LA RESPONSABILITÉ SOCIALE D’ENTREPRISE EST UNE SOURCE …

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LA RESPONSABILITÉ SOCIALE D’ENTREPRISE EST UNE SOURCE DE RICHESSE ET DE PERFORMANCE POUR LES PME OU COMMENT CRÉER DE LA RICHESSE EN ALLIANT LA RSE ET LE PILOTAGE DES ACTIFS IMMATÉRIELS ? Auteur : Alan Fustec Juillet 2012 En partenariat avec Le Label RSE de Référence Présentent leur livre blanc

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Mise en page 1LA RESPONSABILITÉ SOCIALE D’ENTREPRISE EST UNE SOURCE DE RICHESSE
ET DE PERFORMANCE POUR LES PME
OU COMMENT CRÉER DE LA RICHESSE EN ALLIANT LA RSE ET LE PILOTAGE
DES ACTIFS IMMATÉRIELS ?
En partenariat avec
Présentent leur livre blanc
3Livre Blanc édité par l’Agence LUCIE et l’IFEC • Juillet 2012
LA RESPONSABILITÉ SOCIALE D’ENTREPRISE EST UNE SOURCE DE RICHESSE
ET DE PERFORMANCE POUR LES PME
OU COMMENT CRÉER DE LA RICHESSE EN ALLIANT LA RSE ET LE PILOTAGE
DES ACTIFS IMMATÉRIELS ? Alan Fustec
Juillet 2012
5Livre Blanc édité par l’Agence LUCIE et l’IFEC • Juillet 2012 4 RSE et Actifs Immatériels : l’avenir des PME
PRÉFACE « Nous devons reconsidérer la notion de richesse, d’actifs et de performance… pour mieux piloter et développer la valeur des entreprises » Par François Jégard Expert-comptable / Commissaire aux comptes Président de la Commission « Responsabilité Sociale des Entreprises & Innovations » de l’IFEC.
Nous sommes intimement persuadés que les démarches de RSE constituent un puissant effet de levier pour les entreprises et une forte source de compétitivité. Aujourd’hui la valeur d’une entreprise réside plus dans sa capacité d’adaptation
et dans son agilité pour affronter des marchés à venir, que dans l’évaluation de sa capacité à repro- duire à l’identique les cash-flows de trésorerie qu’elle a su générer dans le passé. Les deux tiers de la valeur d’une entreprise sont généralement constitués par des actifs immaté- riels. Pourtant la plupart des tableaux de bord élaborés pour pilo- ter la performance des entreprises ignorent encore le suivi de leurs valeurs immatérielles. L’IFEC invite les Experts-comptables à revenir en force au cœur de leur métier de conseil, notamment en matière de contrôle de gestion, d'outils de pilotage budgétaire ou stratégique et d’intégrer dans ces
outils des données non-financières utiles au développement d’une politique RSE adaptée à chacune des entités conseillées. Ces travaux contribuent à renforcer durablement les relations client/cabinet et permettent d’aborder, au-delà des performances chiffrées, les décisions stratégiques que doivent prendre les chefs d'entreprise pour assurer le développement à long terme de leurs activités.
C’est dans cet esprit que l’IFEC et le Label LUCIE ont décidé, à l’occasion de la semaine du développement durable d’avril 2012, de promouvoir ensemble les démarches de RSE auprès des PME et des TPE. Je remercie très sincèrement Alan Fustec pour la rédaction de ce livre blanc qui démontre de manière très pédagogique tout l’intérêt que représente pour une PME d’adopter une démarche innovante de RSE ainsi que la valorisation et le pilotage de ses actifs immatériels, complément indispensable des outils de pilotage financier. L’IFEC entraîne résolument les Experts-comptables et Commissaires aux comptes à développer dans leur cabinet et au cœur de leur métier une démarche RSE constructive, pragmatique et raisonnée. L’IFEC a notamment publié la Charte du cabinet responsable, un cahier pratique dédié à la RSE dans les cabinets et mis en place des cycles de formation dédiés aux thématiques RSE : bilan carbone, Tour de France de la valorisation des entreprises par leur actifs immatériels, fil d’information twitter (Ifec_RSE) etc. La commission « Responsabilité Sociale des Entreprises & Innovations » de l’IFEC accueille en son sein celles et ceux qui souhaitent agir concrètement pour le développement de la RSE dans les cabinets et chez leurs clients.
Rejoignez nos groupes de réflexion. Vous êtes les bienvenus !
Contact : [email protected]
www.twitter.com/Ifec_RSE
Lancement du partenariat entre la commission RSE & Innovation de l’IFEC et le label RSE de référence
LUCIE, lors du salon Produrable. François Jégard, Bruno Pireyn
7Livre Blanc édité par l’Agence LUCIE et l’IFEC • Juillet 2012 6 RSE et Actifs Immatériels : l’avenir des PME
SOMMAIRE
• Présentation de l’auteur
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METTRE EN ŒUVRE LA RSE DANS UNE PME Qu’est-ce que la RSE ? page 12
Des exemples concrets de contenu page 15
Conduire un projet de RSE page 19
3
LA RELATION ENTRE RSE ET PERFORMANCE ÉCONOMIQUE Une relation à plusieurs facettes page 21
Impact de la RSE sur le compte de résultat page 23
Impact de la RSE sur la valeur de l’entreprise page 24
• Qu’est-ce que le capital immatériel ? • Capital immatériel et RSE
4
CONCLUSION : CONSÉQUENCES POUR L’EXPERT- COMPTABLE ET LE COMMISSAIRE AUX COMPTES page 35
AVANT-PROPOS A propos de l’Agence LUCIE Créée en 2009 à l’initiative de Qualité France Association (fédération d’asso- ciations de consommateurs créatrice de labels et de certificats de qualité depuis 65 ans), l’agence LUCIE a pour vocation d’administrer le label LUCIE. Ce label témoigne de l’engagement d’une organisation en matière de Responsabilité Sociétale selon les lignes directrices de l’ISO 26 000. L’Agence assure en outre, la promotion des organisations labellisées par des actions de communication mutualisées, anime la communauté des labellisés et met à leur disposition une large base de connaissances sur les différentes thématiques du Développement Durable. Sites web : www.labellucie.com et www.membres.labellucie.com
L’agence LUCIE a pour partenaires stratégiques l’AFNOR et VIGEO qui réalisent les audits de RSE préalables à la délivrance du Label. L’AFNOR est actionnaire de l’Agence, aux côtés de QFA notamment.
A propos de l’IFEC L’IFEC, le syndicat représentatif de l’ensemble de la profession comptable. Créé en 1962, et fort de ses 50 ans d’existence, l’IFEC, Institut Français des Experts-comptables et des Commissaires aux comptes, est le premier syndicat patronal de la profession comptable. Avec plus de 4.000 adhérents, répartis dans 27 sections régionales, l’IFEC représente tous les modes d’exercice de la profession d’Expert-comptable et de Commissaire aux comptes, et toutes les tailles de cabinet. Fortement investi dans le développement de la RSE (Responsabilité Sociale / Sociétale des Entreprises) auprès des cabinets d’expertise comptable et de commissariat aux comptes et de leurs clients, l’IFEC dispose d’une commission « RSE et Innovations » qui propose aux professionnels concernés une approche pragmatique et innovante de RSE adaptée aux problématiques spécifiques des professionnels du chiffre et du conseil.
8 RSE et Actifs Immatériels : l’avenir des PME 9Livre Blanc édité par l’Agence LUCIE et l’IFEC • Juillet 2012
1 INTRODUCTION : CHRONIQUE DE GRANDS CHANGEMENTS ANNONCÉS
L’humanité, en ce début de 21ème siècle a initié une profonde remise en cause de ses modes de fonctionnement. Ce mouvement, mondial, est né d’une triple prise de conscience largement parta- gée aujourd’hui.
PREMIÈRE PRISE DE CONSCIENCE : la dégradation de notre milieu de vie, la biopshère, est rapide, alarmante et ne se résume pas au réchauffement climatique : en France, 80 % des eaux de surface et 57 % des nappes phréatiques sont polluées1. Sur les 8 700 décharges officielles de l’Union Européenne, 1,2 milliard de tonnes de déchets s’accumulent dont une partie est extrêmement toxique (mercure, toluène, benzène…)2. Ainsi, la pollution de l’air, de l’eau et des sols entraîne une explosion de pathologies nouvelles chez l’homme : le nombre de cancers a augmenté en France de 63 % en 20 ans3. La progression de certaines pathologies animales est éga- lement inquiétante : la mortalité des abeilles, dans certaines régions, peut atteindre 10 fois la normale4. Rappelons qu’elles contribuent par la pollinisation à la survie et à l’évolution de 80 % des plantes. La cause de surmortalité des abeilles tient à plusieurs facteurs parmi lesquels : le parasite Varroa, la raréfaction des sources d’alimenta- tion liée à l’agriculture intensive, la baisse de la biodiversité végétale et l’impact des pesticides (5 000 substances chimiques commercia- lisées sont pathogènes ou mortelles pour les abeilles).
L’Institut a publié un Cahier Pratique dédié à la RSE, propose des formations spécifiques aux problématiques de RSE et de développement durable (Bilan Carbone™, Valorisation des entreprises par les actifs immatériels…) et est à l’origine de nombreuses publications, conférences, congrès et partenariats sur ces sujets.
Pour en savoir plus, Twitter : www.twitter.com/Ifec_RSE / IFEC_RSE , www.ifec.fr Contact : Henriette de Talhouët, Responsable Pôle Etudes et Publications,
139 rue du Faubourg St-Honoré, 75008 Paris - Tél : 01 42 56 83 19 [email protected]
A propos de l’auteur Alan Fustec est président fondateur du cabinet de conseil Goodwill-Management, spécialisé en Capital Immatériel et Responsabilité Sociale des Entre- prises. Ce cabinet, créé en 2003, compte à ce jour 14 collaborateurs. Il est également directeur général de l’Agence LUCIE qui délivre le label du même nom, premier label français de Responsabilité Sociale des Entreprises. Il est, par ailleurs, personnalité associée du CESE (Conseil Economique, Social et Environne- mental) ; directeur scientifique de l’Observatoire de l’immatériel et enseignant à HEC. Il est ingénieur agronome et docteur en biologie. Il est formateur à l’IFEC.
1 MNHN- Futura Sciences. 2 Eurostat. 3 Approche méthodologique du lien avec l’environnement – coll. Inserm 2005. 4 Agence Française pour la sécurité sanitaire des aliments – Rapport "Mortalités, effondrements et affaiblissements des colonies d’abeilles" 2008.
La somme des bonnes raisons sociales et environnementales qui militent pour une mise en œuvre rapide du développement durable ne semble donc pas suffisante malgré son ampleur. Je suis, compte tenu de mes fonctions, en relation permanente avec des centaines de PME françaises. J’observe que, dans les PME, la progression est encore assez lente. Cela s’explique notamment par la crainte des dirigeants de voir la performance économique de leur entreprise dégradée par l’ajout de nouveaux coûts et de nouvelles contraintes liées à la mise en œuvre de ce que l’on appelle la RSE (Responsabilité Sociale / Sociétale des Entreprises) qui est la déclinaison du développement durable dans le monde marchand.
Ces constats globaux comme locaux permettent de formuler plusieurs pronostics pour le futur : 1 • Le développement durable et la RSE ne sont pas des modes
passagères. La question pour le dirigeant n’est plus de savoir s’il faut intégrer ces concepts dans sa stratégie mais de savoir comment le faire ;
2 • La montée en puissance de la RSE va s’accélérer et est en train de devenir un élément incontournable dans l’inconscient collectif. Demain l’entreprise qui sera restée à l’écart sera disqualifiée ;
3 • Les dirigeants peuvent avoir, au sujet de la RSE, des idées reçues qui sont fausses. Ils peuvent, par exemple, penser que c’est une somme de coûts et de contraintes. Il est important de leur fournir à ce sujet des informations objectives et de les aider à changer de point de vue.
SECOND CONSTAT : L’épuisement des ressources naturelles concerne presque tous les domaines. La désertification touche 1/3 des terres émergées5 et la superficie mondiale des surfaces cultivables stagne depuis 2000 tandis que la population croît de 1,2 % par an6. 75 % des stocks halieutiques sont surexploités7 et les réserves connues de nombreux métaux seront, au rythme actuel de consommation, épuisés dans un avenir proche : Or : 17 ans, Argent : 13 ans, Cuivre : 31 ans, Zinc : 17 ans, Plomb : 22 ans, Palladium : 15 ans8. S’ajoute à cette liste, bien sûr, la question du pétrole.
TROISIÈME RÉALITÉ : La misère persiste. Malgré le développe- ment rapide de l’économie mondiale et la croissance régulière du PIB du plus grand nombre des pays de la planète, 925 millions d’êtres humains souffrent de sous-alimentation. Plus de 3,5 milliards d’individus sont victimes de malnutrition (carences en fer, iode, vitamine A)9. 2 habitants de la planète sur 3 courent le risque de manquer d’eau douce à brève échéance (consommation multipliée par 6 en 20 ans10). Un quart de l’humanité (2,5 milliards de personnes) consomme une eau polluée parce que nous produi- sons mille fois plus de produits chimiques qu’en 1935 et qu’une grande partie finit dans l’eau11. En outre, 250 millions d’enfants dans le monde travaillent dans des conditions épouvantables12.
Si la prise de conscience a bien eu lieu comme le montre l’émer- gence du concept de développement durable (tenue régulière de sommets organisés par l’ONU ou encore, en France, le Grenelle de l’environnement) nous pouvons constater que le vrai passage à l’acte est encore à venir. Les progrès constatés au cours de la dernière décennie sont malheureusement bien trop lents au regard des enjeux : une majorité écrasante des indicateurs précités poursuivent leur dégradation régulière.
11Livre Blanc édité par l’Agence LUCIE et l’IFEC • Juillet 2012 10 RSE et Actifs Immatériels : l’avenir des PME
5 6 7 Saquet Anne-Marie Atlas mondial du développement durable, Autrement, 2002. 8 Sciences et Vie hors Série N° 243 Juin 2008. 9 Rapport Annuel d’activité 2010 Action contre la Faim. 10 Laurent de Bartillat et Simon Retallack, Stop, le Seuil, 2003. 11 Laurent de Bartillat et Simon Retallack, Stop, le Seuil, 2003. 12 Selon Unicef.
Dans ce contexte, la vocation du présent livre blanc est triple : Présenter ce que peut être une démarche RSE pour une PME Montrer que l’engagement renforce la performance économique Exposer les opportunités que cela représente pour l’Expert- comptable ou le Commissaire aux comptes
Au travers de cette définition, trois concepts majeurs qui fondent la RSE sont clairement révélés : en premier lieu son rattachement au développement durable ; en second lieu sa prise en compte de l’éthique que l’on peut aussi traduire de façon vulgarisée comme « la volonté de prendre en compte les intérêts de toutes les parties prenantes » ; en troisième lieu, la volonté d’intégrer ces concepts et pratiques au cœur de l’ADN de l’entreprise et non pas à sa surface.
Cette norme internationale, publiée au terme de 5 ans de discus- sion impliquant 90 pays, comporte 7 questions centrales : 1 • Gouvernance de l’organisation, 2 • Respect des droits de l’homme, 3 • Respect des salariés, 4 • Respect de l’environnement, 5 • Bonnes pratiques des affaires, 6 • Respect des consommateurs et clients, 7 • Engagement pour la société civile.
Fig. 1 : Les 7 questions centrales de l’ISO 26 000
Engagement sociétal
de l’organisation
13Livre Blanc édité par l’Agence LUCIE et l’IFEC • Juillet 2012 12 RSE et Actifs Immatériels : l’avenir des PME
2 METTRE EN ŒUVRE LA RSE DANS UNE PME
QU’EST-CE QUE LA RSE ?
La mise en place d’une politique de responsabilité sociale dans une entreprise vise à établir un mode de fonctionnement qui respecte toutes les parties prenantes (les clients, les salariés, les fournisseurs, l’environnement, etc.) et qui prenne en compte leurs intérêts.
La norme ISO 26 00013 publiée le 1er Novembre 2010 est désormais le référentiel mondial de la RSE (ou de la RSO – Responsabilité Sociétale des Organisations), qu’elle définit comme : « la respon- sabilité d’une organisation vis-à-vis des impacts de ses décisions et activités sur la société et sur l’environnement, se traduisant par un comportement transparent et éthique qui :
• Contribue au développement durable, y compris à la santé et au bien-être de la société,
• Prend en compte les attentes des parties prenantes, • Respecte les lois en vigueur et est en accord avec les normes internationales de comportement,
• Est intégré dans l’ensemble de l’organisation et mis en œuvre dans ses relations. »
13 L’ISO 26 000 en bref : Norme internationale de responsabilité sociétale des organisations. Elle définit un cadre pour les organisations souhaitant adopter un comportement responsable en matière sociale et environnementale. Cette norme d’un nouveau genre, parue le 1er novembre 2010, a pour spécificité d’être non-certifiable, contrairement à d’autres normes internationales comme l’ISO 9 001 (qualité) ou l’ISO 14 001 (management environnemental). Basée sur des recommandations et non sur des exi- gences, sa vocation est de définir les grandes thématiques de la RSE applicables à une organisation et non d’évaluer un niveau de performance dans ces domaines. C’est la raison pour laquelle des la- bels nationaux, comme LUCIE, alignés sur l’ISO 26 000 sont nécessaires pour apporter la preuve d’un niveau d’engagement réel et sérieux en la matière.
DES EXEMPLES CONCRETS DE CONTENU POUR LES POLITIQUES SOCIALES ET ENVIRONNEMENTALES
Un grand nombre d’approches ou de méthodologies permettent à l’entreprise de progresser dans la réduction de ses externalités environnementales.
En voici quelques exemples :
L’éco-efficacité vise à rendre l’entreprise moins énergivore, moins consommatrice de matière première et moins productrice de déchets sans remettre en cause son système de production. Les progrès constatés peuvent être considérables. Par exemple, au cours des dernières années le TPS (Toyota Production System) a permis, dans les usines du groupe, de réduire de 18 % la consom- mation d’énergie et de 22 % la consommation d’eau.
L’écoconception est un concept différent qui vise à revoir totalement la conception du produit afin que celui-ci garde ses fonctions pour l’utilisateur mais avec un impact environnemental nettement réduit. Il est, par exemple, nécessaire de mettre en place une démarche d’écoconception pour concevoir, puis réaliser un bâtiment à énergie positive, c’est-à-dire qui produit plus d’énergie qu’il n’en consomme. Il y en a de plus en plus autour de nous aujourd’hui et leur conception a radicalement changé par rapport aux pratiques antérieures.
L’économie circulaire vise à produire très peu de déchets soit parce que les produits sont biodégradables, soit parce qu’ils sont recyclés. C’est le cas des moquettes proposées par la société Interface Flor qui recycle elle-même les dalles de moquette usagées.
L’écologie industrielle : c’est une forme élargie d’économie cir- culaire : un industriel revend ses excédents ou ses déchets à un autre industriel pour qui ce sont des ressources. C’est le cas, par exemple au sein du CEIA (Club d’Ecologie Industrielle de l’Aude)14
La PME qui entend mettre en œuvre une démarche de RSE de manière réelle et sérieuse fait en sorte que sa stratégie, ses politiques et ses modes de fonctionnement prennent en compte les exigences de ces 7 chapitres et des thématiques qui les composent.
Nous ne présenterons pas ici tous ces sujets (ou domaines d’action, selon la terminologie de l’ISO 26 000).
En voici toutefois une illustration : les “domaines d’action“ de la question centrale 4 relative à l’environnement.
• Domaine d’action 1 : Prévention de la pollution ; • Domaine d’action 2 : Utilisation durable des ressources ; • Domaine d’action 3 : Atténuation des changements climatiques et adaptation ;
• Domaine d’action 4 : Protection de l’environnement, biodiversité et réhabilitation des habitats naturels.
Il y a, au total, 37 domaines d’action dans l’ISO 26 000 répartis dans les 7 chapitres précités.
Le simple exposé de ces domaines d’action montre à quel point une démarche RSE est de nature à provoquer une profonde muta- tion des modes de fonctionnement d’une PME. En effet, la politique commerciale, la gestion des ressources humaines, les relations avec la société civile, etc., sont impactées par une démarche RSE.
De prime abord ces impacts peuvent générer, chez le dirigeant, une forme d’inquiétude liée à l’ampleur des changements que cela pourrait occasionner.
Mais en réalité, sur de nombreux points, sans le savoir, les entre- prises qui sont attirées par le concept de RSE agissent naturellement de façon conforme aux recommandations de l’ISO 26 000. En outre, comme nous le verrons plus bas, ces modes de fonctionnement sont rentables.
15Livre Blanc édité par l’Agence LUCIE et l’IFEC • Juillet 2012 14 RSE et Actifs Immatériels : l’avenir des PME
14 Alexandre Dain Analyse et évaluation de la pérennité des démarches d’écologie industrielle et terri- toriale – Thèse de Master – Université Sherbrooke et Troye - 2010.
Formation et employabilité des salariés : la responsabilité de l’em- ployeur est, par ailleurs, d’aider les salariés à progresser, de main- tenir leurs compétences en phase avec l’évolution des techniques de sorte qu’ils restent employables dans un monde qui bouge vite. Ceci passe par les politiques de formation, de mobilité fonction- nelle (passage d’un métier à l’autre) et de gestion des carrières. En 2009, France Télécom a consacré 5,6 % de sa masse salariale à la formation17 alors que la moyenne pour les entreprises de plus de 10 salariés s’établit à 2,9 %18 et que, pour toutes entreprises confondues, 26 % des entreprises françaises ne forment pas leurs salariés19.
Les conditions de travail et le climat au travail : en dehors des sujets qui impactent la santé et la sécurité des salariés, l’entreprise responsable cherche à ce que les conditions de travail (confort, espace, bruit, éclairage, ergonomie des outils…) soient bonnes et que le climat de travail soit positif. Certaines entreprises sont citées en référence sur ce thème comme le montre le classement Great Place to Work qui distingue (top 5) : Pepsico, Microsoft, Mars Percare and Food, Davidson Consulting et Leroy Merlin (Classement 2012).
La Rémunération et les avantages : ce thème est bien sûr essentiel puisqu’il constitue la première motivation pour travailler. Dans ce domaine, l’entreprise responsable s’assure que les conditions de rémunération et les avantages qu’elle accorde (congés, primes, avantages en nature) sont en phase avec les standards de sa pro- fession et que les conditions sont équitables au sein du personnel.
La gestion des carrières : ce point a un fort impact sur le dévelop- pement des compétences, la rémunération mais aussi l’entretien de la motivation et de la satisfaction. Ici, l’entreprise responsable cherche à offrir de vraies perspectives à ses salariés. Ainsi, chez Monoprix par exemple, 70 % des cadres sont issus de la promotion interne20.
où la charcuterie AT France (Troyes) a mis en œuvre une chaudière qui brûle la graisse de porc (éco-efficacité). Du coup l’énergie est gratuite et les déchets disparaissent. En outre, l’entreprise vend une partie de l’énergie qu’elle produit en excé- dent à une blanchisserie voisine, la société Dubix.
L’économie positive : Ce concept très ambitieux vise à faire en sorte que les activités humaines aient non plus des impacts négatifs mais positifs sur l’environnement. Dans leur livre Réparer la planète, Maximilen Rouer et Anne Gouyon15 proposent de multiples solutions d’économie positive : par exemple, ils rappor- tent les techniques agricoles de Saveol (leader français de la production de tomates) qui a remplacé l’usage de pesticides par des techniques de lutte biologique (les agents qui menacent les plans de tomates : pucerons, mouches… sont éradiqués par des insectes amis : coccinelles ou guêpes). En outre, l’entreprise ne chauffe plus ses serres au gaz mais au bois, etc.
Sur le plan social, le nombre de bonnes pratiques disponibles qu’une entreprise peut mettre en œuvre est également important.
A nouveau voici quelques exemples :
Sécurité et santé des personnes au travail : c’est une base de la responsabilité de l’entreprise de ne pas mettre les salariés en danger à leur poste. A cet égard, notons que les écarts de risque au travail sont énormes d’une entreprise à l’autre. Le taux de fréquence des accidents du travail (nombre d’accidents par million d’heures travaillées) est de 29,7 en France. Il atteint 100, voire plus, dans certaines entreprises mais seulement 5, voire moins, dans celles qui en ont fait un sujet prioritaire. Par exemple, Air Liquide malgré ses métiers dangereux est l’une des plus vertueuses en matière de sécurité avec un taux de fréquence groupe en 2011 de 1,716.
17Livre Blanc édité par l’Agence LUCIE et l’IFEC • Juillet 2012 16 RSE et Actifs Immatériels : l’avenir des PME
15 Jean-Claude Lattes, 2005. 16 Rapport Annuel de Développement durable 2011.
17 francetelecom.com/fr_FR/presse/communiques/cp090421_fr1.jsp 18 La dépense nationale pour la formation professionnelle continue et l’apprentissage, en 2007 ? DARES - 2009.
19 Ministère de l’emploi et de la formation. 20 Rapport Annuel de développement durable de Monoprix.
CONDUIRE UN PROJET DE RSE
Pour faire passer l’entreprise d’un niveau donné de maturité à un niveau plus élevé, la meilleure formule, à mes yeux, consiste à engager un projet d’entreprise.
L’expérience montre, en effet, que les salariés sont très motivés pour y participer. Selon une étude de Macif Gestion en 2008 sur la place de la RSE dans les entreprises du CAC 40, la RSE est un facteur de motivation des salariés.
Ce projet n’est pas une dépense mais un investissement rentable, comme nous le verrons plus loin. En outre, entendu que la RSE est un engagement volontaire, les dirigeants peuvent engager les travaux à leur vitesse. Le cadencement du projet peut être lent ou soutenu : chaque entreprise peut choisir son rythme et progres- ser dans le domaine du développement durable sans stress.
Il est toutefois souhaitable de prévoir des modalités qui permettent à l’entreprise de progresser à long terme malgré les écueils et les difficultés du quotidien. Un projet RSE est une démarche de longue haleine qui a pour risque principal l’enlisement. Il faut y être attentif.
Fig. 2 : Le synoptique d’un projet RSE
ENTRÉE TRAITEMENT SORTIE
• Définir le contenu • Estimer • Affecter • Planifier • Spécifier • Réaliser • Mettre en service • Piloter • Rendre compte
• Politique (texte) • Procédures • Indicateurs • Actions de pilotage
Diagnostic Changements effectifs
Système de management
Dialogue avec les parties prenantes
La qualité du dialogue social : le dialogue social est une exigence réglementaire. Le simple fait d’avoir des délégués du personnel, un CE et un CHSCT ne signifie nullement que l’entreprise est responsable sur ce thème. Tout dépend de la qualité des relations, de la réalité d’une coopération entre les instances représentatives du personnel et les dirigeants pour développer l’entreprise. La simple lecture de quelques comptes rendus de réunion de CE suffit à se forger une opinion sur la qualité du dialogue social !
Diversité et lutte contre la discrimination : l’entreprise responsa- ble s’assure que les processus de gestion des ressources humaines ne font l’objet d’aucune discrimination relative au genre, à l’origine ethnique ou sociale, aux convictions politiques ou religieuses, à l’âge ou au handicap. C’est d’autant plus important que la discrimination est une réalité en France. Selon une étude publiée par Le Défenseur des Droits (ex. Halde), les personnes qui ont des origines étrangères (notamment maghrébines) ont en moyenne 22 % de chances de moins d’être convoquées à un entretien. Les personnes trop jeunes ou trop vieilles ont 42 % de chances de moins de l’être.
Le contenu d’une démarche RSE inclut également de nombreuses bonnes pratiques, qu’on ne présentera pas afin de ne pas être trop long.
Notons que l’entreprise qui veut approfondir ces questions a à sa disposition une littérature professionnelle abondante, peut accéder à des plateformes d’information sur internet, etc. Elle peut aussi devenir membre d’un club d’entreprises qui engage des démarches RSE. Il en existe en France un grand nombre parmi lesquels : Dirigeants Durables en Midi-Pyrénées, Dirigeants Responsables de l’Ouest, le Réseau Alliances dans le Nord, Idée- Alsace, l’association GRANDDE à Rouen, etc.
19Livre Blanc édité par l’Agence LUCIE et l’IFEC • Juillet 2012 18 RSE et Actifs Immatériels : l’avenir des PME
Pour gérer ce risque, j’ai trouvé une solution assez efficace et je m’y suis engagé. J’ai décidé, il y a quelques années, de prendre une participation dans le label LUCIE qui est délivré aux entreprises qui atteignent un bon niveau de maturité dans leur engagement en RSE. LUCIE est le premier label Français aligné sur les exigences de la norme ISO 26 000 qui a la particularité de n’être pas certifiable (voir précédemment). Cet engagement était risqué à l’époque car les PME ne se montraient pas toujours très motivées pour mettre en œuvre des projets RSE de façon approfondie. Fort heureusement, les choses ont depuis évolué dans la bonne direction. Mon choix a été motivé par deux raisons principales : D’une part, pour aider les entreprises sincères à se distinguer de celles qui font du “greenwashing”, un label servant de preuve leur était nécessaire. D’autre part, le label est un excellent but à atteindre dans le cadre d’un projet RSE. Il est structurant et motivant pour l’équipe projet et pour toute l’entreprise dont il récompense les efforts.
21Livre Blanc édité par l’Agence LUCIE et l’IFEC • Juillet 2012 20 RSE et Actifs Immatériels : l’avenir des PME
3 LA RELATION ENTRE RSE ET PERFORMANCE ÉCONOMIQUE
UNE RELATION À PLUSIEURS FACETTES Depuis que le concept de développement durable a fait son apparition dans l’économie, une question-clé se pose. La RSE crée-t-elle de la valeur ? Le sujet est crucial car si la réponse est positive, toutes les entreprises ont intérêt à mettre en place des politiques ambitieuses de développement durable. Mais, à l’inverse, si la réponse est négative, les changements que la biosphère et la société civile réclament à grands cris risquent d’être beaucoup trop lents. Malheureusement, il est impossible de soutenir que, par essence, la RSE est rentable comme le montre le tableau ci-dessous.
C’est pour cette raison que les dirigeants de PME hésitent parfois à s’engager : « le développement durable c’est bien mais je suis en
Fig. 4 : les 4 relations possibles entre RSE et rentabilité : le dirigeant doit chercher la combinaison gagnante (case en haut droite) pour que son action responsable puisse durer.
ACTIONS PAS RENTABLES
Fig. 3 : Échantillon de la communauté LUCIE (Juin 2012)
Ainsi voyons-nous que, lorsqu’elle est conduite avec discerne- ment, la politique de développement durable impacte à la fois le compte de résultat (accroissement du CA, économies et réduction des risques) mais qu’elle a également une influence sur la valeur de l’entreprise au travers de son capital immatériel.
IMPACT DE LA RSE SUR LE COMPTE DE RÉSULTAT L’un des actionnaires de l’Agence LUCIE, Goodwill-Management, dont je suis le fondateur et le dirigeant, est un cabinet de conseil en développement durable spécialisé dans la mesure du capital immatériel et de la performance économique de la RSE. La planche ci-après montre quelques bilans économiques que l’entreprise a réalisés au cours des 7 dernières années. Par exemple :
• Des études relatives aux coûts et aux bénéfices d’une politique de lutte contre la discrimination et de management de la diver- sité ont été réalisées par Goodwill-Management pour le compte de Adecco, Axa, l’Oréal, Vinci et Orange. Leur conclusion est que, lorsqu’il est bien géré, l’accroissement de la diversité est renta- ble pour l’entreprise.
• A la demande de Carrefour, les coûts et les bénéfices écono- miques de la politique qualité de l’enseigne sur les produits de la marque ont été étudiés. Une fois encore, la conclusion est que la politique qualité conduite par ce grand groupe est rentable.
• Gecina est l’une des plus grandes foncières françaises. Une étude de la rentabilité de sa politique de construction responsa- ble a également montré que celle-ci était rentable.
compétition avec des entreprises chinoises qui n’en ont que faire. Le jeu n’est pas égal : si je rajoute des actions coûteuses à mon fonctionnement, je me disqualifie ». Cette idée doit être combattue car elle est fausse: la mise en œuvre du développement durable en entreprise, lorsqu’elle est conduite avec pertinence, entraîne un accroissement de la performance économique. Il faut simplement pour y parvenir que l’entreprise prenne en compte simultanément ses orientations de RSE et les impacts économiques de ses décisions. De nombreux dirigeants parmi mes clients qui ont procédé de la sorte concluent qu’il existe 4 façons de combiner astucieusement RSE et rentabilité et de se trouver ainsi toujours dans “a bonne case” du schéma ci-dessus : 1 • Développer l’activité de l’entreprise grâce à des innovations
responsables (action pour une croissance du chiffre d’affaires). 2 • Réduire les consommations (énergie, matières premières…)
et, par conséquent, faire des économies. 3 • Réduire les risques (accidents, gaspillages…) et faire aussi des
économies à long terme. 4 • Développer son capital immatériel.
Fig. 5 : Quatre façons de conjuguer RSE et performance économique
Produits éco-conçus : accroissement du CA
Bâtiments plus sobres en énergie : économies
La RSE réduit les risques : Generali propose des contrats d’assurance à des tarifs préférentiels aux entreprises engagées dans la RSE
L’innovation responsable produit de la richesse immatérielle : ici des brevets
Pour agrandir la case, on peut :
Vendre plus ou mieux Réduire les dépenses
Réduire les risques Améliorer le capital
Amélioration du capital de savoir de l’entreprise
lié aux innovations dont les mobiles sont
environnementaux
4
23Livre Blanc édité par l’Agence LUCIE et l’IFEC • Juillet 2012 22 RSE et Actifs Immatériels : l’avenir des PME
Les membres de l’Observatoire de l’Immatériel ne remettent pas ce principe en cause mais y rajoutent un questionnement de bon sens : D’où vient la rentabilité future ? Quels en sont les facteurs de production ? La réponse à cette question est évidente : pour dégager une rentabilité dans le futur, il faut que des clients, demain comme aujourd’hui, achètent les produits de l’entreprise. Mais que faut-il pour créer des produits (ou des services) prêts à la vente ? Des machines, des actifs financiers, des hommes, des brevets, des marques, une organisation…
Il apparaît donc ici que les actifs d’une entreprise : ses facteurs de production de la richesse future sont, d’une part, visibles au bilan : immobilisation, actifs circulants et quelques incorporels mais sont, d’autre part, en dehors du bilan : les clients, les hommes, l’organisation, les fournisseurs. C’est ce qui explique que la valeur d’une entreprise est rarement égale à sa valeur comptable car le cédant vend tous les actifs requis pour perpétuer le processus de création de richesse. En effet, l’acquéreur peut se dire « j’achète des cash-flows futurs » ou encore « j’achète les cash-flows futurs, qui existent d’ores et déjà à l’état latent, dans ces actifs qui en sont les facteurs de production ».
Ainsi, l’étude du bilan ne permet pas de cerner la qualité des facteurs de production de la richesse future. Le business plan qui est un compte de résultat prévisionnel (une promesse) ne le permet pas non plus.
Le capital immatériel est la discipline économique qui vise à étudier la qualité (ou la valeur) de tous les facteurs de production de richesse dont une entreprise dispose. Cette approche part d’une “évidence“ : les finances ne sont pas la source de la création de richesse mais son résultat. Il est donc plus pertinent, pour analyser le potentiel d’une affaire de se focaliser sur les sources de création de richesse, leur qualité, leur solidité, etc., plutôt que de mesurer la richesse accumulée par le passé (analyse du bilan) en partant du principe que les facteurs de production de richesse d’hier sont intacts pour produire la valeur de demain.
D’autres études illustrées par le tableau ci-dessous aboutissent à des conclusions analogues.
Ainsi, contrairement à une idée reçue, la RSE ne fragilise pas l’entreprise, elle la renforce.
IMPACT DE LA RSE SUR LA VALEUR DE L’ENTREPRISE
QU’EST-CE QUE LE CAPITAL IMMATÉRIEL ?
Dans l’approche financière classique, la valeur d’une entreprise correspond à l’actualisation de ses cash-flows futurs.
Fig. 6 : La RSE est rentable à condition de faire les bons choix
Goodwill-management a montré la rentabilité de la RSE dans de très nombreuses situations
Politique qualité : rentable
Construction HQE : rentable
Politique sociétale : rentable
Plan de réduction de la production de déchats, de la consommation d’eau et d’énergie : évidemment rentables
C’est pour cette raison que l’Agence LUCIE a intégré à son bouquet de services gratuits pour ses labellisés un programme de mesure en continu de la rentabilité des actions RSE réali- sées en leur sein.
25Livre Blanc édité par l’Agence LUCIE et l’IFEC • Juillet 2012 24 RSE et Actifs Immatériels : l’avenir des PME
Constatons également, sur la figure ci-dessous, qu’au sein de la valeur des entreprises en bourse, il y a beaucoup “de gaz” : la valeur des actifs matériels et financiers ne représente, en effet, que 15 à 22 % de la valeur totale.
Dans le cadre de ses travaux, l’Observatoire de l’immatériel a produit Thésaurus-Bercy, le référentiel français de mesure du capital immatériel des entreprises.
Cette méthodologie lui a été commandée par le ministère de l’écono- mie et des finances en 2009. Elle a été publiée en 2011. Elle identifie 10 classes d’actifs immatériels25, indispensables pour amorcer et perpétuer un processus de création de valeur. Thésaurus-Bercy est accessible sur le site de l’Observatoire et libre de droits.
Fig. 8 : La valeur des entreprises du CAC 40 est surtout “gazeuse”
Décomposition de la capitalisation boursière du CAC 40 (source Ricol & Lasteyrie)
En Ma €
622
170 185
A la fin des années 1980, deux auteurs suédois (Leif Edvinsson21 et Karl Eric Sveiby22) ont engagé une réflexion théorique de premier plan sur le capital immatériel : la richesse de l’entreprise invisible dans les états financiers. Ce concept a connu, depuis lors, un fort développement, notamment en France. Goodwill-Management, spécialisé dans la mesure du capital immatériel, est l’un des fondateurs de l’Observatoire de l’immatériel et de l’Ecole Française de l’Immatériel qui font beaucoup pour promouvoir cette discipline en France.
Selon les travaux de ces structures, la valeur des entreprises est immatérielle aux 2/323. Retenons, aussi, que la banque mondiale estime que l’économie française est immatérielle à 86 %24 !
27Livre Blanc édité par l’Agence LUCIE et l’IFEC • Juillet 2012 26 RSE et Actifs Immatériels : l’avenir des PME
21 Edvinsson L. and Malone M.S. (1997), Intellectual Capital, Harper Collins Publishers, inc. New York. 22 Sveiby Sveiby K.E. (1997), New Organizational Wealth: Managing and Measuring — validating new indicators by analyzing application rationales, Elsevier.
23 Fustec, A. et Marois, B. (2006), Valoriser le capital immatériel de l’entreprise, Editions d’Organisation. 24 Kirk Hamilton & al. (2005) Where Is the Wealth of Nations ? Measuring Capital for the XXI Century, World Bank Publications, Washington.
25 Fustec. A. et al (2011), Thésaurus-Bercy : référentiel de mesure de la valeur extra-financière et financière des actifs immatériels d’entreprises – Rapport au Ministère de l’économie et des finances. 149 pages.
Fig. 7 : Un échantillon d’entreprises françaises qui utilisent Thésaurus-Bercy.
• Le capital territorial ou sociétal : l’entreprise a besoin d’un bon capital sociétal car la délinquance, les tensions sociales voire les guerres civiles ou les renversements de gouvernements ne sont pas propices à un bon développement économique.
La bonne compréhension du processus de création de richesse au cœur duquel se trouve le capital immatériel permet de récon- cilier le manager et le financier. Cette compréhension révèle, en effet, que la valeur de l’entreprise est composée de trois phases : • Du solide (les immobilisations) • Du liquide (les actifs circulants) • Du gaz (les actifs immatériels)
Et, dans ce cadre, le rôle du dirigeant est, en premier lieu, de “créer du gaz” : recruter des bons collaborateurs, trouver des bons clients, mettre au point de bons procédés, etc. Ensuite, à partir de cette richesse latente (valeur des hommes, des clients, des brevets, des marques, etc.), le dirigeant doit agir, prendre de bonnes décisions pour que le gaz devienne du liquide : du cash. Ce qui revient à dire, selon cette analogie, que le dirigeant est un compresseur.
Le management moderne par la valeur matérielle et immatérielle impose donc de mesurer en permanence la qualité de son gaz (de son capital immatériel) et de sa compression (de son management).
L’arbre page suivante (Fig 9) montre la notation (sur 20) du capital client B to B d’une entreprise selon Thésaurus-Bercy. On y voit que l’actif client est décomposé en éléments plus simples : le carnet de commande, la satisfaction des clients, le risque client, etc. et que chaque élément terminal de l’arborescence reçoit une note sur 20. Les notes des composants de niveau supérieur s’obtiennent par des moyennes (composants bleus) ou des multi- plications (composant rouge) ce qui permet de donner une note de synthèse à l’actif. Les notes sont elles-mêmes obtenues grâce à une batterie d’indicateurs étalonnés (Fig 10).
Que faut-il pour fabriquer un produit ? Il faut une liste d’actifs assez longue où l’on trouvera évidemment des actifs matériels et financiers (des machines, des bureaux, des tables, des chaises, des réserves financières permettant de financer le BFR, etc.) mais aussi : 1 • Des clients qui permettront à l’entreprise de se développer s’ils
sont fidéles, solvables, en croissance régulière, etc. ; 2 • Des hommes : que l’on espère compétents, motivés, sociables
et fidèles à l’entreprise, etc. ; 3 • Une organisation : une structure claire, des processus
efficaces, etc. ; 4 • Un système d’information : avec une bonne couverture métier,
un bon niveau de service, une bonne robustesse, etc. ; 5 • Des savoir-faire : dont certains peuvent être protégés par des
brevets ; 6 • Une marque : qui est connue et inspire confiance parce qu’elle
véhicule auprès du client les valeurs, les compétences et la fiabilité de l’entreprise ;
7 • Des partenaires et fournisseurs : des sous-traitants, des constructeurs d’ordinateurs ou de voitures, des partenaires financiers, etc.
Cette liste de 7 actifs représente les composants du fonctionnement de l’entreprise au quotidien mais il faut en rajouter 3 autres, encore moins visibles au jour le jour, sans lesquels rien n’est possible :
• Les actionnaires : l’actionnaire est un actif immatériel qu’on ne voit pas au bilan. Le bilan ne fait apparaître que les fonds qu’il a prêtés à l’entreprise. Mais selon que l’actionnaire est patient ou non, de bon conseil ou dormant, influent ou inconnu... il n’a pas la même valeur pour l’entreprise.
• Le capital naturel : dans le bilan d’un hôtel de Meribel, on ne voit pas la neige. Mais s’il n’y a plus de neige à Meribel : la valeur de l’hôtel fond également ! On voit donc bien que l’environnement est un facteur de production de richesse indispensable mais invisible au bilan. C’est donc bien un actif immatériel.
29Livre Blanc édité par l’Agence LUCIE et l’IFEC • Juillet 2012 28 RSE et Actifs Immatériels : l’avenir des PME
En complément de ces évaluations extra-financières, la méthode Thésaurus-Bercy, ainsi que d’autres qui en découlent, permettent aujourd’hui le calcul de la valeur économique des entreprises. La figure 11 présente, par exemple, l’établissement de la Reference Value pour des entreprises du CAC 40. La méthode a été dérivée de Thésaurus-Bercy et adaptée aux grands groupes. C’est une valorisation de type DCF (Discounted Cash Flows) qui intègre dans son facteur d’actualisation (en alternative au WACC) la qualité des actifs immatériels de l’entreprise.
31Livre Blanc édité par l’Agence LUCIE et l’IFEC • Juillet 2012 30 RSE et Actifs Immatériels : l’avenir des PME
Société
bourse En M€ En
boursière Cours de bourse en €/action
Total S.A. 139 310 59,1 97 856 41,5 42,4 % LVMH Moët Hennessy Louis Vuitton 126 203 248,5 63 959 126,0 97,3 % Sanofi S.A. 118 767 88,6 75 909 56,6 56,5 % L’Oréal S.A. 95 943 159,6 52 148 86,8 84 % GDF Suez S.A. 88 706 39,4 43 859 19,5 102,3 % Danone S.A. 72 659 113,1 33 108 51,6 119,5 % Electricité de France S.A. 61 333 33,2 33 770 18,3 81,6 % BNP Paribas S.A. 52 468 43,4 49 752 41,2 5,5 % Schneider Electricité S.A. 51 118 93,1 26 800 48,8 90,7 % AXA S.A. 49 174 20,9 27 891 11,8 76,3 % France Telecom 47 563 18,0 29 191 11,0 62,9 % Air Liquide S.A. 42 376 149,3 27 240 95,9 55,6 % Société Générale S.A. 40 761 52,5 18 455 23,8 120,9 % Vivendi 38 404 30,8 17 268 13,8 122,4 % ArcelorMittal 31 245 20,0 23 712 15,2 31,8 % Pernod Ricard S.A. 24 870 93,9 20 651 78,0 20,4 % Crédit Agricole S.A. 24 659 9,9 11 601 4,6 112,6 % Renault S.A. 24 169 81,7 11 450 38,7 111,1 % Compagnie de Saint-Gobain S.A. 23 337 43,6 18 257 34,1 27,8 % Vinci S.A. 23 013 40,6 21 760 38,4 5,8 %
Comment évaluer un segment du capital client B to B ?
9 %, instable
Assez bonne
Sources : Agence RVS et FACTSET.
Selon la Référence Value®, le CAC 40 serait aujourd’hui à 5 000 points.
Note En moyenne le volume du portefeuille est de : Si pas de données sectorielles, en moyenne le volume du portefeuille est de :
Source Etudes sectorielles + interview dirigeants Question aux dirigeants
20 2 fois le volume moyen du secteur 1 an et plus
15 1,5 fois le volume moyen du secteur 6 mois
10 Volume moyen du secteur 3 mois
5 0,5 fois le volume moyen du secteur Un mois de CA
0 0 Vide
Carnet de commande
14
14
Fig. 9 : Évaluation extra-financière du capital client d’une entreprise selon Thésaurus-Bercy
Fig. 10 : Exemple d’indicateur étalonné du capital client : le carnet de commande
Fig. 11 : Classement des entreprises du CAC 40 établi selon leur capitalisation en Reference Value® en M€ (au 7 mars 2012, clôture de la Bourse)
La figure 12 présente 3 façons de voir la même entreprise : celle du financier, celle de l’analyste RSE et celle de l’analyste immatériel.
Ce tableau révèle que la RSE se centre sur ce que l’entreprise fait : Agit-elle avec éthique ? Respecte-t-elle ses clients, ses salariés, l’environnement, etc. ?
Mais l’approche Capital Immatériel ne regarde nullement ce que l’entreprise fait. Elle étudie ce que l’entreprise possède : des actifs.
Le grand enseignement de cette analyse est qu’à force d’agir sans éthique, les actifs finissent par être altérés.
Il est possible de présenter la chose de façon plus comptable : si l’entreprise veut avoir de bons actifs matériels et immatériels, quelles sont les contreparties dont-elle doit s’acquitter ? Cette question nous renvoie à la structure du bilan comptable en regard de ce que j’ai, j’inscris ce que je dois.
Le capital immatériel et la RSE nous amènent à proposer le bilan étendu des ressources et des emplois : Si je veux un bon capital naturel, il me faut m’acquitter de ma dette environnementale, etc.
33Livre Blanc édité par l’Agence LUCIE et l’IFEC • Juillet 2012
CAPITAL IMMATÉRIEL ET RSE
La mise en place d’une politique de responsabilité sociale et environnementale n’a pas pour vocation de développer le capital immatériel mais de respecter et de préserver toutes les parties prenantes de l’entreprise (les clients, les salariés, les fournisseurs, l’environnement, etc.) et de prendre en compte leurs intérêts.
Le capital immatériel nous révèle que ces parties prenantes sont aussi des actifs immatériels, comme nous l’avons vu plus haut pour le capital naturel :
• Sans neige, les hôtels d’une station de ski perdent de la valeur ; • Les marées vertes (prolifération d’algues) en Bretagne, liées à l’excès d’engrais, qui se retrouvent dans les eaux littorales réduisent aussi l’attractivité des stations balnéaires ;
• L’assèchement des nappes phréatiques peut ruiner tous les agriculteurs d’une région ;
• Katrina fut un fléau pour toutes les entreprises de la Nouvelle Orléans, que l’exercice de leur activité ait ou non besoin du milieu naturel : la SSII a été pénalisée autant que la clinique, que la banque ou que l’exploitation agricole.
Ainsi, la politique environnementale d’une entreprise est-elle un plan d’action qui vise à préserver un actif : la nature.
De même, il est évident qu’une entreprise qui agit sans éthique et qui, de ce fait, épuise son capital humain ou porte atteinte à son capital client, détruit de la valeur.
La mise en place d’une politique de RSE apparaît donc ici clairement comme une condition nécessaire à la création ou à l’entretien de bons facteurs de production de richesse, c'est- à-dire au développement du capital immatériel qui préfigure la génération de cash-flow.
Pour le dire en termes imagés : la RSE permet de préserver la valeur gazeuse de l’entreprise puisqu’une entreprise qui néglige ses parties prenantes détruit sa valeur immatérielle.
32 RSE et Actifs Immatériels : l’avenir des PME
Questions clés Salariés Fournisseurs
qualité satisfaction éthique
Quelle est la valeur des parties prenantes pour l’entreprise ?
fidélité santé
Fig. 12 : 3 façons distinctes d’analyser une entreprise
35Livre Blanc édité par l’Agence LUCIE et l’IFEC • Juillet 2012
Nous retiendrons enfin ici qu’introduire le développement durable en entreprise n’est pas une condition suffisante pour créer de la valeur : ce n’est pas parce qu’une entreprise respecte ses clients qu’elle a un bon capital client, ni parce qu’elle se montre respon- sable avec ses salariés qu’elle a un bon capital humain. Ce n’est non plus parce qu’elle respecte l’environnement qu’elle a un bon capital naturel.
Le management du futur intégrera donc à la fois le management de la RSE (agir bien) et le management du capital immatériel (avoir de bons actifs).
Fig. 13 : Présentation comptable de la relation entre capital immatériel et RSE
34 RSE et Actifs Immatériels : l’avenir des PME
J’AI
Liquide Solide
Demain un autre bilan ?
CONSÉQUENCES POUR L’EXPERT-COMPTABLE ET LE COMMISSAIRE AUX COMPTES La RSE et le capital immatériel constituent indubitablement un relais de croissance fort et pérenne pour l’Expert-comptable et pour le Commis- saire aux comptes.
En premier lieu, le capital immatériel permet de procéder à des évaluations plus justes d’entreprise lors de fusions, acquisitions, prises de participations, etc. Les professions comptables auraient donc tout intérêt à maîtriser le processus de Due Diligence immatérielle.
Les dimensions extra-financières et financières du capital immatériel permettent, en second lieu, de rapprocher le point de vue du financier et celui du dirigeant. Ainsi, l’Expert-comptable peut, grâce au capital immatériel, accroître la pertinence des conseils qu’il donne tous les jours au dirigeant en y intégrant une dimension plus managériale.
La RSE est, elle aussi, une aubaine pour ces professions : l’Article 225 du grenelle de l’environnement stipule que les entreprises de plus de 500 salariés ou dont le CA est supérieur à 100 M€ ou dont le total bilan est supérieur à 100 M€ doivent produire un rapport annuel de développement durable qui met en évidence leurs impacts sociaux et environnementaux. Ce rapport est exigible selon la taille de l’entreprise en 2012, 2013 ou 2014. En outre, la fiabilité des données présentées dans ce rapport doit être vérifiée par un tiers indépendant.
Il apparaît ici évident que l’Expert-comptable est bien placé pour proposer ses services dans le cadre de la production du rapport RSE. De son côté, le Commissaire aux comptes est naturellement positionné pour procéder aux audits de contenu du rapport.
Je me permets donc ici de formuler, à l’endroit de ces professions, une recommandation très forte : faites de la RSE et du capital immatériel des axes stratégiques de développement de vos organisations !
4 CONCLUSION
Continuons nos échanges, rejoignez-nous sur le réseau social de la profession comptable
www.pacioli.fr Groupe : Commission "Responsabilité sociale
des entreprises et innovations"