Le coup de Jarnac - societe-colposcopie.com · tour de ce cancer déconsidéré. ... 17 % de...

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www.courrier-picard.fr COURRIER PICARD MARDI 12 JANVIER 2016 48 TDER1. LE DESSIN D’ALEX Au cours d’une semaine dernière placée sous le signe des hommages aux victimes des attentats de l’an passé, le premier dé- placement d’un président en exercice sur la tombe de François Mitterrand à Jarnac est passé inaperçu. Coup de com’ dans l’eau donc, mais geste signifiant pour l’ac- tuel président. À travers cet instant de recueillement de- vant la tombe de son illustre prédéces- seur et la proclamation à son égard de sa « fidélité active », François Hollande ne fait pas que s’inscrire dans la fidélité à l’homme qu’il « avait suivi » et du pré- sident qu’il « avait servi » (en tant que chargé de mission en 1981). Nul doute qu’à l’Élysée, on médite d’ailleurs plus sur le second septennat de Mitterrand, celui de la « France unie » de 1988. Un président désavoué dans les sondages, violemment rejeté par une partie croissante du pays, privé de majorité parlementaire depuis deux ans et qui réussit à se faire brillam- ment élire grâce à son positionnement « au-dessus des partis » et, surtout au-de- là de la gauche qui l’avait fait élire sept ans plus tôt. Une stratégie de rêve que l’actuel président semble plus que jamais vouloir rééditer. Ce serait certes omettre que l’élection de « Mitterrand II » doit beaucoup au rejet, conjoncturel, du gou- vernement Chirac de 1986-1988… Et que ce second septennat restera surtout comme un naufrage complet de la gauche dans le cynisme et l’affairisme. Mais alors qu’une initiative médiatico- politique pour l’organisation d’une « pri- maire à gauche » refait surface – avec son arrière-plan d’agit-prop tactique tout au- tant qu’irréaliste – François Hollande peut espérer puiser dans l’exemple du président « florentin » de quoi éliminer toute concurrence. Si le coup à Jarnac a raté sa cible, le coup de Jarnac – cette figure d’escrime auda- cieuse et imprévue, tout autant que dé- loyale – reste, lui, plus que jamais d’ac- tualité. L’ÉDITORIAL DE DANIEL MURAZ Le coup de Jarnac P our le cancer du sein, il existe « Octobre rose ». Mais pour le col de l’utérus ? Rien d’aussi médiatique. La onzième cause de cancer chez la femme (jeune) doit se contenter d’une simple semaine européenne, dont la 10 e édition au- ra lieu du 24 au 30 janvier pro- chain. Pour l’occasion, dans la Somme notamment, des dépis- tages gratuits seront organisés dans les hôpitaux (Amiens, Abbe- ville, Doullens, Corbie, Péronne et Montdidier) ainsi que dans divers centres de PMI. Avec ou sans ren- dez-vous. En principe, 60 000 flyers auront relayé l’infor- mation dans les pharmacies et ca- binet médicaux. L’effort est louable. Mais il en faudra davan- tage pour mobiliser les femmes au- tour de ce cancer déconsidéré. « Ce qui péche, c’est l’organisation de la prévention. Il n’y en a quasi aucune. Surtout par rapport à nos voisins eu- ropéens », grince le professeur Jean Gondry, chef de service de gynéco- logie obstétrique au CHU d’Amiens. 17 % de couverture vaccinale Ses 3 000 cas par an en France pèsent moins que les 50 000 can- cers du sein recensés. Ils s’avèrent pourtant mortels pour un tiers d’entre eux. De quoi faire pester le spécialiste, car « ce cancer est évi- table ! », ne cesse-t-il de rabâcher. Ce cancer est lié à un virus, le pa- pillomavirus (HPV), acquis à l’âge des premiers rapports sexuels. Pour s’en prémunir, un vaccin existe, à administrer en deux injec- tions chez les adolescentes entre 11 et 14 ans. Sauf qu’en France, la couverture vaccinale anti-HPV est tombée à 17 %, contre 40 % en Alle- magne voire 86 % outre-Manche. Assez cher, l’anti-HPV (il n’est pas le seul vaccin) trimbale surtout une mauvaise réputation, taxé de favo- riser l’apparition de la sclérose en plaque. Une étude de l’Agence de sécurité du médicament (ANSM) vient de la contester, qualifiant ce vaccin de « rassurant », même si elle admet un risque sur le syndrome (neurologique) de Guillain-Barré. Sur un nombre de cas « faible ». Le papillomavirus entraîne de pe- tites lésions précancéreuses. Pour la plupart des femmes, elles s’éli- mineront par leur propre immuni- té. Mais pas pour toutes. « Le vaccin ne couvre que 75 % des types de lé- sions. Il faut donc quand même se faire dépister par frottis tous les trois ans entre 25 et 65 ans », recom- mande le professeur Gondry. L’exa- men consiste à prélever des cel- lules sur le col pour analyse. Une autre technique existe : la colosco- pie permet d’observer directement sous microscope les lésions. Quel que soit l’examen, le choix de trai- tement se trouve ainsi guidé. Par chimio ou radiothérapie le cas échéant. Ou par le retrait chirurgi- cal d’une partie du col. Et là encore, cette intervention dite par conisation « n’est pas faite comme il faut », déplore le spécia- liste, par ailleurs responsable na- tional de l’enseignement de cette sous-spécialité gynécologique. « Souvent les chirurgiens en enlèvent trop ou pas ce qu’il faut. » Ce qui ac- centue derrière le risque d’accou- chement prématuré ou d’infertili- té. GAËL RIVALLAIN Dépistage du 25 au 29 janvier. Renseignement auprès de l’ADEMA, au 03 22 93 32 45 Col de l’utérus, ce cancer mal traité SANTÉ Vaccination, dépistage, traitement… Pour le professeur Gondry, spécialiste au CHU d’Amiens, la prise en charge de cette maladie évitable reste à améliorer en France. Jean Gondry le déplore, trop souvent, les interventions ne sont pas assez exécutées selon les critères standards de qualité. Une charte de qualité en colposcopie Le risque d’accouchement préma- turé, la Société française de colpo- scopie et de pathologie cervicova- ginale (SECPCV) dont Jean Gondry est le vice-président, ne veut plus s’y résoudre. Le jeudi 14 janvier, le groupe d’experts lancera à Paris une charte de qualité en colposco- pie, voulue pour les femmes comme une assurance de bonne prise en charge. Les signataires, dont les noms seront visibles par les patientes sur plusieurs sites de sociétés savantes, s’y engageront à suivre une formation continue. Et surtout à pratiquer au moins trente actes par an. Une garantie supplémentaire ? Le professeur Gondry temporise : « Disons que l’on commence bas. La norme eu- ropéenne en recommanderait plu- tôt 100… »

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www.courrier-picard.frCOURRIER PICARD MARDI 12 JANVIER 2016

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TDER1.

LE DESSIN D’ALEX

Au cours d’une semaine dernière placéesous le signe des hommages aux victimesdes attentats de l’an passé, le premier dé-placement d’un président en exercice surla tombe de François Mitterrand à Jarnacest passé inaperçu. Coup de com’ dansl’eau donc, mais geste signifiant pour l’ac-tuel président.À travers cet instant de recueillement de-vant la tombe de son illustre prédéces-seur et la proclamation à son égard de sa« fidélité active », François Hollande ne faitpas que s’inscrire dans la fidélité àl’homme qu’il « avait suivi » et du pré-sident qu’il « avait servi » (en tant quechargé de mission en 1981). Nul doutequ’à l’Élysée, on médite d’ailleurs plus surle second septennat de Mitterrand, celuide la « France unie » de 1988. Un présidentdésavoué dans les sondages, violemmentrejeté par une partie croissante du pays,privé de majorité parlementaire depuisdeux ans et qui réussit à se faire brillam-ment élire grâce à son positionnement

« au-dessus des partis » et, surtout au-de-là de la gauche qui l’avait fait élire septans plus tôt. Une stratégie de rêve quel’actuel président semble plus que jamaisvouloir rééditer. Ce serait certes omettreque l’élection de « Mitterrand II » doitbeaucoup au rejet, conjoncturel, du gou-vernement Chirac de 1986-1988… Et quece second septennat restera surtoutcomme un naufrage complet de la gauchedans le cynisme et l’affairisme.Mais alors qu’une initiative médiatico-politique pour l’organisation d’une « pri-maire à gauche » refait surface – avec sonarrière-plan d’agit-prop tactique tout au-tant qu’irréaliste – François Hollandepeut espérer puiser dans l’exemple duprésident « florentin » de quoi éliminertoute concurrence.Si le coup à Jarnac a raté sa cible, le coupde Jarnac – cette figure d’escrime auda-cieuse et imprévue, tout autant que dé-loyale – reste, lui, plus que jamais d’ac-tualité.

L’ÉDITORIAL DE DANIEL MURAZ

Le coup de Jarnac

Pour le cancer du sein, il existe« Octobre rose ». Mais pour lecol de l’utérus ? Rien d’aussi

médiatique. La onzième cause decancer chez la femme (jeune) doitse contenter d’une simple semaineeuropéenne, dont la 10e édition au-ra lieu du 24 au 30 janvier pro-chain. Pour l’occasion, dans laSomme notamment, des dépis-tages gratuits seront organisésdans les hôpitaux (Amiens, Abbe-ville, Doullens, Corbie, Péronne etMontdidier) ainsi que dans diverscentres de PMI. Avec ou sans ren-dez-vous. En principe,60 000 flyers auront relayé l’infor-mation dans les pharmacies et ca-binet médicaux. L’effort estlouable. Mais il en faudra davan-tage pour mobiliser les femmes au-tour de ce cancer déconsidéré. « Cequi péche, c’est l’organisation de laprévention. Il n’y en a quasi aucune.Surtout par rapport à nos voisins eu-ropéens », grince le professeur JeanGondry, chef de service de gynéco-logie obstétrique au CHU d’Amiens.

17 % de couverture vaccinaleSes 3 000 cas par an en France

pèsent moins que les 50 000 can-cers du sein recensés. Ils s’avèrentpourtant mortels pour un tiersd’entre eux. De quoi faire pester lespécialiste, car « ce cancer est évi-table ! », ne cesse-t-il de rabâcher.

Ce cancer est lié à un virus, le pa-pillomavirus (HPV), acquis à l’âgedes premiers rapports sexuels.Pour s’en prémunir, un vaccinexiste, à administrer en deux injec-

tions chez les adolescentes entre11 et 14 ans. Sauf qu’en France, lacouverture vaccinale anti-HPV esttombée à 17 %, contre 40 % en Alle-magne voire 86 % outre-Manche.Assez cher, l’anti-HPV (il n’est pasle seul vaccin) trimbale surtout unemauvaise réputation, taxé de favo-riser l’apparition de la sclérose enplaque. Une étude de l’Agence desécurité du médicament (ANSM)vient de la contester, qualifiant cevaccin de « rassurant », même si elle

admet un risque sur le syndrome(neurologique) de Guillain-Barré.Sur un nombre de cas « faible ».

Le papillomavirus entraîne de pe-tites lésions précancéreuses. Pourla plupart des femmes, elles s’éli-mineront par leur propre immuni-té. Mais pas pour toutes. « Le vaccinne couvre que 75 % des types de lé-sions. Il faut donc quand même sefaire dépister par frottis tous les troisans entre 25 et 65 ans », recom-mande le professeur Gondry. L’exa-

men consiste à prélever des cel-lules sur le col pour analyse. Uneautre technique existe : la colosco-pie permet d’observer directementsous microscope les lésions. Quelque soit l’examen, le choix de trai-tement se trouve ainsi guidé. Parchimio ou radiothérapie le caséchéant. Ou par le retrait chirurgi-cal d’une partie du col.

Et là encore, cette interventiondite par conisation « n’est pas faitecomme il faut », déplore le spécia-

liste, par ailleurs responsable na-tional de l’enseignement de cettesous-spécialité gynécologique.« Souvent les chirurgiens en enlèventtrop ou pas ce qu’il faut. » Ce qui ac-centue derrière le risque d’accou-chement prématuré ou d’infertili-té.

GAËL RIVALLAIN

▶ Dépistage du 25 au 29 janvier.Renseignement auprès de l’ADEMA,au 03 22 93 32 45

Col de l’utérus, ce cancer mal traitéSANTÉ Vaccination, dépistage, traitement… Pour le professeur Gondry, spécialiste au

CHU d’Amiens, la prise en charge de cette maladie évitable reste à améliorer en France.

Jean Gondry le déplore, trop souvent, les interventions ne sont pas assez exécutées selon les critères standards de qualité.

Une charte de qualité en colposcopie

Le risque d’accouchement préma-turé, la Société française de colpo-scopie et de pathologie cervicova-ginale (SECPCV) dont Jean Gondryest le vice-président, ne veut pluss’y résoudre. Le jeudi 14 janvier, legroupe d’experts lancera à Parisune charte de qualité en colposco-pie, voulue pour les femmescomme une assurance de bonneprise en charge. Les signataires,dont les noms seront visibles parles patientes sur plusieurs sites desociétés savantes, s’y engagerontà suivre une formation continue. Etsurtout à pratiquer au moinstrente actes par an. Une garantiesupplémentaire ? Le professeurGondry temporise : « Disons quel’on commence bas. La norme eu-ropéenne en recommanderait plu-tôt 100… »