Le Saint Suaire de Turin

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Frère Bruno Bonnet-Eymard et l'abbé Georges de Nantes Turin SUAIRE Mise en page : Jean Manaus Etude réalisée par frère Bruno Bonnet-Eymard Extraite de la revue CRC, n° 332 à 367, Pâques 1997 - Mai 2000 LE SAINT SUAIRE DE TURIN Je ne me pose pas en juge de ce qui oppose l’abbé Georges de Nantes, le mouvement qu’il a fondé (la "Contre-Réforme Catholique", ou CRC), et le Vatican. Je prends à l’instant connaissance de cette opposition. Tout ce que je vois est que l’étude faite par le frère Bruno est exceptionnelle, et je sens tout au fond de moi que je me dois de faire ce que je suis en train de faire avec ce document. Il appartient à chaque catholique de prendre connaissance ou pas de cette opposition, et d’en tirer les conséquences et les conclusions, en toute obéissance à notre Sainte Mère l’Église. Mais ce qui est plus important que toutes les divisions, c’est ce qui peut nous unir, répondant en cela au saint vœu du Pape Jean-Paul II, repris par le Pape Benoit XVI : enfants du même Dieu, marchant sur les pas du même Christ, nous ne pouvons nous prétendre disciples que si nous cherchons à nous élever au-dessus des oppositions, à la recherche de l’union absolue et parfaite. Que Dieu fasse que l’étude de ce document soit l’un des signes de ce partage que nous cherchons à réaliser, de notre recherche de vérité, et de notre farouche volonté à assoir notre foi sur l’incorruptibilité de notre décision libre d’être chrétien, par dessus toute chose. Jean Manaus, 23 août 2009

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Page 1: Le Saint Suaire de Turin

Frère Bruno Bonnet-Eymardet l'abbé Georges de Nantes

Turin

SUAIREMise en page : Jean Manaus

Etude réalisée par frère Bruno Bonnet-Eymard

Extraite de la revue CRC, n° 332 à 367, Pâques 1997 - Mai 2000

LE SAINT SUAIRE DE TURIN Je ne me pose pas en juge de ce qui oppose l’abbé Georges de Nantes, le mouvement qu’il a fondé (la "Contre-Réforme Catholique", ou CRC), et le Vatican. Je prends à l’instant connaissance de cette opposition. Tout ce que je vois est que l’étude faite par le frère Bruno est exceptionnelle, et je sens tout au fond de moi que je me dois de faire ce que je suis en train de faire avec ce document. Il appartient à chaque catholique de prendre connaissance ou pas de cette opposition, et d’en tirer les conséquences et les conclusions, en toute obéissance à notre Sainte Mère l’Église.

Mais ce qui est plus important que toutes les divisions, c’est ce qui peut nous unir, répondant en cela au saint vœu du Pape Jean-Paul II, repris par le Pape Benoit XVI : enfants du même Dieu, marchant sur les pas du même Christ, nous ne pouvons nous prétendre disciples que si nous cherchons à nous élever au-dessus des oppositions, à la recherche de l’union absolue et parfaite.

Que Dieu fasse que l’étude de ce document soit l’un des signes de ce partage que nous cherchons à réaliser, de notre recherche de vérité, et de notre farouche volonté à assoir notre foi sur l’incorruptibilité de notre décision libre d’être chrétien, par dessus toute chose.

Jean Manaus, 23 août 2009

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LE SAINT SUAIRE DE TURIN,preuve de la mort et de la résurrection du Christ

Dom Noël

Noguier de Malijay.

Les témoignages abondent, touchant le culte traditionnel rendu à travers les siècles par les Pontifes et la multitude des fidèles, au Suaire qui a enveloppé le Corps du Christ et qui demeure marqué d'une mystérieuse silhouette tachée de son Sang.

À partir de 1898 et surtout de 1978, la science établit le bien-fondé de ce culte en démontrant l'authenticité de cette relique, grâce à l’intuition fulgurante d’un père salésien1 : Dom Noël Noguier de Malijay, considérant l’image du saint suaire ressembler étrangement à un négatif photographique.

• Pour en savoir plus ...

• Introduction : Présentation du Saint Suaire

o Annexe : La découverte de la photo de Jésus

• Le Saint Suaire au cours de vingt siècles d'histoire

• L'authenticité du Saint Suaire prouvée par les sciences

• Datation au Carbone 14 : la mystification du British Museum démasquée

• Science et dévotion à l'Homme du Suaire, le Seigneur de Gloire !

• La Passion du Christ selon le Saint Suaire de Turin

1 Société fondée par saint François de Sales (1567-1622), patron des écrivains, journalistes et documentaristes

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Pour en savoir plus...

Les premiers travaux de frère Bruno Bonnet-Eymard et de l’abbé de Nantes (1978-1990) ont été regroupés en deux volumes :

• Le Saint Suaire : o Tome 1 : Preuve de la mort et de la résurrection du Christ, 1986, album relié, 159 pageso Tome 2 : Signe de contradiction, 1990, album relié, 180 pages

Les principales publications suivantes ont fait l’objet de grandes réunions publiques et de numéros spéciaux de la Contre-réforme catholique, elles sont disponibles en volumes brochés, ou en enregistrements audiovisuels :

• Le Saint Suaire est authentique, numéro spécial, noël 1988, 50 pageso Audio/vidéo : B 22 : Le Saint-Suaire de Turin réhabilité par la science, paris 27 novembre 1988, 3 h

• Un an après le verdict du 13 octobre 1988, la victoire du Saint Suaire acquise par la science, CRC numéro spécial 257, octobre 1989, 36 pages

o Aud/vid : B 23 : La débâcle des tricheurs de Turin, décembre 1989, 1 h 30• Le Saint Suaire, « C'est l'étendard de notre salut », CRC numéro spécial 271, février-mars 1991, 74 pages

o Aud/vid : B 24 : Le Saint Suaire est authentique, Paris 25 novembre 1990, 6 h• Le Saint Suaire de Turin, témoin silencieux. Pour préparer un centenaire (1898-1998), CRC numéro spécial

332, Pâques 1997, 54 pageso Aud/vid : voir N 6 : Notre pèlerinage Jean-Paul 1er à Turin, mai 1998, 3 h

• Le Saint Suaire a l'âge de Jésus Ressuscité, CRC numéro spécial 367, mai 2000, 54 pageso Audio/vidéo : B 40, 4 mars 2000, 2 h

Références complémentaires :

• De la science à la foi, par la sindonologie, CRC n° 354, mars 1999, p. 9-20• La datation médiévale du Saint Suaire invalidée par la chimie, Il est ressuscité !, tome 5, n° 35, juin 2005,

p. 7-8

Autres enregistrements audiovisuels :

• B 12 : "Du nouveau sur Le Saint Suaire". 17 juillet 1981. 1 h 30• B 12bis : Voyage de frère Bruno à Rome et à Bologne. Nov. 81. 1 h 30• B 13 : Du sang et des inscriptions sur le Saint Suaire. 28 mars 82. 1 h• B 15 : Le Saint Suaire en Sorbonne. Paris, 19 mars 1984. 2 h• B 16 : Le Saint Suaire, preuve de la mort et de la Résurrection du Christ, juin 1985, 8 h (vidéo)• B 17 : La passion selon le Saint Suaire. Vendredi Saint 1984• B 18 : Les souffrances de Jésus racontées par le Saint Suaire. 20 avril 1984. 1 h. (aud.)• B 19 : Le Saint Suaire, preuve de la mort et de la résurrection du Christ, 1986, 3 h (aud./vid.)• A 46 : La science mystique du Saint Suaire. 29 janvier 1989, 1 h (aud./vid.)• B 20 : Bilan 1987 sur le Saint Suaire, 26 novembre, 3 h (aud./vid.)• B 22 : Le Saint-Suaire de Turin réhabilité par la science, Paris, 27 novembre 1988, 3 h• B 24 : Le Saint Suaire est authentique, Paris 25 novembre 1990, 6 h• B 25 : Complot contre le Saint-Suaire, (Contre J. Pradel), mars 1996, 2 h 30• B 54 : Le Saint Suaire de Turin, témoin de la mort et de la Résurrection du Christ, montage réalisé en 2006

pour la chaîne de télévision Direct 8 et diffusé le dimanche de Pâques 16 avril, 1 h 40, 1 DVD

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Tel que l'a révélé le négatif photographique de l'empreinte visible sur le Suaire :

PRÉSENTATION DU SAINT SUAIRE

Le saint Suaire de Turin est une pièce de lin tissé en chevron de 4,30 x 1, 08 m. Sans aucune trace de peinture, elle est tâchée de sang humain, brûlée à divers degrés, depuis de légères roussissures largement déployées jusqu'à des carbonisations d'incendie caractérisées. Elle représente de toute évidence le linceul d'un corps humain qui l'a maculé de ses empreintes faciale et dorsale ainsi que des coulées du sang de ses blessures. L'Église a toujours considéré que c'est Jésus de Nazareth qui avait été enseveli dans ce linceul au soir de sa mort, et qu'il l'avait déposé au matin de sa résurrection.

Tel que les chrétiens, de tradition

immémoriale, l'ont

contemplé, vénéré, adoré

:

De l'inversion photographique des valeurs lumineuses émerge un portrait parfaitement expressif, un portrait positif du Christ, le plus beau qui fût jamais, reproduction directe de ses traits : sa... photographie véritable, révélée depuis 1898 !

Jésus était un athlète : l'empreinte faciale permet d'évaluer sa taille à 1,80 m ; et sa carrure permet d'évaluer son poids à 80 kg. Lorsqu'Il était en pleine santé, Jésus devait rayonner d'une extraordinaire séduction, dont la révélation a été réservée à notre temps par la photographie. Auparavant, les peintres et les mosaïstes prenaient pour modèle cette inexplicable et inesthétique empreinte en la copiant positivement, quitte à l'interpréter. C'est une insoutenable contradiction de prétendre que cette forme vague de corps puisse être elle-même une œuvre d'art produite, de quelque façon que ce soit, dans l'impossible intention de paraître positivement, par photographie, comme l'empreinte laissée par Jésus sur son Linceul.

D'une part, c'est un fait que les copistes des temps modernes, du XVIe au XIXe siècle, croyant avoir là, précisément et positivement, l'image du corps de Jésus-Christ empreinte sur ce Suaire, l'ont arrangée pour la dégager de son brouillard, avançant à tâtons vers son... négatif qui n'apparaîtra qu'en 1898.

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D'autre part, tout prétendu faussaire du Moyen Âge aurait travaillé à reculons, à partir d'un individu positivement copié, ou sculpté ou décalqué, pour aboutir à quelque chose de fantomatique, d'inquiétant, d'inachevé... inadmissible par l'Église, insignifiante et repoussante pour les dévots mais puissamment calculée et réalisée pour

apparaître, par la grâce de l'invention photographique, une incomparable image de Jésus-Christ ? C'est impossible.

DESCRIPTION DU SAINT SUAIRE

Silhouette faciale

Blessures d'épines à la Face

« Les soldats ayant tressé une couronne avec des épines, la mirent sur sa tête. Et ils l'enveloppèrent d'un manteau de pourpre. Et ils s'approchaient de Lui, et disaient : “ Salut, Roi des Juifs ! ” Et ils lui donnaient des soufflets. » (Jn 19, 2-3)

Sous les coups, la tête oscille pitoyablement de droite à gauche et de gauche à droite, comme témoignent les écoulements sur les tempes, en “ V ” renversé : le sang a pris les deux directions alternativement, selon que la tête penchait d'un côté ou de

l'autre. Tandis que sur le front, un filet « serpente en onde », comme disaient les clarisses de Chambéry: il suit les rides formées sur le front par les plissements spasmodiques de la douleur.

Faux pli du tissu - Brûlures de l'incendie de Chambéry - Plaie d'entrée du clou sur le pied gauche

Plaie du CœurSur la silhouette faciale, on aperçoit les caillots d'une massive coulée de sang, en partie cachée, sur son bord externe, par une pièce de toile cousue par les clarisses de Chambéry après l'incendie de 1532.On distingue l'empreinte de la Plaie, de forme ovale, un peu oblique, d'où est sorti le sang. Cette Plaie de 4,4 cm dans son grand axe, de 1,5 cm dans sa hauteur, est le passage ouvert par un fer de lance. La partie supérieure du caillot, la plus voisine

de la Plaie, est la plus épaisse et la plus large, au contraire des blessures de la couronne d'épines où le sang, perlant plus lentement, est arrêté dans sa descente et s'accumule en amont d'un obstacle.Le bord interne du caillot est découpé par des échancrures arrondies, qui ne s'expliquent pas sur un corps immobile et vertical. Ces échancrures correspondent aux saillies du muscle grand dentelé.

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Plaie du Coeur de Jésus sur le Saint Suaire

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Plaie du poignet gauche

Les mains racontent d'indicibles souffrances. Quatre doigts seulement sont visibles : le pouce est caché dans la paume par un réflexe de contraction qui trahit la souffrance la plus atroce que l'on puisse imaginer, causée par la lésion du nerf médian.

Tache d'eau losangée consécutive à l'incendie de Chambéry (1532)

En 1532, dans la nuit du 3 au 4 décembre, un violent incendie éclate dans la Sainte Chapelle de Chambéry. Un chanoine sauve la châsse d'argent dont le métal entrait déjà en fusion. L'irradiation du métal incandescent, et sans doute quelques gouttes d'argent fondu tombées sur un angle du paquet formé par le linge plié à l'intérieur, le brûlèrent. Lorsque, par la suite, on déplia l'étoffe, il apparut autant de taches que le drap avait formé de doubles superposés. L'eau jetée sur le linge pour éteindre le feu laissa ces taches en losanges, cernées de liserés charbonneux, que nous voyons disposées le long de l'axe longitudinal : elles suivent, elles aussi, l'ordre des pliures et la symétrie des brûlures pour la même raison de pliage. Par quel nouveau miracle les deux silhouettes demeurèrent-elles sauves, au milieu du Drap, encadrées par les deux lignes de brûlures !

Rapiéçage des Clarisses de Chambéry

Suite à l'incendie de 1532, le duc de Savoie, Charles III, demanda au pape Clément VII de nommer un évêque pour rétablir solennellement l'identité du Saint Suaire. Le pape acquiesça à cette demande et ordonna à son légat, le cardinal Louis de Gorrevod, de reconnaître si le Saint Suaire avait bel et bien été préservé de l'incendie, et de le faire réparer par des religieuses de son choix, dans le cas où il aurait souffert du feu. Après avoir examiné le Saint Suaire, le cardinal le porta en procession au monastère Sainte-Claire.

Mais il faut lire la relation des Pauvres Clarisses : « Nous le reçûmes en procession, les cierges allumés ; on le déploya sur la table pour reconnaître les endroits où il devait être raccommodé ; (...)« Après cela, M. le Légat dit à notre Révérende Mère de choisir quelques-unes de ses religieuses pour le raccommoder. Elle s'offrit avec trois autres qu'elle nomma, pour y travailler ; puis elles donnèrent toutes quatre leurs noms au notaire, en présence de toute la noblesse. M. le Légat fulmina excommunication majeure contre ceux qui le toucheraient, hors les quatre religieuses choisies. (...)« L'après-dîner, le brodeur apporta le bois du toilier pour serrer la toile de Hollande sur laquelle on devait

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Plaie du poignet gauche de Jésus sur le Saint Suaire

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mettre le Saint Suaire ; après les deux heures que la toile fut arrêtée sur le toilier et sur les trefours, nous étendîmes dessus le précieux Saint Suaire, et nous le cousîmes tour à tour à faux filet. »

Silhouette dorsale

Blessures d'épines à la nuque« On voit la nuque de la tête percée de longues et grosses épines qui sont si fréquentes qu'on peut voir par là que la couronne était faite en “chapeau ”, et non pas en cercle comme celle des princes et telle que les peintres la représentent ; lorsqu'on la considère attentivement, on voit la nuque plus tourmentée que le reste et les épines plus avant enfoncées, avec de grosses gouttes de sang conglutinées aux cheveux. » (Témoignage des « pauvres Clarisses » de Chambéry, 1534)

Faux pli du tissu - Brûlures du tissu antérieures à 1192 - Marques des coups de fouet sur les jambes - Ruissellement de sang sur le linge - Plante du pied droit - Rapiéçage des Clarisses de Chambéry

Marques des coups de fouets sur le dos

La flagellation du Seigneur, personne ne l'avait imaginée dans toute son ignominie, telle que nous la voyons ici représentée. Nous voyons les coups pleuvoir sur les épaules, sur le dos, les reins, les cuisses, les mollets ; mais aussi par-devant : nous en comptons les traces sur la poitrine et sur la face antérieure des jambes.Le flagrum romain, un manche avec deux ou trois lanières lestées de petites haltères en plomb, était manié par un bourreau qui tournait autour de sa victime, ou bien par deux bourreaux, dont l'un frappait à revers. Jésus a perdu beaucoup de Sang : les coups des balles de plomb fendent la peau tandis que les lanières proprement dites laissent de longues traces livides, bleus d'ecchymoses sous-cutanées que l'on observe avec émotion aux ultra violets. Impossibles à dénombrer, elles marquent l'ensemble du corps.

Ruissellement lombaireJoseph d'Arimathie, Nicodème et saint Jean « ont réussi à descendre le Corps de la Croix et à le transporter jusqu'au tombeau avec une délicatesse, un respect et une tendresse infinis. Ils ont à peine osé toucher ce Corps adorable », affirmait Barbet. À preuve : cette coulée de sang transversale venant de la veine cave inférieure (à gauche pour le lecteur), par la Plaie du côté droit, après la descente de croix et la mise en position horizontale.

Après le transport, le Corps a été déposé, nu, sur le Linceul, et celui-ci a reçu l'empreinte des caillots de sang formés sur la peau du dos pendant le trajet par capillarité. « Il est certain que le transport a été exécuté avec un minimum de manœuvres, de telle façon que les

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Ruissellement lombaire - Saint Suaire

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caillots sont restés en place, inaltérés. Des manœuvres plus nombreuses et moins délicates les auraient essuyés et effacés. »

Plante du pied droit

Un seul clou traversait les deux pieds croisés l'un sur l'autre. C'est pourquoi le pied droit seul a marqué le Suaire d'une empreinte plantaire complète, d'où un ruissellement de sang a débordé sur le linge (à gauche). Du pied gauche (à droite), le talon seul a laissé une empreinte, parce que l'extrémité de ce pied reposait sur celle de l’autre.

LE SAINT SUAIRE AU COURS DE VINGT SIÈCLES D'HISTOIRE

En plaçant le Saint Suaire au centre des récits de l'ensevelissement de Jésus au soir du Vendredi saint, et de la découverte du tombeau vide au matin de Pâques, les quatre Évangélistes attestent en outre que cette sainte relique, pièce à conviction à l'appui du fait de la Résurrection du Seigneur, a été l'objet de la vénération des fidèles dans la communauté primitive, « comme le linge le plus important et le plus précieux. » C'est à ce titre qu'il a été conservé et nous a été transmis de génération en génération à travers des étapes de mieux en mieux connues, grâce à des recherches positives.

Séjours du Saint Suaire :

De l'an 33 à 1204+ JÉRUSALEM + CONSTANTINOPLE (614)

De 1204 à 1578+ ATHÈNES + LIREY (France - 1355) + VILLERSEXEL (1418) + CHAMBÉRY (1453)

De 1578 à 2004+ TURIN

Les témoignages scripturaires, historiques, iconographiques et paléographiques qui attestent l'existence du Saint Suaire :

JÉRUSALEM

Le Soudarâ de Jésus

Sous le nom de « soudarion » saint Jean (Jn 20, 3-7) désigne, non pas un petit mouchoir, ni une serviette, encore moins une “ mentonnière ” ! mais une grande pièce de drap, passant dans le sens de la longueur par-dessus la tête, epi tès kephalès, la couvrant donc, ainsi que le visage et tout le corps, dessus et dessous, jusqu'aux pieds.

C'est ce même grand linge que les synoptiques désignent sous le nom de « sindôn ». Matthieu précise que ce “ linceul ” était « sans tache », kathara (Mt 27, 59), au moment où Joseph d'Arimathie l'a acheté pour

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Plante du pied droit - Saint Suaire

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ensevelir Jésus. Sans doute fait-il allusion aux « taches » que l'on y découvrit par la suite, et qui sont aujourd'hui l'objet de notre étude.

La Sainte Vierge et le Saint Suaire

L'Évangile selon les Hébreux, apocryphe rédigé en araméen vers la fin du Ier siècle, dans sa haute antiquité, toute proche des Évangiles canoniques, nous assure qu'au second siècle, époque où circulait déjà cet écrit, il y avait des chrétiens qui s'intéressaient au sort du linceul sépulcral du Sauveur et croyaient savoir chez qui il se conservait. À savoir dans la communauté de Jérusalem, où Jacques fit office de « grand prêtre » jusqu'à son martyre en 62. (...)

Dans une version du Transitus, datée du début du VIe siècle, on lit : « Après l'Ascension, cette Vierge Immaculée avait coutume de porter l'image formée sur le Suaire qu'Elle avait reçue des mains divines, afin de toujours avoir sous les yeux et contempler le beau visage de son Fils. Chaque fois qu'Elle priait, elle disposait l'image au levant et priait ainsi vers Elle, en élevant les mains. » Cet apocryphe, qui se distingue de tous les autres par son caractère historique, témoigne que jusqu'au jour de son Assomption, en 63, Marie, que Jean avait prise chez lui (Jn 19, 27), demeura au centre de cette communauté (Ac 1, 14). Elle reçut donc le Saint Suaire rapporté du tombeau par Jean son “ fils ”, avec un infini respect, une grande tendresse et une merveilleuse dévotion, comme Elle avait reçu dans ses bras maternels le doux Corps immolé au pied de la Croix, avant son ensevelissement dans ce même Linceul. [...]

Sainte Véronique

Et après Marie ? Dans un écrit apocryphe, daté du VIe siècle, la Vindicta Salvatoris, “ Vengeance du Seigneur ”, qui traite du châtiment divin exercé contre les responsables de la mort de Jésus-Christ, « il est question non seulement de la sainte femme Véronique, mais du portrait du Christ que Véronique possédait. On apprend seulement que c'était un portrait sur un linge immaculé, in sindone munda ; que la sainte femme Véronique l'avait longtemps gardé par-devers elle, in domo sua. » [...]

Nous sommes donc amenés à penser que la “ légende ” véhicule une tradition, en vertu de laquelle cette sainte femme conserva le Linceul du Seigneur découvert dans le tombeau vide au matin de Pâques par Pierre et Jean. C'est ce souvenir qu'évoque l'appellation traditionnelle de “ voile de Véronique ” désignant cette insigne relique elle-même, dont sainte Véronique reçut le dépôt sacré après l'Assomption de la Vierge Marie en 63, et qu'elle cacha à Panéas pendant la guerre juive (66-70). [...]

Après sainte Véronique

Saint Épiphane de Salamine (315-403) se rendait à Béthel en pèlerinage. Parvenu à Anablatha, près de Jérusalem, il entra dans une église pour prier et vit le voile dans le vestibule. Il l'arracha, promettant au gardien de ce lieu de lui en envoyer un autre sans image et de bonne qualité. Comme nous l'avons montré à la suite du Père Pfeiffer, non seulement l'histoire du voile portant une image « quasi Christi », dans une église proche de Jérusalem, est une histoire vraie, mais encore elle s'explique tout à fait si l'on voit dans ce voile celui de Véronique, c'est-à-dire notre actuel Saint Suaire. [...]

L'Évangile de Gamaliel (Ve siècle), qui a pour thème principal les miracles opérés par les linges funéraires du Seigneur, offre un exemple typique de ce genre littéraire. Ces témoignages littéraires accompagnent la tradition même qui nous a transmis ce Linge sacré, et qui constitue la principale preuve de son authenticité, ne l'oublions pas. Car si ce n'est pas le Suaire de Jésus-Christ, pourquoi nous l'aurait-on précieusement conservé ? [...]

CONSTANTINOPLELorsqu'en 614, survint la conquête de la Palestine et la prise de Jérusalem par les Perses, les lieux saints furent pillés et les reliques du Christ volées. Et le Saint Suaire ? Sans doute fut-il aussi emporté à Constantinople avec les autres reliques de la Passion du Seigneur : la sainte lance, la sainte éponge, les clous et la couronne d'épines. [...]

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Un document prouve la présence du linceul du Christ à Constantinople au début du VIIIe siècle : L'umbella du pape Jean VII, à Saint-Pierre de Rome. Ce pontife, d'origine grecque, a régné de 705 à 707, au moment où Justinien II remontait sur le trône à Constantinople. [....]

L'umbella de Jean VII, un dais liturgique aujourd'hui disparu, connu par la description et les dessins laissés par Jacques Grimaldi au XVIIe siècle lors de la démolition de l'oratoire du pape Jean VII, était un baldaquin de 2,75 m x 1,90 m environ, brodé de scènes évangéliques entourant un « Christ Jésus mort, étendu et déposé, le corps mis à nu ».

Umbella de Jean VIIL'auteur de l'umbella a très

certainement imité la silhouette frontale du Saint Suaire, en commettant d'ailleurs l'erreur commune aux artistes qui ont pris cette sainte relique pour modèle : il a fait passer la main droite par-dessus la main gauche, imitant ce qu'il voyait sur le linge, en oubliant que l'image doit être inversée. Et, d'autre part, il n'a mis à cette main que quatre doigts, comme cela se trouve sur le Saint Suaire.

Sous l'influence du Saint Suaire et comme l'atteste l'Umbella de Jean VII, on voit apparaître une nouvelle iconographie : « À partir d'un moment difficile à déterminer avec une précision absolue, mais qui doit être proche de 700, les images se mettent à parler avec insistance de la mort et de la résurrection du Christ, de ce moment où l'aboutissement de sa vie humaine débouche sur la manifestation de sa divinité.

Conclusion : l'oratoire de Jean VII, à Saint-Pierre de Rome, ses mosaïques et son baldaquin brodé, consacrés à la conservation et à la vénération du “ Saint Suaire de Véronique ” au début du VIIIe siècle, sont des témoins de l'existence, à Constantinople, de l'authentique Suaire du Christ dont ce “ voile de Véronique ” était le truchement à Rome, à la même époque. [...]Saint Jean Damascène († 749), qui mentionne le Linceul dans son De Imaginibus, fut le protagoniste de l'Église au Concile qui condamna dès 730 l'iconoclasme. L'abbé de Nantes a parfaitement formulé " l'orthodoxie ”, qui triompha en 843, sous l'action de l'impératrice Théodora, veuve de l'empereur Théophile : « L'artiste, c'est le Fils de Dieu fait homme, qui s'était déjà créé un corps dans le sein de la

Vierge Marie, à dessein d'en faire l'image de la divinité, l'image de Dieu son Père. L'image qu'il crée sur le Saint Suaire est donc l'image de Dieu. »

Vers 1192-1195, une miniature du manuscrit Pray, du nom du savant jésuite qui le découvrit au XVIIIe siècle, conservé à la Bibliothèque nationale de Budapest, présente une mise au tombeau inspirée de la vision de ce même Suaire.L'auteur de cette miniature avait examiné attentivement le Saint Suaire à Constantinople. Il a représenté le Christ entièrement nu, étendu sur une pièce de tissu toute en longueur.Les bras du Mort sont croisés et se recouvrent aux poignets, bras droit au-dessus du bras gauche, comme sur le Saint Suaire lorsqu'on l'observe en oubliant qu'il joue le rôle d'un miroir inversant l'image par rapport au Corps qu'il recouvre et qui lui fait face.Les mains du Mort ne laissent voir que quatre doigts, très longs et l'index de même dimension que le médius : le pouce n'apparaît pas. Mais les mains de Nicodème aussi ! Le miniaturiste avait donc observé cette anomalie sur le saint Drap, sans la comprendre.

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Manuscrit Pray

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Enfin, détail observé par le Père Dubarle, le front porte une petite tache au-dessus de l'œil droit, correspondant à la tache de sang que l'on voit sur le Saint Suaire.La scène inférieure représente la découverte du tombeau vide par les saintes femmes. Le panneau supérieur représente la face externe du Saint Suaire : dessiné en chevrons, imitant l'armure du tissu.

En 1201, Nicolas Mésaritès, gardien des reliques conservées à Sainte-Marie-du-Phare, la “ sainte chapelle ” du palais impérial, évoquait le mystère de la vie du Christ ressuscité, perpétué en ces lieux par la présence d'une relique particulièrement : « Ici il ressuscite et le Suaire avec les linges en sont la manifestation [...]. Ils sont en lin [...]. Ils bravent la corruption, parce qu'ils ont enveloppé l'ineffable Mort, nu et embaumé après la Passion. » [...]

À la veille de la mise à sac de la ville par les Croisés (avril 1204), le témoignage de Robert de Clari, qui a vu le « sydoines la ou nostres sires fut envelepes », est sans équivoque. En attestant que « on i pooit bien veir le figure notre seigneur », il annonce déjà ce que seront les ostensions de la sainte Relique à Lirey cent cinquante ans plus tard. Car « le figure » désigne la silhouette tout entière. [...]

ATHÈNESAu témoignage de Robert de Clari, « ne ne seut on onques, ne grieu ne franchois, que chis sydoines devint, quand le vile fut prise », plus jamais personne, ni Grec ni Français, ne sut ce que ce suaire devint quand la ville fut prise, le 13 avril 1204. Nous savons aujourd'hui qu'il fut emporté à Athènes. L'année suivante, le neveu de l'empereur Isaac II Ange réclame au pape Innocent III, entre tous les trésors volés à son oncle, « ce qui est saint », les reliques et « parmi elles, objet sacré entre tous, le Suaire » qui est présentement « à Athènes » (1205). C'est de là qu'Agnès de Charpigny, épouse de Dreux de Charny, frère aîné de Geoffroy, seigneur de Lirey, apporta cette « saincte relique » en France. [...]

LIREYAu lendemain de l'Année sainte, du jubilé de 1350, qui attira d'immenses pèlerinages à Rome, où l'on vénérait le “ Voile de Véronique ”, un petit village de Champagne, Lirey, au diocèse de Troyes, attire lui aussi des foules innombrables venues du monde entier pour vénérer une Relique dont l'identité ne fait aucun doute. Un méreau, sorte de médaille en plomb telle qu'en portaient les pèlerins du Moyen Âge, aujourd'hui conservé au musée de Cluny, en apporte la preuve. Il montre deux porteurs de chape – dont les têtes ont disparu – soutenant ladite Relique : le Saint Suaire déployé dans toute sa longueur, comme s'ils le tiraient de sa châsse. Celle-ci est frappée des armes de Geoffroy de Charny, à dextre (à gauche pour le lecteur). [...]

Par une lettre datée du samedi 28 mai 1356, dûment signée et scellée, Henri, élu et confirmé au siège épiscopal de Troyes depuis 1354, venait d'accorder au noble chevalier Geoffroy de Charny, seigneur de Savoisy et de Lirey, « assentiment, autorité et décision » au « culte divin » célébré en la collégiale fondée par ledit seigneur, pour autant, précisait l'évêque, « que nous avons été informé par de légitimes documents ».

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Méreau du saint Suaire

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Ostension annuelle du 4 mai, jour de la fête du Saint Suaire, à Chambéry.

Cette approbation fut confirmée l'année suivante, après la mort dudit seigneur, par une bulle d'indulgence datée du 5 juin 1357, cosignée par douze évêques, en faveur de tous les pèlerins visitant l'église et vénérant les reliques qui s'y trouvaient, donc le Saint Suaire! [...]

VILLERSEXEL

En 1418, le Saint Suaire fut transporté en Bourgogne par Marguerite de Charny, fille de Geoffroy II, dernière du nom, épouse de Humbert de Villersexel. En dépit des réclamations des chanoines de Lirey, la Relique fut conservée dans l'église de Saint-Hippolyte, exposée en divers endroits, et enfin cédée à la Maison de Savoie en 1453.

L'authenticité du Linceul ne fut plus jamais contestée. Les Papes ne cessèrent de donner leur approbation au culte d'adoration qui lui est dû « en considération du Sang divin dont il est teint », comme disait Sixte IV.

CHAMBÉRY

À partir de 1502, la Relique réside dans la chapelle du château de Chambéry à laquelle ce pontife accorde le titre de “ Sainte Chapelle du Saint Suaire ”, avec indulgences et privilèges.

Dans la nuit du 3 au 4 décembre 1532, un violent incendie éclata dans la sainte Chapelle du Saint Suaire. La foule accourut ; une seule pensée la préoccupait : sauver le Saint Suaire. [...]

À l'admiration de tous, lorsque les braves qui venaient de le ravir à l'incendie l'eurent sorti de sa châsse et déployé aux regards de la foule

émue, on constata qu'il était intact, sauf quelques points où le feu l'avait noirci et légèrement rompu. [...]

« Cependant, aux dires de l'abbé Bouchage, les hérétiques, nouveaux ennemis déclarés des saintes Reliques, saisirent avec empressement la nouvelle de l'incendie de la Sainte Chapelle pour essayer de ruiner, dans le peuple savoyard et chez les pèlerins circonvoisins, la dévotion au Saint Suaire de Chambéry.

« N'écoutant que la malice de leurs désirs, ils se persuadèrent, soi-disant, que l'auguste Relique avait péri, en répandant cette fausse nouvelle : “ Le Suaire que l'on montre n'est plus celui d'autrefois, disaient-ils,

c'est une copie habilement faite, et rien de plus. ” Et comme le mensonge a le don de

séduire bien des simples, la prétendue destruction du vrai Suaire prenait du crédit. Tellement que le duc se vit obligé de provoquer une reconnaissance indéniable de la vénérable Relique. Il s'adressa au Pape dans ce dessein, le priant de nommer un évêque pour rétablir solennellement l'identité du Saint Suaire de Chambéry. Clément VII acquiesça volontiers à cette demande de Charles III. » [...]

Après avoir examiné le Saint Suaire, le cardinal, les évêques de sa suite et les autres témoins déclarèrent sous serment reconnaître le Saint Suaire qu'ils avaient vu et vénéré avant l'incendie. On dressa un acte de cette déclaration, avec une description de l'état de la Relique. Puis le cardinal porta le Saint Suaire en procession au monastère Sainte-Claire afin que les sœurs le racommodent aux endroits où le feu l'avait

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brûlé. Aussi le sauvetage miraculeux de la sainte Relique consacra-t-il pour deux cents ans la dévotion des peuples et des saints tels que saint François de Sales, envers cet objet sacré comme la dévotion par excellence de la Contre-Réforme catholique. [...]

TURIN

En octobre 1578 une ostension du Saint Suaire a lieu à Turin où il avait été transporté à l'occasion du pèlerinage que saint Charles Borromée accomplit en action de grâces pour la délivrance de son diocèse atteint par la peste. La Relique ne retourna pas à Chambéry et devint le Saint Suaire de Turin.

Ostension du 4 mai 1613, à Turin, par saint François de Sales, devant le palais Madama.

Le 1er juin 1704, la Relique fut transportée dans la chapelle construite au chevet de la cathédrale Saint-Jean-Baptiste par Guarino Guarini. Là, le Saint Suaire va connaître près deux cents ans d'obscurité jusqu'à cette nuit du 28 au 29 mai 1898 où la photographie de la relique prise par Secundo Pia, révélait que le négatif de la photographie était en réalité la parfaite image positive d'un homme réel, magnifique, grand et bien proportionné, d'une beauté athlétique et d'une admirable prestance...

C'était le Seigneur ! Le fils du Dieu vivant...

En 1978 à la suite de l'ostension qui eut lieu sous le pontificat de Jean-Paul I er et qui suscita un élan de dévotion inouïe, une équipe de savants américains (le STURP) entrepris une analyse scientifique de la relique. Parmi eux de nombreux protestants et juifs pensaient découvrir sans peine la supercherie. Au terme de leurs recherches physiques, chimiques, informatiques, ils durent reconnaître qu'ils étaient devant an "ongoing mystery", un mystère persistant, n'arrivant pas à expliquer le mécanisme spécifique de formation de l'image. « Nous pouvons conclure pour l'heure que l'image du Suaire est celle de la forme humaine réelle d'un homme flagellé et crucifié. Elle n'est pas l'œuvre d'un artiste. Les taches de sang sont composées d'hémoglobine et donnent aussi un résultat positif au test de l'albumine. » La conclusion de leurs recherches rend témoignage à la vérité scientifique ainsi qu'à l'honnêteté de ces savants. On ne pourra pas en dire autant de ceux qui firent la datation au carbone 14.

Extrait de la CRC n° 367, mai 2000, p. 1-23

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Exposition du Saint Suaire de Turin

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LA DÉCOUVERTE DE LA...

“ PHOTO ” DE JÉSUSLorsque le Saint Suaire fut montré en public en 1898, à l'occasion d'une exposition d'Art sacré, il n'avait rien pour attirer l'attention : « sans beauté ni éclat », comme le Serviteur souffrant annoncé jadis par le prophète (Is 53), son aspect si déroutant avait de quoi rebuter les connaisseurs d'art. Mais non pas les dévots.

On l'oublie trop : cette dévotion est première, et si la science intervient, c'est par surcroît, comme une récompense et une aide dans le combat que la foi catholique doit soutenir contre l'impiété des incrédules.

Négatif photographique de la Sainte Face empreinte sur le Saint Suaire. On a dit que c'était une œuvre de Léonard de Vinci, ou d'un de ses disciples. Admettons. Mais alors, il faudrait que le génie humain ait conçu ce chef-d'œuvre en “ positif ”, tel que nous le voyons là, chose à la rigueur

concevable, puis l'ait exécuté en “ négatif ”. Voilà l'impossible !

C'est pourquoi il fut donné à un salésien2, précisément, dom Noël Noguier de Malijay , de concevoir l'intuition géniale qui mit en branle la plus féconde recherche scientifique du vingtième siècle, appliquée avec toutes les ressources des méthodes éprouvées à un si singulier et si fascinant Objet. Il nous entraîne dans cette découverte : « Observant que les reliefs du Corps étaient marqués en teinte sombre, alors que les parties creuses ou fuyantes étaient en teinte claire, je ne tardai pas à assimiler l'image du Suaire à une espèce de cliché photographique négatif », écrit le Père salésien, alors professeur de physique et de chimie au lycée international de Valsalice.

« Prévoyant pouvoir obtenir directement sur la plaque photographique une image positive du Christ », il s'employa aussitôt à demander l'autorisation de photographier la Relique. Secundo Pia, photographe officiel de l'Exposition, ne fut que l'exécutant, désigné par le Roi, de l'idée de dom Noguier. Dans la nuit du 28 au 29 mai 1898, le négatif photographique révélait pour la première fois la parfaite image positive d'un homme réel, magnifique, grand et bien proportionné, d'une beauté athlétique et d'une admirable prestance que souligne un majestueux port de tête, parfaitement dégagé des épaules malheureusement rendues invisibles par suite de l'incendie de Chambéry. Découverte absolument inouïe et totalement imprévisible. Et encore incomprise, cent ans après.

Extrait de la CRC n° 367, mai 2000, p. 26-27

2 Société fondée par saint François de Sales (1567-1622), patron des écrivains, journalistes et documentaristes

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Sainte Face de Jésus

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L'AUTHENTICITÉ DU SAINT SUAIRE PROUVÉE PAR LES SCIENCES

C'est à partir de 1898, date de sa photographie, que le Saint Suaire piqua la curiosité des savants. La technique et les lois scientifiques propres à cet art permirent de comprendre, pour la première fois, que le linge ne pouvait être une peinture. [...]

Le Saint Suaire ne pouvait avoir été fait de main d'homme puisqu'il se comportait comme un négatif qui, une fois photographié, révélait en positif le portrait authentique d'un homme flagellé, couronné d'épines, crucifié. Cette démonstration de l'authenticité de la relique fut confirmée par la médecine comme l'attestèrent brillamment les travaux

du docteur Barbet dans les années 1930.

Mais c'est en 1978 que le Saint Suaire va être passé au crible des sciences exactes et de la plus haute technologie. Une équipe de 32 chercheurs américains se constitue alors pour la réalisation d'un projet bien précis : « déterminer au moyen d'expériences non destructrices, la composition chimique et le caractère de la ou des images empreintes sur le Suaire ». Rogers, l'un des chercheurs du STURP (Shroud of Turin Research Project), exprime bien le sentiment général de ses collègues lors de leur arrivée à Turin avec plusieurs tonnes d'un matériel scientifique des plus sophistiqué : « J'étais réellement sûr à près de 150 % que nous allions entrer, passer 30 minutes à le regarder et décider que c'était un canular... sans qu'il vaille la peine de faire nos expériences... » Voici le bilan de 25 ans de recherches.

LE CONSENSUS DE LA COMMUNAUTÉ SCIENTIFIQUE

Anatomie, physiologie

Les taches de sang reproduisent exactement, chacune pour sa part, un écoulement naturellement formé à la surface d'une blessure, en parfaite conformité avec l'anatomie, la physiologie de la circulation et de la coagulation sanguine, avec la neurophysiologie et les phénomènes de conduction nerveuse. Ce qui exclue évidemment les capacités d'un faussaire du Moyen-Âge puisque les propriétés et caractéristiques de la circulation sanguine ne furent connues qu'au XVIe siècle. [...]

Expertise médico-légale

Cette pièce de pur lin a donc enveloppé un vrai mort dont l'identité ne fait aucun doute : ce que l'on voit sur le Suaire, c'est l'image de Jésus-Christ flagellé, blessé à la tête comme par un bonnet d'épines serré sur les tempes et la nuque, transpercé aux poignets, aux cous de pieds et au flanc droit, enfin couché dans l'attitude de la sépulture.

Ce linceul nous est pourtant parvenu sans la moindre trace de décomposition, ni d'arrachement : les taches de sang n'ont pas été marquées par la séparation du linceul et du corps. [...]

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Physique

La définition de l'image est parfaite, et tient en échec toute tentative d'imitation artistique ou de reconstitution en laboratoire.

L'observation au microscope montre que les fibres du Linceul sont colorées individuellement et uniformément. L'intensité de l'image est fonction de la densité relative des fibres colorées, et inversement proportionnelle à la distance du corps au linge

Chimie

Les examens pratiqués directement sur le Suaire en 1978, ont permis de démontrer que l'image « n'est pas l'œuvre d'un artiste ».

L'image du corps, monochrome, n'est faite d'aucun pigment, ni d'un colorant ou d'une teinture quelconque, mais seulement d'une légère dégradation de la cellulose, due à une oxydation-déshydratation des fibrilles de surface. Il en résulte un jaunissement superficiel des fibres du tissu, apparenté à certaines roussissures

d'incendie dont ce Linge porte la trace : les unes et les autres présentent les mêmes caractéristiques de réflexion spectrale et de fluorescence.

Les taches de sang sont composées d'hémoglobine et donnent un résultat positif au test de l'albumine, ainsi qu'à celui de la bilirubine. [...]

Le problème fondamental de la formation de l'image, d'un point de vue scientifique, est que certaines explications, qui pourraient être retenues d'un point de vue chimique, sont exclues par la physique. Réciproquement, certaines explications physiques qui peuvent être séduisantes sont complètement exclues par la chimie. Comme le disait le professeur Gonella à frère Bruno au soir de la clôture du Congrès de Bologne en 1989 : « Cette image est techniquement inconcevable. Scientifiquement, elle ne doit pas, elle ne peut pas exister... Et pourtant le Saint Suaire existe ! » [...]

Aussi ce fut pour toutes ces raisons que le STURP fut contraint de conclure à l'occasion du symposium de New London en 1981 : « Aucune méthode chimique ou physique connue ne peut rendre compte de la totalité de l'image, aucune combinaison de circonstances physiques, chimiques, biologiques ou médicales ne peut non plus expliquer adéquatement l'image [...]. Ainsi la réponse à la question de savoir comment fut produite l'image et pourquoi, demeure, à l'heure actuelle [et encore aujourd'hui en 2004] comme dans le passé, un mystère. »

La photographie

Le négatif photographique de l'empreinte corporelle tachée de sang fait surgir un portrait positif parfait, totalement inconnu des générations passées, et qui résiste, depuis quatre-vingt-dix ans, à toute tentative d'explication. C'est vraiment un « mystère », plutôt qu'une énigme ou qu'un simple « problème », bien que les données appartiennent au champ d'observation de la physique et de la chimie, et qu'elles soient mesurables en termes mathématiques. [...]

Mathématiques

Non seulement l'image est négative, mais elle a enregistré le relief du corps. « Cette tridimensionnalité » de l'image, perçue par don Noël Noguier de Malijay dès 1898, étudiée par Gabriel Quidor au début du 20e siècle, fait depuis 1976 l'objet de rigoureux calculs mathématiques. [...]

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Macrophotographie du tissu du Saint Suaire. Il est de lin, tissé en chevron.

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Comme Barbet l'avait pressenti, l'idée féconde à retenir des recherches de Vignon sur la genèse des empreintes était que l'intensité de la brunissure en chaque point de l'image, variait en raison inverse de la distance qui séparait de la toile chaque point du corps. C'est cette hypothèse que Jackson entreprit le premier de vérifier en utilisant la technologie que la NASA emploie dans l'étude du relief de la planète Mars.

Il fit appel à Bill Mottern, spécialiste des analyses d'images photographiques aux laboratoires Sandia. Mottern utilisa un Analyseur d'Image VP 8,appareil qui permet de rapporter les ombres d'une image brillante de sorte qu'elles occupent différents niveaux d'un relief vertical. [...]

« Jackson lui tendit une image ordinaire en transparence du Suaire, de douze centimètres et demi sur sept centimètres et demi... Mottern l'introduisit dans sa machine et, négligemment, mit le contact.

« La seconde d'après, les deux hommes, bouche bée, contemplaient le résultat. Sur l'écran de télévision auquel était relié l'analyseur d'images, on voyait pour la première fois, de côté, l'image du Suaire, en trois dimensions, dans un relief parfait. Utilisant un mécanisme incorporé à l'appareil, Mottern fit tourner l'image pour présenter l'autre côté. L'effet était le même. Certains détails apparaissaient maintenant clairement, comme par exemple le fait que les cheveux épais et étroitement serrés étaient rassemblés sur la nuque, selon la coutume des Juifs de l'Antiquité. Une autre photographie du visage présente les mêmes effets de relief. »

Sur la silhouette faciale le genou est légèrement surélevé, dans une position qui lui est propre, à un niveau distinct de celui du visage ou de la poitrine. Les caractéristiques correspondantes se retrouvent sur la silhouette dorsale, où l'on aperçoit très distinctement la rondeur du mollet droit. « Lorsque j'ai vu cette image pour la première fois, déclare Jackson,j'ai compris ce qu'avait dû ressentir Secundo Pia en 1898 à la vue de sa première photographie. »

Le choc de la découverte était analogue en effet, à quatre-vingts ans de distance, pour ce physicien de l'ère spatiale. « La science spatiale déchiffre sur le Suaire », selon le titre de sa communication au Congrès de Turin, une caractéristique unique au monde, qui lui est tout à fait propre : la tridimensionnalité. Cette propriété est la loi même de l'image inscrite sur ce tissu puisqu'il ne se produit aucune déformation quand elle est transformée par les calculs de l'ordinateur. Au contraire cette transformation permet de manifester le modelé d'un corps humain dans ses proportions naturelles harmonieuses, de découvrir de nombreux détails nouveaux sur ce corps meurtri, et même de perfectionner l'image, de parachever son esthétique en isolant des accidents du textile et en révélant ainsi davantage « l'extraordinaire beauté du Crucifié ». [...]

Par contre, si l'on introduit dans le VP 8 une photographie ordinaire « directionnelle », souligna à son tour Jumper clichés à l'appui, pour la transformer en image douée de relief vertical, on y constate des déformations évidentes : ce qui n'était qu'une ombre portée devient appendice proéminent... Une fois de plus « l'hypothèse selon laquelle l'image du suaire serait la création d'un artiste est exclue » par le caractère « non directionnel » de l'image. [...]

Jumper et Jackson remarquèrent aussi un détail d'un intérêt prodigieux : un agrandissement en relief de la Face fait apparaître sur les paupières deux disques ressemblant à des monnaies. Ces monnaies devaient avoir pour rôle de maintenir les paupières fermées, selon une coutume hébraïque. Ils espérèrent parvenir un jour à identifier ces monnaies. [...]

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Gros plan de la Face, et silhouettes faciale et dorsale en bas, telles qu'elles apparaissent sur le terminal vidéo de l'analyseur d'images VP 8

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Datation

C'est au Père Filas, le savant Jésuite de l'université Loyola de Chicago et membre du STURP, que reviendra le mérite de confirmer l'observation de Jumper par une stupéfiante et décisive découverte en août 1979.

Un agrandissement de l'empreinte, sur la paupière droite (fig. ci-bas), a permis au Père Filas de reconnaître l'empreinte d'une pièce de monnaie frappée sous Ponce Pilate : même dimension, même découpe, même effigie (la houlette d'astrologue), même exergue reconnaissable à quatre lettres bien lisibles, qu'une certaine piécette dûment cataloguée pour les années 16, 17 et 18, de Tibère César, soit 29, 30 et 31 de notre ère.

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Le Père Francis, Filas, s.j., mathématicien, physicien et théologien, rappelé à Dieu en 1985

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Confirmée par l'analyse tridimensionnelle, la découverte s'est trouvée définitivement corroborée par sa fécondité même, en conduisant la science numismatique à un progrès inattendu. Quatre lettres grecques, Y CAI, suffisent en effet à reconstituer l'exergue TIBEPIO [Y KAI] CAPOC, « de Tibère César », à une anomalie près : un C latin remplace, sur le Saint Suaire, le K grec initial de KAICAPOC figurant sur toutes les monnaies de collection connues jusqu'en 1980.

Or, les recherches du Père Filas l'ont conduit à découvrir coup sur coup, en 1981, deux pièces de collection frappées, sous Ponce Pilate, de la lettre C au lieu de la lettre K en initiale de KAICAPOC (figure à droite). Dès

lors, à ceux qui l'accusaient d'être le jouet de son imagination et de prendre ses désirs pour la réalité, le Père Filas répondait que n'étant pas du tout numismate, il désirait si peu voir une pièce de Pilate qu'« avant de tomber accidentellement sur celle-ci, m'écrivait-il, je n'aurais pas distingué une pièce de Pilate d'un trou dans le mur ». Il dut donc consulter les spécialistes de la numismatique et c'est alors que sa découverte s'avéra si peu être l'œuvre de son imagination qu'elle procura un progrès positif à la numismatique elle-même en révélant que l'anomalie 1° constatée sur le Saint Suaire, 2° déjà reconnue comme d'usage courant en épigraphie, mais inconnue jusqu'alors en numismatique, 3° existait identiquement sur d'autres pièces de collection frappées sous Ponce Pilate où nul n'y avait jusqu'alors prêté attention.

À deux ans près, voilà le document daté, comme par une volonté expresse de Celui qui fut l'Artisan de cette Image imprimée sur tissu. La piécette le proclame : c'est « sous Ponce Pilate » que cet Homme a souffert. Cette " estampille " scelle d'une manière éclatante, du sceau même de Ponce Pilate, l'authenticité du Suaire et l'identité de l'Homme dont il a enveloppé le Corps précieux.

CONCLUSION SCIENTIFIQUE

Parmi les membres du STURP, seuls Kenneth Stevenson, Habermas et le médecin légiste Robert Bucklin ont osé braver le tabou et conclure à cette identité après avoir fait la synthèse des travaux entrepris sur le Suaire : « L'image est l'empreinte d'un homme connu – Jésus de Nazareth – à un moment donné de l'histoire. L'image est peut-être une brûlure légère. Comment s'est-elle produite, nous ne le saurons peut-être jamais en termes scientifiques, parce que cela implique une action divine qui dépasse les lois de la nature. » [...]

Quoique « cela semble le plus logique », le STURP refuse encore, à ce jour, d'envisager sérieusement « la possibilité » de cette « possible conclusion », sousprétexte que « la science n'est pas outillée pour traiter de telles questions » et que le « mécanisme aboutissant à une brûlure n'est pas techniquement croyable ». « Voilà qui n'est pas de bonne science », s'exclame Stevenson. En effet, « l'étude archéologique indique que l'homme était un Juif, crucifié par les Romains et enseveli selon les coutumes funéraires juives », avec cependant des particularités qui coïncident exactement avec les procédés exceptionnels qui ont marqué la crucifixion et la mise au tombeau de Jésus tels qu'ils nous ont été racontés par les quatre Évangiles : « Le cas de Jésus fut irrégulier. Il a été flagellé, couronné d'épines, cloué à sa Croix, percé au flanc (au lieu d'avoir les jambes brisées), enseveli avec honneur mais incomplètement, et son corps a quitté le linceul avant de se décomposer. »

« Le Nouveau Testament affirme que le corps de Jésus n'a pas été soumis à la corruption mais qu'il est ressuscité d'entre les morts. »

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Les lettres Y CAI sont bien visibles, en haut à gauche, ainsi que la houlette et même le contour de la pièce.

Pièce de Ponce Pilate avec la houlette surmontée des lettres « CAICAPOC », avec ‘C' latin au lieu de ‘K' grec.

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« Il n'y a aucune trace de décomposition sur le Suaire. De plus, les taches de sang sont anatomiquement parfaites et n'ont pas été marquées par la séparation du linceul et du corps. Ce parallèle est particulièrement intéressant parce que nous possédons de nombreux suaires funéraires anciens qui montrent des taches de corruption. »

De plus, Stevenson souligne que Jésus et l'Homme du Suaire ont tous deux été exécutés comme des criminels, et cependant enterrés avec honneur « dans du pur lin et individuellement ». [...]

Stevenson calcule alors la probabilité « que deux hommes aient été crucifiés et ensevelis de cette manière ». En adoptant « volontairement une approche sceptique »,il parvient au chiffre de « 1 chance sur 82 944 000 que l'homme enseveli dans le Suaire ne soit pas Jésus ». Retenons la conclusion du statisticien professionnel : « Il n'existe aucune probabilité pratique que quelqu'un d'autre que Jésus-Christ fut enseveli dans le Suaire de Turin. » [...]

Confrontée à l'ensemble de ces données convergentes, la datation médiévale du tissu par le radiocarbone est une aberration qu'il faut imputer non aux machines mais aux mauvaises gens qui s'en servirent. Elle tient donc davantage de l'enquête policière que de la rigueur scientifique comme vous pourrez le constater dans la rubrique suivante.

frère Bruno Bonnet-Eymard

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ENQUÊTE AU SUJET DE LA DATATION AU CARBONE 14 :LA MYSTIFICATION DU BRITISH MUSEUM DÉMASQUÉE

En octobre 1981, les savants américains publiaient au symposium de New-London le résultat de leurs travaux : « Nous pouvons conclure pour l'heure que l'image du Suaire est celle de la forme humaine réelle d'un homme flagellé et crucifié. Elle n'est pas l'œuvre d'un artiste. Les taches de sang sont composées d'hémoglobine et donnent aussi un résultat positif au test de l'albumine. »

Or dès le lendemain de ce symposium, les administrateurs du British Museum autorisèrent le directeur de son laboratoire de recherche, le Docteur Tite, à agir comme superviseur d'un projet de datation du Saint Suaire par la méthode du carbone 14. À l'initiative de qui et dans quel but ? Mystère ! [...]

I. LES INDICES D'UNE FRAUDE PRÉMÉDITÉE

1. PROCÉDURE ET PROTOCOLE

Une procédure fut d'abord soigneusement concertée entre les sept laboratoires désignés et l'Académie pontificale des sciences. [...]

Il faut toutefois remarquer que les Américains du STURP (Shroud of Turin Research Project), qui avaient mis, eux aussi, au point un projet de datation au carbone 14, étaient exclus, après bien des intrigues... [...]

Le “ Protocole de Turin ” ne comptait pas moins de huit cents pages dactylographiées. Tout, absolument tout était prévu, depuis le prélèvement des échantillons sur le Saint Suaire, confié à Mme Mechtilde Flury-Lemberg, de l'Abegg-Stiftung (Berne), la personne au monde la plus qualifiée pour cette première opération délicate dont toute la suite dépendait ; jusqu'à la mise en œuvre des deux méthodes de datation (AMS et petits compteurs à gaz).

Or, ce protocole conclu sous l'égide du cardinal Ballestrero (29 sept - 1er oct 1986) n'a pas été respecté[...]

1. Pourquoi Mechtilde Flury-Lemberg a été écartée au profit du signor Riggi, personnage sans qualification?

2. Pourquoi trois laboratoires seulement (Oxford, Zürich et Tucson) ont finalement été retenus, employant une seule méthode, sous la coordination du seul British Museum, en la personne du seul Docteur Tite ?

3. Nul ne sait qui a évincé l'Académie pontificale des sciences, pas même le cardinal Ratzinger, à l'encontre des promesses qu'il affirme avoir reçues. Mais c'est de la main du cardinal Casaroli que l'ordre du Pape en parvint au cardinal Ballestrero, par une lettre datée du mois de mai 1987, transmise aux laboratoires le 10 octobre 1987.

Dès lors, il n'y a plus de protocole. Tite est libre de prendre toutes les initiatives, sans contrôle de qui que ce soit. Et c'est un adversaire idéologique de notre foi catholique, de ses dévotions et de ses “ reliques ”. [...]

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Emplacement du prélèvement du 21 avril 1988, laissant paraître la toile de Hollande sur laquelle le Saint Suaire fut « cousu à faux filet » en 1534 par les clarisses de Chambéry.

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2. UNE ORCHESTRATION MÉDIATIQUE

Selon la déontologie scientifique, le résultat de la datation aurait dû faire d'abord l'objet d'un compte rendu révisé par les pairs et publié dans une revue spécialisée, avant d'être annoncé au monde. Inverser cet ordre manifeste l'intention évidente d'abuser le public et tromper le monde entier. [...]

Dès le 27 juillet 1988, le britannique David Sox, ennemi juré de la Sainte Relique, avait programmé une émission à la BBC, qui avait pour titre Verdict on the Shroud, « Verdict sur le Suaire. » Mais il ne fut pas

autorisé à divulguer ce qu'il savait déjà. Cependant, il prépara un livre au titre provocant : « Le suaire démasqué », annonçant en sous-titre la « découverte de la plus grande forgerie de tous les temps », achevé d'imprimer plus de deux semaines avant la publication officielle des résultats. La forgerie était encore à la forge !

Le vendredi 26 août, le quotidien londonien Evening Standard titre : « Le Suaire de Turin est un faux. » La nouvelle se répand aussitôt comme une traînée de poudre. Gonella, le conseiller scientifique du cardinal

Ballestrero, tente en vain de démentir. [...]

Vendredi 14 octobre 1988 : conférence de presse au British Museum. Tite trône, encadré par les physiciens du laboratoire d'Oxford, Edward Hall (directeur du Research laboratory for Archeology and History of Art de l'université d'Oxford) et Robert Hedges. Derrière eux, un tableau noir sur lequel sont écrites à la craie ces simples dates : 1260-1390, ponctuées d'un point d'exclamation, cri de victoire. Le soir de ce vendredi 14 octobre 1988, la datation « médiévale » du Saint Suaire était imposée à l'Église hors de toute justification théologique et pastorale, et au monde entier hors de tout contrôle par les « pairs » de la communauté scientifique, comme le résultat absolu et définitif de l'analyse par la méthode indiscutable et indiscutée du carbone 14. [...]

3. LA RÉCOMPENSE DES FAUSSAIRES

Vendredi saint 24 mars 1989 : quarante-cinq hommes d'affaires et « riches amis » (sic) remettent au Pr Hall un million de livres pour prix de ses bons services, et notamment pour avoir « établi l'année dernière que le suaire de Turin est un faux médiéval ».

Le communiqué du Telegraph annonçait la nouvelle le lendemain, Samedi saint 25 mars, en précisant que cette somme assurerait la succession du « professeur de Turin » (sic) qui atteignait l'âge de la retraite. Ce dernier déclara que son intention était d'investir le “ prix du sang ” (Mt 27, 6) dans la création d'une nouvelle chaire de science archéologique à Oxford. En accord évident avec le groupe des généreux donateurs. Désintéressés, tous ! Au profit de quel savant digne d'un tel secours ? « La nouvelle chaire sera occupée par le Dr Tite, directeur du laboratoire de recherche du British Museum, qui a joué lui aussi un rôle prépondérant pour démasquer la fraude du suaire de Turin. » Tout commentaire serait superflu.

II. LA TRAQUE DES ENNEMIS DU SAINT-SUAIRE, LEUR CRIME DÉCOUVERTDimanche 27 novembre 1988, à Paris, grande salle de la Mutualité : devant deux mille cinq cents auditeurs, l'abbé de Nantes ouvre l'enquête. Il écarte résolument les imaginaires « causes d'erreur » qui permettraient d'incriminer les machines : ni contamination du linge, ni prétendue modification de la composition isotopique de la cellulose n'expliqueront jamais que les résultats « tapent » pile dans le XIIIe-XIVe siècle trop attendu en lieu et place du Ier siècle de notre ère : le hasard a bon dos !

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Hall, le Dr Michael Tite au centre, Hedges

De gauche à droite : Hedges, Donahue, Hall, Damon, Wölfli dans des stalles de chanoines, à Turin, le 21 avril 1988.

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« Et donc, ce ne sont pas les appareils qui ont dicté leur loi aux hommes, ce sont les hommes, leurs “ maffias ” scientifiques et ecclésiastiques, qui ont manipulé et commandé les résultats des appareils de telle manière que leur “ challenge ” se termine à leur gloire et à la satisfaction générale. »

Et déjà, première preuve de ce complot ténébreux : l'intrusion frauduleuse d'un quatrième échantillon. Tite avait en effet demandé au physicien français Jacques Évin un échantillon de lin absolument semblable au Saint Suaire (cf. sa lettre du 12 février 1988). Celui-ci fut découpé sur la chape de saint Louis d'Anjou (mort en 1297), et apporté à Turin par l'expert en textiles Gabriel Vial. [...]

16 février 1989 : La revue Nature publiele seul compte rendu officiel, signé des vingt et un membres de la communauté scientifique internationale ayant participé à " la datation au radiocarbone du Suaire de Turin ", cinq mois après la publication des résultats urbi et orbi. Cet article n'a pas été soumis à la révision par les “ pairs ” ; Nature est d'ailleurs la seule revue de niveau scientifique produisant des articles sans ce contrôle. [...]

DEUX MALVERSATIONS DÉMASQUÉES1. L'analyse statistique des résultats

Figure 1 du compte rendu publié par la revue Nature, le 16 février 1989, récapitulant l'ensemble des résultats obtenus par les trois laboratoires (A, Arizona ; O, Oxford ; Z, Zurich) en âge radiocarbone, c'est-à-dire en nombre d'années avant l'époque présente (1950), âge conventionnel directement mesuré par le carbone 14, avant toute calibration et conversion en âge calendaire.Chaque tiret figure la plage de résultats d'un laboratoire, identifié par son initiale.L' " escadrille " numéro 1 est l'échantillon substitué au Saint Suaire : la bande de tissu de 1 × 7 cm. Elle seule présente curieusement un écartèlement certain entre les trois laboratoires. Discordance qui contraste avec les magnifiques concordances des trois autres résultats fournis par les échantillons 2, 3 et 4 ; le 4 étant la chape de saint Louis d'Anjou.Nos traits rajoutés, à l'encre rouge, soulignent la (trop) exacte contemporanéité du prétendu suaire et de la chape de saint Louis d'Anjou, l'un et l'autre de l'âge exigé par Tite !

Il suffit d'examiner la “ figure 1 ” du rapport de Nature, illustration des résultats accessible à tous, et d'étudier l'analyse statistique consacrée à l'interprétation de ces résultats, qui occupe à elle seule près d'un tiers de l'article, pour constater que ce développement est sans valeur réelle. Le seul fait d'avoir substitué au test du X2, en raison de son résultat négatif, celui de Student, est une malhonnêteté. Le test du X2 (vérification nécessaire de l'homogénéité des résultats, tissu par tissu) posait problème au statisticien, à partir des données qui lui étaient fournies. Il appartenait donc au Dr Tite, coordinateur de l'ensemble de l'analyse, de soumettre ce problème aux physiciens, et de leur demander de faire des mesures complémentaires.

Au lieu de cela, que voyons-nous ? Non seulement le Dr Tite ne pose pas de question, mais il s'entend avec les statisticiennes du British Museum, Mesdames Leese et Bowman, pour appliquer un autre test qui, lui, ne soulèvera aucune difficulté et permettra toujours de définir un intervalle de dates, si large soit-il. Pourvu qu'on en oublie le X2 !

Car il est désormais établi que ce test du X2, incontournable, ne permet pas, dans l'état des données actuelles, d'homologuer les résultats fournis par les trois échantillons A 1, O 1 et Z 1 comme obéissant à

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une même et unique loi normale m1 ± σ1. Autrement dit, dans le cas présent, le test de Student n'a aucune signification et l'affirmation des auteurs du rapport de Nature, selon laquelle : « L'âge du suaire se situe entre 1260 et 1390 après Jésus-Christ, à 95 % de confiance au moins » est sans valeur scientifique. Ce prétendu degré de “ confiance ” est un faux... L'honnêteté scientifique eût dicté la déclaration suivante :

« Nous avons trouvé pour le Suaire un âge calendaire moyen de 1320 environ, mais les résultats obtenus ne nous permettent d'associer aucun degré de confiance à cette moyenne. » [...]

Différents tests statistiques prouvent que les mesures des tissus 2, 3, 4 sont homogènes.

Il est non moins prouvé que les mesures du tissu 1 sont hétérogènes, comme si les trois laboratoires avaient travaillé sur deux tissus différents, avec une probabilité de 97,5 %. Plusieurs explications sont possibles :

1. Les traitements chimiques différents ont altéré les mesures, mais seulement sur le tissu 1. Inacceptable.

2. Les appareils étaient calibrés de façon différente. Mais dans le seul traitement du tissu 1. Encore lui !

3. Sous l'appellation " tissu 1 ", les trois laboratoires ont en fait reçu et analysé des tissus différents.

2. La taille et le poids des échantillons : preuve arithmétique d'une substitution d'échantillons

L'analyse statistique n'établit pas, à elle seule, la preuve de la fraude. Elle signale seulement une hétérogénéité des résultats que n'expliquent pas les aléas du comptage des particules ; elle invite donc à enquêter sur la provenance des échantillons. Le symposium de Paris en septembre 1989 allait mettre frère Bruno sur la piste d'une preuve arithmétique de substitution d'échantillons. La revue Nature affirmait, en effet, que chacun des trois laboratoires avait reçu un échantillon du Saint Suaire pesant environ 50 mg chacun, et qu'ils furent préparés à partir d'une bande d'environ 70 X 10 mm. Or les Italiens Testore et Riggi, qui ont effectué le prélèvement et la pesée des échantillons à Turin, affirmèrent au symposium de Paris que les trois échantillons remis aux laboratoires provenaient d'une bande de 81 x 16 mm partagée en deux ! [...]

Selon la version des 21 savants qui ont signé le rapport de Nature (fév. 1989) :

Une bande de 70 X 10 mm, divisé en trois échantillons égaux pour chacun des laboratoires. Pourquoi ce mensonge ? Tout simplement parce que les échantillons apportés par Tite pour être substitués à ceux du Saint Suaire avaient été préparés à partir d'une bande de 7 X 1 cm ! (Cette bande de tissu " sosie " du Saint Suaire du XIVe-XVe siècle a été prélevée dans la réserve du musée Victoria and Albert, et faussement dénommée « Lin associé à une momie de Cléopâtre ».)

Selon le rapport de Franco Testore (symposium de Paris, sept. 1989) :

Une bande de 81 X 16 mm pesant 300 mg, partagée en deux pièces de 144,9 mg et de 154,9 mg. Cette dernière fut partagée à son tour en 3 parties de 53,7 mg, 52,8 mg et 52 mg. (Pourquoi ne pas avoir partagé

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en trois la bande en entier ? Parce que les échantillons apportés par Tite pesaient environ 50 mg chacun. Il fallait absolument réduire la différence de quantité de tissu entre la bande de 81 X 16 mm et celle de 70 X 10 mm !)

Or, 52 + 52,8 + 53,7 font 158,5 mg, qui ne peuvent en aucun cas provenir d'une pièce de 154,9 mg ! Il y a là une anomalie inexplicable, sinon par une vérité tout simple : les poids annoncés par Testore ne sont compatibles qu'avec les dimensions de 70 X 10 mm, d'une bande toute entière employée à la confection de trois échantillons.

À force de pousser Testore et Riggi dans leurs retranchements, nous avons fini par découvrir que l'un des trois échantillons remis aux laboratoires était en deux morceaux !

Résumons les faits :

Le 21 avril 1988, le signor Giovanni Riggi préleva sur le Saint Suaire un gros morceau de tissu de 500 mg, retrancha 200 mg sur les bords extérieurs, aboutit à une bande de tissu de 81 mm × 16 mm. En désespoir de cause, il la partagea en deux parties inégales ; l'une fournit trois échantillons qu'on dut égaliser avec un fragment d'appoint pris sur l'autre, créant ainsi un échantillon en deux morceaux (40 et 14 mg) !

APRÈS DEUX ANS D'ENQUÊTE, L'AVEU D'UNE MYSTIFICATION SANS PRÉCÉDENT

Fin octobre 1990, frère Bruno alla aux États-Unis pour interroger les chercheurs du laboratoire de Tucson sur la forme et le poids des échantillons du Saint-Suaire reçus par eux. L'entretien mit dans l'embarras les savants américains, car sous la pression des questions précises de frère Bruno, ils s'enferrèrent dans de si nombreuses contradictions et dénégations que finalement l'un d'entre eux, Douglas Donahue, fut contraint d'avouer au symposium international de New-York (2-3 mars 1991 à l'université de Columbia) que l'échantillon du Saint Suaire reçu par son laboratoire « était bien en deux morceaux : l'un pesait environ 14 mg, et l'autre 40 mg. Le poids total de l'échantillon du Suaire était d'environ 50 mg ».

Étrange addition ! Cette fois, il dit enfin la vérité mais elle est inconciliable avec les poids que nous avons relevés sur le cahier de

laboratoire à Tucson le 26 octobre. Rien d'étonnant : car ces poids étaient ceux de l'échantillon n° 1 substitué, que l'on n'avait pas pensé à ramener à 40 mg. En effet, l'échantillon du Saint Suaire, lui, ne pèse plus que 40 mg, lorsqu'il est extrait du tube n° 3, étiqueté « momie de Cléopâtre ». Et le morceau de 14 mg ? Il est en réserve. [...]

Cette farce, sans équivalent dans l'histoire des sciences, sinon le fait de Piltdown, se trouve ainsi ramenée à son inconséquence aveuglante, si on la résume ainsi :

À Tucson, le tube du Saint Suaire présente l'échantillon sous scellés, à réception le dimanche 24 avril et... de nouveau sous scellés ! le lundi 25 avril ; mais alors le morceau de 14 mg a disparu... et le morceau de 40 mg, a pris du poids ! Il n'y a pas besoin d'aller plus loin pour accuser les gens de Tucson d'avoir substitué un tissu médiéval au lin du Saint Suaire. [...]

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Dans le bureau de Douglas Donahue (au fond, genoux croisés). Jull montre, sur le cahier de laboratoire, la signature des «témoins» de l'ouverture des tubes, affirmant que les sceaux n'étaient pas brisés.

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LA FRAUDE RECONSTITUÉE

A. Les étapes d'un crime parfait :

a) À Turin, lors des prélèvements, le 21 avril 1988, Tite introduisit :

• dans le tube 1 : l'échantillon du Saint Suaire.• dans le tube 2 : un tissu médiéval (XIe-XIIe siècle).• dans le tube 3 : sous la fausse étiquette “ lin associé à la momie de Cléopâtre ”,

un échantillon de tissu (XIVe siècle), “ sosie ” du Saint Suaire.

b) Dans chaque laboratoire, après interversion des échantillons 1 et 3 :

• le tube 1, étiqueté “ Suaire ”, contient le sosie du Saint Suaire, pseudo-momie.• le tube 2, sans changement.• le tube 3, étiqueté “ momie ”, contient le Saint Suaire.

c) Résultats à obtenir :• Échantillon 1 : XIVe siècle... c'est la pseudo-momie déclarée Saint Suaire !• Échantillon 2 : XIe-XIIe siècle... c'est le tissu médiéval.• Échantillon 3 : Ier siècle... c'est le Saint Suaire déclaré momie !

B. La réalisation, trois fois modifiée, a rendu le crime patent :

a) À Turin, le 21 avril 1988, le Dr Tite a introduit :

• dans le tube 1 : le Saint Suaire• dans le tube 2 : le tissu XIIe siècle• dans le tube 3 : un tissu de collection du XIVe-XVe siècle• dans une enveloppe 4 : les fils de la chape du XIIIe siècle

b) Dans les laboratoires, une datation trop tardive de l'échantillon 1, “ sosie ” du Saint Suaire, a nécessité la substitution de l'échantillon 4 à l'échantillon 1, à Zurich peut-être en partie, à Oxford certainement.

c) Résultats vulnérables : techniquement parfaits, statistiquement irrecevables :

• Échantillon 1 : l'analyse statistique accuse l'hétérogénéité de l'échantillonnage.

• Échantillon 2 : comme prévu.• Échantillon 3 : le substitué n'est pas très cohérent avec les dates de la

momie de Cléopâtre connues par l'histoire (IIe siècle), ni avec les dates obtenues en 1987 par la méthode classique du carbone 14, datation d'ailleurs non contrôlée : 110 av. - 75 ap. J.-C. En revanche, il tombe exactement dans les années attendues pour le Saint Suaire : 11- 64 ap. J.-C., soit 37 ± 27, achevant la preuve de l'ensevelissement du Saint Suaire sous l'étiquette d'une momie oubliée.

• Échantillon 4 : admirablement daté par des machines performantes.

EXPLICATIONS COMPLÉMENTAIRES Chaque laboratoire reçut une portion du “ quatrième échantillon ” (la chape de saint Louis d'Anjou) apporté par Gabriel Vial et mis par lui de force dans les mains de Tite qui, n'ayant pu l'obtenir à temps et en secret, n'en voulait plus. Il lui fallut pourtant en faire trois parts, et les remettre à chacun dans de petites enveloppes brunes.

Il était convenu que les laboratoires travailleraient sans se concerter. Mais ils avaient un " coordinateur ", unique et souverain maître du jeu, Mr Tite ! Par son intermédiaire, la concertation serait assurée et suivie...

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C'est Arizona qui joua le premier. De retour à Tucson, Douglas Donahue et Paul Damon se retrouvent, sans témoins, le dimanche 24 avril au laboratoire. Ils ouvrent les tubes 1 et 3, et procèdent à la substitution convenue : ils extraient le Saint Suaire, en deux morceaux, du tube 1, prennent une photo souvenir (ci-bas), introduisent, à la place du Saint Suaire, le tissu extrait du tube 3 dénommé " momie de Cléopâtre ". La substitution est facile ; c'est un simple échange. Le gros morceau du Saint Suaire, celui de 40 mg, prend place dans le tube 3, et le petit de 14 mg est gardé en réserve.

Ils remettent les scellés. À partir de ce moment, si tout s'était déroulé normalement, la fraude serait demeurée indécelable. Mais les chiffres ont parlé. Que dis-je ? Ils ont crié la vérité.

Et d'abord, ils ont publié haut et fort la date du Saint Suaire ! En effet, Tite avait fait dater en 1987, par la méthode classique du Carbone 14, un petit tas de chiffons appartenant à la momie d'une certaine Cléopâtre, morte à l'âge de onze ans sous Adrien (117-138 ap. J.-C.), exposée aux Antiquités égyptiennes du British Museum : 110 av. - 75 ap. J.-C. Or, les résultats de 1988 donnent 11- 64 après ! Une seule explication : sous l'étiquette " momie de Cléopâtre " se cache le Saint Suaire de Jésus-Christ, acheté neuf à Jérusalem le 3 avril 30.

Et le tissu n° 1 ? Du vendredi 6 mai au mercredi 8 juin 1988, le laboratoire d'Arizona fit ses analyses et envoya aussitôt les résultats à Tite. Ils aboutissaient, pour l'échantillon n° 1, à deux plages calendaires, dont l'une, 1359-1378, à 68 % de confiance, était vraiment trop moderne pour le " Saint Suaire " : il y avait de quoi prévenir le monde entier que cet échantillon n° 1, malgré son étiquette, n'était pas du Saint Suaire, puisque celui-ci fut exposé et vénéré à Lirey à partir de 1350 !

C'est dire dans quel embarras ces résultats plongèrent l'honorable Dr Tite. [...]

Pour vieillir le substitué mal daté par l'“ évidence historique ”, Teddy Hall (et peut-être Willy Wölfli en partie) s'est servi des fils de l'échantillon 4, cette précieuse, vraiment providentielle chape de saint Louis d'Anjou, dont les mesures effectuées à Tucson concordaient avec les dates historiques du saint, mort à vingt-trois ans (1296-1297).

La chape a un âge coïncidant parfaitement avec celui qui a été attribué au Saint Suaire ! [...]

TRIPLE SUBSTITUTION !

1° Le « Lin associé à une momie de Cléopâtre » est remplacé par un tissu " sosie " du Saint Suaire prélevée dans la réserve du musée Victoria and Albert.

2° Ce tissu sosie du Saint Suaire est interchangé avec l'échantillon du Saint Suaire. Mais le tissu sosie du Saint Suaire est trop moderne, selon les premiers résultats !

3° Il sera donc remplacé par la chape de Saint Louis d'Anjou, à Zurich peut-être en partie, à Oxford certainement. D'où les résultats hétérogènes pour l'échantillon 1, en particulier celui d'Oxford qui correspond étrangement à celui de la chape de St Louis.

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Willy Wölfli, directeur du laboratoire de Zurich, devant les trois tubes contenant les échantillons Z 1, Z 2 et Z 3. L'enveloppe, à gauche, contient le quatrième, clandestin.

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Détail d'une " photo-souvenir " (!) prise au laboratoire de Tucson (Arizona) le dimanche 24 avril 1988, que le Pr Donahue nous a envoyée le 3 janvier 1991. Notre explication :

• Le sceau de l'archevêque de Turin, à la cire rouge. Il n'a pas été brisé et sera remis en place après la substitution. De telle sorte que le lendemain lundi, pour l'ouverture officielle du tube, Damon et Donahue, Jull et Toolin attesteront qu'il est intact.• Le tube d'acier marqué " A 1 ", de l'initiale du laboratoire (Arizona) et du numéro de l'échantillon que Tite y introduisit le 21 avril à Turin en présence du cardinal Ballestrero.• Le papier d'aluminium qui enveloppait l'échantillon.• L'échantillon du Saint Suaire. Il est en deux pièces. Le gros morceau pèse 40 mg. Le petit 14 mg.

Damon et Donahue vont mettre au secret le petit, et introduire le gros dans le tube marqué " A 3 ", après avoir préalablement extrait de ce tube n° 3 l'échantillon officiellement dénommé « Lin associé à une momie de Cléopâtre ». En réalité : Lin provenant de la collection Bock du musée Victoria and Albert (XIVe-XVe siècle), qui va prendre place dans le tube " A 1 ". Malheureusement pour les fraudeurs, ce passage nocturne d'un échantillon en deux pièces à un échantillon en une seule pièce est un fait avéré qui dénonce le crime, malgré tous les efforts déployés pour le dissimuler.

Cette implacable démonstration et les faits qui l'étayent ne seront jamais réfutés. Entre temps, les trois laboratoires, l'honorable Tite, l'Éminence Ballestrero et les Italiens ont poussé plus loin leur petite recherche personnelle, et tous savent que le Saint Suaire, à tous les coups, “ tape ” le 11-64 fatidique. Entre 11 et 64, l'année de la mort du Christ : 30 ou 33, sont des plus probables.

III. DERNIER ATTENTAT

Alors, il ne restait plus aux ennemis du Saint-Suaire qu'une solution : le faire disparaître. Qu'on n'en parle plus, et puis qu'il flambe ! C'est la bonne solution, pour la paix du monde.

Cette solution finale sera mise en œuvre dans la nuit du 11 au 12 avril 1997 par l'incendie de la Sainte Chapelle où reposait la Relique. Ce nouveau crime échouera providentiellement grâce au courage des pompiers italiens. Vitorio Messori historiographe du Pape, n'a aucun doute : « Croyez-moi, quelqu'un voulait brûler le Saint-Suaire. Je n'exclus pas un complot international, et mes soupçons vont aux cercles maçonniques et aux intégristes islamistes. » Laissons de côté Ben Ladden et les islamistes, ils ont certainement d'autres chats à fouetter. Mais à qui profite le crime ? À ceux dont la fraude est désormais dévoilée... ces forces occultes, cette franc-maçonnerie, qui entravait à la fin du siècle dernier l'œuvre de saint Jean-Bosco, à Turin même, et qui est toujours acharnée contre tout ce qui est catholique...

L'abbé de Nantes concluait ainsi :

« La relique a été sauvé par son peuple fidèle. Miracle ! Du Suaire aujourd'hui, comme de l'Église demain, ressuscitant, comme Jésus au matin de Pâques. La divine relique a été sauvée pour faire resplendir en ces lieux même l'infinie miséricorde de notre Sauveur et de sa Divine Mère. Faisons connaître cette Bonne Nouvelle aux âmes de bonne volonté : Jésus est ressuscité ! Des cendres son linceul est sauvé ! Adorons-le, c'est le Seigneur ! »

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SCIENCE ET DÉVOTION À L'HOMME DU SUAIRE,LE SEIGNEUR DE GLOIRE !

Du vivant de sainte Thérèse de l'Enfant-Jésus et de la Sainte-Face, le Saint Suaire était demeuré caché comme elle, méconnu, oublié, relégué, enseveli dans son « sépulcre », si bien nommé, au-dessus de l'autel de Bertola, dans la chapelle de Guarini.

C'est une Exposition d'art sacré qui l'en fit sortir au mois de mai 1898, et la photographie le révéla au monde. Pourtant, il ne sort de son silence pour une « vie publique » qu'à l'occasion de l'ostension de 1978. [...]

I. LA SCIENCE CONFRONTÉE À LA PREUVE PALPABLE DE LA RÉSURRECTION

Comme le dira l'abbé de Nantes : « Cet objet de science, nous l'avons examiné par les yeux exercés des médecins ; nous l'avons écouté avec les oreilles de frère Bruno, oyant le bruit de sa renommée, de lieu en lieu, à travers les siècles. Nous l'avons adoré et goûté par les analyses des biochimistes du STURP qui en ont isolé tous les composants jusqu'aux moindres. Nous l'avons touché, palpé par les mains et les appareils des physiciens et experts qui en ont ainsi reconstitué tous les avatars. Enfin, mariant les unes aux autres ces multiples données empiriques, nous avons fait un recensement pour ainsi dire exhaustif des caractéristiques de l'Objet. »

Ce linge n'a pas été peint par quelqu'un de très très habile, non. Mais il a été en contact avec le corps de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Cette bouleversante certitude résulte d'abord de la présence de sang véritable.

« Un Mort couvert de plaies est resté quelques heures dans ce Linceul. Rien ne nous expliquera comment il en est sorti, en laissant intactes et belles, sur ce Linceul, l'empreinte de son corps et les traces de ses saignements. »

S'il n'y a pas d'explication du “ comment ”, du moins un fait historique bien attesté fournit la raison du “ pourquoi ”. Nous savons avec certitude, par le témoignage des quatre Évangélistes et de saint Paul, que le Corps de Jésus n'a pas connu la corruption, mais qu'il est ressuscité d'entre les morts le troisième jour, selon les Écritures. [...]

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Frère Bruno Bonnet-Eymardet l'abbé Georges de Nantes

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LE TROISIÈME JOUR, RESSUSCITÉ D'ENTRE LES MORTS.

Après la mort, écrit le docteur Barbet, toutes les cellules du corps « continuent à vivre, chacune pour son compte, celles de la peau comme les autres, et meurent individuellement après des temps différents. Si les cellules nobles, les cellules nerveuses, sont les plus fragiles, les autres survivent assez longtemps ; la mort totale ne commence qu'avec la putréfaction. » Or, saint Pierre le proclame dès son premier kérygme, le jour de la Pentecôte : ce corps n'a pas connu la corruption (Ac 2, 31) ; il reste uni à la divinité, en attente de la résurrection. Cette vérité théologique n'est pas sans appui biologique.

Là-dessus, Barbet est absolument génial. Il fait appel aux notions les plus simples de son expérience quotidienne. Représentons-nous que « toutes les plaies, toutes les excoriations dont le corps était couvert continuaient à suinter une lymphe plus ou moins infectée comme sur le vivant, mais liquide ».

Quand on a décalqué un caillot sur un linge et qu'on décolle ensuite celui-ci, une partie seulement du caillot demeure fixée sur le linge : « Sa forme est grossière et elle s'écaille très facilement lorsqu'on manipule le tissu ». Tandis que les décalques du Linceul sont parfaitement intacts, entiers, reproduisant l'image familière d'un caillot normal. Voilà ce qui demeure inexplicable !

« Il est bien certain que ce corps, ressuscité glorieux, pouvait aussi facilement s'évader de ce Linceul, qu'entrer dans le Cénacle “ les portes restant fermées ”. Cette difficulté ultime nous fait toucher du doigt, humainement parlant, une quasi-impossibilité matérielle. La science ici n'a plus qu'à se taire, car ce n'est plus de son domaine. Mais le savant, lui, peut au moins y entrevoir une preuve palpable de la Résurrection. »

Que dire alors des empreintes corporelles ? Du « mystère de cette roussissure, cette légère carbonisation du linge, par radiation thermique probablement. Mystère aussi de ces imprégnations ou dépôts chimiquement analysables, qui

témoignent de contacts corporels : sang, sérum, taches de boue. » Comment se concilient les deux actions, par rayonnement à distance et par contact ? Cela demeure absolument inexplicable par la science, selon la conclusion très officielle du STURP. « Aucune méthode chimique ou physique connue ne peut rendre compte de la totalité de l'image, aucune combinaison de circonstances physiques, chimiques, biologiques ou médicales ne peut non plus expliquer adéquatement l'image. »

« Deuxième seuil d'improbabilité, constate l'abbé de Nantes, qui équivaut à la certitude positive d'une impossibilité de fait : il est impossible que l'homme réalise jamais pareille chose. Or cette chose existe sous nos yeux. C'est ce qu'on appelle une énigme, et quand cette énigme a un rapport très évident avec la révélation de Dieu, on l'appelle un miracle. »

Or, cela n'a rien d'étonnant aux yeux de notre foi catholique. Tout en demeurant objet de science, l'image constitue en elle-même un miracle dont le Christ est l'auteur.

II. UNE DÉVOTION TOUTE DE VÉRITÉ SCIENTIFIQUE ET DE CHARITÉ CATHOLIQUE

Voilà donc un miracle, l'image empreinte sur le Saint Suaire, qui témoigne d'un autre miracle : celui de la Résurrection du Seigneur, dont il est le document permanent, l'« enregistrement » quasi photographique.

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FILS DE DIEU FAIT HOMME

Ainsi le Saint Suaire est-il l'image de la résurrection de Celui dont le corps est l'image de Dieu. « Disons, pour simplifier, une photographie, la photo de Jésus, faite par Lui-même. " Le portrait du peintre par lui-même " ! C'est bien Lui dans son être essentiel, mais avec l'expression de son choix, comme s'il s'était recréé lui-même.

Or, dans le cas du Saint Suaire, l'image qu'il porte est mieux qu'une créature témoignant de la grandeur et de la beauté de Dieu, mieux qu'une création artistique exprimant une certaine conception de l'objet représenté. Ici, " l'artiste peint par lui-même " s'est engagé dans cette œuvre. L'artiste, c'est le Fils de Dieu fait homme, qui s'était déjà créé un corps dans le sein de la Vierge Marie, à dessein d'en faire l'image de la divinité, l'image de Dieu son Père. L'image qu'il crée sur le Saint Suaire est donc l'image de l'image de Dieu. De ce Corps qui s'était montré à ses contemporains dans sa condition terrestre comme l'image de Dieu, Lui, le Fils de Dieu a pris un " instantané " correspondant à l'état qu'il voulait nous laisser en véritable image de son mystère. » Charité du Seigneur Jésus pour nous prémunir contre l'immanentisme moderniste et nous aider à garder la foi dans nos temps d'apostasie, car l'image dont est empreint son Saint Suaire publie la formule indélébile de la foi catholique reçue des Apôtres.

De cette théologie de l'image du Saint Suaire, toute dépendante du mystère de l'Incarnation, naît aussi une sublime et émouvante contemplation : « Non seulement c'est Lui, mais c'est Lui tel qu'Il a voulu que nous le connaissions ! »

ÉPOUX RÉDEMPTEUR

L'abbé de Nantes élève alors sur ce fondement une admirable esthétique du Saint Suaire, pénétrant dans la profondeur du mystère de la Rédemption :

« Que voyons-nous sur cette image ? laideur du Serviteur souffrant (Is 53), ou beauté du plus beau des enfants des hommes (Ps 45) ?

« Nous avons là un homme d'une grande beauté physique. Haute taille, forte carrure, musculature, virilité athlétique manifestent la pleine forme de cet être parfaitement développé. Encore faut-il supprimer les défauts du linge pour voir cette taille élancée, ce magnifique port de tête. Si on s'applique au détail, on remarque la finesse des attaches, les poignets, l'élégance des mains dont la longueur est encore accentuée par la rétraction du pouce à l'intérieur de la main.

« La Face est magnifique : d'une immense sérénité, d'une majesté douce et humble. Le front est large et dégagé. Les arcades sourcilières sont très fermement dessinées, le nez est imposant, la tête est dolichocéphale.

« Ce Corps et cette Face sont ceux d'un Chef. Et cependant il a choisi de nous laisser cette photo de sa laideur, image de « Celui qui nous cachait sa Face » (Is 53, 3), qui est comme un ver de terre (Ps 22), dans l'acte de sa Passion : nudité de ce corps écartelé, poitrine exhaussée, visage tuméfié, lèvres gonflées, serrées, comme éclatées.

« Mais c'est une laideur qui est belle parce qu'elle parle de vertus, de sacrifices, d'héroïsme, de souffrances voulues par amour pour nous, pour notre rédemption. Esthétique dramatique des mystères douloureux.

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Tableau représentant le Saint Suaire

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« Bien plus, pour celui qui ne se laisse pas rebuter par cette laideur et passe outre dans un vigoureux acte de foi, voici que se dévoile le comble de la beauté : « C'est beau comme une dissonance qui évoque des choses de l'au-delà. Esthétique hyperbolique des mystères glorieux : « Cette Sainte Face brille soudain d'une bonté qui ruisselle de la plissure des paupières. Le front très noble et très lumineux, très ouvert, l'emporte sur la défaillance du bas du visage et l'éclatement des lèvres. Il resplendit de la gloire de Dieu. La douceur très belle d'un appel à l'amour tombe de ces lèvres qui s'offrent au baiser. Ecce sponsus, “ Voici l'Époux ”. Ainsi Dieu a aimé.

« Or, voici la plus criante illustration du message de la Sainte Face : un jour, il s'est trouvé que dans mon bréviaire mes deux images de sainte Thérèse sur son lit de mort et du Christ se sont rencontrées. Choc, message soudain véhément : c'était le double sommeil de deux gisants, morts l'un pour l'autre. Sommeil d'amour, d'une mort par amour, d'une mort d'amour, en plein acte d'amour parfait. L'image de l'Époux rapprochée de celle de l'épouse qui a donné silencieusement sa vie par amour pour Lui, ce sont deux solitudes qui se rencontrent, deux visages, deux corps en attente de la résurrection pour leurs noces éternelles.

« Pour Lui, elle est déjà accomplie : cette Face est celle du Christ ressuscité dans la gloire. Pour elle, l'heure ne tardera pas... Gloire à Dieu, au Fils de Dieu dans le Ciel et paix sur la terre aux saints corps qui attendent leur résurrection pour aller s'unir à Lui dans la Vie éternelle. » [...] (CRC n° 127 de mars 1978, CRC n° 224 de juillet 1986)

LE CHRIST RESSUSCITÉ NE MEURT PLUS

Une question se pose alors, angoissante, “ au seuil du troisième millénaire ” : Comment a-t-il pu se laisser condamner à mort une seconde fois le 13 octobre 1988 ? Pour entrer dans ce mystère, il nous faut encore nous mettre à l'école de « la plus grande sainte des temps modernes ». Un jour, son père étant en voyage, la petite Thérèse Martin eut une vision prophétique : elle vit son Père chéri, son « Roi de France et de Navarre », traverser le jardin, courbé, la tête couverte d'une espèce de tablier qui lui voilait le visage. C'est seulement quatorze ans plus tard, en se remémorant ces événements avec sœur Marie du Sacré-Cœur, qu'elles en comprirent le sens : « C'était bien papa que j'avais vu, s'avançant, courbé par l'âge... C'était bien lui, portant sur son visage vénérable, sur sa tête blanchie, le signe de la glorieuse épreuve... Comme la Face Adorable de Jésus qui fut voilée pendant sa Passion, ainsi la face de son fidèle serviteur devait être voilée aux jours de ses douleurs, afin de pouvoir rayonner dans la céleste Patrie auprès de son Seigneur, le Verbe éternel !

« C'est du sein de la gloire qu'il nous a obtenu cette douce consolation de comprendre que dix ans avant notre grande épreuve le Bon Dieu nous la montrait déjà, comme un père fait entrevoir à ses enfants l'avenir glorieux qu'il leur prépare et se complaît à considérer d'avance les richesses sans prix qui doivent être leur partage... »

Parvenu à ce point, notre Père n'hésite pas à prolonger, à la lumière du message de Thérèse, jusqu'à notre temps d'apostasie : cet homme voilé dont elle a vu l'image vivante en la personne de son papa chéri, c'est Dieu le Père, notre très chéri Père céleste, c'est notre Roi singulièrement humilié par la grande apostasie qui submerge le monde et semble devoir vaincre les saints eux-mêmes. La Face de Dieu est outragée. Mais il appartient aux enfants de Marie au Cœur Immaculé de le « consoler ».

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LA PASSION DU CHRIST SELON LE SAINT SUAIRE DE TURIN

LES PLAIES DU CHRIST

« Pilate prit Jésus et Le fit flageller. » (Jn 19, 1)

La flagellation du Seigneur, personne ne l'avait imaginée dans toute son ignominie, telle que nous la voyons ici représentée. Peut-être le laconisme des Évangélistes s'explique-t-il par l'horreur que leur inspirait le souvenir de ce supplice infligé à Jésus (Mc 15, 15 ; Mt 27, 26 ; Jn 19, 1). Selon les témoignages littéraires, le condamné était entièrement dévêtu et attaché à une colonne. C'est pourquoi on parle traditionnellement de “ la colonne de la flagellation ”. Mais si Jésus avait eu ainsi les bras élevés, attachés au sommet d'un fût de colonne, il aurait eu au moins la poitrine à l'abri des coups. Ici nous voyons les coups pleuvoir sur les épaules, sur le dos, les reins, les cuisses, les mollets ; mais aussi par-devant : nous en comptons les traces sur la poitrine et sur la face antérieure des jambes.

Le flagrum, un manche avec deux ou trois lanières lestées de petites haltères en plomb, était manié par un bourreau qui tournait autour de sa victime, ou bien par deux bourreaux, dont l'un frappait à revers. Jésus a perdu beaucoup de Sang, pour une raison que saint Luc est le seul à mentionner, « avec une précision de clinicien tout à fait indépassable », écrit le docteur Barbet ; peut-être parce qu'il avait interrogé saint Jean, le disciple bien-aimé qui ne dormait pas au mont des Oliviers :

« Entré en agonie, il priait de façon plus instante, et sa sueur devint comme de grosses gouttes de sang qui tombaient à terre. » (Lc 22, 44)

Barbet reconnaissait les symptômes de l'hématidrose, phénomène clinique rare, mais bien connu des médecins, causé par un profond ébranlement moral, précisément celui dans lequel nous voyons Notre-Seigneur plongé au cours de l'agonie de Gethsémani, lorsqu'Il prévoit d'avance, dans le détail, les souffrances qui L'attendent ; et surtout lorsqu'Il se remémore la masse effroyable de NOS péchés, et qu'Il s'en revêt en présence de son Père, les prenant sur Lui pour les expier. Une agonie morale, un combat mortel entraîne ce symptôme physiologique d'une hémorragie sous-cutanée : le sang se mêle à la sueur et forme avec elle des petites boules sortant par les pores de la peau et roulant littéralement sur l'ensemble du corps, « roulant jusque par terre », écrit saint Luc.

Ainsi préparée par ces millions de petites hémorragies intradermiques, la peau devient beaucoup plus fragile et sensible aux coups qui vont venir ensuite. Infiltrée de sang, attendrie, elle se fend sous les coups des balles de plomb et commence à se détacher et à pendre en lambeaux. Tandis que les lanières proprement dites laissent de longues traces livides, bleus d'ecchymoses sous-cutanées que l'on observe avec émotion aux ultraviolets. Impossibles à dénombrer, elles marquent l'ensemble du corps.

La flagellation a entraîné la plus grave hémorragie subie par Jésus, elle-même cause de toutes les autres ; lorsque les soldats Lui retirent cette chlamyde de dérision qu'ils ont jetée sur ses épaules après la flagellation, pour Lui remettre ses vêtements, et lorsqu'ils le dépouillent de nouveau au pied de la Croix : chaque fois, le sang ruisselle !

« Voici votre roi. » (Jn 19, 14)

Il est manifeste que Jésus a été coiffé par une sorte de bonnet d'épines. Ce traitement, unique dans tous les témoignages que nous pouvons avoir sur la crucifixion dans l'Antiquité, est l'écho direct du dialogue de

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Silhouette dorsale

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Pilate avec Jésus revendiquant hautement sa Royauté messianique. Les soldats chargés de Le flageller l'avaient entendu répondre : « Tu le dis : je suis roi. » (Jn 18, 37) Ils en témoignent de cette cruelle façon.

Ils n'ont pas eu de peine à se procurer « un fagot de bourrée, de ces arbrisseaux qui foisonnent dans les buissons de la banlieue » de Jérusalem, écrit Barbet ; « c'est souple et ça porte de longues épines, beaucoup plus longues, plus aiguës et plus dures que l'acacia ». Ils en ont tressé « une espèce de fond de panier », qu'ils Lui appliquent sur le chef en rabattant les bords et en serrant le tout avec un bandeau de joncs tordus. Voilà toute la tête prisonnière, enserrée de la nuque au front dans ce casque, et les épines pénètrent dans le cuir chevelu qui saigne abondamment. De longs ruisseaux de sang ont coulé sur le front, et les traces qu'ils ont laissées sur le Suaire montrent qu'ils ont rencontré l'obstacle du bandeau de joncs. [...]

Le “bandeau de jonc” est actuellement conservé à Notre-Dame de Paris sous le nom de “Couronne d'épines”. Il reçoit de cette étude une preuve d'authenticité très certaine. En effet, il est remarquable que cette relique ne porte pas d'épines ; si c'était un faux fabriqué au Moyen Âge, le faussaire lui aurait certainement mis des épines.

« Portant sa Croix. » (Jn 19, 17)

Par-dessus les blessures de la flagellation, on observe les traces de l'abrasion d'un fardeau qui a pesé sur les omoplates : vestige du portement de Croix que personne n'avait imaginé de cette façon. Jésus n'a pas porté la Croix tout entière, comme le représentent généralement les artistes. Les lieux d'exécution étaient plantés par avance du poteau vertical, appelé stipes crucis, et la poutre horizontale, appelée patibulum, était chargée sur les épaules du condamné. Écrasant fardeau. Jésus trouve dans l'amour qu'Il nous porte et sa volonté de nous sauver l'énergie de le charger sur ses épaules déjà meurtries par une flagellation qui aurait dû le tuer.

Depuis la forteresse Antonia jusqu'au sommet du mont Calvaire, le chemin à parcourir était de six cents mètres environ. Jésus les a parcourus pieds nus. Le sol est raboteux, semé de cailloux, très accidenté, même à l'intérieur des remparts. En 1978, des scientifiques américains ont brusquement rencontré le douloureux cortège, sur ce chemin du Calvaire, lorsqu'ils ont retrouvé de la boue incrustée entre les fibres au niveau des genoux et à l'extrémité du nez, comme on pouvait s'y attendre. Jésus mettant péniblement un pied devant l'autre s'est effondré plusieurs fois, tombant sur ses genoux qui ne sont plus qu'une plaie. Enfin, Jésus s'est encore étalé de tout son long, absolument épuisé, et sans pouvoir Se protéger le Visage du contact brutal avec le sol. [...]

« Ils le crucifièrent. » (Jn 19, 18)

Arrivé au sommet du mont Calvaire, Jésus est mis en croix. Comment imaginer une telle scène ? Par l'étude attentive des “Cinq Plaies” « creusées », comme dit le Psaume 22, selon la version grecque des Septante, aux mains et aux pieds de Jésus, ainsi qu'à son Cœur. Sur son Linceul, nous n'en voyons que quatre, parce que celle du poignet droit est cachée sous le poignet gauche.

Ce sont les plaies d'un crucifié cloué aux mains et aux pieds comme d'innombrables condamnés de l'Antiquité, du moins jusqu'à Constantin exclusivement. La vérité oblige à dire que nous ne savons rien sur ce supplice aboli depuis le IVe siècle, rien d'autre que ce que les travaux de Barbet ont découvert sur le Saint Suaire. [...]

En effet, l'empereur Constantin abolit, en l'honneur de Notre-Seigneur, ce supplice affreux, réservé aux droits communs, aux esclaves, aux prisonniers politiques, tel ce Yehohanan ben Hagqôl, dont les archéologues israéliens ont retrouvé en 1968, aux environs de Jérusalem, le talon transpercé d'un clou. L'homme avait été crucifié en l'an 70 ap. J.-C., pendant la Guerre juive, donc quarante ans après Jésus, sans doute parmi les centaines de ces malheureux juifs « soumis, avant de mourir, à toutes sortes de tortures, puis crucifiés face au rempart », qui apitoyaient Titus lui-même au dire de Flavius Josèphe (Guerre juive 5, 449-451).

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Jésus, lui, ne nous a pas laissé son squelette, mais son Linceul taché de son Précieux Sang. Cette magnifique pièce de lin atteste qu'après avoir été exécuté comme un brigand, il a été enseveli comme un prince ! [...]

« Ils ont percé mes mains et mes pieds. » (Ps 22, 17)

Jésus a d'abord été dépouillé de ses vêtements. Supplice atroce : « Avez-vous jamais enlevé un premier pansement mis sur une large plaie contuse et desséché sur elle ? Ou avez-vous subi vous-même cette épreuve qui nécessite parfois l'anesthésie générale ? Si oui, vous pouvez savoir un peu de quoi il s'agit. Chaque fil de laine est collé à la surface dénudée, et, quand on le soulève, il arrache une des innombrables terminaisons nerveuses mises à nu dans la plaie. Ces milliers de chocs douloureux s'additionnent et se multiplient, chacun augmentant pour la suite la sensibilité du système nerveux. Or, il ne s'agit pas ici d'une lésion locale, mais de toute la surface du corps, et surtout de ce dos lamentable ! Les bourreaux pressés y vont rudement. Peut-être cela vaut-il mieux, mais comment cette douleur aiguë, atroce, n'entraîne-t-elle pas la syncope ? Comme il est évident que, d'un bout à l'autre, Il domine, Il dirige Sa Passion ! »

Couvert de sang et de blessures, Jésus est étendu à terre, les épaules couchées sur le patibulum. Les plaies de son dos, des cuisses, des mollets s'incrustent de poussière et de menus graviers.

« Porte ton doigt ici et vois mes mains. » (Jn 20, 27)

« Les bourreaux prennent les mesures. Un coup de tarière, pour amorcer les trous des clous dans la poutre. Les mains, ils le savent, seront faciles à percer, mais les clous entrent moins facilement dans le bois. » Puis « l'horrible chose commence. Un aide allonge l'un des bras, le bourreau prend son clou », un long clou pointu et carré, un “ clou de la Passion ”, de huit millimètres de côté près de sa grosse tête : « Il le pique sur le poignet, dans ce pli antérieur, qu'il connaît d'expérience. » [...]

« Un seul coup de son gros marteau : le clou est déjà fiché dans le bois, où quelques coups énergiques le fixent solidement. Jésus n'a pas crié. » Mais son Visage s'est contracté et son pouce, d'un mouvement violent, impérieux, s'est fermé dans la paume, comme Barbet l'a vu sur les bras fraîchement amputés, et donc encore vivants, de la salle de dissection de l'hôpital Saint-Joseph. De fait, chacune des deux mains, si belles et fines, paraît ne compter que quatre doigts, d'ailleurs admirablement reportés sur le Linge. Les pouces sont en opposition, cachés dans les paumes. Barbet l'a compris en disséquant : « Son nerf médian a été touché. Mais, alors, je ressens ce qu'Il a éprouvé : une douleur indicible, fulgurante, qui s'est éparpillée dans Ses doigts, a jailli, comme un trait de feu, jusqu'à Son épaule et éclaté dans Son cerveau. C'est la douleur la plus insupportable qu'un homme puisse éprouver, celle que donne la blessure des gros troncs nerveux. Presque toujours, elle entraîne la syncope et c'est heureux. Jésus n'a pas voulu perdre connaissance. Encore, si le nerf était entièrement coupé. Mais non, j'en ai l'expérience, il n'est que partiellement détruit ; la plaie du tronc nerveux reste en contact avec ce clou ; et sur lui, tout à l'heure, quand le corps sera suspendu, il sera fortement tendu comme une corde à violon sur son chevalet. Et il vibrera à chaque secousse, à chaque mouvement, réveillant la douleur horrible. »

« L'autre bras est tiré par l'aide ; les mêmes gestes se répètent, et les mêmes douleurs. Mais cette fois, songez-y bien, Il sait ce qui L'attend. Il est maintenant fixé sur le patibulum, qu'Il suit étroitement des deux épaules et des deux bras.

« “Allons, debout ! ” Le bourreau et son aide empoignent les bouts de la poutre et redressent le condamné, assis d'abord, puis debout. Et puis, Le reculant, L'adossent au poteau », le pieu vertical, stipes crucis (gibet de la croix), d'avance planté sur les lieux d'exécution. « Mais c'est, hélas, en tiraillant sur Ses deux mains clouées et en exacerbant la douleur des médians. D'un grand effort, à bout de bras, mais le stipes n'est pas très haut, rapidement, car c'est bien lourd, ils accrochent d'un geste adroit le patibulum en haut du stipes. À son sommet, quelques clous fixent le titulus écrit en trois langues.

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« Le corps, pendant, n'est soutenu que par les clous plantés dans les deux carpes. Il pourrait tenir sans rien d'autre. Le corps ne se déplace pas en avant. Mais la règle est de fixer les pieds. » [...]

« En utilisant un clou de vingt centimètres, à section carrée de huit millimètres de côté, écrit le docteur Pierre Mérat, nous avons cherché ce passage à la main, dans la partie saillante du dos du pied, sans marteau afin de ne briser aucun os, conformément à l'Écriture (Jn 19, 36). En vain.

« C'est alors que songeant à la position de contrainte probablement infligée par les bourreaux à ces pieds qu'ils voulaient appliquer solidement sur le bois, nous avons fléchi le pied de notre sujet de dissection, et nous avons alors senti le clou s'enfoncer assez facilement, au point que deux coups de marteau ont suffi pour le faire apparaître à la plante. Nous avons reporté la pointe du pied sur la même région de l'autre pied, qui fut traversé de la même façon. La dissection a montré le passage du clou entre le deuxième et le troisième os cunéiforme du tarse, en

avant du scaphoïde, à l'emplacement visible sur un calque radio. Les os n'étaient pas brisés, tout au plus légèrement marqués par le passage du clou sur le cartilage ». [...]

Avec la permission de notre ami, nous avons aussitôt dénommé « espace de Mérat » l'espace anatomique découvert par lui à l'école du Saint Suaire. La conclusion de Barbet reçoit de cette nouvelle preuve expérimentale une éclatante confirmation, sans réplique possible :

« Toutes les images sanguines coïncident, sans exception, et d'une façon étonnamment précise, avec la réalité anatomique. C'est cet ensemble serré, disons même cette unanimité de véracité, qui constitue une présomption de vérité équivalant à une certitude. S'il y avait une seule exception, je pourrais hésiter et ne pas accorder au Linceul une confiance, qui est allée en augmentant au fur et à mesure de mes expériences. Et cette confiance s'affermit encore, lorsque je vois le caillot du poignet, au lieu d'évoquer une seule coulée verticale, en démontrer nettement deux, séparées qu'elles sont par une distance angulaire. Ceci coïncide manifestement avec ce que nous savons expérimentalement, hélas ! de la mort par asphyxie et des efforts de redressement faits par le Crucifié. Il faudrait se crever les yeux, pour ne pas voir dans toutes ces images sanguines le pur effet de la réalité. »

« J'ai soif ! » (Jn 19, 28)

Hissé sur son gibet, Jésus s'est affaissé, tirant sur ses bras qui s'allongent, les omoplates raclant douloureusement sur le bois, la nuque heurtant le patibulum. Dans ce mouvement, les pointes acérées de sa couronne d'épines ont déchiré un peu plus le cuir chevelu. Ce “ chapeau ” l'empêche de reposer sa pauvre Tête sur le bois ; elle penche donc en avant, et chaque fois qu'Il la redresse, Il réveille les cruelles déchirures.

Après tant de tortures, pour ce Corps épuisé, l'immobilité semble presque un repos. Ses traits sont tirés, sa figure hâve est sillonnée de sang qui se coagule partout. Il a soif ! Il le dira tout à l'heure, non pas pour se plaindre mais « pour accomplir l'Écriture », note saint Jean (Jn 19, 28). « Mon palais est sec comme un tesson, et ma langue, collée à la mâchoire. » (Ps 22, 16)

Sa bouche est entrouverte et sa lèvre inférieure déjà commence à pendre ! Un peu de salive coule dans sa barbe, mêlée au sang qui coule de son nez. Sa gorge est sèche et embrasée ; Il ne peut même plus déglutir le peu de salive qui Lui reste ! Il n'a rien mangé ni bu depuis... combien de temps ? Et perdu tant de Sang...

Soudain, le voici saisi de crampes ! De proche en proche, une tétanie généralisée contracte tous les muscles de son Corps, diagnostiquée par le regard exercé du médecin : la tête est penchée en avant, comme nous la voyons sur la silhouette faciale, parce que les muscles inspirateurs sont contractés par cette tétanie dans laquelle Jésus est mort finalement. Les filets de sang, le long des bras, dessinent, en les contournant, les contractures des muscles des bras et des avant-bras. Les cuisses elles-mêmes sont déformées par les mêmes saillies monstrueuses, rigides. Les muscles du ventre se raidissent en vagues figées ; puis les intercostaux, puis les muscles du cou et les muscles respiratoires.

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Les deux grands pectoraux, qui sont les plus puissants muscles respiratoires, sont en contraction forcée, élargis et remontés vers les clavicules et vers les bras. Toute la cage thoracique est elle-même remontée et fortement distendue en inspiration forcée, le creux de l'estomac est enfoncé, déprimé par cette élévation et par cette distension du thorax en avant et en dehors. Toute la masse abdominale est refoulée vers le bas par le diaphragme : voyez, au-dessus de ses mains croisées, saillir le bas-ventre.

Tels sont les symptômes indubitables de la tétanisation et de l'asphyxie : « L'air entre en sifflant mais ne sort presque plus. Il respire tout en haut, inspire un peu, ne peut plus expirer. Il a soif d'air. C'est comme un emphysémateux en pleine crise d'asthme. Sa figure pâle a peu à peu rougi ; elle passe au violet pourpre et puis au bleu. Il asphyxie. Ses poumons gorgés d'air ne peuvent plus se vider. Son front se couvre de sueur, ses yeux exorbités chavirent. Quelle atroce douleur doit marteler son crâne ! Il va mourir. »

Eh bien ! non, ni la soif, ni l'hémorragie, ni l'asphyxie, ni la douleur n'auront raison de ce corps athlétique d'un Dieu Sauveur ! Et s'Il meurt avec ces symptômes, Il ne mourra vraiment que parce qu'Il Le veut bien, ayant ce pouvoir, comme Il L'avait annoncé, de « déposer sa vie et de la reprendre ». C'est précisément cette mort volontaire qui fera proclamer tout à l'heure par le centurion qui observe un peu à part avec une attention déjà respectueuse : « Cet Homme est vraiment le Fils de Dieu. » (Mt 27, 54)

En effet, à quoi ont-ils assisté, lui et son escouade, avec Marie, la Mère de Jésus qui se tient là debout, et saint Jean et les saintes femmes ? Nous voyons la scène comme si nous y étions : lentement, d'un effort surhumain, Il a pris appui sur le clou de ses pieds ; les cous-de-pied et les genoux s'étendent peu à peu, et le corps par à-coups remonte, soulageant la traction des bras, mais au prix de douleurs effroyables car les nerfs médians frottent sur le clou. Du coup la tétanie régresse, les muscles se détendent, tout au moins ceux de la poitrine, les poumons se dégorgent de l'air vicié qui les remplissait et bientôt la pauvre figure tuméfiée, toute sanglante et déformée a retrouvé sa pâleur ordinaire. Surtout, Il a retrouvé son souffle ! Pour quoi faire ? Pour parler. Pour articuler quelques paroles d'une voix mourante : « Père, pardonnez-leur, car ils ne savent pas ce qu'ils font ! » (Lc 23, 34)

Et puis, à peine cela dit dans un effort surhumain, son corps commence à redescendre, et la tétanie reprend. À sept reprises, Il se dresse et il parle, entre deux asphyxies, au prix de douleurs indicibles, car chaque mouvement retentit dans ses mains, irritant les nerfs médians. Ces mouvements successifs d'affaissement et de surrection ont laissé une trace visible sur le Linceul : ce sont ces deux filets de sang qui font un angle aigu de quelques degrés sur le poignet gauche. Un côté correspond à l'écoulement du sang en position d'affaissement, le bras faisant alors un angle de 65 degrés avec la verticale ; l'autre correspond à l'écoulement du sang en position de surrection, le bras faisant alors un angle de 70 degrés avec la verticale. Ces redressements et abandons successifs, « c'est l'asphyxie périodique du malheureux qu'on étrangle et qu'on laisse reprendre vie, pour l'étouffer plusieurs fois. »

Il faut ajouter à la soif, aux crampes, à l'asphyxie, aux vibrations insupportables des deux nerfs médians, l'infection des plaies, et ces mouches affreuses, de grosses mouches vertes et bleues qui tourbillonnent autour de son Corps et brusquement s'abattent sur l'une ou l'autre plaie, pour en pomper le suc et y pondre leurs oeufs. Elles s'acharnent au Visage ; impossible de les chasser !

Et pas une plainte, sinon à son Père doucement : « Eli, Eli, lamma sabactani. Mon Père, Mon Père, pourquoi m'avez-Vous abandonné ? » (Mc 15, 34)

Et soudain, sachant que « tout est consommé » (Jn 19, 30), il poussa de nouveau un grand cri : « Mon Père, Je remets mon âme entre vos mains ! » (Lc 23, 46) Enfin, « inclinant la tête, Il a rendu l'Esprit. » (Jn 19, 30) [...]

Sa tête s'est penchée, droit devant Lui, le menton sur le sternum, comme nous le voyons sur la silhouette faciale : la tête nettement fixée en inclinaison antérieure, « visage détendu, rasséréné, que malgré tant d'affreux stigmates illumine la majesté très douce de Dieu qui est toujours là ».

Jésus est mort quand Il l'a voulu. Il est mort dans un miracle, et c'est bien ce qui arrache au centurion sa profession de foi : « Oui, vraiment cet Homme était Fils de Dieu ! » (Mt 27, 54)

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« Du sang et de l'eau. » (Jn 19, 34)

Dernière révélation d'une souffrance que nous ne soupçonnions pas, qu'il faut donc ajouter rétrospectivement à toutes les autres. Les soldats brisent avec une masse de fer les cuisses des larrons. Ils pendent maintenant lamentablement et, comme ils ne peuvent plus se soulever sur leurs pieds, la tétanie et l'asphyxie les auront bientôt achevés. « Mais venant à Jésus, écrit saint Jean, seul témoin oculaire de la scène, comme ils virent qu'Il était déjà mort, ils ne lui rompirent pas les jambes, mais l'un des soldats, de sa lance, lui perça le côté et il sortit aussitôt du sang et de l'eau. » (Jn 19, 33-34)

Barbet voit en praticien le « geste tragique et précis » : « Il a levé la hampe de la lance et d'un seul coup oblique au côté droit, il l'enfonce profondément. » Lui-même a répété l'expérience sur plusieurs corps d'autopsie, puis il a disséqué : « Jean l'a bien vu et moi aussi, et nous ne saurions mentir : un large flot de sang liquide et noir, qui a jailli sur le soldat et peu à peu coule en bavant sur la poitrine, en se coagulant par couches successives. Mais en même temps, surtout visible sur les bords, a coulé un liquide clair et limpide comme de l'eau. Voyons, la plaie est au-dessous et en dehors du mamelon (5e espace), le coup oblique. C'est donc le sang de l'oreillette droite et l'eau sort de son péricarde. Mais alors, mon pauvre Jésus, votre Cœur était comprimé par ce liquide et Vous aviez, en plus de tout,

cette douleur angoissante et cruelle du cœur serré dans un étau. »

En bouquet spirituel, une parole sublime de sainte Thérèse de la Sainte-Face inspirera notre prière : « Ô Jésus, laisse-moi Te dire que Tu as fait des folies pour ta petite épouse. » Songeant que toutes ces souffrances, ces douleurs effroyables, Jésus les a, toute sa vie durant, prévues, préméditées, voulues par amour pour elle, pour la sauver, l'âme prédestinée est envahie de cette charité qui embrasa le cœur de sainte Thérèse de l'Enfant-Jésus à l'âge de treize ans, pour la consumer entièrement en quelques années.

« Un dimanche, en regardant une photographie (sic !) de Notre-Seigneur en Croix, je fus frappée par le Sang qui tombait d'une de ses mains divines, j'éprouvais une grande peine en pensant que ce Sang tombait à terre sans que personne ne s'empresse de Le recueillir, et je résolus de me tenir en esprit au pied de la Croix pour recevoir la divine rosée qui en découlait, comprenant qu'il me faudrait ensuite la répandre sur les âmes... Le cri de Jésus sur la Croix retentissait aussi continuellement dans mon cœur : “ J'ai soif. ” Ces paroles allumaient en moi une ardeur inconnue et très vive. Je voulais donner à boire à mon Bien-Aimé, et je me sentais moi-même dévorée de la soif des âmes. » [...]

Frère Bruno de Jésus

Extrait de la CRC n° 332, Pâques 1997

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