Le Signe Chez Les Stoïciens

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2-Le signe chez les StociensFondamental: Quand les dialecticiens (stociens) disent que tout mot est ambigu, il s'agit de mots considrs isolment... Tout mot est ambigu, et l'on explique un mot ambigu avec des mots, bien sr, mais avec des mots combins, qui ne sont plus ds lors ambigus .Saint Augustin, leDe dialecticaL'cole stocienneLe stocisme est un mode de pense fond par le grec Znon, environ au IVme sicle avant Jsus Christ. Comme dans de nombreuses philosophies, le bonheur est la finalit de la vie humaine. Ainsi, l'cole stocienne dsigne la sagesse et la vertu comme les cls pour y parvenir. Il ne s'agit pas ici d'un bonheur accessible par le plaisir et le dsir. L'individu doit distinguer ce qui dpend et ne dpend pas de lui. Tout ce qui arrive est l'expression du destin.Znon de Cition, n Cition (Chypre) v. 335, mort Athnes v. 262-261 av. J.-C., philosophe, fondateur en 301 du stocisme, l'cole du Portique.Stociens

PrincipesLes stociens antiques accordaient une importance primordiale l'thique, considre comme leprincipal domaine de la connaissance, mais ils formulrent galement desthoriesdelogiqueet descience naturellepour tayer leurs doctrines. Selon eux,toute ralit est matrielle, mais la vritable matire, qui est passive, doit tre distingue du principe actif, le logos, qu'ils concevaient comme la raison divine mais aussi comme un souffle ou feu pntrant l'ensemble de l'Univers.L'me humaine serait une manifestation du logos. Vivre conformment la nature ou la raison, affirmaient-ils, c'estvivre avec l'ordre divin de l'Univers. Cette conception engendra la thorie du droit naturel qui exera une influence profonde sur la jurisprudence romaine. Pour la morale stocienne, le bien ne rside pas dans les objets externes mais dans l?tat de l?me elle-mme, dans la sagesse et dans la matrise de soi, capables de dlivrer l?individu des passions et dsirs qui perturbent la vie ordinaire. Les quatre vertus cardinales de la philosophie stocienne sont la sagesse, le courage, la justice et la modration. Un trait distinctif du stocisme est soncosmopolitisme. Les hommes sont unemanifestation de l'esprit universelet devraient vivre dans un rapport d'amour fraternel et d?entraide mutuelle.Les diffrences extrieures, comme le rang ou la richesse, sontngligeablesdans les relations sociales. Ainsi, avant l'essor duchristianisme, les stociens reconnaissaient et prconisaient lafraternitentre les hommes etl'galitnaturelle de tous les tres humains.Ds l'Antiquit, le systme philosophique de l'Ancien Stocisme a t victime d'un phnomne derejet. L'influence de leur doctrine fut essentiellementpartielle. Leurs pigones officiels, ceux du Moyen Stocisme et du Stocisme Tardif, mais aussi tous ceux qui l'occasion se sont inspirs de l'Ancien Stocisme, ne se sont jamaisattachs l'ensemble de ladoctrinemais seulement tel ou tel de ses aspects, en ngligeant le reste, et surtout en ngligeant l'articulation de l'aspect envisag avec le reste de la doctrine. C'est notammentle cas de l'analyse linguistique de l'AncienStocisme. La place qui lui est accorde dans l'ensemble de la doctrine est trs importante, et l'influencequ'elle a eue dans l'Antiquit estconsidrable, mais cette analyse a t presque immdiatementisole de son contexte, perdant par l une partie du sens qu'elle ne pouvait manquer d'avoir dans unsystme aussi clos.1. L'analyse du signifiant et du signifi : pas de contenu de pense en dehors d'une forme linguistique.L'Ancien Stocisme divise la philosophie en trois parties,la logique, la physique et l'thique, dont le dveloppement doit s'effectuer dans cet ordre. La logique est elle mme divise endialectique et rhtorique.La dialectiqueest donc ce par quoi commence lediscours philosophique stocien. Elle est son tour scinde en deux parties, l'une portant surle signifiantet l'autre sur lesignifi.Le signifiantde la doctrine stocienne est dcoup selontrois ralisationspossibles.Le signifiant vocal(phn) n'est a priorini articul ni porteur de signification, et comprend donc aussi bien la voix animale que la voix humaine.Le signifiant prononc(lexis) est caractris par le fait qu'ilest articul, maissans tre a priori porteur de signification.Enfinle signifiant nonc(logos) est doublement caractris par le fait qu'il estarticul et porteur de signification. Les Stociens appellentsemainon(signifiant)la notion mme de signifiant,envisageindpendammentde ses ralisations.De son ct, l'analyse dessignifisest prsente commecorrlative une tude des contenus de pense, car tout ce qui estsignifi, ce sont descontenus de pense. Toutefois,c es contenus de pense ne sont eux-mmes des signifis que quand ilss'incorporentdans unsignifiant, c'est--dire dans le cadre de lalangue: considrs indpendamment de cette incorporation, ce sont desnonables, constituant le contenu virtueldes noncs. Ainsi, selon le point de vue, les Stociens parlent de contenu de pense {pragma), quand celui-ci estenvisag indpendamment de son incorporation dans un signifiant, d'nonable (lekton) en tant que ce contenu de pense est lecontenu virtuel de l'nonc, de signifi enfin (smainomenon) quand le contenu de pense se ralise dans un signifiant. Dans son expos, Diogne Larce isole tout d'abord l'nonc assertif, c'est--dire l'expression linguistique d'un contenu de pense susceptible d'tre vrai ou faux. Cette analyse passe par une dfinition du prdicat, conu comme noyau de l'nonc. Puis Diogne Larce dfinit les noncs non assertifs, c'est--dire les modalits d'noncs. La suite de l'analyse porte sur les diverses formes de l'assertion, forme simple quand elle est affirmative, ngative, etc., forme compose quand les assertions sont coordonnes, disjointes, constitues en systme conditionnel, etc. Cette prsentation aboutit au calcul des propositions, c'est--dire l'analyse de la validit des relations que les noncs entretiennent entre eux.La place initiale accorde la dialectique dans le systme stocien, et la division de cette dialectique en tude du signifiant et tude du signifi, sont conformes la problmatique qui traverse la philosophie grecque. Cette problmatique tient une interrogation surla possibilit et la validit de la science, et, par l, sur l'nonc scientifique. Ds lors qu'un nonc assertif apparat comme une certaine reprsentation du monde, qu'est-ce qui, dans cet nonc,garantit sa validit par rapport ce qu'il dcrit? En d'autres termes, est-ce qu'un nonc peut comporter lesgaranties de l'information qu'il nonce, et est-ce que par l undiscours scientifique est possible en dehors des garanties particulires et extra-linguistiquesque ses conditions d'nonciation peuvent lui apporter ?A cette question,deux rponsessont apportes avant l'Ancien Stocisme. La rponseplatonicienneest un constat d'chec. D'une part les mots n'ont pas de relation de conformit automatique aux choses, et de ce fait ils ne sont pas indicatifs de ces choses auxquelles ils sont attribus : par l, il est possible d'attribuer une chose un nom qui n'est pas le sien.D'autre part, un nonc peut tout aussi bien noncer ce qui est que ce qui n'est pas. Il est donc possible de dire le faux.La solutionaristotlicienneest diffrente. Pour Aristote, il ne s'agit pas d'tablir une relation entre les mots et les choses mais entreles signifis et les rfrents correspondants. Un mmemotpeut avoirplusieurs signifis, mais chaquesignifine correspond qu'un seul rfrent. Ce point de vue conduit Aristote isoler les signifis des signifiants, et classer les signifis. Cette classification des signifis, et l'analyse de leurs relations, permettent le calcul desprdicatset lasyllogistique, c'est--dire la vrification de lavalidit des noncs scientifiquescomme organisations spcifiques de signifis : le syllogisme est ce mode d'organisation des signifis dont lavaliditestverifiable indpendammentde touteconditiond'nonciation.Les philosophes de l'Ancien Stocisme fondent leur analyse sur cette bipartition du signifiant et du signifi, mais dans une perspective radicalement distincte de celle d'Aristote. Cette bipartition de l'analyse n'a pas ici pour fonction d'isoler le signifiant et le signifi mais l'inverse de dgager leurassociation. Ces deux lments sont en effet l'objet d'analyses spcifiques mais chacun est envisag en fonction de l'autre. L'analyse du signifiant progresse ainsi de faon cerner et caractriser ce type particulier de matire phonique qui estporteur d'un signifi: dans la classification stocienne, c'estl'nonc. L'nonc est inclus dans l'analyse du signifiant : c'est d'abord et fondamentalement dusignifiant, mais en tant qu'il est porteur d'un signifi. L'analyse du signifiant est donc assurment spcifique : il s'agit decaractriser de la matire phonique, mais dans sonrapport au signifi. De mme, l'analyse du signifi est limite au cadre antrieurement dfini, c'est- dire l'nonc. L'analyse du signifi est spcifique : les caractrisations dont le signifies t susceptible sont distinctes de celles du signifiant, mais le signifi n'est envisag qu'en tant qu'il correspond un signifiant. Il n'y a donc pas de contenus de pense en dehors d'une forme linguistique, c'est--dire qu'il n'y a pas de pense sans parole, parole intrieure ou mise. En revanche les Stociens admettent qu'il puisse exister des formes linguistiques sans contenu de pense correspondant : comme ils envisagent trois ralisations du signifiant, selon qu'il n'est ni articul ni porteur de signification, ou seulement articul, ou la fois articul et porteur d'une signification,ils admettent que le signifiant puisse ne pas correspondre un signifi.2. La thorie de l'nonc et ses implications : la pense ne procde que par relations.Le point o se ralise cette association est l'nonc, et lui seul.La notion de mot est excluede cette analyse. On doit en conclure que le motne constitue pas par lui-mme un point de jonction entre un signifiant et un signifi. L'explication de ce point de vue nous est fournie par une remarque communment attribue aux Stociens, et plus prcisment Chrysippe. Cette remarque, fondamentale dans la pense stocienne, est quetout mot est ambigu.L'ide est ainsi qu'un mot n'est pas en lui mme porteur d'un signifi, mais seulement en tant qu'il est le constituant d'un nonc. Il n'y a donc pas de mots dans cette analyse, mais seulement des constituants de l'nonc, qui se dfinissent selon le type de sens dont ils sont porteurs dans un nonc ou selon la fonction qu'ils y occupent, c'est--dire toujours par rapport l'nonc. On ne pense que des relations :l'nonable, c'est--dire le contenu virtuel de l'nonc, est ainsi prsent comme procdant d'une mise en relation. De ce fait, ce ne sont pas les tres eux mmes qui sont objets de pense, mais les relations dans lesquelles ils entrent. Ces relations dans lesquelles ils entrent, ce sont les vnements dont ils sont l'occasion.On ne pense donc pas des tres mais des vnements.La dfinition que les Stociens donnent dunom: Ils le dfinissent en effet commesignifiant non pas un tre mais la caractristique d'un tre.Ce qui prcde apporte un premier clairage cette dfinition. Soit par exemple un objet du monde sensible, un tre quelconque. Il faut que quelqu'un constate l'existence de cet trepour qu'il soitsusceptible d'tre dnomm.Mais prcisment, ce que cette personne constate, ce n'est pas cet tre en soi, c'est qu'il lui tombe sous le sens : c'est cette relation de contact {periptsis) qui constitue en l'occurrence lecontenu de pense.Un tre est caractris s'il lui arrive quelque chose, s'il est l'objet d'un vnement, autrement dit s'il entre dansune relation. Le nom par consquent, comme constituant de l'nonc, c'est--dire dans un nonc, et en tant qu'il est une dnomination affecte une relation, ne signifie pas un tre mais la caractristique d'un tre. Cette caractristique peut tre spcifique, c'est le cas du nom propre qui dans un nonc signifie ce qui caractrise un tre particulier, mais elle peut tre aussi commune, c'est le cas du nom commun qui dans un nonc signifie ce qui caractrise plusieurs tres. Donc un nonc compos d'un nom et d'un verbe est l'expression d'une relation o se trouve impliqu ce qui a antrieurement t une relation. Le systme est indfiniment rcurrent :on ne pense que des relations.Les Stociens recourent ainsi la fiction de l'onomatope, qui permet de poser que dans les dnominations originelles,le signifiant tait indicatif du signifi. Par l, les premiers mots constituaient par eux-mmes un point de jonction entre un signifiant et un signifi, et en tant que tels, ils taient par eux-mmes indicatifs d'une relation.Ils n'taient pas encore ambigus. Ils le sont devenus parce quele lexique s'est dvelopp partir de ces premiers mots, ce dveloppement obscurcissant progressivement la relation entre les signifiants et les signifis et permettant toutes les variations. L'essentiel est de saisir que la thorie de l'onomatope n'est pas un point dedoctrinedict par le dsir de thoriser dans une analyse linguistique la constatation enfantine qu'il existe des onomatopes dans le lexique : c'est au contraireune solution cohrente qu'on peut apporter l'intrieur de ce systme de relationssi l'on accepte de poser le problme de leur origine.La sagesse, comme conformit de soi l'ordre du monde, est ainsila seule garantie de la vracit d'un nonc. Un nonc produit par tout autre qu'un sage peut tre vrai, maisrien ne garantitqu'il le soit coup sr, et l'on peut bien approuver ou nier tout nonc, cette approbation ou cette dngation ne comporte par elle-mme aucune garantie si l'on n'est pas soi-mme un sage. Mais ce pari de l'information, qui pose qu'elle peut tre juste mais qui doit pour cela recourir unethique, aboutit une aporie circulaire :seul celui qui a des reprsentations justes peut savoir qu'il a des reprsentations justes.