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Le Partenariat Afrique Brésil en Faveur de la Croissance Une Solidarité Interatlantique LA BANQUE MONDIALE

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Le PartenariatAfrique Brésil

en Faveur de la CroissanceUne Solidarité Interatlantique

Le Partenariat Afrique Brésil

Une Solidarité Interatlantique en Faveur de la Croissance

LA BANQUE MONDIALE

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Résumé analytique

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Le partenariat Afrique Brésil est une étude descriptive des engagements du Brésil vis-à-vis de ses homologues d’Afrique subsaharienne au cours des dix dernières années, à travers le partage des connaissances, des échanges com-merciaux et des investissements. L’objectif de l’étude est de mieux comprendre ces relations pour pouvoir forger des partenariats concrets et mutuellement bénéfiques entre le Brésil et l’Afrique subsaharienne. Deux éléments expliquent la concentration sur les dix dernières années. Premièrement, bien que des liens unissent le Brésil et l’Afrique subsaharienne depuis au moins 200 ans (Cha-pitre 2), ce n’est qu’au cours de la dernière décennie que des relations plus solides se sont construites grâce à des partenariats plus forts et à des projets à long terme. Deuxièmement, ni le Brésil ni l’Afrique n’avaient l’habitude de collecter, organiser et analyser les données dès le début des partenariats, ce qui constitue un obstacle sérieux à l’obtention d’informations fiables.

Des conditions géographiques similaires et une histoire commune font du Brésil et de l’Afrique subsaharienne des partenaires naturels. Il y a environ 200 millions d’années, l’Afrique et le Brésil étaient réunis au sein du supercontinent Gondwana (Figure ES.1). Bien plus tard, entre le XVIe et le début du XIXe

siècle, la traite des esclaves a relié les deux rives de l’Atlantique jusqu’à l’abo-lition de l’esclavage. Aujourd’hui, les deux régions renouent des relations qui auront un effet favorable sur la prospérité et le développement de l’autre. Cet engagement renouvelé reflète une nouvelle configuration positive dans l’évo-lution de la coopération au développement ; la croissance rapide de l’Afrique au cours des dernières années ; et la montée du Brésil en tant que puissance économique mondiale souhaitant intensifier ses liens — culturels et commer-ciaux — avec l’Afrique.

LA COOPÉRATION SUD-SUD TRANSFORME L’AIDE AU DÉVELOPPEMENT

Le traditionnel modèle Nord-Sud de l’aide au développement, remis en question depuis les années 1970, a cédé la place à d’autres types d’accords de

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coopération financière et technique avec les pays en développement. Les années 1990 ont largement reconnu que les modèles précédents avaient échoué à pro-mouvoir le développement et à s’attaquer aux causes profondes de la pauvreté. Pour trouver des solutions alternatives et renforcer leur pouvoir de négociation au cours du nouveau millénaire, les pays en développement ont commencé à envisager de nouveaux mécanismes. Sur le plan économique, la création du Groupe des 20 (G20) en décembre 1999 a reflété le nouveau rôle des grands pays en développement dans l’architecture mondiale, et, en 2001, les quatre principales économies émergentes que sont le Brésil, la Russie, l’Inde et la Chine ont été réunies sous le sigle « BRIC ». Fin 2010, après deux réunions au sommet, le groupe, désormais dénommé « BRICS » (ou plus rarement « ABRIC » en français), a été rejoint par l’Afrique du Sud. Sur le plan politique, le Forum de dialogue Inde-Brésil-Afrique du Sud (IBAS), a été créé au Brésil à la mi-2003, en tant qu’espace permettant à ces trois grands acteurs mondiaux émergents, multiethniques et démocratiques d’échanger des connaissances et de renforcer leurs intérêts communs. D’autres groupes ont continué à apparaître ou à se développer, comme le Forum de coopération Afrique-Amérique du Sud, le Marché commun du Sud (Mercosur), et l’Union douanière d’Afrique australe.

Au cours de la dernière décennie, l’Afrique est devenue un continent d’opportunités, présentant des tendances économiques positives et une meil-leure gouvernance. Le continent est aujourd’hui souvent décrit comme une nouvelle frontière pour ceux à la recherche de partenaires et de marchés. La croissance de certains pays africains, leur résilience vis-à-vis des récentes

Figure ES.1 Il y a des millions d’années, l’Afrique et le Brésil étaient unis au sein du même continent

Source : Natural Resources Canada 2007.

Hautes terresBasses terresPlateforme continentaleEaux profondes

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crises mondiales, et les réformes politiques qui ont renforcé les marchés et la gouvernance démocratique accroissent les échanges commerciaux et les inves-tissements. Malgré ces tendances positives, de nombreux pays africains restent néanmoins confrontés à un énorme déficit d’infrastructure, sont vulnérables au changement climatique, et souffrent d’une médiocre capacité institutionnelle. L’aide reste donc l’une des principales sources d’assistance au développement dans plusieurs pays du continent africain, et des transferts et échanges de connaissances sont toujours impérativement nécessaires.

L’administration de Luiz Inácio Lula da Silva (2003–2010) a ravivé l’intérêt du Brésil pour l’Afrique et lui a donné une assise plus solide, en tant que com-posante de l’objectif plus vaste d’élargissement du rôle international du Brésil. Le président Lula da Silva s’est ainsi rendu en Afrique à douze reprises au cours de son mandat, visitant 21 pays, ce que n’avaient jamais fait les précédents dirigeants du Brésil.

Traditionnellement, les études des relations Brésil-Afrique avaient tendance à se concentrer sur les liens tant du Brésil que de l’Afrique avec les pays de l’hémisphère Nord. Même si ces études Nord-Sud ont contribué à une meil-leure compréhension du Brésil et de l’Afrique dans un contexte international, elles ont également déformé l’histoire culturelle, politique et sociale qui relie le Brésil et l’Afrique, y compris l’héritage de la traite transatlantique des esclaves. La recherche sur les relations Brésil-Afrique a ajouté de nouvelles perspectives au traditionnel schéma d’analyse Nord-Sud, en considérant l’Atlantique Sud comme un canal de transferts culturels ou d’expériences politiques et sociales, plutôt que comme un océan géopolitique, à l’instar de l’Atlantique Nord. Cette recherche a montré que les expériences de longue durée de l’Afrique au Brésil et vice-versa y ont créés de solides liens, identités culturelles et modèles com-muns, et ont également amélioré l’historiographie des relations ente le Brésil et l’Afrique.

LA NOUVELLE AFRIQUE ET LE NOUVEAU BRÉSIL ONT DES INTÉRÊTS COMPLÉMENTAIRES

Depuis le tournant du XXe siècle, l’Afrique est devenue l’un des grands thèmes de l’agenda international du Brésil. L’Afrique évolue rapidement et le Brésil a manifesté un intérêt croissant pour le soutien et la participation au développe-ment africain. L’engagement accru du Brésil vis-à-vis de l’Afrique est certes le signe d’une ambition géopolitique et d’un intérêt économique, mais les forts liens et affinités historiques du pays avec le continent africain lui confèrent en plus une place à part au sein des autres nations BRIC. La croissance écono-mique du Brésil, son rôle croissant en tant qu’acteur international, son succès dans la réduction des inégalités sociales, et son expérience du développement constituent autant d’enseignements pour les pays africains. C’est pourquoi ceux-ci recherchent de plus en plus la coopération, l’assistance technique et les investissements du Brésil. Les entreprises internationales, organisations non gouvernementales et groupes sociaux brésiliens inscrivent l’Afrique dans leurs plans. En d’autres termes, la nouvelle Afrique coïncide avec la nouvelle place du

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Brésil sur la scène internationale. En outre, au cours des cinq ou six dernières années, le « mouvement noir » brésilien a aidé à élaborer un nouvel ensemble de politiques et normes publiques, notamment de nouvelles institutions fédé-rales pour les questions raciales, l’étude obligatoire de l’histoire et de la culture afro-brésilienne et africaine dans les écoles et universités publiques et privées, et des mesures incitatives visant à accroître le nombre des descendants d’Africains fréquentant l’Institut Rio Branco, la célèbre école de diplomatie du Brésil.

En plus de ces liens historiques et culturels forts, la technologie brésilienne semble être facilement adaptable à de nombreux pays africains en raison des similitudes géophysiques du sol et du climat, entre autres choses. Les récents succès du Brésil sur les plans sociaux et économiques ont attiré l’attention de nombreuses nations africaines autres que les pays lusophones, avec lesquels le Brésil a des connexions historiques. Le Brésil possède aujourd’hui 37 ambas-sades en Afrique, contre 17 en 2002, une hausse allant de pair avec l’augmen-tation des ambassades africaines au Brésil : depuis 2003, 17 ambassades se sont installées à Brasilia, en plus des 16 déjà présentes, constituant ainsi la plus grande concentration d’ambassades africaines dans l’hémisphère Sud.

Des pays d’Afrique subsaharienne ont demandé la coopération du Brésil dans cinq domaines clés : l’agriculture tropicale, la médecine tropicale, la for-mation professionnelle (pour soutenir le secteur industriel), l’énergie et la pro-tection sociale (Figure ES.2). (Les domaines de moindre intérêt comprennent l’enseignement supérieur et les sports.)

Figure ES.2 Principaux domaines d’implication du Brésil dans des accords de coopération Sud-Sud, 2009

Source : ABC 2009. Note : Les parts sont exprimées en pourcentage du portefeuille total des projets.

Renforcement de la capacitéde gestion de projets

3 %

Agriculture19 %

Autres18 %

Industrie16 %

Santé14 %

Éducation11 %

Environnement6 %

Sécurité publique6 %

Administrationpublique

4 %

Énergie3 %

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Agriculture tropicale. La Corporation de recherche agricole brésilienne (EMBRAPA) — avec l’Agence brésilienne de coopération (ABC) et plusieurs autres instituts de recherche brésiliens — s’est engagée aux côtés de partenaires locaux dans la mise en œuvre de projets modèles dans l’agriculture, visant à reproduire les succès obtenus dans la savane brésilienne (cerrado) et à améliorer le développement agricole et l’industrie agroalimentaire. À titre d’exemples, on peut citer le projet Coton-4 (Bénin, Burkina Faso, Tchad et Mali), le projet d’appui technique au développement de l’innovation agricole au Mozambique, et le projet de développement de la riziculture au Sénégal.

Médecine tropicale. Depuis 2011, le Brésil a conclu 53 accords bilatéraux dans le domaine de la santé avec 22 pays africains. L’approche brésilienne du traitement du VIH/SIDA et d’autres maladies très répandues, notamment le paludisme et la drépanocytose, suscite un grand intérêt chez ses pairs africains. La Fondation Oswaldo Cruz (FIOCRUZ), un institut brésilien de recherche et développement en biochimie, est à la tête de partenariats avec des institutions locales en Afrique. En plus de l’exécution de projets modèles en médecine tropicale, FIOCRUZ est également engagé avec l’État du Mozambique dans un partenariat pour la construction d’une usine pharmaceutique de production de médicaments génériques servant à traiter le VIH/SIDA ainsi que d’autres mala-dies. Grâce à cette usine, le Mozambique pourra exporter vers les pays voisins.

Formation professionnelle. Le Service national de l’apprentissage industriel (SENAI) du Brésil a construit des centres de formation professionnelle au Cap-Vert, en Guinée-Bissau, au Mozambique et à Sao Tomé-et-Príncipe. Récemment, il a également forgé avec l’Angola, le Congo et l’Afrique du Sud des partenariats en faveur de la formation professionnelle, afin de promouvoir l’industrialisation et de soutenir les politiques de l’emploi des jeunes.

Énergie. L’énergie durable est un autre secteur où l’expertise brésilienne a attiré l’attention de plusieurs pays africains. Les succès obtenus dans l’agricul-ture n’ayant pas suffi à réduire la pauvreté, les politiques publiques favorisant la croissance économique et l’inclusion sociale sont au cœur de la production de canne à sucre au Brésil — par exemple, les exploitations agricoles locales et fa-miliales ont reçu une aide pour produire de l’énergie (éthanol). Le secteur privé brésilien est également impliqué dans les questions énergétiques en Afrique. BIOCOM, une co-entreprise réunissant la société brésilienne Odebrecht, l’entreprise publique angolaise Sonangol, et l’entreprise angolaise Demer, en est un bon exemple. Un investissement de 400 millions de dollars EU vise à utiliser la canne à sucre pour produire à la fois du sucre, de l’éthanol et de l’énergie.

Protection sociale. Malgré les énormes défis auxquels sont confrontés les décideurs politiques dans un pays connu pour ses inégalités de revenu parmi les plus profondes de l’Amérique latine, quelques programmes offrent une protection sociale. Depuis 2003, des politiques visant à lutter contre la faim et

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la marginalisation ont été mises en œuvre, l’une des plus réussies étant l’ini-tiative Faim Zéro, qui regroupe plusieurs programmes (dont le célèbre Bolsa Família) parrainés par un solide partenariat entre 12 ministères et organismes. L’expérience brésilienne en matière de protection sociale est désormais adaptée et reproduite dans d’autres pays en développement, notamment l’Angola, le Kenya et le Sénégal, avec des activités visant à créer les conditions d’une crois-sance plus inclusive.

La plupart des projets entre le Brésil et les pays africains ayant débuté il y a moins de 10 ans, nous manquons encore d’évaluations significatives des résultats. Les premiers résultats ont, toutefois, été souvent positifs, mettant en évidence la possibilité d’un engagement plus soutenu et à plus long terme.

LES DIX DERNIÈRES ANNÉES ONT VU UNE CROISSANCE SANS PRÉCÉDENT DES RELATIONS ÉCONOMIQUES ENTRE LE BRÉSIL ET L’AFRIQUE

Entre 2000 et 2010, les échanges commerciaux entre le Brésil et l’Afrique sont passés de 4 à 20 milliards de dollars EU, offrant à la Banque nationale de développement économique et social du Brésil (BNDES) un environnement propice au lancement de mesures visant à favoriser les échanges commerciaux entre les deux régions sur la base de prêts brésiliens. La stimulation des expor-tations brésiliennes a également été essentielle pour l’expansion des échanges commerciaux. En 2008, les programmes de relance des entreprises brésiliennes actives en Afrique (au titre d’une initiative connue sous le nom de Programme d’intégration avec l’Afrique) ont abouti au versement de 477 millions de réaux brésiliens (environ 265 millions de dollars EU), une somme qui a grimpé l’année suivante à 649 millions de réaux brésiliens (environ 360,5 millions de dollars EU).

L’investissement privé brésilien en Afrique est apparu dans les années 1980 et a aujourd’hui atteint un niveau tel que les entreprises brésiliennes sont pré-sentes pratiquement dans toutes les parties du continent, principalement dans les secteurs de l’infrastructure, de l’énergie et de l’exploitation minière (Figure ES.3). La présence du Brésil se démarque par la manière dont les entreprises brésiliennes mènent leurs affaires. Elles ont tendance à embaucher de la main-d’œuvre locale pour leurs projets, favorisant ainsi le renforcement des capacités locales, ce qui, au final, améliore la qualité des services et des résultats. Les entreprises brésiliennes chef de file en Afrique (en investissement et volume de vente) sont : Andrade Gutierrez, Camargo Correa, Odebrecht, Petrobras, Queiroz Galvão, et Vale.

Étant donné l’environnement des affaires favorable à l’investissement bré-silien en Afrique, l’Agence brésilienne d’exportation a encouragé les petites et moyennes entreprises sur le continent — à travers des foires commerciales, par exemple. Ainsi, en avril 2010, lors d’un événement organisé à São Paulo, les entreprises brésiliennes et africaines ont signé des contrats et conclu des accords pour une valeur globale d’environ 25 millions de dollars EU, dans des secteurs

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tels que l’alimentation et les boissons, les vêtements et les chaussures, l’auto-mobile, l’électronique, le logement et la construction, et même les cosmétiques.

Les tendances analysées dans ce rapport indiquent que, dans l’ensemble, le Brésil et l’Afrique développent conjointement un modèle de relations Sud-Sud susceptible de bénéficier aux deux.

Source : Élaboré par les auteurs.

Figure ES.3 Entreprises brésiliennes en Afrique, 2010

Nombre d’acteurs traditionnels

1–2

3–4

5–6

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LA BANQUE MONDIALE ET D’AUTRES INSTITUTIONS PEUVENT TIRER DES ENSEIGNEMENTS UTILES DE LA RELATION ENTRE L’AFRIQUE ET LE BRÉSIL

Le Groupe de la Banque mondiale a joué un rôle périphérique dans l’établisse-ment de la relation croissante entre le Brésil et les pays subsahariens, mais les choses sont en train de changer avec la nouvelle stratégie de la Banque pour l’Afrique. À l’avenir, la coopération Sud-Sud jouera un rôle clé, par le biais de partenariats, de l’échange des connaissances et du financement. Mais si la Banque veut systématiquement intégrer et tirer avantage des engagements Sud-Sud dans la mise en œuvre de cette stratégie, en particulier dans les domaines de l’investissement et des échanges commerciaux, elle doit disposer de meilleurs outils et mesures incitatives.

Même si les relations entre le Brésil et l’Afrique se sont considérablement intensifiées ces dix dernières années, il subsiste d’importants obstacles — en particulier un manque de connaissances des deux côtés de l’Atlantique Sud. Au Brésil, la plupart des individus et des entreprises — y compris beaucoup de petites et moyennes entreprises — ont des informations limitées et souvent dé-passées sur l’Afrique, et celles dont ils disposent se limitent souvent à l’Angola, au Mozambique et, parfois, à l’Afrique du Sud. Beaucoup de pays africains non lusophones sont confrontés à la barrière de la langue lorsqu’ils adressent des demandes d’information au Brésil, en particulier aux administrations, l’infor-mation étant rarement disponible en anglais ou en français. Un autre problème important est le fait que, malgré la proximité géographique de l’Afrique occi-dentale et de l’est du Brésil, peu de vols directs relient les deux régions, et que des deux côtés, la bureaucratie a tendance à ralentir le commerce maritime et peut porter les délais à 80 jours au lieu des 10 possibles. La Banque mondiale pourrait aider à surmonter ces obstacles et permettre à la relation Afrique-Brésil de se développer et d’apporter plus d’avantages aux deux parties.

La relation croissante entre l’Afrique et le Brésil permet à la Banque mon-diale et à d’autres acteurs internationaux de tirer de plus larges enseignements, qui devraient les inciter à renforcer leur soutien aux initiatives Sud-Sud dans leur ensemble. Les aspects historiques, culturels et géographiques uniques du cas Brésil-Afrique font de la volonté du Brésil (de partager ses succès) et de l’intérêt des pays africains (à tirer des leçons des expériences brésiliennes) un terrain favorable où la Banque pourrait démontrer son rôle en tant que connec-teur et facilitateur de la connaissance.

La Banque mondiale pourrait également jouer un rôle direct en catalysant la coopération Sud-Sud à travers la promotion de la participation des entreprises brésiliennes (et de celles d’autres acteurs émergents tels que l’Inde et l’Afrique du Sud, par exemple) à la passation des marchés de la Banque, en particulier en Afrique. Cela aurait le double avantage de faire profiter les pays africains de l’expérience des entreprises brésiliennes de manière plus directe et de mettre en évidence le rôle croissant joué par les pays émergents au sein de la Banque. À travers les Enterprise Outreach Services — qui visent à renforcer les relations

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entre le Groupe de la Banque mondiale et le secteur privé afin d’informer et de promouvoir la participation des entreprises privées — la Banque pourrait, comme elle le fait déjà pour les entreprises européennes et américaines, organi-ser au Brésil des ateliers de sensibilisation aux produits et services de la Banque, afin d’encourager l’investissement privé en Afrique.

D’autres moyens que la Banque pourrait utiliser pour renforcer les relations Brésil-Afrique sont notamment :

• Soutenir la collaboration Sud-Sud en fournissant un appui aux parties (les pouvoirs publics ou le secteur privé brésiliens, les pouvoirs publics ou le secteur privé africains) dans le cadre de certains projets Sud-Sud, à travers des prêts, des garanties ou d’autres formes d’assistance. Cela comprendrait, par exemple, l’élargissement à d’autres pays africains, de projets issus de relations bilatérales entre le Brésil et un pays africain donné. À titre d’exemple, un projet brésilien d’assistance technique au Mozambique pourrait s’avérer tout à fait pertinent pour la Tanzanie, et la Banque pourrait aider à diffuser l’information sur ce projet, soit par le biais du personnel de la Banque, soit à travers le financement d’experts brésiliens ou mozambicains mettant leur expérience au service de la Tan-zanie. Étant donné l’intérêt de certains pays africains pour les pratiques modèles brésiliennes, la Banque pourrait également faciliter un échange plus large des connaissances et des pratiques modèles entre le Brésil et l’Afrique, en particulier les pays lusophones. Il pourrait également être intéressant de promouvoir la recherche appliquée conjointe entre les ins-titutions académiques et de formation du Brésil et de l’Afrique.

• Étudier l’impact actuel et potentiel des activités traditionnelles de la Banque, pertinentes dans le contexte de la coopération Sud-Sud, à travers le prisme de cette coopération. Les domaines concernés incluent le climat d’investissement, la gouvernance, l’agriculture, la santé, l’éducation et la justice. À titre d’exemple, le programme brésilien très réussi de lutte contre le VIH/SIDA et de prévention et traitement du paludisme est tout à fait pertinent par rapport aux initiatives de la Banque.

• Améliorer la coordination entre les régions de la Banque ainsi qu’entre les secteurs et régions, en mettant en place des équipes interrégionales (par exemple, entre la Région Amérique latine et Caraïbes et la Région Afrique) afin d’échanger les expériences et de mettre en œuvre des activi-tés Sud-Sud spécifiques, parfois combinées à des initiatives déjà en cours.

• Intégrer systématiquement des dimensions Sud-Sud mesurables dans les stratégies d’assistance pays, les stratégies-pays de partenariat, les évalua-tions de l’assistance aux pays, etc. Il serait également intéressant d’évaluer si des mesures ou mécanismes internes spécifiques incitant à soutenir la coopération Sud-Sud (par exemple lors des évaluations des programmes de travail et des postes) pourraient être utiles, tout en n’alourdissant pas la bureaucratie. Dans le cadre de cet exercice, il serait utile de recueillir et diffuser des exemples réussis du travail de la Banque dans ce domaine,

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tels que le programme de travail de l’Unité de gestion-pays du Brésil en faveur de la coopération Sud-Sud, afin d’aider à intégrer ces activités d’une manière plus systématique et plus stratégique au sein de la Banque.

• Avoir des consultations systématiques avec les pouvoirs publics du Brésil ainsi que d’autres grands pays émergents impliqués dans la coopération Sud-Sud en tant que praticiens ou bailleurs de fonds (tels que les nations BRIC), afin de recueillir leurs points de vue sur la manière dont l’appui de la Banque pourrait être rendu plus pertinent et efficace. L’objectif serait à la fois pratique et stratégique — en particulier d’aider la Banque à démentir le sentiment de certains intervenants qu’elle ne reconnaît et ne comprend pas suffisamment leurs contributions au développement. Un exemple spécifique pourrait être la possibilité d’un programme conjoint entre le Groupe de la Banque mondiale et la BNDES en vue de soutenir les échanges commerciaux et les investissements du Brésil en Afrique.

• Au sein de la Banque, faire évoluer le centre d’intérêt des actuelles activi-tés Sud-Sud de l’Institut de la Banque mondiale vers d’autres domaines (en particulier les infrastructures, le climat d’investissement et le déve-loppement du secteur privé, la gouvernance, la santé et l’éducation) et inclure plus d’assistance technique et de prêts dans ces domaines (en plus de l’échange de connaissances). Il existe en particulier un besoin de plus d’activités directement liées à l’investissement, au développement du secteur privé et à la croissance de l’emploi, qui semblent, jusqu’ici, être en dehors de la portée principale des activités Sud-Sud envisagées dans les programmes de la Banque.

• Rechercher les domaines ou aspects spécifiques des programmes liés au développement Sud-Sud, qui pourraient bénéficier de programmes de travail ou d’objectifs conjoints, dans la mesure où la coordination entre la Banque, la Société financière internationale et l’Agence multilatérale de garantie des investissements reste encore un défi au niveau de l’appui à la coopération Sud-Sud. Deux exemples parmi d’autres sont : 1) un meilleur alignement entre les bureaux nationaux de la Banque et de la SFI dans les marchés émergents clés, afin de promouvoir l’investissement Sud-Sud durable et une meilleure formation ; et 2) motiver le personnel des bureaux nationaux de la Banque (et de la SFI) à faire une « vente croisée » des services de garantie de l’Agence multilatérale de garantie des investissements.

• Renforcer encore la coordination avec d’autres organismes multilatéraux, en particulier les mécanismes Sud-Sud les plus récents, pour permettre à la Banque de devenir un acteur efficace de la coopération Sud-Sud, d’effacer certains stéréotypes dans les pays en développement, et d’évi-ter la duplication des efforts. La Banque, par exemple, se trouve dans une excellente position pour faciliter un sommet annuel mondial du développement Sud-Sud, de préférence dans un pays émergent ou en développement.

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MÉTHODOLOGIE DU RAPPORT

Les données ont été recueillies entre octobre 2010 et août 2011 par une équipe de recherche composée de neuf professionnels de la Banque mondiale ainsi que de l’Institut brésilien de recherche économique appliquée (IPEA) et de l’Uni-versité de Brasilia, deux institutions d’État brésiliennes. Les principales sources comprenaient des documents officiels (principalement les traités internatio-naux et la législation brésilienne), des documents non officiels, des projets, des rapports, des livres, des articles, des exposés, des analyses, des échanges de cour-riels et des entretiens. Au cours de la période de recherche, l’équipe a rencontré 22 hauts fonctionnaires du Groupe de la Banque mondiale, 62 représentants des pouvoirs publics brésiliens, et environ 20 représentants des pouvoirs publics africains ayant déjà eu des relations avec le Brésil. Des entrevues ont également été menées avec 16 représentants du secteur privé et 15 experts issus d’univer-sités et d’organisations non gouvernementales du Brésil et d’Afrique. Au total, pendant cette période, des entretiens ont eu lieu avec plus de 130 profession-nels à Accra, Bamako, Bissau, Brasilia, Dakar, Maputo, Praia, Pretoria, Rio de Janeiro et Washington DC. Une mission de la Banque s’est rendue à Brasilia et à Rio de Janeiro en décembre 2010, pour s’entretenir en direct avec environ 50 professionnels, et des entrevues de suivi ont été organisées à Washington DC, ou par le biais de conférences vidéo ou audio. L’équipe était dépendante de la disponibilité des autorités au cours de la période de collecte des données, et toutes les réunions demandées n’ont pas eu lieu.

Le rapport comprend six chapitres présentant des informations descriptives et analytiques sur les caractéristiques, les tendances, les contraintes et les rela-tions qualitatives entre l’Afrique subsaharienne et le Brésil, ainsi que quelques implications de cette relation pour les politiques.

Le Chapitre 1 place la nouvelle architecture financière et politique mondiale dans son contexte, mettant en évidence les principales caractéristiques du sys-tème international de coopération au développement, notamment les canaux Nord-Sud et Sud-Sud, ainsi que l’ascension du Brésil en tant qu’acteur mondial au cours des dix dernières années. Il présente également l’Afrique comme un continent marqué par une croissance économique et démographique rapide, qui s’est ouvert à de nouvelles possibilités intra- et intercontinentales. L’Afrique a récemment noué des liens plus solides avec quelques acteurs émergents, et le rapport se concentre sur la façon dont le Brésil et l’Afrique exploitent ces nouvelles possibilités.

Le Chapitre 2 s’intéresse aux liens historiques entre le Brésil et l’Afrique, allant au-delà des relations linguistiques avec les pays lusophones pour inclure l’héritage de l’esclavage et d’autres importantes manifestations culturelles et politiques des liens unissant les deux côtés de l’Atlantique. Les connexions historiques et les similitudes subjectives identifiées dans le Chapitre 2 nous aident à comprendre le type de relations expliquées et analysées dans les Cha-pitres 3 et 4.

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Le Chapitre 3 se concentre sur la raison pour laquelle le Brésil a évolué de l’état de bénéficiaire de l’aide dans les années 1960 à celui de fournisseur d’aide en 2010, et sur la manière dont il s’y est pris pour changer ainsi de statut. Les principales caractéristiques de la coopération du Brésil au développement inter-national sont également mises en évidence, en particulier son engagement dans la coopération Sud-Sud en Amérique du Sud et en Afrique. Il analyse ensuite quelques-unes des motivations et des modes de fonctionnement des récents engagements de l’État brésilien en Afrique.

Le Chapitre 4 identifie les principaux domaines de l’expertise brésilienne, partagés avec les homologues africains, tels que résumés plus haut. Il montre comment la technologie brésilienne est facilement adaptable à l’Afrique, en rai-son de conditions géologiques et climatiques semblables et de similitudes entre les contextes politiques et socioéconomiques du Brésil et de certaines sociétés africaines. Bien qu’il s’agisse du chapitre le plus long du rapport, offrant des détails sur la raison et la manière dont la coopération Brésil-Afrique a évolué, il ne prétend pas livrer une liste exhaustive des initiatives actuelles, dans la mesure où celles-ci sont dynamiques, et où l’espace et le temps étaient limités.

Le Chapitre 5 donne un aperçu des tendances actuelles des échanges com-merciaux et des investissements en Afrique subsaharienne, impliquant l’État brésilien et le secteur privé. Malgré leur croissance rapide et importante, les interactions commerciales restent assez limitées comparées, par exemple, au rôle de la Chine en Afrique. Le chapitre met donc en évidence l’énorme oppor-tunité d’interactions futures.

Le Chapitre 6 tire les conclusions et fait des suggestions en matière de politiques sur la façon dont la Région Afrique de la Banque mondiale pourrait renforcer la collaboration Sud-Sud entre l’Afrique subsaharienne et le Brésil. Il recommande également des mécanismes pour soutenir et amplifier le dia-logue entre l’Afrique subsaharienne et des homologues brésiliens dans le but d’accroître les capacités dans des secteurs clés en Afrique.

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