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La Nativité selon Alain Thomas © B. Ferry Le tableau de la Nativité Par Alain Thomas

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La Nativité selon Alain Thomas

© B. Ferry

Le tableau de la Nativité

Par Alain Thomas

La Nativité selon Alain Thomas

© B. Ferry

« Comment pourrais-je comprendre s’il n’y a personne pour m’expliquer ? » Acte 8 (31)

ette phrase adressée dans les actes des apôtres par un eunuque à Philippe n’a

rien perdu de son actualité ! Depuis une quarantaine d’années, les pannes de transmission institutionnelles et familiales dont fait l’objet le christianisme, ont délesté le plus grand nombre d’un patrimoine culturel vieux de 2000 ans ! En effet, pour reconnaître une Annonciation, une Nativité, pour visiter des catacombes, parcourir Rome ou les

couloirs du Prado …il faut un minimum de culture chrétienne. Jusqu’à une époque récente, les représentations de scènes tirées de la Bible étaient immédiatement comprises par tous. Les sujets qu’elles évoquaient faisaient partie de la culture commune ! Or, cette culture a disparu, même dans les milieux chrétiens. Le fait est là, enregistré par les enseignants, les médias, l’Education nationale, les conservateurs de musée….

Dans ce contexte, doit-on faire l’impasse sur deux mille ans de civilisation européenne ?

omme cela est souligné dans le rapport Debray, la question ne porte

pas seulement sur la religion. Ignorer la culture religieuse, « c’est la menace de plus en plus sensible d’une déshérence collective, d’une rupture des chaînons de la mémoire nationale et européenne où le maillon manquant de l’information religieuse rend strictement incompré-hensible voire, sans intérêt, les tympans de la cathédrale de Chartres, la crucifixion du Tintoret... ou encore la Semaine Sainte d’Aragon ». Or, une société qui ne connaît pas ou plus sa culture a toutes les chances d’ignorer ou de dédaigner celle des autres. Une telle société ouvre la porte au commu-nautarisme, à l’intolérance, au rejet de l’autre, à la perte d’identité. A une époque où la mondialisation s’impose, où il importe plus que jamais d’avoir la curiosité de l’autre… il est certainement plus qu’urgent de nous réapproprier notre propre histoire. A une époque aussi, où le christianisme ne s’impose plus et où les évêques nous demandent d’être « inventifs » ! il nous a semblé opportun de saisir la rétrospective consacrée au peintre Alain Thomas par la

ville de Nantes et dans laquelle figure le tableau de « la Nativité » offert à la cathédrale Saint Pierre par le peintre lui-même, pour répondre à cette question de l’eunuque à Philippe : « Comment pourrais-je comprendre, s’il n’y a personne pour m’expliquer ? » Cette démarche ne cherche pas à convertir, sermonner, séduire, impressionner… Elle ne cherche pas non plus à détailler, approuver, critiquer ou remettre en cause l’œuvre elle même ou les techniques picturales utilisées par le peintre. Elle cherche simplement à instruire et donner une grille de lecture qui ouvre au visiteur les portes de la compréhension, lui donne les moyens d’identifier le sujet de l’œuvre et d’en comprendre la portée et lui permette également d’accéder à une certaine profondeur de sens qui puisse élargir son champ de perception. Elle a puisé sa source dans un travail mené avec des jeunes confrontés à cette panne de transmission. La richesse de leur questionnement a été pour nous un véritable trésor.

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Voici quelques unes de leurs réflexions : « Jésus attire tout le monde, tous les univers, tous les peuples. Le peuple des animaux sauvages ne ravage pas le village : un ourson et sa mère se laissent caresser par une personne. On dirait que l’amitié et la fraternité peuvent exister entre deux univers très différents, celui des hommes et celui des bêtes sauvages. » Coline « Ce tableau est vif et plein de couleurs, il est magnifique, on voit que ce peintre a passé du temps à le faire. Les personnages sont très vivants. Ce tableau est très beau ! » Sarah « Ce tableau représente un village en plein hiver. C’est très joyeux ! Cela ressemble à Noël… Guillaume « C’est Noël, c’est la nuit. Le ciel est foncé avec des étoiles ! Non, des oiseaux ! Il y a un étang ! Non, une prairie ! On ne voit pas la même chose de près et de loin… De près, c’est un étang gelé avec des patineurs… Mais, à cette époque, il n’y avait pas de patins à glace ! Ça n’existait pas ! A quelle époque est-on ? Les gens ne sont pas habillés comme à l’époque du Christ ! Ça se passe en Russie !.... mais non, il y a des dromadaires … Ce sont les rois mages… Il y en a cinq. Représentent-ils les cinq continents ? » Kilian

« C’est symétrique, un chemin de chaque côté ! Mais…cet homme, ce Jésus, vous êtes sûre madame qu’il est vraiment né ? A-t-on des preuves ? … C’est marrant, il y a beaucoup de gens qui viennent le voir. Ils sont mis en valeur ! Par contre, ceux qui ne viennent pas (les patineurs) ils sont tout petits ! » Mélanie « Marie est en tenue rafraîchie !... » Ludivine «Les personnages du centre viennent du village, les villageois ont des vêtements sombres… Les gens de chaque côté du tableau ont des vêtements plus colorés ; on pourrait penser qu’ils viennent de loin ! » François Régis « Je trouve que sur ce tableau tout le monde a l’air heureux… » Julie « Quand je vois ce tableau, je pense à la naissance de Jésus car, il y a une crèche avec un enfant dans une mangeoire et il y a un détail intéressant… une étoile qui se voit plus que les autres. Je pense que c’est l’étoile du berger. Je trouve que les arbres en blanc donne une touche de modernité. » Jonas « Dans ce tableau, on est en hiver… Jésus symbolise la clarté vu que le peintre a peint la scène comme en plein jour alors qu’on voit par rapport au ciel qu’il fait nuit ! » Marvin

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eaucoup d’artistes se sont inspirés des textes de la Nativité. Peintres,

sculpteurs, maîtres verriers ont mis leur art au service des premiers chapitres de Matthieu et de Luc. Ils ont illustré les versets des Evangiles en les interprétant, en se laissant influencer par leur époque, par leur sensibilité personnelle et pour un grand nombre d’entre eux par leur foi.

Nous voici devant une Nativité réalisée par le peintre Alain Thomas. Elle a été dévoilée la nuit de Noël 2004 dans la cathédrale Saint Pierre de Nantes par Monseigneur Soubrier, évêque de Nantes. Cette peinture constitue la plus grande œuvre de l’artiste : 3,5m². Commencée en 2003, elle lui a demandé un an de travail.

Triptyque de la Nativité – Alain Thomas

Cette Nativité aux couleurs éclatantes se situe dans un monde intemporel traité dans l’esprit des Flamands. Elle a la forme d’un triptyque, c'est-à-dire d’un tableau à trois volets, clin d’oeil à un Dieu trinitaire (Dieu Père, Fils et Esprit). Par sa sensibilité artistique, Alain Thomas a voulu « restituer un climat de paix et de sérénité » qui entoure le message de Noël.

Nous le voyons, au XXI° siècle, les textes parlent encore ! Mais, avant d’entrer dans une analyse plus affinée de l’œuvre, il nous a semblé opportun de les relire.

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La naissance de Jésus à Bethléem est racontée par l’Evangéliste Luc au chapitre 2 versets 1 à 14. L’Evangile de Luc est l’un des quatre Evangiles que l’on trouve dans la partie de la Bible nommée Nouveau Testament. En ces jours-là, parut un édit de l’empereur Auguste, ordonnant de recenser toute la terre – ce premier recensement eut lieu lorsque Quirinius était gouverneur de Syrie. Et chacun allait se faire inscrire dans sa ville d’origine. Joseph, lui aussi, quitta la ville de Nazareth en Galilée, pour monter en Judée, à la ville de David appelée Bethléem, car il était de la maison et de la descendance de David. Il venait se faire inscrire avec Marie, son épouse, qui était enceinte. Or, pendant qu’ils étaient là, arrivèrent les jours où elle devait enfanter. Et elle mit au monde son fils premier-né ; elle l’emmaillota et le coucha dans une mangeoire, car il n’y avait pas de place pour eux dans la salle commune.

Dans les environs se trouvaient des bergers qui passaient la nuit dans les champs pour garder leurs troupeaux. L’ange du Seigneur s’approcha, et la gloire du Seigneur les enveloppa de sa lumière. Ils furent saisis d’une grande crainte, mais l’ange leur dit : « Ne craignez pas, car voici que je viens vous annoncer une bonne nouvelle, une grande joie pour tout le peuple : aujourd’hui vous est né un sauveur dans la ville de David. Il est le Messie, le Seigneur. Et voilà le signe qui vous est donné : vous trouverez un nouveau né emmailloté et couché dans une mangeoire. » Et soudain, il y eut avec l’ange une troupe céleste innombrable, qui louait Dieu en disant : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes qu’il aime. »

La visite des mages est racontée par l’Evangéliste Matthieu au chapitre 2, versets 1 à 12. Des mages qui venaient d’Orient arrivèrent à Jérusalem et demandèrent : « Où est le roi des juifs qui vient de naître ? Nous avons vu son étoile se lever à l’Est et nous sommes venus nous prosterner devant lui. » Quand il apprit la nouvelle, le roi Hérode fut très inquiet et toute la ville de Jérusalem avec lui. Il réunit tous les chefs des prêtres et tous les maîtres de la loi pour leur demander à quel endroit devait naître le Messie. Ils lui répondirent : « A Bethléem en Judée. »……

Et voilà que l’étoile qu’ils avaient vu se lever à l’est les guidait : elle vint s’arrêter au dessus de l’endroit où se trouvait l’enfant. Quand ils regardèrent l’étoile, ils furent remplis d’une grande joie. Ils entrèrent dans la maison, et ils virent l’enfant avec Marie sa mère. Tombant à genoux, ils se prosternèrent devant lui, ils ouvrirent leurs coffrets, ils lui offrirent leurs présents : de l’or, de l’encens et de la myrrhe. Mais ensuite, avertis dans un rêve de ne pas retourner chez Hérode, ils retournèrent dans leur pays par un autre chemin. »

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es textes font partie des Evangiles de l’enfance et appartiennent à un genre

littéraire particulier. Ils ont été rédigés tardivement, bien après les autres parties de ces Evangiles, à la lumière de la résurrection du Christ. Ils ont pour fonction de parler des origines de ce Jésus dont l’identité va être progressivement révélée dans les pages suivantes. Ils sont avant tout des témoignages de Foi des premières communautés chrétiennes qui ont voulu mettre en relief la signification de la naissance du Christ pour le salut de TOUS les hommes. Ces textes ne sont pas du genre historique mais sont de magnifiques enseignements. Luc dans son texte met en scène Marie, Joseph, l’enfant Jésus et les bergers. Il nous donne des indications sur le lieu de la naissance. Joseph, en allant se faire recenser, se plie à la discipline romaine, il obéit à la loi. Il quitte donc Nazareth où il exerce le métier de charpentier et s’en va avec Marie qui était enceinte, vers la ville où est né son ancêtre le roi David, la ville de Bethléem. « Or, pendant qu’ils étaient là, arrivèrent les jours où elle devait enfanter. Et elle mit au monde son fils premier-né ; elle l’emmaillota et le coucha dans une mangeoire, car il n’y avait pas de place pour eux dans la salle commune. » La description est sommaire… il n’y avait pas de place pour eux dans la salle commune et l’enfant emmailloté fut installé dans une mangeoire.

La Palestine au temps de Jésus

L’étable

a scène se déroule donc dans un abri naturel ou une construction

rudimentaire, le plus souvent une étable, les textes mentionnant une « crèche » (le mot signifiant une simple mangeoire pour animaux). Mais, le texte de Matthieu évoque aussi une maison ! Peu importe ! Grotte, étable, maison, ruine, simple auvent ouvert en plein air dans la campagne ou parfois dans un village, le lieu de la naissance et de l’adoration varie selon la fantaisie du peintre.

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La Nativité selon Alain Thomas

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Alain Thomas a dessiné une étable aux portes d’un village. C’est par cette étable qu’il a commencé sa toile. Elle est simple et recouverte d’un toit de paille contrastant avec les toits des habitations environnantes. Nous voici au cœur d’une nuit extrêmement lumineuse et joyeuse ! L’étable, bien que décentrée, attire le regard.

Joseph, Marie et l’enfant y ont pris place comme cela est mentionné dans le texte. Marie est représentée très simplement. Habillée d’une robe bleue ciel voici une jeune femme dépouillée tendant les mains vers cet enfant qu’elle semble offrir au monde. Son attitude symbolise sa confiance en Dieu, un abandon total. Marie est la seule sur ce tableau à avoir les mains nues ! … Don total ! L’enfant ne ressemble pas à un nouveau né ! Il tend les mains (protégées du froid par des moufles) et relève la tête manifestant de l’intérêt pour ses visiteurs dans un véritable geste d’accueil. Comme cela est mentionné dans le texte il est posé dans une mangeoire… mais, à sa taille ! Une discrète auréole marque sa divinité. La paille sur laquelle il repose symbolise la lumière qu’il porte au monde.

Joseph est l’homme de l’ombre. Barbu, comme dans beaucoup de représentations, il se confond avec le fond de l’étable laissant une place centrale à la mère et l’enfant.

Les animaux

avait-il un âne ? Y avait-il un bœuf ? L’Evangile ne le dit pas. C’est

Origène au IV° siècle qui, semble-t-il parle le premier du bœuf et de l’âne. La tradition concernant les deux animaux prend appui sur deux textes bibliques : Habaquq 3(2) (dans la traduction grecque) et Isaïe 1 (3) : « Un bœuf connaît son propriétaire et un âne la mangeoire de son maître. Israël ne me connaît pas, mon peuple ne comprend pas. »

Dans la plupart des Nativités, l’âne et le bœuf sont présents comme ici au fond de l’étable à gauche. Dans la première partie de son texte, Luc, dans un langage sobre, décrit la naissance de Jésus et en précise les circonstances. Dans la deuxième partie que l’on peut appeler « l’annonce aux bergers », il donne le sens de cette naissance : des hommes, méprisés dans la société juive parce qu’ils exerçaient un métier mal considéré, des hommes qu’on accusait d’être des voleurs, sont les premiers destinataires de l’annonce de cette naissance.

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Si Luc destine cette première annonce de la nativité à ces bergers, c’est simplement pour signifier que la Bonne Nouvelle de Jésus est destinée à tous les hommes y compris à ceux qui ne sont pas reconnus ou que la société juive méprise. Les bergers dans cette nativité sont bien au premier plan, premiers témoins de cette naissance ! Ils sont au centre du triptyque. Leurs chiens et leurs moutons les accompagnent. Les bergers et leurs moutons nous rappellent aussi l’origine du peuple de Dieu issu d’un peuple de nomade gardien de troupeau. Le roi David fut d’abord un simple berger.

Qui sont les anges ?

uand les auteurs de la Bible veulent annoncer quelque chose de la part de

Dieu, ils font intervenir des anges, des messagers de Dieu. Très souvent, on les représente comme des personnages ailés qui vont et viennent entre le ciel et la terre. Les anges sont une représentation merveilleuse qui exprime un évènement difficile à décrire avec des mots ordinaires : Dieu parle aux hommes. Dans le tableau d’Alain Thomas, ils ne volent pas ! Les voici tout simplement installés derrière la fenêtre de droite au fond de l’étable, toutes ailes repliées, admirant l’enfant et chantant ! Un blond, un roux, un brun ! Voici les personnages cités dans le texte de Luc en place, Marie, Joseph, Jésus, les anges et les bergers sont tous représentés dans le panneau central du triptyque.

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Le peintre a élargi cette première annonce à d’autres personnages, comme un montreur d’ours et quelques villageois. Les espèces animales chères à l’auteur cohabitent de façon totalement irréelle, un toucan et un raton laveur, des lapins et un renard… Le climat est à la paix et la sérénité. Un singe trône sur le toit de l’étable et un oiseau juste au dessus de l’enfant, peut être symbole de paix ?

Au cœur de ce triptyque, la nuit de Bethléem résonne d’une merveilleuse annonce : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur la terre aux hommes qu’il aime !» Paix aux hommes parce que Dieu les aime, voilà une bonne, une grande nouvelle qu’annonce les anges aux bergers et l’on comprend que les armées célestes chantent la gloire de Dieu. L’atmosphère est à la paix, l’affection, la sérénité. Toute la création semble se réjouir, toute la création vit en paix. Si Luc décrit l’adoration des bergers, Matthieu parle de l’adoration des mages. Il n’est pas rare que les peintres mêlent ces deux évangiles dans la représentation de la Nativité.

Les Rois mages Nous croyons tous connaître cette histoire des rois mages, et pourtant… en relisant le texte, nous nous apercevons qu’ils ne sont pas rois, qu’ils ne sont peut-être pas trois et qu’on n’a aucune idée de la couleur de leur peau ! Toutes ces précisions ont été inventées au fur et à mesure que les artistes cherchaient à représenter la scène. Le mot « roi » est, dans le texte de Matthieu, à la fois employé pour Jésus et pour Hérode. Dés le début de cet Evangile, on pressent un conflit possible entre deux types de royauté.

Le mot « mage » vient d’un terme perse moga ou maga et désigne les prêtres du culte zoroastre. Ce sont des personnages mystérieux dont on ne sait pas s’ils sont des savants ou des sorciers. Ce texte cependant indique deux choses : ce sont des devins, astronomes ou astrologues et ils viennent d’Orient (Perse ou Arabie) comme l’attesterait la provenance de leurs présents et en conformité avec l’oracle du livre d’Isaïe 60(6) qui évoque des pèlerins en route vers Jérusalem. Ils symbolisent les lointains.

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A part l’emploi du pluriel qui implique que les mages étaient plusieurs, le texte ne précise pas leur nombre. En Occident, le nombre est fixé à trois depuis Origène. A l’origine, ils sont identiques : ils ont le même type, le même costume, la même attitude. Puis, sous l’influence du symbolisme du nombre trois, ils se différencient pour représenter les trois peuples issus des trois fils de Noé (Sem, Cham, et Japhet) ; les parties du monde connues à l’époque : l’Asie, l’Afrique, l’Europe ; les âges de la vie : le vieillard, l’homme de la maturité et le jeune homme imberbe. Les noms de Gaspard, Melchior et Balthasar apparaissent au XIII° siècle. Melchior est un vieillard européen, Gaspard, un homme mûr de type asiatique peu marqué, Balthasar, un jeune homme « maure ». Dans l’art, leurs vêtements reflètent les modes vestimentaires de chaque époque. Les mages, sur le tableau d’Alain Thomas, sont représentés sur le premier volet et le troisième volet du triptyque.

A gauche sur le premier volet, nous reconnaissons Balthasar et Melchior !

Dans le troisième volet, nous reconnaissons Gaspard. Tous les trois sont accompagnés d’une suite qui a permis à l’artiste de représenter plusieurs personnages en costumes exotiques. Tous les trois portent de riches vêtements sur lesquels l’artiste a fait des incrustations de dorure à la feuille. Selon l’endroit ces incrustations apparaissent de façon plus ou moins accentuée. Tous les trois se déplacent à pied et portent dans leurs mains le cadeau qu’ils viennent offrir à l’enfant. Là encore, il faut garder en mémoire le fait que ce texte n’est pas un texte historique mais qu’il a été écrit à la lumière de la résurrection afin de nous délivrer un message. Ces cadeaux apportés à l’enfant expriment un symbolisme. L’or, symbolise la pureté et la puissance et indique la royauté du Christ. L’encens, présent dans les cultes aux divinités, symbolise la divinité du Christ. La myrrhe est une gomme résine à odeur balsamique que l’on trouve en Palestine. Utilisée pour les soins de beauté, pour parfumer les vêtements et le lit, corser le vin ou soigner les malades, elle servait surtout à embaumer les morts. Elle annonce ici l’onguent d’embaumement de la passion et de la mort du Christ. Elle évoque l’humanité du Christ.

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L’astre, l’étoile guidant les rois se situe juste au dessus de l’étable. Dans un ciel nocturne étoilé dont le bleu apporte un éclat particulier aux autres couleurs la danse des oiseaux célèbre elle aussi la naissance de cet enfant et donne du mouvement à ce tableau.

Bien que nous soyons en pleine nuit, le reste du tableau semble éclairé par une lumière naturelle.

Plusieurs villes ocrées et plates parsèment l’espace tandis que les différents plans du paysage s’étagent sans le moindre effet de perspective.

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Toutes les saisons semblent représentées ! La neige nous annonce l’hiver, le givre et les quelques arbres fleuris, le printemps et l’automne, tandis que l’immense prairie fleurie nous rappelle l’été… Et pourtant en s’approchant, faut-il y voir un clin d’œil de l’artiste, nous voici devant une immense patinoire sur laquelle une multitude de patineurs s’ébattent complètement désintéressés par l’évènement qui vient de se produire.

Ils pourraient illustrer cette phrase du prologue de l’Evangile de Saint Jean 1 (11): « Il est venu chez lui et les siens ne l’ont pas reconnu. »

Au récit de la naissance un peu lamentable de Jésus dans un lieu misérable, l’adoration des mages, uniquement relatée par Matthieu, sert de contre point. Malgré les apparences de misère et de dénuement, Jésus est bien le sauveur et le roi du monde qu’il convient d’honorer. Des gens simples et méprisés mais aussi de riches personnages venus de très loin s’inclinent devant lui, la création toute entière le reconnaît, la création toute entière le célèbre. Une étoile mystérieuse indique le chemin. Ces textes viennent nous délivrer un message magnifiquement mis en scène par Alain Thomas : Noël, c’est le monde à l’envers ! Nous attendions un roi puissant et nous voici devant un nouveau né couché dans une étable, un nouveau né venu nous délivrer un secret : Choisissez le chemin de la paix, celui de la vraie joie, celui de l’amour…. « Aimez-vous, comme je vous ai aimé. »