L'AUTOdeveloppemtn

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L'Auto-développement: Psychothérapie dans la vie quotidienne. Ce livre est une synthèse de l'approche Auto-développement. Toute personne intéressée peut y découvrir une conception du développement personnel, une explication du processus de croissance et une possibilité d'utiliser ses relations importantes comme occasions d'épanouissement. Elle y trouvera aussi les réflexions tirées de l'expérience des auteurs sur certaines questions fondamentales de l'existence telles que la responsabilité, la solitude, la liberté, la finitude et la mort. Abrégé de la table des matières Chapitre 1: Une conception de la croissance personnelle Qu'est-ce que la croissance ? Les postulats sous-jacents à notre conception La personne en croissance Chapitre 2: Le processus naturel de croissance Aperçu global (voir l'extrait "Illustration d'une boucle complète du processus") Description détaillée La place du processus en thérapie Comparaison de trois formulations Chapitre 3: La facilitation de son processus La facilitation de son processus Les conditions pour diriger son propre développement Chapitre 4: L'intervention thérapeutique Les fondements essentiels de l'Auto-développement La psychologie du changement Les rôles du psychothérapeute Chapitre 5: La résolution du transfert Nature du transfert Les genre de transfert Le droit à l'existence L'identité distincte

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L'Auto-développement: Psychothérapie dans la vie quotidienne.

Ce livre est une synthèse de l'approche Auto-développement. Toute personne intéressée peut y découvrir une conception du développement personnel, une explication du processus de croissance et une possibilité d'utiliser ses relations importantes comme occasions d'épanouissement. Elle y trouvera aussi les réflexions tirées de l'expérience des auteurs sur certaines questions fondamentales de l'existence telles que la responsabilité, la solitude, la liberté, la finitude et la mort.

Abrégé de la table des matières

Chapitre 1: Une conception de la croissance personnelle Qu'est-ce que la croissance ? Les postulats sous-jacents à notre conception La personne en croissance Chapitre 2: Le processus naturel de croissance Aperçu global (voir l'extrait "Illustration d'une boucle complète du processus") Description détaillée La place du processus en thérapie Comparaison de trois formulations

Chapitre 3: La facilitation de son processus La facilitation de son processus Les conditions pour diriger son propre développement

Chapitre 4: L'intervention thérapeutique Les fondements essentiels de l'Auto-développement La psychologie du changement Les rôles du psychothérapeute Chapitre 5: La résolution du transfert Nature du transfert Les genre de transfert Le droit à l'existence L'identité distincte L'identité sexuelle La résolution du transfert Chapitre 6: Concrétisations Quelques formats d'intervention Explication détaillée d'une session: déroulement et structure Chapitre 7: Implications existentielles La dimension existentielle: importance réalités problématiques Les défis existentiels: mort, solitude (extrait), liberté (extrait) et finitude. Une conception de la vie Chapitre 8: Perspectives nouvelles sur la psychothérapie

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Recherches sur le processus Évolution de l'approche et formation Différenciation des formats Programmes auto-administrables

Quelques extraits

La réalité existentielle de la solitude La réalité existentielle de la liberté Illustration d'une boucle complète du processus (naturel de croissance)

La réalité existentielle de la solitude

Référence: Tiré du chapitre VII: Implications existentielles, page 276

Voici comment pourrait s'exprimer une personne qui assume pleinement sa solitude, en contact avec une autre. "Je suis moi. Je suis le seul à être moi et je suis différent de tous les autres, même si je ressemble à beaucoup de personnes dans les divers aspects de ce que je suis. Je suis seul avec ma vie; personne ne peut s'occuper adéquatement de diriger ma vie, de voir à mon bonheur et à ma satisfaction de chaque moment. Je suis le seul à posséder ma vie et ne veux la donner à personne d'autre.

Je suis avec toi, mais différent de toi. Jamais nous ne pourrions devenir réellement semblables ou unis au point de faire disparaître les différences entre nous. Je ne suis pas responsable de ta satisfaction et je ne compte pas sur toi pour me procurer la mienne. J'aime que tu sois différent car c'est par tes différences que je trouve avec toi de quoi me satisfaire dans notre contact.

Ce que je peux faire de mieux pour que notre contact soit satisfaisant pour nous deux, c'est d'être ce que je suis aussi ouvertement que j'en suis capable et de te laisser être ce que tu es de la façon dont tu choisis de l'être. Je peux aussi me laisser toucher par ce que tu es et y réagir à travers tout ce que je suis.

C'est cette façon d'être ensemble qui me satisfait et m'enrichit, ou me permet de constater rapidement que notre contact n'est pas bon pour moi et que je ne veux pas le poursuivre. Je crois que notre contact peut nous satisfaire tous les deux; autrement je ne serais déjà plus ici. Mais si je constate que je me suis trompé et que l'un ou l'autre de nous deux n'y trouve pas son compte, je préfère me retirer et trouver d'autres moyens d'obtenir ce que je cherche.

Si je t'aime, c'est parce que tu concrétises au moins en partie ce que j'aime et ce à quoi j'accorde de la valeur; mon amour pour toi dépend de cela, mais il n'est pas indispensable que

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tu correspondes à ces exigences, car je n'ai pas besoin de t'aimer pour vivre et tu n'a pas besoin de mon amour pour avoir de la valeur et vouloir vivre. Je ne veux pas de contact avec toi sur d'autres bases que la recherche de notre satisfaction mutuelle; je suis le seul vrai gardien et responsable de ma satisfaction et je ne veillerai en rien à la tienne."

La réalité existentielle de la liberté

Référence: Tiré du chapitre VII: Implications existentielles, page 288-289

On peut traduire la vie intérieure d'une personne qui assume sa liberté au moyen des quelques affirmations suivantes:

"Je suis la seule personne qui détermine mes actes. Je suis mon seul créateur réel dans ma vie actuelle. Rien ni personne n'a le pouvoir de décider de ma vie sans ma collaboration et mon consentement.

Je cherche principalement à exercer ce pouvoir de choisir pour augmenter ma satisfaction à vivre.

Je me trompe parfois, mais j'en profite pour apprendre et me rendre capable de meilleures décisions.

Je peux changer mes décisions aussi souvent que je le veux, et je les change effectivement quand je constate qu'elles ne me donnenet pas la satisfaction qu'elles visaient.

Je tiens à recevoir moi-même toutes les conséquences de mes choix et de mes actes. Je suis capable d'en assumer tous les inconvénients et je tiens à en recevoir tous les avantages. Je gagne énormément à recevoir toutes ces conséquences, bonnes ou mauvaises, non seulement parce que les inconvénients m'instruisent, mais aussi parce que je suis capable de faire des choix qui comportent plus de conséquences satisfaisantes qu'insatisfaisantes.

Je ne veux recevoir de faveurs de personne, ni en faire à qui que ce soit. Même un succès dû à la chance me répugne partiellement, parce qu'il a peu de valeur à mes yeux. En retour, je ne tolère pas qu'on cherche à me priver du fruit de mes actes, quel que soit le motif. Je souhaite développer mon habileté et mon efficacité, pour réussir de mieux en mieux dans les directions que je choisis.

J'aime me mesurer à la réalité et vaincre les difficultés. Mes actes ont de la valeur dans la mesure où ils réussissent à créer ma vie comme je la veux. Mes opinions ne sont justes que si elles me permettent des choix réussis, si elles m'aident à prédire efficacement les conséquences de mes actes. Mes choix sont adéquats dans la mesure où ils me permettent d'obtenir le mieux-être que je recherche, la satisfaction à vivre et à agir qui, au fond, oriente mon action."

Illustration d'une boucle complète du processus (naturel de croissance)

Référence: Tiré du chapitre II: Le processus naturel de croissance, page 32-34

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(1) Une personne est assise avec son conjoint qui lui parle. Soudain, sans raison apparente, elle se sent devenir triste et tendue à la fois.

(2) Elle choisit d'être attentive à cette tristesse tendue; elle sent alors davantage de tristesse et moins de tension.

(3) Elle constate que sa tristesse prend une saveur supplémentaire de nostalgie et de résignation. Elle reconnaît cette forme de tristesse comme familière. Elle constate que cet état triste-nostalgique-résigné se retrouve souvent de façon confuse dans ses contacts avec son conjoint, le soir lorsque les enfants sont couchés. La personne constate ensuite qu'elle n'écoute plus depuis un bon moment son conjoint qui lui parle des enfants.

(4) Une image s'impose aussitôt dans son esprit: son conjoint bordant tendrement le plus jeune des enfants.

À ce moment tout devient clair: la personne constate intérieurement qu'elle est jalouse de ses enfants; elle envie la tendresse et l'attention qu'ils reçoivent de son conjoint. Elle constate que sa tristesse devient plus intense en pensant à combien cette tendresse lui manque, à combien elle s'ennuie de l'époque où ils n'avaient pas d'enfants, à combien cette forme de tendresse lui a toujours manqué, même pendant leurs fiançailles. Elle se dit qu'elle veut être comme un enfant avec son conjoint et s'aperçoit avec beaucoup d'émotion du fait qu'elle est toujours occupée à agir de façon adulte avec son conjoint. Elle voit combien elle s'occupe à paraître raisonnable, compréhensive, aidante et tendre avec lui, sans jamais demander d'aide, de tendresse et de compréhension en retour.

(5) C'est alors qu'avec beaucoup de crainte, de tristesse, d'espoir et d'émotion elle se met à faire part de ses découvertes à son conjoint. Elle va même jusqu'à lui demander de la prendre dans ses bras et de l'écouter parler de ses problèmes de la journée. Pour la première fois depuis longtemps, elle se laisse voir vulnérable, seule, triste et craintive; elle est si clairement expressive que son conjoint est très ému et tendre et qu'il lui confie que lui aussi regrettait de ne pouvoir exprimer sa tendresse complètement qu'avec les enfants.

(6) Après un certain temps, cette personne commence à éprouver un vague inconfort. Elle s'en étonne, mais choisit de ne rien faire pour le repousser...etc.

On peut reprendre le même cheminement en termes plus abstraits qui définissent mieux la nature de l'activité caractéristique de chaque étape.. Dans ce cas-ci les étapes seront identifiées par leurs noms.

Un contenu d'expérience apparaît à la personne (émergence).

Il est ressenti et demeure au centre de son attention (immersion).

Il prend peu à peu des dimensions supplémentaires; de nouveaux aspects apparaissant à la personne (développement).

Brusquement ces divers éléments se combinent d'une nouvelle façon qui leur donne un sens unifié (prise de signification).

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Cette signification nouvelle de son expérience implique de nouvelles façons d'agir de façon expressive et la personne pose ces gestes expressifs qui débouchent sur un nouveau type de satisfaction (action unifiante).

Après avoir ainsi intégré ce nouvel aspect de son expérience la personne constate qu'elle change d'état, qu'un nouveau déséquilibre s'installe (pré-émergence) Et un nouveau cycle complet peut s'amorcer sur un sujet encore inconnu (retour à l'émergence).

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L'auto-développement: Une stratégie d'instrumentation

Par Jean Garneau , psychologue

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Résumé de l'article

Dans cet article, Jean Garneau, contribue à préciser la définition du concept d'instrumentation en mettant en lumière la dimension pratique de ce dernier. Il y distingue les principaux types d'instruments à transmettre et précise les caractéristiques nécessaires de chacun. Il termine en tentant de voir dans quelle mesure les psychologues d'écoles de pensée différentes s'entendent sur les instruments à transmettre.

Table des matières A. Référence B. Introduction C. Qu'est-ce qu'instrumenter ? D. Les principaux genres d'instruments E. Des instruments pour faire quoi ? F. Sommes-nous d'accord sur les instruments à transmettre ?

A. Référence

L'auto-développement: une stratégie d'instrumentation est paru pour la première fois en 1984 dans la "Revue Québécoise de Psychologie", volume 5 no 3, pages 47 à 59. Nous remercions la direction de la revue de nous accorder la permission de reproduire ce texte sur notre site.

B. Introduction

Il y a dix ans, dans le domaine de la psychothérapie, on ne parlait presque jamais d'instrumenter. À l'heure actuelle, la plupart des approches thérapeutiques intègrent des préoccupations d'instrumentation dans leur pratique. On se soucie de rendre plus directement utilisables les apprentissages réalisés en thérapie, on suggère fréquemment des applications dans la vie quotidienne, on propose de refaire chez-soi des exercices qui se sont avérés utiles en entrevue.

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Il semble que le concept d'instrumentation ait rejoint une préoccupation que partagent un grand nombre de psychothérapeutes. Si tel est le cas, c'est vraisemblablement parce que ce concept représente une réponse possible à la grave question du transfert d'apprentissage. L'Auto-développement est avant tout une option stratégique: qu'on l'applique en psychothérapie ou en éducation, on choisit toujours de mette l'accent sur la transmission au client d'un certain nombre d'instruments qui nous apparaissent pouvoir lui être utiles et, en conséquence, sur le fait de lui remettre le pouvoir sur son cheminement.

Dans cet article, je veux apporter ma contribution au développement de cette façon d'intervenir en communiquant quelques réflexions sur cette stratégie d'intervention. Je tenterai de préciser la définition pratique du concept d'instrumentation, de distinguer les différents genres principaux d'instruments à transmettre et de préciser leurs caractéristiques nécessaires, pour terminer en proposant un début de réponse à une question que les rencontres organisées par Yves St- Arnaud ont soulevée à plusieurs reprises: sommes-nous d'accord sur les types d'instruments à transmettre?

C. Qu'est-ce qu'instrumenter ?

Ce terme réfère au concept d'instrument et ne peut être défini sans lui. Un instrument est un outil dont la nature n'est pas nécessairement physique. Il peut s'agir d'un objet, mais on peut également utiliser des concepts, des systèmes conceptuels (grilles d'analyse) ou des procédés (façons de faire) comme instruments. Il suffit de penser à ce que recouvre l'expression instruments de gestion pour comprendre que le terme instrument recouvre ces genres de moyens autant que les objets physiques qu'on nommerait habituellement des outils.

Comme tous les autres genres d'outils, les instruments auxquels nous pensons ici supposent, pour être utiles, une action intentionnelle. Un instrument est défini en partie par le fait qu'il sert à obtenir un résultat, à faire quelque chose. Cette dimension implicite de la notion d'instrument est lourde de conséquences: elle tend à déterminer la façon dont nous devrons concevoir la personne à qui nous transmettrons ces outils, la place que nous devrons accorder à l'action volontaire et orientée dans notre conception de la personne, ainsi que les genres d'instruments à transmettre. Il serait étrange, par exemple, de considérer qu'on instrumente la personne lorsqu'on développe chez elle des automatismes ou des réflexes nouveaux. De même, il serait ridicule de tenter de fournir des instruments à quelqu'un qu'on considérerait comme incapable de choisir ses actes ou d'orienter son action.

Instrumenter devrait donc être défini par l'ensemble des actions permettant de fournir un instrument à un être capable d'en faire un usage adéquat.

Dans plusieurs cas, les instruments sont transmis au client par le professionnel. Il s'agit alors d'instruments qui étaient en possession de ce dernier et qu'il remet au client. Cette transmission s'appuie sur une forme d'enseignement, quel que soit le médium utilisé pour la rendre possible.

Dans d'autres cas, il s'agit plutôt de rendre utilisables des instruments déjà possédés par le client: c'est la façon d'utiliser une habileté déjà présente qui est enseignée. On s'appuie alors sur des acquis antérieurs pour y ajouter des guides qui permettront d'exploiter une plus grande partie de leur potentiel. C'est cette forme d'instrumentation qu'on utilise lorsqu'on enseigne à

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une personne à s'informer sur son expérience vécue en utilisant ses sensations corporelles ou ses fantaisies, lorsqu'on lui enseigne à étudier un phénomène de sa vie en faisant appel à une étude systématique. En fait, on ne lui transmet alors qu'une façon plus raffinée de procéder, dans l'espoir que les résultats seront plus clairs ou plus puissants.

Cette deuxième forme d'instrumentation peut sembler mineure à première vue, mais elle est souvent la plus importante. Par exemple, même si toute personne vivante éprouve continuellement des sensations, sentiments ou émotions, on peut constater que cette capacité est très souvent de peu d'utilité parce que la personne considère ces éléments de son expérience comme inutiles ou nuisibles, plutôt que de s'en servir pour s'informer sur sa situation intérieure et sur ses échanges avec son environnement. Il s'agit alors d'une habileté disponible et déjà possédée par la personne, mais qui demeure relativement inutile sans une intervention d'instrumentation. On retrouve fréquemment l'équivalent en éducation: la curiosité naturelle de l'enfant devenue inutile à l'apprentissage parce qu'assimilée à une forme d'indiscipline.

Instrumenter c'est rendre utilisable un outil servant à obtenir un résultats recherché. C'est également enseigner à un être capable de choisir et responsable de ses choix et de ses actes. Le fait d'instrumenter suppose aussi que celui qui instrumente est en possession de connaissances et de façons de procéder que l'autre personne gagnerait à posséder elle- même. Ces instruments doivent enfin être transmissibles avec un degré de qualité suffisant pour en assurer l'utilisation adéquate.

Choisir d'instrumenter, c'est aussi définir un type de rapport avec son client. C'est se situer comme possédant les instruments, mais aussi comme non- indispensable à leur utilisation. C'est donc adopter une position affirmative et humble à la fois qui, pour un grand nombre de psychothérapeutes et d'éducateurs, semble très inconfortable; certains trouvent difficile d'être aussi affirmatifs de leurs capacités propres alors que d'autres n'aiment pas renoncer à leur statut privilégié de personne indispensable.

Cette définition peut sembler longue, mais il s'agit d'une introduction nécessaire à la suite de ce texte. À partir de cette définition, il est possible d'élaborer sur les genres d'instruments à transmettre.

D. Les principaux genres d'instruments

Lorsque nous choisissons d'instrumenter notre client, nous décidons de le considérer comme un être responsable, capable de se servir de nos instruments avec intelligence et discernement. Nous comptons sur le fait que ses fonctions cognitives peuvent être mises à son service et s'avérer utiles. 1- Des connaissancesEn conséquence, nous devrons lui fournir des instruments de nature cognitive. Il s'agit à la fois de connaissances pratiques et de concepts qui lui serviront à se guider, à rendre efficace et éclairé son désir de changement. Ces instruments cognitifs sont de deux ordres.

D'abord, il lui faut de l'information sur les phénomènes pertinents au genre de changement qu'il vise. Il doit comprendre, d'une façon que la vulgarisation n'aura pas rendues simplistes, les réalités psychologiques auxquelles il aura à se mesurer. Selon la nature et l'étendue des

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changements visés, ce cours de psychologie pratique prendra plus ou moins d'ampleur. Il faudra cependant toujours que le client comprenne ces phénomènes, incluant les processus mis en branle, les résistances qui ne manqueront pas de faire partie de ses réactions, et les genres d'expériences qu'il aura à vivre.

En plus, notre client aura besoin d'information plus précise sur lui-même: ses habiletés et ressources pertinentes actuelles, ses faiblesses et moyens d'évitement caractéristiques, les façons de procéder qui lui sont les plus utiles, les points aveugles qui pourraient l'amener à s'induire lui-même en erreur et les façons efficaces pour lui d'y remédier. Sans cette forme particulière de connaissance de soi, il serait illusoire de croire dans sa capacité de diriger lui- même son cheminement.

Il est évident que ces connaissances ne doivent pas demeurer strictement conceptuelles ou abstraites; pour être utilisables, elles doivent avoir une correspondance tangible avec l'expérience personnelle du client. Il doit les posséder au plan expérientiel autant que conceptuel. Ceci détermine à la fois un type de connaissances à transmettre (proches de l'expérience vécue et vérifiables par soi-même) et un mode de transmission (donner au client un accès expérientiel direct aux manifestations concrètes chez lui des réalités sur lesquelles on cherche à l'informer). Si nous ne respectons pas ces deux exigences, nous ne pourrons que nous illusionner sur la qualité et l'efficacité de notre stratégie d'instrumentation. 2- Des habiletésLorsque nous choisissons d'instrumenter notre client, nous décidons également que c'est lui qui aura à faire les interventions importantes dans l'orientation et la concrétisation de chaque pas de son cheminement. Il faut nécessairement, pour que notre choix ne soit pas simplement un voeu sans conséquence, lui transmettre un savoir-faire complexe et subtil. Il serait naïf de croire qu'en enseignant une seule bonne méthode, nous pourrons rendre notre client apte à se charger de son cheminement, même sur un sujet limité. Nous sommes tous assez avancés dans la pratique pour savoir que la réalité de l'intervention en psychologie ou en éducation est loin d'être aussi simple.

Ces habiletés doivent d'abord avoir une utilité pratique clairement orientée; il ne suffit pas d'avoir tout un arsenal de trucs très efficaces, il faut en plus savoir clairement à quoi sert chacun et dans quelles conditions il est efficace. Il faut savoir comment s'y prendre pour atteindre un but ou un genre de buts donné. Cette dimension est indispensable car nous confions au client la responsabilité de choisir les moyens qui orienteront son cheminement. C'est l'aspect le plus cognitif des habiletés.

Mais pour être de véritables habiletés, celles-ci doivent aussi correspondre à une aisance dans l'application, à une forme d'habitude. Il ne suffit pas de savoir ce qu'il serait opportun de faire, il faut également l'avoir déjà suffisamment pratiqué pour être capable de le faire de façon adéquate. C'est indispensable car ces moyens que nous remettons au client sont, pour la plupart, des instruments à utiliser dans des situations relativement difficiles où il manque normalement d'habileté. Pour cette raison, on ne peut compter sur le fait que le client fera preuve du discernement et de la finesse d'adaptation dont il est capable dans les conditions les plus favorables: il sera en situation plus ou moins intense de stress, d'urgence ou de difficulté.

Ceci détermine encore une forme de transmission qui s'appuie sur l'expérience vécue et sur l'expérimentation active par le client. Cette nécessité ajoute en plus une autre exigence: une certaine répétition permettant d'atteindre un degré de maîtrise et d'automatisme suffisant pour conserver une efficacité satisfaisante en situation difficile. Nous ne pouvons postuler que

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l'habileté sera suffisamment acquise lorsque le client aura bien compris et utilisé une ou deux fois le moyen dans des situations plus difficiles, et d'en automatiser l'utilisation dans une certaine mesure afin que ses ressources puissent être disponibles pour l'essentiel: être en recherche. Autrement, il risquerait d'être trop occupé à l'aspect technique de l'instrument. 3- Et les attitudes?Habituellement, lorsqu'on parle de connaissances et d'habiletés, les attitudes suivent comme troisième volet. Est-ce le cas ici? Les attitudes sont-elles des instruments?

À strictement parler, il s'agit certainement d'un groupe d'instruments, probablement du plus important de tous. En effet, ce sont les attitudes de la personne qui vont déterminer dans une large mesure les façons dont elle utilisera les instruments que nous lui aurons transmis et, par conséquent, leur utilité réelle. On ne peut donc opter pour une stratégie d'instrumentation sans se soucier des attitudes et sans agir à leur niveau.

Cependant, il ne s'agit pas d'un instrument au même sens que les autres: ce n'est pas vraiment un outil ayant une fonction précise et dont on peut apprendre à se servir lorsqu'on en a besoin. Les attitudes agissent plutôt comme un contexte général à l'intérieur duquel se situe l'utilisation des autres instruments et qui détermine en grande partie l'efficacité de cette utilisation. En outre, elles agissent à la façon d'un automatisme ou d'un réflexe, avec le degré élevé d'inconscience qui les caractérise. De ce point de vue on pourrait dire qu'il ne s'agit pas d'un instrument, mais d'un simple prérequis à l'utilisation adéquate de certains instruments.

La conséquence de cette façon de voir est évidente: il ne faut transmettre nos instruments qu'aux individus qui ont déjà les attitudes nécessaires à leur utilisation efficace et pertinente. Dans ces conditions, il vaudrait mieux abandonner simplement toute stratégie d'instrumentation, car les clients qui resteraient sont précisément ceux qui ont le moins besoin de nos instruments et qui en ont développé des équivalents par eux-mêmes. Réciproquement, les clients que nous abandonnerions à leurs moyens ou à l'intervention individuelle curative sont justement ceux à qui nos instruments pourraient être utiles, moyennant une utilisation adéquate.

Cette conclusion répugne sans doute à tout professionnel qui a opté pour une stratégie d'instrumentation. Si nous continuons à travailler dans le sens de l'Auto- développement, c'est parce que notre expérience professionnelle nous permet de croire au réalisme et à l'efficacité d'une telle stratégie, et non par simple entêtement. Comment est-ce possible? Dans ma pratique professionnelle en Auto-développement, je constate que le travail que je fais au niveau des attitudes est effectivement le plus important, parce que c'est sur lui que repose l'efficacité de tout le reste. Lorsque je réussis à influencer les attitudes d'un client, les autres instruments deviennent utiles, riches, souples et mobiles grâce à la façon dont le client se les approprie en tant qu'instruments et non comme recettes plus ou moins magiques. Dans le cas contraire, tous mes instruments me semblent être utilisés de façon statique et ils m'apparaissent futiles.

C'est la façon de les transmettre qui est finalement la différence la plus importante: il n'est pas possible de transmettre une attitude en l'enseignant. Il n'est pas utile de la faire pratiquer comme on le fait avec une technique d'intervention. C'est plutôt par la façon dont j'aborde le client et son expérience, par mes façons d'y réagir que je lui transmets les façons d'être face à lui-même que je considère susceptibles de lui être utiles. On pourrait dire que c'est par le bon exemple (scientifiquement on dit modeling) que je fais cette partie essentielle de l'instrumentation.

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Mais il n'est pas juste, en réalité, de parler ici d'exemple en laissant supposer que le client imite ensuite mon comportement ou mes attitudes en vertu d'une mystérieuse identification au modèle que je représente. À mon avis, l'explication est toute autre et je n'ai à cet égard aucun rôle ou statut de modèle. Tout ce que je fais, c'est de donner à mon client l'occasion de constater par expérience directe la pertinence de ces façons de le considérer et de le recevoir. Ce qui, au départ, peut lui sembler étrange et très naïf de ma part (comme refuser de croire qu'il est irresponsable et de le traiter comme tel), devient, à l'usage, une perception adéquate à ses propres yeux (il constate qu'il est effectivement une personne responsable et qu'on aurait tort de le considérer autrement). Par la suite, le client adopte lui-même une attitude analogue: sa certitude grandit peu à peu à travers les expériences qui viennent en confirmer le bien-fondé.

Lorsque les attitudes à transmettre sont de l'ordre du respect de soi, de la réceptivité face à son expérience, de la tolérance devant ses échecs ou de la confiance dans les ressources de son organisme et dans ses processus vitaux, cette façon de procéder pour modifier les attitudes du client est, à ma connaissance, la plus efficace et la plus profondément éloquente de toutes. Si une personne est ainsi traitée, elle ne peut que se rendre à l'évidence du fait qu'elle mérite, sans avoir à faire d'effort pour s'y adapter, tous ces témoignages de respect et d'estime. C'est de la même façon et par le même mécanisme qu'une autre personne apprendra qu'elle est capable de regarder sa réalité en face et de l'assumer réellement sans se dissimuler à elle-même ou se protéger par les artifices qu'elle croyait auparavant nécessaires à sa survie ou au maintien de son équilibre psychique. C'est une lourde responsabilité que de décider unilatéralement de traiter une personne ainsi alors qu'elle tente de nous convaincre du contraire, mais c'est peut-être aussi la seule façon de lui permettre de découvrir qu'elle ne mérite pas moins.

Donc, les attitudes indispensables à une démarche d'Auto-développement sont elles aussi des instruments à transmettre, même s'il est nécessaire de procéder d'une façon différente pour les transmettre. Il s'agit, en fait, des instruments les plus importants parce que c'est sur eux que repose l'efficacité de tous les autres. Il arrive souvent, dans ma pratique, que cette partie du travail soit la plus difficile et la plus longue; c'est probablement lié au genre de cheminement auto-géré que je vise à rendre possible. Il me semble réaliste de croire qu'avec des objectifs plus circonscrits et plus limités au comportement manifeste ou à une expérience précise, on puisse simplifier davantage cette partie du travail d'instrumentation. J'ai cependant peine à croire qu'on puisse l'éviter complètement sans renoncer à la majeure partie de l'efficacité des instruments qu'on transmet.

E. Des instruments pour faire quoi ?

Il est évidemment impossible de définir le contenu des instruments à transmettre sans décider au préalable du but pour lequel nous voulons instrumenter le client. Les instruments particuliers et leur contenu varieront énormément d'un objectif à l'autre (apprendre à se détendre, apprendre à vaincre ses sentiments dépressifs, apprendre à étudier plus efficacement, etc.).

Les instruments que nous transmettons au client varient donc en fonction des objectifs poursuivis. Il est normal qu'ils varient également selon l'orientation théorique du

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professionnel, car c'est à partir de celle-ci qu'ils sont développés. Doivent-ils dépendre en plus des caractéristiques du client?

Les connaissances, habiletés et attitudes à transmettre sont déterminées par l'objectif à atteindre et non par les caractéristiques du client. Cependant, ces dernières interviennent de deux façons. D'abord, les instruments dont le client possède déjà des équivalents adéquats n'ont pas à être transmis car ils n'ajouteraient rien aux capacités réelles du client. Deuxièmement, les caractéristiques de la clientèle (celles qui ne sont pas inhérentes à la définition du problème-cible) doivent être considérées soigneusement dans le choix de la méthode de transmission des instruments ainsi que du vocabulaire utilisé. Pour ce qui est du reste, les instruments n'ont pas à être déterminés par les caractéristiques des clients.

Les instruments à transmettre doivent être soigneusement sélectionnés: c'est leur utilité pratique plutôt que leur pertinence théorique ou historique qui doit servir de critère de choix. Pour faire cette sélection, nous devons cerner avec précision le cheminement que nous visons à faciliter, afin de n'insérer que les éléments qui, dans ce processus, seront effectivement utiles au client. Les modèles qui ne servent qu'à plaire aux intellectuels ou à classer des phénomènes qui ne seront pas réutilisés ensuite, sont à éliminer. Ils ne font qu'alourdir inutilement le travail et encombrer la mémoire du client en ajoutant des occasions inutiles de confusion. 1- Des instruments de diagnosticPour devenir celui qui dirige son propre cheminement, le client doit disposer d'une grille diagnostique fonctionnelle qui éclairera ce choix. Ce système doit lui permettre de percevoir avec précision les situations où il est opportun d'utiliser un instrument plutôt qu'un autre. Il doit également l'aider à identifier les dysfonctionnements qui surviennent en cours de cheminement, de les cerner avec une précision suffisante pour en comprendre les causes (celles qui ont de l'importance du point de vue de la gestion de sa démarche).

Ces instruments de diagnostic gagnent à se rapprocher des instruments d'évaluation dont il sera question plus bas. Cependant, ils s'en distinguent par le fait qu'ils servent à fournir au client une information plus générale qui lui permettra d'orienter l'ensemble de son cheminement, alors que les instruments d'évaluation sont plus ponctuels et visent à permettre des réajustements en cours de route. 2- Des instruments d'orientationLorsqu'on fait de l'Auto-développement, on transmet surtout des procédures. Il s'agit de techniques d'intervention sur soi qui permettent d'atteindre des objectifs précis. Cependant, l'utilisation de ces techniques serait aveugle ou simpliste si le choix de l'instrument à utiliser ne s'appuyait pas sur un modèle d'ensemble qui fournit des orientations générales.

Encore ici, il est impossible de définir le modèle à transmettre sans que ce soit en rapport direct avec les objectifs visés. Cependant, il est possible de définir certaines caractéristiques générales de ce modèle.

Le modèle de fonctionnement doit d'abord être formulé en termes de processus. Il ne peut s'appuyer directement sur un contenu d'expérience à cause des variations très nombreuses qu'il faudrait alors prévoir et transmettre, ce qui nous confronterait à une tâche impossible. En s'appuyant sur une forme de cheminement, sur le genre de démarche à favoriser, on rend l'instrument plus généralement utilisable et adaptable à diverses situations. Cette façon de faire nous demande un peu plus de travail au départ, mais assure une facilité nettement supérieure au niveau du transfert d'apprentissage et du réinvestissement ultérieur des

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instruments. De la même façon, les techniques que nous transmettons doivent être présentées en termes de façons de les utiliser plutôt qu'en termes de contenu expérientiel.

Le modèle de fonctionnement présenté doit également être applicable dans un cheminement à moyen ou long terme. Il serait inopportun d'instrumenter une personne à résoudre un problème qu'elle ne rencontrera plus dans la suite de sa vie; il vaudrait mieux, dans ce cas, l'aider à le résoudre cette fois de la façon la plus efficace possible et oublier l'idée de lui transmettre des instruments. En conséquence, nous devons transmettre des instruments souples, adaptables à diverses situations. Le modèle proposé doit présenter ces caractéristiques, car il vise à aider le client à orienter sa démarche. Pour cette raison, il me semble que ce modèle doit être formulé en termes d'apprentissage et d'expérimentation plutôt qu'en termes de techniques statiques et de vérités dogmatiques. Si on veut que nos instruments demeurent utiles à long terme, nous devons en faire des méthodes pour apprendre, s'informer et éclairer ses choix, et non pas comme des trucs mécaniques simples pour obtenir des résultats prédéterminées.

De même, il est nécessaire que nos instruments soient des façons possibles de faire, ou des compréhensions possibles de certaines réalités, et que chaque client ait la possibilité d'en vérifier lui-même la validité dans son cas. Si nous voulons remettre au client la direction de son cheminement, nous devons au moins lui remettre le rôle de juge par rapport à la pertinence et à l'utilité, pour lui, de nos concepts et façon de faire. 3- Des instruments d'actionLes techniques à transmettre sont principalement de deux genres: celles qui visent à agir sur le processus qu'on veut mettre en action et celles qui visent à résoudre des problèmes particuliers. Ces deux genres d'instruments peuvent se retrouver dans une même intervention, mais il me semble qu'en général, ils définissent deux genres d'instruments, c'est- à-dire deux approches distinctes d'instrumentation. Ces deux orientations semblent correspondre à deux approches générales qu'on retrouve également dans le domaine des interventions qui ne visent pas à instrumenter: l'intervention centrée sur le problème et l'intervention centrée sur la personne dans son ensemble.

Malgré cette distinction en deux courants, il me semble que toute stratégie d'instrumentation devrait s'appuyer sur les deux genres de techniques et procédés et situer clairement chacun afin que le client puisse s'en servir à bon escient. En effet, une technique axée sur la résolution d'un problème particulier ne peut être efficace sans que ce soit grâce au processus qu'elle déclenche. De même, le fait d'instrumenter le client à faciliter un processus n'a de sens que dans la mesure où ce processus est utile pour rendre possible la résolution de certains problèmes; autrement, il ne s'agirait que d'un exercice gratuit inutile pour le client. Ces deux dimensions sont nécessairement présentes dans tout instrument qui mérite d'être transmis et c'est plus la spécificité de l'instrument du point de vue des genres de problèmes qu'il permet de résoudre qui fera qu'on le présentera comme un processus ou un mode de résolution d'un problème.

Lorsqu'une technique vise à être utile au niveau du processus, il est nécessaire qu'elle soit identifiée à une étape particulière d'un processus que le client connaît suffisamment pour être capable d'en orienter le déroulement de façon pertinente et efficace. Ce processus devra donc avoir été transmis au préalable comme instrument, en tant que modèle de fonctionnement. En plus d'avoir une connaissance suffisante de ce processus, le client aura besoin, dans ce cas, d'une connaissance adéquate de lui-même du point de vue de ce processus: ses façons personnelles d'y cheminer et les étapes où il a tendance à adopter des façons dysfonctionnelles

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d'agir. L'instrumentation pourra alors être plus spécifique en fournissant des techniques utiles pour améliorer le déroulement des étapes que chaque client tend à escamoter, éviter, fausser ou rendre inefficaces. C'est dans ce cas que l'instrumentation au niveau du processus peut lui être utile dans sa vie quotidienne.

Pour ce qui est des techniques qui son axées sur la résolution d'un problème particulier, il est important d'en identifier clairement les zones de pertinence et d'utilité ainsi que de faire connaître avec précision les genres de résultats auxquels elles conduisent. Chaque mode de résolution de problème permet en effet un nombre limité de genres de solutions: ceux qui sont privilégiés par le processus déclenché. Il est important que le client connaisse ces directions qui sont inscrites dans l'instrument, afin qu'il soit en mesure d'y faire appel non seulement en fonction du problème auquel il veut s'attaquer, mais également en fonction des objectifs qu'il poursuit en cherchant à le résoudre. Si on choisit de remettre le pouvoir d'intervenir entre les mains du client, c'est la moindre des choses que de l'informer clairement des résultats qu'il peut obtenir avec les moyens que nous lui fournissons. 4- Des instruments d'évaluationPour que notre client puisse utiliser adéquatement les instruments que nous lui fournissons, il est nécessaire qu'il dispose de moyens d'évaluation appropriés. Ces instruments lui permettront de faire les réajustements nécessaires en cours de route, à la lumière de son expérience. L'évaluation pertinente est celle qui permet d'identifier la qualité du processus qui se déroule et qui suggère les directions dans lesquelles agir pour l'améliorer si nécessaire.

Ces instruments d'évaluation doivent également être relativement simples et peu nombreux, car ils visent à servir de façon plutôt continuelle afin de permettre d'apporter les réajustements aussi rapidement que possible. Pour les mêmes raisons, ces instruments doivent être économiques; s'ils consommaient beaucoup de temps ou d'énergie, ils seraient voués à un oubli rapide.

Ce sont donc surtout des instruments d'évaluation continuelle plutôt que ponctuelle que nous devrions viser à transmettre. Ainsi, nous remettons vraiment entre les mains du client la capacité d'utiliser l'ensemble de nos instruments d'une façon raffinée et d'assumer adéquatement ses responsabilités à cet égard.

Pour correspondre à ces exigences, les instruments d'évaluation continuelle doivent se relier à la conscience subjective continuelle (awareness) du client et s'appuyer sur elle. Ils doivent également permettre de l'éclairer, de la préciser et de la raffiner afin de la rendre directement utile à la gestion adéquate du processus que nous visons. Cette conscience a l'avantage de fonctionner continuellement, même lorsqu'on ne le voudrait pas. Il suffit de l'éduquer pour en faire un gardien de la qualité du processus sans consommer d'énergie ou de temps supplémentaire. Ceci implique également que nous devons permettre au client de développer des critères internes qui sont pertinents au processus à faciliter, plutôt que de lui transmettre des critères externes qui demeureraient des corps étrangers.

Cet aspect du travail d'instrumentation est un des plus difficiles. Nous devons veiller à ce que le client devienne véritablement seul propriétaire des instruments que nous lui avons transmis et qu'il soit celui qui les gère vraiment en connaissance de cause. Pour cela, il est important que nous prenions soin d'épurer nos instruments d'un certain nombre d'éléments qui ont tendance à s'y insinuer, plus ou moins à notre insu.

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Le plus nocif de ces ingrédients est la magie. Il serait grave, dans une perspective d'instrumentation, que le client garde une image magique des instruments ou de celui qui les transmet. Si celui qui instrumente est perçu par son client comme un individu aux pouvoirs mystérieux ou inaccessibles (gourou ou savant), l'effort d'instrumentation est inefficace. Le client se situe alors dans une relation de dépendance interminable par rapport à l'intervenant et ne peut reprendre en mains sa gestion de sa démarche.

Le deuxième genre d'ingrédient nocif qui tend à s'insinuer dans notre travail d'instrumentation si nous négligeons d'y prendre garde, c'est ce qu'on pourrait intituler nos préférences. Qu'il s'agisse de nos options professionnelles, de nos valeurs personnelles, de nos croyances (y compris celles qu'on pourrait qualifier de scientifiques) de nos façons de vivre, de nos peurs ou de nos répulsions, n'est pas important: il est nécessaire de veiller à éviter de les transmettre au client (car elles seraient validées implicitement à travers l'utilité et la pertinence de nos autres contributions à l'amélioration du sort du client). S'il devient nécessaire ou inévitable qu'elles se manifestent, il est important que nous prenions soin d'en réduire l'impact en les identifiant clairement comme des préférences personnelles dont la pertinence ne dépasse pas notre individualité et notre vie particulière.

Il n'est pas toujours facile de reconnaître les éléments de notre approche qui doivent ainsi être mis hors d'état de nuire; nous y sommes souvent trop attachés pour prendre aisément le recul nécessaire et déceler leurs fonctions dans notre vie. Même notre souci de rigueur scientifique ou de cohérence ne peut nous servir de garantie. Il me semble qu'à ce niveau c'est notre option d'instrumentation qui peut être le guide le plus utile:

si nous voulons instrumenter vraiment notre client, nous chercherons à ce qu'il ait en mains toute l'information nécessaire et à ce qu'il en comprenne et en situe clairement l'importance et la portée. Nous chercherons à éliminer de notre intervention toute forme de dogme ou d'arbitraire qui lui enlèverait une partie de sa capacité d'orienter son cheminement dans les directions qu'il choisira lui-même, en connaissance de cause.

Ceci ne constitue en rien une garantie absolue, mais nous fournit un point de repère à partir duquel évaluer continuellement nos interventions et leurs impacts chez nos clients.

F. Sommes-nous d'accord sur les instruments à transmettre ?

Cet article explicite un certain nombre de principes de base concernant l'instrumentation comme stratégie d'intervention et la nature des instruments à transmettre. Au niveau de tels principes de base, je crois que les professionnels qui choisissent d'instrumenter sont généralement d'accord. Il s'agit principalement de conséquences directes d'une telle option stratégique et il me semblerait étonnant que la recherche professionnelle de celui qui travaille dans ce but général n'en arrive pas à des conclusions relativement proches de celles qui sont présentées ici.

Cependant, même en étant d'accord au niveau des principes de base, rien ne nous oblige à être d'accord au niveau des instruments particuliers qu'il nous semble utile de transmettre. À cause du fait que nous nous rattachons à des écoles différentes de pensée (approches thérapeutiques et pédagogiques), nous ne pouvons certainement pas être d'accord sur le choix des instruments à transmettre. Nos instruments privilégiés sont différents, les processus que nous provoquons

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le sont aussi, de même que nos façons de comprendre le changement. Comment pourrions-nous être d'accord dans ces conditions? Nous sommes probablement plus complémentaires que semblables à ce niveau, chaque école de pensée ayant ses cibles favorites et ses zones d'expertise particulières.

Pour ce qui est du contenu de nos instruments, il est évident que nous ne sommes pas semblables et en désaccord sur plusieurs points. En fait, je crois qu'à ce niveau, nous sommes probablement contradictoires entre nous, car c'est notre conception de la personne humaine, du sens de sa vie et du changement qui se traduisent concrètement dans les détails des instruments que nous jugeons opportun de transmettre et nos façons de définir ces détails. À cet égard, nous sommes très probablement irréconciliables dans nos différences, tout autant que les courants de pensée auxquels nous nous rattachons.

Ces différences sont très importantes et peuvent faire qu'il est difficile de nous mettre d'accord sur quoi que ce soit. Cependant, dans la mesure où nous évitons de faire de nos clients les otages de ces débats philosophico-professionnels de spécialistes, ces différences me semblent peu importantes si on les compare à la préoccupation centrale qui nous réunit: le fait de vouloir rendre la personne capable de résoudre elle-même les problèmes de sa vie. À ce niveau, je me considère relié à tous les participants du projet qui a donné naissance à cet échange, au delà des désaccords et des différences de style.

Jean Garneau, psychologueRessources en Développement, 1984

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Qu'est-ce que l'Auto-développement ? Par Karène Larocque , psychologue

Cet article est tiré du magazine électronique " La lettre du psy" Volume 5, No 8: Septembre 2001

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Résumé de l'article

Il y a plusieurs façons de faire de la psychothérapie. Celle que j'utilise est l'Auto-développement, une approche humaniste reconnue par l'Ordre des psychologues du Québec. Elle a été développée depuis une vingtaine d'années par les psychologues québécois Jean Garneau et Michelle Larivey.

Dans cet article vous trouverez une synthèse de l'Auto-développement: ses objectifs, ses principes, sa stratégie d'intervention. Vous y obtiendrez également des illustrations concrètes qui vous permettront de voir clairement ce qu'on peut attendre d'une psychothérapie de ce genre: les outils de vie qu'on y acquiert et la façon dont ça se déroule concrètement.

Table des matières A. Un objectif fondamental : Le développement de la personne B. Quelques principes de base C'est le client qui dirige son cheminement Je suis un "coach" plutôt qu'un facilitateur Des conditions thérapeutiques semblables à la vraie vie Il devient capable de faire lui-même le travail But : Relancer le développement de la personne C. Stratégie d'intervention : Outiller la personne Je lui transmets des connaissances Je l'aide à maîtriser des habiletés Je l'aide à adopter des attitudes particulières D. Une conception des émotions E. Un exemple de démarche thérapeutique L'enquête : Identifier le problème L'instrumentation Les fruits du travail thérapeutique

Vous pouvez aussi voir: Vos questions liées à cet article et nos réponses !

A. Un objectif fondamental : Le développement de la personne

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En Auto-développement, la santé mentale n'est pas seulement une absence de maladie ou de difficulté. Dans notre travail, nous visons le développement de la personne en plus de la résolution du problème présenté. Nous considérons celui-ci comme une occasion de grandir, de revoir ses façons de faire et de changer ce qui "cause" la difficulté. Nous voyons cette dernière comme un symptôme; le signe que quelque chose ne va pas.

En effet, une mauvaise utilisation de ses émotions ou le non respect de soi (besoins, limites, etc.) dans ses relations intimes ou au travail peut amener des problèmes importants : angoisse, anxiété, burnout, dépression, insomnie, etc. Puisque nous considérons ces réactions comme des symptômes, nous les traitons comme des portes d'entrée pour résoudre les difficultés qui en sont la cause. Non seulement ces manifestations disparaîtront-elles lorsque leur cause sera éliminée mais en plus la personne sera outillée pour éviter une rechute. Elle saura ce qu'elle fait pour provoquer l'apparition de tels symptômes et quoi faire pour y remédier.

Crystel est constamment anxieuse et, depuis peu, elle fait régulièrement des crises d'angoisse. Elle découvre en psychothérapie qu'elle devient ainsi anxieuse lorsqu'elle banalise ses réactions émotives. Elle a l'habitude de se dire à chaque réaction "Ce n'est pas grave! Il y a pire!". C'est de cette façon qu'elle repousse ses émotions.

En les apprivoisant et en apprenant à les exprimer, elle est devenue de moins en moins anxieuse et a cessé de faire des crises d'angoisse. De plus, elle a acquis une nouvelle habitude: lorsqu'elle se sent devenir anxieuse, elle cherche immédiatement la réaction qu'elle a récemment repoussée. Elle est donc équipée pour rétablir son équilibre et éviter que son état anxieux ne s'aggrave... jusqu'à la crise d'angoisse! Les problèmes qui amènent à consulter peuvent habituellement être considérés comme des cris d'alarme de notre organisme pour nous inviter fortement à résoudre un problème fondamental qui nous empêche de profiter de notre vie au maximum. C'est dans ce sens qu'un problème devient un occasion de croissance, d'améliorer la qualité de sa vie.

B. Quelques principes de base

1. C'est le client qui dirige son cheminement.

Évidemment, je peux l'aider à définir ses objectifs et à préciser leurs conséquences possibles, mais c'est à lui que revient la responsabilité de déterminer les buts que nous poursuivons. Aussi, je lui propose des exercices, des lectures et des façons de faire mais c'est toujours à lui qu'appartient le pouvoir d'accepter ou de refuser, de les essayer et de les adopter.

2. Je suis un "coach" plutôt qu'un "facilitateur".

Si j'étais un instructeur de ski, j'aiderais mon élève à surmonter les difficultés réelles qu'il rencontre plutôt que de l'amener uniquement sur des pentes "faciles" pour lui éviter toutes les difficultés! Comme un coach, j'aide mon client à identifier ce qu'il fait (ou ne fait pas) pour obtenir les résultats qu'il obtient. Je lui apprends de nouvelles façons d'agir qu'il essaiera pour

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vérifier s'il obtient de meilleurs résultats. Je le supporte aussi dans ces expérimentations, dans ses réussites et ses échecs.

3. Des conditions thérapeutiques semblables à la vraie vie

Les difficultés de la vie réelle ne sont pas niées dans la relation thérapeutique.

Jasmin désire me parler d'un sujet particulier et me dit qu'il a peur que je sois déçue de lui. Je ne le rassurerai pas avant qu'il m'en parle. Jasmin a l'habitude de se "censurer" pour éviter de décevoir les autres. Si je le rassurais, je l'empêcherais de prendre le risque réel qui lui permettra de faire un pas vers l'avant. Le but n'est pas que Jasmin arrive à s'exprimer dans un contexte "protégé" mais bien qu'il arrive à le faire dans la vraie vie... avec tous les risques que cela comporte. Protéger mon client de ces risques, ce serait le priver de l'occasion de prendre de la solidité dans ce qui l'empêche de vivre librement.

4. Il devient capable de faire lui-même le travail

Fidèle à l'Auto-développement, j'aide mon client à développer et à exploiter toutes ses ressources en plus de l'aider à en développer de nouvelles. Je ne tente pas de nommer pour lui ce qu'il vit, je l'aide à le faire par lui-même. Je lui montre des moyens de le faire qu'il peut utiliser par la suite. Le but est qu'il soit mieux équipé dans sa vie réelle et non qu'il se sente mieux uniquement dans mon bureau!

5. But : Relancer le développement de la personne

En psychothérapie, je ne vise pas à aider mon client à devenir "développé"; une démarche de développement personnel n'est jamais achevée. Je vise plutôt à remettre en marche son processus de développement et je l'outille pour qu'il puisse poursuivre sa démarche sans aide au terme de sa psychothérapie.

C. Stratégie d'intervention : Outiller la personne

En Auto-développement, nous visons l'atteinte d'une vie riche et satisfaisante dans les situations normales de notre existence. Une vie qui respecte ce qui nous importe et dans laquelle nous arrivons à répondre à nos besoins. Nous voulons que la personne possède tous les outils nécessaires pour être pleinement satisfaite de sa vie.

Elle apprend à mieux utiliser ses émotions, à connaître ses besoins, à faire des choix qui respectent ce qu'elle est, à s'occuper activement de répondre à ses besoins et à se respecter devant les personnes avec qui elle est en relation.

Aussi, elle apprend à se connaître de divers points de vue : la signification de ses symptômes, ses façons habituelles de fonctionner (comment elle "boycotte" ses émotions et ses relations),

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les impasses dans lesquelles elle se retrouve généralement ainsi que les façons les plus efficaces pour s'en sortir.

Nous transmettons trois principaux groupes d'outils : des connaissances, des habiletés et des attitudes.

1. Je lui transmets des connaissances

Les connaissances que je transmets à mon client touchent principalement les émotions et le respect de soi en relation. Je fournis ces informations en les expliquant moi-même lors des séances de psychothérapie et en suggérant la lecture de textes ou de livres particuliers.

Pour ce qui est des émotions, il découvrira à quoi elles servent, comment elles fonctionnent, comment les ressentir, comment les décoder pour identifier ses besoins ainsi que les avantages et inconvénients de les ressentir et de ne pas les ressentir.

En ce qui concerne le respect de soi en relation, il apprendra pourquoi c'est important de se respecter, ce que cela veut dire "se respecter", comment s'occuper activement de ses besoins et comment rendre ses relations vivantes et nourrissantes. Aussi, il découvrira comment certaines expériences passées influencent ses relations actuelles, pourquoi il aboutit toujours dans les mêmes impasses et comment ne plus répéter ces "patterns" de relation insatisfaisants.

2. Je l'aide à maîtriser des habiletés.

Les habiletés que nous touchons dépendent surtout des difficultés vécues par chaque personne qui consulte. Je tente de l'aider à mieux connaître les moyens dont elle dispose déjà sans les utiliser et à découvrir d'autres moyens qui lui sont encore inconnus. Parfois, je vais même jusqu'à lui enseigner de nouvelles façons de s'y prendre. Ces apprentissages se font principalement par le biais d'exercices lors de nos rencontres et de "devoirs" à pratiquer à l'extérieur du bureau de consultation... dans la vraie vie! La seule façon efficace d'acquérir et de maîtriser des habiletés, c'est la pratique!

En général, il s'agit de développer les habiletés qui permettent de ressentir ses émotions, les utiliser pour s'informer de ses besoins, répondre à ses besoins, se respecter (s'affirmer) devant les personnes avec qui elle est en relation et résoudre ses patterns de relation qui mènent toujours aux mêmes impasses.

3. Je l'aide à adopter des attitudes particulières

Les attitudes que nous favorisons en Auto-développement sont diverses. Elles dépendent aussi des difficultés de chacun. Les plus fréquentes sont d'être à l'écoute de soi, d'accorder de l'importance à ses émotions, de considérer important de se respecter et de prendre la responsabilité de sa satisfaction.

C'est surtout par l'exemple que j'aide mon client à adopter ces attitudes. En les adoptant moi-même à son égard, je lui donne l'occasion d'en découvrir la pertinence et de les appliquer lui-même. Par exemple, c'est en accordant de l'importance à ce que vit mon client que je lui

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fournis la possibilité de commencer lui aussi à accorder à ses émotions l'importance qu'elles méritent!

D. Une conception des émotions

Les émotions ont une place privilégiée en Auto-développement: elles sont les porte-parole de nos besoins! Elles constituent le langage avec lequel notre organisme nous informe de l'état de nos besoins. En général, une émotion désagréable nous informe d'un besoin insatisfait et une émotion agréable nous informe d'un besoin satisfait. Nous avons donc tout intérêt à s'en faire des alliées et à apprendre à les utiliser. Il s'agit d'y être attentif, de les ressentir complètement, de décoder le message et de s'occuper du besoin pour rétablir l'équilibre.

Si nous ne rétablissons pas l'équilibre, le coût peut être élevé! Notre organisme tolère mal qu'on ne l'écoute pas et qu'on ne tienne pas compte des messages qu'il nous envoie. Il fait son boulot : s'assurer que nos besoins soient comblés de façon satisfaisante. S'ils ne le sont pas, il nous envoie un message par le biais de nos émotions. Si nous ne considérons pas ces messages, ils s'intensifieront pour nous inciter à nous occuper de ce qui ne nous convient pas. Notre organisme prend parfois les grands moyens pour être entendu: tensions, migraine, anxiété, angoisse, insomnie, déprime, etc. C'est lorsqu'on sait les écouter et les utiliser que les émotions cessent de nous tourmenter et deviennent de précieuses alliées!

Pour en apprendre plus sur les émotions, consultez le Dossier Psy : Les émotions.

E. Exemple de démarche thérapeutique

Voici maintenant un exemple de démarche thérapeutique. À travers le cheminement de Louis, vous pourrez reconnaître concrètement les diverses particularités de l'Auto-développement présentées dans cet article.

Louis est psycho-éducateur dans une école secondaire. Il a 30 ans et en est déjà à son deuxième burnout. Il est de retour au travail depuis 4 mois et il sent bien que le troisième est à venir. Il est découragé et ne sait plus quoi faire pour s'en sortir! C'est à ce moment qu'il vient me consulter.

1. L'enquête : Identifier le problème

Premièrement, nous cherchons ensemble à identifier le chemin qu'il prend pour aboutir au burnout à tout coup. Un non-respect de ses limites? Un travail qui ne répond pas à ses aspirations? Une difficulté d'affirmation dans sa relation avec ses collègues? Il est important de noter qu'il n'y a pas de cause unique qui s'applique à toute personne vivant un burnout. Pour chacune, il s'agit d'une cause ou d'un ensemble de causes particulières. Il s'agit donc premièrement d'identifier la difficulté qui cause le problème.

Pour identifier cette difficulté, nous faisons une enquête. Les indices qui nous aident sont principalement les émotions que Louis vit au travail : lorsqu'il est seul dans son bureau, avec

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ses collègues, avec sa patronne, le matin en route vers le bureau, le soir en retournant à la maison, etc.

Louis réalise que ses émotions sont particulièrement intenses et désagréables avec ses collègues et sa patronne. Là où il se sent mieux, il dit même "particulièrement motivé", c'est seul dans son bureau. Les matins où il doit travailler seul, il n'y a pas de problème. Par contre, les matins où il doit travailler en équipe... l'angoisse est au rendez-vous et parfois même la nausée!

Après quelques semaines d'enquête, Louis réalise que c'est lorsqu'il se retrouve dans une situation bien particulière qu'il se sent aussi mal : lorsqu'il est contraint à participer à une intervention avec laquelle il n'est pas d'accord. En effet, dans le service où il travaille, les plans d'intervention sont définis en équipe. Lors des réunions d'équipe, il arrive souvent que Louis soit en désaccord avec les décisions prises par l'équipe mais... il n'en dit rien. Il a peur que ses collègues le considèrent comme incompétent parce qu'il ne partage pas leurs idées; particulièrement lorsque toute l'équipe s'entend sur la meilleure façon d'intervenir.

En réalisant cela, Louis devient très triste. Il réalise qu'il n'arrive pas à faire valoir ses idées dans son équipe de travail. Il est donc souvent contraint à faire des interventions avec lesquelles il n'est pas d'accord, des interventions où il ne se respecte pas. Il soupçonne même que le burnout est une façon déguisée de mettre fin à cette situation. Le problème, c'est que ce n'est qu'une solution provisoire; ça ne "règle" pas réellement le problème. Un arrêt de travail de 3 mois lui permet tout au plus de se reposer en évitant d'être en contact avec cette situation très insatisfaisante. Au retour, s'il continue de se traiter comme il le fait, le prochain burnout est à prévoir! S'il reprend la même route, c'est évident qu'il se rendra à la même destination .

Une fois la difficulté identifiée, il s'agit de trouver une façon d'y remédier. Il est clair pour Louis qu'il veut apprendre à mieux affirmer ses besoins particuliers devant ses collègues. Il est content d'avoir trouvé la cause de son problème et en même temps, il est un peu découragé devant l'ampleur de la tâche. Somme toute, il en a assez de cette situation et est bien prêt à s'y mettre!

2. L'instrumentation

La phase suivante du travail thérapeutique est l'instrumentation. C'est le moment d'outiller Louis pour l'aider à atteindre ses objectifs. Notons que Louis est déjà plus outillé pour faire enquête sur ses problèmes personnels. Lorsqu'il aura d'autres difficultés dans sa vie, il saura que ses émotions sont très précieuses pour mieux identifier ce qui lui fait problème!

Nous nous occupons premièrement du découragement de Louis devant l'ampleur de la tâche. Cette réaction, comme toutes les réactions émotives, nous informe d'un besoin chez Louis. Si l'on ne s'en occupe pas, il risque de remettre à demain (de jour en jour) le travail qui lui permettrait de résoudre son problème.

Louis découvre que ce découragement exprime sa très grande peur de s'affirmer; il veut se risquer doucement sur ce terrain. Nous allons donc débuter par graduer les expériences qui lui permettront de développer ses habiletés. Louis ne se sent pas prêt du tout à dire qu'il n'est pas d'accord. Nous cherchons donc ensemble un objectif assez gros pour constituer un risque réel pour lui (car sans risque... pas de progrès!) mais assez petit pour qu'il soit prêt à risquer. Louis

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décide de débuter par cet objectif : Ne plus dire qu'il est d'accord lorsqu'il ne l'est pas (sans nécessairement dire qu'il n'est pas d'accord).

Petit à petit, il risque davantage! Et plus il ose, plus il gagne de solidité. Il discute ou soulève des questions à propos des les interventions proposées, il exprime ses craintes quant à certaines interventions, et finalement, il est surpris de voir que ses collègues en viennent même à apprécier les points particuliers qu'il soulève! Parfois, ils ne sont pas d'accord avec lui mais Louis a découvert le plaisir de se respecter et il tient tout de même à ses idées lorsque cela arrive. Au bout de quelques mois de pratique (en risquant toujours de plus en plus), il ose même refuser de participer à certaines interventions avec lesquelles il n'est pas d'accord!

Ce travail peut sembler plus facile qu'il ne l'est en réalité. Il faut dire que Louis en a vécu des émotions ! Il a dû affronter la peur du rejet et l'insécurité. Au début, c'était difficile. À certains moments, il a repris contact avec certaines émotions éprouvées lors de situations passées où il avait réellement été rejeté à cause de ses idées différentes. Une fois ces émotions vécues, il réalise que le rejet lui fait moins peur. Il croit même qu'il évitait peut-être tout risque de rejet pour ne pas revivre ces émotions!

3. Les fruits du travail thérapeutique

Louis est particulièrement fier, cela fait maintenant 4 mois qu'il est en démarche thérapeutique et la fatigue ainsi que la déprime qu'il sentait au début de nos rencontres sont disparues. Certains jours elles reviennent faire leur tour mais Louis sait maintenant ce qui se passe. Il tente alors d'identifier ce qui lui fait cet effet et prend les moyens d'y remédier. Avec sa patronne, il réalise que c'est plus difficile qu'avec ses collègues... mais il est outillé pour développer son habileté à affirmer ses désaccords avec elle et il compte bien pratiquer à chaque occasion.

Le travail thérapeutique que nous avons fait ensemble lui a permis de développer ses habiletés à être à l'écoute de ses réactions émotives, à décoder ses émotions, à dire ses désaccords, à présenter et défendre ses idées, à négocier en s'assurant de ne pas négliger ses besoins importants, à apprivoiser les émotions qui sont reliées à cette affirmation, ...

Louis réalise aussi qu'il est plus heureux au sein de sa famille! Il n'est plus contraint (ou plutôt il ne se contraint plus) à participer à des activités qui ne lui plaisent pas! Quoi que avec sa fille, c'est plus difficile...

Une des belles récompenses d'une démarche en Auto-développement, c'est d'être remis sur le chemin de la croissance tout en étant plus outillé pour y poursuivre sa route!

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Les chemins de la croissance Par Michelle Larivey, psychologue

Résumé de l'article

Ce texte s'adresse principalement aux personnes qui s'occupent activement de leur développement personnel. Vous y verrez une description des principales étapes: Se faire une place, s'explorer, s'assumer ouvertement et résoudre ses transferts. Vous trouverez aussi des moyens efficaces de faciliter le passage d'une étape à une autre et les pièges à éviter!

Table des matières Avant propos Introduction 1e étape: Se faire une place 2e étape: S'explorer 3e étape: S'assumer ouvertement 3b: Résoudre ses transferts Conclusion

Avant-propos

Ce texte a été rédigé à l'occasion d'une conférence donnée à Montréal le 4 février 1996 dans le cadre du Salon de la santé et des médecines douces.

Il s'adresse principalement aux personnes qui s'occupent activement de leur développement personnel, en s'aidant de divers moyens et services qui s'offrent à eux.

Cette conférence visait à aider ces personnes à faire des choix plus éclairés et efficaces dans leur cheminement. Ainsi, elles deviendront des proies moins faciles pour la publicité et certains intervenants dont l'éthique et le professionnalisme laissent parfois à désirer.

Introduction

"Grow or Die". Croître ou mourir. Ce titre de livre est percutant, mais il traduit vraiment la réalité. Tout ce qui est vivant est soit dans un processus de croissance, soit dans en dégénérescence.

Il n'existe pas de stade inerte chez les vivants. Le rosier donne des boutons qui s'ouvrent lentement, les roses atteignent leur maturité dans toute leur splendeur et commencent

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immédiatement à se flétrir. Physiquement il en est ainsi de l'humain. Ayant atteint le maximum de son développement physique vers 25 ans, le processus de dégénérescence s'amorce.

Malgré cette réalité, les humains, dans bien des cas, s'acharnent à ne pas vouloir changer. Ils se refusent à grandir, même si la situation appelle un changement.

Marie a un mari qui va au-devant de ses besoins et se montre très enveloppant. Ça la satisfait car elle a beaucoup besoin de marques d'affection sans lesquelles elle est insécure.

Mais son milieu de travail n'est pas aussi chaud que son cocon familial. De fait, sa collègue de travail est plutôt froide et ne fait pas de cas d'elle. Marie enrage de ce manque de considération et fait durant plusieurs années, maints efforts pour faire changer le comportement de sa partenaire.

Lorsque j'interviens, elle est sur le point de quitter l'entreprise parce qu'au bord de la dépression. Cette situation est si intenable, que même sa vie familiale est empoisonnée par ses réactions. Mais il n'est pas question pour Marie de faire la démarche de développement psychique nécessaire pour devenir capable de tolérer de n'être pas minimalement aimée de tout le monde. Marie ne veut pas changer.

Croître, c'est changer. Changer pour le mieux, pour s'adapter lorsque nécessaire, pour traverser une difficulté qui nous empêche d'être satisfait, pour mieux se posséder, etc. En Auto-développement, l'approche dont s'inspire mon travail comme psychothérapeute, croître c'est plus particulièrement devenir continuellement de plus en plus sujet dans son existence. C'est exactement le contraire que de se vivre comme un objet à la merci de la vie, des événements, de l'entourage, des êtres aimés.

Si Marie, comme nous tous souvent, préfère l'immobilité et s'acharne à changer l'autre pour l'adapter à son besoin, ce n'est pas par mauvaise volonté, ou par paresse. Je crois que c'est essentiellement pour deux raisons:

D'abord par peur d'être inconfortable ou de souffrir. Elle a, pense-t-elle, une recette gagnante dans le mode d'interaction de son milieu familial. Elle ne voit pas pourquoi elle l'abandonnerait.

Mais c'est surtout, par ignorance qu'elle choisit l'immobilité. Marie ne sait pas combien elle y gagnerait en solidité personnelle si elle arrivait à être capable de vivre, même dans l'adversité. Il n'y a pas de raison que Marie sache cela, à moins qu'elle ne soit une spécialiste du développement humain. C'est une réalité qui n'est absolument pas évidente.

Même si l'humain est mû de l'intérieur par une force qui le pousse à rechercher la satisfaction et même à se développer (cf. la tendance actualisante dont parle Abraham Maslow), il a souvent tendance à éviter ce qui le fait souffrir. Or, le changement passe toujours par une certaine souffrance, ou du moins un certain inconfort.

On accepte cette souffrance lorsqu'on sait qu'elle est temporaire et quelle prépare un mieux être. Comme disent les véliplanchistes extrêmes "Pain is only temporary" (entendre la joie est tellement grande qu'on est prêt à payer le prix qu'il faut).

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Dans certains domaines où on s'y connaît, on peut faire ce choix éclairé. On s'entraîne, douloureusement, pour être en forme. On se prive dans l'espoir d'atteindre la silhouette rêvée. On étudie à se crever pour réussir son examen. Mais dans le domaine de la croissance personnelle, peu de gens possèdent les connaissances qui leur permettent de choisir la douleur pour un mieux-être ultérieur.

C'est la raison qui m'a poussée à offrir une conférence sur le thème "Les chemins de la croissance": fournir des éclaircissements qui permettent de voir son développement dans une perspective plus large. Je vois souvent des clients qui ont investi beaucoup d'énergie, d'argent et de temps dans toutes sortes d'activités de croissance et qui, au bout du compte, se retrouvent à peu près au même point qu'au départ. Parfois, ils sont confus, mêlés, découragés que leurs efforts n'aient pas donné plus de résultats, malgré la sincérité et la force de leur investissement personnel.

Que vous soyez parmi ces personnes où non, si vous êtes intéressé à demeurer en mouvement et si vous êtes préoccupé de votre développement comme personne, les réponses aux questions suivantes vous seront utiles.

Quelles sont les étapes de la croissance? Quelles sont les moyens de rendre notre démarche de développement personnel la plus efficiente? Y a-t-il des conditions plus favorables que d'autres? Dans notre optique, il y a 3 grandes étapes de développement personnel. Ces trois étapes que je vais développer ici sont: se faire une place s'explorer s'assumer.

Pour en savoir plus:

À quoi servent les émotions?

Par le psychologue Jean Garneau

1ère étape: Se faire une place

Se faire une place, c'est oser être réceptif à ce qui est important pour soi, à ce qui est vivant en soi. Cela revient essentiellement à être prêt à ressentir ses sentiments, à considérer d'un regard accueillant ses besoins et ses préoccupations.

Certaines personnes parviennent à l'âge adulte sans avoir réussi à se donner ainsi une place dans leur vie. Il est absolument essentiel qu'elle se consacrent à atteindre cet objectif. Plusieurs raisons expliquent pourquoi c'est si important. Nos émotions sont les données fournies par un système d'information qui nous renseigne continuellement sur nos besoins. Et pour vivre de façons satisfaisante, il faut prendre nos besoins en considération (ce qui suppose, bien sûr, qu'on apprend à se centrer pour qu'ils

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puissent émerger par ordre de priorité). Il est essentiel d'être à l'écoute de ce qui est important, de ce qui nous préoccupe; c'est ce qui nous permet d'avoir une vie pleine.

La seule motivation de changement qui dure est celle qui vient de l'intérieur. Il est indispensable d'être à l'écoute et réceptif à soi pour y avoir accès. Sinon, on cherchera à se manipuler: on se dira qu'il faut arrêter de fumer, prendre plus de vacances, être plus gentille avec son amoureux. Où encore, on tentera de céder aux pressions de l'extérieur: "tu devrais...." sans que cela ait de sens pour nous.

Pour devenir davantage sujet de sa vie, il faut être en contact avec sa vie (son corps, ses besoins, ses émotions, ce qui est important pour soi...). Se faire ainsi une place, c'est aussi la garantie de n'être jamais la proie d'un gourou ou d'une secte. Personne ne peut alors se substituer à nous pour savoir ce qui est bon pour nous. Personne ne peut nous manipuler en répondant à nos besoins inconscients, car nous avons la capacité d'être en contact avec nos besoins.

Les moyens

Si devenu adulte on n'est pas parvenu à se faire une place, il est plus efficace de chercher de l'aide pour y arriver car on a développé des "plis" et on oppose des résistances à le faire.

La psychothérapie individuelle est un moyen très efficace d'y arriver. Il est indispensable, toutefois, qu'il s'agisse bien de psychothérapie et non de traitement de problème dans le genre des différentes thérapies brèves, cognitives, béhavioristes.

Un autre moyen peut être utilisé par ceux qui ne veulent pas où ne peuvent pas entreprendre une psychothérapie, mais souhaitent apprendre à se faire une place dans leur vie. Ressources en Développement a publié dernièrement un outil qui poursuit exactement cet objectif. Il s'agit du Programme Savoir Ressentir, un ensemble d'instruments dont on peut se servir seul pour améliorer sa capacité de contact avec son monde intérieur.

Toute personne qui s'attarde quelque peu sur elle pour reconnaître ce qui la touche, ce qui lui importe et pour cerner ses besoins, se met automatiquement à devenir quelqu'un d'intéressant. C'est alors que naît le désir de se connaître davantage. On est intrigué par certains de nos comportements, on ne comprend pas pourquoi on n'arrive jamais à...etc. On est alors prêt pour la phase suivante.

Il existe cependant un danger (il se présentera d'ailleurs à toutes les phases), c'est d'en rester là. Passer à la phase suivante implique nécessairement de nouveaux défis, de nouvelles difficultés et nous avons probablement atteint un niveau de confort agréable qu'il n'est pas intéressant, à priori, de bouleverser.

Si on atteint un point où on se fait presque une religion de "s'écouter", de "prendre soin de soi", de "se faire plaisir", si on se met à trouver "qu'on est donc bien tout seul... que la vie est donc plus facile", il y a de bonnes chances qu'on soit en train d'éviter le passage normal à la phase suivante.

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2ième étape: S'explorer

Si la première étape est complétée, on en viendra tout naturellement à l'exploration de soi. Celle-ci se fera harmonieusement, les sujets s'arrimant les uns aux autres.

C'est parce que le questionnement viendra de l'intérieur qu'il en sera ainsi. Et c'est parce qu'il se fera à partir de l'intérieur qu'il en restera quelque chose. C'est exactement le contraire de ce qui se produit lorsque l'exploration est conduite par des questions parachutées de l'extérieur comme celles qui viennent des autres ou qui nous sont suggérées par des auteurs.

J'ai vu beaucoup de personnes qui n'arrivaient à rien en essayant de mettre en pratique des conseils comme "change de genre de femme!", "sois ta propre mère", "aime-toi" ... Si ce conseil n'arrive par exactement au moment où la personne est rendue à cette étape précise dans sa démarche (un synchronisme infiniment rare), il est à toute fin pratique inutile.

Combien de personnes se sont perdues en cherchant à mettre en application des choses intéressantes et valables qu'elles avaient lues mais pour lesquelles elles n'avaient pas fait le cheminement préalable. Combien se sont retrouvés en mauvais état en suivant le conseil de leur gourou "d'adresser leur colère immédiatement à leurs parents, quelle que soit leur réaction"!

Je ne le répéterai jamais assez, pour être constructives, les expérimentations doivent être assumées et pour cela, il faut qu'elles soient commandées de l'intérieur. Les suggestions ne sont pas à bannir, mais elles doivent être évaluées soigneusement pour choisir celles qui nous conviennent au moment et au point précis où on se trouve.

Les moyens pour alimenter l'exploration

la lectures l'expérimentation active parler de nos découvertes avec d'autres Les moyens pour rendre la démarche plus efficace

la psychothérapie individuelle (qui doit être absolument enrichie de diverses expériences). La psychothérapie servira de lieu pour

traiter nos découvertes digérer les nouvelles expériences comprendre ce qu'on a vécu (le vécu avec le psychothérapeute constitue un matériel d'exploration très précieux qui doit faire partie de cette exploration) Durant cette phase on se rend compte qu'il y a certaines choses de soi qu'on préfère cacher aux autres. Il y a des sentiments, des besoins, des comportements qu'on n'est confortable d'avoir que lorsqu'on est seul avec soi. Mon opinion est claire, mais je n'arrive pas à l'exprimer en réunion. Je ne peux pas me permettre de n'être pas à mon meilleur devant les autres. Je n'arrive pas à dire non. Il m'est impossible de faire voir à un homme qu'il me plaît. C'est tellement vrai que je choisis ceux qui ne me plaisent pas.

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Malgré les indices clairs que nous présentent ces constatations, le danger d'en rester-là nous guette encore une fois. On est en effet assez confortable avec soi, on réussit à avoir une vie relativement agréable et intéressante.

Pourquoi se forcer à passer à un autre stade? D'ailleurs, y a-t-il un autre stade? N'est-ce pas important de se suffire dans la vie? L'important n'est-il pas d'être bien avec soi et d'être assez autonome pour avoir ses activités? Toutes les rationalisations populaires de notre époque sont au service de notre goût de confort et de notre crainte du changement!

D'abord, il n'est pas évident qu'il existe un autre stade. Quant aux autres questions, la réponse de beaucoup de gens est un GROS OUI. Ils confondent "autonomie dans l'initiative pour répondre à ses besoins" et autarcie, c'est-à-dire, se suffire.

Mais aucun être vivant ne peut se suffire. Il a besoin de contact avec l'univers. Entre humains, le contact est indispensable pour combler les besoins affectifs qui perdurent la vie durant. Il est donc important de savoir qu'il existe une phase subséquente. Seul quelqu'un de familier avec ces étapes peut nous informer de leur existence!

3ième étape: S'assumer devant les autres

Cette étape est cruciale dans la vie de tout individu. C'est en réussissant, graduellement, à s'assumer devant les autres qu'on gagne la sérénité tant espérée. C'est un processus dans lequel on a avantage à être guidé par un expert car il est facile de s'égarer.

Par exemple, s'assumer devant les autres ne signifie pas "pouvoir faire quoi que ce soit devant les autres parce qu'on s'est durci". Cela n'a rien à voir non plus avec se "foutre" du monde.

Au contraire. C'est un cheminement dans lequel nous prenons le risque de nous respecter dans toute notre intégralité devant des personnes auxquelles on tient vraiment.

Les moyens de rendre cette démarche efficiente

le groupe de psychothérapie les sessions de croissance sur des thèmes en rapport avec les dimensions que nous cherchons à mieux posséder. Il est important de choisir un groupe où les gens auront des réactions vraies, ni complaisantes, ni exagérées. C'est essentiel pour pouvoir en tirer une vision réaliste de notre impact sur les autres. Il est important de choisir une approche de psychothérapie qui encourage à s'assumer soi-même et qui ne cherche pas à faire adopter des attitudes et des comportements corrects.

En cours de démarche, on se rendra compte qu'il existe des personnes devant lesquelles il est plus difficile de s'assumer. Sans le savoir très clairement, nous investissons ces personnes d'un pouvoir particulier de nous reconnaître. On s'aperçoit qu'on trouve continuellement de telles personnes sur notre chemin et que parfois même on les cherche. S'affirmer devant ces personnes devient un défi supplémentaire, mais essentiel à notre satisfaction.

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Le danger, ici aussi, c'est de renoncer à s'assumer devant ces personnes. En les évitant, par exemple.

Il est facile de trouver dans la littérature populaire et chez plusieurs conférenciers un encouragement à éviter les personnes qui réveillent nos vieilles blessures. Je ne pense pas qu'il faille les éviter. Au contraire. D'ailleurs une force intérieure nous pousse sur le chemin de ces personnes, pour régler ces vieux conflits. Mais encore faut-il savoir comment arriver à les régler.

C'est ici qu'on doit distinguer une deuxième partie de cette troisième étape, une partie où on cherche encore à s'assumer ouvertement devant autrui, mais avec des personnes spéciales. Il s'agit de s'assumer vraiment devant les personnes qui ont pour nous le plus d'importance.

Pour en savoir plus:

Le transfert dans les relations

Par la psychologue Michelle Larivey

3b: Résoudre ses transfert

On est mûr pour cette démarche lorsqu'on commence à penser qu'il y a anguille sous roche du fait par exemple, d'être systématiquement en désaccord avec les personnes en autorité d'être aussi défensive avec son mari qu'on l'était avec son père d'avoir avec son conjoint des chicanes qui ressemblent étrangement à celles qui nous faisaient tant souffrir avec nos parents qu'on enrage que l'entreprise ne nous manifeste pas davantage de reconnaissance qu'on ne supporte aucune critique qu'on tombe en amour aussitôt que quelqu'un s'intéresse à nous qu'on déprime devant l'indifférence de notre adolescent ... etc, etc, etc La répétition, l'intensité de nos réactions, le fait qu'elles soient si stéréotypées (toujours les mêmes dans une situation semblable) sont des signes qui ne trompent pas. Ils indiquent que nous revivons, dans le présent, des expériences antérieures non complétées.

Lorsqu'on remarque ces indices et qu'on veut y voir plus clair, on est vraisemblablement prêt à compléter ces situations qui empoisonnent notre vie. Mais pour être efficace dans cette démarche et pour ne pas se décourager devant les difficultés qu'on y rencontre, il est important d'être bien instrumenté.

Les moyens de résoudre nos transferts

Le groupe de psychothérapie, dans une approche qui fournira

l'instrumentation

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la possibilité de pratiquer

Les situations de la vraie vie avec interlocuteurs transférés et les originaux, c'est-à-dire, notre famille d'origine.

Conclusion

Il est important de bien comprendre où on en est dans sa démarche de développement personnel. Il est impérieux de connaître les moyens appropriés pour s'aider à réaliser avec succès l'étape où on en est.

En étant bien orienté dans notre démarche de développement personnel, on économisera beaucoup de temps. On évitera aussi plusieurs expériences négatives qui laissent des traces profondes ou nous amènent à abandonner notre recherche.

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L'Auto-développement Par Jean Garneau , psychologue

La première version de ce texte est parue dans la revue Santé mentale au Québec Volume V, No 1, Juin 1980: Vers une nouvelle pratique

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Résumé de l'article

Découvrez l'origine, les principes et les concepts fondamentaux de l'Auto-développement, cette approche thérapeutique qui aide à: acquérir les outils nécessaires pour diriger soi-même son développement personnel tout au long de sa vie (instrumenter)

remettre en marche le processus naturel de croissance et résoudre ses transferts

vivre plus pleinement et à avoir des relations épanouissantes dans sa vie de tous les jours

Table des matières A. Introduction B. Les origines C. Les postulats fondamentaux D. Les concepts principaux E. Conclusion F. Références

A. Introduction

Traditionnellement, le psychothérapeute se considère comme un expert qui permet à l'individu de faire un cheminement plus ou moins complet en direction d'une meilleure harmonie personnelle. Selon les écoles, le thérapeute se définira comme un expert des phénomènes psychiques et psychopathologiques, comme un expert des conditions interpersonnelles nécessaires à un tel cheminement ou comme un spécialiste des façons d'aborder et de résoudre les problème personnels.

L'Auto-développement se distingue de cette tradition en cherchant directement à remettre au client les rênes de son évolution. Pour y parvenir, le psychothérapeute se fait éducateur : il ne cherche pas à utiliser directement son expertise mais se centre sur la transmission des connaissances, habiletés et techniques nécessaires à la facilitation d'une démarche de croissance personnelle. C'est donc le client qui devient l'expert et le facilitateur; en conséquence, c'est la vie quotidienne qui devient la principale situation thérapeutique.

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Cet article vise à présenter les caractéristiques essentielles de cette option thérapeutique. Le lecteur intéressé à en savoir davantage pourra trouver une synthèse complète de l'Auto-développement dans l'ouvrage de Jean Garneau et Michelle Larivey: L'Auto-développement, psychothérapie dans la vie de tous les jours.

Nous tenterons d'abord d'identifier les influences qui ont provoqué le développement de cette approche. Ensuite, nous expliciterons les principes fondamentaux ainsi que les concepts essentiels de l'Auto-développement.

Utilisez vos problèmes pour vous épanouir !

Agressivité Angoisse Anxiété Cyberdépendance Dépendance affective Deuil Insomnie Migraine Phobie Relations difficiles Séparation Stress

B. Les origines

L'Auto-développement s'inscrit dans une orientation générale qu'on peut désigner, avec A. H. Maslow ( 1962), sous le nom de "troisième force" ou, dans les termes de J.F.T. Bugental ( 1967), sous le titre de "psychologie humaniste". I1 s'agit d'un courant de pensée qui met l'accent sur l'actualisation du potentiel humain plutôt que sur l'élimination des problème psychologiques.

Comme les autres auteurs qui s'inscrivent dans ce courant, nous considérons que tout être vivant tend naturellement à se développer (à protéger et à maximiser sa vie) dans la mesure où il en a la possibilité. Dans cette perspective, l'aide professionnelle que peut apporter un psychothérapeute consiste essentiellement à favoriser l'action de cette tendance innée chez la personne. Il ne s'agit plus de contrôler des tendances destructrices, de lutter contre des résistances ou de provoquer l'apparition de nouveaux comportements automatiques, mais d'assister la personne dans ses efforts pour se développer, vivre à sa pleine mesure et atteindre une plus grande satisfaction à travers une vie plus riche, plus intense et plus significative.

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A l'intérieur de ce courant général, nous avons bénéficié de plusieurs influences importantes. Carl Rogers ( 1961 ) nous a surtout servi à comprendre les dimensions interpersonnelles de la facilitation du développement de la personne. particulièrement au niveau des attitudes. Son influence demeure précieuse au plan du respect de la personne du client et de sa démarche. Eugene Gendlin ( 1964) fut, pour sa part, le premier auteur à nous sensibiliser au processus de changement de la personnalité. Son influence a débouché sur la formulation du processus naturel de croissance dont il sera question plus loin. James Bugental (1965) a contribué de façon importante à stimuler notre réflexion sur les questions existentielles fondamentales et l'impact de leur évitement. Enfin, Frederik Perls et l'ensemble de l'école ,Gestaltiste (voir Polster et Polster, 1973) nous ont apporté une stimulation importante à plusieurs niveaux. Non seulement ont-ils inspiré en bonne partie nos recherches sur la dimension de prise en charge du client par lui-même, mais ils nous ont aussi fourni des éléments nouveaux sur le processus, les techniques d'intervention et la réinterprétation de certaines expériences émotives (la peur et la culpabilité par exemple).

Dans les paragraphes qui précèdent, nous identifions les auteurs les plus importants qui ont stimulé ou alimenté notre réflexion et nos diverses tentatives. Cependant, pour cerner les racines essentielles de l'Auto- Développement, il faut avant tout comprendre le cheminement qui y a donné naissance.

C'est d'abord une préoccupation d'efficacité qui nous a amenés à modifier notre pratique d'orientation rogérienne et à devenir spécialistes en croissance personnelle. La double situation de travail (sessions intensives et psychothérapie hebdomadaire) dans laquelle nous nous étions retrouvés nous confrontait à un nouveau problème : les changements importants qui survenaient au cours des sessions intensives avaient souvent tendance à disparaître rapidement lorsque les participants revenaient à leur milieu de vie habituel. C'est alors que notre objectif principal est devenu le suivant: s'assurer que les participants soient en mesure de transposer leurs apprentissages dans leur vie quotidienne et de le faire sans support extérieur.

II devenait alors important que chacun assume pleinement chaque progrès qu'il faisait et qu'il ne s'appuie en rien sur l'aide du thérapeute, le support du groupe ou des conditions facilitantes. La situation de thérapie devait comporter des difficultés semblables à celles de la vie quotidienne; la personne pouvant ensuite y réutiliser ses apprentissages.

Par ailleurs, notre expérience nous faisait croire de plus en plus que la croissance personnelle ne correspondait pas à une étape de développement vers un état d'équilibre relativement stable, mais plutôt à un mode de vie susceptible de durer aussi longtemps que l'existence de la personne. La psychothérapie devenait donc à nos yeux une forme de recherche de soi axée sur l'atteinte d'une intégration personnelle de plus en plus harmonieuse, et l'obtention de satisfactions de plus en plus complètes. Nous croyons, en effet, que le mouvement vital de la personne la conduit à remettre rapidement en question chaque nouvel état d'équilibre atteint, et à rechercher des satisfactions plus complètes qui l'obligeront à se confronter à des difficultés plus grandes que celles qu'elle avait auparavant résolues.

C'est l'interaction entre ces deux préoccupations qui nous a amenés à miser sur l'instrumentation. Si la vie correspond à une démarche sans fin de croissance personnelle et si la vie quotidienne est en définitive la seule importante, il devient en effet nécessaire de redéfinir la psychothérapie dans le sens d'un apprentissage directement applicable par le client lui-même dans sa vie de tous les jours. Idéalement, la personne apprendrait à exploiter les

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situations qui surviennent dans sa vie comme autant d'occasions de mieux se connaître, de développer ses ressources, de s'assumer et de se posséder davantage. Si nous sommes des spécialistes du changement de la personne, nous devrions être en mesure de transmettre cette expertise à nos clients, pour qu'ils puissent l'utiliser continuellement, dans la mesure où ils choisissent de travailler à leur développement.

L'Auto-développement est notre réponse à ce défi: comment rendre l'individu capable de diriger lui-même son propre développement et de l'alimenter à travers les situations où il se trouve chaque jour. I1 ne s'agit pas de la seule réponse possible, mais elle a le mérite d'être claire, cohérente et efficace.

Comme on peut maintenant le comprendre, l'Auto-développement ne correspond pas à une autre méthode thérapeutique qui vient s'ajouter à la liste déjà trop longue; il s'agit en réalité d'une redéfinition fondamentale de l'acte thérapeutique. En cela, il s'agit d'une conception qui rejoint un courant encore jeune, où on veut remettre entre les mains de la personne concernée les instruments qui lui rendront le pouvoir légitime sur sa propre existence. Ce courant se manifeste non seulement en psychologie (groupes sans animateurs, alcooliques anonymes, etc...), mais également en pédagogie (enseignement programmé), en politique (les propositions constitutionnelles du gouvernement actuel) et dans la vie sociale en général (démocratisation des notions économiques, regroupements de citoyens, manuels de type "faites-le vous-même", etc...).

C. Les postulats fondamentaux

La conception de la thérapie retrouvée en Auto-développement n'a de sens que dans le contexte d'une conception particulière de la vie humaine. Nous tenterons de communiquer cette vision de la vie à l'aide de quelques phrases brèves qui en résument les points les plus fondamentaux.

L'important dans la vie c'est la satisfaction qu'on en tire.

C'est dans la vie de chaque jour qu'il est nécessaire de savoir trouver ces satisfactions.

Les plus grandes satisfactions viennent du fait de se sentir pleinement vivant.

Être vivant c'est se développer continuellement et ce développement n'est jamais achevé.

En le percevant, nous créons continuellement l'univers qui nous entoure, à notre image.

L'ensemble de notre vie psychique traduit continuellement l'état de notre organisme et constitue le seul guide fiable dans la recherche de la satisfaction.

Chaque personne peut, si elle consent à y demeurer disponible, avoir accès à l'ensemble des messages de son organisme.

Nul ne peut être déterminé de l'extérieur sans y consentir et aliéner une partie de ses propres forces.

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Au-delà de ces postulats concernant la vie et la satisfaction, on peut identifier une autre option de fond à laquelle nous avons déjà fait allusion. Nous considérons qu'un certain nombre de connaissances et d'habiletés sont nécessaires pour diriger efficacement son propre développement comme personne, tout comme elles sont nécessaires pour aider celui d'un autre. Ces connaissances et habiletés peuvent être transmises avec clarté et précision pourvu qu'elles soient abordées à travers l'expérience vécue. Dans ce cas, le temps nécessaire à leur acquisition suffisante est toujours raisonnable. On imagine mal une société qui ne s'assurerait pas de transmettre à ses citoyens les rudiments de la communication parlée et écrite, ainsi que des notions de base sur les lois et le système économique. Pourquoi faudrait-il que chacun ait tout à réinventer dans le domaine de la vie psychique?

Pour en savoir plus sur l'instrumentation:

L'auto-développement: Une stratégie d'instrumentation

Pour en savoir plus sur le processus naturel de croissance:

La vie d'une émotion

Pour voir un exemple du déroulement de ces étapes:

Illustration d'une boucle complète du processus

Des articles qui traitent du transfert:

Transfert et droit de vivre

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Les noeuds dans les relations (série d'articles)

Pour en savoir plus:

L'expression qui épanouit

D. Les concepts principaux

Le concept d'instrumentation est évidemment au centre de l'Auto-développement. Toute intervention thérapeutique dans cette approche porte cette préoccupation. I1 s'agit toujours que les résultats obtenus découlent directement et clairement des actes du client plutôt que de l'intervention du thérapeute, que les informations utilisées pour guider ces actes soient celles dont dispose le client et non pas celles qui viendraient des intuitions ou interprétations du thérapeute. Ceci n'empêche pas ce dernier d'introduire des informations sur la nature de certains phénomènes psychiques ou sur des façons de procéder pour obtenir un résultat donné, mais toujours ces éléments apportés de l'extérieur demeurent des suggestions ou des opinions que le client aura à vérifier à partir de sa propre expérience. En outre, de telles informations ne portent jamais sur le contenu de l'expérience actuelle du client ; il est considéré comme le seul capable de cerner adéquatement cette dimension de sa vie intérieure.

Le deuxième concept le plus important en Auto-développement est celui de processus. I1 s'agit d'ailleurs d'un des sujets sur lesquels porte surtout l'effort d'instrumentation. Un examen attentif de la démarche de nos clients nous a permis de comprendre comment survenaient les changements durables que nous pouvions observer. C'est la structure fondamentale de ce cheminement que nous appelons le processus naturel de croissance»». II s'agit des étapes typiques nécessaires à l'atteinte d'un développement personnel qui va dans le sens de l'acquisition d'une ressource (capacité) nouvelle. C'est donc le cheminement qui permet la forme de changement personnel que nous visons.

Ce processus comporte six étapes qu'on peut distinguer clairement. Non seulement chacune de ces étapes est- elle nécessaire, mais il est également indispensable qu'elles apparaissent dans un ordre donné. Toute inversion d'étapes ou toute omission fait que le résultat obtenu reste incomplet et que la démarche doit être reprise pour assurer le développement de la capacité en cause. Ce processus demeure semblable, peu importe le contenu expérientiel qui le déclenche. En fait, nous avons de bonnes raisons de croire que cette formulation de processus, malgré ses imperfections, rejoint l'ensemble des phénomènes de croissance des organismes vivants.

Pour une description de ce processus nous référons le lecteur au deuxième chapitre de notre ouvrage (Garneau et Larivey, 1979) car même une esquisse sommaire occuperait le reste de l'espace qui nous est réservé.

I1 faut également mentionner la réappropriation et la responsabilité parmi les concepts fondamentaux de l'Auto-développement. I1 est évident que notre stratégie fondamentale d'instrumentation exige du client qu'il assume plusieurs responsabilités qu'il aurait autrement

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tendance à laisser au thérapeute. C'est lui qui oriente sa démarche à partir de ses préoccupations importantes. C'est lui également qui choisit d'avancer dans cette démarche, et en règle le rythme en fonction de sa motivation et de la disponibilité de ses ressources. Nous l'aidons à connaître les façons efficaces de se fournir l'information nécessaire, mais les choix n'appartiennent qu'à lui.

La réappropriation constitue une extension de cette responsabilité: il s'agit fondamentalement de reprendre possession du contenu de sa vie psychique (perception, émotion, fantaisie, sensations corporelles, etc...). Le but ultime étant que la personne redevienne maître de l'utilisation de toutes ses capacités, il est nécessaire qu'elle sc sensibilise aux dimensions expressives de tout ce qui compose son univers. Par ce chemin, elle apprend à retrouver ce qu'elle met d'elle-même (protection ou création) dans chacune de ses actions. Ainsi, elle sc découvre ;fi travers ce qu'elle perçoit de son environnement, les événements qui surviennent dans sa vie, les situations qu'elle contribue à créer. etc. Par là, elle est en mesure de reprendre son pouvoir réel sur la trame concrète de son existence.

Soulignons enfin que, contrairement à la plupart des auteurs de la psychologie humaniste, nous accordons une importance prépondérante aux dimensions transférentielles des relations interpersonnelles. Nous considérons transférentielles toutes les relations dont la charge émotive est éprouvée comme très importante. Pour nous, le transfert est une tentative de reprendre possession de certaines dimensions de soi autrefois reniées. I1 s'agit donc d'une manifestation importante de la tendance naturelle à rechercher le développement le plus complet. Ces efforts spontanés ont pour but de se donner l'un des trois droits suivants : le droit à l'existence, le droit à une identité distincte et le droit à une identité sexuelle personnelle. Notre apport le plus important à ce niveau consiste à identifier la tâche d'expression complète qui permet une résolution réelle du transfert.

Ceci rejoint un autre concept essentiel de l'Auto-développement : l'action expressive unifiante. Que ce soit au niveau du processus naturel de croissance ou de la résolution du transfert, notre expérience nous amène à croire que c'est par cette expression complète (entièrement fidèle à soi) que se produisent le changement et le développement de la personne dans le sens de la croissance. C'est en s'affirmant ouvertement, d'une façon respectueuse de l'ensemble de ce qu'elle est, que la personne reprend possession de ses capacités de vivre et de donner du sens à sa vie.

E. Conclusion

Cet exposé sommaire des origines, principes et concepts les plus fondamentaux de l'Auto-développement demeure forcément très incomplet. Nous espérons tout de même qu'il permettra au lecteur de déceler l'originalité profonde de cette façon de voir la psychothérapie. Nous croyons qu'il s'agit d'une direction nouvelle dans cet univers, d'une orientation capable de stimuler des réflexions qui pourraient amener des développements importants dans ce champ à la fois trop conservateur et trop empreint de création intempestive.

F. Références

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BUGENTAL, J.F.T. (Ed.), 1967, Challenges of Humanistic Psychology. New York, Mc Graw-Hill.

BUGENTAL, J.F.T., 1965, The Search for Authenticity : An Existential-Analytic Approach to Psychotherapy. New York, Holt, Rinehart and Winston.

GARNEAU, J. et M. LARIVEY, 1979, L'Auto-développement: psychothérapie dans la vie quotidienne. Montréal, Ressources en Développement, Inc.

GENDLIN, E.T., 1964, A Theory of Personality Change, in Worchel et Byrne, Personality Change. New York, Wiley.

LOWEN, A., 1970, Pleasure : A Creative Approach to Life. New York, Cowvard Mc-Cann.

MASLOW, A. H., 1962, Toward a Psychology of Being. Princeton, N.J., Van Nostrand.

POLSTER, E. et M. POLSTER, 1973, Gestalt Threrapy Integrated. New York, Brunner-Mazel.

REICH, W., 1949, Character Analysis. 3e éd., New York, Orgone Institute Press.

ROGERS, C., 1961, On Becoming a Person. Boston, Houghton-Mifllin.