L’aire culturelle: Côte Ouest Groupe de danse tsimshian Git Hoan, 2010 Guy Lanoue,

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L’aire culturelle: Côte Ouest http://www.echospace.org/asset_images/0000/6995/ davidboxleygroup_large.jpg Groupe de danse tsimshian Git Hoan, 2010 y Lanoue, Université de Montréal, 2012-2014

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L’aire culturelle: Côte Ouest

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Groupe de danse tsimshian Git Hoan, 2010

Guy Lanoue, Université de Montréal, 2012-2014

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La préhistoire

Il y a plusieurs débats autour de la question du peuplement de l’Amérique du Nord. Avec la glaciation (26k – 13k a.-P.), les niveaux des océans ont baissé. Les peuples d’Asie centrale ont commencé à occuper les nouvelles terres (Béringie) il y a 40K ans, mais sont restés bloqués par la glaciation à l’est d’Alaska et au nord de la Colombie-Britannique jusqu’à 12 à 16K ans a.-P. Avec le dégel ils ont commencé à migrer vers le sud par deux routes: suivant la Côte Ouest, et par un corridor à l’est des montagnes Rocheuses (qui s’est probablement dégagé en premier, car la zone est à l’abri des vents de l’ouest et donc moins assujettie à la précipitation qui alimentait les glaciers du centre du continent).

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Une chose est (relativement) certaine: les peuples qui ont utilisé le couloir de la côte ouest il y a 12k - 16k ans ne sont pas les ancêtres des résidents actuels. Il y avait trop de déplacement pour établir des cultures stables, et il n’est pas clair que leur mode de vie était orienté aux ressources marines, comme l’est celui des peuples de l’époque traditionnelle.

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En-haut, des microlithes, tradition qui disparait entre 4500 et 2000 a.-P.; à droite, des pointes en coche, qui les remplace, commençant au centre de

l’Alaska et diffusées vers le sud et l’intérieur de C.-B.

Alaska – 11000 a.-PAlaska oriental – 9500 a.-PYukon – 6000 a.-P.Les fabricants ne sont pas les ancêtres des Dènè contemporains

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Emplacement des groupes principaux de la région, avec affiliation linguistique. Il y a un grand nombre de langues isolées, ce qui est surprenant considérant que ces peuples étaient en contact l’un avec l’autre grâce à la présence de réseaux d’échanges, de guerre, de mariage, et de rituel (potlatch). En fait, ces diverses familles linguistiques ne se ressemblent pas sur le plan formel du vocabulaire, mais il y a un certain nombre de traits grammaticaux et phonologiques partagés, probablement dû à l’intensité des rapports économiques et belliqueux. C’est l’inverse des autres situations de contact et d’échange, où c’est souvent le vocabulaire qui « voyage » avec les objets.

La Côte Ouest

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À l’est canadien, les peuples du nord ont définitivement immigré de zones méridionales, car les terres aux nord étaient toujours sous la glace. La côte ouest a aussi été peuplée du sud, après la fin des migrations venues de Beringia au nord. Vers 5,5k a.-P, des cultures stables avec des assemblages qui ressemblent à ceux des peuples actuels semblent être en place ici et là sur la Côte, surtout dans les régions septentrionales. Au sud, l’archéologie est moins certaine, car le climat humide détruit rapidement les restes.

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Outils lithiques de la côte ouest

Dès 3k à 3,5k a.-P., les cultures de la région commencent à développer des traits partagés, car les montagnes à l’est bloquent l’interaction avec les groupes de l’intérieur. Donc, ils ont tendance à entretenir des rapports d’échange avec leurs voisins au sud et au nord.

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Les assemblages culturels au temps du contact sont plus ou moins établis vers 1500 ans a.-P., surtout vers le nord. En fait, émergent quatre zones culturelles distinctes se définissent: a) le nord est consolidé vers 1500 a.-P.; b) la zone du Golfe de Géorgie (la région de Vancouver), où les Salish s’établissent vers l’an 1200 AD; c) la zone Nootka (l’ouest de l’ile de Vancouver) est culturellement stable depuis plusieurs milliers d’années, peut-être grâce à son isolement; d) la partie méridionale d’Oregon, qui semble être stable depuis longtemps, mais qui possède une sédimentation archéologique très complexe.

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Piège pour saumon, région de Kitwancool, début 20e siècle (près du fleuve Skeena). Il y a au moins 4 espèces de saumon (et l’eulakane, une espèce de hareng) qui sont exploitées par les résidents de la Côte; chacun remonte les fleuves pour se reproduire selon un calendrier distinct, donc il y a une compétition pour situer les villages aux embouchures des fleuves.

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Les réseaux d’échange préhistoriques, suivant le corridor nord-sud, étaient centrés sur l’obsidienne (de l’Alaska, Washington et Oregon), le cuivre (de l’Alaska et des territoires du Great Slave Lake, Territoires du Nord-Ouest; les Ahtnas et les Tutchone de l’Alaska méridional étaient les intermédiaires de ce commerce avec les Dènè de l’intérieur et les Tlingit de la Côte; ces derniers le distribuaient par les réseaux nord-sud), les coquillages (partout, utilisées comme monnaie), et les esclaves (passant par The Dalles en Oregon, le plus grand marché d’esclave en Amérique du Nord, où les Chinook les achetaient des tribus du Plateau, qui les capturaient de la région du Grand Bassin au sud-est).

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Des sites d’obsidiennes

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Contact avec les autres

1774 – Les Espagnols (de la Californie) visitent la zone autour de Vancouver, mais ne s’établissent pas.1778 – expédition James Cook note l’abondance et la qualité de la fourrure de la loutre de mer pour alimenter le commerce chinois, et que les Autochtones possèdent déjà des outils en fer, probablement d’origine japonaise.1789 – Russes (de l’Alaska) établissent un poste sur Kodiak Island en territoire tlingit pour rivaliser les Américains et les Britanniques qui commencent à exploiter la côte; ils n’ont pas les ressources pour pénétrer plus au sud.Les commerçants notent que les Autochtones exigent des outils de fer et des armes dès le début des échanges; probablement signe de la militarisation des sociétés de cette zone. La compétition entre Américains et Britanniques mène à l’inflation, donnant l’avantage aux Autochtones

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Les Américains partent de Nouvelle-Angleterre; de la Côte, ils obtiennent des fourrures, à Hawaii du bois de santal, et en Chine échange les fourrures et le bois pour des épices. Les profits suffit pour enrichir à vie le marchand. N’envisageant pas de retourner, ils sont peu motivés pour établir de bons rapports avec les Autochtones. Le mépris domine les échanges: les Blancs sont parfois massacrés ou enlevés, surtout ceux qui ont des métiers jugés utiles, comme les armuriers. L’attitude hostile des Autochtones est sans doute exacerbée par les épidémies de variole qui ont déstabilisé les équilibres politiques, augmentant les rivalités.Au débit, les Britanniques ne peuvent pas exploiter le commerce chinois (la East India Company a un monopole sur le commerce asiatique). Obligés de se concentrer sur le commerce local, ils ont donc de meilleurs rapports avec les résidents.

Un Chinois portant un manteau de fourrure de loutre venant du Nord-Ouest, début 19e siècle; Washington State Museum

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Postes de traite de fourrure, début 19e siècle, alimentés par voie maritime

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La traite de la fourrure, route septentrionale à travers le territoire sekani, vers la périphérie méridionale du territoire tsimshian.

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L’hostilité dans les échanges lança une spirale, car les résidents de la Côte souvent se vengeaient sur les commerçants du prochain navire, ne distinguant Britannique et Américain. Habitués à la guerre, faisant face à la déstabilisation du système politique régional causée par les épidémies, et parfois victimes de pratiques malhonnêtes, les Amérindiens veulent troquer pour des armes (surtout) mais sont très hostiles. 1793 – La fin de l’époque de l’échange côtière au sud, avec la disparition quasi totale de la loutre (la date signale l’arrivée d’Alexander Mackenzie au Pacifique par la route terrestre).1799 – Les Russes établissent un poste à Fort Arkhangel (aujourd’hui Sitka), détruit en 1801 par les Tlingit, qui ne voulaient pas perdre leur position d’intermédiaire pour le commerce à l’intérieur.1811 – David Thompson atteint la côte du Pacifique par le fleuve Columbia, ouvrant la porte à la commercialisation du sud par la HBC. Dès les 1820s, des postes sont établis au centre et au sud par pour encourager les Autochtones de ne plus visiter les postes américains. 1820s – La HBC envoie un agent (Peter Skene Ogden) au Snake River Country (Washington et à Oregon) pour éliminer le castor, pour affamer les postes américains de la côte.

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Les postes de traite principaux établis par la HBC, 1840s

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1830s – Au nord, les Tlingits continuaient d’envoyer des expéditions vers l’intérieur pour intercepter les fourrures destinées pour les postes anglais au sud; ils sont clients des Russes situés en Alaska. 1832 – La HBC commence un programme de vaccination contre la variole autour de Victoria (dès les 1770s, les épidémies avaient tué un tiers de la population de la région; la même année, le gouvernement américain lance un programme semblable parmi les Autochtones américains).1839 – Réagissant à la domination tlingit, la HBC achète des Russes le droit d’établir des postes en territoire russe. Les Russes acceptent, car ils n’ont plus les ressources pour participer dans un commerce appauvri par la disparition de la loutre. Ils vendront Alaska aux Américains en 1866.Avec les ravages de Ogden au sud et le contrat avec les Russes au nord, la HBC établit un monopole, mais les populations de loutre sont détruites. Les peuples de l’intérieur se spécialisent en d’autres fourrures. Les tensions augmentent. La HBC impose une forme de gouvernance pour régulariser ses inventaires. Les Autochtones établissent des réseaux pour mieux négocier.

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Ancien village haida (Haida Gwaii, anciennement, Queen Charlotte Islands) abandonné après les épidémies de la fin 18e siècle; la population est passée de 15,000-10,000 à c.600 (au début du 20e siècle); les survivants ont fondé un nouveau village, Skidegate. Le village porte le nom du chef fondateur, comme veut la tradition.

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Le potlatch, fête de redistribution

Plusieurs théories émergent autour de ce rituel insolite (partagé avec d’autres peuples de la Côte Ouest): p.e., pour redistribuer les ressources, étant donnée la présence de microclimats due à la topographie montagneuse; pour témoigner le statut dans un système hiérarchisé, etc. La mieux acceptée serait qu’il s’agit d’une guerre économique pour impressionner les voisins: on donne des biens, et les invités reconnaissent le pouvoir potentiel de l’hôte. Les détails varient, mais au cœur serait la distribution de cadeaux aux invités, accompagnée par un repas somptueux et parfois de rituels secondaires (p.e., mis en scène des mythes fondateurs).

À la fin du 19e siècle, le potlatch fut interdit par le gouvernement suite aux pressions de la part des missionnaires (surtout protestants), car on pensait que le rituel « gaspillait » des ressources (parfois, certains biens étaient détruits pour souligner la richesse des hôtes) et le temps (les personnes travaillaient pour accumuler des biens pour le potlatch, et refusaient de travailler pour les Blancs). Il est probable que les missionnaires ont vu le rituel dans une phase d’inflation causée par le décès de plusieurs personnes suite à l’introduction des maladies européennes, laissant plusieurs offices vides, menant à une compétition parmi les survivants, et par l’introduction de richesses par la traite de fourrure. Les masques (surtout) ont été confisqués (certains ont été vendus; le Musée ethnographique de Berlin avait une belle collection). Le ban fut annulé seulement en 1951 (mais les personnes continuaient à le performer en secret, et en prétendant qu’il s’agissait de cérémonies religieuses et donc « sacrées ». http://blog.seattlepi.com/thebigblog/files/library/potlatch.jpg

Haida, 1901

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Le potlatch est donc une forme de guerre économique, mais qui transforme les ennemis potentiels en alliés. Les « fêtes de redistribution » ne sont ni fêtes ni une redistribution, car chaque don exige une réponse inflationniste. Les invités doivent répondre avec des dons plus impressionnants ou risquer une invasion.

Potlatch et guerre

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À gauche, casque de guerre, Tlingit, fin 18e siècle; canoé de guerre haida, 19e siècle.

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La guerre était une menace constante, mais il y avait des indications que la guerre n’était pas rare. Les taux de mortalité étaient assez élevés. Quatre raisons sont citées:1)La ressource principale est le poisson et les fruits de mer. Tous les groupes revendiquent l’accès à la littorale. Par contre, les groupes plus riches et plus forts de la côte veulent un accès à l’intérieur pour établir des rapports commerciaux avec les chasseurs des montagnes.2)Le littoral a un climat plus rude, donc ces groupes veulent vivre à l’intérieur, à l’abri, sans permettre les voisins de s’établir sur ka côte.3)Depuis le 18e siècle, le commerce avec les Européens est une source importante d’armes et de métal; les groupes étaient en compétition constante pour s’établir comme intermédiaire.4)La puissance dépend sur les ressources, et les ressources s’accumulent avec la force de travail des esclaves: on lutte pour acquérir le territoire, les esclaves, et les conserves (poisson séché).

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À gauche, couteau tlingit à deux lames, 19e siècle, acier

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À droite, massue nootka de guerre

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Évidence pour la guerre:1)Les villages étaient généralement situés sur des positions défendables2)De l’armure et des armes très élaborées3)Les profits du commerce de fourrure avec les Européens ont été investis dans les armes4)Quelques groupes entrainaient les jeunes guerriers5)Les armes étaient souvent mises en évidence lors des potlatchs « amicaux »6)Les chefs de guerre avaient une influence sur des domaines non militaires7)La menace de guerre était une force motrice pour la création d’alliances complexes

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À gauche, chef portant une lance et de l’armure

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Les Tsimshian et leurs voisins

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À droite, territoire Tsimshian et ses voisins; en bas, photo satellite du territoire.

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- vivent en villages de la région des fleuves Nass et Skeena en Colombie-Britannique; pêcheurs- une grande partie du territoire attachée à chaque village est vide; les villages sont situés sur le littoral ou sur des fleuves- 3 regroupements (Tsimshian, Niska, Gitksan) basés sur des différences de dialecte; ces frontières linguistiques correspondent au symbolisme partagé du système totémique

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- problème: comment créer une communauté politique qui est 1) indépendante et 2) liée aux voisins de telle façon que ces derniers reconnaissent leur autonomie territoriale- 25 villages d’hiver, chacun est autonome sur les plans politiques et économiques

Kitwanga, 1899

Traits principaux des Tsimshian:

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Les villages sont souvent situés sur des fleuves, le plus près possible à l’embouchure, pour mieux exploiter le saumon et d’autres ressources marines. D’autres sont à l’intérieur, mais toujours dans les vallées desservies par un fleuve. Mais l’attachement aux fleuves peut-être lance un mauvais message aux voisins; le territoire inutilisé agit de tampon et isole un village de l’autre, créant ainsi une atmosphère de mépris. Les maisons des villages permanents sont donc démantelées l’été et transportées vers des campements aux marges, où elles sont réassemblées. Les personnes se donnent à la cueillette de baies, à des échanges avec les voisins (surtout pour des peaux, qui manquent sur la côte), et, s’il y a du gibier disponible, chassent. L’emplacement de ces campements d’été change d’une année à l’autre. À gauche, les villages d’hiver principaux des Tsimshian vers 1900. Voir Wilson Duff, The Indian History of B.C., Victoria, 1964.

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Définitions

- un lignage est un regroupement de personnes basé sur la filiation («descendance») – matrilinéaire, patrilinéaire ou bilatéral/cognatique - un clan est un regroupement de lignages, utilisant le même principe de filiation- une phratrie est un regroupement de clans- une moitié est un regroupement de lignages, clans ou phratries quand il y a seulement deux catégories (système dualiste) - une maisonnée est une catégorie sociale basée sur la corésidence (généralement, mais pas toujours, les personnes qui habitent ensemble)- la parentèle est une catégorie formée de personnes qui reconnaissent leur lien de parenté (qui n’est pas nécessairement conçue en termes généalogiques)- un clan cognatique est un regroupement bilatéral de personnes qui reconnaissent un lien de parenté, qui n’inclut pas nécessairement toutes les personnes qui partagent un lien généalogique

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La logique d’un système totémique

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Comme partout sur la Côte Ouest, la société est composée de trois ou quatre classes: les nobles, qui ont hérité leur statut; les aristocrates, qui l’ont atteint grâce à leur richesse et leurs exploits (parfois, ces deux sont considérés comme une seule catégorie); les plebs ou roturiers (la majorité), et les esclaves. Les nobles ne sont pas définis uniquement par l’héritage, car ils doivent valider leur statut par un comportement moral et digne. En pratique, ils doivent se faire respecter en offrant des potlatchs somptueux; ils ont la responsabilité de gérer les rapports avec les nobles des villages avoisinants, soit en les intimidant par la qualité de leurs potlatchs, soit en pratiquant des mariages dynastiques avec leurs homologues étrangers.

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À gauche, femme noble, dont le statut est signalé par ses boucles d’oreilles en coquilles d’haliotis (« abalone »); à droite, homme noble, car il a un bouclier en cuivre. Les deux sont habillés en tissus probablement fabriqués de l’écorce du cèdre.

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Interior of habitation at Nootka Sound, 1778, John Webber (artiste qui accompagnait l’expédition de Capitaine James Cook, 1776-1780, dont les navires ont exploré l’ile de Vancouver). Notez l’arrangement en deux côtés pour les deux lignages qui composent la maisonnée, le foyer central partagé, les colonnes sculptées, et le poisson séché qui pend du toit. Les planches sont de cèdre, arbre géant dont le bois se fend facilement (à différence de la photo qui suit, on voit que les planches ont été fendues avec des outils simples).

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- 4 phratries matrilinéaires (Loup, Aigle, Corbeau, l’Orque) composées de nombreux clans; des « maisons » nommées et composées de deux « côtés », qui appartiennent à deux clans/lignages

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À gauche, l’intérieur d’une maison contemporaine, utilisée pour des cérémonies; notez le foyer central et les deux bancs sur chaque mur, qui définissent un arrangement bilatéral: les deux « côtés » de la maisonnée

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Il y a deux dimensions à l’organisation sociale tsimshian:

a)L’imaginaire, parsemé de clans matrilinéaires, qui sont rassemblés en phratries et qui sont composés de lignages. Ils sont appelés les « côtés » du village, de la même façon que leurs lignages qui les composent définissent les deux côtés de la maisonnée. Ils sont dispersés sur le territoire, semi-corporatifs (c.-à-d., un clan peut agir de personne morale, mais en général il contrôle uniquement des ressources symboliques [masques, rituels] et non des ressources économiques); en principe, des alliés (car chaque clan est placé dans un ensemble plus grand, la phratrie, composée de plusieurs clans; cette alliance, cependant, n’est pas autant politique que symbolique; l’unité politique est le village). Les membres du clan prétendent que leur ancêtre mythique est descendu du ciel ou émergé d’un lieu souterrain; donc, le clan aurait partagé une dimension géographique, mais uniquement dans un passé mythifié; aujourd’hui, ses membres ne vivent pas ensemble.b)Le territoire: le village et la maisonnée (selon Sapir, un mot qu’il traduit avec l’expression, « être ensemble l’un avec l’autre ») sont des personnes morales (« corporations ») organisées selon un principe de matrilinéarité (mais Boas n’est pas clair ici); le village et la maisonnée possèdent un nom, et leurs membres se voient comme alliés politiques et potentiellement militaires. (Pour les références, consultez la bibliographie sur le site WEB).

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Le système tsimshian de parenté: contradictions

L'idéal: - trois composants du système idéalisé (trois règles censées définir l’organisation sociale): 1) filiation matrilinéaire, 2) résidence patrilocale après le mariage, 3) mariage avec la cousine croisée matrilatérale- ces règles créent trois regroupements ou catégories: le clan du père (où le jeune couple vit), le clan de la mère (le nous, dans un système matrilinéaire), et le clan de l'épouse du frère de la mère (le groupe auquel appartient la cousine croisée matrilatérale)

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- ceci est le nombre maximum (3) de catégories qu'on peut reconnaitre utilisant uniquement cette combinaison de règles; n'importe quelle autre combinaison crée un modèle de l’univers social composé de seulement 2 groupes (clans)- en faisant ainsi, les Tsimshian manifestent leur désire d'être autonome (chaque clan est défini par la matrilinéarité, avec des frontières imperméables, dont l'identité dérive du fait de naitre dans le clan, être un enfant d'une mère) et d'être simultanément liés aux autres (chaque clan est lié à 2 autres, le nombre maximum avec cette configuration) http://www.yukoninfo.com/images/fishinhtools.gif

Instruments pour la pêche

C.-à-d., la représentation idéalisée de la société tsimshian reprend les mêmes ambigüités et contradictions du vécu, du désire d’être isolé et d’être lié aux autres pour des raisons de défense : avec des unités « fermées » (car les frontières claniques sont totalement hermétiques), et en manipulant les trois composants du modèle (résidence, mariage, filiation), ils ont créé un modèle idéalisé où chaque clan/phratrie est lié avec le plus grand nombre d’autres composants du modèle. Ceci est une représentation de l’étanchéité parfaite du clan et de l’ouverture envers l’autre, le nous et l’ennemi, le proche et le loin. Idéalisé, car c’est impossible de le réaliser.

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En bref: - la parenté et le mariage ont deux manifestations, le vécu et l'idéalisée- créent un compromis qui semble paradoxal – l'image idéalisée de la communauté souligne l'autonomie, et le vécu souligne les liens avec l'autre, qui sont niés dans la vision idéale- doivent donc politiser la parenté et le mariage, les véhicules qui unissent le Nous et l'Autre

Un Potlatch contemporain

- utilisent également la redistribution, le potlatch, pour créer des alliances (fête de soi-disant « redistribution » qui est fortement politisée comme arme politique qui définisse les rapports surtout avec les voisins)

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Le vécu:- pas tout le monde a une cousine croisée matrilatérale!- le modèle idéal est orienté envers les hommes, pas les femmes, une situation paradoxale pour une société matrilinéaire!- les nobles représentent le village; leurs mariages sont politiques et dynastiques, établissant des liens politiques aux voisins (comme pour les maisons royales européennes de l'Ancien régime)- la majorité n'épouse pas leurs cousines/cousins- la majorité évite d'épouser des personnes dont la mère est née dans le même village où elle réside - la majorité évite d'épouser des personnes dont la mère vient d'un autre village si l’épouse vient-elle aussi d'un autre village

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Artiste Bryan Paul, années 1930.Notez la boite de cèdre utilisée

pour conserver le poisson séché. Il perce un trou avec une perceuse traditionnelle.

Voir Alice Kasakoff, en The Unconscious in Culture, I. Rossi (ed.), New York, 1974, qui décrit les pratiques (et non les règles idéalisées)

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- la majorité se marie avec une personne dont la mère vient d'un village étranger (autre que le village natal de la personne qui veut se marier), ou du village où ils vivent actuellement, si leur mère vient d'un village étranger- donc, la majorité choisit un époux/ épouse dont la mère est née dans le village où les jeunes vivent; l'autre mère vient d'un village étranger- deux lieux, deux villages, sont impliqués dans le mariage, mais uniquement si on tient compte de la dimension temporelle sur 2 générations- si on regarde uniquement une « tranche » composée d’une seule génération, il peut sembler que les personnes viennent du même village, et que le mariage est endogame

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Nobles tsimshian, mère et fille, c.1900

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- le mariage est donc exogame sur 2 générations- cette exogamie est une fiction qui souligne l’importance du modèle composé par la logique phratrique, car les deux époux vivent dans le même village, mais appartiennent à deux clans distincts- cette exogamie (sur 2 générations) permet aux Tsimshian de souligner l'autonomie du village sur le plan résidentiel (les 2 vivent dans un village, et parfois viennent du même village) et de souligner le désir d'être lié aux voisins (les mères viennent de 2 villages différents) - en pratique, les Tsimshian sont pris entre ces deux feux, car leurs nobles ne sont pas «indigènes» au village qu’ils sont censés incarner, comme ne l’était pas la majorité des nobles européens de l'Ancien régime; ceci crée des loyautés ambigües

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Quand il l’exogamie n’est pas respectée ….

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Selon Boas, les Tsimshian évitaient de manger 18 espèces. La majorité est évitée pour des raisons diverses: 1) les méduses « empoisonnent les humains »; 2) les écrivisses « piquent les personnes » 3) les roussettes « sont inutiles »4) les étoiles de mer « n’ont pas de chair »5) les lézards « sont laids »6) les grues « mangent des choses sales »7) les poissons à deux têtes « sont des monstres »8) la pieuvre « surnaturelle » (prob. Enteroctopus dofleini, qui peut atteindre quelques mètres) « mangent des choses sales »9) les cottidae (une espèce de chabot) « ont été touchés par le Corbeau sacré »10) les flétans « surnaturels » « ont jadis mangé des princes de la phratrie des Aigles »11) des grenouilles « étaient jadis des êtres humains »12) les cormorans « sont stupides »13) les belettes « mangent des souris » 14) les grizzlis « tuent les personnes »

À gauche, Enteroctopus dofleini; en-haut, un chabot

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Construire une mythologie pour commenter la politique d’ambivalence

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Cependant, 4 espèces sont évitées pour des raisons « incestueuses » - elles mangent de « vrais » humains:

Les orques « mangent des humains », et les loups, les corbeaux et les aigles « mangent des cadavres »; c.-à-d., ces espèces sont évitées parce qu’ayant ingéré des humains elles sont devenues partiellement humaines. Or, ces quatre sont les noms des totems phratriques. Or, la phratrie est conçue comme étant exogame. En fait, elle n’incorpore pas, mais « dégorge » les humains. Autrement dit, on ne mange pas les animaux qui mangent les humains dans le vécu, mais dans le monde imaginaire, ces mêmes animaux « vomissent » (pour ainsi dire) les humains d’un groupe à l’autre. Ils sont donc des symboles parfaits (polysémique et contradictoire), qui « mangent » et qui « dégorgent » simultanément, comme les villages qui incorporent des humains pour forger une seule identité, mais qui est composé de phratries exogames avec des représentants dispersés dans plusieurs villages. Dans le symbolisme attaché au vécu, on souligne l’importance de l’incorporation, de l’unité, de la solidarité, de la frontière du village; par contre, dans le symbolisme de l’imaginaire, on souligne l’importance d’être lié aux autres.

Le village incorporatif a des frontières potentiellement poreuses capables de conférer une identité sur la base de la corésidence. Par contre, les phratries « fédératives » ont des frontières imperméables, car elles sont héritées de la mère; l’identité conférée ne change pas avec le mariage ou avec le déplacement. Cette identité est à la base de la représentation de la société dans l’imaginaire. À droite, un guerrier tsimshian, selon un dessin basé sur les souvenirs de l’artiste qui avait vécu la guerre autour du village de Fort Simpson à la fin du 19e siècle. Il porte de l’armure en cuire (un matériel de luxe, car importé).

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La parenté kwakiutl* (européenne)

N = Numayma, «maisonnée»

Un rappel: la parenté sekani en comparaison

* Kwakiutl n’est plus le nom officiel utilisé par ces peuples, car il se réfère uniquement à une des tribus, les Kwagu’l. Le nom pour les personnes qui parlent la langue qui les distingue de leurs voisins est Kwakwaka’wakw.

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Dans ce système de parenté, le numayma (ou na’mima, « un [même] genre [de personne] », clan cognatique, génération 0) est composé des descendants des quatre grands-parents. On appelle cela parfois un système bilatéral. Les Kwakwaka'wakw sont situés à la limite septentrionale des systèmes « bilatéraux » du sud, qui inclut les Nootka [Nuu-chah-nulth], les Salish, les Bella Coola [Nuxalk], les Makah, et les Chinooks. Par contre, au nord des Kwakwaka'wakw se trouvent des groupes considérés « matrilinéaires »: les Kwakiutl septentionaux (Haisla, Wuikinuxv et Heiltsuk; ces trois derniers parlent des langues apparentées aux Kwak’wala mais sont distincts), les Haida, et les Tlingit.

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On peut identifier quatre phases historiques dans l’évolution sociale des Kwakwaka'wakw: 1)Préhistoire, avant le contact avec les Blancs (en 1792, James Vancouver)2)Contacte intermittent 1792 – 18493)Potlatch classique 1849 – 1920s (1849 – établissement du poste d’échange à Fort Rupert sur l’ile de Vancouver; une source fiable de marchandises européennes)4)Potlatch « politique » 1920s à présent (le potlatch est toléré officieusement si les dons sont limités; les Kwakwaka'wakw soulignent davantage la dimension « sacrée » du potlatch.

Cette dernière phase voit la transformation graduelle du potlatch en politique de guerre avec les voisins en marqueur identitaire; le vrai ennemi devient les Blancs, qui imposent davantage des règlements sur la pêche, pour limiter la compétition avec les entrepreneurs blancs qui commencent à exploiter le saumon commercialement.

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Fort Rupert en 1914, par le photographe Edward S. Curtis

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La distinction nord-sud est une division approximative basée sur une vision anthropologique dépassée (que les sociétés se « définissaient » par la parenté). Cependant, les groups septentrionaux avaient des potlatchs plus ritualisés; par contre, ceux du sud avaient des potlatchs très compétitifs. En partie, cette distinction peut être expliquée par le fait que les groupes méridionaux avaient plus de contact avec les Blancs, dont plus de maladies (créant des vides dans le système de statut) et un accès plus soutenu aux armes européennes. Par contre, le numayma cognatique signifie que chaque personne avec la possibilité d’invoquer deux identités, et parfois de changer de groupe. Les chefs, dont le pouvoir dépendait du nombre de leurs partisans, étaient souvent en compétition pour recruter des membres au numayma. Les Kwakwaka'wakw sont

composés de 28 tribus/villages (aujourd’hui, certaines sont fusionnées pour créer des gouvernements régionaux). Ici, une des raisons pour l’intensité des potlatchs Kwakwaka'wakw : le clan cognatique est très étend. Ses frontières sont floues.

http://www.umanitoba.ca/faculties/arts/anthropology/

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Sud Nord

Ressources dispersées

Ressources localisées

Accès contrôlé par des groupes

bien définis

Accès contrôlé par des

groupes amorphes

Tsimshian Tlingit Haida Heiltsulk (« Kwakiutl méridionaux »)

Athapaskans d’Alaska*

Athapaskans du Yukon

Athapaskans du Mackenzie

InuitSalish de la Côte

Salish de l’intérieur

Californie du Nord-ouest

Kwakwaka'wakw (« Kwakiutl ») Nuxalk (« Bella Coola ») Nu-chal-nulth (« Nootka »)

Chipewyan

Montagnards (Sekani)

Plateau

* Influencés par des groupes de la Côte Ouest

Les Plaines

Le contrôle de l’accès aux ressources

Pour l’originale qui a inspiré cette présentation, voir: Allan Richardson, "The Control of Productive Resources on the Northwest Coast of North America", in N.M. Williams and E.S. Hunn (eds.) Resource-Managers: North American and Australian Hunter-Gatherers, Boulder, 1982

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1) Notez que les localisations géographiques ne correspondent pas exactement à la disponibilité de ressources: p.e., les peuples de la Californie sont au sud des Salish de la Côte, mais leur environnement est moins riche.

2) Les régions septentrionales sont non seulement plus pauvres en ressources, mais elles sont assujetties à des fluctuations saisonnières.

3) Les ressources dans les régions septentrionales sont souvent concentrées; autrement dit, la distribution est aléatoire, la localisation sporadique.

4) Plus les ressources sont-elles abondantes, moins l’accès est-il contrôlé par un groupe bien défini constitué comme personne morale.

5) Plus une région est-elle pauvre en ressources, plus est contrôlé l’accès par des groupes bien définis agissants de personne morale.

Autrement dit, l’accès aux ressources est relativement libre aux deux extrêmes: si les ressources sont abondantes et omniprésentes, ou si elles sont rares ou mal distribuées (trop concentrées en quelques zones, absentes en d’autres), moins l’accès est-il contrôlé. L’accès est contrôlé quand les ressources sont relativement abondantes (mais pas trop) et distribuées uniformément. La conclusion: dans les deux cas extrêmes, il est soit impossible, soit inutile pour le groupe d’investir ses ressources politiques et sociales pour se constituer comme personne morale et de contrôler des ressources.