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le shofar REVUE MENSUELLE DE LA COMMUNAUTÉ ISRAÉLITE LIBÉRALE DE BELGIQUE SYNAGOGUE BETH HILLEL BRUXELLES N° d’agréation P401059 SEPTEMBRE 2009— N°307 / ELOUL 5769 - TICHRI 5770 Chana Tova!

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s y n a g o g u e b e t h h i l l e l

b r u x e l l e s

N° d’agréation P401059 SEPTEMBRE 2009— n°307 / Eloul 5769 - Tichri 5770

Chana Tova!

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revue mensuelle de la communauté israélite libérale de belgique

EDITEUR RESPONSABLE :

Rabbin Floriane Chinsky

COMITÉ DE RÉDACTION :

Rabbi Abraham Dahan, Monique

Ebstein, Rabbi Floriane Chinsky,

Ralph Bisschops, Gilbert Lederman,

Philippe Lewkowicz, Serge Weinber,

Emmanuel Wolf, Pieter Jehudah Van

Cauwenberge

SECRÉTAIRE DE RÉDACTION :

Giny Susswein

MISE EN PAGE :

www.inextremis.be

n°307 SEPTEMBrE 2009/

Eloul 5769

N° d’agréation P401059

Le Shofar est édité par la

COMMUNAUTÉ ISRAÉLITE LIBÉRALE

DE BELGIQUE A.S.B.L.

N° d’entreprise : 408.710.191

Synagogue Beth Hillel

80, rue des Primeurs,

B-1190 Bruxelles

Tél. 02 332 25 28

Fax 02 376 72 19

www.beth-hillel.org

[email protected]

CBC 192-5133742-59

RABBINS : Abraham Dahan

et Floriane Chinsky

PRÉSIDENT ExÉCUTIF :

Philippe Lewkowicz

CONSEIL D’ADMINISTRATION :

Président : Gilbert Lederman

Avishaï Ben David, Ralph Bisschops,

Monique Ebstein, Patrick Ebstein,

Paul-Gérard Ebstein, Ephraïm

Fischgrund, Josiane Goldschmidt,

Gilbert Lederman, Willy Pomeranc, Elie

Vulfs, Serge Weinber, Emmanuel Wolf.

Les textes publiés n’engagent que

leurs auteurs.

CRÉDIT PHOTOS : Serge Weinber

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Sommaire 05 lE MoT Du PrESiDENT EXEcuTiF

Shofar et éthique, par Philippe Lewkowicz

JuDAÏSME

Les fêtes de Tichri, une réinvention identitaire (au moins) annuelle par Rabbi Floriane Chinsky

Suggestions pour se préparer aux fêtes de Tichri

L’énigme du Kol Nidré, par Rabbi Abraham Dahan

Le Kol Nidré ou résiliation des vœux, de Schalom Ben Chorin

Gershom Scholem, par Monique Ebstein

Hommage à André Neher, par Monique Ebstein

Balaam… from the book of Numbers to Deir’Alla, by Pieter Jehudah Van Cauwenberge

AGENDA

Le peuple juif, une invention ?, par Rabbi Floriane Chinsky

Et plus haut peut-être…, Contes hassidiques, par Y.L. Peretz

ViE coMMuNAuTAirE

Les vœux communautaires

Les fêtes de Tichri à Beth Hillel

Lilmod oulélamed, La contribution des Bné et Bnot Mitsva, par Rabbi Floriane Chinsky

« Bikour Holim », ou la visite des « malades », c’est-à-dire des « personnes en difficulté »

Carnet

In memoriam Jacques Cohen z’’l, par Rabbi Abraham Dahan

liBrE oPiNioN

Shoah, « Aladin » et Jacques Chirac, par Emmanuel Wolf

D’ici ET D’AillEurS

Un shabbat à La Havane, par Phillippe Lewkowicz

lu Pour VouS

L’hébreu israélien, Précis de grammaire (Eliyahou Reichert), par Monique Ebstein

Tribune des lecteur

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lE MoT Du PréSiDENT

HumourIl arriva un jour où les Juifs en eurent vraiment assez d’être juifs, trop de lois, trop de précep-tes, trop d’interdits !Ils dirent au Saint Béni soit-Il : « Reprend ta Tora, elle est trop lourde, nous n’en voulons plus ! » Il leur répondit : « D’accord, rendez-la moi, où nous rencontrerons-nous ? » Les Juifs répondirent : « Au Sinaï, là où Tu nous l’a donnée ». Dieu dit : « Très bien, j’y serai. » Les Juifs se rendirent tous ensemble au Sinaï et rendirent la Tora à Dieu. Mais voilà qu’au moment de partir, il virent que Dieu avait oublié de reprendre une grande partie des lois, des préceptes, des interdits. Les Juifs rappelèrent Dieu et Lui dirent : « Tu as oublié de reprendre toutes ces lois, ces pré-ceptes, ces interdits ! » Dieu leur répondit : « Mais Je ne vous les avais jamais donnés ! »

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le shofar

par Philippe Lewkowicz

Lorsque, bientôt, nous entendrons sonner le shofar à Tishri, nos cœurs et nos âmes vibre-ront comme ont vibré ceux de nos frères et sœurs depuis des générations. Comme ont vibré aussi le cœur et l’âme des Juifs d’Israël et du monde entier quand le Grand Rabbin Goren a soufflé dans la corne de bélier en juin 1967 lorsque les soldats de Tzahal ont enfin pu s’approcher du Mur des Lamenta-tions. A ces occasions, le son du shofar est l’appel millénaire à l’unité du peuple juif. C’est un son de vérité et de création.

Quand, par contre, ont retenti les trompet-tes des assiégeants juifs de Jéricho, les murs de la cité se sont effondrés. Cette fois le son était de destruction, même si celui-ci prove-nait d’un commandement divin.

Au-delà de l’aspect instrumental, le point commun entre ces moments est l’importance du rôle du prêtre ou, aujourd’hui, du rabbin ; c’est lui qui dit comment et quand il faut agir. Il peut ainsi avoir un immense pouvoir aussi bien de construction que de destruction. Face à un tel pouvoir, il nous est difficile de croire que ceux qui en sont investis ne soient pas pleinement conscients de la responsabilité qui pèse sur eux au moment d’agir. Nous ne doutons pas qu’ils aient reçu, au cours de leur formation, les outils et la sagesse nécessaires pour apprécier le bien et le mal, en d’autres mots qu’ils aient une attitude éthique.

C’est tellement vrai qu’une grande partie de la savoureuse littérature ashkénaze raconte comment, pour chaque acte de la vie, du plus simple ou plus compliqué, on deman-dait l’avis ou même parfois l’autorisation du « rebbe », car « il » sait et on « lui » fait confiance.

Le mot est lâché : confiance. Nous sommes encore tous sous le choc de cette photo du New Jersey où l’on voit deux rabbins orthodoxes, les mains menottées dans le dos, emmenés suite au scandale de corruption, de blanchiment d’argent et de différents trafics, dont celui d’organes humains. Parmi les suspects, 5 rabbins et 3 maires.

Pour commettre leurs forfaits, les rabbins avaient, pour blanchir de l’argent sale, uti-lisé les canaux des organisations caritatives communautaires. J’avoue ne pas compren-dre comment ils ont pu en arriver là. Pour un rabbin, ne pas voir que cela minerait la confiance et la crédibilité vis-à-vis des associations caritatives, cela me dépasse. Ils ont utilisé la tzedaka – l’acte de justice – pour commettre l’injustice. Les dégâts sont importants et seront longs à réparer.

Mais, au-delà des moyens utilisés, exami-nons le fond du problème. Des hommes nommés ou élus à des postes de responsabi-lité et présentant une forte image d’intégrité usent du pouvoir associé à leurs fonctions pour commettre des actes que la loi et la morale réprouvent. En ce qui concerne les politiques, nous avons malheureusement en Belgique une certaine expérience et si cela reste inacceptable, cela nous surprend moins.

Que des rabbins, des hommes qui prêchent la rigueur, l’altruisme, le respect des 613 mitzvot, qui se veulent des exemples pour leurs communautés, se conduisent sous le manteau comme de vulgaires hors la loi, c’est au-delà des mots. Le monde juif a assez souf-

Shofar et éthique

lE MoT Du PréSiDENT EXécuTiF

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lE MoT Du PréSiDENT EXécuTiF

fert des amalgames pour que nous fassions la même erreur et je ne peux concevoir que les mouvements auxquels appartiennent ces dif-férents rabbins ne prendront pas les mesures qui s’imposent pour leur retirer leur capacité de nuire quand ils sortiront de prison.

L’enseignement le plus important de cette affaire, même sans en connaître les détails, est encore une fois une question d’époque. A force de ne vouloir rien changer, certaines commu-nautés n’ont même pas pu imaginer l’influence néfaste que pourrait avoir leur environnement sur des hommes - car après tout les rabbins restent des hommes - plus fragiles.

Pour des raisons que je ne comprends pas toujours, ils ont tellement voulu préserver l’ancestrale image du maître (dans l’accep-tion du professeur) protecteur tout puissant de la communauté, qu’ils ont pu se croire aujourd’hui affublés d’une infaillibilité quasi pontificale.

Même si nous ne sommes pas à l’abri d’une défaillance humaine, dans le mouvement libéral nous sommes conscients de ces dan-gers. Pour cela les rabbins, nos rabbins sont avant tout des hommes et des femmes qui ne siègent pas sur un trône. Leur smikhah (ordination rabbinique) n’est pas un sésame pour le pouvoir, leur titre n’est pas une valeur en soi, mais seulement l’outil qui leur permet d’être au service de la communauté. Cela me rassure et m’encourage.

En cette veille de Rosh Hashana, je forme le vœu que chaque responsable communau-taire fasse l’introspection nécessaire afin que l’éthique et la probité restent les valeurs cardinales de leur action. Pour Beth Hillel, je m’y engage en mon nom et au nom de ceux et celles qui y ont un rôle.

Shana tova ve gmar hatima tova. ■

Laissez-vous séduire par le fait d’être chouchouté !

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le shofar

par Rabbi Floriane Chinsky

Les fêtes de Tichri, une réinvention identitaire (au moins) annuelle…

JuDAÏSME

Etre juif, qu’est-ce que c’est ?Il existe deux types de juifs1 : ceux qui don-nent une réponse absolue et définitive à cette question et ceux qui la laissent ouverte.

Les premiers définissent le judaïsme à par-tir de leur propre façon d’être juif, se posent comme le critère ultime, excluent les autres, se ferment à eux-mêmes la possibilité d’évo-luer, se créent eux-mêmes leurs propres chaî-nes. Cette attitude est regrettable.

Au contraire, ceux qui laissent la définition ouverte gardent un espace aux autres juifs. Ils se donnent également à eux-mêmes la liberté d’évoluer. Comme Avraham et Sarah, comme Rébecca, Jacob, Rachel et Léa, ils sont prêts à entreprendre un voyage identitaire qui les mènera au meilleur d’eux-mêmes.

Comme l’enseigne notre tradition, « … Je suis juif, parce que, pour Israël, le monde n’est pas achevé, les hommes l’achèvent.

Je suis juif, parce que, pour Israël, l’Homme n’est pas crée : Les hommes le créent… » 2

Cette recherche permanente, symbolisée par les voyages de nos patriarches comme par ceux des enfants d’Israël dans le désert, n’est pas nécessairement un voyage dans l’espace, c’est également et avant tout un voyage dans le temps3.

Cette souplesse identitaire permet de se mouvoir dans les courants de l’Histoire. L’identité juive est suffisamment forte pour se permettre ces fluctuations sans se dissoudre et disparaître. Il faut recon-naître, pourtant, que ceux qui découvrent notre tradition n’ont pas la tâche facile. On a tellement l’habitude de rigidité, d’ins-crire chacun dans des cases, des défini-tions strictes. Ceci ne convient pas – et n’est pas nécessaire – à une tradition mul-timillénaire.

A tous ceux qui demandent si le judaïsme est une invention, il faut donc répondre de façon positive, et souligner que cette invention est en cours de construction depuis des généra-tions et continuera à se construire dans les générations futures. Lédor vador.

1 Selon d’autres versions, il existe deux types de juifs, ceux qui affirment qu’il existe deux types de juifs et les autres…2 Edmond Fleg, Pourquoi je suis juif, Les belles lettres, Paris, 1995, pp. 100, 101 ou http ://www.centrefleg.com/centre-fleg/histo-

rique.html3 Abraham Joshua Heschel, Les Bâtisseurs du temps, Les éditions de minuit, Paris, 1957.

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JuDAÏSME

4 Chapitre I du livre de Jonas, que nous lisons à MinHa de Kipour : « …Mais Jonas se leva pour fuir à Tarsis, hors de la présence de l’Eternel... Pour Jonas, il était descendu au fond du navire, s’y était couché et profondément endormi… »

5 Metsudat David, qui commente le livre de Jonas souligne l’indifférence au danger de celui qui fuit la réalité. « Qu’as-tu à dormir », question que les marins posent à Jonas en pleine tempête, est pour lui l’interrogation de celui qui veut

sauver le navire face à celui que le désespoir conduit à l’inaction. C’est également un thème important des séliHot, ces prières dédiées à la préparation aux fêtes de Tichri.

6 Extrait de Ountané tokef (traduction de Rabbi Avraham Dahan), prière de Roch Hachana et de Yom Kipour, attribuée à Rabbi Amnon de Mayence dans des circonstances dramatiques et récitée comme introduction à la kédoucha pour l’office supplémen-taire (moussaf) des jours redoutables. MaHzor de Rosh Hashana pp. 82,83.

Au cours de ce voyage, nous devons nous assurer que, contrairement à Jonas4, nous ne sommes pas en fuite, endormis, au fond des cales d’un esquif de hasard. Lorsque cela se produit, nous avons la faculté de nous ressaisir, nous pouvons au contraire nous efforcer de rester à la barre, de ne pas fuir la difficulté.5 De chercher des points de repère. De poser des balises. Marquer le terrain par-couru et regarder, le plus loin possible, vers l’avenir. Les fêtes sont là pour nous aider à garder le cap.

Un appel puissant, saisissant, réconfor-tant

Le Chofar de Roch Hachana est là pour éveiller notre conscience, nous tirer du sommeil, nous ramener de notre fuite. Pour remettre notre vie dans nos mains. C’est la raison pour laquelle Roch Hachana est une fête redoutable.

Roch Hachana est redoutable, car nous pre-nons conscience de nos erreurs, de leurs conséquences, de la fuite de nos vies qui s’en-volent « comme un rêve », puisque :

« L’homme, son origine est poussière et il finit en poussière. Toute sa vie est lutte. Il est comme un vase d’argile qui se casse, comme une herbe qui se dessèche, comme un bour-geon qui se fane, comme l’ombre quand elle passe, comme un nuage qui se dissipe, comme un souffle léger, comme un rêve.6 »

Roch Hachana, la redoutable, reste une fête. La prise de conscience peut être dure, mais celui qui sait la valeur de sa vie bénit les éclairs de conscience qui lui permettent

de se réorienter vers le meilleur de lui-même. Connaître ses faiblesses et les accepter est la première étape d’une libération réaliste, c’est déjà un immense soulagement. Accom-plir ensemble les doux rituels qui marquent le recommencement de l’année est source d’une grande joie.

Kippour, à sa façon, renforce le même mes-sage. Une fois la conscience éveillée, deux sentiments se mêlent en nous. La crainte de n’en être pas capable d’une part, la joie d’en être peut-être capable de l’autre. La culpa-bilité de nos erreurs s’éveille à Kipour, pour être libérée, dépassée, transformée, en sou-lagement et en sérénité.

Il n’est heureusement pas question d’éveiller une culpabilité artificielle pour contrôler le peuple. On peut, certes, éduquer à travers la logique de la punition. Le Maître domine et manipule pour obtenir ce qu’il veut. La logique de nos fêtes est à l’opposé. Elle ne confronte pas un Maître et un esclave. Elle considère chacun comme créé à l’image de Dieu et dési-reux de faire de sa vie un chef d’œuvre. Dans ce contexte, la pression exercée par ces « jours redoutables » est une aide précieuse, qui nous apporte une joie profonde.

Il serait peut-être plus confortable de se passer de ce genre de pression, de se laisser bercer dans le ronronnement des jours. Ce serait courir le risque qu’une réalité parfois très dure nous rattrape et nous saisisse au vol, alors que nos corps et nos consciences sont ramollis. Ce serait courir également le risque, si aucune épreuve ne venait nous sortir du sommeil, de mourir sans nous être réveillés.

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le shofar

7 C’est le seder de Roch Hachana. Les achkénazim ont l’habitude de manger de la pomme et du miel, alors que les sefardim ajoutent de nombreux mets dont les noms se rattachent à des vœux. Le mot Guézer désignant la carotte et se rapprochant du mot gzéra qui veut dire décret, on accompagne la consommation de carotte de vœux concernant l’annulation de toute décision qui nous serait défavorable.

Ici encore, notre tradition fait la preuve de la sagesse des ses pratiques, de l’équilibre har-monieux de ses chemins.

Le corps, voilier de l’âmeLe corps n’est pas un obstacle ou une chose vile, mais l’outil de nos vie, l’occasion de notre grandeur. Le repas de fête de Roch Hachana a permis les retrouvailles en famille et entre amis. Il a permis de formuler pour l’année à venir des vœux et de les « consommer », de goûter le miel dont on espère la douceur pour l’année à venir, la pomme dont on espère le croquant et l’acidité, ainsi que d’autre mets divers selon les traditions et les inspirations de chacun7.

L’absence de repas à Yom Kipour, le jeûne, est lui aussi l’occasion de mettre les sensations de nos corps au service de la progression dans la conscience. Le confort est dangereux, il nous étourdit. L’absence de nourriture, de mauvai-ses chaussures sans cuir, s’asseoir par terre, des vêtements simples, sont des inconforts qui aident à se remettre en question. La fai-blesse qui se saisit de nous tout au long de ce jour nous ramène à la fragilité de la condition humaine. Là où l’effort intellectuel est parfois impuissant, l’expérience directe des sens est d’une efficacité incontournable. Là où l’em-pathie risque de manquer, l’expérience de la faim nous rapproche de ceux qui recommen-cent cette année dans la souffrance, de ceux qui ont besoin de notre aide. L’expérience commune de notre faiblesse nous rend plus humains. L’Anbeis, le repas que nous parta-geons à la fin du jeûne permet de relâcher cette pression, de se réjouir des sens que nous offre la condition humaine. Une fois le travail moral et émotionnel accompli, vien-nent un soulagement et une joie éclatante. Encore une fois, le voyage spirituel a eu le corps comme voilier.

La joie comme principe éthique et comme principe pédagogique

Après le lourd bonheur des fêtes « gra-ves », c’est la libération, l’exubérance. Alors que d’autres traditions conservent la « religion » dans le domaine du solennel, la nôtre nous invite et nous incite à rentrer de tout notre corps dans des temps de joie explosive et débridée. Soukot et SimHat Torah en forment le paroxysme. Soukot est appelée ainsi en raison des cabanes que l’on construit avant la fête et qui devien-nent notre habitation principale (lorsqu’il ne pleut pas) pendant 8 jours. Quelle joie de sortir du cadre habituel, de construire en famille ou en communauté, de décorer ensemble, de recueillir les beaux fruits et légumes de l’automne et de le mettre en valeur ! Les bébés en sont ébahis, les jeu-nes fiers de leur travail, les parents ravis de voir tout le monde en plein éveil.

Soukot est égale-ment appelé « la Fête », Hag, car elle est la fête par excellence. La joie arrive à son summum avec l’espoir trouvé dans nos longues réflexions de Roch Hachana et Yom Kipour. L’espoir, aussi,

qu’à travers nos avancées personnelles, ce soit le monde entier qui avance, et soukot est bien la fête universelle, où l’on offrait 70 offrandes au nom des 70 nations de la terre. C’est la fête de l’unité, où l’on rassemble les différentes espèces du loulav pour affirmer notre croyance que dans ce monde, tous les

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JuDAÏSME

humains ont leur place et la capacité de vivre ensemble.

Soukot, c’est « zeman simHaténou », le temps de notre joie, la joie érigée en devoir. De la folie qui s’emparait des léviim lors de la « simHat beth hachoéva »8 jusqu’à l’en-train étourdissant qui nous accompagne lors des danses de SimHat Torah, notre peuple apprend et réapprend à cultiver la joie de vivre, en dépit des difficultés du présent et des fantômes du passé.

Malgré nos prétentions morales et intellec-tuelles, nous sommes naturellement mus par nos sentiments et enclins à faire ce qui nous réjouit. On pourrait vouloir dompter sa nature, et parfois, réellement, il le faut. Mais notre tradition adopte une position plus ami-cale vis-à-vis de nos pulsions. L’idée est plu-tôt d’enseigner à aimer le bien de telle sorte que chacun ait le désir d’agir dans la droiture, que le sens moral soit une source de joie.

Ainsi, Rabbi NaHman enseigne : « C’est un grand commandement que d’être toujours dans la joie »9. Il est bon de méditer éga-lement sur l’inversion de cette phrase, qui nous donne alors : « C’est une grande joie que d’être toujours dans les commande-ments. »10 Soukot et SimHat Torah sont des fêtes faciles à aimer, elles viennent chercher les jeunes et les moins jeunes sur le terrain de la réjouissance. Sur le terreau de cette réjouissance viendront germer les graines de la conscience, conscience du courage de nos ancêtres, prêts à vivre dans des conditions difficiles pour quitter l’esclavage, conscience de leur attachement à une tradition particu-lière qui a fait d’eux une minorité fière de son identité bien que perdue au sein des nations, conscience de leur attachement aux valeurs universelles, depuis les célébrations tradi-

tionnelles des fêtes de Tichri qui sont éga-lement en l’honneur des nations jusqu’à l’en-gagement dans la cité et l’implication dans l’émancipation et dans les lumières qui ont été les leurs.

Alors, notre travail éducatif vis-à-vis des autres comme de nous-mêmes consistera à nous demander quels sont les défis de notre temps, quelle est notre façon d’expri-mer notre identité particulière au sein des nations, de participer à l’avancée universelle et quelle est notre façon de nous réjouir de notre engagement éthique.

Ainsi, d’année en année, nous continuerons notre travail d’invention et de réinvention d’un judaïsme fidèle à la tradition, et par cela même fidèle aux réalités de notre époque, en accord avec le vœu formulé par le livre des Lamentations : « Fais-nous revenir à Toi, Eternel, et nous reviendrons, renouvelle nos jours comme {ils se renouvelaient} jadis. » 11

Puisse le peuple juif toujours rester en cours d’invention, puissions-nous grâce à ces fêtes de Tichri, tirer le meilleur parti de nos erreurs et de nos aspirations pour renouve-ler une année de bien, de bonnes actions, de bonheur. ■

8 D’après la michna (souka 5 :1) Celui qui n’a pas vu la joie de la cérémonie du puisage de l’eau n’ai pas vu de joie réelle de toute sa vie !  9 Mitsva guédola lihiot bésimHa tamid10 SimHa guédola lihiot bémitsva tamid11 Lam. 5 :21

Joie de la Tora

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• Prendre le temps de penser à l’année écou-lée, à nos espoirs pour l’année à venir, en parler avec ceux que nous aimons.

• Contacter le rabbin pour proposer de par-ticiper aux offices (même si on ne lit pas l’hébreu).

• Venir au études de préparation aux fêtes (le lundi soir et le vendredi soir avant l’of-fice), pour se plonger dans l’ambiance phi-losophique et dans l’ambiance musicale des fêtes.

• Parler de ce grand moment avec ses enfants, leur acheter des vêtements neufs pour la synagogue (le blanc est la couleur traditionnelle pour les fêtes).

• Venir en famille à Kol nidré et à Neila, pour vibrer avec toute la communauté.

• Venir aux autres offices plus propices à l’in-trospection.

• Amener les enfants aux activités prévues pour eux pendant les offices (et bien sûr à SimHat Torah !)

• Penser à marquer son soutien à la commu-nauté par un don, proposer aux enfants de participer, même très modestement.

• Chercher une façon de marquer les fêtes à la maison, allumer des bougies, préparer de la pomme et du miel, inviter des amis.

• Construire la souka communautaire avec nous.

• Venir aux danses israéliennes, comme pré-paration aux danses de SimHat Torah.

• Préparer un drapeau pour SimHat Torah. (http ://israelity.com/tag/succot/ peut être une source d’inspiration intéressante.)

• Si vous avez d’autres idées ou des témoigna-ges concernant votre façon personnelle de préparer les fêtes, vous êtes invités à nous en faire part ! ■

Suggestions pour se préparer aux fêtes de Tichri :

JOURNEE DU MARTYR JUIF53ième PELERINAGE NATIONAL A LA

CASERNE DOSSIN A MALINES

DIMANCHE 6 SEPTEMBRE 2009-07-22Réunion devant la Caserne Dossin à 10h30

Des cars partiront à 9h30 précisesBruxelles : place Rouppe

Anvers : Loosplaats

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L’énigme du Kol NidréPar Rabbi Abraham Dahan

« Tous les vœux, les renonciations que nous pourrions nous imposer, les anathèmes, les bannissements, les malédictions et les serments que nous pourrions prononcer et dont nous pourrions charger notre âme depuis ce jour de Kippour jusqu’au jour du Kippour prochain, puissent-ils arriver pour nous dans la paix.(Les sefaradim ajoutent une phrase qui rétrospectivement annule-rait les vœux de l’an passé) Tous ces enga-gements, nous les regrettons, puissent-ils être dénoués, pardonnés, sans effet, nuls et annulés, sans force et sans valeur. Nos vœux ne sont pas des vœux, nos renoncements ne sont pas des renoncements et nos serments ne sont pas des serments. »

C’est là la traduction la plus littéralement fidèle du Kol Nidré que je suis parvenu à faire.

Stupéfiante prière, qui ouvre l’office de la veille de Kippour et dont les deux premiers mots, « Kol Nidré », désignent cet office.

Pris au pied de la lettre, ce texte, dit trois fois par l’officiant, paraît scandaleux : « nos vœux ne sont pas de vœux, nos serments ne sont pas des serments.. »

Les chrétiens n’ont pas manqué d’en déduire que les Juifs ne respectent pas leur parole, qu’il leur permis de prêter un faux serment devant le tribunal et, pendant plus d’un mil-lénaire, le Kol Nidré a été la cause d’accu-sations et de comportements cruels envers les Juifs.

Des rabbins célèbres, notamment Rabbi Amram Gaon du 9ième siècle, a affirmé que c’était une « coutume stupide ». Au 19ième siècle, les rabbins de plusieurs pays se sont réunis pour le supprimer, mais ne sont pas parvenu à trouver un accord. Le Judaïsme libéral le remplaça souvent par les psaumes 103 ou 130 et, cependant, non seulement le Kol Nidré ne disparut pas de la liturgie, mais encore, il a, sur l’immense majorité du peuple juif, un impact et une résonance pro-fonde et qui ne sont pas seulement dus à la mélodie poignante des ashkenazim ou à la mélopée profonde et évocatrice des sefara-dim.

La signification originelle du Kol Nidré, nous l’avons perdue et la lecture du texte au pre-mier degré est impossible car en contradic-tion avec tous les enseignements de la Tora, du Talmud et de l’ensemble de la tradition sur les vœux et les serments. De plus, l’an-nulation rétroactive est interdite, puisqu’un Juif doit respecter tous les engagements. La parole est lourde et elle engage. Faut-il rappeler que le même mot « davar » désigne en hébreu la parole et la chose ? Le deuxième commandement est clair quant au serment, ainsi que le neuvième concernant les faux témoignages. Pour l’ensemble de la tradition juive, les vœux sont à éviter. Faire des vœux n’est pas un signe d’équilibre et d’harmonie de l’être. La Tora va même plus loin : celui qui fait un vœu d’abstinence doit, à la fin de sa période, apporter un sacrifice d’expiation « car il a péché contre son maître » (Nom-bres 6-1). Le Talmud expliquera que si la Tora

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autorise un vœu d’abstinence temporaire, c’est pour éviter la tentation de se couper de la communauté pour la vie. Ce serait comme une soupape pour les êtres en malaise (Pirké Avot 3). C’est comme si on nous disait : tu es tenté de t’imposer des restrictions, tu veux faire le moine, c’est possible pour un temps limité ; tu dois revenir ensuite et participer à la vie de la communauté.

« Celui qui fait un vœu, c’est comme s’il mettait un joug sur sa nuque » (Yerushalmi, Nedarim 5).

« Celui qui fait des vœux, même s’il les accomplit, est appelé pécheur. Parce qu’il est dit : sache que si tu t’abstiens de faire des vœux, tu n’es pas du tout en faute » (Deuté-ronome 23-23).

Quant aux serments, le deuxième comman-dement est on ne peut plus clair : « Même pour une chose vraie, il n’est pas bon de jurer » (Tanhouma, Vayikra). Les textes sont innombrables qui montrent la méfiance dans ce domaine.

D’ailleurs, Dieu ne pardonne que les fautes commises envers Lui. Si j’ai transgressé le chabbat, c’est entre moi et mon Créateur. « Lifné Adonaï titharou », devant l’Eternel vous serez purifiés. Et les rabbis expliquent : pour les fautes commises envers Dieu. Pour les fautes commises envers le prochain, c’est à nous qu’il appartient de réparer. La longue période de quarante jours qui va du 1er Elloul jusque Kippour, le 10 Tichri, doit être consacrée à ce travail d’apaisement des conflits.

Alors, comment comprendre le Kol Nidré ? Il faut le replacer dans l’ensemble de la liturgie de Yom Kippour, qui est une analyse lucide et sans complaisance de nos comporte-ments. La prière de Kippour met l’accent sur notre inconsistance. Nos faiblesses et nos manquements sont énumérés plusieurs fois

tout au long du Kippour. C’est comme si nos âmes étaient mises à nu. Dans ce contexte, le Kol Nidré est une expression d’humilité : « Maître de l’univers, je me connais, je sais ma fragilité, je ne viens pas, au jour de Kip-pour, avec des alibis. Ce ne sont pas mes mérites, même si j’en ai, qui me sauveront, mais Ton amour. »

On a pu dire aussi que c’était une formule qui permettait de réintégrer tout ceux qui avaient été forcés de se convertir tout au long des siècles et, surtout, au moment de l’Inquisition et qui, après avoir échappé aux griffes de leurs persécuteurs, sont revenus à leur Judaïsme. C’est possible qu’il y ait dans Kol Nidré une allusion à tout cela. Mais le texte est bien antérieur à l’Inquisition…

Peut-être aussi, étant donné le long cal-vaire que fut l’histoire des Juifs parmi les Nations, l’expression d’un problème, d’une souffrance : pour simplement survivre, il fallait plus qu’une formidable foi en la vie, il a fallu de l’ingéniosité et peut-être, parfois, de la ruse dans un environnement hostile et implacable…

Il y a encore un aspect psychologique du Kol Nidré ; un peuple qui étouffe a besoin d’une soupape pour relâcher, abaisser la tension psychique d’une communauté si souvent dans la tourmente.

Je voudrais terminer sur un commentaire que j’ai trouvé et qui jette sur cette problé-matique difficile une note d’humour : depuis que nous nous sommes engagés au Sinaï, ta Tora, Maître de l’univers, nous a désigné à toutes les opprobres, à toutes les hostilités, à tous les écrasements ; nous n’en pouvons plus, nous voulons dénoncer notre enga-gement, renoncer à ta Tora. Trouve-toi un autre peuple! Combat secret de l’âme juive, permanent, mais impossible. Nous sommes et restons Israël. ■

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Le Kol Nidré ou résiliation des vœux Par Schalom Ben Chorin

« Le Judaïsme en prière, la liturgie de la Synagogue »

Fritz Rosenthal naquit en 1913 à Munich où il fit des études de philosophie, de langues germaniques et de sciences com-parées des religions. En 1935, il fit partie de la cinquième aliya, hébraïsa son nom et devint Schalom Ben Chorin (Paix, Fils de la Liberté). Il passa rapidement d’un judaïsme orthodoxe à un judaïsme ouvert qui s’appuyait sur les courants réformateurs de l’Allemagne du 19ème siècle. Il considère l’Etat d’Israël comme un lieu protecteur où chaque Juif pourra vivre son judaïsme comme il l’entend. En 1958, il fonda la première communauté juive réformée « Har-El » (la montagne de Dieu). C’est avec cette communauté qu’il réalisa le tout premier Sidour du mouvement réformé ». Il oeuvra toute sa vie pour le dialogue avec les Chrétiens et les Musulmans. Il est l’auteur de nom-breux ouvrages dont plusieurs sont tra-duits en français. Parmi ceux-ci « Mon Frère Jésus » (Ed.Cerf) et « Le Judaïsme en prière, la liturgie de la Synagogue » (Ed.Seuil). C’est de ce dernier ouvrage que nous extrayons un passage sur le « Kol Nidré ».

Schalom Ben Chorin est mort à Jérusa-lem en 1999. Nous reviendrons dans un prochain numéro du Shofar sur cette personnalité d’exception. M.E.

La formule du Kol Nidré, qui introduit l’of-fice de la veille de Yom Kippour, consiste à

résilier tous les voeux prononcés au cours de l’année.

On n’est pas d’accord sur la date d’origine de cette formule ainsi que sur le moment où elle fut insérée dans la liturgie, mais cela a certainement dû se passer au cours du 1er siècle gaonique, au 7ème siècle, à Babylone. Dès le 9ème siècle, on connaissait les pro-pos des Gaonim s’élevant contre cette for-mule. Pourtant, elle fut maintenue dans la liturgie. Au 12ème siècle, Yocob ben Meir Tam élargit cette liste de voeux aux voeux que l’on allait prononcer. Cette formule est dite en araméen ; dans le rite romain, ainsi que dans certains pays des Balkans, on utilise une version hébraïque. La résiliation des voeux ne s’applique qu’à l’individu qui la pro-clame ; elle ne s’étend pas aux serments ou aux engagements pris envers le prochain.

Cette décision est importante car les calom-nies antisémites attaquent cette formule et les Juifs, en traitant ces derniers de parte-naires peu crédibles dans les affaires :

Ne te fie pas au renard sur la verte prairie,Ne te fie pas au Juif pour ses serments,

prétend un proverbe allemand particuliè-rement haineux qui a toujours cours dans maintes familles bourgeoises ou paysannes.

Cette formule est rattachée à une autre qui met l’accent sur le fait qu’en ce jour de grande sainteté, nous prions avec tous les pécheurs. On a supposé que ces pécheurs

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seraient les Marranes, ces Juifs contraints au baptême en Espagne et au Portugal à la fin du 15ème siècle et qui se replièrent par la suite dans les communautés d’Amsterdam et de Hambourg.

Le Kol Nidré n’est pas une prière, c’est une formule d’absolution par annulation des voeux, qui fut mise en musique de façon tout à fait poignante et qui va droit au coeur.

Dans les liturgies réformées, on remplaça le Kol Nidré par une prière demandant à Dieu de recevoir l’offrande de notre service ou bien par le Psaume 130 « Des profondeurs, je crie vers Toi », qui est chanté sur le même air que le Kol Nidré.

Le consigne de ce jour du Grand Pardon se trouve dans ce passage des Nombres 15,26 : « Et il sera pardonné à toute la communauté

des enfants d’Israël comme à l’étranger qui séjourne parmi eux, car tout le peuple a péché. »

C’est à cela que se rattache la prière pour obtenir le pardon, telle que nous la lisons en Nombres 14, 19-20 : « Pardonne le crime de ce peuple selon Ton infinie clémence ainsi que Tu as pardonné à ce peuple depuis l’Egypte jusqu’ici ! » Le Seigneur répondit : « Je pardonne selon ta demande ».

Telle est la grande nouvelle, celle se référant au pardon des péchés, à laquelle la commu-nauté tout entière se soumet depuis la veille jusqu’au soir de ce jour de Yom Kippour.

La couleur liturgique de ces deux solenni-tés est le blanc « car vos péchés sont rouges comme le pourpre et ils deviendront blancs comme la laine » (Is 1,18). ■

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Gershom Scholem(1897-1982)

Pendant plusieurs mois, nous avons réfléchi à la pensée de Leo Baeck (1873-1956). J’aimerais à présent vous pré-senter une autre personnalité inclas-sable, mais qui reste d’une importance exceptionnelle pour son temps et pour le nôtre : Gershom Scholem.

Gerhard Scholem naît à Berlin, au sein d’une famille qui observe encore cer-taines traditions juives, mais n’a plus aucun lien religieux avec le judaïsme. Adolescent, il se sent attiré par tout ce qui touche à l’histoire du peuple juif, sa langue et sa pensée. Jeune homme, il adhère au mouvement sioniste. Dans cette Allemagne du début du 20ème siècle, le monde juif est d’une richesse intellectuelle foison-nante. Gershom Scho-lem participe à des groupes actifs sur le plan philosophique, mais aussi sur le plan politique, qu’ils soient de mouvance sioniste ou socialiste. Il fait la connais-sance de tous leurs responsables. Nous ne citerons ici que Martin Buber (1878-1965), son aîné, envers qui il mani-festa toujours une grande estime et un profond respect, sans toutefois par-

tager toutes ses idées, notamment sa conception du hassidisme, Walter Ben-jamin (1892-1940) à qui, malgré leurs grandes différences, l’unissait une pro-fonde amitié et Zalman Rubaschoff qui deviendra plus tard président de l’Etat d’Israël sous le nom de Zalman Shazar.

Dans son livre autobiographique « De Berlin à Jérusalem » (Ed. Albin Michel, coll « Présence du Judaïsme »), Scholem raconte, avec des détails extrêmement

intéressants, tant du point de vue privé que du point de vue politique, sa jeunesse jusqu’à son départ de l’Allemagne, en 1923, et son arrivée en Palestine. C’est alors qu’il échangera « Gerhard » pour son prénom hébraïque Gershom.

J’ai la chance de pos-séder un enregistre-ment de 2 CD-Rom, réalisé en 1967. Gers-

hom Scholem y raconte, dans sa langue maternelle, l’oeuvre pionnière qui fut celle de sa vie : la redécouverte de la mystique juive. En effet, depuis que Mendelssohn, et après lui la Haskala, eurent repensé le Judaïsme en s’ap-puyant sur la raison et la philosophie,

Par Monique Ebstein

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la mystique avait été reléguée aux oubliettes, et même considérée comme quelque chose dont il valait mieux ne pas parler. C’est le long récit de Scho-lem que j’ai voulu transcrire et tra-duire pour les lecteurs du Shofar. Je ne sais pas si je saurai rendre cet humour typiquement berlinois, qu’il avait gardé malgré les 43 ans qu’à cette époque il avait déjà passés en Palestine d’abord, en Israël ensuite.

M.E.

***

Enfance berlinoise« Je voudrais vous parler un peu de ma vie et de mon travail. Ce travail qui a duré toute ma vie, et qui touche un domaine extrême-ment spécialisé : la mystique juive.

Je suis né au sein d’une famille juive ber-linoise. Jusqu’en 1812, lorsque les Juifs ont obtenu les droits civils en Prusse, elle vivait à Glogau, en Silésie. Puis, il y a environ 150 ans, elle s’installa à Berlin. A ma naissance en 1897, je faisais partie de la 3ème génération qui y résidait. Depuis plusieurs générations, ma famille possé-dait une imprimerie, et j’ai, aujourd’hui encore le « chef d’oeuvre » d’apprentis-sage de mon grand-père. C’est un volume de poèmes allemands, de bien curieux poèmes..... Or, mon grand-père, né à Berlin en 1830, était la personnification même du passage des Juifs à la culture allemande. A sa naissance, il se nommait Scholem Scho-lem, mêmes prénom et nom, ceci pour des raisons dues à l’histoire de notre famille. Et lorsque, dans les années cinquante, il devint un wagnérien enthousiaste, il se nomma Siegfried Scholem, ce qui fut aussi

le nom de son entreprise. Sur sa tombe, que j’ai étudiée par la suite, à Berlin Weis-sen See, on peut encore lire, sur la partie gravée en hébreu, « Scholem Scholem, alors que sur la partie en allemand figure Siegfried Scholem.

Mon père fut également propriétaire d’une imprimerie. Il était très actif dans l’Asso-ciation des gymnastes berlinois. Je pos-sède encore un petit livre qu’il avait rédigé en 1887 : « Tout pour les gymnastes berli-nois ».

Ma famille était une famille typiquement bourgeoise et émancipée, où l’assimilation à la culture allemande était très avancée. Il n’y avait presque plus rien de juif chez nous, sauf, comme dans beaucoup d’autres familles juives, le vendredi soir qui était devenu une réunion familiale ou les mem-bres de la famille se réunissaient dans la maison de notre grand-mère, et plus tard, dans la maison de mon père ou de l’un de ses frères. A part cela, il n’y avait rien de juif chez nous. Cependant jusqu’en 1917, c’est à dire durant les vingt années où j’ai grandi dans la maison paternelle, je n’ai jamais vu un non-Juif nous rendre une visite à titre privé. Ces Juifs qui se sen-taient véritablement allemands, ne fré-quentaient que des Juifs.

Au cours des années précédant la guerre, alors que j’allais à l’école, l’atmosphère qui régnait à Berlin était calme. Je conçus un très vif intérêt pour l’histoire et c’est alors que je tombais sur la grande oeuvre de Heinrich Graetz : « L’Histoire des Juifs », l’une des ouevres les plus importantes de l’historiographie juive. Cette oeuvre volu-mineuse, que je lus avec l’enthousiasme d’un jeune garçon extrêmement intéressé par l’évolution historique, me fit une très grande impression. Elle m’incita à appren-

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dre l’hébreu. Mes parents n’en étaient pas très contents. De mon côté, je ne savais trop comment m’y prendre, et j’essayais pendant un an et demi d’étudier tout seul, car je ne connaissais personne à qui j’aurais pu m’adresser, jusqu’à ce que je rejoigne un groupe d’autres jeunes gens de mon âge qui, très jeunes déjà, avaient adhéré au mouvement sioniste. De 1912 à 1917, je fus très engagé dans ce groupe dont la plu-part des membres, presque sans exception, sont partis très tôt en Palestine. J’ai donc commencé à apprendre l’hébreu. Pendant environ 10 ans, je l’ai étudié très intensé-ment en plus de mes études régulières. J’ai eu beaucoup de chance, car j’ai rencontré à Berlin, un homme très calme, très réservé, le Dr Bleichrode. Il était le rabbin d’une toute petite synagogue privée, au centre de Berlin, une synagogue très pieuse. Son arrière-grand-père, le Dr Akiva Eiger était, au début du siècle dernier, sans doute le plus grand talmudiste d’Allemagne. Lui-même était un homme très pieux avec la particularité de ne s’être jamais marié, ce qui n’est pas vu d’un bon oeil chez un rabbin. Il avait eu autrefois un amour de jeunesse, et lorsque la jeune fille lui fut refusée, il décida de ne jamais se marier. Je dois beaucoup à cet homme calme et silen-cieux. J’ai étudié auprès de lui, pendant de longues années la littérature hébraïque, le Talmud, les textes en version originale. Plus tard, après avoir quitté Berlin, alors que je terminais mes études à Munich, j’ai rencontré là-bas un autre grand talmudiste, le Dr Ehrentreu. Il était le rabbin de la com-munauté orthodoxe, et avec lui j’étudiais tous les jours le Talmud pendant une ou deux heures. Ils sont mes maîtres, ce sont eux qui m’ont transmis la connaissance et l’amour de la tradition juive. J’étudiais avec intensité, mais en même temps j’étais pro-fondément pénétré par l’idéologie sioniste, c’est à dire la Renaissance du peuple juif dans un pays qui serait le sien. Pendant la 1ère guerre mondiale, je décidai que si

j’y survivais, j’irais en Palestine moi aussi, comme tant de mes amis de jeunesse.

Sciences pour crève-la-faimC’est en 1915 que je commençais mes études, et je choisis d’abord les mathé-matiques. J’étais passionné par le travail et la pensée mathématiques, j’avais aussi quelque talent en la matière. J’ai fait des études complètes, jusqu’à l’examen d’Etat final et le doctorat. Je fus cependant bien-tôt convaincu que mes capacités réelles ne résidaient pas dans la pensée mathémati-que créatrice. Cela devint pour moi une évidence, lorsque, au cours de mon 5ème semestre, durant l’été 1917, je participai à un séminaire qui se tenait dans un amphi-théâtre de l’Université de Berlin. Les par-ticipants n’étaient pas très nombreux, car beaucoup de jeunes gens étaient à la guerre. Nous discutions d’algèbre. Or, chaque fois qu’un problème se présentait, et que nous ne savions pas très bien com-ment le résoudre, ni le professeur du reste, celui-ci s’adressait à un des étudiants : « Alors Monsieur Siegel, qu’en pensez-vous ? » et Monsieur Siegel avait toujours une solution. C’est ainsi que je me rendis compte de ce que représentait une ima-gination mathématique véritable chez un mathématicien de premier plan. Monsieur Siegel qui, si je ne m’abuse, devint plus tard le plus grand mathématicien d’Allemagne, fut le signal qui me convainquit que, malgré tout mon amour pour les mathématiques, je ne serais jamais un mathématicien émi-nent. J’ai cependant continué ces études qui étaient mes études principales, mais je poursuivais en parallèle, avec tout autant de passion, mes études juives : l’hébreu, la littérature hébraïque et les sources des Ecritures juives. En ces temps-là, il n’était pas courant que quelqu’un se plonge avec toute son énergie dans de telles matières, surtout lorsqu’il n’avait pas l’intention de devenir rabbin, ou d’envisager une car-rière de théologien juif.

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Mon père n’était pas du tout d’accord avec le parcours que j’avais choisi. Il disait :

- Monsieur mon Fils n’étudie que des scien-ces pour crève-la-faim. Monsieur mon Fils s’intéresse aux mathématiques, aux mathé-matiques pures. Je dis à Monsieur mon Fils : « Que veux-tu ? Tu t’intéresses aux mathé-matiques ? En tant que Juif, tu n’as aucune chance de faire une carrière à l’université. Tu ne pourras pas y obtenir un poste impor-tant. Deviens ingénieur ! Pendant tes heures libres, tu pourras faire autant de mathéma-tiques que tu voudras. Mais non, seulement des mathématiques pures, rien que des sciences pour crève-la-faim. Monsieur mon Fils s’intéresse aux études juives ! Je dis à Monsieur mon Fils : « Dans ce cas, sois rab-bin ! Tu pourras faire des études juives tout ton soul ! Mais non, Monsieur mon Fils ne veut en aucun cas devenir rabbin. Rien que des sciences pour crève-la-faim !

Telle était la position de mon père, qui, hélas, mourut quelques mois seulement avant que je ne commence à enseigner à l’Université de Jérusalem !

Premières études de CabaleTrès vite, j’eus envie d’ étudier la Cabale, c’est à dire la mystique juive. Mon intérêt est très ancien, il date d’il y a plus de cinquante ans ! Il y avait sans doute des raisons très dif-férentes à cet intérêt. Dans son magnifique ouvrage « L’Histoire des Juifs », Graetz parle beaucoup de la mystique envers laquelle il

avait la plus grande réticence, comme du reste la plus part des érudits juifs du siècle précédent. Il avait la plus grande réticence pour tout ce qui touche à la mystique juive, et même à la mystique religieuse tout court. Il nomme les textes classiques de la mystique juive des « livres de mensonges », et il accable les cabalistes de toutes sortes de remarques péjoratives et méprisantes. Or, quelque chose qui n’était pas de l’ordre de la raison me disait qu’il était impossible que les cabalistes aient été de tels illuminés ! Mon intuition me soufflait qu’il y devait avoir quelque chose de caché, et c’est justement cela qui m’attirait. Voilà pourquoi je me mis avec ardeur à lire des textes de cabalistes. A cette époque, en Allemagne, cela n’était possible qu’au prix de grandes difficultés, car il n’y avait personne qui puisse vous orienter. Mon professeur lui-même essaya un jour de lire un de ces textes. Mais au bout de quelques semaines, il avoua : « Je ne le comprends pas, je ne peux pas vous l’expliquer. Il faut que nous en restions là. » C’est alors que je me plongeais seul dans ce monde, par la lecture de toutes sortes de tex-tes, en allemand, en hébreu, en français. Sans aucun doute, l’intuition, comme si souvent, avait joué le rôle principal, c’est à dire qu’elle précéda dans le temps, le travail scientifique de critique historique que par la suite, je pour-suivis pendant de très longues années. J’avais eu l’intuition de ce que je cherchais, et c’est cette intuition que par la suite j’ai essayé de concrétiser par des méthodes scientifiques. ■ (à suivre)

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Hommage à André Neher10 et 11 mai 2009

Il y a 20 ans disparaissait André Neher (1914 -1988) , une des gran-des figures de la pensée juive au 20ème siècle. Que reste-il de

son enseignement aujourd’hui ?

C’est la question que se sont posée plusieurs personnalités réunies au n°119 de la rue La Fayette. La plupart ont connu André Neher et certaines d’en-tre elles ont suivi son enseigne-ment. Pour ma part, je ne puis malheureusement me targuer de cet avantage, mais je me rappelle très bien sa frêle sil-houette, entourée d’étudiants, lorsqu’il traversait la place de l’Université à Strasbourg, et que je me rendais moi aussi de ma maison toute proche au Palais universitaire.

C’est en 1914, à Obernai, - soit dit en passant, à quelques kms de Rosheim, la ville où Yossel avait vécu 400 ans plus tôt, – qu’est né André Neher, l’année même où éclatait le terrible conflit qui allait ensanglanter l’Europe. Si l’enfant n’a pu être affecté personnellement par la 1ère Guerre Mondiale, c’est en tant que jeune adulte qu’il a vécu la 2ème. Agrégé d’allemand, il enseigna d’abord cette langue

dans un lycée dont il fut exclu lors de la pro-mulgation des lois de Vichy, sans qu’aucun de ses collègues n’intervienne en sa faveur. Ce fut pour lui un réel traumatisme. Après la guerre, il devint rabbin et fut nommé profes-seur de langue et de littérature hébraïques anciennes et modernes à la faculté de Lettres de Strasbourg, seule Université française qui possédait à l’époque une chaire pour ces dis-ciplines.

Freddy Raphaël, sociologue et professeur émérite à l’Université Marc Bloch de Stras-bourg, a rappelé, en tant que 1er orateur,

les liens personnels très forts qui l’avaient attaché dans sa jeunesse à André Neher. Le maître savait traduire en ter-mes juifs les problèmes phi-losophiques que posaient les jeunes qui le suivaient. Il les fascinait parce que le moteur de sa démarche était une ten-sion permanente entre le sin-gulier et l’universel. La « Dou-

ble Demeure », titre d’un livre écrit par son père, Albert Neher, a été celle d’An-dré : l’Alsace où il est né et Jérusalem où il est mort. L’Alsace, pays antérieur, terre où des Juifs ont vécu à partir du 11ème siècle et où, s’ils ne s’y sont pas enracinés, ils ont laissé des traces. Terre où ils n’ont pas été, comme ailleurs, parqués dans des ghettos, mais où ils ont subi un enfermement social et moral dû aux nombreuses accusations de perfidie, de complots, de crimes rituels.

Par Monique Ebstein

Le moteur de la démarche

d’André Neher était une tension permanente entre

le singulier et l’universel.

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Ils étaient, pour la société environnante, la personnification du mal essentiel. Au 18ème siècle, la philosophie des Lumières et la Révolution de 1789, eurent le mérite de les introduire comme acteurs à part entière dans l’histoire. Les Juifs d’Alsace refusèrent cependant de payer leur accès à la citoyenneté française par un renoncement à leurs struc-tures communautaires. Ils continuèrent à traduire leur « yiddishkait » par une double responsabilité, à savoir envers la société française et leur communauté. André Neher participait de cette vie juive en Alsace qui baignait dans la simplicité et la fidélité, ne récusant ni la fête, ni l’humour que traduisait une langue riche et colorée, aujourd’hui hélas en voie de disparition. Par fidélité aux valeurs juives essentielles, le père d’André Neher avait oeuvré à l’intégration parmi les Juifs alsaciens de leurs coreligionnaires immi-grés des pays de l’Europe de l’Est, à la fin du 19ème et au cours de la 1ère moitié du 20ème siècle. Il n’y était guère parvenu, car l’accueil de cette nouvelle population fut un réel échec. Par contre, André Neher et sa femme Renée Neher-Bernheim ont été les artisans d’une immigration réussie, celle des Juifs venus d’Afrique du Nord après la 2ème guerre mondiale. Pour André Neher et son épouse, la Terre Promise où ils firent leur aliya en 1968 n’a jamais été hors de l’horizon alsacien.

Le Grand Rabbin René-Samuel Sirat prit ensuite la parole pour rappeler le rôle d’André Neher dans la renaissance de la pensée juive après la guerre et la Shoah. Au lendemain de la Libération, le Judaïsme de France était à terre, et semblait n’avoir aucune chance de se relever. André Neher abandonne alors la thèse de littérature alle-mande qu’il avait presque achevée pour se

consacrer exclusivement aux études juives. Il devient, avec Léon Ashkénazi, et Emma-

nuel Levinas, un maître de l’Ecole française de pensée juive. Son talent pédagogi-que ainsi que son bonheur d’écriture hors pair couvrent de nombreux sujets bibli-ques, philosophiques et litté-raires. Parmi les innombra-bles sujets qu’André Neher traita dans sa vie, le Grand Rabbin Sirat a choisi d’en illustrer un : « Cité des hom-mes et Cité de Dieu, ou Césa-rée, Babel et Jérusalem ».

D’après l’enseignement d’André Neher, le véritable débat entre Dieu et le monde n’est pas le débat entre Dieu et le Mal, mais le débat entre Dieu et la Cité humaine. Car si Jérusalem, la Cité juive, est duelle, à la fois malkout hashamayim et malkout haarets, (royaume céleste et royaume terrestre), d’autres formes de Cités humaines exis-tent et se réclament d’une même légitimité : Césarée qui représente toute forme prise par la Cité humaine au cours de l’histoire, et Babel qui représente la Cité édifiée sur la notion politique et animale de l’homme : écrasement de l’individu par la collectivité, civilisation de masse, une seule langue, un seul projet, une seule technique. Déper-sonnalisation : le travail n’est pas arrêté lorsqu’un ouvrier est écrasé, mais l’oeuvre entière est ébranlée lorsque par mégarde, on casse une brique. Modernité d’André Neher !

Le colloque se poursuivit par une table ronde au cours de laquelle trois orateurs, Patrick Petit-Ohayon, chef du Département de l’Enseignement du F.S.J.U., Benjamin Touati, directeur de l’Institut André Neher et le Rabbin Claude Sultan, prirent la parole sur le thème : « Dans le sillage d’André Neher : Quelle place pour la pensée juive dans l’éducation ? »

Le véritable débat entre Dieu et le

monde n’est pas le débat entre Dieu et le Mal, mais le débat entre Dieu et la Cité

humaine.

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Ils évoquent les nombreux problèmes que pose actuellement l’enseignement de la pen-sée juive, le choix des programmes et des auteurs à étudier. Plusieurs difficultés, qui sont autant d’écueils, doivent être surmon-tées. Parmi celles-ci, et non la moindre, la for-mation des maîtres qui jusqu’à présent, dans les yeshivot, étaient appelés à dispenser un enseignement doctrinal d’où étaient tout à fait absents des penseurs modernes tels que Neher, Ashkénazi et Levinas. Or, il convient de se demander quelle est la position de la pen-sée juive dans la philosophie, car les maîtres ne sont pas for-cément des philosophes, ayant été le plus souvent formés pour faire de l’exégèse de textes, alors que les grands auteurs (Maïmonide, Yehuda Halevy.....) ne sont pas, eux, des commentateurs bibli-ques. Les maîtres risquent donc d’être enfer-més dans la vision d’un seul courant du monde juif (orthodoxe, loubavitch....), ce qui rend impossible aux étudiants de découvrir toute l’étendue, la diversité et la richesse de la pensée juive. Du reste, comment définir et identifier ce qu’est la pensée juive ? Comme l’enseignement se prodigue différemment aujourd’hui par rapport à la période d’avant la guerre, le maître ne peut plus se contenter d’enseigner une doctrine à travers des commentaires apologétiques du Pentateuque, de la Sidra hebdomadaire, du Midrach et de la Michna. Il est nécessaire pour parler aux jeunes d’aujourd’hui, de par-tir des problèmes de l’actualité (euthanasie, sida, droits de l’homme, fécondation in vitro, mères porteuses....).

Mais encore une fois « qu’est-ce que la pen-sée juive ? », il faut bien se rendre compte que tout le monde a le sentiment d’enseigner la pen-sée juive. Est-ce enseigner la sidra hebdoma-daire ? Rachi ? la « philosophie » juive ? Est-ce enseigner les philosophes du Moyen Age, tels Maïmonide, Yehuda Halevi, Gersonide ? Est-ce

enseigner la pensée d’un auteur moderne comme celle d’André Neher ? En résumé est-ce enseigner « une » pensée juive, ou plutôt une démarche pour apprendre à « penser juif » ? Pour réussir cette tâche, il faut savoir répondre aux questions concrètes posées par les élèves (pourquoi le Shabbat ? pourquoi les Fêtes ? que signifient les rites ?) Il faut savoir trouver dans les textes des éléments de réponse, et montrer la richesse et la diversité de celles que l’on

peut apporter aux différentes questions. Il ne faut pas néces-sairement partir des textes, mais savoir y revenir en les contex-tualisant, par exemple ne pas omettre de situer chaque pen-seur juif dans son temps. L’ensei-gnement approfondi de l’histoire juive, négligé jusqu’il y a peu, est fondamental. Aujourd’hui, le

judaïsme français est certes très dynamique, mais encore trop traditionnel. L’école ortho-doxe a du mal à se tourner vers la modernité. Pourtant, « penser juif », c’est se mettre à l’école de la tolérance, accepter que soit exprimée une opinion différente de la sienne, argumenter et discuter avec son contradicteur, car la parole extirpe la violence. Enseigner la pensée juive, c’est enseigner à penser librement.

David Banon, professeur des Universités, directeur du département d’études hébraï-ques et juives, a choisi comme titre de sa conférence « André Neher ou le dialogue inter-humain ». Il rappelle que pour Platon, le dialogue était le silence de l’âme s’entre-tenant avec elle-même, alors que Buber et Rosenzweig font de ce dialogue une philo-sophie de l’existence. En effet, en 1925, ils commencent la traduction de la Bible, et en découvrent l’armature dialogique notamment dans le livre de Job et l’épisode de Bilaam. Ils entendent la foi comme une audace et un « paradoxe », non comme un « paradis », une foi qui court le risque de mettre en question ses propres certitudes. Pour Rosenzweig le dialogue est inhérent à tous les livres de

la foi comme une audace et

un « paradoxe », non comme un

« paradis »

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la Bible, en particulier aux Psaumes et aux Prophètes. C’est à la lumière de cette lec-ture existentielle de la Bible qu’André Neher développe sa propre conception du dialogue. Lorsque les hommes dialoguent, ils ne par-lent pas ensemble, mais l’un après l’autre : la pause intermédiaire qui sépare leur discours leur permet de s’entendre. Le silence est donc la partie motrice du dialogue. André Neher a entrepris la lecture de la Bible à partir du silence. Il l’enseigne dans ses livres « Du silence biblique au silence d’Auschwitz » et « Le Puits de l’Exil ». Janine Elkouby, professeur agrégée de lettres à l’Université de Stras-bourg se réclame du même judaïsme qu’An-dré Neher. Elle a intitulé son intervention : « Neher et l’école de pensée juive de langue française : Quel avenir pour le projet nehé-rien ? » Issue d’une famille alsacienne, prati-quant un judaïsme traditionnel, elle pénètre dans le monde intellectuel grâce à André Neher dont l’ouverture lui permet de faire dialoguer le judaïsme et la pensée occiden-tale. Grâce à son enseignement, les textes juifs, considérés comme inférieurs par les chrétiens pour qui l’amour prime la Loi, sont réhabilités. Neher réalise une jonction entre le particulier et l’universel, mais sans que l’uni-versel ne sacrifie le particulier. Sa lecture est éclairante et vivante pour nos contemporains, car le judaïsme qu’il enseigne parle au pré-sent, à la fois aux Juifs et au monde. Mais où en sommes-nous aujourd’hui par rapport au projet d’André Neher ? Il faut bien constater que la société juive a beaucoup changé tant en France qu’en Europe. Une partie de cette société affiche à la fois indifférence et igno-rance. Par contre, les Juifs qui sont revenus à

la religion se radicalisent de plus en plus. Leur retour se fait de façon dogmatique et fermée qui très souvent leur fait considérer la halakha comme un but en soi. Ils affichent un grand mépris pour tout ce qui est hol ou laïque, le considérant comme une perte de temps, voire un danger. Ce mépris s’étend au monde non-

juif avec lequel ils refusent de dialoguer, d’où un immobilisme crispé, dû à la peur. L’exemple le plus frappant est le statut de totale inégalité maintenu à l’égard des femmes, souvent plongées dans une situation de profonde détresse, comme par le refus du guet (acte de divorce). De plus, jusqu’en 1985, le judaïsme fran-çais a connu des années de grâce

où l’antisémitisme était frappé d’infamie. La mise en cause politique d’Israël a provoqué une résurgence d’un antisémitisme pseudo-humaniste qui n’est plus seulement d’extrême droite mais aussi de gauche, et qui peut se tar-guer d’avoir à présent pignon sur rue. Cette situation entraîne un repli communautaire juif de plus en plus important, aussi les disciples d’André Neher se sentent-ils aujourd’hui bien seuls. Cependant même si le Maître a disparu, ceux qui l’ont suivi et qui partagent son projet, ne doivent pas baisser les bras ni s’arrêter en route. Ils restent fidèles au « velakhen », « et pourtant » néhérien.

Ce passionnant colloque s’est poursuivi une 2ème journée, le 11 mai. Je n’ai malheureusement pas pu y assister. Devaient y prendre la parole : les Rabbins Alexis Blum et Jacquot Grunewald, Nelly Hanson, directrice de la Fondation du Judaïsme français, Lucien Lazare, historien, membre de la commission pour la désignation des Justes des Nations pour Yad Vashem, et Benjamin Gross, professeur émérite de philo-sophie à l’Université de Bar-Ilan. ■

les Juifs qui sont revenus à la religion se

radicalisent de plus en plus.

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Balaam … from the book of Numbers to Deir ‘Alla

1. Balaam in the book of NumbersMa tovu ohaleHa mishkenoteHa Israel, ‘How goodly are thy tents, O Jacob, thy dwellings, O Israel1’… Who is not acquainted with these words, which accompany us every Shabbath morning, when we enter our synagogue! We find them in Numbers 24 :5, which is part of Parashah Balak. It is not the only verse in this part of the Torah, that has captivated generations of Bible readers and scholars of all possible denominations. Both Jewish and Christian exegetes have also pointed out to the meaningful and Messianic character of Numbers 24 :17 ‘there shall step forth a star out of Jacob, and a sceptre shall rise out of Israel’. Their messianic hope was even more enhanced knowing that ‘God is not a man that he should lie, neither the son of man, that he should repent’ (Numbers 23 :19).

The common characteristic of all these pronouncements is that they were made

by Balaam, son of Beor, unmistakeably the leading figure of Parashah Balak (roughly chapters 22 – 24 of the book of Numbers). How to summarize the content of this parashah ? Perhaps as a chronicle of missed chances to curse the people of Israel ? ‘The Moabites were sick with fear at the sight of them’ (Numb. 22 :3). Their king Balak esti-mates that a possible solution to address this fear is to place curses on Israel, and so he instructs his fortune-teller Balaam to use all his magic to that effect. Balaam is quite willing to give satisfaction to his king, but alas … his mission turns out to be a complete failure ; instead of the ordered damnations Balaam delivers only blessings over the people of Israel, and moreover, they are not simply blessings but powerful benedictions which have eternal value due to their poetic force. Which is why they take a permanent place in synagogue and church services.

Pieter Jehudah Van Cauwenberge

1 All biblical references are taken from THE HOLY SCRIPTURES according to the Massoretic Text, the Jewish Publication Society of America, 5723-1963.

I became a member of the Jewish community of Ghent in 1987, where I lear-ned some Hebrew with several teachers. After a while my interest in Judaism had grown considerably, so that I wanted to investigate the matter more thoroughly. That’s why, after studying Chemistry in my youth, I went back to the university of Ghent to study Semitic languages. In 1994 I promoted as Master in Oriental Studies, with Prof. Dr. Julien Klener as my promotor. The languages I specialized in were Biblical Hebrew and Accadian, but also Archaeology of the Middle East attracted my attention. During several trips to Israel I had the opportunity to visit a lot of the Archaeological tells. I became an active member of the Beth Hillel community some 2,5 years ago.

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It is hardly surprising to read further that, after this series of failures ‘Balak was very angry with Balaam’ (Numb. 24 :10), and of course Balaam has to return his unachieved mission to the king. At the end of chapter 24 we read this laconic remark ‘and Balaam rose up, and went and returned to his place, and Balak also went his way’.

The rest of the Tanach mentions Balaam only scarcely. In Numb. 31 :8 we get some more information about the conflict between Israel and its neighbouring tribes : ‘and they slew the kings of Midian … they slew also Balaam, the son of Beor with the sword’ (he appa-rently collaborated with the Midianites). Prophets such as Nehemiah and Micah mention casually the name of Balaam, but we are not getting any wiser about his enigmatic per-sonality.

2. Balaam in Rabbinic literature.How did the Rabbis look at the complex perso-nality of Balaam ? A superficial lecture of Numb. 22-24 could perhaps give a nuanced view of Balaam ; after all didn’t he bless the people of Israel several times ? Rabbinic literature on the contrary gives us a more one-sided view on his personality. For the Talmud, the action of Balaam had only one purpose : the destruction of Israel. After all, it is no coincidence that the account continues with ‘the people began to commit har-lotry with the daughters of Moab’ (Numb. 25 :1), which results in the death of twenty four thou-sand children of Israel. The Rabbis clearly asso-ciated this disaster with the action of Balaam, so it is of no surprise that we encounter Balaam, always cited in a negative context in both Talmu-dic and post-Talmudic literature.

A crucial text is the Mishna in bSanhedrin

90a ‘Three kings and four commoners have no share in the world to come … The four commoners are Balaam, Doeg, Achitofel and Gehazi’. Several Rabbis have dwelled at length on this Mishna, allowing us to make sort of a robot picture of the personality of Balaam (as seen in Talmudic times) ; Remar-kable is that even his outward appearance is commented.

2.1. The name Balaam.As mentioned by W.F. Albright2 the name

Balaam is a well attested name of NW Semitic type, whose last part clearly refers to Am, peo-ple. In biblical lexicons the ety-mology of the name Balaam is discussed. And also the Gemara on the previous Mishna gives us some insight (e.g. bSanhedrin 105a)3.

* The most obvious etymological explanation for the name is bala am, ‘he devoured people’.

* A second possibility is yavel am, which means ‘he who brings the people’ (towards an undesired destination, in this case!).

* But also balah am, could give a new insi-ght into the character of Balaam ; the verb means ‘to decay’ or ‘to be worn out’ (for garments for instance) ; so it allows to infer that he is at the origin of the decay of the Jewish people.

* And yet all possibilities are not exhausted, as there is one more :beli am, ‘without a people’, which points to a lonesome egoist, someone without spiritual roots.

2.2. His depraved sexual nature.In bSanhedrin 105a we learn that ‘the son of Beor denotes that he committed bestiality’. Indeed, be’ur is scarcely different from be’ir (meaning cattle or animal) and suggests an affinity with animals. The Rabbis didn’t have

The most obvious etymological

explanation for the name is bala am ‘he devoured

people’

2 ALBRIGHT, WILLIAM FOXWELL, The oracles of Bileam, Journal of Biblical Litterature, 63, 1944, pp. 207-233.3 All quotations of the Talmud are cited from ‘THE BABYLONIAN TALMUD under the editorship of Rabbi I. Epstein’ (Soncino

edition).

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to search far to find the animal involved. In the biblical account we already read about the conversation between Balaam and his she-ass. So It follows easily that Balaam’s she-ass is his sexual partner.

bSanhedrin 105a also indicates that Mar, son of Rabina says “he committed bestiality with his ass … because here it is written ‘he bowed, he lay down as a lion and as a great lion’ (Numb. 24 :9), whilst elsewhere it is written ‘at her feet he bowed, he fell’ (Judges 5 :27)”. The Rabbis have seen the verbal similarity in both passages (gezera shawa!), the latter telling about Jael, the wife of Heber, from which it is assumed that she had a sexual relation with Sisera, before exe-cuting him (Judges ch.4).

2.3. Antagonist of Moses. When Moses and Aaron appeared before Pharaoh, and the miraculous transformation of their rods into serpents was achieved, Balaam was one of their opponents. He was also considered to be the father of the Egyp-tian sorcerers Jannes and Jambres who imi-tated the miracle of Moses4. From this scene it is clear that Balaam stood among the long row of adversaries of Israel, characterized by their strong wish to eradicate the people of Israel. In Sanhedrin 105b R. Jochanan resu-med Balaam’s position. “R. Jochanan said : from the blessings of that wicked man you may learn his intentions. Thus he wished to curse them that they should possess no syna-gogues or school-houses, that the Shechinah should not rest upon them, but instead he said ‘how goodly are thy tents …’”.

2.4. A prophet ?In the Tanach Balaam never got the hono-

rary title of navi prophet. On the contrary he’s called a qosem, magician or a maHazeh, someone who sees visions, both terms with a rather negative connotation.

The Rabbis admitted that the ability to make prophecies was not restricted to the people of Israel. As Abraham Cohen put it : ‘since Israel was the depository of the Revelation, men from that nation were naturally chosen as the divine messengers, but not exclusi-

vely5. Prophecy among other nations was considered a lower form of prophecy than the phe-nomenon experienced in Israel, and Rabbis considered Balaam as a typical deliverer of this kind of prophecy. He was referred as one of the seven prophets for the heathens, together with his father and Job, Eliphaz the Temanite, Bildad the Shuhite,

Zophar the Na’amatithe, and Elihu (Baba Batra 15b).

2.5. Was he infirm ?A remarkable reasoning led rabbis to the conclusion that one of Balaam’s feet was paralysed. There have been many discus-sions about the meaning of two words in Numb. 23 :3 vayelech shefi. The 1963 Jewish Publication Society translation of the Torah reads ‘he went to a bare height’, while Onqe-los simply interprets this as : Ve’azal yeHido, ‘he went alone’.

In bSota 10a we read a different interpreta-tion of the verse : ‘R. Jochanan said : Balaam was lame in one of his feet, as it is stated : he walked limping’. Maharsha also gives the origin of his infirmity : ‘Balaam’s leg had been crushed when his donkey had pressed it against a wall on the road to Moab. In spite of

whenever Balaam is cited in the Aggadah, Jews might have

meant Jesus Christ.

4 GINZBERG, LOUIS, The Legends of the Jews, vol.II, 1910, 334-336.5 COHEN, ABRAHAM, Everyman’s Talmud, Schocken Books, New York, 1975, p.121.6 ALLEGRO, JOHN, The meaning of the phrase Shetum ha’ayin in Num. XXIV : 3, 15, Vetus Testamentum, 3, 1953, pp. 78-79.

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his pain, Balaam was so anxious to curse the Jews that he proceeded on the journey until he came to Moab’.

2.6. Balaam was blind of one eye. In Numb. 24 :3,15 we read the expression hagever shetum ha‘ayin.

The word shetum is a ‘hapax legomenon’ (occurring only once in the Tanach), and modern Hebraists still discuss the meaning of the term. Did the author mean ‘the man with the closed eye’ or ‘the man with the open eye’ ? Both interpretations can be found in modern trans-lations (Allegro, John6), and the Tannaim in the first centuries saw complementarity, rather than contradiction between both possibilities. R. Abbahu, on the other hand, mentions the reason for the partial blindness of Balaam as the result of a wic-ked thought of Balaam (bNiddah 31a).

3. Balaam as an alias for … Jesus of Nazareth ?In the first centuries of our era Judaism had to cope with the ever rising influence of its daughter religion Christianity. An interesting thought, reflecting the polemics between Jews and Christians of the time was that in private Balaam might have become a pseu-donym for Jesus, so that whenever Balaam is cited in the Aggadah Jews might have meant Jesus Christ.

The Pirkei Avoth are read between Pesach and Shavuot on Shabbath. In chapter 5 the following paragraph appears : ‘Whoever has the following three traits is among the disciples of our forefather Abraham ;

and (whoever has) three different traits is among the disciples of the wicked Balaam. Those who have a good eye, a humble spi-rit, and a meek soul are among the disci-ples of our forefather Abraham. Those who have an evil eye, an arrogant spirit, and a greedy soul are among the disciples of the wicked Balaam’ (Avoth 5 :22). Such a quo-tation may have been a general remark, or was it intended in reference to the Chris-tians ? For Marti and Beer7 it is beyond any doubt, “because in the time of the emer-ging Mishna the greatest rift in Judaism

was caused by the sect of the Christians who from the point of view of Mosaic law could only be regarded as heretics, therefore Christians are refer-red to as ‘Bileam’s children’’.

A similar hint pointing in the same direction is found in bSanhedrin 106b, in which the Amoraim are still commenting on Mishna Sanhedrin 10 :2. “A

certain Min (heretic) said to R. Chanina : hast thou heard how old Balaam was ? – He replied : it is not actually stated, but since it is written ‘bloody and deceitful men shall not live out half their days (Psalm 60 :24)’ it follows that he was thirty-three or thirty-four years old. He rejoined : thou hast said it correctly ; I personally have seen Balaam’s chronicle, in which it is stated ‘Balaam the lame was thirty years old when Phinehas the Robber killed him’”. In view of the fact that Jesus lived 33 years, and was called a heretic during his life, it could be argued that ‘Balaam’s chronicle’ refers to the gos-pels, while Phinehas, the Robber was an alias for Pontius Pilatus.

Is this a direct proof of the equation in the

At several occasions the Talmud was

burned publicly, … together with

its readers.

8 GINZBERG, LOUIS, The Legends of the Jews, VI, 1968, pp. 123-125.9 LAIBLE, H., Jesus Christus im Thalmud. Mit einem Anhange : die thalmudischen Texte, mitgeteilt von Prof. D. Gustav Dalman,

Leipzig, 1900.

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Talmud between Balaam and Jesus ? Not directly! In fact there are other arguments in the debate, which make the equation between Balaam and Jesus improbable. One is given in bGittin 57a where both persons are mentioned side by side. The Aggadah tells us about the proselyte Onqe-los (the same person who is considered the author of the Targum Onqelos) who raises Balaam and Jesus from the dead to ask for their advice on whether he has to become a Jewish proselyte or not. Both give him contradictory answers, and the quotation concludes with ‘observe the difference between the sinners of Israel and the pro-phets of the other nations who worship idols’.

To conclude, as in other areas of debate, the Babylonian Talmud should not to be seen as a modern scientific document with unequivocal and undisputable definitions. Conflicting allegations are given close to each other, and very often without any conclusion. Consequently there may be considerable doubt as regards the equation between Balaam and Jesus in the Talmud and in post-Talmudic literature. Moreo-ver, modern Jewish (Louis Ginzberg8) and Christian (H. Laible9) authors have serious doubts about the equation. That does not alter the fact that during the Middle Ages, in a climate of Jewish-Christian polemics and disputations, the idea that Balaam was an alias for Jesus, certainly played its role. It was one of the reasons for which the Tal-mud was seen as an anti-Christian book, with tragic consequences in history. At several occasions the Talmud was burned publicly, … together with its readers.

4. Balaam and no end … the inscriptions of Deir ‘Alla.Biblical names or narratives retain their value regardless their ‘historical truth’. They have become part of the collective memory of humanity and don’t need a historical justification. Nonetheless, it is somewhat comforting when confirmation of biblical events seem to be provided by other forms of evidence, such as archaeo-logy or epigraphy.

Tell Deir ‘Alla is located east of the Jor-dan river, about halfway between the lake of Tiberias and the Dead Sea, where the river Zerqa (the biblical Jabboq!) flows via some wadis into the Jordan river. In 1967 a Dutch team of archaeologists found an ins-cription on a plaster wall, probably written in an Aramaic dialect. Analysis of the ink, investigation of potsherds and grains of corn in the immediate surroundings of the inscription pointed towards dating the ins-cription back to the ninth century B.C.E.

Reconstruction of the text was rather dif-ficult because the plaster wall was heavily damaged, but with the help of leading epi-graphists from all over the world, a definite text could be presented at an international symposium10 in 1989. The text itself is a remarkable mix of visions and incantations, so typical for the literature of the Canaanite or Babylonian world of that period. But the principal person whose name is mentioned at least five times in the Deir ‘Alla text is … Balaam ben Beor. ■

10 J. HOFTIJZER/G. VAN DER KOOIJ (ed. ) , The Balaam text from Deir ‘Alla re-evalu¬ated ; Proceedings of the International Symposium held at Leiden 21-24 August 1989, E.J. Brill, Leiden - New York - Koebenhavn -Koln,

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AGENDA

SEPTEMBRE 2009Mardi 1er septembre 200920h00 : Rikoudei Am Mercredi 2 septembre 2009Dès 14h00 : réunion des Parents de Talmidi

Vendredi 4 septembre 200919h00 : Etudier et chanter les airs de Tichri (avec Rabbi Chinsky)20h00 : Office de Kabbalat Chabbat

Samedi 5 septembre 2009 – 16 Eloul 5769 – Ki Tavo9h30 : Etude de Rachi sur la paracha10h30 : Office

Lundi 7 septembre 200920h00 – 21h30 : Judaïsme, pensée et pratiques avec Rabbi F. ChinskyThème : les Fêtes de Tichri, préparation à une année renouvelée

Mardi 8 septembre 200920h00 : Rikoudei Am

Mercredi 9 septembre 200914h00 à 16h45 : TALMIDI

Jeudi 10 septembre 200920h00 : Midrach dans le texte avec Rabbi Abraham Dahan

Vendredi 11 septembre 200919h00 : Etudier et chanter les airs de Tichri (avec Rabbi Chinsky)20h00 : Office de Kabbalat ChabbatOneg Chabbat offert par les familles Naver, Villaz et Mor.

Samedi 12 septembre 2009 – 23 Eloul 5769 - Nitsavim-VayeleH9h30 : Etude de Rachi sur la paracha10h30 : OfficeKiddouch offert par les familles Naver, Villaz et Mor.

Dimanche 13 septembre 200911h00 : PELERINAGE A GAN HASHALOM

Lundi 14 septembre 200920h00 – 21h30 : Judaïsme, pensée et pratiques avec Rabbi F. ChinskyThème : les Fêtes de Tichri, préparation à une année renouvelée

Mardi 15 septembre 200920h00 : Rikoudei Am

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Eloul 5769/ Tichré 5770 Mercredi 16 septembre 200914h00 à 16h45 : TALMIDI

Vendredi 18 septembre 2009 – EREV ROCH HACHANA 577019h00 : Office

Samedi 19 septembre 2009 – 1 Tichré 5770 – ROCH HACHANA 1 10h00 : Office du matin - 11h00 : office des enfants19h00 : office du soir

Dimanche 20 septembre 2009 – ROCH HACHANA 2.10h00 : Office du matin

Lundi 21 septembre 2009 – TSOM GEDALIA20h00 – 21h30 : Pas de cours

Mardi 22 septembre 200920h00 : pas de Rikoudei Am

Mercredi 23 septembre 200914h00 à 16h45 : TALMIDI

Jeudi 24 septembre 200920h00 : Midrach dans le texte avec Rabbi Abraham Dahan

Vendredi 25 septembre 200919h00 : Etudier et chanter les airs de Tichri (avec Rabbi Chinsky)20h00 : Office de Kabbalat Chabbat

Samedi 26 septembre 200- 8 Tichré 5770 – HA’AZINOU CHABBAT CHOUVA10h30 : Office

Dimanche 27 septembre 2009 – EREV YOM KIPPOUR19h30 : KOL NIDRE

Lundi 28 septembre 2009 – YOM KIPPOUR10h00 : Office de Kippour – 11h00 : office des enfants 18h10 : Yiskor20h20 : Fin du jeûne

Mardi 29 septembre 200920h00 : Pas de Rikoudei Am

Mercredi 30 septembre 200914h00 à 16h45 : TALMIDI Dès 17h00 : Construction de la Soucca (voir annonce)

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AGENDA

OCTOBRE 2009 Vendredi 2 octobre 2009 – EREV SOUCCOT19h00 : OfficeOneg Chabbat communautaire de Souccot (voir annonce)

Samedi 3 octobre 2009 – 15 Tichré 5770 – SOUCCOT 110h00 : Office

Lundi 5 octobre 2009 – SOUCCOT 320h00 : Judaïsme, pensée et pratiques avec Rabbi Floriane ChinskyThème : Cycle de l’année juive

Mardi 6 octobre 2009 – SOUCCOT 420h00 : Rikoudei Am

Mercredi 7 octobre 2009 – SOUCCOT 514h00 à 16h45 : TALMIDI

Vendredi 9 octobre 2009 –EREV SIMHAT TORA19h00 : Office et danses de Simhat Tora(voir annonce) Samedi 10 octobre 2009 – 22 Tichré 5770 – SIMHAT TORA 10h00 : Office

Lundi 12 octobre 2009 20h00 : Judaïsme, pensée et pratiques avec Rabbi Floriane ChinskyThème : La vie juive : Hevrouta

Mardi 13 octobre 2009 20h00 : Rikoudei Am

Mercredi 14 octobre 2009 14h00 à 16h45 : TALMIDI

Vendredi 16 octobre 200919h00 : Groupe d’étude LEV – Conférence de Rabbi Chinsky Thème : Beautés de la langue hébraïque20h00 : Office de Kabbalat Chabbat

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le shofar

Tichré / Hechvan 5770Samedi 17 octobre 2009 – 29 Tichré 5770 – BERECHIT9h30 : Etude de Rachi sur la paracha10h30 : OfficeBar Mitsva de Joseph Braginsky

Lundi 19 octobre 2009 – ROCH HODECH HECHVAN20h00 : Judaïsme, pensée et pratiques avec Rabbi Floriane ChinskyThème : Cycle de la vie juive

Mardi 20 octobre 2009 20h00 : Rikoudei Am

Mercredi 21 octobre 2009 14h00 à 16h45 : TALMIDI

Jeudi 22 octobre 200920h00 : Midrach dans le texte avec Rabbi Abraham Dahan

Vendredi 23 octobre 2009 20h00 : Office de Kabbalat Chabbat

Samedi 24 octobre 2009 – 6 Hechvan 5770 – NOACH9h30 : Etude de Rachi sur la paracha10h30 : Office

Lundi 26 octobre 2009 20h00 : Judaïsme, pensée et pratiques avec Rabbi Floriane ChinskyThème : S’impliquer dans la vie juive

Mardi 27 octobre 2009 20h00 : Rikoudei Am

Mercredi 28 octobre 2009 14h00 à 16h45 : TALMIDI

Vendredi 30 octobre 2009 20h00 : Office de Kabbalat Chabbat

Samedi 31 octobre 2009 – 13 Hechvan 5770 – LEKH LEKHA9h30 : Etude de Rachi sur la paracha10h30 : Office

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liBrE oPiNioN

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par Rabbi Floriane Chinsky

Le peuple juif, une invention ?Il est très difficile de faire comprendre la mul-tiplicité identitaire juive. En conséquence, il est assez facile de prétendre que le judaïsme n’existe pas. Comment opposer à cette pré-tention une définition simple ? Chacun devrait pourtant avoir découvert que le monde n’inclut pas que des choses simples, bien au contraire. Cette compréhension demande cependant une certaine maturité. En fin de compte ceux qui veulent se donner la peine de se pencher sur l’identité juive et sa complexité y décou-vrent des trésors d’analyse de l’humain.

Réfuter l’existence du peuple juif est un grand « scoop ». En effet, notre identité est tellement réelle, étant donné les terribles épisodes de notre histoire, que nier notre existence relève de l’absurde. On sait pour-tant que les théories les plus absurdes sont parfois les plus attractives, que le comble de l’absurde peut apparaître comme plausible. C’est sur ce type de sentiments que jouent les théories conspirationistes.

Notre peuple dérange. La culpabilité de la Choa reste une épine douloureuse bien que parfois refoulée dans la conscience de l’oc-cident. Assumer le choix des Nations Unies pour la création de l’Etat d’Israël n’est pas toujours simple. (pour l’occident). Sans compter ceux qui prétendent être les vérita-bles héritiers de notre tradition et que notre constance désavoue. Ah ! Si le peuple juif n’existait pas !

Nous existons, malgré tout. Nous existons et nous ne sommes pas isolés, au contraire. De nombreuses nations, reconnaissent notre apport à l’éthique occidentale, notre contri-bution aux progrès de l’humanité dans tous les domaines. Ils savent que ce n’est pas en détruisant le bouc émissaire qu’on détruit le mal. Tout au contraire, c’est créer un écran de fumée qui obscurcit la conscience ; ils choisissent donc la responsabilité et l’action et renoncent aux illusions et aux fables. De ce fait, ils sont des acteurs de la réalité.

En conséquence, il est bon de réfuter les thè-ses simplificatrices, comme celle de Shlomo Sand1, qui a tant fait parler d’elle. J’ai eu la chance de pouvoir y contribuer à travers une interview publiée dans le Vif/ L’express du 15 juin 20092, dont vous trouverez ci-après quel-ques extraits.

Il est meilleur encore de raconter les mer-veilles de la remise en question juive, de géné-ration en génération, et d’année en année, et de contribuer ensemble à sa construction. C’est sur cet aspect que j’ai donc mis l’accent dans l’article consacré aux fêtes de Tichri, « Les fêtes de Tichri, une réinvention identi-taire (au moins) annuelle… ».

Avec tout ce qui peut nous différencier, et qui peut même parfois nous opposer violemment, nous partageons une histoire, une culture, un mode de vie et un mode de pensée qui font

1 Shlomo Sand, Comment le peuple juif fut inventé, Fayard, Paris 2008. Pour ceux qu’une approche réellement scientifique de la constitution du peuple juif intéresse, il est recommandé de se procurer le livre de Israël Knohl « D’où venons-nous » aux éditions Dvir, actuellement en cours de traduction en anglais, et peut-être bientôt en français.

2 Thomas Gergely a répondu aux mêmes questions pour le même dossier, avec beaucoup de justesse et de clarté, l’article dans son intégralité peut être consulté sur le site de Beth Hillel : www.beth-hillel.org

JuDAÏSME

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JuDAÏSME

de nous un peuple, dont l’avenir, en création permanente, repose entre nos mains.

Quelques extraits de l’interview publiée dans le Vif/L’Express du 15 juin 2009, sous le titre ‘Le peuple juif, une invention ?’.

Les Juifs du XXI° siècle descendent-ils d’Abraham, de Jacob, de Moïse ? Quelle est la part du mythe et celle de l’histoire ?F.C. : Un mythe vieux de 2500 ans est-il moins opératoire qu’une réalité d’hier ? Au-delà de sa légende, Abraham est pour nous un modèle : les Juifs étudient sa vie, son sens de l’hospitalité, pour savoir comment eux-mêmes doi-vent se comporter. Ma fille sait bien évidemment que je ne suis pas sortie d’Egypte, mais c’est quand même ce que je lui rappelle à Pessah, en l’invitant à faire de même. La liberté n’est pas acquise, la « sortie d’Egypte » se rejoue chaque année. L’exode ne s’est sans doute pas déroulé comme on le raconte, mais peu importe : les Juifs se sont transmis depuis toujours ce récit, devenu vérité forte.

Pour Shlomo Sand, le peuple juif est une invention de l’historiographie sioniste. Votre avis ?F.C. : Il y a tant de débats autour des thèses de Shlomo Sand qu’on ne peut leur tourner le dos. Mais elles sont pleines de confusions et sont récusées par la plupart des autres his-toriens israéliens. De la Pologne à Bordeaux, toutes les sources montrent que les Juifs ont formé, pendant des siècles, des communau-tés indépendantes, auto administrées, ce qui, plus encore que la terre, est caractéristique

d’un peuple. Puis il y a eu l’émancipation des Juifs en 1791. Clermont-Tonnerre, favorable à l’accession des Juifs à la citoyenneté, estime alors que « il faut tout refuser aux Juifs comme nation et tout leur accorder comme individus ». Jusque là, nul ne nie la légitimité des Juifs à former un peuple.

N’y a-t-il pas eu des conversions multiples au Judaïsme ?F.C. : Aucun historien du mouvement national

juif n’a jamais réellement cru que le peuple juif était généti-quement pur. Ceux qui le sou-haitent peuvent nous rejoin-dre. Déjà, la Tora signale que les Hébreux, lors de leur sor-tie d’Egypte, étaient accom-pagnés de nombreux Egyp-tiens. Shlomo Sand prétend révéler nos origines alors que l’on sait, depuis un millénaire, que le royaume des Khazars s’est converti au Judaïsme. Même les manuels scolaires israéliens le signalent. Le cas des Berbères est moins clair : certaines tribus étaient peut-être juives dès l’origine. Il y a une proximité génétique entre les Juifs. Mais ce qui compte avant tout, c’est le choix d’être dans l’Alliance, la relation particulière à la vie. Le Judaïsme n’est pas prosélyte, nous encoura-

geons chacun à suivre sa propre voie.

Shlomo Sand rejette l’idée reçue d’une diaspora juive née d’un exode massif en 70 de l’ère chrétienne.F.C. : La diaspora s’est développée progres-sivement depuis le premier exil à Babylone, en 586 avant notre ère. J’ai moi-même appris cela lors de mes études de rabbin, à Jérusa-lem. L’exode de 70, après la destruction du Temple, n’est toutefois pas négligeable : il y a eu tant de Juifs vendus comme esclaves à

Le livre de Israël Knohl, « D’où venons-nous, décryptage de la Genèse de la Bible », une vraie approche scientifique des origines du peuple juif, aux éditions Dvir, en cours de traduction vers l’an-glais.

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le shofar

cette époque que les prix du marché ont été divisés par dix! Mais l’attention particulière portée à cet exil vient de l’idéologie chré-tienne. Le christianisme, qui s’est présenté comme le Nouvel Israël, a propagé l’image du Juif errant. Et il est vrai que notre peuple, tour à tour rejeté d’Espagne, de France, d’Al-lemagne, de Russie… a été ballotté pendant des siècles.

Sand assure vouloir démocratiser Israël. Il accuse son pays de pratiquer la discri-mination à l’encontre de près d’un quart de ses citoyens, non juifs.F.C. : La démocratie est un idéal auquel tous les pays occidentaux aspirent, Israël compris. L’arabe est en Israël une langue nationale, les Arabes israéliens ont des

droits égaux aux citoyens juifs, droit de vote compris. Sand a le droit der souhaiter qu’Israël soit dépourvu de coloration reli-gieuse. Notons pourtant que personne ne conteste le droit à la France ou à la Bel-gique de se fonder sur les fêtes chrétien-nes, ni ne s’insurge contre l’existence de pays musulmans. La première étape de la paix est la reconnaissance de l’existence du peuple juif, de son lien avec la terre d’Israël, de son droit à l’autodétermina-tion sur cette terre. L’Occident l’a acté lorsqu’il a voté pour la constitution de l’Etat d’Israël en 1948 à l’ONU, il ne doit pas l’oublier. Souhaitons que la démocra-tie se développe dans la région de façon à trouver des solutions viables pour toutes les personnes qui y vivent. ■

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le shofarJuDAÏSME

Et plus haut peut-être... Contes hassidiques

Dans le dernier n° du Shofar, nous avons présenté les « Mémoires inachevés » de Y.L. Peretz, traduits par Nathan Weins-tock. Nous reviendrons encore par la suite sur cet auteur, reconnu certes comme étant avec Schalom Alekhem et Mendelé Moher Sforim, l’un des pères de la littérature yiddish moderne. Cepen-dant un grand nombre de ses oeuvres ne sont pas encore accessibles au lecteur francophone. Nous voudrions aujourd’hui vous proposer la lecture d’un conte dont l’histoire se passe le jour de Kippour.

Peretz n’était pas un adepte du hassi-disme, mais il a su en restituer l’atmos-phère et en transmettre le message avec une immense empathie. Ce conte illus-tre bien l’enseignement selon lequel la confiance en Dieu et les oeuvres de bonté sont plus hautes que la prière elle-même. M.E.

***

A l’approche du Jour du Pardon, chaque matin à l’heure de la prière, le fameux Rabbi de Némirov disparaissait : pas moyen de retrouver sa trace !

Il n’était nulle part : ni à la synagogue, ni au Beth-Hamidrasch, encore bien moins chez lui. Sa maison était ouverte à tout venant ; entrait qui voulait : qui, en effet, irait voler le Rabbi ? Bref, dans sa chambre, pas un être vivant !

Où est le Rabbi ?Où voulez-vous qu’il soit ? Au ciel sans doute !

Avant le Grand Pardon, un Rabbi n’a-t-il pas des tas d’affaires à régler avec Dieu ? Les Juifs ont besoin de tant de choses ! D’argent pour vivre, de paix, de santé, de bons maria-ges. Ils veulent être bons et pieux, mais leurs péchés sont grands. Satan, de ses milliers d’yeux, voit le monde d’un bout à l’autre ; rien ne lui échappe ; il accuse et dénonce... Et qui prendra la défense des Juifs, si ce n’est le Rabbi ?

Ainsi pensaient les fidèles.Mais voici qu’arrive un Juif lithuanien,

un Litwak. Et il rit ! Vous savez bien ce que c’est que les Litwaks : ils traitent à la légère les livres de la Cabale, mais, par contre, ils sont farcis de Talmud et de commentaires. Et le Litwak se met à démontrer, à discuter : ses arguments mettent les fidèles en colère ! Tex-tes en main, il prouve que Moïse lui-même n’a pu monter au ciel de son vivant, qu’il a été obligé de se tenir à dix coudées au-dessous du ciel !...

Or, comment répondre à un Litwak ?- Mais où est le Rabbi alors ?- Cela me regarde ? répond le Litwak.Et il hausse les épaules. Mais à l’instant

même il se propose (c’est bien d’un vrai Litwak) de découvrir la chose.

***Le soir même, tout de suite après la prière,

le Litwak se glisse dans la chambre du Rabbi, se couche sous son lit et attend. Il a résolu de pas-ser toute la nuit là, pour savoir ce que le Rabbi fait le matin, à l’heure des prières du Pardon.

Un autre, à sa place, se serait peut-être

par Y.L. Peretz (1852-1915) Ed. Stock coll. Judaïsme/Israël

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JuDAÏSME

endormi et aurait manqué son coup ; mais un Litwak trouve moyen de se tirer d’affaire : il récita de mémoire tout un traité du Talmud ! Je ne me souviens plus si c’était celui des jours Ouvrables ou celui des Serments.

A l’aube, il entend le veilleur qui appelle les fidèles aux prières.

Le Rabbi ne dort plus depuis un bon moment. Il y a une heure que le Litwak l’en-tend soupirer et gémir dans son lit.

Ceux qui ont entendu gémir le Rabbi de Némirov savent combien chacun de ses gémissements exprimait d’affliction pour le sort de tout Israël, combien de douleur !... Mais un Litwak a un coeur de pierre : celui-ci entend les gémissements, et reste couché ! Le Rabbi aussi reste couché : mais le Rabbi, Dieu lui donne longue vie ! est couché sur le lit et le Litwak dessous

Puis le Litwak entend grincer les lits dans toute la maison... Il entend les habitants se lever, murmurer une prière... On s’humecte les ongles... Des portes s’ouvrent et se refer-ment... Enfin, les gens partent ... C’est de nou-veau le calme et l’obscurité ; seul le clair de lune pénètre entre les volets...

Par la suite, le Litwak a avoué que, resté seul avec le Rabbi, il avait été pris de terreur. Des frissons le parcouraient ; il sentait aux tempes des picotements d’aiguilles.

En effet, c’était plutôt grave ! Etre seul avec le Rabbi à l’époque des prières du Par-don, à l’aube !...

Mais un Litwak est entêté : il tremble comme une feuille, mais il reste.

Enfin, le Rabbi, Dieu lui donne longue vie ! se lève...

Tout d’abord, il fait ce que tout Juif doit faire... Puis, il ouvre l’armoire à vêtements et en sort un paquet... Il le défait, et que voit le Litwak ? Des habits de paysan : une blouse et un pantalon de toile, un pardessus grossier, des bottes, une grande casquette avec la large mentonnière de cuir fixée par des bou-tons de métal...

Le Rabbi endosse ces vêtements-là...De la poche de sa blouse pend un bout de

grosse corde... Un vrai paysan !

Le Rabbi sort : le Litwak le suit.Avant de quitter la maison, le Rabbi passe

à la cuisine, se penche, prend une hache ran-gée sous un lit, la passe dans sa ceinture et sort.

Le Litwak tremble, mais il ne quitte pas le Rabbi.

Dans la nuit noire, règne le silence angoissant des jours de prières du Pardon. On entend parfois la voix d’un fidèle qui prie dans quelque maison, et cette prière s’élève de son coeur comme un cri... Ou c’est un gémis-sement de malade qui s’échappe de quelque fenêtre... Le Rabbi glisse furtivement le long des murs, dans l’ombre des maisons... Tel un fantôme, il passe d’une maison à l’autre, le Litwak après lui...

Et le Litwak entend les battements de son coeur en même temps que les pas pesants du Rabbi, mais il continue à le suivre. Bientôt, il se trouve hors de la ville, sur les talons du Rabbi...

***

Près de la ville, s’étend un bois. Le Rabbi, Dieu lui donne longue vie ! y pénètre, fait encore une trentaine de pas et s’arrête devant un petit arbre. Et le Litwak est saisi d’étonne-ment lorsqu’il voit le Rabbi prendre sa hache et en frapper l’arbre.

Il voit le Rabbi cogner et cogner ; l’arbre grince et gémit, enfin il s’abat ; le Rabbi en fait des bûches ; puis il fend les grosses bûches pour en faire des petites. Il fait un tas, le lie avec la corde qu’il a dans sa poche, jette tout le paquet sur son dos, remet sa hache dans sa ceinture, sort du bois et se dirige vers la ville. Dans une petite ruelle, il s’arrête devant une pauvre maison délabrée et il frappe à la fenêtre.- Qui est là ? demande une voix effrayée de

la maison.Le Litwak reconnaît une voix de femme,

une voix de femme malade.- C’est moi ! répond le Rabbi en patois paysan.- Qui, « moi » ? demande la voix.

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le shofar

Et le Rabbi répond encore en ukrainien :- C’est moi, Vassile.- Quel Vassile ? Et que veux-tu Vassile ?- J’ai du bois, dit le prétendu Vassile, j’ai du bois à vendre ! Très bon marché ! Presque pour rien !

Et, sans attendre la réponse de la Juive, il entre dans la maison. Le Litwak s’y glisse après lui.

A la lumière grise de l’aube, il voit une pau-vre chambre, des meubles misérables... Dans son lit, une Juive malade est couchée, couverte de chiffons, et elle dit, d’une voix amère :- Du bois à vendre ? Et comment puis-je

l’acheter ? Je n’ai pas d’argent, je suis une pauvre veuve !

- Je te le laisserai à crédit ! répond le prétendu Vassile. Cela ne te coûtera en tout que trois kopeks !

- Où les prendrai-je ? gémit la pauvre Juive.Le Rabbi lui dit d’un air de reproche :

- Pauvre femme ! Vois : tu es une pauvre Juive malade, et moi je te cède à crédit ce paquet de bois, je te fais confiance ; et toi, qui as un Dieu si puissant et grand, tu n’as pas confiance en lui... Tu n’as pas assez de foi pour croire qu’il

t’enverra un jour trois misérables kopeks pour payer ces quelques bûches ?

- Et qui m’allumera mon feu ? geint la veuve ; ai-je la force de me lever ? Mon fils travaille loin d’ici.

- Je vais te l’allumer, dit le Rabbi.Et tout en mettant le bois dans le poêle, le

Rabbi gémit et dit le premier verset des priè-res du Pardon...

Puis, quand il a allumé le feu, et que le bois s’est mis à brûler gaiement, il dit, d’une voix plus enjouée, le deuxième verset...Il a dit le troisième verset quand le feu eut bien pris et qu’il eut baissé le tablier...

***

Le Litwak qui a été témoin de ces choses est resté un fidèle du Rabbi de Némirov...

Et plus tard, quand un fidèle racontait que le fameux Rabbi à l’époque des prières du Pardon montait chaque matin jusqu’au ciel, le Litwak ne riait plus, mais il ajoutait tout doucement :

Et plus haut peut-être ... ■

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coMMuNAuTé

La Rédaction du Shofar présente à ses lecteurs et à ses amis ses meilleurs vœux de Shana Tova pour une nouvelle année remplie de toutes les lumières qui permettent à l’homme de s’épanouir matériellement et culturellement.

Elle les remercie de leur fidélité et espère qu’ils trouveront au cours de l’an-née à venir le même plaisir à lire le Shofar qu’elle a eu d’intérêt à l’écrire

Shana Tova ou Metouka

Le Conseil d’Administration, les Rabbins et le Staff de la CILB- Synagogue Beth Hillel souhaitent une belle année 5770 aux membres de la commu-nauté ainsi qu’à tout le Yishouv.Nous vous souhaitons une année de santé, de succès et d’harmonie entou-rés de ceux qui vous sont chers.

Shana Tova ou Metouka

Toute la Communauté Israélite Libérale de Belgique - Synagogue Beth Hillel présente ses meilleurs vœux de Rosh Hachana à S.E. Madame Tamar Samash, ambassadeur de l’Etat d’Israël en Belgique.Que le peuple israélien puisse respirer cette année le doux parfum de l’es-poir de paix et qu’il trouve en lui les ressources pour continuer, malgré toutes les difficultés, à insuffler à ses enfants la joie de la vie et de l’étude. Que Guilad Shalit soit enfin libéré et puisse avec les siens entendre le son du shofar

Shana tova ou Metouka

Le conseil d’administration de Gan Hashalom et les bénévoles de la Hevra Kaddisha présentent aux membres de la communauté leurs voeux de bonne santé pour 5770.

Shana Tova ou Metouka

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le shofar

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le shofar

LES FÊTES DE TICHRI A BETH HILLEL

PELERINAGE À GAN HASHALOM : Dimanche 13 septembre à 11h00

ROSH HASHANA

Vendredi 18 septembre – office à 19h00Samedi 19 septembre - office à 10h00Office des enfants à 11h00Office du soir à 19h00Dimanche 20 septembre – office à 10h00

YOM KIPPOUR

Dimanche 27 septembre à 19h30 KOL NIDRELundi 28 septembre - office à 10h00Office des enfants à 11h00Moussaf-minha 14h10Yiskor à 18h10Fin du jeûne à 20h20

SOUCCOT – SIMHAT TORA

Construction de la Soucca le mercredi 30 septembre à 17h00Apportez feuillages, fruits, légumes pour la décorer

Erev Souccot vendredi 2 octobre – office à 19h00Souccot I. samedi 3 octobre – office à 10h00Chmini Atseret/Simhat Tora vendredi 9 octobre - office à 19h00 samedi 10 octobre – office (+Yiskor) à 10h00

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SOUCCOTConstruction de la Soucca

Le mercredi 30 septembre à 17h00

(après Talmidi)

N’oubliez pas d’apportez feuillages,

fruits et légumes pour la décoration de la

Soucca

Erev Souccot

Le vendredi 2 octobre, office à 19h00

Suivi d’un Oneg Chabbat communautaire

Merci d’apporter fruits, gâteaux et douceurs

Souccot 1.

Le samedi 3 octobre, office à 10h00

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Lilmod oulélamed, La contribution des Bné et Bnot Mitsva

Comme nous le rappelons souvent à Talmidi, devenir Bar/ Bat Mitsva consiste à devenir fils ou fille du commandement. En d’autres termes, cela signifie être adopté par sa conscience. On devient responsable de ses actes, comme tous les autres Juifs adultes, à partir de 13 ou 12 ans. Le commandement dans le judaïsme, n’est pas une loi sèche, autoritaire, brutale.

Le commandement est une chose qui nous adopte, qui nous réchauffe, comme le Tallit qui le symbolise. A 12 ou 13 ans, on se présente devant la communauté pour acqué-rir la légitimité qui permettra de devenir un membre actif, un « bâtisseur ».

Notre communauté tient à faire leur place aux Bné et Bnot Mitsva, c’est pourquoi ils étudient notre tradition pendant plusieurs

années dans le cadre de Talmidi, avant de se pencher plus spécifiquement sur leur para-cha avec le Rabbin. Le résultat de cette étude est naturellement un enseignement. Ainsi s’accomplit le commandement de « lilmod oulélamed », étudier et enseigner.

Une communauté a de l’avenir quand elle sait écouter la voix de ses jeunes.

Nos jeunes Bné et Bnot Mitsva, nous vous les présentons dans ces pages.

La voix de nos jeunes, vous pourrez désormais la lire sur internet (www.beth-hillel.org) .

(Après tout, les enfants d’Israël au Sinaï n’ont-ils pas « vu » des voix ?)

Faites-en bonne lecture. ■

Rabbi Floriane Chinsky

Alix BOLMUT – paracha Michpatim (21 février 2009)Léa BIENENSTOCK – paracha Tetsavé (7 mars 2009)

Jonathan CRABBE – paracha Vayakhel Pekoudé (21 mars 2009)Clara DAHAN – paracha AHaré mot Kedochim (2 mai 2009)

Noémie SINIGAGLIA – paracha Emor (9 mai 2009)Marie LYON – paracha BeHoukotaï (16 mai 2009)

Félix CHARBIT – paracha Bamidbar (23 mai 2009)Rémy KRIWIN – Chabbat Chavouot (30 mai 2009)

Antony LEVI – paracha Nasso (6 juin 2009)

Bryan ALLOUN – paracha Beha’aloteHa (13 juin 2009)

Théo FUEG – paracha ChlaH LeHa (20 juin 2009)

TALMIDILe Talmud Tora de Beth Hillel

Tous les mercredis de 14h00 à 16h45

coMMuNAuTé

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Alix BOLMUT – paracha Michpatim (21 février 2009)Léa BIENENSTOCK – paracha Tetsavé (7 mars 2009)

Jonathan CRABBE – paracha Vayakhel Pekoudé (21 mars 2009)Clara DAHAN – paracha AHaré mot Kedochim (2 mai 2009)

Noémie SINIGAGLIA – paracha Emor (9 mai 2009)Marie LYON – paracha BeHoukotaï (16 mai 2009)

Félix CHARBIT – paracha Bamidbar (23 mai 2009)Rémy KRIWIN – Chabbat Chavouot (30 mai 2009)

Antony LEVI – paracha Nasso (6 juin 2009)

Bryan ALLOUN – paracha Beha’aloteHa (13 juin 2009)

Théo FUEG – paracha ChlaH LeHa (20 juin 2009)

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JuDAÏSME le shofar

Simhat Tora

Le vendredi 9 octobre 2009 à 19h00

Nous mettrons à l’honneur les post Bné Mitsva et les futurs Bné Mitsva.

Soyez tous présents pour célébrer dans la joie la Tora!

Nous danserons et chanterons ensemble avec les Sfarim, comme tous les ans.

Venez avec vos enfants et vos amis.

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le shofar

« Bikour Holim » ou la visite des « malades » c’est à dire des « personnes en difficulté »Chaque synagogue a le devoir d’avoir une « Hevra Kaddisha » ou « Confrérie sainte » res-ponsable de la prise en charge des derniers devoirs envers les morts de la communauté. Un numéro spécial du Shofar vient de présenter de façon détaillée le fonctionnement de « Gan Hashalom » et de notre Hevra Kaddisha qui, depuis plus de 20 ans, gère les funé-railles et le cimetière avec une abnégation et une discrétion tout à son honneur. Cette discrétion était telle que de nombreux membres de Beth Hillel ignoraient jusqu’à son exis-tence. L’information est à présent donnée, une lacune importante est ainsi comblée.

Cependant une communauté est composée essentiellement de vivants. Or, le cours de chaque vie humaine comporte des moments heureux, mais aussi des moments durs qu’il est insupportable d’affronter dans la solitude (maladie physique ou morale, deuil, dépres-sion, manque de mobilité dû au grand âge). C’est dans ces moments précis que le terme de communauté prend tout son sens. Voilà pourquoi le Bikour Holim ou « Confrérie dévouée aux soins des malades » a souvent été associé à la Hevra Kaddisha.* Par « malades » nous entendons bien sûr toutes les « personnes en difficulté » qui endurent des souffrances physiques, qu’il s’agisse de maladies longues ou de cas ponctuels (opérations, accidents). Mais ce peuvent être aussi des souffrances psychologiques ou morales (deuils, dépres-sion, difficultés avec les enfants, perte de travail etc ....)

Beth Hillel voudrait que son Bikour Holim soit, non pas un groupe composé de quel-ques bénévoles et chapeauté par un responsable, auquel serait déléguée l’intégralité de la prise en charge des « personnes en difficulté », mais qu’il forme un véritable réseau auquel participerait, à sa manière et selon ses possibilités, chaque membre de la communauté. Car chaque membre est appelé à être à l’écoute de l’autre pour détecter des situations à problèmes.

Dans cet esprit, Beth Hillel lance le présent APPEL, espérant que tous ceux qui le liront se sentiront concernés. Nous savons très bien que de nombreux membres sont dans une phase de leur vie où leur famille et leur profession les absorbent entière-ment, et où ils ne peuvent pas s’engager à assumer des tâches supplémentaires. A ceux-là, nous demanderons simplement d’être à l’écoute et de communiquer à Beth Hillel les cas de personnes en difficulté qui viendraient à leur connaissance. D’autres, par contre, pourraient se déclarer prêts à répondre à un éventuel appel, sachant qu’ils pourraient, le cas échéant, consacrer un peu de temps à un cas particulier.

Plus la liste des « visiteurs » potentiels sera longue plus il sera facile d’adapter la per-sonnalité du « visiteur » à celle du « visité » (âge, intérêts), et aussi de tenir compte de certaines contingences comme de la distance que le visiteur devra parcourir pour se

coMMuNAuTé

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coMMuNAuTé

rendre chez le visité. Il est bien évident qu’il ne sera pas toujours nécessaire d’effec-tuer des visites, mais que des contacts téléphoniques contribuent et suffisent parfois à apporter l’aide morale nécessaire. Tous les cas de figure sont envisageables.

Un noyau centralisateur sera informé via le secrétariat par le « réseau » de chaque cas de détresse. Eventuellement le membre qui donnera l’information pourra prendre lui-même en charge le cas dont il a eu connaissance. Il se peut aussi qu’il ne le puisse pas (manque de temps, trop grande différence d’âge, d’intérêt, manque d’empathie). Dans ce cas le noyau, qui disposera de la liste des visiteurs potentiels, recherchera la personne répondant le mieux au cas qui lui est soumis.

Nous espérons que notre appel sera entendu. Nous le répèterons jusqu’à ce que nous soyons convaincus qu’il n’y a plus un seul membre de Beth Hillel isolé dans sa détresse. ■

* Dictionnaire encyclopédique du Judaïsme.

Bné Mitsva

Le samedi 17 octobre : Bar Mitsva de Joseph • Braginsky – paracha BERECHIT

Décès

Nicole Josica Horowicz s’est éteinte le 19 • juin dernier à l’âge de 67 ans. Ses parents,

Hélène et Srulek ayant été déportés, elle fut élevée par sa tante et son oncle, Bazia et Laj-zer Domankiewicz. Ce dernier était le direc-teur du journal yiddish Unser Wort. Nicole fut une ardente havera du mouvement de Jeunesse Hanoar Hazioni, où on l’appelait Yaël. Sa vie professionnelle s’est déroulée à la Commission Européenne où elle fut secré-taire trilingue. Elle participa avec bonheur au théâtre amateur de la Commission. ■

Carnet

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le shofar

Les familles Gutman, Fischgrund, Goossens et Byl remercient de tout coeur les personnes qui ont témoigné leur sympathie et leur amitié lors du

décès de leur époux, père, beau-père et grand-père

Léon Gutman

Né Leopold Guthmann à Berlin, Ancien déporté à Auschwitz, survivant de la Marche de la Mort, et seul survivant de sa famille de Berlin à la libération du camp de concen-

tration/mort Buchenwald en avril 1945

Volontaire dans la marine pendant la guerre d’indépendance pour Israël en 1948-1949

Nous vous présentons nos meilleurs Vœux pour l’année nouvelle et espérons n’enten-dre que de bonnes nouvelles

Par Rabbi A. Dahan

C’est avec beaucoup de tristesse que j’ai appris la mort de Jacques Cohen z’’l. Pendant de nombreuses années, il a apporté à nos offices de Tichri, Roch Hachana et Kippour beauté et émotion. Il avait une voix faite pour élever notre prière. Elle tou-

chait nos âmes et éclairait la synagogue.

Il avait été choriste à l’Opéra, mais quand il priait, on l’oubliait, car son chant exprimait toutes les nuances de nos vieux textes, il les traduisait avec sensibilité et, en même temps, avec une puissance et une douceur qui réson-nent encore en moi.

Il possédait une remarquable connaissance de la liturgie et un savoir de la langue hébraïque, celle de la Bible, qui se font rares aujourd’hui. Il aimait comprendre la prière et, dans nos discussions, quand se révélait la lumière d’un texte, je voyais ses yeux se mettre à briller.

Il n’a pas eu une vie facile. De son Egypte natale, il dut fuir comme tant de Juifs et il en garda un souvenir douloureux. En Angle-terre il étudia dans une yeshiva, puis ce fut la Belgique où il entra à l’Opéra et travailla la hazzanout. Derrière son aspect bourru et méfiant, il était profondément bon.

Cette année, pour le yahrzeit de son père, il alluma le Ner Zikaron et, presque en même temps, ressentit une vive douleur : « C’est mon père qui m’appelle ». Trois semaines après, il nous quittait : c’était le 19 avril 2009.

Comment ne pas penser à la détresse et au cha-grin de sa femme Karin. Il y a pas mal d’années, j’ai eu le privilège de les faire se rencontrer. Depuis ils étaient ensemble, l’un pour l’autre, l’un toujours avec l’autre, entièrement. Elle s’occu-pait de tout, tant il n’était que dans sa musique.

Au nom de toute la communauté, je voudrais exprimer à Karin notre fraternelle sympathie et notre amitié. A Beth Hillel, où le souvenir de Jacques restera vivant, elle sera toujours la bienvenue, comme lorsqu’il était là. ■

In memoriam Jacques COHEN z’’l

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Shoah, « Aladin » et Jacques Chirac

Il y a quatre ans, la Fondation pour la Mémoire de la Shoah a lancé le projet « Aladin », visant à lutter contre le néga-tionnisme dans les pays musulmans. A cet effet, des ouvrages scientifiques sur ce sujet dramatique seront publiés et large-ment diffusés en arabe, farsi et turc. Un site Internet, www.projetaladin.org, dédié au même objectif, a également été ouvert.

Présent au lancement de cette initiative au Palais de l’Unesco à Paris, l’ancien président français, Jacques Chirac, n’a certes pas pu s’empêcher d’avoir des mots très durs à l’égard d’Israël mais il a aussi eu des paroles justes en ce qui concerne l’Holocauste.

Expliquant les raisons de la création du projet « Aladin », David de Rothschild, président de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah, a notamment déclaré : « Face à la déferlante néga-tionniste (…), issue notamment de certaine sphères limitées mais influentes du monde arabo-musulman, nous avons décidé de réagir en palliant d’abord le manque d’informations historiquement fiables sur la Shoah, que ce soit en arabe, en persan ou en turc ».

Ensuite, l’ancien, président français, Jacques Chirac, a pris la parole. Si bien sûr, il n’a pas caché vers où vont ses sympathies dans le conflit du Moyen Orient, (mais cela on le sait depuis longtemps), il n’en a pas moins eu des mots touchants sur le génocide dont le peuple juif a été victime. En voici quelques extraits.

« Aladin, Aladine en arabe, Aladine en hébreu, c’est la lumière, le symbole de

cette connaissance à laquelle nous croyons ensemble » (…)

« Faire connaître la Shoah à chacun, dans sa langue, pour que chacun lise et com-prenne dans sa langue maternelle ce qui s’est réellement passé, et forme sa convic-tion intime. Aujourd’hui, l’arabe, le persan, demain l’ourdou, le bengali, le malais… La mémoire de la Shoah, c’est faire vivre les livres et non les brûler. Elle ne doit pas seu-lement parler à l’intellect. Elle doit toucher le cœur ».(…)

« Le drame de la Shoah interdit l’oubli. Il impose la pudeur. Il fait exploser la colère au cœur de chaque homme de bonne volonté, lorsque la Shoah est contestée ». (…) « Le négationnisme est un crime contre la mémoire. Mais, plus grave encore, il émousse la vigilance ».

« Quand on demandera demain à un enfant musulman ce qu’est un Juif, il ne pourra plus répondre par des caricatures et des sté-réotypes. Quand on demandera demain à un enfant juif ce qu’est un Musulman, il ne pourra plus répondre par des caricatures et des stéréotypes. »

Si ces propos sont remarquables et d’une haute tenue morale, s’il faut les saluer, il faut aussi se rappeler que Chirac a été le président français le plus anti-israélien et, encore actuellement, il fait semblant d’ignorer que la Charte du Hamas est ouver-tement négationniste… ! Contradiction quand tu me tiens. ■

Par Emmanuel Wolf

liBrE oPiNioN

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le shofarD’ici ET D’A illEurS

Un shabbat à La Havane

Lors d’un séjour de vacances et par la grâce d’une rencontre imprévue avec des dona-teurs nord américains, mon épouse et moi-même avons eu le plaisir d’être invités par le Patronato (organisation faîtière du Judaïsme cubain) à un repas shabbatique dans la prin-cipale synagogue de La Havane. La rencontre avec ces dirigeants et donateurs de petites communautés américaines indé-pendantes fédérées au sein de la Joint Distri-bution Committee, est, en soi, une histoire. Je dirai simplement que le cliché sur la sponta-néité, la familiarité, l’accueil et la générosité des Américains est vrai et c’est tant mieux. Nous avons été embarqués avec eux pour le shabbat comme si nous avions toujours été là et ils ont été aussi heureux de nous accueillir que nous d’être avec eux. En les remerciant, j’ai exprimé - et profondément ressenti - la notion d’unité du peuple d’Israël.En arrivant à Beth Shalom, un bel immeuble pas trop ancien, nous avons été reçus par Adela Dworin, la présidente de la commu-nauté juive de Cuba. Cette respectable dame, dont le dynamisme est inversement propor-tionnel à son âge, a un sens de la communi-cation extraordinaire. Avec un sourire et un charme désarmants, elle nous explique que la

communauté renaît, que tout va bien malgré les incommensurables problèmes, mais que rien de tout cela n’est grave puisque nous sommes là… pour les aider.En la quittant, je lui ai proposé en souriant un job à Beth Hillel…L’histoire des Juifs de Cuba est assez connue et les sources sont foison. Mme Dworin en a brossé les grandes lignes que je rappelle ici. Sa famille, comme celles de beaucoup d’autres, est venue à Cuba fin du 19ème- début du 20ème siècle, essentiellement pour fuir les pogroms d’Europe de l’Est. Pour la majo-rité de ces Juifs, Cuba était l’avant poste des Etats-Unis. Mais faute d’obtenir un visa, ils se fixèrent à Cuba. C’est pourquoi les racines de cette communauté hispanophone sont prin-cipalement ashkénazes. Encore aujourd‘hui, la majorité des synagogues ou groupes de prières suivent le rite ashkénaze même si, et c’est assez déroutant, certaines mélodies ont un rythme, une tonalité « ensoleillés ».Cuba est aussi le pays d’Amérique Latine qui a accueilli le plus de réfugiés de la seconde guerre mondiale. Il y eut ainsi un petit groupe de Juifs anversois qui y développa un négoce de dia-mants.Avant la révolution Castriste de 1959, la com-munauté comptait jusqu’à 15.000 âmes. Elle tomba rapidement à 500, la très grande majo-rité des Juifs cubains fuyant le nouveau régime. Et au fil des années, l’assimilation accéléra encore le déclin de ce petit groupe. La politique anti-religieuse instaurée par Castro n’arrangea bien sûr pas les choses. Néanmoins la commu-nauté survécut et Mme Dworin aime à rappeler que, malgré toutes ces avanies, la synagogue ne ferma jamais ses portes. A cette époque le minian était rare et pour lire dans la Torah à Shabbat, fut

Par Philippe Lewkowicz

Adela Dworin

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D’ici ET D’A illEurS

inventé le concept de « minian cubain » dont je ne suis pas sûr qu’il s’agisse d’une boutade. La synagogue possédant trois Sefarim, il leur suffisait d’être sept pour atteindre le quorum, chaque Sefer Torah comptant pour un participant. Après la chute de l’URSS, tout changea, et la visite du Pape en 1998 officialisa cette nouvelle situation. Fidel Castro, souhaitant l’égalité entre les différents cultes, convo-qua les responsables des autres religions et Adela Dworin fit partie de la délégation juive.

Lorsqu’elle salua le Lider Maximo (Castro) elle lui fit part de ses regrets qu’il ne s’était jamais rendu à la synagogue de La Havane. Du tac au tac, le président répondit « mais vous ne m’avez jamais invité ». Ils cherchèrent une date et convinrent de l’office de Hanoukkah 1999. Castro interrogea Mme Dworin sur le sens de cette fête. Elle répondit : c’est la célé-bration de la « révolution » du peuple juif. Cet à-propos enthousiasma Castro et, en pré-paration de sa visite, il étudia à fond l’histoire et les rites de Hanoukkah. N’oublions pas que Castro avait eu une éducation religieuse et, toute politique mise à part, a toujours été très curieux de la chose religieuse.Depuis, malgré un taux extrêmement élevé de mariages mixtes, la communauté est remon-tée à 1.500 personnes grâce, entre autres, à des cours de conversion pour les conjoints ou futurs conjoints non juifs. Tout cela a été rendu possible grâce à l’ap-pui des Juifs de la diaspora américaine qui,

encore aujourd’hui, portent à bout de bras cette communauté renaissante. Il n’en reste pas moins que la vie y est très dif-ficile. Ainsi, notre accompagnatrice nous pré-vint que le repas de shabbat qui nous serait servi serait frugal et que nous ne devions pas être étonnés si les restes des assiettes étaient rassemblés et redistribués aux membres de la communauté. Croyez-moi, on a beau s’y attendre, ce n’est pas évident et cela remet les choses en place.Si beaucoup de choses vont mal à Cuba, et principalement sur le plan économique, il y a au moins une chose que nous pouvons leur envier. Le peuple cubain, métissé, est très respectueux de l’identité de l’autre et la com-munauté juive n’a jamais été victime d’un quelconque acte antisémite. Même si la poli-tique du gouvernement n’a pas été favorable aux religions, bien au contraire, la liberté de culte a toujours été respectée et se promener avec une kippa ne présente aucun risque. Le besoin crée l’organe et une des plus belles réalisations de la communauté est la pharma-cie centrale ouverte à tous au sein même du Patronato. A Cuba, la médecine fonctionne bien et est gratuite, mais hors de l’hôpital les médicaments sont rares et très, très chers. Pour subvenir aux besoins des Juifs mala-des et nécessiteux, fut créée en son temps cette pharmacie communautaire où, sur pré-sentation d’une ordonnance, le remède était remis gratuitement. Depuis, elle est ouverte à tous, Juifs et non juifs, et elle couvre tous les besoins pharmaceutiques et d’hygiène. Deux fois par an, la responsable dresse une liste des besoins qui est envoyée en Amérique où les comités de soutien rassemblent les com-mandes et envoient le tout via le Canada, embargo oblige. Les Cubains, juifs et non juifs, sont hospi-taliers et généreux et cette visite en dehors du circuit touristique classique fut une des plus enrichissantes de notre voyage. Si vous y allez un jour, n’oubliez pas les tablettes de chocolat (belge bien sûr) pour les jeunes du Talmud Torah de Beth Shalom. ■

Synagogue Beth Shalom – façade

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lu Pour VouS

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le shofar

Quel hébraïsant à Bruxelles ne connaît Eliyahou Reichert, professeur d’hébreu à l’Institut d’Etudes du Judaïsme à l’ULB ? Qui ne connaît sa salle de cours sous le toit de « Martin Buber » ? Nous y avons tous fait nos classes à une certaine épo-que de notre vie, et nous avons gardé le souvenir des savantes et lumineuses explications de notre professeur. Mais avons-nous tout retenu ? Voilà une autre question ! La grammaire hébraïque n’est pas facile, même lorsque, pour l’ »ivrit » ou « hébreu israélien », elle s’adapte quel-que peu à la grammaire des langues euro-péennes. Combien d’entre nous regrettent d’avoir beaucoup oublié, de n’avoir plus le temps de suivre des cours......... Il existe à présent un remède aux lacunes de notre mémoire.

Eliyahou Reichert vient de publier un Pré-cis de grammaire de l’hébreu israélien, fruit de la longue expérience acquise au cours de ses trente années d’enseigne-ment. La table des matières extrêmement détaillée permet de trouver rapidement les pages ou les paragraphes qui, de façon suc-cincte et claire répondent aux nombreuses questions que se pose soit le débutant, soit l’hébraïsant déjà avancé.

Personnellement, j’ai eu beaucoup de plai-sir à faire connaissance avec ce livre, et j’ai bien l’intention de ne pas le laisser se

reposer sur une étagère. Je ne vois pas quelles questions je pourrais lui poser sans qu’il ne me donne la bonne réponse : questions classiques concernant le nom, l’adjectif et le verbe. (Or, quant à moi, si j’ai perdu l’espoir de pouvoir un jour jon-gler parfaitement avec les verbes, j’espère toutefois me réconcilier avec eux grâce à l’encadré admirablement synthétique qui en énonce les règles générales de conju-gaison). Le livre aborde aussi, entre autre, le difficile problème des abréviations, il contient un chapitre très utile intitulé « Comment réduire le nombre de fautes ? » ... et il traite également de questions plus spécifiques, comme par exemple la for-mation et l’origine de mots dont certains remontent à des langues proto-sémitiques anciennes. Ce précis de grammaire est enfin une mine de vocabulaire courant que le lecteur (ré)intègre au cours d’une heure d’agréable lecture.

Je ne saurais mieux conclure ces lignes qu’en citant le Professeur Gergely dans la préface : « Grâces soient rendues à notre auteur qui a su fixer pour le temps pré-sent, l’état de cette langue en devenir, petite par la diffusion mais fondamentale si l’on songe à la culture dont elle émane et qu’elle ne laisse d’illustrer. » ■

L’Hébreu israélienpar Monique Ebstein

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Nous voudrions désormais réserver à nos lecteurs une tribune afin qu’ils puissent s’exprimer et prendre une part active à la vie communautaire.

Dans cette tribune, ils pourront répon-dre à des articles ayant paru dans le Shofar, poser des questions s’y référant, exprimer leur opinion et apporter des compléments d’information.

Nous demandons que les textes envoyés ne dépassent pas une demi page de for-

mat Word. Seuls seront pris en consi-dération les textes respectueux des personnes et des opinions. Nos lecteurs de langue néerlandaise, anglaise, alle-mande, italienne, espagnole pourrons nous écrire dans leur langue mater-nelle. Nous en publierons un abrégé en français.

Nous souhaitons que cette tribune qui se veut interactive soit vivante et ren-force les liens communautaires. ■

Tribune des lecteurs

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VIE COMMUNAUTAIRE

OFFICES DE CHABBAT

Vendredi à 20h et samedi à 10h30

TAlmuD TOrA ET prEpArATIOn A lA BAr/BAT mITSvA

Tous les mercredis après-midi. Voir calendrier.

COurS ADulTES ET CErClES D’ETuDE

Contactez Rabbi Abraham Dahan ou Rabbi Floriane Chinsky

YISkOr

Si vous voulez être tenus au courant des dates de Yiskorpour des membres de votre famille, contactez Giny ( 02.332.25.28

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En cas de nécessité, téléphonez aux numéros suivants :Le jour A Beth Hillel ( 02.332.25.28

Le soir Rabbi Floriane Chinsky ( 0485.428.490Rabbi Abraham Dahan ( 02.374.94.80 ou 0495.268.260

Si vous désirez souscrire à Gan Hashalom,téléphonez à Willy Pomeranc

Le jour ( 02.522.10.24 • Le soir ( 02.374.13.76

Gan Hashalom est réservé aux membres de la CILB en règle de cotisation et ayant adhéré à la société d’Inhumation

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