LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

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UNIVERSITE DE MONTPELLIER I CENTRE DE DROIT DE LA CONSOMMATION ET DU MARCHE MASTER II RECHERCHE : DROIT DU MARCHE ANNEE UNIVERSITAIRE 2010-2011 LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION Par : Tatiana BOUDISSA Directeur de recherche : Vincent CADORET, Doctorant à la Faculté de droit de Montpellier Co-directeur de recherche : Vincent CRAPONNE, Doctorant à la Faculté de droit de Montpellier Mémoire présenté et soutenu dans le cadre de l‟obtention du Master II Droit du Marché

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UNIVERSITE DE MONTPELLIER I

CENTRE DE DROIT DE LA CONSOMMATION ET DU MARCHE

MASTER II RECHERCHE : DROIT DU MARCHE

ANNEE UNIVERSITAIRE 2010-2011

LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

Par :

Tatiana BOUDISSA

Directeur de recherche :

Vincent CADORET, Doctorant à la Faculté de droit de Montpellier

Co-directeur de recherche :

Vincent CRAPONNE, Doctorant à la Faculté de droit de Montpellier

Mémoire présenté et soutenu dans le cadre de l‟obtention du Master II Droit du Marché

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REMERCIEMENTS

Je tiens à adresser mes plus sincères remerciements à :

Monsieur Vincent CADORET, doctorant à la Faculté de droit de Montpellier et

directeur de cette étude, pour sa disponibilité, ses précieux conseils, sa patience et pour

la rigueur qu‟il a su m‟imposer tout en me laissant la liberté nécessaire à

l‟accomplissement de ce mémoire.

Monsieur Vincent CRAPONNE, doctorant à la Faculté de droit de Montpellier et co-

directeur de cette étude, pour son accompagnement dans mes recherches, sa

disponibilité, ses précieux conseils et ses encouragements

Monsieur Daniel MAINGUY, Professeur à la Faculté de droit de Montpellier,

Directeur du Master Recherche Droit du Marché et Monsieur Malo DEPINCE, Maitre

de Conférences à la Faculté de droit de Montpellier, pour la richesse des enseignements

suivis cette année.

Mes parents et mes nombreux frères et sœurs pour tout leur encouragement et leur

confiance. Mes amis, Baptiste, Mathieu, Yann, Lisa pour leur soutien incroyable et si

particulier. L‟ensemble de mes collègues pour m‟avoir soulagé quand il le fallait et

enfin, Gabriel SEGUIER, pour avoir été là et avoir réussi à supporter l‟insupportable.

Et enfin, l‟ensemble de l‟équipe pédagogique et les étudiants du Master Recherche

Droit du Marché de la promotion 2010/2011 qui m‟ont aidée, d‟une façon ou d‟une

autre, à l‟accomplissement de ce mémoire.

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SOMMAIRE

PREMIERE PARTIE : LA CONVERGENCE ENTRE LES DROITS DES

SOCIETES CONSEQUENCES D’UNE CONCURRENCE LEGISLATIVE

TITRE 1 : LE DROIT DES SOCIETES, UN PRODUIT JURIDIQUE CONCURRENTIEL

Chapitre 1 : L‟émergence d‟un produit juridique estampille droit des sociétés

Chapitre 2 : L‟existence d‟une concurrence législative mondiale entre droit des sociétés

TITRE 2 : L’ECHANGE ENTRE LES PRODUIT « DROIT DES SOCIETES » DANS

UNE VOLONTE CONCURRENTIELLE

Chapitre 1 : L‟emprunt de solution externe par le droit français : l‟exemple de la corporate

governance

Chapitre 2 : Une convergence entre les droits nés d‟une volonté concurrentielle

DEXIEME PARTIE : LES CONSEQUENCES D’UNE CONCURRENCE

LEGISLATIVE POUR OBTENIR UN DROIT CONCURRENTIEL

TITRE 1 : LES DANGERS DE LA CONCURRENCE ENTRE LES ETATS SUR LA

REGLE DE DROIT

Chapitre 1 : La dégénérescence de la règle de droit

Chapitre 2 : L‟absence d‟optimisation de la règle de droit

TITRE 2 : LA NECESSITE D’ENCADRER EFFICACEMENT LA CONCURRENCE

LEGISLATIVE

Chapitre 1 : Les dérives de la concurrence législatives pour le sujet de droit international

Chapitre 2 : L‟insuffisance des règles pour réguler cette concurrence

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PRINCIPALES ABREVIATIONS

CA Cour d‟appel de Paris

Cass., civ, Cour de cassation, chambre civile

Cass., com, Cour de cassation, chambre commerciale

Cass., crim, Cour de cassation, chambre criminelle

CJCE Cour de justice des communautés européennes

CJUE Cour de justice de l‟Union européenne

IS Impôt sur le revenu

JDI Journal de droit international (Clunet)

LPA Les petites affiches

AJDA Actualité juridique de droit administratif

RTD CIV Revue trimestrielle de droit civil

Rev. société Revue de droit des sociétés

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INTRODUCTION

1 - La révolution Tunisienne qui a secoué l‟ensemble du monde arable cette

année a provoqué une onde de choc dans le monde entier. De nombreuses causes

peuvent expliquer cette révolution, l‟absence de véritable démocratie par exemple, mais

la véritable raison, le point de départ de cette contestation reste une économie

corrompue. Le rapport Doing Business en 2011, avait cependant placé la Tunisie au 55

ème rang sur 183 ou il fait bon de faire des affaires dans le monde et placé la Tunisie en

tête de l‟Afrique avec son droit des affaires.

Le rapport Doing Business a pour vocation de classer les différents droits des

affaires des Etats, de proposer des réformes et de permettre par la concurrence entre les

droits des différents Etats, l‟exportation de solution considérée comme concurrentiel.

Cela pose de nombreuses questions, tant sur la validité des classements que sur la

validité et l‟efficience de la concurrence législative. Les Rapports Doing Business dès

2004, on donc provoqué une certaines controverse, le droit pouvant désormais être

mesuré, évalué, comme un produit, le meilleur pouvant servir de modèle et s‟exporter

dans les autres Etats.

2 - Le droit, est une notion difficilement définissable, la définition du droit

pour les jus naturalistes est différentes de celle des positivistes, pour qui le droit, est

l‟ensemble des règles en vigueur dans un pays donné à un moment donné. Selon la

théorie de Hans Kelsen, fondateur du positivisme juridique qui tente d‟élaborer une

science du droit en rupture avec le courant jus naturaliste, le droit est une pure technique

au service d‟une volonté politique, chaque règle de droit devant être conforme à une

règle supérieure, fixée dans une pyramide des normes statiques. Les principales

critiques à cette théorie du droit pur, est l‟absence de prise en compte de moral ou de

valeur dans la règle de droit, la règle de droit devant juste être conforme à la norme

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supérieur. La règle de droit est donc assimilée à la loi, l‟Etat « ayant le monopole

productif de la production du droit »1.

Pour cette étude nous nous rangeons à la théorie positiviste, et considérerons

comme droit l‟ensemble des règles régissant la vie en société et offert au sujet de droit

pour faire valoir leurs prérogatives. Le droit est donc constitué d‟un ensemble de règle

relevant un caractère obligatoire au sujet de droit concerné. Cependant, nous ne nions

pas un aspect moral de la règle de droit, cet aspect peut être décelé dans la volonté de

permettre au sujet de droit de vivre en harmonie, et de faire valoir leur prétention. Le

droit doit permettre un équilibre entre le juste et l‟injuste, « Jurs est ars boni et aequi ».

3 - Le droit étudié est donc le droit en vigueur dans un pays déterminé, et

auquel sont soumis les sujets de droit. Les frontières d‟un pays permettent donc de faire

appliquer le droit, cette barrière naturelle permettant de limiter le pouvoir de l‟Etat.

Cependant, l‟histoire a connu de nombreux bouleversements, qui ont marqué le monde

que nous connaissons aujourd‟hui, un monde ou les peuples sont de plus en plus

proches, les pays reliés entre eux, les frontières rigides diminuant peu à peu au gré des

échanges. Le droit subit lui aussi cette diminution des frontières, les sujets de droit étant

de plus en plus mobile, notamment les sociétés qui ont pleinement pris conscience que

cette mobilité pouvait être un atout dans leur stratégie commerciale. Le droit des

sociétés connait donc de profondes mutations liées à la mobilité de ses sujets de droit,

les acteurs économiques étant devenus un enjeu pour les Etats comme le démontre le

rapport Doing Business qui propose aux Etats une exportation des règles juridiques les

plus efficientes. Cette exportation du droit n‟étant pas un phénomène nouveau et ayant

déjà eu lieu dans l‟histoire.

4 - L‟exportation du droit, sous entend que le droit peut être en mouvement,

que celui peut s‟exporter d‟un pays à l‟autre. L‟exportation est définie selon le Larousse

comme l‟action d‟expédier à l‟étranger des produits nationaux. Le terme étant

1 V. Lasserre-Kiesow, « l‟ordre des sources ou le renouvellement des sources du droit », Dalloz 2006, p.

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étroitement lié au domaine commercial. De manière plus générale, l‟exportation désigne

le transfert d‟un élément d‟un endroit à l‟autre, à l‟image dans le domaine informatique

de l‟exportation de donnée. Au niveau du domaine du droit, l‟exportation du Droit

correspond à la circulation des droits, circulation qui peut se faire de différents moyens

comme le montre l‟histoire2.

Le premier véritable mouvement d‟exportation du Droit s‟est opéré avec l‟empire

romain qui s‟étendait de l‟Italie à tout le bassin méditerranéen, une partie de l‟Asie,

l‟Afrique et l‟Europe. Les romains parallèlement à l‟expansion de leur territoire, ont

imposé l‟application de leur règle de droit au population conquise. Le processus de

« romanisation » des populations conquises a donc été aussi bien juridique que culturel

et passe par l‟intégration des territoires, des personnes, et des règles dans l‟ordre

juridique romain. La citoyenneté romaine avec toutes les conséquences juridiques que

cela implique va être avec l‟édit de Caracalla en 212 après Jésus-Christ, octroyée à

pratiquement tous les habitants libres de l‟empire romain. L‟empire romain par le biais

de ses conquêtes à donc permis la circulation de son droit au territoire conquis, même si

l‟empire romain admettait le maintien des droits locaux. La redécouverte au Moyen-âge

du droit romain dans différents pays d‟Europe occidental par la découverte des

compilations justinienne en Italie, témoigne donc de cette circulation du droit romain à

travers toute l‟Europe.

Cette circulation du droit par la conquête se retrouve également avec les invasions

barbares, et l‟application sur le territoire occupé d‟un droit tels que le Bréviaire d‟Alaric

ou la loi Salique. La circulation peut donc se faire par la conquête, le vainqueur

imposant sa loi au vaincu, les exemples dans l‟Histoire ne manquant pas. Plus

récemment, la circulation du droit par la conquête s‟est opérée par les ambitions

coloniales des Etats. L‟histoire coloniale depuis la fin du XVIIIème siècle à la Seconde

2 Il ne s‟agit pas ici d‟étudier l‟intégralité des mouvements de circulation du droit d‟un point de vue

historique, l‟étude étant considérable mais plus d‟utiliser les mouvements de circulation du droit dans

l‟histoire pour démontrer et expliquer les différents causes des mouvements. Pour en savoir plus, la

lecture de l‟ouvrage de Jean Louis Halpérin, « Profil de la mondialisations du droit », collection Dalloz,

2009, est conseillée. L‟auteur analyse de manière exhaustive et enrichissante les différents mouvements

d‟échanges entre les droits, et leurs impacts sur les systèmes juridiques que nous connaissons aujourd‟hui.

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Guerre mondiale, est l‟histoire d‟une domination des puissances occidentales sur les

populations extra-européennes, domination que nous étudierons d‟un point de vue

purement juridique. La colonisation à permis de transporter les droits occidentaux à

travers le monde. Les colonies espagnoles, portugaises, britanniques, ou françaises qui

s‟étaient implantées en Amérique depuis le XVI ème siècle, concernaient des territoire

relativement peu peuplés, les structures politiques indigènes s‟étant effondrées ou non

pris en compte, la transmission d‟élément tangible de l‟ordre juridique n‟ayant pas eu

lieu, les colonisateurs ont imposé leur modèle juridique et leur droit aux populations

colonisées. La seule possible distinction avec le droit continental pouvait être dans

l‟existence de règle particulière aux colonies. Le deuxième temps fort de la

colonisation au XIXème siècle, constitue une circulation du droit différent, les nouvelles

colonies notamment en Asie ayant cette fois leurs propres règles.

Les nouvelles colonisations ne se font plus sur le modèle des anciennes, avec une

évangélisation de la population et l‟exportation de leurs règles juridiques. Les

colonisateurs permettent donc aux colonisés de garder leur spécificité juridique ce qui

se traduit par le recours au statut personnel, tout en étant encadrée cependant par des

règles imposées issu du droit des colonisateurs. Le recours au statut personnel permet

donc de faire respecter le maintien des droits des populations colonisées. L‟un des

nombreux exemples du recours au statut personnel et du maintien de la diversité

juridique se trouve dans le Digest of Hindu Law on contracts and sucessions, voulu par

le juriste William Jones et achevé après sa mort, consacré au droit musulman.

Cependant, malgré le principe proclamé du maintient des statuts personnel, une évidente

pénétration du droit occidental dans les colonies a lieu.

Le droit pénal a été l‟un des premiers droits imposé aux colonisés, les colonies

françaises se voyaient appliquer des régimes dérogatoires, c‟est ce que les historiens

appelle l‟indigénat, à savoir un ensemble de régime dérogatoire imposé aux colonisés.

Le recours au statut personnel pouvait également se voir écarter au nom de principe

juridique supérieur. En matière civile par exemples, les autorités et juridictions

britanniques en Inde, interdisent de brûler les veuves sur le bucher de leur mari en 1819,

leur permettent de se remarier en (1856) et souhaite accroitre la vocation héréditaire des

filles. Les colonies françaises se voient également écarter le recours au statut personnel

au nom de l‟ordre public pour faire écarter l‟application de règles jugés par les

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occidentaux comme contraire. Pour exemple, le législateur français va intervenir pour

modifier certaines coutumes kabyles, en imposant par exemple la majorité matrimoniale

des femmes à 15 ans, (l‟imposition d‟une majorité matrimoniale ayant également été

imposé en France), le droit aux femmes de divorcer en cas de faute du mari et un droit

successoral limités aux filles. Les systèmes de l‟option de législation et de l‟option de

juridiction permettent également d‟étendre l‟empire de la loi française. Les

colonisateurs ont également imposé dans leurs colonies certaines institutions telles que

la hiérarchie des juridictions civiles et pénales.

5 - La circulation des droits s‟est donc fait majoritairement dans l‟histoire

par la guerre et la conquête. Les vainqueurs gagnant de nouveaux territoires et imposant

leurs lois même si il est vrai certaines spécificités juridiques des populations vaincues

pouvant demeurer. La circulation des droits ne s‟est pas seulement fait de manière

forcée, certains pays acceptant l‟importation dans leur droit, la circulation du Code

Napoléonien en est la preuve parfaite.

L‟adoption de code dans la majorité de pays semble montrer un nouveau

mouvement de circulation du Droit et plus précisément de modèle juridique. Un modèle

juridique, à savoir ici la codification fait partie intégrante du droit et trouve donc toute

sa place dans l‟étude historique des circulations du droit. L‟exportation du modèle du

code Napoléonien à travers le monde est l‟exemple le plus souvent usité lorsque l‟on

traite de l‟exportation du droit. La circulation du code Napoléonien est liée à

l‟impérialisme napoléonien en Europe et également au rayonnement intellectuel du code

dans le monde. Le code civil napoléonien s‟est vu imposé en France ainsi que dans les

divers territoires de l‟Empire napoléonien. Au milieu du XVIIIème siècle et au début du

XIXème siècle d‟autres codifications du droit civil ont vu le jour tels que le Codex

Maximilianeus Bavaricus, Civilis de 1756 ou encore le code civil autrichien de 1811

mais aucun d‟entre eux ont connu le rayonnement intellectuel et l‟importation qu‟a

connu le code civil napoléonien.

Au XIXème siècle certains pays ont importé le code civil napoléonien par

admiration. Pour exemple, la Roumanie en élaborant son code civil en 1864, qui est la

reproduction du code civil français. D‟autres pays ont importé le code civil français, tels

que de nombreuses anciennes colonies espagnoles en Amérique latine. La Bolivie

lorsqu‟elle eu obtenue son indépendance et eu besoin de se doter un droit civil, se

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tourna vers la France et se dota en 1831 d‟un code civil qui est une simple traduction du

code civil français. D‟autres pays vont adopter un code civil proche du code civil

français ou influencé par ce dernier comme pour exemple, le code Bellot de 1855 au

Chili. Le Québec a également pris pour exemple le code civil français tout comme le

Japon.

La circulation des droits dans l‟histoire revêt donc différentes formes, imposition

par la conquête, réception volontaire, ou encore par imitation. Même si selon la citation

de Paul Valery, « l‟histoire justifie ce que l‟on veut. Elle n‟enseigne rigoureusement

rien, car elle contient tout et donne des exemples de tout »3, la circulation des droits se

fait encore aujourd‟hui à l‟exemple du code notarial et son exportation en Chine.

6 - Notre sujet traite du droit en tant que produit exportable, l‟exportation

faisant référence à une circulation du droit entre différents Etats. Aujourd‟hui, il existe

encore une circulation entre les droits malgré une apparente pacification du monde. La

circulation du droit par la conquête apparaissant aujourd‟hui obsolète.

Il existe aujourd‟hui un phénomène de convergence indéniable entre les

différents droits des affaires, tels que le droit des sociétés, qui ne peut s‟expliquer par la

conquête d‟un Etat sur l‟autre. Cette convergence peut elle être naturelle et correspondre

à un nouveau stade du droit comme l‟écrivait Condorcet, « Comme la vérité, la raison,

la justice, les droits des hommes, l‟intérêt de la propriété, de la liberté, de la sûreté, sont

les mêmes partout, on ne voit pas pourquoi toutes les provinces d‟un Etat ou même tous

les Etats, n‟auraient pas les mêmes lois criminelles, les mêmes lois civiles, les mêmes

lois de commerce, etc. Une bonne loi doit être bonne pour tous, comme une proposition

craie est vraie pour tous »4 ou cette convergence est liée à une circulation des droits et

s‟explique par une autre raison, plus complexe.

7 - Comment peut-on expliquer les mouvements de convergence entre les

différents droits des sociétés, et quelles en sont les conséquences ?

8 - Notre objectif ici, est d‟expliquer les raison de la convergence entre les

différents droits des sociétés. Pour répondre à cette interrogation, nous utiliserons notre

3 Paul Valéry,

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propre droit, le droit français des sociétés et nous analyserons les raisons de cette

circulation de règle de droit. La convergence s‟expliquant par la concurrence législative

qui à lieux entre les Etats (Première partie). Chaque Etat voulant un droit des sociétés le

plus attractif possible pour attirer les sociétés, va permettre une circulation des droits, en

empruntant la solution législative qui apparait la plus attractif. Cette volonté d‟obtenir

un droit le plus attractif possible impliquant cependant de nombreuses conséquences sur

le droit des sociétés et le droit en général (Deuxième partie).

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PREMIERE PARTIE 1 : LA CONVERGENCE ENTRE LES DROITS DES

SOCIETES CONSEQUENCES D’UNE CONCURRENCE LEGISLATIVE

9 - Le schéma mondial est simple, les sociétés en raison de la mondialisation

ne sont plus obligées de rester sur un territoire déterminé pour exercer leur activité. Le

monde leur est ouvert, les droits nationaux des Etats aussi. Un choix leur ai donc

possible et au regard de ce simple choix qui à l‟air si anodin va en découler une

concurrence législative, dont le principal enjeu est d‟obtenir les faveurs des acteurs

économiques.

Pour cela, les Etats vont donc se livrer à une concurrence sur l‟élément capable

d‟attirer les sociétés, leur droit des sociétés, qui va devenir un véritable produit

juridique concurrentiel (Titre 1). Cette concurrence entre les produits droits des sociétés,

va provoquer une convergence entre les différents droits, les Etats vont importer les

solutions apparaissant les plus attractifs pour les sociétés (Titre 2).

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TITRE 1 : LE DROIT DES SOCIETES, UN PRODUIT JURIDIQUE

CONCURRENTIEL

10 - Le droit des sociétés est un droit propre à chaque Etat et ayant vocation à

s‟appliquer aux sociétés qu‟il régit. L‟Etat va donc vouloir attirer les sociétés mobiles et

pour cela offrir un droit des sociétés répondant à leurs demandes, leurs besoins, en

échange l‟Etat va obtenir le flux financier que va générer la société dans l‟Etat.

Le droit des sociétés va donc être la source d‟une concurrence législative, les

sociétés les mettant en concurrence et les Etats répondant à cette mise en concurrence

en proposant un droit des sociétés le plus apte à répondre à leur demande. Cette réponse

des Etats à la demande des sociétés, s‟apparente étrangement à la réponse des

producteurs sur les marché des biens et services. Le droit des sociétés apparait alors

comme un véritable produit juridique offert aux sociétés (Chapitre 1). Le droit des

sociétés étant un droit disponible, soumis à la volonté des sociétés, va faire l‟objet d‟une

concurrence législative mondiale (Chapitre 2).

CHAPITRE 1 : L’EMERGENCE D’UN PRODUIT JURIDIQUE ESTAMPILLE

DROIT DES SOCIETES

11 - La concurrence entre les produits droits des sociétés des différents Etats

n‟est pas un phénomène ancien. L‟admissibilité d‟un droit en tant que produit est la

conséquence d‟un contexte juridique nouveau (Section 1), ce contexte va permettre

d‟assimiler le droit des sociétés à un véritable produit (Section 2).

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SECTION 1 : L‟ADMISSIBILITE D‟UN DROIT EN TANT QUE PRODUIT

CONSEQUENCE D‟UN CONTEXTE JURIDIQUE NOUVEAU

12 - L‟existence de la concurrence entre les différents droits des sociétés

permettant d‟assimiler les droits des sociétés à des produits, s‟explique par un contexte

juridique nouveau qui permet ce paradoxisme (Paragraphe 1). La mondialisation ayant

également un impact sur le droit, notre conception classique du droit, qui apparait

dépassé (Paragraphe 2). Ce contexte juridique nouveau et le dépassement de la

conception classique du droit, nous permet alors de dépasser les barrières intellectuelles

forgé par l‟histoire et les auteurs anciens et nous permet de penser le droit comme un

produit.

Paragraphe 1 : Un contexte juridique nouveau permettant ce paradoxisme

13 - « Avant, les évènements qui se déroulaient dans le monde n‟étaient pas

liés entre eux. Depuis, ils sont tous dépendants les uns des autres ». Cette constatation

résume bien, les effets de la mondialisation, phénomène multiple (A), qui tend a

rapprocher les peuples entre eux et touche de nombreux domaines tels que l‟économie

appelé globalisation. Se rapprochement induit de nombreuses conséquences, la

globalisation apparaissant comme créatrice et vectrice de la concurrence législative (B).

A) La mondialisation, un phénomène multiple

14 - La mondialisation est un terme récurent dans la sphère juridico-politique

de ces trente dernières années, c‟est un terme souvent utilisé pour décrire l‟évolution

que le monde a connu. La mondialisation peut être définie comme « l‟expansion et

l‟harmonisation des liens d‟interdépendance entre les nations, les activités humaines et

les systèmes politiques à l‟échelle du monde ». Les politologues John Bayles et Steve

Smith définissent la mondialisation comme « un processus de rapprochement entre les

sociétés, selon lesquels les événements survenus dans un coin de la terre ont de plus en

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plus de répercussions sur des sociétés éloignées et leurs hommes. Dans un monde

globalisé les événements politiques, économiques, culturels et sociaux sont de plus en

plus imbriqués les uns dans les autres… De toute façon le monde semble se rétrécir de

plus en plus, ce qui entre au fur et à mesure dans la conscience des être humains »5.

La mondialisation est donc un phénomène qui a provoqué un rapprochement entre

les territoires, les individus, les états, les sujets de droit. Les effets de la mondialisation

sont souvent expliqués par les spécialistes, au point que les effets embrassent les raisons

de la mondialisation, dans un tel fusionnement qui ne permet plus de distinguer les

deux. La mondialisation tels qu‟on la connait aujourd‟hui et qu‟on la défini reste

toutefois un phénomène multiple qui trouve son origine dans les innovations qu‟a connu

notre sociétés durant le siècle dernier.

15 - Les racines du phénomène de mondialisation prennent naissance avec

l‟essor des innovations et du progrès techniques tels que l‟accélération des moyens de

transport de passager, de bien et de donnée et dans la diminution des frais de transport

subséquent. L‟essor du transport des marchandises à permis une multiplication des

échanges à travers le monde, chaque état pouvant être relié. L‟essor des moyens de

communication avec l‟apparition d‟Internet et du transfert instantané de masse de

données électroniques à des coins reculés de la terre, à également permis ce

rapprochement entre les Etats au point que certains auteurs parlent de « village

planétaire ».

La mondialisation n‟est pas seulement économique même si la mondialisation

économique demeure la plus étudiée, la mondialisation demeure un phénomène multiple

qui touche d‟autres domaines tels que la culture, ou encore la politique avec le

développement d‟organisation internationale. La mondialisation économique est

appelée aussi globalisation6, fait référence au domaine économique et financier lié à

5 J.Baylis, S. Smith, The globalization of world politics, ( 1997), spec. p. 7.

6 Anglicisme du terme « globalization », sur le débat sémantique entre mondialisation et globalisation,

voir l‟article « mondialisation » sur le site Wikipédia, ou l‟ouvrage « critique de la raison juridique : entre

mondialisation et post mondialisation » de André-Jean Arnaud, LGDJ. Dans le cadre de ce mémoire nous

utiliserons le terme globalisation pour parler de la mondialisation économique.

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l‟internationalisation des flux financiers et commerciaux, l‟internationalisaition de

l‟économie ou encore l‟implantation à l‟étranger des entreprises.

16 - La mondialisation est un phénomène multiple qui tend à rapprocher les

nations, « en poussant l‟humanité vers plus de mobilité et le dépassement de

frontières »7. La mondialisation ayant un impact tant sur les transports, la technologie,

qu‟elle touche désormais tout les « couches des activités humaines »8. Cette mobilité

exacerbée, cette diminution des frontières dans le domaine économique notamment,

permet donc de qualifier la globalisation de créatrice et de vectrice de concurrence.

B) La globalisation, créatrice et vectrice d‟une concurrence

17 - La globalisation est le terme usité pour décrire le passage d‟une

économie internationale dans laquelle des nations politiquement autonomes assument

l‟organisation de leur espace économique, entretiennent des échanges économique plus

ou moins importants, à une économie mondiale, dans laquelle des nations sont intégrées

à un espace économique mondial qui échappe aux régulations étatiques nationales. Les

nouvelles technologies de l‟information et de la communication accélérant le processus

de dilution des frontières9.

18 - La globalisation a donc permis la diminution progressive des frontières

nationales tant productives que financières. L‟émergence de nouvelle technologie

l‟explosion des échanges et la globalisation de l‟économie à effacer peu à peu

l‟imperméabilité des frontières entre les Etats et à relié les Etats entre eux. Les

individus, les acteurs économiques ont gagné plus de mobilité, chaque Etat apparaissant

moins éloigné l‟un de l‟autre. La notion de frontière apparait de plus en plus poreuse

comme en témoigne ce passage du rapport de la Commission sur la gouvernance

globale, « les avancées technologiques ont rendu les frontières plus poreuse. Les Etats

7J. Basedow, « Vie universelle, droit national ? A propose de la mondialisation du droit », in Mélanges

offerts à X. Blanc-Jouvan, édition société de législation comparé, 2005, p 223 et s. 8 G. Rabu, « La mondialisation et le droit éléments macro juridiques de convergence des régimes

jurdique », Revue international de Droit économique, 2008, p. 335 et s. 9 Définition de la globalisation sur le site de la documentation française,

www.ladocumentationfrançaise.fr.

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18

conservent leur souveraineté, mais les gouvernements ont subi une érosion de leur

autorité »10. La globalisation de l‟économie a fait baisser les frontières, les échanges se

sont multipliés tant économique, qu‟entre les individus. Cette diminution des frontières

va favoriser les rapports de concurrence entre les Etats.

19 - Les sociétés vont donc pouvoir se déplacer dans le monde et choisir

l‟Etat de leur implantation, leur présence sur le territoire de leur activité n‟étant plus

essentielle, les sociétés vont se déplacer, ce déplacement ne se faisant pas sans arrière

pensée. En effet, les sociétés ont vite compris l‟intérêt du droit dans leur stratégie

commerciale et vont en se déplaçant tenter d‟obtenir de l‟Etat voisin, ce qu‟elle

n‟obtient pas dans son Etat d‟origine, à l‟image de ses individus quittant leur pays pour

faire fortune. La globalisation de l‟économie qui résulte de l‟internationalisation des

flux économiques et financiers par l‟implantation à l‟international, des firmes

transnationales appelées communément multinationale ou des sociétés « simples », va

créer et être le vecteur d‟une concurrence entre les différents droits des sociétés, donc

entre les Etats, chacun cherchant a attirer les sociétés dans son sillage. La mobilité

n‟étant plus un frein, les sociétés vont choisir alors le droit des sociétés qui leur

convient.

20 - La mondialisation en tant que phénomène multiple, ne se résume pas

qu‟a la simple globalisation de l‟économie et à eu un impact sur la conception classique

du droit qui apparait dépassé.

Paragraphe 2 : Le dépassement d‟une conception classique du droit

21 - La mondialisation en rapprochant les peuples, en diminuant les frontières

à eu un impact sur le droit. La mondialisation a fait éclore de nouveaux producteurs

juridiques et de nouveaux moyens de règlementation qui viennent nous faire repenser le

10

Commision On Global gouvernance, extrait de l‟ouvrage de André-Jean Arnaud, Critique de la raison

juridique, gouvernements sans frontières : entre mondialisation et post-mondialisation, LGDJ, spéc. p. 34.

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19

droit. La définition classique du droit concernant sa création (A) ou sa substance (B)

apparait dépassé et nous permet de repenser le droit.

A) Une définition du droit dépassé quand à sa création

22 - La conception classique du droit assimile le droit à l‟Etat. Le droit c‟est

la loi, la jurisprudence, les organes législatifs et judicaires détenteur de l‟autorité de

l‟Etat. La transformation de notre société ces 50 dernières années, a profondément

modifié le mode de création du droit. Un élargissement de la sphère de l‟autonomie de

la volonté qui touche de plus en plus de domaine du droit, la multiplication des sources

du droit nous pousse à repenser le droit. En effet, l‟Etat n‟est plus le seul producteur de

droit. La mondialisation et la globalisation de l‟économie a fait émerger de nouveaux

producteurs normatifs. Même si les Etas restent au cœur des dispositifs internationaux

de production normative, les Etats ne détiennent plus ce pouvoir de manière

monopolistique. D‟autres acteurs de normes apparaissent.

Depuis la fin de la 2nd

Guerre mondiale, de nombreuse institution internationale

ont vu le jour tels que l‟OMC ou encore OCDE. Les organisations internationales

deviennent législatrices en créant des conventions internationales que les Etats doivent

introduire dans leur droit s‟ils le souhaitent. Aujourd‟hui il existe un nombre

impressionnant de convention unilatérale ou bilatérale qui vienne limiter l‟exercice du

pouvoir de l‟Etat. Les conventions internationales ont des buts multiples, notamment

d‟unification comme en témoigne la déclaration universelle des droits de l‟Homme

adopté en 1948 par l‟assemblée plénière de l‟ONU ou encore la Convention européenne

des droits de l‟Homme.

Dans le domaine commercial, de nombreuses conventions ont trait aux contrats

commerciaux internationaux et viennent compléter les instruments privés. A cotés des

institutions, d‟autres producteurs de normes apparaissent. Les opérateurs économiques

privés se sont autorégulés par le biais de code de conduite ou encore par la création de

la lex mercatoria. Les opérateurs économiques par la consécration de l‟autonomie de la

volonté et du contrat vont pouvoir s‟autoréguler et échapper peu à peu au contrôle de

l‟Etat.

Page 20: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

20

23 - Aujourd‟hui pour une situation donnée tels que le contrat de vente

international de marchandise, plusieurs droits sont disponibles. La norme matérielles

internationales étatiques tels que la convention de Vienne, des normes matérielles

privées, les Incoterms, des normes de conflits de loi régional ou international,

convention de Rome, des normes matériel et de conflit national. L‟Etat n‟est plus alors

le seul producteur de norme.

24 - Les sujets de droit vont alors pouvoir choisir quand cela est possible

entre plusieurs droits, la conception du droit, assimilable à l‟Etat à la loi demeure

méconnait l‟aspect internationale, cette conception étant dépassé quand à la création

mais également concernant la substance du droit.

B) Une définition du droit dépassé quand a sa substance

25 - Le droit est généralement défini comme l‟ensemble des règles régissant

la vie en société et sanctionnées par la puissance publique11. La sanction de la règle de

droit apparait comme essentielle et déterminante dans la qualification de la règle.

Aujourd‟hui, cette définition apparait comme désuète, la règle de droit ayant

évolué vers une nouvelle forme qualifiée de « soft law » ou « droit mou », qui demeure

cependant du droit, la sanction n‟étant pas une condition de la règle juridique mais une

conséquence de la règle juridique. Cette « soft law » connu dans le droit international,

apparait aujourd‟hui dans les Etats, sous la forme d‟une multitude de code de conduite,

une vingtaine notamment en France12. Ces codes de conduites s‟inscrivent dans la

perspective d‟un ordre « auto-organisé » avançant tous les avantages de souplesse et

d‟adaptabilité. La « soft law » touche également des normes techniques qui concernant

certains produit rends leur application obligatoire, et donc de donner force de loi à des

règles privés, leurs respects étant obligatoire.

26 - Les codes de conduites exemple suprême de la « soft law » formalisent

un certains nombres de principes d‟actions et de normes minimales. Les codes de

11

Lexique des termes juridiques, Dalloz, 15ème édition. 12

Mireille Delmas-Marty, trois défis pour un droit mondial, édition du seuil.

Page 21: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

21

conduites peuvent être conçus directement par les entreprises, il s‟agit des codes de

conduites les plus connus ou, par des ONG ou tout autres organismes proposant des

codes de conduite à la signature de nombreuses entreprises. Les codes de conduites

peuvent être applicables à une entreprise ou plusieurs entreprises. Les acteurs de

l‟entreprise, étant tenus de s‟y soumettre et de les respecter. Ces codes de conduites sont

appelés « droit mou » en raison de l‟absence de contrainte issus de l‟autorité publique,

mais ces codes et les règles qu‟ils proposent relèvent du caractère obligatoire pour les

personnes qui s‟y soumet. La sanction n‟est pas l‟apanage de la règle de droit, ni la

condition mais une conséquence de la règle. Ces règles bien que non édictées par

l‟autorité publique sont sanctionnées en cas de manquement et respectées par les

personnes qui s‟y soumettent. Aujourd‟hui la plupart des entreprises multinationales

sont dotés de code de conduite qui permet aux entreprises de s‟autoréguler.

27 - Le droit évolue donc, la conception classique étant dépassée, le droit

n‟étant plus édicté seulement par le législateur, d‟autres règles de droit apparaissant et

créé par des acteurs privés. Les Etats n‟ont pas cependant vocation à disparaitre, « les

Etats continuent encore de ternir dans la société internationale le rôle cardinal », mais le

droit changent et sa conception aussi. Ces éléments nouveaux qui mettent à mal la

définition du droit et sa prise en considération, nous permet de repenser le droit, et de

surmonter les frontières intellectuelles qui ne permettent pas d‟assimiler le droit à un

produit.

SECTION 2 : L‟ASSIMILATION DU DROIT DES SOCIETES A UN PRODUIT

28 - La définition classique du droit assimilant l‟Etat au seul producteur

normatif et caractérisant la règle de droit comme obligatoirement accompagnée d‟une

sanction, apparait dépassée dans ce contexte juridique nouveau. L‟assimilation du droit

des sociétés à un produit, apparait donc envisageable, les barrages intellectuels étant

dépassés.

Le droit des sociétés produit par les Etats, est un droit disponible, répondant au

plus près à leur besoin, et ayant un cout pour les entreprises (Paragraphe 2). Le droit des

sociétés apparait donc comme un produit (Paragraphe 1) choisi par les entreprises et

soumis à la concurrence.

Page 22: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

22

Paragraphe 1 : Le droit des sociétés, un véritable produit pour les entreprises

29 - Un produit est défini comme le résultat d‟une création. Le produit dans

l‟univers économique, s‟assimile au marché des produits, le produit est alors un bien ou

un service répondant à un besoin. Les produits pouvant être substituable entre eux.

30 - Le droit des sociétés peut s‟assimiler à un véritable produit pour les

entreprises, car les Etats le produit dans un but particulier, répondre à leur besoin, en

s‟adaptant continuellement. Pour exemple, en droit français, le droit des sociétés a

connu un nombre conséquent de réforme et à fait l‟objet de nombreux rapport pour le

moderniser, à l‟image du rapport Marini sur la modernisation du droit des sociétés en

199613

. De nombreux autres droit des sociétés dans le monde ont fait l‟objet de réforme,

l‟idée étant de moderniser le droit des sociétés, d‟en faire un outil efficace pour les

entreprises, de répondre au plus près de leur besoin. Le droit des sociétés est donc

produit par les Etats pour les entreprises, pour répondre à leur besoin, afin que celui-ci

soit choisi par lui.

31 - Le droit des sociétés contrairement à d‟autre droit comme celui de la

famille ou le droit pénal, est disponible et soumit à la volonté des sociétés. Les sociétés

vont pouvoir choisir leurs droits des sociétés en décidant de se rattacher dans un Etat

plutôt qu‟un autre, la mobilité des sociétés nous l‟avons vu étant admise. Le

rattachement des sociétés va être étudié plus loin, mais l‟applicabilité du droit des

sociétés par le biais de facteur volontariste va induire de nombreuses conséquences. Le

droit des sociétés s‟il est choisi peut alors être renié, une société peut donc changer de

droit par sa volonté.

13 P. Marini, La modernisation du droit des sociétés, rapport officiel, collection La Documentation

Française, 1996

Page 23: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

23

32 - Les différents éléments du droit des sociétés permet donc d‟assimiler le

droit des sociétés à un produit. Le droit des sociétés est le résultat d‟une production des

Etats, celui-ci est produit dans le but particulier de répondre à un besoin, celui des

sociétés. Les sociétés de manière générale, ne sont pas soumises à un droit des sociétés

obligatoire, elles peuvent choisir le droit des sociétés et donc substituer les différents

droits des sociétés entre eux. Ces différents éléments propres au droit des sociétés, sont

aussi caractéristiques d‟un produit.

Il est vrai que le droit des sociétés et particulièrement le droit est difficilement

qualifiable en produit, plusieurs obstacles s‟y oppose selon la définition que l‟on a du

droit et comme nous l‟avons vu cette conception peut avoir ces limites. Une fois

dépassée ces obstacles, le droit revêt tout les caractères d‟un produit à l‟image du

produit, biens et services échangeables. La caractéristique principale d‟un produit à

l‟image des biens et services est la notion de cout, l‟échange ne se faisant pas

gratuitement. Le droit des sociétés rempli également cette condition, il à un cout pour

les entreprises qui veulent s‟y soumettre.

Paragraphe 2 : Le cout du droit des sociétés pour les entreprises

33 - Un produit est le résultat d‟une création et à un prix. Ce prix, ce cout est

à la charge de la personne qui souhaite récupérer le produit. Le droit des sociétés à un

cout qui va être mis à la charge des entreprises. Ce cout correspond au prix

d‟immatriculation et de création du droit des sociétés (A), ainsi que par l‟aspect fiscal

(B). Afin de démontrer l‟existence d‟un cout du droit des sociétés pour les sociétés,

nous utiliserons l‟hypothèse la plus simple, une entreprise souhaitant s‟implanter dans

un Etat. Nous analyserons pas le cas d‟une sociétés multinationales et son implantation

dans différents Etats, le cout existant toujours mais étant plus complexe a étudier.

Page 24: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

24

A) Le cout d‟immatriculation du droit des sociétés

34 - Le droit des sociétés est un produit proposé par les Etats aux entreprises

et qui à un prix. En effet, les entreprises lorsqu‟elles veulent s‟implanter dans un pays,

créer une société doivent se soumettre au droit des sociétés et à fortiori à ses règles.

L‟un des couts du droit des sociétés qui doivent être supporté par les

entreprises, est celui des frais liés à la création de la société. En effet, dans chaque Etat

et dans chaque droit des sociétés, il ne suffit pas de créer une société pour que celle ci

existe et soit soumis au droit des sociétés. Des formalités plus ou moins contraignantes

existent avec des coûts variables.

35 - En droit français, une société ne peut pleinement avoir la personnalité

morale sans l‟accomplissement de formalité prévue par le code de commerce dont

notamment une immatriculation au registre du commerce et des sociétés. Cette

inscription se fait au greffe du tribunal de commerce et le cout est d‟environ une

centaine d‟euros. On doit rajouter à cette somme, la publication d‟une annonce dans un

journal d‟annonce légale qui est aux alentours de 150 €. On constate donc que le droit

des sociétés français à un cout pour l‟entreprise souhaitant s‟immatriculer et bénéficier

du droit des sociétés. Ce cout d‟immatriculation est le prix d‟achat du droit, le cout

pouvant s‟allonger durant la vie de l‟entreprise. Les différentes formalités prévues par le

droit des sociétés durant la vie de l‟entreprise, peuvent également avoir un cout qui est

supporté par les acteurs économiques tels que les modifications statutaires.

Le droit français des sociétés n‟est pas le seul à imposer des couts

d‟immatriculation et de création. Au Royaume-Unis, une société est soumise à plusieurs

couts, allant de l‟immatriculation aux différentes publications obligatoires. Le cout

d‟immatriculation est 27, 86 € ou de 111, 45 € si l‟immatriculation à lieu le jour même.

Aux Etats-Unis, le droit des sociétés imposent également un cout quant à sa création et

son immatriculation, tout comme au Canada, le cout d‟immatriculation étant de 179 €.

36 - Le rapport Doing Business qui depuis 2004 étudie les différentes

législations à travers le monde pour mettre au point un palmarès du pays où il fait le

plus « bon de faire des affaires », prend comme indice dans son classement le cout de la

Page 25: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

25

création des sociétés. En 2011, toujours selon ce rapport le cout moyen d‟une société

dans le monde est passé de 86% à 41% du revenu par habitant. Le rapport Doing

businness prend également un autre indicateur pour mesurer l‟endroit ou pour une

société il fait le bon de vivre, la fiscalité qui s‟apparente réellement en raison de

l‟important du cout pour les entreprises, au prix du produit juridique « droit des

sociétés », un prix qu‟elle paye sur du long terme.

B) L‟impact fiscal du droit des sociétés

37 - Le droit des sociétés à un cout fiscal pour les entreprises qui passe

notamment par l‟impôt sur les sociétés et différentes taxes afférentes. En effet, les

sociétés qui génèrent des bénéfices sont dans la majorité des pays du monde soumis à

un impôt, qu‟on appelle impôt sur les sociétés et qui a pour assiette les bénéfices ou

l‟excédent brut des bénéfices des entreprises. Une société lorsqu‟elle a accompli les

formalités d‟immatriculation prévues par l‟Etat, va être soumise à un impôt pour ses

bénéfices. Le taux d‟impôt sur le revenu, tout comme l‟assiette dépend de chaque Etat,

le choix d‟un droit des sociétés à donc des conséquences fiscales pour la société, l‟impôt

sur le revenu peut s‟apparenter à un cout, qui va être payé sur le long terme.

38 - L‟impôt sur les sociétés est un cout pour les sociétés, qui a fait l‟objet de

nombreuse étude comparative pour que les entreprises puissent choisir le cout le moins

élevé14, nous prendrons l‟exemple de trois Etats puissant, la France, les Etats- Unis et le

Royaume-Uni, chaque Etat ayant une imposition propre, une étude complète ne peut

être effectuée ici15

.

En France, cet impôt sur les sociétés ou IS est à la charge de toutes sociétés de

capitaux, à savoir principalement des sociétés anonymes (SA, SAS), des sociétés à

responsabilité limitée (SARL), des sociétés en commandite par action (SCA), les

14

Rapport KPMG 2010, 15

Pour approfondir le sujet, il est conseillé au lecteur de lire les rapports KPMG relatif aux différents

impôts sur les sociétés qui dresse un état des lieux mondial des différentes taxes subies par les sociétés.

Page 26: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

26

sociétés d'exercice libéral (SEL, SELARL…) .D‟autres sociétés peuvent également être

soumises à l‟IS en raison de leurs activités. En effet, certaines personnes morales sont

imposées même si elles n'appartiennent pas aux sociétés de capitaux. C'est le cas des

sociétés civiles qui ont une activité industrielle ou commerciale et des associations

réalisant des opérations lucratives. Enfin, les sociétés de personne telles que les SNC

sont elles aussi soumises à une taxe par le biais de l‟impôt sur le revenu sauf si les

associés optent pour une taxation au titre de l‟IS16.

Cet impôt sur les sociétés est un impôt annuel qui touche l‟ensemble des bénéfices

réalisés en France par les sociétés et autres personnes morales. En France, contrairement

aux règles en vigueur dans l‟ensemble des autres pays de l‟Union européenne qui

appliquent le régime de bénéfice mondial, seuls sont passibles de l‟IS les bénéfices

réalisés dans les entreprises exploitées en France, quelle que soit leur nationalité. Par

conséquent les bénéfices réalisés par une société française dans des entreprises

exploitées à l‟étranger ne sont pas soumis à l‟IS français, mais une société étrangère est

imposable à l‟IS à raison des bénéfices tirés des entreprises qu‟elle exploite en France.

L‟impôt sur les sociétés aux Etats-Unis qui est un Etat fédéral se situe tant au

niveau fédéral que fédéré. Les sociétés constituées sur le territoire des Etats-Unis sont

redevables de l‟impôt fédéral sur l‟ensemble de leurs bénéfices de provenance

américaine ou étrangère, les résultats des succursales étrangères sont donc inclus dans le

résultat imposable aux Etats-Unis. Les Etats fédérés peuvent également imposer les

bénéfices des sociétés par le bais d‟une taxe locale mais ces derniers sont déductible

pour le calcul de l‟impôt fédéral.

L‟impôt sur les sociétés au Royaume-Uni concerne toutes les sociétés résidentes

au Royaume-Uni c‟est-à-dire qu‟elle se soit immatriculé ou si sa gestion centrale et son

contrôle y sont exercés. L‟impôt sur les sociétés comprend comme assiette tous les

bénéfices, y compris les plus-values en capital. Si une société paie des impôts sur des

bénéfices réalisés à l‟étranger, elle bénéficie d‟un crédit d‟impôt correspondant à

l‟impôt payé à l‟étranger à valoir sur l‟impôt britannique en cas d‟accord de double

imposition avec le pays ou le bénéfice à lieu.

16

Article du CGI

Page 27: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

27

39 - La taxation des bénéfices sur les sociétés est donc admise dans les trois

pays étudiés, mais également dans de nombreux pays du monde, seul change l‟assiette

d‟imposition. L‟assiette d‟imposition de l‟impôt sur les sociétés est différente d‟un Etat

à l‟autre mais un trait commun demeure, le taux d‟imposition des revenus de la société

dans le monde est aux alentours de 23,45%.

Le taux d‟imposition pour les revenus des sociétés en France est de 33, 33 % en

générale mais certaines entreprises ont un taux réduit de 15% pour les 38 120 premiers

€ pour un chiffre d‟affaire hors taxes inférieur à 7 630 000 € au cours de l‟exercice

concerné, dont le capital a été entièrement libéré et qui sont détenues à plus de 75% par

des personnes physiques. De plus, toutes les sociétés françaises (sauf exception prévu à

l‟article 223 septies à 223 nonies du code général des imports) se voient soumettre une

imposition forfaitaire annuelle en fonction du chiffre d‟affaire. Une contribution

additionnelle de 3% est également imposée aux personnes morales soumises à l‟IS sauf

pour les collectivités sans but lucratif. Enfin, une contribution sociale 3,3% pour

permettre le financement de la sécurité sociale est due par les sociétés soumis à l‟IS

pour le taux normal de 33, 33 % et dont le montant ne dépasse pas 763 000 €.

Les Etats-Unis ont eu un taux en moyenne de 40% d‟imposition de manière

générale pour les sociétés. Les Etats-Unis ont également un système de taux marginal

d‟imposition par palier, applicable aux revenus imposables pour les sociétés. Le taux le

plus élevé étant de 35%. Les taxes locales varient entre 1 et 12%. Le taux effectif net est

approximativement de 40% mais il peut varier et les Etats unis ont également un impôt

minimum de remplacement autour de 20%.

Le Royaume-Uni à un taux d‟imposition de 21% pour les sociétés dont le profit

est inférieur à 1 millions d‟euros. Au-delà, le taux imposable varie progressivement

allant jusqu‟à 28%. Le taux d‟imposition des revenus de la société est donc différent

d‟un pays à l‟autre, la société qui s‟immatricule au Royaume-Uni, va donc voir ses

revenus taxés à hauteur de 21%, tandis que celle immatriculé en France et exerçant son

activité en France va voir ses revenus taxés à hauteur de 33, 33%. Le cout variant du

tout au tout.

40 - Certains Etats, qualifiés de paradis fiscaux, ont un taux imposition de 0%

est donc un cout pour les entreprises quasi nul comme c‟est le cas pour les Bahamas ou

Page 28: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

28

encore les iles Caïmans. Selon le rapport Doing business 2011, les deux Etat ou il est le

plus favorable de faire des affaires sont Singapour et Hong-Kong qui à un taux

d‟imposition en dessus de 20% à savoir respectivement 17% et 16,5%. Le cout fiscal à

donc un intérêt pour les entreprises, qui vont le regarder, le comparer, à l‟image du

consommateur qui compare le prix des biens de consommation.

41 - Le droit des sociétés à donc un cout pour les entreprises qui veulent

l‟appliquer, ce cout étant variable. Conjugué cet élément aux différentes caractéristiques

du droit des sociétés, il apparait que le droit des sociétés tels que la globalisation de

l‟économie et la mondialisation nous permet de l‟analyser, rejoint les différentes

caractéristiques du produit. A l‟image du produit sur le marché des biens et service, le

droit des sociétés va faire l‟objet d‟une concurrence mondiale entre les différents Etats.

Page 29: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

29

CHAPITRE 2 : L’EXISTENCE D’UNE CONCURRENCE LEGISLATIVE

MONDIALE ENTRE DROIT DES SOCIETES

37 - La concurrence peut être définie comme une « compétition »,

compétition que vont se livrer les protagonistes mis en concurrence. Le droit des

sociétés est un produit crée par les Etats, qui vont le mettre à disposition des sociétés.

Cette mise à disposition, ce choix laissé au société va provoquer une concurrence entre

les différents Etats concernant leur produit, l‟idée étant d‟obtenir un produit juridique

concurrentiel, attractif. Le rapport Doing Business est l‟exemple parfait de la mise en

œuvre

38 - de cette concurrence entre les produits « droit des sociétés » (Section 2),

la concurrence entre les différents droits des sociétés étant admise en raison de leur

nature particulière (Section 1).

SECTION 1 : L‟ADMISSIBILITE D‟UNE CONCURRENCE ENTRE PRODUIT

DROIT DES SOCIETES

39 - La concurrence entre les différents droits des sociétés s‟explique par la

disponibilité de ce droit, le rattachement des sociétés à un Etat et un droit étant le fruit de la

volonté des fondateurs (Paragraphe 2). Cette concurrence entre les produits de droit a fait l‟objet

de nombreuses études, les tenants de la Law and Economics, courant de pensée américaine,

l‟admettant théoriquement (Paragraphe 1).

Paragraphe 1 : L‟admission théorique d‟une concurrence entre produit de droit

40 - L‟analyse économique du droit est issue d‟un courant de pensé américain

appelé Law and Economics, qui a émergé autour des années 50. L‟analyse économique

du droit a pour objectif d‟analyser la loi en utilisant des mécanismes propres à

Page 30: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

30

l‟économie. Concernant la concurrence juridique largement mis en avant par l‟AED,

celle-ci peut se définir comme « un mode de relation entre offreurs de droit reposant sur

certaines hypothèses et induisant certaines conséquences sur le produit offert, elle

semble se définir essentiellement par analogie avec la concurrence économique »17.

Deux théories concurrentes portant sur la concurrence juridique ont émergé,

admettant toutes deux la concurrence entre produit de droit par analogie à la

concurrence des biens et services sur le marché. La première est développée dans le

cadre de l‟analyse économique du fédéralisme, l‟auteur étant Charles Tiebout (A) et

son fameux « vote par les pieds ». La seconde, plus récente analyse la concurrence entre

les différents systèmes juridiques d‟un point de vue comparatiste et par le biais de

l‟analyse économique du droit. Cet article de 1999 d‟Anthony Ogus (B) ayant été très

remarqué.

A) L‟analyse de la concurrence juridique de Charles Tiebout

41 - L‟une des plus fameuses théories de concurrence appliquées aux règles

juridiques est celle de Charles Tiebout18, économiste et géographe américain. Sa théorie

très critiquée fut largement complétée par la suite. Charles Tiebout dans son analyse va

étendre à la concurrence entre règle juridique, un modèle inspiré de l‟économie

publique locale appliqué à l‟offre de biens publics locaux par des juridictions

géographiquement définies.

Cette analyse repose sur l‟idée d‟une concurrence horizontale entre juridiction.

L‟objectif de ces juridictions est d‟attirer des résidents, par le biais de panier associant

certaines structures fiscales à certains biens publics locaux, considéré comme procurant

un avantage aux contribuables résidents. Mobiles, les agents économiques peuvent alors

17

J-S Bergé, S Harnay, « Concurrence entre règles juridiques et construction européenne : a propose de

l‟analyse économique du droit », in Melanges en l’honneur de Michel Bazex, Droit et économie,

interférences et interactions, Litec, p 15 et s. 18

C.Tiebout, “A Pure Théory of Local Expenditure”, Journal of Political Economy, 1956, n°64, p.416 et

s.

Page 31: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

31

« voter avec leurs pieds »19, se déplaçant vers la juridiction offrant le panier qui

correspond le plus à leurs besoins. Par conséquent un équilibre en biens publics locaux

peut alors être atteint. Les gouvernements locaux se concurrençant sur leur offre vont

aboutir à un niveau particulier d‟offre de services, les consommateurs se regroupant en

fonction de leurs préférences. Ce système, selon Charles Tiebout va permettre la

satisfaction maximale des agents et le maintien de la diversité de l‟offre. Selon lui,

« plus le nombre de communautés et la variante entre elles sont importantes, plus le

consommateur va être proche de la pleine réalisation de ses préférences »20

.

42 - Cette théorie économique du fédéralisme proposée par Charles Tiebout,

tente de répondre au problème posé par l‟analyse du public choice sur le dévoiement du

processus législatif en raison de la captation du législateur par des lobbies. Le

législateur est donc ici dissuadé de céder au lobbying en adoptant des lois inefficiente

pour ses contribuables qui s‟ils se sentent lésées voteront avec leurs pieds. Par

extension, les législateurs peuvent rivaliser pour attirer une nouvelle clientèle mobile

génératrice de revenu, en innovant afin de mieux satisfaire leurs préférences. Le choix

opéré par les acteurs privés, regulatory arbitrage, entre les différents ressorts législatifs

va orienter le contenu des législations adoptées et pousser a l‟inventivité législative tout

en disciplinant les gouvernements.

43 - Appliqué à la concurrence juridique, cela consiste à considérer les règles

comme des produits, et qu‟une demande existe pour ces produits, par conséquent les

Etats vont vouloir satisfaire cette demande par leur production juridique car les

législateurs refusent de perdre leurs consommateurs qui sont mobiles. Par conséquent la

pression concurrentielle conduit les gouvernements à offrir leurs produits juridiques à

des prix concurrentiels. Apparait alors une analogie entre une concurrence par les prix

qui discipline les producteurs de biens privés à l‟avantage des consommateurs et une

concurrence juridique qui discipline les gouvernements au bénéfice des consommateurs

de produits législatifs, produit s‟adaptant le plus à la demande. La concurrence conduira

19

Expression utilisée par l‟auteur

20 C. Tiebout, préc. cit.

Page 32: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

32

naturellement à une spécialisation des juridictions, chaque législateur s‟efforçant de

répondre au plus près aux besoins des catégories qui se regroupent dans son ressort. Les

opérateurs économiques se répartissant ainsi selon leurs préférences et maintenant le

pluralisme juridique selon les tenants de cette thèse.

44 - Cette analyse très innovante, ne fut pas sans critique, les principaux

détracteurs de cette thèse, la considèrant comme utopique car, « le vote par les pieds »

ne pouvant avoir lieu qu‟en présence d‟une mobilité parfaite. En effet, la compétition ne

peut exister que si les acteurs privés ont un véritable pouvoir de sortie et sont informés

des offres des autres Etats. Aujourd‟hui, avec l‟essor des moyens de communications,

les opérateurs économiques ont pleinement conscience du choix qui leur ait offert.

Prenons comme exemple, l‟impôt sur les recettes fiscales des sociétés, les rapports

KPMG du cabinet d‟audit, d‟expertise comptable et de conseil permet d‟avoir une

vision globale de la fiscalité de nombreux Etats. De plus, même si la mobilité n‟est pas

sans entrave, ou qu‟il existe des couts liés à cette mobilité, si une entreprise qui paye 10

doit pour payer 5, avoir un cout de 2, elle choisira de payer 7 une fois puis 5 après que

10 continuellement. L‟analyse de Charles Tiebout admet donc l‟existence d‟une

concurrence entre les produits juridiques, cette concurrence ayant des vertus salvatrice

sur la règle de droit.

45 - L‟analyse de Charles Tiebout fut approfondie par celle d‟Anthony Ogus

qui alla plus loin en tentant d‟expliquer l‟impact de la concurrence juridique sur les

droits concurrencés d‟un point de vue comparatiste. Cette thèse permettant d‟expliquer

la convergence entre les droits concurrencés.

B) Analyse de la concurrence juridique d‟Anthony Ogus

45 - Anthony Ogus en 1999 écrit un article très remarqué et intitulé

« Compétition between National Legal Systems : A Contribution of Economic Analysis

to Comparative Law »21. Dans cet article Ogus revient sur la théorie d‟Ugo Mattei en

21

A. Ogus, « Competition between National Legal Systems: A Contribution of Economic

Analysis to Comparative Law », International and Comparative Law Quarterly, 1999, p. 48 et s.

Page 33: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

33

l‟explicitant. Dès les années 1990, Ugo Mattei s‟était interrogé sur l‟apport de l‟AED

dans l‟univers du droit comparé. Selon lui, l‟AED permet d‟expliquer l‟impact de la

concurrence sur la règle de droit et les mouvements entre les différents droits. Il n‟est

pas opportun ici de traiter de l‟impact de la concurrence mais de l‟affirmation qu‟il

existe bien une concurrence entre les produits de droits qu‟ Ogus qualifie

d‟ «homogène » ou d‟ « hétérogène ».

46 - Ogus dans son article, part de la constatation que sur le marché des biens

et services, les fournisseurs de produit se concurrence les uns des autres, les

consommateurs ayant le choix entre les différents produits. Ogus énonce que ces

constatations peuvent s‟appliquer à l‟offre de droit au sein même d‟un seul Etat, la

concurrence pouvant exister entre les pouvoirs exécutifs, législatifs ou judiciaire. Mais

ce qui nous intéresse dans le cadre de ce mémoire et dans l‟article d‟Ogus sont les

interactions entre les systèmes juridiques qui vont créer une compétition externe pour

l‟offre de droit.

Les acteurs privés sur le marché international s‟ils trouvent que leur système

juridique national leur impose des coûts plus élevés, comparés à ceux de leurs

concurrents étrangers opérant sous un autre Etat vont faire pression sur leur législateur

afin de faire réduire les couts, pour cela, ils utiliseront la menace de la migration vers

l‟Etat le plus favorable. Les législateurs vont donc offrir des produits juridiques

concurrentiels afin de répondre à la demande des acteurs privés. De plus, selon Ogus,

les pays dépendant du commerce international vont vouloir attirer les firmes des autres

pays et des sociétés multinationales par des produits législatifs attractifs afin de

récupérer l‟investissement créé par les multinationales.

45 - La concurrence entre les systèmes juridiques va avoir un impact sur le

contenu du droit, car à la demande des acteurs du marché, les législateurs nationaux

vont comparer leurs propres produits juridiques avec ceux disponibles dans les Etats

concurrents, et adapter leurs produits en fonction de la demande. L‟adaptation des

produits en fonction de la demande se faisant de deux manière au regard de la nature du

produit.

; A. Vellez,, Traduction et analyse de l’article A.Ogus, mémoire rédigé sous la direction de M.

Craponne et qui a servi pour l‟élaboration de ce mémoire.

Page 34: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

34

46 - Cet article d‟Anthony Ogus à deux effets. Le premier est de démontrer

l‟existence d‟une concurrence entre les produits de droit des différents systèmes

juridiques. Et là, ou il se distingue du modèle de Tiebout, est dans son analyse de la

répercussion de cette concurrence sur le droit. Les produits juridiques en raison d‟une

concurrence vont aboutir à une convergence, convergence identique à celle que l‟on va

étudier dans le droit des sociétés.

47 - Ces deux théories admettent la concurrence législative pour des produits

juridiques qui peuvent être soumis à concurrence, c‟est-à-dire qui peuvent faire l‟objet

par les acteurs privé de choix. L‟acteur privé pouvant s‟il le faut choisir le produit

juridique de l‟Etat voisin en raison de sa mobilité. Ces théories admettent donc la

concurrence législative entre les produits juridique, le choix des produits devant se faire

de manière volontaire. Le droit des sociétés correspondant aux conditions posées dans

ces deux théories.

Paragraphe 2 : L‟admission de la concurrence par le choix de facteur volontariste : le

choix du rattachement des sociétés

48 - La concurrence entre les droits ne peut exister que si ces droits sont

soumis à la volonté de leur sujet, ceux-ci pouvant passer d‟un droit à l‟autre. Le droit

dont donc être soumis à un facteur volontariste, comme le droit des sociétés. La

nationalité d‟une société dépendant du libre choix du rattachement à un Etat (A), ce

libre rattachement permettant de choisir librement la loi applicable à la société (B).

A) Le libre choix du rattachement de la société concernant la nationalité

49 - Les acteurs économiques peuvent désormais grâce à l‟essor des moyens

de communications et des transports s‟implanter dans différents pays. Des entrepreneurs

français ou américains, peuvent choisir de créer leur société et de l‟immatriculer dans

un autre pays, l‟obstacle du territoire étant désormais inexistant. Le rattachement de la

société est un acte important car il permet de déterminer la nationalité de la société (1),

Page 35: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

35

nationalité qui est déterminé par des critères de rattachement volontariste(2). Un choix

est désormais offert quand au choix de la nationalité de la société.

1) L‟existence de la nationalité des sociétés

50 - La nationalité est une notion classique élaborée pour les personnes

physiques et la transposition aux personnes morales à été difficile et à fait l‟objet d‟un

vif débat doctrinal22(a). En effet, contrairement à la personne physique, la détermination

de la nationalité pour les personnes morales doit forcément faire abstraction de certains

critères classiques liés à la détermination de la nationalité des individus tels que la jus

sanguinis. Cependant, la nationalité des sociétés a été affirmé tant par la jurisprudence

que la loi et devient alors incontestable (b).

a) Une naissance controversée

51 - L‟admission d‟une nationalité pour les sociétés a divisé la doctrine entre

les partisans du oui et les partisans du non.

Les figures de proue de cette doctrine est MM. Salem23 et Léon Mazeaud24 qui

considèrent que les personnes morales sont plus qu‟une simple création intellectuelle,

mais une réalité indépendante des individus qui la composent. La société en obtenant

une personnalité morale devient un sujet droit à l‟image des personnes physiques, elles

aussi sujet de droit. La nationalité apparaissant alors de facto. Pour M. Mazeaud, les

personnalités morales ne sont pas des simples fictions et par conséquent, en raison de

l'existence d'une personnalité juridique morale, indépendante de la personnalité

22

Y. Loussouarn, Nationalité des sociétés, fascicule 564-10, JurisClasseur Droit international. 23

MM. Salem, « La question de la nationalité des sociétés et les intérêts français à l'étranger », JDI 1919,

p. 23 et s. 24

L. Mazeaud, « De la nationalité des sociétés », JDI 1928, p. 30 et s.

Page 36: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

36

juridique individuelle des associés, le concept de nationalité est applicable aux

personnes morales.

D‟autres auteurs, afin de faire admettre le concept de nationalité aux sociétés, ont

avancé un argument pragmatique. En droit international, les conventions internationales

lorsqu‟elle parle de français ou d‟étranger, ne distinguent pas entre les personnes

physiques et les personnes morales quand elles parlent de « français » et « d‟Etranger ».

Le rejet du concept de nationalité poserait alors des problèmes en droit international.

52 - La doctrine favorable à la nationalité des sociétés trouva des

contradicteurs en raison de la fictivité de la personne morale. L‟auteur le plus virulent

dans le rejet du concept de nationalité pour la personnalité morale est Niboyet25. Pour ce

dernier, la nationalité est un rapport politique entre l‟individu et l‟Etat et il ne peut

exister avec une personne morale qui est une simple entité juridique. Niboyet se refuse à

admettre une extension qui reviendrait à dire que la France, par exemple, se compose de

Français personnes physiques, et de sociétés françaises composées des premiers. Cela

reviendrait, pour le moins, à compter deux fois les mêmes et à augmenter fictivement le

nombre des nationaux. D'autre part, considérant la société comme un contrat de droit

privé, Niboyet ne voit pas comment il pourrait donner naissance à un être doté d‟une

nationalité. Niboyet compare pour affirmer son opinion la manière dont la nationalité

est admise entre une personne physique et une personne morale. Pour les personnes

physiques chaque Etat attribue souverainement sa nationalité mais ne peut attribuer une

nationalité étrangère selon ses propres critères contrairement lors de la détermination de

la nationalité des sociétés. Pour Niboyet, les sociétés n‟ont pas de nationalité mais plus

une allégeance vis à vis d‟un Etat. Les arguments de Niboyet à conduit de nombreux

auteurs à nier le concept de nationalité des sociétés

53 - Cette doctrine qui refuse l‟admission du concept de nationalité nie

l‟impact économique des sociétés dans un Etat. La société lorsqu‟on lui octroie une

nationalité va pouvoir agir dans la vie économique et nouer des relations avec des tiers.

La doctrine moderne admet l‟utilisation du concept de nationalité, car ce concept de

nationalité ne peut être identique à celle des personnes physiques. La nationalité des

sociétés va permettre d‟exprimer la relation privilégiée de la société avec un État en vue

25

J-P Niboyet, « Existe-t-il vraiment une nationalité des sociétés ? », RDIP 1927, p. 402 et s.

Page 37: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

37

de protection diplomatique et de jouissance des droits. Le concept de nationalité résolve

plus de problème qu‟il n‟en pose, il a donc admis rapidement de manière incontestée.

b) L‟affirmation incontestée de l‟existence d‟une nationalité des sociétés

54 - La jurisprudence a admis très tôt le concept de nationalité applicable au

droit des sociétés. En effet, dès 1870, la jurisprudence a admis que les sociétés étaient

soumises à leur loi nationale ce qui revenait à admettre implicitement mais

nécessairement qu‟elles eussent une nationalité. Cette solution fut explicitée par le

tribunal civil de Nancy dans un jugement du 16 avril 1883 qui énonce, « attendu qu‟une

société commerciale constitue un être moral distinct de la personnalité des associés ;

que par suite, elle a sa nationalité propre, de même qu‟elle a son patrimoine propre et

indépendant du patrimoine personnel de ceux-ci »26. Cet attendu montre avec netteté

l‟admission par la jurisprudence des idées appartenant à la doctrine favorable à la

nationalité des sociétés.

Cependant, la jurisprudence a opéré un léger recul dès 1950. En effet, lorsque les

juges ont dû se prononcer sur le bien-fondé de l‟application de la nationalité aux

sociétés, les juges se sont montrés très prudents27. L „attendue de l‟arrêt du tribunal des

conflits du 23 novembre 1959 témoigne bien de cette prudence, « La nationalité des

sociétés, qui n'est définie par aucun texte général dont l'application ressortirait à la

compétence de l'autorité judiciaire ne peut être déterminée qu'au regard des dispositions

législatives ou réglementaires dont l'application ou la non-application à la société

intéressée dépend du point de savoir si celle-ci est ou n'est pas française. En

conséquence, la question de la nationalité d'une société doit être tranchée par la

juridiction qui a compétence pour connaître de l'action à l'occasion de laquelle elle est

soulevée et ne saurait, lorsqu'elle se pose devant une juridiction administrative,

26

Tribunal civil de Nancy, 15 avril 1883, Jurisclasseur fasicule 564-10 n°82 27

Tribunal des conflits, 23 novembre 1959 : JCP G 1960 II, 11430, note Aymond.

Page 38: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

38

constituer une question préjudicielle, imposant à ladite juridiction l'obligation de

surseoir à statuer ». Parallèlement l‟expression « nationalité des sociétés »à continué à

être utilisé par la jurisprudence, notamment par l‟assemblée plénière de la Cour de

cassation28 et également par de nombreux textes législatifs dont notamment la loi du 24

juillet 1966 à l‟article 3, 31, 60 et 15429 ou encore l‟article 1837 du code civil30.

55 - Le concept de nationalité des sociétés est aujourd‟hui largement admis

même si aucun texte ne mentionne clairement que les sociétés ont une nationalité

propre. La nationalité étant déterminée selon certains critères, le siège social, élément de

rattachement soumis à la volonté des fondateurs.

2) Les critères de détermination de la nationalité des sociétés

56 - Le rattachement volontaire d‟une société à un Etat permet d‟octroyer à la

société la nationalité de cet Etat. Ce rattachement se faisant selon certains critères, le

siège social (a), le critère volontaire par excellence et en cas de besoin par un critère

alternatif, le critère de contrôle (b).

a) L‟affirmation du critère du siège social

57 - En droit français, le siège social est le lieu ou se situe la direction de la

société et comporte deux aspects, un aspect formel, on parle de siège social statutaire

fixé librement par les fondateurs. Cet aspect formel résulte de la mention dans les statuts

de la société du lieu de son siège social. La société doit aussi être immatriculée au greffe

du tribunal de commerce dans le ressort duquel elle à son siège. Cette conception

28

Cass. ass. plén. 21 déc. 1990, Juris-Data n° 1990-713531 , D. 1991, p. 305, conclusion Dontewille. 29

Loi n°66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales. 30

Article 1837 du code civil, « Toute société dont le siège social est situé sur le territoire français est

soumise aux dispositions de la loi française.

Les tiers peuvent se prévaloir du siège statutaire, mais celui-ci ne leur est pas opposable par la société si

le siège réel est situé en un autre lieu ».

Page 39: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

39

libérale du siège social statutaire fixé librement par les fondateurs laisse indirectement

le choix de la nationalité de la société aux fondateurs en se montrant respectueux de

l‟autonomie de la volonté. La deuxième conception consiste à situer le siège social non,

au simple endroit ou il est fait mention dans les statuts mais au lieu du principal

établissement ou se situe la direction supérieure et le contrôle de la société, là ou il y a

réunion des organes sociaux, on parle alors de siège réel et cela correspond à l‟aspect

matériel du siège social. Le choix entre ces deux critères dépendant du système de

rattachement choisi par l‟Etat, incorporation ou siège réel. La majorité étant celui de

l‟incorporation, système de rattachement permettant une grande autonomie des sociétés.

58 - Le critère du siège social est le critère de principe utilisé par la

jurisprudence pour déterminer la nationalité de la société. Ce principe de détermination

de la nationalité fut affirmé dans un arrêt de la chambre civile de la cour de cassation

du 30 mars 197131 et qui énonça le principe suivant, « en principe la nationalité d‟une

société se détermine par la situation de son siège social ». Le législateur à également

affirmé à deux reprises le principe de détermination de la nationalité d‟une société par le

siège social dans les articles 1837 du code civil et L210-3 du code de commerce. Cet

arrêt de principe met donc un terme à un débat et à une hésitation jurisprudentielle et

doctrinale pour le choix du critère d‟application entre siège social et contrôle et permet

une hiérarchisation des deux critères. Le critère de principe étant celui du siège social,

le critère de contrôle étant alternatif.

b) Le critère alternatif du contrôle

59 - La nécessité de recourir au critère de contrôle est apparue avec les

guerres mondiales qui mirent en exergue la double allégeance des sociétés, juridique et

politique. Si on se fie au simple critère du siège, une société peut apparaitre de

nationalité française en raison de son immatriculation en France, alors que

31

Cass. Civ. 30 mars 1971, “Caisse centrale de réassurance des mutuelles agricoles », JCP 1972, II,

17101, note Bruno Opettit.

Page 40: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

40

politiquement parlant, son allégeance peut aller à un autre Etat. Par conséquent, il est

apparu aux juges que le critère du siège social n‟était pas suffisant et qu‟il fallait pour

pleinement prendre conscience de la situation particulière des sociétés, un autre critère,

le critère de contrôle.

Le critère de contrôle prend en compte la nationalité des associés majoritaires ou

des dirigeants, ou encore celui du centre d‟exploitation qui est le lieu ou se développe

l‟activité principale de la société.

60 - L‟utilisation du critère de contrôle, se retrouve dans de nombreux textes

législatifs tels que la loi n°86-987 du 1er

aout 1988 relatifs aux entreprises de presse. En

effet, l‟article 7 de cette loi dispose « qu‟est étrangère toute société dont la majorité du

capital social ou des droits de vote est détenue par des étrangers ainsi que toute

association dont la majorité des dirigeants est étrangère ». On constate ici, que le critère

de contrôle tels que défini précédemment sert à déterminer la qualification de la société

comme étant étrangère. D‟autres textes législatifs font référence au critère de contrôle

sans le mentionner directement comme critère de détermination de la nationalité32. La

loi NRE du 15 mai 2001 va également dans ce sens car elle modifie plusieurs articles du

code de commerce afin de renforcer les moyens d‟identifications des actionnaires

résidents ou non-résidents. L‟article L 228- du code de commerce permet à la société

d‟identifier les actionnaires en l‟autorisant à prévoir dans ses statuts le droit d‟identifier

les porteurs de titre.

Le principal reproche fait au critère de contrôle est selon certains auteurs son

polymorphisme33 , qui en raison des différents critères qu‟il prend en compte ne permet

pas de dégager un critère unitaire. La Cour de cassation en 1971 affirma l‟alternativité

du critère de contrôle, le critère principal étant celui du siège social. Et malgré sa

présence dans des textes législatifs, le critère de contrôle demeure un critère alternatif,

32

Décret n°2005-1739 du 30 décembre 2005 qui modifie l‟article R. 151-1 du code monétaire et financier

qualifie d‟investissements directs étrangers les opérations effectuées « par une entreprise de droit français

dont le capital ou les droits de vote sont détenus à plus de 33,33% par une ou des entreprises de droit

étrangers ou une ou des personnes physiques non-résidentes » . 33

M. Menjucq, Droit international et européen des sociétés, coll. Montchrestien, 2ème

édition, spéc. 17.

Page 41: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

41

l‟assemblée plénière de la Cour de cassation le 21 décembre 199034 réaffirma et

explicita dans l‟arrêt CCRMA en énonçant que « la nationalité … pour une société

résulte, en principe, de la localisation de son siège réel, défini comme le siège de la

direction effective et présumé par le siège statutaire ». La Cour de cassation réaffirme

donc le principe de détermination de la nationalité des sociétés par le critère du siège

social déterminé par l‟immatriculation de la société. Si ce critère demeure insuffisant,

les juges ont recours au critère de contrôle.

61 - La nationalité de la société va donc être déterminée par le siège social.

Ce siège social étant soumis à la volonté des fondateurs de la société. La nationalité est

donc choisie, la société pouvant installer son siège social dans tel ou tel Etat. Ce choix

volontaire dans l‟installation du siège social, dans le rattachement de la société à un Etat

ne va pas seulement déterminer la nationalité de la société, mais également le droit

applicable à la société.

B) L‟impact du rattachement volontaire de la société concernant la loi applicable

62 - Le rattachement volontaire de la société à un Etat à un impact sur la loi

applicable, le rattachement s‟effectuant selon le système choisi par l‟Etat (1). Ce

rattachement va permettre de déterminer la lex societatis (2).

1) La détermination de la loi applicable

63 - Le siège social de la société est un des critères de rattachement qui

permet de déterminer la loi applicable à la société. Le siège social comprend deux

aspects, un aspect formel, on parle de siège statutaire et un aspect matériel, on parle de

siège réel. Cette distinction revêt une importance concernant la loi applicable. Une

entreprise nouvelle quand elle souhaite s‟immatriculer va devoir choisir ou placer son

34

Cass. ass.plén. 21 décembre 1990, D. 1991, p 305, conclusion Dontewille

Page 42: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

42

siège social, deux systèmes de détermination s‟affrontant, le système de l‟incorporation

(a) et le système du siège réel (b).

a) Le système de l‟incorporation

64 - Le système de l‟incorporation ou siège statutaire, est le système le plus

adopté aujourd‟hui dans le monde. Le Royaume-Uni, les Etats-Unis, la Finlande, la

Suède, le Danemark, la Suisse ou encore l‟Italie. Le rattachement de la société à un

Etat, se fait par le siège social statutaire, le système ne prend en considération qu‟un lien

formel. La loi applicable est donc celle du pays ou la société a accompli le processus de

constitution. Le critère de rattachement de la loi est le siège social désigné dans les

statuts et corroboré par l‟immatriculation.

65 - Pour exemple, une société qui est immatriculée au Royaume-Uni et qui a

respecté les conditions de validité, sera soumis à la loi anglaise, même si son siège réel,

« Head office » se situe dans un autre Etat. Un autre critère de rattachement existe, celui

du siège réel. Ce système va permettre la mobilité des sociétés. Le système de

l‟incorporation étant conçu à l‟origine comme un moyen permettant aux sociétés

britanniques d‟étendre leur commerce à travers le monde tout en bénéficiant de la

protection diplomatique de leur pays. Le siège effectif de la société n‟ayant pas

d‟impact pour déterminer la loi applicable, une société peut bénéficier des dispositions

législatives de l‟Etat ou elle s‟est immatriculée et avoir son siège effectif ou encore

d‟autres sociétés dans différents Etats.

66 - Le système offre donc au dirigeant la liberté d‟adapter le lieu du siège de

direction, ce système étant également favorable à l‟accueil des sociétés, celles-ci étant

valablement constituées selon les dispositions de leurs Etat d‟immatriculation, ce

système s‟oppose à celui du siège réel.

Page 43: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

43

b) Le système du siège réel

67 - La théorie du siège réel détermine la loi applicable du pays ou la société

à suivi la loi du pays pour s‟immatriculer et ou se trouve son centre de direction. Ce

système se fonde sur une situation de fait, en prenant en compte la localisation du siège

statutaire et également le centre de décision de la société. Cette solution a été adoptée

par l‟Allemagne.

L‟Allemagne impose donc que la société soit constituée dans l‟Etat ou se situe son

siège réel. L‟Allemagne impose alors la constitution des deux éléments. Une société

souhaitant bénéficier du droit allemand devra donc s‟immatriculer en Allemagne et

avoir son siège réel en Allemagne.

68 - La France, a choisi un critère de rattachement intermédiaire entre les

deux solutions, tenant compte de l‟immatriculation et du siège statutaire, ce critère

médian tendant à disparaitre, pour laisser place au critère formel. L‟article 210-3

disposant, «Les sociétés dont le siège social est situé en territoire français sont soumises

à la loi française.

Les tiers peuvent se prévaloir du siège statutaire, mais celui-ci ne leur est pas opposable

par la société si son siège réel est situé en un autre lieu ». La loi française utilise donc

un critère intermédiaire, critère qui tend à disparaitre au seul profit de celui statutaire, au

regard de l‟article L210-6 disposant « les sociétés commerciales jouissent de la

personnalité morale à dater de leur immatriculation au registre du commerce ». La

personnalité morale désormais ne résulte plus du contrat de société mais comme dans le

système d‟incorporation de l‟immatriculation. De plus, l‟utilisation du critère formel

comme critère de rattachement, se conforme à la volonté du juge européen, le critère

formel étant accentué et affirmé dans le cadre de trois arrêts complémentaires, l‟arrêt

Centros du 9 mars 1999, l‟arrêt Uberseering du 5 novembre 2002 et l‟arrêt Inspire art

du 30 septembre 2003, qui énonce de manière catégorique la suffisance du critère du

siège statutaire et l‟admission d‟une société incorporée dans un pays utilisant le critère

du siège réel. Il est désormais interdit à un Etat de refuser la reconnaissance sur son

territoire d‟une société incorporée dans un Etat tiers même si pour cet Etat, le critère de

rattachement est celui du siège réel.

Page 44: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

44

69 - Le critère de rattachement permet donc à l‟Etat de reconnaitre à la société

sa personnalité morale, sa nationalité et également une loi applicable. Même si ces

critères s‟imposent aux sociétés, il demeure que la société à naitre va choisir librement

son Etat et remplir les critères de rattachement pour pouvoir bénéficier de la lex

societatis de cette Etat, le choix de la loi applicable étant important en raison de son

domaine d‟application.

2) Le domaine de la lex societatis

70 - La lex societatis va gouverner la vie de la société, des conditions de sa

création jusqu‟à sa mort. La lex societatis va d‟abord régir les conditions de

constitutions de la société et la forme de la société. Les conditions de validités,

d‟immatriculations étant également soumises à la loi de la société. Une fois la société

valablement constituée selon la loi applicable, la lex societatis va gérer le

fonctionnement de la société, les organes, les dirigeants, les associés devant y être

soumis35

. La naissance comme la mort de la société relève de la lex societatis, les règles

des entreprises en difficultés applicable sont ceux de la loi applicable à la société.

71 - Le choix de la loi applicable aux sociétés est donc un choix important,

cette loi devant régir tout les aspects de la société. Ce choix est soumis à condition, la

société doit respecter les contraintes inhérentes à son rattachement pour bénéficier de la

loi, mais ces contraintes sont minimes au regard de la possibilité de la société de choisir

son droit. Les sociétés sont mobiles, elles peuvent donc changer d‟Etat, le critère de

l‟incorporation n‟y faisant pas obstacle. De plus, si le choix d‟une loi applicable à la

société est soumis à sa volonté, la société par principe peut en changer par sa simple

35 Cass. civ. 17 octobre 1972, Société Royal Dutch, Revue critique DIP 1973, p.520, note Batifol : « les

obligations de la société envers ses actionnaires sont régies par la loi nationale de cette société … que

cette loi seule détermine, quel que soit le pays où les titres sont détenus, les conditions dans lesquelles

s‟acquiert, se conserve ou se perd la qualité d‟actionnaire ».

Page 45: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

45

volonté. Cette accumulation de facteur volontariste va permettre une concurrence entre

les différents droits des sociétés, les Etats souhaitant attirer les sociétés ou les garder

vont donc se concurrencer entre eux afin d‟offrir un produit droit des sociétés attractifs.

SECTION 2 : LA MISE EN ŒUVRE D‟UNE CONCURRENCE ENTRE PRODUIT

DROIT DES SOCIETES

72 - Les théories de la Law and Economics, admettent un concurrence entre

produit de droit quand celui peut s‟insérer dans le schéma initial. Le droit des sociétés

s‟insère pleinement dans ce schéma, la concurrence entre les Etats pour obtenir un droit

attractif, concurrentiel est donc admit et peut avoir lieu.

Aujourd‟hui il est très difficile de prouver cette compétition que se livre les

Etats, elle peut cependant se déduire de nombreux éléments tels que les indicateurs

disponibles pour mesurer l‟efficacité d‟un droit sur l‟objectif poursuivi. Concernant le

droit des sociétés, le rapport Doing Business, véritable pilier des indicateurs va

permettre en hiérarchisant les différents droits des Etats de provoquer et démontrer la

concurrence qui se joue entre les eux (Paragraphe 1). La réponse de la France en tentant

d‟obtenir un droit des sociétés attractif, est une réponse à cette concurrence (Paragraphe

2).

Paragraphe 1 : Le rapport Doing Business, l‟exemple de vecteur de concurrence

73 - Le projet Doing Business 2011 est le huitième rapport d‟une série

annuelle qui mesure la réglementation des affaires et son application dans 183 pays. Le

rapport mesure les différents corps de règles juridiques des différents pays, de

l‟Afghanistan au Zimbabwe dans leur aptitude à favoriser l‟aptitude à faire des affaires.

Le rapport Doing Business met donc en concurrence les différentes législations des

Etats en les hiérarchisant (A), cette hiérarchisation ayant un impact sur l‟économie

mondiale (B).

Page 46: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

46

A) La hiérarchisation des différents droits des affaires

74 - Le rapport Doing Business opère un classement des différentes

législations du droit des affaires (1), et pour cela mesure économiquement l‟efficience

du droit analysé (2). La législation étudiée comprenant les droit des entreprises en

difficultées, le droit commercial ou encore le droit des sociétés.

1) La mesure économique de l‟efficience du droit

75 - Le rapport Doing business lors de sa première sortie en 2004 a provoqué

un vif débat notamment en France en raison de la place de la France dans le classement

mais également dans la possibilité de mesurer et d‟évaluer le droit.

Comme nous l‟avons vu, l‟idée de mesurer l‟efficacité économique du droit est

issue du courant de pensée Law and Economics. Les auteurs du rapport Doing Business

dans leurs études mesurent l‟efficacité économique du droit des affaires d‟un pays en

étudiant différents aspects de la vie économique. En 2011, l‟étude se porte sur les

réglementations ayant une incidence sur dix stades de la vie d‟une entreprise tels que la

création d‟entreprise, l‟embauche des travailleurs ou encore le paiement des taxes et

impôts36. Durant les 7 dernières éditions, la méthode d‟étude Doing Business à

profondément été modifiée notamment en raison des nombreuses critiques portées à la

méthode37.

76 - Le premier rapport portait sur 5 types d‟indicateurs pour 133 pays, alors

qu‟aujourd‟hui le rapport porte sur une longue série d‟indicateur dans 183 économies.

Pour permettre d‟évaluer ces indicateurs, le projet Doing Business utilise comme types

36

Rapport Doing Business, 2011, IFC. 37

B. Du Marais, Des indicateurs pour mesurer le droit ? Les limites méthodologiques des rapports Doing

Business, col. Perspective sur la justice, éd. La Documentation Française, 2006, p. 155 et s. ; B. Sturlèse,

« Doing Business 2007 : How to Reform », Dalloz 2006, p 2386 et s.

Page 47: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

47

de données, les textes législatifs et règlementaires et des indicateurs de mesure du temps

et de mouvements (l‟estimation de cet indicateur se fait à partir des barèmes

d‟honoraires officiels) qui mesurent l‟efficacité avec laquelle une règlementation est

mise en œuvre.

Concernant les indicateurs, la mesure de ces indicateurs au regard de la législation

évaluée, se fait par rapport à une étude de cas type assortie d‟hypothèses particulières,

ce qui permet de faire des comparaisons à l‟échelle mondiale. L‟indicateur comprend

un classement partiel des pays en fonction des caractéristiques du droit, et pour chaque

indicateur afin de rendre plus aisée la comparaison, on crée un cas type illustrant

l‟opération évaluée et servant de référence à des questionnaires. Pour les éléments

concernant les couts, on fait appel à des juristes familiarisés avec la législation et les

formalités évaluées.

Pour exemple, concernant l‟évaluation du droit des sociétés, on va utiliser un cas

type, la création d‟un entreprise et l‟on va pour chaque Etat étudier, comparer différents

aspects de cette création à savoir, le temps, la facilité ou encore le cout. Cela permettant

d‟établir un classement entre les Etats sur les différents points étudiés puis un

classement général du droit comme étant le plus efficace pour permettre la création

d‟une société.

77 - Cette méthode permet donc mesure de l‟efficacité du droit des affaires et

bien que vivement contesté permet de proposer un classement des différentes

législations

2) La mise en œuvre d‟un classement des législations

78 - Le rapport Doing Business mesure l‟efficacité du droit des Etats

concernant 10 domaines de la vie courante des affaires. Pour chaque opération étudiée

tels que la création d‟entreprise, un classement des Etats est mis en place. Le rapport

Doing Business pour plus de clarté a également mis en place un indice synthétique de

« facilité à faire des affaires », qui correspond à la moyenne arithmétique du classement

des pays pour chacune des dix opérations qui ont été évaluées dans le rapport.

Page 48: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

48

79 - Ce classement comporte deux types d‟informations, le rang pour le

rapport Doing business 2011 ainsi que le rang du rapport Doing Business 2010 afin de

voir l‟évolution de la « facilité à faire des affaires » des Etats d‟une année à l‟autre. Le

rapport Doing Business 2011 place la république de Singapour en tête du classement

depuis 2007, suivi du RAS de Hong Kong qui est en seconde place depuis 2008 en

détrônant la Nouvelle Zélande qui est à la 3ème place devant le Royaume-Uni et les

Etats-Unis qui se maintiennent à leur place. La France, elle apparait seulement en 26ème

position derrière la Malaisie ou la République de Corée.

80 - Le rapport Doing Business hiérarchise donc les différents droits des

affaires de plus de 183 pays par le biais d‟un classement et d‟une méthode calculant

l‟efficience des législations. Ce classement met en concurrence les Etats et à un impact

sur l‟économie mondiale.

B) L‟impact du rapport Doing Business

81 - La mise en œuvre par le Banque mondiale des rapports Doing business à

permis depuis 5 ans la mise en place dans les différents Etats audité de plus de 1 511

amélioration aux réglementations des activités commerciales. Durant les douze derniers

mois, le rapport Doing Business intitulé « agir pour les entrepreneurs » annonce que

plus de la moitié des modifications réglementaires enregistrées ont facilité la création

d‟entreprises, le commerce transfrontalier et le paiement des taxes et impôts. Selon le

rapport Doing Business, les gouvernements de 117 économies ont mis en œuvre 216

réformes réglementaires pour faciliter la vie des affaires. En 2010, toujours selon le

rapport Doing Business, 70% des Etats avaient reformé leur réglementation des affaires.

82 - Le rapport Doing Business permet donc de prendre conscience des failles

dans sa législation et de mettre en œuvre les reformes et changements nécessaires pour

faciliter la vie des affaires dans son pays et d‟augmenter sa place dans le classement. Le

rapport Doing Business en 2004 propose de standardiser le droit après avoir déterminé

la meilleure pratique juridique.

Page 49: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

49

Cette méthode appelée « one size fits all » et élaborée par un groupe de chercheur

de l‟université de Harvard, considère qu‟il existe un standard mondial apte à favoriser le

développement économique qu‟importe le pays. Le rapport Doing business en mesurant

les droits et en classant les Etats sur neufs domaines de la vie des affaires, va pousser les

Etats « mauvais » à réformer en s‟inspirant des réformes des « bons » Etats. Pour

exemple, dans le rapport 2007 Doing business38

, dans le chapitre création d‟entreprise,

l‟accent est mis sur le Portugal qui a réformé son accès à la création d‟entreprise, les

Etats « mauvais » pouvant s‟inspirer des réformes opérées par le Portugal ou en

s‟inspirant d‟autres Etats « bons », un partie étant entièrement consacré à comment

réformer39 avec des exemples et de nombreux conseils.

83 - Le rapport Doing Business 2011, également dans le chapitre « création

d‟entreprise », fait le point sur les réformes qui ont fonctionné comme l‟instauration

d‟un guichet unique, recommandation proposée par le rapport des 2007. En 2011, 72

économies ont institué un guichet unique ou son équivalent pour l‟immatriculation des

entreprises ou encore améliorée son système de guichet pour immatriculation. On

constate donc que le classement mis en œuvre entre les Etats les mets en concurrence.

84 - L‟idée du rapport étant de comparer les réglementations qui facilitent ou

entravent l‟activité commerciale pour que les entrepreneurs puissent choisir la

législation la plus favorable à leurs activités d‟une part et d‟autre part cette comparaison

entre les Etats les poussent à réformer leurs législation selon les recommandations ou

les législations qualifiés de « bonnes » pour remonter dans le classement et attirer les

entrepreneurs. L‟exemple parfait est celui de la France qui en raison de sa place dans le

classement en 2004, a prit des mesures pour un droit des sociétés attractifs.

38 Rapport Doing Business, 2007, IFC

39 Rapport Doing Business 2007, Banque mondiale, spéc. 12.

Page 50: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

50

Paragraphe 2 : La volonté française d‟obtenir un droit des sociétés attractif

81 - La France a prit conscience par la parution du rapport 2004 de la

concurrence qui se joue pour attirer les sociétés. En effet, le rapport Doing Business très

diffusé, sert de guide aux entreprises pour le choix de leur implantation et leur

rattachement. La comparaison des différents droits crée donc une compétition entre les

Etats, ceux-ci voulant un droit le plus attractif possible.

82 - Les économistes Benoit Coeuré et Isabelle Rabaud définissent

l‟attractivité comme « la capacité d‟un pays à attirer et retenir les entreprises »40.

L‟attractivité d‟un droit est une notion complexe qui peut se définir de plusieurs

manières, l‟idée principale étant d‟attirer les sociétés, les retenir par des propositions

législatives efficaces répondant à leur besoin. La France a prit en compte le rapport

Doing Business (A) et la concurrence qu‟elle induit. Elle a souhaité obtenir un droit des

sociétés attractif pour rentrer dans la compétition (B).

A) La prise en compte du rapport Doing business

83 - Le rapport Doing business en 2004 a provoqué un véritable séisme

auprès des juristes français. La France malgré son classement dans le top 10 des

économies les plus riches n‟a atteint sa meilleure place qu‟en 2011 en se plaçant

seulement au 26ème rang. Afin de redorer le blason du droit français, qui apparait sur la

scène internationale comme étant faible au regard de la compétition économique

internationale et, relancer l‟attractivité du droit français, une résistance s‟est mis en

place.

84 - Tout d‟abord, les juristes français sont montés au créneau, pour critiquer

la méthode de calcul des chercheurs de la Banque mondiale qui ne peut pas permettre de

40

B. Du Marais, « Attractivité économique du droit : le droit français peut il survivre dans la compétition

internationale ? », Revue Droit et Patrimoine, n°170, mai 2008, p. 38, spéc, p. 39

Page 51: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

51

mesurer l‟efficacité du droit français. En effet, la méthodologie de la Banque mondiale

est, pour de nombreux auteurs erronée41. La première critique vient de l‟utilisation de

questionnaire et non de statistique officielle. De plus, les questionnaires ne sont délivrés

qu‟en anglais et même si l‟anglais est l‟une des langues les plus parlées dans le monde,

la compréhension des questionnaires dans certains pays peut être discutée42, ainsi que le

choix des personnes auditées.

Les cas types permettant de rendre la comparaison internationale aisée sont eux

aussi critiqués en raison de l‟absence de prise en considération des spécificités de

chaque système juridique. L‟objet de comparaison est aussi vivement critiqué, en raison

de l‟appréciation limité du droit soumis à étude et des nombreux aspects oubliés.

85 - La vive critique fait à la méthode Doing Business qu‟on appelle également

parangonnage ou « benchmarking », s‟explique par la nouveauté du rapport et sa place

sur la scène internationale. En tant que premier rapport de ce type, concernant autant de

pays sur l‟étude du droit uniquement de manière aussi détaillé, ce rapport peut

apparaitre sur la scène internationale et pour les opérateurs économiques comme étant

un indicateur fiable sur l‟Etat le plus apte à faciliter la vie des affaires. Le rapport Doing

Business renvoi à l‟idée que « les économies nationales ou les territoires sont des

offreurs sur un marché des capitaux internationaux en situation de concurrence face à

des demandeurs d‟offre territoriale qui sont rationnels. Le droit est alors l‟un des

éléments qui est mis en tension dans cette concurrence»43.

86 - Le rapport a donc placé la France dans la compétition internationale à un

niveau faible, la critique française étant compréhensive si elle ne se limite pas qu‟à une

simple critique. La France n‟a pas seulement critiquée le rapport Doing Business, elle a

41

B. Du Marais, « De Kotor à Palikir : à la recherche du paradis du droit des affaires », Dalloz 2006, p

1110 et s. ; B.Du Marais, « attractivité économique du droit : le droit français peut il survivre dans la

compétition internationale ? » préc. cit ; B. Sturlèse, « Doing Business 2007 : How to Reform », préc. cit. 42

Le terme « bankruptcy » est parfois utilisé dans le même questionnaire relatif à l‟indicateur « fermeture

d‟entreprises » dans le sens général de « procédures collectives » mais aussi pour désigner l‟une ou

l‟autre des phases spécifiques de liquidation ou de redressement judiciaire. 43

B. Du Marais, « attractivité économique du droit : le droit français peut il survivre dans la compétition

internationale ? », préc. cit.

Page 52: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

52

également tiré les conséquences de ce rapport et à mis en œuvre des moyens pour rendre

attractif le droit des sociétés, et de lui redonner une place dans la compétition.

B) La mise en œuvre de moyen pour rendre attractif le droit français des sociétés

85 - Afin de rendre attractif le droit français des sociétés, les juristes français

et la classe politique ont réagit par deux moyens. La première est venue du comité sur

l‟attractivité du droit, l‟autre était la fondation pour la promotion du droit français à

l‟étranger.

Le comité scientifique sur l‟attractivité du droit à été mis en place le 20

décembre 2004 par l‟ancien Garde des sceaux, Dominique Perben. Ce comité porte sur

l‟attractivité économique du droit de tradition française et la sécurité juridique des

transactions économiques. Ce comité aura pour objectif d‟apporter une contribution au

débat scientifique sur la pertinence économique des normes juridiques. Ce comité

composé d‟éminent scientifique aura également pour objet de mesurer l‟efficacité

comparée des systèmes de droit écrit et de droit jurisprudentiel au regard d‟objectifs tels

que la simplicité, la rapidité et le coût des procédures, ou encore la prévisibilité des

règles de droit. Ce comité s‟est consacré à des recherches appliquées en analyse

comparée avec notamment une expertise sur les indicateurs d‟efficacité du droit du

comité Doing Business44, ou encore à l‟étude de différents instruments juridiques

utilisables par les opérateurs économiques et porteur d‟efficacité. Le comité AED a

notamment été chargé par le ministère des finances de coordonner la délégation

française qui discute le rapport Doing Business 2008. De plus, grâce à l‟expertise de

l‟AED, la France à gagné 16 places au classement Doing Business entre 2005 et 2007.

86 - La fondation pour la promotion du droit français à l‟étranger a été voulue

par le Président de la République dans son allocution du 11 mars 2004, prononcée à

44

B. Du Marais, Des indicateurs pour mesurer le droit ? Les limites méthodologiques des rapports Doing

Business , La Documentation Française, 2006

Page 53: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

53

l‟occasion du colloque organisé à la Sorbonne pour le bicentenaire du code civil.

L‟objectif de la fondation est de renforcer le rayonnement du droit français à l‟étranger.

La fondation dont la vocation est fédératrice, agira en partenariat avec tous les acteurs

du monde juridique. Cette fondation devra mettre en œuvre diverses actions pour

permettre une meilleure diffusion du droit français à l‟étranger. La fondation aura un

partenariat privilégié avec les entreprises et les universités. Pour cela la fondation

disposera d‟un capital dont les fonds seront majoritairement privés.

87 - Le droit des sociétés est donc l‟objet d‟une concurrence entre les Etats,

l‟enjeu étant d‟obtenir le droit le plus attractif pour les sociétés afin de capter leur flux

financiers. L‟enjeu n‟est pas seulement financier comme, il en va également du

rayonnement des Etats dans les différents classements proposés. Le rapport Doing

Business sert donc d‟exemple à la concurrence entre les Etats qui nous l‟avons vu est

difficilement tangible. Le rapport en hiérarchisant les droits, va faire un classement qui

va servir aux entreprises, l‟Etat va répondre à se classement en proposant un droit

amélioré45

pour attirer les entreprises et également remonter dans le classement. Les

vigoureuses critiques contre la méthode d‟évaluation de la Banque Mondiale, montre

bien l‟importance de la notoriété du droit et son rayonnement dans le monde. Le libre

choix des entreprises, va donc pousser à la compétition, les classements étant également

des vecteurs de cette concurrence.

45 Le nombre de réforme du droit depuis l‟apparition du rapport Doing Business, va dans ce sens.

Page 54: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

54

CONCLUSION DU TITRE 1

85 - L‟étude succincte du phénomène de la mondialisation et de la

globalisation de l‟économie sur la conception traditionnelle du droit, nous permet de

voir les limites de cette définition traditionnelle. De ce fait, une fois admis que le droit a

évolué. Que la définition classique bien que nécessaire, a par certains cotés, était

dépassée par l‟évolution du contexte juridique, l‟assimilation du droit à un produit peut

être envisagée.

86 - Le droit des sociétés s‟apparente à un produit, en étant le résultat d‟une

création législative dans un but particulier celui de répondre à une demande, celle des

sociétés. Le droit des sociétés à également un cout pour les sociétés, ce cout s‟envisage

au moment de l‟immatriculation et sur le long terme, par le paiement de l‟impôt sur les

sociétés propre à chaque Etat. Ces différentes caractéristiques propres au droit des

sociétés permettent de l‟assimiler à un produit, à l‟image du produit marchand échangé

sur le marché des biens et service et soumis à concurrence.

87 - Le droit des sociétés va également faire l‟objet d‟une concurrence en

raison de sa disponibilité, les sociétés pouvant décider du lieu de se rattacher et donc du

droit applicable à leur société. Les sociétés ayant pris conscience de l‟impact du droit

sur leur stratégie économique, les frontières n‟étant plus un frein. Le phénomène de

concurrence entre les Etats pour proposer aux sociétés un produit « droit des sociétés »

concurrentiel est donc réelle même si difficilement palpable, cette concurrence étant

admis théoriquement et de manière indirecte par les classements entre Etats tels que le

rapport Doing Business. Cette volonté de proposer un droit concurrentiel va permettre

une circulation entre les droits, un échange.

Page 55: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

55

TITRE 2 : L’ECHANGE ENTRE LES PRODUIT « DROIT DES SOCIETES »

DANS UNE VOLONTE CONCURRENTIELLE

88 - La concurrence entre les produits droits des sociétés va permettre un

mécanisme d‟échange entre les droits des sociétés, une circulation. Cet échange

s‟explique par la volonté de l‟Etat d‟obtenir un droit attractif pour les sociétés, de

répondre à leur demande, les Etats n‟hésitant pas au regard de l‟enjeu à emprunter les

solutions législatives externes (Chapitre 1). Ces emprunts pour obtenir un droit

concurrentiel vont aboutir à une convergence entre les différents droits des sociétés

(Chapitre 2).

CHAPITRE 1 : L’EMPRUNT DE SOLUTION EXTERNE PAR LE DROIT

FRANÇAIS : L’EXEMPLE DE LA CORPORATE GOVERNANCE

89 - La « Corporate Governance », ou « gouvernement d‟entreprise » selon la

version française peut être définie comme un ensemble de principe visant à régir les

relations entre les dirigeants, le Conseil d‟administration et les actionnaires dans les

sociétés faisant appel aux marchés financiers. Ce mouvement est d‟abord apparu aux

Etats-Unis (Section 1) puis au Royaume-Uni dans les pays ou le financement des

entreprises proviennent essentiellement des marchés financiers avant d‟atteindre

l‟ensemble des autres pays dont notamment la France (Section 2).

SECTION 1 : LA CORPORATE GOVERNANCE : UN CONCEPT ANGLO-SAXON

90 - La « Corporate Governance » est un concept anglo-saxon tant en raison

de sa création qui a eu lieu aux Etats-Unis et au Royaume- Uni (Paragraphe 1), que de

son concept qui à été crée pour les entreprises américaines et anglaises particulières

(Paragraphe 2).

Page 56: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

56

Paragraphe 1 : La naissance de la « Corporate Governance »

91 - Le concept « Corporate Governance » est un courant d‟idée venu des

Etats-Unis (1), puis a atteint le Royaume-Uni (2). Ce courant d‟idée est né en raison de

nombreux scandale financier qui ont poussé les partisans de cette doctrine à

s‟interroger sur le fonctionnement des organes des société à capitaux.

A) La naissance aux Etats-Unis

92 - Les sociétés à capitaux américaine dans les années 70 sont dirigées par le

management, qui gère la société et prend les décisions. Le point de départ de la

« Corporate Governance » aux Etats- Unis vient de l’American Law Institute, crée en

1923 et dont la mission est de promouvoir la clarification et la simplification des lois

américaines, en l‟adaptant à l‟évolution des besoins sociaux.

En 1980 la ALI met en place une commission de juriste et s‟associe avec

l’American Bar Association (association d‟avocat depuis 1878), pour élaborer un texte

qui sera publié en 1993 et intitulé « Principles of Corporate Governance- analysis and

recommandation ». Ce texte fondamental concerne l‟organisation des pouvoirs dans les

Publics Corporation, société faisant appel à l‟épargne. Ce texte vise principalement le

« Board of Directors », qu‟on appellerait en français Conseil d‟administration et qui est

l‟organe central de l‟organisation de la société. Par conséquent, ce conseil

d‟administration doit prendre pleinement conscience de son rôle.

Les rédacteurs de ce texte s‟interrogent sur l‟équilibre des pouvoirs dans les

sociétés cotées et l‟omnipotence du PDG. Pour cela, ils proposent un certains nombres

de recommandations avec l‟objectif d‟obtenir une « bonne gouvernance » de la société.

Pour les rédacteurs, la bonne gouvernance repose sur la notion de mandat, le mandataire

doit exercer sa fonction dans l‟intérêt des actionnaires et valoriser leurs actions. Le

conseil d‟administration doit avoir plus de pouvoir, la société lui appartenant. Ce

concept a été positivement accueilli au Royaume-Uni

Page 57: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

57

B) La naissance au Royaume-Uni

93 - La « Corporate Governance » a également trouvé une terre d‟accueille

au Royaume-Uni. Les principaux acteurs de ce mouvement ont été la Bank of England,

l’Institutional Shareholders Committee et la Confédération of British Industry. Des

recommandations semblables à celles élaborées aux Etats-Unis ont été prises et se

retrouvent dans le fameux rapport Cadbury, qui fait une synthèse des différentes

propositions et est publié en 1991.

Ce rapport aboutit à la mise en place d‟un Code of Best Pratice applicable aux

sociétés cotées qui doivent le respecter ou se justifier en cas de manquement. Le rapport

Cadbury a été ensuite, complété par d‟autres rapports concernant toujours l‟organisation

des pouvoirs dans les sociétés. Tous ces rapports ont été intégrés dans le Combined

Code on Corporate Governance qui figure en annexe des règles boursières du London

Stick Exchange, dès lors quand une société sollicite son admission, le Combined Code

s‟impose à la société de manière impérative. Sous la pressions des marchés et des

investisseurs, à l‟image des fonds de pension américain, les sociétés cotées mettre en

application les recommandations proposées par le rapport. Le concept de « Corporate

Governance » est né.

Paragraphe 2 : Le concept de « Corporate Governance »

94 - « …. Les directeurs de ces sortes de compagnies étant les régisseurs de

l‟argent d‟autrui plutôt que de leur propre argent, on ne peut guère s‟attendre qu‟ils y

apportent cette vigilance exacte et soucieuse que les associés d‟une société apportent

souvent dans le maniement de leurs fonds … Ainsi la négligence et la profusion doivent

toujours dominer plus ou moins dans l‟administration des affaires de la compagnie »46.

46

Adam Smith, Recherches sur la nature et les causes de richesse des nations, 1776

Page 58: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

58

Cet extrait de l‟œuvre de Smith, résume la volonté de la « Corporate Governance », le

rééquilibrage des pouvoirs dans la société.

95 - La doctrine de la « Corporate Governance » place le conseil

administration (Board of Directors) comme le pivot central de l‟organisation des

sociétés. Il doit assumer le contrôle et la gestion quotidienne exercée par les dirigeants.

Pour cela, la doctrine de la « Corporate Governance » recommande d‟ouvrir le conseil

d‟administration à des personnes qualifiées extérieures appelée « non-executive

directors » pour contrebalancer l‟influence du président sur les administrateurs. En

effet, ces administrateurs indépendants pourront sans peur contester le président conseil

d‟administration.

96 - Le conseil d‟administration va aussi voir sa structure modifiée, les

fonctions de « Chairman of the Board » (président du conseil) et de « Chief executive

officer » (directeur général) ne devant pas être occupées par la même personne. Le

conseil doit également mettre en place trois comités spécialisés pour préparer ses

décisions et prolonger son action. Le plus important est le comité d‟audit, « audit

committee » qui doit mettre en œuvre et soutenir la fonction de contrôle du conseil en

revoyant périodiquement les procédures de productions des documents financiers, les

contrôles internes de la société et l‟indépendance de ses commissaires aux comptes. Il

doit être composé d‟au moins trois membres sans lien avec la société et les dirigeants.

Ce comité surveillera donc la société de l‟intérieur et peut proposer des

recommandations. Deux autres comités devant également être créés, le « nominating

committee », chargé de la sélection des mandataires sociaux et un autre comité,

« compensation comittee », chargé de la rémunération des membres du conseil et du

management.

97 - Les administrateurs doivent également avoir accès à l‟information afin de

pouvoir prendre les décisions en toute connaissance de cause. Il doit pouvoir à tout

moment avoir accès aux documents de toute la société. Les devoirs des administrateurs

devant être définis dans des codes de bonnes conduites.

98 - Les recommandations de la doctrine du « Corporate Governance »

anglo-saxonne, ont touché de nombreux Etats à économies de marché atteignant même

Page 59: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

59

l‟Organisation internationale de coopération et de développement économique. Le

conseil de l‟OCDE ayant approuvé en 1999 une série de principe révisée en 2004 pour

aider les gouvernements à améliorer le cadre régissant l‟organisation des pouvoirs dans

l‟entreprise47. On constate donc que le thème du gouvernement d‟entreprise est un

modèle universel qui peut s‟appliquer au différents marchés, Alain Couret48 parlant

même « d‟impérialisme mondialiste », le modèle étant à l‟origine d‟un corps de normes

privées construit en dehors des souveraineté étatique et qui les affectent. Les pratiques

de « Corporate Governance » sont considérées comme indispensable aux Etats-Unis et

au Royaume-Uni mais également dans d‟autres Etats et institution internationale tels

que la Banque mondiale ou comme nous l‟avons vu l‟OCDE. Le concept de

« Corporate Governance » ayant également trouvé sa place en droit français.

SECTION 2 : LA PLACE DE LA « CORPORATE GOVERNANCE » DANS LE

DROIT FRANÇAIS DES SOCIETES

99 - La « Corporate Governance » comme nous l‟avons vu, est un concept

idéologique et normatif. L‟idéologie de la « Corporate Governance » consiste en une

bonne organisation du pouvoir dans la société afin d‟obtenir une société efficience. Pour

cela, les tenants de cette thèse ont érigé un certains nombres de règles et de

recommandations afin d‟obtenir un mode d‟exercice du pouvoir et du contrôle efficace

pour obtenir le but recherché. En France, le concept de « Corporate Governance » à été

introduit de deux manières, par le biais de recommandation privée, de « soft law » (

Paragraphe 1), ou par la loi de manière postérieure dans une volonté de reprendre le

processus de production de la norme (Paragraphe 2)

47

Principes de gouvernement d‟entreprise de l‟OCDE, 2004, Rapport officiel 48

A. Couret, « La structure juridique des entreprises (corporate governance) », Revue internationale de

droit économique, 2002/2 t. XVI, p. 339 et s.

Page 60: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

60

Paragraphe 1 : L‟intégration de la « Corporate Governance » par des normes privées

100 - La France contrairement au Royaume-Uni et le rapport Cadbury n‟a pas

adopté un code de déontologie à l‟instar du code Hamsel. Le concept de « Corporate

Governance » est entré en France par le biais de recommandation formulées par des

personnalités politiques. Les rapports Vienot sont considérés comme les ouvrages de

référence en matière de « Corporate Governance » (A), à cotés d‟autres normes privées

(B)

A) Les rapports Vienot, un rapport Cadbury français

101 - Les études sur la « Corporate Governance » publiées aux Etats- Unis et

au Royaume-Uni apparaissent comme les ouvrages de références sur la « Corporate

Governance ». En France le patronat français et les entreprises se sont interrogés sur ce

mouvement venu des deux grandes économies mondiales, et ont à l‟image des rapports

Principle et Cadbury, porté une réflexion sur la gouvernance d‟entreprise. Le rapport

Vienot I étant le précurseur de ce mouvement (1), qui fut achevé par le rapport Vienot II

(2).

1) Le rapport Vienot I, sur le Conseil d‟administration des sociétés cotées

102 - Le premier rapport qui a introduit la « Corporate Governance » est le

rapport Vienot49 I qui développe un certains nombres de recommandations pour un

meilleur gouvernement d‟entreprise pour les sociétés cotées. Le rapport Vienot 1 a été

demandé par l‟AFEP, l‟association française des entreprises privées et CNPF, le conseil

national du patronat français. Le groupe de travail présidé par M. Marc Vienot, à

l‟époque président directeur général de la Société générale, devait examiner « dans

49

Rapport Vienot 1, « Le conseil d‟administration des sociétés cotées », 1995

Page 61: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

61

quelles mesures la pratique française du gouvernement des entreprises appelait des

évolutions » et s‟interroger sur « la composition, les attributions et les modes de

fonctionnement des conseils au regard notamment des pratiques étrangères et des

réflexions en cours dans les principaux pays développés ». Le groupe de travail a remis

un rapport en juillet 1995 qui n‟a pas été publié mais a été remis aux membres de deux

associations, a des journalistes et a fait l‟objet de commentaires doctrinaux très

complet50.

Le rapport porte sur 3 parties, la mission et les attributions du conseil (a), sa

composition et son fonctionnement (b).

a) Les recommandations sur la mission et les attributions du conseil

103 - Le comité Vienot considère que le Conseil d‟administration à une grande

responsabilité dans la société, il précise « quelles que soient la composition ou les

modalités d‟organisations du conseil d‟administration, ce dernier est et doit demeurer

une instance collégiale qui représente collectivement l‟ensemble des actionnaires et à

qui s‟impose l‟obligation d‟agir en toutes circonstances dans l‟intérêt social de

l‟entreprise »51. Le Conseil d‟administration apparait alors comme une instance

importante de la société, garant de son intérêt.

Le rapport va préciser également la mission du Conseil d‟administration qui à

selon le comité quatre buts, « il définit la stratégie de l‟entreprise, désigne les

mandataires sociaux chargés de gérer celle-ci dans le cadre de cette stratégie, contrôle la

gestion et veille à la qualité de l‟information fournie aux actionnaires ainsi qu‟aux

marchés financiers à travers les comptes ou à l‟occasion d‟opération très

importantes »52. On constate ici, que le rapport Vienot I reprend les idées fondatrices de

la « Corporate Governance » tant américaines qu‟anglaises qui souhaite avoir un

50

A. Tunc, « Le Rapport Viénot sur le conseil d‟administration des sociétés cotées », Revue internationale

de droit comparé, vol 48 n°3, Juillet-septembre 1996 p.647et s. Pour la rédaction de ce mémoire nous

avons principalement utilisé cette revue pour étudier le rapport Vienot I en raison de l‟absence de

publication du rapport. Les citations sont issues du rapport Vienot I et ont été repris dans l‟article précité. 51

A. Tunc, « Le Rapport Viénot sur le conseil d‟administration des sociétés cotées », préc. cit 52

A. Tunc, « Le Rapport Viénot sur le conseil d‟administration des sociétés cotées », préc. cit

Page 62: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

62

Conseil d‟administration fort et qui place le « management » sous le contrôle du conseil

d‟administration.

104 - De plus, comme dans les Principle ou dans le rapport Cadbury, le rapport

Vienot s‟annonce favorable à l‟instauration de trois comités, identique à ceux des

précédents rapports. « Le comité recommande que chaque conseil se dote au moins d‟un

comité de sélection des administrateurs, d‟un comité des rémunérations et d‟un comité

des comptes et informe les actionnaires, lors de l‟assemblée générale annuelle, de

l‟existence de ces comités, ainsi que du nombre des réunions qu‟ils ont tenues au cours

de l‟année »53. On constate donc que la recommandation du rapport Vienot I pour

l‟instauration de comité fait écho aux recommandations des Principles et du rapport

Cadbury qui recommande l‟instauration de trois comités, « l’audit committee », le

« nominating commitee » et le « compensation committee ». Ces recommandations

ayant été suivies, le rapport COB de 199954 annonçant que la France et le Royaume-Uni

sont les pays européens où le nombre de comités d‟audit était le plus élevé, chaque

comité comprenant en moyenne trois membres. Il faut rajouter que le nombre de

membres par comités, à savoir un minimum de trois avait été également recommandé

par le rapport Vienot I.

105 - Enfin, afin que le Conseil devienne un acteur central de la société, le

rapport Vienot propose de lui laisser la charge de l‟organisation et du fonctionnement de

la société. Chaque organisation devant examiner périodiquement sa composition, son

organisation et son fonctionnement. Cet examen doit porter sur certains points, aucune

règle devant être imposée de manière arbitraire en raison des diversités qu‟ils existent

entre les sociétés. Les décisions devant être prises par le conseil dans le but de

l‟efficience de la société. Des recommandations ont toutefois était proposées par le

rapport Vienot concernant la composition et le fonctionnement du Conseil.

53

A. Tunc, « Le Rapport Viénot sur le conseil d‟administration des sociétés cotées », préc. cit 54

Rapport sur le gouvernement d‟entreprise : évolution récentes en France et à l‟étranger du 1er

septembre 1999, p 3 et 4 concernant l‟instauration de comité d‟audit.

Page 63: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

63

b) Les recommandations sur la composition et le fonctionnement du Conseil

d‟administration

106 - Comme nous l‟avons vu, le rapport Vienot refuse d‟imposer des règles

concernant l‟organisation et le fonctionnement du Conseil, cependant il émet quelques

recommandations concernant notamment la composition du Conseil.

Le comité considère qu‟il serait opportun de nommer des administrateurs

indépendants, « il est souhaitable que chaque conseil d‟une société cotée comporte au

moins deux administrateurs indépendants, étant entendu qu‟il appartient à chaque

conseil de rechercher l‟équilibre optimal de sa composition ». Cette recommandation

fait fortement écho aux propositions américaines et anglaises. Les sociétés ont pris en

compte ces recommandations divers Conseil d‟administration comportant des

administrateurs indépendants. L‟administrateur doit également avoir à sa disposition

une charte décrivant ses obligations telles qu‟agir dans l‟intérêt de la société, son

obligation de pas exercer plus de 5 mandats, être présent aux réunions et aux assemblées

générales et s‟informer.

Concernant l‟information, certains auteurs55 considèrent que le rapport Vienot

montre une certaine réserve contrairement aux Principles of Corporate Governance ou

au rapport Cadbury. En effet, comme nous l‟avons vu précédemment, l‟étude

américaine va beaucoup plus loin en permettant à « tout directeur …. d‟inspecter tous

les documents et toutes les propriétés de la société et de ses filiales nationales ou

étrangères, et cela en personne ou par mandataire. Pour faire respecter ce droit, il peut

au besoin recourir au juge qui statuera rapidement et mettra éventuellement à la charge

de la société les frais de l‟intervention »56. Il est vrai que le rapport Vienot I ne va pas

aussi loin dans sa démarche pour l‟obtention d‟information mais la jurisprudence à

l‟époque octroyait déjà un large pouvoir d‟information aux administrateurs57.

55

A. Tunc, « Le Rapport Viénot sur le conseil d‟administration des sociétés cotées », préc. cit. 56

A. Tunc, « Le Rapport Viénot sur le conseil d‟administration des sociétés cotées », préc. cit. 57

Cass. com. 2 juillet 1985, D. 1986, 951 note Y. Loussouarn

Page 64: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

64

107 - Concernant la séparation des fonctions de président du Conseil et de

direction générale, le rapport Vienot I se montre assez frileux contrairement à ses

homologues anglo-saxons. Cela peut s‟expliquer par l‟existence dans notre droit

français des sociétés de structure dualiste, différenciant le contrôle de la direction depuis

1966. Le rapport Vienot I va être complété quelques temps après par le rapport Vienot

II, sorte de synthèse intitulé « Comité sur le gouvernement d‟entreprise ».

2) Le rapport Vienot II, Comité sur le gouvernement d‟entreprise

108 - Le rapport Vienot II fait suite au rapport Vienot I, 4 ans après. Ce rapport

a été à l‟initiative de l‟AFEP et du MEDEF et a été rendu en 1999. L‟objectif du rapport

est d‟analyser une nouvelle fois les pratiques françaises du Gouvernement d‟Entreprise

et d‟apporter des recommandations pour les sociétés. Le rapport est comme son

prédécesseur composé de trois parties sans reprendre le plan initial. Pour plus de

cohérence, nous allons analyser les recommandations du rapport Vienot II selon le plan

établi pour ce rapport, la dissociation des fonctions de président et de directeur général

(a), la publicité des rémunérations (b) et le fonctionnement et la composition du Conseil

(c).

a) Les recommandations concernant la dissociation des pouvoirs dans la société

109 - La dissociation des fonctions de président et de directeur général est

l‟une des mesures phares des rapports américains et britanniques pour permettre une

gestion efficace de la société. Le rapport Vienot I s‟est montré plus prudent concernant

cette dissociation, prudence que le rapport Vienot II écarte car il consacre sa première

partie à ce sujet.

Le rapport Vienot II recommande l‟introduction en droit français d‟une plus

grande flexibilité dans la formule unitaire choisie, en laissant comme cela est déjà le cas

au Royaume- Uni, le choix au Conseil dans l‟organisation à prendre. Certains vont

considérer que le rapport Vienot II s‟éloigne des rapports originels sur la « Corporate

Page 65: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

65

Governance » mais cette idée revient à nier le concept même de la « Corporate

Governance ». La « Corporate Governance » à pour objectif d‟améliorer l‟organisation

de la société afin que celle-ci gagne en efficacité. A l‟époque des Principles aux Etats-

Unis, les sociétés n‟étais pas dirigées par les actionnaires ou administrateurs mais par le

« management », management qui si on reprend les propos prémonitoire de Smith

n‟avait pour seule ambition que sa propre richesse au détriment de celle de la société.

Par conséquent, un renversement du pouvoir devait être envisagé pour rendre le pouvoir

aux propriétaires de la société et permettre à la société d‟agir efficacement dans l‟intérêt

commun des actionnaires. La recommandation du rapport Vienot II qui souhaite laisser

au Conseil d‟administration le choix dans la répartition des pouvoirs58, rejoint

pleinement les idéaux de la « Corporate Governance », en laissant au Conseil

d‟administration le choix de la solution qui apparait pour la société la plus efficace.

Imposé une règle dualiste pour des sociétés qui n‟en ont pas besoin risque d‟être

contreproductif, le choix laissé étant celui de l‟efficacité. Le rapport Vienot II, propose

également des recommandations pour plus de transparence.

b) Les recommandations pour plus de transparence

110 - Aux Royaume-Uni, le rapport Greebury qui est venu compléter le rapport

Cadbury en juillet 1995, impose que l‟information sur les rémunérations des dirigeants

des sociétés cotées figure dans le rapport annuel. Aux Etats- Unis, la rémunération se

trouve dans le document de convocation des assemblées. La volonté d‟une transparence

des rémunérations des dirigeants étaient comme nous l‟avons vu mentionné dans les

Principles of Corporate Governance et dans le rapport Cadbury.

Le rapport Vienot I préconisait comme les autres rapports, l‟instauration d‟un

comité de contrôle des rémunérations. Le rapport Vienot II va plus loin en

recommandant l‟instauration comme aux Etats-Unis ou au Royaume-Uni d‟un chapitre

concernant la rémunération des dirigeants fait en concours avec le comité des

58

Pour plus d‟information sur les recommandations proposées par le Rapport Vienot II voir le rapport

Vienot II p. 8, consultable sur le site www.ecgi.org

Page 66: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

66

rémunérations afin que les actionnaires aient une information sur le cout de la direction

générale de la société et de la politique de rémunération, ainsi que sur les jetons de

présences.

On constate ici, que le rapport Vienot II, reprend les recommandations et les

pratiques des sociétés aux Etats-Unis et au Royaume-Uni avec cependant une légère

limite dû à l‟approche particulière qu‟on les français avec l‟argent.

c) Les recommandations sur la composition et le fonctionnement du Conseil

111 - Le rapport Vienot II propose plusieurs recommandations sur la

composition, le fonctionnement du Conseil d‟administration et des comités. Le rapport

est extrêmement exhaustif proposant 19 recommandations très précises. Parmi les plus

symbolique, notons la recommandation 22 qui revient sur la définition des

administrateurs indépendant et la simplifie. Désormais, un administrateur est

« indépendant de la direction de la société lorsqu‟il n‟entretient aucune relation de

quelque nature que ce soit avec la société ou son groupe qui puisse compromettre

l‟exercice de sa liberté de jugement »59. Le nombre d‟administrateur devant également

être augmenté passant de deux minimums selon le rapport Vienot I à 1/3 minimum

recommandé par le comité Vienot II. Le rapport Vienot II reprend les recommandations

du rapport Vienot I traitant du cumul de mandat des administrateurs, le nombre

maximum restant de 5 mandats.

112 - Les rapports Vienot apparaissent comme de véritable code de « bonne

gouvernance » à l‟image des codes anglo-saxons. Après une étude approfondie, on ne

peut que constater l‟emprunt, l‟influence des codes anglo-saxons sur l‟étude française.

Même s‟il est vrai que le rapport Vienot I s‟est montré assez frileux concernant la mise

en œuvre de ses recommandations, en ne faisant appel qu‟a la bonne volonté des

dirigeants, contrairement au rapport Principles of Corporate Governance ou encore le

59

Rapport Vienot II, préc. cit.

Page 67: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

67

rapport Cadbury qui vise de manière très précise le législateur, le juge et les sociétés ou

encore toutes les organisations concernés. Les sociétés cotées anglaise ont du très

rapidement se conformer au code ou alors expliquer leur déviation. Le rapport Vienot II

se montre plus audacieux visant à plusieurs reprises le législateur, les sociétés ayant

pour la plupart adopté si ce n‟est toutes les recommandations, les plus importantes. Les

rapports de normes privés étant de plus en plus nombreux et appliqués.

B) L‟existence de nombreuses autres normes privées

113 - Plusieurs organisations ont elles aussi élaboré des recommandations en

matière de gouvernement d‟entreprise. L‟association française de gestion financière

(AFG) publie depuis 1998 des recommandations sur le gouvernement d‟entreprise

régulièrement mis à jour afin de guider les membres de l‟association, tels que le rapport

201160 de recommandation sur la « Corporate Governance » dont le but d‟assurer une

effectivité de la société. Parmi les dispositions proposées on peut citer la séparation des

pouvoirs, l‟existence de comité du conseil, audit, sélection, rémunération, et l‟existence

d‟administrateur privé pour ne citer que les points importants que nous avons traité.

L‟association nationale des sociétés par action (ANSA), a aussi rendu un rapport sur la

bonne gouvernance en 1999.

114 - Le concept de « Corporate Governance » a donc été assimilé par les

nombreuses organisations concernées par la bonne gouvernance des entreprises. Chaque

année de nouvelles recommandations et conseils étant offerts aux membres des

organisations. Le dernier rapport important sur la « Corporate Governance » en raison

sa large diffusion est le rapport du groupe de travail présidé par Daniel Boutin à la

demande de l‟AFEP-AGREF et du MEDEF. Ce rapport intitulé « Pour un meilleur

gouvernement d‟entreprise », propose un bilan des dix dernières années et propose des

60

Recommandation sur le gouvernement d‟entreprise, janvier 2011, AFG. Pour plus d‟information sur

ces rapports, tous les documents et recommandations sur le gouvernement d‟entreprise sont en accès libre

sur le site www.afg.asso.fr

Page 68: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

68

recommandations afin de rendre les objectifs pour une meilleure gouvernance

réalisable. Notons que le rapport s‟attaque également aux normes et pratiques

comptables.

115 - La France dispose donc d‟un corps de règle très développé en matière de

gouvernement d‟entreprise, favorisant l‟efficacité et la transparence. Même si ces

normes ne sont pas édictées par l‟autorité étatique, elles n‟en demeurent pas moins

efficaces et respectées par les membres des organisations et les personnes visées par ces

rapports. Le bulletin de la Commission des opérations de bourse (COB) en 199961,

prouve que 4 ans après le rapport Vienot I, les sociétés françaises ont pris en compte les

recommandations.

Par exemple, 73% des sociétés cotées au CAC 40 avaient mis en place un comité

d‟audit et 83% des sociétés du CAC 40 ont mis en place au moins un comité. Le

législateur est intervenu pour récupérer le monopole de l‟édiction de norme. Il a

demandé au sénateur Marini un rapport dans le but de permettre une modernisation du

droit des sociétés et préparer des réformes législatives. Le rapport sans vraiment traiter

de la « Corporate Governance », prend partie pour plusieurs orientations développées

dans le rapport Vienot.

Paragraphe 2 : L‟intégration de la « Corporate Governance » par le législateur

116 - Le législateur français à fait entrer dans notre droit français des sociétés,

le « Corporate Governance », cette intégration s‟est faite tardivement par rapport aux

normes privées, les concepts de la « Corporate Governance » étant majoritairement

rentrés dans notre droit français par la loi sur les nouvelles régulations économique en

2001 (A). La « Corporate Governance » est donc pleinement entrée dans notre droit

français aujourd‟hui et constitue un exemple de circulation du droit (B).

61

Bulletin COB n°338 Septembre 1999, les documents sont disponibles en accès libre sur le site internet

de l‟autorité des marchés financiers, www.amf-france.org

Page 69: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

69

A) L‟intégration de la « Corporate Governance » par la loi sur les nouvelles

régulations économiques

117 - La loi NRE du 15 mai 200162

sur les nouvelles régulations économiques

est le texte qui reprend de manière la plus évidente les idées de la « Corporate

Governance ». Cette loi démontre la volonté de l‟Etat de récupérer le processus de

production de normes et de répondre aux besoins des entreprises concernant le

gouvernement d‟entreprise, comme en témoigne l‟objectif de la loi, « Face à la

mondialisation de l‟économie et aux réalités du capitalisme d‟aujourd‟hui, l‟Etat doit se

doter d‟instruments de régulations efficaces afin d‟assurer … un fonctionnement plus

équilibré et transparent des organes dirigeant des entreprises ». La loi NRE va permettre

une modification du fonctionnement des sociétés selon les principes portés par la

« Corporate Governance ».

118 - La loi NRE va permettre une meilleure définition des pouvoirs du

Conseil d‟administration. Le nouvel article L 225-35 du code de commerce dispose,

« Le conseil d'administration détermine les orientations de l'activité de la société et

veille à leur mise en œuvre. Sous réserve des pouvoirs expressément attribués aux

assemblées d'actionnaires et dans la limite de l'objet social, il se saisit de toute question

intéressant la bonne marche de la société et règle par ses délibérations les affaires qui la

concernent…Le conseil d'administration procède aux contrôles et vérifications qu'il

juge opportuns. Le président ou le directeur général de la société est tenu de

communiquer à chaque administrateur tous les documents et informations nécessaires à

l'accomplissement de sa mission ». Le Conseil administration apparait donc par la loi

comme le pivot centrale de l‟entreprise, la vie de la société lui appartenant. Le nombre

d‟administrateur passant dorénavant de 24 membres à 18.

119 - La loi NRE reprend également, un des principes fondamentaux de la

« Corporate Covernance », la dissociation des fonctions de président et de directeur

général. Le nouvel article L225-51-1 étant rédigé ainsi, « La direction générale de la

Page 70: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

70

société est assumée, sous sa responsabilité, soit par le président du conseil

d'administration, soit par une autre personne physique nommée par le conseil

d'administration et portant le titre de directeur général.

Dans les conditions définies par les statuts, le conseil d'administration choisit entre les

deux modalités d'exercice de la direction générale visées au premier alinéa. Les

actionnaires et les tiers sont informés de ce choix dans des conditions définies par décret

en Conseil d'Etat.

Lorsque la direction générale de la société est assumée par le président du conseil

d'administration, les dispositions de la présente sous-section relatives au directeur

général lui sont applicables ». Il revient donc au CA de choisir entre une dissociation du

pouvoir ou non, comme il était préconisé dans le rapport Vienot II, les actionnaires de la

société étant les plus à même de savoir ce qui était bon pour la société. Ce choix devant

s‟opérer selon les conditions prévues par les statuts. On assiste donc à une convergence

du nouveau droit des sociétés vers les principes de la « Corporate Governance ».

120 - Cette convergence ne s‟arrête pas seulement aux missions du Conseil

d‟administration, la loi NRE a également modifié les règles de limitation du cumul de

mandat passant de 8 pour les SA ayant leurs sièges sur le territoire métropolitain et de 5

maximum pour les sociétés dont le capital est détenu à concurrence de 20% au moins

par une société dont il est déjà administrateur. La loi rejoint le rapport Vienot II, en

imposant une limite maximum de cinq mandats avec des conditions nouvelles. L‟article

225-21 nouveau disposant, « Une personne physique ne peut exercer simultanément

plus de cinq mandats d'administrateur de sociétés anonymes ayant leur siège sur le

territoire français.

Par dérogation aux dispositions ci-dessus, ne sont pas pris en compte les mandats

d'administrateur dans les sociétés qui sont contrôlées, au sens de l'article L. 233-16, par

la société dans laquelle est exercé un mandat au titre du premier alinéa, dès lors que les

titres des sociétés contrôlées ne sont pas admis aux négociations sur un marché

réglementé. Cette dérogation n'est pas applicable au mandat de président. ». La loi

renforce également le pouvoir des actionnaires minoritaires en leurs autorisant certains

droits63. Cette nouvelle règle va dans le sens d‟un renforcement du pouvoir du Conseil

Page 71: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

71

d‟administration, chaque associé qu‟importe le montant de détention du capital doit

avoir un droit de s‟exprimer et de participer à la bonne gouvernance de l‟entreprise.

121 - Enfin, la loi NRE impose une certaine transparence concernant la

rémunération et les avantages versés, transparence qui est l‟un des principes

fondamentaux de la « Corporate Covernance » et qui est appliqué aux Etats-Unis et au

Royaume-Uni. Cette transparence va passer par l‟insertion des rémunérations totales et

des avantages de toute nature versés à chaque mandataire social dans le rapport présenté

à l‟assemblée générale comme le prévoit l‟article L 225-102-1 nouveau du code de

commerce, qui dispose, « Le rapport visé à l'article L. 225-102 rend compte de la

rémunération totale et des avantages de toute nature versés, durant l'exercice, à chaque

mandataire social. Il indique également le montant des rémunérations et des avantages

de toute nature que chacun de ces mandataires a reçu durant l'exercice de la part des

sociétés contrôlées au sens de l'article L. 233-16.Il comprend également la liste de

l'ensemble des mandats et fonctions exercés dans toute société par chacun de ces

mandataires durant l'exercice. ».

Le rapport doit également comporter la liste de l‟ensemble des mandats et

fonction exercés dans toute société par chacun de ces mandataires durant l‟exercice. Un

autre rapport a vu le jour, concernant les opérations réalisées par les mandataires en

matière d‟options de souscription ou d‟achats d‟action. Les actionnaires devant

connaitre le nombre, la date d‟échéance et le montant des stock-options réalisées au

cours de l‟année dans la société ou ses filiales.

63

Article L225-231 du code de commerce, « Une association répondant aux conditions fixées à l'article L.

225-120, ainsi que un ou plusieurs actionnaires représentant au moins 5 % du capital social, soit

individuellement, soit en se groupant sous quelque forme que ce soit, peuvent poser par écrit au président

du conseil d'administration ou au directoire des questions sur une ou plusieurs opérations de gestion de la

société, ainsi que, le cas échéant, des sociétés qu'elle contrôle au sens de l'article L. 233-3. Dans ce

dernier cas, la demande doit être appréciée au regard de l'intérêt du groupe. La réponse doit être

communiquée aux commissaires aux comptes.

« A défaut de réponse dans un délai d'un mois ou à défaut de communication d'éléments de réponse

satisfaisants, ces actionnaires peuvent demander en référé la désignation d'un ou plusieurs experts chargés

de présenter un rapport sur une ou plusieurs opérations de gestion.

« Le ministère public, le comité d'entreprise et, dans les sociétés faisant publiquement appel à l'épargne,

la Commission des opérations de bourse peuvent également demander en référé la désignation d'un ou

plusieurs experts chargés de présenter un rapport sur une ou plusieurs opérations de gestion. »

Page 72: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

72

122 - La loi NRE apparait comme une réponse législative au concept de

« Corporate Governance ». Le législateur reprend en leur donnant une force

contraignante les principes déjà proposés par les acteurs privés. Une évidente

convergente apparait dans la loi NRE même si de nombreux point n‟ont pas été pris en

compte par la loi tels que les administrateurs indépendant. Les codes de conduite et les

rapports de « Corporate Governance » comblant les lacunes de la loi, la « Corporate

Governance » étant pleinement introduit dans le droit français.

B) La « Corporate Governance » aujourd‟hui

123 - Aujourd‟hui le concept de « bonne gouvernance », s‟est largement

répandu en France, les sociétés l‟ayant complètement intégré. De nombreux rapports

et recommandations existent, proposés par différentes organisations et ayant vocation

à s‟appliquer aux membres. L‟ordonnance de 200864 à l„article L823-19 du code de

commerce à imposé aux sociétés cotées l‟instauration d‟un comité d‟audit chargé

d‟assurer le suivi dans les différents domaines tels que l‟information financière, le

contrôle interne et gestion des risques, le contrôle légal des comptes annuels et

l‟indépendance des commissaires aux comptes. Cependant aucune sanction n‟est

prévue en cas de manquement, la responsabilité des membres du conseil devant être

mis en œuvre si l‟absence s‟avère porter préjudice aux actionnaires.

124 - Concernant les administrateurs indépendants, la loi NRE ne précise rien

et encore aujourd‟hui aucune loi n‟est venue imposer la présence de mandataire

indépendant. Cependant, la demande d‟administrateur indépendant se retrouve dans de

nombreux codes et rapports établis par les organisations représentatives des sociétés.

En effet, le code Afep-Medef à l‟article 8.2 recommande que la part des

administrateurs indépendants soit de la moitié des membres du Conseil administration,

le code défini également ce qu‟est un administrateur indépendant et les critères de

64 Ord. 2008-1278 du 8 décembre 2008

Page 73: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

73

qualification. Cet exemple de recommandation, que l‟on retrouve dans le code

américain et britannique montre l‟insertion dans notre droit de ce concept. De plus,

même si le législateur n‟a pas érigé en principe la présence d‟administrateur

indépendant, les ouvrages relatifs au droit des sociétés tels que le mémento Francis

Lefebvre renvoi directement au code de bonne gouvernance, les codes ayant trouvé

toutes leurs places dans le droit français des sociétés65.

125 - On peut citer également à titre d‟exemple, les deux autres comités

préconisés par les rapports anglo-saxons et français. La loi ne mentionne pas la

présence de comité des rémunérations et des nominations contrairement au comité

d‟audit. Le code Afep-Medef, recommande la mise en place de ces comités de manière

exhaustif, la composition et la mission y étant décrit. La loi du 3 juillet 200866, vient

apporter un légitimité supplémentaire à ces codes, la loi prévoyant que lorsque la

société se réfère volontairement à un code de gouvernement d‟entreprise élaboré par

les organisations représentatives des entreprises, comme le code Afep-Medef que nous

avons vu, la société doit respecter le code ou dans son rapport67

, préciser les

dispositions du code qui ont été écartées et les raisons pour lesquelles elles l‟ont été. Si

la société ne se réfère pas à un code, le rapport doit indiquer les règles retenues en

complément des exigences requises par la loi et expliquer les raisons pour lesquelles la

société a décidé de ne pas appliquer le code de gouvernement d‟entreprise.

Aujourd‟hui de nombreuses sociétés appliquent les principes de bonne gouvernance.

126 - Le droit français des sociétés à donc été très perméable au concept de

« Corporate Governance ». L‟assimilation par le droit s‟étant opérée tout d‟abord par

les acteurs privés. Les rapports, études et codes témoignant incontestablement d‟une

convergence des idées. Convergence que l‟on retrouve également dans la loi. Ce

mouvement d‟échange entre les droits témoigne donc de l‟existence encore

aujourd‟hui d‟une circulation des droits, cette circulation n‟étant pas opéré par la

conquête mais par une volonté des Etats d‟obtenir un droit concurrentiel à offrir aux

65

Mémento Francis Lefebvre, Société commerciale, 2011, n°39370, p.517 et s. 66

Loi n° 2008-649 du 3 juillet 2008, portant adaptation du droit des sociétés au droit communautaire 67

Rapport du président du conseil d‟administration ou du conseil de surveillance.

Page 74: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

74

sociétés. La globalisation de l‟économie pousse les législateurs à répondre à la

demande des sociétés, à s‟inspirer des solutions externes apparaissant comme les plus

opportunes, afin de rester concurrentiel dans une économie globalisée.

Page 75: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

75

CHAPITRE 2 : UNE CONVERGENCE ENTRE LES DROITS NES D’UNE

VOLONTE CONCURRENTIELLE

127 - « Il est évident qu‟une approche strictement nationaliste du droit des

sociétés commerciales n‟a plus de sens aujourd‟hui. Il est, en effet, difficile d‟imaginer

que l‟on puisse avoir une certaine conception de la société à Paris, une autre à Londres,

à New York, à Tokyo, à Mexico, au Caire, etc. Les sociétés financières, industrielles,

commerciales ou de prestations de services ne se ressemblent-elles pas singulièrement

au-delà de toutes les frontières ? Seuls, peut-être, sont différents certains aspects de leur

organisation technique ou l‟importance qu‟elles accordent plus particulièrement à tel ou

tel intérêt catégoriel. Cette similarité est encore accentuée, pour certaines d‟entre elles,

par le caractère international ou multinational de leurs organisations et de leurs activités.

Par le fait, aussi, que leurs actions sont cotées dans différents pays. Ne serait-il pas

étrange que puissent exister dans différents pays des notions très étrangères de la société

commerciale, voire incompatibles alors qu‟elles pourraient concerner, par exemple, les

filiales locales d‟un même groupe multinational ? En fait, la société commerciale est

fondamentalement la même chose dans tous les pays industriels. Il est donc, là aussi,

très nécessaire d‟avoir une conception et une notion claires de la société qui ne soient ni

trop étrangères d‟un pays à l‟autre et, encore moins, contradictoires »68

. Cette citation

de J. Pailluseau en 1984 montre déjà l‟importance et la nécessité d‟une certaines

convergence entre les différents droits des sociétés.

Cette convergence du droit des sociétés que l‟on connait aujourd‟hui nait de la

volonté des Etats de proposer un droit de sociétés attractif pour les sociétés (Section 1).

Les Etats proposent leur produit juridique aux sociétés qu‟elles mettent en concurrence,

les Etats se livrant également un concurrence, on peut alors à l‟image du rapprochement

entre le droit et le produit, parler d‟un marché du droit des sociétés (Section 2).

68 J. Paillusseau, « Les fondements du droit moderne des sociétés », JCP G II, 14193, 1984.

Page 76: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

76

SECTION 1 : LE TRANSFERT ENTRE LES DROITS DES SOCIETES NES D‟UNE

VOLONTE CONCURRENTIELLE

128 - La « Corporate Governance » est l‟exemple parfait d‟échange entre les

droits, d‟une convergence entre différents droits nationaux. La réception d‟un droit

étranger peut se faire de manière globale ou parcellaire. Les échanges entre les droits

ont une multiplicité d‟origine, différents processus d‟interactions entre les droits

(Paragraphe 1) existant et étant identifié. Concernant l‟indéniable convergence qui

existe entre les différents droits des sociétés, la principale explication étant celle de la

transplantation (Paragraphe 2), transplantation en raison d‟une concurrence entre les

différents droits nationaux.

Paragraphe 1 : L‟existence de différents processus d'interaction entre les droits

129 - Il existe différentes pratiques, processus pour relier les systèmes

juridiques entre eux et favoriser les échanges entre les droits. Les deux principales et les

plus largement répandues sont l‟harmonisation et l‟internormativité.

Le processus d‟harmonisation du droit peut être défini comme un processus de

rapprochement entre différentes législations. Les phénomènes les plus connus

d‟harmonisation, sont ceux européens par le biais de directive ou de règlement qui

harmonise les différentes législations nationales en laissant une marge de manœuvre aux

Etats. L‟harmonisation implique une relation de type «hiérarchique entre le haut (le

niveau international, régional ou mondial) et le bas (niveau national)»69

. Le processus

d‟harmonisation ne touche pas seulement l‟Union européenne, il touche également

d‟autres sources, mondiales ou régionales. En l‟espèce, la convergence entre le droit des

sociétés américain et français ne peut s‟expliquer par le phénomène d‟harmonisation,

aucune relation hiérarchique existant entre ces deux pays. La convergence entre les

69

M. Delmas-Marty, «Le pluralisme ordonné et les interactions entre ensemble juridique», Dalloz 2006,

p. 951 et s.

Page 77: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

77

droits des sociétés pouvant également avoir lieu par le biais de l‟harmonisation

notamment en matière communautaire.

La coordination est un autre processus permettant un lien entre les normes. Le

processus de coordination s‟apparente à celui de «l‟internormativité», qui peut être

définie comme le rapprochement et les relations entre des ensembles normatifs non

hiérarchisés entre eux ou non. Les relations pouvant s‟établir d‟un niveau à l‟autre par

imitation ou par renvoi. Une norme française pouvant alors se retrouver dans une

norme étrangère. La coopération a lieu également en présence communautaire.

130 - L‟intégration de normes extérieures en absence de toute coordination ou

harmonisation peut s‟expliquer par le phénomène de transplantation. La transplantation

entre les droits expliquant la convergence entre les droits des sociétés.

Paragraphe 2 : L‟application de la transplantation en droit des sociétés

131 - Le mécanisme de la transplantation explique la circulation entre les droits

quand ceux-ci sont l‟objet d‟une concurrence (B), la transplantation doit au préalable

être définie.

A) Définition de la transplantation

132 - La transplantation, ou greffe est un terme médical qui définie l‟opération

chirurgicale par laquelle on greffe un organe étranger dans le corps du patient. En droit,

le processus de transplantation est un phénomène bien connu des comparatistes. Il

correspond à la réception d‟un droit dans un système juridique. De nombreux auteurs

considèrent que des corps entiers de règles peuvent se déplacer d‟un système juridique à

l‟autre.

133 - La transplantation entre les droits a ces dernières années trouvé un

nouveau souffle en raison de l‟ouverture des frontières liées à la libéralisation des

échanges économiques et le développement de nouvelle technologie. La globalisation

Page 78: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

78

comme nous l‟avons vu par la perméabilité des frontières, a permis de favoriser la

concurrence législative.

La compétition législative peut conduire à une coordination spontanée par

échange croisé, mais elle peut également se traduire par une transplantation des droits, «

imposées par contrainte ... ou encore acceptées, voire recherchées au profit, d‟un

système réputé plus prestigieux »70

. La transplantation est entre les droits des sociétés

est donc une conséquence de la concurrence législative.

B) La transplantation conséquence d‟une concurrence législative

134 - La globalisation a exacerbé les phénomènes de compétition juridique.

Les acteurs économiques qui sont localisés dans un Etat disposant d‟une loi et d‟outil

juridique ont tendances à se référer à ces outils et à appliquer la loi de l‟Etat. Les acteurs

économiques peuvent également lorsqu‟ils ont connaissance, vouloir bénéficier d‟un

droit différent, étranger qu‟il trouve plus avantageux ou ayant moins d‟inconvénient que

le leurs. En effet, les acteurs économiques vont vouloir choisir leur droit applicable, un

droit qui correspond le plus à leurs besoins. De nombreuses controverses existent,

menées par les auteurs refusant de croire en l‟impact du droit sur la croissance. Il est

vrai que démontrer l‟impact du droit sur l‟économie d‟un pays n‟est pas chose facile,

encore moins pour les détracteur de l‟analyse économique du droit mais, le droit à un

impact sur le choix du rattachement des entreprises71

. Le droit n‟est peut être pas la

raison principale dans le choix des acteurs économiques mais il en fait partie intégrante

dans le choix de rattachement.

135 - Les acteurs économiques bénéficient d‟une facilité de mouvement, le

monde paraissant de moins en moins grand, le transfert de siège social, le rattachement

de la société dans un autre Etat étant facilité, les sociétés vont pouvoir choisir la loi

applicable et ce choix n‟est pas sans conséquence. L‟Etat choisi, qui apparait attractif

70

M. Delmas-Marty, « Le pluralisme ordonné et les interactions entre ensemble juridique », préc. cit. 71

Y. Dezalay, Marchands de droit

Page 79: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

79

pour l‟entreprise va bénéficier des investissements apportés par l‟entreprise. L‟Etat doit

donc pouvoir offrir aux acteurs économiques un droit efficace, attractif, qui attire les

acteurs économiques.

Le droit des sociétés va être un enjeu pour la croissance de l‟économie, par

l‟attrait qu‟il provoque sur les sociétés étrangères ou sur les investissements étrangers.

La volonté des Etats d‟obtenir un droit attractif, et la mise en concurrence72

par les

acteurs économiques va provoquer cette convergence entre les différents droits des

sociétés par le mécanisme de la transplantation. Ce mécanisme de transplantation en

présence de concurrence législative a été démontré de nombreuses fois, notamment par

Anthony Ogus, qui explique la transplantation en présence de concurrence, « Le

raisonnement précédent semblerait mener à la prédiction que, du fait de la concurrence,

il y aura certaines convergences des droits nationaux, par l'État réformateur soit en

acceptant une "transplantation" d'un autre ou en imitant ses principes juridiques.

Satisfaire la demande des acteurs du marché par ce genre d'action est peu chère en

termes d'information et de couts administratifs »73

136 - Les Etats vont récupérer, assimiler, des droits ou même des simples

règles plus attractives, plus concurrentes, cela étant pour eux sans contrainte de cout ou

d‟innovation. La règle de droit ayant déjà fait ses preuves. La convergence entre les

droits s‟explique alors par une raison concurrentielle, le droit étant « l‟un des facteurs de

compétitivité »74

, principe confirmé par le vice président délégué du MEDEF. Les Etats

souhaitant attirer les flux des acteurs économiques vont donc proposer des produits

juridiques attractifs, concurrentiels, l‟existence d‟un marché du droit des sociétés

pouvant être démontré.

72

Table ronde, « Comment créer un espace juridique européen compétitif face à la puissance anglo-

saxonne ? », Jean-Bernard Thomas, « les droits sont des produits juridiques en concurrence », LPA 13

juillet 2000, p. 26 et s. 73

A. Ogus, « compétition between national legal systems : a contribution of economic analysis to

comparative law », préc. cit. 74

Table ronde, « comment les entreprises intègrent-elles désormais dans leurs stratégie les contextes

juridiques dans lesquels elles évoluent » LPA 13 juillet 2000, n°139, p.51et s.

Page 80: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

80

SECTION 2 : L‟EXISTENCE D‟UN MARCHE DU DROIT DES SOCIETES

137 - Le marché est souvent considéré comme une création invisible et

indestructible, « le marché libéral … est un fait, de ces faits dont on ne dispose pas, de

l‟existence desquels on peut éventuellement se réjouir mais contre lesquels il ne sert à

rien de maugréer ou de vitupérer »75

. L‟auteur continue en ajoutant que le marché est un

modèle, une invention qui entretient une relation particulière avec les faits, les faits

servant le modèle. La notion de marché doit d‟abord être définie (Paragraphe 1) avant

de voir si le modèle du marché peut s‟appliquer au droit des sociétés (Paragraphe 2), les

faits en présence décrivant le modèle du marché.

Paragraphe 1 : La définition de la notion de marché

138 - Le concept de marché est un concept ambigu et multiple76

. En effet, il

n‟existe pas une seule définition du marché tout comme il n‟existe pas un seul marché.

Il convient d‟essayer de définir la notion théorique du marché (A), et les conditions de

son existence (B) avant de tenter de l‟appliquer au produit droit des sociétés.

A) Une tentative de définition

139 - Le marché se défini de manière générale comme le lieu de rencontre de

l‟offre et de la demande. Cette définition étant celle la plus souvent utilisée. Le marché

est également étroitement lié à la notion de produit. Le marché étant le lieu de rencontre

entre l‟offre et la demande, offre et demande qui concerne des biens et services, des

produits. Le droit communautaire liant les deux, « le marché de produit comprend tous

les produits et/ou service que le consommateur considère comme interchangeable ou

75

Marie-Anne Frisson-Roche, « Le modèle du marché », Archive philosophique du droit, n°40, p. 286 et 76

« Maintes confusion provient de ce que, d‟une discipline à l‟autre- et, à l‟intérieur d‟une discipline,

d‟une école ou d‟un courant à l‟autre- on ne désigne pas la même chose par le terme de marché »,

Critique de la raison juridique

Page 81: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

81

substituable en raison de leurs caractéristiques, de leurs prix et de l‟usage auquel ils sont

destinés ».

La jurisprudence a également tenté de définir le marché la Cour d‟appel de Paris

dans un arrêt du 17 juin 1992, défini le marché « comme le lieu théorique ou se

confrontent l‟offre et la demande de produit ou de services qui sont considérés par les

acheteurs ou les utilisateurs comme substituables entre eux mais non substituables aux

autres biens et services offerts »77

. Les différentes définitions font ressortir des

éléments composant le marché et nécessaire à son existence.

B) Les conditions d‟existence du marché

140 - Le marché est un modèle d‟organisation des relations. Le marché est une

conception théorique, il n‟est pas physiquement tangible, c‟est un mécanisme d‟échange

abstrait, qui nécessite la présence de différents acteurs.

Pour que le modèle du marché existe, il est nécessaire que coexistent une offre et

une demande dont la libre confrontation porte sur un produit ou un service

régulièrement mis sur le marché. La notion d‟offre englobe les producteurs et les

distributeurs du produit. La demande elle, se compose de toute les personnes qui

exercent une action dans l‟acquisition du produit, tels que les consommateurs. Le

produit lui correspond aux résultats d‟une création qui peut être mis en place sur le

marché.

141 - Le marché est étroitement lié à l‟économie et dans la logique et la

conception des juristes ou tout simplement des Hommes, le marché n‟existe que pour

des biens et services marchands. Le modèle du marché touche bien d‟autres domaines,

selon Marie-Anne Frisson-Roche le marché « dévore proprement tout sur son passage

… le marché concurrentiel des biens et des services est une sorte de pieuvre théorique

qui s‟étend progressivement pour recouvrir de son modèle d‟autres marchés

77

Cour d‟appel de Paris, 17 juin 1992, BOCCRF n°13/92

Page 82: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

82

environnants mais spécifiques, annexant également des objets jusqu‟ici hors de son

atteinte »78

, tels que le droit. Le modèle du marché des biens et service peut donc

s‟appliquer au phénomène du droit, même si cela est très controversé.

Paragraphe 2 : Son application controversée au produit droit des sociétés

142 - Les phénomènes nouveaux que nous avons vu précédemment va

permettre d‟appliquer le modèle du marché au phénomène touchant le droit des

sociétés, l‟existence des conditions d‟application du marché étant remplis (A), apparait

alors un véritable marché du droit des sociétés (B).

A) L‟existence des conditions d‟application du marché

143 - Un marché se compose d‟une offre et d‟une demande qui coexistent,

concernant un produit déterminé et substituable. L‟offre est caractérisée par le

producteur du produit, la demande par le consommateur, reste le produit.

144 - Un produit au sens du marché, est le résultat d‟une création, qui répond à

une demande. Ce produit à un cout qui est prêt à être payé par le consommateur. Le

droit des sociétés à un cout comme nous l‟avons vu. Ce cout est l‟attribution par le

consommateur de ce droit, un cout fiscal et un cout d‟immatriculation. Le droit des

sociétés est également substituable, les consommateurs pouvant choisir le « produit »

droit qui répond à leur demande. La qualification du droit comme un produit se retrouve

dans de nombreux articles79

, et rapport officiel tels que le rapport sur l‟attractivité

international du droit français. Le droit des sociétés est donc assimilable à un produit,

les principaux critères du produit se retrouvant dans le droit des sociétés.

78

Marie-Anne Frsson-Roche, Le modèle du march é, prec. cit 79

Horatia Muir Watt, concurrence d‟ordres juridiques et conflits de lois de droit privé, prec cit. « Produit

législatif

Page 83: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

83

145 - La demande est matérialisée par les acteurs économiques, les entreprises.

Le droit et notamment le droit des sociétés à un impact pour les entreprises80

, les

entreprises ont compris que le droit est un avantage dans la réalisation de leurs objectifs.

De plus, le droit des sociétés régente la vie des entreprises, les entreprises sont

obligatoirement soumises à un droit, par conséquent quand un choix leur est offert, les

entreprises par rationalité, comme elles ont besoins du droit vont consommer le droit

des sociétés qui est le plus efficace à leur yeux.

146 - Les producteurs du produit sont les offreurs sur le marché et s‟apparente

en l‟espèce à tous les producteurs de droit. Concernant le droit des sociétés, les

producteurs de droit sont les Etats, les organisations internationales, ou encore les

opérateurs privés. Les Etats offrent leurs droits des sociétés aux Entreprises. Les Etats

n‟étant pas perdant dans l‟histoire, comme nous l‟avons vu le choix du droit va avoir un

impact tant sur l‟entreprise que sur l‟Etat, cela va être source de richesse pour ce dernier

et également une source de rayonnement international et de prestige. Les conditions

d‟existence d‟un marché sont bien présentes concernant le domaine du droit des

sociétés, l‟existence d‟un marché du droit des sociétés apparait alors même si cela reste

encore pour certains difficilement envisageable.

B) L‟existence d‟un marché du droit des sociétés

147 - Le droit des sociétés et plus particulièrement le droit en général à du mal

à être considéré comme un produit qui peut s‟échanger, comme étant l‟objet d‟un

marché. Cependant, les changements qui ont lieu dans le monde, ont profondément

bouleversé les rapports entre le droit et le marché, l‟économie, les frontières et le monde

lui-même.

Le modèle du marché, apparait comme nous le présente Marie-Anne Frisson-

Roche comme un concept s‟étendant de plus en plus à des domaines qui lui échappaient.

Le droit des sociétés en fait partie, « Le droit (des sociétés) devient lui-même, et un

marché et un objet de marché .... Mais ce sont surtout les législations entres elles qui

80

Yves Dezalay, Marchand de droit

Page 84: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

84

sont mises en concurrence, du fait de leur attache territoriale qui les constituent comme

des produits limités et particuliers qui sont offerts à des utilisateurs aptes techniquement

à se soumettre à la législation qui leur convient. La demande s‟oriente vers l‟offre. Le

phénomène de délocalisation est une conséquence de cette mise en concurrence des

législations entre elles. L‟implantation est le prix payé pour obtenir la législation

convoitée. Ce n‟est plus la loi mise en esclavage par le marché, c‟est la loi qui est

manipulée comme un objet de marché, à la disposition de qui l‟estime apte à l‟usage

auquel il la destine »81

.

Le mécanisme du marché comme le lieu de rencontre de l‟offre et de la demande,

et comme moyen de régulation des échanges peut donc s‟appliquer au produit législatif,

comme nous l‟avons vu. Les différentes conditions d‟existence du marché étant

remplies. Cette assimilation du concept de marché aux droits à été mentionné de

nombreuses fois par différents auteurs82

, « nous ne nions pas l‟existence d‟un

phénomène qui a commencé à se développer dès le milieu du XXe siècle et qui a pris de

l‟ampleur avec la globalisation de l‟économie. Il existe bel et bien un marché

international du droit ». Les théoriciens de la Law and Economics que nous avons vu

précédemment, parle également du marché du droit, en assimilant ces mécanismes à

ceux du marché des biens et services83

.

148 - Le marché du droit des sociétés se composent des Etats qui proposent sur

ce marché leurs produits législatifs, produit qui va être choisi par les consommateurs-

entreprises. Le produit va donc être soumis à une concurrence, concurrence qui va avoir

pour effet d‟aboutir à une certaine convergence entre les différents produits, le produit

le plus attractif servant de modèle aux autres produits, l‟enjeu pour l‟Etat étant

important en raison du flux financier que peut rapporter les entreprises. Les Etats vont

donc se livrer une concurrence, ce qui n‟est pas sans conséquence.

81

Marie-Anne Frisson-Roche, « le modèle du marché », op. cit. 82

C. Kessedjian, « Le droit entre concurrence et coopération », préc. cit. 83

Pour exemple, Anthony Ogus, « a la demande des acteurs du marché, les législateurs nationaux vont

comparer leurs propres produits juridiques avec ceux disponibles produit juridiques avec ceux disponibles

dans les États concurrentes ».

Page 85: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

85

CONCLUSION DU TITRE 2

149 - Le rapprochement entre les différents droits des sociétés, n‟est pas le fruit

du hasard, cette convergence trouvant son explication dans le caractère particulier du

droit des sociétés, qui nous permet de l‟assimiler à un produit semblable à un produit

sur le marché des biens et services.

Il existe entre les produits, une concurrence, que se livre les producteurs pour

offrir le produit le plus attractif, le plus adéquate à la demande des consommateurs.

Cette phrase qui pourrait être issu de nombreux manuel d‟économie peut s‟appliquer

tant au domaine de l‟économie et au produit marchand qu‟au phénomène mondial

propre au droit des sociétés. La concurrence que se livre les Etats pour offrir aux

consommateurs de droit, les sociétés, un droit attractif, efficace peut se voir calquer le

modèle du marché des biens et services. Ce calque peut paraitre de première vue

incongru, paradoxal, le droit des sociétés ne pouvant faire l‟objet d‟un marché, mais la

concurrence entre les droits, la convergence qui existe entre les différents droits des

sociétés, la similitude qui existe entre le droit des sociétés et la définition d‟un produit,

nous pousse à dépasser notre conception du droit et appréhender ce phénomène

nouveau. Les acteurs sur ce marché du droit des sociétés se comportent comme les

acteurs du marché des biens et services, ce modèle apportant plus de similitude que de

contradiction, nous obligent à rattacher et a expliquer les différents mouvements de

convergence entre les droits des sociétés, par l‟existence d‟un marché du droit des

sociétés, ou les Etats pour attirer les sociétés vont se livrer une concurrence qui va

permettre une convergence entre les droits, les Etats récupérant sur leurs concurrents les

solutions paraissant plaire aux sociétés ou étant selon plus efficace. La convergence

pouvant naitre également de la demande des sociétés.

Page 86: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

86

CONCLUSION DE LA PARTIE 1

150 - La convergence des droits des sociétés s‟explique par une circulation des

droits des sociétés d‟un Etat à l‟autre, la circulation ayant pour cause, la volonté des

Etats d‟offrir un produit « droit des sociétés » concurrentiel aux sociétés afin de les voir

se rattacher à eux et obtenir en retour un avantage financier. Les sociétés n‟ont plus de

frein à leur mobilité, elles vont désormais choisir ou se rattacher, ou s‟implanter et

choisir leur droit, leur lex societatis. Comme on le sait, le rattachement des sociétés à un

Etat est soumis aux règles de l‟Etat, cependant ce rattachement se fait sur la base du

volontariat, une société qui vient d‟être créé peut décider de s‟implanter en France ou

aux Etats-Unis. Pour les groupes de sociétés, plus généralement connus sous le nom de

multinationales, cette mobilité nous allons le voir est également admise, le critère de

l‟incorporation étant le critère le plus utilisé par les Etats.

151 - Ce choix qui est offert aux sociétés va provoquer une concurrence entre

les Etats, cette concurrence étant semblable à la concurrence qu‟on trouve sur le marché

des biens et services. Le droit des sociétés est devenu un produit sur un marché

composé des Etats, producteurs, des sociétés, consommateurs. Dans le cadre de notre

étude nous avons mis l‟accent sur la concurrence législative et donc ne traitons

volontairement sur ce marché que des Etats comme producteurs de droit, mais d‟autres

producteurs sur ce marché existent, tels que les organismes privés qui proposent aux

sociétés des règles, une régulation. La convergence entre ces règles en raison d‟une

concurrence pouvant également s‟appliquer, la concurrence comme source de

convergence pour le droit des sociétés, ne peut s‟apparenter à une exception. Cette

concurrence induisant de nombreuses conséquences.

Page 87: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

87

DEUXIEME PARTIE : LES CONSEQUENCES D’UNE CONCURRENCE

LEGISLATIVE POUR OBTENIR UN DROIT CONCURRENTIEL

152 - La concurrence est décrite comme un mécanisme sain pour permettre

l‟amélioration des produits concurrencé. Chaque producteur voulant et cherchant

l‟innovation afin de vendre son produit. On constate cependant que la concurrence

législative ne permet pas toujours, une optimisation de la règle de droit, les

conséquences néfastes de la concurrence législatives sur la règle de droit pouvant avoir

lieu (Titre 1), apparait alors la nécessité de réguler efficacement la concurrence

législative (Titre 2).

TITRE 1 : LES DANGERS DE LA CONCURRENCE ENTRE LES ETATS SUR

LA REGLE DE DROIT

153 - « Dans bien des discours, politiques ou d‟entreprise, la concurrence

apparait comme une donnée et une nécessité »84

. La concurrence, la compétition entre

les producteurs devant les pousser, les stimuler pour permettre une optimisation de leur

produit. L‟application de la concurrence sur la règle de droit des affaires, ne produit pas

l‟effet escompté, celle-ci provoquant une dégénérescence de la règle de droit (Chapitre

1). L‟optimisation de la règle de droit n‟ayant également pas lieu (Chapitre 2), les droits

des sociétés convergent mais n‟innovent pas.

84 M. Depincé, D. Mainguy, JL. Respaud, Droit de la concurrence, ed. Litec, spéc. p. 1 et s.

Page 88: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

88

CHAPITRE 1 : LA DEGENERESCENCE DE LA REGLE DE DROIT

154 - Le droit nous l‟avons défini précédemment est composé d‟un ensemble

de règle de droit qui permet d‟assurer une cohésion et d‟organiser la vie en société. Le

droit et la morale sont deux chose différentes bien que tous consent à reconnaitre qu‟il

existe une certaine proximité entre les deux. Le droit n‟est pas la morale, mais le droit à

une valeur morale, c‟est-à-dire qu‟il poursuit un but particulier, l‟organisation de la vie

en société, par un moyen une règle de droit soumis à des principes. La concurrence est

elle morale ? Peut-on alors se demander, en reprenant et en la modifiant la fameuse

question que se pose André Comte-Sponville85

. La concurrence poursuivit par les Etats

dans l‟unique but d‟attirer les entreprises, va provoquer une perte de valeur de la règle

de droit (Section 1), et un nivellement vers le bas (Section 2).

SECTION 1 : LA PERTE DE VALEUR DE LA REGLE DE DROIT

155 - La concurrence législative que se livre les Etats dans le seul but d‟attirer

les entreprises et de répondre à leur demande, nie les valeurs morales du droit

(Paragraphe 1), en se focalisant uniquement sur une catégorie de sujet de droit, la règle

de droit perd alors sa neutralité (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : La négation de la valeur morale du droit

156 - Le Digeste de Justinien défini le droit comme l‟art du bien et du juste86

.

Bien que cette vision apparaisse comme idyllique, le Droit doit permettre de faire la

balance entre le juste et l‟injuste, en organisant la vie en société par le biais de règle,

85

A. Comte-Sponville, Le capitalisme est-il moral ?, ed. 2004. 86

Jus est ars boni aequi

Page 89: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

89

règle qui a vocation à s‟appliquer à l‟ensemble de la société et doit donc être formulé de

manière générale et impersonnelle.

157 - Le Droit doit donc être un moyen d‟obtenir une cohésion sociale, de

permettre aux individus de pouvoir vivre entre eux de manière harmonieuse par le biais

de règle, appelé aussi droit subjectif. La concurrence législative va nier cette approche

du droit, le but recherché n‟est plus alors la cohésion sociale, la recherche du juste mais

la recherche de l‟attractivité. La concurrence entre les droits va donc nier la valeur

morale du droit, le législateur poursuivant un but égoïste, augmenter les richesses de son

Etat en rendant attractif son droit mis en concurrence.

Comme nous l‟avons vu le législateur va transformer les règles du droit des

sociétés notamment, dans le but d‟attirer les entreprises, les acteurs économiques. La

règle de droit va être produite dans un but unique celle de satisfaire la société, le droit

ne fait plus alors l‟équilibre, la neutralité du droit disparait.

Paragraphe 2 : La perte de neutralité de la règle de droit

158 - Les acteurs économiques, multinationales, sociétés sont considérés

comme les nouveaux pouvoirs qui dominent le monde87

. Les multinationales génèrent

des sommes astronomiques, les Etats souhaitent alors récupérer ces flux financiers et

vont donc leurs proposer un droit correspond à leurs demandes.

159 - La règle de droit doit être neutre, elle doit s‟appliquer quand elle a

vocation à s‟appliquer au sujet de droit sans distinction possible. Cette neutralité de la

règle de droit est essentiel, elle nous protège de l‟arbitraire et de la tyrannie. La règle de

droit que proposent les Etats est basée sur une demande, une demande particulière, qui

ne correspond à l‟ensemble des sujets de droit. La concurrence législative va donc faire

perdre au droit sa neutralité. Pas tant dans l‟application, elle a vocation à s‟appliquer à

tous les sujets de droit, mais dans la création de la règle de droit, celle-ci se faisant dans

le but de « favoriser » une partie des sujets de droit. La perte de neutralité de la règle de

87

Mireille Delmas-Marty, trois défi pour un droit mondial, édition du Seuil, p. 138

Page 90: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

90

droit, va orienter le droit en fonction de la demande. Un nivellement vers le haut ou vers

le bas.

SECTION 2 : LE DANGER INEVITABLE D‟UN NIVELLEMENT VERS LE BAS

DES LEGISLATIONS NATIONALES

160 - La mise en concurrence des Etats, va pousser ces derniers à répondre aux

demandes des sujets de droit. Les sociétés vont vouloir maximiser leur profit, optimiser

leur stratégie et cela à moindre cout. Les Etats vont donc offrir un droit des sociétés

répondant le plus proche au besoin des acteurs économiques, acteur économique qui

évidemment souhaite avoir une législation à moindre cout. L‟Etat le plus attractif va

donc être copié, les autres Etats transplantant les solutions de l‟Etat concurrencé, ce qui

va entrainer indéniablement un nivellement vers le bas.

161 - Pour de nombreux auteurs, ce « race to the bottom » peut déboucher sur un

« race to the top », un nivellement vers le haut en aboutissant à une simplification et

flexibilité du droit des sociétés. Ce « race to the top » pourrait donc avoir lieu, comme

le propose les professeurs Benedetelli et Rescio, qui croient en un « law shopping »

vertueux. Pour ces auteurs, la concurrence peut se faire par le haut en permettant une

harmonisation minimale afin de protéger les intérêts des parties les plus faibles.

Cependant, ce « race to the top » nous l‟avons vu ne pourra avoir lieu que si il existe

une demande des acteurs économiques vers un droit des sociétés flexible et efficace.

162 - Le problème vient alors de savoir si cette demande peut avoir lieu. Les

Etats selon Guzman, poursuit des objectifs égoïstes. Ce qui importe à un législateur

c‟est d‟obtenir la maximisation des ressources dont dispose la communauté dont il régit

et par conséquent si les décisions qu‟il prend ne sont pas conformes au bien être de

l‟ensemble des sujets de droit, l‟Etat ne s‟en soucie pas88

. L‟Etat va donc proposer un

Page 91: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

91

produit législatif conforme à la demande des entreprises, les entreprises voulant un droit

à faible cout ou faible règlementation vont répondre à cette demande.

163 - Le « race to the top », s‟il ne dépend pas des Etats, doit donc dépendre des

entreprises, les Etats répondant de manière conforme à leur demande. Selon le

professeur Horatia Muir Watt, il existe un moyen d‟obtenir un nivellement vers le haut,

comme en témoigne l‟affaire Nike. Dans l‟affaire Nike, les consommateurs furent mis

en connaissance des conditions de fabrication des fameuses chaussures et notamment

des conditions de travail inhumain qui étaient appliquées dans les usines de sous-

traitance en Chine, Vietnam et Indonésie. Pour remédier à l‟image désastreuse le groupe

Nike avait mis en place une importante campagne publicitaire pour rétablir sa crédibilité

en promettant de faire respecter par ses sous-traitants les normes sociales en faveur des

travailleurs locaux. Les promesses n‟ont pas été exécutées et un consommateur saisi la

justice américaine. Le point ici, n‟est pas de savoir si le juge judiciaire qui a en l‟espèce

condamné la société Nike peut permettre un nivellement vers le haut mais si le

consommateur qui estime que le produit importé mérite l‟opprobre peut avoir un

impact. C‟est ce qu‟on voit actuellement dans le droit de l‟environnement et que l‟on

appelle communément le « Green washing». Les seuls qui peuvent avoir sur les acteurs

économiques un impact sont les consommateurs, les sociétés attirées par l‟appât du gain

recherchent une législation à moindre cout. Hélas, les consommateurs se moquent du

lieu d‟implantation des sociétés et de la législation choisie, leur principale priorité étant

de payer un produit à moindre cout, produit qui ne peut être à moindre cout, que si la

société à une stratégie efficace qui passe notamment par le choix de la loi.

164 - Le nivellement par le haut peut donc difficilement se faire par les

entreprises, le seul moyen d‟obtenir ce nivellement doit alors être mis en œuvre par

l‟Etat ce qui est difficilement envisageable comme nous l‟avons vu. La concurrence

entre les Etats conduit donc à un nivellement vers le bas ou « race to the bottom »,

principale crainte des auteurs analysant la concurrence législative. La concurrence

législative ne permettant pas non plus une optimisation de la règle de droit.

88 Guzman cité dans Horatia Muir Watt, Globalisation des marchés et économies politique du droit

international privé, Archive philosophique de droit, n° 47, 2003, p. 243

Page 92: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

92

CHAPITRE 2 : L’ABSENCE D’OPTIMISATION DE LA REGLE DE DROIT

165 - La concurrence apparait dans le domaine économique comme une

donnée essentielle et une nécessité. La concurrence doit permettre de stimuler les

producteurs des produits concurrencés, permettre d‟adapter la valeur du produit à son

juste prix, être au plus proche de la demande en optimisant le produit ou en

l‟améliorant. La concurrence ayant des vertus positives et étant source d‟innovation.

Le basculement des vertus de la concurrence entre les produits sur la concurrence

législative devrait permettre une optimisation de la règle de droit, la concurrence ne

devant poursuivre comme autre finalité que l‟efficacité de la norme. Tels était l‟objectif

des tenants de la « Law and Economics », de permettre par la mise en concurrence une

allocation optimale des règles89

. La concurrence devant provoquer une amélioration de

la règle de droit (Section 1) et des innovations législatives (Section 2) qui brillent

aujourd‟hui par leurs absences.

SECTION 1 : L‟ABSENCE D‟AMELIORATION DE LA REGLE DE DROIT

166 - Les tenants de la doctrine de la « Law and Economics » appliquée à la

concurrence entre les droits, comme nous l‟avons vu précédemment, énonce que la

concurrence entre les droits va permettre une amélioration de la règle par une

spécialisation. Selon lui, les consommateurs vont migrer vers la règle de droit la plus

efficace au regard de leur besoin. Les Etats vont alors en présence d‟une réactivité du

89 Horatia MIUR WATT, « Globalisation des marchés et économie politique du droit international

privé », Archive philosophique de droit, 2003, n°47, p. 243 : « un courant de pensée nouveau, apparu au

sein de l‟analyse économique du droit aux Etats-Unis, … de façon à assurer l‟allocation optimale des

compétences étatiques », Horatia Miur Watt, « Concurrence d‟ordres juridiques et conflits de lois de droit

privé », préc. cit « En même temps comme sur un marché de biens privés, la concurrence législative

conduit à une différenciation des produits normatifs en fonction des préférences hétérogènes des

justiciables. Le marché législatif pourvoit donc au niveau optimal de réglementation de chaque Etat en

même temps qu‟il assure la satisfaction des préférences agrégés ».

Page 93: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

93

législateur se spécialiser, afin de répondre à la demande de ses consommateurs. La

concurrence par le bais du pouvoir « d’exit » va agir comme un mécanisme de

correcteur sur la tentation de sur-régulation des législateurs ou de sous-régulation. Les

consommateurs se répartissant selon leurs préférences au regard du produit offert et

permettant la multiplicité des régimes juridiques.

167 - L‟amélioration de la règle de droit, doit donc être produite par les

législateurs en raison de leur spécialisation sur leurs produits proposés aux

consommateurs intéressés. Les produits juridiques ne doivent donc pas alors converger

vers le produit apparaissant comme concurrentiel, mais s‟améliorer en gardant leurs

spécificités. Cependant, nous avons constaté qu‟aujourd‟hui la concurrence législative

va provoquer une convergence des droits, le législateur souhaitant maximiser les

ressources de son territoire en captant le plus grand nombre de consommateur et pour

cela en offrant le produit le plus attractif possible. L‟amélioration de la règle de droit

par le biais d‟une spécialisation des législations apparait utopique. De plus, même si

certains opérateur économique tels les petites PME française, qui ne se soucie guère de

la concurrence législative et n‟ont pas vocation à bouger, vont rester sur le territoire

pour bénéficier de la législation de l‟Etats, la convergence aura quand même lieux,

l‟Etat va méconnaitre cette donnée financière légère au profit d‟une donnée financière

plus forte.

168 - L‟amélioration peut aussi résulter de la volonté du législateur d‟offrir un

produit toujours « à la pointe de la technologie » au consommateur. Cependant, on l‟a

constaté la concurrence provoque une convergence du droit vers la solution la plus

attractive. Il est vrai que la transplantation d‟un droit étranger peut s‟assimiler à une

amélioration du droit, mais l‟amélioration ne doit pas se faire pour favoriser un seul

groupe mais concerner tout le groupe visé par la règle. Pour exemple, le concept de

« Corporate Governance » a fait l‟objet d‟une transplantation en France comme nous

l‟avons vu précédemment. La « Corporate Governance » en soit, n‟apparait pas comme

une convergence du droit vers le bas, une course à la déréglementation, mais

l‟importation de ce concept, a été fait dans un but particulier, celui des actionnaires en

méconnaissant les autres intérêts de l‟entreprise, tels que les salariés. L‟amélioration

Page 94: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

94

prétendue de la règle de droit dans un but de favoriser une partie du groupe, ne peut pas

pleinement s‟apparenter à une amélioration.

La concurrence ne doit pas seulement permettre l‟amélioration mais également

l‟innovation législative, innovation législative qui semble être compromise.

SECTION 2 : L‟ABSENCE D‟INNOVATION DE LA REGLE DE DROIT

169 - La concurrence entre les produits va stimuler la création des producteurs

et va favoriser l‟innovation. La concurrence législative devant également avoir cette

vertu innovante. L‟Etat à l‟image du producteur de bien va vouloir innover pour attirer

de nouveaux consommateurs ou récupérer les consommateurs partis.

170 - La concurrence législative ne va pas permettre l‟innovation mais une

simple convergence, celle-ci étant admit théoriquement par Anthony Ogus dans son

article 90

qui complète l‟œuvre de M. Mattei et considère que la concurrence va

provoquer une convergence entre les droits. Selon la thèse de Mattei, chaque droit

contient des principes efficaces et ce droit est conçu comme une chose dans le

commerce. Dans la sphère internationale, il existe un marché des droits ouvert à la

concurrence. Si un droit ou un élément d‟un système circule, c‟est qu‟il est choisi par

préférence à un autre en raison d‟une meilleure efficacité économique qui n‟est pas

seulement l‟explication de la concurrence mais également de la cause de leur

convergence. La concurrence législative est alors source de convergence mais non

d‟innovation.

171 - La concurrence de manière générale ne va pas permettre dans chaque

Etats des innovations législatives mais une simple convergence entre les différents

droits quand celle-ci est possible. Il est vrai que de nombreuses lois naissent chaque jour

dans notre pays, au point qu‟on parle de prolifération législative, ces lois ne pouvant

90 A. Ogus, « Competition between National Legal Systems: A Contribution of Economic

Analysis to Comparative Law », préc. cit.

Page 95: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

95

s‟assimiler à des innovations. L‟Etat afin d‟attirer les acteurs économiques, n‟innove

pas, il récupère juste les solutions apparaissant plus attractifs. Il est vrai, que l‟Etat

« copié » fait lui source d‟innovation, cette innovation devenant vite la « norme », les

autres Etats n‟innovant pas, récupérant juste la solution la plus favorable.

172 - La concurrence législative lorsqu‟elle a été pensée devait permettre une

optimisation de la règle de droit en assurant la diversité des régimes juridiques

disponibles pour répondre au plus près aux différentes demandes des investisseurs. Cela

nécessitant que les forces du marché interviennent et déterminent l‟intensité optimale de

réglementation applicable apportant une solution au problème de la course vers le bas.

L‟impact néfaste de la concurrence sur le droit résulte d‟un mauvais fonctionnement du

marché qui peut s‟expliquer par l‟insuffisance des règles encadrant la concurrence

législative.

Page 96: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

96

CONCLUSION DU TITRE 1

173 - La concurrence se retrouve dans de nombreux domaines tels que le sport,

la mode, l‟école, la musique etc… La concurrence, la compétition apparait donc

comme un mécanisme courant, sain, permettant la stimulation, l‟optimisation des

ressources. Dans le domaine du droit, la concurrence que vont se livrer les Etats sur la

règle de droit risque d‟avoir un impact néfaste sur cette dernière.

La concurrence ne va pas permettre une optimisation de la règle de droit, ni la

recherche d‟innovation, les Etats se contentant d‟importer les solutions les plus attractifs

dans leur droit. Cette absence d‟optimisation n‟est pas un véritable problème, les droits

convergeant ne pose pas de soucis particulier, sauf quand cette convergence provoque

un nivellement vers le bas. La concurrence va également nier les valeurs morales de la

règle de droit, celle-ci va en étant créée dans le but de répondre à une demande nie la

neutralité inhérente et essentielle à la règle de droit.

174 - La concurrence peut aussi s‟avérer positive, les risques envisagés ont été

analysés dans un cadre général et peuvent frapper avec parcimonie la règle de droit. La

concurrence doit donc être encadrée, régulée.

Page 97: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

97

TITRE 2 : LA NECESSITE D’ENCADRER EFFICACEMENT LA

CONCURRENCE LEGISLATIVE

175 - La concurrence que vont se livrer les Etats pour obtenir un droit attractif

pour l‟acteur économique peut avoir de nombreux impacts sur la règle de droit. La

concurrence est un mécanisme sain lorsque celle-ci est régulée. Cependant, la régulation

législative ne se fait pas directement mais indirectement par la régulation des acteurs

économiques dans le choix de la loi applicable, cette régulation apparaissant alors

comme insuffisante (Chapitre 2). La concurrence législative doit donc être encadrer, en

raison de l‟impact sur la règle de droit, mais également en raison des dérives possibles

orchestrées par les acteurs économiques internationaux dans la mise en concurrence

(Chapitre 1).

CHAPITRE 1 : LES DERIVES DE LA CONCURRENCE LEGISLATIVES

POUR LE SUJET DE DROIT INTERNATIONAL

176 - Les sujets de droit international qui peuvent choisir leur droit applicable,

peuvent utiliser ce droit de manière abusive ou frauduleuse. Le « law shopping »

(Section 1) ou le « forum shopping » (Section 2)

SECTION 1 : LE « LAW SHOPPING »

177 - Le « Law shopping » est très peu usité en droit international privé, le

terme se retrouvant plus souvent en droit communautaire et notamment dans les

commentaires de la jurisprudence de la Cour de justice de l‟Union européenne. Le

« law shopping », consiste à choisir une loi qui apparait moins contraignante. Ce « law

shopping » s‟opère par la faculté de rattachement et d‟immatriculation des sociétés qui

va leur permettre de choisir la loi la moins contraignante parmi de nombreuses autres

lois.

Page 98: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

98

178 - Les acteurs économiques ont pleinement pris en conscience de l‟impact du

droit dans leur stratégie économique et vont donc chercher à tirer avantage de cela en

choisissant une loi souple. Pour cela, la société va contourner le rattachement qui aurait

du être le sien à l‟origine en se constituant dans un Etat à la législation plus souple que

celle originale et continuer à exercer son activité dans le pays d‟origine, cela constitue le

siège réel. Le « law shopping » apparait alors comme une optimisation de la règle de

droit dans une stratégie économique.

Le « law shopping » se constitue donc de deux éléments, un matériel et un

intentionnel. Le matériel est constitué par le choix offert d‟un système juridique et des

règles le constituant. L‟élément intentionnel étant lui constitué du mobile, de la volonté

d‟obtenir et de tirer avantage de la lex societatis. Le « law shopping » n‟est donc

possible que pour la mobilité des sociétés. Cette mobilité devant être régulé pour éviter

ce que la doctrine appelle un « effet Delaware ».

179 - L‟Etat du Delaware est un Etat se situant sur la cote Est des Etats-Unis

proche du Maryland. Cet Etat est considéré comme un paradis fiscaux pour toutes les

sociétés off-shore la seule taxation, étant une taxation forfaitaire de 300 €. Cette Etat

attire donc de nombreuses sociétés afin de bénéficier du régime souple applicable aux

sociétés et de la fiscalité quasi réduite. Cette Etat appliquant le système de

l‟incorporation va donc permettre à une société de s‟immatriculer, de bénéficier des

produits législatifs très attractif qu‟offre cette Etat, tout en continuant à avoir ses

principales activités sur un autre territoire. Pour exemple, le cout de création d‟une

société au Delaware coute environ en moyenne 300€, l‟apport de la société étant de 500

€, modique somme à payer sachant qu‟après il n‟y a plus aucune taxe ni impôt à payer

hormis les 300 € annuel91

. L‟Etat du Delaware avec sa législation attractif héberge plus

de la moitié des 500 sociétés américaines les plus importantes. L‟Effet Delaware est

donc caractérisé par la doctrine comme la volonté d‟un Etat d‟obtenir le rattachement

des sociétés en proposant une législation attractif. Les autres Etats vont rétorquer en

91 Pour en savoir plus, plusieurs sites traitent de l‟Etat du Delaware notamment,

http://www.paradisfiscaux.com.

Page 99: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

99

proposant eux aussi une législation attractive à moindre cout, ce qui va provoquer un

nivellement vers le bas.

SECTION 2 : LE « FORUM SHOPPING »

180 - Le forum shopping consiste pour un plaideur à s‟assurer de l‟accès au for

le plus favorable à ses intérêts, que ce soit sur le fond pour voir appliquer la solution

substantielle la plus intéressante ou sur le terrain de la procédure pour se voir faciliter

l‟action en justice. Le forum shopping a également été défini par la jurisprudence

européenne comme « le choix du for en fonction des avantages pouvant résulter du droit

matériel (voire procédural) qui y est appliqué »92

.

181 - Le forum shopping bien que discutable, reste néanmoins licite. Le forum

shopping consistant en une option de compétence devant laquelle se trouve le

demandeur, en raison d‟un lien d‟extranéité. Le forum shopping peut également être mis

en œuvre par le défendeur, en prenant l‟initiative d‟une procédure devant un for

étranger afin de court-circuiter la procédure préalablement engagée devant un for qui

risque de lui être dommageable. Le forum shopping apparaissant comme « l‟expression

d‟une préférence constituant plutôt un facteur d‟émulation entre Etats et, partant

d‟efficience globale »93

. Le forum shopping est donc juste une manière habile du

demandeur d‟exercer une option de compétence offerte par les règles de compétences

internationales et la situation la créant.

« L‟internationalisation est grande tant dans l‟actionnariat des sociétés cotées,

accentuée par la possible multi cotation, que dans les activités exercées par ces sociétés,

avec pour corollaire une absence totale de frontière »94

. Le forum shopping apparait

92

CJCE, 28 septembre 1999, affaire C-440/97, Groupe Concorde e.a. 93

H. Muir Watt, Quelles méthodes ? Vers un procès civil universel ? Les règles transnationales de

procédure civile de l’American Law Institute, sous la direction de Ph. Fouchard, LGDJ, p.43.

Page 100: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

100

alors inévitable en raison de la diversité des règles juridiques et des systèmes juridiques.

Les demandeurs vont donc vouloir quand cela leur est offert, choisir le juge le plus apte

à satisfaire leur demande. Après tout qui refuserait quand le choix est possible, la

solution la plus facile. Cependant, le forum shopping ne peut demeurer licite qu‟a la

condition qu‟il n‟ait pas pour effet d‟opérer une rupture anormale d‟équilibre entre les

parties.

182 - Dans le domaine du droit des affaires, le forum shopping est

particulièrement présent en raison des nombreux éléments d‟extranéité. Le forum

shopping tend à s‟étendre en raison de l‟activité internationale du droit des sociétés et

des groupes de sociétés. Dans le domaine du droit des affaires, le forum shopping le

plus récent est relatif au « class action», tout les droits nationaux tels que celui de la

France ne l‟admettant pas. L‟un des exemples les plus frappants de forum shopping est

l‟affaire Vivendi. La société Vivendi et deux de ses anciens dirigeants ont été assignés

devant le juge américain. Des actionnaires américains ayant acquis des ADS aux Etats-

Unis en raison d‟information s‟avérant trompeuse ont décidé d‟agir en justice et de

mettre en œuvre la procédure de « class action » Le juge américain a admis la « class

action » et l‟a étendu à l‟ensemble de tous les actionnaires français ayant acquis leurs

titres sur le marché français pendant la période retenue.

183 - Cet exemple démontre bien tout l‟intérêt du forum shopping, bénéficier

d‟une règle de fond ou procédurales plus favorable que celle devant être obtenue. Ce

bénéfice pour qu‟il soit admis ne doit cependant pas provoquer un déséquilibre entre les

parties. Un forum shopping malus pouvant être décelé quand le choix du tribunal est

guidé non pas par la volonté d‟obtenir une solution avantageuse, mais par celle de nuire

ou de tirer parti du choix du fort de manière illégitime. Selon Pascal de Vareilles-

Sommières, le shopping malus illicite est mauvais dès lors que le choix produit certains

types de conséquences procédurales, tels que soumettre le litige à une juridiction

dépourvue de lien caractérisé avec ce dernier, de mettre en échec un jugement ou une

procédure déjà intervenue régulièrement. Le forum shopping malus est une dérive de la

94 Daniel Cohen, Contentieux d‟affaires et abus de forum shopping, Dalloz 2010, p. 975

Page 101: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

101

mise en concurrence des différents systèmes juridiques, le choix ne se faisant pas dans

un but purement égoïste, à savoir obtenir pour soi la meilleure solution, mais au

contraire dans le but de nuire et de rompre l‟équilibre entre les parties en ayant un

avantage.

184 - La mise en concurrence législative, doit permettre une optimisation de la

règle or en l‟espèce l‟intention frauduleuse vient nuire à cette optimisation. Pour éviter

toutes dérives, des règles régulant la concurrence doivent être mises en place de manière

efficace.

CHAPITRE 2 : L’INSUFFISANCE DES REGLES POUR REGULER CETTE

CONCURRENCE

185 - La concurrence entre les Etats pour obtenir un droit concurrentiel va

avoir un impact sur le sujet droit à savoir les acteurs économiques car ces derniers vont

avoir à leurs dispositions une multitude de droit plus différent les uns que les autres. Les

règles de concurrence ne vont pas à proprement parlées permettre de réguler

directement la concurrence que va se livrer les Etats entre eux, mais va permettre de la

réguler à travers les acteurs économiques en encadrant leur volonté de choisir le droit le

plus attractif possible. Hélas, cette manière indirecte de réguler la concurrence demeure

cependant insuffisante, malgré l‟existence de règles nationale (Section 1) ou plus

général, appartenant au droit international privé (Section 2).

Page 102: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

102

SECTION 1 : L‟INSUFFISANCE DES REGLES NATIONALES POUR REGULER

LA CONCURRENCE ENTRE LES DROITS DES SOCIETES

186 - La mobilité des acteurs économiques est un véritable vecteur de

concurrence. Les entreprises peuvent s‟implanter dans différents pays en fonction de la

législation et de leurs ambitions. Les groupes de sociétés ou multinationales sont les

sujets les plus à même d‟utiliser la règlementation des Etats. Afin d‟éviter toute dérive

et de « law shopping », des règles ont été mis en place, pour que la société ne puisse pas

frauduleusement choisir son droit. La théorie du siège réel devant encadrer le choix de

l‟Etat (paragraphe I), théorie qui se voit limité par l‟émergence de la théorie de

l‟Incorporation (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : L‟insuffisance des règles propres au droit des sociétés pour limiter la

concurrence

187 - Le critère de rattachement du droit des sociétés à un Etat qui permet la

détermination de la loi applicable est propre à chaque Etat, deux critères dominant la

sphère mondiale. Quand la société est nouvelle et se rattache à un Etat, les critères de

rattachement n‟ont pas vocation à réguler le choix. Cependant, dans la situation des

transferts de siège social, le critère de rattachement permet de réguler la concurrence en

évitant toute « évasion législative », cette régulation demeurant limitée (A). Apparait

alors qu‟importe la situation de la société, un critère efficace pour réguler cette

concurrence et permettre d‟appliquer à la société, le droit le plus adéquate. Le critère de

du siège réel reste cependant le critère exceptionnel (B).

Page 103: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

103

A) La réglementation limitée des transferts de siège social

188 - Le transfert de siège social est encadré, qu‟il emportant chmangement de

la loi applicable (1), ou non (2).

1) Transfert du siège social emportant changement de la lex societatis

189 - Le transfert du siège selon le système de rattachement ou l‟on se trouve

va provoquer un changement de lex societatis. Le changement de lex societatis dépend

également de la nature du siège transférer car comme nous l‟avons vu, les Etats qui

admettent la théorie de l‟Incorporation, permette une mobilité accrue de leur société. Le

siège statutaire correspond à l‟aspect formel et, est celui mentionné dans les statuts et

ou à lieu l‟immatriculation. Le siège réel correspond au lieu effectif de décision et au

lieu de la prise de décision. Le siège total comprenant les deux, à savoir le siège

statutaire et le siège réel. Le changement de la loi applicable peut se faire selon les

systèmes de rattachements, en cas du transfert du siège total (a) ou seul siège statutaire

(b).

a) Le transfert du siège total

190 - Le transfert de siège total va permettre un changement de la loi

applicable à la société. Que l‟Etat opte pour le système de l‟incorporation ou pour le

système du siège réel, le transfert du siège statutaire va obligatoirement changer la loi

applicable à la société. Ce transfert du siège total est difficilement admis par les Etats,

ce qui explique la disparité des règles admettant ce transfert, certains Etats refusent le

transfert (α), d‟autres l‟admettent avec des conditions rigoureuses (β), d‟autres Etats

sans le faciliter l‟acceptent (Ω).

Page 104: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

104

α) Le refus du transfert international du siège total

191 - L‟Allemagne qui utilise comme critère de rattachement le siège réel pour

exemple, refuse le transfert du siège total d‟une société allemande dans un autres Etats.

Selon le droit positif allemand, une société allemande ne peut pas transférer son siège

social95

dans un autre Etat sans se dissoudre96

. D‟autres Etats, admettent ce transfert de

manière rigoureuse.

β) Les conditions rigoureuses de transfert international du siège total

192 - Certaines législations admettent le transfert de siège social à l‟étranger

mais cela se fait néanmoins sous des conditions qu‟on peut qualifié de rigoureuse. Pour

exemple, le droit luxembourgeois imposent pour qu‟une société transfert son siège

social l‟unanimité des associés. L‟unanimité étant aisé quand la société comporte deux

actionnaires, l‟unanimité est moins facile quand la société en comporte plus de dix.

Cette exigence d‟unanimité est donc une manière détourné d‟empêcher le transfert du

siège total, ou tout du moins de le rendre plus difficile.

193 - La législation française, choisie une position médiane, l‟unanimité étant

demandée dans certaines sociétés, la majorité qualifiée suffisant dans d‟autres formes.

Le transfert de siège social d‟une société en commandite simple (SCS) ou en

responsabilité limitée (SARL) est prévu par la loi et impose l‟unanimité des

actionnaires97

. Concernant la société anonyme, l‟article L 225-97 dispose, « l‟assemblée

générale extraordinaire peut changer la nationalité de la société, à condition que le pays

d‟accueil ait conclu avec la France une convention spéciale permettant d‟acquérir sa

95 En présence d‟un Etat utilisant le système du siège réel comme critère de rattachement, il n‟est pas

nécessaire de parler de siège total, le système du siège réel assimilant les deux. 96

Cour suprême de Bavière, 7 mai 1992, la cour prononce la dissolution d‟une société unipersonnelle du

droit allemand ayant pris la décision de transférer son siège social, statutaire et effectif en Allemagne. 97

Articles L222-9 du code de commerce et L 223-30 du code de commerce.

Page 105: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

105

nationalité et de transférer son siège social sur son territoire, et conservant à la société

sa personnalité juridique ». La doctrine en l‟absence de convention spéciale entre la

France et le nouveaux pays d‟accueil considère que le transfert de siège social ne pourra

se faire qu‟a l‟unanimité des actionnaires98

. Les sociétés en nom collectif ne dispose

elles d‟aucune législation tout comme les sociétés par action simplifiées, mais la

doctrine considère que le transfert de siège social d‟une SAS ou d‟une SNC se fasse à

l‟unanimité comme celui d‟une SA. D‟autres législations plus souples admettent plus

facilement le transfert international de siège social.

Ω) les conditions souples de transfert international du siège total

194 - Certaines législations contrairement à la France ou au Luxembourg

n‟exigent qu‟une simple majorité simple ou qualifiée. Le droit italien, impose aux

sociétés par actions qui souhaitent transférer son siège total, qu‟une majorité simple des

actionnaires. Le droit italien prévoyant également un droit de retrait au bénéfice des

actionnaires minoritaires opposés au transfert du siège, les actionnaires minoritaires

pouvant quitter la société en obtenant le remboursement de leurs actions.

195 - Le transfert international du siège social total est donc admis, les Etats

ayant le choix de l‟admettre ou non. Au sein de l‟Union européenne, le transfert de

siège social a pris une tout autre ampleur. L‟arrêt Cartesio admettant le transfert de

siège d‟une société d‟un Etat membre vers un autre Etat membre, dès lors que ce

transfert entraine un changement de loi applicable pour la société dès lors que le droit de

l‟Etat le permet. Une société peut donc se déplacer dans un autre membre et changer sa

loi applicable si les deux Etats l‟admettent par un critère de rattachement commun ou en

cas de divergence lorsque l‟Etat d‟accueil accepte le renvoi au premier degré.

98 M. Menjucq, Droit international et européen des sociétés, préc. cit.

Page 106: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

106

196 - Le transfert international de siège social emportant transfert de la loi

applicable est donc admis tant d‟un point de vue communautaire qu‟international, les

Etats ayant le choix de l‟admettre ou non. Cette admission pouvant se faire de manière

rigoureuse ou non.

b) Transfert du seul siège statutaire

197 - Le transfert du siège statutaire emporte changement de loi applicable

quand le transfert se fait d‟un Etat appliquant le critère de l‟incorporation à un Etat

appliquant le même critère. Quand ce transfert se fait d‟un Etat d‟incorporation à un

Etat utilisant le critère du siège réel ou de deux Etat utilisant le critère du siège réel, le

transfert n‟est pas admis nous l‟avons vu.

2) Le transfert de siège social sans changement de la loi applicable

198 - Le transfert de siège social peut également s‟opérer sans pour autant

changer la loi applicable à la société. C‟est le cas du transfert de siège réel qui à intérêt

pour la société d‟un point de vue fiscal. Ce transfert même s‟il ne change pas la loi

applicable reste toutefois encadré par les Etats selon que le critère de rattachement est

celui de l‟incorporation (a) ou du siège réel (b).

a) L‟Etat d‟origine utilise le critère de l‟Incorporation

199 - La société issue d‟un Etat utilisant le critère de l‟incorporation va

transférer son siège effectif dans un Etat utilisant le même critère de rattachement. Le

critère de l‟incorporation dissociant siège réel et siège statutaire, la société n‟a alors

aucun problème, la mobilité de la société est donc accrue.

200 - La société issue d‟un Etat utilisant le critère de l‟incorporation et

transférant son siège réel dans un Etat utilisant le critère du siège réel pose de nombreux

problèmes, les critères du siège réel étant opposés au critère de l‟incorporation. Dans ce

Page 107: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

107

cas là, soit l‟Etat d‟accueil dispose de règle permettant d‟admettre ce transfert, la société

étant soumis à des règles protectrices du pays d‟accueil à l‟égard des tiers comme c‟est

le cas en Belgique. L‟article 56 du code de la société Belge dispose « Une société dont

le siège réel est en Belgique est soumise à la loi belge bien que l‟acte constitutif ait été

passé en pays étranger ». C‟est également le cas des droits italien, espagnol, hollandais.

Le droit français permet également la mobilité du siège effectif de direction sans

négliger la protection des tiers, la société qui aurait transféré son siège réel en France est

admis, sauf mise en œuvre du droit des tiers ou de la théorie de la fraude.

En absence de conciliation, l‟Etat ne reconnaît pas la validité du transfert comme

en Allemagne la société devant alors se reconstituer sur le territoire de l‟Etat comme le

prévoit la Cour de cassation allemande dans l‟arrêt Ûberseering.

b) L‟Etat d‟origine utilise le critère du siège réel

201 - Le transfert du siège effectif d‟une société dont l‟Etat utilise le critère du

siège réel comme rattachement vers un Etat utilisant le critère de l‟incorporation se fait

sans difficulté, l‟Etat accueillant la société admettant la dissociation des sièges. Le

problème se pose cependant pour l‟Etat quitté. Si l‟Etat admet le critère de rattachement

du siège réel de manière moins rigoureuse, alors la question se règlera par la technique

du renvoi

202 - En revanche si la société transfert son siège effectif vers un Etat utilisant

également le critère de rattachement du siège réel, le transfert ne peut avoir lieu, le

transfert n‟étant admis ni par l‟Etat d‟origine ni par l‟Etat d‟accueil, la dissociation entre

siège réel et siège statutaire n‟étant pas admise.

203 - On constate donc, que les règles encadrant le transfert de siège social

sont limitées, la mobilité des sociétés étant le plus souvent admis, le critère du siège réel

étant peu usité par les Etats malgré que ce critère permette de limiter la concurrence.

B) La théorie du siège réel, un frein à la concurrence peu usité

Page 108: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

108

204 - Le système du siège réel impose que la loi applicable à la société soit

celle ou la société s‟est immatriculée et où elle a également son siège effectif et son

centre de direction. Le système du siège réel est donc un frein à la mobilité des

entreprises. Les sociétés doivent s‟immatriculer dans le pays ou elles ont le siège

effectif de la société, ce siège ne pouvant alors être transférer sans difficulté.

205 - En effet, selon cette conception, le transfert du siège social ne pourrait

avoir lieu sans la dissolution de la personne morale et sa nouvelle immatriculation dans

le pays accueillant. De plus, la société qui souhaite bénéficier de la législation d‟un pays

A devra s‟immatriculer dans ce pays et avoir son centre de direction dans ce pays. A

contrario si une société est immatriculée dans un pays B ou la législation est plus

favorable mais que son siège réel est dans le pays A, la société dans le pays A n‟a pas la

capacité juridique, et n‟est pas reconnu dans l‟Etats A. La théorie du siège réel, n‟admet

pas le transfert de siège social d‟un pays à l‟autre que ce soit le transfert du siège

statutaire et du siège réel, les deux devant être dans le même Etat. Si la société souhaite

changer les deux, elle doit alors se dissoudre et se reconstituer dans un autre Etat ce qui

a un cout élevé.

206 - Cette limite à la mobilité a été démontrée dans l‟arrêt Überseering du 5

novembre 200299

. La société Überseering, BV a été immatriculé au registre du

commerce d‟Amsterdam et Haarlem. En 1990, cette société acquiert un terrain en

Allemagne ou elle y fait construite un motel rénové par la société de droit allemand

Nordic Construction Company (NCC) par un contrat de maitrise. La société

Überseering invoquant des vices dans l‟exécution des travaux de rénovation, assigna la

société NCC en 1996. Sachant qu‟en 1994, les parts de la société Überseering avait été

en intégralité à deux ressortissants allemands et que par conséquent depuis la société

était dirigé effectivement en Allemagne, la société NCC fit valoir que la société

Überseering avait transféré son siège effectif en Allemagne sans modifier son

immatriculation et que par conséquent en raison du critère du siège réel applicable en

99 CJCE, 5 novembre 2002, affaire Überseering BV c/ Nordic Construction Company Baumanagement

Gmbh (NCC), JCP G, II, 10032 note M. Menjucq

Page 109: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

109

Allemagne comme critère de rattachement, la société Überseering n‟avait pas la

capacité juridique et ne pouvait donc pas ester en justice. Les recours de la société en 1er

et 2ème

instance devant les juridictions allemandes avaient été jugés irrecevable en

raison de l‟application de la jurisprudence de la Bundesgerischtshof, la Cour fédéral

allemande et de l‟opinion majoritairement favorable de la doctrine à cette décision.

Selon cette cour, la capacité juridique d‟une société s‟apprécie conformément au

droit applicable à l‟endroit ou la société à son siège effectif et non au lieu de sa

constitution. Le Bundesgerischtsof saisi par la société Überseering, décida de sursoir à

statuer en raison de la jurisprudence communautaire dans l‟arrêt Centros et pose deux

questions préjudicielle à la Cour de justice des Communautés Européennes (CJCE)

dorénavant appelé Cour de justice de l‟Union Européenne (CJUE) qui affirma le

principe de libre établissement des sociétés et le respect par cette Etats de la capacité

juridique conféré par le droit de l‟Etat membre. Apparait ici, malgré l‟impact positif que

pourrait avoir la théorie du siège réel sur la concurrence législative, la montée en

puissance de la théorie de l‟incorporation et de la mobilité des sociétés. L‟application de

la théorie du siège réel restant l‟exception.

Paragraphe 2 : L‟existence d‟obstacles fiscaux au transfert de siège social des sociétés

207 - Afin de limiter le transfert du siège social et donc le départ de la société

les Etas ont pris des mesures fiscales. La société qui souhaite transférer son siège social

doit donc apurer sa situation fiscale dans l‟Etat d‟origine, on parle alors d‟ « Exit Taxe »

(A), qui demeure hélas souvent inefficace (B).

A) Le paiement de l‟ « Exit Taxe »

208 - Le contribuable qui se délocalise doit apurer sa situation fiscale en

réglant les plus values latentes ou encore non réalisées. Cette règle fait référence aux

règles applicables aux personnes physiques qui doivent déclarer ses revenus acquis mais

également les créances acquises mais non encore encaissées.

Page 110: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

110

209 - En France, le paiement de « l‟Exit Taxe » est imposé par l‟article 221

alinéa 2 qui dispose « En cas de dissolution, de transformation entraînant la création

d‟une personne morale nouvelle, d‟apport en société, de fusion, de transfert du siège ou

d‟un établissement à l‟étranger, l‟impôt sur les sociétés est établi dans les conditions

prévues aux 1 et 3 de l‟article 201 ». L‟article 201 alinéa 1disposant, « Dans le cas de

cession ou de cessation, en totalité ou en partie, d'une entreprise industrielle,

commerciale, artisanale ou minière, ou d'une exploitation agricole dont les résultats sont

imposés d'après le régime du bénéfice réel, l'impôt sur le revenu dû en raison des

bénéfices réalisés dans cette entreprise ou exploitation et qui n'ont pas encore été

imposés est immédiatement établi ».

La société française qui souhaite transférer son siège social doit donc

fiscalement être taxée comme une dissolution et aura pour effet de rendre imposable

immédiatement tout les bénéfices et plus values non imposée résultant de la différence

entre l‟actif net réel et l‟actif comptable ainsi que du boni de liquation.

D‟autres Etat utilise le système de « l‟Exit Taxe », tels que le Royaume-Uni, la

Belgique ou encore les Etats-Unis. Ces obstacles fiscaux au transfert de siège et

changement de loi applicable, cette mesure étant souvent inefficace.

B) L‟inefficience de cette mesure

210 - L‟obstacle fiscal du transfert du siège social devait mettre un frein à la

délocalisation des sociétés, cette mesure étant inefficace dans l‟Union européenne entre

les Etats membres et plus généralement dans les transferts entre Etats.

211 - La loi de finance de 2005 dans un but d‟harmonisation européenne va et

plus précisément dans son article 34 annuler l‟obstacle fiscal en complétant l‟article 221

alinéa 2 en y ajoutant un alinéa. Le nouvel alinéa de l‟article 221 dispose « Toutefois, le

transfert de siège vers un autre Etat membre de la Communauté européenne, qu‟il

s‟accompagne ou non de la perte de la personnalité juridique en France, n‟emporte pas

les conséquences de la cessation d‟entreprise ». Le transfert de siège social dans un

autre Etat membre est donc levé de tout obstacle fiscal, les sociétés des Etats membres

Page 111: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

111

pouvant alors être transféré sans obstacle fiscal, seul sont taxé les plus values afférentes

aux actifs réellement transféré ou cédé lors du transfert de siège100

.

212 - De plus, même si le transfert de siège à un cout fiscal pour les sociétés

celle-ci vont accepter de le payer en raison de l‟avantage sur le long terme que va leur

apporter le transfert. Pour exemple si dans un pays A, la société a chaque année

imaginons un cout de 10, alors que dans un pays B se cout serait de 5. La société va

accepter de payer 10 pour le transfert du siège du pays A au pays B sachant qu‟en 3 ans

elle aura amorti les sommes. De plus, la société va économiser sur le long terme,

imaginons que le cout reste le même au bout de 10 ans, la société qui accepté de payer

le transfert aura payé, 60 (10 X 5 + 10 de transfert) alors que si elle n‟avait pas payé le

cout du transfert la société aurait payé en 10 ans, 100. La société à donc économisé 40,

213 - La mobilité des sociétés connait des freins, des règles nationales, celles-

ci demeurant marginal, voir insuffisante. Au regard du dépassement des règles national,

le droit international privé doit lui trouver toute sa place.

SECTION 2 : L‟EXISTENCE DE REGLE PROPRE AU DROIT INTERNATIONAL

PRIVE POUR REGULER LA CONCURRENCE

214 - Face à la perte significative des frontières et l‟affranchissement qu‟elle

implique, le droit international privé doit pouvoir trouver toute sa place. L‟insuffisance

de la théorie de la fraude à la loi (Paragraphe 1), véritable outil de régulation de la

concurrence doit permettre la mise en place d‟autres mécanismes (Paragraphe 2).

100 Projet de loi des finances , article 17, pour approfondir ce point, consultation du projet de loi

disponible sur le site, http://www.senat.fr.

Page 112: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

112

Paragraphe 1 : L‟insuffisance de la théorie de la fraude à la loi, comme outil de

régulation

215 - La théorie de la fraude à la loi est un moyen efficace de faire obstacle au

choix d‟une loi pour des raisons frauduleuses. Ce choix étant possible par la

modification de l‟élément de rattachement va être sanctionnée en écartant la loi choisie.

Cette théorie de la fraude à la loi (A) est donc un outil de régulation, son application aux

sociétés demeurent cependant insuffisante (B).

A) La théorie de la fraude à la loi

216 - La fraude à la loi en droit international privé vient sanctionner la fraude

d‟une personne qui soumise à une loi qui la contrarie va tenter de se placer sous

l‟empire d‟une loi étrangère plus complaisante en modifiant volontairement le critère de

rattachement à cette loi. L‟exception de fraude à la loi ne peut être établie que si

différents éléments sont constitués, la modification de l‟élément de rattachement (1), et

l‟intention frauduleuse (2), la sanction pouvant alors avoir lieu (3).

1) La modification artificielle de l‟élément de rattachement

217 - L‟élément de rattachement doit être modifié dans le but de faire

appliquer une autre loi plus favorable. Le déplacement de l‟élément constitue alors une

fraude, mais tous les déplacements ou changements de l‟élément de rattachement ne

constitue pas toujours une fraude quand le sujet de droit a la possibilité de changer

l‟élément de rattachement et que ce changement se fait sans intention frauduleuse mais

juste par l‟exercice d‟un droit.

Le rattachement des sociétés à un Etat et le fruit de sa volonté, la fraude pouvant

alors avoir lieu en cas d‟intention frauduleuse.

Page 113: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

113

2) L‟intention frauduleuse

218 - L‟élément frauduleux est l‟élément essentiel dans l‟exception de fraude

quand la modification du rapport de droit est admise et constitue un acte licite. La

fraude impose donc un élément intentionnel dans cet acte licite, l‟intention d‟éluder les

dispositions impératives qui lui étaient applicables. Par conséquent, le changement de

loi applicable doit non seulement être le résultat de la manœuvre mais aussi le but

exclusif, la seule finalité de la manœuvre. La manipulation du critère de rattachement,

tels que le transfert du siège d‟une société, ou l‟immatriculation d‟une société dans un

Etat utilisant le critère de l‟incorporation et ayant une législation favorable pour

finalement garder son siège effectif et ses principales activités dans le pays initiale

constituera une fraude à la loi seulement si l‟intention de bénéficier d‟une législation

favorable est prouvée. Si les éléments sont retenus la fraude peut être sanctionnée.

3) La sanction de la fraude à la loi

219 - La fraude à la loi va être sanctionnée à l‟occasion de la résolution d‟un

litige par le for ou au moment de la demande de reconnaissance de l‟exequatur. Le juge

va refuser de faire droit au raisonnement invoqué et va priver la manœuvre frauduleuse

de l‟effet attendu. La nullité peut être retenue si l‟opposabilité ne permet pas de parvenir

à l‟inefficacité de la fraude, la nullité ne pouvant pas cependant portée atteinte à la

souveraineté étrangère, ce qui limite les cas de nullité.

B) L‟application de la théorie de la fraude à la loi aux sociétés et personnes

morales, une application limitée

220 - Les sociétés sont des sujets de droit mobile, l‟implantation dans un pays

éloigné de leur centre d‟activité effectif n‟est pas un frein, l‟essor des communications

accroissant leur mobilité. Le « domicile » de la société dépend de la volonté des

fondateurs, une possibilité de fraude existe donc. La loi applicable à la société peut donc

Page 114: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

114

être choisie par les parties par la désignation du siège social et l‟accomplissement des

formalités de constitution dans le pays choisi. La fraude consistera donc, à rattacher la

société à un Etat avec qui elle n‟a aucun lien effectif et ce, afin de soustraire la société à

la règlementation applicable dans l‟Etat auquel elle est rattachée par des liens plus

étroit. L‟objet de la fraude est alors la règlementation des sociétés et le moyen

frauduleux est le recours à une loi qui ne correspond au véritable lien que la société a

avec le pays.

221 - En France, les sociétés sont soumises à la loi française lorsqu‟elles ont

leur siège social sur le territoire. La notion de siège social nous l‟avons vu en France, à

été sujet de controverse, certains auteurs considérant que par siège social, il faut

entendre siège réel, d‟autres et nous nous rangeons à cette avis considère que la France

utilise le siège statutaire comme critère de rattachement. Avant la loi de 1966 de

nombreux arrêt ont sanctionné les sociétés qui avaient tenté de frauder la loi française

en considérant que la loi applicable à la société est celle de son siège réel101

. Depuis, la

modification de l‟article L 210-3, le critère de rattachement est celui du siège statutaire,

le siège réel ne s‟appliquant qu‟a l‟égard des tiers. La société peut donc se voir appliqué

la loi de son siège réel, à savoir la loi française si le siège réel est en France à l‟égard

des tiers.

222 - Le siège réel apparait encore une fois ici, comme un moyen de

prévention et de sanction d‟une fraude au droit. Si une société s‟est immatriculée dans

un pays A mais à son centre effectif dans un pays B, et qu‟elle s‟est immatriculée sous

la loi du pays A que pour échapper à la législation du pays B, la fraude à la loi aura du

mal a être reconnue par le for du pays B si celui-ci considère que la société est régie par

la loi de son immatriculation. Si l‟Etat utilise le critère du siège réel comme critère de

rattachement, la difficulté ne se posera pas, la société serait régie par la loi du pays B et

la fraude à la loi serait alors constituée. L‟Etat d‟accueil doit utiliser le critère du siège

réel pour que l‟exception de fraude à la loi soit retenue. Le problème ici, est que les

Etats utilisent majoritairement le système de l‟Incorporation comme critère de

101 Cass crim 21 novembre 1989, JDI 1889, p. 850

Page 115: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

115

rattachement, la seule limite étant à l‟égard des tiers qui peuvent comme en droit

français, se prévaloir du siège réel quand celui-ci est différent.

223 - La fraude à la loi est donc un outil utile pour permettre la vraie

application de la loi écartée, cet outil étant difficilement applicable à la société, le

critère de l‟incorporation admettant le choix de la loi applicable. D‟autres outils doivent

donc être utilisés pour permettre de réguler indirectement la concurrence entre les droits

des sociétés.

Paragraphe 2 : La nécessité d‟utiliser d‟autres outils de régulation

224 - La théorie de la fraude à la loi étant insuffisante, il apparait nécessaire de

recourir à d‟autres outils déjà présents dans le droit international pénal, l‟abus de droit

(A) ou les lois de police (B).

A) La nécessité de recourir à d‟autres règles pour limiter la concurrence, l‟abus de

droit

225 - La théorie de la fraude à la loi, nous l‟avons vu n‟est pas un outil

suffisant pour réguler la concurrence, d‟autres outils devant être utilisés tels que l‟abus

du droit de choisir la loi applicable. L‟abus du droit de choisir la loi applicable découle

de l‟abus de droit dans le choix du for (1), admis en droit international privé, l‟extension

de ce régime a l‟abus du droit de choisir la loi applicable pouvant être admise (2).

1) L‟admission de l‟abus du choix du for

226 - Initialement la théorie de l‟abus d‟un droit est totalement ignorée par le

droit international privé car ce dernier n‟accorde aucun droit subjectif, il détermine

seulement les lois applicables et l‟autorité compétente pour l‟appliquer. On ne peut

également pas parler d‟abus de règle de conflit, car cela nécessiterait au préalable la

Page 116: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

116

désignation de la loi applicable au droit subjectif moyen de l‟abus. Cependant, cette

incompatibilité disparait quand on admet une certaine influence de la volonté pour le

choix d‟un juge. Le droit international privé crée alors un véritable droit subjectif pour

le sujet de droit international, le droit de choisir la loi qui sera applicable à sa situation.

227 - Le droit d‟agir en justice, est considéré par la loi française comme un

droit fonction doué d‟une finalité propre, donc tout utilisation de ce droit dans un but

autre que de faire éclater la vérité constitue un abus102

. Pour la CJUE, une action en

justice peut constituer un abus de droit si elle a été exercé « dans le but, d‟obtenir, au

détriment de l‟autre partie des avantages illégitimes et manifestement étrangers à

l‟objectif de ladite disposition »103

.

L‟abus du choix du for est admis en droit interne, le droit français donne

compétence a la loi du for pour déterminer l‟existence ou non d‟un abus, la CJUE la

rejoignant dans l‟arrêt Kefalas, puisqu‟elle admet, « qu‟il ne saurait être considéré

comme contraire à l‟ordre juridique communautaire que les juridictions nationales

appliquent une rège nationale (…) pour apprécier si un droit découlant d‟une disposition

communautaire est exercé d‟une manière abusive ». La loi du for est donc compétente

pour déterminer les mises en œuvre de réserve de l‟abus de droit.

228 - L‟abus du choix du for peut se caractériser de deux manières, quand le

demandeur va introduire une action internationale devant un for éloigné du défendeur

dans le seul but de lui nuire ou quand le demandeur va saisir un for à la place d‟un autre

pour obtenir un résultat déterminé, qu‟il n‟aurait pas obtenu en saisissant l‟autorité

compétente. La sanction de l‟abus de droit du choix du for, étant similaire à celle de la

fraude à la loi à savoir la perte du droit abusivement invoqué.

La sanction peut être fondée sur la théorie du forum non conveniens, qui consiste

à l‟autorité saisi de refuser d‟exercer sa compétence, en raison de l‟exercice abusif de

l‟option de compétence. La théorie du forum non conveniens n‟est cependant pas admis

en droit français et dans l‟Union européenne. La sanction de l‟abus ne peut avoir lieu

102

Article 31-1 et 103 du code de procédure civil 103

CJCE 12 mai 1998, affaire C-367/96, Kefalas

Page 117: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

117

que par la privation du droit de porter cette demande devant l‟autorité et non par la

privation de la compétence de cette autorité. La sanction peut également être fondée sur

l‟irrecevabilité de la demande. L‟abus du choix du for peut être pris comme un élément

d‟appréciation de la légitimité de l‟intérêt à agir du demandeur. La réserve de l‟abus du

choix du for n‟atteint que l‟exercice de l‟action et non la compétence de l‟autorité saisie,

par conséquent la sanction par l‟irrecevabilité va permettre de préserver le droit d‟agir

du demandeur tout en sanctionnant le choix abusif du for. La théorie de l‟abus de droit

s‟applique lorsque le choix du for est admis, elle devrait alors avoir vocation à

s‟appliquer quand le choix de la loi est admis.

2) L‟extension de la réserve de l‟abus au choix de la loi applicable

229 - L‟abus du choix du for est donc un moyen efficace de sanctionner le

forum shopping quand la théorie de la fraude à la loi est insuffisante. Dans le domaine

de la loi applicable l‟abus au choix de la loi applicable, pourra par analogie à la réserve

de l‟abus du choix du for sanctionner l‟utilisateur abusif de la loi. Contrairement à la

fraude qui sanctionne la modification frauduleuse du critère de rattachement, la réserve

de l‟abus du choix dans la loi applicable sanctionnera alors l‟utilisation abusive du droit

de choisir la loi applicable. La sanction serait alors l‟inapplicabilité de la choisi de

manière abusive, la détermination de l‟abus dépendant alors de la loi du for ou le litige

est soumis. Cette application viendrait compléter la théorie de la fraude à la loi et se

substituerait quand celle-ci ne s‟applique pas.

230 - L‟abus du choix dans le droit applicable apparait comme un moyen

efficace de réguler la concurrence car il relève de la compétence du for et dans de

nombreux droit la théorie de l‟abus de droit est appliquée. D‟autres mécanismes propres

au droit international privé peuvent être appliqués pour réguler la concurrence telle que

l‟ordre public ou la loi de police mais cela parait insuffisant.

Page 118: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

118

B) L‟ordre public et les lois de police, des outils insuffisants

231 - L‟exception de l‟ordre public va permettre quand la loi applicable choisie

est contraire à l‟ordre public du for d‟écarter cette loi. L‟ordre public permet donc

d‟écarter une loi quand celle porte atteinte aux intérêts de l‟Etat ou est en contradiction

avec les valeurs de cet Etat. Cette exception d‟ordre public va avoir le même effet que la

fraude à la loi, la loi sera écartée mais non en raison de l‟attitude du demandeur mais en

raison de la loi elle-même. La solution apportée par la loi, apparait pour le juge du for

tellement choquante au regard des conceptions du for que celle-ci ne peut pas

s‟appliquer. L‟exception d‟ordre public permet donc d‟écarter une loi mais les

conditions d‟applications sont nombreuses et variables, et l‟exception d‟ordre public est

rarement admise pour les sociétés souhaitant une législation à moindre cout.

232 - Les lois de police sont des lois propres à chaque droit national, à chaque

Etat et elles ont une importances telles pour l‟Etat qu‟elles ne peuvent pas être écartées.

La CJUE, les définie comme des « dispositions nationales dont l‟observation a été jugée

cruciale pour la sauvegarde de l‟organisation politique, sociale et économique du pays.

On ne peut les écarter »104

. Les lois de police apparaissent donc comme une mesure de

régulation de la concurrence, ces lois devront être appliquées qu‟importe la loi choisie, à

l‟image du Sarbanes-Oxley Act américain de 2002 qui a vocation à s‟appliquer de

manière extraterritoriale. Les lois de police peuvent donc apparaitre comme un outil de

régulation associé aux autres outils, la société devant quand même se soumettre à des

dispositions impératives lorsqu‟elles existent.

104 CJUE 23 novembre 1999, Arblade, JDI 2000. 493, observation Luby

Page 119: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

119

CONCLUSION TITRE 2

233 - « Le seul mauvais choix, c‟est l‟absence de choix »105

, les sociétés ont

bien compris cela, et vont utiliser le choix qui leur est offert pour optimiser leur

stratégie, leur économie, leur rendement. Cette optimisation est naturelle, les sociétés et

leurs dirigeants poursuivent un but propre, commun à tous, celui de s‟enrichir. Le choix

de la loi applicable ne va donc pas se faire dans un but altruiste, ce choix pouvant

entrainer des dérives, des abus tels que le « forum shopping », ou encore le « law

shopping ».

La réponse des Etats à ce choix, est un produit concurrentiel répondant à une

demande qui si elle n‟est pas orientée vers le haut va provoquer un « race to the

bottom », une concurrence à la législation à moindre cout, un « effet Delaware ». La

concurrence des Etats ne peut pas être directement régulée, aucune règle aujourd‟hui ne

saurait encadrer la législation d‟un Etat et lui dicter sa conduite législative. La

concurrence doit donc être régulée par l‟autre coté, par les personnes qui poussent à la

concurrence, les acteurs économiques mobiles.

La régulation de leur mobilité et de leur choix contient des règles tant nationale et

propre au droit des sociétés qu‟international, avec les règles de droit international privé.

Cependant malgré la profusion de règle, celle-ci demeure souvent inefficace, la mobilité

apparaissant comme un principe et la concurrence législative par son caractère si

particulier ne peut être pleinement prise en compte par des règles générales.

105 A. Nothomb, Métaphysique des tubes, extrait.

Page 120: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

120

CONCLUSION PARTIE 2

234 - La concurrence législative existe, elle porte sur des droits biens

particuliers, des droits disponibles, pouvant être choisie, et ayant un enjeu pour l‟Etat

tels que le droit des sociétés. La concurrence législative existe mais est elle une bonne

chose ?

235 - La question ne comporte pas de réponse, la concurrence pouvant amener

tant des effets positifs que négatifs. Cependant au vue des impacts sur la règle de droit

la concurrence doit être régulée, avec un droit à sa mesure à l‟image des acteurs se

livrant compétition.

Page 121: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

121

CONCLUSION GENERALE

236 - « Le tout est un rébus, une devinette, une interrogation béante, une

énigme. Pour avancer dans cette énigme aussi loin que possible, nous avons une seule

source de ressource : notre pensée. Et un seul outil : la science ».

237 - L‟assimilation du droit à un produit, sa place sur un marché va paraitre

pour de nombreuses personnes impossibles, paradoxales, voire même fantaisistes.

Cependant, tout au long de notre étude nous avons démontré l‟étrange similitude entre

les mouvements de convergence que connait le droit des sociétés dans le monde

aujourd‟hui et la logique du marché des biens et services. Le droit des sociétés par son

caractère si particulier permet l‟association droit/ produit/ marché/ concurrence. Le

marché du droit étant une réalité déjà admis par de nombreux auteurs, « il existe bel et

bien un marché du droit » écrivait Catherine Kessedjian106

. La convergence entre les

droits des sociétés, la circulation des droits trouve sa seule explication dans la volonté

des Etats d‟offrir sur ce marché des produits attractifs répondant à la demande. La

concurrence des Etats sur ce marché à donc un impact sur le droit, elle est source de

convergence, elle est également une source de risque.

238 - La concurrence régulée est une source d‟efficacité tant pour le marché,

tant pour les producteurs, que pour les consommateurs. La concurrence législative doit

donc être régulée, encadrée. Cependant, les Etats ne sont pas comme les simples

producteurs sur le marché des biens de consommation, il n‟existe pas d‟autorité

supérieure aux Etats, la concurrence qui se livre ne peut donc pas être régulé par une

autorité supérieure. Apparait alors toute l‟opportunité de réguler la concurrence par

l‟autre bord, les acteurs économique de ce marché, cette régulation n‟étant pas

suffisante.

106C. Kessedjan, « Le droit entre concurrence et coopération », préc. cit.

Page 122: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

122

239 - Certains auteurs tels que Andrew Guzman, considère qu‟il est nécessaire

de recourir à « un législateur supranationale ». Sans conforter ou infirmer cette

proposition, il nous apparait essentiel que l‟Etat prennent des dispositions pour réguler

la concurrence. L‟Etat bien qu‟acteur sur le marché ne doit pas oublier qu‟il a également

des obligations, il ne peut se comporter comme un banale producteur, les conséquences

pouvant être désastreuse.

Page 123: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

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concrets(1),Occasions manquées et naissantes pour une convergence méthodologique

entre le droit français et le droit anglais », RTD Civ. 2005 p. 47.

C. STURLÈSE, “Doing Business 2007: How to Reform”, Dalloz 2006, p. 2386.

T

C. THIBELGE, “Le droit souple”, RTD civ. 2003 p. 599

C.TIEBOUT “A Pure Theory of Local Expenditure”, Journal of Political Economy,

1956, n°64, p.416 et s.

A. TUNC , « Le rapport Vienot sur le conseil d‟administration des sociétés cotées »,

Revue internationale de droit comparé, vol. 48, n°3, Juillet-septembre 1996, p 647

V

S. VALORY, « Promouvoir le droit français », Droit et Economie, n°93, p. 6-9

VI- JURISPRUDENCE

JURIDICTION FRANCAISE

Page 132: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

132

A- COUR DE CASSATION

Cass., civ. 30 mars 1971, “Caisse centrale de réassurance des mutuelles agricoles », JCP

1972, II, 17101, Bruno Opettit.

Cass., civ. 17 octobre 1972, Société Royal Dutch, Revue critique DIP 1973, p.520, note

Batifol :

Cass., com. 2 juillet 1985, D. 1986, 951 note Y. Loussouarn

Cass., crim 21 novembre 1989, JDI 1889, p. 850

Cass., ass., plén 21 déc. 1990, Juris-Data n° 1990-713531 , D. 1991, p. 305,

conclusion Dontewille

B- COUR D‟APPEL

Cour d‟appel de Paris, 17 juin 1992, BOCCRF n°13/92

C- PREMIERE INSTANCE

Tribunal civil de Nancy, 15 avril 1883, Jurisclasseur fasicule 564-10 n°82

JURIDICTION EUROPENNE

CJCE 12 mai 1998, affaire C-367/96, Kefalas

CJCE, 28 septembre 1999, affaire C-440/97, Groupe Concorde e.a

CJUE 23 novembre 1999, Arblade, JDI 2000. 493, observation Luby

CJCE, 5 novembre 2002, affaire Überseering BV c/ Nordic Construction Company

Baumanagement Gmbh (NCC), JCP G, II, 10032 note M. Menjuc

Page 133: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

133

VII- SITE INTERNET

www.paradisfiscaux.com/royaumeunis.htm

www.lentrepriseeuropeenne.com/ESPACE%20CREATION/Avantages.htm

www.bluemercurysolutions.ltd.uk

www.kpmg.com

www.fondation-droitcontinental.org

www.biu-montpellier.fr

www.ecgi.org

Page 134: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

134

TABLE DES MATIERES

REMERCIEMENTS ........................................................................................................ 2

SOMMAIRE ..................................................................................................................... 4

PRINCIPALES ABREVIATIONS .................................................................................. 5

INTRODUCTION ............................................................................................................ 6

PREMIERE PARTIE 1 : LA CONVERGENCE ENTRE LES DROITS DES

SOCIETES CONSEQUENCES D‟UNE CONCURRENCE LEGISLATIVE .............. 13

TITRE 1 : LE DROIT DES SOCIETES, UN PRODUIT JURIDIQUE

CONCURRENTIEL ................................................................................................... 14

CHAPITRE 1 : L‟EMERGENCE D‟UN PRODUIT JURIDIQUE ESTAMPILLE

DROIT DES SOCIETES ........................................................................................ 14

SECTION 1 : L‟ADMISSIBILITE D‟UN DROIT EN TANT QUE PRODUIT

CONSEQUENCE D‟UN CONTEXTE JURIDIQUE NOUVEAU ................... 15

Paragraphe 1 : Un contexte juridique nouveau permettant ce paradoxisme... 15

A) La mondialisation, un phénomène multiple ....................................... 15

B) La globalisation, créatrice et vectrice d‟une concurrence .................. 17

Paragraphe 2 : Le dépassement d‟une conception classique du droit............. 18

A) Une définition du droit dépassé quand à sa création ......................... 19

B) Une définition du droit dépassé quand a sa substance ........................ 20

SECTION 2 : L‟ASSIMILATION DU DROIT DES SOCIETES A UN

PRODUIT ........................................................................................................... 21

Paragraphe 1 : Le droit des sociétés, un véritable produit pour les entreprises

........................................................................................................................ 22

Paragraphe 2 : Le cout du droit des sociétés pour les entreprises .................. 23

A) Le cout d‟immatriculation du droit des sociétés ................................. 24

B) L‟impact fiscal du droit des sociétés .................................................. 25

CHAPITRE 2 : L‟EXISTENCE D‟UNE CONCURRENCE LEGISLATIVE

MONDIALE ENTRE DROIT DES SOCIETES.................................................... 29

SECTION 1 : L‟ADMISSIBILITE D‟UNE CONCURRENCE ENTRE

PRODUIT DROIT DES SOCIETES ................................................................. 29

Paragraphe 1 : L‟admission théorique d‟une concurrence entre produit de

droit ................................................................................................................. 29

Page 135: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

135

A) L‟analyse de la concurrence juridique de Charles Tiebout ................ 30

B) Analyse de la concurrence juridique d‟Anthony Ogus ....................... 32

Paragraphe 2 : L‟admission de la concurrence par le choix de facteur

volontariste : le choix du rattachement des sociétés ....................................... 34

A) Le libre choix du rattachement de la société concernant la nationalité

34

1) L‟existence de la nationalité des sociétés ....................................... 35

a) Une naissance controversée ......................................................... 35

b) L‟affirmation incontestée de l‟existence d‟une nationalité des

sociétés................................................................................................ 37

2) Les critères de détermination de la nationalité des sociétés ........... 38

a) L‟affirmation du critère du siège social ....................................... 38

b) Le critère alternatif du contrôle ................................................... 39

B) L‟impact du rattachement volontaire de la société concernant la loi

applicable .................................................................................................... 41

1) La détermination de la loi applicable ............................................. 41

a) Le système de l‟incorporation...................................................... 42

b) Le système du siège réel .............................................................. 43

2) Le domaine de la lex societatis ....................................................... 44

SECTION 2 : LA MISE EN ŒUVRE D‟UNE CONCURRENCE ENTRE

PRODUIT DROIT DES SOCIETES ................................................................. 45

Paragraphe 1 : Le rapport Doing Business, l‟exemple de vecteur de

concurrence ..................................................................................................... 45

A) La hiérarchisation des différents droits des affaires ........................... 46

1) La mesure économique de l‟efficience du droit ............................. 46

2) La mise en œuvre d‟un classement des législations ....................... 47

B) L‟impact du rapport Doing Business .................................................. 48

Paragraphe 2 : La volonté française d‟obtenir un droit des sociétés attractif . 50

A) La prise en compte du rapport Doing business ................................... 50

B) La mise en œuvre de moyen pour rendre attractif le droit français des

sociétés........................................................................................................ 52

CONCLUSION DU TITRE 1 .................................................................................... 54

TITRE 2 : L‟ECHANGE ENTRE LES PRODUIT « DROIT DES SOCIETES »

DANS UNE VOLONTE CONCURRENTIELLE ..................................................... 55

Page 136: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

136

CHAPITRE 1 : L‟EMPRUNT DE SOLUTION EXTERNE PAR LE DROIT

FRANÇAIS : L‟EXEMPLE DE LA CORPORATE GOVERNANCE ................. 55

SECTION 1 : LA CORPORATE GOVERNANCE : UN CONCEPT ANGLO-

SAXON .............................................................................................................. 55

Paragraphe 1 : La naissance de la « Corporate Governance »....................... 56

A) La naissance aux Etats-Unis ............................................................... 56

B) La naissance au Royaume-Uni ........................................................... 57

Paragraphe 2 : Le concept de « Corporate Governance » ............................. 57

SECTION 2 : LA PLACE DE LA « CORPORATE GOVERNANCE » DANS

LE DROIT FRANÇAIS DES SOCIETES ......................................................... 59

Paragraphe 1 : L‟intégration de la « Corporate Governance » par des normes

privées ............................................................................................................. 60

A) Les rapports Vienot, un rapport Cadbury français ............................. 60

1) Le rapport Vienot I, sur le Conseil d‟administration des sociétés

cotées ...................................................................................................... 60

a) Les recommandations sur la mission et les attributions du conseil

61

b) Les recommandations sur la composition et le fonctionnement du

Conseil d‟administration..................................................................... 63

2) Le rapport Vienot II, Comité sur le gouvernement d‟entreprise .... 64

a) Les recommandations concernant la dissociation des pouvoirs

dans la société ..................................................................................... 64

b) Les recommandations pour plus de transparence ........................ 65

c) Les recommandations sur la composition et le fonctionnement du

Conseil ................................................................................................ 66

B) L‟existence de nombreuses autres normes privées ......................... 67

Paragraphe 2 : L‟intégration de la « Corporate Governance » par le législateur

........................................................................................................................ 68

A) L‟intégration de la « Corporate Governance » par la loi sur les

nouvelles régulations économiques ............................................................ 69

B) La « Corporate Governance » aujourd‟hui ......................................... 72

CHAPITRE 2 : UNE CONVERGENCE ENTRE LES DROITS NES D‟UNE

VOLONTE CONCURRENTIELLE ...................................................................... 75

SECTION 1 : LE TRANSFERT ENTRE LES DROITS DES SOCIETES NES

D‟UNE VOLONTE CONCURRENTIELLE ..................................................... 76

Page 137: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

137

Paragraphe 1 : L‟existence de différents processus d'interaction entre les

droits ............................................................................................................... 76

Paragraphe 2 : L‟application de la transplantation en droit des sociétés ........ 77

A) Définition de la transplantation .......................................................... 77

B) La transplantation conséquence d‟une concurrence législative .......... 78

SECTION 2 : L‟EXISTENCE D‟UN MARCHE DU DROIT DES SOCIETES

............................................................................................................................ 80

Paragraphe 1 : La définition de la notion de marché ...................................... 80

A) Une tentative de définition ................................................................. 80

B) Les conditions d‟existence du marché ................................................ 81

Paragraphe 2 : Son application controversée au produit droit des sociétés .... 82

A) L‟existence des conditions d‟application du marché .......................... 82

B) L‟existence d‟un marché du droit des sociétés ................................... 83

CONCLUSION DU TITRE 2 .................................................................................... 85

CONCLUSION DE LA PARTIE 1 ................................................................................ 86

DEUXIEME PARTIE : LES CONSEQUENCES D‟UNE CONCURRENCE

LEGISLATIVE POUR OBTENIR UN DROIT CONCURRENTIEL .......................... 87

TITRE 1 : LES DANGERS DE LA CONCURRENCE ENTRE LES ETATS SUR

LA REGLE DE DROIT ............................................................................................. 87

CHAPITRE 1 : LA DEGENERESCENCE DE LA REGLE DE DROIT .............. 88

SECTION 1 : LA PERTE DE VALEUR DE LA REGLE DE DROIT ............. 88

Paragraphe 1 : La négation de la valeur morale du droit ................................ 88

Paragraphe 2 : La perte de neutralité de la règle de droit ............................... 89

SECTION 2 : LE DANGER INEVITABLE D‟UN NIVELLEMENT VERS LE

BAS DES LEGISLATIONS NATIONALES .................................................... 90

CHAPITRE 2 : L‟ABSENCE D‟OPTIMISATION DE LA REGLE DE DROIT . 92

SECTION 1 : L‟ABSENCE D‟AMELIORATION DE LA REGLE DE DROIT

............................................................................................................................ 92

SECTION 2 : L‟ABSENCE D‟INNOVATION DE LA REGLE DE DROIT... 94

CONCLUSION DU TITRE 1 .................................................................................... 96

TITRE 2 : LA NECESSITE D‟ENCADRER EFFICACEMENT LA

CONCURRENCE LEGISLATIVE ............................................................................ 97

Page 138: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

138

CHAPITRE 1 : LES DERIVES DE LA CONCURRENCE LEGISLATIVES

POUR LE SUJET DE DROIT INTERNATIONAL .............................................. 97

SECTION 1 : LE « LAW SHOPPING » ............................................................ 97

SECTION 2 : LE « FORUM SHOPPING »....................................................... 99

CHAPITRE 2 : L‟INSUFFISANCE DES REGLES POUR REGULER CETTE

CONCURRENCE ................................................................................................ 101

SECTION 1 : L‟INSUFFISANCE DES REGLES NATIONALES POUR

REGULER LA CONCURRENCE ENTRE LES DROITS DES SOCIETES . 102

Paragraphe 1 : L‟insuffisance des règles propres au droit des sociétés pour

limiter la concurrence ................................................................................... 102

A) La réglementation limitée des transferts de siège social .................. 103

1) Transfert du siège social emportant changement de la lex societatis

103

a) Le transfert du siège total........................................................... 103

α) Le refus du transfert international du siège total ...................... 104

β) Les conditions rigoureuses de transfert international du siège

total ............................................................................................... 104

Ω) les conditions souples de transfert international du siège total 105

b) Transfert du seul siège statutaire ............................................... 106

2) Le transfert de siège social sans changement de la loi applicable 106

a) L‟Etat d‟origine utilise le critère de l‟Incorporation .................. 106

b) L‟Etat d‟origine utilise le critère du siège réel .......................... 107

B) La théorie du siège réel, un frein à la concurrence peu usité............ 107

Paragraphe 2 : L‟existence d‟obstacles fiscaux au transfert de siège social des

sociétés.......................................................................................................... 109

A) Le paiement de l‟ « Exit Taxe » ....................................................... 109

B) L‟inefficience de cette mesure .......................................................... 110

SECTION 2 : L‟EXISTENCE DE REGLE PROPRE AU DROIT

INTERNATIONAL PRIVE POUR REGULER LA CONCURRENCE ......... 111

A) La théorie de la fraude à la loi ......................................................... 112

1) La modification artificielle de l‟élément de rattachement ............ 112

2) L‟intention frauduleuse................................................................. 113

3) La sanction de la fraude à la loi .................................................... 113

Page 139: LE DROIT PRODUIT D’EXPORTATION

139

B) L‟application de la théorie de la fraude à la loi aux sociétés et

personnes morales, une application limitée .............................................. 113

Paragraphe 2 : La nécessité d‟utiliser d‟autres outils de régulation ............. 115

A) La nécessité de recourir à d‟autres règles pour limiter la concurrence,

l‟abus de droit ........................................................................................... 115

1) L‟admission de l‟abus du choix du for ......................................... 115

2) L‟extension de la réserve de l‟abus au choix de la loi applicable 117

B) L‟ordre public et les lois de police, des outils insuffisants ............... 118

CONCLUSION TITRE 2 ......................................................................................... 119

CONCLUSION PARTIE 2 .......................................................................................... 120

CONCLUSION GENERALE ...................................................................................... 121

BIBLIOGRAPHIE........................................................................................................ 123

TABLE DES MATIERES ............................................................................................ 134