L’atosph e d te vdue, je lançai

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1 La boulimie du savoir L’aŶŶĠe aĐadĠŵiƋue touĐhait à sa fiŶ, mais, il fallait encore compléter les pƌogƌaŵŵes. C’est aiŶsi Ƌue je ƌepƌis le chemin du Burkina dans le cadre de mes Đouƌs à l’uŶiveƌsitĠ ;OuagaͿ. La joie d’appƌeŶdƌe J’LJ ai ƌetƌouvĠ des ĠtudiaŶts pƌessĠs de ďouĐleƌ l’aŶŶĠe et de se mesurer aux deƌŶieƌs devoiƌs. C’Ġtait aussi le début de la saisoŶ pluvieuse où l’huŵiditĠ et la boue pouvaient démotiver même les plus assidus. D’ailleuƌs, uŶ ŵatiŶ, faute d’avoiƌ tƌouvĠ uŶe voituƌe, j’ai dû braver la poussière et l’oƌage aveĐ ŵa ŵoto pouƌ aller vociférer dans une classe, dont le toit en tôle était devenu une véritable cymbale sous le fracas de ces gouttes de pluies tropicales. Je rentre en classe, le pantalon et le sac mouillé, dans une salle étonnamment comble. Une étudiante des premiers bancs me dit : « Monsieur, il a plu aujouƌd’hui ». Esquissant un petit sourire et montrant du doigt mon sac je lui répondis : « Et Đ’est visiďle ». L’atŵosphğƌe dĠteŶdue, je lançai immédiatement les différents points à étudier, ce jour-là. Les deux cours concernaient les relations internationales (RI) et le droit international public (DIP). Nous avons évolué en crescendo avec des jeunes désireux de comprendre, de se former, de réfléchir sur le sens des institutions, sur la marche du monde. Insatiables, ils en voulaient toujours plus. Le taux de présence aux cours a été excellent à ma grande satisfaction. Bien Ƌu’iŶteŶse et ĠpuisaŶte, Đette aĐtivitĠ ŵ’a procuré beaucoup de plaisir et de bonheur. J’ai même été honoré que certains étudiants postulants pour des concours internationaudž ŵ’aieŶt pƌis comme personne de référence. Après les examens et les délibérations, à la mi- juillet, je suis parti en Côte D’Ivoiƌe où six de nos jeunes séminaristes allaient être ordonnés prêtres. Comment va le monde ? Géopolitique ! L’aďoŶdaŶte moisson La Cathédrale de Bouaké qui abritait la célébration était pleine comme un œuf, le samedi 13 juillet 2019. Une longue

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La boulimie du savoir

L’a e a ad i ue tou hait à sa fi , mais, il fallait encore compléter les

p og a es. C’est ai si ue je ep is le chemin du Burkina dans le cadre de mes

ou s à l’u ive sit Ouaga .

La joie d’app e d e

J’ ai et ouv des tudia ts p ess s de ou le l’a e et de se mesurer aux

de ie s devoi s. C’ tait aussi le début de

la saiso pluvieuse où l’hu idit et la boue pouvaient démotiver même les plus

assidus. D’ailleu s, u ati , faute d’avoi t ouv u e voitu e, j’ai dû braver la

poussière et l’o age ave a oto pou aller vociférer dans une classe, dont le toit

en tôle était devenu une véritable cymbale

sous le fracas de ces gouttes de pluies

tropicales. Je rentre en classe, le pantalon

et le sac mouillé, dans une salle

étonnamment comble. Une étudiante des

premiers bancs me dit : « Monsieur, il a

plu aujou d’hui ». Esquissant un petit

sourire et montrant du doigt mon sac je lui

répondis : « Et ’est visi le ».

L’at osph e d te due, je lançai

immédiatement les différents points à

étudier, ce jour-là. Les deux cours

concernaient les relations internationales

(RI) et le droit international public (DIP).

Nous avons évolué en crescendo avec des

jeunes désireux de comprendre, de se

former, de réfléchir sur le sens des

institutions, sur la marche du monde.

Insatiables, ils en voulaient toujours plus.

Le taux de présence aux cours a été

excellent à ma grande satisfaction. Bien

u’i te se et puisa te, ette a tivit ’a procuré beaucoup de plaisir et de

bonheur. J’ai même été honoré que

certains étudiants postulants pour des

concours internationau ’aie t p is comme personne de référence. Après les

examens et les délibérations, à la mi-

juillet, je suis parti en Côte D’Ivoi e où six

de nos jeunes séminaristes allaient

être ordonnés prêtres.

Comment va le monde ? Géopolitique !

L’a o da te moisson

La Cathédrale de Bouaké qui abritait la

célébration était pleine comme un œuf, le

samedi 13 juillet 2019. Une longue

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procession, rythmée par les tambours et

les chants des grands rendez-vous,

introduisit l’asse l e à ette esse d’i vestitu e sa erdotale. La joie qui

émanait des gestes et des cris se lisait

aussi sur les visages rayonnant de12

jeunes prêtres dont nos anciens six

séminaristes.

Prostration et consécration à Dieu

La moisson fut abondante ! L’ v ue Monseigneur Paul Awana, ordinairement

connu pour ses grandes exhortations et sa

volubile éloquence, a surpris, ce jour-là,

par sa sobriété et son sérieux, s’e te a t strictement aux rites prescrits.

Les jeu es p t es salue t l’asse l e

Les fid les ui ’o t pas eu de pla e à

l’i t ieu de la ath d ale ont glané

l’o e des a es ui peuple t l’i e se ou de l’Eglise. Une fois

ordonnés, les jeunes prêtres donnèrent

leurs bénédictions à tous, dans une

e plosio d’alléluia et d’a e . La fête fut

belle, la grâce du Seigneur tait à l’œuv e da s les œu s. Le lendemain dimanche

14, nos six jeunes prêtres ont célébré

ensemble leurs messes de prémisses dans

notre nouvelle paroisse, en présence du

Père Bertin Sanon, notre Supérieur

général et du Père Gilles Morin, Provincial

de France. Mais comme on le dit parfois :

les g a des joies s’a o pag e t souve t de grandes épreuves. La ie e ’allait pas tarder puisque la veille de notre retour

au Burkina Faso, nous avons été victimes

de a iolage. J’ai do pe du tout mon

matériel informatique (ordinateur,

tablette, téléphone, disque dur et l’a ge t pour mon séjour en Afrique.

Le Provincial de France retrouve ses

anciens fidèles de Bouaké

Une prison à ciel ouvert

Après le constat du vol, je flottais entre

deux mondes, celui de la cuisante réalité

et celui du déni. « Ce ’est pas possi le ! ».

Je me suis retrouvé les mains vides,

complètement dépouillé. Le Provincial de

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France me demanda : « Noël comment tu

fais pour tenir encore debout, à ta place je

Il faut se relever et continuer à marcher

serai anéanti ». Des années de travail qui

s’e vole t e fu et dans mes multiples

raisonnements, je serai allé jus u’à donner une prime au voleur pour

récupérer, ne serait- e u’u e pa tie de mes données. Je suis resté debout parce

que la vie a fait de moi un combattant et

ma foi a fait de moi un homme qui a

appris à ne compter que sur Dieu en toute

circonstance.

Faire de chaque épreuve une

opportunité !

Si le voleur savait uelles p ivatio s ’o t per is d’a u i e at iel de t avail ! s’il savait o ie de te ps o et à faire la fourmi ! J’ai eu al ais j’ai

éprouvé de la pitié pour le voleur, car,

j’esti e u’il est, lui, da s u e p iso à iel ouvert, ta t u’il e uitte pas es cloisons

de la tromperie. Et je me suis souvenu à

ai tes ep ises de e p ove e u’ai e nous citer ma mère. Elle dit ceci : « Celui

ui e fa te u voleu , ’a pas e o e enfanté ». Après cet épisode, je savais que

o s jou ’allait plus être un long fleuve

tranquille.

Ma nièce Regina, la plus jeune de la

famille

Alors que mes vacances à proprement

parlé allaient commencer, la galère

s’i vite et e pousse à ’adapte à la

situation. J’avais p vu d’alle au Sénégal

pour rencontre a petite sœu ue je ’ai pas vue depuis 8 a s. J’allais p ofite

de l’o asio pou fai e o aissa e avec

son mari et mes deux petits neveux. Ce

sera pour une autre fois ; le voleur en a

décidé autrement. Pourtant il me fallait

lâcher prise !

Le Lâcher prise

Pou e d te d e, j’ai eu la ha e de passer 15 jours « sans rien faire » à la

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maison auprès de maman. Les premiers

soirs, je me surprenais en train de me

dire « Tu ’as ie fait aujou d’hui ». Puis,

doucement, avec la famille et les amis, je

me suis « pardonné » d’ t e e va a es.

C’ tait t s ag a le, da s la si pli it du

quotidien, les échanges de regards quand

les mots ne suffisent plus.

Visite au a p d’ t des jeu es filles dans notre patro de Bobo

C’ tait aussi la saiso des arachides

fraiches particulièrement appréciées dans

la famille.

Visite aux enfants du Patro en plein jeux

On tenait donc la causette autou d’u ol d’a a hide qui se vidait sensiblement de

son contenu à mesure que le temps

passait. Autour de nous bruissaient les

enfants, naturellement absorbés par leurs

jeux et qui, de temps en temps, venaient

chercher « tonton » pou fai e l’a it e.

Ana (autre nièce) et son tonton

Je le faisais avec plaisir en observant

chacun de mes neveux et nièces et je

constate qu’ils o t uel ues t aits de os caractères. Comme quoi les lions ne

donnent pas naissance à des cabris. La

fa ille s’ag a dit et la nécessité de

logement se fait sentir. Alors, avec mes

f es et sœu s, ous avo s o e cé la

o st u tio d’u e aiso à la périphérie

de Bobo. Le chantier a démarré grâce aux

cotisations de chacun ! On espère pouvoir

le terminer un jour (le plus tôt possible).

Nous avons également profité de ma

présence pour célébrer le souvenir des 26

a s de l’e t e da s la Vie de ot e P e.

Notre Père qui est aux cieux

Oui, cela fait maintenant 26 ans que notre

Père est aux cieux. La commémoration de

et v e e t ouleve sa t s’est

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articulée autour de trois moments : la

veillée de prière, la messe, et le repas.

Veillée de prière pour papa

Nous tio s tous e fa ts ua d ela s’est produit et les conséquences ont été

tellement rudes que nous sommes murés

dans le silence. Nous avons voulu

commémorer notre père, sans en faire un

jour de tristesse.

F es et sœu !

Nous craignions tous pour maman, mais,

elle a été forte : Ce fut alors l’o asio de libérer la parole pour que les uns et les

autres extériorisent comment ils ont vécu

la déchirure. Ce fut un moment riche, un

moment de thérapie familiale. Aussitôt,

nous avons eu une pensée

particulièrement reconnaissante pour tous

ceux qui ont été présents pour nous

quand il le fallait. Nous avons évoqué nos

amis et bienfaiteurs dont le soutien nous a

été précieux.

La famille : lieu de ressourcement !

Nous rendons grâce à Dieu pour la fidélité

de sa Providence. Par ailleurs, à cette

réunion de famille, nous avons partagé

notre préoccupation au sujet de mon frère

Silvère (diplômé en comptabilité et

gestion) qui enseigne dans une école

située non loin de Dori, dans le nord du

Burkina, où sévissent les terroristes. La

dangerosité de la zone fait

u’a tuelle e t, il fl hit à u e

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possibilité de reconversion professionnelle

afin de quitter cette partie du territoire.

Mais comme pour beaucoup de jeunes, où

et comment trouver le fonds

d’i vestisse e t essai e ? Nous

cherchons des solutio s…

Les o ades de l’i s u it

La situation est tellement précaire que

l’i s u it a p ovo u u d pla e e t de populatio s. C’est ai si ue j’ai a ueilli dans la maison des étudiants une famille

de peuls spoliée (le père, la mère et trois

enfants), ayant fui les atrocités des

djihadistes.

Acquisition de meubles pour les

chambres

Quand ils ’e o t fait la de a de au

t l pho e, j’avais refusé, mais, lorsque je

me suis retrouvé devant les enfants, j’ai oublié mes réticences. Contraints de

partir, ils avaient tout laissé derrière eux ;

la peau sur les os, torturés par la faim, je

ne pouvais pas rester insensible, car nul

’est pou souff i autant. L’e t e pauvreté de cette famille était

indescriptible à tel point J’ai vité de les

prendre en photo, par respect.

Peinture, rideaux de la salle de séjour

J’ai po du à un appel de la dignité

humaine à laquelle je crois fermement.

Sa itai e et salle d’eau

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Je suis heureux de contribuer à la

reconstruction de cette famille inconnue.

Ma plus grande joie, ça été de voir le

retour du sourire sur leurs visages

initialement meurtris. C’ tait ag ifi ue !

Cet i p vu ’a e e à devoi fai e des travaux pour offrir des conditions plus

hospitalières. L’o de de joie s’est prolongée, car, une semaine avant la fin

de o s jou , j’ai eu la joie de recevoir

les parents de Flavien ve us d’Italie pou participer au mariage de leur fils avec

Nina, une jeune fille de Koubri.

Avec Flavien : « Qu’as-tu fais à mon

fils ? »

Les Noces

Le père de Flavien me demanda : « Qu’as-

tu fait à o fils, depuis u’il est ve u e Afrique avec toi, il a beaucoup évolué ».

Avec les parents de Flavien

En effet, Flavien était rentré en Afrique

avec moi en 2015 et ensemble, nous

avo s o st uit l’école de couture, et

l’ ole de Taa s ai si u’u fo age da s la ou de l’ ole. Pendant son séjour, il

rencontre Nina et une grande histoire

d’a ou s’ g era au fil du temps

jus u’au o es, ui o t t l es le 24 août de ie , alo s ue j’ tais d jà rentré à Paris pour raison de permis de

séjour. Heureux ménage au nouveau

couple.

HEUREUX MENAGE A FLAVIEN ET NINA

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C’est la rentrée !

La période de la rentrée est un moment de

grande espérance pour moi, car il faut

o ti ue à e vo e des e fa ts à l’ ole et accompagner ceux qui sont déjà inscrits

en vue de leur progression. C’est u ministère magnifique quand on regarde

les fruits, mais, assez gourmand en

énergie quand on regarde les exigences.

Mais, tant que le Seigneur me permettra,

il e faut pas s’a te .

C’est la e t e, ous off o s à os jeunes la ha e d’alle à l’ ole

Par ailleurs, notre rentrée pastorale à Paris

s’effe tue e dou eu . Les jeunes

séminaristes sont arrivés en provenance

de notre noviciat. Ils sont originaires de la

Côte d’Ivoi e, du Congo, du Burkina et du

Brésil et entament leurs études de

philosophie et de théologie. En ce qui me

concerne, cette année, je deviens titulaire

du cours de droit canonique chez les

Bernardins, et continuerai mes cours de

relations internationales à Ouagadougou.

Aussi, j’ai t o au t i u al ecclésiastique de Paris pour les questions

relatives au mariage.

Avec le recul, je pe se ue e ui ’est arrivé pendant mon séjour en Côte

d’Ivoi e ’i ite, d’u e e tai e faço , à

me renouveler intérieurement. C’est e u’il faut fai e ua d o a tout perdu.

Ainsi, je grandis sans vieillir, toujours en

me réinventant continuellement. Le

Seig eu e do e pa là l’o asio d’u e renaissance. Il pourvoira en tout point aux

nécessités de cette nouvelle genèse.

A plusieurs... On est meilleur !

Je do e à ha u de vous l’assu a e de mes prières et me recommande aux

vôtres. Le 19 septembre, Le Supérieur

G al ’e voie e issio au Bu ki a pour présider l’asse l e apitulaire qui

u i a tous les eligieu de l’Af i ue de l’Ouest en vue de notre chapitre général

qui aura lieu en mai 2020 au Canada. Je

confie ce grand rendez-vous à vos prières.

A tous, je souhaite une bonne reprise et

beaucoup de bonheur dans vos familles.

Dieu vous bénisse ! Père Noël NANA

Comment nous soutenir ?

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