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LES ACTES COLLOQUE VALORISATION IMMOBILIÈRE Valorisation du patrimoine immobilier en santé 30 juin 2015

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LES ACTES COLLOQUE

VALORISATIONIMMOBILIÈREValorisation du patrimoine immobilier en santé30 juin 2015

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SOMMAIRE

02 _ VALORISATIONS IMMOBILIÈRES : LES ACTES

PAGE 02Introduction• Discours de Philippe Ritter• Discours de Yannick Le Guen• Discours de Catherine Fermand• Discours de René Caillet• Valorisation du patrimoine immobilier :

l’accompagnement de l’ANAP

PAGE 12Table ronde 1 : comment contribuer aux financements de ses investissements avec son patrimoine existant ?

PAGE 18Exemple des hospices civils de Lyon

PAGE 22Table ronde 2 : patrimoine de l’hôpital et enjeux communaux : comment travailler ensemble et concilier les contraintes ?

PAGE 28Valorisation patrimoine : politique publique d’avenir ?

PAGE 30Table ronde 3 : quelle articulation entre libération de foncier santé et construction de logements sociaux ?

PAGE 39Table ronde 4 : la valorisation patrimoniale : une stratégie gagnante pour les entreprises publiques ?

PAGE 44Table ronde 5 : imaginer aujourd’hui ce que deviendra demain le site dans la ville

PAGE 49L’ANAP, partenaire de vos projets à venir

PAGE 50Conclusion

VALORISATION IMMOBILIÈREValorisation du patrimoine immobilier en santé

30 juin 2015

COLLOQUE VALORISATIONS IMMOBILIÈRES

INTRODUCTION

CONTEXTE Les établissements de santé, qu’ils soient sanitaires ou médico- sociaux, comptent parmi les équipements les plus importants d’une ville. Ils contribuent directement à la structuration et au développement du territoire par l’attractivité économique et démographique qu’ils génèrent.Cependant, les établissements de soins vivent actuellement de profondes mutations liées notamment aux modifications des modes de prise en charge (parcours de santé, évolutions des pratiques telles que l’augmentation de l’ambulatoire ou encore la progression des technologies médicales).Les établissements médico-sociaux se transforment également : l’accroissement important des personnes âgées de plus de 75 ans sur les vingt prochaines années ou encore l’augmen tation importante de la population atteinte d’affection de longue durée vient impacter directement ces établissements.Ainsi le paysage sanitaire et médico-social bouge : il doit adapter son modèle organisationnel et instaurer de nouvelles coopéra-tions entre acteurs de la santé. La recomposition du maillage territorial de l’offre de soins commence à s’opérer notamment par des regroupements de structures (tel l’exemple qui vous sera présenté aujourd’hui avec la cité sanitaire de Saint Nazaire).L’évolution du bâti et son rapport à son environnement proche, autrement dit à la ville, s’imposent.Or, le patrimoine immobilier est un bien de premier plan dans la gestion au quotidien d’un établissement qu’il soit sanitaire ou médico-social.L’ensemble de ce patrimoine constitue un parc « hors normes » pour plusieurs raisons :• Par son ampleur qui en fait l’un des plus gros patrimoines nationaux au même rang que celui de l’État,• Par sa présence et son ancrage territorial fort,• Par sa typologie de biens si variée et parfois d’une richesse patrimoniale extraordinaire. Comment ne pas évoquer les nombreux Hôtels-Dieu qui ont accueilli durant des siècles les malades et les indigents, tels

Discours dePhilippe Ritter, Président du conseil d’administration de l’ANAP

LES ACTES COLLOQUES

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l’Hôtel-Dieu de Lyon ou celui de Marseille dont vous parleront les hospitaliers présents ce jour,• Par ses enjeux financiers forts : 1er poste dans un bilan et 2e poste de charges dans un compte de résultats.

ENJEUXL’un des principaux défis à relever pour un établissement de santé est désormais de valoriser ce patrimoine immobilier excep-tionnel et d’en optimiser sa gestion au profit de ses usagers.« Valoriser » signifie pour un établissement mettre en place une véritable stratégie patrimoniale, notamment par :• La connaissance approfondie de son patrimoine.• Son optimisation au regard des enjeux actuels et futurs : assurer un équilibre financier de l’établissement, s’adapter à l’évolution des prises en charge, tout en préservant ses ressources.L’organisation spatiale d’un établissement est un véritable enjeu d’aménagement du territoire à l’échelle de la ville. La libération des sites qui peut en découler également.Il faut sortir de cette ignorance mutuelle entre les collectivités locales et l’hôpital avec une meilleure prise en compte, au niveau local, des enjeux de la politique des investissements en santé.Des partenariats sont à concevoir avec les acteurs de terrain pour créer de nouveaux modèles urbains et sociaux. Cette prise de conscience est récente mais importante car elle constitue une nouvelle approche notamment concernant la problématique de libération de fonciers au regard des politiques publiques portant sur la construction de logements.Il y a pour autant un équilibre des forces à trouver entre les collectivités et les établissements en santé car les premières disposent déjà d’instruments réglementaires puissants en matière d’urbanisme. Comme Christian Eckert, secrétaire d’État au Budget l’a rappelé nous ne pouvons nous permettre de brader notre patrimoine.L’exemple de la vente par l’AP-HP de Saint Vincent de Paul à la Ville de Paris démontre que des accords sont possibles.D’autres propriétaires publics ont amorcé des politiques de valorisation de leur patrimoine, tels que la SNCF et le groupe La Poste. Nous nous devons de partager nos expériences, d’impliquer tous les acteurs afin d’ouvrir un dialogue fourni et constructif.

MISSIONS ANAPL’ANAP a pour mission de venir en appui aux établissements sanitaires et médico-sociaux dans l’optimisation de leur gestion patrimoniale. Elle les accompagne sur ces missions d’optimisation pour les aider à s’adapter aux nouveaux besoins et aux mutations urbaines en cours.

Elle offre ainsi ses compétences et son expérience pour permettre aux établissements et aux collectivités locales de travailler ensemble tout en conciliant les contraintes de chacun. Les résultats du premier appel à candidatures lancé en 2011 auprès de dix-huit établissements de santé pour cet accompa-gnement dans la valorisation et la cession d’un site sont significatifs : en moins de trois ans la moitié des sites ont été vendus ou sont sous protocole d’achat pour un montant de cessions de 70 M €. L’amélioration des recettes est par ailleurs significative (environ 30 %). La valeur ajoutée « technique » de son concours est également reconnue par l’ensemble des acteurs de terrains (ARS, établissements et collectivités territoriales). Cet apport de l’ANAP appelle une réflexion au plus haut niveau sur le devenir et les enjeux des prochains sites sanitaires et médico-sociaux qui vont être désaffectés.Cependant l’expertise « spécifique à la valorisation » en établissement n’est pas répartie de manière homogène sur le territoire. Il y a du sens à faire coopérer les établissements qui possèdent en interne cette expertise et ceux qui ne l’ont pas. Il faut donc professionnaliser et mutualiser afin de devenir efficients sur ce sujet dans le secteur de la santé.

OBJECTIFS DU COLLOQUENous nous réjouissons donc aujourd’hui de la large représen-tation des établissements sanitaires et médico-sociaux, mais également de la présence des représentants des collectivités territoriales, ainsi que des hautes autorités de l’État, telles que le Conseil immobilier de l’État. Vous nous prouvez que cette thématique de la valorisation du patrimoine dépasse très significativement les murs de l’hôpital ou de la maison de retraite et est une réelle opportunité pour notre territoire et nos villes car elle représente un enjeu majeur pour l’avenir.Je souhaite que ce colloque puisse stimuler votre imagination et ainsi contribuer à l’innovation en matière de valorisation du patrimoine en santé. L’objectif étant d’en faire un véritable levier de performance au service des établissements et de l’intérêt collectif.

INTRODUCTION _ 03

« VALORISER » SIGNIFIE POUR UN ÉTABLISSEMENT METTRE EN PLACE UNE VÉRITABLE STRATÉGIE PATRIMONIALE, NOTAMMENT PAR LA CONNAISSANCE APPROFONDIE DE SON PATRIMOINE ET SON OPTIMISATION AU REGARD DES ENJEUX ACTUELS ET FUTURS.

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04 _ VALORISATIONS IMMOBILIÈRES : LES ACTES

QUELS SONT LES PRINCIPAUX OBJECTIFS ?• La transformation de la gestion patrimoniale en un levier d’efficience suffisant pour accroître la performance globale de l’établissement, et plus largement la performance du système de santé.• Renforcer la stratégie de valorisation du patrimoine et réaliser des arbitrages entre le maintien et la cession, en fonction de la création de valeur des biens détenus.• Intégrer les évolutions structurantes en cours dans la réflexion sur le patrimoine, comme le développement de l’ambulatoire et la mise en place des GHT.Lorsque la loi de santé sera votée, l’aspect territorial sera extrêmement prégnant pour les établissements de santé avec notamment la constitution des groupements hospitaliers de territoire. Cette approche territoriale va devoir transformer profondément la gestion patrimoniale des établissements de santé, qu’ils soient publics ou privés.• La réflexion sur l’hôpital de demain et son évolutivité.Tout le sujet pour le patrimoine immobilier sera de pouvoir intégrer dans les sujets organisationnels les innovations apportées par les technologies de santé, tout en cessant de résonner sur une logique pure d’investissement.

QUELS SONT LES PRINCIPAUX DÉFIS ?• Ne plus raisonner dans une logique d’investissement alors que le coût de maintenance représente 75 % du coût de la vie d’un bâtiment.• Maîtriser ses charges face à l’augmentation des coûts d’énergie et les possibilités offertes par les énergies renou-velables.L’augmentation des coûts de l’énergie est par ailleurs certai-nement l’élément le plus structurant dans l’augmentation des charges d’exploitation sur les quinze prochaines années. Il faut donc adopter d’ores et déjà dans vos approches les notions de développement durable et les possibilités offertes par les énergies renouvelables. Il y a des exemples qui démontrent que des réductions importantes de consomma-tion d’énergie sont possibles.• Articuler libération du foncier des établissements de santé et construction de logements sociaux (loi du 18 janvier 2013, « loi Duflot »).Sur le thème de l’articulation de la libération du foncier et de la production de logements sociaux, les établissements de santé doivent s’intégrer dans une politique d’aménagement urbain en lien avec les collectivités territoriales.• Continuer de gérer un patrimoine très hétérogène et complexe.

Discours deYannick Le Guen, Sous-directeur de la DGOS

Je suis particulièrement honoré et heureux d’intervenir pour ce premier colloque sur la valorisation du patrimoine immo-bilier en santé, qui est parmi les nombreuses actions de l’ANAP, l’un des axes sur lequel l’établissement a créé le plus de valeur. Je voulais au nom de l’État remercier les équipes, à la fois sur le champ des cessions et sur les nombreuses autres externalités que vous avez su créer et sur lesquels je vais revenir.Quelques rappels sur les chiffres du patrimoine immobilier : 60 millions de m², environ 60 milliards d’euros de valeur nette comptable, un coût d’exploitation qui représente 75 % du coût de la vie d’un bâtiment.C’est un enjeu organisationnel qui doit continuellement s’adapter aux évolutions et aux ruptures en innovation des prises en charge. C’est donc un enjeu considérable qui dépasse le patrimoine au sens habituel du terme. Le ministère et l’ANAP ont engagé ces dernières années des actions très structurantes sur ce thème.

60 millionsde m2

Les chiffres clés

60,6 Mds d’eurosde valeur

nette comptable

Coût d’exploitation=

75 % du coût de la vie d’un

bâtiment

Levier d’adaptationaux évolutions

en cours

LE PATRIMOINE IMMOBILIER CONSTITUE UN ENJEU ORGANISATIONNEL QUI DOIT CONTINUELLEMENT S’ADAPTER AUX ÉVOLUTIONS ET AUX RUPTURES EN INNOVATION DES PRISES EN CHARGE. C’EST DONC UN ENJEU CONSIDÉRABLE QUI DÉPASSE LE PATRIMOINE AU SENS HABITUEL DU TERME.

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INTRODUCTION _ 05

QUELLES SONT LES ACTIONS MENÉES ?Face à ces enjeux nous avons engagé ces dernières années plusieurs actions structurantes.La première a été la mise en place d’outils et de référentiels qui permettent un pilotage local.Deuxièmement, nous avons rénové en profondeur la stratégie de soutien à l’investissement, de manière à l’orienter vers la création de valeur pour le système de santé, indépendamment de celui de l’établissement de santé.Ainsi, un groupe national d’experts sur le patrimoine immo-bilier a été mis en place.Ensuite, la connaissance du patrimoine est un préalable indispensable. Nous avons donc « standardisé », en lien avec l’ATIH et l’ANAP, un outil qui permet aux établissements d’avoir une connaissance fine de leur patrimoine de manière à optimiser le pilotage de leur immobilier. Les niveaux régio-naux et nationaux peuvent également disposer d’une vision consolidée du patrimoine immobilier. À ce jour, 250 établis-sements ont commencé à renseigner l’outil Ophelie.Réaliser un inventaire du patrimoine pour une meilleure traçabilité des immobilisations.Ceux qui sont déjà engagés dans une démarche de certifica-tion des comptes savent que c’est un point d’attention par-ticulier et tout à fait légitime des commissaires aux comptes sur ce point. Ce travail de longue haleine doit être un pré-re-quis indispensable au fait d’avoir des comptes certifiés.Troisièmement, un accompagnement dans la dynamisation des actifs immobiliers pour des établissements a été mis en place. 18 sites ont bénéficié de ce programme, et d’autres vont continuer à être accompagnés.La fiabilisation des coûts de maintenance en lien avec les travaux sur la comptabilité analytique et financière a démarré, mais n’est pas terminée.Pour ce qui concerne les investissements, nous avons aban-donné la logique de plan pour avoir une approche des projets plus en maturité et avec une réflexion nécessaire de retour sur investissement. L’objectif principal de cette approche est de renouveler et moderniser l’offre de soin à un rythme raisonnable sans augmenter l’endettement du secteur hospitalier. En 2014, pour la première fois depuis 15 ans, l’endettement hospitalier n’a pas cru, sans avoir un impact négatif sur la sécurité et la qualité des soins.Nous avons mis en place le Copermo (Comité interministériel de la performance et de la modernisation de l’offre de soins) pour promouvoir auprès des établissements de santé une démarche globale, avec une doctrine qui permette de diffuser les référentiels, dont ceux de l’ANAP, de manière à ce que l’ensemble des acteurs puissent se positionner sur la bonne adéquation territoriale de la stratégie de l’établissement et sur la pertinence interne du projet d’établissement.L’ensemble des acteurs s’accordent sur ce sujet pour recon-naître l’importance des référentiels ANAP tels qu’Oscimes, Ælipce, Hospi Diag, qui permettent d’avoir de meilleurs projets avec une meilleure maîtrise des dépenses.Ainsi le ministère se place, avec le projet de loi de santé, dans une logique de territorialisation avec entre autres : la création

des GHT, refonte des modèles de GCS, restructuration de l’amorce du premier recours. Tous ces éléments convergent vers une approche qui vise à mettre le patient au cœur du système et de ne plus avoir de vision segmentée sanitaire, médico-sociale ou ville en termes d’investissements. Cela signifie qu’en termes de patrimoine hospitalier il faut intégrer cette stratégie d’investissement avec une notion également d’investissements immatériels. Dans les années à venir, ceux-ci vont révolutionner les systèmes de prises en charge car tout ce qui concerne les systèmes d’informations doit faire partie intégrante du service en santé et permettre d’avoir des investissements immobiliers moins conséquents en termes de surface.

Gestion patrimoniale active à l’hôpital

Formation d’un groupe national d’experts sur le patrimoine hospitalier

Objectifs

Identifier et diffuser les leviers d’efficience du patrimoine aux établissements

Actions

Mise en place de l’outil de pilotage national OPHELIE

Réaliser le diagnostic du patrimoine immobilier par les établissements. 1 an après son lancement, 250 établissements ont commencé OPHELIE

Valorisation du patrimoine immobilierAccompagner les établissements dans la dynamisation des actifs immobiliers. 18 sites ont bénéficié du programme suite à l’appel à projets de 2011

Certification des comptesEngager une démarche d’inventaire du patrimoine pour une meilleure traçabilité des immobilisations

Fiabilisation et optimisation des coûts d’entretien / maintenance

Fiabiliser les coûts d’entretien et de maintenance en lien avec les travaux de comptabilité analytique hospitalière

Transformation en profondeur de la stratégie de soutien à l’investissement

Évolution du processus de sélection des projets d’investissement

Objectifs

Assurer la pertinence des investissements (respect des référentiels ANAP en termes d’organisation) et rompre avec la logique de plan

Actions

Soutenabilité des investissementsRenouveler l’offre et une modernisation de l’offre de soins à un rythme raisonné, sans augmenter l’endettement du secteur hospitalier

Mise en place du COPERMO

Promouvoir une démarche globale, une doctrine nationale fixant à tous les projets d’investissement des objectifs ambitieuxValider les « grands projets » et définir les modalités de leur accompagnement financier par l’échelon national

Mise en place des SRIS pilotés par les ARSVeiller à la bonne articulation des projets d’investissement portés par l’ensemble des acteurs du système de santé sur le territoire considéré 

Diffusion des outils de pilotage de la stratégie d’investissement

Doter les acteurs des outils ANAP, appui au pilotage de la stratégie d’investissement : grille d’indicateurs ANAP/DGOS, référentiel OSCIMES, Ælipce, Hospidiag

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06 _ VALORISATIONS IMMOBILIÈRES : LES ACTES

L’hôpital Lariboisière à Paris, qui sera inauguré 50 ans plus tard, en sera la première application. Premier hôpital d’architecture pneumatique et de conception pavillonnaire, avec une conception en peigne qui va chercher à éviter les risques de contagion et d’infection, favorisant la circulation, l’assainissement de l’air.L’Hôtel-Dieu de Paris est également un hôpital pavillonnaire.Ces bâtiments étaient inscrits dans des projets urbains, des projets de quartier.

LES CITÉS-JARDINS HOSPITALIÈRESDeuxième génération d’hôpitaux pavillonnaires, les cités-jardins hospitalières, avec Pasteur et la découverte du monde micro-bien. L’hôpital va changer d’échelle et on cherchera à rendre encore plus autonomes les services et donc les bâtiments, afin de restreindre les déplacements, parce qu’on s’aperçoit que la contamination microbienne ne passe pas par l’air mais par les mains.L’hôpital Édouard Herriot regroupe 16 pavillons construits sur des plans de l’architecte Tony Garnier, sur un foncier de 16 ha.À son ouverture en 1930, on constate l’obsolescence des principes qui avaient animé sa conception, 20 ans auparavant.La Pitié Salpêtrière est également un hôpital de cette géné-ration.

LES PREMIERS HÔPITAUX BLOCSEn 1932, l’hôpital Beaujon, est le premier hôpital bloc. Il a pu être construit grâce à l’acceptation par les équipes soignantes de la concentration des services hospitaliers. Concomitam-ment à cette idée, des événements survenaient : l’arrivée de la pénicilline, le développement des secteurs médico- techniques, une nécessité de réduire les distances, la création des circuits différenciés. Par ailleurs, l’invention du béton armé, de l’ascenseur mais également les exigences foncières ont facilité la construction en hauteur.Beaujon est un hôpital pavillonnaire de la première génération, en peigne, mais empilé sur plusieurs niveaux.

Discours deCatherine Fermand, Architecte – rédactrice d’un ouvrage sur la construction hospitalière

REGARD SUR L’IMMOBILIER EN SANTÉEn prenant de la distance par rapport à l’histoire de l’hôpital tel qu’on le connaît, on prend conscience à quel point sont relatives les convictions, les mentalités de chaque époque, sur le plan médical, sur le plan de l’hygiène, mais aussi sur un plan urbain et architectural.La conception des morphologies de l’hôpital contemporain puise dans l’héritage des formes passées.L’hôpital dit moderne est apparu à la Révolution avec l’ap-parition de la notion de santé publique, l’évolution de la perception de la maladie et donc des théories hygiénistes et la naissance de la médecine clinique qui réclamait des lieux propices à l’observation.

LE MODÈLE TENONPremier modèle pavillonnaire, celui du médecin physicien Tenon. Le plan présenté, de l’architecte Poyet, répond aux théories aéristes soit au principe d’une contamination aéroportée.

Cité-jardin hospitalière de la Grange-Blanche à Lyonaujourd’hui l’hôpital Édouard Herriot - Architecte Tony Garnier.

Hôpital Lariboisière - plan du rez-de-chausée. Martin-Pierre Gauthier (1790-1855). Première application fidèle du modèle de Tenon de 1788.

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INTRODUCTION _ 07

Dans la même génération, on retrouve l’hôpital Huriez au CHRU de Lille.

L’HÔPITAL CENTRE DE SOINSLes trente glorieuses, c’est l’hôpital centre de soins. Cette période voit la création de la Sécurité sociale, de la carte sanitaire… et vit une mutation profonde de l’immobilier de santé. On y voit la construction des grands établissements hospitalo- universitaires, le développement des plateaux techniques, la création de services et soins d’urgence, la transformation des conditions d’hébergement. L’apparition du socle-tour avec l’indépendance des secteurs et l’hyper-compacité. Naît ainsi le modèle « à la française » des années 60-70 : le plateau technique en bas et les étages d’hospitalisation.Durant cette période, on « inventera » également les procédures dites industrialisées, avec la création des modèles tels que Beaune ou Fontenoy, qui sont des modèles de socle-tour permettant la construction de 70 000 lits en France.Cependant, d’un point de vue urbain, d’accueil du public et d’évolutivité nécessaire au secteur, l’hôpital bloc n’était probablement pas la solution idéale.

L’HÔPITAL DANS LA VILLEÀ partir des années 80, de nouveaux modèles émergent tels que « l’hôpital rue » avec la notion de galerie hospitalière. L’un des premiers exemples est l’hôpital Robert-Debré ouvert en 1988, sur les plans de l’architecte Pierre Riboulet.Le regroupement des équipements médico-techniques toujours plus sophistiqués, le développement encore plus important des activités externes et la diminution de l’hospi-talisation classique deviennent des critères essentiels dans la conception des projets architecturaux hospitaliers. Le développement de l’intérêt pour l’architecture, avec l’amélioration de l’accueil du public et des conditions de travail, avec notamment un effort sur la lumière naturelle permettent une évolution importante de la conception hospitalière.

Les premiers hôpitaux blocs : hôpital Beaujon à Clichy, Jean Walter et Cassan (1934).

Hôpital pédiatrique Robert-Debré. Architecte : Pierre Riboulet.Hôpital centre de soin : CHU de Caen.

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08 _ VALORISATIONS IMMOBILIÈRES : LES ACTES

une galerie centrale relève principalement du modèle Nucleus. C’est un modèle anglais qui a vu le jour en même temps que les modèles type Fontenoy ou Beaune apparaissaient en France. L’objectif de ce modèle est de permettre à l’hôpital de se régénérer sur lui-même et de pouvoir modifier facilement les frontières entre services (Marne-la-Vallée, Douais).

Je conclus cette présentation sur des termes d’hospitalité, d’urbanité, de fonctionnalité, de modularité et je m’adresse à vous, concepteurs d’hôpitaux en tant que maîtres d’ouvrage, architectes, programmistes, ingénieurs pour rappeler que tout le travail de conception est de rechercher un équilibre de ces critères en s’inspirant des concepts et des formes du passé.

L’HÔPITAL D’AUJOURD’HUIOn est depuis lors dans le modèle de « l’hôpital d’aujourd’hui » : l’hôpital se « débloque » et s’organise autour d’un nouvel espace public. La lumière naturelle pénètre au cœur du bâti-ment et on voit réapparaître des patios, des jardins, comme il y avait dans les cités hospitalières d’autrefois. Ils permettent d’avoir un fonctionnalisme nécessaire à l’hôpital tout en produisant des conditions d’accueil agréables.Dans les constructions hospitalières plus récentes, on observe de plus en plus des architectures aérées et horizontales, comprenant des séquences alternées de barres, courbes, patios, jardins, galeries et implantations en peigne, avec un vocabulaire architectural empreinté à l’héritage du passé.Le modèle pavillonnaire de la première génération est conservé avec les galeries, le thème du plot et du jardin mais s’adapte à la densification.Un point important pour les établissements hospitaliers concerne l’évolutivité et la flexibilité des bâtiments. Le modèle du monospace basé sur des modules répétitifs branchés sur

Le « Monospace » - Hôpital de Marne-la-Vallée. Brunet Saunier Architecture.

Extension de la maternité de l’hôpital Antoine-Béclère à Clamart. Architectes : Brigit de Kosmi, Espace et Associés.

L’hôpital dans la ville : centre hospitalier intercommunal de Toulon - La Seyne-sur-Mer. BBG architectes associés.

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INTRODUCTION _ 09

L’adaptation architecturale traduit la diversité et la complexité des métiers pratiqués à l’hôpital.• L’hôpital évolue vers plus de modularité, plus d’ambu-latoire, plus de sou ples se dans son fonc tionnement interne, notamment dans l’orga nisation de ses pôles. L’ANAP travaille beaucoup sur ces sujets.• L’adaptation de l’offre de soins passe également par des restructurations. Depuis 25 ans le tiers des capacités d’hospitalisation a été supprimé, notamment une grande partie des unités de soins de longue durée ont muté vers le médico-social.• Ce mouvement de transformation va se poursuivre avec la mise en place des groupements hospitaliers de territoire.• Le secteur de l’accueil des personnes âgées et handicapées connaît des évolutions majeures. L’accueil en EHPAD évolue et va continuer d’évoluer vers des structures plus intégrées avec le quartier, le village et la ville.

Nous sommes donc devant des transformations profondes qui sont à la fois systémiques et organisationnelles.Mais ces affirmations sur l’évolution de l’hôpital devenant plus moderne, plus ambulatoire, de plus courte durée… pour-raient être fortement déjouées par un certain nombre de questions majeures qui sont dans le paysage. Il faut donc être prudent.Ces évolutions majeures sont :• La crise, qui pourrait rendre les modalités de financement plus difficiles.• Le développement d’une certaine paupérisation, avec une difficulté d’accès aux soins. Celle-ci peut être un frein à l’évolution du système de santé, tel que le développement de l’ambulatoire.• Les crises sanitaires, canicules, de type infection ou de crise majeure posent la question d’avoir un nombre de lits suffisants, notamment en médecine.Tout ceci démontre que le sujet du patrimoine immobilier est essentiel et j’espère que cette journée sera la première d’une longue série car l’immobilier est un sujet passionnant !

Discours deRené Caillet, Adjoint au délégué général, FHF – responsable du pôle organisation des soins

L’immobilier est un sujet important pour la FHF, il est majeur par son volume économique, ses enjeux, sa diversité, son implication et son intrication avec la « chose locale ». Pour la FHF, même s’ils sont implémentés et bien documentés par le niveau national, ces questions ne peuvent pas être centralisées ou étatisées et relèvent de la réflexion locale.Car en fait l’immobilier ne se résume pas à de l’immobilier : l’intrication entre le bâti et le collectif intellectuel que repré-sente un hôpital, un établissement de santé ou un établis-sement médico- social est forte.Le patrimoine physique est important mais le patrimoine invisible et intellectuel l’est encore plus.Le travail que fait l’ANAP sur l’immobilier est considérable.Mais il ne faut jamais oublier que l’hôpital, avant d’être un plateau technique, est d’abord un ensemble de savoir-faire et de connaissances collectives organisées qui utilisent un outil qu’est l’immobilier.Cet outil est en permanente évolution, il est même en accélé-ration. Je m’interroge sur la stabilisation de l’endettement des hôpitaux car c’est peut-être un événement plutôt favora-ble d’un point de vue macro-économique, il faut rester vigilant au niveau de la situation micro-économique.

Le patrimoine immobilier est en adaptation constante avec les besoins des hospitaliers..Les évolutions actuelles sont considérables en lien avec l’accélération du progrès médical et des connaissances technologiques, techniques et numériques. L’évolution des métiers et des connaissances actuelles est prodigieuse.Face à cela, les contraintes financières et leur soutenabilité soulèvent un certain nombre d’enjeux qui sont redoutables pour les établissements de santé. Il est évident que la somme de ces contradictions interpelle l’immobilier ainsi que le fonction nement de l’hôpital (et pas seulement l’hôpital public) et que celui-ci doit s’adapter en permanence.La réorganisation de l’offre de santé est-elle suffisante ? La réponse est certainement ambivalente. On évoque régu-lièrement les cathédrales hospitalières pour stigmatiser l’excessif poids de l’hôpital, notamment public, dans notre offre de soins. Ce sujet fait débat.Nous devons le pondérer par plusieurs constats :• Les consultations externes sont, en France, largement internalisées à l’hôpital et cela peut évoluer demain.• L’hôpital intègre de plus en plus de fonctions multiples, évoquées notamment dans la présentation pré cédente.

LE PATRIMOINE IMMOBILIER EST EN ADAPTATION CONSTANTE SUR UN MODE SANS DOUTE ITÉRATIF, AVEC LES BESOINS.

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10 _ VALORISATIONS IMMOBILIÈRES : LES ACTES

de l’État a donné son point de vue sur la gestion patrimoniale des CHU, ainsi que sur la valorisation des actifs immobiliers des CHU.

RETOUR D’EXPÉRIENCES DE L’ANAP SUR L’ACCOMPAGNEMENT AUX VALORISATIONS ET CESSIONS En 2011, l’ANAP a lancé un appel à candidatures pour accom-pagner des établissements de santé dans la valorisation et la cession de leurs sites.L’accompagnement se décompose en deux grandes phases : le pilotage d’une étude de reconversion, et l’aide à la négo-ciation et à la cession de leur site.À cet appel à candidature, 65 établissements ont candidaté, et fin 2011, le jury national en a sélectionné 18 sur l’ensemble du territoire national.L’accompagnement a démarré au printemps 2012. Un travail a été réalisé avec les établissements sur une période d’environ 6 mois, sur un point très important qui est celui de la propriété. Les établissements peuvent être propriétaires depuis très longtemps, par le biais de dons et legs, avec des charges pesant sur ceux-ci. C’est un point très important sur lequel chaque établissement, qu’il soit hospitalier ou médico-social, doit travailler.La justification de l’intervention de l’ANAP était liée à la complexité de chaque site. Cette complexité est basée notamment sur des contextes locaux particuliers.Pour qu’une reconversion puisse se réaliser, il faut que réglementairement nous puissions faire de ces sites autre chose que de l’hospitalier. 60 % de nos sites ont dû avoir une modification du plan local d’urbanisme.Mais l’hôpital a une histoire très longue et peut avoir du bâti historique à conserver. Dans nos cas ce fut pour 50 % des sites, avec certains sites qui combinaient ces complexités.Aujourd’hui, 10 ventes ont pu avoir lieu (ventes fermes ou signatures de protocole), pour un total d’un peu plus de 72 M €, avec des projets de reconversion très variés : centre sportif, logement étudiant, quartiers mixtes.La question centrale de l’ensemble de ces reconversions est le logement. Sur l’ensemble de ces 10 sites, les projets de reconversion prévoient plus de 3 700 logements dont 1 500 logements sociaux. Il y a donc une vraie participation des établissements de santé à la production de logements. Ces 10 projets n’ayant pas fait l’application du dispositif Duflot.Les éléments de réussite sont au nombre de trois :• La démarche partenariale menée avec tous les acteurs : établissements, ARS et collectivités locales. Les projets de reconversion sont avant tout des projets d’aménagement du territoire, et les collectivités locales sont celles qui insufflent le dynamisme aux projets. Elles deviennent des facilitateurs pour la réussite de ces projets.• La prise en compte du facteur temps. L’anticipation permet de minimiser les coûts d’entretien et de gardiennage, qui restent à la charge du propriétaire tant qu’il n’a pas vendu.• Les compétences. Le fait d’avoir fédéré les acteurs (éta-blissements, ARS, collectivités locales et ANAP), a permis

Présentation deAnabelle Billy, Manager, ANAPet Damien Poirot, Chef de projet, ANAP

VALORISATION DU PATRIMOINE IMMOBILIER : L’ACCOMPAGNEMENT DE L’ANAPPOURQUOI ET COMMENT ACCOMPAGNER LES STRATÉGIES DE VALORISATION DU PATRIMOINE ?L’accompagnement de l’ANAP a démarré en 2011 avec un appel à candidatures. Il concerne l’accompagnement de 18 sites hospitaliers à valoriser et céder sur le territoire métropolitain.Quelle définition commune donner à la valorisation ?C’est bien sûr la définition de la valorisation économique mais c’est aussi donner une valeur sociale et une valeur urbaine. Ces trois notions sont importantes et essentielles dans ce type de démarche.Valoriser son patrimoine dans un but d’opti misation de la gestion patrimoniale et de diminution des charges est un objectif que tous les établissements ont au quotidien. C’est également pouvoir articuler cette valorisation avec de nouveaux projets d’investissement portés par les établis-sements.L’abondement des plans de financement est un objectif recherché par la valorisation, car le patrimoine vit et est en perpétuelle reconversion.La valorisation des actifs immobiliers contribue aux missions et objectifs stratégiques des établissements de santé et médico-sociaux.La mutation profonde et actuelle que vit le secteur de la santé et du médico-social touche le paysage immobilier de ce secteur, tel que décrit précédemment. C’est donc un enjeu d’actualité et d’ampleur nationale.Ce sujet intéresse les hautes autorités de l’État puisque trois rapports sont sortis, deux de la Cour des comptes et un conjoint de l’IGAS-IGF-CGEDD publié récemment et portant sur l’impact de la loi Duflot et la mobilisation du foncier public auprès des établissements de santé. Le Conseil immobilier

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INTRODUCTION _ 11

LE SITE BODÉLIOÀ Lorient, le bâti date de la reconstruction sur 7 ha. Tout doit être démoli en dehors d’une chapelle. Le site a été vendu à l’établissement public foncier de Bretagne pour une production essentiellement de logements : environ 700, dont 50 % de sociaux.

CG ABONDANCESBoulogne-Billancourt est un projet très intéressant quand on parle de maximiser les capacités d’autofinancement. La cession va permettre la quasi-intégralité du financement d’une opération de modernisation d’un USLD de plus de 100 lits.

MARGUERITE DE FLANDRESMarguerite de Flandre était exploitée il y a 2 ans. Les premiers bâtis datent du 13e siècle. Les façades du 17e et du 19e siècle sont classées aux Monuments Historiques. Il y a une chapelle, une salle des malades. Il sera toujours ouvert au public. Le bâti historique sera transformé en logements de standing et dans le parc une centaine de logements sont prévus, dont 25 % de sociaux.

D’autres accompagnements perdurent puisque des mises en vente sont en cours.

une augmentation de la valeur de 30 % en moyenne. Cela a permis de fiabiliser ces montants de recettes. Il est impor-tant pour les établissements de s’entourer de compétences sur ces sujets pour créer un vocabulaire commun.À côté de ces accompagnements, l’ANAP édite des guides téléchargeables sur notre site internet. Trois guides sont actuellement en ligne.

PRÉSENTATION DE 5 PROJETSLE SITE DU MOULIN DU PÉLe site du moulin du Pé appartenait au CH de Saint Nazaire. Il s’agit d’un bâti des années 60 qui est appelé à être en grande partie démoli, sur une emprise de 8 ha. Le projet initial de la communauté d’agglomération prévoyait 640 logements dont 50 % sociaux.

LE SITE BON REPOSLe site de Bon Repos, à Saint-Germain-en-Laye, est un projet très intéressant car l’intégralité du bâtiment a été mis en vente et va être réutilisé par Domnis. Il s’agit d’un projet complexe par la présence sur la même parcelle d’un EHPAD conservé par le CHIPS. Domnis va réaliser une résidence étudiante sociale.

Site moulin du Pé, CH de Saint Nazaire.

Site Bon Repos, Saint-Germain-en-Laye.

Le site Bodélio, CH de Lorient.

CG Abondances, Boulogne-Billancourt.

Marguerite de Flandres, CH de Seclin.

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TABLE RONDE 1 COMMENT CONTRIBUER AUX FINANCEMENTS DE SES INVESTISSEMENTS AVEC SON PATRIMOINE EXISTANT ?

La table ronde animée par Philippe Leduc, journalisteA réuni : Francis Saint-Hubert, Directeur général, CH de Saint Nazaire / Nicolas Bougaut, Directeur adjoint, CH de Poissy-Saint-Germain / Pascal Duperray, Directeur de l’accompagnement et des soins, ARS Pays de la Loire / Xavier Dupont, Directeur des établissements et services médico-sociaux, CNSA / Didier Charlanne, Vice-président du conseil scientifique d’orientation de l’ANAP

12 _ VALORISATIONS IMMOBILIÈRES : LES ACTES

Le patrimoine hospitalier est estimé à 60 millions de m2 et représente environ 60 milliards d’euros en valeur comptable. Il s’agit d’un des premiers postes dans les bilans.Comment ce patrimoine existant peut-il donc venir contribuer au financement des futurs investissements ?Deux tables rondes se répondent : la première « comment contribuer aux financements de ses investissements avec son patrimoine existant ? » et la seconde « comment travailler ensemble ? ».

Francis Saint-Hubert, comment arriver à financer ses investissements avec son patrimoine existant, car pour vous, il s’agit plutôt d’une amélioration du bilan. Vous avez également connu un changement de maire ? Cela a-t-il été compliqué ? Francis Saint-Hubert : L’opération de reconstruction de la cité sanitaire de Saint Nazaire a été réalisée en Bail emphytéotique hospitalier(BEH). Effectivement le lien n’est pas si direct qu’avec un investissement en MOP classique, néanmoins il y a un lien.

L’expertise et la plus value que l’ANAP nous a apportée a été déterminante dans la réalisation de cette opération.Pour le financement des immobilisations, il y a trois possibilités :• Par fonds propres : les dons et legs nous n’en avons plus beaucoup, quant aux subventions n’en parlons pas.• Par emprunt, mais nous avons compris qu’il fallait minimiser l’endettement des établissements de santé.• Par l’autofinancement.L’autofinancement c’est simple : le premier levier pour le  renouvellement des immobilisations est sur la base des  amor-tissements. La question étant « comment optimiser les crédits affectés aux dotations d’amortissement ? ».Le premier levier est les recettes supplémentaires de  l’activité, la location des immeubles et les coopérations et partenariats. À Saint-Nazaire, le centre du projet a été la coopération entre une clinique privée et l’hôpital. Un des points majeurs est le partage des charges, qui permet aujourd’hui à nos deux structures de pouvoir abaisser les coûts et notamment les charges fixes.Dans le BEH il n’y a pas d’investissement direct puisque nous payons un loyer. Néanmoins, la vente de l’hôpital permet de sortir de l’amortissement l’ancien site qui représentait envi-ron 1,5 M € par an de dotations aux amortissements. C’est donc une contribution par rapport au loyer que nous payons actuellement.

Alors pour vous M. Bougaut, le problème était différent et plus compliqué car vous aviez plusieurs bâtiments à rénover ? Nicolas Bougaut : Les deux sites hospitaliers de Poissy- Saint-Germain sont implantés sur deux communes, avec un contexte patrimonial qui va sans doute nous aider à résoudre un certain nombre de difficultés liées à notre situation financière : une situation de déficits cumulés importante, des problèmes de trésorerie, un sous-investissement pendant plusieurs années.Nous avons un sujet important d’investissement qui est à l’étude au COPERMO. Les possibilités que nous avons de réaliser ce projet seront possibles avec les aides régionales et nationales mais également en valorisant notre patrimoine rendu non nécessaire après nos opérations d’investissement.

CE PATRIMOINE QUI POURRAIT ÊTRE CONSIDÉRÉ INITIALEMENT COMME UN OBSTACLE DANS L’ÉTABLISSEMENT, CAR IMPORTANT ET ANCIEN, POURRA ÊTRE, À L’ISSUE DE NOTRE PROJET, UN MOYEN D’ASSURER LE FINANCEMENT D’UN INVESTISSEMENT OU UN ABONDEMENT EN TRÉSORERIE.Nicolas Bougaut

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COMMENT CONTRIBUER AUX FINANCEMENTS DE SES INVESTISSEMENTS AVEC SON PATRIMOINE EXISTANT ? _ 13

Ce patrimoine pourrait être considéré comme une difficulté de gestion dans l’établissement, avec un patrimoine important et ancien — notamment pour Saint-Germain consommateur en moyens et en surfaces —. Dorénavant, il est considéré comme un atout car il pourra être, à  l’issue de notre projet, un moyen d’assurer un financement de projet ou un abondement en trésorerie.Des éléments sont prérequis pour initier une démarche de valorisation de patrimoine.Tout d’abord, l’obligation pour un établissement d’avoir une vision à long terme quant à l’utilisation de son patrimoine immobilier. Cela nécessite de mettre en perspective la question patrimoniale avec le projet d’établissement, et plus spécifiquement le schéma directeur immobilier, le projet médical et le Plan global de financement pluriannuel (PGFP). L’ensemble de ces éléments permet d’avoir cette vision stratégique, et d’intégrer la question patrimoniale dans cette perspective en y associant de plus en plus les préoccupations de performance : (ambulatoire, diminutions capacitaires, ratio d’occupation de surface optimum). Un des outils utiles à cette mise en perspective est l’outil Ælipce produit par l’ANAP.L’association de l’ARS en amont est nécessaire afin de s’as-surer que la visée stratégique prise par l’établissement est la bonne. En 2010, l’établissement a abandonné un projet de reconstruction d’un site unique, pour lequel le CHIPS a acquis un terrain à Chambourcy. Aujourd’hui, nous n’en avons plus l’utilité immédiate mais l’enjeu porte sur sa revente pour le financement de nos projets.Cet exemple nous incite à être d’autant plus prudents et à avoir une vision partagée avec l’ARS pour choisir le scénario le plus optimum pour l’établissement.Le dernier prérequis est la bonne connaissance du patrimoine. La certification des comptes a été un levier extraordinaire pour fortement améliorer sa connaissance. Même si nous n’en connaissons de manière fiable qu’environ 80 %, puisque les recherches d’actes de propriété sont assez longues.

Vous disiez qu’un hôpital ne sait pas très bien ce qu’il possède comme patrimoine immobilier. Est-ce fréquent ?N. B. : Je ne sais si cela est fréquent, mais à Poissy-Saint Germain, certains locaux que nous pensions détenir ne nous appartiennent pas en réalité. Souvent dans les recherches nous avons eu des hésitations sur la propriété entre la com-mune et l’établissement de santé.Je voudrais insister sur la manière avec laquelle on peut valoriser ce patrimoine de manière opérationnelle, essen-tiellement pour les sujets d’ampleur. Nous avons besoin d’un pilotage assez fort au niveau de la direction générale ainsi que des compétences juridiques, financières et tech-niques pour réussir cette valorisation. Ce que nous a apporté l’expérience de Bon Repos (site accompagné par l’ANAP)

est de jouer le jeu de la mise en concurrence, d’avoir un cahier des charges, d’avoir des critè res et un processus formel qui donne des leviers dans la négo ciation avec les différents opéra-teurs.Le recours à un tiers expert (ANAP ou établissement public foncier) est forte-ment utile car il apporte une maîtrise de ces sujets de valorisation que nous ne maîtrisons pas forcément à l’hôpital.

Est-ce qu’à Saint-Nazaire vous connaissez parfaitement le patrimoine que vous possédez ? F. S.-H. : À Saint-Nazaire la question s’est effectivement posée de savoir qui était le propriétaire du terrain, entre la ville et l’hôpital. La question a été réglée et le centre hos-pitalier était bien propriétaire.

Allez-vous revendre le terrain de Chambourcy plus cher que vous ne l’avez acheté ? A-t-on intérêt à faire de la spéculation foncière ? N. B. : Nous ne cherchons pas à faire de la spéculation, mais à ce que le montant de la cession couvre a minima le coût d’acquisition, parce que nous avons par ailleurs des objectifs de trésorerie et d’investissements. Aujourd’hui le seul usage que nous avons pu faire de ce terrain est une valorisation

NOUS AVONS BESOIN D’UN PILOTAGE ASSEZ FORT AU NIVEAU DE LA DIRECTION GÉNÉRALE ET DES COMPÉTENCES JURIDIQUES, FINANCIÈRES ET TECHNIQUES POUR RÉUSSIR CETTE VALORISATION. Nicolas Bougaut

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agricole. Pour un terrain de plusieurs millions d’euros, nous avons un agriculteur qui cultive le terrain et nous verse une redevance de quelques milliers d’euros par an.

Le rapport de la Cour des comptes montrait que le patri-moine des hôpitaux n’était pas bien géré, et que l’État devait s’en préoccuper.Quel est le rôle des ARS ? Comment interagissent-elles avec les hôpitaux ? Vous allez nous parler d’un outil, OPHELIE, « outil de pilotage du patrimoine hospitalier pour les établissements de santé, législation-indica-teurs-environnement ».Quels sont vos objectifs pour aider les hôpitaux et com-ment les accompagnez-vous ? Pascal Duperray : Il n’y a pas qu’en santé où nous avons un chemin à parcourir sur le patrimoine. Les collectivités locales ont beaucoup de chemin à parcourir sur la connais-sance et l’optimisation de leur patrimoine. Dans la sphère publique, nous avons collectivement un effort à apporter sur cet enjeu. Mais c’est une chance pour nous car ce sont des leviers d’actions importants.Le rôle de l’ARS est d’accompagner les acteurs dans cette démarche de valorisation.Nous incitions les acteurs à entrer dans une véritable stra-tégie immobilière, qui est à la fois une stratégie propre à l’éta-blissement mais également une stratégie de territoire. Nous ne pouvons pas construire aujourd’hui des projets d’établis-sements sans un projet de territoire : le lien avec les collec-tivités locales, avec les autres acteurs du territoire, les enjeux de GHT, les rapports entre le public et le privé.Aujourd’hui, quand nous construisons un patrimoine, nous avons cette responsabilité collective de bien utiliser les fonds et de les utiliser au mieux, de façon efficiente, pour pouvoir porter ensemble les projets du territoire à la fois sanitaires et médico-sociaux. Il s’agit de construire des m² efficients, et lorsque nous libèrons des m², se demander qui, éventuel-

lement, pourrait les réutiliser — qu’il soit dans le monde de la santé ou ailleurs.L’enjeu de l’agence régionale de santé est d’accompagner les acteurs dans cette gestion active du patrimoine. Pour cela, nous avons été érigé en pilote pour déployer l’outil OPHELIE. Cet outil conçu et développé par l’ANAP et l’ATIH est aujourd’hui déployé par la DGOS. Nous avons pour ambition de le porter sur notre région, sur l’ensemble des acteurs public, privé ou privé non lucratif. Nous avons mis à disposi-tion de tous et souhaitons mettre en œuvre cet outil de ges-tion du patrimoine pour sortir de cette gestion ponctuelle lorsque nous avons un projet, une opportunité, afin d’être dans une gestion au quotidien. Car un actif se déprécie, l’en-vironnement bouge, la vente de certains patrimoines immo-biliers devient nécessaire car ils coûtent très cher en charge d’exploitation.

Y a-t-il des compétences en hospitaliers ? Messieurs les directeurs utilisez-vous OPHELIE ? En êtes-vous contents ?P. D. : Le fait de déployer cet outil sur l’ensemble du champ sanitaire permet déjà de réaliser un recensement du patrimoine. Mener le remplissage des différents modules d’OPHELIE qui incorpore des notions de coûts, de performance et d’environ-nement permettra petit à petit d’augmenter la compétence interne des établissements et l’utilisation d’OPHELIE.Nous sommes bien conscient que dans les petits établisse-ments la compétence n’est pas toujours au rendez-vous. Nous avons donc mis en place un accompagnement particu-lier au travers d’une mission, MARTAA, qui développe un certain nombre d’autres projets tels que la certification des comptes. Nous avons également comme autre objectif de déployer OPHELIE dans chacun de nos départements. Cette mission dispose de ressources telles qu’un ingénieur, un contrôleur de gestion ; elle s’appuie sur un certain nombre de référents en établissement qui connaissent l’outil OPHELIE. À ce jour les résultats sont encourageants, car plus

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NOUS INCITONS LES ACTEURS À ENTRER DANS UNE VÉRITABLE STRATÉGIE IMMOBILIÈRE, QUI EST À LA FOIS UNE STRATÉGIE PROPRE À L’ÉTABLISSEMENT MAIS ÉGALEMENT UNE STRATÉGIE DE TERRITOIRE.Pascal Duperray

Centre hospitalier Poissy-Saint Germain - site de Bon Repos.

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de 60 % de nos établissements ont commencé à renseigner l’outil. Nous ne sommes pas uniquement dans le renseigne-ment d‘une enquête mais plutôt dans une démarche qu’un établissement de santé doit intégrer. Il reste encore beaucoup d’étapes à franchir, pour autant les acteurs sont conscients des enjeux à la fois sur la valorisation du patrimoine et de l’actif et sur l’optimisation des charges car nous sommes tous à la recherche d’économies en termes de charges d’exploi-tation pour financer les futurs investissements.F. S.-H. : Je ne peux pas dire que je ne suis pas content puisque je suis à côté de mon ARS.C’est compliqué et chronophage, mais nous voyons bien l’utilité que cela peut avoir, donc nous participons complè-tement à ce projet.N. B. : Nous ne sommes pas encore entrés dans le rensei-gnement OPHELIE, car nous avons défini des priorités et OPHELIE n’en était pas une notamment.

La certification des comptes ne remplace-t-elle pas OPHELIE ?N. B. : Je ne peux pas parler de quelque chose que nous n’avons pas testé.Nous imaginons qu’OPHELIE puisse être le prolongement de la démarche liée à la certification des comptes, notam-ment sur la partie fiabilisation de l’actif. Nous n’avons pas

réussi à le faire simul-tanément à celle-ci (la certification ayant été définie comme priori-taire) pour des raisons notamment de charge de projets à gérer.

Rencontrez-vous des résistances ? Le monde hospitalier a-t-il pris conscience que la valo-risation du patrimoine immobilier est un vrai sujet ?P. D. : La prise de conscience est là mais il y a le temps de faire. Répertorier les titres de propriété, les m² est un travail de longue haleine. L’objectif est d’entrer dans une démarche active et d’aller plus loin pour estimer par exemple les coûts de mise en conformité et surtout de pouvoir se comparer entre établissements. L’un des intérêts de cet outil réside dans ces comparaisons afin de créer des réfé-rentiels partagés qui nous permettront plus tard de construire des projets en santé plus efficients également en termes d’utilisation de ressources.

Quelle est la particularité du médico-social, par rapport à cette valorisation du patrimoine pour investir ?Xavier Dupont : Par rapport à ce que nous avons entendu il y a plusieurs particularités du secteur médico-social qu’il faut souligner.Les gestionnaires de l’accueil et l’accompagnement des personnes âgées ou des personnes handicapées, ne sont pas majoritairement publics, même si dans le secteur des EHPAD la moitié des places sont publiques - hôpital ou commune ; pour l’accueil des personnes handicapées, c’est à peine 10 %. C’est un secteur dont on peut dire, au moins pour les per-sonnes handicapées que le virage ambulatoire est pris. La part des services qui accompagnent les personnes dépasse le tiers de l’offre ce qui veut dire que l’adaptation des condi-tions d’accueil et d’accompagnement se fait au bénéfice de structures de plus en plus légères. La culture professionnelle « ancienne » qui est proche de la gestion des bâtiments, des locaux s’efface petit à petit pour trouver des modalités plus souples.Beaucoup de bâtiments sont hérités d’une époque très ancienne, en particulier dans le secteur du handicap, mais aussi dans les EHPAD, avec des patrimoines mal situés, très anciens, difficile à entretenir, parfois limités dans leur usage du fait de leur inadaptation aux conditions actuelles d’occu-pation. À l’instar du secteur hospitalier, se posent des ques-tions de valorisation, de vente, de réutilisation avec des limites encore plus importantes que dans le monde hospita-lier notamment pour la conduite de ce type de projets du fait

COMMENT CONTRIBUER AUX FINANCEMENTS DE SES INVESTISSEMENTS AVEC SON PATRIMOINE EXISTANT ? _ 15

DANS LE MÉDICO-SOCIAL, LA PROBLÉMATIQUE DE LA CONNAISSANCE NOUS CONCERNE DIRECTEMENT PUISQUE POUR UN PATRIMOINE ÉPARPILLÉ, DISPERSÉ, ET DE PLUS PETITE TAILLE QUE DANS L’HOSPITALIER, NOUS SOMMES DANS UNE SITUATION DE CONNAISSANCE PARTIELLE. Xavier Dupont

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16 _ VALORISATIONS IMMOBILIÈRES : LES ACTES

d’établissements et de gestionnaires de petite taille. Cependant des recompositions sont à l’œuvre, avec des compétences en interne, parfois limitées pour mener ce type de démarche.En revanche l ’implantation, la stratégie de territoire concerne directement le secteur médico-social.

Êtes-vous aidés par les ARS ?X. D. : C’est plutôt la CNSA qui aide les ARS ! Les ARS déploient une aide à l’investissement, avec le plan d’aide à l’investissement de la CNSA (environ 100 M € par an) qui permet d’aider en capital des projets de reconstruction ou de rénovation.Nous achevons une période de création massive d’établis-sements dans les années 2000. Aujourd’hui ces plans de création se terminent, et nous allons devoir nous concentrer sur la rénovation de l’existant. La problématique de la connaissance du patrimoine existant et d’outils de la connaissance, qu’ils soient des applications comme OPHELIE ou d’autres, nous concerne directement s’agissant d’un patrimoine encore plus éparpillé, dispersé, de plus petite taille que dans l’hospitalier.

M. Charlanne, vous êtes rapporteur auprès du CSO de l’ANAP du projet d’accompagnement des établis-sements pour valoriser leur patrimoine. Cela prend-il la bonne voie ? Ne faudrait-il pas aller un peu plus vite ? Y a-t-il des freins ?Didier Charlanne : La question qui avait été posée au conseil scientifique et d’orientation était de savoir s’il fallait poursuivre l’expérience qui avait été conduite avec les 18 premiers établissements accompagnés. L’ensemble du conseil a accueilli très favorablement les résultats obtenus. Cela a été évoqué avec les 30 % de complément de valori-sation, dans un contexte qui est celui de la certification des comptes et de la correcte valorisation, en haut de bilan, de l’ensemble du patrimoine des établissements hospitaliers.

Cette correcte valorisation vous protégera à l’avenir, parce que la valorisation à la valeur potentielle de cession et non plus à la VNC, qui est souvent égale à zéro, est un argument assez fort pour dire au maire « regardez, mon bien est valori-sable à 4 M € et vous me demandez de vous le céder pour 1 € ». Cet enjeu est majeur car il aura un impact à l ’avenir. Une sous-valorisation revient à financer l’exploitation par le patrimoine ; on ne constate pas d’amortissement si on sous-valorise.Le CSO a accueilli favorablement, au vu des enjeux et des métiers différents, la nécessité de mobiliser dans des opé-rations de ce type. Bien sûr auprès des établissements, il y a potentiellement France Domaine. Mais il est apparu sur les 18 projets que les experts de l’ANAP ont joué, lors de leurs interventions, un rôle de tiers dans les négociations avec les collectivités. Ce point a été majeur dans la décision de poursuivre.Néanmoins le conseil a été vigilant à plusieurs points. En  premier lieu, il a alerté sur la correcte affectation des res-sources issues d’une cession, et en particulier dans un contexte d’établissement déficitaire. « Vendre les bijoux de famille » pour financer l’achat de matériel en contexte déficitaire revient à financer l’exploitation.

La pratique de vendre pour financer l’exploitation est-elle fréquente dans les établissements ? Si oui, qu’en pensez-vous ?D. C. : Ce sont des points de vigilance. Nous ne savons pas dire si c’est fréquent. Ces points de vigilance ont été rappelés dans les futurs projets qui seront accompagnés.Deuxième point de vigilance : est-ce qu’il faut être propriétaire pour un établissement de santé ? Le choix d’être propriétaire a des conséquences, cela dépend de la situation de l’établis-sement, de sa trésorerie, mais il ne faut pas confondre situa-tion de trésorerie et rentabilité de l’exploitation. Les deux approches sont à compléter.Le CSO a insisté sur la question des reconversions. En effet, ce qui n’est plus bon pour le sanitaire en termes de locaux ne l’est pas obligatoirement pour le médico-social. Aujourd’hui certains EHPAD, anciennement structures hospitalières et USLD, demeurent en configuration USLD. Une configura-tion où nous avons des personnes qui sont accompagnées sur des soins assez lourds dans la durée, en moyenne

CE QUI EST UN BESOIN AUJOURD’HUI NE LE SERA PAS DEMAIN. IL FAUT ABSOLUMENT L’ANTICIPER POUR NE PAS SE RETROUVER DEMAIN AVEC UNE SITUATION QUI N’EST DÉJÀ PLUS ADAPTÉE.Didier Charlanne

SUR LES 18 PROJETS, LES EXPERTS DE L’ANAP ONT JOUÉ UN RÔLE DE TIERS DANS LES NÉGOCIATIONS AVEC LES COLLECTIVITÉS. CE POINT A ÉTÉ MAJEUR DANS LA DÉCISION DE POURSUIVRE SON ACTION. Didier Charlanne

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COMMENT CONTRIBUER AUX FINANCEMENTS DE SES INVESTISSEMENTS AVEC SON PATRIMOINE EXISTANT ? _ 17

de 28 mois. Nous ne pouvons pas accueillir des personnes âgées dans ce type de structures sans se poser la question de la qualité de vie. Il faut être vigilant sur le besoin immédiat par exemple en sortie d’hospitalisation et un besoin plus pérenne d’accompagnement à l’issue d’une période post-hos-pitalisation.Dernier point de vigilance : anticiper les évolutions à venir. Par exemple, les évolutions sur le recours aux urgences sont connues aujourd’hui. L’ensemble des acteurs du domaine sanitaire et du domaine médico-social travaillent à la question du recours aux urgences tel qu’il est aujourd’hui, pour empêcher, limiter des hospitalisations évitables. Le développement des maisons de santé fait partie de ce dispositif : ce qui est un besoin aujourd’hui ne le sera pas demain. Il faut absolument l’anticiper pour ne pas se retrouver avec des investissements réalisés et une situation qui n’est déjà plus adaptée.Le rôle des ARS est donc majeur pour l’offre sur le territoire et pour la programmation de l’offre sur le territoire par rapport à un établissement donné.P. D. : Les enjeux sont partagés. Nous avons tous à évoluer collectivement dans un monde qui change, qui est plus contraint. Il faut avoir une logique de territoire et de réflexion globale de parcours du patient et bien sûr bien dimensionner notre capacitaire, pour ne pas investir à tort. En MCO, nous développons de l’ambulatoire, avec des conséquences fortes

sur notre capacité car cela va vider notre capacité d’héber-gement à temps plein. Il faut donc reconstruire les hôpitaux pour la prise en charge d’aujourd’hui et de demain et inclure un dimensionnement évolutif de nos équipements. Nous savons tous pertinemment que nous ne construisons pas des hôpitaux pour 10 ans et que cela va beaucoup évo-luer sur les 30 prochaines années.Pour exemple, le côté modulaire a complètement été intégré dans le projet du CHU de Nantes qui va être dévoilé demain. Aujourd’hui nous avons besoin d’une certaine capacité, demain ce sera peut-être moins ; il faut être capable de faire évoluer notre patrimoine très rapidement.

ÉCHANGE AVEC LA SALLE

Un directeur d’hôpital Je suis étonné depuis ce matin que l’on n’ai peu parlé des outils de valorisation. Et que même le ministère soit resté extrêmement discret sur la disparition de certains outils. Je veux parler là de l’article 34 de la loi de Programmation des finances publiques, de décembre dernier, qui a supprimé pour les hôpitaux un certain nombre de moyens directs de valorisation : les moyens d’occupation du domaine public, les baux emphytéotiques hospitaliers. On ne peux pas faire à la fois un colloque sur la valorisation et d’un autre côté voir l’État publier des textes qui interdisent aux hôpitaux d’utiliser ces outils de valorisation. Le projet de loi santé a un peu rattrapé cela, mais il n’en est qu’à sa première phase de négociation et rien n’est gagné sur ce point.

Centre hospitalier de Saint Nazaire - site Moulin du Pé.

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EXEMPLE DES HOSPICES CIVILS DE LYON

Le témoignage de la politique patrimoniale, menée aux hospices civils de Lyon, démontre la logique de contribution au financement des investissements.

Q uelques chiffres préalables pour comprendre le contexte de notre politique patrimoniale : le patrimoine hospitalier des HCL correspond à   14 établissements/sites (dont un sur la presqu’île de Giens), 5 300 lits, 23 000 profes-sionnels. Il y a quelques années les HCL possé-

daient 19 sites. Cinq sites ont été désaffectés et reconvertis ou sont en cours de reconversion.Une des caractéristiques de notre CHU réside dans l’impor-tance de son domaine privé. De près de deux cent immeubles en pleine propriété il y a quinze ans, nous sommes aujourd’hui propriétaires d’environ 80 immeubles.C’est une preuve des arbitrages qui ont dû être faits à l’aune des contraintes financières que nous avons connu.L’une des singularités du domaine privé des HCL consiste dans la propriété du sol. Il y a 200 ans celui-ci représentait l’équivalent de deux arrondissements de Lyon en pleine propriété. Progressivement nous avons loué des terrains à des syndicats de propriétaires via des baux de longue durée. Aujourd’hui nous avons 30 000 à 40 000 lyonnais qui habitent sur des terrains appartenant aux HCL. C’est un peu le même modèle ’à Amsterdam et à Londres.Pour nos biens situés en milieu rural, les enjeux ne sont pas de même taille, à l’exception d’une forêt que nous possédons en Normandie.La quasi-intégralité de notre domaine privé provient de libé-ralités, dons ou legs, et non d’opérations de « marchands de biens » menées par les HCL.

Je voudrais partager avec vous l’intérêt de mener une poli-tique patrimoniale, via dans un premier temps la mise en œuvre d’une stratégie patrimoniale, qui ne concerne non seulement les CHU mais également les gros propriétaires fonciers ou immobiliers.Ensuite, la nécessité de travailler sur la valorisation de nos actifs, y compris les actifs hospitaliers que nous conservons.Enfin, vous présenter quelques exemples de reconversion de sites hospitaliers et des points d’attention portant sur des éléments fondamentaux dans la méthodologie de reconversion.

LA MISE EN ŒUVRE D’UNE STRATÉGIE PATRIMONIALELE SCHÉMA DIRECTEUR IMMOBILIERElle se décline au travers d’un schéma directeur immobilier. Cette démarche, préparée dès 2009, a pris environ 18 mois, au terme desquels nous avons audité l’ensemble de notre domaine privé, ainsi qu’une partie de notre domaine public hospitalier.L’objectif principal était de mener une démarche de réflexion et de prospection sur ces espaces. L’élaboration d’un outil nous a permis de décider et surtout de définir les conditions de la mise en œuvre de cette décision. Nous avons défini des arbitrages pour financer des investissements, puisque la situation des HCL était tendue, et nous avons pu ainsi trouver des marges de manœuvre au niveau du patrimoine.Cette politique de dynamisation a été portée par la direction générale des HCL du début du processus jusqu’à la fin. Nous avons été accompagnés par un prestataire qui nous a  permis de cadencer la mise en œuvre de cette politique, et pouvoir rouvrir « des portes qui se fermaient » pour mettre en œuvre toutes les actions qui avaient été votées par nos instances, décidées par la direction générale, etc.Le schéma directeur immobilier concernait pour une grande partie notre domaine privé. Il est toujours plus simple de  toucher au domaine privé, plutôt qu’aux actifs techniques d’exploitation. Encore qu’aujourd’hui le domaine privé sert la politique sociale du CHU de Lyon. Une grande majorité des logements est louée aux agents.L’idée est de fixer un cadre tout en ayant eu une démarche préalable d’inventaire patrimonial. C’est une démarche clas-sique pour l’établissement d’un schéma directeur immobilier.

Luc Fabres Directeur du patrimoine, HCL

L’IDÉE EST DE FIXER UN CADRE TOUT EN AYANT UNE DÉMARCHE D’INVENTAIRE PATRIMONIAL, QUI EST UNE DÉMARCHE CLASSIQUE POUR L’ÉTABLISSEMENT D’UN SCHÉMA DIRECTEUR IMMOBILIER.

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EXEMPLE DES HOSPICES CIVILS DE LYON _ 19

Connaissions-nous la totalité de notre patrimoine immobilier ? À titre principal oui, mais nous avons eu une exception. Nous possédions un bien utilisé dans le cadre du  service public hospitalier dont nous pensions être propriétaire. Ce terrain se révélant au final appartenir à l’État nous avait consenti un bail emphytéotique il y a plus de 40 ans. Cet aspect-là de notre propriété était un peu tombé aux oubliettes. Ce sont des choses qui arrivent également dans d’autres secteurs, puisqu’il y a eu beaucoup de partenariats dans les années 60 entre l’État et certains établissements publics. Le cas se présente avec des collectivités locales.Une fois cet inventaire réalisé, des valeurs de marché des biens ont été définies. Là aussi bien plus facile à faire pour le domaine privé que pour le domaine public.Pour le domaine public nous avions pris comme axe d’analyse : « avons-nous des parties de sites inutilisées et si oui que valent-elles ? ». C’est-à-dire évaluer les efforts que nous devons réaliser pour libérer ces parties de sites, et mesurer l’écart avec la valeur que nous pouvions retirer de ces sites.Un point essentiel porte sur l’intégration du facteur temps. Nous avons des actifs que nous souhaiterions parfois céder immédiatement, mais si nous prenons le temps d’attendre une modification du PLU, qui peut arriver dans 2 ou 3 ans, combien pouvons-nous gagner sur cette valorisation ? Par exemple : pour gagner 10 % de plus il faut peut-être lancer l’opération de cession dès maintenant. Par ailleurs, nous différons parfois des opérations de cessions pour permettre cette augmentation de valeur.La mise en œuvre de ce plan directeur a été suivie par différentes réunions avec la direction générale et tous les partenaires qui nous avaient aidés à le mettre en place.En 4 ans nous avons réalisé 160 M € d’excédent sur la DNA en sachant qu’ils sont issus d’opérations d’optimisation de notre gestion et de cessions. Évidemment, dans ces 160 M €, la part de cessions est plus importante que les actions d’optimisation de gestion, parce qu’« augmenter des loyers ne se décrète pas ».

Ce schéma directeur nous a permis de travailler sur deux axes : domaine privé et domaine public.Je ne m’arrêterai pas sur le domaine privé, parce que cela ne concerne que quelques CHU et/ou CH en France qui ont un domaine privé significatif. Autant que les actions d’optimisa-tion de gestion de ce domaine privé n’ont pas de particularité par rapport à une foncière ou n’importe quel propriétaire privé. Les principales actions portent sur des renouvellements de baux commerciaux ou d’habitations, déplafonnement de loyers, etc.

SI NOUS PROPOSONS PLUS DE SERVICES, SI LES GENS SONT MIEUX ACCUEILLIS DANS L’HÔPITAL, CELA VALORISE L’IMAGE DE L’HÔ PITAL PUBLIC.

LA VALORISATION DE NOS ACTIFSJe voudrais m’arrêter sur les actions qui nous ont permis d’optimiser la gestion de notre domaine public hospitalier et toutes les opérations de reconversion partielles ou totales de certains sites hospitaliers.

LA VALORISATION DE NOS ESPACES HOSPITALIERSCeux qui sont disponibles, ou mal utilisés, eu égard à leur localisation. Nous avons engagé cette démarche il y a plu-sieurs mois. C’est un travail collaboratif entre plusieurs direc-tions, car il y a un aspect foncier, technique et de « services » également. Nous avons étudié la potentialité de certains espaces dans nos hôpitaux, et nous nous sommes interrogés sur nos besoins.Nous avons travaillé avec les représentants des médecins, des paramédicaux, et nous en avons conclu qu’il fallait offrir plus de services dans l’hôpital. Nous nous sommes donc lancés dans la liste des services que nous n’avions pas et qu’il serait souhaitable d’avoir. Les publics visés sont très larges : patients, accompagnants, personnel médical et non médical. Finalement c’est l’ensemble des publics qui vivent l’hôpital. Nous nous sommes aperçus que chaque type de population avait des attentes particulières. Nous avons donc essayé d’y répondre, en sachant qu’il y a des services qui auraient souhaité trouver leur place au sein de l’hôpital. Cependant nous n’avons pas acceptés pour des raisons d’image par exemple, ou des raisons de concurrence avec nos propres activités ou avec des acti-vités que nous souhaitions développer.

LA VALORISATION DE NOTRE IMAGESi nous proposons plus de services et si les gens sont mieux accueillis dans l’hôpital, finalement cela valorise a l’image de l’hôpital public.

L’AUGMENTATION DES REVENUSNous avons lancé une consultation pour l’occupation de ces espaces et nous avons reçu plusieurs réponses. C’est un projet ambitieux, fait pour l’ensemble des groupements du CHU. Je mets de côté la gériatrie, car nous n’avons pas d’unités suffisamment significatives qui permettent de faire vivre des services et des commerces. Les réponses reçues à ce jour sont satisfaisantes. Elles devraient, dans les 1 à 2 ans qui

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20 _ VALORISATIONS IMMOBILIÈRES : LES ACTES

viennent, changer l’accueil qui sera assuré aux HCL, et en même temps produire des revenus.Pour exemple, un important site hospitalier « revisité » de 30 ha. L’idée est d’offrir à différents endroits de ce site divers services, sans tenir compte des marques/enseignes citées. Nous pensons beaucoup à une offre de restauration, avec différents niveaux, mais aussi de conciergerie pour faciliter la vie des gens qui travaillent à l’hôpital, et pourquoi pas la patientèle. Nous imaginons également la création d’une petite supérette, pour permettre à l’infirmière qui travaille en horaires décalés de trouver ce qui lui manque ou aux gens qui sont hospitalisés de pouvoir acheter leur brosse à dents ou leur mousse à raser.Nous souhaitons donc densifier et élargir l’offre que nous proposions jusqu’à maintenant.

LES OPÉRATIONS DE RECONVERSIONLorsque nous parlons d’opérations de cession ou de conclusion de baux de longue durée, la même méthodologie de valorisation est appliquée. Juridiquement, il s’agit de cession de droits réels.Deux éléments nous semblent fondamentaux dans le calendrier des reconversions qui sont menées .

LA LIBRE DISPOSITIONVérifier, dès que l’on souhaite libérer un site, d’en avoir la libre disposition. Pour exemple, sur un site des HCL, nous avons mis 8 ans pour lever les conditions de legs et le rendre aliénable, au terme d’une longue procédure de recherche des héritiers et d’une longue procédure judiciaire, avec un appel et un pourvoi en cassation. C’est un point qui doit être anticipé très en amont, en sachant que les tribunaux sont plutôt ouverts à ce type de procédure de « levée de charges de legs », car ils ont compris qu’il fallait faire vivre le patri-moine.Le Code Civil impose deux conditions pour lever une clause d’inaliénabilité : les changements de circonstances entre le

jour du legs et le jour où on enclenche la procédure de levée de conditions de legs. Puis, il faut démontrer que conserver le patrimoine en question est sérieusement dommageable pour l’établissement hospitalier. Ce qui est, en général, assez facilement démontrable.Parfois des servitudes sont découvertes et rendent le site inaliénable et même très tardivement, au moment où on demande l’état hypothécaire. Quelques fois, on découvre des servitudes inconnues de tous, y compris même des gestionnaires de site.

LES RÈGLES D’URBANISME Le rôle central et déterminant des collectivités locales a été largement évoqué. En effet, ce sont elles qui maîtrisent à la fois le PLU, et toutes les autorisations d’occupation du sol. Elles sont incontournables. C’est un point capital qu’il faut étudier très en amont dans une démarche de valorisation et de cession.Par exemple la reconversion du Centre Livet. Un site hospi-talier d’environ 1,5 ha sur lequel un bâtiment d’une super ficie de 3 500 m² était construit. Nous avons lancé une consulta-tion d’opérateurs après une concertation étroite avec les collectivités (Communauté urbaine de Lyon, ville de Caluire). Aujourd’hui un projet de reconversion a été arrêté et un candidat retenu. Nous avons signé une promesse de vente. Malheureusement un recours a été déposé contre le permis de construire déposé par le futur acquéreur. C’est un des risques sur ce type de dossier; ce peut-être évité lorsqu’un

NOUS AVONS MIS 8 ANS POUR LEVER LES CONDITIONS DE LEGS ET LE RENDRE ALIÉNABLE, AU TERME D’UNE LONGUE PROCÉDURE JUDICIAIRE.

LA RECONVERSION DU CENTRE LIVETSurface du bâtiment hospitalier : 3 500 m²

SDP du projet : 11 500 m²

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EXEMPLE DES HOSPICES CIVILS DE LYON _ 21

bien est vendu directement à un établissement public foncier. Les modalités de cessions (EPF ou acquéreur privé) relèvent d’abord d’une analyse et de gestion de risques pour l’hôpital : Sommes-nous structurés pour porter ce type d’opération et acceptons-nous de porter le risque ? (en général dans l’objectif d’une meilleure valorisation).Lors du travail collaboratif avec la mairie de Caluire, il s’est avéré que celle-ci souhaitait la réalisation d’un hôtel sur le  site. En termes de valorisation foncière, c’est très préjudiciable pour un vendeur. La contrepartie, dès lors demandée et obtenue par les HCL, a été de densifier le site pour compenser le respect de la programmation envisagée par la ville. Ce site était à l’origine inaliénable (conditions de legs). Il a connu deux modifications de PLU coup sur coup, qui ont été menées en temps masqué avec la procédure de levée des conditions de legs.Une autre illustration de valorisation et de cession : l’Hôtel-Dieu de Lyon. Un site emblématique à la fois pour les HCL et pour l’agglomération lyonnaise.C’est la plus importante opération de reconversion d’un monument historique en France à ce jour puisqu’il est évoqué le chiffre d’environ 150 M € d’investissement.Ce site a été libéré de ses activités médicales en 2010.La genèse du projet de valorisation n’a pas été simple. Pour travailler sur ce projet, nous avons constitué aux HCL une équipe pluridisciplinaire composée de membres de la direction des affaires techniques pour gérer les aspects patrimoniaux, de la direction des affaires foncières et immobilières, ainsi que de la direction des affaires juridiques. Nous avons été accompagnés par un AMO qui nous a aidés à travailler et à discuter avec les collectivités locales. Ce dossier a fait l’objet de nombreuses discussions avec la ville, la communauté urbaine et aussi la DRAC.Le choix du bail a été un choix politique. L’objectif était de conserver la propriété de l’Hôtel-Dieu dans le giron public pour permettre aux générations futures de pouvoir réutiliser ce lieu pour une autre destination. Par ailleurs, il est possible de consentir un bail de longue durée, tel que le projet de l’Hôtel-Dieu, et percevoir la totalité du prix sous forme de droit d’entrée, comme dans le cadre d’une cession. C’est donc une possibilité pour les bâtiments à caractère patrimonial affirmé de ne pas être vendus mais être loués tout en perce-vant des loyers cumulés sous forme de droit d’entrée.Il y a eu sur ce site des enjeux forts liés à la pollution, l’archéologie, le traitement des problématiques de plomb, d’amiante, qui ont compliqués les relations avec le preneur, Eiffage, notamment entre la signature du compromis et la réitération du bail.La programmation des travaux comporte de la rénovation lourde pour la partie ancienne de l’Hôtel-Dieu, mais égale-ment de la construction neuve sur l’arrière du site.Quelques chiffres pour ce projet de l’Hôtel-Dieu : environ 51 000 m² de plancher, avec 17 000 m² de commerces, 13 000 m² de bureaux, un hôtel de 13 000 m², un centre de conventions, une partie habitation et 8 000 m² de cours et jardins.Ce dossier a été complexe à mener car nous avons notamment réalisé, d’un point de vue juridique, un découpage en volumes, avec un volume inférieur conservé par les HCL et une mise à bail des volumes supérieurs.

LES ÉTUDES PRÉPARATOIRESUn point important également dans les projets de reconver-sions réside les études préparatoires. Il faut donc s’interroger, au cas par cas, sur les études à mener en fonction de la typo-logie du bien concerné.Ci-dessous, la liste la plus complète des études possibles. Il peut bien sûr y en avoir d’autres mais toutes les opérations de reconversion ne nécessitent pas de faire des études. Cependant chaque étude menée permet de lever un risque identifié par un preneur. Ainsi, à la signature d’un compromis, celui-ci a pu mesurer la totalité des risques potentiels de l’opé-ration. Cela permet donc de sécuriser la promesse de vente ou de bail.

Au-delà de ces études, il y a tous les éléments à collecter pour « porter à connaissance » des candidats preneurs (plans, titres de propriété). Nous avons souvent la fâcheuse ten-dance, quand nous désaffectons un bâtiment hospitalier, à se tourner vers l’avenir et à ne plus tellement s’occuper de ce bâtiment qui appartient au passé de l’hôpital. Cela reste cependant une étape importante et nécessaire. Concernant le contenu des consultations que nous lançons aux HCL, il est relativement classique et comporte : une description du bien, les éléments du projet de reconversion attendu suite aux échanges avec les col lectivités locales, et le règlement de la consultation.

LE PROCESSUS DE VENTE D’UN ACTIF COMPLEXELa préparation de la consultation :• Études préparatoires ; au cas par cas, il y a lieu de s’interroger

sur l’opportunité de faire réaliser : - une étude de faisabilité, - une étude géotechnique, - une étude environnementale, - un plan topographique, - des diagnostics techniques approfondis, - une étude de la charge admissible des planchers, - une consultation des services de l’État : Archéologie, ABF, DREAL.

• Éléments à collecter ; au-delà des études : - éléments techniques (plans des bâtiments, liste des équipements, principaux travaux…), - éléments juridiques (titre de propriété, servitude, occupation…), - éléments politiques (attentes liées à la reconversion du site…).

L’Hôtel-Dieu de Lyon.

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22 _ VALORISATIONS IMMOBILIÈRES : LES ACTES PATRIMOINE DE L’HÔPITAL ET ENJEUX COMMUNAUX : COMMENT TRAVAILLER ENSEMBLE ET CONCILIER LES CONTRAINTES ? _ 23

TABLE RONDE 2PATRIMOINE DE L’HÔPITAL ET ENJEUX COMMUNAUX :COMMENT TRAVAILLER ENSEMBLE ET CONCILIER LES CONTRAINTES ?

La table ronde animée par Philippe Leduc, journalisteA réuni : Éric Provost, Vice-président CARÈNE – Saint-Nazaire Agglomération / Francis Saint-Hubert, Directeur général, CH de Saint Nazaire / Maurice Solignac, Adjoint au maire de Saint-Germain-en-Laye / Nicolas Bougaut, Directeur adjoint, CH de Poissy-Saint Germain / Anabelle Billy, Manager ANAP

Monsieur Éric Provost, vous êtes vice-président de Carène, pourriez-vous nous expliquer le contexte dans lequel s’est déroulé l’achat du site Moulin du Pé ?Éric Provost : L’analyse que nous avons fait du coût de décon-struction et de dépollution du site de Moulin du Pé était de l’ordre de 5 M €. Or, ce site avait été valorisé en l’état à 5 M €, soit le coût de la dépollution – déconstruction. Le résultat nous faisait donc aboutir à une solution à l’euro symbolique.Dans le processus que nous avons mené, nous avions consulté France Domaine, qui avait valorisé le site en l’état à 2,5 M €, et un site dépollué – déconstruit à 80 €/m², ce qui faisait envi-ron 6 M €. Nous n’étions donc p pas si loin de cela avec l’euro symbolique, si nous considérons qu’il y a des frais annexes comme la surveillance d’un site pendant 2 à 3 ans qui pouvait engloutir une partie de l’enveloppe.Voici le contexte de départ de cette discussion sur le site. Un site qui n’est pas au cœur de la ville, mais dans un envi-ronnement urbain, donc très bien situé par ailleurs.

Comment se sont donc déroulées vos négociations avec l’hôpital ? Vous disiez « on était obligé d’aboutir ».É. P. : L’important est de montrer que ce n’est pas tellement la question économique qui est posée sur de telles opéra-tions, mais la question de l’urbanisme, de l’aménagement, et du devenir que nous pouvons donner à un tel site. La valori-sation à laquelle nous avons abouti, vient de la volonté de faire en sorte que du côté de l’hôpital comme du côté de la ville nous sortions ensemble gagnants d’une telle opération. Nous étions très satisfaits de voir qu’une nouvelle cité sani-taire allait se construire. Mais dans le contexte du marché immobilier local en crise, avoir 8 ha en ville à réaménager et produire 600 à 700 logements c’est pour nous extrêmement difficile. C’est une perspective à 10 ans. Cela veut dire que ce site, tel qu’il est aujourd’hui, nous n’en avons pas besoin dans les 10 ans qui viennent. Nous avons de quoi construire, y compris en logements sociaux, sur le reste de la ville, sans utiliser le site de Moulin du  Pé.C’est ensuite la question du cadre de vie qui nous est posé. Un site comme celui-ci, nous ne pouvons pas le laisser en

IL NE FAUT PAS S’ENFERMER DANS DES QUESTIONS DE VALORISATION ÉCONOMIQUE, MÊME SI ELLES SONT PRIMORDIALES POUR LE CENTRE HOSPITALIER. IL FAUT QUE LES PARTIES ENTAMENT CE DÉBAT SUR L’AMÉNAGEMENT, SUR LA FABRICATION DE LA VILLE ET POUR TROUVER DES SOLUTIONS.

Centre hospitalier de Saint Nazaire - site Moulin du Pé.

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PATRIMOINE DE L’HÔPITAL ET ENJEUX COMMUNAUX : COMMENT TRAVAILLER ENSEMBLE ET CONCILIER LES CONTRAINTES ? _ 23

Quels ont donc été les facteurs « clés » de succès ? Cela a-t-il pris beaucoup de temps ?É. P. : Ce qui a permis le déclenchement de l’opération c’est que nous avons considéré, nous collectivités, que nous ne pouvions pas, vis-à-vis de l’hôpital, des autorités sanitaires et de la popu-lation, laisser cette situation en l’état et qu’il fallait trouver des solutions. Les parties se sont rapprochées et un accord a été trouvé sur un prix de cession à 4 M € avec une prise en charge par la communauté d’agglomération, qui a la compétence amé-nagement, et non plus la ville de Saint-Nazaire. Aujourd’hui l’opération d’aménagement avance bien. Nous avons très prochainement une réunion avec les riverains pour les infor-mer sur l’opération de démolition. Sur le projet urbain, nous avons relancé une phase d’étude parce que nous ne sommes plus dans le contexte des discussions initiales sur le nombre de logements et la typologie d’habitat.Nous ne devons pas nous retrouver enfermé dans ces ques-tions de valorisation économique, de finance, même si elles sont primordiales pour le centre hospitalier. Il faut vraiment que les parties rentrent dans ce débat sur l’aménagement, sur la fabrication de la ville. C’est comme cela que nous pourrons sortir des solutions. Nous sommes sur une ville attractive, même si le marché n’est pas florissant, où des gens viennent s’installer, cherchent des logements. En France, il peut y avoir des situations très difficiles où il n’y a aucun marché, et d’autres comme à Lyon, où ce sont pratiquement les promoteurs qui viennent frapper à la porte des propriétaires-vendeurs.

M. Saint-Hubert, comment avez-vous vécu cette période de négociations ?F. S.-H. : Sur le moment c’était difficile. J’ai passé quelques nuits blanches mais le bilan que j’en tire est extrêmement positif.Pour répondre à la question « comment travailler ensemble ? »,

friche, en faire une grande prairie au cœur des habitations. Il faut donc intervenir. Il y a une responsabilité politique et absolument nécessaire d’intervenir sur un tel site. C’est pour cette raison que nous avons considéré qu’il fallait travailler avec l’ensemble des services concernés, que ce soit l’hôpital, l’ANAP, l’ARS, pour envisager le devenir du site. Très vite nous avons proposé de faire une étude d’urbanisme avec un cabinet spécialisé, à laquelle nous avons convié toutes les parties pour réfléchir ensemble au devenir du site. Sur un plan technique Il est intéressant d’entendre la voix du pro-priétaire sur les contraintes éventuelles du site. Nous n’avions pas exclu, même si la volonté de la ville était de faire une acquisition globale, de pouvoir scinder le site en plusieurs morceaux. Que certaines parties puissent être conservées en vue de la location et que nous puissions réutiliser une partie du bâtiment central, le tripode. Nous avions besoin d’étudier tout cela.Nous avons réfléchi pendant deux ans à la question du devenir du site et de l’aménagement urbain. Nous étions plutôt dans une perspective de 600-700 logements. Aujourd’hui compte tenu de l’environnement et du marché nous sommes sur un objectif de 500 logements.Sur un plan économique ce site est « hors norme et hors ren-tabilité », par rapport à des opérations d’aménagement public que nous pouvons mener ailleurs sur la ville.À Saint-Nazaire, nous sommes dans des pourcentages de  logements sociaux conformes à la loi. Sur ce quartier-là, nous avons déjà une forte densité de logements sociaux. La perspective de construire de nouveaux logements sociaux de manière importante n’était donc pas envisa-geable. Nous avons une volonté de distribuer les différents types d’habitats sur l’ensemble de la ville afin de générer une réelle mixité.Sur les règles d’urbanisme, le PLU permettait de monter assez haut sur ce site. Nous avons eu beaucoup de discussions avec l’ANAP sur cette question, parce qu’il y a la faisabilité tech-nique de construire des immeubles à 7/8 étages et il y a l’ac-ceptabilité des riverains et/ou des coûts de construction. La valorisation théorique pouvait nous amener à dire à valoriser à tant d’euros au m² sur ce site, compte tenu de la hauteur constructible, mais nous considérons qu’il n’est pas possible, par rapport au cadre de vie et à la capacité du marché d’ absorber 500 ou 600 logements.Donc plus que la question économique et la question réglemen-taire, il faut que les parties acceptent qu’il existe un enjeu supérieur sur ce type d’opérations. C’est une contribution à l’in-térêt général qu’il faut à un moment mettre sur la table. Nous devons admettre que sur le long terme ce site deviendra stra-tégique pour la ville de Saint-Nazaire.

Centre hospitalier de Saint Nazaire - projet de démolition du site Moulin du Pé.

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il faut d’abord répondre à la question « pourquoi travailler ensemble ? Quels sont les objectifs ? Quels sont les intérêts des parties et avec qui ?».À un moment donné, il y a un projet d’intérêt général qui est porté par les élus. C’est vraiment l’élément clé, pour qu’un projet aboutisse. Si les élus viennent « à reculons » et que ce projet-là n’existe pas, c’est extrêmement compliqué.Côté hôpital, il y a plusieurs acteurs. Il n’y a pas que le directeur. Sinon ce serait plus simple. Nous devons partager ce projet. Nous ne pouvons pas nous positionner en disant nous voulons uniquement céder ce terrain et le reste ne nous regarde pas.

Ce n’est pas votre métier en tant que directeur d’hôpital, de savoir vendre du patrimoine, ni votre priorité. N’est ce pas compliqué dès lors ?F. S.-H. : Certes mais même si nous ne sommes pas experts immobilier, nous comprenons le sens de l’intérêt général, le sens profond d’un projet et son insertion dans la cité. Nous n’avons pas un certain nombre de compétences, mais les  directeurs d’hôpitaux savent tout faire ! Nous avons donc besoin d’aide.Chaque acteur qui intervient dans cette négociation doit avoir le sens de ses responsabilités. Parce que, avant même de déterminer un prix, il faut parfaitement mesurer la dimen-sion psychologique et politique.J’ai passé des nuits blanches, parce qu’il y avait une tension, et dans toute négociation il y a des passages où le directeur est pris au milieu de plusieurs forces centrifuges, où nous sommes vraiment écartelés. Vous avez d’un côté le président du Conseil de surveillance, mais il est également maire et pré-sident de la CARÈNE. C’est lui qui devait avoir le plus mal à la tête parce qu’il avait trois casquettes.Pour le directeur c’est relativement plus simple. Il y a l’ARS, qui est notre autorité et nous avons la responsabilité de mener à bien cette négociation.Ce n’est pas simplement la valorisation qui compte, c’est que tous ces acteurs continueront à vivre ensemble. Cette négo-ciation doit donc aboutir et être satisfaisante pour tout le monde.Que nous soyons dans des positions écartelées au départ, ou  opposées, est tout à fait logique. Mais il faut ensuite « mettre en ligne les acteurs ». De notre côté il y a eu une

convention tripartite avec l’ARS et l’ANAP pour cadrer les inter-ventions de chacun.Ensuite France Domaine est intervenue. Cela a été compliqué car leur valorisation ne peut pas relever uniquement d’un  calcul de logiciel pour dire « voilà la valeur ».

Y a-t-il nécessairement France Domaine dans ce genre de négociation ?É. P. : Dans notre délibération de collectivité locale nous sommes obligés d’avoir un avis de France Domaine.F. S.-H. : Et en sus à Saint-Nazaire, nous avons eu M. le sous-préfet. Il fallait donc éviter que cela prenne une dimension politique. Et surtout éviter qu’à un moment donné le maire ou le président du Conseil de surveillance soit amené, à aller voir la directrice de l’ARS. Il nous fallait donc vraiment négocier localement et travailler dans le temps. C’est à ce moment-là que l’aide de l’ANAP a été précieuse.Face à France Domaine et à la CARÈNE, nous n’avions pas forcément les arguments pour pouvoir valoriser au mieux. La  valeur ajoutée de l ’ANAP fut essentiellement sur ces points.

Y a-t-il eu un passage difficile ? Quelque chose qui a réussi à résoudre les problèmes ?F. S.-H. : Dans ce dossier, les acteurs avaient le sens de la  res-ponsabilité.Ensuite il y avait un projet, et l’ARS a beaucoup accompagné l’établissement. Elle a eu une position d’écoute, de compré-hension, avec des liens directs. Par exemple, si à une réunion il faut mettre un prix sur la table, il vaut mieux avoir l’avis de l’ARS au préalable pour savoir si vous pouvez l’annoncer.

Les réunions se passaient à l’hôpital ou à la mairie ?F. S.-H. : Non elles se passaient à la sous-préfecture, dans un lieu neutre…

Maurice Solignac, vous êtes adjoint au maire de Saint- Germain-en-Laye et vous étiez aussi jusqu’il y a peu de temps président de l’établissement public foncier des Yvelines. Vous connaissez donc bien le sujet. Comment avez-vous réussi à travailler entre la ville, le CH et les dif-férents acteurs ?Maurice Solignac : Je ne voulais pas vous faire un retour d’expériences uniquement sur une « petite opération » de valorisation.

CHAQUE ACTEUR INTERVENANT DANS CETTE NÉGOCIATION DOIT AVOIR LE SENS DE SES RESPONSABILITÉS. PARCE QUE, AVANT MÊME DE DÉTERMINER UN PRIX, IL FAUT PARFAITEMENT EN MESURER LA DIMENSION PSYCHOLOGIQUE ET POLITIQUE.

Éric Provost, Vice-président CARÈNE – Saint-Nazaire Agglomération.

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PATRIMOINE DE L’HOPITAL ET ENJEUX COMMUNAUX : COMMENT TRAVAILLER ENSEMBLE ET CONCILIER LES CONTRAINTES ? _ 25

contraintes électorales. Vous connaissez tous le slogan « Maire bâtisseur, maire battu ». Il faut en discuter avec le maire pour lui faire comprendre qu’il y a une nécessité à bâtir, et une nécessité de gérer le foncier d ’une manière peut-être un peu plus intelligente sur sa commune.C’est ce qui amène malheureusement ces propositions de maire telles que « je vous achète votre terrain pour 1 euro ». Et là on démarre les discussions.Contradiction aussi avec les bailleurs sociaux. Ils ne peuvent pas payer le foncier au même prix que les autres catégories de logements. Pour cela le gouvernement a prévu ce sys-tème de décote. Mais c’est une contradiction parce que cela baisse encore le prix. Entre le prix négocié et le prix après la décote, il y a encore un écart conséquent.

Comment gérer ces contradictions ?M. S. : Quelques termes ont été utilisés à bon escient : négo-ciation, intermédiaire. L’ANAP, à mon sens, est un organisme qui est essentiellement là pour conseiller la partie du vendeur. Ce n’est pas de la compétence des directeurs hospitaliers d’aller dans ce genre de négociations. L’ANAP est un élément indis-pensable. Mais ce n’est pas le seul. Il est important que nous puissions avoir d’autres intermédiaires dont le but est de déterminer des projets, de faire ressortir politique-ment l’intérêt pour un maire de réaliser telle ou telle chose, d’intervenir auprès du préfet en terme de négociation sur une certaine densité, parce que la population ne comprend pas forcément. Nous devons être aussi en contact avec la population. Les notions de réunion publique sont très importantes, en amont de la réalisation du projet. L’établissement foncier des Yvelines remplit ce rôle de négociateur. Je pense à un slogan que nous avons adopté pour notre établissement il y a quelques années, c’est la clé de la solution, « facilitateurs de projets ».Il faut absolument que pour tout projet, en dehors des parti-cipants institutionnels, il y ait un facilitateur.Un Établissement public foncier peut être un facilitateur, parce que c’est lui qui va, in fine, acheter. Mais il n’est pas qu’un banquier. Les EPF d’État ont cette compétence de négo-ciation, d’établissement de plans, de bilan aménageur. Des missions qui sont maintenant devenues obligatoires, et qui font que ce rôle de facilitateur est un rôle de plate-forme, de tour de contrôle et d’observatoire. Il est important qu’il y ait quelqu’un qui soit le facilitateur entre toutes ces contradictions.

Cette table ronde, qui tourne autour des contraintes de changement, devrait peut-être transformer le terme contraintes en contradictions. Car dans tous les projets nous nous sommes heurtés à cette problématique.Vous évoquiez l’État, en disant que les réunions se sont passées en terrain neutre chez le préfet.Dans ce problème de cession de foncier, nous nous heurtons dès le départ à une problématique de contradiction entre le ministère des Finances et le ministère concerné, celui qui cède concrètement et qui est à la recherche de produits de ces-sions… ministère, ARS ou établissement délégué.

Mais qu’il s’agisse du ministère, des ARS ou des établis-sements de santé, y a-t-il une différence ?M. S. : Ce n’est pas pareil, parce que le ministère ne perçoit qu’une petite partie de la cession, alors que l’établissement délégué reçoit 100 %.Il y a une énorme contradiction entre le souhait de Bercy d’accroître les rentabilités provenant des cessions, et le ministère du Logement, souvent représenté par le préfet, qui est d’accentuer une politique de logement défaillante en France. Pour illustrer cela je ne prendrai qu’un seul chiffre : la fondation Abbé Pierre a publié dernièrement le chiffre de 3,5 millions de mal-logés en France. La problé-matique est devant nous, et nous avons un impératif à réaliser. Aujourd’hui le ministère du Logement prend le pas sur Bercy, et il faut gérer cette contradiction.

Comment aborder ces contradictions, les confronter ou les contourner ?M. S. : L’autre difficulté c’est effectivement les élus locaux. Ils ont aussi par définition leurs contraintes, sans parler des

IL FAUT ABSOLUMENT QUE POUR TOUT PROJET, EN DEHORS DES PARTICIPANTS INSTITUTIONNELS, IL Y AIT UN FACILITATEUR.

Maurice Solignac, adjoint au maire de Saint-Germain-en-Laye .

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Y a-t-il un lieu où il vaut mieux se rencontrer ?M. S. : La clé de l’opération, celui qui va appuyer sur le bouton de déclenchement du PLU, qui va accepter de le modifier, ou non, c’est le maire. Je suis donc favorable que le lieu « commun » soit la mairie. C’est avant tout lui qu’il faut convaincre. C’est lui, et par son intermédiaire la population, que nous devons faire adhérer au projet final.

Comment réagissez-vous, au CH de Poissy-Saint Germain, à ce « travailler ensemble » ?Nicolas Bougaut : Le CH de Poissy-Saint Germain dispose de terrains sur quatre communes. Cela nous permet d’avoir quatre exemples simultanés de relations avec les collectivités, auxquels il faut ajouter le rôle du conseil départemental qui intervient notamment sur les EHPAD / USLD que nous gérons.Je me retrouve donc dans les propos exprimés de la volonté des acteurs de partager un projet commun.Le premier préalable est la volonté des deux acteurs de se mettre d’accord sur un projet commun. Si ce premier point est un obstacle absolu, nous nous trouvons dans l’impasse.Il y a deux aspects à avoir en tête avant toute phase de négociation pour trouver les bons outils du dialogue, les intérêts et le projet communs : la convergence et la bonne compréhension des intérêts de l’un et de l’autre.Il y a un aspect politique entre le directeur et le maire de la commune, qui revêt dès lors un enjeu stratégique et d’inté-rêt général.Sur les aspects plus opérationnels il est nécessaire aussi de développer des liens réguliers avec les services de la com-mune, en particulier le service de l’urbanisme, la direction générale des services. Ensuite, il y a une dimension technique sur toutes ces questions qui va être importante dans la réa-lisation et la vente du projet. Nous évoquions la révision du PLU, mais toute une série de questions se posent très en amont sur l’analyse des projets et de leur faisabilité, ainsi que dans tout le déroulement du processus.Le dernier élément est la question de la gestion du temps. Nous sommes plutôt sur un temps à l’échelle de plusieurs années. Quand à un moment le dialogue est difficile ou bloqué, nous pouvons aussi laisser le temps passer. Sans être inactif, de nouvelles opportunités, de nouveaux besoins sur le territoire, de nouvelles réglementations, des chan-gements d’acteurs vont pouvoir débloquer les sujets.

Ce temps permet également de mieux connaître l’autre et d’améliorer ce dialogue.

Est-ce qu’à un moment le directeur d’hôpital peut dire « je ne vends pas » ?F. S.-H. : À Saint-Nazaire, l’idée ne m’a jamais traversé l’esprit parce que maintenir un bâtiment tel que vous le voyiez est compliqué. Il a fallu recourir à une société de gardiennage. Il y a un ensemble de frais évalué à 200 000 euros par an. Ce n’est pas anodin. Garder un site dans cet état constitue un vrai risque pour l’hôpital, nous voulions donc vendre. Par ailleurs un projet existait. Il y a tout de même un transfert de risque qui s’opère. Par exemple pour les démolitions : qui porte l’opération de démolition ? La CARÈNE me disait « si vous estimez que c’est moins cher, faîtes-le vous-même ». Finalement c’est un facteur financier qui a joué : si c’est l’hôpital qui faisait, nous devions payer la TVA sans pouvoir la déduire, alors que la communauté d’agglomération pouvait déduire la TVA.

Combien va coûter la démolition ?É. P. : Je pense que ce sera supérieur à 3 M €. Nous échange-rons le chiffre exact à la fin des travaux.Sur le long terme, il est clair que c’est un enjeu important pour une ville de réhabiliter et requalifier un tel site. Nous savons que les ressources fiscales (taxe d’habitation, taxe foncière,etc.), viendront dans le temps. Nous finiront par retrouver un équilibre sur le très long terme.Ce qui nous gênait au départ, c’est que sur une opération d’aménagement public il y a une nécessité d’équilibre ou de subvention pour participer à l’équilibre. Nous étions là sur un déficit plus important que ce que nous faisons habituel-lement. Entre la démolition, la dépollution et le rachat du site nous sommes sur un coût d’acquisition du foncier de 180 € du m². Nous pourrons, au mieux, vendre 10 à 20 % du foncier sur des lots libres à 200 €/m², mais 80 % de la surface sera entre 80 et 100 €/m² de valorisation de la charge foncière. Sur le logement social, avec un phénomène de compensation par l’agglomération, nous atteindrons 150 €/m². Mais avec un nouvel apport public. C’est déficitaire mais dans le contexte de tension budgétaire et social que connaissent les hôpitaux, il me semble qu’il est de la responsabilité du gouvernement local (ville, agglomération), d’aider à trouver une solution pour ce type d’opération.Sur l’étude d’urbanisme conduit sur le site de Moulin du Pé, nous avons étudié à la fois les capacités de construction de

26 _ VALORISATIONS IMMOBILIÈRES : LES ACTES

L’ANAP EST UN ORGANISME QUI EST ESSENTIELLEMENT LÀ POUR CONSEILLER LA PARTIE DU VENDEUR. CAR CE N’EST PAS DE LA COMPÉTENCE DES DIRECTEURS HOSPITALIERS DE NÉGOCIER SUR CES SUJETS.

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logements, les activités économiques que nous pouvions installer sur le site. Nous avons aussi fait tourner les « mou-linettes d’équilibre » de l’opération d’aménagement.Celà a été fait sans convention formelle entre l’hôpital et la ville, mais il est important de mener en commun cette réflexion. Cela apporte à tout le monde, ne nuit pas à la négo-ciation et a plutôt tendance à rapprocher les parties. Cela montre aussi que des intérêts qui semblent très divergents au départ finissent parfois par converger, mais surtout par créer de la discussion.Quant au délai, nous n’avons pas cherché au travers de la réa-lisation d’une étude à gagner du temps, mais nous avons considéré qu’il fallait un certain nombre de mois pour mener à bien l’étude d’urbanisme et avoir un processus de concer-tation avec les riverains. Parallèlement, nous évoquions régulièrement la question prix de la négociation. Tout cela s’est réalisé dans un calendrier, qui a pu paraître long pour certains acteurs mais qu’il était nécessaire d’avoir pour per-mettre d’aboutir.

À quel moment interviennent les promoteurs ?É. P. : Sur la ville de Saint-Nazaire il y a une dizaine d’années, nous avons eu beaucoup de mal à faire venir les promoteurs, mais ils sont venus. Actuellement ils sont repartis depuis 2-3 ans, parce que le marché n’est plus là. Nous avons aujourd’hui beaucoup de mal à les retenir sur Saint-Nazaire. Notamment sur des quartiers qui ne sont pas situés en front de mer. Notre « boulot » va donc être de les faire revenir.Anabelle Billy : En général lorsque nous intervenons sur un site, nous vendons un projet et non uniquement un terrain.Il nous arrive d’intervenir sur des communes où les collecti-vités n’ont que peu voire pas de projet.Ce n’est pas facile de trouver un projet de reconversion quand la dynamique locale n’est pas au rendez-vous.C’est peut-être sur cela que nous pouvons et devons pro-gresser ensemble entre collectivités et établissements hos-pitaliers.

Francis Saint-Hubert, quand on a 6 M € à son bilan, et qu’on en récolte seulement 4 M €, que fait-on ?F. S.-H. : Déjà nous sommes tout de même contents d’avoir obtenu 4 M €, c’est mieux que 2,5 M €.En valeur nette comptable nous étions à 5,5 M €. Il restait 1,5 M € et nous avons eu, grâce à l’ARS, une aide de 1 M €, dans le cadre de cette opération. 500 000 euros ont donc été inscrit en charges exceptionnelles.

PATRIMOINE DE L’HOPITAL ET ENJEUX COMMUNAUX : COMMENT TRAVAILLER ENSEMBLE ET CONCILIER LES CONTRAINTES ? _ 27

ÉCHANGES AVEC LA SALLE

Florence Crépu, Architecte urbanisteJe voudrais faire une remarque sur la valorisation des sites qui sont à reconvertir, car une valorisation correspond à la potentialité d’un site. Je voudrais rapporter l’expérience de ce qu’a fait le ministère de la Défense avec les casernes qui ont été libérées. La MRAI avait mis en place un protocole qui faisait intervenir la ville concernée et le ministère de la Défense. Les études faites en amont étaient des études de vocation générale qui permettaient d’aborder les questions de programmation, telles que le logement mais pas uniquement. Ces études faisaient aussi le point sur les contraintes foncières, techniques, règlementaire, de pollution, et faisaient également le bilan opérationnel. Nous avions donc déjà une idée du bilan financier de l’opération d’aménagement. C’est à ce moment-là qu’intervenait France Domaine. Ce protocole était un bon outil de dialogue entre les acteurs.

Maurice Solignac, Adjoint au maire de Saint-Germain-en-LayeJe voudrais citer l’exemple de l’école d’application militaire de Montpellier. La MRAI avait estimé ce bien à 53 M €. La proposition d’acquisition de la ville s’est située à 7,5 M €. L’estimation finale de la valorisation foncière s’est clôturée à 32 M € et la valeur réelle de vente à 19 M €, à cause des principes de décote. C’est un terrain qui a permis la construction de 2 700 logements dont 35 % de logements sociaux. Cela vous situe l’importance de ce terrain. Il faut avant tout avoir en tête ces ordres de grandeur, avec ces différences d’évaluation suivant la position de chacun. C’est en tout cas significatif en termes de contradictions. Nous pouvons quand même de principes très nettement éloignés et les chiffres traduisent cela.

IL N’EST PAS FACILE DE TROUVER UN PROJET DE RECONVERSION QUAND LA DYNAMIQUE LOCALE N’EST PAS AU RENDEZ-VOUS. C’EST PEUT-ÊTRE SUR CELA QUE NOUS POUVONS ET DEVONS PROGRESSER ENSEMBLE ENTRE COLLECTIVITÉS ET ÉTABLISSEMENTS HOSPITALIERS.

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28 _ VALORISATIONS IMMOBILIÈRES : LES ACTES

VALORISATION PATRIMOINE : POLITIQUE PUBLIQUE D’AVENIR ?

La valorisation du patrimoine est-elle une politique publique d’avenir ?

L e Conseil de l’immobilier de l’État (CIE) a été créé il y a une dizaine d’années. L’État n’avait alors que peu connaissance de son patrimoine, et n’avait pas de politique immobilière. Sous l’impulsion de parle-mentaires et avec l’aide de professionnels de l’im-

mobilier, une structure de conseil composée d’une quinzaine de personnes a été créée. Elle est présidée par un député (membre de la commission des finances de l’Assemblée nationale) et intègre trois députés, deux sénateurs et des professionnels de l’immobilier : des hauts fonctionnaires, des directeurs immobiliers d’entreprises, des représentants des professions juridiques liées à l’immobilier (notaires, avocats) et des professionnels techniques tels que les géomètres experts. Le CIE donne donc des avis sur demande du ministre du Budget, soit sur des schémas pluriannuels de stratégie immobilière de services de l’État (ministère ou services décon centrés) soit d’opérateurs (au sens large puisque les CHRU ont été auditionnés et ne sont pas au sens stricto sensu de la Loi de Finance des opérateurs de l’État). Parmi les points importants de la doctrine du CIE il y a bien sûr la valorisation des biens immobiliers.

QUELQUES CHIFFRESÉtat et opérateurs stricto sensu représentent 100 M de m2 de surface utile brute pour une valorisation à l’actif (pour les biens propriété de l’État) de 60 Mds €, avec une diversité de classe d’actifs et une implantation territoriale très variée. L’État ne peut donc pas réfléchir en termes de valorisation de patrimoine public comme une foncière de bureaux ou une entreprise ne possédant qu’une ou deux classes d’actifs bien précises. Il ne peut donc pas y avoir de réflexion monolithique. La première réflexion en termes de valorisation s’oriente vers la cession. Depuis 2002, l’État a vendu pour plus de 7 Mds € d’actifs immobiliers sur le territoire national ou à l’étranger avec des variations importantes de montant. La décision de céder s’opère dans une stratégie de rationalisation et donc à se défaire de biens qui ne sont plus utiles à l’État ou néces si-teraient des travaux d’investissements peu judicieux. La vraie question quant à la valorisation du patrimoine est donc portée vers la meilleure exploitation des biens utilisés : • Si le bien est encore utile, comment l’adapter à l’offre de service public ?

• S’il ne l’est plus, comment le valoriser : soit en le cédant, soit en améliorant les conditions de location ou de concession.La vente n’est qu’une approche / composante de la valori sation. Le plus important pour le CIE est donc d’avoir un patrimoine adapté aux besoins du service public et aux conditions dans lequel ce service est rendu. Les objectifs de l’État sont parfois contradictoires. Par exemple, l’État veut vendre son patrimoine aux conditions de marché. Mais, en même temps il y a une action pour faciliter l’offre de logements grâce à la mobili sation du foncier public. La loi Duflot et d’autres dispositifs permettaient des cessions à prix décotés. Il peut donc y avoir une source de contradic-tion. Le vendeur peut avoir un objectif de cessions au prix le meilleur. Alors que l’acheteur souhaite que les bilans soient équilibrés, et que le foncier pour les opérations de logement social soit le moins onéreux possible.

VALORISATION ET PATRIMOINE HOSPITALIER EN 5 POINTS• Un vrai patrimoine bien valorisé est un patrimoine entretenu et adapté. Bien que cela puisse passer pour un truisme, l’ensemble des auditions réalisées dans le secteur hospitalier, comme dans d’autres secteurs audités par le CIE, démontre que cette « vérité » n’est pas une évidence pour tous. Politique de valorisation = politique d’entretien + poli-tique d’adaptation aux besoins de l’activité. Par exemple : ne pas programmer des investissements surcalibrés tels que ce plateau technique comportant 14 blocs opératoires pour 6  en fonctionnement uniquement.• La valorisation peut s’entendre comme la cession des biens inutiles à l’activité de soins. En effet, soit ces bâtiments sont devenus inutiles car obsolètes et ne peuvent plus être affectés à l’activité hospitalière, soit ce sont des biens liés à la DNA et mal valorisés.C’est donc un axe majeur : la politique de l’offre de services développée par l’ANAP sur une vingtaine de sites est un vrai métier et nécessite donc de se munir de tous les outils, dont un inventaire fiable.Lors du démarrage de ma carrière professionnelle à la ville de Paris, j’avais en charge le budget des services sociaux de la ville et du département. Une de mes collaboratrices avait récupéré, alors qu’ils allaient partir à la poubelle, d’anciens actes de propriété d’établissements médico- sociaux ou hospitaliers appartenant à l’AP-HP. Je possédais donc, dans mon tiroir, des éléments stratégiques d’un inventaire d’un grand propriétaire comme l’AP-HP. Ceci est un exemple très concret de la faible importance accordée autrefois aux éléments d’inventaire. Je me plais à constater (ou espérer) que cela a évolué.

Emmanuel Charron Secrétaire général du Conseil de l’immobilier de l’État

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VALORISATION PATRIMOINE : POLITIQUE PUBLIQUE D’AVENIR ? _ 29

• Les relations avec les collectivités locales : nous avons constaté à plusieurs reprises que les maires ont des actions primordiales lorsque des zones hospitalières doivent être valorisées. Ils n’ont pas les mêmes objectifs ou les mêmes attentes objectives que les responsables hospitaliers, ce qui est logique. Il faut donc absolument nouer un vrai dialogue entre les élus locaux et les responsables d’établissements pour permettre de trouver le bon mode opératoire. Ce sont des biens souvent importants pour des villes au niveau historique, urbain car en centre-ville et représentant de grandes emprises. Les élus locaux – in fine – sont les maîtres des règles de l’urbanisme et ont une voix légitime à faire entendre. Cette relation avec les collectivités territoriales est évidemment particulièrement importante.• La contribution à la construction de logements sociaux Lorsque le CIE a rendu son avis, le décret d’application de la loi Duflot applicable aux EPS n’avait pas été pris. Le CIE avait eu une position médiane. Les EPS doivent contribuer, dans la mesure des terrains dont ils disposent, à cette recherche de foncier qui s’exprime au travers de cette loi. Mais pour autant, il ne fallait pas oublier les contraintes financières lourdes qui pèsent sur les EPS et les quinze auditions réalisées nous l’ont rappelé. Il faut donc trouver un équilibre pour que la contribution à la création de logement par les EPS existe sans être pénalisante pour ces derniers.

• La dotation non affectée : elle ne concerne pas tous les CHU ni tous les CH, ni tous les EPS en possédant de la même manière. Personne, a priori, ne suggérerait aux établissements propriétaires de vignes dans les belles régions de les vendre. En revanche, pour les EPS propriétaires de logements et de bureaux, le CIE a constaté lors de ces auditions, que, malgré les efforts et les améliorations constatées, ce n’est pas le métier des dirigeants d’hôpitaux de gérer comme une foncière ou comme un gestionnaire de biens. La préconisation très claire du CIE sur ce sujet est donc, pour la valorisation, de se défaire de ses biens et de les confier à de vrais professionnels de la gestion.

En conclusion, il va de soi que nous ne vendons pas pour « brader les bijoux de famille ». Nous valorisons parce que cela apporte des ressources et permet de se défaire de biens dont nous n’avons plus besoin pour l’activité. Donc nous ne valorisons bien que si nous avons une vraie stratégie patri-moniale.Ensuite, c’est une politique cruciale pour l’avenir des villes car ce sont des emprises généralement assez importantes pour les communes. Pour la ville de demain, les emprises hospitalières sont essentielles à l’aménagement urbain.Valoriser est donc une politique d’avenir !

AVIS SUR LA GESTION IMMOBILIÈRE DES CHRU

Dans cet avis sur la gestion immobilière des CHRU 3 points sont à mettre en exergue :

• Mieux prendre en compte l’activité immobilière de l’activité hospitalière : suite à l’audition de la quinzaine d’établissements (soit environ la moitié des CHRU). Paradoxalement, le bâtiment est au cœur de l’activité hospitalière mais moins au cœur des préoccupations des gestionnaires des établissements. Cela évolue mais c’est un constat partagé dans les différentes composantes d’une gestion immobilière. Qu’il s’agisse de l’entretien courant, des coûts de services rendus au bâtiment, ou plus globalement de la stratégie immobilière et des arbitrages entre actifs utiles et inutiles à l’activité hospitalière. Le bâtiment est donc un élément crucial dans le domaine hospitalier à l’instar des domaines dans lequel nous intervenons.

• Mieux intégrer le facteur temps : le cycle hospitalier, et donc celui de l’innovation technologique et l’organisation dans le secteur de la santé, peut être plus ou moins rapide et le temps du bâtiment (investissement) n’est pas nécessairement calé sur ces cycles. Plusieurs exemples nous prouvent qu’il peut y avoir des décalages de plus de dix ou quinze ans entre l’investissement et la mise en exploitation. Surviennent alors des décalages entre la réponse offerte par l’investissement et les besoins optimaux avec des coûts d’adaptation qui viennent peser sur l’activité hospitalière.

• La professionnalisation du secteur hospitalier : le processus de professionnalisation sur les fonctions immobilières est en marche, en lien notamment grâce aux travaux de l’ANAP. Le CIE tient à en souligner la qualité.

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30 _ VALORISATIONS IMMOBILIÈRES : LES ACTES

TABLE RONDE 3QUELLE ARTICULATION ENTRE LIBÉRATION DE FONCIER, SANTÉ ET CONSTRUCTION DE LOGEMENTS SOCIAUX ?

Le financement du logement social, un sujet qui mériterait plusieurs thèses, plusieurs centaines de colloques, est résumé très schématiquement ici.

APERÇU DU FINANCEMENT DU LOGEMENT SOCIALL’UNION SOCIALE POUR L’HABITATL’Union sociale pour l’habitat est une confédération qui regroupe l’ensemble des organismes HLM de différents statuts. Concernant la gestion locative il s’agit surtout des offices publics et des entreprises sociales pour l’habitat qui sont des entreprises sans but lucratif ou à but lucratif limité. Tous ces acteurs pèsent dans l’économie française : plus de 4 millions de logements, 10 millions de locataires, 18 milliards d’investissement par an. Ces organismes construisent environ 100 000 logements /an, soit presque un tiers de la production française. Ce sont des professionnels du secteur de la cons-truction qui sont très souvent des précurseurs dans l’applica-tion des normes.

LES GRANDS PRINCIPES DU FINANCEMENT DU LOGEMENT SOCIALPour rendre accessible le logement aux ménages modestes, il existe deux types d’aides :• Accorder une offre monétaire aux ménages pour faire face à leurs charges et leurs loyers.

• Offrir des logements à bas loyers, ce qui est le métier des organismes HLM.Le principe du financement du logement social est résumé par ce graphique qui relie tous les paramètres et toutes les contraintes.

Taux Durée

Des loyers au besoin en subventions

Loyers futurs

Exploitation Gestion

Coût de production

Capacités d’endettement

Emprunts

Besoin de subventions ou de fonds propres

L’objectif recherché est de proposer un loyer qui soit le plus bas possible. Par exemple, pour un logement de 70 m², le loyer repré-sente environ 5 000 € / an. Cet argent est destiné à couvrir les frais liés à la gestion patrimoniale et à la gestion locative, etc. Cela représente entre 1 500 et 2 000 €.Le reste va couvrir les annuités de la dette. C’est la ressource future que constituent les loyers qui va permettre d’emprunter et donc de financer la construction. C’est l’utilisation classique de l’effet de levier de la dette.

Dominique Hoorens, Directeur des études économiques et financières de l’Union sociale pour l’habitat

INTRODUCTION À LA TABLE RONDE

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QUELLE ARTICULATION ENTRE LIBÉRATION DE FONCIER, SANTÉ ET CONSTRUCTION DES LOGEMENTS SOCIAUX ? _ 31

Les conditions des prêts sont donc plus favorables en taux pour le PLAI que pour le PLUS et plus encore que pour le PLS. De même pour les subventions unitaires qui sont le reflet en plus de la diversité des coûts de production et des capacités financières des collectivités locales.

1RE CONTRAINTE STRUCTURELLE : UNE AUGMENTATION EN VOLUME DE LA PRODUCTIONNous vivons une formidable accélération de la production de logements sociaux. Dans les années 2000, environ 40 000 logements sociaux étaient produits par an. Actuellement, nous connaissons des summums historiques. Nous sommes presque au niveau des années 70, avec environ 100 000 loge-ments par an. Toutefois, le type de logements qui a le plus cru ces dernières années est le PLS. Notre souhait serait d’ac-croître la part des logements aux loyers les plus bas.Cette augmentation très importante du volume de notre production met en tension tous les acteurs. Car si le volume des logements augmente, les montants des aides, des fonds propres et des emprunts vont augmenter.

2NDE CONTRAINTE STRUCTURELLE : L’AUGMENTATION DES PRIXÀ cette augmentation des « volumes » s’ajoute une augmen-tation forte des « prix ». Comme l’indique le graphique, la production d’un logement social standard, en zone « ville de province », coûtait au début des années 2000 environ 80 000 - 90 000 € / logement. Aujourd’hui il en coûte 140 000 - 150 000 € / logement. Il y a eu une augmentation extrêmement importante des coûts de production pour plusieurs raisons. D’une part l’évolution du prix du foncier, nous y reviendrons ! Mais surtout l’application de normes de plus en plus exigeantes, comme les normes thermiques. Ces dernières années, les coûts de production se sont un peu ralentis. Cette hausse des coûts met fortement sous tension la chaîne de production du logement social.Les volumes augmentent et les prix aussi. Atteindre l’objectif des organismes HLM de proposer des loyers bas passe par la maîtrise des coûts de production. Le coût du foncier en est une composante importante. L’accès à une offre de terrains à prix modérés est donc un impératif pour que les organismes HLM parviennent à remplir pleinement leur vocation.

D’un niveau de loyer cible donné, on déduit une capacité d’endettement. Avec notre exemple de 5 000 € de loyer/an, on aboutit à une capacité d’endettement de 3 500 € par an, ce qui permet d’emprunter 100 000 €. Ces 100 000 € d’emprunt couvrent l’essentiel du coût de production d’un logement social, 140 000 €. Le reliquat sera apporté par des aides et des fonds propres de l’organisme. Les subventions proviennent de l’État, des collectivités locales, d’Action Logement (1% patronal). Autour de ce graphique peuvent être reliées deux de nos contraintes principales. Si nous voulons pratiquer des loyers plus bas, nous ne pouvons pas jouer énormément sur les frais d’exploitation qui sont quasiment optimisés. Nous ne pouvons pas non plus jouer sur les coûts de production parce que notre objectif n’est pas de faire du logement bas de gamme pour des gens modestes. Tous nos logements ont les mêmes standards de qualité. Donc si nous voulons faire des loyers plus bas, il nous faut plus de subventions. C’est mécanique. De même si nos coûts de produc-tion augmentent, nous ne pouvons pas les reporter sur des niveaux de loyers plus élevés. Donc quand les coûts de produc-tion augmentent, là aussi nous devons trouver plus de subven-tions ou de fonds propres. Voilà la problématique du logement social : arriver à maintenir des loyers bas, les plus bas possibles. Nous n’y arrivons pas suffisamment à notre goût.

DES GAMMES DE LOYERS CALQUÉES SUR LES PRÊTS ET DÉPENDANTES DES AIDESNous arrivons à faire des niveaux de loyers bas en fonction du montant des aides que l’on nous attribue. Ces aides nous sont apportées, soit sous forme de subventions, soit sous forme de prêts bonifiés. Ces prêts ont des durées plus longues et des taux plus bas que ceux du marché et sont mis en œuvre par la caisse des dépôts et consignations. Le lien entre l’em-prunt et le logement est tellement fort que la gamme de nos productions de logement, fonction des loyers attendus, a pris le nom de la gamme des prêts qui les financent : le PLAI, repré-sente un loyer moyen, hors Île-de-France, de 4 € / m² par mois. Le PLUS, environ 6 € / m² par mois. Le PLS, environ de 9 € / m² par mois.

Évolution des coûts de production

160 000

140 000

120 000

100 000

80 000

60 000

40 000

20 000

0

EN €

HT

/ M2 D

E SU

2006 2013

Bâtiment Foncier Prestations intellectuelles

87 000

30 000

13 000

130 000

156 000

15 000

39 000

102 000

+ 17 %

+ 30 %

+ 15 %

+ 20 %

Le lien loyers / aides publiques : la gamme de l’offre Hlm

160 000

140 000

120 000

100 000

80 000

60 000

40 000

20 000

0

PRIX

DE

REV

IEN

T TO

TAL

(AU

TA

UX

PLS

)

PLS PLUS PLAI

8,5 € m2 / mois 5,5 € m2 / mois 4,9 € m2 / mois

Emprunt Aide de taux Subventions / fonds propres

LOGEMENT NEUF « TYPE »

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32 _ VALORISATIONS IMMOBILIÈRES : LES ACTES

ARS ET EPF BRETAGNE : UN APPUI OPÉRATIONNEL AUX ÉTABLISSEMENTSLE CONVENTIONNEMENT ENTRE L’ARS ET L’EPF par Olivier Paugam de l’ARS BretagneLe rapprochement avec l’EPF est venu du fait que nous avions beaucoup de sites hospitaliers, qui s’étaient retrouvés désaffectés suite à des programmes de reconstruction, notamment dans le cadre de grands plans nationaux H2007 et H2012. On en a dénombré une douzaine en Bretagne.L’ANAP a accompagné trois sites dans le cadre de l’appel à projets de 2011 : 2 sites sur Rennes (l’Hôtel Dieu du CHU et le CHS Guillaume Régnier) et 1 site sur Lorient (Bodélio).Pour accompagner les autres sites, l’ARS s’est rapproché de l’Établissement public foncier (EPF). Celui-ci était identifié comme un partenaire qui avait ces compétences très fortes au service des collectivités. Ce partenariat a été formalisé par la signature d’une convention.La convention repose sur un principe d’échange réciproque d’informations entre l’ARS et l’EPF. Celui-ci peut être sollicité directement par des collectivités, voire dans certains cas par des établissements de santé. L’EPF nous informe alors que telle collectivité ou tel établissement de santé souhaiterait engager une démarche de cession d’un site, ce qui peut amener, l’ARS, à valider l’idée.Dans certains cas rares, le fait de lancer cette démarche de cession n’est pas forcément opportun eu égard au projet immobilier que l’établissement pourrait avoir dans le futur. L’idée est que l’établissement se garde un peu de réserve foncière et ne cède pas tout son patrimoine. Il y a un échange, une réflexion. À  l’inverse, quand nous avons connaissance de sites qui vont être désaffectés, nous sollicitons l’EPF.Dans le cadre d’un projet de cession, l’anticipation des démarches à réaliser est vraiment importante. Dans les opérations d’inves-tissement, les établissements tablent souvent dans leur plan de financement sur une cession 3-4 ans après, à l’exécution du

projet. Si la mécanique ne s’est pas enclenchée, ils vont se retrouver sans ce produit de cession qui devait abonder le plan de financement. Il est donc tout à fait important d’anticiper la démarche alors que le projet n’en est encore qu’à ses balbutiements.Ce n‘est pas le cœur de métier de l’ARS d’être expert sur ces questions de valorisation. Pour autant, son rôle est important dans le cadre du partenariat. C’est bien la raison pour laquelle l’ANAP a prévu des conventions tripartites. L’ARS apporte une forme de caution « institutionnelle » qui sécurise le prix de cession auquel nous allons aboutir in fine, notamment lorsqu’antérieurement il y a eu des estimations des services des domaines.Les estimations de sites hospitaliers sont complexes. Nous ne pouvons valoriser qu’en fonction du projet qui va être fait dessus. Il n’est pas question d’estimer ex-nihilo un site hospitalier. Du coup, il y a parfois des déceptions. Un établis-sement qui tablait sur une recette de 3-4 millions, in fine, peut se retrouver avec 500 000 € de produits.L’ARS est là aussi pour valider cette estimation. Cela signifie également que l’établissement de santé peut intégrer cette somme vue avec l’ARS dans ses éléments budgétaires.

L’APPUI DE L’EPF par Sandrine Paterour de l’EPF BretagneQuand nous sommes sollicités, nous incitons fortement à la réalisation d’une étude. Celle-ci doit permettre de déterminer un projet.

Une étude sur un projet hospitalier a 3 phasesLa première phase est un diagnostic à la fois urbanistique, et réglementaire. Quand vous avez un hôpital qui est en zone rouge du PPRI, vous savez que vous ne pourrez pas faire le même programme que s’il n’y était pas. Si vous avez des

La table ronde animée par Philippe Leduc, journalisteA réuni : Olivier Paugam de l’ARS Bretagne / Sandrine Paterour de l’EPF Bretagne / Jean-Michel Budet, Directeur adjoint de l’AP-HM / Carine Chervrier, Directrice économique des finances, de l’investissement et du patrimoine de l’AP-HP / Stéphane Dambrine, Directeur général de Paris Habitat OPH et représentant pour l’union sociale pour l’habitat à la commission nationale de l’aménagement, de l’urbanisme et du foncier.

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Applicabilité de la loi DuflotL’un de nos rôles est de créer de la réserve foncière. Ainsi cela laisse le temps à la collectivité d’écouler son programme de logements sur le marché. Nous achetons les fonciers souvent très en amont. Or la loi Duflot, exige, sauf lors de possibilités de réalisation par tranches, une réalisation des logements dans les 5 ans. Elle exige également un nombre de pièces à produire, notamment un plan prévisionnel de financement des logements, un plan prévisionnel de l’opération et un descriptif des logements qui vont être construits.Au regard des études pré-opérationnelles que nous faisons, nous ne sommes pas en mesure de produire ces pièces. Nous appliquons la loi Duflot, mais pas complètement dans les conditions du décret d’application.Ce que nous faisons avec l’ANAP, l’ARS, les hôpitaux, c’est une application de la loi Duflot sans l’utiliser. Lorsque nous établissons notre compte à rebours, nous allons avoir une recette foncière par m² de logement libre. Nous intégrons un coût qui sera moitié moins pour les logements locatifs sociaux. Nous savons à peu près, aujourd’hui en Bretagne, quelle est la charge foncière que peuvent supporter les organismes HLM pour acheter le foncier. C’est cette charge foncière que nous appliquons quand nous faisons le calcul du compte à rebours.Le but pour les EPF est de sécuriser l’acquisition pour les collectivités, de leur dire où ils vont, en termes d’équilibre d’opération ou de déficit, s’il existe.

NOUS N’APPLIQUONS PAS EXACTEMENT LA LOI DUFLOT DANS LES CONDITIONS DU DÉCRET D’APPLICATION CAR AU REGARD DES ÉTUDES PRÉ-OPÉRATIONNELLES MENÉES, NOUS NE SOMMES PAS EN MESURE DE PRODUIRE TOUTES LES PIÈCES DEMANDÉES.

bâtiments qui sont protégés par les bâtiments de France, vous ne pourrez pas faire table rase du passé. Il y a un premier diagnostic à faire.Ensuite, il y a une phase de programmation. Il ne s’agit pas de faire du R+7 partout et uniquement du logement privé collectif cela ne se vend pas dans la ville. Une étude assez fine du marché immobilier, doit donc être réalisé en lien avec les besoins connus par la collectivité, via son programme local de l’habitat et son PLU.Il y a ensuite la réalisation de trois scénarios par un bureau d’études, dont un sera approfondi. L’ARS est très souvent dans le comité de pilotage de l’étude et en assure le suivi, avec parfois l’appui de l’ANAP.

Le compte à reboursPour l’estimation de la valorisation foncière, un compte à rebours est fait. Cela donne lieu à de vives discussions, pour intégrer les charges foncières, les recettes espérées, et évi-demment les coûts d’aménagement. L’EPF apporte aussi son expertise sur tout ce qui est décons truction-dépollution. L’acquisition d’un site implique d’abord avoir fait le diagnos-tic amiante et le diagnostic des sols. Nous savons où nous allons en matière de déconstruction- dépollution, et en matière de recettes. Bien sûr, nous ne savons pas ce que sera le marché immobilier dans 5 ans, mais nous essayons de diminuer les risques le plus possible pour la collectivité. En renouvellement urbain, les projets sont assez souvent défi-citaires. Il y a une négociation avec les services qui vendent le foncier pour déterminer un prix acceptable de part et d’autre.

La production d’un minima de logements sociaux est impératifNous travaillons pour le compte des collectivités locales. L’EPF Bretagne étant un EPF d’État, nous travaillons égale-ment pour mettre en œuvre sa politique. Nous sommes sur-tout au service de la production de logements et notamment de logements sociaux.Lorsqu’une collectivité fait appel à nous, nous lui imposons un ratio minimum de production de logements sociaux.Actuellement sur l’ensemble du territoire breton, un minimum de 20 % de logements locatifs sociaux sont requis. Nous privilégions le logement social et très social en faisant du PLUS et du PLAI.Nous ne faisons pas de PLS, sauf dans certains cas. Dans des communes carencées ou dans des communes soumises à la loi SRU ce pourcentage de logements sociaux peut être aug-menté jusqu’à parfois 30-35 %.Tout cela se fait en concertation avec la collectivité en regar-dant le programme local de l’habitat. Il ne s’agit pas de deman-der 50 % de logements locatifs sociaux là où il n’y a pas de demande en logement social.

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LA DIFFICILE ÉQUATION DE LA VALORISATION VUE D’UN ÉTABLISSEMENTpar Jean-Michel Budet, Directeur général adjoint de l’AP-HM

L’HÔPITAL DOIT-IL FINANCER LE LOGEMENT SOCIAL ?À l’AP-HM, il nous a paru contradictoire, de demander d’un côté aux établissements en difficulté financière d’intégrer dans leur contrat de retour à l’équilibre la valorisation de leur patrimoine dans sa façon la plus exhaustive et la plus élevée possible. Et dans le même temps de demander à ces établissements d’accepter de rentrer dans un système de décote de leur patrimoine pour faire du logement social.Nous ne pouvons pas à la fois renflouer les caisses de l’hôpital et subventionner le logement social. Il faut choisir. Ce message a été entendu par l’État. Les établissements en difficultés qui remplissent certains critères liés à leur endettement se voient appliquer une décote inférieure aux autres.D’une certaine façon, nous récompensons les mauvais élèves de la classe. C’est assez surprenant. Nous pensons que le besoin de logement social est criant. S’il doit être aidé, ce n’est pas à l’hôpital, et d’une certaine façon à l’Assurance maladie, de le financer.Une grande partie du patrimoine dont il est question dans les textes est un patrimoine privé dont nous avons hérité, avec des conditions spécifiques de legs. Nous avons un certain devoir vis-à-vis des personnes qui ont donné ces biens. Ils ne les ont pas donnés à n’importe qui, mais à des établissements hospitaliers.

Cependant nous ne pouvons pas rester dans des situations figées pendant des siècles. Ce n’est pas imaginable. Certaines conditions ne sont plus possibles de tenir actuellement. Il faut donc pouvoir en sortir, c’est pourquoi nous allons souvent devant les tribunaux pour lever ces conditions historiques.Néanmoins, les donateurs avaient une certaine idée du don. C’était fait pour ceux qui étaient hospitalisés et les nécessi-teux de l’hôpital, à une époque où il n’y avait pas l’Assurance maladie. Il faut donc rester dans cet esprit lors de nos ventes et quant à l’utilisation de nos produits de cession.

LES DONS ET LEGS : DE NOUVEAU UNE NÉCESSITÉ POUR L’HÔPITALNous allons renouer avec la charité publique. Parce que la plupart des hôpitaux sont en train de créer des fonds de dotation, comme les établissements médico- sociaux.La dette n’augmente plus, elle diminue même. Pas parce qu’il y a des subventions qui se substituent aux emprunts, mais parce que nous n’investissons plus. Il va donc falloir faire preuve d’imagination avec des outils nouveaux pour faire repartir la machine, mais aussi retourner vers le public au sens large. Si vous expliquez aux futurs donateurs, que les dons qu’ils font à l’hôpital vont être captés pour faire du logement social, ils vont penser qu’ils auraient mieux fait de donner directement au logement social. Il y a, là aussi, une contradiction.

NOUS N’AVONS PAS ATTENDU POUR FAIRE DU LOGEMENT SOCIALNous n’avons pas attendu le législateur pour faire du loge-ment social. Donnez des responsabilités aux établissements, interrogez-les, évaluez-les sur leurs actions, mais nous faisons tous les jours du logement social.À l’AP-HM, nous avons vendu des bâtiments à des offices HLM parce que ce type de biens correspondait tout à fait à ce qu’ils pouvaient faire. Nous avons engagé des actions avec les associations familiales, avec un organisme HLM qui a réhabilité un bâtiment dans le cadre d’un bail emphytéo-tique. C’est ce que nous appelons les familles gouvernantes. Il s’agit de réinsertion. Une gouvernante s’occupe des personnes qui sont logées dans ces immeubles, c’est suivi par des associations familiales.Nous nous sommes occupés des SDF schizophrènes. C’est à la limite de l’hôpital, mais cela reste quand même du social. La première façon de réhabiliter socialement ces gens qui vivent dans la rue est d’avoir un logement. L’hôpital le fait avec des offices HLM dans le cadre de baux emphytéotiques à nouveau.Nous travaillons aussi avec la communauté EMMAÜS. Nous avons un très beau terrain dans un quartier résidentiel où se trouve un grand centre de vente EMMAÜS. Nous sommes aujourd’hui en train de conclure un bail emphytéotique avec la fondation EMMAÜS pour assurer l’hébergement des retraités compagnons, parce qu’il faut bien continuer à s’occuper d’eux.

NOUS PENSONS QUE LE BESOIN DE LOGEMENT SOCIAL EST CRIANT. S’IL DOIT ÊTRE AIDÉ, CE N’EST PAS À L’HÔPITAL, ET D’UNE CERTAINE FAÇON À L’ASSURANCE MALADIE, DE LE FINANCER.

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renter à du logement social, lorsque nous logeons des élèves infirmières par exemple. C’est bien une action sociale de loger les infirmières dans des studios loués dans des immeubles HLM et pour lesquels nous subventionnons les loyers.En revanche à l’AP-HM nous ne gérons plus les logements du personnel. La première raison est que le marché immobilier n’est pas le même à Marseille qu’à Paris, et que nous sommes dans des niveaux de prix accessibles aux fonctionnaires. Ensuite nous avons considéré que ce n’était pas notre métier et que nous ne saurions pas le faire de manière optimale. C’est une situation un peu particulière qui n’est pas forcément reproductible. En tout cas pas dans une ville comme Paris où le foncier est beaucoup plus élevé et inaccessible, ou comme Nice où les choses sont aussi différentes.

Nous avons la capacité de rester dans l’esprit de l’hôpital, sans que cela nous soit imposé. C’est cela la revendication d’autonomie.

LE LOGEMENT DU PERSONNEL DE L’HÔPITALNous sommes sortis du mécanisme de logements sociaux attribués de facto aux membres du personnel. J’ai du mal à dire que loger du personnel hospitalier, c’est du logement social. Les personnels hospitaliers sont des fonctionnaires qui ont un traitement, certes parfois à la hauteur du smic. Forcément, à Paris, la question se pose. Vu le coût des loyers, il est pratiquement impossible pour un fonctionnaire avec une famille de payer cela.Mais dans d’autres villes de province, cette question se pose différemment. Nous avons des activités qui peuvent s’appa-

C’EST BIEN UNE ACTION SOCIALE QUE DE LOGER DES ÉLÈVES INFIRMIÈRES DANS DES STUDIOS LOUÉS DANS DES IMMEUBLES HLM POUR LESQUELS NOUS SUBVENTIONNONS LES LOYERS.

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LA VALORISATION AU CŒUR DE LA STRATÉGIE PATRIMONIALE DE L’AP-HPpar Carine Chervrier, Directrice économique des finances, de l’investissement et du patrimoine de l’AP-HP

L’AP-HP, UN PATRIMOINE IMMOBILIER HORS NORMESLe patrimoine de l’AP-HP est conséquent et représente prèsde 4 millions de m2. Aujourd’hui, pour les hôpitaux, dans uncontexte contraint, savoir valoriser son patrimoine est un enjeu majeur pour le financement des investissements, limitele recours à la dette et complète la capacité d’autofinancement.L’AP-HP en quelques chiffres, c’est 42 sites et 700 bâtiments,dont plus de 600 recevant du public. Ce patrimoine est situé à Paris ou en petite couronne et répond à une finalité première : délivrer le service public de soins. La deuxième est de loger notre personnel. La troisième est que, quand il est libéré il constitue un moyen de financer une partie de nos investissements. À l’AP-HP, les produits de cession représentent entre 40 et 50 millions d’euros par an et financent entre 10 et 15 % des investissements. C’est donc une recette non négligeable.Notre offre de soins est de plus en plus ambulatoire. Les patients restent de moins en moins à l’hôpital, les durées moyennes de séjour baissent. Structurellement, les hôpitaux « libèrent » des m². Donc, tout l’enjeu est de rendre du m² dans des endroits suffisamment denses pour qu’il puisse être libéré et vendu.

LES FACTEURS CLÉ DE SUCCÈS DE LA STRATÉGIE DE VALORISATIONL’AP-HP s’est dotée d’une équipe dédiée à la gestion et à lavalorisation du patrimoine. Nous connaissons de manière pluriannuelle ce que nous pouvons libérer et vendre. Avec la

loi Duflot, la pression sur l’ensemble du foncier des hôpitauxs’est accrue. Nous sommes confrontés à une double logique :valoriser le foncier libéré, fruit de restructurations parfois douloureuses, pour financer de l’investissement hospitalieret le service public hospitalier d’une part ; répondre à l’intérêtgénéral visant à soutenir le logement d’autre part. Cela peut nous conduire parfois à des logiques contradictoires dans les rapports avec les collectivités locales notamment.Dans ce débat, nous avons divers arguments à faire valoir. Les collectivités ont l’argument évidemment du PLU et nousavons l’atout d’être propriétaire et décider en derniers recours de ne pas vendre. Face aux besoins de logements, nous trouvons tous cela malheureux de ne pas vendre.Je reste là-dessus sur une note optimiste : la relation entre les acteurs et avec collectivités locales permet dans bien des cas de concilier les deux impératifs : un besoin de res-sources financières et de valorisation correcte de ce foncier d’un côté ; de l’autre le besoin de valoriser et de dédier des emprises à des fins de logement en général mais aussi de contribution de logements sociaux.Il y a clairement quelques facteurs clés de succès pour viserune correcte valorisation de ce patrimoine. Le premier viseà offrir une visibilité pluriannuelle. Nous en avons besoin eninterne mais c’est aussi une attente des collectivités et de l’ensemble des acteurs de logement. Cette planification pluriannuelle s’appuie sur un travail d’identification préalable des emprises libérables par notamment la mise à jour régu-lière de schémas directeurs immobiliers des sites hospitaliers.42 sites, cela fait 42 schémas directeurs immobiliers.Le deuxième facteur clé est la transparence sur ces opérations à venir notamment en direction des acteurs. C’est ce que nous faisons avec la Ville de Paris avec laquelle nous avons signé un accord cadre dont un des thèmes porte sur le patrimoine et surtout avec l’ensemble des communes sur lesquelles nous sommes implantés, soit près de 100 collectivités concernées. Cette transparence aide à prévoir les évolutions réglementaires

LE PATRIMOINE EST AUSSI UN MOYEN DE FINANCER UNE PARTIE DE NOS INVESTISSEMENTS. À L’AP-HP, LES PRODUITS DE CESSION, REPRÉSENTENT ENTRE 40 ET 50 M € PAR AN, ET ILS FINANCENT ENTRE 10 ET 15 % DE NOS INVESTISSEMENTS.

IL Y A QUELQUES FACTEURS CLÉS DE SUCCÈS. LE PREMIER EST CLAI REMENT D’OFFRIR UNE VISIBILITÉ PLURIANNUELLE. NOUS EN AVONS BESOIN EN INTERNE, LES COLLECTIVITÉS EN ONT BESOIN, ET L’ENSEMBLE DES ACTEURS DE LOGEMENT AUSSI.

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(modification du plan local d’urbanisme) et à se concerter sur les aménagements à venir.Le troisième levier important est de porter des programma-tions partagées avec les collectivités. Les hôpitaux repré-sentent, dans certaines communes, un quart voire un tiers de l’emprise foncière de la commune.Tout l’enjeu de la valorisation de l’emprise est le programme urbain et immobilier qui va s’y implanter. Rien de pire que des travaux parallèles souvent contradictoires : la collectivité, avec les établissements fonciers qui l’appuient, les hôpitaux avec leurs conseils le cas échéant.L’atout clé est donc de travailler à des programmations partagées avec les collectivités. C’est ce que nous faisons au Kremlin-Bicêtre autour de la gare et à Paris sur le site de Saint-Vincent-de-Paul. Le travail est long et soutenu mais garantit un accord équilibré en fin de course.Nous travaillons aussi beaucoup, en lien avec l’ARS, avec lesservices de l’État qui ont une expertise particulière et éclairée dans ce domaine (préfet de région, DREAL et France Domaine).

LA PROPORTION DE LOGEMENT SOCIAL DES PROGRAMMES DE CESSION EST PRÉPONDÉRANTEL’AP-HP vise à retenir un programme équilibré sur ces emprises qui cherche à combiner les besoins de logements sociaux sur les territoires et la valorisation.Nous avons beaucoup d’emprises, notamment sur le sol pari-sien, avec des projets comportant environ 50 % de logement social.L’opération globale, Broussais - Boucicaut , représentait ainsi un gros pourcentage de logements sociaux, livrés pour une partie d’entre eux. C’est déjà un bon équilibre.Dans les zones moins tendues, nous visons 30 % de logements sociaux par opération. Nous rentrons aussi dans les négocia-tions sur le logement intermédiaire avec l’ensemble des acteurs.

CESSION DE DOMAINE PRIVÉ ET PUBLICLe domaine privé, issu de legs pour une partie, est encore assez conséquent. Mais c’est surtout le domaine public qui est pourvoyeur de cessions. C’est le lieu d’exercice du soinet du service public hospitalier mais c’est aussi le lieu des reconfigurations de l’offre de soins.Avec l’évolution de notre offre de soins en ambulatoire, nouslibérons des espaces. L’enjeu est de libérer des bâtiments entiers, mais cela nécessite des investissements pour restruc-turer.Nous avons une belle trajectoire de cessions complètement construite à 5 ans et presque achevée à 10 ans.

NOUS PORTONS DES PROGRAMMATIONS PARTAGÉES AVEC LES COLLECTIVITÉS. EFFECTIVEMENT, TOUT L’ENJEU DE LA VALO RISATION DE L’EMPRISE, C’EST LE PROGRAMME QUI VA Y FIGURER.

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OBJECTIF : ABOUTIR À UN CONSENSUSLa loi Duflot avait été essentiellement inventée pour que l’État s’oblige lui-même. L’État a créé une loi pour vendre son foncier, notamment, parce qu’il n’avait pas le droit de décoter. La loi Duflot, en tant que telle, n’est pas tellement utilisée pour la cession d’emprise hospitalière.La cession d’emprise hospitalière s’inscrit dans un schéma assez classique à 3 acteurs :• Le propriétaire du terrain.• Les acheteurs potentiels, qui sont les promoteurs privés ou sociaux.• La collectivité territoriale.Au fond, ce jeu à 3 acteurs est pratiqué depuis de nombreuses années et largement avant la loi Duflot. Dans ce type de jeu, l’important est que tout le monde connaisse les règles et raisonne de la même manière. À ce moment-là le consensus se fait assez rapidement, ou ne se fait pas. S’il ne se fait pas, c’est le vendeur qui se retire du jeu en retirant son terrain de la vente. Généralement, le consensus se fait et ce qui est important, c’est de limiter les règles d’incertitudes.

LES RÈGLES D’INCERTITUDESPremier paramètre, le pourcentage de logements qui s’est complexifié. Maintenant il y a trois types de logements sociaux et le logement intermédiaire.

Deuxième paramètre important, la densification. Le proprié-taire du terrain demande une densité maximum. En tant qu’opérateurs, nous ne sommes pas gênés par la densité. Mais les collectivités locales sont plutôt anti-densité, non pas parce qu’elles le sont par essence, mais parce que leurs électeurs le sont.Le troisième paramètre est sans doute plus compliqué à appréhender. Il concerne tout ce qui tourne autour de l’acte d’aménagement, c’est-à-dire les équipements publics à réa-liser, les réseaux, et les exigences des uns des autres en matières environnementales. Tout ceci ayant un coût, la seule variable d’ajustement devient le coût du foncier.L’important est qu’autour de la table, les acteurs parlent la même langue. C’est le cas je pense pour les grands établis-sements. Cela l’est sans doute moins pour les établissements de plus petite taille. D’où l’importance des outils et conseils pour parler le même langage que les uns et les autres. Une fois que nous avons fait cela, nous arrivons assez rapidement soit au constat d’accord soit de désaccord.Les organismes HLM interviennent à plusieurs niveaux. Ils peuvent intervenir en tant qu’aménageur, comme acheteur de charge foncière ou dans une posture, qui ne nous convient pas toujours, celle de racheter des logements à un promoteur en VEFA (Vente en l’état futur d’achèvement). Dans ce dernier cas, nous n’intervenons qu’in fine dans la boucle. Nous ne sommes donc pas autour de la table des négociations.

DEUX EXEMPLES DE CONSENSUSÀ Limeil-Brévannes, le projet de la mairie de construire 400 maisons sur un terrain hospitalier nécessitant des travaux de consolidation de sol conduisait à une valorisation nulle. C’est en proposant un projet où la densité a été multipliée par 3 que le projet a pu se réaliser. Ce n’était pas tellement la différence de charge foncière entre logement social et logement privé qui a permis la réalisation de l’affaire, mais le projet urbain.Deuxième exemple, la ville de Paris impose un pourcentage de logements sociaux qui varie de 0 à 30, voire 50 % selon que les arrondissements déficitaires ou non en logements sociaux. La ville de Paris impose dès lors un prix. Dans le cas de Laennec, le prix imposé était de 3 600 € / m² alors qu’à côté, les prix de vente des program mes s’élevaient à 20 000 € / m².Les paramètres étant clairs, le consensus peut se faire assez facilement concernant le calcul du prix. La loi Duflot, pour ce qui nous concerne (établissement public hospitalier, aména-geur, collectivité locale, organisme HLM) n’a pas changé le mode de raisonnement. Faire un bilan d’aménageur, ou compte à rebours, et voir si ceci donne une valorisation cor-recte par rapport au programme d’investissement.

La Commission nationale d’aménagement et d’urbanisme foncier réunit des parlementaires, des membres de l’administration, des experts, un représentant du notariat, l’USH et le conseil immobilier de l’État.Quand les désaccords subsistent au plan local, le préfet peut saisir la CNAUF pour obtenir un avis. La CNAUF essaie alors de trouver un bon compromis entre les positions des uns et des autres. Essentiellement entre les 2 acteurs que sont les propriétaires et les collectivités locales.

LE RÔLE DE LA CNAUF

Stéphane Dambrine, Représentant de l’union social pour l’habitat pour la CNAUF et directeur général de Paris Habitat OPH

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LA VALORISATION PATRIMONIALE : UNE STRATÉGIE GAGNANTE POUR LES ENTREPRISES PUBLIQUES ? _ 39

TABLE RONDE 4LA VALORISATION PATRIMONIALE : UNE STRATÉGIE GAGNANTE POUR LES ENTREPRISES PUBLIQUES ?

La table ronde animée par Philippe Leduc, journalisteA réuni : Pierre Bressolette, Poste Immo / Emmanuel Dunand, SNCF Immo.

POSTE IMMO200 immeubles cédés en un an, c’est beaucoup. Vous insistez beaucoup sur le travail en amont avec les mai-ries, sachant que les maires se considèrent très fré-quemment comme propriétaires de leur poste.Pierre Bressolette : Poste Immo est une filiale à 100 % de La Poste. Elle est récente et a été créée en 2005 pour des raisons uniquement fiscales. La Poste a de grosses dif-ficultés pour récupérer la TVA et a décidé de créer une struc-ture pour mettre en place des loyers et donc, récupérer la TVA. C’est le point déclencheur à la création de cette filiale. En moins de 10 ans, nous avons plus de 1 000 collaborateurs, qui se trouvaient au préalable en majorité au sein du service immobilier de La Poste. Nous avons également créé de nou-velles fonctions telles que celles permettant de valoriser le parc immobilier. Initialement cette valorisation était très orientée sur l ’exploitation, donc l ’accompagnement des métiers du Groupe par rapport à leur utilisation de locaux.Le parc est très vaste (7 M de m²) et très diffus. Il y a des bureaux de poste partout en France mais également des plateformes de tri et de distribution de courrier. Nous avons une présence très diffuse et décentralisée, à l’instar, des établissements de santé, avec des directions régionales (8 à ce jour) qui permettent de gérer les services de proximité.Le parc est également ancien avec un historique fort. Nous avons 23 000 baux en place dont des baux internes avec les métiers de la Poste pour inciter les services utilisateurs à bien optimiser l’utilisation de leurs espaces. En effet l’absence de loyers n’incitait pas à l’optimisation de l’espace. Un pro-gramme important d’optimisation en interne est depuis mis en place. Le courrier subit une décroissante très forte d’ac-

tivité de par l’arrivée du numérique et d’autres modes de com-munication. Il faut donc que cette branche diminue ses charges fixes de fonctionnement dont les m². Le loyer et les charges immobilières représentent un poste de charges très important pour le courrier.Nous possédons 11 000 immeubles pour le parc géré dont 3 500 sont en patrimonial. Sur ces 3 500 nous avons mis en place des structures de valorisation. Nous avons des typo-logies d’immeubles très diverses : commerce (les agences/bureaux de la Poste), tertiaire pour le back-office, et logis-tique pour le colis et le courrier. Nous possédons également des Hôtels des Postes, souvent présents dans les grandes

UN DES CRITÈRES ESSENTIELS DE RÉUSSITE D’UNE VALORISATION EST LE FACTEUR TEMPS.

Pierre Bressolette, Poste Immo

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métropoles régionales qui regroupent un ensemble des acti-vités en un seul immeuble.Nous avons créé de nouvelles compétences en interne dédiées à la valorisation : la promotion et le développement. À partir de sites existants et pour des problématiques de valorisation, nous nous attachons à créer de la valeur sur ces sites détenus en patrimoine par la Poste. Une des opérations développées par la Poste a été l’opération de logements rue Clerc dans Paris 7e et de bureaux à Issy-les-Moulineaux qui était une ancienne plateforme de tri.Nous pouvons réaliser de la promotion en direct. Comme l’opération emblématique de la Poste du Louvre, un ensemble de 35 000 m², dont les travaux vont démarrer cette année pour environ 150 M € de restructuration. D’autres opérations dont les immeubles ont été reconvertis en logements dans des métropoles telles que Lyon ou Marseille.Poste Immo fonctionne comme une foncière et souhaite donc valoriser financièrement au mieux les cessions. En revanche, les relations avec les élus et les collectivités locales sont

très fortes. Les maires considèrent souvent que le patrimoine postal leur appartient et nous avons des demandes des col-lectivités pour acheter à l’euro symbolique les biens postaux. Nous avons donc créé au sein du groupe La Poste une filière dédiée aux relations avec les élus pour l’ensemble des filiales du groupe y compris Poste Immo. Nous nous appuyons beau-coup sur ce service pour promouvoir les « bons messages » auprès des élus. Notamment lorsque nous voulons fermer une plateforme de tri ou délocaliser un bureau de poste. L’un des principaux intérêts de cette démarche est d’avoir un message cohérent auprès des élus avec une vision d’en-semble des actions du groupe. Cela nous permet ainsi d’avoir les bons leviers de négociation auprès des élus.Concernant les problématiques plus particulières liées à la valorisation, l’un des critères essentiels est le facteur temps. Les dossiers « compliqués » prennent beaucoup de temps. Il est essentiel de s’entourer des bonnes compé-tences que ce soit en interne ou par le recrutement de pres-tataires externes (bureaux d’étude et cabinets d’architecte). Cela afin de réaliser des faisabilités en termes de capacité d’accueil du site étudié. il faut bien comprendre le marché économique dans lequel nous intervenons ainsi que la demande surtout lorsque les projets sont longs. Il est important d’aller au plus profond de l’état des lieux inhérent à l’actif : contraintes techniques, géotechniques, d’urba-nisme, mais également de l’environnement du projet. Si nous voulons valoriser et optimiser, il faut prendre le temps de faire ces études, pour trouver la sortie du bien la plus adé-quate,afin d’être force de propositions auprès des collecti-vités. Il est beaucoup plus aisé d’aller vers elles avec un projet bien défini plutôt que de ne pas savoir exactement ce que nous souhaitons faire du bien. Nous risquons dès lors nous faire imposer les souhaits de tous les acteurs économiques.Enfin La Poste a mis en place des schémas directeurs. À l’ins-tar du secteur hospitalier, nous avons des utilisateurs et des propriétaires. Nos utilisateurs sont dans nos murs mais pas uniquement. Nous avons donc besoin de bien comprendre l’évolution de leurs besoins sur la durée afin d’anticiper les libérations, le recentrage et ainsi en déduire les m² qui

Rue Clerc : projet d’un ensemble immobilier mixte.

Zenora : transformation d’une friche industrielle.

SI NOUS VOULONS VALORISER ET OPTIMISER IL FAUT PRENDRE LE TEMPS DE FAIRE CES ÉTUDES AFIN D’ÊTRE FORCE DE PROPOSITIONS AUPRÈS DES COLLECTIVITÉS.

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pourront être libérés et cédés. Nous pouvons ensuite étu-dier une valorisation de ces biens en amont sans perdre de temps. Historiquement, nous libérions dans un premier temps les locaux et puis traitions dans l’urgence la vacance de ces biens. Il est donc important de pouvoir anticiper avec ces schémas directeurs immobiliers les besoins d’implan-tation qui sont liés et la problématique immobilière qui en découle.

Est-il important pour un hôpital de faire une étude de reconversion pour connaître la valorisation de son  bien ? Est-il possible de faire des études à moindres coûts ?P. B. : Il est essentiel de s’entourer de compétences ciblées sur ces sujets de valorisation, en interne si elles existent, par recrutements de prestataires ou avec l’ANAP au niveau national pour structurer ce référencement.Nous avons mis en place des contrats-cadres d’études et de référencement pour l’ensemble du territoire. Ainsi, nos délégués régionaux peuvent faire appel à ces accords-cadres. Ces études ne nécessitent pas nécessairement des budgets très conséquents en amont. Mais il est important de pouvoir définir un gabarit dans un contexte d’urbanisme qui évolue notamment avec la Loi ALUR. L’essentiel est de bien comprendre les leviers de négociations que nous pouvons avoir autour de la densification des constructions. Il vaut donc mieux être accompagné avec de bonnes com-pétences sur ce sujet. L’investissement initial de l’étude doit permettre de sécuriser les produits de cessions.

Est-ce que vous vendez ou louez, ou bien les deux ?P. B. : Nous faisons les deux. Au niveau stratégie de valori-sation, nous pouvons très bien avoir comme objectif la loca-tion, et pas uniquement en interne du groupe La Poste. Par exemple, pour le projet de la Poste du Louvre, le groupe a décidé de la garder en patrimonial. Ce projet représente 35 000 m² de plancher au total avec un objectif de location de 10 000 m² en tertiaire et 5 000 m² en commerces au rez-de-chausse. C’est donc une nouvelle orientation de valori-sation que le groupe La Poste a créé depuis 2013 pour capter de nouvelles sources de valeurs.

ÉCHANGES AVEC LA SALLE

Comment définissez-vous les valeurs locatives que vous mettez en œuvre ?Pierre Bressolette : L’objectif de Poste Immo est de louer à des valeurs de marché. Nous réalisons donc des expertises pour définir les loyers à appliquer, même en interne. Dans les opérations de valorisation, si notre objectif est la location nous allons calculer la valeur locative nous permettant d’atteindre le retour sur investissement que nous attendons. En revanche si notre objectif de reconversion est tourné vers du logement — ce qui n’est pas dans notre cible pour conserver ce genre de biens en patrimoine direct — alors nous allons plutôt évaluer le prix de revente du bien suivant un bilan promoteur.

Projet la Poste du Louvre.

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SNCF IMMOBILIERVous êtes semblables à Poste Immo et à la fois diffé-rent. Vous avez vendu beaucoup de petites gares à plein d’acheteurs différents (nous avons bien connu cela par le passé) et puis parfois les lignes de chemin de fer ne sont pas très intéressantes. Comment valo-risez- vous tout cela ?Emmanuel Dunand : SNCF Immobilier correspond à la fusion d’équipes entre SNCF et RFF dans la recomposition du pay-sage ferroviaire français. Aujourd’hui les équipes immobilières ex-RFF et ex-SNCF sont regroupées sous une même appel-lation, SNCF Immobilier, et représentent 600 personnes sur l’ensemble du territoire français. S’y ajoute une filiale de loge-ments intitulée ICF représentée par 4 Entreprises sociales de l’habitat (ESH), une entreprise de logements libres non conventionnés ICF NOVEDIS, et une filiale « outil » interne d’aménagement urbain avec laquelle nous travaillons sur un certain nombre de sites pour les transformer de foncier fer-roviaire en projet urbain.Quelques grands chiffres clés du patrimoine ferroviaire :• 20 000 hectares, 12 millions de m² et 100 000 logements répartis sur tout le territoire.• 250 M € environ par an de cessions et 150 M € de recettes locatives.La facture immobilière globale représente, pour le groupe public ferroviaire, environ 1 Md € de charges par an toutes natures de dépenses confondues. C’est donc un poste de dépenses important.

Au sein de SNCF Immobilier, nous avons trois grands enjeux :• La gestion du parc immobilier et son optimisation. Il a voca-tion à être utilisé au mieux de ses capacités pour servir l’en-semble des métiers qui composent le paysage ferroviaire.Au même titre que les établissements de santé ou Poste Immo, nous avons besoin d’optimiser au mieux le parc. De n’utiliser que ce dont nous avons besoin et optimiser, en les faisant muter vers de l’urbain, ce dont nous n’avons plus ni l’usage, ni l’utilité pour l’ensemble du groupe.• La valorisation de tous les actifs inutiles à nos besoins ferroviaires que nous transformons avec de la création de valeur en projets urbains de taille différente. Nous avons un parc urbain très varié qui va de 100 m² à plusieurs dizaines d’hectares. Cela ne se valorise pas de la même manière.• Dernier enjeu important : le logement. Il constitue une prio-rité pour le groupe ferroviaire à travers le développement de sa filiale ICF. Nous avons une convention avec l’État fixant des objectifs de cession de foncier pour contribuer au déve-loppement de l’offre de logements. À travers également tous les engagements qui ont été pris auprès de certaines collec-tivités locales dont la Ville de Paris. Nous avons signé avec elle un protocole « logements » nous engageant, sur un certain nombre d’emprises, à réaliser des programmes urbains avec une forte composante de logements sociaux confor-mément au PLH. À ce titre, nous dialoguons régulièrement

NOUS MENONS UN TRAVAIL DE COOPÉRATION « CLÉ » AVEC LES COLLECTIVITÉS POUR ÉQUILIBRER LES PROJETS ET LES ENJEUX URBAINS, ENVIRONNEMENTAUX, ÉCONOMIQUES.

Emmanuel Dunand, SNCF ImmoDirecteur de l’immobilier Île-de-France

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par l’ensemble des représentations de l’État sur le territoire, les préfets, mais également avec la CNAUF devant laquelle nous « planchons » régulièrement.La fonction immobilière du groupe SNCF se transforme actuel-lement pour passer du statut de vendeur de foncier, sur lequel nous nous sommes beaucoup appuyé ces dix dernières années, en opérateur. Depuis plus de dix ans, notre filiale d’aménagement « Espaces ferroviaires » développe plusieurs projets dont un dans le 18e côté Porte de la Chapelle. Nous nous appuyons sur cette filiale et nous nous structurons dans le cadre de notre plan stratégique. Nous regardons ce qui nous attend à l’horizon des dix prochaines années pour nous structurer comme opérateur immobilier. Nous souhaitons, de plus en plus, faire intervenir cette structure sur nos fon-ciers pour les aménager et les transformer pour la mutation vers l’urbain. Nous travaillons également dans des structures de co-promotion. Pour aller, à l’instar de Poste Immo, vers des structures de promotion permettant de développer des programmes de logements ou de tertiaire. La SNCF a éga-lement la particularité d’être un utilisateur important de bureaux de plus d’un million de m² dont plus de la moitié en Île-de-France.Un point est essentiel : l’anticipation. Car tout le cycle de  préparation de l’actif à vendre n’est peut-être pas la partie la plus simple à prendre en charge et à anticiper. Pour nous propriétaire ferroviaire, nous avons besoin de préparer en amont car nous sommes soumis à plusieurs contraintes. Pour sortir de l’inaliénabilité, nous avons besoin de démontrer l’inutilité pour permettre le déclassement et de libérer le terrain de toutes ses contraintes techniques (la désaffec-tation). Nous avons surtout un travail de coopération « clé » avec les collectivités pour créer de la valeur et obtenir la constructibilité qui va permettre de développer la valeur et de favoriser l’émergence de produits urbains conformes aux attentes des collectivités. Celle-ci va ensuite conduire au dialogue sur la programmation à engager avec les collecti vités sur un programme équilibré entre enjeux urbains, environ-nementaux et économiques. Nous anticipons le dialogue avec la collectivité, et arrivons en amont, en ayant déjà pré-étudié le terrain, afin de proposer un programme qui nécessitera de revoir le PLU (nos emprises sont a priori inconstructibles sauf pour du ferroviaire).

ÉCHANGES AVEC LA SALLE

Laurent Becard : Il y a actuellement beaucoup de grands sites (friches ferroviaires en Île-de-France) représentant des dizaines d’hectares sur lesquels ont été étudiés des projets urbains de qualité qui ont fait consensus entre la ville, différents acteurs et vous propriétaire SNCF. Pour autant ces terrains sont toujours à ce jour des friches ferroviaires. Lorsque les bilans d’aménagements sont produits, nous nous apercevons que le prix du foncier, seule variable d’ajustement, ne permet pas de débloquer une situation et donc de construire un vrai projet urbain de plusieurs centaines de logements et autres destinations. Il y a tout de même cette idée d’injonction contradictoire de l’État. D’un côté on vous demande de valoriser au mieux vos fonciers, soit le plus cher possible pour financer un certain nombre d’activités, même chose pour l’AP-HP. De l’autre, notamment autour des gares où se trouve souvent votre foncier à forte valeur ajoutée urbaine, qu’il y ait une intensification urbaine forte mais sans un prix de foncier trop élevé. Cette situation dure depuis plusieurs années. Des projets sont mûrs et ne se font pas parce que cette situation n’est pas débloquée. Pensez-vous que votre nouveau statut d’opérateur puisse faire évoluer ces injonctions contradictoires ?Emmanuel Dunand : Un des éléments de réponse peut effectivement résider dans notre nouveau positionnement d’opérateur. Nous pensons qu’en nous positionnant nous-même comme aménageur, voire promoteur ou co-promoteur, cela peut aider à mieux dérouler le cycle de création de valeur dans les différentes étapes du projet urbain. Nous devons équilibrer les dépenses de libération et de reconstitution sur des fonciers très encombrés avec les enjeux posés par les collectivités locales sur le développement urbain de nos fonciers souvent bien situés en centre-ville.

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TABLE RONDE 5IMAGINER AUJOURD’HUI CE QUE DEVIENDRA DEMAIN LE SITE DANS LA VILLE

La table ronde animée par Philippe Leduc, journalisteA réuni : Laurent Becard, Urbaniste / Géraud De Baillencourt, Directeur général DOMNIS. (entreprise sociale pour l’habitat) / Nathalie Garin-Chereau, Chef de projet établissement public d’aménagement du Mantois, Seine Aval.

LE POINT DE VUE DE L’URBANISTEpar Laurent Becard, urbaniste

L’urbaniste va dire qu’il faut poser la question à l’envers. Comment imaginer aujourd’hui ce que deviendra la ville de demain pour apprécier le mieux possible la place de cette future friche hospitalière dans la ville de demain.Nous retrouvons les fondamentaux du métier d’urbaniste, qui sont d’essayer avec les maires, les partenaires, l’État, les grands propriétaires fonciers d’imaginer à 5, 10, 15 ans ce que pourra être la ville, ou au moins le quartier dans lequel s’inscrira le nouveau projet.Cette question se pose de façon extrêmement différente selon les différents cas de figure.

LE CAS DES PÉPITES FONCIÈRES ET/OU IMMOBILIÈRESC’est le cas « le plus facile ». Le site hospitalier est dans un contexte urbain très dynamique avec des atouts de déve-loppement important, un marché immobilier porteur dans tous les secteurs de l’immobilier (résidentiel, tertiaire et com-mercial). Ce projet est porté par un maire, une collectivité et aussi porté par le marché. Les marchés immobiliers sans lesquels, dans la plupart des cas, il n’y a pas de projet possible.C’est ce que nous pouvons appeler des pépites foncières et/ou immobilières.S’agissant de sites hospitaliers parisiens, nous arrivons vite à trouver le bon consensus, le bon projet. Pour satisfaire à la fois, les objectifs de valorisation foncière du propriétaire, en l’occurrence l’AP-HP et ceux de la ville de Paris, y compris avec une obligation importante de logements sociaux.

LE CAS PARTICULIER DU SITE À FORT POTENTIELIl y a des cas plus compliqués où vous avez des pépites immobilières et/ou foncières situées dans un contexte urbain qui ne se trouve pas à l’instant T au bon endroit imaginer sa transformation, sa mutation en projet urbain, mais dont le potentiel du contexte urbain et du site lui-même est formidable.Prenons l’exemple de Marseille. Dans son centre, l’hôpital dominait le vieux port, et était en limite du quartier

du Panier, qui s’est vidé progressivement dans un mauvais contexte urbain. Tout le monde parlait de Marseille la belle endormie, il y a 10 ans, avant les transformations récentes.Le vieux port n’avait pas bougé depuis des décennies, nous avions quasiment oublié l’existence du Fort Saint Jean. Les docks, de l’autre côté, sur la mer, étaient restés en l’état.Ce contexte urbain, au départ un peu triste, devient mainte-nant beau et emblématique. Vous avez une pépite hospitalière située à une encablure de la mairie, qui elle-même, s’est éten-due et a créé une esplanade reliant l’hôpital au port.Puis, un investisseur immobilier a acheté à la ville et décidé d’investir quelques millions d’euros pour faire un grand hôtel de centre-ville, haut de gamme.Dans ce cas, la corrélation entre les deux est claire : il est indis-pensable que la ville bouge pour que le site hospitalier bouge.

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LE CAS COMPLIQUÉIl y a le 3e cas, le plus compliqué. Lorsqu’il y a une friche hospitalière, ou qui va le devenir, souvent un très beau site, parfois même classé monument historique. Elle est souvent dans une belle ville, mais située dans un secteur avec une dynamique très faible et un marché immobilier atone.A priori, nous ne voyons pas comment cette friche va pouvoir être valorisée. Dans ces cas-là, les études conjointes entre la ville et le propriétaire, en amont, sont encore plus impor-tantes. Elles doivent offrir différents scénarios qui ne peuvent être mises en œuvre à un instant T, mais pourront l’être dans quelques années si le marché repart, si l’activité économique est relancée.Il est nécessaire qu’un porteur foncier de type EPF, dont le métier est de porter un foncier qui pourrait être valorisé plus tard, soulage l’hôpital. Son métier est de soigner les gens, pas de faire du portage foncier dans des conditions souvent difficiles et dans ces cas compliqués.Il faut que le projet de cession soit co-construit avec les deux partenaires fondamentaux : le propriétaire et la col-lectivité porteuse du projet urbain. C’est la condition élé-mentaire, minimum et fondamentale pour qu’émerge un consensus.Mais selon les cas, nous y arrivons plus ou moins facilement. Il faut justement identifier le plus en amont possible la pire des choses. Quand vous avez un site dont la valorisation est inscrite de façon un peu arbitraire par des financiers, le projet est bloqué pendant longtemps. Il faut quelques années par-fois pour que tout le monde atterrisse sur la réalité. Ce terrain ne peut pas donner plus que ce qu’il est capable de donner, dans un contexte qu’il faut mettre en évidence.

Hôtel intercontinental.

Projet de rénovation en hôtel.

Carte postale de l’ancien Hôtel-Dieu.

LE CAS COMPLIQUÉ EST LORSQU’IL Y A UNE FRICHE HOSPITALIÈRE, QUI PEUT ÊTRE UN TRÈS BEAU SITE VOIRE UN MONUMENT CLASSÉ, MAIS SITUÉE DANS UN SECTEUR AVEC UNE TRÈS FAIBLE DYNAMIQUE LOCALE ET UN MARCHÉ IMMOBILIER ATONE.

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EXEMPLE DE VALORISATION AU CHIPS – LE POINT DE VUE DE L’ACQUÉREURpar Géraud De Baillencourt, directeur général DOMNIS

DOMNIS est une SA d’HLM implantée dans les Yvelines. C’est un acteur local propriétaire de 12 000 logements.

LE PROJET DU CHIPSLe CHIPS, Centre hospitalier de Poissy-Saint Germain souhaitait valoriser un actif immobilier sur la commune Saint -Germain-en-Laye. DOMNIS a répondu à la mise en vente réalisée par l’établissement.La programmation paraissait assez évidente. Le projet concernait la valorisation d’une maison de retraite, donc une trame de petits logements. La transformation en loge-ments familiaux aurait peut-être été compliquée. La chance du CHIPS est la future installation de Sciences Po Yvelines, en face du site.Pour réaliser le projet, trois contraintes ont été surmontées :• S’il y a une modification du PLU à envisager, l’anticipation est importante pour que le vendeur sécurise la promesse de vente. L’acquéreur souhaite aller vite pour obtenir le permis de construire et les financements, et s’assurer de la faisabi-lité de l’opération. Ce point avait été anticipé.• La deuxième contrainte, est la nature du projet de rénova-tion-réhabilitation. Il y a eu un dialogue constructif pour obtenir la meilleure offre en fonction de la surface développée.

• La troisième contrainte, est la division de l’immeuble en volume, avec une complexité des travaux inhérente.Le marché a donc été favorable à cette valorisation puisqu’il y a un potentiel de résidence étudiante à Saint-Germain-en- Laye alors que c’est une ville qui n’est pas universitaire. En l’absence de cette opportunité, la transformation en résidence étudiante aurait été plus compliquée qu’au-jourd’hui.

Bâtiment existant.

VALORISATION D’UNE MAISON DE RETRAITE AU CHIPS

Projet de résidence étudiante - DOMNIS.

LE PROJET D’INSTALLATION DE SCIENCES PO YVELINES À PROXIMITÉ A ÉTÉ DÉTERMINANT POUR LA RÉUSSITE DE LA RECONVERSION DU SITE.

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IMAGINER AUJOURD’HUI CE QUE DEVIENDRA DEMAIN LE SITE DANS LA VILLE _ 47

PROGRAMMER SUR LE LONG TERME - LE POINT DE VUE DE L’AMÉNAGEURpar Nathalie Garin-Chereau, chef de projet Établissement public d’aménagement du Mantois, Seine Aval

L’ÉTABLISSEMENT PUBLIC D’AMÉNAGEMENTL’établissement se retrouve dans la situation, comme les bailleurs sociaux, de devoir négocier avec des opérateurs, de devoir trouver des compromis afin de préserver les inté-rêts de chacun.L’établissement public d’aménagement travaille au risque de l’État. Donc, si les opérations sont déficitaires, l’État les prend en charge. Dans le même temps, des acteurs publics, tels RFF et les hôpitaux, négocient âprement la vente de leur foncier pour pouvoir leurs opérations d’investissement.C’est un vrai paradoxe qui implique des négociations préa-lables indispensables pour faire avancer le débat, et de l’an-ticipation, puisque l’on parle de la ville de demain.Comment amener un site, qui est souvent stratégique, à évo-luer ? C’est le cas des sites hospitaliers, de certains sites ferroviaires qui se trouvent en centre-ville et à proximité des transports en commun et de la ville. Il y a un véritable enjeu à les faire évoluer en intégrant l’enjeu environnemental et en favorisant le renouvellement de la ville.

LES POLITIQUES PUBLIQUES DOIVENT ANTICIPER SUR LE LONG TERMEIl faut poser la question de la valorisation foncière comme un enjeu de politique publique.Les sites implantés sur Paris, la proche couronne, ou de grandes villes, ne posent pas de difficulté particulière. Il y a toujours une discussion, une pression politique, qui amènent à un accord et à ce que les opérations se réalisent.Pour les terrains en périphérie, comme ceux sur lesquels nous intervenons, c’est plus difficile. Parfois, des désaccords politiques entre les zones périphériques et les zones cen-trales apparaissent.

Nous sommes confrontés aux deux cas de figures. Un terri-toire qui est déjà attractif, côté Carrières-sous-Poissy, mais aussi un territoire qui l’est moins, vers Les Mureaux ou le Mantois.Comment arrive-t-on à concilier une remise en état d’un site et une valorisation pour qu’il ne soit pas à valeur nulle ? Nous sommes confrontés à des problématiques de remise en état, de déconstruction, de dépollution. Elles conduisent aujourd’hui à des valorisations souvent négatives, notam-ment lorsque la pression foncière est très faible.Nous nous inscrivons dans de la programmation à long terme. Nous anticipons les choses et travaillons en amont avec les opérateurs, les propriétaires fonciers, les collectivités, les éventuels aménageurs ou opérateurs comme les EPF pour programmer les aménagements dans le temps.Les développements des territoires se programment. Il y a un vrai travail politique sur le long terme et des investisse-ments publics à engager.Les nouvelles emprises hospitalières sont de plus en plus importantes. Elles sont intégrées à la ville parce que leur accessibilité le nécessite. Mais il faut se poser la question du futur de ces sites. Comment pourront-ils évoluer avec les problématiques urbaines ? Il faut discuter des futurs projets urbains, investir de l’argent public notamment sur les trans-ports et les services.

LES DÉVELOPPEMENTS DES TERRITOIRES SE PROGRAMMENT. IL Y A UN VRAI TRAVAIL POLITIQUE SUR LE LONG TERME ET DES INVESTISSE MENTS PUBLICS À ENGAGER.

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48 _ VALORISATIONS IMMOBILIÈRES : LES ACTES

La problématique de reconversion des sites hospitaliers devrait être aujourd’hui le cœur de la politique foncière à l’échelle nationale. Quels sont les sites à privilégier ? Comment met-on en place de vraies politiques pour favoriser la reconversion de ces sites ? Quels sont les moyens ? Les positionnements sont certainement différents quand il s’agit d’acteurs publics amenés à discuter ensemble.Il y a une vision urbaine, urbanistique et de développement durable qui fait partie maintenant de la façon dont nous devons penser le développement de la ville.Des réflexions sont à mener sur les sites des territoires peu attractifs qui ne peuvent pas rester des friches. Un hôpital en centre-ville d’une ville moyenne du centre de la France ne peut pas rester une friche. C’est insoutenable à la fois pour les élus et pour les propriétaires d’un point de vue urbain et sécuritaire.

L’ADÉQUATION ENTRE LA DENSIFICATION ET LA DEMANDENous voulons aujourd’hui de densification autour des gares. En même temps, il y a un paradoxe : nous continuons à déve-

lopper des territoires annexes. Il y a aussi un discours contra-dictoire qui est de favoriser le mode collectif en ville, en  densifiant l’habitat, alors que l’idéal de beaucoup de Français est le pavillonnaire.Nous travaillons par exemple sur une friche industrielle et ferroviaire qui présente un bilan déficitaire. Nous sommes amenés à densifier, et cela a réellement un sens. Nous avons une gare, Eole arrive, nous renforçons les transports en commun, nous réimplantons des équipements publics. Nous sommes aussi confrontés à ce que les gens attendent en termes de mode de vie : le pavillonnaire.La pédagogie est donc nécessaire. Cela fait partie des ques-tions sur lesquelles il faut travailler tous ensemble, y compris avec l’État. Il faut faire évoluer la culture française, expliquer que le collectif peut être bien. Pourquoi ? Parce que l’école est en bas de chez soi, nous ne prenons pas notre voiture, les commerces sont à côté, les enfants font leurs activités à côté, etc.Un groupe de travail de réflexion sur la reconversion des friches est actuellement mené avec l’ADEME, l’EPF Bretagne et d’autres acteurs. Dans d’autres pays, l’Allemagne par exemple, des sites industriels ont été valorisés autrement. Il faut être inventif.

IL Y A UNE VISION URBAINE, URBANISTIQUE ET DE DÉVELOPPEMENT DURABLE QUI FAIT PARTIE MAINTENANT DE LA FAÇON DONT NOUS DEVONS PENSER LE DÉVELOPPEMENT DE LA VILLE.

UN HÔPITAL EN CENTRE-VILLE D’UNE VILLE MOYENNE DU CENTRE DE LA FRANCE NE PEUT PAS RESTER UNE FRICHE. D’UN POINT DE VUE URBAIN, DE SÉCURITÉ, C’EST INSOUTENABLE LA FOIS POUR LES ÉLUS ET POUR LES PROPRIÉTAIRES.

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L’ANAP, PARTENAIRE DE VOS PROJETS À VENIR _ 49

L’ANAP, PARTENAIRE DE VOS PROJETS À VENIR

LE CONTEXTE DES ÉTABLISSEMENTS DE SANTÉ EN 2015La part des produits de cession dans le financement des investissements a triplé dans les quatre dernières années. La moyenne nationale est passée de 2,1 % en 2012 à environ 6,2 % en 2015. L’AP-HP précisait que sa part d’autofinance-ment s’élevait entre 10 et 15 % de ses investissements.Il y a donc une exigence renforcée d’autofinancement des investissements pour les établissements de santé et les établissements sociaux et médico-sociaux.Les produits de cessions sur les deux dernières années repré-sentent, pour les établissements publics de santé, environ 180 millions d’euros par an en 2013 et 2014.Les cessions hospitalières se sont donc énormément ampli-fiées ces dernières années. Elles représentent une part très importante des cessions publiques au niveau national (pour rappel : 506 M € en 2014 pour l’État, incluant la défense).L’application de la loi Duflot sur la mobilisation des fonciers publics en faveur du logement social n’est pas simple. Il faut beaucoup de pédagogie pour expliquer aux collectivités que nous faisions déjà du logement social. Et que nous ne sommes pas obligés de passer par un cadre législatif pour produire du logement, et vendre nos fonciers à juste prix.

NOUVEL APPEL À CANDIDATURES 2015Nous avions lancé un premier appel à candidature en 2011 qui avait bénéficié aux établissements publics de santé. Nous allons en lancer un nouveau pour la période 2015-2018.Cet appel à candidature sera également étendu au secteur médico-social, public et privé non lucratif. C’est une vraie problématique à laquelle les établissements de ce secteur doivent faire face.Il y aura des critères d’éligibilité :• Délais d’exécution de l’opération : le site devra être libérable au plus tard fin 2018.• Stabilité des engagements institutionnels de l’établisse-ment :- Engagement de la direction sur la stabilité du schéma directeur immobilier en cours et mobilisation de l’ARS,

- Lettre de soutien du président du conseil de surveillance pour un établissement de santé, ou du conseil d’administra-tion d’un ESMS.

• Dimensions et complexité du site présenté :- Emprise foncière significative (valeur et/ou taille),- Complexité de la requalification urbaine,- Action de l’ANAP sur les opérations les plus complexes.

• Utilisation des produits de cession :- Utilisation pour de nouveaux investissements,- Contribution au retour à l’équilibre pour le secteur sanitaire.L’établissement doit être en possession des titres de propriété du site à céder.

MODALITÉS D’ACCOMPAGNEMENT DE L’ANAPConcernant les modalités d’accompagnement de l’ANAP, nous restons sur des conventionnements tripartites ANAP-ARS-établissement sanitaire ou médico-social.L’ANAP accompagnera l’établissement dans le pilotage du projet et des études de reconversion. Le financement de l’étude sera supporté par l’établissement.L’appui de l’ANAP se poursuivra jusqu’à la négociation. Soit la signature d’une vente, lorsque nous sommes en direct avec un EPF par exemple, soit jusqu’à la signature d’un protocole de cession.Nous avons réussi à créer un petit réseau de professionnels qui connaissent la technique de valorisation et d’accompa-gnement. Nous aurons quelques relais dans des établisse-ments. Nous faisons cela pour être au plus proche des acteurs et des établissements qui candidateront.

Anabelle Billy Manager responsable du programme immobilier à l’ANAP

SE RÉUNIR EST UN DÉBUT. CETTE JOURNÉE NATIONALE EST LA PREMIÈRE SUR CE SUJET DE VALORISATION. RESTER ENSEMBLE EST UN PROGRÈS. TRAVAILLER ENSEMBLE EST LA RÉUSSITE !Henry Ford

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Christian Anastasy, Directeur général de l’ANAP

Cette journée était une première. Nous avons de formidables mutations devant nous. Nous avons construit beaucoup d’hôpitaux, mais en même temps, nous avons fait beaucoup de progrès médicaux. Avec davantage de murs au moment où les séjours sont de plus en plus brefs, nous devrons changer nos façons de voir.Notre but est de changer la culture des acteurs, faire prendre conscience que l’immobilier est un facteur important au sein des établissements.Nous prenons les expériences les plus valorisantes, les plus fortes. Nous essayons de les faire connaître au plus grand nombre pour que le mouvement et la culture à l’égard de l’immobilier changent. L’ANAP organise donc un appui méthodologique et assure une aide technique aux établis-sements.Elle répond ainsi aux demandes de l’inspection générale des finances, l’inspection générale des affaires sociales et la Cour des comptes.Mais il ne faudrait pas que les hospitaliers se désintéressent de la partie « murs » de leurs établissements.Les plateaux techniques évoluent, les murs qui les abritent s’adaptent. C’est un immobilier qui n’est pas figé, il évolue, et se doit d’être adapté aux besoins des personnes. Nous sommes là pour aider à trouver les outils qui vont permettre aux hospitaliers de bien gérer cet enjeu considérable qu’est l’immobilier. L’évolution des progrès va bouleverser les murs.À l’ANAP, nous pensons qu’il vaut mieux que les acteurs hospitaliers, à leur échelle, continuent d’être maîtres de leur patrimoine. S’ils n’ont plus la maîtrise des murs, ils auront un peu moins la maîtrise de soigner. Il ne faut pas qu’il y ait de dissociation entre les murs et l’exploitant. Les deux doivent être menés de concert.

LES FACTEURS CLÉS DE RÉUSSITEPour réussir les différents acteurs, le directeur d’hôpital, le directeur de l’ARS et l’intervenant de l’ANAP doivent être parfaitement en ligne. S’ils sont d’accord sur les objectifs, dès lors, les opérations sont fructueuses.Nous avons optimisés de plus de 30 % les estimations initiales des opérations dès lors que les acteurs sanitaires étaient en phase.Nous avons un grand chantier devant nous. Il y a encore beaucoup de murs à apprécier au sens économique du terme. Il faut que nous soyons innovants dans ce domaine. Passer de la phase actuelle d’exploration à une plus grande échelle. Il y a en même temps, une phase d’innovation à imaginer dans ce domaine. Valoriser ce qui peut l’être, c’est tout le travail fait actuellement. Mais il faut aussi valoriser ce qui est difficile

à valoriser. Nous avons souvent tendance à oublier ce qui fait la valeur intrinsèque d’une entreprise. À l’hôpital c’est la même chose.Aux États-Unis, l’université John Hopkins est une marque. Gustave Roussy, en France, devient également une marque reconnue à l’échelle mondiale. Les enjeux de la santé sont d’ordres mondiaux. Le patrimoine immobilier constitue un des éléments de l’image de marque. C’est un élément imma-tériel qui est considérable.John Hopkins est aussi une valeur. Avoir une marque aussi forte, c’est comme l’image dans le milieu automobile, c’est une marque qui est une image très forte, au-delà de la qualité intrinsèque de leurs produits. Il faut être innovant, continuer de rechercher ce qu’il faut valoriser.D’une façon un peu générique, contribuer à ce que le patrimoine immobilier fasse partie intégrante de la vie des établissements. C’est le rôle des techniciens, ingénieurs, responsables des patrimoines de faire prendre conscience aux directions générales des établissements, aux pouvoirs publics, que l’immobilier est partie prenante de la vie d’un établissement de santé. L’ANAP apporte son aide pour cela.Merci aux participants et aux intervenants. Toutes vos interventions étaient intéressantes, riches, diversifiées et consolident la culture générale du milieu. Nous espérons qu’il y aura une seconde journée avec d’autres expériences à partager.

ALLOCUTION DE CLÔTURE

50 _ VALORISATIONS IMMOBILIÈRES : LES ACTES

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Conception et réalisation :

Efil - www.efil.frCrédit photos : ANAP

Imprimé par Corlet imprimeur sur du papier

PEFC

Équipe projetAnabelle Billy

Philippe CrépinDamien Poirot

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