alors ques’annonce le Plan National Maladies Rares 2 et l’une de ses cibles prioritaires : l’adoptionde bases de données.

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CLAUDE DESNUELLE

genèse des myopathies centronucléaires ». Elle acontinué son travail de thèse sur le même sujet dansle laboratoire IGBMC à Strasbourg sous la directionde Jocelyn Laporte. Elle a bénéficié d’un renouvelle-ment de la subvention pour l’année 2008. « L’identifi-cation des domaines fonctionnels du récepteur de laRyanodine » a permis à Marine Cacheux d’être lau-réate en 2008 et d’effectuer un travail de thèse surle même thème sous la direction d’Isabelle Martyà l’U836 INSERM de Grenoble. Le renouvellementde la subvention recherche lui a été accordé pour

2009. En octobre2009, le prix aété remis à AliciaMayeuf pour sonmémoire portantsur « le rôle deNotch dans larégulation myo-génique » et unprojet de thèse àsuivre sur « larégulation de la

différenciation des cellules multipotentes du dermo-myotome chez l’embryon de souris ». Ce travail doitêtre réalisé dans le laboratoire CNRS/URA 2578 àl’Institut Pasteur à Paris, dans l’équipe de MargaretBuckingham.Lors des Journées de la SFM, en octobre 2009 àHendaye, Valérie Tosch-Lienhart et Marine Cacheuxont présenté l’avancée de leurs travaux et AliciaMayeuf a exposé son mémoire de Master. Le PrixMaster 2010 sera remis à l’occasion des Journées dela SFM qui auront lieu à Nice les 24 et 25 novembre2010.

Pour tous renseignements sur les conditions desoumission au Prix Master de la SFM, consulter lesite www.sfmylogie.org

L’objectif du prix Master de la SFM est double : recon-naître la qualité d’un travail réalisé au sein d’uneéquipe de recherche en Myologie pendant cette phasedu cursus universitaire ; être une force d’incitation àla continuité de ce travail scientifique en doctoratd’Etat et ainsi faciliter l’orientation de jeunes scienti-fiques vers la recherche appliquée aux maladies dumuscle.L’originalité de ce prix est non seulement dedonner une récompense incitative et valorisante,mais surtout de participer au financement d’untravail de thèse(sous réserve quecelui-ci soit enrapport avec laMyologie et quel’équipe scien-tifique d’accueilsoit reconnue parune Ecole docto-rale).

Le Prix Master en pratiqueUn prix de 1000 € récompense la qualité d’unmémoire de Master2. Une subvention de 9000 €

directement versée au laboratoire d’accueil (selondes conditions établies) y est associée. Selonl’analyse d’un rapport d’activités intermédiaire, cettesubvention peut être renouvelée une 2e année. Tousles ans, un jury désigné par la SFM classe selon descritères définis les candidatures reçues. Le Prix estremis à l’occasion des Journées Annuelles de la SFM.

2007, 2008 et 2009, trois lauréatesA ce jour, trois candidates ont été récompensées. Le1er prix Master de la SFM a été attribué, en 2007, àValérie Tosch-Lienhart à propos de « l'impact demutations ou d'anomalies d'épissage retrouvéesdans l'Amphiphysine II et la Dynamine 2 dans la

Claude DesnuellePrésident de la SociétéFrançaise de Myologie Centre de RéférenceDHOS, MaladiesNeuromusculaires et SLA, GH Archet, Nice CNRS UMR 6543/IFR 50,Faculté de Médecine,Université de Nice SophiaAntipolis

Prix Master de la

Le Prix Master de la Société Francaise de Myologie (SFM) est une des actions marquantesde cette société savante. Depuis 3 ans, ce prix, créé en partenariat avec les laboratoiresGenzyme, récompense chaque année un travail de Master 2 scientifique en rapport avecla Myologie.

V. Tosch-Lienhart M. Cacheux A. Mayeuf

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Les cahiers de myologie N°2 AVRIL 2010 49

L’ et les consultations collaborent

INFO

S

INFOS

SYLVIE MARION

de la prise en charge et son accompagnement. Lacollaboration des services régionaux et des consulta-tions spécialisées permet la mutualisation des infor-mations, clé d’une prise en charge optimale, efficaceet adaptée au patient dans son environnement.

Le temps de la consultation... et dans la duréeLe document édité par l’AFM propose des repères etdes outils qui facilitent la mise en œuvre de cettecollaboration, au long cours comme lors de chaque

consultation. Il en préciseles objectifs et propose despistes d’action pour chacund’entre eux, à l’exempled’une fiche de liaison dontun modèle figure en annexe.Cet outil permet de faire unpoint synthétique et globalsur la situation du patientavant la consultation : priseen charge médicale, droitssociaux, conditions de vie,aides humaines et techni-ques. Le document com-porte également un modèlede tableau de suivi despatients, utile pour réperto-rier dans le temps lesactions engagées après laconsultation. De même, unmodèle de convention de

partenariat aide à formaliser les engagements dechacune des parties, les modalités de partage desinformations ou encore les questions de responsabi-lité. Les consultations spécialisées et les servicesrégionaux peuvent s’approprier ces différents outilset les adapter à leurs spécificités.

(1) Brochure disponible auprès de :AFM – Direction des Actions Mé[email protected]

Les consultations spécialisées et les services régio-naux de l’AFM sont deux acteurs majeurs de laprise en charge des patients atteints de maladiesneuromusculaires. Ils remplissent auprès d’euxdes rôles complémentaires autour de missionspartagées. Leurs finalités communes consistent àpromouvoir une prise en charge de qualité, respec-tueuse du patient, à assurer une approche globale desa situation et à co-construire avec lui son parcoursde soins. La collaboration des consultations spéciali-sées et des services régio-naux facilite l’atteinte de cesobjectifs. L’AFM a édité undocument(1) sur ce thème :« Consultations neuromus-culaires et services régionauxde l’AFM - Des repères pourbien collaborer ».

Une collaborationqui va de soi Elaboré par des représen-tants de consultations neuro-musculaires et de servicesrégionaux de l’AFM, ce docu-ment met en exergue lesapports mutuels des deuxintervenants, au regard de lacomplémentarité de leursactions. Interlocuteurs privi-légiés des patients et de leurfamille, les services régionaux interviennent en effetdans l’aide à la connaissance et à la compréhensionde la maladie, de sa prise en charge et de ses impli-cations au quotidien. Ils jouent également un rôledans la prévention des conséquences de la maladieet aident à la mise en relation entre le patient et lesdifférents intervenants médico-sociaux. Les consul-tations neuromusculaires assurent pour leur part lediagnostic, le suivi médical régulier, la mise en place

Sylvie [email protected]

La collaboration des consultations neuromusculaires et des services régionaux de l’AFM nepeut être que bénéfique aux patients atteints de maladies neuromusculaires. L’AFM a publiéune brochure sur le sujet. Conçue par un groupe de travail pluridisciplinaire, elle proposedes pistes d’action et des outils pratiques qui facilitent la mise en œuvre de ce partenariat etoptimise son efficacité.

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50 N°2 AVRIL 2010 Les cahiers de myologie

COUR

RIER

COURRIER

patients. Une meilleure caractérisation du phénotypeclinique et des aspects anatomo-pathologiques apermis de réaliser l’analyse moléculaire en France.Cette collaboration a aussi permis de contribuer à laformation de nombreux professionnels et d’apporterde précieuses recommandations aux différents spé-cialistes prenant en charge les patients atteints demyopathies. Ceci a favorisé les stages à l'étranger demédecins argentins et la venue, à l’Hôpital Garrahan,de professionnels issus d’autres centres hospitaliersde notre pays et d’Amérique latine (Chili, Uruguay).En raison de l’extraordinaire impact de l'expérienceacquise au cours de ces années de collaboration avecla France et de la demande croissante de soins despatients atteints de maladies neuromusculairesen Argentine, la direction de l'Hôpital National dePédiatrie Garrahan a approuvé, récemment, unprogramme de soins interdisciplinaires conjoints,rassemblant les consultations spécialisées etl’hôpital de jour. Cette pratique est actuellementunique dans notre pays.

Fabiana Lubieniecki (MD), Soledad Monges (MD),Ana Lia Taratuto (MD; PhD)

Des éloges en provenance de Suisse« ... Depuis bientôt dix ans, nous avons rédigé, éditéet distribué à tous nos membres la revue médicale« Myopathies ». Nous avons essayé de réunir desarticles intéressants sur les dernières avancées dela médecine et de la science dans le domaine desmaladies neuromusculaires. Cependant, cela devientde plus en plus difficile de rédiger une publicationde qualité. C’est la raison pour laquelle nous noussommes adressés à l’Association Française contreles Myopathies et à la Société Française de Myologiequi ont créé une publication de grande qualité, « LesCahiers de Myologie », faite par des professionnels,c’est le premier ouvrage de référence francophonedans ce domaine.… ».

Emmanuel DubochetPrésident de l'ASRIM

Extrait du courrier du Président de l'ASRIM (Association dela Suisse Romande et Italienne contre les Myopathies),adressé aux neurologues et aux membres sympathisantsde l'ASRIM lors de l’envoi du premier numéro des Cahiersde Myologie.

Précisions venues de Buenos Aires« Nous nous adressons à vous à propos de la publi-cation de l’article sur « La Myologie en AmériqueLatine, nouvelle génération de spécialistes » et del'importante contribution de EVELAM (Escuela deVerano Euro-Latino-Americana) à la diffusion de lamyologie, depuis 2008. Nous souhaitons complétercet article par l’historique de la prise en charge de lapathologie neuromusculaire en Amérique Latine parles équipes multidisciplinaires de l'hôpital public denotre pays l’Argentine.L'analyse de la biopsie musculaire avec les techni-ques d’histochimie a commencé à Buenos Aires(Argentine) dès 1973 dans le Laboratoire de Neuropa-thologie de l’Hôpital des Enfants « Ricardo Gutier-rez ». Celui-ci faisait partie de la Fondation Di Tellades Neurosciences et de la Fondation pour combattreles maladies neurologiques infantiles (Fundación deLucha contra las Enfermedades Neurológicas de laInfancia : FLENI). Ce travail s'est poursuivi avecFLENI (englobant la pathologie pédiatrique et celle del’adulte) en tant que centre de référence pour leshôpitaux de notre pays. Par ailleurs, dans cette fonda-tion, ont été formés de nombreux neurologues,neuro-pédiatres et pathologistes qui ont terminé leurspécialisation à l'étranger. Depuis 1987, dans leLaboratoire de pathologie de l’Hôpital National dePédiatrie « J. P. Garrahan » à Buenos Aires, a étécréée une section dédiée aux maladies neuromuscu-laires. Elle est devenue le seul Centre National etPublique de Référence pour l'étude des biopsiesmusculaires en Argentine.Par la suite, nous avons établi des partenariats avecdifférents centres de renommée internationale,notamment avec les Unités Inserm de Institut deMyologie à l’Hôpital Pitié Salpêtrière. Nous avonsainsi bénéficié de subventions de rechercheoctroyées par l'Association Française contre lesMyopathies (AFM) en 2002 et du programme decollaboration ECOS-SECYT (Collaboration scientifi-que et technologique entre la France et l'Argentine)depuis 2003. En 2007, notre travail en commun avecla France a été reconnu comme une des dix meilleu-res collaborations de ces dix dernières années. Dansce projet, ont été étudiés, notamment en Argentine,les aspects cliniques et les biopsies musculaires des

« Courrier », une nouvelle rubrique créée dans Les Cahiers de Myologie. L’objectif estde donner la parole aux lecteurs afin de recueillir leurs avis et/ou opinions sur le fond etsur la forme des articles parus. C’est aussi un espace d’échanges où chacun peut apporter deséléments ou des informations complémentaires sur un sujet préalablement traité dans larevue. Deux courriers reçus après la publication du premier numéro des Cahiers de Myologieinaugurent cette page : l'un en provenance d'Amérique latine (Argentine) et l'autre de Suisse.

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Les cahiers de myologie N°2 AVRIL 2010 51

AGENDA

20108 avril 2010 (Institut de Myologie, Paris)Réunion [email protected] &nb.romero.institut-myologie.org

10-17 avril 2010 (Toronto, Canada)American Academy of Neurologywww.aan.com

27-30 avril 2010 (Lyon, France)Journées de Neurologie de Langue Françaisewww.b-c-a.fr

4 mai 2010 (Institut de Myologie, Paris)Journées utilisateurs [email protected]

5-8 mai 2010 (Ottawa, Canada)New Directions in Biology &Diseases of skeletal musclewww.med.upenn.edu/muscle

17-21 mai 2010 (St Petersburg, Russie)Russian Course of [email protected]

24-27 mai 2010 (London, UK)Update in Neuromuscular Disorderswww.cnmd.ac.uk

9-11 juin 2010 (Lyon, France)17e journées Francophonesd’Electroneuromyographiewww.enmglyon2010.com

19-23 juin 2010 (Berlin, Allemagne)ENS Annual Meetingwww.ens.org

21-29 juin 2010 (Institut de Myologie, Paris)13e Summer School of Myologywww.institut-myologie.org

24 juin 2010 (Institut de Myologie, Paris)Réunion GEM (exceptionnellement en anglais)www.sfmyologie.org

24-26 juin 2010 (Freiburg, Allemagne)Workshop Essais Cliniques [email protected]

7-10 juillet 2010 (Santiago, Chili)Congrès ORITELJournée Maladies [email protected]

17-22 juillet 2010 (Naples, Italie)XII International congress on neuromuscular diseasewww.icnmd2010naples.org

16 septembre 2010 (Institut de Myologie, Paris)Réunion [email protected] &nb.romero.institut-myologie.org

25 septembre 2010 (partout en France)Journées Nationales AFM("Révision et précision des diagnostics")www.afm-france.org

14-16 octobre 2010 (Marseille, France)Journées Annuelles de la SOFMERwww.sofmer.com

12-16 octobre 2010 (Kumamoto, Japon)WMS Annual Meetingwww.worldmusclesociety.org

24-25 novembre 2010 (Nice, France)Journées Annuelles SFM + GEMwww.sfmyologie.org

16 décembre 2010 (Institut de Myologie, Paris)Réunion [email protected] & nb.romero.institut-myologie.org

Page 52: Les cahiers de

3 ÉDITORIAL

4-5 SOMMAIRE

HISTORIQUE5-10 Une contribution à l'histoire de la découverte

des calpaïnopathies Michel Fardeau, Jacques Beckmann, Hiroyuki Sorimachi,Andoni Urtizberea

PHYSIOLOGIE11-13 Le muscle endocrine

Sébastien Banzet, Nathalie Koulmann

CAS CLINIQUES14-15 Déficit en thymidine kinase de type 2 :

un diagnostic à évoquer aussi chez l'adulteAntony Béhin, Claude Jardel, Kristl Claeys, Norma Romero,Bruno Eymard, Anne Lombès

16-17 Amyotrophie spinale : une cause d'hypomobilitéfœtale pouvant être trompeuseIsabelle Desguerre, Marjolaine Wilhems, Itxaso Marti

PRISE EN CHARGE18-19 Grippe A [H1N1], la vaccination chez les

patients neuromusculairesGroupe d'experts MNM et infection pandémique

20-21 Le positionnement en fauteuil roulant :une dynamique complexeElise Dupitier

22-23 Dystrophie myotonique de Steinert (DM1) :la fatigue, plainte principale Benjamin Gallais

FICHE PRATIQUE24-25 Accès de paralysie périodique :

orientation diagnostique Savine Vicart

MISE AU POINT26-34 La Mesure de Fonction Motrice, une échelle

validée pour les MNMCarole Bérard, Carole Vuillerot, Françoise Girardot,Dalil Hamroun, Christine Payan

LU POUR VOUS35-36 Préclinique

Jean-Thomas Vilquin37-38 Thérapeutique

Leïla Lazaro, Norma Romero39-40 Génétique

Gisèle Bonne, Valérie Allamand41-42 Psychologies

Christian Réveillère

MYOLOGIE DANS LE MONDE43-44 MyoSuisse, un réseau de spécialistes

et d'organisations dédiés aux MNMThierry Kuntzer

PARTENARIATS45 TREAT-NMD, Conférence Internationale

en collaboration avec le NIHFrançoise Rouault

CLIN D’ŒIL46 Le point de vue du "dinosaure"

Génomique et Médecine : l'heure du bilanJean-Claude Kaplan

INFOS47 Le premier Plan National Maladies Rares

est mort... Vive le deuxième !Jean Pouget

LA PAGE DE LA SFM48 Prix Master de la SFM

Claude Desnuelle

LA PAGE DE L’AFM49 L'AFM et les consultations collaborent

Sylvie Marion

50 COURRIER

51 AGENDA

SOMMAIRE N° 2 - avril 2010