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Parti communiste français P. 3 ÉDITO VOS CRITIQUES, NOTRE TÉNACITÉ Par PATRICE BESSAC u P. 6 LE DOSSIER LA SÉCURITÉ P. 16 COMBAT D’IDÉES LA RENTRÉE DES «THINK TANKS» Par GÉRARD STREIFF P. 26 MORALE ET POLITIQUE Par YVON QUINIOU N°1 OCT. 2010 REVUE THÉORIQUE MENSUELLE DU PCF COMMUNISME EN QUESTION

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P a r t i c o m m u n i s t e f r a n ç a i s

P.3 ÉDITO

VOS CRITIQUES,NOTRE TÉNACITÉPar PATRICE BESSAC

u P.6 LE DOSSIER

LA SÉCURITÉ

P.16 COMBAT D’IDÉES

LA RENTRÉE DES «THINK TANKS»Par GÉRARD STREIFF

P.26 MORALE ET POLITIQUEPar YVON QUINIOU

N°1OCT.2010

REVUETHÉORIQUEMENSUELLE

DU PCF

COMMUNISME EN QUESTION

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Deux chercheurs français viennent d’obtenir la plushaute distinction mathématique mondiale. Quand lascience confine au rêve et à l’utopie.

Cédric Villani, 36 ans, directeur de l’Institut HenriPoincaré (Paris), et Ngo Bao Chao, 38 ans, profes-seur à Paris-Sud, sont deux des quatre lauréats de la

plus haute distinction mathématique mondiale, décer-née par le Congrès Mathématique Mondial qui, cetteannée avait lieu à Hyderabad (Inde). En Mathéma -tiques, le prix Nobel n’existe pas. Le second des deux lauréats est l’auteur d’une preuveen Théorie des Nombres qui démontre une conjecturefondamentale énoncée en 1987 ; on ne peut en présen-ter un condensé accessible ici ; ces travaux considéra-bles mêlent à un niveau exceptionnel divers outils ettechnologies mathématiques de la plus haute élégancequ’il conduit à un point d’achèvement. Laissons maintenant parler Cédric Villani : « C'est sur-tout utile aux ingénieurs aéronautiques et à ceux quitravaillent sur des plasmas, par exemple pour lesproblèmes de fusion », a-t-il précisé. En ce qui concernele futur réacteur expérimental à fusion nucléaire (ITER),« je suis à l'extrémité la plus théorique de ceux quitravaillent sur ce sujet », souligne-t-il.

Un plasma est une phase de la matière constituée d’ionset d’électrons ; on l’obtient artificiellement en chauffantsuffisamment un gaz ; cette phase de la matière est laplus courante dans l’univers ; électriquement neutre,cette phase donne naissance à des comportementsinconnus chez les fluides en présence notamment d’unchamp électromagnétique. En 1946, le physicien sovié-tique L. Landau sut prédire un comportement tendant àun état stable même en l’absence de collisions entreparticules ; mais cette découverte fondamentale,compte tenu de l’époque, supposait les « modèles » uti-lisés linéaires ; les équations qui régissent l’évolutiondes plasmas sont non linéaires et Cédric Villani a ainsiachevé la preuve de la conjecture de Landau ; ceciconstitue une étape indispensable vers le contrôle de lafusion thermonucléaire qui est envisagé à une échellede 25 ans (optimiste ) voire 50 (pessimiste) ; le contrôlede la fusion thermonucléaire serait un pas de géantpour la maîtrise de la production d’électricité sansdéchets radioactifs.Deux travaux aux antipodes mathématiques l’un del’autre et dont l’un des points communs ultimes est lapuissance du rêve. n

* Olivier Gebuhrer est responsable de la commission Enseignement supérieur et recherches

2 SCIENCES par Olivier GebhurerLa puissance du rêve

3 ÉDITO par Patrice BessacVos critiques, notre ténacité

4 FORUM DES LECTEURS/LECTRICES

6 u15 LE DOSSIER LA SÉCURITÉIsabelle Lorand Délinquance urbaine, la sociétéest malade des inégalitésLaurent Bonelli Pour une histoire sociale de lasécuritéJean-Marie Doussin Les mesures sécuritaires deSarkozyNicole Borvo La justice pénaleSerge Garde D’urgence repenser l’insécuritéGilles Garnier Tranquilité publique, la policemunicipale une fausse bonne réponse Philippe Aoustin Le rôle et le positionnementdes polices municipales

Gilles Poux Comment reprendre pied dans ledébat sur la sécurité ?Santiago Serrano Un monde sans drogue ?Ian Brossat La guerre aux familles aura-t-elle lieu ?Jean-Michel Daquin Concevoir un projet de ville solidaireStéphane Bonnery Violences à l’école, des cléspour un débat piégé

16 COMBAT D’ IDÉESGérard Steiff La rentrée des think tanksSONDAGES Le déclassement social

19u22 NOTES DE SECTEURSXavier Compain Conquérir de nouvelles politiquesagricolesAlain Morin Rapport Camdessus, l’austérité pourl’éternitéLaurence Cohen Les femmes, toujours les pre-mières concernées dans les luttesHervé Bramy Pour une écologie citoyenne

23 REVUE DE LIVRES par Alain Vermeersch

25 CRITIQUESCoordonnées par Marine Roussillon

26 COMMUNISME EN QUESTION

Yvon Quiniou Morale et politique

28 AGENDA

29 APPEL À COMPÉTENCES

30 CONTACTS / RESPONSABLESDES SECTEURS

SCIENCES

SOMMAIRE

La culture scientifique est un enjeu de société. L'appropriation citoyenne de celle-ci participe de la constructiondu projet communiste. Chaque mois un article éclaire une actualité scientifique et technique. Et nous pensonsavec Rabelais que « science sans conscience n’est que ruine de l’âme ».

LA PUISSANCE DU RÊVE

Par OLIVIER GEBUHRER*

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S oyons clairs ! A l’occasion de cepremier numéro de la Revue duProjet, nous ne nous attendons

pas à recevoir des tombereaux defleurs mais bien plutôt une ava-lanche de critiques. Donnez-vous enà cœur joie ! Écrivez vos attentes, voscoups de colères, écrivez tout ce quevous voulez, mais écrivez ! Vos cri-tiques sont précieuses à l’avenir dece projet : nous les attendons avecimpatience.L’équipe qui a commencé à seconstituer autour de la Revue est uneéquipe tenace. À cette ténacité uneraison profonde. Chacun, chacunede ses membres pensent que l’exis-tence de cette revue répond à unemission d’intérêt général : partager,mettre en commun, créer un espacequi soit l’un des lieux du mouve-ment des idées pour penser l’alter-native au capitalisme, au service duParti communiste français, et au ser-vice du mouvement critique.Qu’il pleuve, qu’il neige ou qu’ilvente, cette revue sortira le 1er jourde chaque mois. Nous y consacre-rons l’énergie nécessaire pour cela.D’ici juin, cela signifie que nouspublierons neuf numéros. Votreapport, l’apport des militantes etdes militants, sera la matière laplus précieuse pour réussir. Je merépète donc encore une fois : pre-nez votre plume et écrivez-nous.

Trois remarques à présent sur lesrubriques et la suite.

Première remarque. Nous avons fait le choix d’un granddossier, constitué de points de vueassumés par leurs auteur-es. Le butest d’ouvrir un débat puis deuxmois après de produire une syn-thèse, une “fiche” politique sur lesujet, proposant un positionne-ment pour notre parti et ainsi laconstruction de points de vue et depropositions partagées.Deuxième remarque.Nous publions les notes des secteursde travail nationaux. Le fait est quede nombreux secteurs de travail pro-duisent et que ce travail n’est connude personne. La Revue défendra lalogique de partage permanent dutravail existant dans le parti comme

l’une des conditions d’une efficaciténouvelle, politique et démocratique.Troisième remarque.Nous lançons un appel à toutes lescompétences. Intellectuelles, sociales,syn dicales, politiques, militantes,techniques. Nous invitons chaquelectrice, chaque lecteur à prendre letemps d’y réfléchir une seconde. LeParti communiste français est riched’un potentiel humain qui est saforce principale, un potentiel enjachère. Parvenir à cultiver ensem-ble ce jardin est une tâche urgente.

Et maintenant, travailler sur leprojet, c’est quoi ? Le Comité duprojet se penchera le vendredi 15octobre lors de sa première réunionsur le sujet.Dès maintenant, il est, me semble-t-il, trois domaines pour lesquels ilfaut éclaircir notre point de vue.

QUE SE PASSE-T-IL ?La nature des principaux enjeuxcontemporains. À mon sens, lesvingt prochaines années se résu-ment à l’idée de crise de civilisationou encore de crise anthropolo-gique, de crise du devenir humainet de sa niche écologique, la planèteterre. Notre problème principaln’est pas de mieux traiter la criseécologique, ou la crise du travail ouencore la crise du système produc-tif mais d’accéder à la pensée del’ensemble. Pour la première foisdans l’histoire de l’Humanité, notreorganisation sociale par son carac-tère de “société-monde” fait peserun risque global et majeur à la sur-vie de l’Humanité en tant qu’espècecivilisée. Trois exemple à l’appui. Nous vivons actuellement lasixième phase d’extinction massivedes espèces vivantes, bientôt à unrythme plus rapide que les cinqphases géologiques précédentes.Certaines prévisions, notammentde la CIA, prévoient à court termedes déplacements de population del’ordre de 500 millions du fait de ladésertification. L’affaiblissement constant des démo-craties occidentales avec commecorollaire la montée des populismeset, dans les classes dominantes, de

stratégies de contournement desprocessus démocratiques.La fin de la guerre froide et l’effon-drement de l’Est a eu comme effet,entre autres, d’accélérer violem-ment l’organisation des sociétésautour d’un seul critère : la rentabi-lité financière.Si la source essentielle des désordresactuels est connu, penser l’ensem-ble, c’est tenter de dire en quelquesmots la cohérence essentielle dessociétés actuelles et les défis fonda-mentaux que l’Humanité devraaffronter dans l’avenir. Socialismeou barbarie, cette alternative estprobablement plus que jamaisaujourd’hui au bout de cette tenta-tive de penser l’avenir.

COMMENT CHANGER ?D’un regard sur l’histoire, je tirecomme conclusion que l’essentieldu travail sur le projet est de permet-tre l’identification de notre combat,du combat communiste, du combatd’alternative au capitalisme, àquelques “grands fondamentaux”.Loin de moi l’idée de philosopher enpantoufle et de ne pas s’occuper desréponses immédiates, notammentpour l’horizon 2012. Cependant, aunom de quelles grandes idées pourl’avenir de notre société, de la civili-sation humaine, conduisons nousnotre action ? Changer les modes deproduction actuels, de consomma-tion, dépasser le salariat, changer lerapport à la nature, oui mais au nomde quels principes ? Penser lesgrands traits mondiaux du change-ment de société.

AVEC QUI TRAVAILLER ? COMMENT ?Nous devrons nous faire une opi-nion de la durée de ce travail et deson rapport avec les forces critiquesqu’elles soient populaires, intellec-tuelles, militantes, politiques ousyndicales. Quelle est notreconception de long terme de l’unitésur le projet politique ? À mes yeux,l’essentiel est de mettre l’accent surle mouvement, c’est-à-dire notrecapacité de nouer des relationsvivantes de travail avec tous lesacteurs et actrices disponibles.

Au mois prochain.

PATRICE BESSAC, responsable du Projet

ÉDITO

VOS CRITIQUES, NOTRE TÉNACITÉ

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La Fête de l'Humanité a permis à La Revue du Projetd'aller à la rencontre des militants et militantes communistes pour inaugurer cette rubrique.

« Ne pas travestir la réalité sur nos faiblesses. Acter des différences, montrer une cohérence, l'originalité de nos propositions.»

FORUM DES LECTEURS

Pierre et Dominique de Haute-Garonne qui étaient déjàen retard pour un débat « Des mouvements de libérationremettent en cause le capitalisme et même en crise, ilrésiste. Quelle est sa force pour mieux le combattre ?L'implication de toutes et tous, cheminots, universi-taires, associatifs et de beaucoup d'autres, est impor-

tante pour mieux faire voir un contre-projet. Contre-pro-jet qui manque aujourd'hui. Le déficit de cohérence detoutes nos propositions pose problème au quotidien. Enbref, on ne sait plus ce qui fait l'identité des commu-nistes. Que dit-on sur l'agriculture, l'éducation, le tra-vail... ? Avoir un regard sur les expériences » n

LA REVUE, UN OUTILJean-Luc prend quelques minutes pour arrêter son acti-vité sur le stand de Mitry et donner son point de vue« Une revue sera très utile, il en est sûr. Beaucoup dequestions sur l'utilité de rester au Parti existent, certainsl'ont déjà quitté et j'ai mal de ces départs. Je suis pourmaintenir des liens avec elles et eux. Je ne quitte pas leParti mais il faut que les choses changent et vite. Je voisde la théorie, des objectifs partagés et les communistesco-auteurs de tout cela. Un regard sur la société réelleet pas sur un rêve. Une des explications de notre diffi-culté actuelle est notre désertion des cités populaires.Les propos racistes, même au PC, je les combats. Neplus dire des choses à la volée, la complexité des chosesest aussi une richesse. Le renforcement du Parti est laquestion principale, sinon c'est la petite mort, c'est exis-tentiel. Dire absolument : on a un bout de chemin à faireensemble, on n'encarte plus, on entre et on en sort.Faire du lien. » n

Aller sur le fond, aller vite : une contradiction ?Cyril accoudé au bar du stand du Puy-de-Dôme « La méconnaissance des prises de position pose un vraiproblème. Sans l'Humanité, on ne saurait rien. Où en est-onsur tel ou tel sujet ? On va souvent chercher ailleurs, c'estbien mais là je voudrais que les communistes s'expriment.Ne pas travestir la réalité sur nos faiblesses. Acter des dif-férences, montrer une cohérence, l'originalité de nos pro-positions.Montrer notre capacité à monter un projet, cela nousmanque. Nous ne sommes pas un ilot montrer les réactionsen chaîne, le long terme sur un sujet aujourd'hui brûlant. Jerepense à la Burqa : Pourquoi Gérin a-t-il eu cette action ? À quelle fin ? J'ai eu beaucoup de débat en interne mais pasassez alimenté pour avancer sur la question tous et toutesensemble. C'est encore un sujet qui divise les communistes etqui fait venir sur des notions importantes comme : le respectde chacun et chacune, les musulmans, le féminisme, la laï-cité, le colonialisme. On ne profite pas de la réflexion collec-tive. Il faut entrer dans un processus». n

L’implication de toutes et tous est nécessaire

Au prochain numéro, à vous la parole à l'adresse mail suivante : [email protected]

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FORUM DES LECTEURS

QUELS SONT NOS MARQUEURSIDENTITAIRES ? Fabienne du Vaucluse : « On confond le programme et leprojet, le type de société se dit synthétiquement.Qu’entend-on par socialisme d'émancipation ? On en n'ajamais débattu. Ou encore société éco-progressiste ? Il faut clarifier notre projet et le programme partagé avecle Front de gauche dans le même mouvement.D'après un sondage, le PCF est moins perçu comme vou-lant changer la société ? Que disons-nous ? Qu'est-ceque cela reflète ?Des notions comme appropriation sociale, gratuité, ouencore accession à la propriété sont à approfondir. Lepartage de la pauvreté, ce n'est pas nous, on a une autreambition. » n

« Je trouve très bien que lepremier dossier soit sur lasécurité.. On ose ! Attentionpar exemple au Blanc-Mesnil cette préoccupationest première. Des lieuxdeviennent partout inviva-bles, que dit-on ? Quellessont nos solutions ? Quelscontacts ? ».

« Comment sortir desconstats, des donnéesbrutes, comment arriver àtout mettre en perspectivesurtout en ne partant pas denos seules références ? »

LA REVUE, UN LIEU IDENTIFIÉ PARCHACUNE ET CHACUNNathalie met l'accent sur le compte-rendu des collectifsnationaux notamment dans les domaines de l'écolo-gie, le travail. J'en ai besoin autant dans le cadre de macollectivité territoriale en Seine-Saint-Denis que dansmon militantisme au quotidien. J'ai besoin de nourrirma réflexion, de travailler, c'est quand même frustrantque le Parti produise mais que toi de ton côté tul'ignores.Je ne souhaite pas une compilation, je veux que celasoit directement utile aux militants. Il faut rendre leschoses synthétiques. Si on exposait mieux les choses,on les prendrait mieux aussi.Être lisible, clair sur la pollution, la mal bouffe la santéavec des idées fortes, des points de repères.Dans le travail aujourd'hui ce qui monte c'est la ques-tion de la reconnaissance, de la souffrance, je le voisdans ma propre collectivité. L'urgence est là. Parlerdes nouvelles formes d'exploitation, insidieuses quel'on décrypte mal seul et sans recul, ce n'est pasoublier de parler de ce qui est chez nous, traditionnel,des salaires et de l'emploi. Faire des grilles de lecture,des mécanismes à expliquer. Toutes ces questions res-tent sans traitement politique aujourd'hui. On ne faitque les dénoncer. Avec le regard des salarié-es, dessociologues et des politiques, cela se connecte, tu esdans la réalité de quelque chose. n

Pages réalisées par CÉCILE JACQUET

Être clair pour le plus grand nombreSophie avec le bel accent de Marseille « Le projet toutd'abord, ce n'est pas un programme. Une société soli-daire, la démocratie...être clair pour le plus grand nom-bre. Il y a trop de cloisonnement. On ne peut pas laisserles choses entre initiés.Le web, c'est bien, ça me va. Nous sommes dans masection un tiers seulement à avoir cet outil. Mais on vafaire du lien autour de la revue et c'est très bien ! Celaenrichira le rapport que l'on a entre nous.Sur formation, on avance bien. Mais c'est drôle, on abeaucoup de demandes et ensuite peu de monde sedéplace le jour dit. Il existe un blocage. Il faut travail-ler ce blocage, on s'y attelle. Cela passe par la valorisa-tion, ce que nous ne savons pas faire du tout ! Il fautdonner confiance à la participation citoyenne, à l'écri-ture. » n

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La sécuritéÉdito

LE DOSSIERPlus caricaturale que jamais, la politique de sécurité dugouvernement se résume à une politiquepénitentiaire etstigmatisante pour les plus démunis.Pourtant, la droite sarkoziste,qui ne jure que par le seulvolet répressif, ne peut pluscacher ses échecs successifs.Les enjeux de sécuritépublique sont ainsi devenusde véritables enjeux decivilisation. Vivre en sécuritéest un droit élémentaire etune condition de la liberté.

La Revue du Projet ouvrele débat avec ce dossier.Nous avons voulu traiter lesujet à partir de plusieursangles d'approches police,justice, éducation, urbanisme,services publics, vivreensemble, tous plus décisifsles uns que les autres.L'expérience citoyenne, ainsique celle des élus, permet auPCF de porter de fortespropositions alternatives auxseules logiques sécuritaires.

Par LAURENT BONELLI*

En politique, l’« insécurité » est désor-mais un mal qui explique tout, oupresque. Peu après l’émeute du quartierde la Villeneuve à Grenoble, consécutiveà la mort d’un jeune dans un échangede tirs avec la police à la suite d’un bra-quage ; et la mise à sac par des gens duvoyage de la gendarmerie de Saint-Aignan, après que l’un des leurs décèdesous les balles d’un militaire, alors qu’iltentait de forcer un barrage routier, M.Frédéric Lefebvre, porte-parole del’Union pour un mouvement populaire(UMP) déclarait : « la très forte absten-tion aux régionales (de mars 2010) a tra-duit de nouvelles attentes des Français,notamment sur la question des gens duvoyage et des Roms. Ils veulent aussiune fermeté totale contre l'économie

souterraine, cancer des sociétésmodernes auquel nous avons décidé dedéclarer la guerre » (Le Figaro, 9 août2010). Imputer à ces questions plus devingt millions d’abstentionnistes, voilàqui est audacieux et mériterait sansdoute de figurer dans les annales de lasociologie politique… Pourtant, si lecaractère fantaisiste du propos ne dis-crédite pas immédiatement son auteur,c’est peut être parce dans les débats surla sécurité, l’outrance l’emporte sou-vent sur la raison. En attestent les décla-rations récentes du gouvernement et denombre d’élus de la majorité, propo-sant de punir pénalement les parents demineurs délinquants récidivistes, dedéchoir de la nationalité française cer-tains criminels, de démanteler 300 cam-pements illégaux de Roms avant le moisd’octobre, et même de sanctionner les

POUR UNE HISTOIRE SOCIALE DE « L’INSÉCURITÉ »À l’heure où la sécurité est érigée en « première des libertés »,l’époque où la violence et la délinquance étaient considérées commele résultat de « ratés » de la socialisation et de comportements donton ne doutait pas que le développement économique et social dupays finirait par les discipliner, semble lointaine et révolue.

DÉLINQUANCE URBAINE, LA SOCIÉTÉ ESTMALADE DES INÉGALITÉSPar ISABELLE LORAND*

N ous militants, élus de proximité, sommes interpellés par les habitants : incivi-lités, délits et même parfois violence dégradent leurs vies déjà si dures. Et faceaux arguments sécuritaires et populistes, les solutions complexes et inscrites

dans le temps sont difficiles à porter. Encore qu’il ne faille pas sous-estimer l’évolu-tion de l’opinion publique. Les caméras et autres outils de surveillance, l’aggrava-tion des sanctions, la multiplication des gardes à vue... commencent à être appré-ciées à leur juste valeur : inefficaces et dangereuses. L’expérience aidant de plus deplus de nos concitoyens considèrent que le cœur du problème est une politiqueextrêmement inégalitaire, que le tous contre tous - nec plus ultra chez les puissants- contamine l’ensemble de la société. Il devient de plus en plus audible que les ser-vices publics de proximité, la présence humaine à l’école comme dans les cagesd’escalier, la qualité des espaces communs, la vie associative, évidemment l’emploiet le pouvoir d’achat... mais aussi la qualité du rapport avec les politiques, la police,la justice, les intervenants sociaux... sont les pistes d’avenir. En un mot, une autreidée du vivre ensemble. n

*Isabelle Lorand est responsable au comité exécutif du PCF des libertés et des droits de la personne

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qui ont des effets concrets, mais leursignification ne peut être séparée, ycompris pour ceux qui en sont victimes,des cadres construits dans lesquels ellestrouvent un sens. Sans même réfléchir ici sur les condi-tions dans lesquelles certains actes sonttolérés dans certains groupes sociaux etprescrits dans d’autres, ni sur les dyna-miques par lesquelles ils deviennentdes infractions pénalement répréhensi-bles, retenons que la transgression de laloi ne suffit pas pour constituer un« problème social ». Nombre de lois etde règlements sont violés quotidienne-ment dans de fortes proportions sanssusciter de mobilisations particulières. Pour comprendre le changementd’échelle qui s’opère lorsque certainesformes de déviances accèdent au statutde « problème social », il faut revenir surle travail de groupes capables de pro-

municipalités qui « ne se conformentpas à leur obligation de sécurité ». Il est vrai que depuis 2002, ce thèmesemble avoir plutôt profité à l’UMP etque l’attention qu’il lui porte estconstant. Qu’on en juge plutôt : entre2002 et 2010, pas moins de treize loisspécifiques ont été votées, plus de qua-rante ont modifié le code de procédurepénale et plus de trente, le code pénal... Pourquoi une telle inflation ? Certainsesprits chagrins feront valoir que leregain actuel d’attention pour la sécu-rité vise à faire peut être oublier leseffets de la crise économique, ou plusrécemment les multiples rebondisse-ments de l’affaire Woerth ou le fortimpopulaire projet de réforme desretraites. L’explication est sans doutejuste, mais elle demeure insuffisante.Depuis la fin des années 1990, l’« insé-curité » s’est en effet imposée commel’une des manières privilégiées pourparler de la réalité quotidienne demilieux populaires qui ne participentau jeu politique que de manière deplus en plus intermittente. Qu’ils’agisse du chômage des jeunes, de l’il-lettrisme, de l’absentéisme scolaire, dela maltraitance, de l’urbanisme ou dela santé mentale, tout semble ramenerinvariablement à la délinquance et à« l’insécurité ». Ce qui révèle que pourun nombre croissant d’élites politiques,mais aussi médiatiques, administra-tives, voire académiques, les comporte-ments d’une fraction des jeunessespopulaires, comme plus largement lavie quotidienne des banlieues ouvrièresen déclin relèvent d’abord de la théma-tique de la sécurité. C’est précisément ce « ça va de soi » (oucette doxa) sécuritaire qu’il faut ques-tionner. Non pas que la violence ou ladélinquance soient dépourvues de réa-lité ou qu’il ne soit pas légitime de s’enpréoccuper, mais parce que la reformu-lation en ces termes de ce qui pouvaitrelever à d’autres périodes de la ques-tion sociale, ne va justement pas de soi.En tout cas, le succès de cette représen-tation commune n’est pas une consé-quence mécanique et inévitable d’une« flambée » de la petite délinquance,invoquée régulièrement pour la justi-fier. Outre le fait que cette flambée restesujette à caution, la « délinquance »comme la « violence », ne constituentpas des catégories immuables et natu-relles. Elle résultent au contraire de pro-cessus sociaux de définition.Il existe en effet des formes de violencesinterpersonnelles (ou contre les biens)

duire des nouvelles catégories de per-ception du monde social. Ce qui revientà dire qu’aux changements objectifs,sans lesquels le problème n’accèderaitpas à l’existence, s’ajoute un travail spécifique d’énonciation et de formula-tions publiques, c’est-à-dire une entre-prise de mobilisation d’acteurs maniantdes catégories universalisantes (hommespolitiques, journalistes, universitaires)qu’il faut chaque fois questionner etmettre à jour. Le terreau sur lequel prospère « l’insécu-rité » comme catégorie de pensée estd’abord celui d’une transformation desconditions de vie de l’ensemble desclasses populaires, sous l’effet du pas-sage à un modèle post-fordiste de pro-duction à partir de la seconde moitié desannées 1970. Les entreprises fortementconsommatrices de main d'œuvre délo-calisent leurs activités dans les pays du

Le projet de «loi d'orientation et de programmation pour la performancede la sécurité intérieure» (LOPPSI 2) fixe les grandes orientations desforces de l'ordre pour 5 ans (2009-2013). Ce texte est devenu le véhi-cule législatif du tournant sécuritaire amorcé par N.Sarkozy le 30 juilletdernier à Grenoble.

Nombre d'amendements ont été retenus par le Sénat qui durcissent sapolitique en matière de répression des délits et des crimes. Le texteorganise ainsi la violation du principe de la proportionnalité des peineset celui de l'individualisation, en aggravant de manière quasi systéma-tique les sanctions pénales déjà existantes.

Elles concernent l'extension des peines planchers aux primo délinquantsréservées jusqu'à présent aux récidivistes, l'aggravation des peines pourles meurtres des policiers avec 30 années incompressibles. La déchéancede la nationalité ainsi que la comparution immédiate des mineurs.

Le projet systématise le fichage, tant des victimes que des témoins, sansparler des personnes ayant été poursuivies mais n'ayant fait l'objet d'au-cune condamnation.

On peut ajouter à cet arsenal la mise en place de 60 000 caméras devidéo surveillance d'ici à 2012 (Cette disposition oblige les collectivitéslocales à développer les délégations de service public à des officines pri-vées, pour un marché très juteux, celui de la surveillance privée) et l’ex-tension du port du bracelet électronique aux récidivistes condamnés àune peine de plus de 5 ans de prison. S'inscrivent dans ce dispositif lesétrangers en attente de leur expulsion pour terrorisme.

Une disposition rend les étrangers qui dérogent aux obligations de présen-tation périodique à la police, passible d'un an de prison. Le non respect del'assignation à résidence est déjà passible pour les étrangers de 3 annéesde prison. L'évacuation d'office pour les caravanes et camping-car visantnotamment les gens du voyage a été étendue aux « campements illicites ».

JEAN-MARIE DOUSSIN

LES MESURES SÉCURITAIRES DE SARKOZY

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ment installés ont tendance à faire blocface aux nouveaux venus, considéréscomme des intrus et stigmatiséscomme des gens à moindre valeurhumaine et morale. La pièce centrale deces représentations est un rapport deforces inégal et les tensions inhérentes àcette situation. C’est en effet parcequ’ils sont bien installés dans les postesde pouvoir locaux (formels dans lesmultiples structures, comme les asso-ciations de parents d’élèves, de loca-taires,… ou informels, comme autorités« morales ») que les établis peuvent stig-matiser les marginaux, qu’ils considè-rent comme une menace pour lesnormes du quartier et les modes de viecommuns. Bien entendu, le groupe desétablis est lui même hiérarchisé et lesrivalités y sont nombreuses. Mais il n’enreste pas moins que tous ses membresont intérêt à maintenir une barrièresymbolique avec les nouveaux venus età limiter les contacts pour éviter de

Sud ou font des efforts d'automatisationet d'informatisation, générant un chô-mage de masse, qui s’est conjugué avecla généralisation du recours aux intéri-maires et aux emplois temporaires. Cesdeux facteurs ont accru la précarisationdes conditions des milieux populairesque l’avènement d’une société salariale(basée sur la croissance économique etun état social fort) avait contribué àréduire. Ce qui a généré simultanémentdes désordres, modifié le cadre danslequel ils étaient perçus et radicalisé lescompétitions au sein de ces milieux. Les désordres urbains, la petite délin-quance ou plus généralement la «débrouille » quotidienne des « jeunessans affectation » ou de certainsmigrants récents sont d’autant plus malperçus dans les quartiers populaires,qu’ils traduisent l’affaiblissement de ladomination des « établis » (established)sur les « marginaux » (outsiders). (Eliaset Scotson, 1997) Les plus ancienne-

déchoir. Quant aux marginaux, aussilongtemps qu’ils manquent de cohé-sion, ils sont incapables de riposter àcette disgrâce collective. Les conflitsinhérents à ces relations de dominationdemeurent habituellement discrets,lorsque les différentiels de pouvoir sonttrès grands ; mais ils peuvent aussi écla-ter au grand jour, sous la forme deconflits continus (ce qui est le cas si lerapport de forces change en faveur desintrus). Et c’est justement ce qui s’estproduit au terme des transformationsqui ont affecté les milieux populairesdepuis le milieu des années 1970. Lesétablis voient, sous le double effet deleur vulnérabilisation sociale et de leurvieillissement, s’affaiblir le contrôlequ’ils pouvaient exercer sur les nou-veaux venus, voire même sur leurs pro-pres enfants. L’occupation des espacespublics, les conflits de voisinages, la fré-quence de comportements qui achop-pent avec leurs propres normes du

La sécurité

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LE POINT DE VUE DE NICOLE BORVO* SUR LA JUSTICE PÉNALELa justice pénale est le reflet des dys-fonctionnements de notre société, dela relégation des plus démunis, del’iniquité entre les plus faibles et lesplus favorisés.

L a dernière grande réforme a prèsde vingt ans. Or, depuis dix ans,droit et procédure pénale ne ces-

sent d’être bouleversés dans leursfondements. L’aggravation des peines- au nom de la « tolérance zéro » : àchaque événement une loi, à chaquecatégorie de population une loi -montre que la petite délinquance estde plus en plus sanctionnée, que l’en-fermement – jusqu’à la détention à viey compris des malades mentaux – esten œuvre, alors que, dans le mêmetemps, on assiste à une dépénalisa-tion rampante de la délinquancefinancière.

Il faut avoir le courage de sortir decette logique, ce qui implique :1- de réinscrire la lutte contre la petitedélinquance dans l’ensemble despolitiques publiques : sociales, éduca-tives, de prévention, d’intégration, deprotection de la jeunesse, de dissua-sion avec une police de proximité.2- de prendre à bras-le-corps àl’échelle nationale et internationale la

grande délinquance : trafic d’êtreshumains, de la drogue et autres pro-duits illicites, phénomènes mafieux,prolifération des armes, qui contri-buent à la petite délinquance et à lagrande délinquance financière.

LA SANCTION PÉNALE DOIT ÊTRE PROPORTIONNÉE, JUSTE ET UTILE La prison doit être l'ultime recours. Ilfaut multiplier les réponses alternativesà l'enfermement et la libération condi-tionnelle qui facilitent la réinsertion.Les courtes peines d'emprisonnementdoivent être transformées en travauxd’intérêt général. Il faut dépénaliser leséjour irrégulier des étrangers, sortir lesmalades mentaux de prison et revenir àl’individualisation des peines (suppri-mer les peines automatiques).Il faut revoir l’échelle des peines,réfléchir sur leur sens, leur utilité,comme sur la prison elle-même pourqu’elle puisse être facteur de réinser-tion et de prévention de la récidive.Toute personne doit être défendue. Laprésomption d’innocence doit être larègle. Il faut limiter drastiquement lescomparutions immédiates, réformer lagarde à vue et abaisser le seuil d’admis-sion à l’aide juridictionnelle. Nul ne peutêtre détenu dans un centre de rétentionsous la seule autorité administrative.

La justice spécifique des mineursjusqu’à 18 ans doit être maintenue.Il faut relancer le chantier d’une plusgrande collégialité des jugements. Dece point de vue, la procédure d’ins-truction par des juges indépendantsreste indispensable. Nous souhaitonsy introduire la collégialité (3 juges parexemple).

Plus fondamentalement, tous lesjuges doivent être indépendants del’exécutif et donc, le parquet doit enêtre soustrait. Le Garde des Sceaux nedoit plus nommer les procureurs niêtre membre du Conseil Supérieur dela Magistrature. La tutelle de la justice sur la policedoit être réaffirmée.Sur les moyens, la France est au 35e

rang en Europe. Le doublement dunombre des magistrats et des person-nels est incontournable.Plus généralement, au-delà de la poli-tique pénale à proprement parler, ilfaut avoir le courage d’abolir les loissécuritaires et rétablir les lois de liber-tés publiques petit à petit remises encause. n

* Nicole Borvo, sénatrice, responsable aucomité exécutif national du PCF des ques-tions : institutions, démocratie, justice.

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quartier leur rappellent à chaque ins-tant ce renversement des rapports deforces. Tout ceci provoque, selon les cas,des tentatives de départ du quartier, unrepli sur l’espace domestique, voiremême des appels aux pouvoirspubliques pour restaurer leur autorité.C’est sur ce terrain que va se déployer le« tournant sécuritaire » des principauxpartis de gauche. Confrontés à une aug-mentation des tensions au niveau local,prenant acte d’une érosion régulière deleurs résultats électoraux dans lesmilieux populaires et d’une croissancesimultanée des partis xénophobes,nombre de dirigeants de la gauche fran-çaise (et européenne) sont arrivés à laconclusion qu’ils ne pourraient « recon-quérir » ces électorats que par un durcis-sement de leurs politiques de sécurité. De là, les différentes mesures qui ren-forcent le spectre des interventionspolicières, judiciaires ou morales. Nonseulement la police et la justice doiventdésormais réguler des comportementsqui ne leur incombaient pas aupara-vant, mais « l’autorité parentale » estdevenue un objet de politique publique.Des « écoles des parents » au chantageaux prestations sociales, il s’agit d’ame-ner (ou de contraindre) les familles àjuguler les indisciplines de leursenfants. Or cette reconfiguration ducontrôle mérite attention. De la même manière que les réforma-teurs sociaux du XIXe siècle essayaientde poser les bases d’une nouvelle formede discipline, les réformateurs sécuri-taires de la fin du XXe et du début deXXIe siècle s’efforcent de rechercherdans l’extension de l’intervention poli-cière, judiciaire et du contrôle, lesmoyens de contrarier les effets des mul-tiples dérégulations qui affectent lesclasses populaires. Théorie de « la vitrebrisée », prévention situationnelle, cou-vre feux, vidéosurveillance, arrêtés anti-bandes ou anti-mendicité,… ne sontrien d’autre que des exemples de cesnouvelles technologies de gouverne-ment dont on attend qu’elles garantis-sent une paix sociale. « Nul n’est responsable d’une émer-gence, nul ne peut s’en faire gloire ; ellese produit toujours dans l’interstice »,rappelle Michel Foucault (Foucault,2001, p. 1012). « L’insécurité » n’est doncpas une intention ou la dernière mani-festation du talon de fer sous lequel lesdominants écraseraient les dominés,mais le résultat non pensé, non voulu etnon coordonné de dynamiques et depréoccupations hétérogènes visant à res-

taurer des formes localisées de disci-plines. Si l’ouvrier indiscipliné ou le pau-vre ont longtemps été des figures typesdes perturbateurs de l’ordre social, c’estaujourd’hui cette fraction de la jeunessesans affectation sociale (souvent repré-sentée sous les traits du « jeune d’origineétrangère, sans emploi, en échec scolaireet/ou délinquant ») qui focalise l’atten-tion. Il ne s’agit plus tant d’assurer sa dis-cipline au travail que de se prémunircontre les désordres qu’elle peut engen-drer dans l’espace public (et dont les vio-lences collectives constituent leparoxysme), dans les écoles, dans lesstructures socio-culturelles, etc. Sous l’effet des dynamiques propres auxchamps politique, médiatique et acadé-mique (et les relations entre ces différentsunivers) ces indisciplines juvéniles sontdésencastrées des contextes locaux danslesquels elles s’inscrivaient, pour devenirdes catégories générales d’appréhension.Elles sont retraduites dans des logiquesdifférentes de celles qui leur avaientdonné naissance et sont universalisées,sous une nouvelle catégorie unifiée etunifiante : l’« insécurité ». Au terme de ce processus, la vision sécu-ritaire s’impose même dans certainsespaces qui essayaient jusque là de privi-légier d’autres approches. Ainsi, la dimi-nution des crédits, les retards systéma-tiques dans le versement des subven-tions aux associations et la priorité don-née à la démolition (ou à la vente) descités HLM constituent de bons indica-teurs d’un lent déclin des perspectivesportées autrefois par les institutions de laVille. De la même manière, les résis-tances que l’on peut observer à ce mou-vement au sein de l’Education nationale,de l’institution judiciaire, voire de lapolice peinent à se manifester collective-ment et pourraient, de l’aveu même deleurs artisans, s’affaiblir encore au gré dela relève des générations d’enseignants,de magistrats ou de policiers. Bien entendu, les pratiques locales decertains maires, tout comme les mobi-lisations de travailleurs sociaux contrele projet de loi sur la prévention de ladélinquance (qui prévoyait dans sespremières versions la levée du secretprofessionnel), ou des praticiens de lasanté mentale contre la détection des« troubles comportementaux » chezl’enfant avant trois ans attestent qu’ilexiste encore de vives oppositions àune appréhension en terme de sécuritéde la précarité sociale ou mentale. Maisces voix paraissent bien minoritairesface à celles appelant au renforcement

du contrôle, des sanctions pénales et del’enfermement. L’analyse des conditions de possibilité etd’émergence d’une doxa sécuritaire, deséléments qui la constituent et de la circu-lation entre des univers aux intérêts etaux logiques spécifiques dans et parlaquelle elle se fabrique et se redéfinit,est donc nécessaire pour éclairer lesdynamiques actuelles. Ce dévoilementconstitue une première étape pourremettre en question les présupposésadmis sans examen qui fondent cettecroyance collective. Ceci est d’autant plus important qu’il nes’agit pas seulement d’une idéologie : surce terrain, les discours se sont transfor-més en mécanismes agissants. Ils ont deseffets pratiques, tant sur ceux qui ont àsubir cette nouvelle configuration disci-plinaire que sur ceux qui sont les agents,directs ou indirects de sa mise en œuvre.Alors que la France connaît des taux d’in-carcération historiques, qu’une fractionnon négligeable des jeunesses popu-laires s’enracine dans une forme d’éco-nomie de subsistance et que nombre deprofessionnels de l’encadrement (édu-cateurs, travailleurs sociaux, animateurs,« médiateurs », etc.) mais aussi de poli-ciers ou de magistrats, semblent décou-ragés par l’ampleur de la tâche qu’onleur assigne, il apparaît urgent de réflé-chir sur les processus à l’œuvre et leurscontradictions. C’est la base de tout pro-jet politique soucieux d’instaurer unordre social plus harmonieux, c’est-à-dire capable d’assurer le bien être de touset pas seulement la discipline dequelques uns. n

* Laurent Bonelli est Maître de conférencesen science politique. Membre du grouped’analyse politique de l’Université Paris-Ouest-Nanterre et du comité de rédaction dela revue Cultures & Conflits. Auteur de LaFrance a peur. Une histoire sociale de « l’insé-curité » (La Découverte, Paris, 2008) et co-directeur, avec Didier Bigo et ThomasDeltombe de Au nom du 11 septembre… Lesdémocraties à l’épreuve de l’antiterrorisme,(La Découverte, Paris, 2008).

Livres :- Bourdieu P., « Les sous prolétaires algériens», Agone n°26/27, 2002, [Les temps modernes,décembre 1962] pp. 203-224.- Elias N. et Scotson J.L., Les logiques de l’ex-clusion, Fayard, Paris, 1997 [1965]- Foucault M., « Nietzsche, la généalogie etl’histoire », in Dits et écrits I, Paris, Gallimard2001.- Rabinow, P., Une France si moderne.Naissance du social, 1800-1950, Paris, Buchet& Chastel, 2006.- Thompson E.P., Temps, discipline du travailet capitalisme industriel, Paris, La Fabrique2004.

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Cette escroquerie intellectuelle n’estpossible que parce que la Gauche,toutes composantes confondues, anégligé jusqu’à ce jour cette dimensiondu combat. Elle doit effectuer une révo-lution culturelle à ce sujet. Le poisson pourrit par la tête. La sociétécontrôlée par la caste du Fouquet’s estdevenue gravement criminogène.Notons qu’il n’existe aucune différenceentre la définition d’un systèmemafieux et celle du capitalisme ultrali-béral. La situation est grave. Refusons lacorruption, l’avènement du «tous pour-ris pourquoi pas moi ? » Un combatpour les valeurs de la république, pourle service public et contre les dérivesmafieuses, devient urgent. Mais on nepeut combattre que ce qu’on a identifié.Ouvrons donc sans délai un atelier pourétudier et débattre sans tabou, afin dedéfinir collectivement un diagnostic dela situation française. Inventons denouvelles militances citoyennes à lamesure de ce combat. n

* Serge Garde est Grand reporter, ancienjournaliste à l’Humanité. Auteur du livre :« Le crime paie… Lettre ouverte à celles etceux qui se désespèrent de voir la Gauchegalérer sur l’insécurité » (éditions duSurvenir), téléchargeable gratuitement sur :survenir.unblog.fr.

Par SERGE GARDE*

Parler d’insécurité ferait le lit de laDroite ? Cela restera exact si nouspersistons à en discuter de façon

défensive, sur le terrain que le pouvoir aperversement balisé, en acceptant delimiter le débat au seul dosage du cock-tail explosif prévention/répression. Carcela revient à véhiculer l’image sublimi-nale d’une France saine et menacée surses marges par les pauvres, les étran-gers, les jeunes non conformes, les fous,les Roms… Liste des boucs émissairesnon exhaustive.Ce pseudo diagnostic de la Droite induitl’idée que l’insécurité se limite auxdélinquances d’inadaptation et d’exclu-sion sociales. Certes elles sont visibles etempoisonnent le quotidien du plusgrand nombre. Nous devons apporterune réponse, y compris répressive, à cestransgressions. Le terme sécuritaire doitcesser d'être péjoratif à gauche, car cesont les plus fragiles qui vivent l'insécu-rité au quotidien, tout en servantd'épouvantail aux beaux quartiers. Maisnous devons en changer le contenu, enrendant visible dans le même temps lesautres criminalités invisibles et indo-lores (à court terme), mais qui ruinent lepays : les pratiques financières immo-rales, légales ou non. C’est la mise encohérence de ces deux types de crimeset délits qui doit fonder, à Gauche, uneapproche novatrice du problème. Ils’agit de réexaminer l’ensemble destransgressions et de repenser la hiérar-chie des sanctions qu’elles méritent :pourquoi une personne qui vole pourla deuxième fois un téléphone portableécoperait-elle, peine plancher oblige,de deux ans de prison ferme, alors queles patrons qui ont exposé pendant desdécennies des milliers de salariés auxpoussières d’amiante qu’ils savaientmortelles depuis 1907 bénéficieraientd’une scandaleuse impunité ? Landrureste un artisan du crime à côté dupatronat de l’amiante ! La crise des sub-primes, toutes ces hypothèques fraudu-leuses revendues comme des bons duTrésor, a précipité la planète dans un

gouffre financier. N’était-ce pas, commel’a souligné l’économiste J-K. Galbraith,une « fraude financière massive » ?Pourquoi les responsables échappent-ils aux lourdes condamnations prévuespour les faux monnayeurs ? Ne doit-on pas, en matière financière,rendre illégal ce qui est immoral ?C’est pour éviter cette mise en cohé-rence que la Droite focalise l’attentionsur les seules délinquances d’inadapta-tion et d’exclusion sociales. Pour proté-ger les lobbies financiers, elle se faitcomplice des criminalités écono-miques. Pour être disponible, l’argentsale généré par l’ensemble des trafics(psychotropes illégaux, contrebanded’armes, fraude fiscale, trafic d’êtreshumains, détournement de l’argentpublic, etc.) doit être blanchi. Pour cela,il passe par les mêmes tuyaux : ceux dusystème financier, des banques et deleurs filiales dans les paradis fiscaux.Prétendre lutter contre le crime sanss’attaquer au système bancaire relèvedu mensonge. Et pourtant, la Droite estencore perçue comme la plus compé-tente pour lutter contre l’insécurité !

D’URGENCE, REPENSER L’INSÉCURITÉSi l’insécurité au quotidien est visible et empoisonne le plus grandnombre, d’autres criminalités invisibles et indolores ruinent le pays :les pratiques financières immorales, légales ou non. La mise encohérence de ces deux crimes et délits doit fonder, à Gauche, uneapproche novatrice du problème.

La garde est vue est une mesure privative de liberté et doit donc demeu-rer exceptionnelle. Elle est aussi le premier acte dans une procédurepénale et aura des effets déterminants. Pourtant, on a atteint un seuilinsupportable : 900 000 gardes à vue en 2009, 54 % de plus qu’en2000.La Cour Européenne des Droits de l’Homme en est venue à obliger laFrance à modifier sa législation. Mais le projet de loi rendu public estloin du compte.Nicole Borvo, sénatrice, a pour sa part déposé une proposition de loipour limiter et encadrer le recours à la garde à vue. Cette proposition la circonscrit au cas d’indices graves et concordantspour un crime ou un délit passible d’au moins cinq ans de prison, la sup-prime pour les mineurs et met fin aux dispositions exorbitantes du droitcommun en matière de terrorisme et de criminalité organisée. Elle ren-force les garanties procédurales et le respect de la dignité des personnesgardées à vue avec l’assistance d’un avocat dès la première heure avecaccès au dossier, la fin des fouilles au corps et leur remplacement pardes moyens de détection électronique.

RÉFORMER LA GARDE A VUE

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Malgré des effets d’annonce,l’état se désengage de plus enplus en matière de « sécurité »et de prévention.

Par GILLES GARNIER*

L a baisse des effectifs de policiersnationaux est continue et pourtantle gouvernement fidèle à la notion

d’Etat « édicteur » et contrôleur décided’une politique de plus en plus sécuri-taire et liberticide (projet de « loid’orientation et de programmationpour la performance de la sécurité inté-rieure » dite LOPPSI II.Cela se traduit, entre autres, par un véri-table transfert de compétences, avecdes charges financières supplémen-taires pour les communes qui devien-nent insupportables pour les collectivi-tés à faibles ressources et pose un véri-table problème d’équité entre tous lesterritoires.Le rôle d’une collectivité n’est pas deprendre en charge, même en partie, lapolice de proximité démantelée parNicolas Sarkozy. Les habitants n’ontpas à payer deux fois, une fois avecleurs impôts sur le revenu et unedeuxième fois avec les impôts locaux.En toute responsabilité, et avec desvaleurs de solidarité, et de justicesociale, nous devons apporter desréponses différentes, durables et inno-vantes à la question de la tranquillitépublique.Il y a un besoin urgent de recréer unepolice de proximité. Cela pourrait sefaire en « nationalisant » les policesmunicipales. Nous avons aujourd’hui18 500 policiers municipaux dans toutela France, c’est une bonne base pourreconstruire une police de proximité,avec de vraies tâches de proximité. Maissurtout avec l’engagement de maillertout le territoire et pas seulement defavoriser les communes riches qui sesont dotées de policiers municipauxparfois mieux équipés que la policenationale comme à Epinay-sur-Seinepar exemple.Cela permettrait également de répon-dre aux revendications des policiersmunicipaux qui ne veulent plus êtreconsidérés comme des policiers deseconde zone et d’obtenir ainsi des for-

mations, des salaires identiques à leurscollègues nationaux.Cette police de proximité devra travail-ler en lien étroit avec tous les acteursdes collectivités et les élus. Une bonnepolitique de contractualisation entrel’Etat et les collectivités du type CLSPDne peut fonctionner que si les co-contractants se respectent et met-tent des moyens pour le moins aussiimportants.Il est important de se donner desambitions et des moyens pour retisserle dialogue avec les populations, pourremettre du service public au cœur descités, plus de gardiens dans les immeu-bles HLM.Des médiateurs de proximité et descorrespondants de nuit doivent pou-voir assurer une présence quotidiennedans les quartiers auxquels ils seraientaffectés et dans lesquels ils seraientreconnus comme des interlocuteurslégitimes, que ce soit par les habitants,par d’autres institutions et les acteursdes quartiers, services municipaux,bailleurs sociaux, secteur associatif,commerçants, éducation nationale,police nationale, etc.Leur intervention : écouter et échangeravec les habitants. Créer ou recréer dulien entre les habitants, les générations,les institutions publiques. Réactiver les

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solidarités, les attitudes civiques quoti-diennes. Informer, orienter, sensibiliser,expliquer, prévenir les incivilités et lesdégradations. Contribuer à la vie et àl’animation du quartier.La mise en place de maison de la justiceet du droit avec des professionnels doitaider aux dépôts de plaintes, à la miseen œuvre des procédures utiles ou àl’orientation vers une médiation quandelle est possible. Mais là aussi l’Etataprès en avoir été l’instigateur se désen-gage de ses structures, elles ont besoinde personnel qualifié et formé.Mais avant tout, faisons le bilan dans lagestion des communes des dépensesliées à la culture, à la jeunesse, au sport,aux loisirs des jeunes, aux missionslocales... Voyons si dans les villes où unepolice municipale a été crée les moyenspour la prévention primaire ont étéaccrus, stagnent ou progressent ? Notreprojet de société doit volontairementinverser la vapeur. À force de tout faireles maires et les municipalités voientleurs missions être perverties. Ladroite veut les voir jouer le rôle de shérifet ainsi se défausser sur eux d’une res-ponsabilité régalienne. n

*Gilles Garnier, membre du Conseil nationaldu PCF, il est conseiller général de la Seine-Saint-Denis.

TRANQUILLITÉ PUBLIQUE, LA POLICE MUNICIPALE UNE FAUSSEBONNE RÉPONSE

Par PHILIPPE AOUSTIN*

L a CGT a réaffirmé le rôle premier depolice de proximité et de préventionde la police municipale. Précisant

toutefois, que ce besoin incontournablede police de proximité ne peut et nepourra jamais être assuré que par lespolices municipales. Le rôle de la policenationale et de la gendarmerie, en cedomaine, restant primordiale. 20 000Policiers municipaux ne pourront jamaisse substituer aux 92 000 gendarmes et

150 000 policiers nationaux. La CGT atout de suite soulevé le problème desmoyens financiers accordés aux policesmunicipales, dans le cadre de la réformedes collectivités territoriales (suppressionde la taxe professionnelle, etc…). Lesauditeurs de l’IGA nous ont alors interro-gés principalement sur la nécessité depasser, dans le cadre des conventions decoordination, d’une coopération théo-rique à une coopération pratique.La CGT partage cette analyse : il faut plusd’échanges de renseignements, des

LE RÔLE ET LE POSITIONNEMENT DES POLICES MUNICIPALESSuite à une audition de la CGT « Police Municipale » par l'inspectiongénérale de l'administration : Philippe Aoustin revient sur le rôle dela police municipale avec son regard de syndicaliste.

> SUITE P.12

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La sécuritéformation professionnelle, une unifor-misation de celle-ci sur tout le territoire,tout en conservant et améliorant des for-mations spécifiques répondant à desbesoins locaux. Le CNFPT et ses déléga-tions régionales doivent donc conserverun rôle essentiel dans cette formation,tant initiale que continue. Cinq ou sixdélégations pouvant devenir pôle deréférence « Police municipale », pôlesqui pourraient, de plus, s’appuyer surcinq ou six plateaux techniques.La CGT sera vigilante sur la fusion de laformation des gardes champêtres etcelle des policiers municipaux. La délé-gation CGT souhaite que les différentesétudes en cours sur la police municipale(rapport Ambroggianni, auto saisine duCSFPT, DGCL et formation, rapportLafargue, en cours, avec les syndicats dela police nationale, audit de l’IGA)soient concentrées en un seul point, parexemple à la Commission Consultative

des Polices Muni cipales. Cela permet-trait un meilleur suivi et enfin, des avan-cées réelles. Nos auditeurs nous ontpromis la restitution de ce nouveau rap-port : début novembre 2010. La déléga-tion CGT est revenue fortement sur lanécessité absolue d’une meilleurereconnaissance sociale du travail despoliciers municipaux. Nos nouvellescompétences, nos nouvelles missions(la loppsi 2 nous en rajoute encore) doi-vent être suivies d’avancées sociales :augmentations salariales, ISF, recon-naissance de la pénibilité (voir lesrevendications sociales de l’intersyndi-cale). Sinon, faudra-t-il envisager unboycott de ces nouvelles compétencespar les policiers municipaux ? n

* Philippe Aoustin est responsable nationalde la branche police municipale de la CGT.

LE DOSSIERmoyens radios croisés, il faut obtenirl’accès « aux fichiers ». Les échanges d’in-formations doivent être réciproques.Mais tout ceci doit se placer dans lecadre d’une police municipale com-plémentaire de la police nationale oude la gendarmerie nationale, mais nondans le cadre d’une police municipalesupplétive et de substitution à lapolice nationale et à la gendarmerienationale. La baisse des moyens maté-riels et humains de ces deux dernièresannées nous y poussant RGPP, trans-ferts de compétences…). Partant duconstat qu’il n’existe pas une policemunicipale, mais des polices munici-pales, les deux parties : IGA et CGT, sonttombées d’accord sur le fait qu’il exis-tait, donc, plusieurs doctrines d’em-plois différentes. Les besoins despolices municipales variant d’une col-lectivité à une autre.Ce qui implique, par exemple, pour la

• celui de la multiplication des commis-saires et gradés.Je le constate au quotidien dans uneville comme La Courneuve, le travail dela police est une tâche difficile qui exigeconnaissance du terrain, discernement,esprit d’initiative.

Cela appelle des compétences, un enca-drement permanent qui fait aujour -d’hui défaut, afin de mener de pairel’exigence du respect des lois avec lerespect dû à chaque citoyen, et notam-ment cette jeunesse de nos quartiersque notre société ignore. Celui de la sta-bilité des effectifs afin, là encore, dedonner la continuité indispensable àl’action de la police sur le terrain. Celapose à l’évidence le nécessaire débatavec les organisations syndicales despoliciers afin de construire desréponses durables. En parallèle, il nefaut pas se le cacher, c’est revisiter toutel’intervention publique qu’appelle cedébat sur la sécurité.

Les fondements de ce problème sontaussi à rechercher dans la crise de nossociétés. Ce n’est pas un hasard s’il y aplus de violence là où la misère est laplus grande. Il ne s’agit pas de caution-

ner quoi que ce soit, mais on ne peut,non plus ignorer cette réalité.

Aussi, je pense que le développementd’éducateurs spécialisés, un renforce-ment des moyens de la ProtectionJudiciaire de la Jeunesse sont indispen-sables. De même, l’école qui aujour -d’hui, est plus une institution à repro-duire les inégalités sociales, qu’à lescorriger, est interpellée sur sa capacitéà prendre en charge le décrochage sco-laire, les liens et accompagnementindispensables pour les familles. Toutcela appelle un vaste débat citoyen pourla reconquête du droit de vivre en paixet en sécurité dans les villes, en asso-ciant les élus, les associations, les cher-cheurs, les professionnels de la justice,les travailleurs sociaux, les citoyens, lesforces vives des villes et des quartiers,les enseignants et les personnels del’éducation nationale, les jeunes, lesparents. n

* Gilles Poux est maire de La Courneuve.

Par GILLES POUX*

U n premier constat, les 20 lois rela-tives à la sécurité adoptées sousl’impulsion de Nicolas Sarkozy

depuis 2002 n’ont rien changé.Le douloureux vécu des habitants, de lajeunesse première victime de la vio-lence ne fait que croître.Et derrière les déclarations péremp-toires, un constat s’impose – La Francecompte 12 000 policiers de moinsdepuis 2004, et le rôle dévolu à la PoliceNationale se réduit à la répressionoubliant la prévention et la dissuasion.

Il est donc urgent de revenir à une vraiepolice de proximité impliquée au quoti-dien dans les quartiers, capable de lierdes liens avec les habitants, les servicespublics, les commerçants pour redon-ner une cohérence à l’action publique.Mais cela suppose de relever quelquesdéfis :• celui de l’arrêt des baisses d’effectifs• celui de la répartition des forces depolice sur le Territoire National. En effet,50% des actes délictueux se déroulentsur 10% du Territoire National, or à l’évi-dence, l’organisation de la police neprend pas en compte cette réalité.

SUITE DE > LA P.11

COMMENT REPRENDRE PIED DANS LE DÉBAT SUR LA SÉCURITÉ ?Comment répondre aux attentes légitimes des citoyens et notamment des plus précaires, souvent lesplus en butte avec les phénomènes de délinquance ?

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Il y a urgence à sortir sur cesujet, des dogmes et des procèsd’intention et « dépénaliser » ledébat !

Par SANTIAGO SERRANO

L’usage des psychotropes (deψυχη - âme sensible, esprit - etτροπος - mouvement, transfor-

mation -) est universel. De tous tempset dans toutes les civilisations, afin demodifier leur humeur, enflammer leursrêves et animer leur créativité, obtenirdétente ou excitation, s'évader dumonde ou trouver la capacité de luifaire face, les hommes ont utilisé des« plantes magiques ». De fait, et jusqu’àce jour, il ni y a pas traces de sociétéshumaines n’ayant intégré des subs-tances psychoactives à leur fonctionne-ment culturel.

LES FONDEMENTS DE L’USAGE DESSUBSTANCES PSYCHOACTIVESLes usages sont tant liés à des rituelsculturels propres aux réseaux de sociali-sation des sujets concernés, qu'à larecherche de plaisir, de prises de risqueet à un phénomène d'automédicationpour faire face à des tensions sociales etaffectives.Les substances illégales, une situationhors contrôle du point de vue écono-mique, social…Le besoin d’ivresse, les tensions affec-tives et sociales, l'utilitarisme et l'his-toire des drogues, en particulier celle deleur prohibition, montrent que le traficn'est pas le fruit de la mise à jour par lui-même d'une substance illégale maisplutôt celui de la prohibition d'unesubstance légale, correspondant à uneconsommation probante qui lui estantérieure et qu'il contribue à étendre.Il ne peut-être lucratif que si le produitrépond à un besoin. On ne peut accor-der au trafic illégal actuel de drogue, néau XXe siècle, la responsabilité de l'en-gouement pour l'usage de psychotropesdans les civilisations si ce n'est quant àla qualité sociale, de par la clandesti-nité, de cet usage et aux risques encou-rus par les produits qu'il distribue endehors de tout contrôle sanitaire.Par contre en s'appuyant sur ce que lesspécialistes de la distribution commer-ciale appelle une valeur sûre, la culturede l'ivresse et l'apport de « molécule-

panacée » dans la régulation des ten-sions psychiques et sociales et pour lacompétitivité des individus, le trafic, àl'échelle internationale, développe unetrès forte puissance financière qui n'estpas sans représenter un danger pour lessystèmes démocratiques et pour la sta-bilité économique mondiale.De fait, la drogue répond simplement aujeu mondial de l'offre et de la demande,constitue bel et bien un marché qui necesse de croître depuis plusieurs décen-nies, produisant un chiffre d'affaire etdes bénéfices extrêmement importantsqui finissent blanchis et investis, dansun souci de rentabilité à court terme,dans les places boursières les plusactives des cinq continents. Plusieursétudes montrent notamment commentce blanchiment privilégie la spéculationaux dépens de la production, accentuantla formation de bulles immobilières etboursières jusqu'à des situations de crise.Sur le plan local, l’économie illicite com-posée, dans les zones de relégationssociales, majoritairement de « petitesmains » du trafic dont la récente étude deChristian Ben Lakhdar(1) (Universitécatholique de Lille – 2009) montre queles gains excédent rarement le smic, posed’importants problèmes de sécuritépublique dus au fonctionnement d’unmarché ultralibéral dont le propre est laviolence des rapports concurrentiels.Le traitement actuel de cette questionbasé sur une approche pénale et répres-sive quasi-exclusive a un impact limité surson expansion qui suit la courbe de l’ex-clusion sociale, éducative et économique.

SITUATION SOCIALE ET SANITAIRELe cadre légal renvoyant à la clandesti-nité l’approvisionnement et l’usage desdrogues illicites, les consommateurs lesplus fragilisés et dépendants se retrou-vent marginalisés socialement avec unfort marquage pénal de par les activitésdéployées pour l’obtention du produit(vols, trafic, prostitution) et une situa-tion sanitaire critique liée à leurs condi-tions de consommation.L’épidémie du Sida « a permis », dans la2e moitié des années 90, une ouvertureavec la politique de réduction desrisques (distribution de matériels deconsommation stériles, structures d’ac-cueil sans conditions pour l’aide à lasurvie, distribution de produits de subs-titution aux opiacés…) dont les résul-tats ont été spectaculaires sur les plans

de l’amélioration de l’état de santé et dela situation sociale d’une partie impor-tante des usagers en difficulté ainsi quesur celui de la baisse des overdoses, duSida et du trafic d’héroïne.Cependant cette politique est « restée aumilieu du gué » et une frange consé-quente d’usagers énormément vulnéra-bles continue « d’échapper » au disposi-tif dans un état sanitaire et social forte-ment dégradé (VIH, hépatites C, squat,scènes publiques de consommation,seringues abandonnées, deal, prostitu-tion, violence, misère extrême…).

QUE FAIRE ?Tout d’abord, et de façon urgente, com-pléter la palette des réponses sanitairesà travers l’installation de salles deconsommation à moindre risque dontune récent rapport de l’INSERM (juin2010), après une étude de ces structuresen Europe, au Canada et en Australie,préconise l’expérimentation en Franceau regard de leur plus-value en termesde santé, de sécurité publique et decoûts financiers.Le rapport montre l’efficacité de cetteréponse pour atteindre les usagers lesplus éloignés tout en ne notant aucuneaugmentation des consommations etdes trafics.Ensuite décriminaliser l’usage dedrogue à l’instar de nombre de nos voi-sins européens.Faire de l’usager de drogue un délin-quant apporte, après 40 ans d’applica-tion de la Loi du 31 décembre 1970 quile désigne comme tel, plus de pro-blèmes que de réponses à cette ques-tion sociale.Enfin répondre à cette question : éradi-quer les drogues est-il un objectif attei-gnable ?Si ça n’est pas le cas il faut se poser, àtout le moins, la question et les modali-tés de leur contrôle.Mais pour pouvoir le faire il y a urgenceà sortir sur ce sujet, des dogmes et desprocès d’intention et « dépénaliser » ledébat ! n

(1)Commande de l’Observatoire Françaisdes Drogues et des Toxicomanies (OFDT).Plusieurs études antérieures, dont MichelKokoreff (Paris 5 – 2005) et Nacer Lalam(CNRS – 1998), tirent à plusieurs années d’in-tervalles, les mêmes conclusions.

* Santiago Serrano est élu municipal auBlanc-Mesnil.

UN MONDE SANS DROGUES ?

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La sécuritéLE DOSSIERLA GUERRE AUX FAMILLESAURA-T-ELLE LIEU ?Dans la vaste entreprise enga-gée par le gouvernement pourrejeter sur d’autres la responsa-bilité de son échec en matièrede sécurité, deux catégoriessemblent occuper une place dechoix : les maires de gauche,accusés de laxisme et les mèresde famille, jugées inaptes à tenirleurs enfants.

Par IAN BROSSAT*

Des maires aux mères, un même dis-cours et une même stratégie : tousresponsables, sauf l'Etat. Etrange

tour de passe-passe qui permet à ungouvernement de se dégager de touteresponsabilité dans un secteur régalienen renvoyant la faute aux élus et auxfamilles. Autant la réplique à la mise encause des édiles de gauche n’a pastardé, autant les attaques contre lesparents « défaillants » sont restées sansréponse forte. Pourtant, nous assistonsdepuis quelques mois à une stigmati-sation des familles qui dépasse l’imagi-nable. Qu’on mesure l’arsenal répressifdéployé en moins d’un an à l’encontredes parents jugés « démissionnaires » :en janvier 2010, l’Assemblée Nationaleaccordait aux préfets le droit d’établirun couvre-feu pour les mineurs demoins de 13 ans entre 23h et 6h. En Juin2009, elle adoptait en première lectureune proposition de loi d’Eric Ciottivisant à suspendre les allocations fami-liales des parents jugés défaillants. Unmois plus tard, le même député propo-sait que les parents des mineurs délin-quants puissent être condamnés à 2 ansde prison. Où s’arrêtera l’escalade ? Letemps où la droite était réputée défen-dre la famille est bien révolu. Tout sepasse en réalité comme si elle avaitcessé d’aimer la famille dès lors qu’ellene correspond plus à l’idée qu’elle s’enfait. Elle aime peut-être la famille, unecertaine idée de la famille, elle n’aimepas les familles. Comme souvent, EricZemmour présente l’avantage de pous-ser la logique jusqu’au bout : il suggé-rait, en avril dernier, de « supprimer cer-

taines allocations aux mères seules »pour en finir avec « cette plaie » queconstituent les familles monoparen-tales. Ce discours n’est pas neuf. C’estune vieille rengaine entonnée par lesconservateurs américains lors desémeutes de Los Angeles, en avril 1992,pour expliquer la vague de violences. Ilfut repris en février 1993 lorsque deuxenfants de Liverpool en tuèrent unautre. Pourtant, contrairement à unpréjugé aussi tenace que faux, lesenquêtes prouvent que les famillesmonoparentales ne sont pas plus cri-minogènes que les autres.Si elles méritent bel et bien une atten-tion singulière de la part des pouvoirspublics, c’est d’abord parce qu’elles sontplus que les autres exposées à la préca-rité. Dans bon nombre de paysd’Europe, cette question est partie inté-grante du débat politique. L’augmen -tation des familles monoparentaless’accompagne de mesures ciblées et depolitiques spécifiques. En France, riende tel. Pendant sa campagne présiden-tielle, Nicolas Sarkozy avait promis d'ac-corder les allocations familiales dès lepremier enfant. De cet engagementcapital pour nombre de mères qui élè-vent seules leur enfant, il n'est désor-mais plus question. L'heure n'est mani-festement pas à l'attribution de nou-velles allocations. Elle est plutôt à larecherche des conditions permettant desupprimer celles qui existent déjà. Qu’on s’entende bien : qu'il faille redon-ner de l'autorité aux adultes dans lesquartiers les plus exposés à l'insécurité,j’en suis convaincu. Qu'une bonne par-tie de la solution aux problèmes de tran-

quillité publique passe par une revalori-sation du rôle des parents, c'est une évi-dence. Mais qui peut imaginer qu'onatteindra cet objectif en jetant en pâtureles parents les plus en difficulté ?Curieuse idée que celle qui consiste àpenser - ou plutôt à faire croire - qu'onrevalorisera le rôle des adultes en lespointant du doigt et qu'on leur permet-tra de se faire respecter en les mettanteux-mêmes sous tutelle. C’est un toutautre chantier qu’il faudrait engagerpour cela. C’est toute la question del’aide à la parentalité qui mériteraitd’être posée. D’ores et déjà, unemyriade d’expériences locales se sontaccumulées au cours des dernièresannées. A Paris, dans le 18e arrondisse-ment, des écoles de la Goutte d’Or ontainsi mis en place un système permet-tant aux parents de suivre avec unesemaine d’avance les cours qui serontdonnés à leurs enfants. On fait ainsid’une pierre deux coups : les parentssont mieux à même d’aider leursenfants à faire leurs devoirs, et oncontribue surtout à modifier le regardque les petits portent sur eux. ABobigny, une Maison des parentsaccompagne et soutient les famillesdans leurs démarches administrativeset leur apporte un soutien psycholo-gique individuel. On a là les prémissesde ce qui pourrait constituer un vérita-ble service public de la parentalité.C’est aussi sur ce terrain-là que sejouera la capacité de la gauche àconstruire une alternative. n

* Ian Brossat est Président du groupe PCF/PGau Conseil de Paris, nouveau responsable dela sécurité pour le Conseil national du PCF.

CONCEVOIR UN PROJET DE VILLE SOLIDAIRE Comprendre les facteurs urbains qui agissent sur l’insécurité c’est pren-dre la mesure de l’écart qui s’est creusé entre les mutations urbaines etla situation de relégation que connait une partie de la population.

Par JEAN-MICHEL DAQUIN*

L a première des violences urbainesc’est celle que l’environnementpeut infliger à ses habitants et en

premier lieu la jeunesse : un habitatdégradé ou inadapté, des cités séparéesde la ville, un espace public inexistant.C’est aussi la coupure physique avec laville de tous, des transports insuffisantsen nombre et en rythme, des infra-structures (autoroutes, faisceaux ferrés)

qui fragmentent et isolent des partiesentières du territoire. Les logiques deséparation se sont exacerbées. Lespopulations qui en avaient les moyensont quitté les quartiers défavorisés, lesplus riches vivent entre eux, les pluspauvres sont assignés à résidence. C’estla ville à 3 vitesses et la primauté del’entre soi contre le vivre ensemble.Les réponses à apporter aux questionsd’insécurité sont multiples et transver-sales, elles sont économiques et sociales

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VIOLENCE À L’ÉCOLE : DES CLÉS POUR UN DÉBAT PIÉGÉFace aux actes de violence qui peuvent exister, notamment en collège ou lycée, la droite aimerait bienenfermer le débat dans des choix dichotomiques : soit le « laisser faire » qu’elle attribue à la gauche,soit une politique sécuritaire contre les jeunes qui « sont » violents. Or, ces jeunes ne « sont » pas nésviolents, ils le sont devenus.

mais aussi spatiales. Agir sur les quar-tiers ne suffit plus. La ville a changéd’échelle, la vie des citadins ne se pra-tique plus aujourd’hui seulement àl’échelle de son voisinage mais aussi àcelui des métropoles. Il faut refaire dulien, travailler au maillage du territoire,développer et diversifier les modes dedéplacement pour permettre à chacund’user de tous les services, équipe-ments et lieux de production que peutoffrir la ville contemporaine. Lorsquedes quartiers sont isolés et monofonc-tionnels, c’est l’enfermement et un ter-

rain propice à des logiques de groupes. La question de l’espace public est fon-damentale. Il ne s’agit pas seulementd’embellissement du cadre de vie, maisdu développement de nouveaux lieux desociabilité accessibles à tous. L’espacepublic ça n’est pas seulement la place oula rue de son quartier. La mixité urbaine,l’emploi ne peuvent se résoudre unique-ment au lieu de la résidence. En ce sensle droit à la mobilité est fondamental. Concevoir un projet de ville, solidaire,pensé à toutes les échelles est unecondition pour casser les logiques

ségrégatives qui nourrissent le rejet del’autre et l’insécurité. Il faut créer denouvelles polarités, sortir de la dualitéville-centre/périphérie, fabriquer de l’in-tensité urbaine au cœur même des ban-lieues, redonner du sens commun. Pourun grand nombre d’habitants la repré-sentation qu’ils se font de leur espace devie est limitée à leur cité, à leur quartier.Aujour d’hui chacun devrait pouvoiravoir le sentiment d’appartenir à lamême ville et donc à la même société. n

* Jean-Michel Daquin est architecte urbaniste.

Par STÉPHANE BONNÉRY*

Dans la situation actuelle, on ne peutlaisser faire, et quand les sanctionssont nécessaires, ou les mesures

d’urgence comme les affectations dansles « dispositifs relais » par exemple, il fautles prendre. Mais pas pour que la sociétése débarrasse de sa responsabilité enversces jeunes : pour œuvrer plutôt à ce qu’ilsaient l’occasion de comprendre ce quesont la scolarité et la formation intellec-tuelle et ainsi préparer réellement unretour vers une vraie scolarisation jusqu’à18 ans qui les dote des instruments deleur développement intellectuel et desoutils de pensée indispensables à leur vied’adulte. Or, ces dispositifs d’urgencen’ont pas les moyens de le faire, et n’ontpas réellement cette mission aujourd’hui.Aucun portique ni détecteur ne rempla-cera les personnels sur de vrais statuts etformés pour renouer le dialogue avec lajeunesse qui se sent reléguée.Toutefois, les communistes portent unautre objectif que de traiter les problèmesune fois que ceux-ci se sont produits. C’estinefficace : pendant ce temps, le systèmecontinue à fabriquer de l’incompréhen-sion et du ressentiment des jeunes enversl’école. Sanctuariser les établissementsrepose sur l’idée que l’école est envahie del’extérieur par les problèmes. Alors que lesmauvaises conditions d’enseignementfabriquent elles aussi le ressenti et la vio-

lence, elles laissent penser aux jeunes queles comportements extérieurs ont unepertinence dans l’enceinte scolaire.Voilà quelques points sur lesquels nospropositions prennent le contre-piedde la politique de la droite.1) L’école unique, commune, contre larelégation et l’élitismeDémanteler la carte scolaire et exfiltrerles « élèves méritants » des quartierspopulaires, c’est renforcer la marginali-sation de ces établissements, le senti-ment d’abandon et de révolte, donc laviolence. Recréons une carte scolaire,plus juste que ce qu’elle existait, en lienavec des politiques d’aménagement duterritoire plus justes.2) Pas de fatalité ni de sanctuarisation,relancer une politique éducativeLes recherches le montrent, les collé-giens et lycéens violents le sont souvent :• par dépit, leurs résultats catastro-phiques les poussant à la révolte et audécouragement ;• par inacceptation de la forme desocialisation scolaire car ils ne l’ont pasacquise et n’en comprennent pas lebienfondé.C’est l’appropriation ratée de ce quel’école devait leur transmettre commedispositions à apprendre, donc à réus-sir, à comprendre le sens de ce qui estenseigné. La réponse principale doitdonc être dès le plus jeune âge, avantque les problèmes se posent par de la

violence, le défi de l’enseignement àtoute une classe d’âge des outils del’émancipation intellectuelle et dupouvoir que procurent les savoirs.Ainsi on comprend l’école au lieu de larejeter. Il faut la transformer pourqu’elle remplisse mieux cette mission.Les règles scolaires (se tenir correcte-ment, écrire avec netteté, etc.) doiventmoins être présentées comme uneinculcation moraliste qui suscite le rejetque comme une nécessité pour appren-dre. C’est surtout, avec une rechercheen éducation et une formation d’ensei-gnant au niveau que les activités d’en-seignement passionneront les élèvespour que ces règles, allant de pair avecl’exigence intellectuelle, apparaissentcomme logiques aux enfants. Il fautaussi qu’ils apprennent vraiment pouréviter le dépit ultérieur.Il faut du temps pour former l’enfant enélève apprenant : donc dès les pre-mières classes de maternelle au lieu deles supprimer, dans l’école élémentaireet le collège au lieu de supprimer desheures en les renvoyant à des optionshors du « socle commun ».L’école républicaine, il y en a plusieursversions : contre la trique fataliste,créons les conditions de l’éducation etde la démocratisation en amont. n

* Stéphane Bonnery est responsable éduca-tion recherche, Formation/Savoirs.

Dans deux mois : synthèse ! Avec les responsables nationaux, nous travaillerons à une fiche de synthèse permettant de résumer sur chaque dossier traité, et ce deux mois après, le pointde vue du PCF. C'est le temps nécessaire pour recueillir avis, propositions, critiques. Vous pouvez être acteur, actrice, de cette rubrique. Si vous souhaitez partager une expérience, faire partde votre point de vue sur tel ou tel sujet, vous pouvez le faire par mail. Nous publierons certains extraits ou textes qui nous serons parvenus. Adresse mail : [email protected]

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Si ça pense fort (on n'a pasdit que ça pense bien, c'est uneautre histoire), il y a à cela au moinsune double raison. Le monde est deplus en plus complexe, indéchiffra-ble et tous les acteurs de la viepublique ont besoin de s'y retrouver,au moins de poser des repères.L'autre aiguillon, c'est la perspec-tive de 2012. Cette séquence élec-torale obsédante pousse à unelongue préparation. L'UMP commele PS ont besoin de montrer qu'ils serenouvellent, qu'ils innovent, semodernisent...

LE SOCLE LIBÉRALA la présidentielle de 2007, l'UMPavait pris un temps d'avance. Sousl'impulsion du couple Sarkozy-Fillon, ce parti avait décliné pen-dant des mois, lors de séminaires etd'ateliers, une série de thématiquesnouvelles ; la droite avait dépous-siéré et décomplexé son argumen-taire. Son insistance sur l'impor-tance de la bataille d'idées jouabeaucoup, à l'arrivée, dans le suc-cès de son candidat. En 2012,Sarkozy va se trouver dans des dis-positions moins favorables. Ses poli-tiques sont discutées, la crise finan-cière est passée par là et ses pen-seurs sont divisés. Certes la plupartdes gourous libéraux ( Pascal Salin,Christian Saint-Etienne, Guy Sorman,

Alain Minc...), qu'on imaginait fragi-lisés par la débâcle boursière, sontpourtant remontés imperturbable-ment sur leur dada : ce n'est pas lelibéralisme qui est en crise, c'estl'État ; il y a trop d'Etat, il fautamplifier les dérégulations, les dérè-glementations, les privatisations et« revenir au véritable capitalisme ».Si certains peuvent admettre que lapensée libérale est en crise, c'estavec précaution. Genre Luc Ferryqui dit : « Il semble à nouveau qu'onne puisse plus être libéral et « gen-til ». C'est dommage parce que plusque jamais nous allons avoir besoind'un libéralisme intelligent ». Latoile de fond, c'est donc un libéra-lisme intouchable. Sur cette base,les penseurs de droite, comme lespolitiques, se divisent sur lamanière de mener la guerre desidées. Il y a ceux qui poussent à l'af-frontement gauche/droite, à la radi-calisation. On en a un exemple,chaque semaine, dans les chro-niques d'Ivan Rioufol, du Figaro. Ilflirte avec le populisme, et, sur fondde croisade anti-musulmans et dechoc des civilisations, nourrit ensomme l'idée qu'en ces temps deglobalisation, « entre soi, on s'ensortira mieux ». Sans aller jusque là,tout se passe comme si ce choix dela « droitisation » des idées étaitaussi celui de l'Elysée. C'est l'opi-

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COM

BAT

«Tu peux tout accomplir dans la vie si tu as le courage de le rêver, l'intelligence d'en faire un projet

La rentrée des « think tanks* » Ça pense beaucoup,à droite comme àgauche, en cetautomne 2010. Ça sonde, ça scrute, ça interroge. Commela rentrée sociale et politique, la rentrée idéologique est mouvementée. Allons voir ce qui se passe du côté de l'UMP et du PS. Dans un prochainnuméro, on pourrait examiner l'état des lieux dans « l’espace critique ».

Par GÉRARD STREIFF

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Sciences Po et directeur de laFinpol, Fondation pour l'innovationpolitique, liée pourtant à l'UMP :« Réduire la distance (avec le FN),c'est prendre le risque d'ouvrir desvoies de passage.». Notons encorequ'à droite, il y a ceux qui se posi-tionnent « ailleurs » : MichelMaffesoli, par exemple, avocat de la« postmodernité », martèle l'idéeque le progrès a fait son temps, queles gens sont pressés de jouir, ici etmaintenant ; il vante le « local », le« tribal », plaide pour l'abandon dela valeur travail, mise en avant parSarkozy, et la réinvention de ladroite par le ludique, l'hédonisme (Ilapprécie la mode des « apérosgéants »).

LE MEDEF ET SA MYTHOLOGIEAccordons une mention à part, dansce remuement idéologique, auMEDEF. Depuis la fin des années90, sous l'impulsion de DenisKessler et de François Ewald, ex-maos passés au patronat, l'organisa-tion va fournir, via les universitésd'été notamment, et avec le soutiend'abord de Ernest-Antoine Seillièrepuis de Laurence Parisot, des grillesde lecture très pointues. Ils vontnotamment développer une longueréflexion sur le « risque » : les entre-preneurs sont des « riscophiles »,des chevaliers des temps modernes,face à des acteurs sociaux craintifs,obsédés de « protection » et de« couverture sociale ». Toute unemythologie du patron d'aujourd'hui.L'université d'été 2010 du MEDEF,autour de la mondialisation, s'intitu-lait « l'étrangeté du monde ».

LE PS ET « CARE »« La chasse aux idées bat son pleinau PS » estime Le Figaro. Dès sonarrivée rue de Solférino, MartineAubry a mis en place le « Laboratoiredes idées », structure officielle char-gée de préparer 2012, sous la direc-tion de Christian Paul. Ce dernierrépète qu'à la prochaine présiden-tielle, « le PS sera bien mieux pré-paré qu'en 2007 », qu'il s'agit de

« réinventer une pensée globale »;ce laboratoire a déjà produit plu-sieurs rapports. À la droite du PSmouline la structure « Terra Nova »(voir encadré). La « Fondation JeanJaurès », structure plus ancienne,propose aussi des notes et prévoit laprochaine parution d'un livre, cosi-gné de Benoît Hamon et de la socio-logue Virginie Martin, sur « L'égalitéfemmes hommes ».

Si le PS bouge les idées, les limitesde ce mouvement sont vite percepti-bles. Il y a d'abord le côté « instru-mental » de ce travail, volontierssouligné par les commentateurs. Il ya surtout le fait que si ce parti penseplus à gauche, il reste dans un choixde gestion purement libérale. Unexemple : l'entrée dans le vocabu-laire socialiste de la notion de« care ». Ce terme anglais signifiesoin ou bien-être, il englobe à l'ori-gine toutes les relations entre soi-gnant et soigné. L'idée est proposéepar Fabienne Brugère, philosophedu « Laboratoire » (ou du « lab »comme on dit au PS) à MartineAubry ; cette dernière récupère lanotion dont elle fait l'axe du futurprogramme socialiste. Le message,c'est : regardez comme nous prêtonsattention à autrui ; mais c'est aussiune manière de tout renvoyer auxindividus, à leur responsabilité per-sonnelle avec, sous entendue, l'idéeque l'État ne peut pas tout... Dire :aidons nous nous-mêmes, n'est-cepas, en partie, une autre façon dedévaloriser le politique ? La ques-tion sociale est renvoyée à chacun.Une façon, non libérale, aussi, deremettre le couvert contre « l'assis-tanat ». Comme l'observe le polito-logue Rémi Lefebvre, « si cettenotion devient le cœur du systèmeidéologique socialiste, la questiondes inégalités perdra toute sa cen-tralité. » n

* Think tank signifie laboratoire d'idées.

nion d'un politologue commeJérôme Jaffré : Sarkozy pense, dit-il,que la gauche est peut-être popu-laire mais idéologiquement, ladroite reste la plus forte et gagneraen dernière instance sur ses idées :« Sarkozy est à la recherche d'arêtesidéologiques susceptibles de créerune opposition maximale entredroite et gauche ». Nombreux, àdroite, redoutent que sur cette voie,ce soit le Front National qui ramassefinalement la mise. C'est probable-ment l'opinion d'un homme commeDominique Reynié, professeur à

réaliste, et la volonté de voir ce projet mené à bien.» Sidney A. Friedman, économiste américain

TERRA NOVA

Créée en 2008, l'association« Terra Nova » est présidée parMichel Rocard et dirigée par OlivierFerrand. Proche de DSK, ce groupeentend peser sur la politique duparti ; c'est lui par exemple qui alancé l'idée des primaires ; il pro-duit des notes et des essais sur dessujets divers, la réforme desretraites, les leçons de l'échec desBleus en Afrique du sud, Internet etla campagne électorale d'Obama,l'identité nationale ou les rapportsfranco-brésiliens... Ferrand, qui ditapprécier les travaux de l'InstitutMontaigne sur l'école (Cela rejointce que dit DSK), prône une « sécu-rité sociale professionnelle » pour« compenser la désindustrialisa-tion inévitable ». Incarnant uneligne droitière, sociale-démocrate,« Terra nova » veut « refonder lamatrice idéologique de la gaucheprogressiste ». Alors qu'on deman-dait à Michel Rocard, cet été, si lePS pouvait se prévaloir de lasocial-démocratie, il répondait :« Le PS est trop en dehors du coup,car il n'a jamais vraiment acceptél'économie de marché. Sans douteà cause d'un trop grand voisinageavec le Parti Communiste ».L'association compte publier unesynthèse de ses travaux fin 2010.

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D’ IDÉESCO

MBA

T SONDAGES

Depuis une quinzaine années, les sondages attestent régulière-ment qu'une des principales peurs françaises est celle du déclas-sement social, que des chercheurs appellent aussi la «mobilitédescendante », doux euphémisme.

Par déclassement, il faut entendre le senti-ment de vivre moins bien que ses parents;mais se sentent aussi déclassés des gens

dont le travail ne correspond par à la formationsuivie. L'institut CSA, entre 1993 et 2004, a menésix enquêtes sur le sujet, montrant chaque fois queplus de la moitié des Français (de 53 à 57%)« avait eu peur de devenir un exclu » (voir fig. 1).En décembre 2006 puis en novembre 2007, pourBVA/Emmaüs, 48 puis 47% des sondés disaientredouter de devenir sans abri. En 2009, pourOpinion Way, plus d'un français sur trois avait peurde l'exclusion. Cette peur naturellement est plusforte dans les milieux populaires ; elle diminueavec l'âge, elle est plus nette chez les ruraux(45%) que chez les urbains (31%).

La droite, face à cette donnée, tendrait à minimi-ser l'enjeu. C'est un peu ce qui a été reproché aurapport du Centre d'analyse stratégique (CAS),remis à la secrétaire d'Etat Nathalie Kosciusko-Morizet. Selon cette étude, un Français sur cinqpense vivre un déclassement social par rapport àcelui de ses parents. L'étude a fait débat. Mais le pouvoir est aussi tenté d'utiliser cettenotion, comme celle de l'insécurité, pour installerl'idée de la fin du progrès et nourrir le fatalisme,le repli. Tout au contraire, on peut interpréter cettedonnée comme un appel à des mesures radicalescontre les inégalités sociales.

Sur cet enjeu, on lira avec profit l’essai de lasociologue Camille Peugny, « Le déclassement »,chez Grasset (2009) ainsi que l'article « Ledéclassement, définitions, perceptions » de JulienDamon in « Regards sur l'actualité » n°354, octo-bre 2009, pp 90-98. n

Le déclassement socialPar GÉRARD STREIFF

Fig. 1

VOUS ARRIVE-T-IL D'AVOIR PEUR DE DEVENIR UN EXCLU ?(CSA, MAI 2004)

Fig. 2

L'ÉVOLUTION DU STATUT SOCIAL PAR RAPPORT À LA GÉNÉRATIONPRÉCÉDENTE(CAS, 2009)

Pages réalisées par GÉRARD STREIFF

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NOTES

La crise capitaliste imposedes réponses nouvelles. Lebras de fer est engagéentre les capitalistes etcelles et ceux quidéfendent un mode dedéveloppement alternatif,d'émancipation humaine.

Ce mois-ci, quatre notesdes commissionsnationales s'inscriventdans cette toile de fond.

XAVIER COMPAIN,responsable de lacommission agriculture-pêche-forêt. met à l’ordredu jour un nouveau typede développement pourpromouvoir un nouvel ordrealimentaire.

ALAIN MORIN, pour lesecteur économique,décrypte le «rapportCamdessus», qui sepropose d'institutionnaliserles «réductions des déficitset des dettes publiques»dans les pays de l'unioneuropéenne.

Enjeu politique, enjeu decivilisation ! LAURENCECOHEN, de la commissionféminisme/droit desfemmes, revient sur l’enjeudu féminisme en lien avecles luttes sur la retraites etpour l’avortement.

HERVÉ BRAMY, responsablede la commissionnationale écologie, faitétat de la réflexion et desdécisions d'engagement duPCF sur les enjeuxénergétiques, climatiques,l'accès à l'eau et lestransports.

AGRICULTURE PÊCHE FORÊT

Conquérir de nouvellespolitiques publiques agricolesL'objectif de nourrir la planèteoblige la naissance d'un nouvelordre alimentaire. Il s'agit d'unenjeu de civilisation avec au cœurun nouveau type de développementpour à la fois nourrir les femmes, leshommes et répondre aux questionsenvironnementales, écologiques,climatiques et énergétiques. La vieréelle nous a appris que la luttecontre la faim se pense à l'échelledes cycles de productions, des acti-vités du vivant. C'est donc dès main-tenant qu'il faut agir pour prévenirles crises agricoles, écologiques etles insécurités alimentaires dedemain.

D e grands principes sur lesquelsl'humanité souhaite construire

durablement la satisfaction desbesoins humains doivent être pérenni-sés par l'invention de règles de pro-duction, de consommation, de partageet de coopération au service du pro-grès partagé. Par le prisme de la souve-raineté alimentaire (droit fondamentaldes peuples), la responsabilité poli-tique est confiée aux états, aux élu-e-set aux populations de définir leurspolitiques agricoles et alimentaires.L'exigence d'une réforme agraire ycompris la redistribution de quotas depêche répond à la préoccupation dedévelopper des agricultures pay-sannes et la pêche artisanale produc-trices de denrées de qualité. La réforme de l'ONU dans le sensd'une nouvelle gouvernance mondialepour l'alimentation s'affirmant indé-pendante des logiques actuelles del'OMC, du FMI, de la Banque Mondialedevient une nécessité incontournable.Au centre de cette instance renouvelée,de nouvelles missions impératives :mettre fin à la spéculation des matièrespremières agricoles, l'instauration declauses de sauvegarde pour protégerles terres des pays menacés, la taxation

à un taux dissuasif des importationsabusives pour financer la relocalisa-tion des productions, la sortie de l'agri-culture et l'alimentation de l'OMC.Pour mieux être au service de ce pro-grès si elle en a la volonté politique,l'Europe doit : utiliser sa préférencecommunautaire et organiser seséchanges avec les pays tiers sans dum-pings sociaux, sanitaires, environne-mentaux, sous la forme d'accordsmutuellement avantageux, fixer unprix minimum indicatif européen avecpour objectif la rémunération du tra-vail paysan, répartir la plus value entreproducteurs, industries agro-alimen-taires et la grande distribution tout engarantissant l'accès des consomma-teurs à l'alimentation.En France, malgré la politique deNicolas Sarkozy et de la droite qui viseà laisser les mains libres aux géants del’agroalimentaire, aux distributeurs etaux spéculateurs, des conquêtes sont àportée de main. Travaillons à gagnerl'adoption de la la proposition de loisur le Droit au Revenu Agricole dépo-sée à l'Assemblée Nationale par AndréChassaigne au nom de la Gauchedémocrate et républicaine. Cette pro-position offre des solutions pour sortirl’agriculture française de la crise engénéral et de celle « de revenus » enparticulier. C'est un arsenal avec desdispositifs permettant la mise enœuvre d’un coefficient multiplicateur,la définition de prix minimums indica-tifs, la mise en place d’une conférenceannuelle par production associantl’ensemble du monde agricole et don-nant lieu à négociation sur les prix,l'encadrement des marges de la grandedistribution.Ces propositions sont à disposition desforces politiques, syndicales, associa-tives de Gauche. Elles seront construc-tives à l'élaboration du Pacte d'UnionPopulaire que nous avons décidé au35e Congrès. n

Évènement : Du 24 au 26 septembre 2010, uneimportante délégation du PCF conduite parPierre Laurent (secrétaire National) partici-pera à la rencontre:« Bamako 2010, Afrique-France-Europe, 50 ans après les indépen-dances, bilan et perspectives ». Rendez-vousCo-organisé par le PCF et l'UM-RDA du Malidans le cadre de la célébration des 50 ans d’in-dépendance de nombreux pays africains

XAVIER COMPAIN

Membre du Conseil National du PCF

Chaque mois, des secteurs de travail du PCF produisent des analyses,des propositions, des notes. Cette rubrique publie leurs travaux :ù

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SECTEUR ÉCONOMIE

Rapport Camdessus :l'austerité pour l'éternitéAlors que la crise financière et larécession de 2008-2009 auraientdu conduire à une réorientation pourune efficacité sociale de l'utilisationdes fonds publics, du crédit et desprofits avec de nouveaux pouvoirsd'intervention des salariés, despopulations et de leurs élus, le rap-port Camdessus institutionalise desréductions des déficits et des dettespubliques dans l’Europe entière

L a crise financière et la récession de2008-2009, sans précédents depuis la

guerre, et la grave crise de l'euro en 2010auraient du conduire à une mise encause de toutes les pratiques et règlesactuelles. Il s'agit, notamment, desrègles de la construction européenneactuelle. Les gigantesques interventionspubliques (États et BCE) n'ont visé qu'àremettre le même système à flot, au lieude répondre aux énormes besoinscontrariés de développement des popu-lations. Cela entraine un formidablegâchis de financements publics,conduit à un surendettement public.Celui-ci effraye d'autant plus les mar-chés que ces interventions, loin deramener une croissance dynamique,développent tous les facteurs de chô-mage, d'insuffisance des qualifications,des revenus et une croissance durable-ment anémique. Alors que tout invite à une réorientationpour une efficacité sociale de l'utilisationdes fonds publics, du crédit et des pro-fits avec de nouveaux pouvoirs d'inter-vention des salariés, des populations etde leurs élus, cette fuite en avant amèneles dirigeants européens à prétendrefaire intérioriser ces contraintes dans lespratiques politiques et les institutions dechaque pays. On parie sur une alter-nance entre majorités politiques qui, au-delà de différences à la marge, seraientliées par un pacte de fer sur les condi-tions de réductions des déficits et desdettes publics. C'est dans cette visée ques'inscrit le rapport Camdessus.Le rapport du groupe de travail « Réaliserl'objectif constitutionnel d'équilibre desfinances publiques » présidé par M.Camdessus se présente comme un vadé-

mécum technocratique bipartisan insti-tuant dans la Constitution que : « lesorientations pluriannuelles des financespubliques sont définies par des lois deprogrammation ». (...)La seule véritable ambition du rapportCamdessus est de doter la France d'undispositif qui serait susceptible de lui lierles mains en matière de politique bud-gétaire, au niveau national et local, et enmatière de protection sociale. Et cela, defaçon telle que, au delà des alternancesd'équipes au gouvernement, soit res-pectée une norme de limitation à mêmede rassurer les marchés financiersauprès desquels sont émises des dettespubliques (...)Cet impératif doit d'autant plus s'impo-ser, martèle le rapport, que l'allongementde la durée de la vie et le vieillissementdes populations vont entrainer une ten-dance à l'augmentation des dépensespubliques et sociales contradictoire avecla perspective que les marchés financiersabsorbent de plus en plus de richessesproduites par le pays. (...)Le dispositif institutionnel envisagé nes'imposerait comme la "loi fondamen-tale" aux gouvernements successifs quesi, et seulement si, ceux-ci s'inscriventdans une simple alternance politiqueautour d'un socle commun consensuelavec primat de la rentabilité financièreet des marchés financiers excluanttoute ambition d'utilisation alternativede l'argent des profits, des fonds publicset, surtout, du crédit bancaire, touteréorientation de l'Europe et, particuliè-rement, des missions et de la politiquemonétaire de la BCE, toute transforma-tion du Fonds européen de stabilisationfinancière créé le 9 mai dernier, toutapport original de la France et del'Europe à une nouvelle constructionmondiale.Il s'agit d'abord d'introduire dansnotre législation une loi-cadre de pro-grammation des finances publiques(LCPFP) qui bénéficierait de la pri-mauté par rapport aux lois de finances(LF) et aux lois de financement de lasécurité sociale (LFSS) et qui fixeraitpour chaque année de la période deprogrammation considérée :- Un plafond du niveau des dépensesde l'Etat (loi de finances) et un plafonddu niveau des dépenses de la sécuritésociale (LFSS) ;- Un plancher des recettes de l'Etat etde la sécurité sociale résultant de choixnouveaux concernant, particulière-ment les prélèvements obligatoires(impôts et cotisations sociales).

On retrouve ici les propos de JacquesAttali (Les échos 22/08/2010 ) selon les-quels il faudra dix années de rigueur et,pour cela, « définir le programme com-mun minimum qui devra être appliqué,quoi qu'il arrive, sans interruption pen-dant les dix ans qui viennent et quelleque soit la couleur politique desPrésidents de la République ». L'objectif est de contenir le plus possi-ble la part des prélèvements obliga-toires (impôts et cotisations) dans lesrichesses produites afin de permettreaux prélèvements financiers du capital(intérêts et dividendes) de continuer decroître beaucoup et rapidement. Le rapport précise que « ces proposi-tions ont réuni, pour l'essentiel, unlarge consensus. Elles fixent des règlesqui, sans imposer à une nouvelle majo-rité politique les choix politiques de laprécédente,(..) établissent cependantun cadre rigoureux de progression versl'objectif d'équilibre ». Autrement dit, la différence entre cesmajorités politiques devrait être de l'or-dre d'amendements très à la marged'un vaste bloc consensuel et réputéintouchable sur l'argent et les pou-voirs. n

YVES DIMICOLIResponsable de la commission

Économie et finances

SECTEUR FÉMINISME DROITS DES FEMMES

Les femmes, toujours lespremières concernéesdans les luttesMalgré des luttes féministes impor-tantes ayant entrainé des avancéesconsidérables, l’égalité entre lesfemmes et les hommes n’existe tou-jours pas.

Q ue ce soit dans l’accès à la formationet à l’emploi, dans les formes d’em-

ploi et les positions occupées au sein dela division sociale du travail, dans lessalaires à qualification similaire, dans lepartage des tâches et des fonctions dansle couple et au sein de la famille, dans leregard que la société porte sur l’imagedu corps de l’un et de l’autre. Enfin, en dépit de la loi sur la parité,l’accès égal aux postes de responsabilitépolitique est loin d’être réalisé.

NOTES Chaque mois, des secteurs de travail du PCF produisent des analyses,des propositions, des notes. Cette rubrique publie leurs travaux :

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Les femmes subissent une doublepeine, celle de l’exploitation capitalisteet celle de la domination masculine(domination patriarcale).Mener ces deux combats de front est lacondition de toute transformation de lasociété, c’est le sens du travail que portenotre commission.

LA RÉFORME DES RETRAITESLes réformes du gouvernement Sarkozyne font qu’aggraver les inégalités tirantvers le bas l’ensemble de la société. Nous sommes engagés dans la bataillecontre la réforme des retraites qui, pour60% de femmes au moins, signifiel’obligation de travailler jusqu’à 67 ans.Le montant mensuel moyen desretraites des femmes est de 848 eurossoit un écart de près de 40% avec cellesdes hommes.Les raisons sont multiples : la périodede la retraite arrive après une vie passéesur le marché du travail et se transformedonc en une caisse de résonance detoutes les inégalités que les femmes ysubissent. Les écarts de salaires à res-ponsabilités et qualifications égales, lescarrières morcelées dues notammentau manque cruel de structures d’accueilde la petite enfance permettant leretour à l’emploi après la maternité, lessalaires particulièrement bas desfemmes, l’accumulation de contratsprécaires ou encore le recours fréquentdes entreprises au temps partiel sontautant d’inégalités que l’on retrouveamplifiées au moment de la retraite.De précédentes réformes ont déjàcreusé les écarts. Ainsi, lorsque la droitea choisi d’allonger la durée de cotisationet de passer, pour le calcul des pensionsde retraites, des 10 aux 25 meilleuresannées, elle a clairement dégradé leniveau de vie des femmes retraitées. Nous ne voulons pas de cette réforme,nous devons et nous pouvons préserverun système solidaire en agissant sur leniveau des salaires, sur le calcul du tauxde réversion et ses modalités (par exem-ple en ouvrant de nouveaux droits auxcouples pacsés), en augmentant lescotisations patronales en particulier surles emplois précaires et à temps partiel,en taxant les revenus financiers et lesdividendes versés aux actionnaires, endéveloppant et en créant des emplois.Ces mesures structurelles sur le marchédu travail doivent s’accompagner demesures d’urgence pour lutter contre laprécarité des retraitées : meilleureindemnisation des congés maternité,politique de lutte contre les temps par-

tiels et les contrats précaires, maintiendes dispositifs existants pour les salarié-es du public parents de 3 enfants…..Nicolas Sarkozy veut en finir avec lespolitiques de protection sociale et desolidarité nationale, il économise sur ledos des populations, cassant tous lesservices publics, de l’école à la santé,afin de faire fructifier les intérêts d’unecaste de privilégiés.

DROIT À L'AVORTEMENTConquis de hautes luttes par lesfemmes, le droit à l’avortement est plusque jamais menacé. La loi Bachelotmarque une nouvelle et forte dégrada-tion de la santé publique. Au fur et àmesure des restructurations des hôpi-taux, nous assistons à la réorganisationdes services publics hospitaliers avecréduction drastique de personnels et,dans la plupart des cas, fermetures descentres IVG. Onze centres sont menacésdans les mois qui viennent ! Déjà les délais d’attente de plus de troissemaines pour obtenir un RDV ou lenon respect de l’obligation d’ouvrir descentres dans les établissements publics,conduisaient plus de 5000 femmes à serendre à l’étranger pour avorter. La loiBachelot, au nom de la rentabilité

financière, va porter un coup fatal audroit à l’avortement. Contre la remise en cause d’une libertéfondamentale pour les femmes, cellede disposer de leurs corps, le PCFappelle à participer à la manifestationnationale unitaire qui se déroulera àParis le 6 Novembre prochain. Associations féministes, syndicats, par-tis de gauche exigeront l’ouverture et lemaintien de tous les centres IVG, descentres de qualité avec des personnelsreconnus. Nous demanderons égale-ment que les délais pour un premierRDV n’excèdent pas cinq jours. Toutes ces réformes, portées par ladroite française, se retrouvent dans tousles pays européens. Cette remise enquestion des droits des femmes àl’échelle de l’Europe nécessite de pen-ser des actions communes. Dans le cadre de la tenue du 3èmecongrès du Parti de la GaucheEuropéenne, nous avons décidé, avecles militantes des différents pays adhé-rents, de réitérer l’organisation d’uneAssemblée de Femmes en ouverture duCongrès. n

LAURENCE COHENResponsable de la commission Féminisme/droits des femmes

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SECTEUR ÉCOLOGIE

Pour une écologiecitoyenneChacune et chacun d’entre nous lemesure, notre époque est celle d'uneprise de conscience que l'avenir mêmede la planète est menacé si on continueainsi. Il y a urgence !

Àmi-parcours, l'année 2010 est déjàune année noire : la tempête Xinthia,

les coulées de boues de Draguignan, lesinondations dramatiques en Pologne,les feux de forêt en Russie qui ont pourconséquence l'augmentation du coursdu blé, les inondations dramatique-ment mortelles au Pakistan et en Chine,le séisme qui a frappé Haïti , et la maréenoire causée par le géant pétrolier BP...Ces faits témoignent de l’impérativenécessité de faire vivre dans la penséeet l’action politiques l’incontourna-ble interaction entre sociétéshumaines et nature. S’engager à pla-

cer les défis écologiques au cœur denotre projet comme de notre pra-tique militante constitue en soi unetransformation à part entière qu’ilnous faut mener à bien.

QUEL EST LE PLAN DE TRAVAIL DE LACOMMISSION ÉCOLOGIE ?

Aider à engager le débat avec nos conci-toyens pour contribuer à l’élaborationd’un programme partagé qui intègre lesenjeux écologiques. La démocratieconstitue là aussi un marqueur denotre positionnement à l’opposé de lastratégie de la peur entretenue à des finsélectoralistes. Il en est ainsi des questions écono-miques notamment celles de la produc-tion comme de la consommation. Ils’agit d’un débat de société au seinduquel les citoyens doivent être en maî-trise des enjeux. L’entreprise ne peutéchapper à cette nécessité. Commentpenser un mode de développement, deproduction et de consommation sansdonner de nouveaux pouvoirs aux sala-riés qui leur permettent de concevoir etd'intervenir sur les processus de travail ? > SUITE

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NOTESOn est ici au cœur de l'enjeu de classe.A contrario de cette pensée destructricenous voulons préserver les biens com-muns de l’humanité, les ressourcesnaturelles du champ dévastateur desmarchés. Nous voulons promouvoir,dans tous les domaines, un nouveaumode de développement, qui soit à lafois durable, renouvelable sur le planécologique et générateur de nouvellesconquêtes sociales et d'émancipationhumaine. Tout cela implique de dépas-ser l'économie de marché capitalistepour avancer vers une économie soli-daire et de partage. Le travail engagéau sein du pôle Nouveau Mode deDéveloppement doit s’accélérer.Au-delà des idées nous devons, par ledébat et la lutte, nous confronter à degrands enjeux de société. Prenonsquelques exemples :

1°- L’ÉNERGIE. Pour ce qui nous concerne, nous consi-dérons qu'il faut nous préparer à lasociété de l'après pétrole, mais quellesource d'énergie alors solliciter ? Lesbesoins en énergie vont aller croissantde par le monde, mais comment lessatisfaire et avec quelle technologie?Nous sommes favorables à l’accroisse-ment des énergies renouvelables par-tout où cela est possible. Mais pourrépondre aux besoins nous continuonsde penser que le nucléaire – malgré sesinconvénients notamment les déchets-reste un mode de production énergé-tique utile. Dans ces conditions, quellebataille politique mener sur le terrain,pour un mixe énergétique qui préservela couche d'ozone, tout en répondantaux besoins de la production et desbesoins des ménages ?Ces questions ouvertes appellent uneréflexion exigeante et citoyenne. C’est lesens que nous donnons à l’organisa-

tion d’un séminaire du parti pour trai-ter des défis énergétiques pouraujourd’hui et demain.

2°- LE CLIMAT. Nous avons engagé un important travailsur le Climat. Nous avons produit de lapensée, des points de vue, organiser desateliers. Nous avons contribué, avec lePGE à des mobilisations lors du som-met de Copenhague. On le sait les chefsd’états ont accouché d’une souris aprèsde longs mois d’intenses négociationssur le prix à payer pour préserver le cli-mat. Pour les pays industrialisés il s’agitd’adapter leur système de production etil s’agit également de contribuer par letransfert de technologies propres audéveloppement légitime des pays pau-vres. Il faut le dire franchement, celareprésente des sommes énormes àmobiliser. Le débat sur le climat est donc loind’être clos. Depuis Copenhague lesnégociations se sont poursuivies afin depréparer un nouveau sommet à Cancunau Mexique fin décembre. La mobilisa-tion des peuples lors de Copenhaguedoit prendre un nouvel essor. Nous pro-posons d’organiser en France un oudeux Cancun afin de continuer la lutteet promouvoir nos propositions.

3°- DE L’ACTION DE NOS ÉLUS. Nous n’avons pas la place ici pour souli-gner l’originale et intense activité denos élus dans le domaine environne-mental. Un inventaire de leurs réalisa-tions s’avèrerait nécessaire afin demodifier quelque peu notre image dansla population. Pourquoi ne pas y travail-ler ? En attendant le Parti, ses militantsdevraient s’attacher à porter plus avantleurs engagements et leurs combatsdans le débat public. Je pense pourl’exemple à trois sujets :

Nous ne pouvons concevoir une effica-cité de la politique environnementalequi puisse être utile à la planète sansune intense intervention pour laréduction des inégalités sociales. Lesparlementaires communistes et du PGont déposé une proposition de loivisant à mettre en œuvre le droit à l’eauqui vise à garantir de manière préven-tive l’accès à ce droit fondamental pourde nombreuses familles qui doiventfaire face à des difficultés de pouvoird’achat. Un projet de loi gouvernemen-tal reprenant nos propositions sera exa-miné au parlement en octobre. Plus lar-gement la gestion de l’eau est au cœurde nombreux débats locaux. La créa-tion d’un service public national del’eau est d’actualité. En 2012, Marseilleaccueillera le sommet mondial de l’eau.D’ici là nous pouvons nous emparer detous ces enjeux dans les débats et lesluttes pour faire connaître nos positionset nos réalisations. Une campagnenationale de communication seramise à disposition des communistes.Les élus régionaux communistes dontplusieurs vice-présidents aux trans-ports ont engagé avec les syndicats unegrande initiative pour le maintien et ledéveloppement en service public duFret SNCF. Il s’agit là d’un dossier aucroisement d’enjeux économique,social et environnemental ; nous pou-vons également nous saisir de ces ques-tions ! Enfin, pour aider à cette mise en dyna-mique nationale nous avons décidéd’un programme de formation ouvertaux adhérent-es qui pourra être régio-nalisé. Il s’agit avec l’organisation d’au-ditions de participer largement à la dif-fusion de nos propositions. n

HERVÉ BRAMYResponsable de la commission

nationale écologie

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REVUE DE LIVRES

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Rentrée « littéraire » politique

Par ALAIN VERMEERSCH

Le livre politique fait un retour en force à la rentrée avec plusieurs essaiscritiques sur Nicolas Sarkozy, un portrait de DSK doublé d'une investiga-tion, une enquête sur Le Pen, un livre de Michel Rocard ou encore deuxouvrages sur la ministre de l'économie, Christine Lagarde.

Tous ces livres paraîtront enseptembre ou octobre, au côté des 700romans de la rentrée... À tout seigneur,tout honneur, c'est le président de laRépublique qui a inspiré le plus d'au-teurs, pour la plupart journalistes.

Essais critiques sur Sarkozy, Largardefascine, DSK aussi.Marie-Eve Malouines, chef du servicepolitique de France Info, dissèque lapsychologie du chef de l'Etat dans«Nicolas Sarkozy, le pouvoir et lapeur»(Stock) et le journaliste DenisJeambar livre au lecteur un sans équi-voque «Monsieur le président, tout estpourri dans votre royaume»(L'Opportun).Le sociologue Cyril Lemieux, spécia-liste des médias, qui avait tenu un blogpendant la campagne présidentielle2007 intitulé «Prises de parti journalis-tique», persévère avec «NicolasSarkozy, élu par les médias»(Transvalor). Ses confrères MichelPinçon et Monique Pinçon-Charlotpublient quant à eux «Le président desriches» (Zones).

Potentiel candidat PS à la présiden-tielle en 2012 et actuel directeur géné-ral du Fonds monétaire international(FMI), Dominique Strauss-Kahn est aucœur d'un portrait sobrement intitulé«DSK» (Hugo & Compagnie) signéJean-Pierre Gonguet et FlorenceRaillard, mais aussi d'une enquête deYves Azeroual et Joachim Ohnona,

«Les dessous chocs de l'affaire DSK»(éditions du Moment).DSK fait aussipartie, selon son auteur David Revaultd'Allones, des prétendants à «Un fau-teuil pour trois, une enquête secrète aucœur du PS» (Robert Laffont).La ministre de l'Economie, ChristineLagarde, fait une entrée en fanfareavec deux ouvrages qui lui sont consa-crés : «Christine Lagarde enquête surla femme la plus puissante de France»(Michel Lafon) de Cyrille Lachèvre etMarie Visot et «Christine Lagarde, sou-ris et serre les dents» (Alphée-Jean-Paul Bertrand) de Martial You.

Le leader du Front national fait par ail-leurs l'objet d'une enquête de AzzedineAhmed-Chaouch, «Le testament dudiable, les derniers secrets de Jean-Marie Le Pen» (éditions du Moment).

QUAND LES POLITIQUES PRENNENT LA PLUME...D'autres prennent eux-mêmes la plumecomme l'ancien Premier ministresocialiste Michel Rocard, qui revientsur ses engagements, ses choix et sesactions dans «Ma trajectoire»(Flammarion). Chez le même éditeur,le ministre de la Défense, Hervé Morin,se lance «Dans l'arène, au cœur dugouvernement, un ministre raconte»,tandis que la secrétaire d'État à l'Éco-logie, Chantal Jouanno, se livre «Sanstabou» (La Martinière).

L'ancien Haut-commissaire auxSolidarités actives Martin Hirsch publie«Pour en finir avec les conflits d'inté-rêts» (Stock), le député PS ArnaudMontebourg écrit un «Antimanuel depolitique» (Bréal), tandis que le leaderdu Parti de gauche Jean-LucMélenchon fait son «Devoir de rup-ture» (J.-C. Gawsewitch). Atteinte à la liberté : les dérives de l'ob-session sécuritaire. J. Zeh, I. Trajanow. Actes Sud (septem-bre) La romancière et juriste Juli Zeh etl'écrivain Ilija Trojanow nous mettenten garde : depuis le 11 septembre2001, aux États-Unis mais aussi enEurope, les droits fondamentaux pourlesquels nos ancêtres se sont battusont souvent été bafoués, et l'arbitraires'installe. Intrusions dans nos vies pri-vées, contrôle de nos opinions, de noscorrespondances, de nos déplace-ments... Les auteurs tirent la sonnetted'alarme et posent les questions cru-

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LA REVUE DU PROJET - OCT 2010

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REVUE DE LIVRESciales : Pourquoi laissons-nous faire ?Et comment devons-nous nous défen-dre ? Dans cet essai richement docu-menté, Juli Zeh et Ilija Trojanow dres-sent un tableau stupéfiant des consé-quences désastreuses d'une obsessionsécuritaire dont les Français aussi fontles frais.

La nouvelle idéologiefrançaiseBéatrice Durand. Stock (septembre)Depuis les années 1980, au momentoù les projets marxistes et révolution-naires quittaient la scène, une nouvelleidéologie typiquement française s’estinstallée dans le paysage : le républica-nisme. Tout le monde s’est mis à seréclamer de la république et de sesvaleurs ; aucun mot n’est mieux porté, àdroite comme à gauche. Le « modèlerépublicain » serait maintenant le modèlefrançais. L’identification à la Républiqueest devenue l’épine dorsale de notreidentité. Ce républicanisme recouvre,en vrac, notre conception de l’État dedroit, la manière dont nous compre-nons la laïcité et la séparation del’Église et de l’État, notre conceptionde l’école méritocratique, etc. Et aussila manière dont nous réglons les revendi-cations particularistes, depuis le régiona-lisme jusqu’aux fameuses affaires duvoile islamique et, maintenant, de laburqa.

Un regard sur ce qui se passe chez nosvoisins européens nous aiderait à com-prendre qu’on peut conjuguer d’autresfaçons les idéaux qui sont les nôtres etleur mise en application. Non seule-ment la République n’est pas l’apanagede la France, mais son principe devraitpermettre d’articuler les identités parti-culières et la vie commune en laissant àl’individu un maximum de liberté dansle choix et l’expression de ses convic-tions. Ne serait-ce que dans la manièrede gérer les revendications identitaires.Ne serait-ce aussi que dans la manièred’aborder la question de la religion et deson articulation au politique.

Il faut revisiter notre conception de laRépublique, en espérant qu’on pourraainsi la rendre moins arrogante, moinsfranchouillarde, en espérant aussi quenotre actuel républicanisme cesserad’être un autoritarisme contraire auxprincipes d’une société démocratique.

Le temps du monde fini : versun postcapitalisme civilisé. Geneviève Azam. Les liens qui libèrent(septembre) « Le temps du monde finicommence » écrivait Paul Valéry en1931. Pourquoi cet appel n’a-t-il pasété entendu ? Comment faire de laconscience de cette finitude un com-mencement ? Près d’un siècle s’estécoulé et la globalisation économique aaccéléré la clôture du monde et cellede l’imagination. Les vainqueurs lais-sent une Terre épuisée et un mondecommun miné par les inégalités, ledéracinement et la violence. Ce monde-là, assigné à la rentabilité immédiate,s’effondre. Les crises mettent à nu lapromesse empoisonnée de réaliser laliberté et la justice par le « libre »échange, la croissance et la consom-mation, elles dévoilent l’illusion scien-tiste qui repousse à l’infini les limitesde la Terre et l’espoir fou de s’affran-chir de la matérialité de l’existence.Elles heurtent aussi les forces « pro-gressistes ». S’inscrire dans le temps du monde fini,c’est s’échapper de l’enclos et écouterles voix, souvent celles des vaincus,qui, au Nord et au Sud, expriment plusque leur défaite ; elles disent que laTerre et ses éléments sont un patri-moine commun vital et inaliénable ;elles opposent le « bien vivre » au « tou-jours plus », les mondes vécus aux abs-tractions expertes ; elles luttent pourconserver les biens communs qui lesprotègent et les enracinent, réinvententla démocratie et l’aspiration à l’univer-sel. Sous les décombres souffle unautre imaginaire, fait de coopération aulieu de concurrence, d’attachement àla Terre au lieu d’arrachement, d’unepropriété-usage au lieu de la propriété-appropriation, d’une liberté retrouvéeface à la « raison » économique et àl’asservissement de sujets renvoyés àeux-mêmes.

Adieu à la croissanceJean Gadrey. Les petits matins (octo-bre) « Je ne crois pas que là soit le pro-blème du néolibéralisme et de la finan-ciarisation excessive (l'absence de crois-sance). Il est exact que ces logiques sontnéfastes pour la croissance en Europe,mais je défends (avec d’autres) l’idéeque la recherche de la croissance estdevenue néfaste et que très probable-

ment la croissance prendra fin dans lespays « riches » dans les années oudécennies à venir, qu’on la poursuiveou pas. C’est l’objet d’un livre à paraî-tre début octobre, sous le titre « Adieuà la croissance ».

La finance contre la croissance ?Chronique d'une rupture. Henri Bourguinat. Maxima (septembre)Ce qui devait être le « bout du tunnel »de l’après crise financière laisse un goûtamer. Montée inexorable du chômage,croissance molle, dettes publiques quiexplosent, attaques contre l’euro par lesdérivés de crédit... autant de signesinquiétants.Alors même que la sphère financière sereprend, que les banques retrouvent desolides profits et que les rémunérationsde leurs dirigeants affichent desniveaux insolents, c’est cette fois l’éco-nomie réelle qui souffre profondément.Comment est-on passé d’une situationoù la finance était un moteur de l’éco-nomie et concourrait à la croissance àcet état où les banques semblent êtrebénéficiaires quel que soit l’état desautres composantes du monde écono-mique (entreprises, fonction publiqueetc...). Tel est l’objet de ce livre écritpar un économiste réputé et un profes-sionnel du monde des affaires. n

Ici vous trouverez dans leprochain numéro, la liste des derniers bulletins internes des commissions nationales.

Merci aux différents secteursde travail d’envoyer vospublications à : [email protected]

LA REVUE DES BULLETINS

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PASCAL MARTINILa CGT investit la police 2010.Disponible auprès de l’UFR CGT de la Police Nationale.

Par ADRIEN TIBERTI

Le récit de la vie militante de P. Martini, ancien secrétaire général de laCGT Police, est une lecture enrichissante pour qui veut dépasser lesponcifs sur les policiers et réfléchir sur ce que pourrait être un vérita-ble service public de la Police Nationale.Apprendre que la police compte en son sein de véritables militantsd’un syndicalisme confédéré et progressiste ouvre une perspective : ildevient possible de démontrer comment, depuis le milieu des années1980, tous les gouvernements ont mis en œuvre une politique conti-nue pour séparer les policiers du reste de la population, commentrépression syndicale, démagogie et corporatisme ont creusé un fossési important.Ce témoignage rappelle que l’espoir existe, au sein même de laPolice Nationale, pour que les « forces de l’ordre » deviennent enfinun instrument démocratique au service de la population plutôtqu’un soutien de l’ordre établi. n

LAURENT MUCCHIELLI*« Vers une criminologie d'État en France ? Institutions,acteurs et doctrines d'une nouvelle science policière »in Politis, 2010/1 (n° 89).

Par PIERRE LAROCHE

« Une stratégie de domination institutionnelle et intellectuelle ».C’est ainsi que L. Mucchielli qualifie le débat autour de la « guerre aucrime » dont l’enjeu est de mettre fin à une exception française : l’ab-sence de discipline criminologique.En 2009, N. Sarkozy a créé une chaire de « criminologie appliquée » auConservatoire National des Arts et Métiers pour son ami Alain Bauer :depuis, celui-ci mène une bataille idéologique pour imposer une« science criminologique », conçue comme essentiellement policière.Au cœur de cette bataille, le contrôle des chiffres de la délinquance, deleur production et de leur communication, la multiplication desenquêtes portant sur les victimes, le développement des recherchessur les phénomènes de délinquance au détriment de celles sur lapolice.Sont alors créés de multiples organismes de recherche et de formationdans les domaines de la sécurité et de la défense. Leur mission : déce-ler les « nouvelles menaces » de la « violence urbaine », de la « mondia-lisation criminelle » ou du « cyber-crime ». Ces organismes bénéfi-cient de crédits publics et privés et de l’accueil favorable de maisonsd’éditions (PUF et même CNRS éditions). L’ensemble de ce réseau,bien implanté dans la sécurité privée, tend à croître avec la réductiondu nombre de policiers et gendarmes. n

* Laurent Mucchielli est sociologue. Il est notamment l’auteur de :La Frénésie sécuritaire. Retour à l’ordre et nouveau contrôle social, Paris, LaDécouverte, 2008 ; Quand les banlieues brûlent. Retour sur les émeutes denovembre 2005, Paris, La Découverte, 2007 ; Violences et insécurité, Fantasmeset réalités dans le débat français, Paris, La Découverte, 2002. Il anime depuis 2001 le groupe CLARIS (Clarifier le débat public sur la sécurité)qui publie une revue en ligne (dernier numéro : « la municipalisation des poli-tiques de sécurité »). http://www.groupeclaris.org/. http://blog.claris.org/.

CRITIQUESChaque mois, des chercheurs, des étudiants vous présentent des ouvrages.

LOÏC WACQUANTLes prisons de la misère Raisonsd'Agir, 1999 et Punir les pauvres.Le nouveau gouvernement del'insécurité sociale. Agone, ContreFeux, 2004.

Par AUGUSTIN PALLIÈRE

Loïc Wacquant décrit le com-plexe commercial-carcéro-assistanciel américain : unepolitique répressive datantdes années 1980 qui s’enprend particulièrement auxnoirs, aux jeunes et aux pau-vres et s’appuie sur l’empri-sonnement et le fichage judi-

ciaire de ces populations. Il montre l’ineffica-cité de cette politique et dévoile ses fonde-ments idéologiques : les théories de la tolé-rance zéro et de la vitre cassée (selon laquellela répression des petites incivilités fait reculerle grand banditisme), fondées sur une penséeréactionnaire qui peut se résumer ainsi : lasource de la criminalité, c'est le criminel ; lasource de la pauvreté, c’est le pauvre.Le mérite de ces ouvrages est de faire le lienentre politique pénale et politique sociale.Dans un contexte de précarisation du sala-riat, une politique ultra répressive répondselon l'auteur à trois missions économiques,sociales et idéologiques : soumettre la classeouvrière à de nouvelles conditions de travail,emprisonner ses éléments les plus rétifs etdonner à voire un État fort, précisément alorsqu’il se retire la vie économique et sociale.Sans confondre la France et les Etats-Unis,l’auteur montre que tous les gouvernementsdepuis 1997, de droite comme de gauche,s’alignent sur cette politique.Punir les pauvres propose en outre quelquespistes pour ne pas tomber dans le piège sécu-ritaire : combattre les glissements séman-tiques qui déplacent le débat, rappeler que laprison n’est que très rarement une solution,refuser la collaboration entre les servicessociaux et les services de police et surtoutconsidérer la sécurité non pas comme laseule sécurité physique des individus maisbien aussi comme la sécurité de l’emploi, durevenu, du logement… Sur ces bases, l’auteurappelle à une collaboration plus étroite entremilitants et chercheurs. n

Critiques coordonnées parMARINE ROUSSILLON

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26 Le problème est qu’il y abeaucoup d’hypocrisie dans cettemanière de faire intervenir lamorale : on s’en sert pour critiquerdes comportements individuels etles excès visibles de l’injusticesociale, rarement pour critiquer lecapitalisme en lui-même, dans sonfonctionnement ordinaire. Pourquoi ? Cela tient à une concep-tion restrictive de la morale,ancienne mais remise à la mode pardes philosophes comme L. Ferry ouA. Comte-Sponville. Les valeursmorales, dont Kant nous a donné laplus parfaite définition au 18e siècle– critère de l’Universel, respectd’autrui, autonomie – sont appli-quées au seul champ des rapportsinterpersonnels où la responsabilitédes individus est clairement enga-gée, mais exclues des rapportssociaux qui influencent pourtant lapart la plus importante de notreexistence, par exemple à travers letravail, ses conditions et sa rétribu-tion, et les conséquences que celaentraîne pour la vie hors travail.L’argument avancé par Comte-Sponville dans un livre à succès, Le

capitalisme est-il moral ?, mais quele théoricien du néo-libéralismeHayek avait déjà formulé au 20e siè-cle, est que le système économiqueactuel n’a été voulu par personne enparticulier et qu’il est constitué deprocessus objectifs, de naturescientifico-technique et déterminéspar des « lois » quasi naturelles(celles de la concurrence, par exem-ple) sur lesquels les hommes n’au-raient pas de prise. L’économiecapitaliste n’aurait donc pas à êtrejugée moralement : elle ne serait nimorale ni immorale, mais amorale,et on ne pourrait y intervenir pour enatténuer les méfaits sociaux que del’extérieur et à la marge, à traversune politique de régulation réduite àpas grand chose.

C’est là une erreur majeure et surl’économie et sur la morale dans sonnécessaire prolongement politique.Sur l’économie puisqu’on oubliealors qu’elle est faite de pratiquespar lesquelles certains hommes secomportent d’une certaine manièreà l’égard d’autres hommes – en lesexploitant, en les mettant au chô-

Morale et politiqueLa crise récente du capitalisme a fait resurgir dans l’actualité la questiondes rapports entre morale et politique : spéculation financière, comporte-ment des traders, creusement scandaleux des inégalités et paupérisationdes plus pauvres, etc., tout le monde a été sensible à ce qu’il y a de scan-daleux moralement dans le capitalisme et on a même vu Sarkozy, sansdoute le chef d’État qui a bafoué le plus la morale en politique depuislongtemps, réclamer publiquement la moralisation du système.

Par YVON QUINIOU*

* Yvon Quiniou est philosophe.Son dernier livre s’intituleL’ambition morale de la politique. Changer l’homme ?,L’Harmattan, collectionRaison mondialisée, 2010.

COMMUNISME EN QUESTION

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droit, comme en 1789 avec laDéclaration des droits de l’hommeet du citoyen affirmant l’égaleliberté juridique de tous leshommes. Or, ce n’est pas là unconstat, mais la proclamation d’uneexigence – celle de traiter leshommes comme libres et égaux endroits –, qu’il faut bien dire moraleet qui a contribué à instaurer laRépublique. De même, l’histoire dumouvement ouvrier, tout au long des19e et 20e siècles, a été celle deconquêtes sociales qui ont fait sau-ter les limites de classe de laDéclaration de 1789, au point dedéboucher sur la riche Déclarationde 1948 où l’universalité des droitshumains est revendiquée dans tousles aspects concrets de l’existence(santé, travail, culture, etc.). Ce nesont point là seulement des acquisprécieux sur le plan de l’intérêtmatériel : concernant tous leshommes et se préoccupant de leurépanouissement comme de leurdignité, ils ont incontestablementune teneur normative d’essencemorale.

Restent alors les rapports écono-miques. On aura compris qu’ilsentrent eux aussi dans le champ dela morale alors qu’on voudrait cyni-quement les en exclure. Plus préci-sément, quand on lit Marx avecattention et en allant au-delà de lacondamnation qu’il a pu faire d’unemorale abstraite dont il a dénoncé

l’impuissance, on s’aperçoit que sonanalyse critique du capitalismen’est pas seulement fondée sur unexamen scientifique de ses contra-dictions objectives, mais habitéepar une indignation morale devantses effets humains – sans quoi ellene serait pas critique : on ne peutcritiquer le réel sur une base exclu-sivement scientifique, toute critiquesupposant des valeurs que lascience ne peut fournir. Et ce sontbien l’Universel, le respect de lapersonne humaine et la promotionde l’autonomie individuelle qui fon-dent sa critique : le rapport d’exploi-tation ne peut être universalisé –pour qu’il ait des exploiteurs, il fautdes exploités ! –, il instrumentalisele travailleur en le réduisant à unfacteur de profit et, enfin, il nie sonautonomie en le rendant dépendantde cette « puissance sociale » qu’estle Capital. La politique que Marxnous propose alors, inscrite dans leprojet communiste, est donc aussiune politique morale, et il l’a avouédans sa jeunesse en se réclamant de« l’impératif catégorique de renver-ser tous les rapports sociaux qui fontde l’homme un être humilié, asservi,abandonné, méprisable ». Cet impé-ratif, indissolublement moral etpolitique, magnifiquement formulé,est hélas toujours d’actualité. n

mage, en délocalisant leur entre-prise, par exemple – et qu’ellen’obéit pas à des lois naturellesimmuables et implacables, mais àdes règles faites par les hommes etqui peuvent donc être modifiées oudéfaites par eux. « L’économie poli-tique ce n’est pas la technologie »dit Marx justement (Contribution àla critique de l’économie politique),elle s’offre donc au jugement devaleur moral. Car si une techniqueest bien neutre moralement en elle-même, son usage ne l’est pas en rai-son de ses effets sur l’existence deshommes. Se saisir d’un nouveauprocédé de production plus efficacepour supprimer des emplois et aug-menter les profits, au lieu de réduirele temps de travail, voilà le typemême d’un comportement écono-mique qui peut et doit être jugé, enl’occurrence condamné.

Mais c’est aussi une erreur sur lamorale. Portant sur les rapports avecautrui (et non sur la seule vie indivi-duelle comme l’éthique), il fautadmettre qu’elle s’intéresse à l’en-semble de ces rapports, avec toutleur poids de réalité socio-histo-rique : ceux qui se nouent dans lechamp politique (au sens étroit duterme), le champ social et le champéconomique. L’histoire l’atteste : àla fin du siècle des Lumières, lamorale ainsi entendue est interve-nue dans la politique (au sens large)pour lui imposer ses fins à travers le

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SPORT. //// FILM ET CONFÉRENCES‚1er ET 2 OCTOBREGARDANNE (Bouches-du-Rhône) à la médiathèqueË Troisième édition des Rencontres de l’association

Provence, Mémoire et Monde ouvrier (Promemo),consacrée aux rapports entre « le monde ouvrier et lespratiques sportives », Au programme, la projection dufilm de Jean-Christophe Rosé Onze footballeurs en or,et une journée de conférences autour de sujets telsque « le sport populaire et socialiste en France et enItalie entre 1914 et la fin des années 50 », « le foot-ball, l’argent et le socialisme ». Programme complet :http://biosoc.univ-paris1.fr/spip.php?article312"Maitron.org ;Rens. : 04-42-69-85-43).

PALESTINE. //// RENCONTRE‚ JEUDI 7 OCTOBRE À 19HAUBERVILLIERS à la librairie Les Mots passants, 2, rue du MoutierË Rencontre avec Alain Gresh à l’occasion de la parution

de son livre De quoi la Palestine est-elle le nom ? (LesLiens qui libèrent, Paris, septembre 2010).

SANTÉ. //// CONFÉRENCE‚ JEUDI 14 OCTOBRE, À PARTIR DE 20 HDOUAI - salle Robert de Douai(salles d’Anchin), rue Fortier.Ë Le Cercle de Réflexions Alternatives du Nord/Pas-de-

Calais (CRéA) propose une conférence sur le thème :« l’hôpital malade de la rentabilité ». Débat introduitet animé par le professeur André Grimaldi, diabéto-logue à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris.(Contact et renseignements : Jean-Claude Sellier, [email protected] ; http://crea-douai.over-blog.com/blog du CRéA).

PROTECTION SOCIALE. //// FORUM INITIATIVE NATIONALE‚ JEUDI 14 OCTOBREMARSEILLE (lieu à définir voir www.pcf.fr)

ÉDUCATION. //// TABLE-RONDE ‚ VENDREDI 15 OCTOBRE, DE 15H30 À 18HLILLE-ARMENTIÈRES à l’EPSM de Lille-Armentières, Ë organisée par le mouvement Culture et Liberté, dans le

cadre de son congrès et de son 40e anniversaire. Sonobjet : examiner les méthodes et pratiques de transfor-mation de la société qui existent, et esquisser des pistesnouvelles, afin de les proposer dans le cadre des initiatives de l’Education Populaire. (Informations :http://www.culture-et-liberte.asso.fr/"www.culture-et-liberte.asso.fr ; Contact : Alexandra Maheas au 01-47-70-37-50 ou [email protected]).

LE TRAVAIL, UNE REVALORISATION INDISPENSABLE‚ SAMEDI 16 OCTOBREPARIS Espace Niemeyer, 2 place du Colonel Fabien - 19e

M° Colonel FabienË Journée co-organisée par le secteur

Formation du PCF et Espaces Marx

RENCONTRE DU PROJET‚ 26-27-28 NOVEMBRE PARIS Espace Niemeyer, 2 place du Colonel Fabien M° Colonel Fabien - 19e

Ë Cette rencontre nationale qui réunira des militants-e-set des élu-e-s communistes, des intellectuel-le-s, desacteurs et actrices du mouvement social et associatif,permettra d'engager les reflexions et la constructiond'un projet partagé, qui vise à répondre aux pro-blèmes de la société, aux espérances populaires, enrupture avec les logiques libérales, utile à toute lagauche, un projet pour la France, européen et inter-nationaliste.

LES DROITS DES FEMMES EN EUROPE : Assemblée «El-FEM» //// DÉBAT‚ 3 DÉCEMBREPARISSiège national du PCF2 place du Colonel Fabien - 19e

M° Colonel Fabien Ë Rencontre organisée avec le PGE (Parti de la GaucheEuropéenne)

AGENDA

Dans cet agenda, qui est appellé às’étoffer, vous trouverez des événementscontribuant au mouvement de lapensée. Vos propositions sur :[email protected]

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OCT 2010 - LA REVUE DU PROJET

APPEL À COMPÉTENCE« Beaucoup mettent de l'énergie à résister , il en faut tout autant qui se mêlent du débat politique ! »Pierre Laurent, secrétaire national du PCF, a invité ainsi, l'ensemble des forces sociales , syndicales, associatives, à inves-tir le débat d'idées et à participer à la construction d'une véritable alternative politique à gauche.Il s'agit d'ouvrir des espaces de travail par réseaux thématiques dans tout le pays.Nous voulons nous appuyer sur l'expertise professionnelle, citoyenne et sociale de chacune et chacun, en mettant àcontribution toutes les intelligences et les compétences.La «revue du projet»est un outil au service de cette ambition.Vous souhaitez apporter votre contribution? Vous avez des idées, des suggestions, des critiques ? Vous voulez participerà un groupe de travail en partageant votre savoir et vos capacités avec d'autres ?

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Patrice BessacRepsonsable national du [email protected]

Stéphane Bonnery Formation/Savoirs, é[email protected]

Nicolas Bonnet [email protected]

Hervé Bramy [email protected]

Ian Brossat Sécurité[email protected]

Laurence Cohen Droits des femmes/Féminisme [email protected]

Xavier Compain Agriculture/Pêche [email protected]@pcf.fr

Olivier Dartigolles [email protected]

Yves Dimicoli Economie [email protected]

Jacques Fath Relations internationales, paix et désarmement [email protected]

Olivier Gebhurer Enseignement supérieur et [email protected]

Jean-Luc Gibelin Santé Protection [email protected]

Isabelle De Almeida [email protected]

Fabienne Haloui Lutte contre racisme, antisémitisme et [email protected]

Alain Hayot [email protected] ou [email protected]

Valérie [email protected]

Jean-Louis Le Moing [email protected]

Danièle Lebail Services Publics et solidarités [email protected]

Isabelle Lorand Libertés et droits de la [email protected]

Sylvie Mayer Economie sociale et solidaire [email protected]

Catherine Peyge Droit à la ville, [email protected]

Gérard Mazet [email protected]

Eliane Assassi Quartiers populaires et liberté[email protected]

Richard Sanchez [email protected]

Véronique Sandoval [email protected]

Jean-François Téaldi Droit à l'information [email protected]

Nicole Borvo Institutions, démocratie, [email protected]

Jean-Marc Coppola Réforme des collectivités [email protected]

Jérôme Relinger Révolution numérique et société de la [email protected]

Jean-Marie DoussinCollaborateur

Noëlle MansouxSecrétaire

de rédaction

Gérard StreiffCombat d’idées

Marine RoussillonPages critiques

Alain VermeerschRevue de livres

Frédo CoyèreMaquette etgraphisme

Partice BessacResponsable de la Revue

Cécile Jacquet Secrétaire générale

COMITÉ DU PROJET ÉLU AU CONSEIL NATIONAL DU 9 SEPTEMBRE 2010 : Patrice Bessac - responsable ; Patrick Le Hyaric ; Francis WurtzMichel Laurent ; Patrice Cohen-Seat ; Isabelle Lorand ; Laurence Cohen ; Catherine Peyge ; Marine Roussillon ; Nicole Borvo ; Alain Hayot ; Yves DimicoliAlain Obadia ; Daniel Cirera ; André Chassaigne.

L’ÉQUIPE DE LA REVUE

LES RESPONSABLES THÉMATIQUES

Liste publiée dans CommunisteSdu 22 septembre 2010