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Le premier centre anticancéreux de Lyon (1923) Le chirurgien Léon Bérard et Auguste Lumière* par L. P. FISCHER **, B. MARTINET ***, P.Y. GLAS*** Portrait officiel de Léon Bérard Le premier centre anticancéreux de Lyon a été inauguré en 1923, dans un site prestigieux, sous le grand dôme de Y hôtel-Dieu, au milieu de la façade de l'hôtel-Dieu qui regarde vers le Rhône, due en 1748 au grand architecte Soufflot. Cet hôtel-Dieu fonctionnait en grande partie pendant la guerre 1914- 1918 dans l'accueil et le soin des bles- sés de la guerre, notamment dans le ser- vice de Léon Bérard (1870-1956), pro- fesseur de clinique chirurgicale, avec deux salles de soins confiées à Auguste Lumière (Besançon 1862 - Lyon 1954) qui les finance ; Auguste Lumière inventeur du cinématographe en 1895 avec son frère Louis Lumière (Besançon 1864 - Lyon 1948), non seu- lement a financé des travaux de recherches de Léon Bérard et d'Etienne Destot, le radiologue, de 1896 à 1913, mais a payé toutes les radiographies * Comité de lecture du 25 novembre 2000 de la Société française d'Histoire de la Médecine. ** Professeur de chirurgie orthopédique et traumatologique - Hôpital Edouard Herriot Pavillon T - 69374 Lyon Cédex 03 et Faculté de Médecine Grange Blanche - 8 Avenue Rockefeller - 69008 Lyon. *** Médecin Capitaine B. Martinet - 8ème Régiment d'Artillerie - Quartier Oudinot - 55200 Commercy **** Chef de clinique - Hôpital Edouard Herriot Pavillon T - 69374 Lyon Cédex 03 et Faculté de Médecine Grange Blanche - 8 Avenue Rockefeller - 69008 Lyon HISTOIRE DES SCIENCES MÉDICALES - TOME XXXV - №3 - 2001 253

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Le premier centre anticancéreux

de Lyon (1923)

Le chirurgien Léon Bérard

et Auguste Lumière*

par L. P. FISCHER **, B. MARTINET ***, P.Y. GLAS***

Portrait officiel de Léon Bérard

Le premier centre anticancéreux de

Lyon a été inauguré en 1923, dans un

site prestigieux, sous le grand dôme de

Y hôtel-Dieu, au milieu de la façade de

l'hôtel-Dieu qui regarde vers le Rhône,

due en 1748 au grand architecte

Soufflot. Cet hôtel-Dieu fonctionnait en

grande partie pendant la guerre 1914-

1918 dans l'accueil et le soin des bles­

sés de la guerre, notamment dans le ser­

vice de Léon Bérard (1870-1956), pro­

fesseur de clinique chirurgicale, avec

deux salles de soins confiées à Auguste

Lumière (Besançon 1862 - Lyon 1954)

qui les finance ; Auguste Lumière

inventeur du cinématographe en 1895

avec son frère Louis Lumière

(Besançon 1864 - Lyon 1948), non seu­

lement a financé des travaux de

recherches de Léon Bérard et d'Etienne

Destot, le radiologue, de 1896 à 1913,

mais a payé toutes les radiographies

* Comité de lecture du 25 novembre 2000 de la Société française d'Histoire de la Médecine.

** Professeur de chirurgie orthopédique et traumatologique - Hôpital Edouard Herriot Pavillon T - 69374 Lyon Cédex 03 et Faculté de Médecine Grange Blanche - 8 Avenue Rockefeller - 69008 Lyon.

*** Médecin Capitaine B. Martinet - 8ème Régiment d'Artillerie - Quartier Oudinot - 55200 Commercy

**** Chef de clinique - Hôpital Edouard Herriot Pavillon T - 69374 Lyon Cédex 03 et Faculté de Médecine Grange Blanche - 8 Avenue Rockefeller - 69008 Lyon

HISTOIRE DES SCIENCES MÉDICALES - T O M E X X X V - № 3 - 2001 253

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pendant la guerre et aidé au démarrage des traitements radiothérapiques des cancers à

T hôtel-Dieu.

1) La fondation du centre anticancéreux (1923)

Sur le plan historique dans cet hôpital de l'hôtel-Dieu, Ollier s'était intéressé depuis

1870 aux cancers osseux ; il les photographie et les ampute mais ne propose pas d'autre

conduite pratique. En 1896, peu de temps après la découverte des rayons X par

Roentgen, Victor Despeignes, ancien chargé de travaux à la Faculté de médecine de

Lyon et installé aux Echelles en Savoie, tente d'utiliser les -rayons X pour un patient

atteint d'un cancer gastrique. L'histoire ne dit pas quels furent les résultats.

N'oublions pas Pierre et surtout Marie Curie, d'origine polonaise, première femme

titulaire d'une chaire à la Sorbonne, qui découvrit la radioactivité du thorium et isola le

radium, recevant pour cela le Prix Nobel de physique en 1903 et de chimie en 1911.

N'omettons pas le nom d'Antoine Béclère (dont un hôpital à Clamait porte le nom) qui

lança la radiothérapie à peu près en même temps que Léon Bérard.

Dès 1917, Léon Bérard effectue quelques essais de radiothérapie dans son service de

chirurgie de l'hôtel-Dieu. C'est en 1923 qu'il inaugure, sous le dôme de l'hôtel-Dieu de

Lyon, un des premiers centres anticancéreux de France après celui de Bordeaux. Une

photographie du musée des Hospices Civils de Lyon montre l'installation de ce service

dans des structures de type préfabriqué, installées sous le dôme de l'hôtel-Dieu par

manque de place. Ce service est richement doté en radium, arme puissante contre les

cancers O.R.L. et utérins, financé par la Ligue lyonnaise contre le Cancer, organisée par

Léon Bérard. Le professeur Daniel Dargent, fils du professeur Marcel Dargent le grand

cancérologue, se souvient des descriptions faites par son père de patients atteints de

cancers de la tête ou du cou qui étaient emprisonnés par des colliers ou des masques de

bois pendant toute la durée d'application du radium. Les malades étaient hospitalisés

dans des salles communes annexes.

2) Transfert au nouvel Hôpital Edouard Herriot du Centre anticancéreux (1934)

Léon Bérard et sa clinique chirurgicale quittent en 1934 l'hôtel-Dieu pour le nouvel

Hôpital Edouard Herriot (conçu en 1905 et terminé en 1933 !). Il s'installe au Pavillon

D. Le rez-de-chaussée est consacré à la chirurgie viscérale, le premier étage à la chirur­

gie osseuse sous la direction du chef de clinique Jean Creyssel, l'un des élèves préférés

de Léon Bérard, Marcel Dargent et Marcel Bérard sont les internes. Pierre Mallet-Guy a

décrit cette période jusqu'à la deuxième guerre mondiale dans ses Souvenirs de la

Clinique Chirurgicale. Quant au pavillon anticancéreux, il s'installe sur les toits du

Pavillon B du même Hôpital Herriot ! Jean Creyssel y restera jusqu'en 1938. Les doc­

teurs André Morel, Pierre Colson, Charles Freidel y sont attachés avec trois ou quatre "

radiologistes" et deux internes. Bientôt le centre "phagocyte" tout le pavillon B.

Auguste Lumière dirige une annexe du Centre en ville qu'il finance et participe à cette

épopée y amenant ses connaissances et les ressources de ses laboratoires. De nom­

breuses radiographies et photos en témoignent.

Le Centre se dote d'appareils de radiothérapie à grand rendement, d'une bombe de

télécuriethérapie et bénéficie de l'association avec la clinique chirurgicale.

Le témoignage le plus poignant sur ce centre anticancéreux est donné par le médecin

et grand écrivain Jean Reverzy (1914-1959), auteur du roman Le Passage, 1950 (Prix

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Renaudot). Jean Reverzy, dans une nouvelle, (Actes Sud Editeur) nous décrit son rôle

"d'externe secrétaire" en 1934-35 dans le pavillon anticancéreux inauguré par les som­

mités françaises et étrangères et "où le calme régnait" du fait du désintérêt du chef de

service "le Professeur K." qui est Léon Bérard, et de son interne. Reverzy décrit un

endroit que tout espoir a quitté, où la mort règne accompagnée de son accolyte la dou­

leur. Pour le patient qui y rentre, toute la période antérieure, heureuse, est niée... Le

temps est rythmé par l'heure de la radiothérapie, celle du pansement sur la dermite. La

phrase de l'agrégé décrit comme timide (qui est-ce ?) est révélatrice : "Depuis trente

ans, depuis la découverte des propriétés du radium et les rayons X, les recherches sont

en pleine stagnation. Il faut être audacieux, tout essayer." La description de Léon

Bérard est terrible : il ne s'intéresse pas au cancéreux, méprise son agrégé, se met en

scène lors des séances de consultation en faisant des bons mots aux dépens des patients

intimidés par une assemblée fort nombreuse. Nous retiendrons cette phrase de Jean

Reverzy : "Le Professeur K avait depuis longtemps passé la soixantaine ; d'un seul

regard de ses yeux bleus sans bonté, il avait observé et pénétré toute l'assemblée."

Quelle réalité donner à cette description empreinte de dureté ? (B. Martinet)

3) La création du Centre "Léon Bérard" (1958)

Nous n'avons pu obtenir de documentation de la part du Centre Léon Bérard et nos

informations restent fragmentaires. Léon Bérard prend sa retraite en 1941. Le centre de

l'Hôpital Edouard Herriot est surpeuplé. Le successeur de Léon Bérard, Paul Santy

- chirurgie cardiaque - étudie la construction d'un nouveau centre. Sa première pierre

avait été posée par le Président E. Herriot le 18 décembre 1950. Le 19 mai 1958, le

Centre Léon Bérard est officiellement inauguré avec trois cents lits (soixante lits en

1923). En 1958, une chaire de cancérologie est créée et confiée au Professeur Marcel

Dargent, directeur du Centre, sur proposition du doyen Hermann. Marcel Mayer succé­

dera au Professeur Dargent à la tête du centre. "Actuellement, l'établissement qui est un

établissement de santé privé à but non lucratif, participe au service hospitalier. Le

Préfet de région préside son conseil d'administration. Comportant deux blocs opéra­

toires, un département de radiothérapie, un laboratoire (biologie, anatomopathologie,

biochimie), des services de cancérologie médicale, chirurgicale et pédiatrique, il partici­

pe au réseau de recherche avec un département de santé publique, un département de

biologie des tumeurs (recherche sur les tumeurs de l'enfant) et l'unité I N S E R M 453

travaillant sur la biologie des gènes suppresseurs de tumeur. Le tout emploie huit-cents

personnes et soigne quinze mille patients différents par an..."

"...Nous voyons que, depuis 1923, un long chemin dans le centre anticancéreux de

Lyon a été parcouru, initié par un homme dont la volonté et les qualités d'organisations

permirent le développement du traitement des cancers." (B. Martinet).

Commentaires

Nos commentaires seront brefs : ils sont plus longs dans la thèse de Bruno Martinet

(Lyon 2000)

1. Le créateur véritable du Centre anticancéreux a été un chirurgien exceptionnel

Léon Bérard.

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2. Il a été aidé au point de vue financier non seulement par les Hospices Civils de

Lyon, mais par un créateur de génie : Auguste Lumière, dévoré, après l'invention du

cinéma, du désir de soulager la souffrance des hommes.

Les noms des radiologues qui travaillaient à l'époque en radiothérapie restent à

rechercher : nous connaissons, d'après des photographies, Henri Novel (dont le fils

radiologue, Roger Novel, nous a aidé récemment dans la création d'un musée de chirur­

gie Léopold Ollier (1830-1900, aux Vans, Ardèche, son pays natal) ; Jean Papillon qui

deviendra le premier professeur de la chaire de radiologie vers 1956 ; plus tard

Monbarbon et d'autres qui étaient à cette époque radiologues cliniciens, analyseurs

d'image avec quelques vacations de radiothérapies.

Léon Bérard

Né à Morez, Jura, en 1870, fils de pharmacien, Léon Bérard arriva à Lyon en 1888

pour y débuter ses études médicales. Il était le frère du grand helléniste Victor Bérard

(commentaires fameux sur L'Odyssée d'Homère), adepte de l'ORIM (Organisation de

la Résistance intérieure Macédonienne), et auteur du livre Pro Macedonia (1904). Il fut

l'élève préféré d'Antonin Poncet qui orienta le début de sa carrière chirurgicale dans la

chirurgie de la thyroïde et de l'actinomycose humaine. Puis Léon Bérard s'orienta dans

deux domaines : la chirurgie thoracique et celle du cancer.

Les qualités de Léon Bérard furent repérées par Antonin Poncet. Antonin Poncet

(voir thèse de Thierry Haug) était le grand nom de l'hôtel-Dieu ; bien vu de l'adminis­

tration, il avait obtenu, ce que les précédents chirurgiens auraient voulu avoir, une salle

d'opération superbe dite "la première salle aseptique de France" que viennent visiter

tous les chirurgiens de Paris, Lille, Bordeaux et ceci en 1889. Léon Bérard surnommé

"le plus Parisien des Lyonnais" a des amis efficaces à Paris, prétend à cinquante-cinq

ans ne plus opérer ou opérer exceptionnellement pour se consacrer à une œuvre scienti­

fique et d'éducation. Antonin Poncet a des élèves prestigieux qui se bousculent autour

de lui : parmi eux, outre Bérard, René Leriche, le futur chirurgien de l'Institut à Paris,

Alexis Carrel qui agacera le Maître plus tard avec la parution de son livre Le Voyage à

Lourdes. Le service de Poncet est, à la différence de celui du catholique Ollier, un ser­

vice scientifique plutôt hostile à la religion.

Léon Bérard soutient avec Poncet en 1896 une thèse remarquable sur la thérapeu­

tique chirurgicale du goitre et deux ans plus tard est nommé professeur agrégé à la

Faculté de médecine, en continuant de travailler sur les sujets favoris de son Maître :

actinomycose, corps thyroïde. Dans les années entre 1896 et 1914-1918, c'est-à-dire

pendant huit ans, Léon Bérard effectue un nombre considérable de travaux. L'ambiance

de l'hôtel-Dieu est à la recherche : il suffit d'évoquer le nom de Mathieu Jaboulay qui

effectue les premières greffes rénales pour remplacer des reins tuberculeux, et à partir

de 1896 le véritable déchaînement de recherches scientifiques en radiologie et anatomie

d'Etienne Destot, prosecteur d'anatomie, qui abandonne, bien obligé, la chirurgie puis-

qu'aucun patron ne veut le prendre comme assistant, du fait de son caractère un peu

ombrageux.

Nous allons parler des recherches de Léon Bérard en les groupant selon des thèmes.

1. Léon Bérard travaille sur la chirurgie du cou : les localisations de l'actinomycose

et les goitres. Après sa thèse de 1896 sur Le Traitement chirurgical des goitres, inspirée

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par Antonin Poncet, Léon Bérard publie en 1908 un Traité de chirurgie du corps thy­

roïde. Il précise avec Etienne Destot, le pionnier de la radiologie lyonnaise, les rapports

anatomiques du corps thyroïde, avec des radiographies, après injection artérielle avec

des produits opaques.

Léon Bérard évoque "l'innocuité habituelle des interventions pour goitres qui,

depuis dix ans, ne nous ont donné aucun cas de mort après ablation des lésions thyroï­

diennes non cancéreuses sur un total de plus de deux cents opérations...", alors qu'il

aura malheureusement le décès sur table de son millième goitre. Il faut dire aux plus

jeunes que les goitres à cette époque étaient souvent impressionnants : il est intéressant

de voir les photographies reproduites dans le livre de Léon Bérard, ce sont des masses

énormes avec des phénomènes de compression sur les vaisseaux, sur les nerfs.

2. Léon Bérard est un chirurgien généraliste puisqu'il laisse un nom dans la chirurgie

osseuse : dans les grandes ostéomyélites, il prône l'ouverture large de la diaphyse, la

mise à plat des bords de l'ouverture de l'os, mise à plat qui est traduite en anglais par

"saucer" et revient dix ans plus tard en France avec le terme anglais de "saucérisation" !

Il écrit en 1914 un Traité sur l'appendicite.

3 . Léon Bérard est le pionnier de la chirurgie thoracique (tuberculose).

Léon Bérard, dans sa formation chez Antonin Poncet, avait étudié toutes les localisa­

tions de la turberculose sauf une, la plus fréquente : la tuberculose pulmonaire pour

laquelle les traitements restaient aléatoires. C o m m e l'écrit Bruno Martinet : "A travers

l'institution du sanatorium Mangini fondé par son ami Frédéric Dumarest, Léon Bérard

va être l'un des premiers à tenter, et le premier à réussir, du moins en France, des thora-

coplasties permettant de guérir de nombreux patients... Il devient le fondateur de la

chirurgie thoracique dans notre pays". L'Allemagne est en avance sur les essais théra­

peutiques puisqu'en 1851 c'est la création du premier sanatorium dont les principes

sont : air pur et sec, repos, nourriture riche. Je rappelle que plus tard il y aura le fameux

roman de Thomas Mann, La Montagne Magique, sur ce thème du sanatorium.

En 1880 la Suisse et les Etats-Unis découvrent les bienfaits du sanatorium. En

France le premier sanatorium du Canigou à Vernet-les-Bains est créé par Sabourin en

1890. On doit, comme l'a souligné Martinet, à la volonté d'un seul homme, Frédéric

Dumarest, 1810-1851, la réalisation du sanatorium Mangini à Hauteville qui sera l'un

des premiers et l'un des plus grands sanatoriums français. Nous conseillons vivement la

lecture de l'ouvrage de Monsieur Jean Dumarest Hauteville-Lompnes, station clima­

tique d'altitude qui retrace la vie du centre depuis sa création jusqu'en 1951, date à

laquelle les antibiotiques rendent caduques les cures sanatoriales. Frédéric Dumarest,

camarade d'internat de Léon Bérard, publie en 1896 un article dans lequel il évoque la

création d'un sanatorium à Hauteville : "Puis il rencontre Hermann Sabran, Président

du Conseil d'Administration des Hospices Civils de Lyon, pour lui faire part de son

projet. Celui-ci l'oriente vers Félix Mangini, lequel (tout comme Hermann Sabran qui

avait perdu sa fille Renée) avait été durement touché par le décès de tuberculose de l'un

de ses enfants (à noter que Frédéric Dumarest avait effectué un semestre d'internat à

l'Hôpital Renée Sabran à Hyères)" (B. Martinet).

Félix Mangini utilise alors tous ses moyens techniques et financiers, tout son réseau

d'influences, commençant par fonder "l'œuvre lyonnaise des tuberculeux indigents",

association sans but lucratif qui gérera le centre. Son conseil d'administration com-

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prend A. Lumière, H. Sabran, F. Mangini et la direction scientifique est assurée par

Saturnin Arloing.

Léon Bérard, gendre du philanthrope Félix Mangini (qui permet la création du pre­

mier sanatorium de Hauteville), est un des premiers à réaliser des thoracoplasties.

Forlanini, inventeur du pneumothorax, avait eu en 1882 cette phrase prophétique : "La

résection du poumon ou son ablation totale seront dans le futur un traitement de la phti­

sie", prévoyant l'avènement de la chirurgie dans le traitement de la tuberculose. La tho-

racoplastie consiste à affaisser une partie de la paroi thoracique par résection de plu­

sieurs arcs costaux voisins, dans le but de "collaber" (ie. d'affaisser et fermer) le pou­

mon sous-jacent. Les premiers à tenter ce geste sont les Allemands Sauerbruch et

Saugmann, sous la direction de leur maître Von Mikulitz à Breslau, en Silésie

aujourd'hui polonaise... En 1885, de Cérenville réussit ce geste pour la première fois à

Lausanne. En 1908, Bauer et Friedrich procèdent à l'ablation complète du grill costal

d'un hémithorax. En 1912, Sauerbruch perfectionne la technique en réséquant de courts

fragments postérieurs de onze côtes. En 1913, Frédéric Dumarest demande à Léon

Bérard de tenter cette opération : le premier malade français, un jeune boulanger, de

vingt-six ans, présentait une poussée ulcérofibreuse du lobe supérieur droit et Léon

Bérard résèque la moitié antérieure des quatre premières côtes droites et les trois quarts

de la clavicule droite. Le patient guéri sera revu en 1921. "Avec cette technique consa­

crée au Congrès Français de la Tuberculose de 1927 à Lyon par le rapport commun de

Léon Bérard et Frédéric Dumarest, nous pouvons affirmer que Léon Bérard fut bien un

fondateur de la chirurgie thoracique en France." (Bruno Martinet, thèse p. 60)

4. Léon Bérard et la tuberculose osseuse.

"Léon Bérard (avec l'œuvre lyonnaise des tuberculeux indigents) traite des tubercu­

loses osseuses. Avec son fils Félix, chirurgien, il ouvre à Hyères (Var) des établisse­

ments pour traiter des tuberculoses osseuses. L'un d'entre eux, en 2000, existe toujours,

remarquable, et porte le nom d'Hôpital Léon Bérard. Il est devenu un centre de réadap­

tation, avec quatre services hospitaliers : la réadaptation cardiaque, (il reçoit vingt pour

cent des transplantés de France), après infarctus du myocarde, chirurgie ; la réhabilita­

tion des grands brûlés ; la rééducation neuromotrice ; la rééducation en pathologie vas-

culaire, appareillage des amputés, rééducation des stomisés". (B. Martinet)

5. Léon Bérard et Auguste Lumière : une amitié depuis 1894 et une recherche facili­

tée pour la création du centre anticancéreux grâce à la générosité d'Auguste Lumière.

"Auguste et Louis Lumière sont parmi les plus grandes figures scientifiques. Ils

n'échappèrent point à une polémique plus absurde que réellement historique. En effet,

il y a quelques années, un projet consistant à mettre leur effigie sur de nouveaux billets

de banque fut proposé, ce qui provoqua un tollé médiatique car Auguste et Louis

Lumière furent taxés de collaboration. Bien qu'ils n'aient jamais été inquiétés à la

Libération, le projet fut enterré, nonobstant l'importance de leurs travaux scientifiques.

En fait, seul Auguste Lumière était incriminé. Dans son livre de mémoires Siegfried et

le Berrichon, Léon Gaultier (qui fut haut fonctionnaire du gouvernement de Vichy

avant de partir combattre l'Armée Rouge sous l'uniforme allemand) écrit qu'Auguste

Lumière fut membre du comité fondateur de la Légion des Volontaires Français contre

le Bolchevisme. Cette fameuse L.V.F., d'association type loi 1901, se transforma en

unité militaire qui partit combattre le bolchevisme dans les steppes et les forêts russes,

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sous l'uniforme allemand, ramassis de militants de partis collaborationnistes y poursui­

vant leurs querelles politiques, d'anciens militaires en quête de campagne, d'aventuriers

(on y retrouva même une poignée de Kabyles et d'Arabes et quelques Antillais...) et de

clochards venus pour la gamelle. A leur retour, les survivants furent d'ailleurs moins

inquiétés par les tribunaux de l'épuration que les collaborateurs restés en France." (B.

Martinet). Auguste Lumière se retira vite de ce comité et dans le même temps, dans sa

clinique de la rue Villon (actuel siège économique des Hospices Civils de Lyon),

Auguste Lumière employa des médecins israélites étrangers, dissimulant leur identité

aux yeux des autorités d'occupation. Son fils Henri, qui entra dans la Résistance, lui

reprocha rapidement son inscription à ce scandaleux comité (Henri mort en 1972, après

avoir été président de la chambre de commerce) ; quant à Louis Lumière, le reproche

qui peut lui être fait est d'avoir reçu la francisque.

Auguste est né à Besançon (sur la même place que Victor Hugo) en 1862 et est décé­

dé à Lyon le 10 avril 1954 dans sa villa de Montplaisir aujourd'hui classée. Avec

Louis, ils sauvèrent l'usine des produits photographiques fondée par leur père en 1880.

Ils la développèrent, lui donnant un essor mondial. Inventeur du cinématographe en

1895 avec son frère Louis, Auguste est sensible à la douleur humaine et veut aider la

recherche et les soins médicaux. Auguste Lumière, pendant la guerre de 1914-1918,

avec l'afflux de blessés, travaille auprès de Bérard à l'hôtel-Dieu et met au point une

technique de pansements par tulles gras et une théorie sur l'interprétation du "shock"

traumatique et des accidents anaphylactiques. En 1918, Auguste Lumière perd sa fille

lors de la terrible épidémie de grippe espagnole. Dès lors il décide de se consacrer

exclusivement à soulager la souffrance.

Auguste Lumière, "le biologiste", fonde sa polyclinique rue Villon à Lyon, dont il

suit les consultations. Il passe plusieurs matinées par semaine au service des cancéreux

de l'hôtel-Dieu de Léon Bérard, puis à l'Hôpital Edouard Herriot. Léon Bérard créant,

par manque de place, une annexe à son pavillon anticancéreux, charge Auguste

Lumière de l'organiser et d'en prendre la direction scientifique. Cet immeuble, situé rue

Mistral (qui servait auparavant aux jeunes filles sans situation) accueille les malades

cancéreux opérés ou en cours de traitement et nécessitant une surveillance. Auguste

Lumière s'en occupa pansant lui-même les cancéreux et leur payant les médicaments

dont ils avaient besoin. Cette annexe devint l'Hôpital "Le Bon Abri". Auguste Lumière

y visitait tous les jours chaque malade en compagnie du docteur Vigne.

Cet homme dévoué à la souffrance d'autrui vouait une admiration profonde à Léon

Bérard illustrée par cette phrase dithyrambique : "Maître admirable dont la haute scien­

ce, l'érudition, la technique impeccable, le talent de présentation et d'exposition incom­

parable en ont fait le plus brillant, le plus éblouissant instructeur que j'aie jamais

connu", tirée de son livre de mémoires Mes Travaux et mes jours.

Auguste Lumière assiste aux cours donnés à la Faculté de médecine par Léon

Bérard. Il a reproduit pour ses leçons, en agrandissements colorés (1 m 05), les

planches d'anatomie du livre de Testut qui seront utilisées jusqu'en 1940. De la même

façon, Léon Bérard fut le premier chirurgien à faire filmer ses opérations, à Lyon, grâce

au concours d'Auguste Lumière. A Paris, des chirurgiens étaient aussi intéressés à se

faire filmer pendant des opérations spectaculaires : le fameux E. Doyen "séparant" les

deux siamoises du cirque Barnum, dont une était en train de mourir de tuberculose, ou

Jean-Louis Faure dans sa chirurgie gynécologique...

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Auguste Lumière, dans les années 30, habite le coin de la place Monplaisir et du

cours Albert Thomas et apparaît comme un petit homme en noir, consul d'un pays, (la

Hongrie semble-t-il). Il est le véritable second de Léon Bérard, roulant dans une petite

voiture d'avant-guerre pour véhiculer comme chauffeur Léon Bérard !

D'après le professeur Daniel Dargent qui se souvient de ce que lui racontait son

père, Marcel Dargent, élève de Léon Bérard et directeur du centre anticancéreux, Léon

Bérard appréciait davantage Auguste Lumière comme sponsor que comme scientifique.

Deux anecdotes illustrent ce propos et montrent qu'il y avait un peu de condescendance

de la part de Léon Bérard vis-à-vis d'Auguste Lumière : un jour, devant un blessé pyré-

tique auquel personne ne comprenait rien, Auguste Lumière trouve une petite tuméfac­

tion thoracique qu'il ponctionne, trouvant du pus. Léon Bérard dit alors, non sans une

pointe d'ironie, (dixit Auguste Lumière lui-même dans son livre Mes Travaux et mes

jours) : "Messieurs, quand vous aurez un diagnostic difficile à faire, vous vous adresse­

rez à Monsieur Lumière". La seconde anecdote concerne l'allochrysine, poudre de sels

d'or mise au point par Auguste Lumière pour le traitement de la tuberculose et dont

Léon Bérard, constatant que son seul effet était antiinflammatoire, fit arrêter l'utilisa­

tion au sanatorium Mangini. Auguste Lumière eut du mal à lui pardonner cette décision

prise de façon unilatérale, comme le raconte Jean Dumarest dans son histoire du sanato­

rium Mangini.

En conclusion, Léon Bérard travailla dans les hôpitaux jusqu'à soixante-dix ans, puis

continua, avec son épouse Hélène Mangini, à animer des sanatoriums. Son nom est

donné à trois hôpitaux : celui de Hyères (Var) de rééducation fonctionnelle, celui de

Morez, sa ville natale. Mais son nom reste surtout connu car attaché au centre antican­

céreux de Lyon qu'il a inauguré en 1923 sous le grand dôme de l'hôtel-Dieu avec

Auguste Lumière et le maire Edouard Herriot qui démolira l'hôpital voisin de la

Charité et le pont de la Guillotière. Une anecdote amusante décrite par notre maître, le

chirurgien Alain Bouchet, ancien président de notre Société, peut être rapportée avant

cette inauguration de 1923 à l'hôtel-Dieu : le Maire Edouard Herriot aurait voulu la

destruction de l'hôtel-Dieu, sur les conseils du médecin hygiéniste Courmont, Auguste

Lumière, personnalité importante, en avril 1903, publia un texte de quatre-vingt-dix

huit pages Désaffection de l'hôtel-Dieu : "Auguste Lumière, comme Herriot, voulait la

destruction de l'hôtel-Dieu" (Alain Bouchet).

Avec la collaboration de Bénédicte Fischer et Véronique Vey, notre secrétaire.

BIBLIOGRAPHIE

La thèse de Bruno MARTINET sur Léon Bérard (Lyon, février 2000) apporte de nombreux autres éléments et une bibliographie étendue. Cette thèse a été réalisée grâce à des témoignages remar­quables, en particulier de Madame Marguerite Bérard-Pila, dernière fille de Léon et Hélène Bérard ; du professeur René Guillet, chirurgien des Hôpitaux de Lyon, élève de Léon Bérard, du docteur André Morel à Paris, ancien chirurgien à Romans, élève de Léon Bérard, de Maurice Trarieux-Lumière (Paris-Neuilly), de Bernard Malaterre, directeur de l'Hôpital Léon Bérard de Hyères, de Madame Rousset du musée des Hospices Civils de Lyon.

CREYSSEL Jean - Thèse de Médecine par Malapert Eric, Lyon 1981, inspirée par L.P. Fischer.

LEBEL Renée - Hommage à Madame Léon Bérard (Audimed, 1958).

REVERZY Jean - Le Centre anticancéreux, in Le Mal du Soir (Actes Sud, 1986, p. 157-165)

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I N T E R V E N T I O N : D r Alain S É G A L .

Celui-ci regrette qu'effectivement les recherches historiques sur les centres antican­

céreux n'enthousiasment guère les historiens d e la m é d e c i n e et apprécie g r a n d e m e n t le

travail d u professeur Fischer. Il signale le fait p e u c o n n u q u e le premier centre d e soins

pour des cancéreux ait pris naissance à R e i m s e n 1 7 4 0 grâce à la générosité d'un cha­

noine d e l'Eglise métropolitaine d e R e i m s , m a i s aussi grand vicaire d e M M . les cha­

noines d e la Sainte-Chapelle d e Paris : Jean G o d i n o t (1661 [date d u B a p t ê m e ] 1749).

D é j à en 1 7 3 8 , il essuya u n premier échec en voulant doter l'hôpital Saint M a r c o u l ,

qui recevait les scrofuleux, d e d e u x lits réservés a u x "cancérés". Alors il se tourna pour

u n e donation particulière aux administrateurs d e l'hôtel-Dieu qui trouvèrent u n e solu­

tion élégante car le p r e m i e r refus venait n o n s e u l e m e n t d e s m a u v a i s rapports d e

l'Archevêque d e R e i m s M g r d e R o h a n avec notre janséniste chanoine mais aussi d u fait

q u e l'on craignait q u e les scrofuleux déjà affaiblis courent "le risque inévitable à

c h a q u e instant d'être infectés d'un m a l incurable". E n effet, il fut trouvé u n e m a i s o n

voisine d e l'Hôpital Saint-Marcoul entourée d e jardins, très étroite sur la rue m a i s très

profonde et les administrateurs la proposèrent pour l'Hôpital des "cancérés" qui devint

d'ailleurs l'Hôpital Saint-Louis. Cela se lit dans l'extrait d u registre des conclusions d e

l'hôtel-Dieu à la date d u 2 5 août 1740. Actuellement, notre centre anticancéreux porte à

juste titre celui d'Institut Jean G o d i n o t e n souvenir d e cet h o m m e bienfaisant et géné­

reux qui dota é g a l e m e n t la ville entière d e n o m b r e u s e s fontaines d'eau pure car à

l'époque le cancer et les écrouelles étaient considérés c o m m e des maladies voisines,

provoquées toutes d e u x par les limons crétacés d e l'eau c h a m p e n o i s e !

RÉSUMÉ

L'historique de la création des centres anticancéreux est actuellement peu connu. Le centre

anticancéreux de Lyon a été inauguré officiellement en 1923 à Vhôtel-Dieu. Les appareils de

radiothérapie avaient été installés, sommairement séparés par des cloisons amovibles, sous le

prestigieux grand dôme de l'architecte Soufflot. Le centre a été créé par le chirurgien Léon

Bérard (1870-1955), avec l'aide financière généreuse d'Auguste Lumière, inventeur en 1895 du

cinématographe avec son frère Louis, et inventeur du fameux Tulle gras pour les plaies.

Deux salles d'hospitalisation commune (l'une pour les hommes, l'autre pour les femmes) et

un bloc opératoire étaient voisins. Le chirurgien Bérard, élève de Poncet, opérait déjà avec pré­

dilection les cas les plus graves : grandes infections osseuses, goitres suffocants, et, surtout le

premier en France à pratiquer la cruelle thoracoplastie dans des tuberculoses pulmonaires.

Le centre anticancéreux déménagea au Pavillon B du nouvel Hôpital Edouard Herriot en

1934. Auguste Lumière assistait toujours Léon Bérard dont il était même le plus souvent le

chauffeur automobile. Auguste Lumière, non médecin, avait créé une importante clinique rue

Villon où travaillaient des médecins. Cependant, par manque de place, Léon Bérard demanda à

Auguste Lumière d'ouvrir une annexe à son centre anticancéreux dans la rue Mistral, qui devint

l'Hôpital "Le Bon Abri", financé entièrement par Auguste Lumière.

En 1958, deux ans après la mort de Léon Bérard, est inauguré, en dehors des Hospices Civils

de Lyon, le nouveau centre anticancéreux qui porte le nom de Léon Bérard "un des chirurgiens

les plus remarquables de la première moitié du XXème siècle" comme aimait le répéter notre

maître Jean Creyssel, élève de Bérard.

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SUMMARY

At present, little is known about the creation of cancer hospitals. I will report on that of

Lyons, France, with the famous surgeon, Léon Bérard (1870-1956). A spécialiste of neck surge­

ry, he was the first to carry out major thoracoplasties.

The cancer hospital was inaugurated in 1923 under the Great Dome of the hôtel-Dieu hospi­

tal. (The dome is the creation of the famous architect Germain Soujflot (1748)). In 1933, the can­

cer hospital moved in the newly-built Edouard Herriot Hospital ; it became indépendant in 1958,

two years after the famous surgeon's death, and it was rightly named after him : "Centre anti­

cancéreux Léon Bérard".

Its creation and its quick development owes a lot to generosity of Auguste Lumière, one of the

two inventors of cinematograph. Auguste Lumière sponsored radiotherapy material and, at Léon

Bérard's request (as there was a lack of space in Edouard Herriot hospital), created a centre for

cancer patients (Bon Abri Hospital, rue Mistral, with Dr Vigne). A. Lumière gave his time as well

as his money for the centre ; he was the car-driver, he helped L. Bérard with his university

classes, and he often comforted the patients while running a private clinic (La Clinique Lumière),

wich combined dispensary services with research. (Micheline Bonin)

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