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29 Mars 2017 28 Mars 2017 Atelier de travail Conférence LE FINANCEMENT DE LA VIE POLITIQUE EN PÉRIODE ÉLECTORALE REGARDS CROISÉS INTERNATIONAUX SUR LES TECHNIQUES DU CONTRÔLE DU FINANCEMENT DES CAMPAGNES ÉLECTORALES RAPPORT FINAL En partenariat avec :

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Atelier de travail

Conférence

Le financement de La vie poLitique en période éLectoraLe

regards croisés internationaux sur Les techniques du contrôLe du financement des campagnes éLectoraLes

RAPPORTF I N A L

En partenariat avec :

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CEs évèNEmENTs ONT éTé ORgANIsés PAR L’INsTANCE suPéRIEuRE INdéPENdANTE POuR LEs éLECTIONs (IsIE) EN PARTENARIAT AvEC LE PROgRAmmE dEs NATIONs uNIEs POuR LE dévELOPPEmENT (PNud), LE CONsEIL dE L’EuROPE ET LA COmmIssION dE vENIsE, ET INTERNATIONAL FOuNdATION FOR ELECTORAL sysTEms (IFEs)

Avertissement : Le contenu de ce rapport reflète les discussions qui ont eu lieu lors de ces évènements et ne peuvent aucunement être considéré comme une présentation de faits ou une position officielle des institutions représentées.

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29 Mars 2017

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Atelier de travail

Conférence

Le financement de La vie poLitique en période éLectoraLe

regards croisés internationaux sur Les techniques du contrôLe du financement des campagnes éLectoraLes

RAPPORTF I N A L

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sOmmAIRE

RAPPORT FINAL dE LA CONFéRENCE suR LE FINANCEmENT dE LA vIE POLITIquE EN PéRIOdE éLECTORALEI. INTROduCTION II. PRésENTATION dE LA CONFéRENCEIII. PARTICIPATION ET déROuLEmENT dE LA CONFéRENCEIv. Résumé dEs PRésENTATIONs ET déBATs séANCE I : L’ENCAdREmENT JuRIdIquE du FINANCEmENT dE LA vIE POLITIquE : sTANdARds ET BONNEs PRATIquEs INTERNATIONALEs séANCE II : LE FINANCEmENT dE LA vIE POLITIquE EN TuNIsIE séANCE III : LEs méCANIsmEs INsTITuTIONNELs du CONTRÔLE du FINANCEmENT dE LA vIE POLITIquEv. RAPPORT dE syNTHèsE ET PRésENTATION dEs RECOmmENdATIONs dE LA CONFéRENCEANNEXEs : PROgRAmmE

RAPPORT FINAL dE l’Atelier de trAvAil « regArds croisés internAtionAux sur les techniques du contrôle du finAncement des cAmpAgnes électorAles » I. INTROduCTION II. PRésENTATION dE L’ATELIER dE TRAvAILIII. PARTICIPATION ET déROuLEmENT dE L’ATELIER dE TRAvAIL Iv. Résumé dEs PRésENTATIONs ET déBATs séANCE I : TECHNIquEs ET méTHOdEs d’évALuATIONséANCE II : mOyENs dE PREuvE, gEsTION dEs PLAINTEs ET RégImE dEs sANCTIONsv. RAPPORT dE syNTHèsE ET CLÔTuRE dE L’ATELIER dE TRAvAILANNEXEs : PROgRAmmE

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dE LA vIE POLITIquE Le financement

EN PéRIOdE éLECTORALE

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Conférence

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RAPPORT FINAL

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I. INTROduCTION

Nul ne peut nier l’importance de l’argent dans la vie politique. En effet, l’argent joue désormais un rôle déterminant dans la conduite des processus électoraux et s’il demeure une composante essentielle du déroulement d’une campagne électorale et constitue le ’nerf de la guerre’ pour les différents acteurs politiques, il peut s’avérer être un outil problématique d’un système politique. Avec le développement des techniques de la communication politique, le coût des campagnes électorales devient de plus en plus onéreux. Devant cette spirale et cette course au pouvoir, les tentations sont grandes et la frontière entre besoins légitimes de financement et mauvaises pratiques électorales est de plus en plus insaisissable.

La façon dont les campagnes électorales sont financées a un impact direct sur la qualité du processus électoral. L’intérêt de réguler la relation existant entre argent et politique est double : d’une part, assurer un financement adéquat pour que les candidats et les partis politiques soient à même de diffuser leur programme électoral au plus grand nombre et d’autre part, s’assurer, pour les Etats, que le système de régulation du financement des campagnes électorales est équitable et transparent et qu’il tend à limiter toute sorte de corruption et de distorsion du processus démocratique. Cependant, un système normatif et législatif de contrôle du financement des campagnes électorales ne peut être efficace que s’il est véritablement mis en œuvre et qu’une autorité de contrôle en assure l’application.

La régulation et le contrôle du financement des campagnes électorales et des partis politiques sont essentiels pour garantir à la fois l’indépendance des partis politiques et des candidats vis-à-vis de généreux donateurs et assurer à tous les acteurs politiques la possibilité de s’affronter et de confronter leurs idées dans le respect du principe d’égalité des chances. Les règles relatives au financement des campagnes électorales doivent ainsi viser à assurer un équilibre entre le besoin de respecter la liberté d’expression des acteurs politiques et la nécessité de garantir un processus électoral juste et équitable.

En Tunisie, les avancées remarquables réalisées en matière du financement des campagnes électorales ne doivent pas masquer les faiblesses et les lacunes du cadre juridique relatif au financement de la vie politique en général identifiées et soulignées par plusieurs institutions publiques et

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organisations de la société civile. Les textes adoptés après le 14 janvier 2011, que ce soit le décret-loi n° 87-2011 du 24 septembre 2011 portant organisation des partis politiques, ou la loi organique n° -201416 du 26 mai 2014 relative aux élections et au référendum ont montré leurs limites.

Ainsi, en matière de financement des partis politiques, le décret-loi n° 87-2011 ne définit ni le montant ni les procédures d’allocation du financement public des partis politiques et le mécanisme de contrôle institutionnel du financement des partis politiques, prévu par le même texte, n’a jamais fonctionné. Quant à la loi électorale de 2014, elle a laissé plusieurs questions en suspens, dont notamment la réglementation des sondages d’opinion1.

Toutes ces questions ont placé les débats sur le financement de la vie politique en Tunisie au cœur de l’agenda politique et institutionnel du pays. De nouveaux textes sont en cours de préparation par le nouveau gouvernement en matière de transparence de la vie publique et les débats parlementaires sur le projet de loi relative aux élections locales et régionales ont mis l’accent sur la nécessité de la création d’une institution publique chargée du contrôle du financement de la campagne électorale voire de la vie politique en général.

1 . il n’y a pas eu d’initiative gouvernementale à ce sujet, mais deux propositions de loi portant sur les sondages d’opinion ont été déposées à l’Assemblée des représentants du peuple à l’initiative des députés. il s’agit de la proposition de loi n° 2016/21 présentée par 10 députés et de la proposition de loi n° 2017/23 déposée le 15 février 2017 par un groupe de 21 députés. A ce jour, aucune suite n’a été donnée à ces propositions. ci-joints, les liens des deux textes sur le site de l’ARP :http://arp.tn/site/servlet/fichier?code_obj=93656&code_exp=1&langue=1http://www.anc.tn/site/servlet/fichier?code_obj=96945&code_exp=1&langue=1

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C’est dans ce contexte que l’ISIE et ses partenaires internationaux ont décidé d’organiser une conférence sur le financement de la vie politique en période électorale afin de nourrir la réflexion sur l’amélioration du cadre juridique pour les prochaines élections municipales et régionales et d’apporter un éclairage international aux acteurs et décideurs politiques et institutionnels tunisiens quant aux modèles, principes et bonnes pratiques en la matière, ainsi qu’aux règles et techniques du contrôle du financement des campagnes électorales.

La conférence qui s’est tenue à Tunis le 28 mars avait trois objectifs principaux :1/ Rappeler aux principales parties prenantes

II. PRésENTATION dE LA CONFéRENCEtunisiennes impliquées ou concernées par la réglementation du financement de la vie politique les principes, critères, méthodes, et bonnes pratiques en la matière ;

2/ Apporter un éclairage international et une vision comparée sur les questions de financement politique afin de stimuler le débat et les échanges entre des acteurs venant d’horizons différents mais confrontés à des défis similaires ;

3/ Fournir un forum pour les acteurs et décideurs politiques et institutionnels tunisiens afin de leur donner des pistes de réflexion pour les réformes législatives à venir.

Près de cent vingt personnes étaient présentes lors de l’ouverture de la conférence par le Ministre chargé des Relations avec les instances constitutionnelles, la société civile et des droits de l’Homme, Monsieur Mehdi BEN GHARBIA. La conférence a rassemblé des membres de l’ISIE, des magistrats de la Cour des comptes, des juges du Tribunal administratif, des membres des instances indépendantes, des universitaires, des experts nationaux et internationaux ainsi que des représentants de la société civile.

La conférence était structurée en trois sessions thématiques : (1) éclairage international sur l’encadrement juridique du financement de la vie politique ; (2) le financement de la vie politique en Tunisie

III. PARTICIPATION ET déROuLEmENT dE LA CONFéRENCE

(3) mécanismes institutionnels du contrôle du financement de la vie politique. Chaque session était constituée de trois à quatre exposés suivis de débats.

Parmi les intervenants figuraient des conférenciers tunisiens (des membres de l’ISIE, des magistrats de la Cour des comptes, une journaliste, le Président de la Chambre Syndicale des Professionnels des Etudes de Marché et Sondage d’Opinion et des universitaires) et des experts internationaux (experts du GRECO et de la Commission de Venise et représentants des organes de contrôle français, mexicain et québécois).

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La conférence a été ouverte par trois discours inauguraux.

Mohamed Chafik SARSAR, Président du Conseil de l’ISIE, a commencé son propos en soulignant que la démocratie n’a pas de prix mais que les élections ont un coût, et que bien trop souvent désormais les élections sont associées à de mauvaises pratiques telles que les emplois fictifs, l’achat de voix, le hacking, la corruption ou le

blanchiment d’argent. Il a également insisté sur un phénomène général et global d’un déficit d’éthique et de la crise des valeurs au sein des opinions publiques en Tunisie mais également dans de nombreux pays. Face à cette situation de défiance des citoyens vis-à-vis de leur classe politique, il y a un vrai besoin d’adopter des codes de conduite et des bonnes pratiques afin de moraliser la vie publique dans son ensemble. Il a souligné l’importance de poser les règles visant à mettre en place un système électoral fiable en matière de financement des campagnes électorales et a insisté sur le fait que, malgré les avancées remarquables réalisées en la matière depuis le début de la période de transition démocratique, certains pans de la législation ne sont toujours pas réglementés, tels que la question des sondages d’opinion.

Iv. Résumé dEs PRésENTATIONs ET déBATs

Mehdi BEN GHARBIA, Ministre chargé des Relations avec les instances constitutionnelles, la société civile et des droits de l’Homme a d’emblée souligné l’importance de cette conférence dans le contexte tunisien actuel. Il a ainsi expliqué que le gouvernement joue un rôle éminent avec l’ISIE pour que les élections locales se déroulent en 2017 et a insisté sur l’importance et l’enjeu de ces élections nécessaires pour fonder une seconde République et continuer le processus démocratique initié en 2011. Le Ministre a souligné la responsabilité qui pèse sur le gouvernement d’union nationale pour que les prochaines élections soient une réussite. De nombreux défis vont se poser ; en 2017, contrairement aux précédents cycles électoraux, le contrôle opéré sur le financement des campagnes sera un contrôle a posteriori, et la question du financement en dehors des périodes électorales et donc de la vie politique dans son ensemble va se poser, notamment la question du financement des partis politiques, des associations et des tierces-parties. Le Ministre a également mis l’accent sur l’importance du rôle joué par les partis politiques qui constituent le rouage essentiel pour préserver l’appareil électoral. Dans ce contexte, il est donc nécessaire qu’un financement public leur soit attribué afin de les protéger des financements occultes mais également de les soumettre à l’examen des

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institutions de contrôle. Afin de renforcer la transparence de la vie politique, il est essentiel de doter l’administration d’outils de contrôle performants et d’adopter une approche plus globale de la supervision de la vie politique pour mettre en place un contrôle effectif des activités de tous les acteurs politiques, avec l’aide des acteurs de la société civile. Les projets de loi relatifs aux conflits d’intérêt et à l’enrichissement illicite ainsi que celle portant sur les sondages d’opinion s’inscrivent dans cette optique.

Diego ZORRILLA, Coordinateur résident du Système des Nations Unies, Représentant

résident du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) a tenu à saluer l’initiative de l’ISIE d’organiser une conférence sur la question du financement de la vie politique en période électorale et a rappelé l’importance de cet aspect du processus électoral. Il a également insisté sur le fait qu’il n’existe pas un seul modèle de contrôle du financement de la vie politique qui pourrait s’appliquer à tous les pays et qu’il est essentiel que chaque pays élabore

ses propres règles et principes en fonction de son héritage politique, historique, culturel et économique. Il a exprimé le souhait que les débats et les recommandations issus des travaux de la conférence puissent permettre d’entamer une discussion plus approfondie sur les réformes législatives et institutionnelles qui pourraient s’avérer nécessaires afin de mieux encadrer la question du financement de la vie politique en période électorale en Tunisie.

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RAPPORT FINAL

L’ENCAdREmENT JuRIdIquE du FINANCEmENT dE LA vIE POLITIquE : sTANdARds ET BONNEs PRATIquEs INTERNATIONALEsSe

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n I

Les trois interventions de la première session présentées par Yves-Marie DOUBLET, expert du Groupe d’Etats contre la Corruption du Conseil de l’Europe (GRECO), Richard GHEVONTIAN, Professeur à la Faculté de Droit et de Science Politique de l’Université d’Aix-Marseille et expert de la Commission de Venise, et Gabriel POIFOULOT, Directeur des études de la Haute Autorité pour la Transparence de la Vie Publique (HATVP) en France ont porté sur les thèmes suivants :

1 . Les leçons des évaluations du GRECO sur le financement de la vie politique ; 2 . Les standards internationaux en matière de financement de la vie politique : l’expérience de la Commission de Venise ; 3 . L’encadrement juridique du financement de la vie publique en France

Yves-Marie DOUBLET a articulé son intervention autour de 3 axes visant à présenter les thèmes qui constituent la base des évaluations conduites par le GRECO dans le cadre de son troisième cycle d’activités entamé en 2007 et en voie d’achèvement, à savoir la transparence du financement, le contrôle et le régime des sanctions. A titre liminaire, il a présenté le GRECO, structure créée

en 1999 qui comprend les 47 membres du Conseil de l’Europe plus la Biélorussie et les Etats-Unis. La vocation du GRECO est d’évaluer les législations de ses membres au regard de standards du Conseil de l’Europe en matière de lutte contre la corruption. Pour ce faire, il utilise comme document de référence la Recommandation Rec(2003) 4 du Comité des Ministres aux Etats membres sur

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les règles communes contre la corruption dans le financement des partis politiques et des campagnes électorales qui définit les grands principes et concepts relatifs au financement de la vie politique. En matière de transparence du financement, les évaluations du GRECO visent à analyser la transparence des ressources (question des dons anonymes, des dons en nature, du sponsoring, de l’apport personnel, des prêts) et des dépenses des acteurs de la vie politique (question de l’utilisation des ressources administratives, problème de la définition de la dépense électorale, de la durée de la campagne).

La problématique du contrôle soulève la question du statut de l’organe qui l’exerce, de ses moyens et de ses pouvoirs. M. DOUBLET a insisté sur le fait que les sanctions assurent la crédibilité du dispositif légal du financement de la vie politique et qu’à ce titre, il est nécessaire que les Etats membres mettent en place des sanctions efficaces, proportionnées et

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dissuasives, et qu’ils disposent d’une large palette de sanctions adaptées à la nature de l’infraction.

De nombreux Etats membres du GRECO ont amendé significativement leur réglementation à la suite des recommandations qui ont été mises en œuvre à hauteur de 75 %. Malgré ce pourcentage élevé, le taux de mise en application demeure en-deçà de celui des autres cycles d’évaluation (98 % pour les 2 autres cycles)1. Les obstacles liés à la concrétisation de ces recommandations procèdent principalement de la difficulté et parfois même de l’impossibilité de trouver un accord viable entre les partis politiques de l’Etat concerné pour améliorer la transparence du financement politique. De plus, ces réformes ne peuvent intervenir à n’importe quel moment et notamment pendant l’année précédant une élection.Le pouvoir politique dispose de deux leviers pour modifier la législation ; soit cette réforme vient de l’intérieur, généralement à la suite de scandales, soit elle procède d’une pression extérieure. C’est le cadre dans lequel s’inscrit l’action du GRECO.

m. dOuBLET a terminé son propos en soulignant que les thématiques de la transparence, du contrôle et des sanctions sont étroitement liées. Les sanctions ne peuvent pas être imposées sans un dispositif de contrôle efficace et un contrôle effectif ne peut être mis en œuvre sans transparence.

1 Ces cycles d’évaluation ont trait à l’indépendance et à la spécialisation des organes nationaux engagés dans la prévention de la corruption et la lutte contre ce phénomène ainsi que des moyens mis à leur disposition et de l’étendue et de la portée des immunités (cycle I) et à l’identification, à la saisie et à la confiscation des produits de la corruption, à l’administration publique et à la corruption (systèmes d’audit, conflits d’intérêts), à l’utilisation de personnes morales pour dissimuler les faits de corruption, à la législation fiscale et financière visant à lutter contre la corruption et aux liens entre corruption, criminalité organisée et blanchiment d’argent (cycle II).

Richard GHEVONTIAN a présenté le rôle joué par la Commission européenne pour la démocratie par le droit, plus connue sous le nom de Commission de Venise, dans l’établissement et la consécration de standards internationaux et l’établissement d’un patrimoine européen. La Commission comprend 61 États membres : les 47 États membres du Conseil de l’Europe sont membres de la Commission de Venise, ainsi que 14 autres pays non européens, dont la Tunisie. m. gHEvONTIAN a souligné qu’en matière de financement de la vie politique, les standards internationaux, bien que désormais plus étoffés, sont relativement peu nombreux et s’articulent autour de deux principes majeurs : la transparence et l’égalité des chances.

Le principe de transparence s’applique à deux niveaux : au niveau électoral, ce principe se traduit par l’obligation pour les acteurs électoraux de déposer un compte de campagne retraçant toutes les recettes et dépenses liées à la campagne électorale et à un niveau plus large, cela induit d’obliger les élus à déclarer leur patrimoine avant, pendant et à la fin de leur mandat. Le principe d’égalité des chances, dans le contexte du financement de la vie politique, trouve sa traduction dans l’instauration d’un financement public afin de permettre aux acteurs électoraux de concourir sur un pied d’égalité. La question de l’utilisation des ressources administratives pose la question de la conciliation de deux notions apparemment contradictoires : l’exercice de la fonction en cours assorti de

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l’existence de facto d’une prime au sortant et le principe d’égalité entre les candidats.

La mise en œuvre de ces deux principes implique de définir et de réguler les quatre principales composantes de tout système de financement politique :

1 . les sources de financement, à savoir d’où vient l’argent (ressources personnelles, versements des partis politiques, dons, financement public - direct ou indirect) mais également quelles sont les sources interdites (financement étranger, financement par les entreprises, dons anonymes),

2 . l’existence d’un plafond des dépenses réaliste et raisonnable, c’est-à-dire prenant en compte le coût réel de la campagne,

3 . les modalités de dépôt d’un document comptable retraçant les recettes et les dépenses et

4 . la nécessité de la mise en œuvre d’un contrôle assorti du prononcé de sanctions, financières et électorales, en cas de méconnaissance ou de violation de la loi. A cet égard, l’intervenant a souligné le caractère sensible de la sanction d’inéligibilité qui nécessite la mise en place d’un dialogue entre l’organe de contrôle et le juge électoral.

m. gHEvONTIAN a conclu sa présentation en soulignant que les règles en matière de financement de la vie politique ne sont pas formellement contraignantes, mais constituent des fils directeurs et sont en perpétuelle construction et évolution.

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Gabriel POIFOULOT a débuté son propos en soulignant que la dégradation de la confiance publique dans la classe politique se traduit bien souvent par un taux d’abstention de plus en plus fort. En France, la perception dégradée de la classe politique accompagnée d’un sentiment généralisé de corruption des édiles politiques a constitué l’élément déclencheur qui a engendré la création de la Haute Autorité pour la Transparence de la Vie Publique (HATVP) en 2013 répondant ainsi à un impératif de transparence. Les six membres de la HATVP sont nommés pour 6 ans, et leur mandat n’est ni révocable ni renouvelable.

Actuellement, quelque 15 000 responsables publics sont assujettis à l’obligation de dépôt d’une déclaration de patrimoine.

m. POIFOuLOT a souligné que la HATVP est une autorité administrative indépendante, et non pas une juridiction, et qu’à ce titre, elle ne peut pas prononcer de sanctions. L’intervenant a ensuite présenté les trois missions de la HATVP, à savoir contrôler le patrimoine des responsables publics, prévenir les conflits d’intérêts et promouvoir la transparence de la vie publique.

1 . En matière de contrôle, la HATVP a à sa disposition deux outils principaux : la déclaration de situation patrimoniale qui constitue une photographie de ce que possède le déclarant et sert à identifier des situations d’enrichissement non expliquées en vue de détecter certaines infractions

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RAPPORT FINAL

(notamment corruption ou prise illégale d’intérêts) et la déclaration d’intérêts qui sert à identifier d’éventuelles situations de conflit d’intérêts pour assurer leur prévention. Ces déclarations doivent être déposées dans les deux mois suivant l’entrée en fonction puis tout au long du mandat en cas de changements de la situation patrimoniale. La HATVP vérifie l’exhaustivité, l’exactitude et la sincérité des déclarations déposées et coopère avec l’administration fiscale en cas de besoin. Depuis sa création, 12 dossiers ont été transmis au procureur et 4 condamnations définitives ont été prononcées.

2 . Selon la définition retenue par la HATVP, «constitue un conflit d’intérêts toute situation d’interférence entre un intérêt public et des intérêts publics ou privés qui est de nature à influencer ou à paraître influencer l’exercice indépendant, impartial ou objectif d’une fonction ». m. POIFOuLOT a souligné que la mission de la HATVP en ce domaine est de détecter s’il existe une interférence d’un intérêt public avec un intérêt privé ou avec un autre intérêt public afin d’agir et d’y mettre fin. A ce titre, la HATVP contrôle également les possibles risques de conflit d’intérêts ou « pantouflages » en cas de reconversion professionnelle dans le secteur privé à l’issue de fonctions gouvernementales ou de fonctions électives locales. La HATVP joue également un rôle de conseil auprès des déclarants ou institutions souhaitant mettre en place des dispositifs de déontologie interne.

3 . m. POIFOuLOT a insisté sur la nécessité de concilier l’impératif de transparence via la publication des déclarations et la confidentialité des données personnelles des déclarants. C’est la raison pour laquelle, toutes les déclarations sont accessibles en ligne sur le site de la HATVP sauf les déclarations de patrimoine des

parlementaires qui sont consultables en préfecture. De la même façon, seules les déclarations des membres du gouvernement sont publiées in extenso, tandis que la publication des autres déclarations se fait sous forme étagée. La HATVP peut être saisie par des associations agréées (Transparency International, Anticor) et tout citoyen peut lui adresser ses observations sur les déclarations qu’il consulte.

m. POIFOuLOT a conclu son propos en mentionnant l’adoption de deux lois en 2016 qui étaient venues étendre le champ de compétences de la HATVP. La loi d’avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires a étendu le champ des déclarants et la loi de décembre 2016 a créé un registre des lobbyistes ou

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RAPPORT FINAL

représentants d’intérêts.

DéBATLes débats se sont articulés principalement autour des points principaux présentés par les intervenants de la première session, à

savoir :

→ La question du financement extérieur et notamment la situation des binationaux ou des sociétés étrangères ayant des filiales en Tunisie ;

→ La question du sponsoring qui a permis d’aborder deux cas de figure distincts : le cas des pays où les dons de personne morale sont interdits et dans lesquels le sponsoring est utilisé pour contourner cette interdiction et le cas des pays dans lesquels les dons de personnes morales sont autorisés et où il n’existe donc pas de raison d’interdire le sponsoring ;

→ Les conditions d’éligibilité, d’allocation et de déboursement du financement public. Dans la majorité des cas, l’allocation des fonds publics se fait selon des critères objectifs, tels que le pourcentage de voix obtenues ou le nombre de sièges obtenus. Il

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est important de distinguer le financement des partis politiques et celui des campagnes électorales ;

→ Comment s’assurer de l’exactitude des données déclarées dans les déclarations de patrimoine ? En France, dans 99 % des cas, l’expertise et les ressources de la HATVP suffisent. La seule difficulté concerne la détermination de la valeur des biens exceptionnels (châteaux ou îles détenus par des politiques). La HATVP est en contact avec l’administration fiscale et les notaires ;

→ L’inéligibilité est considérée en France et en Grande-Bretagne comme une sanction électorale. Cependant, pour la CEDH il ne s’agit ni d’une sanction pénale, ni d’une sanction civile.

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RAPPORT FINAL

LE FINANCEmENT dE LA vIE POLITIquE EN TuNIsIE

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II

Les quatre interventions de la deuxième session présentées par Ahmed essoussi, Professeur de Droit, Faculté de Droit et de Sciences Politiques, Université de Sousse, Fadhila gARgOuRI, Présidente de chambre à la Cour des comptes, Akram mouhli et mouna

mTIBAA, respectivement Magistrat-Président de section à la Cour des comptes et Rédacteur principal à l’Agence Tunis Afrique Presse et nébil BelAAm, Président de la Chambre Syndicale des Professionnels des Etudes de Marché et Sondages d’Opinion (BEMSO) ont porté sur les thèmes suivants :

1. L’encadrement juridique du financement de la vie politique en Tunisie ;2. Le financement des associations en Tunisie ;3. Le financement des médias en période électorale en Tunisie ;4. La réglementation des sondages d’opinion en périodes électorales en Tunisie.

Ahmed ESSOUSSI a débuté sa présentation en faisant le parallèle entre la situation qui prévalait avant la Révolution et la situation actuelle et a opposé à l’ancien faux système politique où existaient de fausses élections et un faux droit des élections, le nouveau système tunisien. Il a

insisté sur le fait que désormais le concept d’élections libres et démocratiques est fondé sur la notion de pluralisme. La Tunisie est ainsi passée en l’espace de 6 ans d’un système de parti unique à un pluralisme pléthorique. Cette situation nouvelle a ainsi modifié le rapport existant entre les partis politiques et les institutions publiques, rapport nouveau qui a été formalisé par le concept d’encadrement juridique ou plutôt de droit financier de la vie politique. La vie politique a ainsi vu l’émergence, sur la scène

électorale, d’acteurs en charge de l’animation (partis politiques et société civile) et de la régulation (organes de contrôle).

m. EssOussI a ensuite rappelé que dans les démocraties modernes, il existe désormais un ensemble de principes et de règles fondés sur la liberté de constitution des partis ou des associations politiques mais également un droit au financement public dépendant pour l’essentiel de la présence sur la scène politique, notamment au niveau des assemblés, ou de la participation aux campagnes électorales. Les règles relatives aux limitations/ interdictions des dons par des personnes morales trouvent leur origine dans la crainte, justifiée, de l’influence des milieux d’affaires sur la vie politique et la possibilité que la démocratie soit l’otage de l’argent. L’obligation de déposer un compte de campagne rendant compte des sources de financement tout comme des dépenses réalisées permettent à l’organe de contrôle de s’assurer du respect des obligations légales et comptables par les acteurs électoraux. Le prononcé de sanctions en cas de méconnaissance des dispositions applicables

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ou dans l’hypothèse d’irrégularités allant jusqu’à l’exclusion du jeu politique, dès lors que les irrégularités sont suffisamment graves pour dénaturer l’expression du suffrage, permet la mise en œuvre du cadre juridique.

m. EssOussI a également mis l’accent sur le fait que le cadre juridique applicable en Tunisie, et notamment le décret-loi n° 2011-87 et la loi organique n° 2014-16, contiennent des principes généraux relatifs au financement de la vie politique et les conditions dans lesquelles l’argent est utilisé et contrôlé. Les textes prévoient un financement mixte sous la forme, pour les campagnes électorales, d’un système de remboursement des dépenses à caractère électoral (contrôle régularité, effectivité et sincérité dépenses) avec plafonnement du montant des flux financiers. De plus, la législation impose la tenue d’un compte financier par un mandataire financier utilisant à cette fin un compte bancaire unique ouvert spécialement pour l’élection en cause et prévoit le contrôle du financement des campagnes électorales et partis politiques par la Cour des comptes et toutes parties prenantes compétentes (ISIE, Banque Centrale de Tunisie, Ministère des finances, y compris l’administration des douanes).

m. EssOussI s’est ensuite interrogé sur la nécessité d’évaluer le système de financement de la vie politique de façon critique et de prendre en compte les évolutions. A cet effet, l’intervenant a rappelé que les décrets lois n° 87 et 88 de l’année 2011, ainsi que le décret-loi n° 2011-116 portant création de la HAICA ont été adoptés avant la promulgation de la Constitution qui a consacré le multipartisme, la bonne gestion des deniers publics, la transparence financière et l’organisation d’élections libres. De la même façon, la question des déclarations de patrimoine reste en suspens. M. ESSOUSSI a conclu son

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propos en soulignant qu’afin d’assurer la transparence de l’ensemble du processus politique et de garantir la mise en œuvre de la responsabilité de tous les acteurs politiques et institutionnels, la question du rapport entre les partis politiques et les associations devait être clarifiée.

Fadhila GARGOURI a commencé son intervention par le rappel des dispositions de l’article 35 de la Constitution qui dispose que « les partis politiques, les syndicats et les associations s’engagent dans leurs statuts et leurs activités à respecter les dispositions de la Constitution et la loi, à la transparence financière ». Tout au long de sa présentation, mme gArgouri a mis l’accent sur le manque de transparence quant au financement des associations et au système de responsabilité limité de ces dernières. Elle a insisté sur le fait que le contrôle opéré par la Cour des comptes quant aux sources des financements des associations était fondé sur le contrôle de conformité de ces ressources avec les activités prévues dans les statuts des associations. L’intervenante a d’abord exposé les mécanismes de financement des associations (1), puis a présenté les mécanismes de contrôle de ce financement (2).

1. Le financement public est un droit constitutionnel et l’État doit allouer des fonds pour aider les associations à mener leurs activités. Ce financement est conditionné au dépôt d’un rapport financier annuel et donc au respect du principe de transparence des

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sources de financement et de la légalité des dépenses en conformité avec les statuts de l’association.

Les associations peuvent également bénéficier de financements étrangers sous condition. En effet, ces dernières ne peuvent recevoir des financements que de la part des pays ayant des liens diplomatiques avec la Tunisie. De plus, l’allocation de tels financements est soumise à la publication des informations y afférant. Les associations ne peuvent pas financer une campagne ou un parti ou procéder à des activités à but lucratif.

2. mme gArgouri a mis en exergue le contrôle imparfait et partiel du financement des associations dû en grande partie à un manque de coordination des différents organes impliqués à savoir le Ministère des finances, la Présidence du Gouvernement, le Ministère des domaines de l’Etat et la Cour des comptes. En effet, l’intervenante a indiqué que malgré la multitude des organes de contrôle, le contrôle reste limité surtout compte tenu du fait que les services de la Banque Centrale, malgré la promulgation du décret de 2013 exigeant la notification de toute source de financement suspecte, n’ont pas les moyens de savoir si les banques ont détecté des transactions suspectes. Ceci limite considérablement l’efficacité du contrôle.

En termes de contrôle, la Cour des comptes examine le financement obtenu par les associations pour étudier et détecter de possibles irrégularités. Les institutions bancaires ne peuvent opposer le secret bancaire à la Cour des comptes et par l’intermédiaire de la loi électorale, celle-ci peut étendre son contrôle au financement (public et étranger) des associations.

En cas de financements occultes, les systèmes

bancaire et douanier ne peuvent pas détecter les sources de financement extérieur. Ainsi, dès 2011, la Commission des analyses financières, qui reçoit les notifications en cas d’opérations douteuses ou suspectes, a mis en exergue la possibilité d’omissions non répertoriées.

Bien que le décret-loi n° 2011-88 portant organisation des associations interdise toute collecte de fonds pour le financement des partis politiques, la portée des dispositions du décret-loi est cantonnée aux périodes électorales laissant ainsi un pan entier de la matière non réglementée. De nombreuses associations ont dévié vers des actions plus politiques mettant en œuvre des activités qui ne correspondent plus à leur objet social. mme gArgouri a terminé son intervention en soulignant la nécessité de revoir le régime des sanctions pour assurer un meilleur contrôle des associations, en collaboration avec toutes les parties concernées. En effet, les sanctions prévues par les textes actuels n’ont pas d’impact réel sur le financement des associations car elles ne sont pas assez proportionnées et dissuasives.

Akram MOUHLIa entamé son intervention par le constat selon lequel les médias jouent un rôle déterminant dans la formation de l’opinion publique durant la période électorale. L’intervenant a souligné que dans un contexte de démocratie naissante, qui détient la parole détient le pouvoir et que par conséquent, le financement et le contrôle des médias pendant la période

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électorale revêtent une importance particulière. Selon m. mOuHLI, il n’y a pas d’opinion publique, mais une opinion publique publiée pour souligner à quel point les médias peuvent façonner l’opinion publique. Bien que les médias soient des faiseurs d’opinion, ils constituent également un bon outil pour détecter les abus.

L’intervenant a ensuite rappelé le cadre général applicable qui se rapporte aux médias en période électorale et le corpus de lois existant en la matière (textes relatifs à l’HAICA, à la Cour des comptes, la loi électorale et la loi organique n° 2017-10 relative à la dénonciation de la corruption et à la protection des dénonciateurs) ainsi que les décisions de l’ISIE, et a insisté sur le principe d’impartialité qui doit prévaloir quant à la couverture des campagnes électorales pendant toute la période électorale.

m. mOuHLI a par la suite évoqué les définitions clés relatives au financement des médias en période électorale et notamment les notions de médias, de neutralité dans la couverture des campagnes, de dépenses électorales, de publicité politique, d’environnement médiatique, de médias audiovisuels nationaux). Il a également énuméré les institutions jouant un rôle en matière de financement des médias (Cour des Comptes, ISIE, HAICA, candidats, citoyens, société civile et médias) afin de mettre l’accent sur le fait que la multitude de ces organes peut prêter à confusion.

L’intervenant s’est ensuite intéressé aux différentes problématiques qui se posent en matière de financement des médias en période électorale. Parmi ces problématiques, l’absence de déclaration par les médias de leurs sources de financement ainsi que le financement masqué des propagandes occupent une place importante. A cet égard,

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il est revenu sur l’importance de distinguer les notions de propagande et de publicité.

m. mOuHLI a conclu son intervention en insistant sur la nécessité de mettre en place des mécanismes effectifs de contrôle du financement des médias qui prévoiraient la coordination entre les différentes parties prenantes et nécessiteraient par voie de conséquence la mobilisation de ressources humaines importantes.

Mouna MTIBAA a débuté son intervention

en soulignant que les mots clés en matière de financement des médias en période électorale sont la transparence et la divulgation. La loi portant sur le droit d’accès à l’information procède d’une volonté politique et législative d’aborder la question de la transparence dans les sources des financements des médias. Le registre www.registre-commerce.tn peut être utilisé afin de détecter toute forme de corruption dans les sources de financement des médias qu’ils soient publics, privés ou associatifs.

mme mtiBAA a ensuite exposé les différents indicateurs, qui doivent figurer sur le cahier des charges, en matière de transparence des sources de financement des médias. Les indicateurs incluent notamment la nécessité

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de présenter les données actualisées sur les ressources provenant de la publicité, des sms et de toute autre source de financement, la nécessité de publier les états financiers de la société le 31 décembre de chaque année et la nécessité de publier la liste actualisée des actionnaires de la société. L’intervenante a mis l’accent sur le fait que l’institution médiatique doit publier ces données sur le registre du commerce et ne pas uniquement les présenter à la HAICA.

En ce qui concerne les indicateurs qui traitent des engagements relatifs à la publicité, l’intervenante a notamment mentionné l’interdiction pour la chaîne télévisée, ayant obtenu une licence, de diffuser des programmes, des annonces ou des spots publicitaires au profit d’un parti politique ou d’une liste candidate gratuitement ou avec une contrepartie. mme mtiBAA a également souligné l’interdiction pour les partis politiques de parrainer des programmes diffusés dans les médias. Sur la base des informations publiées sur le registre commercial, il s’avère qu’uniquement six stations radios sur 24 ont publié les données nécessaires sur le registre commercial et qu’aucune chaîne de télévision n’a publié de telles informations.

Pour ce qui est des indicateurs relatifs à la transparence de la propriété des entreprises médiatiques, l’intervenante a indiqué que, selon un rapport sur la propriété des médias audiovisuels privés effectué par l’association de l’éveil pour la démocratie et l’État civil en novembre 2016, il s’est avéré que la propriété de 18 institutions médiatiques sur un total de 35 a un caractère familial. De plus, le rapport révèle que la plupart des actionnaires de ces institutions sont des hommes d’affaires et que des sociétés commerciales tunisiennes ou étrangères font partie des actionnaires d’environ 13 institutions médiatiques. Le

suivi des sites électroniques des institutions médiatiques révèle que ces dernières ne publient pas d’informations concernant l’identité de leurs responsables, leur statut juridique, leur durée, leur capital ou leur budget annuel.

L’intervenante a présenté quelques recommandations concernant les prochaines élections municipales. Elle a insisté notamment sur la nécessité de respecter la loi concernant la publication des documents et données sur la propriété et les sources de financement sur le site de la HAICA, au cas où l’institution médiatique ne le fait pas. mme mtiBAA a conclu son intervention par la présentation des résultats d’une étude menée lors des élections de 2014 sur la mobilisation électorale en Tunisie. Cette étude a démontré que les partis Ennahdha et Nidaa Tounes avaient été les principaux bénéficiaires de la couverture médiatique et a mis en exergue le fait que l’attraction des électeurs à travers les médias fait partie des éléments les plus importants dans l’orientation de l’opinion publique en période électorale

Nébil BELAAM a débuté sa présentation par rappeler que depuis les dernières 50 années, il n’est plus une élection sans sondage, ni une élection sans controverse sur les sondages. En effet, il a rappelé que si dans tous les pays démocratiques, l’importance de la connaissance et du suivi des comportements des électeurs et

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l’évaluation de leurs intentions de vote, tout au long de l’exercice électoral, sont devenues des composantes essentielles, il n’en demeure pas moins que la publication des résultats des sondages d’opinion fait l’objet de grands débats. Le droit des sondages n’est pas encore une discipline mature du droit et la tendance actuelle est plutôt dans le renforcement de l’encadrement, notamment lorsque ces sondages sont de nature électorale.

Il existe 5 systèmes de régulation fondés sur un code de déontologie (qui rassemble les informations relatives au respect des données privées et le contenu des sondages) que sont les systèmes international(ESOMAR), anglo-saxon, allemand, italien et français.

m. BELAAm a ensuite présenté l’expérience tunisienne en matière de sondages d’opinion où les premières études politiques ont vu le jour après la Révolution. Après l’adoption d’une loi restrictive en 2014 et l’observation de dérapages de plus en plus fréquents, notamment sur les réseaux sociaux, il a été constaté que les journalistes ne disposaient plus d’outils nécessaire pour garantir la sincérité des débats politiques et qu’ils n’étaient pas suffisamment armés pour contrer les rumeurs et les mauvais sondages influents.

m. BELAAm a présenté les actions récentes entreprises par le BEMSO (Chambre Syndicale des Professionnels des Etudes de Marché et Sondages d’Opinion) et notamment l’élaboration d’un cadre juridique portant réglementation de la profession qui devrait être rendu public d’ici un mois, ainsi que la mise en œuvre d’une réflexion autour de la mise en place d’une commission des sondages impliquant tous les acteurs concernés y compris les professionnels des études et sondages. Le BEMSO souhaite que

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soit adopté un code de bonnes pratiques entre médias, journalistes et Instituts de sondage régissant la publication des sondages politiques en période électorale et notamment la publication des résultats le jour du scrutin. L’intervenant a insisté sur l’absence de consultation des professionnels du milieu, BEMSO et professionnels des journalistes et des médias (SNJT, STDM), lors de l’élaboration des deux propositions de lois présentées récemment à l’Assemblée des Représentants du Peuple1.

m. BELAAm a terminé sa présentation en soulignant que l’interdiction des sondages est particulièrement antidémocratique car elle restreint la liberté d’opinion et le droit à l’information et contrevient aux dispositions de l’article 19 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme qui consacre le droit de recevoir les informations par quelque moyen que ce soit. L’objectif du BEMSO est de mettre en place une législation complète afin de garantir le maximum de transparence et de fiabilité des sondages, d’établir un code d’éthiques entre professionnels et à mettre en place des normes d’information pour publication et c’est la raison pour laquelle ses membres ont demandé que le projet de loi soit suspendu en attendant la rédaction définitive de la charte professionnelle du BEMSO.

1 Voir note de bas de page 1 à la page 7

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DéBATLes débats se sont articulés principalement autour des principaux points présentés par les intervenants de la deuxième session, à savoir :

→ Quelles sont les dispositions en place pour garantir la protection des deniers publics pendant la période électorale et permettant également de donner leur chance aux partis non représentés au Parlement ? Il a été répondu qu’en application des dispositions de la Constitution, la Cour des comptes est en charge du contrôle de la bonne utilisation des deniers publics et s’attache à respecter le principe d’égalité entre les différents acteurs. Cependant, les moyens à la disposition des organes de contrôle et notamment à la disposition de la Cour des comptes ne sont pas toujours suffisants pour leur permettre de mener à bien leur mission ;

→ Les médias jouent un rôle important et peuvent influencer le processus électoral dans son ensemble et parfois même fausser les élections. Il apparait nécessaire que les médias soient dotés de moyens adéquats pour assurer leur mission, mais encore faut-il que la couverture médiatique soit neutre et impartiale ;

→ La frontière entre vie politique et vie associative est très mince voire poreuse et il n’est pas rare que des figures politiques travaillent au sein d’associations car les passerelles sont nombreuses. Y-a-t-il des solutions pour endiguer/juguler la corruption par l’intermédiaire des associations afin de rendre la vie politique plus saine et crédible dans la mesure où les associations constituent un élément nécessaire/le rouage de la société civile?

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Les intervenants ont reconnu que le statut des associations reste une question problématique et qu’il est nécessaire que l’Etat réagisse afin d’éviter l’impact négatif des associations sur la transparence de la vie politique ;→ Serait-il opportun de réviser les textes dans leur ensemble afin de consolider les différents textes et de moraliser la vie politique/ publique dans son ensemble ?

→ Concernant les sondages d’opinion, il est frappant de constater qu’il n’existe pas de textes juridiques de base. Dans ces conditions, comment est-il possible de poursuivre les instituts de sondages d’opinion en cas de manquement(s) à leurs obligations ? Il existe actuellement une volonté de proposer un code d’éthique professionnelle avec la mise en place d’une commission de sondages gérant les problèmes liés aux sondages et notamment la question du financement des instituts de sondage. Se posera à terme la question du statut de cet organe professionnel de régulation et de son indépendance.

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LEs méCANIsmEs INsTITuTIONNELs du CONTRÔLE du FINANCEmENT dE LA vIE POLITIquE

Sess

ion

III

Les quatre intervenants de la 3ème session, Anouar Ben hAssen, Membre du Conseil de l’ISIE, Catherine LAgACE, Secrétaire générale du Directeur général des élections du Québec et du Réseau des Compétences Électorales Francophones, stéphane gAuvin, Chef du Service du contrôle et des affaires juridiques au sein de la Commission nationale française des comptes de campagne et des financement politiques (CNCCFP) et ciro murayama rendon, Conseiller à l’Instituto Nacional Electoral mexicain (INE) ont chacun à leur tour présenté les mécanismes institutionnels du contrôle du financement de la vie politique dans leur pays respectif.

Anouar BEN HASSEN a rappelé que la Révolution avait permis la transition d’un système de parti unique vers un système démocratique et pluraliste. Depuis 2011, la Tunisie a vécu trois échéances électorales et la formation de plus de 200 formations politiques. Le financement des partis politiques, ainsi que des campagnes électorales, est devenu un sujet de première importance. L’intervenant a ensuite articulé son intervention autour de deux axes : le contrôle des campagnes électorales (1) et le contrôle des partis politiques (2).

1. Après avoir mentionné les principales dispositions relatives au cadre juridique applicable dans le contexte ante-révolution, m. BEN HAssEN s’est attaché à exposer l’évolution des règles en matière de financement des campagnes électorales entre 2011 et 2014. Il a ainsi insisté sur les améliorations apportées au cadre juridique par la loi organique n° 2014-16, et notamment l’autorisation d’un financement privé plafonné et l’adoption d’un financement public a priori et a posteriori, tout en soulignant les faiblesses du système ; la plus flagrante étant la difficulté du recouvrement de l’aide publique ou les limites du contrôle opéré par l’ISIE et la Cour des comptes.

m. BEN HAssEN a également mis en exergue la principale nouveauté introduite par la loi organique n° 2017-7, à savoir la mise en place d’un système de remboursement des dépenses électorales attribué aux listes ayant obtenu au moins 3 % des suffrages exprimés, ayant respecté leurs obligations légales et comptables et ayant publié leur compte financier. L’intervenant a par la suite expliqué la nature du contrôle opéré par l’ISIE puis par la Cour des comptes.

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L’ISIE garantit l’intégrité et la transparence du cycle électoral, proclame les résultats et contrôle et impose le respect des règles et moyens de financement de la campagne électorale en collaboration avec les autres institutions publiques. Le contrôle de l’ISIE est un contrôle, sur place ou sur pièces, a priori et complémentaire à celui opéré par la Cour des comptes. m. BEN HAssEN a également rappelé que la loi de 2017 avait transformé la nature du pouvoir de réformation dévolu à l’ISIE d’un pouvoir discrétionnaire en un pouvoir lié. Désormais, lorsque toutes les conditions requises pour la mise en œuvre de ce pouvoir de réformation seront réunies, l’ISIE sera dans l’obligation de prendre une décision d’annulation et de réformation des résultats.

La Cour des comptes opère un contrôle a posteriori qui porte sur la légalité des ressources allouées à la campagne électorale, le caractère électoral de la dépense, le respect des plafonds des dépenses électorales et sur l’absence d’infractions électorales. La Cour des comptes rend compte de son contrôle à l’appui d’un rapport rendu public dans un délai de 6 mois et publié au JORT. Le Tribunal administratif exerce un contrôle indirect sur le financement de la campagne électorale à l’occasion des recours intentés contre les résultats préliminaires.

2. Après avoir rappelé les dispositions applicables avant 2011, m. BEN HAssEN a exposé les règles introduites par le décret-loi n° 2011-87 portant organisation des partis politiques. Le nouveau cadre juridique a introduit un système de financement mixte, sans toutefois avoir défini ni les mécanismes de calcul ni les modalités d’allocation du financement public. Le décret-loi a également instauré, en amont du contrôle exercé par la Cour des comptes, un système mixte de contrôle externe par des commissaires aux

comptes puis d’une commission ad hoc. Parallèlement au dépôt des états financiers à la Présidence du Gouvernement et à la commission, les partis présentent un rapport annuel à la Cour des comptes qui n’a aucune compétence autre que celle de réceptionner les rapports annuels. À ce titre, elle ne peut imposer aucune sanction. Le parti publie ses états financiers accompagnés du rapport du commissaire aux comptes dans un quotidien paraissant en Tunisie mais pas le rapport annuel déposé auprès de la Cour des comptes. Depuis 2012, il existe au sein de la Présidence du Gouvernement une unité ayant pour mission l’amélioration de la législation relative aux partis politiques.

m. BEN HAssEN a conclu son intervention par la présentation de constats et de recommandations et a notamment insisté sur la nécessité d’une collaboration entre les organes de contrôle, l’impératif d’instaurer un droit au compte et de respecter le principe de légalité et le besoin de compléter les régulations en matière de financement des partis politiques et d’évaluer le système de financement dans son ensemble à l’aune des expériences de 2011, de 2014 et certainement de 2017.

Catherine LAGACé a exposé l’encadrement des campagnes électorales québécoises en articulant son intervention autour de trois principaux points : le contexte historique et politique du Québec (1), l’encadrement actuel, notamment par l’entremise du financement des partis politiques et du contrôle des dépenses

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électorales (2) et les défis à relever et les perspectives d’avenir pour le Québec (3).

1. Jusqu’à 1963, le financement politique n’était soumis à aucune contrainte au Québec. Cependant, cette loi, bien qu’ayant introduit le plafonnement des dépenses, l’obligation de dépôt de rapports de dépenses et le remboursement conditionné d’une partie des dépenses électorales, était muette quant aux sources de financement des partis. La loi de 1977 est venue réglementer les sources des financements des partis politiques en limitant les dons aux seuls électeurs et en plafonnant le montant des dons. A travers l’adoption de ces 2 lois, le législateur a voulu instaurer un système où seuls les électeurs, et non des intérêts corporatistes, contrôlent les leviers du pouvoir politique.

2. Le Québec a connu une série de réformes entre 2010 et 2016 afin de faire face à de nouvelles pratiques et à une crise de confiance. En effet, face à la prolifération du système de prête-noms pour contourner les règles de financement (à savoir une entreprise qui rembourse ses employés pour des contributions effectuées à un parti politique), ainsi qu’en raison de scandales de corruption et de collusion, le gouvernement a été amené à mettre en place une commission d’enquête publique en 2011. Cette série de réformes a abouti à l’abaissement des limites des contributions, à l’augmentation de l’aide publique octroyée aux partis politiques, à la diminution du plafond des dépenses, mais également au renforcement des règles quant au travail bénévole, à l’instauration d’une limite de prêt à un parti politique par un individu et à l’augmentation des pouvoirs d’enquête et de vérification du Directeur Général des élections du Québec (DGEQ).

Le financement politique québécois repose sur deux grands principes : l’équité et la

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transparence. Afin d’assurer l’équité entre les partis politiques, il y a un plafond des dépenses électorales admises. En vue de garantir la transparence, les contributions des électeurs sont rendues publiques dans un rapport et sont publiées sur le site internet de DGEQ. Les partis politiques doivent produire au DGEQ des rapports financiers annuels et de dépenses électorales lors des campagnes électorales. Ces rapports sont également publics.

Le financement public est alloué aux partis, proportionnellement au pourcentage de votes obtenus lors de la dernière élection générale et les contributions des électeurs sont plafonnées à 100 CAD par personne physique. La législation prévoit également un système d’appariement (allocation d’une aide publique pour chaque tranche de financement privé atteinte) afin d’encourager le financement privé des campagnes.

La dépense électorale est définie comme le coût de tout bien ou service utilisé pendant une période électorale pour favoriser ou défavoriser l’élection d’un candidat ou celle des candidats d’un parti. La campagne électorale dure environ 33 jours et le plafond des dépenses diffère selon qu’il s’agit d’un parti politique ou d’un candidat. Pour être éligibles au remboursement de 50 % de leurs dépenses électorales, les partis politiques doivent avoir obtenu 1 % des votes au niveau national et les candidats doivent avoir obtenu 15 % des votes dans leur circonscription.

Pour recueillir des contributions, effectuer des dépenses ou contracter des emprunts, un parti politique ou un candidat indépendant doit être inscrit au Registre des entités politiques autorisées du Québec (REPAQ). Pour réaliser une dépense électorale, les partis politiques et les candidats doivent nommer un agent officiel, qui est la seule

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personne autorisée à effectuer une dépense électorale. Il doit apposer son autorisation sur toute dépense électorale.

En période électorale, les médias peuvent offrir de l’espace publicitaire gratuit, mais cela doit être fait équitablement pour tous les candidats ou tous les partis représentés à l’Assemblée nationale ou ayant recueilli 3 % lors des dernières élections générales. De la même façon, les tierces-parties peuvent engager des dépenses de nature publicitaire dans la limite de 300 CAD.

Les partis politiques doivent transmettre au DGEQ un tel rapport au plus tard le 30 avril de chaque année, accompagné du rapport d’un auditeur indépendant. Les partis et les candidats doivent produire un rapport de dépenses électorales faisant état de l’ensemble des dépenses électorales. Les partis politiques doivent produire ce rapport dans les 120 jours suivant le jour du scrutin. Les candidats doivent le produire, quant à eux, dans les 90 jours suivant le scrutin.

Au Québec, les partis politiques, les candidats ainsi que les électeurs se surveillent mutuellement, il n’y a très peu de contrôle « sur le terrain ». Lorsqu’une irrégularité est observée, une plainte est déposée au « Bureau des plaintes » du Directeur général des élections, qui étudie la recevabilité de la plainte et qui ouvre une enquête le cas échéant. Le Directeur général des élections détient un pouvoir d’enquêtes et un pouvoir de poursuites pénales si la loi électorale n’est pas respectée. Les sanctions prévues par les textes sont d’ordre financier et électoral.

3. mme lAgAcé a terminé sa présentation en soulignant que les nouvelles dispositions ont eu un impact significatif sur l’assainissement des pratiques en matière de financement politique au Québec. Ce nouveau cadre légal

devra encore être suivi au courant des années à venir, pour bien évaluer ses différentes implications.

Stéphane GAUVIN a commencé sa présentation en soulignant que la question du financement de la vie politique est une question complexe qui nécessite une révision et une adaptation continues. A cet égard, il est primordial de contrôler le lien existant entre le cadre juridique et l’application pratique des dispositions. La mise en œuvre des dispositions relatives au financement de la vie politique en France doit prendre en compte un impératif législatif qu’est le principe d’égalité des acteurs politiques et un impératif constitutionnel qu’est celui de la libre organisation et administration des partis politiques.

m. gAuvIN a ensuite brièvement rappelé les différentes étapes législatives ayant abouti au cadre juridique actuel et insisté sur le fait que jusqu’en 1995, le financement des campagnes électorales et des partis politiques était permis mais contrôlé et soumis à publication. C’est pendant la période 1993-1995 qu’a été mis en lumière le fait que les grands groupes financiers et économiques français finançaient autant les partis de gauche que les partis de droite. À

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partir de 1995, la législation a interdit les dons de personnes morales et en compensation de cette interdiction a introduit un système de financement public de la sphère publique.

La législation en matière de financement de la vie politique repose sur deux principes : limiter la prépondérance de l’argent notamment en séparant la vie économique et la vie politique et encadrer les recettes des candidats et des partis. Le système de financement est mixte avec une incitation des citoyens à financer la vie politique (déduction fiscale sur les dons faits aux candidats et aux partis) et un remboursement conditionné des candidats. Les dépenses électorales sont plafonnées par type d’élection et sur la base de la population dans chaque circonscription. La CNCCFP, autorité administrative indépendante créée en 1990, est l’organe en charge du contrôle du financement de la vie politique.

m. gAuvIN a ensuite souligné la fréquence des adaptations législatives et/ ou réglementaires ; en effet, depuis 2011, 5 lois ont été adoptées en matière de financement de la vie politique. La loi du 14 avril 2011 a consacré le droit au compte et créé l’élection des députés représentant les Français hors de France, qui est une élection très compliquée et très chère. La loi du 11 octobre 2013, qui a créé la HATVP, a aussi institué l’interdiction de l’utilisation de l’Indemnité représentative de frais de mandat (IRFM) pour les besoins de la campagne électorale. La loi du 4 août 2014 a introduit le principe d’investiture des candidats, et celle du 25 avril 2016 a réduit la durée de la période électorale pour l’élection présidentielle à 6 mois sans pour autant régler la question des primaires. La loi du 6 mars 2017 a introduit une information améliorée sur le recours à l’emprunt, tant pour le financement des campagnes électorales que pour celui des partis politiques.

Le financement de la vie politique en période électorale • La conférence du 28 mars 2017

En 2016, 451 partis politiques étaient tenus de déposer un compte auprès de la CNCCFP (53 sont éligibles à l’aide publique et 398 non éligibles). Les partis politiques peuvent recevoir des dons de personnes physiques plafonnés à 7,500 euros par an et pour l’ensemble des formations politiques et un financement public, s’ils remplissent les conditions légales (50 candidats ayant obtenus au moins 1 % des suffrages exprimés sur l’ensemble du territoire ou 1 candidat ayant obtenu au moins 1 % dans une circonscription d’outremer). En 2016, le montant de l’aide publique s’élevait à 68,7 millions d’euros. L’article 4 de la Constitution de 1958 consacre la liberté de création et de gestion des partis politiques. A ce titre, l’intervenant a souligné que lors des débats législatifs relatifs à la loi du 6 mars 2017, le problème d’inconstitutionnalité de la loi en raison des modifications apportées au régime des partis politiques a été posé.

En termes de contrôle des campagnes électorales, la CNCCFP procède à un contrôle exhaustif à partir des comptes de campagne déposés. La CNCCFP édite un formulaire de compte qui n’est pas obligatoire (sauf pour l’élection présidentielle). La prise de décision est collégiale et dans la mesure où la CNCCFP n’est pas une juridiction, le membre de la commission qui rapporte peut participer aux délibérations. Toutes les décisions prises par la CNCCFP le sont sous le contrôle du juge. Dans la majorité des cas, le juge électoral est le juge administratif (sauf cas de l’élection présidentielle). M. GAUVIN a terminé son intervention en soulignant que le pilier du système de contrôle mené par la CNCCFP est la présence d’un expert-comptable présentant les comptes de campagne des candidats et de commissaires aux comptes certifiant les comptes des partis.

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RAPPORT FINAL

Ciro MURAYAMA RENDÓN a débuté son intervention par la mention des objectifs visés par le système de financement de la vie politique en vigueur au Mexique, à savoir la transparence et la responsabilité de tous les acteurs de la sphère électorale, l’égalité des armes

entre acteurs électoraux et le respect et la mise en œuvre des standards internationaux. Différentes réformes ont eu lieu depuis la 1ère loi en matière de financement politique de 1977 qui avait consacré le principe du financement des partis politiques sur fonds publics et un accès réglementé et gratuit aux médias publics. Deux autres réformes de 1996 et 2007 sont venues affiner le système en place en précisant les modalités d’allocation de l’aide publique avant le de la diminuer, en imposant l’obligation du dépôt d’un compte auprès de l’organe de contrôle d’alors, l’IFE, et en interdisant la publicité commerciale. Le temps d’antenne alloué aux formations publiques est fondé sur des critères précis : 30 % attribués de façon équitable et 70 % alloués en fonction des résultats des partis aux dernières élections.

L’intervenant a ainsi précisé que les sources principales des partis politiques sont constituées des dons des militants et personnes physiques (avec une limite annuelle de 2 % du revenu total) et de l’apport personnel des candidats. Il existe un plafonnement des dépenses et le plafond des dépenses est équivalent à 20 % du financement public alloué à tous les partis politiques.

La réforme intervenue en 2014 est la plus importante à ce jour en matière de financement de la vie politique. Elle a créé l’INE (Instituto Nacional Electoral), qui a remplacé l’IFE, et a mis en place un système de contrôle intégral, le SIF (Sistema Integral de Fiscalización). Ainsi, les partis et candidats rendent compte de l’intégralité de leurs recettes et de leurs dépenses, en temps réel, sur une plateforme dédiée à cet effet sur le site internet de l’INE. Pour ce faire, ils doivent reporter et inscrire dans le système toutes les transactions financières dans les 3 jours suivant leur survenance. Une fois la campagne terminée, toutes ces informations sont consolidées dans un document unique soumis pour contrôle à l’INE. Les comptes doivent être accompagnés de toutes les pièces justificatives nécessaires.

L’INE a 40 jours, à compter de la date de l’élection, pour se prononcer sur les comptes remis et rendre des décisions qui peuvent avoir un impact sur les résultats des élections ; dans l’ancien système, l’IFE disposait de 158 jours pour contrôler les comptes déposés. L’INE conduit un audit des comptes déposés et peut également diligenter des visites sur le terrain (les candidats doivent produire des factures avec la mention de la TVA et toutes les mentions légales y afférant). Par la suite, l’INE peut contrôler et croiser toutes les informations contenues dans les rapports et se rapprocher des systèmes fiscaux ou des banques en cas d’incohérences. En 2016, l’INE a prononcé des sanctions pour un montant total de 23 millions de dollars, contre 250,000 dollars en 2013. Il y a eu une véritable augmentation au niveau des sanctions prononcées par l’INE (92 fois plus qu’en 2013).

Il existe sur le site internet de l’INE un portail « Rendición de cuentas y resultados de fiscalización » sur lequel il est possible de

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RAPPORT FINALLe financement de la vie politique en période électorale • La conférence du 28 mars 2017

consulter les comptes présentés par les partis politiques. Les médias sociaux représentent une thématique nouvelle pour l’INE et cette dernière travaille de concert avec Facebook et Twitter afin de contrôler que les montants déclarés par les candidats correspondent aux données fournies par ces plateformes sociales.

m. muRAyAmA RENdÓN a conclu son propos en soulignant que la relation entre argent et politique demeure une relation problématique et qu’il n’existe pas un système clé-en-main qui pourrait être copié-collé.

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DéBATLes débats qui ont suivi les interventions des panelistes de la 3ème session se sont principalement concentrés sur les problèmes pratiques rencontrés par les différents organes de contrôle :

→ Le financement des partis politiques est crucial en Tunisie. Les notions de financement des campagnes électorales et des partis politiques vont de pair et il apparaît essentiel, dans le contexte de transition démocratique que connait la Tunisie, de pérenniser les sources de financement des partis politiques pour les mettre à l’abri de toute influence extérieure. Le conférencier a rebondi sur ce point en soulignant qu’actuellement, il n’y a toujours pas de décret d’application ni de processus d’évaluation du décret-loi n° 2011-87 et a conclu en exprimant son souhait que soit créé un organe de contrôle en charge du financement de la vie politique dans son ensemble.

→ La question de l’efficacité du contrôle

opéré par l’INE a été posée, notamment au regard des délais très contraints dont disposent les candidats pour soumettre leur compte et ceux impartis à l’organe de contrôle pour rendre ses décisions. La question de l’accès aux données bancaires et fiscales par l’INE a été également posée. Depuis 2014, le secret bancaire a été levé et l’INE utilise sa plateforme internet et le portail dédié au contrôle du financement afin de croiser et récolter des informations auprès des banques et de l’administration fiscale. Le conférencier a souligné que le Mexique a mis en place un système de contrôle très solide afin de conserver un système de financement aussi légal que possible (les problèmes des cartels de drogue et de blanchiment d’argent sont endémiques au Mexique) ;

→ Quel est le coût du contrôle versus le coût de la campagne en France et quelles sont les sanctions encourues par les partis politiques ? Le conférencier a répondu que le coût du contrôle avait représenté un peu

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RAPPORT FINALLe financement de la vie politique en période électorale • La conférence du 28 mars 2017

moins de 10 % du coût de la campagne lors des élections municipales de 2014. Les sanctions prononcées à l’encontre des partis politiques sont d’ordre financier (perte de l’aide publique, non-délivrance des reçus-dons), mais le rôle de la CNCCFP est délicat car les comptes sont certifiés par les commissaires aux comptes ;

→ Comment s’assurer de la transparence du système de financement, autrement dit comment tracer les sources de financement et contrôler les flux d’argent ?

→ Est-ce que le financement public est la solution afin d’éviter toute (tentative de) corruption des partis politiques et des candidats ? Pour l’intervenant mexicain, le financement public est le pire des systèmes à l’exclusion de tous les autres, tandis que pour la conférencière québécoise, il convient de trouver un juste équilibre entre financement public et privé afin de conserver un lien entre les partis politiques, les militants et les électeurs.

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RAPPORT FINALLe financement de la vie politique en période électorale • La conférence du 28 mars 2017

La conférence a été clôturée par la présentation d’un rapport de synthèse des différentes interventions et discussions de la conférence par Barbara JouAn, spécialiste du financement auprès d’IFES.

Après avoir remercié les intervenants et les organisateurs de la conférence (ISIE, PNUD, IFES, Commission de Venise et Conseil de l’Europe), Barbara JouAn, a souligné que la question du financement de la vie politique est devenue un aspect à part entière, voire même un enjeu du processus électoral. L’intérêt et l’attention portés par les missions d’observation et d’évaluation électorale de l’OSCE/ODIHR, de l’Union Européenne, du Conseil de l’Europe et du Centre Carter ou les projets d’assistance technique d’IFES ou du PNUD en témoignent. Il existe désormais un patrimoine électoral

v. RAPPORT dE syNTHèsE ET PRésENTATION dEs RECOmmENdATIONs dE LA CONFéRENCE

commun, communément appelé « normes internationales ».

Ces standards internationaux et bonnes pratiques, tels que présentés par mm. dOuBLET et gHEvONTIAN lors de leurs interventions, couvrent les 4 pans du financement des campagnes électorales et des partis politiques, à savoir : les sources de financement, le plafonnement des dépenses électorales, le dépôt et la publication des comptes financiers et le contrôle et le prononcé de sanctions.

Le rapporteur a mis l’accent sur le fait que, de la même façon que la démocratie est en perpétuelle évolution et en constante construction, le financement de la vie politique est une matière mouvante qui nécessite que les parties prenantes s’adaptent en permanence.

Les différentes interventions de cette journée de conférence ont mis en exergue un point essentiel ; la question du financement de la vie politique s’inscrit dans une perspective plus large qu’est celle de la transparence mais aussi de la moralisation de la vie publique dans son ensemble. L’argent est le nerf de la guerre et la démocratie, bien qu’elle n’ait pas de prix, a un coût. Ces 2 maximes illustrent la relation nécessaire mais problématique qui existe entre argent et politique et montre que s’il n’est pas de progrès irréversible, il s’avère parfois nécessaire que la loi vienne au secours de la vertu. Le rapporteur s’est référé au déficit éthique et à la crise de valeurs mentionnés par m. sARsAR et illustrés par

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RAPPORT FINALLe financement de la vie politique en période électorale • La conférence du 28 mars 2017

m. POIFOuLOT. Ce dernier a ainsi souligné que la création de la HATVP avait procédé d’un impératif de transparence lié à une perception dégradée de la classe politique.

L’existence de règles en matière de financement de la vie politique implique de s’interroger sur les raisons et la nécessité de leur adoption. La présentation des différents mécanismes institutionnels de contrôle du financement de la vie politique pendant la 3ème session a mis en exergue le fait qu’il n’existe pas un système préexistant/ prédéfini qui pourrait être recopié et reproduit à l’envi. L’adoption d’une législation relative au financement de la vie politique répond à des besoins spécifiques et s’inscrit dans un contexte particulier. Comme indiqué par m. TABIB, la classe politique a un devoir d’exemplarité et comme souligné par m. sOussI, il existe 2 catégories d’acteurs au sein de la sphère politique : ceux qui jouent un rôle d’animation (partis politiques et société civile) et ceux qui jouent un rôle de régulation. Le rapporteur a mis l’accent sur le fait que les deux principes fondamentaux de tout système de financement, à savoir la transparence et la redevabilité ou responsabilité s’appliquent aussi bien aux animateurs qu’aux régulateurs de la sphère politique.

Le rapporteur a ensuite abordé les implications liées à l’adoption d’une législation relative au financement de la vie politique. L’adoption de règles en la matière pose la délicate question de la nécessité de trouver un équilibre entre des principes qui semblent a priori contradictoires. Il en va ainsi du (1) besoin de respecter la liberté d’expression des acteurs électoraux et politiques d’une part et de la nécessité de garantir un processus électoral juste et équitable et l’égalité entre les candidats d’autre part et du (2) besoin de respecter la vie privée et les données à

caractère privé d’une part et de la nécessité d’assurer la transparence du financement de la vie politique d’autre part.

La présentation du cas tunisien et des règles en matière de financement des associations et des médias et de réglementation des sondages d’opinion a permis d’illustrer cet équilibre subtil. Comme indiqué par m. BELAAm, la question de la réglementation des sondages d’opinion pose le problème de la restriction de la liberté d’expression. Dans le même temps, comme mis en exergue par m. mOuHLI, qui détient la parole (et donc les ressources financières pour l’acheter) détient le pouvoir.

Tout au long de la conférence, les différents intervenants ont insisté sur l’importance d’avoir un cadre juridique réaliste et applicable afin d’éviter que l’organe de contrôle soit amené, dans le silence ou l’ambigüité des textes, à émettre des prescriptions qui peuvent revêtir un caractère prétorien. Il a également été souligné l’importance de mettre en place un dialogue, une collaboration entre les acteurs institutionnels et entre les acteurs institutionnels et non-institutionnels (médias, société civile) afin d’assurer un meilleur contrôle et un suivi du financement de la vie politique. Les objectifs louables de l’adoption de règles relatives au financement de la vie politique, à savoir l’égalité des armes et la nécessité d’éviter l’influence des intérêts privés sur la sphère publique, ne peuvent être atteints que si le système normatif est mis en œuvre et assorti d’un mécanisme de contrôle impartial, indépendant et équitable. En effet, le problème posé est souvent moins l’absence de règles que l’insuffisance des moyens pour en assurer l’application.

Le rapporteur a conclu sa synthèse en soulignant que la transparence du financement de la vie politique doit

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RAPPORT FINALLe financement de la vie politique en période électorale • La conférence du 28 mars 2017

s’accompagner de la possibilité de mettre en cause et tenir responsables les acteurs institutionnels et non-institutionnels qui ont manqué à leurs obligations via l’existence d’un mécanisme de contrôle efficace et équitable prenant en compte les observations de toutes les parties prenantes et rendant compte du travail de vérification opéré. En effet, les sanctions ne peuvent être imposées sans un dispositif de contrôle efficace et un contrôle effectif ne peut être mis en œuvre sans transparence.

Le financement de la vie politique est une matière en perpétuelle évolution qui nécessite une adaptation constante de tous

les acteurs de la sphère politique afin de s’adapter aux nouvelles thématiques (tels que les réseaux sociaux) mais aussi d’anticiper, de prévenir ou de punir les liaisons dangereuses existant entre l’argent et la politique. En tout état de cause, l’adoption d’une législation en matière de financement de la vie politique doit correspondre à la volonté de mettre en place un système cohérent et non au besoin d’apporter une réponse immédiate à un problème conjoncturel.

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RAPPORT FINALLe financement de la vie politique en période électorale • La conférence du 28 mars 2017

ANNEXEs : PROgRAmmE

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RAPPORT FINALLe financement de la vie politique en période électorale • La conférence du 28 mars 2017

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suR LEs TECHNIquEs du CONTRÔLE du F I N A N C E m E N T

regards croisés i n t e r n at i o n a u x

dEs CAmPAgNEs é L E C T O R A L E s

29 Mars 2017

Atelier de travail

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RAPPORT FINALRegards croisés internationaux sur les techniques du contrôle du financement des campagnes électorales • Atelier de travail du 29 mars 2017

I. INTROduCTIONLe contrôle du financement de la vie politique en général et des campagnes électorales en particulier est une tâche très sensible qui requiert des organes publics en charge de cette mission un degré élevé de professionnalisme et des compétences techniques très pointues. En Tunisie, les élections de l’Assemblée Nationale Constituante de 2011 et les élections législatives et présidentielles de 2014 ont été organisées dans la précipitation. La législation a mis en place un contrôle du financement des campagnes électorales à deux étages opérés par l’Instance Supérieure Indépendante pour les Élections (ISIE) tout au long de la campagne électorale et par la Cour des comptes après la réception des comptes financiers. Ces deux institutions ont été investies de missions complexes, lourdes et enserrées dans des délais très courts. Les expériences électorales de 2011 et 2014 ont mis en exergue les faiblesses du contrôle mis en œuvre et les limites des moyens mis à la disposition de ces organes de contrôle.

Dans l’optique des prochaines élections locales prévues pour la fin de cette année (17 décembre 2017), il est légitime et opportun de poser à nouveau la question du contrôle du financement des campagnes électorales. L’angle choisi pour débattre de cette problématique a été d’orienter la réflexion et les débats de l’atelier de travail du 29 mars vers les techniques et méthodes du contrôle ainsi que les moyens de preuve et la gestion des recours. La présence en Tunisie des experts internationaux et des représentants des instances électorales et institutions chargées du contrôle du financement des campagnes électorales, a constitué une très bonne occasion, pour les institutions tunisiennes impliquées ou concernées par la question du contrôle du financement politique, d’avoir un éclairage international quant au contenu et à l’étendue du contrôle opéré dans les pays dont les expériences ont été présentées.

Pour les besoins de cet atelier, deux thématiques ont été identifiées :

1/ les techniques et méthodes d’évaluation comptable regroupant l’évaluation des sources de financement (dons en nature, sponsoring et prêts bancaires) et l’évaluation des dépenses (référentiel d’évaluation, évaluation des plafonds, amortissement des équipements, distinction entre dépenses courantes des partis politiques et dépenses électorales) ;

2/ les moyens de preuve (techniques de recoupement des informations, utilisation des outils informatiques, constats et PV), la gestion des plaintes et dénonciations et le régime des sanctions.

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RAPPORT FINALRegards croisés internationaux sur les techniques du contrôle du financement des campagnes électorales • Atelier de travail du 29 mars 2017

C’est dans ce contexte que l’ISIE et ses partenaires internationaux ont décidé d’organiser un atelier de travail sur les techniques de contrôle du financement des campagnes électorales afin de nourrir la réflexion et d’apporter un éclairage international aux acteurs et décideurs politiques et institutionnels tunisiens quant à l’importance de la mise en place d’un contrôle efficace dans l’optique des prochaines élections municipales et régionales.

L’atelier de travail qui s’est tenu à Tunis le 29 mars avait trois objectifs principaux :

1/ sensibiliser les principales parties prenantes tunisiennes impliquées dans le

II. PRésENTATION dE L’ATELIER dE TRAvAIL

III. PARTICIPATION ET déROuLEmENT dE L’ATELIER dE TRAvAIL

contrôle du financement de la vie politique à la nature, à l’étendue et aux méthodes de contrôle utilisées ;

2/ débattre des dispositions juridiques qui ont encadré le système de financement de la campagne électorale et son contrôle en 2014, en tirer les enseignements et réfléchir à la façon de l’améliorer dans l’optique des prochaines élections locales ;

3/ fournir un forum de dialogue pour les acteurs institutionnels tunisiens (ISIE, Cour des comptes, Tribunal administratif) visant à une compréhension commune des méthodes et techniques utilisées dans le contrôle du financement des campagnes électorales.

L’atelier de travail a rassemblé des membres de l’ISIE, des magistrats de la Cour des comptes, des juges du Tribunal administratif, des experts-comptables, des universitaires et des experts nationaux et internationaux (experts du GRECO et de la Commission de Venise et représentants des organes de contrôle français, mexicain et québécois).

L’atelier de travail était structuré en deux sessions thématiques : (1) techniques et

méthodes d’évaluation comptable et (2) moyens de preuve, gestion des plaintes et régime des sanctions. Chaque session était constituée de deux à trois exposés relatifs à l’expérience tunisienne de 2014 et de discussions et débats principalement centrés autour de la présentation des expériences des 3 pays représentés (France, Mexique et Québec).

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RAPPORT FINALRegards croisés internationaux sur les techniques du contrôle du financement des campagnes électorales • Atelier de travail du 29 mars 2017

Iv. Résumé dEs PRésENTATIONs ET déBATs

L’atelier de travail a été ouvert par les mots de bienvenue de chafik sArsAr qui a tenu à remercier les organisateurs ainsi que les intervenants de cet atelier de travail. Richard gHEvONTIAN, membre de la Commission de Venise, a ensuite introduit les deux thèmes de cette demi-journée d’atelier. Il a débuté son rapport en insistant sur le fait que la présence d’une législation en matière de financement de la vie politique est le signe du bon état d’une démocratie. La dimension comparée et l’opportunité d’avoir des regards croisés entre différentes législations permet ainsi de mettre en exergue les similarités et les différences, mais permet surtout de comprendre les spécificités intrinsèques à chaque système de financement et par voie de conséquence à chaque système de contrôle du financement de la vie politique.

L’intervenant a ensuite souligné les

principales similitudes entre la France et la Tunisie. Ainsi, dans les 2 pays, les dépenses sont plafonnées et le financement privé bien qu’autorisé est limité. De plus, certaines sources de financement sont interdites, telles que le financement étranger ou par les personnes morales. À partir de la présentation du système de financement public existant en France et en Tunisie, m. gHEvONTIAN a abordé la question des principes de transparence et d’égalité des armes. En effet, au sein de l’arsenal de règles en matière de financement de la vie politique, l’existence d’un système de financement sur fonds publics permet de mettre en œuvre la transparence au niveau des sources de financement mais également le principe de l’égalité des armes. Il a cependant apporté un bémol en distinguant le financement des partis politiques qui ne garantit pas l’égalité absolue car la distribution des fonds publics

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est fondée sur des critères d’éligibilité et d’allocation prédéfinis et le financement des campagnes électorales où le principe d’égalité pur devrait être la règle.

m. gHEvONTIAN a ensuite rappelé que la Commission de Venise recommande qu’un seul organe de contrôle soit en charge du contrôle du financement des campagnes électorales et des partis politiques. En France, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP), autorité administrative indépendante, est investie de cette compétence, tandis qu’en Tunisie, cette compétence a été conférée à l’ISIE et à la Cour des comptes. La question qui se pose ici est donc le degré de dialogue et le niveau

de collaboration et de coopération existant entre les deux institutions de contrôle. Ces dernières ont à leur disposition une large palette de sanctions financières, électorales et pénales. L’intervenant a souligné que les sanctions électorales ont trait à la morale électorale et que la loi organique n° 2017-7 du 14 février 2017 a introduit une obligation nouvelle pour l’ISIE qui est celle d’annuler totalement ou partiellement les résultats des élections en cas de constatation de violations revêtant un caractère substantiel et déterminant. M. GHEVONTIAN a terminé son rapport introductif en soulignant le risque, en cas de dualité d’organes de contrôle, d’un possible conflit de compétences pouvant potentiellement engendrer un conflit négatif de compétences.

Les trois interventions de la première session présentées par Ons KACEM, Experte-comptable, ancienne membre de l’unité de contrôle du financement de campagne au sein de l’ISIE en 2014, Chiraz TLILI, Magistrate-Présidente de section à la Cour des comptes et Walid AMMOUS, Expert-comptable ont porté sur la présentation de l’expérience tunisienne de 2014 et ont été suivies de la présentation des expériences française, québécoise et mexicaine en la matière.

Ons KACEM a débuté sa présentation par le rappel du cadre juridique du contrôle de l’ISIE en termes de financement des campagnes électorales de 2014, à savoir la loi électorale n° 2014-16 du 24 mai 2014 (titre IV, chapitre 2), la décision n° 2014-20 de l’ISIE et les décrets n° 2014-2761 et 2014-3038. Elle a ensuite

TECHNIquEs ET méTHOdEs d’évALuATION

Sess

ion

I

rappelé les principales étapes du contrôle de la campagne, à savoir le contrôle sur terrain nécessitant le déploiement d’agents de contrôle pour observer les activités de la campagne, la rédaction de PV par ces derniers dans le but de constituer une base de données concernant les activités électorales, et ce afin de faciliter le contrôle des comptes financiers et le contrôle a posteriori, et un contrôle documentaire consistant en la vérification de l’absence de dépassement du seuil des dépenses et des plafonds des sources de financement (autofinancement, financement privé et financement public).

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mme KAcem a ensuite évoqué les difficultés rencontrées respectivement pour l’évaluation des ressources des campagnes et des dépenses. En termes de sources de financement, le non-respect du principe d’intégration systématique de toutes les ressources dans le compte bancaire unique, l’absence de déclaration et d’imputation au compte de certains concours en nature, l’absence d’un tableau unique d’évaluation du coût des différentes dépenses de campagne possibles pour chaque circonscription électorale (pour une meilleure appréciation et comparaison entre les listes), l’inexistence d’un critère précis de définition et d’évaluation des concours en nature et l’impossibilité pour les agents de contrôle de couvrir toutes les activités de campagne ont représenté les principales difficultés rencontrées.

Selon les procédures en vigueur, les dépenses électorales relatives à la campagne sont effectuées sur la base de documents de preuve originaux et authentiques. Les agents de contrôle ont ainsi été amenés à vérifier l’existence d’un registre contenant les différentes dépenses électorales effectuées, la valeur du marché et la comparaison entre la valeur des dépenses et le seuil des dépenses électorales et la fixation du montant de dépassement s’il existait. En termes de dépenses, les problèmes liés à la définition de la dépense électorale, aux dépenses engagées et consommées avant la campagne électorale, mais ne rentrant pas dans le compte financier et donc dans le calcul du plafond, à la difficulté de distinguer entre les dépenses ordinaires des partis et les dépenses électorales des listes candidates et à la difficulté d’évaluer les dépenses illicites, et notamment la publicité politique, et leur inclusion dans le compte financier ont été les principales difficultés rencontrées.

mme KAcem a terminé sa présentation en soulignant la nécessité d’unifier les méthodes d’évaluation, via une application informatique, notamment pour les concours en nature prenant en compte les indicateurs du coût de la vie et d’établir des normes comptables propres au financement des campagnes électorales.

Chiraz TLILI a articulé son intervention autour de deux thèmes, à savoir le cadre organisationnel et logistique de la Cour des comptes en matière de contrôle du financement des campagnes électorales (1) et la méthodologie de contrôle des campagnes électorales (2) et a souligné d’emblée que le contrôle de la Cour, fondé sur les rapports de terrain et sur les pièces fournies à l’appui des comptes financiers, n’était pas un contrôle exhaustif.

1/ L’intervenante a, en premier lieu, expliqué l’organisation de la Cour des comptes pour le contrôle du financement des campagnes électorales et a mentionné les différentes structures internes à la Cour intervenant dans les opérations de contrôle, une fois les comptes financiers reçus et répartis entre les différentes chambres. Le travail de contrôle s’est effectué en 7 étapes. 1/ la réception, l’enregistrement et le dispatching des comptes financiers par les bureaux d’ordre entre les différentes chambres (aux niveaux central et régional) ; 2/ la révision préliminaire des comptes déposés par les secrétaires et la préparation d’un rapport sur l’état du compte envoyé au juge d’instruction compétent ; 3/ la présentation des remarques préliminaires

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RAPPORT FINALRegards croisés internationaux sur les techniques du contrôle du financement des campagnes électorales • Atelier de travail du 29 mars 2017

(1er rapporteur) et la vérification de la véracité et de la précision de ces mêmes remarques (2ème rapporteur) avec la possibilité laissée aux listes concernées de produire leurs observations à l’appui de la procédure contradictoire ; 4/ la présentation de remarques sur le projet de rapport final et la mention des infractions électorales par le ministère public ; 5/ la vérification des remarques relatives aux comptes soumis à son contrôle et la préparation du projet de rapport de synthèse par la chambre (avec examen des infractions passibles de sanctions financières en première instance) ; 6/ la réception, par l’instance de cassation, des pourvois contre les jugements rendus en première instance par les chambres ; 7/ la coordination par le rapporteur général, des travaux de programmation du contrôle, de suivi et de préparation d’un rapport général sur les résultats du contrôle de la Cour sur le financement des campagnes électorales, sous la direction du premier Président.

Afin de mener à bien sa mission de contrôle du financement des campagnes électorales en 2014, la Cour des comptes a développé un cadre organisationnel et logistique, à savoir une application de contrôle du financement des campagnes électorales, un guide du contrôle du financement des campagnes électorales et un guide du cadre juridique relatif au financement de la campagne électorale de 2014. L’intervenante a également souligné qu’une équipe de travail, présidée par le président d’une chambre, avait été chargée de contrôler les sources de financement, public et privé, ainsi que le respect des plafonds.

2/ mme tlili a ensuite expliqué les 2 phases de contrôle des campagnes électorales opéré par la Cour des comptes, à savoir la révision préliminaire des comptes de la campagne de la part des secrétaires et

les travaux d’investigation. Les secrétaires ont ainsi été amenés à réviser les données générales inscrites aux comptes, à superviser l’authenticité des documents de preuve, à procéder à la révision préliminaire des recettes et dépenses, à dresser une liste des listes candidates n’ayant pas obtenu 3% au moins des suffrages exprimés et devant restituer la totalité de l’indemnité et à établir une liste des dépenses dépourvues de caractère électoral.

Les travaux d’investigation ont nécessité que soient mis en place un contrôle de la légitimité des recettes et des dépenses, le contrôle financier des partis et la préparation du rapport général. Au final, la Cour des comptes a contrôlé les flux financiers et les variations de ces flux (pouvant constituer un début de preuve pour détecter des mouvements irréguliers) de 3 084 comptes ouverts auprès de 6 banques par 1 888 listes. Le contrôle de la légitimité des recettes a impliqué de vérifier la transparence des sources du financement des campagnes électorales retracées sur le compte bancaire unique pour les revenus en numéraire, et inscrites sur un registre particulier pour les concours en nature. Le contrôle de la légitimité des dépenses a induit la vérification du caractère électoral des dépenses déclarées, du respect par les candidats du seuil des dépenses électorales et du paiement, par le mandataire, des dépenses à partir du compte bancaire unique. Le contrôle financier des partis opéré par la Cour des comptes s’est fondé sur la vérification des sources de financement des partis, sur l’utilisation de ces fonds, sur les moyens de transfert d’argent, sur la saisie des registres et des comptes et sur la préparation des listes financières et de leur adoption.

À la lumière des résultats du contrôle, chaque chambre a préparé un rapport préliminaire (premier rapporteur) puis un second

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rapport (deuxième rapporteur). À la suite de la réception des réponses des listes, un rapport de synthèse de toutes les infractions rencontrées a été préparé et les rapports ont été envoyés à la chambre concernée pour adoption. La Cour des comptes a par la suite rédigé un rapport général contenant toutes les remarques figurant dans les rapports de synthèse des différentes chambres. Le rapport général a été présenté à la commission des rapports et de la programmation dans un premier temps et à l’assemblée plénière pour adoption et publication dans un second temps.

mme tlili a conclu sa présentation en soulignant que la publication du rapport général avait pour but d’informer le public et de rendre compte du contrôle opéré, de déterminer les dépassements ayant constitué des infractions, de rendre des décisions provisoires concernant les listes ayant commis des infractions mais également de formuler des recommandations susceptibles d’améliorer la transparence des campagnes électorales.

Walid AMMOUS a débuté sa présentation par le rappel de la définition de la dépense électorale telle qu’établie par la loi organique n°2014-16, à savoir « la somme des dépenses en numéraire et en nature engagée par le candidat, la liste ou le parti, ou pour leur compte, durant la période électorale ou référendaire, et consommée ou effectuée en vue d’honorer les frais de la campagne électorale ou référendaire et afin de gagner la confiance de l’électeur et d’obtenir sa voix». L’intervenant a ensuite présenté les différentes catégories de dépenses qui ont été engagées pour les besoins des campagnes électorales de 2014 (publicité, achat de biens, location de matériels ou de locaux, transports salaires, impression) et a insisté sur le fait que toute dépense électorale devait être justifiée et

autorisée pour être remboursée. Il a ensuite fait un parallèle entre le poste de dépenses « impression » qui représentait 48 % du total des dépenses en 2011 et seulement 30 % en 2014. Il a également mis en exergue le fait, qu’en 2014, 51 % des dépenses avaient été payées en espèces, 18 % par chèque et 12 % par virement et 19 % des dépenses correspondaient à des concours en nature.

m. AmmOus a ensuite brièvement rappelé le cadre juridique (financement mixte, plafonnement des dépenses, dépôt et publication des comptes financiers et contrôle) et a souligné l’obligation faite à l’ensemble des listes de déposer un compte financier, selon un formulaire préparé par l’ISIE accompagné des pièces originales. Il a également mis l’accent sur le problème lié à la justification des dépenses. En effet, en cas d’absence de factures, quels sont les documents qui seront considérés comme acceptables par l’organe de contrôle : les décharges de paiement (copie de chèque, ordre de virement, bon de caisse), les contrats, les échantillons (spécimens des documents produits, pages des journaux par exemple) ?

L’intervenant a également évoqué les difficultés comptables liées à la prise en compte et à la comptabilisation de certaines dépenses électorales, notamment en ce qui concerne la valorisation des concours en nature et/ou les contributions des bénévoles. Il a ainsi insisté sur la nécessité d’une information exhaustive, fiable et pertinente et d’un référentiel permettant cette évaluation grâce à la mise en place de traitements comptables. L’intervenant a également souligné les problèmes concrets rencontrés lors des campagnes de 2014 quant à la distinction à opérer entre comptabilité d’engagement et comptabilité de trésorerie, l’interdiction de la compensation en cas de

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RAPPORT FINALRegards croisés internationaux sur les techniques du contrôle du financement des campagnes électorales • Atelier de travail du 29 mars 2017

charges lourdes liées à la campagne et la nécessité de distinguer entre les dépenses de campagne et les dépenses courantes des partis politiques. m. AmmOus a conclu son propos en soulevant la question des dépenses revêtant un caractère hybride sans que soit fournie une clé de répartition permettant de procéder à l’imputation comptable de ces dernières au compte financier de la campagne et au compte du parti.

DISCUSSION - DéBATLes trois experts internationaux ont brièvement présenté la situation dans leur pays respectif en matière de techniques et méthodes d’évaluation.

1/ Québec :

o Il existe un registre des représentants officiels et chacun d’entre eux doit obtenir l’autorisation du Directeur d’Élections Québec. Les représentants officiels ne peuvent pas être candidats (incompatibilités très strictes).

o Tous les partis et candidats doivent produire un rapport financier comportant l’intégralité des recettes et des dépenses. Les formulaires des rapports sont prescrits par le Directeur général des élections du Québec et tous les rapports sont publiés sur le site internet d’Élections Québec (EQ). Toutes les pièces justificatives doivent être fournies à l’appui des rapports financiers et les agents d’Élections Québec peuvent faire des demandes supplémentaires sous 30 jours. En cas de non production des pièces demandées, le juge est saisi.

o Chaque parti politique doit ouvrir un compte bancaire unique, comportant une dénomination particulière et le nom du

représentant officiel. Les relevés bancaires mensuels de ces comptes doivent être fournis à EQ ainsi que les talons des chèques supérieurs à 10 CAD). En cas d’élection, un second compte bancaire, ne retraçant que les dépenses électorales, doit être ouvert pour les besoins de la campagne.

o Au Québec, la définition de la dépense électorale est claire. L’organe de contrôle assure des formations et publie un guide à destination des représentants officiels pour s’assurer de la bonne compréhension du cadre juridique.

o EQ procède au contrôle par échantillonnage et seuls les rapports financiers sélectionnés sont soumis au contrôle exhaustif des pièces et à la vérification du respect des obligations légales et comptables par les partis contrôlés. EQ mène un contrôle de la cohérence et de la chronologie des dépenses inscrites au rapport à comparer avec le registre comptable.

o En cas de doute d’une irrégularité, EQ peut diligenter une visite sur place et un contrôle dans les locaux du parti. En ce qui concerne les élections législatives du Québec, tous les documents originaux sont envoyés à Élections Québec (pour les élections municipales, c’est le trésorier municipal qui reçoit ces pièces).

o En matière d’évaluation des sources de financement, EQ peut faire des demandes de renseignements fiscaux auprès de l’agence du revenu du Québec afin de cibler les employés d›un même employeur. C’est grâce au recoupement de données entre EQ et l’administration fiscale que 14.5 millions CAD de contributions « louches » ont été décelés entre 2006 à 2011 en raison d’une trop forte concentration de donateurs chez un même employeur.

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o Les plafonds de dépenses applicables sont de 4 millions CAD pour les partis politiques et de 4.3 millions CAD pour les candidats. En cas de soupçons d’irrégularités, il est possible d’augmenter les échantillonnages et en cas de doutes, les dossiers litigieux sont transférés au département juridique.

2/ France :

o La CNCCFP n’a pas de pouvoir d’investigation et son travail de contrôle est fondé principalement sur la pratique de la procédure contradictoire.

o Il n’y a pas de contrôle sur terrain pendant la campagne électorale. Les comptes sont envoyés chez les rapporteurs qui travaillent sur les comptes via une application informatique. L’écueil de ce système de télétravail est qu’il n’est pas possible de collecter les informations au niveau central avant que tous les comptes ne soient retournés à la commission.

o Il n’existe pas, dans le système actuel, un mécanisme de collecte des informations relatives aux fournisseurs et aux prestataires de services permettant de croiser les données imputées aux différents comptes financiers.

o Le système français est déclaratif et la CNCCFP ne peut pas avoir accès aux comptes bancaires des candidats ou des parlementaires, seulement les comptes bancaires des mandataires financiers.

o Il n’y a pas de croisement des données entre la CNCCFP et la Haute Autorité pour la Transparence de la Vie Publique (HATVP) en ce qui concerne les comptes personnels et les déclarations de patrimoine. Il existe un vrai problème de collaboration entre les différentes institutions de contrôle.

o La CNCCFP met à la disposition des candidats un guide. Elle ne mène pas de sessions de formation comme c’est le cas au Québec. Le travail de la CNCCFP repose essentiellement sur la présentation des comptes par l’expert-comptable.

o Mise à part les cas de surévaluation/sous-évaluation flagrante, la CNCCFP est complètement démunie face à ce problème. Qui plus est, le juge administratif a encadré de façon de plus en plus restrictive le pouvoir d’appréciation de la CNCCFP.

o Le formulaire de compte de campagne n’a pas de valeur normative. Il s’agit juste d’un arrangement de plan comptable pour permettre une présentation uniforme des recettes et dépenses.

o Le militantisme n’est pas valorisé dans les comptes de campagne. Cependant, dans l’hypothèse où la prestation fournie correspond à une valeur professionnelle particulière, il doit y avoir une valorisation en concours en nature dans le compte de campagne (la charge de la preuve incombe au candidat).

o Le droit financier de la vie politique est un droit en constante évolution.

• Ainsi, lors des dernières élections régionales de 2015, le juge a estimé, en présence d’une facture pour une prestation non effectuée, que l’élément intentionnel était présent, même en l’absence de réalisation de la dépense, et qu’à ce titre, elle constituait une dépense électorale ; • Lors des élections législatives de 2012, un parti politique a eu recours à un expert-comptable pour l’ensemble des comptes et a procédé à la mutualisation des dépenses et recettes via la production de

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kits de campagne livrés clés en main. Ce parti politique, « Jeanne », a été requalifié en entreprise en raison du mouvement des flux financiers sur un laps de temps très court (sur 3/ 4 jours). Le dossier a été transféré au Procureur après que la CNCCFP ait croisé les comptes de campagne avec les comptes du parti.

3/ Mexique :

o Depuis 2014, l’Institut National Electoral (INE) dispose d’un logiciel de contrôle en ligne, l’ISF (ou SIF en espagnol, Sistema Integral de Fiscalización), pour contrôler en temps réel les dépenses et recettes qui doivent être déclarées par les partis politiques dans un délai de 3 jours suivant leur survenance. Une fois la campagne terminée, toutes ces informations sont consolidées dans un document unique soumis pour contrôle à l’INE. Les comptes doivent être accompagnés de toutes les pièces justificatives nécessaires.

o L’INE conduit de visites de terrain pendant la campagne et visite les quartiers généraux de campagne des partis politiques. L’INE contrôle également les médias sociaux et les journaux à travers des revues de presse et observe les affiches et panneaux publicitaires apposés dans les rues. Une fois les comptes reçus, l’INE peut donc confronter les documents fournis par les partis politiques à l’appui des comptes déposés avec ses propres constations et observations.

o Le système de l’ISF présente comme avantages de générer des rapports automatiquement et en temps réel, de permettre un contrôle homogène des comptes déposés et une consultation facilitée des comptes en ligne.

o Lors des élections de 2015 et 2016, l’INE a contrôlé les comptes de 21,185 candidats. Pour les élections de 2016, 122,938 opérations ont été enregistrées, dont 53,012 (soit 69 % du total des opérations déclarées pour l’année) pour la seule période s’étalant du 29 mai au 4 juin 2016.

DéBATLes débats se sont articulés principalement autour des points principaux présentés par les intervenants de la première session, à savoir :

o Dans les différents pays présentés, dans quelle mesure les dépassements constatés peuvent engendrer l’annulation des résultats de la liste/ du candidat concerné ?

o Au Mexique, comment s’organise la coordination entre les niveaux national et local en raison des délais très contraints (40 jours) et du volume très important des comptes à examiner ?

o Comment s’effectue le choix du représentant officiel au Québec ? Quel est le rapport entre les structures provinciale et locale des partis politiques ? Est-ce qu’Élections Québec procède à un audit de conformité ou à un audit financier, sur pièces ou sur place ? L’intervenant a indiqué que lors des dernières élections, les équipes de contrôleurs déployés dans les grandes villes du Québec ont constaté des dépenses importantes qui n’auraient certainement pas été intégrées au compte sans ce travail de contrôle sur terrain ;

o Est-ce que l’absence de croisement des données bancaires constitue un obstacle au contrôle opéré par la CNCCFP? L’intervenant a souligné que l’intérêt est

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de contrôler qu’il n’y a pas de procuration/ d’intermédiaire et a souligné que bien souvent, il y a un manque d’informations alors même que les décisions doivent être prises dans des délais très courts. La CNCCFP est confrontée à un problème de gestion des flux des comptes en raison d’une réponse tardive des candidats et il arrive parfois que la CNCCFP doive statuer en l’absence de réponse du candidat.

o Dans quelle mesure les responsables financiers des partis ou des listes sont compétents pour mener à bien leur mission ? Devrait-il y avoir une vulgarisation des règles applicables et des procédures de contrôle ?

o Le contrôle sur terrain devrait être privilégié afin de glaner et collecter les informations nécessaires pour déceler les irrégularités.

o Comment éviter un conflit de compétences qui peut s’avérer négatif ? Dans le contexte tunisien, il a ainsi été avancé qu’il était préférable de cantonner le contrôle afin d’optimiser les ressources humaines et financières et de conférer à l’ISIE le contrôle du financement pendant la campagne électorale et de laisser à la Cour des comptes le contrôle a posteriori.

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Les deux interventions de la seconde session présentées par Mohamed TLILI MNASRI, membre du Conseil de l’ISIE, et par Samia BOKRI, Présidente de chambre consultative au Tribunal administratif, ont porté sur la présentation de l’expérience tunisienne de 2014 et ont été suivies de la présentation des expériences française, québécoise et mexicaine en la matière.

mOyENs dE PREuvE, gEsTION dEs PLAINTEs ET RégImE dEs sANCTIONsSe

ssio

n II

Mohamed TLILI MNASRI a débuté sa présentation par le rappel des caractéristiques du contrôle du financement de la campagne électorale opéré par l’ISIE, à savoir un contrôle sur terrain durant la période de la campagne électorale exercé en parallèle de celui effectué par la Cour des Comptes, mais également par les différentes structures publiques impliquées dans ce processus, notamment la Banque Centrale Tunisienne (BCT) et le Ministère des finances.

L’intervenant a ensuite présenté les moyens de preuve qui étaient à la disposition de l’ISIE lors des campagnes législatives et présidentielles. L’ISIE s’est fondée sur les rapports établis par les agents de contrôle relatifs aux différentes activités électorales observées et aux visites sur terrain des listes candidates, des candidats et de certains mandataires financiers, ainsi que sur les PV portant sur les infractions repérées. Afin de garantir l’authenticité du travail effectué par les agents de contrôle de la campagne électorale, l’ISIE a œuvré à ce que ces agents remplissent les conditions suivantes : la neutralité, l’indépendance, la prestation du serment et le travail au sein d’une équipe composée de deux agents de contrôle.

m. TLILI mNAsRI a ensuite présenté les objectifs des 2 visites de terrain menées en 2014. En effet, tandis que la première visite

avait un rôle pédagogique de sensibilisation, la seconde a constitué un contrôle à proprement parler. L’intervenant a ensuite souligné que, malgré les efforts fournis par l’ISIE en 2014, plusieurs difficultés ont été rencontrées au niveau du contrôle du financement de la campagne. Il a ainsi mis en exergue la faiblesse de la coordination avec le reste des structures de contrôle, spécialement en matière de lutte contre le financement étranger, et la faiblesse de l’opposabilité des PV rédigés par les agents de contrôle de la campagne.

m. TLILI mNAsRI a conclu sa présentation par l’explication relative à la réception des plaintes par l’ISIE lors des campagnes électorales de 2014. Il a été décidé de réceptionner toutes

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les plaintes quelle que soit leur source. Pour être inscrites sur un registre spécifique au sein de l’ISIE, les plaintes devaient être faites par écrit. Une fois ces plaintes enregistrées, les agents de contrôle ont diligenté les recherches nécessaires concernant l’objet de ces plaintes afin de pouvoir prendre les décisions adéquates. Dans tous les cas, les droits de défense ont été respectés via l’audition du défendeur. L’intervenant a ensuite mentionné le régime des sanctions mis en place en 2014 : sanctions électorales à la disposition de l’ISIE et de la Cour des comptes, sanctions financières à la disposition de la Cour des comptes et sanctions pénales relevant de la compétence des tribunaux judiciaires. Il a cependant souligné que des lacunes persistent dans la loi électorale révisée, puisque certaines infractions, telles que l’absence de l’ouverture d’un compte bancaire unique, ne sont pas sanctionnées.Samia BOKRI a articulé son intervention autour de deux points, à savoir la définition des moyens de preuve à travers la jurisprudence (1) et les pouvoirs du juge électoral et les limites des moyens de preuve (2).

1/ Le juge électoral a eu l’occasion de définir les moyens de preuve à l’appui de deux décisions. Par un jugement en appel n° 201420027 en date du 8 novembre 2014, il a été décidé que les infractions électorales pouvaient être prouvées par tous les moyens possibles et pas uniquement sur la base des rapports de l’ISIE et des PV rédigés par les agents de contrôle assermentés permettant ainsi la prise en compte des rapports préliminaires des organisations de la société civile à condition que ces rapports soient assez sérieux, précis et qu’ils aient un rapport direct avec les questions soulevées dans le cadre du contentieux soumis au juge. Par un arrêt de l’Assemblée plénière n° 201450006 en date du 19 novembre 2014, il a été jugé que la prérogative octroyée par la loi aux

agents de contrôle leur permettant de rédiger les procès-verbaux n’empêchait pas le juge d’exercer son contrôle quant à la véracité du contenu de ces PV.

Mme BOKRI a également souligné que le juge électoral a eu l’occasion de prouver la valeur procédurale et juridique de certains moyens évoqués par la loi électorale et les décisions de l’ISIE. En effet, la détection des infractions électorales ne constitue pas une compétence exclusive des agents assermentés de l’ISIE selon les termes des articles 71 et 72 de la loi électorale, car le juge administratif peut, en tant que juge électoral, utiliser tout autre moyen pouvant prouver l’existence d’infractions électorales de manière qui ne laisse pas place au doute. Le juge électoral a évoqué dans ses jugements les éléments d’accusation et les moyens présentés par le requérant qui doivent contenir un minimum de données permettant de prouver que les accusations revêtent un caractère sérieux pour être pris en compte.

L’intervenante a également indiqué que malgré les contraintes de temps, le juge électoral pour examiner les affaires qui lui étaient soumises avait eu recours à tous les moyens de preuve. Mme BOKRI a mis en exergue le caractère prétorien et audacieux du travail effectué par le juge électoral. À cet effet, elle a cité le cas où le juge a révisé les PV de dépouillement relatifs à l’une des délégations et a recalculé les voix octroyées à chacune des listes.

2/ Bien que l’expérience tunisienne en matière d’élections libres et honnêtes soit limitée, le juge électoral a joué un rôle pédagogique auprès de l’ISIE afin d’attirer son attention sur les lacunes et déficiences de ses méthodes et outils de contrôle, et ce afin d’éviter de répéter les mêmes erreurs dans le futur, y compris notamment les

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PV rédigés par les agents assermentés. Le juge électoral a ainsi jugé nécessaire que ces PV contiennent toutes les infractions accompagnées de tous les moyens de preuve et de tous les documents. Le PV doit également contenir le cachet de l’Instance afin qu’il puisse être considéré comme un PV officiel. Le juge électoral a mis l’accent sur le caractère prédominant de ces PV officiels sur les rapports des observateurs nationaux et internationaux.

mme BoKri a conclu sa présentation en soulignant que l’impact des moyens de preuve présentés devant le juge électoral demeurait relatif car la preuve et la nature des dépassements et des infractions restent soumises à l’appréciation du juge et n’entraînent pas systématiquement la révision ou l’annulation des résultats.

DISCUSSION :Les trois experts internationaux ont brièvement présenté la situation dans leur pays respectif en matière de moyens de preuve, de gestion des plaintes et de régime des sanctions.

1/ France

o Il existe une distinction entre le « contentieux initial » et les dénonciations portées à la connaissance de la CNCCFP.

o L’analyse juridique des griefs formulés à l’appui des recours déposés auprès du juge électoral compétent et transmis à la CNCCFP se fait au sein de la commission. La commission peut ainsi écarter un grief financier si elle juge qu’il n’y a pas lieu de le retenir. En cas de rejet du compte de campagne d’un candidat, le juge peut prononcer une inéligibilité allant de 1 an à

3 ans et s’appliquant à toutes les élections.

o La commission accuse réception de toutes les dénonciations (hormis les dénonciations anonymes). 80% des dénonciations reçues contiennent des griefs ou des éléments qui sont inexploitables.

o Le Code électoral prévoit toute une série de sanctions, notamment en cas d’infractions, qui ne sont jamais mises en œuvre telles que le rappel à l’ordre du mandataire financier.

o Les décisions d’approbation après réformation ou avec modulation sont toujours attaquables devant la commission elle-même à l’appui d’un recours gracieux et devant le juge à l’appui d’un recours contentieux. Les décisions de rejet de la CNCCFP sont transmises automatiquement au juge électoral compétent.

2/ Québec

o Au Québec, les partis politiques et les candidats se surveillent mutuellement, il n’y a pas de « contrôleurs électoraux » sur le terrain. Lorsqu’une irrégularité est observée, une plainte est déposée au « Bureau des plaintes » du Directeur général des élections (DGEQ), qui étudie la recevabilité de la plainte et qui ouvre une enquête le cas échéant.

o Le DGEQ détient un pouvoir d’enquête et un pouvoir de poursuite pénale si la loi électorale n’est pas respectée. Il peut, de sa propre initiative ou à la demande d’une personne, engager des poursuites ou initier une enquête. Il peut obliger une personne à témoigner ou à fournir un document financier. Le DGEQ détient son propre greffe pour l’émission des constats d’infraction,

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RAPPORT FINAL

la réception des plaintes/ requêtes et le paiement des amendes

o Les plaintes sont déposées au service juridique d’Elections Québec (par écrit ou par téléphone) et transmises au bureau des plaintes qui peut décider ou pas d’initier une enquête. Les enquêtes sont menées par une équipe de vérificateurs (enquêteurs) spécialisés en droit électoral qui ont pour mission de constater les manquements et irrégularités aux fins de transmission au service juridique.

o Il existe actuellement un projet de dénonciation en ligne afin que les citoyens puissent déposer leur dénonciation sur le site internet d’EQ. En 5 ans, 80 dénonciations ont été enregistrées auprès des services d’EQ.

o Les sanctions sont pécuniaires ou administratives, électorales et pénales. Par exemple, en cas de dépassement du plafond des dépenses électorales, l’agent officiel du parti politique ou du candidat est passible d’une amende de 5,000 CAD à 20,000 CAD. Également, si un candidat ne dépose pas dans le délai légal imparti un rapport de dépenses électorales, ce dernier perd son droit de siéger à l’Assemblée nationale et son droit de vote au parlement jusqu’à ce que le rapport soit déposé au Directeur général des élections.

3/ Mexique

o Le calendrier de dépôt et d’examen des comptes (40 jours au total) s’établit comme suit :

o 3 jours après le jour de scrutin, les partis déposent leurs rapports consolidés ;

o L’INE a 10 jours à compter de la date limite de dépôt des comptes pour relever et notifier toute erreur et/ou omission ;

o Les partis ont alors 5 jours pour apporter des clarifications et amender/ rectifier leurs rapports ;

o La commission de l’audit au sein de l’INE a 10 jours pour recevoir et revoir les rapports des partis ;

o Le conseil général des résolutions a ensuite 12 jours pour statuer sur les plaintes dans un délai de 15 jours avant la session du Conseil et rendre des décisions sur l’ensemble des comptes soumis.

o Le contrôle du financement de la campagne se fait tout au long de la campagne de façon simultanée. Les sanctions prévues sont d’ordre pécuniaire et électoral (le dépassement du plafond des dépenses à hauteur de 5 % peut engendrer l’annulation des élections).

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RAPPORT FINAL

L’atelier de travail a été clôturé par la présentation d’un rapport de synthèse des différentes interventions et discussions de la conférence par Barbara JouAn, spécialiste du financement auprès d’IFES.

Après avoir remercié les intervenants et les organisateurs de la conférence (ISIE, PNUD, IFES, Commission de Venise et Conseil de l’Europe), Barbara JouAn, a souligné que cet atelier, articulé autour de deux thématiques, à savoir les technique et méthodes d’évaluation et les moyens de preuve, la gestion des plaintes et le régime de sanctions, avait pour objectif d’apporter un éclairage pratique sur les fonctionnalités et l’aspect opérationnel du contrôle des comptes financiers. L’intervenante a ainsi indiqué qu’aborder ces deux thèmes revenait à se poser la question de la nature et de l’étendue du contrôle opéré et que se poser la question de la nature

et de l’étendue du contrôle opéré avait deux buts distincts. D’une part, celui d’uniformiser le contrôle exercé en mettant en place un système de traitement des comptes fondé sur des critères objectifs et clairement définis et d’autre part celui de faciliter et d’automatiser le contrôle opéré en se dotant d’outils de contrôle efficaces, notamment via le traitement automatique de données grâce à une application informatique.

Parallèlement et pour pouvoir mettre en place un contrôle efficace, uniforme et systématisé, il est nécessaire d’informer les acteurs électoraux de leurs obligations légales et comptables via l’élaboration et la publication de guide et la mise en place de formation ; le cas québécois étant un excellent exemple en la matière. Comme souligné par Mme KACEM et M. AMMOUS dans leurs présentations, un préalable est cependant primordial, à savoir que le cadre juridique définisse de façon précise les concepts-clés, et notamment la dépense électorale et la durée de la campagne électorale afin de déterminer, le cas échéant, si la combinaison des deux notions permet de contourner la législation en vigueur.

Le rapporteur a ensuite souligné que l’enjeu d’établir et d’élaborer des techniques d’évaluation des dépenses résidait en la possibilité d’instaurer un référentiel fondé sur des indicateurs et des critères objectifs (prix du marché, spécificités de la circonscription concernée, chronologie des dépenses) afin de permettre un contrôle de cohérence des dépenses de location, d’impression, de transport et de personnel. L’adoption d’un tel référentiel présenterait ainsi l’avantage de créer un système d’alerte lorsque les écarts

v. RAPPORT dE syNTHèsE ET CLÔTuRE dE L’ATELIER dE TRAvAIL

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ou disparités entre les dépenses inscrites aux comptes financiers des listes/ candidats au sein d’une même circonscription ou lorsque les écarts ou disparités entre les dépenses inscrites par les listes/ candidats et les dépenses évaluées par l’organe de contrôle sont importants.

La difficulté liée à la mise en place d’un tel outil de contrôle est le croisement de données entre les différents comptes financiers au sein d’une même circonscription ou d’une grande région ou entre les différentes listes soutenues par un même parti politique, comme cela a été illustré et présenté par m. gAuvIN. Le rapporteur a souligné qu’afin de mettre en place une telle évaluation des dépenses engagées pour les besoins de la campagne électorale, et ce afin d’apprécier la réalité du coût des campagnes électorales, il est nécessaire d’avoir une application informatique. La question de l’évaluation des dépenses va revêtir une dimension particulière dans le cadre des élections locales et la mise en œuvre, pour la première fois, d’un système de remboursement des dépenses électorales en Tunisie. En effet, la surévaluation, la sous-évaluation ou la requalification en concours en nature de certaines dépenses va avoir un impact sur le montant du remboursement arrêté et le respect du plafond des dépenses.

Le rapporteur a souligné que l’objet de la seconde session de l’atelier portant sur les moyens de preuve, la gestion des plaintes et le régime des sanctions visait à s’interroger sur l’efficacité du contrôle exercé à travers les 4 points mentionnés par m. dOuBLET, à savoir la question des moyens humains et financiers de l’organe de contrôle, la question de la gestion et de la réception des plaintes et recours, les délais et le contenu des décisions prises (posant la question de la nature des investigations menées et de l’approche

pragmatique à adopter en raison des délais contraints) et l’effectivité des sanctions. Ainsi, pour prononcer des sanctions, l’organe de contrôle et a fortiori le juge électoral doivent se fonder sur des éléments concrets, solides, authentiques et probants. Ces éléments de preuve constituent la condition indispensable à l’introduction de tout recours ou de toute contestation électorale et éventuellement la base juridique au prononcé d’une sanction.

La difficulté réside dans la définition à donner à la notion de moyens de preuve. S’agit-il d’un faisceau d’indices laissé à la discrétion de l’organe de contrôle et du juge électoral ou s’agit-il d’éléments revêtant un caractère déterminant et substantiel ? La notion de moyens de preuve implique également que soit posée la question de la recevabilité des recours et notamment les questions de l’intérêt et de la qualité à agir des requérants (candidats, électeurs, ONG). Le but du contrôle sur place et sur pièces est de détecter les dépassements et irrégularités et à cet égard, comme souligné par m. TLILI mNAsRI, la coordination entre les différents organes de contrôle est essentielle pour pouvoir croiser et corroborer la constatation de violations/ d’infractions. L’enjeu est la prise en compte des rapports d’observation des agents de contrôle et de la société civile pour permettre à l’organe de contrôle et au juge de prononcer des sanctions correspondant à l’infraction constatée.

Le rapporteur a conclu sa synthèse en soulignant que cet atelier de travail avait permis d’aborder et de mettre en lumière deux pans importants du contrôle opéré en matière du financement de la vie politique, à savoir les techniques de contrôle et la prise en compte d’éléments pour apprécier au plus juste le coût des campagnes électorales d’une part et l’étendue du contrôle opéré par l’organe de contrôle afin de prononcer, in

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fine, les sanctions prévues par les textes en cas de méconnaissance des règles relatives au financement de la vie politique d’autre part. L’enjeu est de déterminer, comme indiqué par M. BEN ABID, la recevabilité du travail d’évaluation des dépenses opéré par l’organe de contrôle d’autant plus lorsqu’il procède du résultat des visites de terrain. Cette question prend une dimension toute nouvelle dans le contexte tunisien. En effet, l’ISIE a désormais une compétence liée et doit annuler totalement ou partiellement les résultats des vainqueurs en cas de violations ayant affecté les résultats électoraux d’une manière substantielle et déterminante. La nature du contrôle opéré et les moyens de preuve à la disposition de l’ISIE vont donc revêtir une importance particulière. En tout état de cause, comme souligné par Mme BOKRI, il appartiendra au juge électoral d’apprécier, en dernier ressort, les irrégularités constatées au regard des éléments de preuve produits et d’évaluer, le cas échéant, leur impact sur les résultats électoraux.

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ANNEXEs : PROgRAmmE

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