L'encombrement bronchique et ses dangers chez la personne âgée

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Ann. Kinésithér., 1987, t. 14, n° 1-2, pp. 57-63 © Masson, Paris, 1987 L'encombrement bronchique et ses dangers chez la personne âgée D. CHARRAS (1), M. DURIN (2) NOTE DE TECHNIQUE (1) MCMK, Pavillon Shutzemberger, Service de médecine interne en Gériatrie, 83, rue Himmerich, Strasbourg 67015 Cedex. (2) MCMK, Services de chirurgie thoracique et de pneumo-phtisiologie CHU de Strasbourg, 1, place de l'Hôpital, 67000 Strasbourg. Introduction LA FONCTION RESPIRATOIRE CHEZ LA PERSONNE ÂGÉE (1) La fonction respiratoire est une fonction vitale. Elle assure l'apport d'oxygène et le rejet de gaz carbonique, indispensables au bon fonc- tionnement de tout l'organisme. Avec l'âge, l'appareil respiratoire perd en performance : la cage thoracique s'enraidit et perd sa mobilité, la colonne dorso-Iombaire évolue vers l'hyper-cyphose raide, la force des muscles respiratoires, en particulier le dia- phragme et les abdominaux, diminue, le vieillis- sement du parenchyme pulmonaire rend le poumon pseudo-emphysémateux (tendance à la collapsibilité des bronchioles), l'activité ciliaire, véritable «escalator bronchique», diminue avec l'âge, alors que les sécrétions bronchiques augmentent spontanément. Cette physiologie respiratoire sénescente a comme conséquence: une diminution du rap- port ventilation/perfusion, une facilitation de la stase des mucosités et de l'encombrement chez la personne âgée peu mobile. Tirés à part: D. CHARRAS, à j'adresse ci-dessus. L'IMMOBILITÉ ET L'ENCOMBREMENT Toutes pathologies aiguës, qu'elles soient médicales (pneumopathies, cardiopathies ...), neurologiques (hémiplégie, maladie de Parkin- son...), traumatologiques (fractures de .hanche, de côtes...), toutes interventions chirurgicales entraînent l'alitement de la personne âgée et exposent le malade à l'immobilité et à la grabatisation, avec comme conséquence, en particulier sur le plan respiratoire, l'encombre- ment bronchique. Cet encombrement bronchique diminue les possibilités d'échanges gazeux, affaiblit le ma- lade dont l'état général se dégrade, et expose la personne âgée à la surinfection bronchique, l'insuffisance respiratoire aiguë et la mort. LA PRÉVENTION DE L'ENCOMBREMENT BRONCHIQUE (6) La prévention de l'encombrement et le désen- combrement bronchique doivent être un souci thérapeutique constant et de tout premier ordre auprès de la personne âgée. Cette prise de conscience doit être collective : toute l'équipe soignante est concernée par ce problème au même titre que la prévention des escarres, des phlébites, des rétractions articulaires et mus- culaires par exemple.

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Ann. Kinésithér., 1987, t. 14, n° 1-2, pp. 57-63© Masson, Paris, 1987

L'encombrement bronchique et ses dangerschez la personne âgée

D. CHARRAS (1), M. DURIN (2)

NOTE DE TECHNIQUE

(1) MCMK, Pavillon Shutzemberger, Service de médecine interne en Gériatrie, 83, rue Himmerich, Strasbourg 67015 Cedex.(2) MCMK, Services de chirurgie thoracique et de pneumo-phtisiologie CHU de Strasbourg, 1, place de l'Hôpital, 67000 Strasbourg.

Introduction

LA FONCTION RESPIRATOIRE

CHEZ LA PERSONNE ÂGÉE (1)

La fonction respiratoire est une fonctionvitale. Elle assure l'apport d'oxygène et le rejetde gaz carbonique, indispensables au bon fonc­tionnement de tout l'organisme.

Avec l'âge, l'appareil respiratoire perd enperformance : la cage thoracique s'enraidit etperd sa mobilité, la colonne dorso-Iombaireévolue vers l'hyper-cyphose raide, la force desmuscles respiratoires, en particulier le dia­phragme et les abdominaux, diminue, le vieillis­sement du parenchyme pulmonaire rend lepoumon pseudo-emphysémateux (tendance à lacollapsibilité des bronchioles), l'activité ciliaire,véritable «escalator bronchique», diminueavec l'âge, alors que les sécrétions bronchiquesaugmentent spontanément.

Cette physiologie respiratoire sénescente acomme conséquence: une diminution du rap­port ventilation/perfusion, une facilitation de lastase des mucosités et de l'encombrement chezla personne âgée peu mobile.

Tirés à part: D. CHARRAS, à j'adresse ci-dessus.

L'IMMOBILITÉ ET L'ENCOMBREMENT

Toutes pathologies aiguës, qu'elles soientmédicales (pneumopathies, cardiopathies ...),neurologiques (hémiplégie, maladie de Parkin­son...), traumatologiques (fractures de .hanche,de côtes...), toutes interventions chirurgicalesentraînent l'alitement de la personne âgée etexposent le malade à l'immobilité et à lagrabatisation, avec comme conséquence, enparticulier sur le plan respiratoire, l'encombre­ment bronchique.

Cet encombrement bronchique diminue lespossibilités d'échanges gazeux, affaiblit le ma­lade dont l'état général se dégrade, et expose lapersonne âgée à la surinfection bronchique,l'insuffisance respiratoire aiguë et la mort.

LA PRÉVENTION DE L'ENCOMBREMENTBRONCHIQUE (6)

La prévention de l'encombrement et le désen­combrement bronchique doivent être un soucithérapeutique constant et de tout premier ordreauprès de la personne âgée. Cette prise deconscience doit être collective : toute l'équipesoignante est concernée par ce problème aumême titre que la prévention des escarres, desphlébites, des rétractions articulaires et mus­culaires par exemple.

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Les palliatifs de l'encombrement bronchiquechez la personne âgée

LES TECHNIQUES ACTIVES

Les activités fonctionnelles et le maintien del'autonomie

Le moyen préventif le plus efficace contrel'encombrement bronchique de la personne âgée,et qui nécessite la participation de toute l'équipesoignante, est l'entretien, voire la récupérationde l'autonomie. Tous les mouvements fonction­nels nécessaires aux activités de la vie quoti­dienne sont autant de moyens de stimuler toutesles grandes fonctions vitales de l'organisme eten particulier la fonction respiratoire. L'aug­mentation du rythme respiratoire secondaire àl'effort de la marche, du déplacement en fauteuilroulant, du transfert du lit au fauteuil, de latoilette, de l'habillage, etc. entraîne une meil­leure ventilation et assure une parfaite « toilettebronchique ».

A chacun des soignants de se donner tous lesmoyens pour maintenir le niveau d'autonomieoptimal du malade (aides àla marche, aménage­ment des locaux, mains courantes, fauteuilroulant adapté et utilisé sans excès etc.),d'appliquer d'une façon personnalisée les techni­ques de manutention des malades afin que lorsdes changements de position, lors "de chaquetransfert (sortir du lit pour aller au fauteuil parexemple), le malade participe activement etefficacement.

Enfin, à chacun d'user de tous les moyenspour « mobiliser» la personne âgée dans unsens plus global, psychomoteur, en développantdes activités dites d'animation (ex. : activitésgymniques de groupe).

Le drainage actif

1. La ventilation dirigée.

- Définition : la ventilation dirigée est unerespiration ab domino-diaphragmatique à fré­quence lente et à grand volume courant.

- Intérêt : la ventilation dirigée optimise laventilation dans les bronches et les alvéoles et

assure ainsi un parfait drainage bronchique actif.

- Modalités d'application: le malade est assissur une chaise, ou demi-assis dans son lit. On luidemande une respiration profonde, lente, sansforcer et sans brusquerie, tant lors de l'expirationque lors de l'inspiration. On sollicite tout d'abordl'expiration: elle est réalisée « lèvres serrées» ;cette résistance au flux expiratoire permet d'évitertoute collapsibilité bronchique. A cette fin, desmoyens suggestifs sont exploités :- souffler sur une bougie (en progression : fairevarier la distance bouche-bougie); faire desbulles dans une bouteille d'eau à l'aide d'untuyau (calibrer 112 cm) ;- souffler sur une balle de ping-pong et la fairese déplacer sur une table; souffler sur un ballonde baudruche suspendu par lJ.n fil à hauteur dela bouche, etc.L'expiration active et profonde se fait enrentrant le ventre. Il ne faut jamais insister surl'inspiration. Si le malade apprend à bien expirer,l'inspiration suivra automatiquement et se feraen toute détente.

En tout cas, on ne commence jamais parl'inspiration. Car l'inspiration forcée bien souvent ­bloque Je malade, et déclenche des mouvementsrespiratoires anarchiques, incoordonnés (respira­tion paradoxale) ; le malade ne respire plus alorsd'une façon efficace et s'essoufte rapidement.

Cette séance de ventilation dirigée dureenviron 20 minutes et s'accompagne générale­ment d'exercices de toux et d'expectorationcontrôlée.

L'expiration active peut être aidée par despressions manuelles sur l'abdomen en cas demauvaise participation de la personne âgée. Lesoignant, face au malade, met ses mains à platà hauteur de l'ombilic. Lorsque le malade expire,le soignant amplifie la rentrée de l'abdomen, parune pression lente, progressive et non doulou­reuse. Cette pression manuelle est orientée versle haut, ce qui favorise la remontée du dia­phragme; elle a deux effets :

- améliorer la prise de conscience du mouve­ment en difficulté de compréhension chez unmalade âgé,

- améliorer la course diaphragmatique et dece fait la ventilation alvéolaire chez le malade

âgé présentant une insuffisance de force de lasangle abdominale.

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2. Savoir tousser

La toux est nécessaire à l'expectoration desmucosités accumulées dans les bronches. Cepen­dant, la toux est très coûteuse sur le planénergétique et fatiguante pour le cœur de lapersonne âgée. Aussi la toux doit-elle êtred'emblée productive, et faudra-t-il éviter lesquintes de toux.

Deux types de toux sont utilisés pour l'expec­toration des mucosités : la toux physiologiqueet la toux à glotte ouverte.

- La toux physiologique :

Définition : la toux physiologique est la touxspontanée que tout le monde a déjà expérimen­tée. Elle est déclenchée par un réflexe de toux.Les zones tussigènes se situent au niveau de latrachée et des gros troncs bronchiques. Aussiles mucosités doivent-elles être drainées jusquedans ces régions pour déclencher le réflexe detoux.

Description: cette toux se décompose en troistemps :

1. inspiration maximale2. fermeture de la glotte3. ouverture de la glotte et chasse brutale de

l'air comprimé dans les poumons. Cette augmen­tation brutale du débit de l'air entraîne lesmucosités dans le phraynx, puis dans la boucheet c'est l'expectoration.

- La toux à glotte ouverte (5) :

Définition: c'est une toux dirigée, permettantla mobilité des sécrétions dans les petitesbronches qui elles, n'ont pas de. zones tussi­gènes; il ne peut donc pas y avoir de réflexede toux. L'avantage de cette technique est ledrainage des mucosités en profondeur quientraîne une accélération de la remontée dessécrétions jusque dans les zones à grossesbronches où le réflexe de toux physiologiqueprend le relais.

Description: La toux à glotte ouverte consisteà souffler, la bouche ouverte, «comme pourfaire de la buée sur une vitre ou un miroir ».Cette expiration est rapide, soudaine etbruyante. Elle nécessite une vive contraction desabdominaux, entraînant une remontée soudaine

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du diaphragme et, par conséquent, une chassebrutale de l'air.

Certaines personnes âgées, peu énergiques,doivent bénéficier de l'aide du soignant, quiamplifie le mouvement par une pression bima­nuelle au niveau de l'abdomen. Cette pressionest brève, mais relativement importante sanspour autant être agressive et douloureuse.

En général, l'aérosol est associé à ces exercicesde toilette bronchique. L'expectoration, parailleurs, peut être facilitée par l'absorption deboisson chaude (tisane).

L'amélioration de la cinétique abdomino­diaphragmatique. Le renforcement des musclesabdominaux et diaphragme.

Le thorax de la personne âgée étant particuliè­rement rigide, la mobilité costale par conséquentpeu efficace, seule la respiration abdomino­diaphragmatique assure une ventilation exploi­table et rentable. Améliorer la ventilatioI;lpulmonaire, dans un but de prévention del'encombrement bronchique, signifie donc amé­liorer la cinétique abdomino-diaphragmatique.

Cette incitation respiratoire se~faitsur le modede la ventilation dirigée. On commence par laprise de conscience de la respiration abdomino­diaphragmatique : lorsque l'on souffle, «onrentre le ventre », lorsque l'on inspire «ongonfle le ventre ». Il est important d'insister surla phase expiratoire: pour cela le malade appuiesur son ventre à l'aide de ses deux mains, oupar l'intermédiaire d'un ballon que « l'on veutdégonfler en l'appuyant sur son ventre et enfaisant Pschuuuuuu ... ! » La phase inspiratoirese fait en détente. En progression l'exercice sefera sans l'aide des mains ou du ballon.

Outre la meilleure coordination abdomino­diaphragmatique, ce travail répétitif améliore letonus de la sangle abdominale.

Le renforcement des muscles du tronc et desabdominaux en particulier se fait par desexercices gymniques durant la séance de gym­nastique de groupe (voir rubrique: Conservationde l'autonomie).

On doit également s'intéresser à un travailplus spécifique du diaphragme dont la forcediminuée est à améliorer. On peut utiliser un

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FIG. 1. - Exercice de renforcement du diaphragme à l'aide del'appareil «Inspiron ». (Réf Laboratoire Bard et cie, 94250Gentilly).

appareil incitatif de type « inspiron» (fig. 1)ou un travail contre résistance manuelle lors del'inspiration, intégré dans le programme degymnastique de groupe.

Une détente corporelle peut précéder la prisede conscience de la respiration abdomino­diaphragmatique. Elle a comme intérêt deralentir le rythme respiratoire, d'atténuer letirage susternal en relâchant les muscles du cou;la respiration thoracique, très coûteuse sur leplan énergétique et peu efficace, sur le planrespiratoire, diminue, voire disparaît alors auprofit d'une respiration abdominale, lente, pro­fonde et efficace.

Le patient accepte tout d'abord de fermer lesyeux. La relaxation intéresse alors les musclesdu visage : elle sera suggérée en terme de« largeur de front, de mâchoire détendue, debouche qui s'entrouvre ... ».

Puis on détend les épaules, les bras, avant­bras, mains, doigts : la suggestion de sensationde lourdeur des membres, de chaleur dans lesdoigts, etc. facilite la décontraction.

On continue par la détente de la nuque, dudos. Un massage lent et progressif de la nuqueaccentue les effets de la relaxation.

Enfin, le soignant suggère la détente du thoraxet de l'abdomen. La poitrine ne se soulève pluset l'abdomen retrouve son mouvement spon­tané : «le ventre se gonfle et se dégonfle,lentement, profondément».

Cette technique nécessite la participationbienveillante du patient. Son application difficile

et délicate exige un apprentissage sérieux dusoignant.

2. LES TECHNIQUES PASSIVES

L'encombrement et le positionnement

L'alitement prolongé de la personne âgée(quelques deux jours suffisent quelques fois)entraîne des complications de décubitus bienconnues de tous les soignants, et désastreusespour l'état général du patient.

Sur le plan respiratoire en particulier, laposition horizontale prolongée entraîne unehypoventilation des bases pulmonaires par laremontée du diaphragme. Il en résulte uneaugmentation de la sécrétion bronchique et unestagnation des mucosités : il y a encombrementbronchique des bases pulmonaires. Or cesdernières assurent environ 60 % de la ventilationpulmonaire totale. Prévenir l'encombrement decette zone pulmonaire est donc impératif.

Aussi, le malade âgé sera-t-il installé enposition demi-assise dans le lit, avec un parfaitagencement des oreillers pour le bon soutien dutronc et son confort. De plus, Ja mise au fauteuilprécoce s'impose. Les malades grabataires ou àmobilité réduite sont installés au fauteuil tousles jours matin et après-midi. La durée de laposition assise est fonction de la fatigabilité dupatient.

Par ailleurs, le changement de position régu­lier sollicite d'une façon optimale tous lesterritoires pulmonaires et par conséquent aug­mente le rapport ventilation/perfusion. Le chan­gement de position est donc une techniqueintéressante de prévention et de traitement del'encombrement bronchique. Pour les maladesdont les conditions de santé ne permettent pasune verticalisation précoce, ou limitent la duréede séjour au fauteuil, les changements deposition réguliers (toutes les heures si fortencombrement, toutes les 2-3 heures en préven­tion pour les autres) s'imposent. Du décubitusdorsal (demi-assis), le patient passera en positionde décubitus latéral droit puis gauche (6).

Les manœuvres de massage

- Le clapping : il a un effet de décollementdes sécrétions bronchiques dans les grosses

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bronches, ce qui provoque un réflexe de toux.- Les vibrations et les ébranlements : ils ont

un effet tyxotropique sur les mucosités. Lesmucosités, alors plus liquides, sont plus facile­ment drainées.

- Indications : les manœuvres de massages'associent à toutes les techniques de drainageactif ou passif. Elles sont de la compétence dumasseur-kinésithérapeute.

LES ADJ UV ANTS

L'hydratation. L'humidification

1. Hydratation par voie générale.Il est important de faire boire le malade. Cette

consigne est bien connue de tous les soignantstravaillant en milieu gériatrique. L'hydratation,en effet, maintient l'homéostasie de la personneâgée. Chez le malade encombré sur le planrespiratoire elle permettra la diminution de laviscosité des sécrétions, leur meilleure mobilitéet donc un meilleur drainage.

L'absorption d'environ 3 litres d'eau par24 heures s'impose.

2. - L'hydratation par voie locale: l'aérosol (4).- Définition : L'aérosol est une suspension

dans un milieu gazeux (air ou oxygène + air)de particules solides ou liquides inférieures à10 f.L.

- Indications: il se justifie comme thérapeuti­que d'appoint chez le sujet âgé encombré,essentiellement pour l'hydratation locale dessécrétions bronchiques trop visqueuses et peumobiles. Plus fluides, ces mucosités seront mieuxdrainées et mieux expectorées.

Le serum physiologique et l'eau distillée sontde parfaits humidificateurs. Ils peuvent êtreassociés ou non à des médicaments (expecto­rants, fluidifiants, antibiotiques, bronchodilata­teurs ...). Le médicament sera prescrit par lemédecin en fonction de la pathologie respiratoireet de la qualité des mucosités.

- Appareillage : les moyens de productiond'aérosols sont essentiellement la pulvérisationgazeuse sous pression et la pulvérisation parultra-son.

La pulvérisation gazeuse sous pression par airou par oxygène (à l'hôpital : arrivée muraled'oxygène, pression: 3 à 6 Vmn) :

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FIG. 2. - Ventilation dirigée avec aérosol.

C'est le moyen le plus souvent mis à ladisposition du soignant dans les milieux hospi­taliers.

La pulvérisation par ultra-sons:L'appareillage est fragile et onéreux; cepen­

dant il est plus efficace. En effet, le diamètre desparticules émises de l à 5 f.L permet une bonnepénétration des gouttelettes d'aérosol dans lesvoies aériennes jusqu'aux bronchioles. Alors quela pulvérisation gazeuse par pression produit desgouttelettes de 8 à 10 f.L de diamètre, nepermettant pas une aussi bonne pénétration dansles voies aériennes Gusqu'aux grosses bronchesseulement).

- Modalités d'application : l'application del'aérosol chez la personne âgée se fera parmasque, car plus commode et plus efficace. Lepatient, en position assise, exécutera durant sonaérosol une ventilation dirigée : la respirationsera profonde et lente pour une meilleurepénétration du produit. La séance dure 10 à15 minutes; elle est suivie par la séance dedrainage (fig. 2 et 3J.

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FIG. 3. - Ventilation dirigée avec aérosol chez une patientetrachéotomisée.

Attention! Une fluidification excessive des

sécrétions bronchiques peut rendre inefficace ledrainage actif. Il y a alors aggravation del'encombrement avec véritable noyade broncho­alvéolaire ..

3. - Humidification: chez les malades trachéo­tomisés ou respirant par la bouche, une parfaitehumidification de l'air ambiant s'impose. Pourcela, on veille à ce que la pièce ne soit passurchauffée, et à ce qu'il y ait de l'eau dansl'humidificateur du chauffage central. Puis oninstalle un humidificateur à vapeur d'eau chaudetype « Petit Pierre ». Ce dernier est installé àdemeure chez le malade trachéotomisé (fig. 4).

L'aspiration (2)

On distingue l'aspiration buccopharyngée ourhinopharyngée et l'aspiration trachéale.

- L'aspiration buccopharyngée ou rhinopha­ryngée :

Elle est utilisée lorsque j'expectoration sponta­née ne peut être obtenue généralement par

FIG, 4. - Installation d'un humidificateur type « Petit Pierre»chez une patiente trachéotomisée.

manque de coopération du malade. Ces aspira­tions se font à distance des repas selon des règlesd'asepsie. Strictes. leur application est réservéeaux médecins, infirmières, kinésithérapeutes ..

- L'aspiration trachéale :Elle est indiquée pour le malade présentant

. un encombrement important, qu'il est incapabled'éliminer par la toux. Cette technique estagrressive, mais déclenche souvent la toux et ledésencombrement rapide du malade qui se noiedans ses sécrétions.

Cet acte particulièrement délicat (risque d'ar­rêt cardio-respiratoire réflexe) est exécuté parle médecin ou sous surveillance.

La personne âgée trachéotomisée bénéficieraégalement d'aspirations trachéales.

Remarque: les règles d'asepsie doivent êtreappliquées sans relâche : gants stériles, sondesà usage unique, prise de la sonde avec 'pincestérile (trempée dans de l'alcool).

III. Choix des techniques de désencombrement

LES TECHNIQUES ACTIVES

Elles sont appliquées en prévention et entraitement, chez les personnes âgées conscienteset coopérantes. Ces techniques seront adaptéesen fonction du niveau d'autonomie fonctionnelle

du malade, de son état cardiaque, de son seuilde fatigabilité et de son temps de récupération.

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LES TECHNIQUES PASSIVES

Elles sont appliquées chez les personnes âgéesprésentant une fatigabilité extrême à l'effort,interdisant toute participation active (ex :personne âgée atteinte d'un infarctus ...); maisaussi lorsque le malade est confus, opposition­niste, voire inconscient.

LES TECHNIQUES ACTIVES, PASSIVESET LES ADJUVANTS ASSOCIÉS

Bien souvent, il y a association de techniques.Ex. 1 : un drainage actif est d'autant plus

productif que les sécrétions sont préalablementhumidifiées par un aérosol.

Ex. 2 : une aspiration trachéale est danscertains cas· plus efficace si elle a été précédéepar un aérosol.

Ex. 3 : l'association de l'aérosol et de lamarche comme technique active de mobilisationdes sécrétions favorise efficacement l'expectora­tion.

Ex. 4: une technique passive, d'aspiration parexemple, doit céder la place à des techniquesde drainage actif au fur et à mesure de larécupération fonctionnelle du malade, de l'amé­lioration de son niveau de conscience et de saparticipation.

Ex. 5 : les exercices respiratoires initiésindividuellement doivent être repris dans desactivités de groupe d'animation gymnique.L'émulation et la dynamisation du groupe sontparticulièrement bénéfiques chez ces personnesâgées bien souvent angoissées et déprimées.

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Conclusion

La perte de mobilité et la grabatisationexposent le malade à des risques de complica­tions pouvant mettre en question le pronosticvital de la personne âgée. L'encombrement estune complication qu'il faut traiter en priorité,sans pour cela négliger les autres actionspréventives qu'elles soient cutanées, ostéoarti­culaires, circulatoires, etc.

L'efficacité d'une telle prévention ne peut seconcevoir sans l'intervention de chacun desmembres de l'équipe soignante.

La bonne connaissance du malade âgé, biensouvent difficile d'accès, car dépressif, fatigable,quelquefois oppositionniste, et la parfaite maî­trise des techniques palliatives de l'encombre-

. ment permettront d'assurer un bon choix théra­peutique et contribueront au meilleur confort devie de la personne âgée.

Références

1. BOURLIÈRE F. - Gérontologie Biologie et Clinique. Flam­marion Médecine, Paris, 1982.

2. BRIEN J.C. - La kinésithérapie respiratoire. Revue del'infirmière, II, 64-70, 1983.

3. CLAVE M. - La toux. Revue de l'infirmière, 5,39-45, 1984.4. DUBREUIL C., PUJET J.C. - Drainage et aérosol. Revue de

l'infirmière, 13, 57-63, 1982.5. LALIBERTE R., COUNE A., VERGARA P., GIMENEZ M. - Le

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7. VANDEVEUNE A. - Rééducation respiratoire des broncho­pneumopathies chroniques obstructives. A compte d'auteur.Imprimerie Valblor de Strasbourg, 1985.