L'Analyse planifiée des données en psychologie

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L'analyse planifiée

des données en psychologie

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COLLECTION DIRIGÉE PAR PAUL FRAISSE

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L E P S Y C H O L O G U E

L'analyse planifiée des données

en psychologie m ; / J E A N - M I C H E L H O C 1

! Chargé de Recherche au CNRS

Préface de H. Rouanet et D. Lépine

PRESSES UNIVERSITAIRES DE FRANCE

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A Thibaud

ISBN 2 13 038084 0

Dépôt légal — Ire édition : 1983, septembre

(0 Presses Universitaires de France, 1983 108, boulevard Saint-Germain, 75006 Paris

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S O M M A I R E

PRÉFACE par H. ROUANET et D. LÉPINE 9

REMERCIEMENTS 13

INTRODUCTION 15

PREMIÈRE PARTIE

L'organisation des données 21

CHAPITRE PREMIER. — Variable, protocole et facteur . . . . 21

1. Exemple illustratif 23 A / Objectif de l'étude 23 B / Méthode 24

a) Tâche expérimentale 24 b) Sujets 24 c) Conditions expérimentales 25 d) Variable observée 25

C / Données de base 25 2. Caractérisation préalable des données 27

A / Recherche de la variable 27 B / Représentation formelle de la variable 28 C / Protocole de base 28

3. Facteurs élémentaires 32 A / Recherche des facteurs élémentaires 32 B / Rôle des facteurs élémentaires dans l'analyse... 36

a) Facteurs de groupe et facteurs systématiques 36 b) Facteurs principaux et facteurs secondaires 38

CHAPITRE II. — Relations de croisement et d'emboîtement entre facteurs, plan d'analyse 42

1. Facteur composé 43 2. Relation de croisement entre facteurs . . . . . . . . . . . 46

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3. Relation d'emboîtement entre facteurs 50 4. Plan d'analyse 54 5. Protocoles dérivés 57

A / Sous-protocoles 58 a) Sous-protocoles séparés 58 b) Sous-protocoles appareillés 60

B / Protocoles dérivés par moyennage 62

DEUXIÈME PARTIE

L'évaluation des effets observés 71

CHAPITRE III. — Analyse des effets liés à un facteur : les comparaisons 71 I. Effet d'un facteur à deux modalités : l'écart entre deux

moyennes 72 2. Effets liés à un facteur quelconque : contrastes entre

moyennes 77 3. La notion de comparaison 80

A / Comparaison à un degré de liberté 80 B / Comparaison à plusieurs degrés de liberté . . . 81

4. La somme des carrés et le carré moyen associés à une comparaison 84 A / Comparaison globale sur un facteur 85 B / Comparaison quelconque sur un facteur 89

a) Comparaison à un degré de liberté 89 b) Comparaison à plusieurs degrés de liberté.. 92

Annexe au chapitre III : Formules « de définition » et for- mules « de calcul » 94

CHAPITRE IV. — Analyse des effets liés à un emboîtement de facteurs 98

1. Décomposition « inter » + « intra » 99 A / Comparaison et effet « inter » 100 B / Comparaison et effet « intra » 100 C / Equation de décomposition 104

2. Comparaisons entre parties d'un facteur : comparai- son pondérée, comparaison équipondérée 108 A / Protocole pondéré par les effectifs 109 B / Moyennage pondéré par les effectifs ou équipon-

déré . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 110

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C / Comparaison pondérée par les effectifs ou équi- pondérée 113

CHAPITRE V. — Analyse des effets liés à un croisement de fac- teurs 121

I. Décomposition « intra + inter » 122 A / Comparaisons « intra » partielles 125 B / Comparaison « inter » 126 C / Equation de décomposition 128

2. Décomposition en effets principaux et en effet d'in- teraction 130 A / Comparaison d'interaction 130 B / Equation de décomposition et condition d'obten-

tion 133 3. Non-orthogonalité du croisement : un choix crucial 138 4. Comparaisons conditionnelles 140

TROISIÈME PARTIE

L'analyse inférentielle des effets 147

CHAPITRE VI. — Principes de l'inférence statistique : du test de signification à l'inférence fiduciaire 147

1. La méthode des tests de signification 149 A / Le vénérable exemple de Student 149 B / Test de signification 151

a) Cas d'école 151 b) Test du 't' de Student 154

2. La méthode d'inférence fiduciaire 155 A / Parabole du « démon de Fisher » 156 B / Inférence fiduciaire sur l'exemple de Student.. 159 C / Pratique de la méthode d'inférence fiduciaire.. 161

a) Procédure pour conclure à un effet notable 165 b) Procédure pour conclure à un effet négli-

geable 169 c) Absence de conclusion 173

CHAPITRE VII. — L'inférence sur une comparaison 177

I. La notion de facteur aléatoire 178 2. Plans du type « groupes indépendants » : S<G> 180 3. Plans du type « groupes appareillés » : S*T . . . . . 187

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4. Plans du type « combinaison entre groupes indépen- dants et groupes appareillés » : S<G>*T 190 A / Les comparaisons sur G (type V) 191 B / Les comparaisons sur T (type 192 C / Les comparaisons d'interaction entre G et T

(type V. W) 194 D / Les comparaisons sur G conditionnellement à T'

(type V/T) 195 E / Les comparaisons sur T conditionnellement à

G' (type W/G") 196 5. Inférence fiduciaire sur un contraste entre moyennes

dans le cadre S<G>*T 197

CONCLUSION 203

BIBLIOGRAPHIE 207

CORRIGÉS DES EXERCICES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 209

TABLES STATISTIQUES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 239

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Préface

Avec l'usage d'instruments de calcul de plus en plus puis- sants, diversifiés et accessibles, s'est répandu, dans les domaines de recherche les plus divers, le goût des analyses statistiques plus poussées, qu'il s'agisse de dégager les lignes de force d'un processus à partir d'une masse de données, ou de procéder à des analyses fines répondant à des questions spécifiques que peut se poser le chercheur.

Parallèlement, on a vu se développer, dès les années cin- quante, chez les « Anglo-Saxons », un nouveau courant de la statistique, dénommé par eux « analyse des données » (data analysis) : terme ne renvoyant bien sûr ni à une doctrine sec- taire ni à des pratiques laxistes, mais à un certain état d'esprit à l'égard de la statistique, selon lequel il est parfaitement légitime d'examiner de près des données et de les interpréter, quelles que soient les intentions, les hypothèses qui ont pu présider à leur recueil. Quelques maximes favorites du statis- ticien Tukey, qui a tant œuvré pour répandre cet état d'esprit de la data analysis, sont à cet égard tout à fait significatives : « C'est au statisticien de s'adapter aux besoins de l'usager, et non l'inverse! » 3' ou encore : « Ce qui importe-9 ce sont les questions, bien plus que les modèles! ». Pour un psychologue, surtout s'il est de tempérament un peu clinicien, ces idées auront peut-être l'air d'aller de soi, et de définir le cadre le plus sage qui soit pour que le fameux dialogue entre « le mathématicien » et « le psychologue » se déroule avec fruit. En réalité, elles ont dû s'affirmer contre l'idéologie statistique régnante (cette his- toire reste à écrire), alors même qu'elles se trouvaient tout à fait en harmonie avec, d'une part, la tradition de la statistique dans l'expérimentation, d'autre part, l'utilisation de procédures inférentielles « non décisionnistes » (1).

(1) Comme on sait, les principes de base de l'inférence fiduciaire ont été posés par le créateur même de l'analyse de la variance, R. A. Fisher,

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C'est dans ce courant d' « analyse de données », au sens qui vient d'être évoqué, qu'il convient de situer les recherches de H. Rouanet et D. Lépine, étayées par les travaux informa- tiques de M.-O. Lebeaux, qui, entreprises vers la fin des années soixante, aboutirent à ce que nous appelons maintenant l'ana- lyse des comparaisons (parce que la notion formalisée de com- paraison y joue un rôle central). A l'origine, nous n'avions pas prémédité de remettre en cause le cadre traditionnel de l'analyse de variance, mais simplement d'utiliser toutes les ressources des mathématiques abstraites, alliées aux immenses possibilités ouvertes par le calcul automatique, pour aborder de front des situations techniquement complexes (mais usuelles dans la pratique), telles que les plans d'expérience « à mesures répétées », ou non orthogonaux, etc. Or, au fur et à mesure que se déve- loppait notre entreprise de mieux adapter les méthodes d'ana- lyse des données expérimentales aux besoins des chercheurs, nous fûmes amenés à remodeler ce cadre traditionnel, à l'élargir dans des directions diverses, bref à mettre en place une nouvelle problématique, bien différenciée par rapport à l'analyse de variance classique. En 1975, on peut dire que l'analyse des comparaisons était constituée autour de trois idées-forces (structuration des données, analyse spécifique, inférence fidu- ciaire), qui devaient se retrouver dans tous les développements ultérieurs, et d'un programme informatique d'une grande géné- ralité (le programme V AR 3), permettant la mise en œuvre pratique de ces idées-forces.

Les méthodes d'analyse des comparaisons, du moins dans leurs aspects les plus élémentaires (langage des plans quasi complets, langage des demandes d'analyse, voire inférences fiduciaires à un degré de liberté), se répandent progressivement dans la communauté des chercheurs qui utilisent la méthode expérimentale, aussi bien au laboratoire que sur le terrain; le programme V AR 3 de Lebeaux, Lépine et Rouanet, implanté

dans les années trente, dans le but d'exprimer « ce que les données ont à dire sur les paramètres », en laissant de côté toute information ou opinion a priori.

*

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dans un grand nombre de centres de calcul, a constitué, le plus souvent, l'instrument efficace de cette diffusion. Parallèlement, l'enseignement de la statistique en psychologie, au niveau licence et maîtrise, s'est trouvé rénové par les apports des nouvelles méthodes.

Le présent manuel répond à une demande, maintes fois émise par nos collègues, d'un texte élémentaire, capable de servir de support pour l'enseignement, et également de texte introductif pour les utilisateurs. Ce texte vient à son heure, ayant pu bénéficier de la longue pratique de son auteur, Jean-Michel Hoc, que de son expérience d'enseignant de la statistique en psychologie. Laissant à l'arrière-plan d'une part les consi- dérations abstraites, d'autre part les aspects qui nécessitent un appareil plus technique, J.-M. Hoc a choisi de traiter en détail, à propos d'exemples concrets, les points suivants : — l'organisation des données en vue de la planification des

analyses ; — l'évaluation descriptive des effets des facteurs ; — l'analyse inférentielle des effets : tests de signification, et

inférence fiduciaire pour les effets à un degré de liberté. La présentation adoptée par J.-M. Hoc accorde une large

place aux considérations méthodologiques, en insistant sur les critères de choix parmi les diverses procédures, plutôt que sur les justifications proprement mathématiques. De nombreux exercices, avec leurs corrigés, viennent opportunément compléter l'exposé. Tout permet de prédire que ce manuel connaîtra, auprès des chercheurs, enseignants et étudiants, le plein succès qu'il mérite.

H. ROUANET, Groupe Mathématique

et Psychologie UER MLF

Université René-Descartes. D. LÉPINE,

Laboratoire de Psychologie expérimentale

EPHE et Université René-Descartes.

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Remerciements

Mes remerciements iront tout d'abord à H. Rouanet et D. Lépine qui, par leurs travaux, sur lesquels s'appuie ce manuel, et les nombreuses discussions et collaborations que j'ai eues avec eux, m'ont permis de relier plus étroite- ment méthodologie et statistique.

Je remercie également les étudiants qui m'ont permis d'améliorer la présentation de ce manuel, en acceptant de faire une lecture critique du manuscrit : J. Adrian et N. Roussel. Il me faut remercier tout particulièrement F. Paran qui a participé à la mise au point définitive.

J'ai également profité des critiques et suggestions de J. Leplat et J.-F. Richard, de l'encouragement de nom- breux enseignants de statistiques. Qu'ils trouvent ici l'ex- pression de ma gratitude.

Il me faut enfin vivement remercier ceux qui, par leur action, ont permis la publication de ce manuel : H. Rouanet, auprès de qui j'ai trouvé un soutien amical et constant, G. Noizet et, plus particulièrement, P. Fraisse, directeur de cette collection.

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Introduction

Quelle que soit sa spécialité, le psychologue, chercheur ou praticien, est amené à utiliser des méthodes statistiques, soit en procédant lui-même à des analyses de données, soit en cherchant à tirer le meilleur parti d'analyses faites par d'autres. L'analyse des données n'est l'apanage, ni du sta- tisticien, ni du chercheur de laboratoire.

L'utilisation des méthodes statistiques implique des choix méthodologiques dont les critères ne sont pas détenus par le statisticien. Ainsi, méthodologie et statistique ne doivent pas être séparées dans la conduite d'une analyse de données. Si elles l'étaient, l'utilisateur s'exposerait au moins à deux risques graves.

En premier lieu, la méthode statistique utilisée peut donner l'impression de répondre aux questions posées, en répondant en fait à d'autres questions, éventuellement non pertinentes. Un bon exemple est donné par le recours exclusif aux tests de signification, pour étudier l'effet de tel ou tel facteur. Le test permet de savoir si le facteur a ou non un effet sur une variable donnée. Mais un tel test ne permet pas de se prononcer sur l'importance de cet effet. Or, c'est souvent ce que l'on souhaite faire.

En second lieu, la méthode mise en œuvre peut s'appuyer sur une formalisation inadéquate des données, auquel cas l'analyse ne sera pas valide et donnera des réponses fausses aux questions posées. Ainsi, les questions concernant les effets de facteurs sur une variable trouveront leurs réponses dans le calcul d'indicateurs de ces effets. Le choix des bons

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indicateurs est alors crucial. Par exemple, on pourra être amené à décider si on accorde le même poids à des moyennes calculées sur des effectifs différents. En fonction de la pondération choisie, la réponse à la question (à partir de la valeur de l'indicateur) pourra grandement varier.

Dans ce manuel, on insistera davantage sur ces points de choix méthodologiques que sur les caractéristiques détaillées des techniques statistiques dont il sera question. Le lecteur intéressé pourra se référer à la bibliographie pour en trouver des exposés mathématiques.

En approfondissant l'analyse planifiée des données, ce manuel ne présente pas toutes les méthodes statistiques utilisées en psychologie. Une vue d'ensemble de ces mé- thodes peut être trouvée dans le Précis de statistique de M. Reuchlin (1976). On peut regrouper ces méthodes en deux grandes classes : celles qui étudient des covariations (on les associera sous le vocable d'analyse des covariations qui intégrera des méthodes aussi variées que l'analyse fac- torielle classique, l'analyse en composantes principales, l'analyse des correspondances, etc.) et celles qui procèdent à des comparaisons (l'analyse des comparaisons). C'est sur ces dernières que portera ce manuel.

Un livre de statistique pourrait commencer par une exergue du type : « Au commencement étaient les variables... » En s'intéressant au comportement, on va chercher d'abord à le décrire selon un certain nombre de dimensions, c'est-à- dire en mesurant des variables (numériques ou non) : un temps de réaction, une fréquence cardiaque, une stratégie de résolution de problème, etc.

Dans un premier temps, il pourra être intéressant de relever les variables dont les variations sont liées (cova- riations) et celles dont les variations sont indépendantes. On utilisera alors une méthode d'analyse des covariations. L'épidémiologie, en médecine, en donne un bon exemple : on cherche toutes les variables qui sont liées à l'apparition d'une maladie (par exemple le tabagisme et le cancer du poumon).

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Ensuite, on pourra suivre deux directions non exclusives : — soit rechercher derrière ces variables manifestes des

variables plus fondamentales et cachées qui expliquent les covariations : ce sont les variables factorielles (ou « facteurs » dans l'analyse factorielle classique, par exem- ple le facteur Cg' (1) des tests d'intelligence) ;

— soit en tentant de rechercher parmi ces variables mani- festes celles qui déterminent les variations des autres (on les appellera des facteurs, par exemple le tabagisme dont on pense qu'il est une des causes de cancer).

En s'engageant dans cette seconde direction, on va chercher à contrôler systématiquement les variations des facteurs pour observer leurs effets sur les autres variables. On va donc créer des conditions d'observation bien diffé- renciées, selon diverses valeurs choisies pour les facteurs (modalités des facteurs) et on va comparer les valeurs obser- vées des autres variables (qu'on appellera tout simplement variables) entre les diverses conditions. On sera alors conduit à l'analyse des comparaisons. Par exemple, on va comparer les fréquences d'apparition d'une tumeur cancéreuse obser- vée à la suite d'injections de doses croissantes de nicotine chez l'animal.

Le plus souvent, une telle investigation amène à contrôler plusieurs facteurs en même temps. Par exemple, on combi- nera l'injection de nicotine à celle d'alcool dans l'étude sur le cancer. Le mode de combinaison des modalités des facteurs conduira à une certaine organisation, à un plan d'analyse qui permettra d'articuler les questions que l'on se pose. Par exemple, l'effet de la nicotine est-il le même selon que le taux d'alcoolémie est faible ou fort ?

Ce manuel s'inspire essentiellement de travaux autant méthodologiques que statistiques, menés dans notre pays sous le thème de l'analyse des comparaisons (cf. bibliogra-

(1) On encadrera certaines expressions entre deux apostrophes, chaque fois que ce sera utile pour mieux les isoler du reste du texte.

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phie), notamment par des psycho-mathématiciens. Ces travaux ont consisté à reprendre une méthode statistique couramment utilisée dans cette perspective, l'analyse de la variance classique, et à en rechercher une meilleure adapta- tion aux objectifs méthodologiques des sciences expérimen- tales telles que la psychologie. Cette adaptation a été réalisée en procédant à deux extensions principales de l'analyse de la variance :

1) L'analyse de la variance classique préconise une dé- composition privilégiée, qu'on qualifie de canonique, des sources de variations liées aux facteurs. Or, cette décompo- sition ne permet pas toujours de répondre aux questions que se pose l'utilisateur. L'extension consiste à faire apparaître des points de choix vers d'autres décompositions possibles.

2) L'analyse de la variance classique oriente sur une méthode d'inférence statistique également privilégiée : la méthode des tests de signification (F de Snédécor). Cette méthode ne permet de conclusions qu'en termes d'existence des effets analysés. Elle a été prolongée pour conclure sur l'importance des effets, par une méthode qualifiée de fiduciaire.

Ces deux extensions vont donc amener l'utilisateur à faire des choix pour lesquels ce manuel se propose d'être un guide.

Ce manuel s'adresse tout naturellement à l'étudiant de licence et de maîtrise de psychologie où sont enseignées ces méthodes, mais également à l'étudiant d'autres disci- plines dont la méthodologie est proche : physiologie, agro- nomie, etc. Il s'adresse évidemment aux chercheurs : ces extensions de l'analyse de la variance classique leur per- mettront de mieux utiliser les techniques qu'ils connaissent et d'en découvrir d'autres. Ce manuel sera aussi fort utile au praticien. Dans de nombreux domaines (par exemple, psychologie du travail, de l'éducation, etc.), le praticien est amené à recueillir et à analyser des données pour décider de ses interventions. C'est à lui que nous avons plus parti-

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culièrement pensé en choisissant des exemples de données recueillies sur le terrain.

Les connaissances nécessaires pour aborder ce manuel sont celles dont dispose l'étudiant à la fin de sa deuxième année :

— notions élémentaires d'algèbre des ensembles, telles que : partition, application, produit cartésien (2) ;

— statistiques descriptives élémentaires : distribution, m o y e n n e , v a r i a n c e , é c a r t t y p e (2) (3) ;

— t e s t d e s i g n i f i c a t i o n d i t ' t ' d e S t u d e n t (3) ;

— concepts méthodologiques courants en psychologie tels q u e l a n o t i o n d ' i n t e r a c t i o n (3) .

Le plan de ce manuel suit les étapes successives d'une procédure d'analyse des comparaisons :

a) On commence par mettre en ordre les données, en maîtrisant leur organisation : c'est l'objet des deux premiers chapitres sur l' organisation des données.

b) Ensuite on cherche à évaluer les effets qu'on observe : les trois chapitres suivants sur l'évaluation des effets observés orienteront vers des indicateurs de ces effets, non seulement de facteurs pris isolément mais aussi liés à la combinaison de facteurs (ex. : l'effet d'interaction).

c) Enfin, on montrera comment, à partir des effets observés sur des échantillons, il est possible d'inférer les effets correspondants au niveau des populations d'où pro- viennent ces échantillons. Deux méthodes (tests de signi- fication et inférence fiduciaire) seront proposées dans les deux derniers chapitres sur l' analyse inférentielle des effets.

Ce manuel est essentiellement limité au traitement des comparaisons dites à un degré de liberté, pour lesquelles l'évaluation des effets ne pose pas de problème notable.

(2) Une remise à niveau sur ce point peut être faite à partir du livre de Barbut (1967).

(3) On pourra se référer au manuel de Schwartz et Lazar (1968) et au Précis de Reuchlin (1976).

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Néanmoins, on sera souvent amené à évoquer les compa- raisons à plusieurs degrés de liberté. En conclusion, on orientera le lecteur vers la bibliographie pour leur traitement.

Un certain nombre de dossiers statistiques concrets sont utilisés tout au long du manuel pour illustrer les chapitres et sont exploités dans les exercices de ces chapitres. Les corrigés des exercices ont été rassemblés à la fin du livre. Le lecteur est vivement invité, non seulement à faire les exercices, mais également à vérifier par lui-même les résul- tats donnés dans le corps des chapitres. Il aura intérêt à conserver les résultats intermédiaires qui pourront être utilisés ultérieurement. Il est conseillé de procéder aux calculs avec une calculatrice de poche pour obtenir une précision numé- rique suffisante.

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PREMIÈRE PARTIE

L'organisation des données

CHAPITRE PREMIER

Variable, protocole et facteur

Ce n'est pas la complexité des procédures de calcul mises en œuvre qui fait la qualité d'une analyse. Celle-ci réside essentiellement dans la maîtrise des choix fondamentaux qui conditionnent la pertinence des résultats obtenus. C'est du tout premier dont il sera question ici : celui de la meil- leure organisation pour les données.

Le but de toute analyse de données consiste à mettre en évidence les informations qui sont pertinentes aux questions qu'on se pose. Ces informations sont contenues dans les données, mais elles n'apparaissent pas toujours immédia- tement dans un simple examen à vue. Elles sont noyées parmi d'autres informations, moins pertinentes, qui peuvent rendre la tâche difficile. Il faut donc résumer ces données de façon adéquate.

L'analyse des comparaisons s'appuie sur une distinction fondamentale entre deux types de variables qui vont jouer un rôle dissymétrique tout au long de l'analyse :

— des variables qui permettent de décrire des conditions d'observation : ce sont les facteurs dont les valeurs sont appelées modalités (niveaux si elles sont ordonnées) ;

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— et des variables dont on observe les variations d'une condition à l'autre : on gardera pour celles-ci les termes de variable et de valeur (1).

Le but de ce type d'analyse consiste à évaluer les effets de facteurs sur des variables. Généralement, on combine plusieurs facteurs dans le recueil des données. On comparera alors les valeurs observées de variables sous des combinaisons de modalités de facteurs.

Par conséquent, la façon dont on a recueilli les données détermine déjà, dans une large mesure, le type de questions auxquelles l'analyse devra répondre et le point de vue adopté pour construire le résumé. On a choisi certaines conditions d'observation (décrites par les facteurs). Ce choix initial va induire une organisation pour les données.

On appellera cette organisation le plan d'analyse. Dans le contexte de l'expérimentation, on distinguera le plan d'analyse du plan d'expérience. Le plan d'expérience indique tous les détails du déroulement d'une expérience, de sorte qu'elle puisse être éventuellement reproduite. Si tous ces détails doivent être pris en compte dans l'interprétation des résultats obtenus, certains d'entre eux peuvent être mis de côté pendant le traitement proprement dit des données. Le plan d'analyse sera donc généralement plus simple que le plan d'expérience. Puisqu'on se limite ici aux problèmes posés par l'analyse des données, on ne traitera pas directe- ment de la conception des expériences : il s'agit de questions qui se posent en amont de notre propos.

Le choix du plan d'analyse est stratégique et c'est à l'utilisateur que revient le choix de la meilleure organisation pour ses données.

Dans les deux premiers chapitres, on décrira une procé- dure qui permet de décomposer ce choix en deux grandes phases.

(1) Cette distinction recouvre l 'opposition classique entre variables indépendantes (facteurs) et variables dépendantes (appelées ici tout simplement variables). Nous y reviendrons p. 34).

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J J f E n p r e m i e r l i e u , i l s ' a g i r a d e d é f i n i r p r é c i s é m e n t l a

v a r i a b l e o b s e r v é e , s u r l a q u e l l e o n v e u t é v a l u e r l e s e f f e t s

d e s f a c t e u r s . O n p e u t e n f a i t s ' i n t é r e s s e r à p l u s i e u r s v a r i a b l e s .

M a i s o n s e l i m i t e , d a n s c e m a n u e l i n t r o d u c t i f , a u t r a i t e m e n t

d ' u n e s e u l e v a r i a b l e n u m é r i q u e . C e t t e p r e m i è r e é t a p e c o n -

d u i r a à u n e p r e m i è r e d e s c r i p t i o n d e s d o n n é e s , s o u s l a f o r m e

d e c e q u ' o n a p p e l l e r a l e p r o t o c o l e d e base d o n t o n c h e r c h e à f o u r n i r u n r é s u m é .

E n s e c o n d l i e u , o n c a r a c t é r i s e r a l e s d i v e r s e s c o n d i t i o n s

d ' o b s e r v a t i o n p a r d e s c o m b i n a i s o n s d e m o d a l i t é s d e s f a c -

t e u r s . O n e n d é r i v e r a a l o r s u n e o r g a n i s a t i o n p o u r l e s d o n n é e s ,

c ' e s t - à - d i r e u n p l a n d ' a n a l y s e .

M a i s , a v a n t d e d é c r i r e c e t t e p r o c é d u r e d ' o r g a n i s a t i o n

d e s d o n n é e s e t l es n o t i o n s d e b a s e q u ' e l l e m e t e n j e u , o n

p r é s e n t e r a d ' a b o r d u n e x e m p l e i l l u s t r a t i f d e d o s s i e r s t a -

t i s t i q u e . O n s e r é f é r e r a s o u v e n t à c e d o s s i e r , m a i s o n n e c o n s i -

d é r e r a p a s s o n t r a i t e m e n t c o m m e u n « m o d è l e » d ' a n a l y s e .

L e s e x e m p l e s p r é s e n t é s d a n s c e l i v r e o n t é t é c h o i s i s p o u r

la r e l a t i v e s i m p l i c i t é d e l a p r o b l é m a t i q u e s o u s - j a c e n t e , d e

s o r t e q u e le l e c t e u r p u i s s e l a c o m p r e n d r e r a p i d e m e n t . I l

n e f a u t d o n c p a s n é c e s s a i r e m e n t l e s c o n s i d é r e r c o m m e d e s

c a s t y p i q u e s .

1. E X E M P L E I L L U S T R A T I F

(« D É P A S S E M E N T A U T O M O B I L E »)

d ' a p r è s M . N e b o i t ( 1 9 8 2 ) , L ' e x p l o r a t i o n v i sue l l e d u

c o n d u c t e u r : rô le d e F a p p r e n t i s s a g e e t d e l ' e x p é r i e n c e ,

ONSER, C a h i e r d ' E t u d e , n ° 56 .

A / OBJECTIF DE L'ÉTUDE

L ' o b j e c t i f p r i nc ipa l des a u t e u r s cons is te à é tud i e r le rô le d e l ' expé r i ence g lobale de la c o n d u i t e a u t o m o b i l e su r les s t ra tég ies d e f ixat ion ocula i re , d a n s u n e t â c h e s t anda rd i s ée d ' é v a l u a t i o n d i s t a n c e - t e m p s avan t u n d é p a s s e m e n t .

L a f ixat ion ocula i re es t u n e var iab le c o m p o r t e m e n t a l e ind ica - t r i ce d u p rocessus d e p r i se d ' i n f o r m a t i o n qu i va p e r m e t t r e au su je t de d é c i d e r de dépasse r o u de n e pas dépasser . C e t t e déc i s ion do i t

Page 25: L'Analyse planifiée des données en psychologie

s'établir sur une évaluation du rapport entre la distance d'un véhicule venant en sens contraire et la vitesse de ce véhicule. Il s'agit donc d'une évaluation du temps disponible pour effectuer le dépassement.

La question centrale est de savoir si ces prises d'information sont effectuées différemment par des sujets débutants et par des sujets expérimentés.

On s'intéresse également à deux questions secondaires : a) Cet effet de l'expérience de la conduite est-il le même quel

que soit le temps disponible, objectivement, pour effectuer le dépassement ?

b) Quelques répétitions de l'épreuve, chez les débutants, se traduisent-elles par un apprentissage ?

B / MÉTHODE

a) Tâche expérimentale (fig. i)

La tâche met en jeu trois véhicules, sur une piste à double voie matérialisée : — un véhicule-obstacle, à l'arrêt et barrant l'une des voies ; — le véhicule au volant duquel se trouve le sujet, lui aussi à l'arrêt

et garé derrière le véhicule-obstacle ; — et un véhicule mobile, venant en sens inverse à vitesse cons-

tante (50 km/h). Le sujet doit prendre la décision d'effectuer ou non le dépas-

sement du véhicule-obstacle, à partir du moment où l'expérimen- tateur, assis à côté de lui, lui en donne le signal.

b) Sujets

Deux groupes de 7 sujets ont été soumis à cette expérience : — 7 conducteurs débutants, ayant moins de 1 000 km de conduite ; — et 7 conducteurs expérimentés, ayant plus de 5o ooo km de

conduite.

FIG. i . — Schéma de la disposition des véhicules avant dépassement (expérience sur le dépassement automobile, d'après Neboit, 1982).

Page 26: L'Analyse planifiée des données en psychologie

Paul GUILLAUME

38 | L'imitation chez l'enfant

Maurice REUCHLIN 39 | La psychologie différentielle

Daniel LAGACHE 40 | L'unité de la psychologie

Michèle PERRON-BORELLI et Roger PERRON

41 | L'examen psychologique de l 'enfant

Nina RAUSCH DE TRAUBENBERG 42 | La pratique du Rorschach

Jean-Michel PETERFALVI 43 | Introduction à la psycholinguistique

Jacques BARBIZET 44 | Pathologie de la mémoire

Henri WALLON 45 | Les origines du caractère chez l 'enfant

Jacques LEPLAT, Claude ÉNARD et Annie WEILL-FASSINA

46 | La formation par l 'apprentissage

Georges MAUCO 47 | L'inconscient et la psychologie de l 'enfant

David VICTOROFF

48 | Psychosociologie de la publicité

Pierre GOGUELIN 49 | La formation continue des adultes

Pierre GOGUELIN, Jean CAVOZZI, Jean DUBOST et Eugène ENRIQUEZ

50 1 La formation psychosociale dans les organisations

Jean-Marie FAVERGE

51 | L'examen du personnel et l'emploi des tes ts

Elfane VURPILLOT 52 | Les perceptions du nourrisson

Jean STOETZEL et Alain GIRARD

53 | Les sondages d'opinion publique

Walter J. SCHRAML

54 | Précis de psychologie clinique

Jacques LARMAT 55 | La génétique de l'intelligence

Page 27: L'Analyse planifiée des données en psychologie

Jean MAISONNEUVE

56 | Introduction à la psychosociologie

Claude LÉVY-LEBOYER 57 | Psychologie des organisations

Paul FRAISSE 58 | Psychologie du rythme

Gaston RICHARD

59 | Les comportements instinctifs

Jean GRISEZ 60 | Méthodes de la psychologie sociale

Maurice POROT

61 | La psychologie médicale du praticien

Mark R. ROSENZWEIG

62 | Biologie de la mémoire

Paul ALBOU 63 | Besoins et motivations économiques

Paul ALBOU

64 | Psychologie de la vente et de la publicité

Maurice REUCHLIN 65 | Précis de statistique

Présentation notionnelle

Jean-Pierre DUFOYER 66 | Le développement psychologique de l 'enfant, de 0 à 1 an

Jacques CORRAZE 67 | Les maladies mentales

Jacques LEPLAT et Xavier CUNY 88 | Introduction à la psychologie du travail

Laurence BARDIN

69 | L'analyse de contenu

Roland DORON

70 1 Eléments de psychanalyse

Hervé BEAUCHESNE

71 | Psychopathologie de l 'enfant et de l 'adolescent Etude de cas

Denise VAN CANEGHEM 72 | Agressivité et combativité

Jean-François LE NY 73 1 La sémantique psychologique