Le Comité organisateur - CSOB Le...R. Marie-Ève Arcand R. Lyne Ringuette R. Denyse Leduc R....
Transcript of Le Comité organisateur - CSOB Le...R. Marie-Ève Arcand R. Lyne Ringuette R. Denyse Leduc R....
Le Comité organisateur
Isabelle Langlais, enseignante
Mélanie Francoeur, enseignante
R. Denyse Leduc, Club Richelieu Fontaine
Christian Landry, directeur adjoint
Josée Lacasse, secrétaire
Les membres du jury
R. Diane Comeau
R. Sylvie Lafontaine
R. Mirenda Fillion
R. Sonia Lefebvre
R. Marie-Ève Arcand
R. Lyne Ringuette
R. Denyse Leduc
R. Claudine Levesque
Aux enseignantes et enseignants de français
et d’arts plastiques
Merci pour votre contribution à la promotion de cette activité.
Veuillez considérer que les textes sont écrits par des élèves du secondaire.
Leur façon d’écrire est celle de jeunes qui sont en apprentissage.
Nous avons voulu respecter le plus fidèlement possible leurs textes, tels qu’ils les ont écrits.
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Mot de la présidente du Club Richelieu-Fontaine
’est avec grand plaisir que le Club Richelieu-Fontaine renouvelle son
mandat de promouvoir l’utilisation correcte du français auprès des
étudiants de la polyvalente Le Carrefour de Val-d’Or.
Par le biais du concours d’écriture La Plume Fontaine, les étudiants sont invités à
exposer leur talent d’auteur. Chaque année, nous découvrons de très beaux textes.
Depuis plus de 25 ans, le Club Richelieu-Fontaine de concert avec les professeurs
de français et la direction de la polyvalente Le Carrefour s’implique à faire rayonner
le français tout en suscitant la créativité des étudiants. Nous souhaitons ainsi
contribuer à développer leur goût pour la lecture et l’écriture.
Félicitations et merci à tous les participants. Merci aux professeurs de français et
d’arts plastiques.
Bonne lecture!
Denise Leduc Présidente Club Richelieu-Fontaine de Val-d’Or
C
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Mot du directeur adjoint du Carrefour
’est avec un grand plaisir que nous vous partageons pour une 22e année
consécutive le fruit de l’expression littéraire des lauréats du concours
d’écriture La Plume Fontaine.
C’est un très grand plaisir de voir année après année autant de jeunes vouloir
partager leur œuvre et leur créativité.
Dans cette édition, les jeunes auteurs avaient le défi d’inclure dans leur texte une
expression usuelle incluant un des mots suivants : encre, mot ou lettre. Encore
une fois, vous serez épatés par leur créativité, leur sensibilité et leur plume
extraordinaire. Une édition qui ne vous laissera pas sans mot…
Bravo à tous nos lauréats de cette 22e édition et un grand merci aux membres du
Club Richelieu Fontaine de soutenir le concours depuis les tout débuts.
Je vous laisse donc le plaisir de lire les œuvres de nos jeunes écrivains… toute
l’encre versée ne doit pas rester lettre morte!
Bonne lecture,
Christian Landry Directeur adjoint Polyvalente le Carrefour
C
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Mot de l’enseignante responsable
e concours Plume Fontaine est l’occasion pour les jeunes d’écrire ce qu’ils
ont réellement le goût d’écrire. Encore une fois cette année, plusieurs
élèves se sont réunis pour participer à cet après-midi d’écriture. Cette
année, les élèves devaient écrire un texte littéraire avec une expression contenant
le ou les mots LETTRE, ENCRE OU MOT.
Nous pouvons vous dire que cette journée-là, beaucoup d’encre a coulé, que les
mots ont tourné et que les lettres ont dansé. Environ 150 élèves ont tenté de
se distinguer. Le mystère, le bonheur et les émotions ont transpercé les textes de
chacun. L’imaginaire de tous a voyagé à travers les feuilles de papier.
Alors, chers lecteurs, nous vous laissons découvrir l’univers des élèves qui ont su se
faire remarquer.
Isabelle Langlais
Enseignante Mélanie Francoeur
Co-responsable du projet Plume-Fontaine Co-responsable du projet Plume-Fontaine
L
Illustrations gagnantes
Illustration page titre
par Samantha Giroux 4e secondaire
Illustration page 7
par Amigaelle Paquette 5e secondaire
Illustration page 18
par Pascale Labranche 5e secondaire
Illustration page 28
par Patricia Morin 5e secondaire
Textes gagnants
Premières positions
Plateforme
par Daphnée Michaud 1re secondaire
Presque immortel par Charlotte Goulet-Poulin
2e secondaire
Toi
par Valérie Létourneau
3e secondaire
Le journal du suicide
par Katherine Leclair 5e secondaire
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Plateforme par Daphnée Michaud
1re secondaire
éa se réveilla et s’extirpa de son lit. Aujourd’hui,
c’était un jour qu’elle n’appréciait pas. C’était le jour
du héros Élias, celui qui avait sauvé tout le monde. C’est lui
qui avait construit le dôme où le reste de la population qui
avait survécu à l’explosion nucléaire qui avait ravagé la Terre
il y a cinquante ans. Maintenant, l’entière population était dans
une bulle sous l’eau.
Béa descendit en bas pour prendre son déjeuner. Elle prit un bol
de céréales et alla s’asseoir dans la salle à manger avec ses
parents. Une fois fini, elle mit son bol dans l’évier et alla se
préparer. Une quinzaine de minutes plus tard, elle redescendit
attendre ses parents dans l’entrée. L’avant-midi se déroula
commes les autres avant-midis du dimanche. Aller au monument
dédié à Elias, assister à la cérémonie en son honneur et puis
rentrer chez soi.
Une fois rentrée, Béa alla directement dans sa chambre se changer
en pyjama pour profiter du reste de sa matinée. Après s’être
changée, elle prit son livre et se coucha sur son lit. Quand elle
ouvrit son livre, elle se fit déjà déranger par des chuchotements
provenant de l’extérieur. Elle soupira et se laissa guider par
les chuchotements. Ceux-ci l’amenèrent sur son balcon. Béa
découvrit son meilleur ami en bas de celui-ci.
- Isaac! Qu’est-ce que tu fais ici? demanda-t-elle.
- Il faut qu’on se parle, descends, dit Isaac.
Elle retourna dans sa chambre et se changea en jeans et en
t-shirt. Béa prit ensuite son téléphone et descendit les marches.
Elle mit ses chaussures et sortit voir Isaac qui était sur le
trottoir devant chez elle. Elle lui adressa un grand sourire et
alla le rejoindre.
B’
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- On y va, dit Isaac d’un ton joyeux.
Béa hocha la tête et ils se dirigèrent vers le bois proche de
chez elle. Rendus à la cabane qu’ils avaient construite étant
jeunes, les deux adolescents allèrent s’asseoir sur le toit pour
parler.
- Tu ne trouves pas que la Plateforme s’est agrandi?
Commença Isaac.
- Oui. Est-ce que tu penses qu’on pourra bientôt sortir?
- Je ne sais pas.
Ils continuèrent à parler et élaborèrent un plan.
Depuis quelques années, Béa et Isaac s’intéressaient à une grosse
plaque rocheuse au-dessus du dôme et depuis peu, ils avaient
découvert une sortie.
Une semaine plus tard…
Comme tous les dimanches, les familles allèrent à la cérémonie.
Depuis leur discussion, Béa et Isaac sentaient que c’était cette
semaine qu’ils allaient sortir, mais un petit ou plutôt un gros
problème les inquiétaient. Un gros requin se promenait.
Les familles s’installèrent dans le monument peu à peu. Quand
tout le monde fut assis, la cérémonie commença. Béa stressait au
plus haut point. Elle voyait le requin par la vitre du monument.
Elle et Isaac se lançaient des regards. Tout à coup, le requin
percuta le dôme. Tout le monde se fit un sang d’encre. Pendant ce
temps, Béa et Isaac passèrent à l’action. Ils firent évacuer tout
le monde par la porte de la bulle. Tout le monde se dépêcha à
monter les marches. Petit à petit, les personnes découvrir un
nouveau monde. Une fois tout le monde en haut, sain et sauf, Béa
alla vers Isaac et lui dit :
- Une nouvelle vie commence.
Puis, la bulle éclata.
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Presque immortel par Charlotte Goulet-Poulin
2e secondaire
e me réveille un bon matin. J’ouvre lentement les yeux, un à
un. J’étire tranquillement tous les muscles de mon corps et
appelé pour mon déjeuner, je m’extirpe de mon lit douillet tout
en me léchant les babines. Mon déjeuner, identique à celui
d’hier, est toujours un régal. Je passe donc la journée à faire
cette routine : manger, dormir et parfois boire.
Après cette journée paisible pleine de repos, je décide d’aller
faire une promenade dehors, aux alentours de 23 heures. Pendant
le chemin du retour, je passe par la ruelle pour rentrer chez
moi.
À peu près au milieu de celle-ci, j’aperçois malencontreusement
un groupe s’approcher de moi. Méfiant, je fais demi-tour, mais
l’autre moitié m’attendait de ce côté. Ils s’approchent
dangereusement, puis m’attaquent sans aucune pitié dans les yeux.
J’ai peur. Je me défends comme je le peux, mais seul contre cinq,
ça devient de moins en moins évident : j’essaie de peine et de
misère de les blesser avec des coups ou encore de fortes
égratignures. Les minutes s’écoulent. J’ai mal. Je me fais un
sang d’encre pour ma vie. Je n’ai plus de forces, je suis faible.
Ils m’ont abattu : je me vide de mon sang. Je baigne même dans
celui-ci. Les yeux mi-clos, je souris. Je souris, car je me dis
que sur neuf, il me reste encore huit vies.
J
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Toi par Valérie Létourneau
3e secondaire
’ai toujours cru qu’à la fin, j’allais accueillir la mort
avec tranquillité. Je m’imaginais m’éteindre sereinement dans
tes bras. Te sentir près de moi m’aurait réconforté.
Pourtant, comme cela est arrivé trop souvent dans ma vie, rien ne
se passe comme je l’avais prévu. Tu m’as laissé ici sans un
regard d’adieu. À quelques secondes de ma fin, je repense à ma
vie avec toi.
Mes premiers souvenirs remontent à la nuit où tu m’as trouvé.
J’errais, perdu, dans un dépotoir. Quand je t’ai aperçu, j’ai cru
mourir de peur. Tu étais si grand! Mais, la faim qui me torturait
a pris le dessus sur ma panique quand j’ai senti une délicieuse
odeur émaner de ton sac. Tu m’as nourri et offert ce que je
n’avais jamais eu : de l’amour. J’ai alors compris que ma crainte
était injustifiée. Ton grand corps ne servait qu’à contenir toute
la gentillesse du monde. Tu m’as ramené chez toi et élevé comme
un fils pendant toutes ces années. J’adorais quand tu m’amenais
au parc et que tu me laissais me faire des nouveaux amis, mais ce
que je préférais, c’était nos moments à tous les deux. Quand tu
n’arrivais pas à dormir, occupé par de sombres pensées, tu
m’amenais prendre de longues marches dans la nuit d’encre. À
notre retour, tes problèmes semblaient disparus et tu dormais
profondément. Tout allait pour le mieux et je n’aurais pu être
plus heureux. Et puis, un jour, notre petit monde a été
chamboulé. Tu m’as fait marcher jusqu’au parc, comme à tous les
jours. Il y avait plus d’enfants qu’à l’habitude, ce qui m’a
rendu agité. Plus de nouveaux copains! Je m’amusais comme un fou
et tout allait bien jusqu’à ce que j’agrippe la jambe de l’un des
ces enfants. J’étais si joyeux que je l’ai serré fort, trop fort.
Le goût métallique du sang s’est répandu dans ma bouche au moment
où le gamin a hurlé. Ce n’était qu’un jeu. Je ne voulais pas le
J
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blesser, mais le mal était fait. Tu m’as pris par le cou tandis
que d’autres personnes accouraient vers le blessé. Sa jambe était
creusée de profonds sillons laissés par mes crocs. Autour du
membre blessé s’étalait une flaque de sang. Tu m’as ramené à la
maison d’où nous ne sommes pas pas sortis pendant plusieurs
jours. Tu ne voulais plus jouer ou sortir la nuit.
Au terme de ces sombres journées, tu m’as finalement accordé de
l’attention. Tu as déposé un baisé sur mon front et m’as amené
prendre une marche. Nous nous sommes arrêtés devant un bâtiment
tout blanc. Une femme en est sortie et m’a pris par le cou pour
me tirer à l’intérieur. Inquiet, j’ai voulu te regarder, mais tu
as détourné les yeux. Tu es reparti sans m’accorder un dernier
regard. Je me suis senti terriblement seul, comme si une partie
de moi avait disparu avec toi. La femme m’a trainé dans une pièce
étrange où régnait une écoeurante odeur de propreté. Elle a
planté une seringue dans mon cou puis le monde a commencé à
tourner.
Au terme de ma vie, mon seul regret est de ne pas avoir pu te
dire à quel point je t’ai aimé.
Adieu, humain!
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Le journal du suicide par Katherine Leclair
5e secondaire
‘homme est foncièrement méchant. C’est un fait. L’histoire le
prouve encore et encore. Il a continuellement le besoin de se
sentir supérieur, souvent au détriment d’une victime, que ce soit
un nègre, une femme ou un animal sans défense.
Je suis une victime. Seule, sans défense et complètement
impuissante face à cette masse liguée contre moi.
Il s’agit là d’un autre défaut de l’homme. Cette habitude de se
ranger aveuglément derrière celui qui parle le plus fort, celui
qui semble dominer, qu’il soit bon ou mauvais.
J’ai décidé de ne pas nommer qui que ce soit dans ce dernier
témoignage. Ils se reconnaitront bien. Si ce n’est pas le cas, il
n’y a plus rien à faire pour eux. Alors, voici mon dernier écrit,
mon témoignage du pouvoir des mots.
Voilà 468 jours, soit 1 an, 3 mois et 12 jours que tout a
commencé. Je le sais, c’était le jour de mon anniversaire. Pour
l’occasion, ma mère avait eu la gentillesse de quitter le bureau
pour m’apporter un gâteau à l’école. Ce geste, que j’avais trouvé
tellement gentil, est pourtant devenu le prétexte des autres pour
s’en prendre à moi. Je suis devenue « la petite fille à sa
maman », « bébé Suzi » ou encore la « no-friends girl ». Il ne
s’agissait que de petits surnoms au départ.
Puis les choses ont commencé à dégénérer. Ils se sont mis à
raconter des histoires, à me créer une vie remplie de drames
outrants. Ma mère avait-elle fait cela pour compenser le fait
qu’elle était alcoolique? Ou encore parce que mon père était en
prison pour trafic de drogue? Ma mère devait être battue, peut-
être que moi aussi. Un jour, j’ai entendu quelqu’un dire que le
fait que je sois battue pourrait expliquer mon visage. Celle-là
L
’
’
’
’
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m’a fait mal, vraiment. L’hilarité générale qui a suivi encore
plus.
Pour la première fois, je me suis détestée profondément. Chaque
jour était une épreuve atroce. Chaque insulte était comme mille
gifles. Chaque larme était une partie de moi qui mourrait à petit
feu.
Le temps avançait et leurs attaques empiraient. M’insulter ne
suffisait plus. Il leur fallait quelque chose de plus gratifiant.
Ils se mirent à me bousculer, à faire tomber mes livres, à
barbouiller des obscénités sur mon casier. C’est là que je me
suis mise à me cacher. Les toilettes et les dernières rangées de
la bibliothèque étaient mes seuls refuges.
En permanence, j’étais dans un état d’angoisse et de terreur. Les
larmes et la solitude étaient devenues mon quotidien. Pourtant,
on me forçait à revenir à l’école. Même le système d’éducation
était contre moi. Je me haïssais un peu plus chaque jour.
Pourquoi fallait-il que je vienne au monde ainsi? Pourquoi
n’étais-je pas jolie et populaire? Pourquoi étais-je aussi
stupide?
On parle d’intimidation à tout va. On le publicise, on dit qu’il
y a toujours de l’aide disponible. Mais ces gens, ces maudits
adultes, ne sont d’aucune aide, ils n’y comprennent rien! Il ne
suffit pas d’en parler pour que tout cesse! Il n’y a aucune
solution, aucune issue! Une fois qu’on est ciblé, une fois qu’ils
ont réussi à s’armer contre vous, c’est fini!
Fini
J’ai toujours cru que la vie consistait en une succession
d’épreuves visant à tester notre vivacité, notre désir à demeurer
en ce triste monde. Certains disent que Dieu n’envoie les plus
grandes batailles qu’à ses meilleurs soldats.
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Je n’ai jamais cru en Dieu. En fait, il y a longtemps que j’ai
cessé de croire en Dieu. En fait, il y a longtemps que j’ai cessé
de croire en quoi que ce soit.
468 jours. Pas un de plus. C’est ici que je m’arrête. Je n’en
peux plus, je ne peux plus vivre avec moi-même.
Ces mots étaient mes derniers.
Puisse ma mort vous faire réaliser tout le pouvoir des mots.
Suzie Hammer
Deuxièmes positions
Où sont-ils?
par Léa Bolduc 1re secondaire
Encre sympathique
par Myriam Béland 2e secondaire
Lettre à maman
par Justine Mongrain Petit 3e secondaire
Le survivant
par Félix Auclair 4e secondaire
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Où sont-ils? par Léa Bolduc
1re secondaire
e me demande pourquoi tante Isabelle pleure comme ça.
Pourquoi sommes-nous ici? C’est si triste dans cette pièce.
Pourquoi personne n’est heureux ici? Voilà ce que Marie-Soleil, 6
ans se demande depuis presque 1 h 30 maintenant.
Tantôt, tante Isabelle et moi étions chez une de ses amies, Lili-
Rose. Je m’amusais bien avec sa fille. Nous jouions avec ses
poupées et nous faisions du bricolage. Tout à coup, tante
Isabelle reçut un appel. Elle n’eut même pas le temps de
raccrocher qu’elle me dit de m’habiller et d’entrer dans la
voiture tout de suite. Elle avait vraiment l’air inquiète.
Après quelques minutes de route, tante Isabelle se mit à pleurer.
Ne sachant pas pourquoi elle pleurait, je lui demandai :
- Tante Isabelle, pourquoi es-tu triste?
Ne répondant pas tout de suite, elle se mit à sécher ses larmes
et me dit alors :
- Pour rien Marie-Soleil, tout va bien aller.
Je ne comprenais pas trop ce qu’elle voulait dire. Qu’est-ce que
signifiait « tout va bien aller »? Je me rendis alors compte que
ce n’était pas le bon temps pour poser des questions.
Il est 15 h 47 et ça fait maintenant exactement 1 h 30 que tante
Isabelle et moi sommes arrivées dans cette pièce et que nous
attendons. Qu’est-ce que nous attendons? Je n’en sais rien.
Soudain, je me souviens qu’à 14 h 30, maman, papa et ma grande
sœur Ariane étaient supposés venir me chercher chez Lili-Rose.
Mais où sont-ils? Je demande alors à tante Isabelle :
J
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- Est-ce que maman, papa et Ariane savent que nous sommes
ici?
- Non, me répond-elle.
À ce moment, j’ai une idée. Peut-être qu’ils sont allés faire un
tour de licorne. Même si ma grande sœur me dit souvent que ça
n’existe pas (elle a tort), je sais que ça lui plairait bien.
Non, c’est impossible, s’ils avaient eu la chance de faire un
tour de licorne, ils n’y seraient pas allés sans moi.
Peut-être aussi qu’ils ont rencontré un loup-garou en chemin et
que papa a dû utiliser toute sa force pour le combattre et
protéger maman et Ariane. Ça leur aurait pris plus de temps pour
arriver. Ils auraient aussi dû arrêter à la crèmerie pour que
papa mange une crème glacée et reprenne des forces. Non, ça ne se
peut pas, ils ne seraient jamais allés à la crèmerie sans moi,
surtout quand la saveur du jour est banane.
Ne sachant vraiment pas où est ma famille, je demande à tante
Isabelle :
- Pourquoi maman, papa et Ariane ne sont pas là?
- Tu sais Marie-Soleil, parfois, les gens qu’on aime nous
quittent pour toujours. Ta famille a eu un accident. Moi
aussi je suis sans mot, mais quoiqu’il arrive…
Elle n’eut pas le temps de finir sa phrase qu’on entendit :
- Bip! Bip! Bip!
- Docteur, venez vite! Son cœur ne bat plus…
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Encre sympathique par Myriam Béland
2e secondaire
n beau jour d’été, dans une petite ville, une vieille femme
nommée Anne était assise comme à son habitude sur sa chaise
berçante située sur sa galerie. Elle vit alors le facteur qui la
salua et lui donna une lettre.
Anne la prit et lorsqu’elle vit le nom inscrit dessus, elle fut
très surprise, car il s’agissait de son ancienne amie d’enfance,
Sarah. La vieille dame ouvrit impatiemment la lettre, mais fut
déçue lorsqu’elle vit une feuille blanche. Elle l’observa en
espérant trouver au moins un seul mot, mais il n’y avait rien. La
femme âgée mit cette dernière au recyclage en se disant qu’il
s’agissait d’une blague de mauvais goût.
Anne était une vieille femme un peu seule, mais heureusement,
elle recevait régulièrement la visite de sa petite-fille. Une
semaine plus tard, lorsque celle-ci arriva, elle demanda à sa
grand-mère de lui faire de la limonade, car il faisait chaud
dehors et la recette de sa mamie était la meilleure. Anne se mit
alors au travail. Tandis qu’elle pressait des citrons, elle se
souvint qu’à l’époque, avec Sarah, elles s’échangeaient des
messages secrets écrits avec différentes substances qui
produisaient une encre invisible et qui se dévoilait avec la
chaleur d’une bougie allumée. Le jus de citron donnait une
écriture brunâtre, le vinaigre, une écriture rouge et le jus de
cerise, une écriture verte. Elles avaient fait des expériences
avec plein de produits.
Soudain, Anne pensa à la lettre qu’elle avait reçue la semaine
dernière. Elle alla la chercher dans le bac de recyclage et
pleine d’espoir, mit une flamme de bougie sous le papier. C’est
alors que le texte caché apparut. Le message était le suivant :
U
La Plume Fontaine 2015-2016 23
« Bonjour Anne! Cela fait si longtemps que nous nous sommes
parlé. Je me demande combien de temps il t’a fallu pour
comprendre que j’ai écrit à l’aide d’encre invisible. Même après
tout ce temps, je savais que notre amitié n’aurait pas changé. Tu
me manques énormément, c’est pourquoi je t’écris cette lettre.
Pour moi, notre amitié est la chose la plus importante au monde.
J’ai décidé que j’irais te rendre visite dans environ deux
semaines, car tu sais que j’habite loin et que le voyage pour te
voir sera long. J’ai hâte de te voir. De ta meilleure amie
Sarah ».
Anne referma la lettre, émue, quand sa petite-fille vint la voir.
Elle lui demanda des informations sur la lettre et la vieille
femme lui expliqua l’importance de la véritable amitié. La grand-
mère lui montra comment écrire à l’encre invisible. La fillette
lui demande le nom de cette technique et Anne lui répondit :
« C’est l’encre sympathique ».
La Plume Fontaine 2015-2016 24
Lettre à maman par Justine Mongrain Petit
3e secondaire
hère maman,
Il est devenu fréquent pour moi de t’écrire des lettres comme
celle-ci. J’ai demandé à papa pourquoi tu ne me répondais pas. Il
m’a dit que c’était parce que tu étais partie loin. Trop loin
pour pouvoir me dire les mots « Je t’aime ».
J’ai de bonnes nouvelles maman! Le médecin a appelé papa ce
matin. Il s’est mis à pleurer. J’ai alors pensé qu’il était
heureux de la nouvelle. J’étais tout excité de savoir ce qui se
passait alors j’ai demandé à papa de m’expliquer. Il m’a
seulement dit : « Alex, tu pourras bientôt revoir maman ».
J’étais tellement heureux maman! Je vais enfin pouvoir te voir!
Cela faisait si longtemps! Je ne t’ai plus vu depuis l’accident
de voiture l’an dernier. J’ai oublié la douceur de ton sourire,
la chaleur de ta voix et le réconfort de tes câlins.
Heureusement, nous nous verrons sous peu.
Mon anniversaire est dans exactement 2 mois. J’aurai enfin mes 7
ans! J’aime beaucoup papa, mais je voudrais passer cette fête
avec toi. Peut-être que l’an prochain, nous pourrons la fêter
tous ensemble!
Tu sais maman, il y a quelque temps, j’ai passé une soirée à
regarder les étoiles avec papa. On a même vu une étoile filante!
Papa m’a dit de faire un vœu. Sais-tu ce que c’était? Que l’on
puisse te revoir un jour. Je crois bien que ça a marché! Papa
aussi a fait un vœu. Il a souhaité qu’un miracle me sauve de ce
qu’on appelle « tumeurs ». D’ailleurs, qu’est-ce que ça veut
dire?
c
La Plume Fontaine 2015-2016 25
Enfin, plus rien ne me dérange maintenant. J’ai désormais peine à
respirer. Papa se fait un sang d’encre pour moi. Ça me rend
triste. Je sais que je te rejoindrai bientôt, dans un endroit
appelé paradis. D’après papa, c’est là que les anges comme toi
attendent leur famille.
Je n’arrive plus à mouvoir mes doigts. C’est papa qui terminera
ma lettre. La chambre où je me trouve désormais n’est pas la
mienne. Celle-ci est blanche avec une toute petite fenêtre qui
donne une vue sur un parc où des enfants comme moi s’amusent.
Maintenant que je te rejoins, plus rien ne m’inquiète. J’entends
le « bip » des machines branchées à mon doigt devenir de plus en
plus lent. Papa pleure énormément depuis tout à l’heure. Je ne
l’ai jamais vu aussi chagriné. Chaque battement de cœur est plus
douloureux que le précédent. Chaque fois que je ferme les yeux,
ils deviennent de plus en plus difficiles à ouvrir. Tous mes sens
me quittent. J’entends les médecins arriver tandis que la machine
émet un son continu et que mes paupières restent closes pour
toujours.
Je t’aime maman!
Alex
La Plume Fontaine 2015-2016 26
Le survivant par Félix Auclair
4e secondaire
epuis quelque temps, tous mes amis disparaissent autour
de moi. Sans me dire un adieu, sans même que je puisse
les revoir.
Au tout début, j’étais seul, puis plus les jours avançaient,
plus j’avais des amis. Mais, la période où nous étions heureux
tous ensemble s’est terminée brusquement au cours d’une
journée de pluie. La noirceur était partout, autant que l’eau.
La pluie était tellement intense lors de cette journée qu’elle
a emporté certains de mes amis et d’autres se sont noyés. Moi,
j’avais la chance d’être sous une bâche, en hauteur, loin des
rivières en crues et des lacs qui débordaient.
Plus les jours avancent, plus je me sens seul, plus je suis
seul. En effet, les gens sont joyeux, mais moi je suis triste
parce que tous ceux qui sont autour de moi disparaissent. Nous
ne sommes plus qu’une centaine, tous près les uns des autres
de peur d’être emportés par l’eau et de disparaitre à jamais,
loin de notre famille et de nos amis. Après tout, nous sommes
seulement une petite civilisation qui tentons de survivre face
à la menace constante du réchauffement climatique.
Aujourd’hui, ça fait une semaine que les crues et les
inondations ont commencé. Je n’aurais jamais cru voir mon
meilleur ami disparaitre. C’est la nuit passée, il n’y avait
pas de lune et beaucoup de nuages, j’aurais bien aimé pouvoir
l’aider et le secourir, mais un ravin est apparu entre nous
deux et il y avait de l’eau au fond. Donc, en essayant de
traverser, je me serais sûrement noyé moi aussi. À ce moment,
je me sentais triste, choqué et surtout impuissant de ne pas
pouvoir l’aider.
D
La Plume Fontaine 2015-2016 27
Sans mes amis, je me sens seul, un peu comme une plume sans
encre, il me manque quelque chose. En fait, je suis le dernier
survivant, seul au monde. Tous mes amis se sont fait emporter
dans les pluies diluviennes ou les chaleurs extrêmes les ont
achevés. Mais, je crois que c’est maintenant mon tour,
quelqu’un m’a volé la bâche qui me protégeait des pluies et du
soleil. Mon corps commence à se désintégrer tellement le
soleil est puissant en cette journée de printemps. En fait,
c’est un cycle de la nature et je n’ai pas le choix de le
suivre. Donc, comme les autres flocons de neige, je laisse
place à l’été et je disparais.
Troisièmes positions
La Menteuse
par Léane Ménard 1re secondaire
L’enlèvement
par Maude L’Écuyer 2e secondaire
Enlever les mots de la bouche
par Danaé Allain 3e secondaire
Lily
par Anny-Pier Lévesque 4e secondaire (Ex aequo)
Anomalie de la société
par Naomie Béland 5e secondaire (Ex aequo)
La Plume Fontaine 2015-2016 30
La Menteuse par Léanne Ménard
1re secondaire
ela a commencé lors de l’été, durant une journée comme les
autres. Audrey et Félix étaient à la plage. Les deux cousins
ne savaient pas encore ce qui les attendait.
Au début, rien ne semblait différent. Le son des vagues berçait
les jeunes gens et le soleil couchant réchauffait leur peau. Un
calme magnifique régnait sur l’endroit. Malheureusement, il fut
brisé quelques instants plus tard. Des sanglots étouffés
arrivèrent à leurs oreilles brisant l’atmosphère de tranquillité.
Une adolescente pleurait, les pieds dans l’eau. Seul son dos
était éclairé par les lampadaires. Ses cheveux blonds
contrastaient avec la nuit d’encre. La jeune fille fixait
l’horizon, le regard rempli de tristesse. Ce fut Audrey qui
s’avança en premier. Elle essaya de communiquer avec
l’adolescente, mais celle-ci ne répondit pas. Le grand cœur
d’Audrey la poussa à donner refuge à la pauvre jeune femme. Elle
l’amena donc chez elle.
Le lendemain matin, lors du réveil d’Audrey, Félix était déjà
arrivé. Il était assis avec l’autre jeune fille, tentant de la
faire parler, toujours sans succès. Elle ne faisait que rire et
lui sourire, comme si elle ne comprenait pas le français. La
seule information qu’ils réussirent à lui tirer fut son nom,
Sasha. Soudain, un bulletin de nouvelles commença. Celui-ci
informait qu’une meurtrière était en liberté. Audrey et Félix ne
s’en préoccupèrent pas.
Quelques jours plus tard, la police cogna à leur porte. Cette
journée-là, Audrey était seule. Les officiers entrèrent dans le
vestibule pour questionner la jeune fille. Ils lui parlèrent
d’une personne recherchée en lui montrant une photo de Sasha.
Audrey nia avoir vu la jeune femme. Quelques heures plus tard,
Félix revint, mais aucune trace de Sasha. Ils commencèrent à
C
La Plume Fontaine 2015-2016 31
s’inquiéter. Heureusement, leur amie revint un peu plus tard.
Tout était normal, excepté une coupure sur le bras de la jeune
fille. Elle fut soignée rapidement. Félix la questionna sur une
possible rencontre avec la meurtrière. Celle-ci secoua la tête de
gauche à droite en riant. Ce n’était pas la vérité! La soirée
continua tranquillement. Soudain, le regard de Sasha changea. Une
lueur de rage s’alluma dans ses yeux. Elle prit un vase et le
jeta sur le mur près de ses amis. Elle repartit en courant,
sanglotant.
Cela faisait environ un mois que Sasha habitait avec eux.
Parfois, Sasha avait des sautes d’humeur inquiétantes. Elle
brisait plusieurs choses puis redevenait souriante. Un jour, ils
décidèrent de se rendre à la plage. Le crépuscule décorait le
ciel de magnifiques couleurs. Tout se déroulait bien, lorsqu’un
malheureux incident arriva. Sasha posa le regard sur Félix et
celui-ci en eut des frissons. Des reflets de méchanceté et une
lueur cruelle brillèrent dans ses yeux. Elle fixa son ami en
ricanant méchamment. La jeune femme se jeta sur Félix en lui
griffant sauvagement le visage. Elle le frappa à répétition avec
une férocité sans égal. Tout à coup, Sasha redevint comme avant
douce et naïve. Cela dura l’instant d’un sourire. Son rire se
transforma rapidement en ricanement. C’était comme si elle était
deux personnes différentes. Elle s’approcha à une vitesse
étonnante. Une force maléfique émanait d’elle, Félix n’avait pas
la force de se défendre et il tomba inconscient.
Un peu plus loin Audrey avait assisté à la scène, clouée sur
place par la peur. Sasha s’arrêta près d’elle prête à frapper,
mais rien ne se passa. Elle s’était figée sur place, en regardant
Audrey d’un air doux. Elle sourit à son amie une dernière fois et
tomba au sol, inerte. Son cœur avait cessé de battre. Derrière
elle, un policier avait été alerté par le bruit et avait tiré sur
Sasha.
Celle-ci avait une double personnalité, ce qui lui causait de
poser des actes impardonnables. Ils furent conduits à l’hôpital.
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Quelques jours plus tard, Félix succomba à ses blessures. Audrey
en fut démolie. Elle se rendit à la plage et pleura durant un
long moment. Elle se jura de vivre sa vie pour son cousin et ce
n’était pas un mensonge.
La Plume Fontaine 2015-2016 33
L’enlèvement par Maude L’Écuyer
2e secondaire
e son effréné des sabots percutant le sol humide se
répandait dans la forêt, faisant écho aux palpitations de
leur cœur. Riant aux éclats, Raven et sa sœur talonnaient leur
monture, chacune espérant gagner la course-poursuite engagée un
peu plus tôt. Puis, essoufflées, les deux jeunes filles
s’arrêtèrent peu à peu, tout sourire.
Leur père leur avait finalement offert une journée de repos loin
de la ferme, loin de tout problème. Que pouvaient-elles espérer
de mieux? Raven descendit doucement de sa jument et avec un
regard attendri, regarda sa sœur faire de même. Depuis la mort de
leur frère, Raven et Morgane étaient plus proches que jamais.
Malgré leur grande différence d’âge, les deux sœurs n’avaient pas
besoin de mots pour se comprendre. Toutes les deux avaient une
passion en commun; l’écriture. À chaque fin de journée, après
avoir travaillé jusqu’à l’épuisement total dans les champs ou à
nourrir les animaux, elles se rejoignaient dans la chambre à
coucher et commençaient à écrire. Écrivant des lettres pour
former des mots, pour en faire des phrases, des paragraphes, puis
une histoire. Cette sensation était pour elles si douce, leurs
plumes glissant doucement sur le parchemin, l’encre traçant
délicatement tout ce qu’elles voulaient. La forêt était pour
elles l’endroit idéal pour laisser place à l’imagination.
- Crois-tu à la magie Raven?
Cette dernière rit doucement.
- Pourquoi cette question petit cœur?
- Je ne sais pas.
Elle leva son regard vers le ciel bleu, l’air rêveur.
L
m
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Raven lui lança un regard amusé, mais ne dit rien, continuant
simplement de marcher.
Un craquement raisonna alors dans la clairière et elles
stoppèrent toutes les deux, nerveuses. Au loin, elles entendirent
leurs chevaux piaffer de peur et Raven courut dans leur
direction, tirant Morgane au passage. Lâchant la main de sa
petite sœur, Raven sauta sur sa monture et se prépara à partir.
- Raven!
Le petit cri de Morgane déchira la calme de la forêt et le cœur
de Raven par l’occasion. Retournant brusquement son cheval d’un
mouvement de bride, Raven découvrit avec effroi la scène qui la
hantera toute sa vie.
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Enlever les mots de la bouche par Danaé Allain
3e secondaire
était une fois, dans un royaume exilé du reste du monde, une
dame âgée, aigrie par le temps. Elle se nommait Marie-Louise,
mais elle se faisait couramment appeler Lou. Cette vieille dame
avait pour habitude de parler en tout temps. Elle exprimait
chacune de ses pensées à qui voulait bien l’écouter. Orpheline de
père comme de mère, elle avait dû s’épanouir par ses propres
moyens. Lou avait donc pris le métier de conteuse. Avec ce
métier, elle pouvait tout juste se mettre quelque chose sous la
dent.
Tout allait pour le mieux lorsqu’un jour, pendant qu’elle contait
son histoire favorite, une enfant prédit la fin de son récit
rocambolesque et lui enleva les mots de la bouche. Marie-Louise
était si profondément insultée qu’elle se leva d’un bon.
- Comment t’appelles-tu? lui demanda-t-elle en la pointant
du doigt.
- Zoé, murmura timidement l’enfant en baissant piteusement
les yeux.
- Tu regretteras de m’avoir enlevé les mots de la bouche,
Zoé! dit la vieille dame avant de partir prestement de la
place publique.
Marie-Louise se jura que plus personne ne lui couperait la parole
de cette manière. Ne sachant comment traiter avec la honte que
lui procurait les événements précédants, Lou partit vers les
bois, s’y réfugiant pour préparer sa vengeance.
Les saisons passèrent sans que personne n’entende parler de Lou.
Pourtant, celle-ci n’avait pas abandonné son idée de vengeance.
Dans la sombre et mystérieuse forêt, Marie-Louise rencontra une
I
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dame étrange, son visage paraissait sans âge, mais ses yeux
reflétaient de longues années de vie. La dame se présenta à
Marie-Louise sous le nom de Muriel. Muriel était une personne
hors de l’ordinaire, elle pratiquait la sorcellerie. Elle
enseigna son terrible art à Marie-Louise qui trouva dans ces
méthodes peu communes une façon de se venger de la petite Zoé.
Un soir de pleine lune, Marie-Louise, confiante de ses nouveaux
pouvoirs, décida que c’était l’heure des représailles. Elle
arriva au Royaume à l’aube. Grâce à une formule magique
incompréhensible, elle trouva la demeure de Zoé et entra.
Surprise, Marie-Louise s’aperçut qu’elle s’était absentée si
longtemps que Zoé était maintenant la mère d’une petite fille.
Zoé murmura quelques mots à sa fille, qui échappa à l’apprenti-
sorcière et l’enfant courut dehors. Maintenant seule avec sa
future victime, Marie-Louise avança lentement vers Zoé, savourant
le moment de vengeance tant attendu. Elle leva le bras pour
attaquer quand quelqu’un la prit par-derrière et la bâillonna
pour qu’elle ne puisse plus prononcer aucun mot.
Quelques jours plus tard, Marie-Louise se faisait brûler sur la
place publique pour sorcellerie. Depuis ce temps, tous les
habitants du Royaume chantonnent :
« Je sais pas si c’est vrai,
Je sais pas si c’est pas vrai,
Va donc savoir l’histoire de Marie-Louise! »
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Lily par Anny-Pier Lévesque
4e secondaire (Ex aequo)
ngourdi, épuisé, confus, voilà les états d’esprit qui
m’habitaient depuis je ne sais combien de temps. J’avais
étrangement perdu le fil, enfermé entre ces quatre murs d’un gris
terne et morose. Parfois, dans les pires moments, je me
surprenais même à me demander si une vie vécue ainsi en valait
vraiment la peine, s’il était vraiment nécessaire d’espérer
sortir de cet endroit misérable. Pourtant, on ne m’infligeait
aucune douleur physique, on ne me torturait pas. Certaines
journées, je profitais même d’un peu de compagnie. Malgré cela,
c’était comme si la solitude me rongeait jusqu’au plus profond de
l’âme, me laissant plonger dans l’ennui et la mélancolie pour
toujours.
Lorsqu’arrivaient les moments où je ne pouvais pas en supporter
plus, je replongeais dans l’unique souvenir que j’arrivais à voir
clairement dans mon esprit. Le souvenir d’un bonheur incroyable,
d’une tendresse à faire rêvasser. Lily. En fermant les yeux,
j’arrivais à voir sa longue tignasse blonde cascadant jusqu’à sa
taille, ses yeux noisette qui brillaient quand elle me regardait,
son sourire rayonnant qui aurait pu chasser les plus gros nuages,
ses mains délicates et minutieuses. Je me rappelais ces nombreux
voyages que nous avions faits ensemble, ces soirées sous les
étoiles, ces rires à gorge déployée, ces rêves d’avenir racontés.
Je me souvenais de notre amour inconditionnel.
Malheureusement, je devais tôt ou tard revenir à la réalité.
Retomber dans mon habituel ennui. Cet heureux souvenir me faisait
parfois plus de mal que de bien : j’en ignorais la fin. J’avais
l’impression qu’il s’était écoulé un certain nombre de mois,
d’années peut-être, depuis la dernière fois où j’avais réellement
vu Lily. Comment m’étais-je retrouvé ici aujourd’hui?
E
La Plume Fontaine 2015-2016 38
Un peu plus tard, la porte de la pièce où je me retrouvais en
permanence s’ouvrit en grinçant. Par l’entrebâillement de la
porte, je vis apparaître une vieille dame tout à fait ordinaire.
Ne l’ayant jamais vue auparavant, je lui demandai son nom et ce
qu’elle prononça me fit l’effet d’une bombe. Lily. Exactement
comme ma bien-aimée. Évidemment, je n’étais pas assez sot pour
croire que j’avais devant mes yeux la femme de ma vie. Celle-ci
avait de longs cheveux blancs, des yeux noisette tristes et
fatigués, un sourire à peine perceptible et des mains toutes
ridées. Malgré tout, nous discutâmes un peu, mais il ne s’écoula
que quelques minutes avant qu’une dame habillée de blanc demande
à ma visiteuse de quitter la pièce, sous prétexte que les heures
de visite étaient terminées. Sur le pas de la porte, tout juste
avant de quitter, Lily se retourna vers moi et me regarda avec un
regard mélancolique, ce qui me parut étrange provenant d’une dame
que je venais tout juste de rencontrer. Elle semblait sans mot,
comme si elle avait voulu m’exprimer quelque chose qu’il m’était
impossible de comprendre.
Drôlement confus, regardant la porte se refermer devant moi, une
solitude trop familière me regagna.
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Anomalie de la société par Naomie Béland
5e secondaire (Ex aequo)
e me faisait du sang d’encre lors de ta naissance. J’écoutais
beaucoup les gens parler autour de moi et je n’entendais pas
de belles choses. On traitait les gens de ta génération de
robots, d’êtres surdoués dépourvus de sentiment et de créativité.
J’avais peur que tu deviennes ce qu’ils disaient, une
technologie. Je voulais que tu puisses vivre comme j’avais pu le
faire. Pour mon plus grand bonheur, tu as contredit tout ce que
j’avais pu entendre.
À 7 ans, tu refusais de t’asseoir devant un ordinateur toute la
journée et de faire le travail que tu avais à faire.
Comparativement aux autres enfants, tu préférais courir, aller
dehors et raconter des histoires. Tu étais toujours en train de
parler et tu refusais d’obéir.
À 10 ans, tu écrivais encore avec un bon vieux crayon de bois sur
de vieilles feuilles lignées, pour le plus grand malheur de tes
parents. Tu étais différente des autres enfants. Tu refusais la
technologie et tes parents détestaient cela. Quand ils t’ont
modifiée par ordinateur lorsque tu étais dans le ventre de ta
mère, ils ont choisi tes caractéristiques psychologiques pour que
tu sois comme les autres enfants. Sauf que cela n’a pas
fonctionné avec toi.
À 15 ans, ils ont voulu t’envoyer dans une école spécialisée pour
les anomalies, car tu as osé leur avouer que tu voulais devenir
écrivaine. Pour eux, ce n’était pas un métier assez prestigieux
pour une fille comme toi. Tu ne t’en souviens pas, mais j’ai dû
leur faire croire que tu faisais une crise d’adolescence. C’est
un truc que les adultes disaient par rapport aux jeunes quand
j’avais 16 ans. Moi, je savais très bien que c’était faux et que
J
La Plume Fontaine 2015-2016 40
tu ne rentrerais jamais dans le moule de la société. Être
écrivaine, ce n’était presque plus considéré comme un métier,
mais je t’encourageais quand même.
À 20 ans, tu as publié ton premier roman. Évidemment, il n’a pas
été un succès, car tu l’as fait imprimer. Je te l’avais dit que
l’encre n’était plus à la mode et que c’était maintenant les
hologrammes sur tablette. Même les vieux comme moi ne lisent plus
de bouquins, mais je m’étais quand même procuré le tien.
Aujourd’hui, tu as 40 ans et tu es une écrivaine reconnue. Comme
moi, tu as fini par laisser la technologie rentrer dans ta vie,
car on finit par ne plus avoir le choix. J’aurais voulu t’écrire
cette lettre moi-même, mais je ne suis plus capable. Une chance
que tes parents m’ont acheté un robot, il est très pratique. En
parlant d’eux, tu devrais les texter pour prendre de leurs
nouvelles. Je suis sûr que tu les comprendrais mieux maintenant
que tu as vieilli. Maintenant, je n’ai plus besoin de me faire du
sang d’encre pour toi.
Ton grand-père
Table des matières
Le Comité organisateur ______________________________________________ 2
Les membres du jury ________________________________________________ 2
Aux enseignantes et enseignants de français et d’arts plastiques _______________ 2
Illustrations gagnantes ______________________________________________ 6
Textes gagnants ___________________________________________________ 7
Premières positions _________________________________________________ 9
Plateforme _______________________________________________________ 10
Presque immortel _________________________________________________ 12
Toi _______________________________________________________________ 13
Le journal du suicide ______________________________________________ 15
Deuxièmes positions ________________________________________________ 19
Où sont-ils? _____________________________________________________ 20
Encre sympathique _______________________________________________ 22
Lettre à maman _________________________________________________ 24
Le survivant _____________________________________________________ 26
Troisièmes positions ________________________________________________ 29
La Menteuse ____________________________________________________ 30
L’enlèvement ____________________________________________________ 33
Enlever les mots de la bouche ____________________________________ 35
Lily _____________________________________________________________ 37
Anomalie de la société ___________________________________________ 39