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« La vie contemplative est une vie d’amour et d’amitié avec le

Christ parce que Lui nous le demande. Cet amour est réciproque

et vous devez en témoigner toute votre vie par votre amour de

l’Eucharistie. Vous devez laisser le temps au silence, faire

silence en vos âmes à certains moments du jour et garder cette

inspiration à retrouver le Christ dans l’Eucharistie. Apprenez à

aimer Jésus, à penser à Lui, à devenir habituellement attentives

quoi que vous fassiez d’autre. La partie invisible de votre vie est

celle de devenir amoureuses du Christ ; alors vous serez

‘Sauveurs avec Lui’, car cela est une conséquence. Comme

l’amour s’est manifesté dans la Croix du Christ, nous avons à le

manifester dans notre vie toute donnée aux autres. »

Père René Voillaume – chapitre 2001

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Décembre 2012

Chers frères et sœurs, parents, amis et bienfaiteurs,

« Une petite graine semée… il y a 50 ans » !

Le 1er décembre 2013, notre Fraternité des Petites Sœurs de

l’Evangile célébrera son 50ème anniversaire.

Ce 1er décembre 2012, nous sommes donc rentrées dans l’année

jubilaire préparatoire à cette célébration.

Vivre une année jubilaire, ce n’est pas seulement faire un retour

sur le passé, mais c’est avant tout un appel à vivre un renouveau, à

retrouver dans nos sources l’intuition première de notre charisme

que nous avons aujourd’hui à mettre en œuvre dans un monde tout

autre.

Situé au cœur de cet évènement, nous aurons aussi à vivre au

cours de cette année 2013 notre chapitre général, occasion de

jeter un regard sur ce qui a été vécu, mais aussi à la lumière de

notre « aujourd’hui » de tracer la route pour l’avenir à partir de

ce retour aux sources à laquelle nous invite cette année jubilaire.

Dans ce bulletin, nous allons laisser la parole à notre fondateur, le

Père Voillaume, qui, en 1988, nous envoyait, à l’occasion de la

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célébration du 25ème anniversaire de notre Fraternité, un message

dans lequel il retraçait succinctement l’histoire de notre fondation.

Ensuite comme chaque année, nous voulons vous donner des échos

de ce que nous avons vécu dans quelques-unes de nos fraternités.

Merci de nous accompagner dans cette année de retour aux

sources et de rendre grâce avec nous pour tout le chemin

parcouru, pour les liens d’amitié tissés pendant ces 50 années

avec tant de personnes avec qui nous avons cheminé dans les

différents lieux de nos fraternités.

Merci aussi pour votre amitié fidèle et votre générosité qui nous

ont accompagnées et qui nous accompagnent toujours.

Ce bulletin veut toujours être le signe de tous ces liens qui nous

unissent.

Très fraternellement avec chacun et chacune.

Les Petites Sœurs de l’Evangile

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MESSAGE DU PÈRE VOILLAUME (Extraits)

A l’occasion du 25ème anniversaire de la fondation des Petites Sœurs de

l’Evangile

« Les Petites Sœurs de l’Evangile m’ont demandé d’intervenir dans cette

célébration du 25ème anniversaire de leur fondation, comme témoin de leur

origine et des étapes successives qui furent nécessaires pour que se dégage peu

à peu la vraie physionomie de leur Fraternité et celle de leur mission apostolique

dans l’Eglise.

Je voudrais tracer devant vous les traits essentiels de leur idéal de vie, de leur

vocation et montrer pour quoi ces étapes étaient nécessaires. Ce fait n’est

d’ailleurs pas propre aux Petites Sœurs de l’Evangile, d’autres fondations issues

du témoignage de Charles de Foucauld ont connu cette même évolution par

étapes, comme si une sorte de lent cheminement était nécessaire pour que se

rencontrent ces deux réalités qui sont, d’une part, la vie de cet ascète brûlé par

l’amour du Christ et, d’autre part, les attentes du monde actuel. Entre

l’apostolat d’un petit peuple nomade, perdu dans le désert et les tâches difficiles

de l’évangélisation de nos cités et notre monde actuel, quelle différence !

De plus aucune fondation n’avait été clairement définie par ce frère solitaire. Les

graines semées par cet unique semeur devaient lentement germer et se

développer avant qu’on ne puisse découvrir la nature de la plante qui peu à peu

s’épanouissait en révélant sa vraie forme.

Pour ne parler que des frères, qui aurait pu prévoir que leur fraternité établie

dans le désert en 1933 dans le silence et la solitude allait donner naissance aux

fraternités ouvrières enfouies dans le bruit, les labeurs et les mouvements du

monde du travail ? Nul ne peut douter de la valeur providentielle de telles

évolutions.

Et voilà qu’à son tour, il nous faut célébrer aujourd’hui une autre croissance,

celle qui fit naître une fraternité apostolique à partir d’un germe issu des Petites

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Sœurs de Jésus, contemplatives et enfouies dans le travail et les soucis

quotidiens de la vie des pauvres.

Cependant, avant les Petites Sœurs de l’Evangile et dès le mois de Juin 1956, les

Petits Frères du Ministère de l’Evangile étaient fondés en Camargue, dans le

diocèse d’Aix de Monseigneur de Provenchères… Voici, brièvement raconté,

comment est venue l’idée d’une fondation des Petites Sœurs de l’Evangile. Je

me réfère pour cela aux diaires de l’époque, ceux de Petite Sœur Magdeleine de

Jésus et les miens.

Nous sommes en 1963, au début d’octobre. Je ne pensais pas encore

sérieusement à cette fondation, lorsque, avant de quitter Marseille pour Rome,

je parlais avec des responsables des Petits Frères de l’Evangile, de l’extrême

difficulté de trouver des auxiliaires féminines, cependant indispensables, pour

compléter le travail effectué par les frères chez les Indiens Makiritarés et je leur

dis subitement : « il ne reste plus qu’à fonder les Petites Sœurs de l’Evangile » et

d’un coup cela me fut d’une telle évidence que j’étais dès lors certain qu’elles

verraient le jour.

Arrivé à Rome le 12 octobre, Petite Sœur Magdeleine1 me parle de son désir de

reprendre son premier projet des Petites Sœurs du Christ et je dis à petite Sœur

Magdeleine : « Les Petites Sœurs du Christ, ce sont les Petites Sœurs de

l’Evangile ». Il faut dire que l’idée des Petites Sœurs du Christ s’était imposée à

Petite Sœur Magdeleine en constatant que, du fait qu’elles étaient insérées dans

des populations éloignées, non encore évangélisées comme c’était le cas des

Pygmées en Afrique ou des Indiens Tapirapés au Brésil, ces sœurs ne pouvaient

pas éluder le devoir d’évangélisation qui s’imposait à elles en l’absence de tout

autre missionnaire.

Petite Sœur Magdeleine fut d’abord réticente. Or son idée des Petites Sœurs du

Christ n’allait pas aussi loin en réalité, car ces Petites Sœurs demeuraient de

1 Fondatrice de la Fraternité des Petites Sœurs de Jésus

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vraies Petites Sœurs de Jésus au milieu desquelles elles constitueraient un

groupe un peu à part, ayant pour mission de parler simplement du Seigneur et

de son Evangile, mais sans rien organiser, ni assumer aucune charge,

responsabilité éducative, ni religieuse et là où aucun religieux ne pouvait aller.

Je lui exposais à nouveau mes idées et Petite Sœur Magdeleine fut convaincue :

l’opportunité de la fondation des Petites Sœurs de l’Evangile lui apparaissait

maintenant clairement, mais il fallait alors que ce soit une Congrégation

nettement différente de celle des Petites Sœurs de Jésus.

Deux jours plus tard, le 14 octobre exactement, Petite Sœur Magdeleine avait

choisi parmi ses sœurs celles qui semblaient s’orienter vers les Petites Sœurs du

Christ, une responsable assistée de trois autres petites sœurs et c’était convenu

que ces petites sœurs étaient prêtées pour commencer cette nouvelle

Congrégation mais pourraient aussi y rester si telle était leur vocation… Les

Petites Sœurs de l’Evangile allaient commencer leur première fraternité en

décembre 1963 au Venezuela, parmi les Indiens Makiritarés de l’Amazonie.

En plein accord avec Petite Sœur Magdeleine, je prenais alors la responsabilité

de cette fondation nouvelle, avec l’approbation de Monseigneur de

Provenchères qui en serait l’évêque fondateur.

Ce n’est pas facilement, ni en un seul jour, que les fraternités allaient apprendre

à concilier, dans le concret de leur vie, les exigences renouvelées d’une tâche

d’évangélisation avec les valeurs propres à l’idéal de Nazareth que ces premières

Petites Sœurs avaient appris à vivre dans l’humilité sociale d’une insertion parmi

les gens, partageant avec eux le travail et les conditions ordinaires de la vie.

Cette manière de vivre était devenue le cadre normal de leur vie religieuse. Leur

prière et l’offrande contemplative de leur vie conféraient à cette existence la

plénitude d’une mission d’Eglise.

Oui, les Petites Sœurs devaient découvrir peu à peu que l’Evangélisation n’était

pas une tâche parmi d’autres, ni une activité qu’on insère comme on peut dans

les loisirs que peut laisser une vie de travail à plein temps, sans compter qu’il

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fallait aussi se consacrer à la prière d’adoration ou d’intercession au nom du

peuple.

Les petites sœurs devaient apprendre à sortir de Nazareth, avec Jésus, tout en

demeurant profondément marquées dans leur comportement, par l’esprit, les

attitudes et une manière d’être et d’agir qui caractérisaient Jésus à Nazareth. Il y

avait à découvrir comment vivre dans l’unité un même service du Christ adoré et

des hommes à évangéliser.

Cette unité était à trouver dans une prise de conscience de la nature propre de

leur mission apostolique, mission qui est la conséquence d’un appel du Christ,

appel qui est une mise à part en vue de l’apostolat, mise à part qui exige une

totale consécration de la personne afin de se vouer au ministère de

l’évangélisation, mais en communion avec le Christ sacramentellement présent

et agissant en son Eglise. Elles devaient devenir apôtres avec le Christ Apôtre,

pasteurs avec le Christ Pasteur.

L’unité de la vie d’une Petite Sœur de l’Evangile doit se chercher dans la foi en

cette mission, dans la conscience de cette mise à part, car cette mission qui est

participation à celle même de notre Sauveur Jésus-Christ exige qu’on y consacre

toute la personne de l’Apôtre. Au travers de la vie et des actes de son ministre,

Jésus continue d’enseigner, de consoler, de guérir, de soulager, de sanctifier par

les sacrements et l’Eglise ne peut accomplir sa tâche sans des ministres choisis

par l’Esprit Saint, mis à part pour cette œuvre d’amour…

…La conciliation des exigences de l’apostolat avec celles d’un travail

rémunérateur sera souvent impossible à réaliser. Cependant leur fidélité à

l’esprit et à l’état de Nazareth devra toujours marquer leur mentalité et leur

comportement, car le but de leur vie, ce but qui oriente toutes leurs activités,

c’est le service de la mission d’évangélisation, service pour lequel elles ont été

consacrées du seul fait de leur consécration religieuse.

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Dans leur manière de réaliser la pauvreté et l’humilité sociale au sein même de

leurs activités apostoliques, les petites sœurs ont pour se guider, les

enseignements de l’Evangile, les exemples du Christ lui-même durant les années

de sa vie publique, le comportement de l’apôtre Paul et enfin celui du frère

Charles de Jésus dans la période apostolique de sa vie.

Car, en effet, et on ne saurait l’oublier, la vie de Charles de Foucauld comporte

bien deux périodes distinctes : la première est marquée par une recherche

inlassable d’un état d’abjection pour lui-même tout en imitant la vie de Jésus à

Nazareth, vie conçue par lui comme une retraite silencieuse et solitaire, dans la

prière prolongée, la pauvreté et le travail. La deuxième période commence pour

lui exactement le 25 avril 1900 lorsqu’il décide, le jour de la fête de Saint Marc,

qu’il doit être prêtre et, avec le sacerdoce, il acceptera les exigences de

l’apostolat, la charge pastorale des chrétiens du Sahara et la responsabilité

apostolique parmi les Touaregs…

…Ce que le frère Charles dit ici du sacerdoce, les Petites Sœurs de l’Evangile

pourraient, presque dans les mêmes termes, l’appliquer au ministère de

l’évangélisation auquel elles sont appelées car il s’agit d’un ministère qui

s’enracine dans la grâce sacerdotale conférée à tout chrétien par le baptême… »

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DE NEW-YORK À … BRUXELLES

Nous avons été présentes aux USA pendant 40 ans et, depuis 20 ans, Petites

Sœurs Simone, Amy et Rita vivaient à « Abraham House », maison d’accueil pour

prisonniers, mais aussi lieu de rencontre et d’espérance pour des anciens

prisonniers et pour leurs familles Depuis quelques années déjà, les petites sœurs

n’assuraient plus la responsabilité de cette maison, mais elles y vivaient toujours,

comme une présence d’amitié et pour l’animation pastorale de la communauté

qui s’y réunissait tous les W.E. Dernièrement un changement de direction et

d’esprit a fait que les petites sœurs ne se sentaient plus d’y vivre en fidélité à notre

vocation. Au mois de septembre elles ont donc quitté New-York pour commencer

une nouvelle aventure à Bruxelles.

Amy nous parle de ce départ et de ce nouveau démarrage…

« Il y a un moment pour tout et un temps pour chaque chose sous le ciel »

(Eccl. »,1)

C’est vrai et l’Ecriture nous le

rappelle. Pourtant cela ne va pas

sans déchirures et sans larmes.

Nous avons laissé New-York et

beaucoup d’amis là-bas. Le 25

août, c’était la « despedida » (les

adieux). La messe et un repas ont

été organisés par l’équipe

d’Abraham House et spécialement

par un des non-résidents, cuisinier

de métier. Beaucoup pleuraient

pendant le chant des adieux et la

chaîne d’amitié ; mais surtout tant

de gens, ce jour-là et aussi bien

avant, nous disant toute leur

tristesse de notre départ et du

vide que cela représentait.

Pour nous aussi, bien que cette

décision ait été bien mûrie et

pensée, le départ n’a pas été

facile. Nous pouvons seulement

prier et espérer que le projet

continuera, mais depuis longtemps

déjà, nous sentions que la nouvelle

direction en place depuis deux ou

trois ans, avait d’autres intérêts et

d’autres perspectives. Beaucoup

de gens à Abraham House, et

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même des jeunes, se sont engagés

à tout faire pour garder l’âme de la

maison et nous espérons que

malgré tout, la vie va continuer.

Maintenant, nous voici toutes les

trois à Bruxelles, essayant de nous

insérer dans une ville encore

inconnue pour nous toutes. Nous

avons trouvé un appartement par

internet, dans un quartier

commercial (beaucoup de béton et

peu d’oiseaux… !), proche des

transports et de l’hôpital Saint

Jean. Vu l’état de nos santés, il

fallait un immeuble avec

ascenseur, difficile à trouver dans

un quartier populaire.

La très grande majorité des gens

dans le centre de Bruxelles sont

des immigrés et un effort est fait

pour que des Belges reviennent

aussi au centre, ce qui permet

ainsi des prix abordables pour le

loyer. Nous en sommes au stade

des démarches nombreuses, des

contacts et aussi… essayer de nous

retrouver dans la ville.

Simone s’est déjà mise en contact

pour travailler comme bénévole

avec les malades en soins palliatifs

à l’hôpital Saint Jean. Rita s’est

engagée à aller faire la cuisine une

ou deux fois par semaine à l’Ancre,

un centre d’accueil pour les sans-

logis et moi, je suis allée voir au

« Poverello », un centre d’accueil

aussi pour les « sans domicile

fixe » et pour des gens vivant très

seuls ; je regarde aussi s’il y a des

possibilités en prison.

Nous allons commencer par aller

visiter nos sœurs en France. Après

40 ans aux Etats-Unis, il y a

beaucoup de fraternités que nous

ne connaissons pas et beaucoup

de sœurs que nous n’avons pas

revues depuis des siècles… Nous

désirons aussi visiter frère Peter

qui est maintenant dans une

maison de retraite à Lodève ;

après tant d’années passées aux

USA et à Abraham House où nous

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avons travaillé ensemble, c’est

pour lui une grande solitude qu’il a

à vivre à cette étape de sa vie.

Quelqu’un disait à Abraham

House : « il n’a plus de forces

parce qu’il les a toutes utilisées

pour nous ».

Au retour, nous aurons assez vite

la première messe dans notre

chapelle.

Nous vous donnerons d’autres

nouvelles plus tard et nous vous

embrassons chacune très fort en

comptant aussi sur votre prière

pour ceux que nous avons laissés

et pour ce nouveau démarrage.

Sachez aussi que vous êtes

bienvenues.

Rita, Amy, Simone et Franca devant « Abraham House »

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MEJICANOS (SALVADOR)

Après 10 années à la fraternité de Port-au-Prince, Petite Sœur Chantal a rejoint la fraternité de Mejicanos, dans la banlieue de la capitale, San Salvador. Elle nous livre ces premières impressions : Voilà donc plus de trois mois que je commence une nouvelle étape, avec mes Sœurs du Salvador. Après ces mois sabbatiques, temps très apprécié, est venu le moment de rejoindre une fraternité de la Région des Amériques, au Salvador précisément, à quelques heures d’avion de Port-au-Prince. Nous sommes deux communautés à vivre dans ce petit pays d’Amérique Centrale, au bord du Pacifique. Nos plus proches voisins sont les honduriens et les guatémaltèques; les nicaraguayens, les costariciens et les béliziens ne sont pas loin non plus.

La Fraternité des Petites Sœurs de l’Evangile y était accueillie en 1982, en pleine guerre civile… Notre fraternité se trouve dans la banlieue de San Salvador, la capitale. La maison est bien agréable, la terrasse sur laquelle donne ma chambre, donne l’illusion d’un peu d’espace vert, grâce aux nombreuses plantes. A la nuit tombante comme à l’aurore, c’est un peu d’air frais qui passe. Les matinées commencent sans précipitations car l’Eucharistie est à 7 heures, ce qui permet de méditer calmement la Parole, de se préparer à la nouveauté du jour…

J’ai beaucoup marché à mes débuts ici, afin d’entreprendre certaines démarches et de connaitre la ville de San Salvador. Il m’est resté quelques images de ces promenades urbaines ; je vous en relate quelques-unes : - le nombre considérable de vendeurs et vendeuses, courant à

droite à gauche, apparaissant et disparaissant dans les bus avec leur marchandise à la main, répétant indéfiniment les mêmes mots pour vendre coûte que coûte. Combien de jeunes font ce « job » ! Je me demande toujours, en les regardant, comment ils rentrent le soir chez eux…et que pensent-ils du travail, du sens qu’ils donnent à ce qu’ils

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font…Jamais, je ne leur achète quelque chose… Il me semble qu’il y a des distances qui nous séparent…et pourtant on vit tous une certaine lutte, comment la rendre moins dure ? Comment la vivre plus proche les uns des autres ? - l’ingéniosité de ces autres vendeurs, à bicyclette, ayant réussi à transformer ce moyen de transport en boutique ambulante et fonctionnelle, j’ai même vu des brouettes ambulantes où peut être placé le dernier-né de la famille tout contre l’emplacement des fruits ou légumes (cas des mamans qui doivent vendre sans pouvoir laisser leur enfant à la maison…). – le règne du plastique ! Les sacs en plastique font rage, tout peut entrer, du jus de fruits aux graines d’anis en passant par la crème et le fromage. C’est si pratique, le problème commence quand il se vide et se retrouve par terre… - les avenues de San Salvador sont larges et le trafic intense, il serait dramatique d’interdire l’usage du klaxon car ce dernier me semble indispensable; les bus, aux allures de camions, se prennent pour des rois. Gare aux piétons que nous sommes,

face à eux nous ne faisons pas le poids. Il est vrai que nous avons bien besoin d’eux et que ce réseau public fonctionne bien. - et puis tous ces panneaux publicitaires qui vous attirent comme un aimant en vous faisant croire que vous pouvez tout avoir, tout manger , tout acheter, tout goûter, tout connaître et tout de suite parce que demain ce pourrait être moins avantageux : « Buy easy », « Biggest », « Mister donut», « Mac Donald », « Pizza Hut »,… « A toda hora », « dos por uno », « Comer light sin tener hambre »,… mêmes slogans sous d’autres cieux, mêmes pièges, mêmes folies, même « religion », celle de l’appétit à combler à bas prix. Cela fait mal, je crains qu’un jour les gens trouvent les rayons vides, un autre jour ce sera leur porte-monnaie et un autre encore, il n’y aura plus rien parce que tout aura été pillé par ceux qui n’auraient jamais pu y entrer autrement que par la violence. - beaucoup de jeunes et d’enfants, avec des traits de visages bien divers, reflet de l’existence de plusieurs peuples et civilisations sur cette terre du Nouveau Monde…

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Et puis il y a la province ; quand se présente une occasion de sortir de la capitale, les Sœurs m’invitent à profiter du voyage. Ce fut le cas dernièrement dans le but de reprendre contact avec des amis prêtres en paroisse ; à chaque fois, un accueil très fraternel et touchant. J’ai été impressionnée de la vitalité de ces assemblées dominicales et de la présence active des laïcs « en service », de l’effort persévérant des fidèles pour terminer la construction

de leur église parce que celle-ci fut détruite lors d’un séisme. La campagne est luxuriante, les familles peuvent se nourrir de leurs cultures quand elles ont un terrain ; la vie est rude, certes comme celle de tout paysan. Il y a beaucoup de vie au fin fond de ces « cantons » (hameaux) où il fait bon voir les mamans couper les feuilles des épis de maïs ou contempler les plantations qui s’étendent sur une surface tant vallonnée.

Le travail devrait aussi se confirmer ; j’ai pu trouver quelques heures par semaine, par une amie d’une de nos Sœurs du pays, responsable d’une ONG, au service de la jeunesse et de la promotion des femmes. Il s’agit de soutien scolaire. Je peux m`y rendre en 20’, ce qui est vraiment une chance. Les enfants présents sont issus de familles qui souvent ne peuvent pas s’en occuper quand ils sortent de l’école. Il y aurait aussi une possibilité de compléter ces

heures par un cours de français dans une autre organisation. Difficile de trouver du travail mais notre situation n’est pas comparable à celle d’un grand nombre de jeunes et de moins jeunes dont personne n’a besoin pour mettre en pratique ce qu’ils ont appris et réaliser par eux-mêmes un travail digne de ce nom. Beaucoup de salvadoriens émigrent aux USA, en particulier pour trouver de quoi vivre et faire vivre leur famille.

Comment participer à un travail d’évangélisation, plus direct? A voir… nous veillons et attendons de voir quelles propositions fera la

nouvelle équipe des prêtres de la paroisse. La Paroisse est bien vivante, ses communautés de base permettent aux fidèles de vivre quelque chose

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entre eux pendant la semaine. Leurs rencontres régulières les rendent capables de parler entre eux, de réfléchir, de s’intéresser les uns aux autres, de se questionner, de se détendre ensemble même s’ils subsistent toujours des petits problèmes de relations. C’est ainsi

que je vois la communauté de base dont nous faisons partie. La Bible et le livre de chant font vraiment partie de la vie de ses membres. La paroisse, autour de l’Eucharistie dominicale demeure le lieu privilégié de la communion entre tous.

Bientôt, une sœur m’accompagnera sur un des lieux de l’Histoire plus dramatique du peuple et de l’Eglise d’ici2. Ce sera une marche différente, motivée par le désir de prendre conscience du poids de la vie de ces personnes, de leur « vie en Dieu », de leur « suite « dans les pas du Christ, de leur courage. A ce moment-là, le silence et le retrait par rapport aux bruits du monde, parleront d’eux-mêmes. Et la marche reprendra, plus assurée. La violence est là, encore, différente des années 1970-1992, nous concernant tous et nous effrayant tous. Elle n’éteindra pourtant pas le

2 Lieu de massacres pendant la guerre civile

souffle de Vie ; la population est courageuse et continue à affronter les peurs, les menaces et les duretés quotidiennes. Elle prend conscience que la paix sociale demande de

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grands changements de la part de chacun. On voudrait entrer dans ce mouvement de conversion, de « culture de la paix », avec les personnes qui nous entourent et espérer avec elles.

Le Seigneur demeure au milieu de son peuple et Son appel se fait entendre.

* * * * * * * * * * * *

Petite Sœur Iris, de la fraternité de Mejicanos au Salvador, a participé au

Congrès des Jeunes Religieux en Amérique Latine et Caraïbes. Elle nous

donne quelques échos de cette rencontre qui a eu lieu en Colombie :

Le Congrès a commencé, en nous

invitant à écouter Dieu, là où cris et

douleurs se font entendre, dans nos

pays et dans notre continent.

Ecouter cette voix, regarder la

réalité, contempler les défis, puis,

découvrir de nouveaux champs

d’action de la Vie Religieuse, où

seront présents les sujets

émergents, avec leurs espoirs, leurs

douleurs, avec leurs aspirations. Et

nous religieux (es), nous cherchons

avec ces peuples comment

répondre à cette soif de « plus de

vie », de vie digne.

Ceci nous invite à nous laisser

transformer par l’Esprit Saint, source

de vie mystique, de prophétie,

d’espérance et nous engage dans un

travail commun en faveur de la vie. ..

…Nous avons partagé notre

expérience de consacrés au service

du Royaume de Dieu.

Notre recherche fondamentale

touchait la vision de la vie consacrée

et de la manière dont nous la vivons.

À travers nos conférences et nos

partages nous avons cherché

ensemble, des chemins nouveaux,

des chemins de service. Nous avons

senti joie et espérance dans chaque

visage qui nous transmettait le désir

de donner et de se donner, dans

l’aujourd’hui de notre réalité

personnelle, communautaire,

apostolique et ecclésiale, avec un

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désir de qualité humaine et un

grand esprit de générosité.

Dans une ambiance de famille et

plein de confiance, de joie et

d’espérance, nous avons fait le

chemin de découvrir, ou, redécouvrir

ensemble, où va la Vie Religieuse et

les possibles chemins qui nous

permettraient de revitaliser notre

don, et d’être une réponse qui ait du

sens pour la réalité d’aujourd’hui.

Nous avons commencé en regardant

et en contemplant le chemin

réalisé….

Je voudrais vous livrer quelques

conclusions auxquelles nous sommes

arrivés. Dans nos réflexions, nous

avons constaté qu’il y a plusieurs

aspects qui sont une exigence dans

notre monde d’aujourd’hui :

La nécessité d’une

revitalisation de la Vie

Religieuse, par un changement

de mentalité. Revenir à

« être », plus qu’à faire;

désapprendre et se laisser

« déstabiliser» pour essayer

des chemins nouveaux ; laisser

l’assistanat et être plus

acteurs, accompagner la

personne dans sa démarche;

ne pas avoir peur de nous

tromper ; intensifier les

relations inter-congrégations,

interpersonnelles, interculturelles,

intergénérationnelles et veiller à

l’action communautaire de

nos activités…

Quelques pas possibles pour

une nouvelle humanité :

apprendre de la différence

(cultures, religions, âges…),

surmonter les idéologies, croître

dans une vie d’oraison incarnée

avec plus d’écoute, de silence et

de contemplation, se laisser

interpeller par la réalité, mettre

en dialogue ce qui est différent

(culture, religion, etc.)

Désapprendre: l’individualisme,

les structures, l’image de Dieu

que nous avons, la commodité,

se mettre en avant, l’activisme,

l’automatisme, etc.

Tout ça nous fait un bon projet de vie

et implique, pour nous, d’assumer

les grands défis, entre autres, celui

de la fidélité à notre engagement de

disciple et de missionnaire pour être

toujours, « lumière et sel ». Il faut

réincarner, dans notre

« aujourd’hui », le Jésus humain qui

vit et accompagne les luttes des

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peuples, pour un monde plus juste,

sans misère ni oppression.

Nous voulons être disciples

d’Espérance, dans un monde de

violence, d’injustice, de mort… par

tous les moyens possibles. Et pour

cela, nous constatons que la vie

communautaire est un lieu privilégié

où l’on peut partager tout ce que

nous portons dans le cœur (joies,

espérances, dons, luttes, conquêtes,

souffrances….)

Quand nous saurons « écouter Dieu

là où la vie crie », alors, on pourra

s’ouvrir personnellement et

communautairement, sans peur, à la

mission…

Que le Dieu de la Vie, qui aime que

son peuple ait la vie et la Vie en

abondance, nous bénisse et nous

accompagne dans ce chemin de

recherche de la Vérité, de la

Justice et de la Paix… et que Lui

nous donne la grâce d’être ses

instruments pour chaque

personne rencontrée dans notre

quotidien ! Que nous puissions Le

reconnaitre en chacune d’elle !

P.S Iris avec les enfants d’un quartier populaire à Medellin

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FRATERNITÉ DE MULHOUSE

Petite Sœur Bruna nous partage sa méditation sur le Mystère de la

Visitation et de Nazareth :

Durant ma dernière retraite j’ai lu

avec intérêt le livre d’Andrea

Mandonico « Testimoni

dell’Emmanuele » où il fait

« ressortir les points importants de la

spiritualité foucauldienne :

L’Evangile, l’Eucharistie, le mystère

de la Visitation comme style

d’annonce évangélique ». J’ai donc

commencé à lire cette année en

portant un regard sur mon vécu à la

lumière de la vie de Jésus à

Nazareth, avec un esprit de

Nazareth et en même temps comme

une continuelle Visitation.

Visitation qui est manifestation

voilée de la présence du

Christ, Visitation où Jésus est

présent mais caché. Visitation qui

m’invite à partir en hâte, m’invite à

être disponible. Visitation qui me

permet la rencontre avec l’autre.

Visitation qui fait jaillir l’action de

grâce et la louange, un Magnificat

que l’on peut chanter ensemble,

pour les merveilles que le Seigneur

fait pour nous, dans ma vie comme

dans la vie de ceux et celles que je

rencontre.

Mon Nazareth est aujourd’hui avec

mes sœurs à Mulhouse, aux

Coteaux, dans la Communauté de

Paroisses des Coteaux de l’Illberg.

Concrètement ce sont des activités,

des engagements qui sont

reconduits depuis quelques années,

qui petit à petit prennent forme, se

consolident et me font vivre. Il y a

aussi des nouveautés voulues ou

inattendues qui me font bouger,

m’aident à rester disponible à la

réalité en construisant ainsi ma vie

humaine et spirituelle, comme

personne faisant partie d’une

communauté. Une vie ancrée dans

la méditation de la Parole de Dieu et

dans la prière pour confier au Christ

tous les projets et les personnes

rencontrées, avec leurs difficultés et

leurs joies, occasion de devenir sœur

en Christ et dans le Christ.

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Nazareth comme présence au

quartier : je le vis surtout à travers la

rencontre des familles qui préparent

le baptême de leurs enfants – cette

année un groupe de sept enfants

entre 6 et 10 ans. Ce sont des

moments de partage, de joie et

d’émerveillement pour le travail du

Christ dans le cœur de chacun –

Visitation qui est présence de Jésus

dans nos rencontres, au cœur de la

vie de ces enfants. Une présence

aussi à l’école primaire où cette

année j’ai assuré 4 heures par

semaine. Possibilité de créer des

liens avec des jeunes voisins, qui

sont un peu étonnés de découvrir

que je suis aussi leur voisine. Parfois

de connaître leur parents –

Visitation qui se veut une Présence

cachée mais réelle de Jésus parmi

eux.

Nazareth sur le lieu de travail, au

Lycée technologique-professionnel

(10 h hebdomadaire cette année),

j’apprends à être un peu plus

« enseignante ». J’assure des cours

qui sont une réflexion et un échange

sur des thèmes choisis par les élèves

plus que des cours où j’ai « des

savoirs » à transmettre.

Au sein de l’« équipe Pasto »

formée de 4 professeurs, je

commence à avoir ma place et un

bon équilibre s’est créé entre nous.

Des belles rencontres et des

partages entre collègues sont

possibles. Cela a permis d’essayer

une collaboration et un échange au

niveau des cours et du programme,

chose peu courante entre

professeurs. Pour les deux temps

forts de l’année, souvent autour des

vacances de Noël et Pâques,

l’équipe s’est bien soutenue au

point de risquer un grand pique-

nique et une fresque sur le mur

d’enceinte, à l’intérieur du Lycée.

Pour moi une Visitation qui fait

bouger de nos schémas sécurisants,

qui fait risquer la rencontre entre

ados et adultes, qui invite à partager

ce que nous sommes, nos dons et à

mettre au service nos capacités –

Visitation qui est manifestation

voilée de la présence du Christ parmi

nous.

21

Nazareth dans la Communauté

de Paroisses, je l’ai aussi vécu à

travers mon soutien à la

préparation des célébrations

dominicales de la Parole de Dieu

pour les familles. Occasion de

créer des liens avec certaines

d’entre elles, de soutenir la

coopératrice de la pastorale, très

seule cette année – Visitation

comme un Magnificat chanté

ensemble chaque dimanche.

A partir des liens créés avec les

parents, un pèlerinage à Lourdes

en Famille voit le jour. Nous

sommes 8 adultes et 13 enfants à

partir du 9 au 14 juillet à Lourdes,

par nos propres moyens. La

question du coût du pélé est

importante et pour demander de

l’aide aux paroissiens nous avons

organisé des ventes de pâtisserie.

Visitation qui ouvre à l’ accueil où

je donne et je reçois, où la

connaissance réciproque grandit

entre nous. Magnificat pour les

moments vécus ensemble, une

amitié simple qui grandit dans le

respect des différences, le partage

des soucis quotidiens. Certitude

que le Seigneur nous

accompagnera en tout ce que nous

allons vivre ensemble

prochainement à Lourdes.

L’appauvrissement et la

fragilisation de la Communauté de

Paroisses en personnel est réelle

et beaucoup plus évidente cette

année en l’absence de curé. La

difficulté à accueillir la nouveauté

et le changement est là. Les

sensibilités et les fragilités de

chacun ont pu provoquer des

malentendus et des conflits. Les

réunions pour essayer de gérer,

organiser, chercher des solutions

dans l’urgence, non pas toujours

été faciles à vivre. Pour moi une

Visitation, une invitation à partir

en hâte, à être disponible, à

l’écoute avec ce que je suis pour

que le centre reste le Christ.

Nazareth en Fraternité, c’est vivre

l’accueil réciproque entre nous

sœurs, mais aussi garder le cœur

ouvert à celui ou celle qui frappe à la

porte, Visitations inattendues qui

m’invitent à la disponibilité. Comme

inattendue a été la présence parmi

nous de Virginie, réalisatrice de films

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documentaires pour KTO. Visitation

durant laquelle nous avons été une

porte d’entrée, pour lui donner

accès à tout ce qui se vit de beau

dans le quartier et à la paroisse.

Cette année, donner ma

disponibilité pour la Commission de

préparation à l’année Jubilaire me

permet de vivre un service à la

Fraternité. Cela demande de

l’investissement en temps et en

énergie mais me rend heureuse.

Oui, jusqu’à présent je n’ai pu que

constater la vitalité cachée de

chacune de nous et je partage le

souhait que cette année jubilaire

soit riche en partages et rencontres,

réelles ou « virtuelles ». Visitation

qui me fait sortir de mon chez moi,

me fait prendre de la hauteur et voir

plus large. Visitations virtuelles avec

la petite équipe où la syntonie est

réelle. Magnificat pour toutes les

rencontres vécues jusqu’ici, pour les

partages écrits que nous recevons,

pour l’investissement de chacune : le

Christ est là avec nous.

A la veille de la fête de la Visitation

je vous souhaite de vivre, là où est

votre Nazareth, plein de

« Visitations » qui nous font

grandir dans notre souhait de vivre

en sœurs.

Dessin fait à partir d’un original du Père de Foucauld

23

FRATERNITÉ DE BARI (Italie du sud)

En fraternité à Bari, une ville du sud de l'Italie, petite sœur Marta a dû

abandonner son travail d'aide-ménagère pour des raisons de santé.

Pendant 2 ans, elle a cherché en vain du travail. Et petit à petit, l'idée

de pouvoir créer son propre travail à germer. Aujourd'hui, l'association

"Equanima" est née. Marta nous partage cette aventure.

« A partir du moment où quelqu’un s’engage définitivement, la providence se met elle-même en mouvement. Toutes sortes de choses arrivent pour aider,

Autant d’évènements qui ne seraient jamais arrivés autrement. Une succession de faits se déroule à partir de la décision,

faisant tourner en notre faveur tout type d’incidents imprévisibles, de rencontres et d’assistance matérielle,

dont personne n’aurait pu rêver la réalisation de cette manière. Tout ce que tu peux faire ou rêver de faire, commence-le. Le courage porte en lui le génie, le pouvoir et la magie.

Mets-toi en route » (Wolfgang J. Goethe)

Pendant ma recherche j’ai rencontré

Ezio, un entrepreneur qui désirait

mettre ses compétences au service

d'un projet social : la création d’un

« magasin solidaire » de vêtements

usagés. Dès le début j’ai aimé le

genre de projet et l’esprit qui

l’animait, qui – quelque part-

rejoignait aussi « le premier amour »

de ma jeunesse, quand avec

l’Operazione Mato Grosso (un

groupe qui travaille pour les Pays du

tiers monde) on passait les soirées et

les week-ends à ramasser papiers,

vêtements, meubles usagés, etc…

Mais même si le cœur y était, il a

fallu une sérieuse réflexion en

communauté et avec nos sœurs du

conseil pour pouvoir y adhérer. On

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savait bien que c’était un défi et,

que, dans la meilleure des

hypothèses, je n’aurais pas eu un

salaire avant plusieurs mois. Nous

avons voulu y croire et je peux

vraiment dire que c’est toute la

fraternité qui a épousé et soutenu le

projet.

Equanima (association de promotion

sociale – sans but lucratif) est née le

10 décembre 2010 : moi, Carla et

Carmen, sommes membres

fondateurs avec d’autres laïcs. Ezio en

est le président.

Il a fallu une bonne année de travail

d’information, sensibilisation et

rencontres avec l’Eglise locale, les

services publics, des associations pour

pouvoir être en fin opérationnels.

Tout en étant une association laïque

elle a été fortement appuyée par

l’archidiocèse de Bari-Bitonto , grâce

au consensus et à l’encouragement

de l’Evêque. Nous avons proposé

donc aux paroisses, qui souvent

n’arrivent plus à faire ce genre de

service, de positionner des

containers pour recueillir les

donations des vêtements.

Même la recherche de bénévoles a

donné ses fruits et c’est ainsi que le

14 décembre 2011, avec la

bénédiction et la présence de notre

évêque nous avons inauguré « le

magasin », un lieu beau et accueillant.

Comme nous avons écrit dans notre

dépliant « en entrant dans le Magasin

Solidaire d’Equanima, nous voudrions

qu’on respire une atmosphère de

familiarité, où les personnes sont

accueillies non pas pour leur pouvoir

d’achat, mais pour leur individualité

et originalité, un lieu de rencontre et

de dialogue entre personnes de

n’importe quelle culture, classe

sociale, nationalité…

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Le but premier est celui de la

distribution gratuite de vêtements

aux personnes sans ressources

(S.D.F., immigrés, prisonniers,

nomades, familles qui vivent dans la

précarité, etc.), soit en accédant

directement au magasin, soit à

travers d’autres associations. C’est

ainsi que plusieurs réalités sont en

train de se croiser, et petit à petit on

voudrait élargir ce réseau.

Dans une société de consommation

et de gaspillage, on mise aussi à

sensibiliser les personnes à adopter

une façon de vivre sobre! C’est pour

cela que le magasin est ouvert à tout

le monde et, avec une petite

participation, chacun peut acheter et

ainsi redonner vie à ce qui a été

donné (pas seulement habits, mais

aussi livres, jouets, articles

ménagers…)

Solidarité, accueil, sobriété,

récupération, sauvegarde de la

nature, travailler en réseau font donc

parti de l’esprit d’Equanima.

Au fur et à mesure qu’on avance

augmentent les bénévoles qui

croient à ce projet et qui, avec

beaucoup de générosité mettent à

disposition leur temps, leurs

énergies, leurs talents et, surtout,

leurs enthousiasme.

Pour le moment il y a une quinzaine

de femmes qui nous aident dans le

tri, le rangement des habits, l’accueil

des personnes et quelques hommes

qui s’occupent du travail

d’aménagement du local et du

ramassage des habits, sans compter

beaucoup d’autres personnes qui

nous soutiennent et nous aident de

mille autres façons. Comme chaque

réalité nouvelle nous sommes dans

une continuelle gestation,

transformation…

Nous avons appris à nous laisser

conduire par la vie, en étant à

l’écoute de ceux qui frappent à la

porte, des besoins de la ville, de

l’expérience d’autres personnes et

associations.

Cela nous projette toujours en avant,

nous stimule à rêver toujours plus

grand, conscients que nous ne

sommes qu’une petite goutte au

milieu d’un immense océan, mais

bien contents de l’être !

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SALAPOUMBÉ (CAMEROUN)

Petite Sœur Nadia vient de quitter la fraternité de Salapoumbé où elle a vécu pendant 6 ans et où elle était particulièrement chargée du petit foyer proche de la fraternité ; ce foyer accueille les enfants baka (pygmées) qui viennent de villages éloignés, pour qu’ils puissent aller à l’école primaire. Nadia nous parle de cette expérience

« En approchant un autre peuple, une autre culture, une autre religion, notre première tâche est d’enlever nos chaussures

car, le lieu qu’on approche est sacré sinon nous pouvons poser le pied sur le rêve d’un autre.

Plus grave encore, nous pouvons oublier… qu’avant notre arrivée, Dieu est là »

Maintenant que j’ai quitté Salapoumbé beaucoup de souvenirs me viennent à l’esprit, beaucoup de visages habitent mon cœur. Tant de rencontres, tant d’histoires, de richesses humaines vécues dans ce petit coin perdu au milieu de la forêt équatoriale ! Des choses difficiles aussi me reviennent à l’esprit car ce n’est pas toujours facile de se situer dans une situation de pauvreté : il

faut toujours rester éveillées et chercher ensemble des chemins pour pouvoir aider les plus malheureux. Parmi mes nombreux souvenirs je veux vous partager ceux qui concernent les enfants du foyer que nous avons ouvert il y a quatre ans à Salapoumbé. S’occuper de ces enfants a été pour moi une belle aventure car les surprises n’ont jamais manqué.

Au début il y a toujours eu quelqu’un qui voulait quitter le foyer pour revenir au village…Une fois ils se sont tous enfuis à pieds jours ils sont revenus au foyer (il

faut savoir que ceux qui habitent plus loin sont à 45 km. Et pourtant aujourd’hui je rends grâce à Dieu et je me réjouis du chemin qu’ils ont fait.

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L’année dernière ils étaient huit, deux en classe de CM2, quatre en classe de CM1 et deux en CE2. Ces enfants viennent normalement, tous, des villages éloignés de Salapoumbé (Tembé, Lotong, Samis) et certains d’entre eux sont orphelins. Venir chez nous signifie leur donner la possibilité de fréquenter régulièrement l’école et d’être suivi, avoir les livres et le matériel scolaire, de quoi manger et être soignés si nécessaire.

Certains parmi eux étaient des « anciens » et ils étaient déjà habitués car la vie au foyer a aussi ses exigences : il faut apprendre à vivre en groupe, s’appliquer dans l’étude, respecter la propreté et faire le travail d’entretien de la maison et du jardin. Les enfants vivaient avec un jeune couple Baka qui avait deux enfants, respectivement de 5 et 2 ans. Malgré les hauts et les bas de la vie de tous les jours, ils ont su créer une bonne ambiance et un esprit de famille tout au long de l’année.

Les enfants Baka aiment beaucoup la forêt. Il y a chez eux un instinct naturel qui les pousse à cette relation fondamentale avec le monde de la forêt. Souvent, dès qu’ils rentraient de l’école, après avoir mangé, ils partaient tous ensemble « se promener en forêt »….Ils y allaient pour chercher des fruits, des escargots, mettre des pièges pour attraper les souris qu’on peut manger, chasser les oiseaux. Ils

allaient aussi chercher du bois pour le feu de l’Internat ou pour le porter aux maîtres de l’école. Ceux-ci malheureusement demandent des petits services de ce genre à leurs élèves. Pour étudier et faire du rattrapage scolaire avec eux, il fallait parfois les chercher …et surtout les attendre avec patience. C’est vrai que nous n’avons pas la même notion du temps qu’eux et surtout ils n’ont pas de montre !

Tous les dimanches après-midi c’était le moment de la catéchèse et les plus fidèles avaient fait le premier engagement pour le Baptême depuis un an. Parfois

c’était le moment aussi pour visionner un film chez nous ou tout simplement pour faire une sortie. J’ai pu constater leur chemin de croissance humaine même dans

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les difficultés. Parfois il y a eu des moments de crise ou des problèmes entre eux et vouloir les régler n’allait pas sans « faire la tête » ou sans des mutismes entre eux et même avec moi qui cherchait à délier les nœuds. Mais au-delà de ces problèmes qui viennent du « vivre ensemble » il y

a eu entre eux toujours une grande solidarité : si quelqu’un avait des soucis en famille à cause d’une mort imprévue ou d’une maladie, les autres lui restaient très proches. De même si quelqu’un de leurs villages était hospitalisé à Salapoumbé, les visites ne manquaient pas.

Le lien avec ces enfants m’a permis de tisser des amitiés avec leurs familles et de toucher de près les problèmes qu’elles devaient affronter. J’ai pu les aider à comprendre un peu plus le comportement de leurs enfants ; tous étaient contents de cette possibilité donnée aux enfants et ils ont bien collaboré pour qu’ils

puissent arriver jusqu’au bout de l’année. A la fin de l’année scolaire, tous ont bien réussi et ils sont rentrés chez contents ; je garde dans mon cœur le beau sourire et la fierté de J ., qui est veuf, en regardant le bulletin de son fils, alors que lui a toujours souffert de ne pas savoir lire.

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Chacun de ces enfants a été pour moi une grande richesse, j’ai cherché à accueillir chacun avec sa propre personnalité, sa nature, sa vulnérabilité ; petit à petit j’ai appris à leur faire confiance et à les aimer comme ils étaient : des

enfants de la forêt très fragiles, confrontés à la modernité et à tout ce qu’elle comporte comme tentation de tout genre. Chacun de ces enfants porte un rêve…Dieu le connaît…Dieu est là.

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Toujours de Salapoumbé , Petite Sœur Jacqueline, , qui vient d’avoir 70 ans nous retrace quelque chose de ce chemin d’alliance avec le Seigneur dans la Fraternité :

Je n’ai pas choisi, j’ai tout reçu 70 ans : une étape dans la vie.

Un regard en avant ? … l’avenir, quel qu’il soit, sera court. Qu’il me soit donné de l’accueillir paisiblement, de rendre témoignage jusqu’au bout de l’Amour qui m’habite, de me préparer à la Rencontre et de la désirer. Un regard en arrière ? … une immense action de grâce !

« Racontons-nous souvent la double histoire des grâces que Dieu nous a faites personnellement depuis notre naissance, et celle de nos infidélités ; nous y trouverons, nous surtout qui avons vécu loin de Dieu, les preuves les plus certaines et les plus attendrissantes de son amour pour nous » (Frère Charles).

A 24 ans, j’ai demandé à être baptisée ; j’étais attirée par le Saint Sacrement et fascinée par l’Evangile ! J’ai voulu tout donner au Seigneur ! Mais où ? Quand ? Comment ? J’ai fait plein de projets, et à chaque fois, c’était comme si le Seigneur me disait : « non ! Pas ça ! », Jusqu’au jour où j’ai accepté de le laisser faire.

« On ne choisit pas sa vocation, on la reçoit, et on doit chercher à la connaître, prêter l’oreille à la voix de Dieu, guetter les signes de sa volonté. » Frère Charles Pourquoi m’a-t-on offert, à mon baptême, des livres de Frère Charles que j’ai tellement aimés?

Mais le Seigneur m’a d’abord fait suivre Saint François. Comment ? Je ne le savais pas… Les sœurs faisaient l’adoration ; elles étaient aussi envoyées dans les paroisses populaires pour l’éducation chrétienne des enfants. J’ai vécu cela

10 ans dans une paroisse du 17è arrondissement de Paris, et j’ai beaucoup aimé. Mais plus je découvrais Saint François, plus un désir grandissait en moi de vivre plus radicalement l’Evangile.

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Poussée irrésistible dirait Frère Charles ! Où ? Comment ?... Charles de Foucauld … Le Père Voillaume que j’avais beaucoup lu pendant ces 10 ans … Une petite Sœur de Jésus, sur la paroisse, qui me dit : « Les petites sœurs de

l’Evangile, peut-être … » Les petites sœurs de l’Evangile ! Qui les connaissait ? Mais c’est là que le Seigneur m’a conduit. Je ne savais rien d’elles, sinon qu’elles vivaient de la spiritualité de Charles de Foucauld.

Et elles m’ont accueillie ! Pour faire quoi ? Je ne le savais pas bien ; je savais seulement que par l’adoration elles mettaient Jésus en premier dans leur vie à la suite de Frère Charles. J’ai découvert en vivant. Et plus j’avance, plus je me dis : ce charisme, cette vocation, cette mission ! Si j’avais dû choisir, c’est cela que j’aurais choisi : à la suite de Jésus, envoyée pour annoncer sa Parole aux plus « petits » en

partageant leur vie, dans une vie fraternelle étroite, dure à vivre parfois, mais qui fait grandir ; ce que le Père Voillaume définit dans l’introduction de nos Constitutions : « Vie contemplative, toute centrée sur la Présence Eucharistique, et en même temps toute dévouée, sans réticence ni repli sur soi, à l’évangélisation des hommes les plus démunis ou les plus éloignés de l’Eglise. »

Je n’ai pas choisi, j’ai tout reçu. Et chaque étape, chaque envoi, ont été comme un cadeau à découvrir : « tu vas voir ! » Aimer l’Afrique ? Oui, je l’aime. Comme j’aime l’Europe ; comme j’aurais aimé l’Amérique ou l’Asie si j’y avais été envoyée ! Parce que ce que j’aime, ceux que j’aime sont ceux

que le Seigneur m’a donné de rencontrer : les enfants du l7è, les bergers d’Azet, les Tofis du Bénin, les gens des vignes de Montbazin, les enfants gitans de Valencia, et aujourd’hui tous ces visages de Salapoumbé qui emplissent mon cœur ! Avec tous j’ai fait un petit bout de chemin, à la suite de Jésus, heureuse de leur partager sa Parole !

A l’homélie de ma profession perpétuelle, le Père Voillaume m’avait dit :

« … Choisie par Jésus, … tu es appelée à t’abandonner à Lui, afin de lui être comme une humanité de

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surcroît, en laquelle Il pourra continuer à louer son Père, à s’offrir à la Croix et à intercéder sans cesse pour les hommes. Jésus pourra aussi à travers toi continuer d’enseigner les hommes par ta bouche, de les consoler par tes paroles et par ton

cœur, de les sanctifier par ta prière et de les conduire aux sources de vie que sont les sacrements. A travers toi, il pourra continuer de se fatiguer à courir après les brebis égarées et à les soigner par tes mains. » Ce que j’ai essayé de vivre …

A la réunion régionale à Madagascar, nous avions à nous présenter à l’aide d’une photo langage. J’avais choisi celle de deux mains fatiguées, pétrissant le pain, et j’ai exprimé

mon merci au Seigneur d’avoir pu toutes ces années partager le Pain de sa Parole à ceux qu’Il avait mis sur mon chemin, ce que j’aimerais faire jusqu’au bout.

Depuis quarante ans, le monde a changé, les sociétés ont évolué (évolution ?). Depuis longtemps déjà, la société occidentale est analysée comme décadente, à cause de son individualisme, son consumisme à outrance, sa fermeture au divin. Aujourd’hui, notre vocation à l’évangélisation, si elle reste la même, doit se réaliser par d’autres chemins que l’annonce directe de la Parole pour rejoindre « les plus éloignés de l’Eglise ». Pour moi, il n’y a pas opposition dans nos différentes manières de faire, mais complémentarité. Ces lieux où Dieu est oublié sont aussi ces « bouts du monde » où nous voulons aller. Mais à Salapoumbé, la soif de la Parole existe encore et c’est une grâce d’avoir à y répondre. Beaucoup

encore ne l’ont pas entendue. C’est vrai, soyons sincères, ceux qui l’ont entendue ont du mal à en vivre, parce que la société moderne, par ce qu’elle draine de plus mauvais, les écrase ; elle est comme un rouleau compresseur qui avance inexorablement et vers lequel les Baka courent ! Et nous, au bord de la route, nous nous évertuons à leur crier : « Mais non ! N’y allez pas ! » La saison des safaris (chasse touristique pour gens fortunés) est terminée, les familles Baka en reviennent, mais c’est à pleurer ! Ils font la fête, parce qu’ils ont encore un peu d’argent, mais sur leur corps, sur leur visage, se lit la progression du grand mal de l’alcoolisme.

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Pourtant nous sommes sûres que l’accueil dans leur vie de la Parole de Dieu peut les aider à vivre et à rester debout ! Il y a bien des raisons de s’émerveiller de ce que Dieu fait dans leur cœur ! Je pense à W., défiguré par l’alcool, mais dont le visage s’illumine quand il partage la Parole à ses frères ; je pense à D. qui dans sa prière dit à Dieu qu’il marche sur son chemin entraînant derrière lui tous

ses frères Baka ; je pense à A. pauvre petite vieille femme sur le visage duquel les larmes coulaient silencieusement au départ de Marie-Laurence : lorsqu’elle s’avance pour communier, mendiante de Dieu, je la vois plus belle qu’une princesse ! ; je pense à nos différentes communautés chrétiennes, souvent plus que modestes, mais dont la prière exprimée crie la confiance …

Il faut leur annoncer encore la Parole ! Mais avec quelle force ? « Donne-moi la force physique, mon Dieu Donne-moi la force morale qu’il faut pour vivre Et pour vivre bien, car c’est là mon désir …. » Poème du Lézard Oui, il nous faut la force physique, et la nôtre diminue.

Il nous faut la force morale, et … nous ne devons pas nous décourager ! Qu’il nous soit donné d’être là encore un peu, pour continuer à aider les Baka à découvrir le visage d’Amour de celui qu’ils reconnaissent comme leur Dieu sans le connaître, être là, témoins d’Espérance.

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FRATERNITÉ DE TANA (MADAGASCAR)

Petite Sœur Cathe est depuis de nombreuses années à la fraternité

d’Antananarivo dans un quartier populaire. Elle nous livre aujourd’hui

quelques aspects de la vie du quartier et de ce qu’y vivent les petites sœurs :

Voici quelques étincelles de notre

vécu à la fraternité d’Antananarivo.

Notre fraternité est située au milieu

d’une population très pauvre, dans la

banlieue de la capitale : le chômage,

les problèmes de santé, les difficultés

pour assumer l’éducation des enfants,

la pauvreté humaine et spirituelle,

sont le lot de la plupart des habitants

du quartier. Nous essayons de leur

être proches dans l’amitié, mais nous

ne pouvons pas ne pas répondre, avec

nos possibilités, aux besoins et aux

appels des gens dans les domaines les

plus primaires : l’éducation, la santé, la

promotion humaine et

l’évangélisation.

Dans l’école paroissiale, dont P.S

Giovanna assume la coordination et

où elle se donne sans compter, les

parents viennent de plus en plus

nombreux frapper à la porte pour y

inscrire leurs enfants, car

l’enseignement y est sérieux et les

résultats scolaires très bons : 100 % de

réussite à l’examen d’Etat ! Plus de

600 enfants sont inscrits. Mais il y a en

a tant d’autres, au niveau primaire ou

secondaire, qui ne bénéficient pas de

telles conditions et qu’il faut aider et

accompagner pour qu’ils persévèrent

et ne se découragent pas !

De nombreuses familles du quartier,

femmes surtout, n’ont pas le

nécessaire pour vivre et pour envoyer

les enfants à l’école ; aussi pour faire

face à ce problème, depuis de

nombreuses années déjà nous avons

commencé un atelier de broderie. P.S

Dety avec une équipe responsable

essaye de donner en priorité du travail

aux femmes les plus démunies et

aussi de les conscientiser à vivre la

solidarité entre elles. Actuellement ce

sont 240 femmes qui travaillent pour

l’atelier. Récemment, elles ont

organisé une sortie à une quarantaine

de km d’Antananarivo, bonne

occasion pour se connaître, sortir de

son milieu et se détendre, ce qui est

un luxe pour elles. Plusieurs sont

revenues rayonnantes !

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Nous sommes aussi très

présentes dans un Centre

Social géré par une ONG et

qui essaye de répondre aux

besoins du quartier dans le

domaine de la santé. Ayant

travaillé dans ce centre

pendant de nombreuses

années, j’en parle avec

beaucoup d’émotions, car

j’y ai vécu des moments très

forts. Pendant mon absence pour un

temps sabbatique, c’est maintenant

surtout notre jeune sœur Eliane qui y

travaille. L’action du centre touche

plusieurs aspects : il y a un centre de

récupération nutritionnel pour les

enfants, mais aussi pour les vieillards,

les personnes atteintes de

tuberculose et un suivi pour

l’hospitalisation des plus pauvres.

Au dispensaire, nous accueillons tous

les malades qui viennent pour se

soigner, mais avec une attention

toujours plus grande pour les plus

pauvres qui parfois n’arrivent même

pas à payer la participation minime

qui leur est demandée. Souvent leur

état de santé c’est beaucoup

détérioré parce qu’ils n’osent pas

venir s’ils ne peuvent pas payer ; ils

viennent quand la situation est

critique et nous devons prendre alors

l’hospitalisation en charge, tous les

soins y compris les repas. Nous ne

pourrions pas assumer ce service

sans l’aide de tant de personnes

solidaires qui nous soutiennent.

Avec la crise politique dans le pays, le

pouvoir d’achat des familles baisse

chaque jour et nous constatons, par

les visites à domicile, les

consultations et les campagnes de

vaccination, qu’il y a de plus en plus

d’enfants dénutris. Plusieurs fois, j’ai

remarqué que des mamans, devant

leur bébé si fragile, n’osent même

plus parler de la situation de leur

enfant ; leur angoisse est tellement

forte et leur situation tragique,

qu’elles s’enferment dans le silence.

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Il faut alors employer toutes nos

énergies et notre force de persuasion

pour que la maman accepte

l’hospitalisation de son enfant pour

le sauver.

Pour beaucoup d’autres enfants qui

ne nécessitent pas une

hospitalisation, le centre social met

en place un suivi médical

systématique et une aide pour les

repas.

Si la pauvreté matérielle et humaine

est visible et criante, la pauvreté

morale et spirituelle n’en est pas

moins présente. Comment être

témoins et messagères de la Bonne

Nouvelle dans ce Nazareth ? Notre

paroisse est bien organisée mais la

plupart des forces sont utilisées pour

le fonctionnement ou les

engagements dans les mouvements

paroissiaux et la partie spirituelle est

facilement délaissée. C’est un souci

pour nous. Nous avons pris en

charge la formation des catéchistes

et avec une équipe responsable nous

essayons d’organiser un meilleur

suivi des groupes et des catéchistes ;

c’est un grand travail.

Il nous faut toujours garder une

attention particulière aux enfants en

difficultés mais aussi aux parents.

P.S Dety suit les parents qui

demandent le baptême de leur

enfant ; elle fait équipe avec d’autres

personnes qui font la formation

biblique. Eliane accompagne l’équipe

des jeunes animateurs du

mouvement MEJ.

Je vous ai donné un petit aperçu de

ce que nous vivons dans notre

fraternité, mais je ne peux pas

oublier non plus tous les gens qui

frappent à notre porte, souvent des

personnes très démunies qui

viennent chercher auprès de nous

une écoute attentive.

Tout cela je le porte dans mon cœur ;

tout ce vécu, tous ces liens vont

rester présents en moi pendant

toute cette année sabbatique que j’ai

la chance de pouvoir vivre

maintenant.

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FRATERNITÉ DE BONNEFAMILLE - NOMADES

Si les « petites sœurs nomades » commencent à se sédentariser un peu plus

en passant une partie de l’année à la fraternité de Bonnefamille, la

« caravane » est toujours là, prête à reprendre la route pour rejoindre leurs

amis, les gens du voyage, comme nous l’explique maintenant Petite Sœur

Jacqueline :

La caravane – notre monastère

ambulant ! – a sagement repris sa

place sur le petit parking qui lui est

réservé à Bonnefamille !... Les

voyages sont terminés jusqu’au

printemps prochain.

Je voudrais partager avec vous comment nous continuons à vivre notre mission auprès des Voyageurs, dans cette nouvelle étape qui ressemble fort à une sédentarisation ; en cela, nous sommes proches de la plupart de nos amis, de plus en plus sédentaires, suite aux pressions de toutes sortes et très fortes de la société. Avant tout je dirai qu’il nous a fallu du temps – et il en faudra encore ! – pour nous adapter à un autre rythme, pour vivre autrement la présence et la mission dans la fraternité de Bonnefamille qui a

plusieurs visages : noviciat, étudiantes, village-paroisse, gens du voyage… et de passer de trois à une grande fraternité avec ses richesses et ses exigences… Il y a toujours un équilibre à rechercher ensemble sœurs fixes de la fraternité. Concrètement, nous repartons au printemps, vivre la Semaine Sainte avec des amis manouches du Centre de la France, un groupe très pauvre et isolé, qui voyageait peu et qui un jour a planté ses caravanes à chevaux sur un terrain et n’en a plus bougé ; nous avions choisi de leur être proches et nous continuons… pour eux c’est une présence d’amitié et d’Eglise ; ensuite jusqu’en septembre, ce sont les pèlerinages et sessions : Pellevoisin, Saintes Maries de la Mer, Paray-le-Monial, Ars, Lourdes, Mont Saint Michel et des petits pèlerinages de notre Région Rhône –Alpes.

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Le voyageur aime vivre sa foi dans des temps forts où il peut recevoir une formation, se préparer à un sacrement, s’engager dans l’animation, se retrouver avec d’autres, et il aime le faire en « famille » - famille « large », c'est-à-dire plusieurs caravanes : les enfants mariés, le frère, la sœur, chacun avec les siens – Les pèlerinages, les Ecoles de la Foi, les sessions répondent à ce besoin ; l’Aumônerie Nationale ou Régionale, la Communauté de l’Emmanuel proposent et organisent, avec des voyageurs bien sûr. Pour nous, les y rejoindre, c’est déjà retrouver tous ceux avec qui nous avons voyagé, stationné, vécu, depuis 25 ans, dans une grande partie de la France – ça fait de la « route » ! – c’est vivre ensemble ces temps forts pour continuer le chemin commencé, c’est les encourager par notre présence… c’est ainsi qu’ils le ressentent et l’expriment. Nous nous rendons compte, avec le recul, de la profondeur des liens que nous avons tissés par le partage de leur condition, au quotidien, pour le meilleur et pour le pire !... on n’avait pas l’impression de « faire » grand-chose, on a semé, on a essayé – en équipe – de donner le goût de la Parole, de rassembler, de leur donner leur place… et on réalise que

quelque chose a germé ! Cette année, par exemple, nous avons vécu Paray-le-Monial, Ars et Lourdes avec une famille du Centre de la France, connue alors qu’ils étaient presque dans la misère : ils ont fait les saisons tout l’hiver et le printemps et ont pu prendre la route ; une des filles s’est confirmée à Paray, son mari a fait sa première communion après une préparation sérieuse et, si le travail le leur permet, ils feront peut-être cet hiver « l’Ecole de la Foi » pour les jeunes qui se vivra en Isère et à laquelle nous sommes invitées à participer ; un autre voyageur de Seine et Marne, un frère pour nous, tellement on a vécu de choses ensemble, papa de deux grandes filles, a décidé d’aller à Paray l’an prochain pour qu’elles vivent un temps fort avec d’autres, c’est la première fois… ces amitiés, qui durent et peuvent se vivre même si on se rencontre une fois par an – en culture nomade (ou ce qu’il en reste) ce n’est pas un problème, on se retrouve comme si on s’était laissés la veille ! – se situent toujours dans un partage de vie et de Foi, on ne sépare pas, on vit tout ensemble, et il est bien rare de ne pas parler de Dieu lorsqu’on rencontre des voyageurs, c’est « naturel », c’est aussi ce qu’ils attendent de nous.

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Cela c’est pour l’été !... la mission, c’est aussi le reste de l’année à Bonnefamille. Il y a beaucoup de voyageurs dans la région et même très près de chez nous… éternelle question du temps !...nous connaissons déjà quelques familles, nous participons aux rencontres et à ce qui se vit en Région. Nous sommes conscientes qu’un jour nous ne voyagerons plus du tout et nous essayons de faire de Bonnefamille un lieu d’accueil : déjà les uns ou les autres sont venus avec leur caravane pour quelques jours, ils y trouvent ce qu’ils aiment : un lieu

où ils sont bien accueillis, l’amitié, une fraternité vivante, plus large que nous trois – ça passe très bien, de part et d’autre, avec les jeunes – la possibilité de prier avec nous. La prière… c’est un monde qui prie, qui crie vers Dieu dès que quelque chose ne va pas, qui peut faire des centaines de kilomètres pour aller dire merci à Lourdes, ou ailleurs, quand les choses vont mieux… ils y croient et ils croient à la nôtre !... drôle de responsabilité !... Personnellement, ils me bousculent, m’interrogent, « m’obligent » à l’intercession…

Combien de coup de fil recevons-nous de partout, même du courrier d’Irlande et d’Angleterre : nous nous étions approchées de

Voyageurs de passage à la Verpillière , avec notre anglais plus que réduit ; très bien accueillies, tout de suite, ils avaient demandé

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de bénir leurs véhicules ; depuis ils écrivent et demandent notre prière avec une confiance assez bouleversante, celle des petits, que la vie ne ménage guère… Qu’ils soient d’Irlande, de France, de Roumanie ou d’ailleurs, leur vie n’est pas simple et ils sont « pris » entre deux mondes : le nôtre, par le travail, l’école, la société de consommation et le leur, qui passe du nomadisme à la sédentarisation et qui en perd – en partie du moins – les valeurs qui étaient liées à un

mode de vie ; les jeunes sont souvent déboussolés, tiraillés, et les parents dépassés !... cela ne leur est pas propre et ce n’est pas nouveau, mais « ici et maintenant », il nous revient d’être bien présentes, même si c’est autrement, et de « profiter » de nos acquits – toutes les années vécues sur les terrains – pour creuser, approfondir, accompagner, participer aux réflexions, en toutes occasions.

C’est finalement l’action de grâces qui émerge de tout ça – une action de grâces « réaliste » qui ne ferme pas les yeux sur les difficultés, les problèmes, les dérives, mais qui « voit » : - les chemins qui se frayent, - les personnes qui changent, - les hommes et les femmes qui se lèvent pour témoigner, - les jeunes qui prennent la relève, - les liens qui se nouent, - les pardons qui s’échangent…

Je suis toujours remuée quand je vois ces hommes et ces femmes, ces jeunes et ces vieux, aux visages burinés, marqués par leur vie, prier en public et dire leur Foi ; c’est un geste fort, c’est vrai… quand on sait d’où ils viennent !... et les fruits cachés, vécus au quotidien, on ne peut que remercier d’en être témoin, et d’en être enrichies. Bonne route à chacune

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FRATERNITÉ DE LOS TEQUES (VENEZUELA) "Voici des extraits d’une lettre que Petite Sœur Bernardita, de la fraternité de Los Teques, au Venezuela, a écrite à un ami pour répondre à une question qu’il lui posait : « Comment les pauvres s’efforcent-ils de vivre l’Evangile dans leur vie toute simple et courageuse ? ». Question qui est la raison essentielle de sa présence dans un quartier populaire d’Amérique Latine, et dans la Fraternité…

Situons-nous dans la réalité latino-américaine : C’est bien difficile d’y répondre d’une manière simple, car il y a tant de facettes et il faut prendre en compte la réalité de notre continent, qui a une histoire si différente de l’Europe… Peut-être ces différences de l’Amérique Latine avec l’Europe sont moins reconnues quand on parle du milieu populaire des grandes villes ou des campagnes, que les différences plus tranchantes avec le monde indien. Et pourtant : nous sommes un continent marqué par le fait de la colonisation, de l’esclavage, de l’invasion, situations violentes qui sont très profondément marquées dans l’âme des Vénézuéliens et qui ont été le terreau dans lequel est née l’Eglise latino-américaine. La Conférence des Evêques à Medellin (1968) a bien mis le doigt sur la plaie et a permis tout un mouvement vers les périphéries en tenant compte de la CULTURE. L’effort d’inculturation a été remarquable. Mais les « réformes »

en cours ont fortement fait revenir l’Eglise à l’avant-Concile Vatican II. Pourquoi dis-je cela ? Parce qu’on ne peut annoncer l’Evangile sans tenir compte des racines des personnes. Plus que l’origine indienne, présente il est vrai, ce sont les réminiscences des racines et de la religiosité africaines qui ont marquées la foi des gens. Les fêtes religieuses populaires sont très colorées par les traditions ancestrales africaines, et nous savons bien que sous la dévotion à tel ou tel saint, c’est tel ancêtre d’Afrique qui est vénéré. Je crois que la population est marquée par le métissage africain à près de la moitié. Les religions africaines du type du candomblé ou du vaudou n’existent pas au Venezuela, mais la religiosité populaire a gardé beaucoup de traditions africaines. L’usage du tambour dans les fêtes est omniprésent. S’ajoute à cela que tous les afro-descendants sont descendants d’esclaves, qui étaient obligés de pratiquer leur religiosité clandestinement (pour cela, les

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saints catholiques couvraient en réalité leur dévotion aux ancêtres africains). Pour donner un exemple : un fait statistique : 95% des couples ne sont pas mariés, et encore moins à l’Eglise, car cela coûte cher. La raison ? Le mariage était interdit du temps de l’esclavage qui touchait une grande majorité de personnes, afin que le propriétaire des esclaves puisse séparer mari et femme, et enfants. Le mariage officiel n’est pas une tradition dans le monde populaire. Je dis cela parce

qu’actuellement, dans nos églises, avant chaque communion, le prêtre est obligé de dire (certains y échappent) que ceux ou celles qui ne sont pas mariés à l’Eglise, ne peuvent pas communier. Cette admonition date seulement d’il y a deux ans. Cela crée beaucoup de confusions et de désistements de l’église catholique (ce n’est qu’une des raisons de l’hémorragie de chrétiens vers d’autres dénominations religieuses).

Il y a une différence fondamentale entre l’Europe, le monde « développé » et le Venezuela, comme personnes et peuple. Ici, ce n’est pas courant, du moins dans le monde populaire, d’entendre quelqu’un dire qu’on ne croit pas. Presque tout le monde se sent profondément croyant en Dieu et

l’invoque à toute occasion, même publiquement, sans pudeur. Ici, on baigne tout naturellement dans une ambiance où Dieu est présent, remercié, supplié, professé, sans honte. Et ceci, par des personnes qui ne vont à la messe que très rarement (ou jamais). Il y a beaucoup de spiritualité dans le peuple humble.

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On se signe en passant devant une église, en commençant un voyage en bus ou en voiture, on demande la bénédiction aux parents, parrains et marraines et proches, chaque fois que l’on arrive ou que l’on part de la maison, quel que soit l’âge (ne pas la demander est une faute très grave). C’est souvent avec affection que l’on manifeste que « Papa-Dieu » ne nous abandonne jamais, que la foi en Lui, permet de surmonter les difficultés. Parfois ils nous donnent de bonnes leçons de confiance à la Providence, quand nous serions tentées de baisser les bras. Cela s’exprime très fort dans les neuvaines que l’on célèbre dans la maison du défunt, après l’enterrement (on prie le Rosaire et les Litanies, et ensuite on prend ensemble une boisson chaude, en parlant, en particulier du mort… et de la vie tout simplement). Ce n’est de la résignation, c’est un deuil que l’on fait ensemble en confiant tout à Dieu, avec des larmes, mais en paix. Cette force spirituelle, cette foi énorme, affective, s’est beaucoup manifestée publiquement depuis que notre Président a affronté sa grave maladie : dans tous les espaces publics, on s’est réuni pour prier, dans tous les rites (indiens, africains, évangéliques, catholiques, etc.) et

cela depuis un an déjà. Rares ont été les églises catholiques qui l’ont fait ! Ceci révèle une autre caractéristique de la foi des Vénézuéliens : la pratique de la religiosité populaire, très impressionnante. Dans un pays où les prêtres ont été toujours en très petit nombre, le peuple a appris à vivre sa foi en-dehors de la présence d’un prêtre. Souvent les grandes fêtes patronales sont aussi de grandes et riches manifestations populaires, folkloriques, qui réunissent des multitudes. Des prêtres y participent, mais l’organisation des célébrations est confiée à la Confrérie du Saint ou de telle fête (du Saint-Sacrement, par exemple). On pourra dire que ce n’est pas « pur », mais qui a dit que Dieu n’accueille pas l’expression de ses enfants qui vivent leur foi dans les chants, les danses et les roulements de tambour, parfois symbolisant la lutte entre leur Dieu et le Diable ! Evidemment, c’est très surprenant pour les mentalités occidentales. Dans notre quartier où le prêtre de la paroisse vient une seule fois par an, avant Noël, les familles nous demandent encore d’ondoyer les petits enfants. Nous en profitons pour en faire une catéchèse familiale en vue du baptême.

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Aujourd’hui, en-dehors de l’animation de la petite communauté chrétienne et de la catéchèse, nous assumons des classes de rattrapage et l’accueil d’enfants en perte de vitesse au niveau scolaire. Grâce aux politiques sociales de l’actuel gouvernement, nous n’avons plus à intervenir au niveau santé, au niveau de nourriture d’urgence, ou d’autres aides ponctuelles (dépenses pour la rentrée scolaire, pour des médicaments, pour un toit de zinc, etc.). Ces secours étaient possibles grâce à la solidarité suscitée par l’aumônier des Français. Actuellement, et au cours de ces 10 dernières années, le quartier, les familles les plus pauvres (et moins pauvres) ont bénéficié de pas mal d’aides et les gens savent comment obtenir les bourses, les aides de toutes sortes. Tous ont reçu des

aides pour faire leur maison en dur et tout le monde qui le désire, a du travail. Les personnes âgées ont toutes, la pension-vieillesse, même si elles n’ont jamais cotisé. Cela nous décharge donc. Nous collaborons avec l’organisation communautaire du quartier, le Conseil Communal qui a une structure légale dont je fais partie pour le recensement et pour la Commission Electorale. Je suis une élue, tout comme les 24 membres du CC et leurs remplaçants. C’est un service nécessaire pour que les familles obtiennent les aides demandées. Sans structure de C.C., on n’obtient pas certains crédits ou aides. Il n’y a pas de doute que l’aspect de notre mission a changé. Mais le sens de notre présence est le même : relations de proximité et d’amitié, en particulier avec les plus pauvres.

Au niveau de l’Eglise et de la foi chrétienne : Au niveau religieux, les changements ont été très grands. Ces changements touchent tout le continent où vivent encore le plus grand nombre de catholiques ; beaucoup ont passé à d’autres églises, voire à des sectes, comme les Témoins de Jéhovah, qui sont très agressifs dans leur prosélytisme. Cela

a provoqué un bouleversement très grand dans notre quartier, comme ailleurs. Plusieurs dénominations religieuses (surtout évangéliques) se sont installées et ont ouvertement attiré les membres actifs de notre communauté chrétienne, catéchistes entre autres, dans leur groupe. Avec certaines personnes, les relations continuent à être amicales, avec d’autres, cela est plus difficile. Nous nous réjouissons quand tel ou tel qui

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s’est engagé dans un groupe évangélique, a cessé de boire, mais les « Témoins de Jéhovah » ont un langage très aliénant et agressif. A présent, en acceptant un enfant pour la catéchèse de Première Communion, nous devons d’abord clarifier avec eux qu’ils ne peuvent être en phase avec deux religions. Ce n’est pas évident, car les évangéliques vont de maison en maison pour chercher les enfants pour leur culte, chaque semaine. Donc, il y a une baisse vertigineuse des catholiques engagés dans notre quartier. D’autre part, beaucoup de catholiques traditionnels et qui n’aiment guère un engagement dans leur foi, préfèrent revenir au style de pratique religieuse intimiste et de « consommation » que proposent toutes les paroisses catholiques de Los Teques. On paye pour les sacrements, pour les messes, pour les morts, et on n’est pas obligé d’assister à des réunions de préparation… L’involution de l’Eglise catholique dans notre pays est vraiment très dommageable et triste. Contrairement à d’autres pays d’Amérique Latine, le Concile Vatican II et « Medellín » ont été acceptés tardivement et il est clair que la hiérarchie catholique a marginalisé et combattu les courants progressistes, tels que les Communautés Ecclésiales de Base,

que l’on tente de neutraliser en les infiltrant par le charismatique, ainsi que les Religieux-ses en milieu populaire, les groupes de Bible, les groupes œcuméniques, etc. Faisant partie de ces groupes, je connais de près les difficultés de survie que nous affrontons et la suspicion des Prélats de l’Eglise Catholique. Pourtant, nous avons bien besoin de ces petits groupes de référence, qui nous aident à avancer dans notre option pour les pauvres, « à cause de l’Evangile ». Un autre facteur qui perturbe bien des personnes croyantes, c’est l’agressivité de presque tous les prêtres qui profitent de leur position « supérieure » pour faire leur politique contre le gouvernement, durant leurs homélies. En toute impunité, puisque les évêques sont les premiers à le faire et à publier dans les journaux leur aversion envers le Président de la République. Bien des chrétiens ne vont plus aux messes, car ils se sentent insultés par ces offenses. Comme me confiait une jeune religieuse issue du monde des pauvres : « toutes mes sœurs parlent mal de notre Président… et je ne peux rien dire, mais comment veux-tu que je nie tout le bien qu’il fait pour nous, les plus pauvres, car à présent mes pauvres parents peuvent vivre dignement » ?

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Ceci est un facteur d’importance quant au rejet de l’église catholique actuellement. Et cela fait que notre présence doit être discrète, sans beaucoup de paroles, et une fidélité à notre vocation d’amitié. Nous nous y sentons très bien. Et nous sommes très proches de ceux et celles qui se dévouent sans compter pour le bien et le progrès des autres, même s’ils ne s’identifient pas avec notre église. Nous apprenons à vivre de manière « œcuménique » notre présence. Dans ces temps de profonde transformation de notre pays et notre société, il y a tout de même beaucoup de chrétiens inquiets afin que leur vie et leur foi soient en accord. Autrefois ce que moi-même

je trouvais dans les mouvements d’Action Catholique, ici nous le trouvons dans des groupes, très minoritaires, tels que celui de « spiritualité libératrice », dans la ligne de la Théologie de la Libération et de l’œcuménisme, de la Lecture Populaire de la Bible, des Communautés Ecclésiales de Base et le petit groupe de religieux/ses en monde populaire. Ce sont des espaces qui nous maintiennent dans l’enthousiasme et l’espérance chrétienne, et où nous pouvons aussi apporter notre petit grain de sable. Il va sans dire que nous avons aussi un réseau d’amitié et de fraternité avec d’autres membres de la Famille Charles de Foucauld.

Comment les gens simples vivent-ils de l’Evangile ? Dans la joie de vivre, le goût de la fête, l’action de grâces si spontanée pour eux. Mais en cette époque des nouvelles technologies à présent accessibles pour beaucoup, surtout pour les jeunes, il y a une perte réelle de certaines valeurs, pas chez tous, et la soif de l’avoir et

d’une vie commode menacent la solidarité qui caractérisait notre milieu de vie. C’est un nouveau défi… Sûrement ai-je extrapolé en voulant répondre à une simple question, qui a suscité en moi bien des choses que j’aimerais mieux te dire de vive voix.

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DE LA COURNEUVE A SAINT-DENIS

Vous êtes nombreux à avoir connu la fraternité de La Courneuve qui a été

longtemps fraternité générale, puis fraternité d’accueil pour les sœurs de

passage. La mairie ayant préempté une partie du terrain sur lequel nous

étions, nous avons dû quitter cette maison, qui, en l’état, ne répondait plus

à nos besoins. Depuis le mois de septembre, nous avons donc déménagé à

St Denis, dans la même rue que la fraternité générale, pour une meilleure

entraide et un meilleur service de la Fraternité.

Petite sœur Anne-Marie qui a vécu très longtemps à la Courneuve nous

laisse un petit message :

« Quitter La Courneuve, c’est garder dans la mémoire plus de 30 ans de vie.

Si les murs pouvaient parler, ils nous raconteraient tous les évènements,

heureux et douloureux, vécus dans ces lieux. Ils nous égrèneraient les noms

des sœurs qui ont passé ici un temps plus ou moins long selon leurs besoins

ou les nécessités. Ils nous parleraient de toutes les rencontres, les

échanges, les partages… mais aussi de tous les silences, en particulier ceux

de la prière… »

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Mon Père,

Je m’abandonne à toi,

Fais de moi ce qu’il te plaira.

Quoique tu fasses de moi,

je te remercie.

Je suis prête à tout. J’accepte tout.

Pourvu que ta volonté se fasse en moi,

en toutes tes créatures,

Je ne désire rien d’autre, mon Dieu.

Je remets mon âme entre tes mains.

Je te la donne, mon Dieu,

Avec tout l’amour de mon cœur,

Parce que je t’aime,

Et que ce m’est un besoin d’amour

de me donner, de me remettre

entre tes mains,

sans mesure,

avec une infinie confiance,

car tu es mon Père.

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TABLE DES MATIÈRES

Père Voillaume : p.1

Introduction : p.2

Message du Père Voillaume : p.4

De New-York à Bruxelles : p.9

Fraternité de Mejicanos (Salvador) p.12

Fraternité de Mulhouse : p.19

Fraternité de Bari : p.23

Fraternité de Salapoumbé (Cameroun) : p.30

Fraternité d’Antananarivo (Madagascar) : p.38

Fraternité de Bonnefamille - Nomades : p.41

Fraternité de Los Teques (Venezuela) p.45

De La Courneuve à Saint-Denis p.51

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Ces nouvelles veulent être un signe d’amitié, un

lien fraternel entre nous,

nos familles et nos amis.

Merci à vous tous, dont la prière et le soutien

fidèle nous permettent de poursuivre notre

mission.

Adresse : Petites Sœurs de l’Evangile Fraternité Générale 31, Rue Georges Politzer 93200 SAINT-DENIS FRANCE

Email : [email protected] Téléphone : 0033 / 01 48 23 32 28 Sites Internet :

www.petites-soeurs-evangile.org www.piccole-sorelle-del-vangelo.org www.kleine-schwestern-vom-evangelium.org www.hermanitas-del-evangelio.org

www.charlesdefoucauld.org

http://www.petites-soeurs-evangile.org/

http://www.piccole-sorelle-del-vangelo.org/

http://www.kleine-schwestern-vom-evangelium.org/

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