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Joanes Hippolyte Sylli LE MICROCRÉDIT DANS LE PROGRAMME DE LUTTE CONTRE LA PAUVRETÉ CHEZ LES FEMMES AU BÉNIN : MYTHE OU RÉALITÉ? Mémoire présenté à la Faculté des études supérieures et postdoctorales de l’Université Laval dans le cadre du programme de maîtrise en sociologie pour l’obtention du grade de Maître ès arts (M.A) DÉPARTEMENT DE SOCIOLOGIE FACULTÉ DES SCIENCES SOCIALES UNIVERSITÉ LAVAL QUÉBEC 2012 © Joanes Hippolyte Sylli, 2012

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Joanes Hippolyte Sylli

LE MICROCRÉDIT DANS LE PROGRAMME DE LUTTE

CONTRE LA PAUVRETÉ CHEZ LES FEMMES AU BÉNIN :

MYTHE OU RÉALITÉ?

Mémoire présenté

à la Faculté des études supérieures et postdoctorales de l’Université Laval

dans le cadre du programme de maîtrise en sociologie

pour l’obtention du grade de Maître ès arts (M.A)

DÉPARTEMENT DE SOCIOLOGIE

FACULTÉ DES SCIENCES SOCIALES

UNIVERSITÉ LAVAL

QUÉBEC

2012

© Joanes Hippolyte Sylli, 2012

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II

Résumé

Cette étude tente de comprendre les conditions d’octroi des prêts de microcrédit aux

populations pauvres des pays en développement plus précisément au Bénin ainsi que

l’impact de ces prêts sur les bénéficiaires.

À partir d’une analyse secondaire des travaux sur le sujet, nous avons mis en

évidence l’impact du microcrédit sur les bénéficiaires. Les bibliothèques de l’Université

d’Abomey-Calavi ainsi que celle du Fonds national de la microfinance du Bénin sont les

principales sources de nos données.

Au terme de l’étude, nous avons constaté que les prêts de microcrédit contribuent à

l’amélioration des conditions de vie des populations bénéficiaires contrairement à ce que

certains écrits font comprendre. Ces prêts leur ont permis d’entreprendre des activités

génératrices de revenus dont les revenus ont été utilisés pour les besoins élémentaires.

Bien que les conditions d’octroi des prêts nécessitent des améliorations, elles

n’empêchent pas dans la majorité des cas la réalisation des projets pour lesquels ils ont été

contractés. Mais ces prêts pourront contribuer efficacement à la lutte contre la pauvreté si

en amont, les IMF accordaient plus de crédits à moyen et long terme aux activités agricoles.

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III

Abstract

This study tries to understand the conditions of granting of the loans of microcredit

to population of developing countries more precisely in Benin and along with the impact of

these loans on the beneficiaries.

We brought to light, by means of a secondary analysis the impacts of microcredit on

the beneficiaries. The libraries of the University of Abomey-Calavi and that of Benin

national Fund of the microfinance are the main sources of our data.

The main results of the study were that the loans of microcredit contribute to the

improvement of the living conditions of the profitable populations contrary to what certain

papers lead to think. These loans allowed beneficiaries to begin generative activities of

income, income of which was used for the elementary needs.

Although, the conditions of granting of the loans require improvements, they do not

prevent in the majority of the cases the realization of the projects for which they were

contracted. But these loans can contribute effectively to the fight against poverty if

upstream, IMFs gave more credit to medium and long term agricultural activities.

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IV

Remerciements

Pour la réalisation de ma formation et de ce mémoire, j’ai bénéficié de l’aide et de

l’assistance tant matérielle que morale de la part de plusieurs personnes que je ne saurais

toutes nommer ici. La liste est longue et témoigne de l’intérêt que les uns et les autres

accordent à ma formation.

A cet effet, j’exprime ma profonde gratitude à l’endroit de tous mes frères, sœurs,

parents et amis notamment ceux qui, d’une manière ou d’une autre, ont contribué à mon

évolution et à la réalisation de ce travail, notamment à Moïse Sylli et Koffi Sylli.

Mes remerciements vont particulièrement à :

- Madame Nicole Bousquet, ma directrice de mémoire qui a su diriger ce travail

avec diligence en dépit de ses nombreux devoirs et occupations. Qu’elle reçoive

l’expression de ma profonde reconnaissance pour sa disponibilité et ses conseils

éminemment utiles.

- Tous les enseignants du département de sociologie de l’Université Laval qui ont

contribué à ma formation et en particulier à Messieurs Richard Marcoux, Guy

Fréchet, André Drainville, Alfred Dumais et Madame Stéphanie Rousseau.

Merci infiniment à tous et chacun de vous pour le soutien indéfectible grâce auquel

cette étude a pu être menée à terme

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V

Table des matières

Résumé ......................................................................................................................... II

Abstract ....................................................................................................................... III Remerciements ............................................................................................................. IV Table des matières ......................................................................................................... V

Listes des tableaux et cartes.......................................................................................... VII Liste des sigles et acronymes utilisés ........................................................................... VIII

Introduction générale ................................................................................................... 10 Chapitre 1 : cadre conceptuel........................................................................................ 13

1.1 Problématique ................................................................................................ 13 1.2 Clarification conceptuelle : qu’est-ce qu’un microcrédit? ................................. 17

1.3 Perspective théorique et recension des écrits ........................................................ 21 1.3.1 Perspective théorique ....................................................................................... 21

1.3.2 Recension des écrits ......................................................................................... 23 1.3.2.1 L’argumentaire des tenants des incidences positives des programmes de

microcrédit .......................................................................................................... 23 1.3.2.2 L’argumentaire des tenants des incidences moins favorables des programmes

de microcrédit ...................................................................................................... 28

1.3.2.3 Le microcrédit dans le monde rural en Afrique francophone subsaharienne . 33 1.3.2.4 Synthèse ................................................................................................... 43

1.4 Objectifs de recherche ........................................................................................ 45 1.4.1 Objectif général ............................................................................................... 45

1.4.2 Objectifs spécifiques ........................................................................................ 45 1.4.2.1 Objectif spécifique1 .................................................................................. 45

1.4.2.2 Objectif spécifique2 .................................................................................. 45 1.4.2.3 Objectif spécifique3 .................................................................................. 45

1.4.2.4 Objectif spécifique4 .................................................................................. 45 Analyser le lien entre le microcrédit et les activités agricoles en milieu rural. .......... 45

1.5 Justification du champ d’étude ............................................................................ 46 Chapitre 2: Cadre méthodologique................................................................................ 47

2.1 Nature de l’étude ................................................................................................ 47 2.2 Durée de l’étude ................................................................................................. 48

2.3 Les sources bibliographiques du cadre théorique de la recherche ........................... 48 2.4 Technique de collecte et analyse des données sur la microfinance au Bénin ........... 49

2.4.1 Collecte des données .................................................................................... 49

2.4.2 Analyse des données .................................................................................... 50 2.4.3 Cadre d’interprétation .................................................................................. 51

2.5 Présentation du cadre de l’étude .......................................................................... 52 2.6 Les difficultés rencontrées .................................................................................. 54

2.7 Limites méthodologiques .................................................................................... 54 Chapitre : 3 Mise en œuvre des projets de microcrédit au Bénin ..................................... 55

3.1 Historique des projets de microcrédit au Bénin..................................................... 55 3.2 Historique du microcrédit en Afrique de l’Ouest .................................................. 55

3.3 Historique du microcrédit au Bénin ..................................................................... 56 Chapitre 4 : Présentation des résultats ........................................................................... 59

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VI

4.1 Introduction ....................................................................................................... 59 4.2 Résumé des huit études ....................................................................................... 59

4.2.1 Le rapport intitulé : «Évaluation et impacts de la microfinance sur les

bénéficiaires de microcrédit» ................................................................................ 59

4.2.2 Le rapport intitulé «Mission d’évaluation globale du programme de microcrédit

aux plus pauvres (PMCPP)» ................................................................................. 61

4.2.3 Le mémoire intitulé : La dynamique des banques communautaires pour le

développement des femmes en milieu rural : expérience du CREDESA au sud-Bénin,

1995-1996 ........................................................................................................... 64

4.2.4 Le mémoire intitulé : Impact des systèmes de financement décentralisés sur le

développement du secteur informel : cas du PADME, 2002-2003 ........................... 68

4.2.5. Le mémoire intitulé : Les produits de la microfinance et la lutte contre la

pauvreté : cas des institutions de microfinance (IMF) du Bénin (2003) ................... 72 4.2.6. Le mémoire intitulé : Contribution du microcrédit à la réduction de la pauvreté

dans la commune d’Abomey-Calavi : cas de l’ONG BETHESDA, 2008-2009 .......... 73 4.2.7. Le mémoire intitulé : Programme de microcrédit aux plus pauvres (PMCPP)

dans le processus de réduction de la pauvreté dans le neuvième arrondissement de

Cotonou 2010 ...................................................................................................... 77 4.2.8. Le mémoire intitulé : Femmes et pauvreté en milieu urbain et les institutions de

microfinance : cas de l’Assef (Association d’entraide des femmes) 2009-2010. ........ 81 Chapitre : 5 Analyse des résultats ................................................................................. 85

5.1 Les produits financiers mis à la disposition des populations .................................. 85 5.2 Les montants accordés et les modalités de payement ............................................ 86 5.3 Les conditions de vie des bénéficiaires avant l’obtention des crédits ...................... 88

5.4 Les activités génératrices de revenus (AGR) ........................................................ 90 5.5 Les conditions économiques et sociales après l’obtention des microcrédits ............ 91

5.6 Le microcrédit et le secteur de l’agriculture.......................................................... 93 5.7 Recommandations .............................................................................................. 94

Conclusion .................................................................................................................. 96 Bibliographie............................................................................................................... 98

Annexes .................................................................................................................... 105

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VII

Listes des tableaux et cartes

Tableau 1 : Synthèse générale de la répartition des IMF par catégorie au Bénin

Tableau 2 : classification des huit études analysées avec leurs différents indicateurs (en

Annexes)

Carte 1 : Carte indiquant la position géographique du Bénin en Afrique

Carte 2 : Carte du Bénin

Carte 3 : Carte administrative du Bénin

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VIII

Liste des sigles et acronymes utilisés

ACI : Alliance coopérative international

AFSSEF : Accès des femmes sénégalaises aux services financiers

AGR : Activités génératrices de revenus

AssEF : Association d’entraide des femmes

BM : Banque mondiale

CIF : Confédération des institutions financières

CLCAM : Caisse locale de crédit agricole mutuel

CNCA : Caisse nationale de crédit agricole

CONAUDE : Comité national pour le développement des unions de coopératives

d’épargne et de crédit

COOPEC : Coopérative d’épargne et de crédit

CRCAM: Caisse régionale de crédit agricole mutuel

CREDAF : Centre de rencontres et d’études des dirigeants des administrations fiscales

CREDESA : Centre régional pour le développement et la santé

CRG : Crédit rural guinéen

DSRP : Document stratégique de réduction de la pauvreté

FASEG : Faculté des sciences économiques et de gestion

FCFA : Franc de la communauté financière africaine

FECECAM : Fédération des caisses d’épargne et de crédit agricole mutuel

FIDEC : Financière du développement du Congo

FLASH : Faculté des lettres arts et science humaines

FMI : Fonds monétaire international

FENU : Fonds d’équipement des Nations Unies

FNM : Fonds national de la microfinance

FUCEC : Faîtière des unités coopératives d’épargne et de crédit du Togo

IBW : Institut de Bretton Wood

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IX

IFI : Institutions financières internationales

IMF : Institution de microfinance

INSAE : Institut national de la statistique et de l’analyse économique

IPD-AOS : Institut panafricain de développement- Afrique de l’Ouest Sahel

MC2 : Mutuelle communautaire de croissance

MINAGRI : Ministère de l’agriculture et de l’élevage

MMEJF : Ministère de la microfinance et de l’emploi des jeunes et des femmes

MUCODEC : Mutuelle congolaise d’épargne et de crédit

OMD : Objectifs du millénaire pour le développement

ONG : Organisation non gouvernementale

PADME Projet pour la promotion et l’appui au développement des micro-entreprises

PAPME : Association pour la promotion et l’appui aux petites et moyennes entreprises

PAS : Programme d’ajustement structurel

PASMIF : Programme d’appui au secteur de la microfinance

PIB : Produit intérieur brut

PMCPP : Programme de microcrédit aux plus pauvres

PNUD : Programme des nations unies pour le développement

PPTE : Pays pauvres très endettés

RGPH : Recensement général de la population et de l’habitat

TPCF : Tout petit crédit aux femmes

UAC : Université d’Abomey-Calavi

UCECB : Union des caisses d’épargne et de crédit du Burkina Faso

UMOA : Union Monétaire Ouest Africain

VIH/SIDA : Virus immuno humaine/ syndrome immuno déficience acquise

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Introduction générale

Autour des années 1990, la féminisation de la pauvreté est devenue préoccupante en

raison du discours de l’implication des femmes dans les processus de développement.

Nombre de travaux du Programme des nations unies pour le développement (PNUD)

montrent que «la pauvreté a un visage de femme» (PNUD dans Guérin et al. 2011 : 38).

Ainsi, «le genre est devenu une clef d’entrée incontournable et consensuelle des nouvelles

stratégies de lutte contre la pauvreté. Cette transformation notoire à partir du milieu des

années 1990 a été plus marquée encore avec l’élaboration des Objectifs du millénaire pour

le développement (OMD) à l’aube du XXIe siècle» (Prévost dans Guérin et al. 2011 : 38).

Le constat de la féminisation de la pauvreté a entraîné différentes stratégies de lutte

dont celle qui fait florès est le microcrédit. En effet, Afin de lutter contre la pauvreté qui

touche davantage les femmes, certaines institutions du développement (la Banque mondiale

«BM» et le Fonds monétaire international «FMI») ainsi que les autorités politiques des

pays en développement ont mis l’accent sur le microcrédit pour les femmes. Cette approche

de développement par le genre consiste non seulement à financer les femmes mais aussi à

leur donner plus de pouvoir qu’autrefois. Selon Prévost (2011), le succès de l’approche du

développement par le genre s’est traduit par celui de l’empowerment féminin, devenu en

quelques années un concept incontournable que l’on retrouve décliné dans des registres

extrêmement divers, de l’accès à la propriété foncière à la participation politique en passant

par l’engagement au sein de la collectivité et l’expansion du microcrédit etc. (Prévost dans

Guérin et al. 2011 : 32).

L’expansion du microcrédit pour lutter contre la pauvreté dans les pays en

développement est une évidence. Une multitude d’Organisations non gouvernementales

(ONG) ainsi que des structures financières étatiques ou privées pullulent désormais dans les

pays en développement. De petits prêts sont ainsi octroyés aux femmes les plus

«démunies» afin qu’elles entreprennent des activités génératrices de revenus (AGR)

pouvant leurs permettre de sortir de la pauvreté. Acclassato (2008) indique que les

institutions de microfinance (IMF) sont devenues une composante importante de

l’architecture financière dans de nombreux pays en développement, notamment en Afrique

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et en particulier dans l’Union Monétaire Ouest Africain (UMOA) en raison de la masse

d’argent brassée : 173,4 milliards FCFA à fin 2003 en hausse de 21,6 milliards par rapport

à 2002 et de l’ampleur de la clientèle issue de toutes les couches sociales : plus de 3,9

millions de bénéficiaires dans l’union en décembre 2003 (Acclassato, 2008 : 161-162).

Mais pouvons-nous dire que ces prêts ont des effets positifs sur les bénéficiaires?

Servet (2006) opine que même si la microfinance connaît une forte concentration de ses

activités sur quelques dizaines d’organisations, il est très difficile de mesurer avec

exactitude l’ampleur du phénomène et surtout ses effets réels aux échelles privée, locale ou

macroéconomique, du fait de la très grande multiplicité de ses formes et de la myriade de

micro-organisations ayant informellement des activités de microfinance (Servet, 2006 : 19).

Il ajoute qu’ hormis le cas de quelques rares pays, la perspective d’une viabilité à très court

terme des projets de microfinance est douteuse en raison de la facturation intégrale de ses

coûts aux utilisateurs, des populations pauvres et extrêmement pauvres. Un tel modus

operandi ne peut que conduire à un échec (Ibid : 463).

Une telle controverse en matière de viabilité et des bienfaits auxquels l’on s’attend

des programmes de microfinance est ce qui justifie notre intérêt pour le cas du Bénin où

l’on retrouve à la fois des organismes privés et des institutions publiques engagés dans les

programmes de microfinance et ce, dans le cadre officiel de «lutte contre la pauvreté»

véhiculé comme on le sait par la banque mondiale. Dans le souci de bien comprendre la

nouvelle stratégie de lutte contre la pauvreté et ses effets sur les populations bénéficiaires

au Bénin ainsi que la logique des différents acteurs impliqués, cette étude vise à

comprendre les conditions d’octroi des prêts de microcrédit et d’analyser les retombées

possibles de ces derniers sur les bénéficiaires ainsi que le lien entre le microcrédit et les

activités agricoles en milieu rural.

Pour ce faire, l’analyse secondaire a été l’approche méthodologique retenue. Ces six

critères d’évaluation de données secondaires décrits par J. Turgeon et J. Bernatchez (2009)

nous ont permis d’analyser huit études réalisées au Bénin. Nous avons obtenu ces

documents aux bibliothèques des facultés des lettres arts et sciences humaines et des

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sciences de gestion de l’Université d’Abomey-Calavi ainsi qu’à la bibliothèque du Fonds

national de la microfinance et celle de l’ONG Bethesda.

Les deux premiers chapitres de cette étude seront consacrés au cadre conceptuel et

méthodologique du travail. Le troisième portera sur l’historique des projets du microcrédit

en Afrique de l’Ouest et plus précisément au Bénin. Le quatrième chapitre sera consacré à

la présentation des résultats des huit études retenues et enfin le cinquième chapitre sera

consacré à l’analyse des données issues de ces études.

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Chapitre 1 : cadre conceptuel

1.1 Problématique

Dans la seconde génération des réformes proposées par les institutions financières

internationales (IFI) aux pays du Tiers monde à partir des années 1980, se trouvent la

bonne gouvernance et la lutte contre la pauvreté. Dans ces deux volets, l’accent est mis sur

celui de la lutte contre la pauvreté où de Washington à Tokyo en passant par Paris, la lutte

contre la pauvreté est devenue le nouveau mot d’ordre universel des agences d’aide

publique au développement (Chavagneux, 2001). Ce nouveau volet de lutte contre la

pauvreté trouve sa concrétisation dans le document stratégique de réduction de la pauvreté

(DRSP) que les pays pauvres très endettés (PPTE) doivent soumettre avant de bénéficier

d’une aide financière ou d’un allègement de dette auprès des institutions de Bretton Woods

(IBW) à partir des années 1990 (Cling et al. 2002).

Les objectifs de ce document (DSRP) sont : l’instauration d’un cadre

macroéconomique adéquat pour favoriser la croissance; le développement des services

sociaux de base (éducation, santé, accès à l’eau, etc.); la protection et la sécurité des plus

démunis; l’accroissement des opportunités d’emploi et de revenus des pauvres

(développement rural, promotion des micro et petites entreprises, extension des systèmes de

micro-crédit, développement des infrastructures de transport et de communication) (Cling

et al. 2002).

Le volet microcrédit de ces objectifs est devenu un élément principal de lutte contre

la pauvreté aux yeux des institutions de développement (Banque Mondiale et Fonds

Monétaire International). Dans leurs discours, le microcrédit est un instrument efficace de

lutte contre la pauvreté. Pour Pal (2009), il s’agirait donc d’un moyen efficace pour

stimuler l’esprit d’entreprise chez les populations pauvres afin que leur situation

économique change du point de vue de la sécurité du revenu, la priorisation de la santé,

l’éducation, l’environnement, l’émancipation des femmes et la participation politique.

Le microcrédit est avant tout un prêt octroyé aux femmes des pays en

développement. Une petite somme d’argent (environ 100 dollars américains) qui permettra

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à ces femmes d’entreprendre des activités génératrices de revenus afin de sortir de la

pauvreté dans laquelle elles vivent. Cette situation de pauvreté que vivent de façon générale

ces populations des pays en développement a été constatée par les institutions des Nations

Unies comme étant les conséquences sociales des politiques d’ajustement structurel (Cling

et al. 2002). Elles définissent donc la pauvreté non pas en terme monétaire (revenu par tête

d’habitant) mais en terme de besoins. Il s’agit de la satisfaction des besoins élémentaires (se

nourrir, se loger, se former, etc.) (Hofmann et al. 2007).

C’est dans ce souci de lutter contre la pauvreté galopante qui frappe les populations

des pays en développement plus précisément les femmes et à la suite de l’expérience

«réussie» de la Banque Grameen de Yunus en Asie que le microcrédit est devenu pour les

développeurs un instrument incontournable dans la lutte contre la pauvreté. Cette

expérience de la Banque Grameen a encouragé beaucoup de structures financières, qui, hier

ne prêtaient pas aux pauvres, c'est-à-dire des gens qui n’ont pas de garantie matérielle pour

contracter un prêt comme dans le système classique des banques, à rentrer dans le jeu de

crédits aux pauvres. Des études comme celle de Soko (2009) ont montré que l’accès au

crédit contribue à une augmentation des revenus de façon significative chez les ménages

emprunteurs par rapport aux ménages non emprunteurs dans les mêmes catégories sociales

(Soko, 2009 : 212). Dans le même ordre d’idées, Soulama (2005) indique qu’en ce qui

concerne l’augmentation du revenu et la réduction de la pauvreté, les résultats des

vérifications empiriques concordent généralement sur le fait que le micro-crédit a un impact

positif sur le revenu et aussi sur la pauvreté, surtout lorsque celle-ci n’est pas réduite à la

seule dimension monétaire (Soulama, 2005 : 113). Le discours des développeurs est alors

sans équivoque, le microcrédit éradique la pauvreté. Mais d’autres études comme celle de

Fodé (2009) indiquent que la liaison entre accès aux services financiers et réduction de la

pauvreté et développement n’est ni linéaire, ni souvent évidente (Fodé, 2009 : 17).

Dans cette controverse du succès du microcrédit, Vincent (2000) s’interroge sur le

microcrédit en tant qu’outil de lutte contre la pauvreté. Il estime que les crédits inférieurs à

100 dollars américains, accordés principalement aux femmes, ne créent que très rarement

(moins de 3%) de petites entreprises ou des emplois nouveaux. Ces crédits améliorent la

situation sociale des bénéficiaires qui peuvent ainsi trouver les fonds nécessaires pour

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satisfaire des besoins de première nécessité (santé, nourriture, logement, écolage, etc.). Il y

a donc amélioration, mais rares sont les bénéficiaires qui dépassent le seuil de la pauvreté.

Mais ces «crédits inférieurs ou légèrement supérieurs à 100 dollars américains»

peuvent-ils avoir des incidences sur les activités agricoles? Car, selon Kendo (2012) les

capacités des ménages agricoles ont une double influence sur le processus de réduction de

la pauvreté au travers de la productivité des ménages agricoles d’une part et la distribution

des revenus d’autre part (Kendo, 2012 : 237). Mais malheureusement, l’agriculture est un

secteur risqué pour les IMF (Honlonkou et al., 2006 : 76). Morvant-Roux (2008) montre

que la plupart des paysans dans les pays en voie de développement sont exclus du système

bancaire de par leurs conditions précaires et très peu attractives en termes de garanties

offertes (Morvant-Roux, cité par Kendo, 2012 : 238). Ces paysans qui pratiquent

l’agriculture pour la majorité en milieu rural sont en grande partie pauvres (Kendo, 2012:

239). La pauvreté qui caractérise les paysans en milieu rural et le risque que constitue le

financement de l’agriculture font que la majorité des IMF ne financent que les activités de

petits commerces et de transformation.

La généralisation des pratiques de microcrédit, pour lutter contre la pauvreté, dans

les pays en développement suite à une forte implication des institutions financières privées

a alors entraîné une variation dans la pratique des taux d’intérêt. Ces taux d’intérêt varient

selon les institutions bancaires et les régions du monde. Le laisser-aller qui s’opère dans ce

domaine des taux d’intérêt et les conséquences néfastes que cela génèrent pour les

bénéficiaires de ces microcrédits ont amené les dirigeants de certains États comme ce fût le

cas en Afrique de l’Ouest à instaurer un taux de plafonnement. Acclassato (2008) montre

qu’il est normal que le taux d’intérêt soit élevé (au-dessus des taux de plafonnement qui

sont à 27%) compte tenu des risques que constitue la clientèle des institutions financières et

que les coûts associés aux faibles montants de crédit soient compensés par des taux élevés.

Cette controverse entre ceux qui considèrent le microcrédit comme un moyen de

lutte contre la pauvreté et ceux qui remettent en question l’efficacité du microcrédit à plus

d’un égard, notamment le problème des taux d’intérêt élevés déjà évoqué, nous amènent à

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nous poser la question suivante : le microcrédit permet-il de lutter efficacement contre la

pauvreté?

Le développement socioéconomique ou l’autonomie financière qu’entrainerait le

microcrédit sur les populations bénéficiaires tel qu’escompté par les experts de la Banque

mondiale nous laisse perplexe et nous nous demandons a priori si la nature des prêts

octroyés aux populations ne renferme pas en elle-même des failles qui font que le

développement socio-économique tant attendu ne soit pas au rendez-vous. Aussi, en

regardant les conditions de vie des populations (les femmes) dans les pays en

développement, plus précisément dans les zones rurales où le microcrédit est en vogue,

pouvons-nous dire que les prêts de microcrédits ont des retombées positives sur les

bénéficiaires? Le constat nous laisse dubitatif car, nous ne savons pas si les projets de

microcrédit dans les pays en développement ont changé réellement les conditions de vie des

populations bénéficiaires. Nous nous demandons tout particulièrement si les éléments de

développement socioéconomique tels que : «la sécurité du revenu, la priorisation de la

santé, l’éducation, l’environnement, l’émancipation des femmes, et la participation

politique» sont à la portée de ces populations. Dans cet ordre d’idées, quels sont alors les

impacts des projets de microcrédit sur les populations bénéficiaires? Nous voulons vérifier

si, en bout de piste, les bénéficiaires des prêts de microcrédit sont financièrement

autonomes, si la nature des prêts a sur eux des effets bénéfiques en termes de conditions de

vie mais aussi, si les prêts de microcrédit ont permis le développement des activités rurales

susceptibles de créer des emplois et de l’autosuffisance alimentaire.

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1.2 Clarification conceptuelle : qu’est-ce qu’un microcrédit?

Le concept fondamental de ce travail est le microcrédit mais avant de le définir,

nous essayerons de clarifier au prime abord le concept de pauvreté qui a en quelque sorte

engendré celui de microcrédit. Nous ferons également la distinction entre microcrédit et

microfinance. Enfin nous définirons deux autres concepts à savoir, l’autonomie financière

et le développement socioéconomique qui peuvent être la conséquence logique de

l’introduction des projets de microcrédit dans un milieu donné.

La pauvreté dans un premier temps renvoie à l’état d’une personne ou d’un groupe

qui manque de moyens matériels, d’argent, de ressources (Dictionnaire de Sociologie, le

Robert/Seuil, 1999 : 387). Selon Simmel (1998), «les pauvres, en tant que catégorie sociale,

ne sont pas ceux qui souffrent de manques et de privations spécifiques, mais ceux qui

reçoivent assistance ou devrait la recevoir selon les normes sociales. Par conséquent, la

pauvreté ne peut, dans ce sens, être définie comme un état quantitatif en elle-même, mais

seulement par rapport à la réaction sociale qui résulte d’une situation spécifique» (Simmel,

1998 : 15). Il indique également que la pauvreté, telle qu’il l’entend, est donc non

seulement relative, mais elle est aussi construite socialement (Ibid : 15). Ces deux

premières définitions montrent bien que le concept de pauvreté est avant tout

multidimensionnel. L’approche monétaire qui est la plus répandue prend en compte

l’ensemble des revenus du ménage et cherche à définir le seuil le plus adapté (Dictionnaire

de Sociologie, le Robert/Seuil, 1999 : 388). Ce seuil de pauvreté est calculé en fonction de

certains critères et selon les pays. Selon Mercier (1995), la pauvreté renvoie au sens obvie,

à un manque dont la provenance peut être de différentes sources. Lessard (1987) distingue

le manque de l’avoir (argent, logement, nourriture, vêtements) et le manque de l’avoir

physique, psychologique, social ou moral (maladie, handicap, analphabétisme, isolement,

absence de relations significatives, etc.) (Lessard 1987, cité par Mercier, 1995 : 10). La

Banque mondiale quant à elle, s’inscrit dans une approche monétaire et distingue la

«pauvreté extrême» (monétaire ou absolue) de la «pauvreté générale» (relative). Selon elle,

la pauvreté absolue ou monétaire correspond à un niveau de revenu nécessaire pour assurer

la survie des personnes. En général, ce seuil est calculé en fonction d’un régime alimentaire

de base (Benicourt, 2001 : 38). La pauvreté générale ou relative, quant à elle, reflète une

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conception plus axée sur la répartition des revenus; elle signifie avoir «moins que les

autres». Cette notion renvoie au niveau de revenu nécessaire pour participer à et vivre dans

une société particulière (logement, habillement…) (Benicourt, 2001 : 38). L’autre

définition de la pauvreté est celle développée par le PNUD. Cette définition fait une

distinction nette entre l’«extrême pauvreté», la «pauvreté générale» et la «pauvreté

humaine». Ainsi, «une personne vit dans la pauvreté extrême si elle ne dispose pas de

revenus nécessaires pour satisfaire ses besoins alimentaires essentiels définis sur la base de

besoins caloriques minimaux(…). Une personne vit dans la pauvreté générale si elle ne

dispose pas des revenus suffisants pour satisfaire ses besoins essentiels non alimentaires

(tels l’habillement, l’énergie, le logement) et alimentaires». La «pauvreté humaine», quant

à elle, est présentée comme l’«absence des capacités humaines de base : analphabétisme,

malnutrition, longévité réduite, mauvaise santé maternelle, maladie pouvant être évitée»

(PNUD, 2000, cité par Benicourt, 2001 : 35-36). Cette définition du PNUD qui met en

lumière la pauvreté humaine renvoie à l’approche par les conditions de vie développée par

certains auteurs qui, pour définir statistiquement la pauvreté préfèrent se fonder sur une

approche en termes de conditions de vie. Ils insistent sur l’idée que ce n’est pas le manque

de tel ou tel bien matériel élémentaire qui permet de définir la catégorie des pauvres, mais

le cumul des handicaps (Dictionnaire de Sociologie, le Robert/Seuil, 1999 : 389). Ce qui a

emmené le sociologue anglais Townsend (1970-1988) a élaboré dans cet esprit le concept

de «deprivation» à partir de plusieurs indicateurs, comme le manque de bien-être matériel

ou de possibilités de participation à la vie sociale (Dictionnaire de Sociologie, le

Robert/Seuil, 1999 : 389). Dans le même ordre d’idées, Sen (2000) propose «de penser la

pauvreté comme la privation de libertés relevant des différentes dimensions de la vie : non

seulement économiques, mais aussi sociales et politiques. Les trappes à pauvreté dont les

populations les plus démunies n’arrivent pas à s’arracher résultent d’un cumul de privations

qui sont enracinés dans les institutions» (Sen, cité par Prévost dans Guérin et al., 2011 :

33). Cet état de pauvreté qui caractérise les individus dans un contexte donné a poussé les

développeurs à introduire les projets de microcrédit comme stratégie pouvant lutter contre

la pauvreté. Qu’est-ce alors un microcrédit?

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19

Avant d’aborder le concept de microcrédit, nous essayerons de définir aussi le

concept de crédit qui est en vogue avant l’avènement de microcrédit. Le crédit est

généralement définit comme mécanisme par lequel un débiteur obtient un bien ou de la

monnaie d’un créancier en échange de la promesse d’un paiement différé de la contrepartie,

majoré d’un intérêt (Dictionnaire d’économie et des sciences sociales, Nathan 1989 : 120).

Le crédit permet donc de disposer d’un bien produit par autrui avant d’en avoir produit soi-

même l’équivalent : il rend effective une demande, jusque-là virtuelle, et anticipe une

production à venir qu’il facilite. C’est un moyen essentiel de financement de l’économie.

Le crédit a un coût à la charge du débiteur : sa dette sera majorée d’un intérêt. Si le crédit

n’est pas financé par l’épargne d’un agent s’abstenant de consommer au profit d’un

emprunteur, il l’est par une création monétaire nette de la part d’une banque (Dictionnaire

d’économie et des sciences sociales, Nathan 1989 : 120). Il s’agit généralement d’une

activité réservée aux institutions financières (les banques). Le microcrédit quant à lui, est en

quelque sorte une variante du crédit qui se déroule non seulement dans les banques mais

aussi et surtout dans les structures para-bancaires comme les organisations non

gouvernementales (ONG) qui gèrent le microcrédit, les associations, les caisses locales

d’épargne et de crédit, les tontines etc. Traditionnellement, le terme de microcrédit

s’applique au financement des acteurs économiques les plus défavorisés des pays en voie

de développement. L’objectif étant de permettre à ces différents acteurs d’accéder au crédit

parfois pour des montants très faibles, mais de pouvoir ainsi assurer le financement de leur

projet. Cette forme de financement se retrouve également dans les pays industrialisés. Le

microcrédit est alors une forme de crédit conçue pour faciliter la réinsertion ou le retour à

l’emploi d’une personne fragilisée (Trader-finance.fr, 2011). Il s’agit d’un petit montant

prêté aux plus défavorisés surtout les femmes des pays en développement afin de les aider à

entreprendre des activités génératrices de revenus. Mais le terme de microcrédit est plus

relié à la microfinance de nos jours et est considéré comme sa variante. La microfinance est

un terme englobant et est définie comme «l’ensemble des dispositifs permettant d’offrir des

petits crédits (microcrédits) à des familles pauvres pour les aider à conduire des activités

productrices de revenus leur permettant ainsi de développer leurs petites entreprises»

(Ikiémi, 2008 : 18). Djade (2011) indique que la microfinance s’inscrit toujours dans une

logique de fourniture de services financiers à des populations non bancarisées et que l’offre

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20

revêt différentes formes : crédit, assurance, épargne, garantie, transfert d’argent (Djade,

2011 : 31). Selon Vincent (2000), il n’y a pas de consensus parmi les professionnels pour

définir ce qu’est le microcrédit. Les uns, influencés par les dirigeants du Sommet mondial

de Washington, estiment que tout crédit de plus de 100 dollars américains n’est plus du

microcrédit. Les premières expériences de crédit de la Banque Grameen et des

organisations prêtant aux femmes pour le petit commerce ou des micro-projets se rangent

dans cette catégorie. Les autres, et ce sont les plus nombreux, prêtant des sommes, en

monnaie locale allant de 100 à 5.000 voire 10.000 dollars américains et plus, considèrent

leurs prêts comme du microcrédit (Vincent, 2000 : 2). Le microcrédit est donc une somme

relativement petite prêtée aux individus. Selon Vincent (2000), le microcrédit est

étroitement lié à l’activité des travailleurs du secteur informel. Il est local et proche des

gens. Quelquefois seulement, il est lié à l’épargne, en particulier en Afrique (op. cité : 2).

Dans le cadre de cette étude, le microcrédit est considéré comme une petite somme variant

entre 25 et 100 dollars américains (voire un peu plus) accordé aux femmes des pays en

développement pour entreprendre une activité génératrice de revenus. Ce type de

microcrédit est différent (en termes de montant accordé) de celui dont le montant accordé

va au-delà de 1000 dollars américains qui est considéré selon Vincent (2000) comme le

type de crédit susceptible de déclencher la croissance économique. Le but du microcrédit

dont il s’agit ici est de permettre aux bénéficiaires d’entreprendre une petite activité (AGR)

susceptible de leur donner une autonomie financière, et qui pouvait entrainer leur

développement socioéconomique. Qu’entendons-nous par autonomie financière et par

développement socioéconomique?

L’autonomie est définie comme étant la capacité d’un individu ou d’un groupe

d’agir et de se déterminer librement, selon ses propres désirs et volontés (Dictionnaire de

Sociologie, le Robert/Seuil, 1999 : 45). Rocque et al. (1999) considèrent que l’autonomie

est «la capacité d’une personne à décider, à mettre en œuvre ses décisions et à satisfaire ses

besoins particuliers sans sujétion à autrui» (Rocque et al, 1999, cité par Ngabonzima,

2009 : 26). L’autonomie financière est donc cette capacité qu’a l’individu ou un groupe à se

déterminer librement en termes d’argent, afin de ne pas se retrouver dans une situation de

manque d’argent ou de dépendance pour entreprendre quoique ce soit. Généralement cette

capacité d’agir librement en termes de moyens financiers entraînerait chez les individus

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d’une communauté donnée un développement (socioéconomique) qui est caractérisé par,

comme l’a écrit Pal (2009), la sécurité du revenu, la priorisation de la santé, l’éducation,

l’environnement, l’émancipation des femmes et la participation politique. Dans cet ordre

d’idées, Sen (1999) affirme que : «Le développement peut être considéré comme le

processus par lequel les libertés réelles des personnes s’accroissent» (Sen, cité par

Grosjean, 2000 : 3). Les travaux de Sen ont ensuite influencé la perspective onusienne de

développement qui à travers le PNUD parle aujourd’hui de développement humain. Ce

dernier est défini comme «l’élargissement des possibilités et des choix offerts aux individus

à savoir : vivre longtemps et en bonne santé, d’acquérir des connaissances et un savoir, et

de pouvoir accéder aux ressources nécessaires pour vivre ensemble dans des conditions

décentes» (PNUD, cité par Benicourt, 2001 : 36-37).

1.3 Perspective théorique et recension des écrits

1.3.1 Perspective théorique

La théorie du développement (théorie de la modernisation) qui stipule que le

développement se fait par étape (Rostow, 1960) s’est vue confrontée à d’autres réalités qui

font appel à de nouvelles théories. C’est ainsi qu’à la fin des années 1970, le paradigme du

développement en vigueur depuis les années 1950, celui de la modernisation (abstraction

faite bien entendu des théories de la dépendance et du système monde), subit une profonde

remise en question. Prennent alors la relève des approches sectorielles, méso et micro

économiques, politiques et sociales d’ordre pragmatique.

Ainsi, à partir des années 1990, l’approche du développement par le genre table sur

ce dernier (le genre) comme unité d’analyse et met en relief le concept d’empowerment

dans les pays en développement. Après avoir constaté l’incapacité des anciennes théories

de développement (théorie de la modernisation, théorie de la dépendance et le système

monde) à expliquer de façon concrète les problèmes de développement qui touchent les

pays en développement, particulièrement la pauvreté chez les femmes, les institutions

internationales (la Banque mondiale et le Fonds monétaire international) se basent sur cette

nouvelle approche qu’est le développement par le genre afin d’intégrer les femmes au

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processus de développement. Cette approche trouve son écho dans le concept

d’empowerment féminin, qui a été renforcé par l’approche par les capacités d’Amartya Sen.

L’idée ici, est de donner plus de pouvoir aux femmes car pour Sen, la pauvreté est

envisagé comme une privation de libertés relevant des différentes dimensions de la vie :

non seulement économiques, mais aussi sociales et politiques (Sen, cité par Prévost dans

Guérin et al. 2011 : 33). Comme mentionné un peu plus haut, l’empowerment féminin est

devenu en quelques années un concept incontournable que l’on retrouve décliné dans des

registres extrêmement divers. De l’accès à la propriété foncière, à la participation politique

en passant par l’engagement au sein de la collectivité et l’expansion du microcrédit, la

préservation de l’environnement et l’amélioration des services publics, l’empowerment est

un élément charnière autour duquel s’articule une approche multidimensionnelle de la

pauvreté et du développement durable (Ibid : 32). Cet état de chose a entraîné le

financement des projets menés par des femmes grâce au financement mis à leur disposition

par les institutions de microfinance dans plusieurs pays en développement.

La logique des différents acteurs impliqués à savoir les femmes pauvres et les

agents d’institutions de microfinance nous renvoie à l’analyse stratégique de Crozier et de

Friedberg (1992) qui met en évidence l’action collective dans toute organisation ou toute

association. Pour Crozier et Friedberg (1992), toute organisation, entreprise, administration

ou association volontaire, peut être analysée comme un système d’action concret. Cette

analyse stratégique a montré son importance dans l’étude des organisations et des

associations. L’essentiel ici pour nous est de combiner cette approche à celle du

développement par le genre afin de bien analyser notre objet d’étude.

Les projets ou programmes de développement mettent souvent en relation des

acteurs de divers horizons avec des stratégies différentes et des intérêts divergents, voire

contradictoires, bref un «système d’action concret» que Crozier et Friedberg (1992)

définissent comme un ensemble de jeux structurés entre acteurs interdépendants dont les

intérêts peuvent être divergents voire contradictoires. Notre objet d’étude, le microcrédit est

un élément des projets de développement qui met en présence différents acteurs animés de

stratégies différentes et d’intérêts divergents. Ces intérêts peuvent même aboutir à des

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contradictions. Nous estimons pertinents et utiles aux fins de la présente étude, tant la

perspective théorique de Sen concernant l’empowerment des femmes et celle de Crozier et

de Friedberg, axée sur le «système d’action au sein des organisations».

1.3.2 Recension des écrits

La recherche d’une littérature sur notre sujet de recherche intitulé : «Le microcrédit

dans le programme de lutte contre la pauvreté chez les femmes au Bénin, mythe ou

réalité?» nous a permis de constater l’existence d’une littérature foisonnante. Plusieurs

études ont été menées sur l’importance du microcrédit dans la lutte contre la pauvreté. Ces

études ont abordé différentes problématiques. Certaines recherches se sont intéressées aux

effets positifs du microcrédit sur les bénéficiaires tels que Hofmann et al. (2003), Pal

(2009), Vincent (2000), Ndiaye (2002), Swain (2007). D’autres ont plutôt porté sur les

aspects négatifs du microcrédit sur les bénéficiaires tels Woolcock (1999), Mayoux (2007),

Fouillet et al. (2007) et enfin, celle d’Acclassato (2008) qui explique le plafonnement des

taux d’intérêt.

1.3.2.1 L’argumentaire des tenants des incidences positives des programmes de

microcrédit

Sur la question de la microfinance et plus particulièrement de sa composante la plus

populaire, le microcrédit, Hofmann et al. (2003) précisent que de vastes sommes ont déjà

été investies par les acteurs de la mondialisation et que celles-ci représentent aujourd’hui

des outils privilégiés de la lutte contre la pauvreté. Ces auteurs précisent également que la

pauvreté a été promue au premier rang des objectifs des institutions onusiennes et de

Bretton Woods. Ils se demandent si, à la limite, le microcrédit ne serait pas devenu le

cheval de Troie de la mondialisation néolibérale, alors que, grâce à ces outils financiers

décentralisés, même les pauvres, jusqu’alors en marge de l’économie marchande,

deviennent des agents économiques et apportent leur modeste participation à l’économie

mondiale. Les femmes pauvres pour leur part, longtemps exclues du processus de

mondialisation se montrent désormais capables de se prendre en main, d’assumer le

financement de leur emprunt, lequel est garant de la viabilité financière du système de

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microcrédit. En bref, ces auteurs mettent l’accent sur trois points essentiels à savoir,

l’efficacité du microcrédit comme instrument de lutte contre la pauvreté, le microcrédit en

tant qu’instrument d’empowerment des femmes pauvres et enfin, l’image de la femme

«entrepreneuse» qui est sous-jacente aux projets de microcrédit. Ils précisent également que

malgré certaines difficultés liées au processus du microcrédit (la hauteur du taux d’intérêt et

les maigres moyens pécuniaires de la population cible), certains aspects positifs peuvent

être dégagés comme le cas de l’empowerment économique, social et politique, c'est-à-dire

l’acquisition d’un droit à la parole, à la reconnaissance sociale et enfin, le droit à une

autonomie personnelle.

S’inscrivant dans la même perspective que les auteurs précités sur la question

d’autonomisation des femmes, Swain (2007) souligne le succès des programmes de

microcrédit du type «self-help Bank linkage» en Inde et affirme que ces programmes sont

de plus en plus salués pour leurs résultats économiques positifs et pour l’autonomisation

des femmes. Ces programmes visent à lutter contre l’exclusion des femmes dans les

politiques de développement. En effet, dans le contexte de l’Inde, les femmes ne

participaient pas aux discussions et prises de décisions dans le ménage et ont un accès

limité au crédit et au marché salarié. Selon l’auteur, la véritable autonomie de la femme a

lieu lorsque celle-ci défie les normes et la culture établies pour affirmer effectivement son

bien-être.

Le concept d’autonomisation selon Swain renvoie d’une part, à la capacité des

femmes à participer à la croissance économique et au développement social et de l’autre, à

leur participation politique au plan local. La raison avancée pour l’autonomisation de ces

femmes est qu’elles sont parmi les plus pauvres et les plus fragiles et qu’il convient de les

aider en priorité. Une deuxième raison consiste à dire qu’investir dans les capacités des

femmes leur permet de faire des choix qui contribuent en outre à la croissance économique

et au développement. Pour cet auteur, la participation politique, surtout locale, est

considérée comme un des facteurs clé de l’autonomisation. Swain estime que sa recherche

sur la participation des femmes au contrôle des ressources, sur les changements d’attitude

et la prise de décision prouve que le processus d’autonomisation de la femme est en bonne

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voie. Néanmoins, il ne faut pas imaginer qu’un programme de microfinance minimaliste

pourra exercer une influence durable sur l’autonomisation des femmes.

Pour leur part, Vincent (2000), Ndiaye (2002) Pal (2009) montrent que le

microcrédit a apporté un changement dans la vie des bénéficiaires. L’étude de Vincent

(2000) tente de préciser les effets du microcrédit. Il conclut que les crédits inférieurs à 100

dollars américains, accordés principalement aux femmes, améliorent certes leur situation

pécuniaire à la marge, en termes de satisfaction relative de besoins de première nécessité

(santé, nourriture, logement, écolage, etc.) mais qu’ils ne créent que très rarement (moins

de 3 %) de petites entreprises ou des emplois nouveaux. Pour l’auteur, il y a donc

amélioration, mais rares sont les bénéficiaires qui dépassent le seuil de pauvreté. Il montre

également que ces microcrédits ont malgré tout un rôle essentiel, celui d’être un «plus

social» et que pour cette seule raison, ils méritent d’être développés. Il précise que même

lorsque les crédits octroyés sont plutôt de l’ordre de 100 à 1.000 dollars américains, les

effets sont les mêmes, la satisfaction des besoins de première nécessité une fois de plus,

mais que quand même, contrairement aux prêts plus modestes ils contribuent dans une

certaine mesure à la création d’emplois et de nouvelles entreprises (de 7 à 12 % selon les

pays et selon les cas). Ce sont les crédits de 5.000 dollars américains et plus qui sont ceux

qui déclenchent un véritable processus de croissance par l’investissement dans les

nouvelles unités de production, l’amélioration de la productivité et l’ouverture sur de

nouveaux marchés.

Vincent (2000) émet cependant quelques réserves concernant les programmes de

microcrédit. Celles-ci concernent les conditions des prêts, soit la question des taux d’intérêt

qui les accompagnent. Il rapporte que certains organismes comme les organisations non

gouvernementales (ONG) chrétiennes du Nord et les donateurs optent pour des taux

d’intérêt très bas de (1 à 3 % quelle que soit le niveau de l’inflation). Les caisses d’épargne

et de crédit et les mutuelles, leurs fédérations et unions, de type Raiffeisen, adoptent même

des taux d’intérêt en dessous de ceux du marché, et ce bien sûr quand les États dans

lesquels ils fonctionnent les y autorisent. Vincent prévient qu’on peut aider les pauvres

avec des prêts sans intérêts ou à intérêts subventionnés mais qu’on ne peut continuer à

«jouer Les Mères Teresa» sans être conscients que de tels programmes ne sont pas durables

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et se termineront avec la fin de l’aide. L’auteur précise que par contre nombreuses sont les

organisations qui gèrent autrement le microcrédit avec des taux de prêts du crédit qui

incluent non seulement le coût de l’intérêt bancaire (y compris l’inflation), mais aussi une

participation à un fonds de couverture de risque et qu’un tel modus operandi est viable.

Pal (2009), de son côté, montre que les stratégies de réduction de la pauvreté

contemporaine retiennent le microcrédit comme l’outil ultime pour éliminer la pauvreté.

Pour cet auteur, le microcrédit s’impose comme une stratégie préventive pour l’éradication

complète de la pauvreté et un instrument efficace pour le développement socio-

économique notamment en ce qui concerne la sécurité du revenu, l’amélioration de l’accès

aux services de la santé, l’éducation, la salubrité, l’environnement, l’émancipation des

femmes, et la participation des populations concernées au processus politique. Pal (2009) se

dit convaincu que l’octroi de prêts aux plus pauvres d’entre les pauvres (même à des

citoyens vivant avec moins de 1 dollar par jour), si modestes soient-ils, finiront par

engendrer des activités génératrices de revenu (AGR) soit pour des travailleurs autonomes,

soit pour des micro-entreprises. Les gains financiers ainsi obtenus permettront aux

emprunteurs de continuer à investir et à développer leurs entreprises, perpétuant ainsi un

niveau de revenu durable, d’investissement et d’épargne. Enfin, l’auteur propose de

mesurer l’efficacité réelle du microcrédit à partir d’indicateurs du développement

socioéconomique et humain à savoir, l’investissement dans l’enseignement supérieur,

l’autonomisation socioéconomique des femmes, l’accès et l’utilisation des services de

santé, l’épargne et l’investissement.

Selon Pal (2009), une étude de cas de la Banque Grameen en Asie a montré que les

pratiques du prêt de cette banque, notamment l’ouverture envers des clientèles jusque-là

marginalisées du crédit, ont valu la notoriété à cette institution. Pal (2009) montre en effet

que la Banque Grameen a réussi à aider 68 % des familles parmi ses emprunteurs à franchir

avec succès le seuil de pauvreté, et qu’une partie de ces familles a peu à peu fini par

atteindre le seuil de 2 dollars de revenu par jour, revenu estimé comme étant relativement

confortable. Toutefois, l’auteur n’a pas vérifié si ce groupe d’emprunteurs allait pouvoir à

terme s’engager dans une réelle trajectoire de développement de leurs activités

économiques.

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Pour sa part, Ndiaye (2002) présente le microcrédit comme une arme contre la

pauvreté suite à une étude de cas réalisée au Sénégal. À partir de son analyse sur l'impact

du programme Accès des Femmes Sénégalaises aux Services Financiers (AFSSEF), elle

mentionne que les activités entreprises par les femmes ayant reçu des prêts de 25.000 à 50.

000 F CFA ont été rentables sur deux plans: les activités génératrices de revenus telles que

le commerce et les activités d'investissements. Pour les activités génératrices de revenus par

exemple, le commerce de produits locaux et céréaliers, l'écoulement se fait facilement,

l'approvisionnement se fait aussi sans difficulté et les femmes arrivent à vendre à des prix

qui leur permettent de recouvrer le prix d'achat mais aussi d'avoir un certain bénéfice

pouvant leur permettre de disposer d'un fonds de remboursement. Ndiaye (2002) mentionne

aussi que les bénéfices générés sont réinvestis dans des activités productives et des biens

d'investissement. Elle avance par ailleurs que les femmes bénéficiaires ont réussi à parfaire

leurs compétences au fil du temps avec comme résultat la maîtrise des mécanismes du

marché. Leur sens des affaires s’est amélioré notamment au chapitre de la gestion et de la

qualité des produits mis sur le marché et qu’elles consacrent plus de temps maintenant à

acheter, à vendre et à gérer des tontines. Elle rapporte aussi qu’elles sont en mesure

désormais en matière de comptabilité de distinguer la part qui leur revient comme apport

personnel de celle qui revient à la mutuelle.

En ce qui a trait aux impacts sociaux du programme sénégalais de crédit AFSSEF,

l’auteure montre que les résultats financiers ont affecté le comportement individuel des

femmes bénéficiaires. Au niveau de la communauté, les groupes de crédit permettent aux

femmes bénéficiaires de mieux se connaître et de collaborer en toute confiance. Sur le plan

familial, l’auteure rapporte que les femmes jouissent d’avantage d’autonomie, sont

devenues plus actives, capables de gérer leur propre revenu et aptes à s'ériger en

responsable au sein de leur famille. Le crédit AFSSEF a favorisé la collaboration entre

femme et mari, les maris encourageant même leurs épouses dans la poursuite de leurs

activités. Il y a une réelle transformation des rapports sociaux intra-familiaux quand les

revenus de la femme deviennent la source du soutien exclusif de la famille, affirme-t-elle.

En somme, la participation au programme de microcrédit a permis la réalisation d’activités

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génératrices de revenus qui à leur tour ont permis aux femmes de s’affirmer davantage au

sein de la famille et de la communauté.

Enfin, les revenus générés par les activités financées à partir de la garantie AFSSEF

ont permis d'améliorer la situation alimentaire des familles, de prendre en charge la

scolarité des enfants, d'atténuer les problèmes de santé et de répondre aux besoins de

cérémonies.

Bref, selon Ndiaye (2002) le programme de l’AFSSEF a contribué à relever le

revenu de ces femmes et celui de leur famille, que celles-ci disposent maintenant de leurs

propres moyens et contribuent à la vie économique. Cet auteur conclut en disant que le

crédit est un service désirable et utile, et non un mal nécessaire auquel on ne doit faire appel

qu'en dernier recours.

1.3.2.2 L’argumentaire des tenants des incidences moins favorables des

programmes de microcrédit

En contre-partie du premier volet de la problématique du microcrédit mettant

l’emphase sur les incidences positives que celui-ci comporte, un deuxième volet fait état de

son côté moins reluisant, de ses incidences négatives. Épousent ce point de vue moins

enthousiaste des auteurs comme Woolcock (1999), Mayoux (2007), Fouillet et al. (2007).

Woolcock (1999) montre que la transposition des politiques de crédit ou de

microcrédit d’un pays à un autre ne peut se faire sans des ratés. Les politiques de

microcrédit élaborées dans un pays spécifique ne peuvent pas être appliquées à la lettre

dans un autre pays sans tenir compte de certaines spécificités de ce pays. Le souci de

trouver une solution urgente à un problème donné, à son avis, pousse les dirigeants ou les

décideurs sans une vision prospective à sauter sur la première occasion en hypothéquant un

groupe non négligeable d’individus et, à la limite, l’avenir d’une nation entière. Faute de

tenir compte des déterminants qui expliquent le succès d’une politique ou d’une stratégie

dans un pays donné, son application directe dans un autre pays peut créer des anomalies,

des dysfonctionnements au sein des programmes de microcrédit. L'auteur illustre cet état de

chose avec l'exemple de l'Irlande. Il montre que dans le souci de trouver une solution aux

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problèmes de crédit pour sa population rurale, l'Irlande a transposé le système de crédit en

vogue en Allemagne par la Raiffeisen Bank dans son pays en 1898. Le constat est que le

système n’a pas marché comme en Allemagne témoignant de la non compatibilité du

système de crédit allemand aux réalités irlandaises.

First, the presence of rival financial institutions deprived the cooperatives of savers,

which in turn generated liquidity problems. Second, a well-developped system of

auditing federations, a key feature of Raiffeisen’s model, failed to emerge, third,

cooperative members themselves were reluctant to follow through on requirements to

monitor their colleagues and ensure timely repayment of loans.

(Woolcock, 1999 : 23)

Woolcock (1999) montre également que d’autres facteurs comme les catastrophes

naturelles constituent un handicap pour la lutte contre la pauvreté à travers les microcrédits.

Les catastrophes naturelles entrainent souvent la perte des récoltes des populations qui ne

sont plus en mesure de rembourser les prêts. Ceci entraine des situations de tension entre

les prêteurs et les emprunteurs. «Failure to repay loans as a result of natural disaster

manifests itself in two major sources of organizational stress: relations among borrowers

and relations between borrowers and staff» (Woolcock, 1999: 26).

Un autre facteur de l’échec des microcrédits selon Woolcock concerne les

problèmes individuels des bénéficiaires qui font que les prêts qui devraient servir à créer

des activités génératrices de revenus sont utilisés pour d’autres besoins comme la maladie

d’un proche ou tout autre problème individuel. Tous ces facteurs précités en plus des taux

d’intérêt élevés et la petitesse des prêts octroyés ne permettent pas aux crédits de générer

une croissance économique, moteur du développement.

Pour sa part, Mayoux (2007) montre que la microfinance peut avantageusement

influencer certaines facettes de l’autonomisation des femmes comme l’augmentation de

l’accès des femmes aux services microfinanciers. Car ceci garantirait leur autonomisation

économique et leur permettrait de prendre des décisions sur l’utilisation de leur épargne ou

de leur crédit. Le renforcement de l’accès des femmes à la microfinance peut améliorer leur

bien-être familial sur plusieurs plans. D’une part, il permet de canaliser les ressources

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économiques telles que le crédit et l’épargne par l’entremise des femmes vers les familles.

D’autre part, il permet une conjugaison accrue de l’activité économique des femmes et une

plus grande participation aux décisions du ménage qui peuvent leur donner un poids social

et politique accru.

Cependant, Mayoux met en évidence les faiblesses à l’intérieur du processus

d’autonomisation en montrant que même si l’accès des femmes à la microfinance s’est

considérablement amélioré au fil des vingt dernières années, dans beaucoup de régions

l’accès aux programmes, aux unions de crédit et aux banques villageoises reste faible. Elle

montre que pour la plupart des femmes qui empruntent, le revenu n’augmente que très

faiblement, que parfois il est négatif. L’auteure précise que même avec une légère

amélioration du revenu, on peut noter une forte augmentation de la charge de travail des

femmes et le stress qui l’accompagne, une situation potentiellement nuisible à leur santé.

Selon l’auteure, il n’existe pas de lien directe entre autonomie économique et/ou

participation à des groupes de microfinance ou autonomisation sociale et politique car,

rares sont les programmes qui tentent de lier la microfinance à une activité sociale et

politique plus large.

Ce que propose Mayoux (2007), c’est de revoir les liens présumés entre

microfinance et autonomisation des femmes car même s’il y a quelques succès, la route est

encore longue avant que les femmes jouissent du même accès aux services financiers ou

soient à même d'en profiter pleinement. Elle montre également que les obstacles

contextuels placés à différents niveaux empêchent les femmes d'accéder aux programmes,

d'augmenter ou de gérer leurs revenus ou encore de dénoncer des liens de subordination.

Ces obstacles s’associent souvent à des politiques discriminatoires selon le genre. Ces

politiques empêchent les services microfinanciers d’exercer une influence positive. Leur

seule contribution semble être trop limitée aux plus pauvres et aux femmes les plus

défavorisées, particulièrement vulnérables aux problèmes de santé et autres impromptus,

qui disposent de moins de ressources pour réagir aux fluctuations du marché ou aux

catastrophes naturelles.

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Fouillet (2007) et al. montrent, que les louanges faites au microcrédit paraissent

aujourd’hui avoir atteint un tel niveau qu’il peut sembler incongru d’interroger les limites

de cette prétendue «révolution de la finance». Selon ces auteurs, un mois après le

«microfinance Summit à Halifax», certaines interventions ont précisé que cette technique

financière ne pouvait être considérée comme une panacée pour éradiquer la pauvreté.

Toutefois, force est de constater qu’elle en reste au seul plan du discours. Les auteurs

précisent qu’il y a trop de mythes propagés par les néolibéraux mal remis de l’échec des

recettes issues du consensus de Washington (les dix recommandations de John williams

pour permettre aux pays du Sud de se développer) et par les marchands d’illusions qui

profitent de la microfinance à titre d’opportunité de gains personnels, exorbitants et à court

terme.

Fouillet (2007) et al. mettent également l’accent sur les confusions sémantiques qui

caractérisent le monde du microcrédit à savoir, la lutte contre la pauvreté, l’inclusion

financière et le statut des acteurs qui viennent d’horizons divers avec des objectifs

divergents. Pour ces auteurs donc, il existe en microfinance des opportunités de gain

financier à saisir et qui peuvent être socialement utiles, tout comme, en certaines

circonstances, elles peuvent produire des effets très négatifs. Pour eux, le microcrédit

profite à certains acteurs de lutte contre la pauvreté qui se transforment en usuriers ou s’en

font les complices. Ces acteurs de développement diffusent sans vergogne des types de

prêts qui conduisent régulièrement à un surendettement des emprunteurs qui est masqué par

le rééchelonnement des prêts ou par le recours à d’autres prêts.

Fouillet et al. (2007) rappellent que, pour répondre aux besoins de la planète, il faut

un changement plus important des conditions de vie des plus pauvres, devant aller au-delà

de leur inclusion financière, et une volonté bien plus forte que celle de diffuser des prêts de

faible montant. Cette manière de faire les choses répond aux préceptes néolibéraux qui se

révèlent être des obstacles à un développement à moyen et à long terme de cette technique

financière qu’est la microfinance. Ils précisent que quand le crédit sert à l’achat de biens de

consommation fabriqués en dehors des lieux où vivent les emprunteurs, l’effet

multiplicateur sur les revenus est quasi nul et qu’on observe alors une fuite des ressources

hors de la communauté.

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L’autre phénomène rapporté est que la faible contribution du microcrédit à des

investissements productifs additionnels et cette fuite des revenus hors des économies

locales peuvent conduire au surendettement dès lors que les revenus attendus ne sont pas

créés par la dépense. Pour ces auteurs, le micro-entrepreneur est confronté à des limites,

telles que la faible rentabilité des activités et l’incapacité de transposer les succès obtenus

quelque part sur un autre terrain. Ils montrent que le microcrédit est très utile, mais que les

dépenses des emprunteurs priment souvent sur l’investissement et la prise de risque, ce qui

ne contribue pas à créer de la richesse, contrairement aux idées reçues. Faute donc

d’accroître de façon sensible les revenus des plus pauvres, le microcrédit peut conduire à

leur surendettement et à créer alors plus de drames que d’espoirs parmi les plus démunis.

Nos auteurs insistent sur le fait que force est de constater de nos jours qu’on assiste

à une «dérive commerciale» visant à transformer les organisations de microfinance en

«banques des pauvres», à partir de là, à plaider pour leur refinancement sur les marchés

financiers et même pour le déplafonnement des taux d’intérêts. Selon ces auteurs, la

«libération» des taux d’intérêt n’est pas la bonne solution pour développer une

microfinance au service des pauvres. Fouillet et al (2007) concluent que seule la myopie

néolibérale donne à penser que l’imputation de tous les coûts aux bénéficiaires de certains

services est en tout lieu et en tout temps la panacée.

S’inscrivant dans une perspective de déplafonnement des taux d’intérêt, Acclassato

(2008) montre qu’il est normal en épousant l’avis d’autres chercheurs que le risque élevé

que constitue la clientèle des institutions de microfinance et les coûts associés aux faibles

montants de crédit soient compensés par des taux d’intérêt élevés. Il montre que dans la

sous-région ouest-africaine les taux d’intérêts sont plafonnés à 27% et que dans les

pratiques financières des institutions en charge, ce plafonnement n’est pas respecté. Pour

cet auteur, le plafonnement des taux d’intérêt peut nuire non seulement aux institutions de

microfinance mais également aux pauvres et petits opérateurs économiques en les privant

des services financiers et en les poussant vers les prêteurs informels. L’objectif avoué des

programmes de plafonnement est de maintenir le taux d’intérêt à un niveau bas. Pour lui, en

interdisant le prêt au-delà du taux d’usure ou de plafonnement, on réduit non seulement la

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satisfaction des prêteurs mais aussi celle de l’emprunteur qui se voit interdire l’accès à un

emprunt sans qu’un autre prêt à meilleur taux lui soit proposé. Pour le prêteur, l’imposition

d’un taux de plafonnement constitue une barrière à l’entrée sur ce segment de marché plus

risqué, et certainement plus profitable pour les institutions financières qui maîtrisent la

sélection et le contrôle de risque sur ce segment. En définitive, l’auteur montre que les taux

d’intérêt plafonnés affectent les pauvres en limitant leur accès aux services financiers, ce

qui contribue à creuser davantage des inégalités.

Au demeurant, nous constatons à la fois une divergence et une convergence de

points de vue sur la question de microcrédit dans le processus de la lutte contre la pauvreté

chez les différents auteurs étudiés. Certains pensent que le processus en cours marche bien

à part quelques irrégularités. D’autre pensent que beaucoup restent à faire. Il nous revient

alors de faire une analyse critique des différents rapports d’évaluation d’impacts des projets

de microcrédit et des mémoires de maîtrise portant sur le sujet afin de faire ressortir

l’impact de ces derniers sur les populations bénéficiaires. Mais avant d’en arriver là, quel

est l’état des projets de microcrédit dans les pays francophones en Afrique subsaharienne

en termes de moyen de bonification des activités lucratives des ménages bénéficiaires en

milieu rural d’une part et d’instrument de développement des activités économiques

agricoles et non agricoles en milieu rural d’autres part?

1.3.2.3 Le microcrédit dans le monde rural en Afrique francophone

subsaharienne

L’Afrique subsaharienne francophone compte au total dix-sept pays hormis les îles.

Nous avons le Bénin, le Burkina-Faso, la Côte d’Ivoire, la Guinée (la Guinée Conakry), le

Mali, le Niger, le Sénégal et le Togo en Afrique de l’Ouest et le Burundi, le Cameroun, la

Centrafrique, le Congo, le Djibouti, le Gabon, la République démocratique du Congo, le

Rwanda et le Tchad en Afrique centrale. Les données compilées dans le paragraphe suivant

font état de la situation du microcrédit dans les milieux ruraux de ces différents pays hormis

le Djibouti sur lequel nous n’avons trouvé que de la littérature grise et non scientifique.

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Les milieux ruraux en Afrique au sud du Sahara francophone regorgent beaucoup

d’individus dont l’activité principale reste l’agriculture. Sidibe (2011) montre que dans les

pays en voie de développement une grande partie des populations vivent dans les zones

rurales et sont engagées dans des activités agricoles. Il montre également à titre illustratif

qu’au Mali, au Burkina Faso et au Rwanda, plus de 80% de la population dépend

directement d’activités agricoles et que ce secteur contribue à plus de 40% de leur produit

intérieur brut (PIB) (Sidibe, 2011; Niyongabo, 2008). Dans la perspective de lutter contre la

pauvreté dans les pays en développement, plusieurs institutions de microfinance se sont

engagées à financer les activités des pauvres. Au sein de la microfinance africaine, ce sont

les réseaux mutualistes qui ont la plus forte contribution au financement de l’agriculture.

Les réseaux coopératifs et mutualistes de la confédération des institutions financières (CIF)

de l’Afrique de l’Ouest tels que Kafo Jiginew au Mali ont su offrir des services adaptés au

financement de l’agriculture (Lapenu, 2007 : 5).

Au Bénin, dans les documents de politique de crédit, les IMF énumèrent les divers

types de prêt qui sont proposés à leurs clients tels que le crédit à l’agriculture (intrants,

équipements agricoles, main d’œuvre), élevage, pêche, artisanat, service social ou urgence

(santé, éducation, mariage, naissance, funérailles), commerce, consommation (Sossa,

2011 : 18). L’auteur montre que les activités génératrices de revenus (commerce,

transformation de produits agricoles, spéculations sur les produits vivriers, production de

l’alcool) sont les seuls motifs du recours au crédit et bien que le prêt de la banque

communautaire ne semble pas être investi directement dans l’agriculture, les revenus

dégagés par les autres activités sont réinvestis dans l’agriculture (Ibid : 18; Leege, 1997,

cité par Sossa, 2011 :19). Doligez (2002) montre que la microfinance a des «effets

surfaces» sur les activités agricoles au Bénin, avec une augmentation du volume d’activités

commerciales, utilisation des excédents (dépenses familiales), investissement fractionné par

le court terme et financement de la traction animale (Doligez, 2002 : 791). L’auteur indique

également que différents effets ont pu être mis en évidence au niveau «méso-économique»

comme par exemple la filière coton au Bénin qui a été renforcée grâce au développement

des services financiers de la FECECAM. Ceci a permit aux agriculteurs d’embaucher dans

le Nord-Bénin une quantité importante de main d’œuvre (les Gourmantché, originaire du

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Burkina Faso) pour la préparation des cultures, du sarclage et de la récolte du coton (Ibid :

795-797).

Au Burkina Faso, Kaboré (2011) montre à travers une étude sur «L’effectivité d’un

crédit ciblé aux pauvres : le cas des microentreprises rurales du Burkina Faso» que la

majorité des microentreprises rurales (74,17%) évolue dans le secteur de la transformation,

10,9% dans le secteur des services, 8,01% dans l’artisanat et 6,92% dans le commerce

(Kaboré, 2011 : 221). Il indique par ailleurs que les filières de concentration des

microentreprises rurales sont l’apiculture, le karité, les céréales, les services, le néré-soja,

l’artisanat et l’anacarde et bien que les filières commerce et fruits et légumes sont, sans être

des secteurs de concentration, génèrent les marges moyennes par microentreprises rurales

les plus élevées (Ibid : 221). En outre, les cinq filières les plus rentables sont : l’huile de

palme, avec une marge de 3,1021 F CFA par franc CFA dépensé; la maçonnerie, avec une

marge de 1,9431 F CFA par franc CFA dépensé; l’artisanat, avec une marge de 1,9351 F

CFA par franc CFA dépensé; l’apiculture, avec une marge de 1,3585 F CFA par franc CFA

dépensé; les services, avec une marge de 0,8584 F CFA par franc CFA dépensé (Ibid :

224). Ceci amène Kaboré à conclure que les microentreprises rurales représentent un

potentiel important de réduction de la pauvreté rurale (Ibid : 229).

En Côte d’Ivoire, Olivier Koudou Zohoré (2009) indique lors d’une communication

que le microcrédit a entraîné une amélioration de la relation avec les fournisseurs et de

l’achat d’intrants dans la région sud-ouest de la Côte d’Ivoire (Zohoré, 2009 : 20). Selon

Mosher (1967), l’accès au crédit est un mode de financement qui constitue un accélérateur

du développement agricole et pour renchérir, Ellsasser (1993) montre comment l’accès à

des financements appropriés permet à des agriculteurs de sécuriser et de développer leurs

activités économiques (Mosher, 1967; Ellsasser, 1993, cité par Djato, 2001 : 92). En outre,

Djato (2001) montre que les paysans ayant accès au crédit n’ont pas la même efficacité

économique que ceux n’ayant pas accès au crédit et que cette différence d’efficacité

s’explique par une différence d’efficacité technique des deux groupes de paysans (Djato,

2001 : 99). Il indique par ailleurs que les paysans ayant accès au crédit semblent

techniquement plus performants car ils reçoivent des facteurs modernes de production

(semences améliorées, engrais, insecticides et herbicides) dont le paiement intervient au

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moment de la récolte et que ce résultat montre donc que le crédit est un stimulant important

(Ibid : 99). Pour renchérir cet état de chose, Soko (2009) montre que dans les zones rurales,

le crédit permet à des micros et petites entreprises exclusivement agricoles de renforcer des

activités secondaires ainsi que le développement de cultures maraîchères et fruitières dans

les zones forestières de même que l’élevage et la pisciculture dans les zones de savane.

L’auteur indique également que dans les zones rurales, les crédits permettent en moyenne

aux micros et petites entreprises, quand le foncier n’est pas saturé, un doublement des

surfaces comme c’est le cas en zone café/cacao où les crédits ont entrainé une augmentation

des surfaces pour la culture de riz au détriment du cacao et du café dont les prix ont

fortement chuté (Soko, 2009 : 215).

En Guinée forestière par exemple, le crédit de campagne permet d’acheter intrants

et main-d’œuvre pour les cultures annuelles de riz et d’arachide. Avec les suppléments de

récoltes, les petits planteurs améliorent non seulement la consommation familiale, mais

acquièrent également des plants de variétés améliorés et financent la main-d’œuvre pour

rénover leur caféière d’un quart d’hectare environ chaque année (Doligez, 2002 : 793). Il

montre que le crédit à moyen terme aurait permis de financer entre 60 et 80% des

équipements actuels de la traction animale et que ce lien peut s’observer en Guinée, dans le

cas de la filière riz où l’augmentation de la production locale, la dynamisation des circuits

commerciaux d’écoulement et de la diffusion des décortiqueuses et des étuveuses grâce au

crédit du CRG (Crédit Rural Guinéen) ont permis une substitution non négligeable des

importations et un effet prix pour les consommateurs (Ibid : 796). Par ailleurs, Lambert et

Condé (2002) montrent qu’en Guinée les commerçantes moyennes qui ont accès au crédit

rural solidaire et au crédit d’investissement continuent à participer à une tontine dont les

fonds leur permettent de faire des avances aux paysans en période de soudure. Quant aux

petites commerçantes, elles utilisent les fonds de la tontine pour rembourser le crédit rural

solidaire (Lambert et Condé, 2002 : 837). Ces auteurs montrent que le nombre de personnes

ayant recours aux tontines a augmenté et que cette hausse concerne surtout les agriculteurs

qui, grâce au crédit agricole solidaire du CRG, bénéficient d’une plus grande disponibilité

monétaire qu’ils ont pu engager dans les tontines (Ibid : 838-839).

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Au Niger, les IMF sont prudentes quant au financement de l’agriculture et des

organisations paysannes. Elles hésitent face au risque de l’agriculture, l’insuffisance de

ressources financières longues et stables limitent leur capacité à faire du crédit moyen

terme, l’un des principaux besoins de l’agriculture (Wampfler, 2005 : 2). Malgré cet état de

chose, Abdulsalam, Zakari et Abdou Y. Aboubacar (2010), ont montré dans une étude

réalisée sur « Yarda microcredit programme» dans la vallée Tarka au Niger que grâce à

cette institution financière, «It was found that 41,66% of respondents regard farming as

their major occupation; 25% of the respondents are engaged in petty trading; 16,67% are

engaged in the processing and sale of food; 5% are engaged in the processing of

agricultural products; while 11,67% of the respondents consider activities like butchery,

tailoring; currency exchange and dyeing as their major occupation» (Abdulsalam and

Abdou, 2010 : 2054). Les auteurs précisent que «The study revealed that majority of

respondents (66,6%) is engaged in farming and petty trading, which they combine with

other income generating activities such as livestock production». Nos auteurs tirent la

conclusion selon laquelle «Microcredit has introduced some major innovation in rural

finance approaches. The results of this study have demonstrated the major contributions of

«Yarda» microcredit programme to poverty reduction in the study area through increase in

income and diversification of income sources of beneficiaries as well as through the

improvement of health status and household food security of beneficiaries» (Ibid : 2055).

Au Mali, le taux de bancarisation en milieu rural est d’environ 5% et cet état de

chose s’explique par le caractère aléatoire de la rentabilité des activités agricoles ainsi que

par les coûts engendrés par la dispersion géographique de la clientèle rurale (Sidibe, 2011).

Alors que les premières institutions de microfinance se sont d’abord installées en milieu

rural, avant de s’étendre dans les zones urbaines comme l’illustre cette statistique de la

proportion de la clientèle de la microfinance, 62,9% soit 472219 bénéficiaires sont du

milieu rural, contre 37,2% du milieu urbain soit 279066 (Koloma, 2007 : 7). Il indique

également que les principales activités entreprises par les bénéficiaires des services

microfinanciers sont l’agriculture, notamment en milieu rural, la commercialisation

(commerce de gros et petit commerce), la production, l’artisanat et que la majeure partie de

ces activités se déroulent dans le secteur informel qui emploie près de 1,2 millions de

personnes (Ibid : 7).

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Au Sénégal, le microcrédit en milieu rural a permis aux bénéficiaires d’entreprendre

des activités génératrices de revenus et de développer leur potentiel économique à travers

plusieurs activités. Isabelle Guérin (2002), montre que les activités génératrices de revenus

sont étroitement liées au contexte local (productions locales et degré d’enclavement) et que

les produits les plus courants sont l’arachide et le mil (transformés ou non), les produits

maraîchers (vendus surtout en ville), le bois mort et les produits alimentaires divers

(Guérin, 2002 : 821). Pour renchérir, Donna Perry (2002), à travers une étude menée dans

le Sénégal rural découvre ce qui suit : « I discovered that many female members opt not to

invest their loans in artisanal activity or petty trade but to invest in moneylending. They

recycle their capital as high-interest loans to other farmers (The poorest farmers who are

effectively excluded from microcredit programs), becoming cash patrons to their kin and

neighbors» (Perry, 2002 : 31). En plus de cette activité de «moneylending» les femmes sont

engagées dans d’autres activités avec le microcrédit comme l’indique l’auteur ici : « In

addition to moneylending, women’s most popular economic activity is animal fattening.

Other common strategies are the selling of household provisions and cooking ingredients,

grain bulking, rice threshing, peanut-oil pressing, and selling snacks» (Ibid : 35).

Au Togo, le microcrédit a influencé les activités des petites entreprises. Selon une

étude menée par Kodjo Abalo (2007), le microcrédit a un impact sur les activités des

microentreprises et que cet impact est mesuré par le volume de production, la

diversification de la production, le volume des ventes, la compétitivité et la rentabilité des

activités ainsi que l’utilisation de la main d’œuvre, la réduction du temps de travail, la

trésorerie. Il indique donc que, dans la proportion des entrepreneurs qui ont bénéficié du

crédit, 85% déclarent que le crédit leur a permis d’augmenter leur volume de production, le

crédit a permis à 71,4% des entrepreneurs d’augmenter leur chiffre d’affaires et aussi, les

résultats montrent que l’accès au crédit a contribué à l’amélioration de la rentabilité et de la

compétitivité pour 64,2% des microentreprises (Abalo, 2007 : 10-11). S’agissant du

domaine de l’agriculture, le rapport FENU/PNUD 2007 indique que les agriculteurs et

éleveurs ont unanimement déclaré que grâce au microcrédit, leurs activités sont rentables

alors que les praticiens de la microfinance sont réticents à financer l’agriculture à cause des

risques liés à ce secteur d’activité. Le rapport montre que les agriculteurs utilisent

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généralement une partie du crédit pour acheter l’engrais et pensent que l’engrais qu’ils

utilisent permet de doubler leur production (FENU/PNUD, 2006 : 29-30). Le rapport

indique aussi qu’au moins 44% des clients des IMF ont diversifié leurs activités après avoir

bénéficié d’un certain nombre de crédit (ibid : 44).

Au Burundi en Afrique centrale, le secteur agricole constitue un élément important

pour l’économie du pays. Les statistiques du Ministère de l’agriculture et de l’élevage

(MINAGRI, 2006) montrent une forte dépendance de l’économie burundaise à l’égard du

secteur agricole et rural qui abrite 91 pour cent de la population, procure plus de 90 pour

cent des emplois, contribue pour plus de 50 pour cent au PIB (produit intérieur brut),

fournit 95 pour cent de l’offre alimentaire et plus de 95 pour cent des recettes d’exportation

(Niyongabo, 2008 : 4). Cependant, l’auteur indique qu’il y a une inadéquation entre la

gamme des services financiers offerts par les IMF et les besoins spécifiques du financement

agricole et rural (Ibid : 1). Ndimubandi (2010) montre que le «warrantage» est une nouvelle

alternative qui permet aux producteurs d’accéder au financement sans brader la récolte. Il

permet d’auto-garantir le crédit ; profiter de l’augmentation des prix des produits ; acquérir

des intrants sans altérer le maigre budget du ménage ; valoriser l’utilisation des intrants ;

créer une demande groupée, solvable et prévisible en intrants (Ndimubandi, 2010 : 6-7).

L’auteur indique au terme de son étude que le système de «warrantage» est considéré de

nos jours comme un des moyens permettant, aux petits producteurs agricoles, de sortir du

cercle vicieux de la pauvreté et que l’application de ce système sur la culture du riz a

permis aux riziculteurs de ne plus faire recours aux commerçants usuriers qui leur

donnaient des crédits agricoles à rembourser après la récolte avec un taux d’intérêt allant

souvent à plus de 200% (Ibid : 13).

Au Cameroun, Tchakounté (2008) montre que l’émergence des établissements de

microfinance dans la plupart des pays sous-développés et en particulier au Cameroun

favorise un accès plus large au crédit pouvant permettre une meilleure accessibilité des

ruraux aux services financiers (Tchakounté, 2008 : 4). L’auteur indique que le caractère du

crédit pratiqué par les établissements financiers semi formels ou établissements de

microfinance au Cameroun est double : (1) les crédits productifs repartis principalement

entre l’agriculture et le commerce 18%; (2) les crédits non directement productifs répartis

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entre l’éducation, la santé et les investissements non productifs 67% et 15% au divers

(Ibid : 4). Lekane (2003) à travers une étude menée au Cameroun «Mutuelle

communautaire de croissance (MC2) et de développement rural à Baham», montre que les

crédits consentis au secteur agro-pastoral par la MC2 ont permis la réalisation de nombreux

projets qui, avec l’appui de la ferme école, ont transformé à la fois le cadre et le niveau de

vie des mutualistes, et le paysage rural et que l’agriculture spéculative portant sur les

produits maraîchers et les vivriers s’est développée, entraînant la mise en culture de toutes

les surfaces disponibles, dont les versants et les talwegs des vallées (Lekane, 2003 : 8).

L’auteur indique aussi que des exploitations de plusieurs hectares emploient des techniques

modernes de mise en valeur et que leurs propriétaires construisent des magasins de

stockage, mais aussi des logements pour les ouvriers salariés auxquels ils font appel (Ibid :

8). Par ailleurs, l’auteur montre qu’il s’agisse des produits de l’agriculture ou de ceux de

l’élevage, Baham est ainsi passé, en l’espace de huit ans, du statut de Zone consommatrice

à celui de zone productrice et qu’à l’heure actuelle, ce village contribue à approvisionner

les villes de Douala et de Yaoundé en produits agro-pastoraux tels que tomates, choux,

bananes plantains, condiments, porcs, lapins, poulets, œufs (Ibid : 8). Ceci a donc amélioré

le niveau et le cadre de vie des bénéficiaires du crédit de cette mutuelle (MC2). De plus en

plus, les mutualistes abandonnent les cases en briques de terre et à toit de chaume, le

mobilier en bambou et les matelas en paille au profit de maisons en dur ou semi-dur, plus

vastes (jusqu’à 5 à 6 pièces) avec un mobilier moderne et un confort qui rompt avec la

pauvreté des anciens logements (Ibid : 8).

En Centrafrique, bien que les études sur la microfinance sont rares, une étude de

Ndongo (2012) portant sur certains pays de l’Afrique centrale dont la Centrafrique

(Cameroun, Congo, Gabon, Guinée Équatoriale et le Tchad), montre que les crédits

octroyés aux populations ont été utilisés à bon escient «Credits were used to increase the

equipments of the enterprise, to renew stocks, to create new productive units, and above all,

to ensure current expenditures which are unavoidable and of great use» (Ndongo, 2012 :

105). L’auteur indique par ailleurs que les crédits ont été d’une grande importance pour le

développement des activités agricoles «It is mainly the operators (promoters) of the

primary sector who are concerned with the growth in equipments, to cultivate their cassava,

banana, yams, coco yams, etc., farms. Indeed, sellers of agricultural products (members of

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the female saving funds or credits), are generally owners of agricultural outfits (cassava,

maize or vegetable farms) (Ibid : 105). Il conclut en montrant que «It is sufficient to

mention here that the main part of the revenue induced by credits (more than 50%), is

allocated to survival expenses, notably, food, medicines, aid to families (Ibid : 107).

Au Congo, la mutuelle congolaise d’épargne et de crédit (MUCODEC) est l’une des

IMF qui finance le secteur primaire. Des activités primaires (la pêche, l’agriculture,

l’élevage, la chasse et l’exploitation forestière), seules celles de l’agriculture ont bénéficié

du financement de la MUCODEC à hauteur de 193.825.672 FCFA (environ 430723, 716

dollars canadiens) pour 267 sociétaires en 2003 (Akiana Mfere, 2009 : 7). L’auteur montre

par ailleurs que parmi les activités financées par les IMF, le commerce est celui privilégie

par certaines IMF (FIDEC : financière du développement du Congo) et que ce choix

s’explique par le fait que les activités commerciales ont des délais de récupération très

courts et renferment des risques assez moindres comparativement aux autres secteurs

d’activités (Ibid : 8). Selon Itoua (2008), les microcrédits favorisent les activités de

production (ou parfois des activités mixtes de productions ou de consommation) des

ménages ou de petites et microentreprises (Itoua, 2008 : 27). Il indique aussi que la

tendance dans les MUCODEC est à la réorientation des crédits vers la consommation entre

60,72% en 2005, 10 à 20,5% pour l’habitat et que la part réservée aux crédits productifs

(l’agriculture et l’élevage, voire l’artisanat) et commerciaux tend à baisser (Ibid : 8). Une

étude menée par Defoundoux-Fila (2003) sur un échantillon de 108 bénéficiaires montre

que les bénéficiaires ont étendu leur fonds de commerce en devenant importatrices de

produits en provenance de la de la République démocratique du Congo, ou en se situant à

un autre niveau de la chaîne de distribution des produits locaux qu’elles vendaient jusque-là

(Defoundoux-Fila, 2003 cité par Itoua, 2008 : 10).

Au Gabon, l’avènement de la microfinance a permis aux femmes de bénéficier

d’une ressource financière jusque-là inaccessible pour la majorité et cette entrée dans le

système de microfinance leur a donné droit à l’ouverture d’un compte (Kacou-Amondji,

2011 : 98). L’auteur montre que les femmes de Tchibanga sont engagées dans des activités

de maraîchage, de petit commerce, notamment la vente d’aliments et que le crédit a permis

à certaines d’entre elles d’agrandir leurs commerces et d’économiser de l’argent dans un

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compte. Il indique qu’il y a des exemples de réussite avec les prêts de microcrédit car l’une

des femmes actives dans le maraîchage a affirmé que ses activités étaient prospères, ce qui

lui a permis d’acheter un tracteur pour le développement de ses activités (Ibid : 91).

En République Démocratique du Congo, Mpanzu Balomba (2004-2005) montre que

le microcrédit a permis aux maraîchers de N’djili à Kinshasa d’augmenter leurs niveaux de

production et d’investir dans d’autres activités tels que l’élevage et le petit commerce.

L’auteur montre par ailleurs une diversification des activités des bénéficiaires du

microcrédit à tel enseigne que les fonds utilisés pour rembourser ne proviennent pas de

l’activité première ou principale qui a fait l’objet d’obtention du crédit (Balomba, 2004-

2005 : 42). Il indique pour finir que les postes de dépense les plus importants pour les

bénéficiaires de crédit sont les frais de scolarisation de leurs enfants ou parents,

l’alimentation, le remboursement du crédit, les soins médicaux et le logement (Ibid : 45).

Tambwe (2010) s’inscrit dans la même perspective que l’auteur précédent et montre à

travers une étude réalisée à Goma (au Nord-kivu) que les femmes bénéficiaires du

microcrédit sont engagées dans la vente des denrées alimentaires (produits laitiers, les

poissons salés) et que les profits générés par ces activités servent à l’achat de la nourriture

pour toute la famille. L’auteur indique par ailleurs que grâce aux activités génératrices de

revenus, les femmes cotisent pour acheter des parcelles de terrain afin de construire un jour

leur propre maison.

Au Rwanda, Ngabonzima (2009) montre que l’accès aux crédits de la microfinance

a procuré aux femmes les capacités de créer de nouveaux projets ou d’améliorer les

commerces qu’elles détenaient au moment de leur adhésion à la microfinance. L’auteur

montre aussi que les prêts accordés aux femmes par la microfinance font évoluer leurs

activités commerciales et qu’elles sont passées du commerce ambulant au commerce stable

dans les boutiques ou les petits magasins (Ngabonzima, 2009 : 103).

Au Tchad, les analyses d’impact montrent que les IMF rurales financent

spontanément le développement d’activités telles que le commerce, l’artisanat, la

transformation agroalimentaire et que ces activités génèrent des revenus réguliers,

relativement sûrs, avec des cycles de rotation du capital rapide limitant les risques et

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permettant des taux de rentabilité élevés (Narem, 2009 : 1). À travers une étude menée sur

le projet d’appui à la réduction de la pauvreté et de l’insécurité alimentaire, l’auteur montre

que les principales activités auxquelles les paysans se sont adonnés après l’obtention de ce

crédit restent le petit élevage, le maraîchage, la commercialisation et la transformation de

produits agricoles (Ibid : 2). Il montre que sur les quarante femmes enquêtées (bénéficiant

du projet), 10% ont utilisé le crédit pour la fabrication et la commercialisation de la bière

locale (bili bili). Le crédit leur a permis d’acheter les équipements (marmites) nécessaires à

la préparation de bière locale et que deux bénéficiaires ont respectivement grâce aux

bénéfices engendrés par leurs activités construire deux chambres et payé un terrain (Ibid :

3). Comme pour renchérir, Laring Baou (2009-2010) montre que les micros entrepreneurs

rencontrés dans le cadre de la rédaction de son mémoire ont déclaré avoir exercé dans les

secteurs de l’agriculture, l’élevage, le commerce, l’artisanat, la pêche etc. les crédits reçus.

L’auteur indique que la plupart de ces micros entrepreneurs ont demandé des crédits pour

développer leurs activités existantes (66,51%), un nombre relativement important,

(19,70%) pour répondre aux besoins sociaux et une petite partie (2,46%) pour créer une

nouvelle activité (Laring Baou, 2009-2010 : 58).

1.3.2.4 Synthèse

D’après tout ce qui précède, nous constatons que la présence des IMF dans les zones

rurales en Afrique centrale et de l’Ouest est relativement effective. Ces IMF octroient des

crédits aux populations pour qu’elles entreprennent différentes activités dont l’agriculture.

Mais ce que nous remarquons dans tous ces pays est que les crédits octroyés pour le

financement de l’agriculture par les IMF sont minimes et les IMF qui financent

l’agriculture ne sont pas aussi nombreuses que celles qui financent les activités

commerciales et ou de transformation des produits agricoles (les activités rurales) alors que

plus de 80% de la population dépend directement d’activités agricoles (Sidibé, 2011 ;

Niyongabo, 2008).

L’autre phénomène observé est lié à l’importance accordée par les IMF aux activités

de commerce et de transformation agricole. Nous constatons que la plupart des IMF

accordent des crédits aux activités susceptibles de faire générer de profits aux bénéficiaires

du crédit pour une période courte comparativement aux activités agricoles qui nécessitent

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un délai donné avant de générer du profit. Par ailleurs, si on se met à l’écoute des usagers,

on entend quasiment toujours la même plainte adressée aux institutions de microfinance –

IMF- à propos des crédits proposés : trop courts, trop chers, trop faibles (SOS FAIM,

2006 : 2). Les bénéficiaires du crédit préfèrent alors investir dans les activités rurales

contrairement aux activités agricoles. Ceci s’explique, selon Wampfler (2000), par le fait

que les emprunteurs ruraux, même agriculteurs, marquent souvent une préférence pour

l’investissement dans les activités rurales plutôt qu’agricoles et que d’autre part, les IMF se

montrent prudentes à l’égard de ce type de financement (Wampfler, 2000 : 2).

Par ailleurs, nous remarquons une amélioration des conditions de production dans

tous les pays où les IMF ont accordé des crédits aux agriculteurs. Il s’agit de l’achat des

semences, de l’intrant et des équipements agricoles pour la pratique de l’agriculture. Ce qui

a entraîné une amélioration des conditions de vie de ces agriculteurs suite à la prospérité de

leurs activités agricoles qui a du coup boosté leurs revenus. Mais les IMF qui pratiquent le

financement de l’agriculture (les réseaux coopératifs et mutualistes de crédits) sont moins

nombreuses comparativement aux IMF de crédit directe alors que, ce sont les réseaux

coopératifs et ou mutualistes qui consacrent la plus grande partie de leur budget à

l’agriculture. Comme l’indique Wampfler (2000), l’analyse chiffrée met en évidence la

contribution écrasante des systèmes mutualistes (99% des volumes de la contribution des

IMF à l’agriculture au Bénin, plus de 90% en Côte d’Ivoire, plus de 75% au Mali…). Seul

le Niger déroge à ce constat avec une contribution des mutuelles de 26% seulement et une

part prépondérante des projets de crédit (Ibid : 4). L’auteur indique aussi que les IMF

construites sur de crédit de très court terme (les ASF par exemple), de très faibles montants

(crédit direct type Grameen Bank), ou ciblées spécifiquement sur les femmes, ont une

contribution plus limitée à l’agriculture (Ibid : 5).

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1.4 Objectifs de recherche

1.4.1 Objectif général

Il s’agit pour nous d’analyser les conditions d’octroi des prêts de microcrédit aux

femmes, les retombées de ces prêts sur ces femmes ainsi que le lien entre le microcrédit et

les activités agricoles.

1.4.2 Objectifs spécifiques

1.4.2.1 Objectif spécifique1

Étudier les modalités d’octroi des prêts de microcrédit ainsi que les taux d’intérêt qui sont

appliqués.

1.4.2.2 Objectif spécifique2

Évaluer la capacité d’autonomie financière des femmes au moment de l’obtention des prêts

de microcrédit.

1.4.2.3 Objectif spécifique3

Analyser les conditions économiques et sociales des femmes après l’obtention des prêts de

microcrédit.

1.4.2.4 Objectif spécifique4

Analyser le lien entre le microcrédit et les activités agricoles en milieu rural.

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1.5 Justification du champ d’étude

La propagation des projets de microcrédit dans les pays en développement et plus

précisément au Bénin est une réalité depuis l’avènement de la banque Grameen et aussi,

grâce aux politiques de développement adoptées par les institutions de Bretton Woods pour

les pays en développement à partir des années 1990. Nous avons choisi la République du

Bénin dans la réalisation de cette étude pour plusieurs raisons.

Premièrement, le Bénin est un pays de l’Afrique de l’Ouest où le secteur de la

microfinance est animé par une multitude d’institutions de microfinance (voire tableau 2 en

annexes). Deuxièmement, l’actuel gouvernement a créé un Fonds national de microcrédit

(FNM) en 2007 qui, à travers son Programme de microcrédit aux plus pauvres (PMCPP)

octroie des prêts allant de 25000 à 50000 CFA aux femmes dans le but de lutter contre la

pauvreté. Cette implication de l’État béninois dans l’amélioration des conditions de vie des

populations à travers le microcrédit où le président de la république se déplace lui-même

pour aller rencontrer les bénéficiaires du microcrédit, même dans les milieux ruraux, ainsi

que l’engouement que les femmes des villages ont pour ces prêts de microcrédit nous ont

poussé à choisir le Bénin comme lieu d’étude. Il est sans doute que les IMF qui prêtent de

l’argent pour l’agriculture (FECECAM, PADME, etc.) existent en nombre limité mais

l’engouement des femmes (rurales ou urbaines) à prendre le crédit du PMCPP est

remarquable.

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Chapitre 2: Cadre méthodologique

2.1 Nature de l’étude

«Aucun travail "scientifique" ne peut aboutir si l'homme de "métier" n'a acquis

aucune méthode. Il faut une méthode pour assimiler les théories, une méthode pour aller sur

le terrain. Les deux vont de pair» (Claude, Assaba 2002 : 3). En sciences sociales et

humaines, il est possible de conjuguer plusieurs approches méthodologiques, mais la

prédominance de l'une sur l'autre est déterminée par la nature de l'étude. Il s’agit ici d’une

analyse qualitative de contenu dans une approche secondaire déterminée par des données de

secondes mains auxquelles nous avons recouru. Cette démarche dérive de l'orientation

méthodologique de l'objet de notre étude. L’analyse de contenu (de type thématique) dont

nous avons fait usage pour analyser nos données secondaires est une «méthode de

classification ou de codification dans diverses catégories des éléments du document analysé

pour en faire ressortir les caractéristiques afin de mieux comprendre le sens exact et précis»

(L’écuyer dans Deslauriers, 1987 : 50). Cette méthode vise à découvrir la signification du

message étudié, que ce message soit un poème, un discours, un récit de vie, un article de

journal, un écrit scientifique, un roman, un rapport verbal ou un écrit relatif à une

expérience intérieure, un film une affiche etc. (L’écuyer dans Deslauriers, 1987 : 50). Cette

analyse thématique nous a permis de dégager des «thèmes» ou des «unités thématiques»

qui sont considérées comme des principaux axes autour desquels notre analyse est centrée.

Les unités thématiques sont définies par Landry (2002), comme étant «des noyaux de sens

dont la présence ou la fréquence permettront de faire des inférences» (Landry, 2002, cité

par Ngabonzima, 2009 : 58). Notons également que la recherche fondée sur l’analyse

secondaire se distingue de celle axée sur l’analyse primaire par le fait que l’analyste est

entièrement dégagé de la responsabilité de la collecte des données (mais non de celle de

s’assurer de leur validité). Elle doit plutôt se concentrer sur la conceptualisation et l’analyse

(J. Turgeon et J. Bernatchez, in Benoit Gauthier, 2009 : 490). Dans la perspective d'une

observation indirecte, cette méthode nous a permis d'enquêter sur une gamme variée de

documents à savoir : des rapports d’évaluation d’impacts des projets de microcrédit sur les

bénéficiaires ainsi que quelques mémoires de maîtrise en sociologie et en science

économique abordant ces questions.

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Les raisons du choix de cette méthode sont multiples. Premièrement, nous avions

constaté l'existence de plusieurs documents portant sur l'impact des projets de microcrédit

sur les bénéficiaires au Bénin. Deuxièmement, cette méthode a l’avantage de permettre la

vérification des conclusions d’autres chercheurs et présente également l’immense avantage

d’être accessible à peu (ou pas) de frais pour l’analyste (J. Turgeon et J. Bernatchez, in

Benoit Gauthier, 2009 : 492-493). Enfin, les données secondaires permettent un retour sur

le passé et d’analyser le changement à partir d’indicateurs prélevés en temps réel. Le

recours à des sources secondaires diverses permet également au chercheur de constituer des

séries chronologiques représentant, des éléments de preuve plus solides que des

démonstrations isolées et synchroniques (J. Turgeon et J. Bernatchez, in Benoit Gauthier,

2009 : 494). Telles sont les justifications qui nous ont mené à analyser des rapports

d'évaluation d'impact des projets de microcrédit ainsi que des mémoires de maîtrise portant

sur le sujet en lieu et place de la collecte de données primaires.

2.2 Durée de l’étude

Cette étude a véritablement commencé en Août 2011 et s’est déroulée jusqu’à la fin

du mois de juillet 2012. La revue de littérature s’est déroulée du début jusqu’à la fin de

l’étude. Nous nous sommes rendus au Bénin du 19 août au 18 septembre pour prendre

connaissance des documents devant servir à l’analyse secondaire. Les mois d’octobre,

novembre et décembre 2011 ont servi à l’analyse des documents obtenus et à la rédaction

du mémoire. Le premier dépôt a été effectué en janvier 2012.

2.3 Les sources bibliographiques du cadre théorique de la recherche

A cet égard, nos efforts ont consisté à faire le point des ouvrages et articles sur le

microcrédit et son impact sur les populations bénéficiaires ainsi que les rapports

d’évaluation d’impact des projets de microcrédit sur les bénéficiaires et également les

mémoires de maîtrise. Cette recherche documentaire nous a conduit à la bibliothèque de

l’Université Laval où différents articles et ouvrages ont été consultés.

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Au Bénin, les centres de documentation de l’université d’Abomey-Calavi (centre

de documentation de la Faculté des lettres, arts et sciences humaines «FLASH» et le centre

de documentation de la Faculté des sciences économiques et de gestion «FASEG») nous

ont permis de consulter plusieurs mémoires de maîtrise.

Des rapports d’évaluation d’impact des projets de microcrédit ainsi que des revues

portant sur le sujet ont été consultés au siège du Fonds national de la microfinance et du

Programme d’appui au secteur de la microfinance (PASMIF).

2.4 Technique de collecte et analyse des données sur la microfinance au

Bénin

2.4.1 Collecte des données

Notre analyse secondaire a porté sur différents rapports d’évaluation d’impacts des

projets de microcrédit élaborés par la cellule de la microfinance et le Fonds national de la

microfinance (FNM) en collaboration avec le ministère de la microfinance (MMEJF) au

Bénin. Nous avons analysé au total deux rapports d’évaluation d’impact des projets de

microcrédit (les seuls disponibles au FNM). De récents et anciens mémoires de maîtrise au

Département de sociologie anthropologie à l’Université d’Abomey-Calavi et au

Département des sciences économiques ont été analysés ainsi qu’un mémoire de fin de

cycle de l’Institut panafricain pour le développement «Afrique de l’Ouest Sahel» (IPD-

AOS). Ces mémoires de maîtrise traitent de l’impact des projets de microcrédit sur les

bénéficiaires dans différentes régions du Bénin. Ils ont été sélectionnés suivant la technique

de l’échantillonnage «au jugé» compte tenu d’une multitude de mémoires portant sur le

sujet de notre recherche. Cette technique d’échantillonnage nous a permis de sélectionner

les mémoires de maîtrise dont les objectifs de recherche portent sur l’impact des projets de

microcrédit sur les bénéficiaires.

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2.4.2 Analyse des données

Nous avons utilisé les six critères d’évaluation des données secondaires décrits par

J. Turgeon et J. Bernatchez (2009) à savoir : le but de la collecte primaire, le responsable de

la collecte, l’information qui a été recueillie, quand elle a été recueillie, comment elle a été

obtenue et sa corroboration de par d’autres sources. Celles-ci ont présidé à l’analyse des

éléments de notre base de données soit les mémoires et les rapports déposés à l'université

d'Abomey-Calavi et au ministère de la microfinance. Tout ceci nous a permis de rester dans

l'objectivité qui caractérise les recherches en sciences sociales et humaines. Nous avons

donc, dans un premier temps, procédé à la détermination des objectifs de réalisation des

différents mémoires et rapports. Dans un deuxième temps, nous avons procédé à

l’identification des responsables de ces différents documents pour vérifier la pertinence et

la qualité du travail. Ensuite, nous nous sommes penchés plus particulièrement sur

l’information recueillie, notamment en ce qui a trait à la période à laquelle elle a été

recueillie et aux méthodes qui ont présidé à sa récolte. Enfin, nous avons comparé les

résultats des différents documents afin de déterminer les principaux axes de leur inter-

correspondance. L’interprétation des données colligées s’est voulue simple mais

rigoureuse.

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2.4.3 Cadre d’interprétation

L’interprétation des résultats relatifs aux conditions d’octroi de microcrédit ainsi

que ces retombées possibles s’est faite à l’aide d’une grille d’interprétation construite de la

manière suivante.

Tableau1 : grille d’interprétation qualitative des conditions d’octroi des prêts de microcrédit

et ces retombées sur les bénéficiaires.

Qu’est-ce qui est offert? Les produits financiers mis à la disposition

des populations

Combien (argent) et comment rembourser? Les montants accordés et les modalités de

remboursement

À qui les montants sont accordés? Des femmes extrêmement pauvres avec un

bas niveau intellectuel

Pour quelles activités? Toutes activités génératrices de revenus

Comment vivaient ces populations? Les conditions économiques et sociales au

moment de l’obtention du crédit

Comment vivent-elles aujourd’hui?

Les conditions économiques et sociales

après l’obtention du crédit

Y a-t-il un lien entre le microcrédit et les

activités rurales?

Le microcrédit et le secteur de l’agriculture

Réalisation: Joanès Hippolyte Sylli 2012.

L’interprétation des résultats s’est faite suivant les six principaux axes indiqués dans

le tableau ci-dessus. Ces six principaux axes ont été dégagés à partir de l’inter-

correspondance des données des différents documents étudiés.

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2.5 Présentation du cadre de l’étude

La présente partie esquisse le cadre de l’étude, l’accent étant mis pour l’instant sur

la situation géographique du Bénin, son organisation administrative, sa population et ses

activités économiques.

Le Bénin est un pays de l’Afrique de l’Ouest. Situé dans la zone tropicale entre

l’équateur et le tropique du Cancer, il est limité au Nord par le fleuve Niger, au Nord-Ouest

par le Burkina-Faso, à l’Ouest par le Togo, à l’Est par le Nigeria et au Sud par l’Océan

Atlantique (Cf. carte n01). Il couvre une superficie de 114 763 km

2 selon le recensement

général de la population et de l’habitat 2002 (RGPH-3) (INSAE, 2002). (Cf. carte n02).

Le Bénin compte 12 départements subdivisés en 77 communes (Cf. carte n03). Il a

pour capitale Porto-Novo tandis que la ville de Cotonou constitue le pôle économique le

plus important.

La population béninoise, selon le dernier recensement général de la population et de

l’habitat (RGPH-3), est de 6 769 914 habitants dont 3 284 119 hommes et 3 485 795

femmes : soit 48,5% pour les hommes, 51,5% pour les femmes. La population urbaine est

de 38,9% et celle du monde rural 61,1%. Selon les estimations effectuées par Perspective

monde sur les données officielles de 2006 (7 871 707), 2007 (8 112 573), 2008 (8 355 980),

2009 (8 601 771), 2010 (8 849 892) suivant un modèle de régression linéaire simple, la

population du Bénin serait autour de 9 096 460 en 2011 (www.perspective.usherbrooke.ca,

2012). La population est composée d’un peu plus de 50 ethnies dont les Fon, Yoruba, Adja,

Gen, Waci, Weme, Dendi, Baatombu, Peuhls, Betammaribe, Waaba, Ayizo, Idaasha, Maxi,

Gun, Lekpa, Natemba, Yowa, Anii, Berba, Shabe, Foodo, Gulmanceba, etc. Le français est

la langue officielle chapeautant 52 langues nationales. La densité de la population est de

62,3 habitants par km2 en 2004 et le taux de croissance démographique (1992-2002) est de

3,2% (source : RGPH-3).

Les activités économiques du Bénin se répartissent en trois secteurs à savoir : le

secteur primaire, le secteur secondaire et le secteur tertiaire. Le secteur primaire au Bénin

est caractérisé par l’agriculture qui constitue la base de l’économie béninoise et compte

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pour 40% du Produit Intérieur Brut (PIB). Il s’agit d’une agriculture extensive à production

essentiellement vivrière et pratiquée par 80% de la population active qui s’adonne à la

culture du maïs, du manioc, du haricot, de l’igname, du sorgho (CREDAF, 2008). Nous

notons également la production du palmier à huile, de l’arachide et du coton comme

produits d’exportation. Le coton représente 80% des exportations (CREDAF, 2008). Entre

autres produits, nous avons l’ananas, le riz etc. La production animale concerne les ovins,

caprins, bovins, volailles et porcins; et la production halieutique. Le secteur secondaire est

caractérisé par une industrie embryonnaire. La cimenterie, la minoterie, le textile et les

transformations alimentaires dominent ce secteur handicapé par les aléas climatiques,

énergétiques et conjoncturels du marché international. De nombreux gisements inexploités

existent au nombre desquels on peut citer les gisements de fer de Lomboulombou, l’or de

Perma, les phosphates du Mekrou, etc. Le secteur tertiaire est dominé par le commerce et

les activités de transport. Une situation géographique exceptionnelle fait de Cotonou la

capitale économique du Bénin un port à vocation régionale. Le port de Cotonou offre une

plate-forme de transit portuaire et ferroviaire de dimension internationale pour les pays

enclavés (le Niger, le Mali et le Burkina-Faso). Le trafic dans ce port a atteint en 1998, 2,22

millions de tonnes. Le commerce en 1998 est marqué par un fort échange de produits

vivriers à l’intérieur du pays, par une importation des produits manufacturés pour un total

de 576 millions d’euros (CREDAF, 2008). Toutes ces potentialités que regorge le Bénin

devraient permettre aux bénéficiaires de microcrédit de développer leurs activités et d’en

tirer énormément profit.

Malgré ces atouts, le produit intérieur brut (PIB) par habitant en 2004 est de

300 023 F CFA (457,38 Euros ou 600 dollars américains). Les indicateurs sociaux montrent

que l’espérance de vie est de 59,2 ans (RGPH, 2002). La population sous le seuil de la

pauvreté en 2002 est de 28% et l’indicateur de développement humain (IDH) est de 0,431

en 2003 avec un classement de 162 sur 177. C’est un pays à faible niveau de

développement humain. Il compte parmi les pays pauvres avec une incidence estimée des

plus pauvres à 41,6% en 2007 contre 36,0% en 2006 (INSAE, 2007, cité par Acclassato,

2010 : 32). Cette pauvreté croissante a amené le gouvernement béninois à créer par décret

le fonds national de microfinance (FNM) le 26 juin 2006 et le rôle primordial joué par le

financement dont sont privées les populations à faible revenu, néanmoins dotés d’un

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potentiel économique important justifie cette décision (Acclassato, 2010 : 32). Les

statistiques actuelles indiquent que le PIB par habitant au Bénin en 2011 est de 1500 dollars

américains (www.indexmundi.com). La population sous le seuil de la pauvreté en 2010 est

de 33,3% (UNDP, 2010). L’IDH est de 0,42 en 2010 (www.perspective.usherbrook.ca), ce

qui classe le Bénin en 134e sur 169 pays en 2010 (www.csfdd.org).

2.6 Les difficultés rencontrées

Les principales difficultés rencontrées sont les suivantes :

- La rareté des rapports d’évaluation d’impacts des projets de microcrédit sur les

populations bénéficiaires au Fonds national de la microfinance du Bénin ;

- L’impossibilité de faire la photocopie du seul rapport disponible ;

- L’impossibilité d’avoir accès au centre de documentation du Fond national de la

microfinance pour consulter les documents qui y sont ;

- La fermeture du centre de documentation de la Faculté des sciences

économiques et de gestion (FASEG) en raison de l’indisponibilité de la

secrétaire ;

Néanmoins notre étude a été menée en dépit de ces difficultés et la documentation

nécessaire pour la réalisation de notre travail a pu être finalement colligée.

2.7 Limites méthodologiques

Notre analyse des conditions d’octroi des prêts de microcrédit et son impact sur les

bénéficiaires au Bénin, serait plus intéressante si nous avons effectué une enquête

participative. Cela nous aurait permis d’entrer en contact avec les bénéficiaires et d’obtenir

de plus amples information à l’aide d’un guide d’entretien ou d’un questionnaire sur leur

condition économique et sociale. Rappelons, à toutes fins utiles, que nous avons eu recours

à une base de données secondaires alors qu’une enquête participative nous rapprocherait

plus du vécu quotidien des bénéficiaires de microcrédit. Néanmoins, les objectifs de notre

étude ont été atteints.

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55

Chapitre : 3 Mise en œuvre des projets de microcrédit au Bénin

3.1 Historique des projets de microcrédit au Bénin

Le microcrédit est une pratique qui a vu le jour depuis des temps immémoriaux tant

dans les pays du Nord que dans les pays du Sud. Il s’agissait traditionnellement de petits

prêts à taux d’intérêts élevés octroyés par les marchands à ceux qui ont des difficultés à

joindre les deux bouts du mois. Si, la pratique de la microfinance fait désormais partie de

l’arsenal des politiques des institutions internationales (Banque mondiale, Fonds monétaire

international) dans le cadre notamment du macro-programme de lutte contre la pauvreté et

des objectifs du Millénaire, il ne faut pas oublier que ces politiques s’inspiraient au départ

du succès qu’a connu la Banque Grameen au Bangladesh.

3.2 Historique du microcrédit en Afrique de l’Ouest

Le microcrédit en Afrique de l’Ouest ne date pas d’aujourd’hui. Il existait déjà en

Afrique et plus précisément en Afrique noire des coopératives d’épargne et de crédit

(COOPEC). Selon Alpha Ouédraogo et Dominique Gentil (2008), l’histoire de la

microfinance est déjà ancienne. Elle est née bien avant la banque Grameen (1983) et sa

forte médiatisation. Par exemple, pour l’Afrique, la caution solidaire d’emprunteurs a été

expérimentée dès 1956 au Cameroun, et les premières coopératives d’épargne et crédit

(credit unions) ont été créées au Ghana dès 1956 (Alpha Ouédraogo et al. 2008 : 8).

Dans la sous-région Ouest-africaine, il existait des groupements de producteurs qui

se réunissaient en coopérative et bénéficiaient d’un crédit. Nous pouvons citer, entre autres,

la «COOPEC» de Fakéna en 1969 et qui est devenue en 1996 l’Union des caisses d’épargne

et de crédit du Burkina Faso (UCECB). La «COOPEC TOGO» en 1969 a donné naissance

au Comité national pour le développement des unions de coopératives d’épargne et de

crédit (CONAUDEC) qui à son tour donna naissance à la Faîtière des unités coopératives

d’épargne et de crédit du Togo (FUCEC). Au Bénin, la Caisse nationale de crédit agricole

(CNCA) a été créée en 1975 et a donné naissance à une multitude d’institutions financières

après sa faillite.

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À la suite des différentes crises qui ont secoué ces différentes coopératives doublées

de crises politiques, économiques et sociales, nous assistons aujourd’hui à une floraison

d’institutions de microfinance dans ces différents pays avec différentes stratégies de mise

en œuvre. Qu’en est-il alors de la République du Bénin?

3.3 Historique du microcrédit au Bénin

L’institutionnalisation moderne de la microfinance au Bénin date de 1975 avec la

création par l’État béninois de la Caisse Nationale de Crédit Agricole (CNCA). Cette caisse

a sous sa tutelle, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel (CRCAM) au niveau

départemental et la Caisse Locale de Crédit Agricole Mutuel (CLCAM) au niveau

communal (Cellule de microfinance, 2003 : 11). Les succursales de la «CNCA» (CRCAM

et CLCAM) ont pour activités de collecter l’épargne en milieu rural, centraliser les

demandes et consentir des crédits conformément aux conditions fixées par leurs statuts et

règlements intérieures (Alpha Ouédraogo et al. 2008 : 79-80).

En 1987, la «CNCA» a fait faillite à la suite d’une crise financière qui a secoué le

système bancaire béninois. Cette crise a entraîné la fermeture de la CNCA et l’ouverture de

la Fédération des Caisses d’Épargne et de Crédit Agricole Mutuel (FECECAM) en Juillet

1983. Rappelons aussi que la crise économique des années 1980 dans les pays d’Afrique de

l’Ouest a poussé l’État béninois à se désengager du secteur bancaire avec l’avènement du

libéralisme économique. Cette situation a entraîné une marginalisation de certains individus

à la recherche de financement pour leurs activités. La FECECAM a alors introduit à titre

expérimental un nouveau produit appelé «tout petit crédit aux femmes» (TPCF) grâce à une

subvention de l’Alliance Coopérative Internationale (ACI) (Alpha Ouédraogo et al. 2008 :

86).

Le «TCPF» a permis de développer le sociétariat de la «FECECAM». En effet, la

femme qui avait besoin du «TCPF» était dispensée de l’obligation de constituer une

épargne préalable avant d’obtenir son crédit. Seul le payement de la part sociale de 1000

francs CFA était obligatoire (Alpha Ouédraogo et al. 2008 : 86). A la Suite des décisions

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malheureuses des gestionnaires de la Fédération c’est-à-dire à des changements opérés sans

une évaluation objective et des impayés des clients, la FECECAM tombe en faillite.

La libéralisation du secteur financier béninois comme nous l’avons indiqué

précédemment a entraîné une prolifération sur le marché financier béninois d’une multitude

d’institutions de microfinance. Le secteur de la microfinance est animé aujourd’hui par les

mutuelles et coopératives d’épargne et/ou de crédits, les institutions de crédits directs, les

projets et Organisations Non Gouvernementales (ONG) à volet microfinance. Au nombre

de 1192 en 2002, les Institutions de microfinance (IMF) constituent le meilleur canal de

drainage de fonds vers les couches défavorisées. Le taux d’intérêt débiteur est moins élevé

au niveau du secteur bancaire (à 18%) que celui des IMF (taux d’usure de 27%). Par contre,

le taux d’intérêt créditeur des IMF (maximum 12%) est plus attrayant que celui des

banques (3,5% en moyenne) (Cellule de microfinance, 2003). Aujourd’hui, nous avons un

total de 762 institutions de microfinance reparti en cinq types d’institutions à savoir : les

mutuelles et coopératives d’épargne et de crédit, les associations et ONG, les sociétés, les

projets gouvernementaux à volet microfinance et les groupements d’épargne et de crédit

(cf. tableau1) (Répertoire des institutions de microfinance, 2005 :11).

Mais, malheureusement, le monde rural béninois compte peu d’IMF. Ceci résulte de

l’enclavement des zones rurales ainsi que le faible pouvoir d’achat des populations rurales

qui limite considérablement leur attractivité pour la plupart des IMF (PNUD/BÉNIN,

2007 : 52). Il existe quand même quelques IMF qui prêtent de l’argent aux agriculteurs

pour l’achat des semences, des intrants, etc. mais elles ne sont pas nombreuses et ne font

pas l’objet d’un engouement au sein des femmes rurales. Les femmes rurales utilisent les

petits prêts de 25 000 ou 50 000 FCFA pour les petits commerces et la transformation des

produits agricoles. Pire, les banques dites «banques des paysans» créées par le

gouvernement ne prêtent que pour la culture du coton.

Rappelons aussi, à toutes fins utiles, que de 2006 jusqu’à nos jours le gouvernement

du président Yayi Boni (président béninois élu en 2006) a mis en place un Fonds National

de la Microfinance. Ce Fonds a été mis en place par le gouvernement à la suite des

difficultés auxquelles le secteur de la microfinance est confronté à savoir :

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- Difficulté d’accès aux ressources financières adaptées aux spécificités des

besoins des pauvres;

- Absence de mécanismes d’accompagnement en termes de renforcement des

capacités et d’appuis divers;

- Absence d’un mécanisme de sécurisation pour la gestion des nombreux risques

auxquels sont soumises les institutions de microfinance (Revue Fonds national

de la microfinance en échos, 2009 :12).

Fort convaincu de la microfinance comme un outil stratégique d’intervention dans le

domaine du développement et la lutte contre la pauvreté, le Fonds national de la

microfinance a lancé son Programme de microcrédits aux plus pauvres (PMCPP). Ce

programme consiste à mettre à la disposition des populations les plus démunies (milieu

rural comme urbain), écartées du système financier et n’ayant pas de garanties pour

bénéficier d’un prêt, de se faire octroyer une petite somme variant entre 25. 000 et 50. 000

FCFA (environ 55 et 111 dollars canadiens) pour entreprendre une activité génératrice de

revenu (les petits commerces et les activités de transformation en milieu rural). Cette

stratégie de lutte contre la pauvreté n’a pas une disposition particulière pour le monde rural.

Elle est mise en œuvre sur toute l’étendue du territoire béninois (dans les villes comme les

campagnes).

Derrière cette multitude d’institutions de microfinance qui existe au Bénin de même

que la volonté avouée du gouvernement de sortir les plus pauvres de la misère à travers ce

programme de microcrédit aux plus pauvres, quel est alors l’impact de ces prêts de

microcrédit sur les populations bénéficiaires?

Dans le chapitre suivant nous présenterons les résultats de notre recherche avant

d’aborder le dernier chapitre qui nous éclairera en fonction de notre cadre d’interprétation

défini préalablement.

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Chapitre 4 : Présentation des résultats

4.1 Introduction

Le chapitre suivant fait le point des résumés des différents rapports et mémoires lus

pour la réalisation de cette étude. Ces huit documents à savoir : deux rapports généraux et

six mémoires de maîtrise abordent la question de microcrédit au Bénin sous différents

angles. Ces documents traitent de l’impact des projets de microcrédit sur les bénéficiaires

au Bénin, des conditions d’octroi des prêts de microcrédit, les modalités de crédit mises à la

disposition des populations, de l’état des lieux en matière de microcrédit au Bénin et plus

précisément de la contribution du microcrédit dans le cadre du programme de lutte contre la

pauvreté.

4.2 Résumé des huit études

Dans ce qui suit nous allons rapporter le résumé des huit études qui ont servi de

matériel pour notre recherche. Ces documents sont présentés dans un tableau classificatoire

en annexe (tableau no2). Ce tableau présente les différentes études et leurs indicateurs de

mesure.

4.2.1 Le rapport intitulé : «Évaluation et impacts de la microfinance sur les

bénéficiaires de microcrédit»

Ce rapport réalisé par la cellule de la microfinance au Bénin en 2003, met en

lumière l’impact des projets de microcrédit sur les populations bénéficiaires. C’est un

rapport de 131 pages subdivisé en sept chapitres qui fait un état des lieux général du secteur

de la microfinance dans quelques villes du Bénin avant de consacrer le sixième chapitre

à l’impact de la politique de microfinance sur les bénéficiaires. L’un des objectifs de ce

rapport est de mesurer l’impact de la microfinance sur les bénéficiaires de crédits. Les

données ont été collectées grâce à un questionnaire. Une grille d’observation a été

également utilisée pour alléger le questionnaire et permettre de recueillir des informations

qualitatives. L’étude s’est déroulée dans trois grandes villes du Bénin (Cotonou, Abomey-

Calavi et Bohicon). Le nombre d’individus enquêtés est de 498. La taille de l’échantillon

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est de 500 clients des IMF répartis en 50 grappes. Le but de l’étude est de répondre à trois

interrogations à savoir : Les clients utilisent-ils les prêts de manière efficiente ? Les clients

ont-ils atteint ou sont-ils sur le point d’atteindre une certaine autonomie ? Les clients sont-

ils satisfaits du programme de microcrédit ? Et enfin, le programme aide-t-il les clients à

développer leurs activités ?

Les données du rapport indiquent que 65,43 % des clients (498 clients) des

institutions de microfinance enquêtés sont instruits. Parmi les enquêtés, 334 sont des

femmes contre 164 hommes. Ceci donne un pourcentage de 32.94% pour les hommes et

67,06 pour les femmes. L’âge des enquêtés varie entre 20 et 71 ans.

Le rapport indique également que 90% des enquêtés sont à leur troisième cycle de

prêt et 88% déclarent pour la plupart ne pas accuser de retard dans le paiement de leur

échéance contre 12% qui ont éprouvé des difficultés à rembourser leur prêt. 72% de cette

catégorie de clients qui éprouvent des difficultés à rembourser l’imputent à la mévente et à

l’instabilité des activités.

Par ailleurs, 64% des clients destinent leurs prêts à l’augmentation du volume de

leur activité et 14% dans une activité nouvelle. Les clients estiment que les activités sont

rentables à 84% mais que les revenus qu’ils en tirent permettent juste d’honorer les

engagements dans les délais et de subvenir aux charges de ménage. Ils estiment à 99% que

les délais de remboursement sont courts et qu’en réalité ils développent des activités

secondaires pour leur permettre de faire face à leurs obligations. 62% des clients ont

déclaré avoir enregistré une augmentation de revenu durant les douze derniers mois mais,

seuls 8,5% ont considéré cette augmentation comme substantielle. En outre, les clients des

institutions financières évoquent la faiblesse du montant des prêts mais restent insensibles à

la question du taux d’intérêt car leur motivation première est d’avoir accès au crédit en

dehors de toute autre considération.

Le rapport montre également que 86,5% des enquêtés, en majorité des femmes non

chef de ménage (55,6%), participent de façon substantielle aux charges des ménages.

Certains ménages (14%) déclarent même consacrer directement une partie de leur prêt aux

besoins du ménage. 67,18% des femmes enquêtées participent au budget du ménage.

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61

L’alimentation reste le principal besoin qui absorbe en priorité les bénéfices dégagés de

leurs activités. 80,1% des clients des IMF déclarent que l’achat de nourriture constitue leur

premier choix en matière d’allocation de leur bénéfice.

L’autre poste de consommation qui absorbe le revenu des clients des IMF est la

santé. 30% des clients des IMF continuent à se soigner à l’indigénat mais la majorité

déclare avoir recours de plus en plus aux centres de santé modernes et 98% d’entre eux

déclarent se soigner mieux à leur entrée dans le système des IMF. Aussi les enfants en âge

scolaire fréquentent l’école dans 83,9% des ménages. Les gains tirés des activités sont

affectés à la consommation et aux besoins des ménages parce que très peu investissent au-

delà de la sphère domestique. Cependant, 47% des femmes vont au-delà de cette sphère et

jouent des rôles traditionnellement dévolus aux hommes (assumer les droits de scolarité des

enfants et payer le loyer).

En ce qui concerne les activités exercées, le rapport indique que 76% des

bénéficiaires investissent dans le commerce et les services, 8% dans la production agricole

et le reste dans l’artisanat, la transformation, etc.

Le rapport conclut sur le fait que le microcrédit permet à ses clients de satisfaire aux

besoins élémentaires sans toutefois leur donner la possibilité de réaliser des investissements

productifs. Quoiqu’il en soit, les programmes de microcrédit semblent remplir leur rôle

premier en relâchant la contrainte de financement pesant sur leurs clients.

4.2.2 Le rapport intitulé «Mission d’évaluation globale du programme de

microcrédit aux plus pauvres (PMCPP)»

Ce rapport intitulé «Mission d’évaluation globale du programme de microcrédit aux

plus pauvres (PMCPP)» élaboré en février 2011 par le cabinet Pluri-Expertise au nom du

ministère de la microfinance et de l’emploi des jeunes et des femmes (MMEJF) est un

document de 78 pages. Ce rapport, après avoir rappelé le contexte de sa réalisation et ses

objectifs, fait ressortir les effets du programme de microcrédit aux plus pauvres (PMCPP)

sur les bénéficiaires. L’objectif général de la mission a été de faire une évaluation globale

du programme de microcrédit aux plus pauvres (MCPP). C’est une étude qui a couvert

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toute l’étendue du territoire. Les points de mesure retenus sont les suivants : Amélioration

des revenus, du patrimoine, du niveau d’épargne des clients, des conditions de vie pour la

population exclue (des soins de santé et de l’éducation etc.), création d’emplois,

empowerment : en termes de position des individus dans leur famille et dans la

communauté, il s’agit d’une construction du capital social. Les données ont été collectées à

partir d’une observation directe de faits, d’affirmations venant d’informateurs

personnellement impliqués, d’observations indirectes (proxies) permettant d’inférer

l’existence d’un fait particulier; d’affirmations indirectes sur les faits dans lesquels les

informateurs n’ont pas été impliqués personnellement. Ainsi, des questionnaires individuels

et des guides d’entretien ont été élaborés pour chaque catégorie d’acteurs (les partenaires

des IMF, des bénéficiaires de crédit et les agents du FNM). La taille de l’échantillon est de

8 547 enquêtés basée sur une combinaison de méthodes d’échantillonnage par quotas et

aléatoire en fonction d’une stratification faite suivant les principes et critères de

l’exhaustivité.

Selon ce rapport, les bénéficiaires du programme MCPP sont constitués à 93,5% des

femmes dont la tranche d’âge varie à 88% des cas entre 20 et 50 ans. 62% des bénéficiaires

n’ont aucune formation de base, 26% ont un niveau d’étude primaire et 10% un niveau

d’étude secondaire. Les activités des bénéficiaires sont en majorité le commerce (62%).

Sur le plan d’autonomisation économique des bénéficiaires, le rapport indique, sur

la base des enquêtes menées auprès des bénéficiaires, qu’il y a un accroissement de revenus

pour 85% des bénéficiaires, un accroissement des investissements pour 69% et une

diversification des activités pour 58%. En ce qui concerne les effets du programme sur les

conditions de vie, le rapport indique qu’une amélioration est constatée pour 55% des

bénéficiaires en ce qui concerne l’éducation des enfants et la sécurité financière, 52% sur

l’état nutritionnel, 45% sur la prise en charge sanitaire, 45% sur le plan relation avec le

conjoint et 37% sur les conditions de logement.

Le rapport affirme, en se référant aux résultats de l’enquête, que le PMCPP a

favorisé ou renforcé l’auto-emploi de tous les bénéficiaires (675 164 au 30 juin 2010); a

permis à 81,2% des bénéficiaires, soit environ 548 225 Béninois, d’obtenir pour la première

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fois un crédit d’une institution de financement et a enfin permis à au moins 5,4% des

bénéficiaires, soit plus de 37 646 béninois de démarrer une activité génératrice de revenus.

Tout ceci a entrainé l’amélioration des capacités financières des bénéficiaires et a

également contribué à la diversification de leurs activités (58%) et à l’accroissement du

revenu (85%). Le rapport indique également que le PMCPP a renforcé dans une certaine

mesure, la capacité des bénéficiaires à épargner à travers un système de collecte de

l’épargne sous forme de tontine développée par certains partenaires stratégiques. Cette

stratégie a permis aux bénéficiaires d’honorer dans la majorité des cas (84,34%) leurs

engagements vis-à-vis des IMF dans le délai, leur donnant ainsi la possibilité d’avoir accès

à d’autres lignes de crédit.

Selon ce rapport, le département de l’Atakora est la zone ou les bénéficiaires ont le

plus senti une nette amélioration de leur revenu. Il est suivi du département du Zou et de

l’Atlantique. Le département du littoral vient en dernière position malgré l’intervention

relativement massive dans ce département ainsi que le département des Collines. Il se pose

alors la question de savoir si ce type de programme leur est adapté. Le rapport souligne

aussi le fait que certaines activités comme l’agriculture et l’élevage nécessitent de longs

délais de payement.

Le rapport met en évidence les effets économiques du programme en stipulant

qu’on constate avec ce programme une augmentation des revenus du ménage, sous la

direction de la femme, ce qui contribue à l’amélioration du bien-être familial. Il montre que

les femmes arrivent à contribuer aux charges familiales telles que la scolarisation des

enfants (55% des cas); la prise en charge des besoins de santé (42%); l’amélioration de

l’état nutritionnel (52%); l’amélioration de l’état de logement (le revêtement du sol de

l’habitat (37%) et l’accès à l’eau potable (32% des cas). Il précise que l’état nutritionnel,

l’accès à l’éducation des enfants et les relations avec le conjoint s’améliorent au fur et à

mesure que le bénéficiaire passe d’un cycle à un autre.

Le rapport conclut que la participation des bénéficiaires en général et des femmes en

particulier aux activités économiques et aux décisions du ménage leur a permis d’accroître

leur autonomisation sociale et politique. Leur contribution au bien-être du ménage a

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renforcé leur confiance et leur estime de soi. La confiance, les compétences et les

connaissances acquises, de même que la création de réseaux d’entraide ont rehaussé le

statut de l’ensemble des bénéficiaires, leur donnant un rôle social dans la communauté.

Enfin, le programme MCPP a sans aucun doute des effets sur le niveau socio-économique

des bénéficiaires dans la majorité des cas, les indicateurs retenus montrent que la situation

de ces derniers s’améliore au fur et à mesure que ceux-ci passent d’un cycle à un autre. Il

recommande que les actions du Fonds national de la microfinance aillent dans le sens de

l’amélioration et de la pérennisation des acquis.

4.2.3 Le mémoire intitulé : La dynamique des banques communautaires pour le

développement des femmes en milieu rural : expérience du CREDESA au sud-

Bénin, 1995-1996

Dans son mémoire de maîtrise, Ayité (1995-1996) nous présente les avantages des

banques communautaires selon les femmes bénéficiaires concernées. L’objectif de l’étude

est d’étudier dans la commune de Gapké (sud du Bénin), la contribution des banques

communautaires à l’amélioration des conditions de vie dans les ménages des femmes

bénéficiaires. Il s’agissait d’une observation participante au cours de laquelle des entrevues

semi-structurées, des discussions informelles, et des questions généralement ouvertes ont

été données avec l’aide de trois enquêteurs formés pour la cause.

C’est une étude qui a porté sur une population totale de 45 enquêtées dans 24

ménages. Les personnes enquêtées se trouvent dans la tranche d’âge de 22 à 75 ans. Sur les

45 personnes enquêtées au total, 66,7% ne sont pas scolarisées; 15,6% ont le niveau

primaire, 17% ont le niveau secondaire, soit un total de 100,1 % par excès. 44,4% des

enquêtées s’adonnent aux activités de commerce de détail (la vente), 35,6% à l’agriculture.

Elle indique à partir de cette statistique que les activités de commerce et d’agriculture

constituent les activités dominantes. Elles se pratiquent dans les proportions de 44,4 % pour

le commerce et 35,6% pour l’agriculture. Les autres activités (transformation alimentaire,

ramassage de noix etc.) représentent 13,3%. L’auteure mentionne qu’il lui manque

d’information sur l’activité exercée par 6,7% des enquêtées.

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Le but de l’étude est de vérifier quatre hypothèses. Premièrement, l’augmentation

des revenus des bénéficiaires des banques communautaires améliore les rapports entre les

épouses et leur mari, soit les rapports inter-genre. Deuxièmement, les volets de

formation/éducation au sein des banques communautaires favorisent l’amélioration du

niveau des connaissances et des pratiques des mères en matière d’alimentation et de

nutrition. Troisièmement, l’augmentation des revenus permet aux mères de scolariser leurs

enfants surtout les filles et enfin, les femmes bénéficiaires des banques communautaires ont

une perception claire des avantages que peuvent procurer la banque communautaire.

Selon l’auteure, la banque communautaire donne la possibilité aux femmes ayant

des enfants de s’épanouir, en s’inscrivant au sein des groupes de solidarité pour participer

aux formations en alphabétisation, en gestion et en nutrition, mais surtout de bénéficier

d’un prêt et de faire de l’épargne. Les bénéfices tirés de leurs activités permettent ainsi aux

femmes de contribuer aux dépenses de la maison. Selon l’homme, la femme contribue

lorsqu’elle mène des activités économiques, ce qui l’arrange car il n’est plus dérangé pour

les dépenses du foyer. L’auteure note aussi le fait que la gestion du crédit n’est pas laissée

au seul soin de la femme. Les maris exercent une certaine pression, un contrôle sur les

femmes. Elles ne doivent rien acheter à leur insu.

L’auteure du mémoire montre également que les activités des banques

communautaires amènent les femmes à participer aux différentes séances au cours

desquelles des thèmes de gestion et de nutrition sont discutés avec les bénéficiaires des

deux sexes. La nutrition et la pesée sont des thèmes récurrents parce qu’elles permettent à

leurs enfants d’être en bonne santé et améliorent leurs connaissances. L’alphabétisation est

aussi intéressante parce qu’elle leur assure une autonomie de gestion de leurs activités et

elles valorisent leur langue. Les séances de gestion leur permettent de savoir comment

utiliser l’argent, car elles ont le souci de bien gérer.

L’auteure montre qu’avant l’avènement des banques communautaires, les femmes

nourrissaient les enfants de 0 à 5 mois au sein et à la tisane. À partir de cinq mois, elles

introduisaient la bouillie de farine de maïs. À partir d’un an, les enfants étaient au plat

familial (pâte, sauce et autres). Mais aujourd’hui les femmes connaissent le soja et savent

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que cela s’utilise dans la bouillie, mais le moment précis auquel l’incorporer dans la

bouillie leur a échappé. Elles savent aussi qu’il faut l’utiliser dans la sauce, dans la pâte

mais elles ne le font pas, car l’amélioration des connaissances n’engendrent pas forcément

l’amélioration des pratiques. L’auteure constate cependant que les femmes connaissent bien

les éléments qui composent une alimentation équilibrée et sont en mesure de les énumérer.

Pour ce qui concerne l’alphabétisation, il y a un effort de répétition les soirs avec le

concours des élèves pour ceux qui ont des enfants scolarisés. L’allocation de crédit a

permis également aux femmes de mieux nourrir leurs enfants et ce, plus régulièrement. 17

femmes sur 24, soit 70,83% l’ont reconnu. Elles ont en quelque sorte hérité du devoir

d’habiller et de soigner leur progéniture.

Selon l’auteure, l’installation des banques communautaires dans la commune de

Gakpé a permis d’atteindre une couche importante de femmes (base du développement).

Cette innovation a créé une motivation de développer le commerce dans le milieu et a

permis aux femmes de diversifier leurs activités lucratives. Les membres des banques

communautaires profitent du crédit pour résoudre leurs différents problèmes sociaux

(maladie, cérémonie, réparation d’engins, achat de machines etc.) qui se présentent à

l’occasion. Le système de banque communautaire a favorisé l’atteinte d’une meilleure

nutrition et par conséquent d’une meilleure santé. Le système a également permis aux

bénéficiaires d’assurer la scolarisation de leurs enfants et a entrainé une solidarité au sein

des membres des groupes. La banque a apporté à ces derniers le bien-être, la santé,

l’épanouissement etc. Elle est d’un grand secours car quand l’enfant est malade, la femme

n’attend plus le mari avant d’aller à l’hôpital. Pour d’autres cependant cette banque n’est

pas une bonne chose car les femmes ont trop de difficultés à faire l’activité pour laquelle

elles ont obtenu un prêt; elles se plaignent qu’elles s’endettent.

Les crédits octroyés vont de 25 000 FCFA à 100 000 FCFA (55 et 220 dollars

canadiens). Selon les femmes, les remboursements se font régulièrement, soit dans une

proportion de 54,16%. Certaines femmes arrivent difficilement à rembourser 25%. Les

difficultés auxquelles elles sont confrontées sont l’insuffisance de période de repos,

l’occupation par des formations et des réunions, le court délai de remboursement, de même

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qu’une mauvaise gestion de l’argent. Le faible écoulement des produits sur le marché ou

dans le village entrave aussi les remboursements aux échéances prévues.

Malgré tout, les crédits ont permis le développement du commerce dans le milieu, la

possibilité d’approvisionnement en gros, l’épanouissement dans le commerce et

l’apprentissage. Pour certaines d’entre elles, le crédit a également entrainé l’amélioration de

leur revenu mais pour d’autres c’est le contraire qui s’est produit.

L’auteure mentionne qu’avec le crédit, les femmes se sont mises au travail. Celles

qui menaient des activités génératrices de revenus ont renforcé leur commerce. Celles qui

n’en faisaient pas se sont lancées dans le commerce grâce au prêt. Ce qui a entrainé dans le

rang des femmes une certaine liberté dans les dépenses. L’auteure constate qu’au plan

alimentaire et nutritionnel, la disponibilité alimentaire est garantie car les femmes

s’approvisionnent suffisamment. Elles ont acquis des connaissances nutritionnelles qu’elles

n’arrivent pas à mettre en application sans les professionnels. Au sein des ménages,

l’alimentation est cependant garantie et les enfants sont nourris plus régulièrement ce qui

leur assure une bonne santé renforcée par les cours d’éducation nutritionnel le. Cette

situation de crédit aux femmes a fait que certains hommes se sont déchargés sur leurs

femmes; ou qui profitent du crédit de leur femme.

L’auteure conclut en montrant que l’augmentation des revenus des femmes

bénéficiaires a amélioré les rapports entre elles et leurs maris : les femmes qui ont une

certaine pratique du commerce, ont profité de l’existence de ce crédit. Elles se sont

adonnées au commerce pour augmenter leurs revenus, les enfants sont scolarisés et nourris

régulièrement et la disponibilité d’aliments au sein du ménage n’a pas fait défaut un seul

instant; le mari arrive facilement à négocier avec sa femme pour obtenir une partie du

crédit, cette atmosphère de bonne entente entre couple a créé une ambiance très détendue

au sein des ménages. Mais autant l’existence du crédit a pu arranger la situation au sein de

certains ménages, autant elle l’a dégradé dans le cas d’autres ménages car certains maris ne

veulent pas entendre parler de la banque communautaire, ils vont jusqu’à interdire à leur

femme d’en faire partie et les menacent de divorce. La banque a créé des sentiments de

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soulagement auprès des bénéficiaires qui se trouvent en même temps face à une contrainte

de surcharge de travail (diversification des activités).

Pour finir, l’auteure signale que la dynamique créée par les banques

communautaires dans la commune de Gankpé a permis aux femmes de s’épanouir, d’avoir

confiance en elles-mêmes et de répondre à leurs besoins à tout moment. Ce système de

crédit a permis également de lutter contre l’oisiveté et la paresse. Il leur a permis de

s’ouvrir sur d’autres marchés, de faciliter la satisfaction des besoins élémentaires de leurs

enfants dont la scolarisation.

4.2.4 Le mémoire intitulé : Impact des systèmes de financement décentralisés sur

le développement du secteur informel : cas du PADME, 2002-2003

Abordant la question de l’impact des systèmes financiers décentralisés sur les

bénéficiaires dans leur mémoire de maîtrise intitulé, Hounye et Gninoukoun (2002-2003)

ont analysé les effets indirects de ces systèmes de financement décentralisés sur les

bénéficiaires. L’objectif du travail est d’étudier l’impact socio-économique des crédits du

PADME sur les activités des micro-entrepreneurs installés dans les zones urbaines et

périphériques du Bénin. Une grille d’entretien et un questionnaire ont été administrés pour

la collecte des données. L’échantillon est constitué de 150 clients tirés au hasard de la base

de données de l’institution (PADME). Le but de l’étude est de vérifier trois hypothèses.

Premièrement, les crédits octroyés par le PADME permettent la création d’emploi et

l’émergence de nouvelles activités économiques. Deuxièmement, les crédits octroyés par le

PADME améliorent la rentabilité des activités économiques des bénéficiaires et enfin, les

crédits du PADME améliorent les conditions de vie des bénéficiaires et facilitent l’insertion

des femmes dans le tissu économique. Dans leurs analyses, les auteurs de l’étude ont mis en

évidence la situation nutritionnelle, sanitaire, éducationnelle, de logement, d’entretien et de

transport des bénéficiaires.

Sur le plan nutritionnel, les auteurs montrent qu’avec l’avènement du crédit et

surtout après le quatrième crédit, on remarque une amélioration dans la satisfaction des

besoins alimentaires des clients bénéficiaires. Les résultats indiquent que : de 29% de

clients enquêtés ne consommant qu’un seul repas par jour, on est passé à 9% après

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l’obtention du crédit, soit une réduction de 20%, ce qui traduit une réduction de la pauvreté.

De 28% de clients enquêtés ne consommant que deux repas par jour, on est passé à 38%

après l’obtention du crédit, soit un accroissement de 10%, ce qui traduit une situation de

mieux être.

Sur le plan de la santé, les auteurs montrent qu’avant l’obtention du crédit, la

population enquêtée ne se faisait presque pas soigner (73%) ou s’adonnait à des traitements

à risque. Mais avec l’apport du crédit, et surtout après le quatrième crédit, on note une

augmentation de la proportion des clients ayant un mode de traitement sanitaire adéquat

(63% après crédit contre 27% avant crédit). Les auteurs précisent que cette amélioration est

la plus visible au niveau des clients individuels qui ont cherché des soins exclusivement

dans le cadre de la médecine moderne. Mais pour l’autre catégorie de la clientèle celle des

clients ayant contracté des prêts dont ils sont solidairement responsables, le problème de

l’incapacité financière se pose toujours.

Sur le plan de l’hygiène (les soins corporels), les résultats de l’étude montrent que la

proportion de clients ayant un mode d’entretien acceptable, est passée de 52% avant le

crédit à 60% après le crédit, soit une croissance de 8%. Ils indiquent encore que

l’amélioration est encore beaucoup plus importante au niveau des clients individuels qu’au

niveau des clients solidairement responsables de l’emprunt contracté. Cet état de choses est

dû au fait que la rentabilité des activités de ces derniers est relativement plus faible.

Sur le plan de la formation dispensée, nos auteurs montrent qu’avant le crédit, 23%

seulement du nombre des clients enquêtés parvenaient à scolariser leurs enfants. Mais grâce

au crédit PADME, cette proportion est passée jusqu’à 83%, soit une amélioration assez

appréciable. Le taux des enfants qui vont en apprentissage a diminué (15% après crédit,

contre 32% avant le crédit). Ils précisent que cette volonté de faire inscrire les enfants est

plus accentuée au niveau des groupes individuels. Ils stipulent par ailleurs que le crédit seul

ne peut pas aider les micro-entrepreneurs à faire face aux dépenses d’éducation, mais qu’il

les aide à faire le minimum nécessaire.

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70

Sur le plan du logement, les auteurs montrent qu’avant l’obtention du crédit, sur le

total des clients enquêtés, 43% étaient dépendants en matière de logement (clients hébergés

ou vivant en famille). Après le quatrième crédit, on note que 71% des clients ciblés sont en

location contre 44% avant le crédit, soit une augmentation de 27%, ce qui peut s’expliquer

par le fait que le crédit a permis à certains clients d’accéder à l’indépendance en matière de

logement. Ces auteurs affirment qu’avec le crédit, les micro-entrepreneurs mènent une vie

relativement libre mais que la qualité de leur logement laisse à désirer car ces gens vivent

généralement dans les banlieues de Cotonou (capitale économique du Bénin) et de ses

environs. Ils se trouvent pressés de quitter les proches parents, car ils estiment qu’avec

l’indépendance sur le plan du logement, ils pourront mieux gérer leurs activités. Le crédit

PADME a pu favoriser l’indépendance en matière de logement aux clients enquêtés, mais

aucun d’entre eux n’a pu s’acheter une maison après avoir bénéficié du soutien financier du

PADME.

Enfin sur le plan du mode de transport, les auteurs montrent qu’avant l’obtention

d’un crédit, 15% des micro-entrepreneurs ciblés disposaient de leur propre moyen de

déplacement, 72% se déplaçaient avec le transport en commun et 13% se déplaçaient

essentiellement à pieds. Les résultats de terrain indiquent que, l’obtention du crédit et son

exploitation ont permis à certains de ces micro-entrepreneurs et ce, après l’obtention d’un

quatrième crédit, de se doter d’un moyen de déplacement, l’estimant très important pour le

développement de leurs activités (39% après le crédit contre 155 avant le crédit). Aussi, 1%

de la proportion des micro-entrepreneurs ciblés, ont acquis leur propre véhicule. Par contre

la proportion des micro-entrepreneurs se déplaçant essentiellement à pieds est passée de

13% avant le crédit à 5% après le crédit. Les auteurs précisent que l’amélioration se

remarque surtout au niveau des clients qui optent pour le crédit individuel. 26% contre 8%

avant le crédit ont pu s’acheter une moto alors que chez les clients de groupe solidaire , on

note un taux de 7% contre 2% avant le crédit. Cette méfiance de se doter d’un moyen de

déplacement est surtout à la base du mode de remboursement, ainsi que du faible niveau de

rentabilité des activités menées.

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Quant au taux d’intérêt, les auteurs montrent que celui pratiqué par le PADME est

de 2% sur l’encours de crédit, soit un taux nominal annuel de 24%. En plus des intérêts, les

clients supportent des frais de dossiers représentant 1% du montant de crédit obtenu et des

frais de garantie de décès d’une valeur de 1% du montant de crédit. La garantie de décès est

en quelque sorte une assurance pour couvrir le risque de cette nature. Aussi, le PADME

exige aux clients la constitution progressive au fur et à mesure du remboursement de crédit,

d’un fonds de garantie dont le montant équivaut au moins à 10% du montant du crédit

obtenu. Pour les auteurs, en prenant en compte les éléments constitutifs du coût du crédit, le

taux annuel effectif pratiqué par le PADME est d’environ 31,99%, soit un taux mensuel de

2,34%, ce qui les pousse à dire que le PADME doit revoir ses conditions d’octroi de crédit.

En ce qui concerne les modalités de remboursement, 90% des enquêtés ont affirmé

qu’elles leur permettent d’éponger leurs dettes sans difficulté. Par contre, certains parmi les

enquêtés déplorent le fait que le PADME ne leur accorde pas suffisamment de temps pour

faire fructifier le crédit obtenu avant le premier remboursement. Ils souhaiteraient donc que

le PADME leur offre l’opportunité d’un remboursement bimestriel, trimestriel ou

semestriel. Ainsi, souhaiteraient-ils bénéficier d’une période de report de deux mois au

moins avant le premier remboursement.

Sur le plan social, le crédit a permis aux femmes bénéficiaires de développer des

aptitudes à occuper des postes de responsabilité et de prise de décision. Ceci est à la base de

l’émergence des mouvements féminins que nous rencontrons aujourd’hui dans la plupart de

nos villes et principalement à Cotonou et ses environs. Cet état de chose amène aussi les

femmes à mieux comprendre leurs maris au foyer. Elles se donnent beaucoup plus de

conseils pour une bonne gestion de leur foyer. Avec l’évolution des activités, ces femmes

arrivent à participer aux dépenses du ménage pour une part bien appréciable.

Pour conclure, les auteurs mentionnent qu’il ressort de leur analyse que, les crédits

améliorent les conditions de vie des clients. Leur étude montre que 77% de la population

enquêtée sont des femmes. Ce qui prouve qu’elles ont décidé de participer au

développement de l’économie nationale, et aussi de sortir de leur misère. Ces femmes,

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malgré les difficultés qu’elles rencontrent, espèrent qu’un jour leur situation s’améliorerait

pour les amener à l’indépendance vis-à-vis des institutions de microfinance.

4.2.5. Le mémoire intitulé : Les produits de la microfinance et la lutte contre la

pauvreté : cas des institutions de microfinance (IMF) du Bénin (2003)

S’intéressant aux produits de la microfinance dans une perspective de lutte contre la

pauvreté dans son mémoire de maitrise, Yves (2003) stipule que l’analyse de l’impact du

portefeuille des IMF sur la pauvreté s’avère indispensable. L’objectif de cette étude est de

suggérer des mesures pouvant contribuer à l’amélioration de la qualité des produits

microfinanciers afin de mieux les adapter aux besoins des populations pauvres. Il s’agit

pour l’auteur de faire ressortir les faiblesses des produits financiers proposés aux clients.

Pour réaliser cette étude, trois hypothèses ont servi de piste de recherche à savoir.

Premièrement, Les microfinanciers ne tiennent pas compte des besoins des pauvres dans la

conception de leurs produits. Deuxièmement, les conditions d’accès au crédit éliminent les

pauvres de la clientèle des IMF et enfin, les IMF n’intéressent pas les pauvres à consommer

leurs produits. Les données ont été collectées par l’administration d’un questionnaire et

d’un guide d’entretien. L’étude s’est déroulée dans les départements du littoral et de

l’atlantique du Bénin sur la base d’une méthode de sondage stratifié où 25 IMF ont

constitué l’échantillon. En analysant les résultats de son enquête de terrain, l’auteur révèle

que les taux d’intérêts des IMF au Bénin sont pour la plupart compris entre 15 et 24% (en

moyenne). Toutefois, certaines institutions offrent des taux d’intérêt jusqu’à 60% l’an. Ces

taux représentent un poids de plus en plus lourd à supporter par l’activité des emprunteurs;

c’est d’ailleurs l’une des principales raisons des difficultés de remboursement de crédit.

Une telle situation semble réduire les chances de réduction de la pauvreté et de croissance

des micro-entreprises par la microfinance et enfermer les emprunteurs dans le cercle

vicieux de l’endettement.

Selon l’auteur, les montants des crédits octroyés aux bénéficiaires varient d’une

IMF à l’autre. Mais il existe toujours dans leur portefeuille, des prêts de faibles et parfois

même de très faibles montants. Ce qui représente un élément positif aussi bien pour les

pauvres que pour l'’institution prêteuse. En effet, ces faibles montants, d’une part

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permettent l’accès d’un très grand nombre de pauvres au crédit, et, d’autre part, permettent

de se prémunir contre les risques de défaillance que courent les IMF en prêtant à cette

catégorie d’agents considérée comme non solvable.

Abordant les formalités administratives d’octroi de crédit, l’auteur montre qu’elles

sont très souples et rapides. Elles se limitent souvent à l’acquittement des frais de dossiers

et/ ou à la présentation de la carte de membre pour certaines IMF et aussi à l’étude du projet

à financer. Elles sont moins coûteuses et satisfont plus ou moins à la condition des

populations pauvres.

L’auteur indique que la croissance des crédits en souffrance est relativement plus

rapide que celle de l’ensemble des prêts de la période. Et que cela traduit un accroissement

du taux d’impayé dans le temps. Cette situation, si elle perdurait, entraînerait un

effondrement de tout le système. L’auteur explique cette situation par le détournement par

les bénéficiaires, des crédits pour d’autres fins ainsi que la non rentabilité des activités

financées. Il montre que plus de deux tiers des IMF de notre échantillon présentent des

rapports dépôts/prêts très faibles (inférieurs à 25%). De plus, il fait ressortir que la majeure

partie des dépôts provient de «l’épargne forcée» (l’épargne forcée se présente comme une

condition, une garantie pour l’octroi de crédit). D’après ces résultats, le petit commerce est

l’activité la plus financée par les IMF. En effet, cette activité fait courir apparemment

moins de risque aux IMF et permet d’ailleurs un remboursement plus rapide. Toutefois, la

réalité sur le terrain prouve que les pauvres sont toujours marginalisés en matière de

microcrédit car malgré la petitesse des montants accordés, une grande partie non

négligeable de la population n’arrive pas à accéder à ces prêts. D’ailleurs la quasi-totalité

des IMF exercent l’essentiel de leurs activités en zones urbaines et périurbaines.

4.2.6. Le mémoire intitulé : Contribution du microcrédit à la réduction de la

pauvreté dans la commune d’Abomey-Calavi : cas de l’ONG BETHESDA, 2008-

2009

Dans son mémoire de fin de cycle à l’Institut Panafricain pour le Développement,

Ahouandjin (2008-2009) a analysé l’effet induit par le volet microcrédit de cette ONG sur

les bénéficiaires. L’objectif du travail est d’évaluer, de façon générale, la contribution de

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l’ONG Béthesda à la réduction de la pauvreté dans la commune d’Abomey-Calavi. Les

techniques d’observations, d’interviews semi-structurées, de guides d’entretien et de

questionnaire ont été utilisées pour la collecte des données primaires. Sur la base d’un

choix raisonné, l’échantillon est composé à 62,22% de femmes et 37,78% d’hommes, tous

bénéficiaires de microcrédit de l’ONG. 88,89% des bénéficiaires sont mariés avec 48,89%

de ménages dont le nombre de personnes est supérieur à 7. 37,78% des bénéficiaires dont le

nombre de personnes est compris entre 5 à 7 et 13,33% dont le nombre de personnes est

moins de 4. Parmi les bénéficiaires, 64,44% ont pour activité le commerce, 24,45%

pratiquent l’artisanat, 6,67% font l’élevage et 4,44 % sont dans la transformation

alimentaire. Le but de l’étude est de vérifier trois hypothèses. Premièrement, la

disponibilité des ressources financières à travers les IMF entraîne l’amélioration des

conditions de vie des populations. Deuxièmement, l’accès au crédit permet aux populations

de mener des activités génératrices de revenus et enfin, la satisfaction des besoins

élémentaires de la population concourt à la réduction de la pauvreté.

L’auteur de l’étude souligne en premier lieu que plusieurs institutions de

microfinance existent dans sa zone d’étude (PADME, PAPME, Vital Banque, CLCAM,

FECECAM etc.) mais que leur répartition spatiale dans la commune pose problème et

qu’elles sont aussi insuffisantes par rapport à l’effectif de la population de la commune.

L’auteur montre qu’avant l’obtention de crédit, plus de la moitié des enquêtés utilisaient

presque exclusivement leur propre épargne pour financer la majeure partie de leurs

investissements ou s’adressaient aux circuits financiers informels et plus particulièrement à

leur mari, ami ou parent. D’autres également font recours à certaines IMF de la place quelle

que soit la distance à parcourir pour les atteindre. L’auteur stipule que 80% des enquêtés

sont fidèles (venant toujours contracter des prêts au niveau de la structure) aux crédits de

l’ONG et 20% infidèles (ne revenant plus contracter de prêts au niveau de l’ONG après une

premier prêt). Le phénomène de l’infidélité des emprunteurs s’expliquerait par

l’insuffisance des crédits qui leur sont alloués par l’ONG, mais l’auteur mentionne que le

crédit octroyé par l’ONG est quand même un instrument d’autopromotion et de libération

économique (notamment pour les femmes à l’égard de leurs maris et/ou autres).

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75

Selon l’auteur, ce qui pousse les enquêtés à emprunter auprès de cette institution est

le taux d’intérêt qui est de 2% le mois, les conditions d’accès au crédit moins

contraignantes et surtout la caution solidaire pour les groupements ainsi que l’obligation

pour les bénéficiaires d’épargner au fur et à mesure qu’ils exercent leurs activités, ce qui

leur permet de rembourser leur crédit sans grande difficulté. La majorité des enquêtés

trouvent également que le délai de remboursement leur est favorable et qu’ils n’éprouvent

pas de difficultés à rembourser leurs prêts (82,22%) mais 17,78% sont confrontés à des

difficultés de remboursement. Ces difficultés évoquées par les concernés sont : la mévente,

la coïncidence du jour de remboursement et du paiement de loyer, le non écoulement des

produit fabriqués surtout par les artisans, le problème de maladie d’un enfant, etc.

Par ailleurs, l’auteur met l’accent sur l’impact du crédit sur les activités exercées en

montrant qu’un peu plus de la moitié (51,11%) des personnes enquêtées souscrivent aux

crédits pour démarrer une activité et que, par contre un peu moins de la moitié (48,89%), le

font afin de renforcer leurs activités. Ce qui signifie que ce sont les pauvres qui ont le plus

souvent recours aux microcrédits. L’auteur montre aussi l’impact du microcrédit sur le

chiffre d’affaire des enquêtés et montre que 84,44% des clients ont constaté un

accroissement du chiffre d’affaire et que 13,34% n’ont constaté aucune augmentation du

chiffre d’affaire.

D’autre part, le microcrédit a eu des impacts sur la rentabilité des activités des

bénéficiaires. 84,44 ont constaté un accroissement de bénéfices contre 13,34 qui n’ont pas

constaté un tel accroissement de bénéfices. Le montant des bénéfices réalisés, selon certains

clients enquêtés varient entre 3000 FCFA (6.60 dollars canadien) et 75 000 FCFA (165

dollars canadiens) par mois. Pour certains enquêtés, les bénéfices varient en fonction des

activités menées et il leur est difficile de déclarer tel ou tel montant en matière de bénéfices

obtenus.

En outre, les revenus générés par les activités des enquêtés sont investis pour la

plupart, dans l’éducation des enfants, pour l’alimentation des membres de la famille, pour

les soins de santé primaires. Pour d’autres, une partie de ces revenus est utilisée pour le

paiement de loyer et l’autre partie pour le renforcement de leurs activités. L’auteur stipule

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qu’après l’obtention de crédits à l’ONG, les conditions de vie des bénéficiaires et de leurs

ménages connaissent un changement, puisque 95,56% des enquêtés le confirment.

Selon l’auteur, les personnes enquêtées ont de façon générale une bonne impression

des microcrédits octroyés par l’ONG, car pour les uns, les revenus générés par ces crédits

les aident à subvenir à leurs besoins élémentaires (alimentation, santé, éducation des

enfants, loyer) et que pour les autres, en dehors de la satisfaction des besoins élémentaires,

ils arrivent à renforcer leurs activités lucratives. Il est donc, selon l’auteur, loisible de dire

que le microcrédit contribue à l’amélioration des conditions de vie des populations dans la

commune d’Abomey-Calavi et par conséquent à la réduction de la pauvreté. Mais l’autre

constat est que la plupart des clients enquêtés regrettent en effet l’absence d’un crédit avec

un montant élevé à plus de 100 000 FCFA (220 dollars canadiens) et aussi au niveau de

crédits à long terme, surtout pour les individus car ils considèrent que cet état de fait

empêche le développement de leurs activités.

Enfin, l’auteur mentionne que la hausse des prix des marchandises et des matières

premières, du fait des crises alimentaires et financières, contribue à accroître les coûts et

donc à réduire la rentabilité des activités des enquêtés. Cet état de chose accompagné de la

situation de mévente à laquelle ils sont confrontés et aussi des difficultés éprouvées à

écouler régulièrement leurs produits sont des facteurs qui freinent le développement des

activités des enquêtés. Il faut donc, selon l’auteur, se garder de surestimer le rôle du crédit

en général et du microcrédit en particulier, car il n’est qu’un facteur de l’amélioration des

conditions des populations bénéficiaires parmi d’autres qui sont également essentiels à

savoir la formation, les infrastructures socio-économiques, les réseaux de

commercialisation, la politique macro-économique, etc.

Grosso modo, l’auteur montre qu’avant l’obtention du crédit, les personnes

enquêtées recouraient presque exclusivement à d’autres sources de crédit (mari, surtout

pour les femmes, ami, parent, etc.). Par la suite, elles n’étaient plus que 20% à y avoir

toujours recours. Les microcrédits obtenus à l’ONG permettent par conséquent aux

emprunteurs de se libérer de l’emprise des sources classiques d’allocation de crédit. Les

revenus monétaires que les clients dégagent de ces activités leur permettent non seulement

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d’honorer les remboursements, mais aussi d’épargner et de contribuer significativement au

budget familial grâce notamment au financement de certains besoins sociaux

(consommation du ménage, éducation des enfants, soins de santé primaire, loyer). Mieux, il

leur permet de ne plus recourir aux usuriers. Les revenus générés par les activités financées,

ne permettent malheureusement pas à un grand nombre de clients de créer des emplois. Il

faut dire que le rôle des emprunteurs dans la création d’emplois est contrecarré par deux

tendances fortes : la nature des activités exercées et la difficulté à accéder au crédit à long

terme à l’ONG pour financer les besoins d’investissement importants. Par ailleurs,

l’insuffisance du montant de crédit accordé à chaque membre de groupement demeure aussi

un problème récurrent soulevé par les clients. Certes, le financement des crédits à court et

moyen terme contribue à améliorer les conditions de vie des bénéficiaires, mais seul le

financement des crédits d’investissement permet d’asseoir les bases d’une éradication

durable de la pauvreté.

4.2.7. Le mémoire intitulé : Programme de microcrédit aux plus pauvres

(PMCPP) dans le processus de réduction de la pauvreté dans le neuvième

arrondissement de Cotonou 2010

S’inscrivant dans la perspective de la lutte contre la pauvreté à travers les

microcrédits, Alahanou (2010), dans son mémoire de maitrise, présente dans un premier

temps les bénéficiaires et les services qui leur sont offerts avant d’aborder l’impact des

services du PMCPP sur ces dernières. L’objectif de cette recherche est d’étudier les effets

du programme de microcrédit aux plus pauvres sur l’amélioration des conditions de vie des

bénéficiaires. Pour ce faire, trois hypothèses ont servi d’éléments. Premièrement, le

programme de microcrédit instauré par le gouvernement est destiné aux pauvres.

Deuxièmement, les services offerts par le programme de microcrédit aux plus pauvres

rendent les bénéficiaires économiquement actifs et enfin, le programme de microcrédit aux

plus pauvres contribue à l’amélioration du bien-être économique et social des bénéficiaires.

L’entretien et le questionnaire ont été utilisés comme technique de collecte de données. La

technique du hasard simple a été utilisée dans la constitution de l’échantillon. Sur un total

de 286 unités, 100 ont été retenues comme l’échantillon de l’étude. Il s’agit des femmes

bénéficiaires du microcrédit du PMCPP du neuvième arrondissement de Cotonou (Bénin).

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Les bénéficiaires du programme MCPP sont exclusivement des femmes. L’âge moyen est

de 34 ans révolus alors que l’âge médian est de 37 ans. Bref, les bénéficiaires du

programme sont en moyenne des jeunes en âge de travailler et donc susceptibles

d’entreprendre des activités génératrices de revenus. Les bénéficiaires ont un niveau

d’instruction qui varie entre le primaire et le secondaire. Celles qui ont fait les études du

cours primaire font 41% de la population enquêtée pendant que les femmes qui ont fait les

études secondaires font seulement 15% de cette même population. Celles qui n’ont aucun

niveau d’instruction composent 44% des bénéficiaires enquêtées. Le nombre d’enfants à

charge des bénéficiaires du PMCPP varie de zéro à six enfants. 60% de la population des

bénéficiaires ont chacun un nombre supérieur ou égal à trois enfants à leur charge avec

respectivement pour les ménages ayant à leur charge 3, 4, 5, et 6 enfants, les pourcentages

de 28, 16 12, et 4%. Les 40% restant ont un nombre inférieur ou égal à deux enfants à leur

charge. Le nombre moyen d’enfants à charge est de 3 pour la population étudiée. La

majorité des bénéficiaires sont locataires ou vivent dans les logements familiaux avec des

taux respectifs de 42% et 33%.

Le programme fournit à la population des services d’encadrement susceptibles de

développer en elle une capacité de gestion des activités génératrices de revenu auprès des

bénéficiaires du microcrédit destiné au développement d’AGR. Le montant du crédit est

plafonné à 30 000 FCFA (66 dollars canadiens) pour le premier prêt. Selon le respect du

délai de remboursement par les bénéficiaires, il leur est permis de bénéficier de 50 000

FCFA (110 dollars canadiens) au deuxième crédit sollicité. Le programme donne aussi des

formations en alphabétisation et les notions élémentaires de gestion des AGR ainsi que

l’épargne stratégique qui est constituée par une partie du montant des intérêt que paient les

bénéficiaires sur leurs emprunts. Cette épargne a un caractère obligatoire et sera ristournée

aux bénéficiaires en fonction de leurs efforts de remboursement. La seconde épargne

volontaire s’apparente aux produits financiers classiques d’épargne qu’offrent les

institutions financières à leur clientèle. Elle est remboursable selon les conditions qui la

régissent et suivant le terme qui convient au souscripteur. Quant au taux d’intérêt, il est de

5% l’an dont un maximum de 3% servant d’épargne stratégique. Si le bénéficiaire respecte

les délais de remboursement, il lui est accordé un troisième crédit. Pour bénéficier du crédit

du programme, il faut payer 1000 FCFA (3 dollars canadiens) dont 500 FCFA constituent

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les frais d’adhésion, 300 FCFA pour les frais de formation et 200 FCFA pour les frais de

dossier. La seule garantie exigée est la constitution des groupes solidaires allant de 5 à 15

personnes au maximum.

Selon l’auteure, toutes les femmes enquêtées ont apprécié le coût de ce crédit qui est

très accessible. Cependant certaines d’entre elles ont exprimé le vœu qu’un différé d’au

moins un mois leur soit accordé désormais concernant les remboursements. Aussi plus de

90% des femmes enquêtées n’ont-elles pas trouvé que le montant accordé est insuffisant.

Elle précise que par ailleurs, grâce aux formations qui précèdent et accompagnent l’octroi

du crédit, les bénéficiaires investissent dans différents domaines avec l’ultime souci de

rembourser le capital et l’intérêt à bonne échéance tout en faisant profit.

Pour l’auteure, cette étude a permis de constater que certains bénéficiaires arrivent

difficilement à rembourser à bonne date leur dû. D’autres encore parviennent à rembourser

le crédit mais sans pour autant que, celui-ci influence leur niveau de vie. Le niveau de vie

étant l’un des déterminants premiers du seuil de pauvreté, les bénéficiaires sont dans une

démarche qui interpelle le facteur temps pour confirmer ou infirmer les changements réels.

Cependant, il y a quelques facteurs observables comme l’accroissement des AGR, la

satisfaction des besoins alimentaires et quelques fois éducatifs. Par ailleurs, des tentatives

de confiscation du crédit sont manifestes dans le rang de ces bénéficiaires pour la simple

raison que le crédit est le bien personnel du chef de l’État béninois (Yayi Boni) et d’autre

part, comme leur part de ce qui est destiné à tous (car pour les bénéficiaires, le PMCPP est

un bien public étant donné que ce programme est créé par le chef de l’État). L’auteur

stipule que les bénéficiaires quoique actives, influencent assez faiblement leur condition ou

niveau réel de vie au travers des différentes entreprises et initiatives.

Quant aux crédits reçus, ils ont servi à financer essentiellement deux activités

principales à savoir : le commerce et la transformation agro-alimentaire. La grande masse

des bénéficiaires s’est engagée dans l’achat et la revente de marchandises. Elle représente

83% du total enquêté. Seulement 17% se sont données à la transformation agro-alimentaire.

Toutes les femmes enquêtées ont affirmé que le microcrédit MCPP a favorisé

l’accroissement de leurs activités. Ces activités ont permis aux femmes de dégager des

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revenus allant de 5000 FCFA à plus de 12 000 FCFA (11 à 27 dollars canadiens) par mois.

Les revenus réalisés sont obtenus à partir des activités principales citées plus haut mais

particulièrement à travers plusieurs options à savoir, l’amélioration de la productivité de

l’unité de production, l’intensification de l’activité, l’extension de l’activité, la

diversification des activités.

En outre, l’auteure mentionne que les revenus issus des activités des bénéficiaires

sont réinvestis dans les mêmes activités, soit ils sont destinés à l’«épargne tontine», soit à

financer des dépenses du ménage. Selon l’auteure, 94% des bénéficiaires prennent au moins

en charge les dépenses liées à l’alimentation dans le ménage. Cela se fait soit par la

consommation directe de la marchandise ou l’achat grâce au revenu généré par l’activité.

81% des bénéficiaires consacrent leur revenu pour au moins deux postes de dépense à

savoir : l’alimentation, le loyer, la scolarisation des enfants, la santé, l’habillement, l’eau et

l’électricité. L’enquête révèle également que des changements positifs ont commencé par

naître dans la vie quotidienne des bénéficiaires. Il y a donc amélioration de leurs conditions

de vie dans plusieurs domaines à savoir : l’habitude alimentaire, le logement, l’éducation,

la santé, l’habillement etc. Certaines femmes ont déclaré que le démarrage des activités,

l’intégration et la participation à des travaux de groupe leur ont permis de s’épanouir et de

s’émanciper. Au total, le microcrédit aux plus pauvres a permis aux bénéficiaires de

s’investir dans les activités à partir desquelles des revenus ont été tirés.

Enfin, l’auteure met l’accent sur quelques faiblesses du programme. Il s’agit de

l’analphabétisme des bénéficiaires et les impayés enregistrés qui sont parfois dus aux

catastrophes naturelles. L’exemple de la Région du Mono (c’est l’un des douze

départements du Bénin touché par une inondation) est un cas d’école car les

remboursements étaient à 100% mais à la suite de la crue du lac, les femmes n’arrivaient

plus à rembourser compte tenu du ralentissement de leurs activités.

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4.2.8. Le mémoire intitulé : Femmes et pauvreté en milieu urbain et les

institutions de microfinance : cas de l’Assef (Association d’entraide des femmes)

2009-2010

Parlant de microcrédit et de ses effets sur les femmes bénéficiaires dans son

mémoire de maîtrise, Ahouansinkpo (2009-2010) présente dans un premier temps

l’institution de la microfinance (AssEF) et ses produits c’est-à-dire les produits financiers

mis à la disposition des clients, avant d’analyser les effets de ces derniers sur les

bénéficiaires. L’objectif de ce travail est d’analyser les atouts et les contraintes de l’AssEF

dans le processus de l’amélioration des conditions de vie des femmes pauvres en milieu

urbain. Trois hypothèses ont été retenues pour faire le travail. Premièrement, si le mode de

fonctionnement et de gestion des structures de l’AssEF permet d’améliorer la situation

socio-économique de ses membres ; à moyen terme. Deuxièmement, si l’augmentation du

revenu induit une indépendance financière qui peut accroître l’autonomie et le prestige de

la femme dans le contexte familial, voire au sein de la collectivité et enfin, si

l’alphabétisation fonctionnelle et la formation permettent aux néo-alphabétisés de prendre

conscience de la nécessité de cultiver entre elles l’esprit de solidarité et d’entraide.

L’observation, l’entretien et le questionnaire sont les techniques de collecte de données

utilisées. La technique du choix raisonné a été utilisée pour la constitution de

l’échantillonnage qui est de 60 enquêtés.

Les différents types de crédits offerts par l’institution sont, entre autres, le crédit

ordinaire, le crédit «la commerçante», le crédit de groupe et le crédit scolaire ainsi que

l’épargne préalable et l’épargne obligatoire. Le crédit ordinaire est octroyé à tout sociétaire

remplissant les conditions suivantes : être résident dans le quartier où se trouve la caisse,

être régulier aux réunions et avoir deux avaliseurs au sein de la caisse, avoir une épargne

préalable de 25% du crédit demandé bloquée jusqu’à la fin du remboursement. La durée de

remboursement du crédit varie de un à huit mois. Le taux d’intérêt est de 2% par mois sur

le montant du crédit. Le crédit «la commerçante» est un crédit de très courte durée destiné

aux activités commerciales qui nécessitent des besoins ponctuels et urgents de fonds pour

saisir des opportunités de commerce. Il est accordé aux sociétaires de la caisse et également

aux non sociétaires. L’objectif, c’est de permettre aux non sociétaires de devenir membres

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après deux crédits «la commerçante». Pour bénéficier de ce crédit, la nécessité d’avoir deux

avaliseurs au sein de la caisse s’avère indispensable comme dans le cas du crédit ordinaire.

La durée de remboursement est de deux mois. Le taux d’intérêt du crédit est de 10%

répartie de manière suivante : pour les sociétaires 3% pour la caisse et 7% pour épargne

obligatoire. Pour les non sociétaires 5% pour la caisse et 5% pour épargne obligatoire. Si

après deux crédits, la non sociétaire n’adhère pas à la caisse les 5% d’épargne obligatoire

constituée reviennent à la caisse. Signalons également que le montant minimum octroyé à

ce niveau se situe entre 10 000 FCFA (22 dollars canadiens) et 30 000 FCFA (63 dollars

canadiens). Quant au crédit du groupe, il a été conçu pour permettre aux femmes les plus

pauvres qui n’ont pas les moyens pour les formalités d’adhésion à la caisse d’y adhérer

progressivement. Ainsi trois à cinq femmes se mettent ensemble pour bénéficier auprès de

la caisse de crédit. Lors du remboursement, chaque membre du groupe est soumis à verser

progressivement une épargne obligatoire qui lui permettra après un certain nombre de

cycles, d’avoir une épargne personnelle et de bénéficier de façon individuelle d’un crédit

ordinaire. Le taux d’intérêt est de 2%. Enfin le crédit scolaire est accordé au bon sociétaire

une fois par an à l’approche de la rentrée scolaire pour contribuer à l’achat des fournitures

scolaires et au paiement des frais de scolarité. La durée de remboursement est de trois mois,

le taux d’intérêt est de 1% par mois. Concernant les épargnes, il y a l’épargne préalable qui

est exigée au membre sociétaire de la caisse avant l’obtention du crédit. Elle représente

25% au moins du montant du crédit. Elle est rémunérée actuellement au taux de 3% calculé

sur le solde moyen. Quant à l’épargne obligatoire, elle est constituée avec le crédit du

groupe et du crédit la commerçante. Elle n’est pas rémunérée lorsque le membre est intégré

aux cycles de crédit du groupe. Mais lorsqu’elle devient sociétaire et obtient un crédit

ordinaire, son épargne est rémunérée au même taux que l’épargne préalable.

Les bénéficiaires de crédit de cette association sont des femmes. L’âge minimum au

sein des groupements se situe entre 15 et 20 ans. L’âge maximum se situe entre 60 et 80

ans. La moyenne dominante se situe entre 35 et 45 ans. Sur les quatre groupements visités

seulement un comporte surtout des membres ayant quelques années d’étude au secondaire.

Par contre, les quatre groupes étudiés disposent à la fois de membres du primaire,

alphabétisés et de membres non alphabétisés. Pour bénéficier du crédit de l’association, il

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faut être une femme résidente du quartier, exercer une activité génératrice de revenus. Ce

qui permet d’ailleurs de devenir sociétaire de plein droit.

Au début de son analyse, Ahouansinkpo montre que les ressources de la caisse sont

les dépôts (épargne), le droit d’adhésion et la part sociale. Le financement de la caisse vient

de l’épargne des femmes-elles mêmes et que l’intérêt recueilli sert à payer les charges

prises en compte par la caisse. Ainsi donc, on note au niveau de l’AssEF, l’insuffisance de

ressource financière. Les nombreuses formalités à remplir avant d’obtenir une ligne de

crédit au niveau des banques et des partenaires, l’analphabétisme de la majorité des

femmes, la mévente, la mauvaise gestion et les problèmes d’impayés constituent autant de

facteurs qui freinent le développement de l’association.

Ahouansinkpo mentionne qu’avec le crédit octroyé par cette association, les femmes

avouent qu’elles sont plus écoutées par leur conjoint. Elles n’attendent plus nécessairement

leur époux pour subvenir aux besoins du ménage. Elles participent conjointement à la prise

de décision au sein du ménage. La femme acquiert donc une autonomie financière.

Cependant les contraintes observées au niveau de cette association restent l’insuffisance de

ressources financières, les formalités administratives à remplir avant l’obtention des lignes

de crédit, la non acceptation de traitement de faveur à l’égard de l’AssEF au niveau des

banques et les intérêts à rembourser ainsi que les impayés enregistrés auprès des différentes

caisses.

Malgré ces difficultés, l’AssEF permet d’améliorer la situation socio-économique

de ses membres. Au niveau de tout le groupement enquêté les femmes ont affirmé qu’après

leur adhésion aux groupements de l’AssEF, leur vie a changé. Avec les crédits octroyés, les

activités se sont diversifiées, rentabilisées et le revenu, augmenté. L’auteure stipule que les

bénéfices ainsi réalisés servent à renforcer l’épargne et sont aussi utilisés pour résoudre les

problèmes familiaux tels que les frais de scolarisation des enfants, l’achat des fournitures

scolaires, les soins médicaux de la famille et enfin pour s’offrir des plaisirs et participer aux

cérémonies de la collectivité.

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L’auteur conclut en disant que les groupements de l’AssEF sont une réalité sociale

et économique et font partie intégrante de la société globale; qu’ils participent à la

transformation politique sociale et économique de leur localité; qu’ils constituent un canal

efficace de socialisation des membres et une école qui les prépare à mieux gérer leur

inévitable intégration aux processus économique national et mondial. De plus, la

participation des femmes aux côté des hommes dans la prise en charge des besoins du

ménage constitue aujourd’hui un atout dans la réduction de la pauvreté.

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Chapitre : 5 Analyse des résultats

5.1 Les produits financiers mis à la disposition des populations

À la lecture des différents mémoires et rapports, nous constatons qu’il y a en général

deux produits qui sont offerts aux populations au Bénin. Ces produits financiers varient

d’une institution de microfinance à une autre. Les crédits qui sont le plus souvent octroyés

sont : le crédit individuel et le crédit de groupe.

Généralement, le crédit individuel est accordé à tout individu qui désire bénéficier

des prêts et qui répond aux exigences des IMF. Ces exigences varient également d’une

institution à l’autre. Mais le plus important est d’avoir un ou deux avaliseurs pour

bénéficier d’un prêt tout en ayant déposé un fond comme une épargne préalable (épargne

volontaire) au départ auprès de cette institution financière. C’est généralement en fonction

de ce qui est déposé à titre d’épargne préalable que le crédit est accordé. Au niveau de

l’AssEF par exemple, il faut avoir une épargne préalable de 25% du crédit demandé

laquelle est bloquée jusqu’à la fin du remboursement.

Le second type de crédit est celui dit de groupe. Ce type de crédit est accordé à des

individus (trois, quatre ou plus) qui n’ont pas une épargne préalable mais qui bénéficient

des prêts sur la base d’une caution solidaire. Cette caution solidaire pousse chaque individu

à faire un effort de payement pour ne pas compromettre l’obtention de prêts ultérieurs à

l’ensemble du groupe. Une épargne obligatoire est ainsi instaurée par les IMF pour

permettre aux individus bénéficiant de crédit de groupe d’épargner un peu d’argent à

chaque remboursement pour qu’en fin de remboursement ils constituent leur propre

épargne à travers l’épargne obligatoire. Ce qui leur permet de bénéficier par la suite des

crédits individuels.

À tout ceci, s’ajoutent les modalités d’adhésion des IMF. Ainsi les six mémoires lus

indiquent que pour adhérer à ces IMF, il faut payer 1000 FCFA OU 2000 FCFA (3 ou 6

dollars canadiens) et ce, selon les IMF qui fixent les frais d’adhésion à savoir, les frais

d’adhésion, de formation et les frais de dossier. Ces différentes IMF offrent également aux

populations outre les crédits de formations et ceux concernant la gestion de leur crédit, des

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services, tels l’alphabétisation des bénéficiaires de crédit, qui sont heureux d’apprendre leur

langue et une formation nutritionnelle leur permettant de mieux nourrir dorénavant leur

petite famille.

La remarque ici est que les individus n’ayant pas une épargne préalable ne peuvent

bénéficier de crédit qu’à travers la formation d’un groupe solidaire comme l’indiquent les

différents documents lus. Ce qui est tout à fait normal au niveau des IMF car cela leur

permet de récupérer l’argent emprunté en instaurant un climat de suivi entre les individus

d’un même groupe d’emprunteurs et d’une pression sociale entre ces derniers. Mais l’autre

aspect est que lorsqu’un individu n’arrive pas à rembourser sa dette compte tenu des

situations indépendantes de sa volonté (catastrophe naturelle, mévente, maladie, etc.), il

compromet l’avenir de tout le groupe qui peut se voir obliger de contracter d’autres prêts

afin de respecter leur engagement de remboursement auprès de la première institution

financière. Ce qui veut dire que l’obtention de prêt à caution solidaire est à la fois un atout

et une faiblesse du système. Cet état de chose n’a pas été mis en exergue par les différents

documents mais constitue un point important dans le devenir des emprunteurs.

La seconde remarque importante concernant les produits financiers mis à la

disposition des populations est le crédit à l’agriculture. Nous constatons que la plupart des

IMF accordent des crédits de petits montants à courte durée. Alors que l’agriculture, qui

devrait constituer un pôle de financement privilégié par ces IMF afin d’enclencher un

véritable développement des activités rurales susceptible d’améliorer les conditions de vie

des populations rurales, reste peu financer.

5.2 Les montants accordés et les modalités de payement

Les montants accordés varient aussi d’une institution à une autre. Le constat général

est que les crédits octroyés sont compris généralement entre 5000 FCFA et 100 000 FCFA

voire plus (11 et 220 dollars canadiens). Mais les montants qui sont le plus souvent

accordés se situent entre 5000 et 50 000 FCFA (11 à 110 dollars canadiens). Les modalités

de remboursement varient également. Certaines IMF exigent des remboursements mensuels

et ce, après l’obtention du crédit. D’autres types de crédit par contre, exigent le

remboursement deux mois après l’obtention du prêt. Mais généralement le remboursement

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est échelonné sur une période de six à huit mois, voire douze mois. Nous constatons ici une

insuffisance des montants accordés depuis le premier prêt jusqu’au dernier, ce qui a été

d’ailleurs souligné par Alahanou (2010, cf. étude 4.2.7). Avec la montée des prix des

denrées alimentaires et autres aujourd’hui, accorder un montant de 100 dollars canadiens à

un individu pauvre qui à 80% pratiquent le commerce comme activité est certes un atout

mais en réalité très insignifiant. Il est vrai que le montant du crédit augmente à chaque

renouvellement du prêt (si le bénéficiaire a pu payer à temps) mais la réalité est que celui

qui contracte le prêt a des besoins élémentaires avant l’obtention du prêt : peut-être devait-

t-il de l’argent à des parents ou amis. Si avec ce montant «insignifiant» il doit subvenir à

ses besoins élémentaires immédiats et autres et en même temps commencer une activité, ce

montant nécessiterait d’être revu à la hausse. Il est vrai que les besoins existeront toujours.

Mais cette augmentation des montants doit tenir compte du contexte socioéconomique des

bénéficiaires en termes de pouvoir d’achat et des antécédents économiques avec leurs

voisins, amis et parents afin de leur permettre de consacrer la partie importante du montant

alloué à une activité génératrice de revenu au nom de laquelle le prêt a été consenti. Parce

que si le bénéficiaire du crédit devait de l’argent à des voisins, nous ne voyons pas dans

quelle condition il peut commencer une activité génératrice de revenus à côté de ces

derniers sans les avoir remboursé préalablement. Dans ces conditions, le microcrédit peut

instaurer des climats de conflit entre les individus. Aussi à en croire les documents lus (cf.

les huit études), les femmes qui bénéficient de ces crédits contribuent énormément aux

besoins alimentaires et autres de leur famille. Mais pour que cela soit effectif, il faudrait

augmenter les montants accordés à partir du premier prêt et aussi essayer de différer le

premier remboursement à trois, voire six mois pour enfin permettre aux bénéficiaires

d’exploiter suffisamment les fonds avant de commencer les remboursements.

Quant aux taux d’intérêt, nous notons une variation au niveau de chaque institution

financière. Le PADME par exemple pratique un taux d’intérêt annuel effectif de 31,99%

soit un taux mensuel de 2,34% selon l’étude de Hounye et Gninoukoun (2002-2003). Des

travaux révèlent également que les taux d’intérêts des IMF au Bénin sont pour la plupart

compris entre 15 et 24% (en moyenne) et que toutefois, certaines institutions offrent des

taux jusqu’à 60% l’an (Kounde Djaikpon, 2003; Ahouandjin, 2009). De façon générale, à

part le PMCPP qui pratique un pourcentage de taux d’intérêt à 5 % l’année selon les études

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de Ahouandjin (2009) et Alahanou (2010), toutes les autres IMF ont un taux d’intérêt

compris entre 2 et 2,34% voire plus par mois. Il ressort de ce constat qu’en réalité le

microcrédit pouvait aider mieux les bénéficiaires à sortir de la pauvreté si le taux d’intérêt

n’était pas à ce niveau. Si malgré ce taux d’intérêt, les différents documents lus témoignent

des retombées positives du microcrédit sur les bénéficiaires à part quelques rares cas, il est

impératif alors de se demander si le microcrédit des IMF a pour ambition d’éliminer la

pauvreté ou tout simplement de venir en aide de façon plutôt minimale aux plus pauvres. Si

les pauvres devraient payer des intérêts élevés sur des crédits qui sont censés leur venir en

aide n’est-ce pas là une manière de les enrôler dans un système bancaire classique qui ne dit

pas son nom? Nous constatons également sur la base des documents étudiés que les clientes

de ces institutions financières contractent des prêts parce qu’elles n’ont pas d’autres

alternatives. Elles ont besoin d’un fond de démarrage d’une activité génératrice de revenu.

Voilà une importante raison qui les motive à contracter un prêt même si l’intérêt est élevé.

Ceci est révélateur de la situation de pauvreté que vivent ces familles ainsi que leur niveau

de scolarisation qui ne leur permet pas de bien faire le calcul des taux d’intérêt avant de

contracter les prêts.

5.3 Les conditions de vie des bénéficiaires avant l’obtention des crédits

Les bénéficiaires de microcrédit sont dans la tranche d’âge de 15 à 80 ans. Tous les

documents lus s’accordent sur l’état de pauvreté qui caractérise ces derniers. Nous

remarquons à travers les documents que les bénéficiaires sont en général dans une situation

de manque d’argent car il ne leur est pas facile de trouver des fonds comme 50 ou 100

dollars canadiens pour entreprendre une activité génératrice de revenu. Ce sont des

individus qui passaient par le biais des parents, amis ou maris avant d’entreprendre de petits

commerces. Le niveau intellectuel de ces derniers est significatif pour comprendre l’état

dans lequel ils se trouvent. Nous constatons que ces individus en question ont un niveau

d’instruction très bas. À part un seul rapport (Évaluation et impacts de la microfinance sur

les bénéficiaires de microcrédit, 2003) qui montre que 65,43% des enquêtés sont instruits,

tous les autres documents montrent que les bénéficiaires ont un niveau d’instruction faible.

La majorité a le niveau primaire comme le montre cette statistique tirée du mémoire

d’Alahanou (2010) : les bénéficiaires ont un niveau d’instruction qui varie entre le primaire

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et le secondaire. Celles qui ont fait les études primaires représentent 41% de la population

enquêtée; 15% dans le cas d’études au secondaire; 44% pour ceux qui n’ont aucun niveau

d’instruction Alahanou (2010). Ceci témoigne de l’illettrisme qui caractérise cette cohorte

d’individus de la société qui sont majoritaires. Le fait le plus marquant est que les individus

qui reçoivent le crédit par le biais de la caution solidaire, soit des individus qui n’ont pas de

garantie matérielle et qui n’ont pas pu épargner une petite somme pouvant servir d’épargne

volontaire avant de bénéficier du crédit, sont majoritaires. C’est la preuve de la pauvreté

absolue qui caractérise les individus vivant en dessous de 1 dollar américain. Nous

remarquons également qu’avant l’introduction des crédits, certaines femmes éprouvaient

des difficultés à nourrir convenablement leurs enfants et ne savaient même pas ce qui

constituerait pour leurs enfants une alimentation équilibrée selon Ayité (1995-1996). Leur

situation d’inactivité rendue inévitable par l’inexistence de l’argent les entraînaient dans

une certaine oisiveté et une dépendance inédite non seulement de leur mari pour celles qui

sont mariées mais aussi dans une situation de vulnérabilité pour les jeunes filles en cette

période de propagation du VIH/SIDA.

Suite à l’échec des programmes d’ajustement structurel (PAS), plusieurs personnes

se sont retrouvées dans une situation de précarités plus précisément les femmes des pays en

développement. Le constat a été fait par le Programme des Nations Unies pour le

développement (PNUD) comme indiqué précédemment. Les femmes manquaient

cruellement d’argent pour entreprendre des activités génératrice de revenus et sont

dépendantes des hommes, des parents et amis ou des crédits à taux élevé comme l’a

rapporté Koundé (2003).

Cette situation doublée du niveau de scolarisation très faible des femmes les

plongent dans une condition de vie exécrable. Ce qui n’est pas sans effets sur l’éducation

des enfants et leur bien-être. Comme pour pallier à cette situation les microcrédits ont été

vus comme un outil pouvant éradiquer la pauvreté. Ainsi, pour les institutions de Bretton

Woods le microcrédit peut éliminer la pauvreté et ceci grâce aux succès qu’a connu la

banque Grameen cité précédemment.

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5.4 Les activités génératrices de revenus (AGR)

Le constat général est que les bénéficiaires des microcrédits s’adonnent à des

activités comme le commerce, les transformations agro-alimentaires. Le commerce

demeure l’activité principale des bénéficiaires de crédit. Il s’agit de l’achat et de la revente

des produits de consommation. Nous remarquons que si la majoritaire des bénéficiaires

s’adonnent au commerce c’est compte tenu de la nature des prêts contractés. Ces prêts qui

doivent être remboursés dans un laps de temps limité ne peuvent pas permettre à une

grande majorité des bénéficiaires de s’adonner à des activités comme l’agriculture et

l’élevage par exemple car ces activités nécessitent du temps avant de profiter à celui qui s’y

adonne. Dans ces conditions, les prêts de microcrédit ne peuvent pas permettre un

décollage économique gage d’une réduction de la pauvreté. Car l’activité agricole qui

pouvait insuffler le développement des activités rurales fait figure de parent pauvre dans le

financement des IMF.

L’autre constat est que ces activités d’achat et de vente des marchandises (des

produits de consommation) aident les bénéficiaires pour leur consommation personnelle

dans le cadre du foyer comme l’a indiqué Ayité (1995-1996). Ces denrées constituent

généralement la base de la consommation des bénéficiaires et de leur entourage, surtout en

période de mévente. Aussi utiles soient-elles ponctuellement, elles peuvent également

porter préjudice à l’évolution de l’activité. D’où la nécessité de financer plus l’agriculture

pour permettre une autosuffisance alimentaire. Cette autosuffisance alimentaire permettra

aux bénéficiaires de crédit de ne pas dépenser les fonds de commerce pour les denrées

alimentaires de leurs foyers.

Par ailleurs, ces activités s’exercent dans l’informel pour la plupart et constituent un

manque à gagner pour l’État en termes d’impôts et de taxes non perçus. Ce qui est

remarquable ici est que l’État béninois qui fait du microcrédit un levier du développement

et qui à travers son PMCPP prête de l’argent aux femmes, investit dans l’informel alors

qu’il pouvait bénéficier des taxes pour la survie de son économie si le secteur était bien

organisé. Ceci nous amène à penser que le PMCPP lancé par le gouvernement de Yayi

Boni, ne vise pas forcément à trouver une solution à la pauvreté et au développement du

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Bénin mais au contraire, à des fins électoralistes. La preuve est que ce PMCPP a été utilisé

comme argument de campagne lors des dernières élections présidentielles de 2011.

L’autre phénomène est que l’agriculture qui constitue la base de l’économie du

pays, qui est pratiquée par 80% de la population comme indiqué précédemment ne peut pas

tirer profit de ces microcrédits. En raison des délais de remboursement des prêts et de la

petitesse des montants octroyés, il sera difficile pour un paysan de profiter de ces crédits.

Car il lui faut des mois pour récolter sa semence et une quantité importante d’argent au

préalable pour débroussailler son champ avant de semer ses produits. Ce type de crédit

accordé à une majorité de Béninois ne peut donc malheureusement profiter aux agriculteurs

alors que c’est par l’agriculture que nous avons les produits alimentaires. De même n’est-il

pas certain que le type de crédit accordé aux agriculteurs puisse susciter le même

engouement ou une popularité aussi forte que celui octroyé aux activités de type

commercial.

5.5 Les conditions économiques et sociales après l’obtention des

microcrédits

La comparaison des différents travaux étudiés pour évaluer l’impact des projets de

microcrédit sur les bénéficiaires nous indiquent que le microcrédit à des effets positifs

remarquables sur les bénéficiaires. Malgré les quelques recommandations faites par les

différents auteurs pour parfaire ce système financier, tous s’accordent sur son importance

dans la perspective de lutte contre la pauvreté. Nous remarquons pour notre part que

l’instauration des projets de microcrédit au Bénin dans la perspective de lutter contre la

pauvreté est une nécessité mais l’amélioration du système et particulièrement le

financement de l’agriculture par ces IMF sont une condition sine qua non pour la réduction

de la pauvreté car les effets positifs des projets de microcrédit ne sont pas encore ce qu’il

faut pour la lutte contre la pauvreté.

Nous constatons également à travers les travaux étudiés que les populations

apprécient les crédits qu’elles obtiennent car dans le passé elles n’ont pas joui de telles

opportunités. Aujourd’hui avec ces crédits, les bénéficiaires arrivent à entreprendre des

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activités génératrices de revenus et les bénéfices issus de ces activités leur permettent de

jouer un rôle important dans la société comme de contribuer aux dépenses du foyer avec le

mari ou prendre carrément en charge ses enfants. Le microcrédit a entraîné un changement

sur le plan social. Hier, c’était les hommes qui prenaient en charge les dépenses du foyer

mais aujourd’hui les femmes aussi y participent activement. Grâce aux crédits, les

responsabilités sont partagées dans le couple et les femmes sont plus écoutées par leur mari.

Cette situation a entrainé une certaine égalité entre hommes et femmes. Les femmes

discutent des projets de famille avec les hommes et participent à la prise de décision dans le

couple. Elles sont aujourd’hui plus actives que jamais en participant à la vie sociale, voire

politique locale. La formation que les femmes reçoivent au niveau des IMF leur permet

d’acquérir des notions nutritionnelles, ce qui leur permet d’améliorer la qualité des repas

dans le foyer. Grâce à l’alphabétisation, certaines d’entre elles savent lire et écrire dans leur

langue maternelle et arrivent à bien gérer leurs commerces. Il va sans dire que les crédits

ont donné un nouveau statut à la femme qui est aujourd’hui entrepreneuse alors qu’hier elle

était confinée dans son rôle de femme au foyer.

Mais l’appréciation faite par les femmes à propos du crédit ne signifie pas pour nous

que ce type de crédit est meilleur mais plutôt qu’il s’agit d’une appréciation du fait que

c’est nouveau à leurs yeux et qu’au paravent cela n’existait pas. Aussi, le fait que les

femmes participent ou prennent en charge les dépenses du foyer ne rendra-t-il pas les

hommes passifs dans la recherche d’un emploi ou plutôt à fuir leurs charges familiales. Il

faut plutôt en aval financer l’homme à investir dans l’agriculture et en amont la femme

dans la transformation des produits agricoles et les commerces de détails. Ce qui va

assurément réduire la pauvreté et contribuer au développement du Bénin.

Les retombées économiques des crédits comme l’indiquent les travaux étudiés

permettent à la femme de scolariser son enfant et de payer ses premiers soins en cas de

maladie grâce à son autonomie financière rendu possible par l’amélioration de son revenu .

Nous pouvons donc dire qu’il y a une amélioration à en croire ces travaux. Mais ces

revenus «minimes» ne peuvent pas en réalité lutter contre la pauvreté. Les dépenses pour

les soins de santé même si on ne va pas à l’hôpital tous les jours et les frais de scolarité des

enfants (de 4 à 7 enfants par couple) dépassent largement ces prêts de microcrédit. Quand

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93

on regarde de près les tissus pagnes extrêmement chers que portent ces femmes

bénéficiaires de microcrédit, nous nous demandons si c’est toujours ces prêts insignifiants

qui leur permettent de se procurer ces vêtements. D’après tout ce qui précède, les prêts de

microcrédit aux femmes va-t-elle permettre aux pays en développement, plus précisément

le Bénin, de réduire la pauvreté et la faim qui touchent ses populations alors que le secteur

de l’agriculture qui devrait permettre une autosuffisance alimentaire grâce à la production

agricole pour lutter contre la faim et le chômage reste faiblement financé par les IMF?

5.6 Le microcrédit et le secteur de l’agriculture

Il est de toute évidence que le microcrédit utilisé pour le but pour lequel il a été

demandé et en dehors de toutes contraintes (maladies, aléas climatiques et autres) permet

une amélioration des conditions de vie des bénéficiaires. Mais le constat aujourd’hui est

que le secteur qui devrait le plus aider à lutter efficacement contre la faim et la pauvreté

reste faiblement financé par les IMF. La preuve est que la majorité des IMF prêtent de

l’argent aux femmes (des villages et des villes) qui investissent dans les commerces et les

activités de transformation (bien entendu les activités rurales). Ces prêts permettent aux

femmes le développement des activités rurales non-agricoles c’est-à-dire la transformation

des produits agro-alimentaires en milieu rural béninois et les petits commerces. Mais le

financement des activités agricoles (les cultures vivrières) reste faible.

Au Bénin par exemple, les IMF qui prêtent de l’argent aux individus pour le

développement des activités de commerce et de transformation sont plus nombreuses que

les mutuelles et coopératives qui prêtent de l’argent pour les activités agricoles. Même dans

le domaine du financement agricole, ces mutuelles financent les produits de rente comme le

coton au détriment des cultures vivrières (maïs, manioc, etc.) comme nous l’avons indiqué

précédemment. Les statistiques indiquent qu’on dénombre au Bénin en 2005, 293 mutuelles

et coopératives d’Épargne et de crédit (nombre de représentations, agences ou antennes)

avec un taux de fréquence relative de 22,4%, contre 739 groupement d’Épargne et de crédit

(nombre de représentations, agences ou antennes) avec un taux de fréquence relative de

56,5% (Répertoire des institutions de microfinance, 2005 : 11). Ceci témoigne du faible

investissement dans l’agriculture par les IMF alors que le rapport mondial de

développement (2008) montre l’importance de l’agriculture dans la réduction de la pauvreté

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et indique que : «As an economic activity, agriculture can be a source of growth for the

national economy, a provider of investment opportunities for the private sector, and a prime

driver of agriculture-related industries and the rural nonfarm economy» (world

development report, 2008 : 3).

Malgré la présence des IMF qui investissent dans l’agriculture au Bénin comme

nous l’avons indiqué précédemment, nous remarquons une insuffisance des fonds alloués à

l’agriculture car, comme l’indique Wampfler (2000), les volumes de crédit offerts sont

faibles face aux besoins de financement de l’agriculture : l’exemple du Bénin suffit à

illustrer ce constat : la contribution des IMF à l’agriculture était de l’ordre de 6 milliards en

1997, alors que les besoins de financement de la seule filière coton étaient de l’ordre de 30

à 40 milliards, dont environ 10 milliards pour la seule production (Wampfler, 2000 : 5).

Cet état de chose c’est-à-dire le faible financement des activités agricoles nous

amène à dire que l’amélioration des conditions de vie des populations à travers le

microcrédit pour les activités de commerce et de transformation (les activités rurales) n’est

pas la solution sine qua non pour la réduction de la pauvreté. Au contraire, c’est le

financement par les IMF des activités agricoles qui peut engendrer un développement des

activités rurales (les transformations agricoles et les petits commerces). Ceci entraînerait la

création de l’emploi dans le domaine de l’agriculture, une autosuffisance alimentaire grâce

à la production agricole d’où la réduction de la pauvreté.

5.7 Recommandations

La présente étude montre que les projets de microcrédit constituent un élément

important dans le programme de lutte contre la pauvreté chez les femmes. À la suite des

données analysées et eu égard aux avis des bénéficiaires, il serait important que les IMF

augmentent les montants qui sont accordés aux bénéficiaires compte tenu de la cherté de la

vie au Bénin aujourd’hui due aux récentes crises financières mondiales qui ont entraîné la

hausse des prix des denrées alimentaires. Car le commerce des denrées alimentaires

constitue le domaine privilégié d’activités et de consommation des bénéficiaires. Il faut

également que les organismes prêteurs accordent un peu plus de temps dans les délais de

remboursement, ce qui permettrait aux bénéficiaires d’utiliser dans un délai donné les

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crédits avant de commencer le payement. L’autre phénomène très important est le

financement des activités agricoles par les IMF. Aujourd’hui, le financement de

l’agriculture est faible. Il faut donc revoir cet état de chose et encourager les promoteurs de

crédit à financer l’agriculture et à trouver des moyens et des stratégies de mise en place des

compagnies d’assurance pour la couverture des risques de financement liés aux aléas

climatiques.

Il serait très intéressant si les IMF créent le volet «crédit à la consommation». Ce

volet aiderait les bénéficiaires à cesser de dépenser immédiatement les revenus issus de

leurs activités et à épargner adéquatement. Car nous constatons que les revenus issus de

leurs activités sont directement utilisés pour la consommation dans le foyer alors que cela

pourrait servir plus tard à financer d’autres activités. Cette épargne leur permettrait après

d’investir dans des activités qui nécessiteraient plus de financement et d’évaluer aussi les

bénéfices issus de leurs activités. Les IMF doivent prendre également en compte les

conditions de vie des bénéficiaires avant l’obtention des crédits, ce qui leur permettrait de

savoir quel type de crédit accordé à chaque demandeur après une analyse approfondie de

son contexte économique et social. Enfin il est important de comprendre le contexte social

dans lequel évoluent les demandeurs de microcrédit, faute de quoi, toute tentative d’octroi

de crédit dans le contexte des femmes des pays en développement risque soit l’échec soit de

n’apporter un changement notoire au niveau de vie de ces derniers.

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96

Conclusion

La réalisation de cette étude a été guidée par deux préoccupations majeures. Il s’agit

de voir dans un premier temps, la relation entre la nature des prêts de microcrédit et la

réalisation des projets des bénéficiaires, et dans un deuxième temps, la relation entre

conditions économiques et sociales et les prêts de microcrédit.

Nous pouvons, au terme de notre analyse et au regard des données étudiées dire que

les prêts de microcrédit ont contribué dans une certaine mesure à la réalisation des projets

des bénéficiaires car cela leur a permis d’entreprendre des activités génératrices de revenus

et d’être actifs économiquement même si tel n’a pas été le cas partout. Nous pouvons donc

affirmer qu’un pas a été fait dans la perspective de lutter contre la pauvreté car les femmes

pauvres disposent aujourd’hui des moyens financiers qui hier n’existaient pas, même s’ils

ne sont pas suffisants.

Quant à notre deuxième préoccupation nous constatons, contrairement à l’idée que

les conditions économiques et sociales des bénéficiaires de microcrédit devraient influencer

l’usage efficient des prêts, que les revenus issus de ces prêts ont plutôt contribué dans une

certaine mesure à l’amélioration des conditions de vie des bénéficiaires. Ces prêts ont rendu

les bénéficiaires plus ou moins autonomes financièrement. Ils leur ont permis de se faire

une place dans le foyer et à prendre en charge les besoins de leur foyer. Ces prêts ont

néanmoins joué un rôle important dans les rapports de genre dans les couples et ont

entraîné l’émancipation de plusieurs femmes bénéficiaires. Mais si les IMF contribuaient

plus au financement des activités agricoles, la réduction de la pauvreté serait plus effective

que ce qui est constaté aujourd’hui.

Somme toute, les prêts de microcrédit contribuent dans une certaine mesure à

l’amélioration des besoins élémentaires des bénéficiaires à savoir : le logement,

l’alimentation, les soins de santé primaires, la scolarisation des enfants etc. mais le

développement économique des bénéficiaires des microcrédits servirait-il de tremplin au

développement qu’on constate dans les pays développés? Autrement dit, le développement

du Bénin passerait-il par le microcrédit? Une question à laquelle des études plus poussées

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97

devront répondre en n’omettant pas du cadre d’analyse, les dimensions complexes du

contexte béninois et celui d’autres pays de l’hémisphère Sud dans les mêmes circonstances.

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Annexes

Tableau no1: Synthèse générale de la répartition des IMF par catégorie au

Bénin

Type

d’institutions

Statistiques globales

Nombre

d’institutions

Fréquence

relative des

IMF

Nombre de

représentations,

Agences ou

antennes

Fréquence relative

des représentations,

Agence ou antennes

Mutuelles et

Coopératives

d’Épargne et de

Crédit

293 38,5% 293 22,4%

Associations et

ONG

131 17% 222 17,0%

Sociétés 6 0,8% 19 1,5%

Projet

Gouvernementaux

à volet

microfinance

25 3,3% 35 2,7%

Groupement

d’Épargne et de

Crédit

307 40,3% 739 56,5%

Total 762 100,0% 1308 100,0%

Source : Répertoire des institutions de microfinance, Cellule de microfinance 2005

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Tableau : no2 Tableau classificatoire des huit études analysées avec leurs

différents indicateurs

Les différentes études Les mesures de vérifications (indicateurs)

1) La dynamique des banques

communautaires pour le

développement des femmes en

milieu rural : Expérience du

CREDESA au sud-Bénin

-Les activités économiques

-Niveau d’instruction

-Rapport entre conjoints

-Nutrition

-Formation

-Scolarisation des enfants

-Retombées économiques

-Amélioration des revenus

2) Impact des systèmes de

financement décentralisés sur le

développement du secteur

informel : Cas du PADME

-Nutrition

-Santé

-Entretien corporel

-Formation

-Logement

-Transport

-Épargne

-Taux d’intérêt

-Modalités de remboursement

-Emploi crées

-Insertion des femmes dans le tissu économique

-Gestion des Ménages

3) Les produits de la microfinance

et la lutte contre la pauvreté : Cas

des institutions de microfinance

(IMF) du Bénin

-Services financiers

-Formation

- Octroi de crédit

-Taux d’intérêt

-Montants accordés

-Clientèles des IMF

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-Promotion des services microfinanciers

4) Programme de microcrédit aux

plus pauvres (PMCPP) dans le

processus de réduction de la

pauvreté dans le neuvième

arrondissement de Cotonou

-Montants accordés

-Conditions d’accès au crédit

-Taux d’intérêt

-Renforcement des capacités des femmes

-Formation

-Activités et revenus des bénéficiaires

-Amélioration du Bien-être

-Satisfaction des besoins fondamentaux

5) Femmes et pauvreté en milieu

urbain et les institutions de

microfinance : Cas de l’AssEf

(Association d’Entraide des

Femmes)

-Produits financiers disponibles

-Différentes types d’épargne

-Niveau d’instruction

-Condition d’octroi de crédit

-Formation

-Activités pratiquées

6) Contribution du microcrédit à

la réduction de la pauvreté dans la

commune d’Abomey-Calavi : Cas

de l’ONG BETHESDA

-Nombre d’IMF dans la commune

-Taux de pénétration (couverture spatiale)

-Taux de populations bénéficiaires de crédit

-Produits financiers offerts

-Différentes formes de crédit

-Taux d’intérêt pratiqué

-Nombre de groupements ayant bénéficiés de crédit

-Nombre d’individus ayant bénéficiés de crédit

-Nombres de personnes morales ayant bénéficiées de

crédit

-Montant des crédits accordés aux groupements et

individus

-Taux de remboursement des crédits

-Activités pratiquées

-Situation avant obtention de crédit

-Revenu quotidien des membres des groupements

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bénéficiaires

-Bénéfices générés par les activités

-Domaines où les revenus sont investis

-Niveau de consommation

-Autonomie financière

7) Mission d’évaluation globale

du programme de microcrédit aux

plus pauvres (PMCPP)

-Le revenu

-L’investissement

-La diversification des activités

-L’éducation des enfants

-La sécurité financière

-L’état nutritionnel

-La prise en charge sanitaire

-La qualité des relations entre conjoints

-L’acceptation sociale

-Le logement

-La capacité de gestion

-Le confort matériel

-L’accès à l’eau potable

-L’amélioration des moyens de déplacement

8) Évaluation et impacts de la

microfinance sur les bénéficiaires

de microcrédit

-Le revenu des ménages

-La consommation des ménages

-Emploi des jeunes

-Valorisation de la production en milieu informel

-Habitat/logement

Source : données secondaires

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Carte indiquant la position géographique du Bénin en Afrique

Source : http://translate.google.ca

Carte du Bénin

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Source : http://translate.google.ca

Carte administrative du Bénin

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