La pression de mars - numéro 7

18
de mars Le Quotidien des Municipales 2008 réalisé par les étudiants de l’École supérieure de journalisme de Lille Numéro 7 Vendredi 14 mars 2008 Duels politiques Entre les candidats, le complexe de Caïn. Un psychologue explique. Coup de gueule Marc-Philippe Daubresse, candidat UMP à LMCU, balance sur le MoDem. page 6 page 5 Maire rural : une passion plus qu’un métier Martine fait son marché à Wazemmes Photo: Jonathan Roux Photo: Jérémy Marot page 11 Photo: Thibaud Vuiton Le maire de Neuville-Vitasse, 433 habitants. Hier sur le plus populaire des marchés lillois.

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Le quotidien des municipales dans le Nord Pas-ce-Calais, par les étudiants de l'Ecole supérieure de journalisme de Lille

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Page 1: La pression de mars - numéro 7

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Duels politiquesEntre les candidats,le complexe de Caïn.Un psychologueexplique.

Coup de gueuleMarc-Philippe Daubresse,candidat UMP à LMCU,balance sur le MoDem.

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Maire rural : une passionplus qu’un métier

Martine fait son marchéà Wazemmes

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Le maire de Neuville-Vitasse, 433 habitants.

Hier sur le plus populairedes marchés lillois.

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L’ É V É N E M E N T

2La Pression de mars Vendredi 14 mars 2008

Fin bâclée

OOnn ffrrôôllee ll ’’eennnnuuii.. AApprrèèss ll ’’eeff --ffeerrvveesscceennccee ddeess ddeerrnniieerrssjjoouurrss,, lleess ttrraaccttaatt iioonnss eennttoouutt ggeennrree,, lleess mmaarriiaaggeess eettlleess eenntteerr rreemmeennttss,, llaa ssuucc--cceessssiioonn ddee mmeeeettiinnggss eett lleessddiissttrr iibbuuttiioonnss ddee ttrraaccttss,, lleeccaallmmee eesstt rreevveennuu.. CCeerr tteess,,uunnee ccaammppaaggnnee éélleeccttoorraalleett iieenntt pplluuss dduu mmaarraatthhoonn qquueedduu sspprriinntt .. MMaaiiss ddaannss ddeennoommbbrreeuusseess vvii lllleess,, lleess ddééssééttaaiieenntt jjeettééss ddèèss llee pprreemmiieerrttoouurr.. PPoouurr lleess aauuttrreess,, lleessccaannddiiddaattss mmoobbiill iisseenntt lleeuurrssddeerrnniièèrreess ffoorr cceess.. DDeerrnniieerrssmmaarrcchhééss àà ttrraavveerrsseerr,, ddeerr--nniieerrss ppooiinnttss pprreessssee,, ddeerr--nniièèrreess aafffificchheess àà ccoolllleerr..HHeeuurreeuusseemmeenntt qquuee MMaarrcc--PPhhiill iippppee DDaauubbrreessssee ééttaaiitt llààppoouurr aajjoouutteerr dduu ppiiqquuaanntt ààggrraanndd rreennffoorr tt ddee ppeettii tteesspphhrraasseess aassssaassssiinneess eennvveerrssllee MMooDDeemm..AAuu pprrooggrraammmmee ddee MMaarr tt iinneeAAuubbrryy eett SSéébbaasstt iieenn HHuuyygghheehhiieerr,, uunnee vviissiittee aauu ppaass ddeeccoouurrssee dduu mmaarrcchhéé ddee WWaa--zzeemmmmeess.. CCeerr tteess ccee qquuaarr--tt iieerr lluuii eesstt cchheerr,, mmaaiiss ttoouuttddee mmêêmmee,, bbeeaauuccoouupp ss’’aatt--tteennddaaiieenntt àà mmiieeuuxx qquu’’uunnmmaarrcchhéé àà llaa vvaa--vviittee,, àà ttrrooiissjjoouurrss dduu sseeccoonndd ttoouurr.. CC’’eessttuunn ffaaiitt ,, lleess LLiill llooiiss oonntt qquuaa--ssiimmeenntt éélluu llaa mmaaiirree ssoorr--ttaannttee ddiimmaanncchhee ddeerrnniieerr eettppeerrssoonnnnee nnee ppeeuutt lleeuurr rree--pprroocchheerr dd’’aavvooiirr ttuuéé ttoouuttssuussppeennssee.. RRiieenn nnee sseerr tt nnoonnpplluuss dd’’eenn vvoouullooii rr àà SSéébbaass--tt iieenn HHuuyygghhee ccaarr,, eett cc’’eessttddoommmmaaggeeaabbllee ppoouurr lluuii ,,MMaarr tt iinnee AAuubbrryy aa ééttéé ddééfifinnii --tt iivveemmeenntt aaddooppttééee ppaarr lleessLLii ll llooiiss qquuii nnee llaa ttaaxxeenntt pplluussddee ““ppaarraacchhuuttééee””.. EEnn ssoommmmee,, aapprrèèss uunneelloonngguuee sseemmaaiinnee ppaauuvvrree eennrreebboonnddiisssseemmeenntt mmiiss àà ppaarr ttlleess aallll iiaanncceess,, lleess LLii llllooiissss’’aacchheemmiinneenntt vveerrss uunn ddii--mmaanncchhee qquuii ss’’aannnnoonnccee ttoouuttaauussssii lloonngg.. DDeess fifiaannççaaii ll lleessddee 22000011 eennttrree AAuubbrryy eett lleessLLii ll llooiiss,, oonn ss’’aapppprrêêttee àà vviivvrreellee mmaarriiaaggee.. EEtt oonn vvooiitt mmaallqquueellqquu’’uunn ccaappaabbllee ddee ss’’yyooppppoosseerr..

Marc-Antoine Barreau

ÉDITO

LA PRESSION de marsQuotidien réalisé par les étudiants de l’ESJ, de2e année (presse écrite et agence) et de PHR.Refermentation et maturation - Directeurde la publication :Pierre SavaryFermentation - Directeurs adjoints de la publication :Sylvie Larrière, Cyril Petit, Yves Sécher et Jacky DurandHoublonnage - Rédacteurs en chef :Flore Thomasset, Nicolas Kienast, Clémence Lambard et Marc-Antoine BarreauEmbouteillage - Rédacteurs en chef techniques :Séverine Rouby, Caroline Bozec,Florian Hervieux et Guillaume WillecoqSur le blog des municipales de l’ESJ, lire, écouter et regarder les reportages des deuxièmes années :http://chroniquesdemars.blogspot.com

École supérieure de journalisme de Lille,50 rue Gauthier-de-Châtillon, 59046 Lille Cedex.Tel : 03.20.30.44.00. www.esj-lille.fr

À Wazemmes,

Contrairement à 2001, où Martine Aubry avait élu rési-dence au siège de la Fédération socialiste de Lille, enplein cœur de Lille, l’équipe de campagne a choisi cetteannée un endroit autrement plus stratégique : la placedu marché de Wazemmes. « Un local de campagne, il faut que ça soit ouvert. Les ha-bitants du quartier viennent, cette année. Ils donnent uncoup de main, offrent des gâteaux et participent à la cam-pagne. Ça ne désemplit pas », explique la candidate so-cialiste. Pour Akim Oural, responsable du PS à Wa-zemmes et numéro 32 sur la liste Aubry, ce choix s’estfait tout naturellement. « Tout local de campagne doit êtredans le centre. Mais à Lille, le centre-ville n’est pas habité.C’est à Wazemmes qu’est le vrai centre de Lille, car c’estici que les gens vivent. »Les militants socialistes sont, eux aussi, conscients quecette décision est très politique. « Oui, ce choix est tac-

tique, mais c’est normal par temps d’élections. Martine aquand même une véritable légitimité ici. Moi, j’habite Lilledepuis 2001 et j’ai assisté à l’évolution du quartier. Il y asept ans, dans la rue Gambetta, il y avait encore desfriches, quelques petits commerces. Aujourd’hui, cette rueest un véritable aspirateur vers le quartier. »Pour Daniel Beaussaert, colistier de Sébastien Huyghe(UMP), la maire sortante n’a rien fait pour le quartier.« Les Maisons folies, c’est grâce à Didier Fusiller[NDLR : directeur artistique de Lille 2004]. C’est lui qui aprolongé l’initiative au-delà de 2004. Elle, elle reprend lesprojets des autres et se les approprient. »Linda est elle aussi sceptique. Elle pense que son quar-tier n’est qu’une vitrine pour la candidate socialiste, etne se fait aucune illusion sur la portée du choix de Mar-tine Aubry, une fois la campagne terminée. « C’est pasétonnant qu’elle ait choisi ce secteur. Les gens qui viventici sont de potentiels électeurs pour les socialistes. C’estune population qui économise, attend des aides et du pou-voir d’achat. Mais après les élections, on ne la verra plus. »

AN

Un QG bien placé

es militants du Partisocialiste n’ont pasqu’un atout dansleur jeu. Certes, leurcandidate est arri-vée première di-manche dernieravec 46 % des voix.

Certes, Martine Aubry a installéson local de campagne au cœur duquartier de Wazemmes, un des pluspopulaires de Lille. Mais en plus,ils ont la chance (et l’obligation) deporter des écharpes en guise d’ac-cessoire de campagne. Alors queleurs adversaires n’ont, en tout etpour tout, qu’une casquette encoton estivale, estampillée Sébas-tien Huyghe.Jeudi, dernier marché avant le se-cond tour des élections munici-pales, le vent souffle sur la place dumarché. La candidate socialiste

s’est déplacée à son QG pour lamatinée mais se fait attendre. Dansle local, le café fume. Assise à unetable, Martine Aubry met la mainà la patte, passe des coups defil, pendant que les militants distri-buent des tracts à tour de bras, em-mitouflés dansleur précieux fou-lard bleu. « On atous attrapé unrhume », s’amuseNicolas, jeune mi-litant et habitantde Wazemmes. Quand, enfin, la maire de Lille sortde son local, la petite troupe se meten marche. Une poignée de mainau marchand de culottes, une biseau kiosquier d’en face. MartineAubry est la star du marché. « J’aieu très peu de retours négatifs des élec-teurs. Même pendant les réunions pu-

bliques que nous avons tenues, lesLillois m’ont fait beaucoup de compli-ments », s’enorgueillit-elle. Et effec-tivement dans les allées, les« bravo », « félicitations » et autres « onva gagner » s’amoncellent. MêmeMourad, commerçant au marché,qui avait promis de « titiller » l’élue ,se ravise devant elle. « MadameAubry, on n’arrive plus à trouver desplaces au marché alors qu’on est Lillois.C’est pas normal ! » se plaint-il. « Oui,oui vous avez raison. Merci de votre re-marque, on va s’en occuper » lui ré-

pond MartineAubry, avant depoursuivre sa tra-versée du marché. Un quart d’heure etvingt-cinq « bonnechance pour di-manche » plus tard,

la candidate en campagne est arri-vée à l’autre bout du marché.Le petit cortège s’échappe par unepetite rue. Martine Aubry a unautre rendez-vous, un apéritif à lamaison de quartier de Wazemmes,dans lequel elle ne restera que vingtminutes.

Martine Aubryne sera restée

qu’un quartd’heure

sur le marché de Wazemmes

avant de partir vers la maison

de quartier.

Reportage photo:Jonathan Roux

Dernier jour de marché à Wazemmes avant le second tour. Martine Aubry hâte le pas… vers sa réélection.

Par Alexandra NawawiL« ON A TOUS ATTRAPÉ UNRHUME »

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L’ É V É N E M E N T

2La Pression de mars Vendredi 14 mars 2008

Fin bâclée

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Marc-Antoine Barreau

ÉDITO

LA PRESSION de marsQuotidien réalisé par les étudiants de l’ESJ, de2e année (presse écrite et agence) et de PHR.Refermentation et maturation - Directeurde la publication :Pierre SavaryFermentation - Directeurs adjoints de la publication :Sylvie Larrière, Cyril Petit, Yves Sécher et Jacky DurandHoublonnage - Rédacteurs en chef :Flore Thomasset, Nicolas Kienast, Clémence Lambard et Marc-Antoine BarreauEmbouteillage - Rédacteurs en chef techniques :Séverine Rouby, Caroline Bozec,Florian Hervieux et Guillaume WillecoqSur le blog des municipales de l’ESJ, lire, écouter et regarder les reportages des deuxièmes années :http://chroniquesdemars.blogspot.com

École supérieure de journalisme de Lille,50 rue Gauthier-de-Châtillon, 59046 Lille Cedex.Tel : 03.20.30.44.00. www.esj-lille.fr

À Wazemmes,

Contrairement à 2001, où Martine Aubry avait élu rési-dence au siège de la Fédération socialiste de Lille, enplein cœur de Lille, l’équipe de campagne a choisi cetteannée un endroit autrement plus stratégique : la placedu marché de Wazemmes. « Un local de campagne, il faut que ça soit ouvert. Les ha-bitants du quartier viennent, cette année. Ils donnent uncoup de main, offrent des gâteaux et participent à la cam-pagne. Ça ne désemplit pas », explique la candidate so-cialiste. Pour Akim Oural, responsable du PS à Wa-zemmes et numéro 32 sur la liste Aubry, ce choix s’estfait tout naturellement. « Tout local de campagne doit êtredans le centre. Mais à Lille, le centre-ville n’est pas habité.C’est à Wazemmes qu’est le vrai centre de Lille, car c’estici que les gens vivent. »Les militants socialistes sont, eux aussi, conscients quecette décision est très politique. « Oui, ce choix est tac-

tique, mais c’est normal par temps d’élections. Martine aquand même une véritable légitimité ici. Moi, j’habite Lilledepuis 2001 et j’ai assisté à l’évolution du quartier. Il y asept ans, dans la rue Gambetta, il y avait encore desfriches, quelques petits commerces. Aujourd’hui, cette rueest un véritable aspirateur vers le quartier. »Pour Daniel Beaussaert, colistier de Sébastien Huyghe(UMP), la maire sortante n’a rien fait pour le quartier.« Les Maisons folies, c’est grâce à Didier Fusiller[NDLR : directeur artistique de Lille 2004]. C’est lui qui aprolongé l’initiative au-delà de 2004. Elle, elle reprend lesprojets des autres et se les approprient. »Linda est elle aussi sceptique. Elle pense que son quar-tier n’est qu’une vitrine pour la candidate socialiste, etne se fait aucune illusion sur la portée du choix de Mar-tine Aubry, une fois la campagne terminée. « C’est pasétonnant qu’elle ait choisi ce secteur. Les gens qui viventici sont de potentiels électeurs pour les socialistes. C’estune population qui économise, attend des aides et du pou-voir d’achat. Mais après les élections, on ne la verra plus. »

AN

Un QG bien placé

es militants du Partisocialiste n’ont pasqu’un atout dansleur jeu. Certes, leurcandidate est arri-vée première di-manche dernieravec 46 % des voix.

Certes, Martine Aubry a installéson local de campagne au cœur duquartier de Wazemmes, un des pluspopulaires de Lille. Mais en plus,ils ont la chance (et l’obligation) deporter des écharpes en guise d’ac-cessoire de campagne. Alors queleurs adversaires n’ont, en tout etpour tout, qu’une casquette encoton estivale, estampillée Sébas-tien Huyghe.Jeudi, dernier marché avant le se-cond tour des élections munici-pales, le vent souffle sur la place dumarché. La candidate socialiste

s’est déplacée à son QG pour lamatinée mais se fait attendre. Dansle local, le café fume. Assise à unetable, Martine Aubry met la mainà la patte, passe des coups defil, pendant que les militants distri-buent des tracts à tour de bras, em-mitouflés dansleur précieux fou-lard bleu. « On atous attrapé unrhume », s’amuseNicolas, jeune mi-litant et habitantde Wazemmes. Quand, enfin, la maire de Lille sortde son local, la petite troupe se meten marche. Une poignée de mainau marchand de culottes, une biseau kiosquier d’en face. MartineAubry est la star du marché. « J’aieu très peu de retours négatifs des élec-teurs. Même pendant les réunions pu-

bliques que nous avons tenues, lesLillois m’ont fait beaucoup de compli-ments », s’enorgueillit-elle. Et effec-tivement dans les allées, les« bravo », « félicitations » et autres « onva gagner » s’amoncellent. MêmeMourad, commerçant au marché,qui avait promis de « titiller » l’élue ,se ravise devant elle. « MadameAubry, on n’arrive plus à trouver desplaces au marché alors qu’on est Lillois.C’est pas normal ! » se plaint-il. « Oui,oui vous avez raison. Merci de votre re-marque, on va s’en occuper » lui ré-

pond MartineAubry, avant depoursuivre sa tra-versée du marché. Un quart d’heure etvingt-cinq « bonnechance pour di-manche » plus tard,

la candidate en campagne est arri-vée à l’autre bout du marché.Le petit cortège s’échappe par unepetite rue. Martine Aubry a unautre rendez-vous, un apéritif à lamaison de quartier de Wazemmes,dans lequel elle ne restera que vingtminutes.

Martine Aubryne sera restée

qu’un quartd’heure

sur le marché de Wazemmes

avant de partir vers la maison

de quartier.

Reportage photo:Jonathan Roux

Dernier jour de marché à Wazemmes avant le second tour. Martine Aubry hâte le pas… vers sa réélection.

Par Alexandra NawawiL« ON A TOUS ATTRAPÉ UNRHUME »

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Se loger à Wazemmes ? Pas évi-dent. L’ancien bastion ouvrierpâtit de son insalubrité… et ses

26 000 habitants avec. « Wazemmesest toujours un quartier très populaire,note Philippe Deltombe, présidentrégional de l’association Droit au lo-gement (DAL). L’habitat est souventen mauvais état, mal isolé, et ce sont lesplus démunis qui paient les pires facturesd’électricité et de chauffage ». La muni-cipalité a mis en place une cellule delutte contre l’insalubrité « mais elle nefonctionne efficacement que depuis unan », explique-t-il, reconnaissant querénover l’ensemble des anciens loge-ments ouvriers « ne se fait pas en cla-quant des doigts ». Le logement social,lui, est pris d’assaut. « On voudrait unlogement sur Lille, ça fait quatre ansqu’on demande », soupire MokhtarMeglali, vendeur de poulets sur lemarché et installé à Cysoing dans untrois-pièces avec sa femme et sesquatre enfants. Selon les chiffres dela Direction départementale del’Equipement, 80000 ménages sonten attente d’un logement social surLille, et Wazemmes n’est pas enreste. En campagne, Martine Aubrya promis… 877 nouveaux logementspour le quartier, dont 317 sociaux.« C’est loin d’être suffisant, mais avec 30% de logements sociaux sur Lille on nepeut pas dire que la mairie ne joue pas lejeu », nuance Philippe Deltombe.Reste que des bobos s’installent deplus en plus, rejetant mécanique-ment les classes moins aisées horsdu lieu. « Ce sont des places prises au dé-triment de l’âme populaire. »

Ça lambine pour les bambins. À Wazemmes, ilfaut deux ans d’attente pour obtenir une placedans la crèche de la Maison de quartier, qui en

compte 22. « Tout cela est très insuffisant, déplore Toun-sia Lehlid, directrice de l’endroit. Les crèches sont debeaux exemples de mixité sociale et culturelle, il faut main-tenir ce lien. On trouve des enfants issus de l’immigrationcomme de parents cadres sup. La chance de Wazemmes,c’est de ne pas être un quartier ghetto ». Mais les chiffrespeinent à suivre, comme dans la crèche de l’associa-tion Innov’Enf, où cinquante enfants sont sur listed’attente. « Le quartier attire beaucoup de jeunes ménages,il faut trouver des solutions de garderie », assure DaniellePoliautre, adjointe de Martine Aubry. Un centre pe-tite enfance est prévu pour 2009 avec 24 places, et leprogramme de la maire sortante prévoit 70 placessupplémentaires d’ici 2011. Deux projets pour ré-pondre aux demandes des personnels éducatifs… etdes parents.

É V È N E M E N T

3La Pression de mars Vendredi 14 mars 2008

Aubry peut mieux faire

La Maison Folie. Symbole du nouvel élan culturel im-pulsé à Wazemmes depuis Lille 2004, cette structurede 300 places accueille aussi bien des expositions, du

théâtre que de la danse et des concerts. « C’est un quartier dy-namique avec une mixité sociale et culturelle très intéressante.L’équipement est à la fois ambitieux par ses projets et proche deshabitants. Cela doit devenir un outil de démocratisation cultu-

relle », explique Laurent Tricart, chargé de la communica-tion dans cet établissement. Lorsque Didier Fusillé, direc-teur de Lille 2004, a lancé ce concept, il voulait laisser unetrace pérenne. Pourtant cette structure laisse certains dubi-tatifs comme André Denimal, directeur du Biplan. « On neconsacre que peu de place à la musique là-bas. Déjà qu’à Lille 2004,les groupes locaux n’avaient pas vraiment été associés… ». Aujourd’hui, il faudrait davantage de subventions pourmaintenir à flot ces établissements wazemmois. « Je perçois25 000 euros chaque année. Tout juste de quoi payer le loyer. Il enfaudrait le double », réclame André Denimal. « Il faut mainte-nir les lieux populaires de Wazemmes. » Le quartier devrait êtrede nouveau sollicité l’an prochain sur la thématique de« l’Europe et les pays de l’Est » à l’occasion de Lille 3 000.Quant à la renovation du Bazar de Wazemmes, « j’aimeraisbien qu’on en fasse un pôle du livre », souhaite Dimitri Va-zemsky, éditeur lillois et riverain.

Identitéculturelle

à préserver

Lesjardins

d’enfantsen friche

habitatdégradé

Habitantspopulaires,

Voir Naples… et se dire qu’à Lille, parfois,c’est un peu pareil. Sacs poubelles, détritus,Wazemmes souffre d’une réputation de sa-

leté : le nettoyage était déjà l’un des enjeux des mu-nicipales de 2001. « C’est lié à l’activité du quartier,justifie Nicolas Bernard, militant PS et animateurd’un groupe de riverains mobilisés sur le sujet. À Wa-zemmes, il y a à la fois le plus grand marché de la villetrois fois par semaine, et la rue Gambetta, la plus granderue commerçante de Lille. Néanmoins, on tente de faireprogresser les mentalités, notamment sur la mise en placedu tri sélectif ». Membre de l’Union des commer-çants de la rue Gambetta, Jackie Gosciniak essaied’y contribuer, à son niveau : « j’ai mis une affichesur ma vitrine, j’ai collé des autocollants sur les boîtesaux lettres, mais les gens s’en moquent. Il a fallu que jevoie des rats dans les rues pour obtenir une réaction.

L’alarmisme, ça va cinq minutes, mais visiblement lameilleure sensibilisation c’est le PV. »Depuis peu, une« brigade propreté » verbalise les habitants qui aban-donnent leurs ordures hors jours decollecte. « Il faut exemplariser la sanc-tion », justifie Nicolas Bernard. Ad-jointe au maire et présidente duconseil de quartier, Danielle Poliau-tre évoque une autre cause à la sa-leté: « On dénombre beaucoup de bâti-ments découpés en petits logements, où iln’y a pas la place de mettre les deux bacsréglementaires. Et puis certaines rues sonttrop étroites, voire encombrées par les voi-tures, et les éboueurs ne peuvent pas y pas-ser. » D’où des ordures qui s’amon-cellent.

Des poubelles qui débordent

Avec ses 26 000 habitants, le quartier est stratégique. Sur quels thèmes se gagne Wazemmes ?

Par Jean Décotte,Françoise Marmouyet,Alexandra Nawawi, et Florian Pottiez.

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P O R T F O L I O

4La Pression de mars Vendredi 14 mars 2008

La maire de Lille (re)passe voir ses parti-sans de la boucherie Razzouk, à côté dumaché.Elle tient son QG de campagnedans ce quartier populaire.

Foire d’empoigneMilitante UMP (à gauche de la photo): « Il y a certaines régionsoù le PS est respectable, ici non. »Militant PS (à droite): « Arrêtez madame,on a fait 40 %! »Militante UMP : « Mais nous on représente la classe, l’élégance... »Militant PS, en riant : « Venez voir la classe et l’élégance.Faîtes le bon choix contre Sarko! »

Tête à têteÀ la sortie de son QG deWazemmes,

Martine Aubry prend le temps derépondre aux questions des habitantsavant de se rendre au pas de course

à un cocktail de la Maison de quartier.

Sébastien Huyghe arrive au marché deWazemmes deux heures avant Mar-tine Aubry. « Je suis très bien accueilli. Je suis parfois mieux qu’au Concert[marché duVieux-Lille, NDLR] qui est très bobo. » Le candidat UMP critiqueau passage la politique de sa rivale: « Il n’y a pas de rénovation dans un quar-tier qui en a bien besoin. Les Maisons-Folies je veux bien,mais la programma-tion n’est pas utilisée à sa juste mesure. »

VOIXÀSAISIR

Sur les terresd’Aubry

Martine revient

Par Jonathan Roux(Photos) et FrançoiseMarmouyet (Textes)

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E N R É G I O N

5La Pression de mars Vendredi 14 mars 2008

l avait prévenu.D’un sourire gourmand : « Si vous êtes amateur de pe-tites phrases, il faut venir. » Alors, on est venu. Et on n’a pas été déçu.Marc-Philippe Daubresse, député-maire UMP de Lambersart etcandidat à la présidence de la Communauté urbaine de Lille(LMCU), était en grande forme, hier. Épaulé par Thierry Lazaro,patron de l’UMP local et Jean-René Lecerf, sénateur du Nord, ilavait bien préparé son point-presse. Et était tout chagrin de l’atti-tude duMoDem. Il est vrai que leMoDem a joué plus d’un vilaintour à l’UMP du Nord, qui a découvert, à l’occasion, que le partide Bayrou – eh oui – était parfois àdroite, parfois à gauche. En l’occur-

rence, dans leNord, il penche à gauche, enfin plu-tôt, tangue, etMarc-PhilippeDaubresse, accoudéau bastingage, en est malade. Lui qui a « fondé, dé-veloppé et fait prospérer l’UDF dans le coin ». Alors,dès les premières minutes du point-presse, LAflèche. « Je suis furieux de voir un certain nombre demes amis en tête de la procession socialiste, avec un en-censoir et tout ça, pour un plat de lentilles ! »Il s’en prend à Olivier Henno, chef duMoDem nordiste, qu’il traite de « gi-rouette opportuniste qui attend le sens du vent. » Le mieux loti est sans contesteJacques Richir, candidat orange à Lille et fraîchement rallié à MartineAubry. Ce libéral-traître est prêt à « vendre son âme » et « aller à la soupe » pourgrappiller quelques places d’élus. « Quelle désolation, quelle tristesse, c’est la-mentable ! » Pourtant, le pacte Richir-Aubry n’est pas vraiment une surprisepour tout observateur de la politique lilloise. Richir avait, par exemple, lors

de l’un de ses derniers meetings, cité « les excellentes infrastructures de transportsà Lille » et regretté que « certains élus centristes aient pu faire penser que le MoDemétait un parti de droite ». Jamais pendant son discours,Martine Aubry n’a étéégratignée.Indignation parmi les élus de droite quant on en vient aux cantonales àBailleul. « Pourquoi le lundi midi, on nous demande de retirer des candidats, ce quenous faisons, pour négocier, lundi soir, avec les socialistes ? », s’emporte Daubresse.Visiblement, les cadres nordistes de l’UMP se sont faits rouler. « Mais nous,on est naïfs », assume Lazaro.Les tempêtes de mots battent son plein alors que Daubresse s’essaye au ca-lembour maritime – en latin s’il vous plaît. « Fluctuat nec mergitur (Il tanguemais ne sombre pas, NDLR), pourrait-on dire à propos du MoDem. Mais au bout

d’un moment, fluctuat, d’accord, maisTitanic Mamèreaussi ! » Aïe... Vexé comme un amant éconduit,Daubresse voit plus loin que les municipales. Entête, la présidence de la Communauté urbaine,pour laquelle il s’estime « toujours en lice ». Lepetit jeu des élus orange ne l’inquiète pas plus queça. « Ils vont gagner quoi à s’allier au PS ? Une voixd’élu communautaire à Saint-André, une ou deux àFaches-Thumesnil ? Ça ne change rien, ce sont des

sièges pris sur ceux du PS. »Plutôt que de s’attarder sur ce « champ de ruines » qu’est le MoDem, Dau-bresse préfère enfin chouchouter celui qui sera le véritable arbitre de la luttepour la Communauté urbaine : Henri Ségard. Vice-président de LMCU,l’homme est à la tête d’un groupe d’élus sans étiquette qui pèsent actuelle-ment pour 28 % des votes pour la présidence. Or, Ségard est aussi un prochedeDaubresse. De quoi nourrir « beaucoup d’affection » pour lui en retour... Etfaire oublier la trahison des amis d’hier.

Il aura tout essayé et pourtant, il n’yaura personne pour sauver le soldatMellick (PS). C’est définitif, c’est

bien seul contre trois que le maire deBéthune s’apprête à protéger son fau-teuil de maire. Hier soir, au premierétage du café Le Brussel, en face dubeffroi de Béthune, était réuni le frontanti-Mellick au grand complet. Sté-phane Saint-André (DVG), OlivierGacquerre (MoDem soutenu parl’UMP) et Bernard Seux (SE) étaientattendus pour éclairer les Béthunoissur cette alliance soudaine.« Notre union n’est pas dirigée contre Mel-lick mais pour Béthune ! ». En cœur, lestrois candidats unis derrière StephaneSaint-André nommé tête de liste, de-vancent tout jugement de valeur pou-vant porter sur leur coalition. Brou-haha dans la salle, les personnesvenues les soutenir semblent en avoirassez qu’on leur colle l’étiquette « toutsauf Mellick » sur le dos. « On est contrelui dans le sens où on n’a pas la même vi-sion de Béthune. On veut prendre sa place

pour apporter autre chose à la ville. Dansun sens, oui, on est contre Mellick »,conclut Olivier Gacquerre à ce sujet.Par la suite, plus jamais le nom dumaire sortant ne sera prononcé.Place au projet et surtout à la cohé-rence de cette fusion de liste. Tous troisaffirment que leurs programmes res-pectifs se ressemblaient beaucoup.Alors, à la question « Pourquoi n’avez-vous pas fait liste commune dès le pre-mier tour ? », Stéphane Saint-Andrébotte en touche : « Nous avons consultéles électeurs. Six sur dix veulent que çachange. Nous répondons à leur demande. »Bernard Seux embraye : «Au-delà descalculs politiciens, nous sommes là pour Bé-thune. Nous avons, ensemble, un projet co-hérent dynamique qui tient compte des dif-férentes sensibilités au-delà de l’espritpartisan. » Reste à savoir si les Béthu-nois se retrouveront dans cette al-liance : deux personnes de gauche al-liée à un MoDem, lui-même soutenupar un député UMP. Peut-être de quoidonner un peu le tournis.

Une nouvelle famille

Par Jérémy Marot

Par Marie-Adélaïde Scigaczet Marc-Antoine Barreau

« QUELLEDÉSOLATION,

QUELLETRISTESSE,C’EST LAMENTABLE ! »

Stéphane Saint-André (au centre) n’a pas de doute : « Ensemble,nous serons capable de nous entendre pour gérer la ville. »

Photo:M

arie-AdélaïdeScigacz

ILe maire de Lambersart était remonté contre

le parti centriste. Il l’a fait savoir hier lors d’uneconférence de presse où les piques, visiblementmûries depuis un temps, ont été nombreuses.

Daubressetout colère

contrele MoDem

Marc-Phippe Daubresse,hier lors de sa conférencede presse

photo:JeremyMarot

Page 7: La pression de mars - numéro 7

A N A LY S E

6La Pression de mars Vendredi 14 mars 2008

ean-Pierre Friedman connaît d’autant mieux lesluttes intestines de pouvoir qu’il en a été victime.Premier adjoint au maire de Meillers, petitecommune de 200 habitants dans l’Allier, il s’estreprésenté aux élections municipales cetteannée. Le conseil sortant a été reconduit maispas lui, évincé par ses colistiers. Il est donc unobservateur privilégié de la question.

Comment deux hommes politiques,de gauche tous les deux et qui ont tra-vaillé ensemble, peuvent-ils se livrerune bataille électorale aussi agres-sive ?Les plus grandes haines naissent entre lesgens les plus proches. Il s’agit du complexede Caïn, de quelque chose de fratricide. Onne peut détester que ce que l’on connaîtbien. Plus on se connaît, plus on est proche,plus le complexe de Caïn se justifie. Ceciest particulièrement vrai pour les électionsmunicipales où le terrain de la bataille estplus petit et où les gens, les électeurs

comme lescandidats, seconnaissentbien. Si lescandidats sontdavantage descousins dansles élections

nationales, ils sont des frères dans les élec-tions locales ; c’est pourquoi l’intensité dela bataille est bien plus forte. Ce sont lesgens qui se connaissent le mieux qui ont leplus tendance à se trahir les uns les autreset à porter des coups bas.

Une campagne entre candidats debords politiques différents serait doncmoins violente ?Entre gens de bords différents, la guerrepeut être saine et loyale. Entre gens dumême bord, la lutte devient haineuse etperfide. Pendant la Présidentielle, NicolasSarkozy et Ségolène Royal ne se portaientpas vraiment des coups bas, simplementdes attaques. La campagne fut beaucoupplus sournoise pour les primaires du PS,par exemple. À l’intérieur de leur proprecamp, les gens ne sont pas seulement encompétition, ils se haïssent encore plusqu’ils détestent les gens des camps oppo-sés. Regardez Laurent Fabius et FrançoisHollande, Dominique de Villepin et NicolasSarkozy. On respecte souvent plus l’adver-saire politique qui n’est pas dans soncamp. Dans un même camp, il y a des luttesà mort.

Cela a toujours été le cas en poli-tique ?En tout cas, le phénomène s’est amplifiéavec la disparition des grands leaderspolitiques. À gauche, quand François Mit-terrand est parti, avant même qu’il ne dé-cède, le Parti socialiste a explosé. Puis lePS a cru, à tort, pouvoir se donner un lea-der avec Ségolène Royal. À droite, NicolasSarkozy s’était placé comme tel mais il aété discrédité à cause de l’exposition ex-trême de sa vie personnelle. Aujourd’hui, àgauche, à droite et au centre, il y a claire-ment un grand vide de leadership commeon n’en a pas connu depuis longtemps.

Dans la région, PierreMauroy ne joue-t-il pas ce rôle de leader fédérateur ?À une certaine époque, il y avait en effetdes parrains régionaux. À Marseille, Gas-ton Defferre était reconnu comme tel,même par les gens de la gauche. PierreMauroy le fut aussi à une époque. Mais au-jourd’hui, en partie à cause de son âge etde ses relations difficiles avec MartineAubry, je ne suis pas sûr qu’il soit toujoursune forte personnalité dans le Nord. EtMartine Aubry n’a pas repris le flambeau.

C’est donc propre au genre humain ?Oui. D’un point de vue psychosociolo-gique, déjà, les luttes intestines ont tou-jours été les pires. Regardez ce qui s’estpassé entre les catholiques et les protes-tants, pourtant tous chrétiens. Et regardezce qui se passe aujourd’hui entre les sun-nites et les chiites. Les guerres civiles sontbien souvent les plus cruelles et les plusmonstrueuses. D’autre part et d’un point devue psychologique, cela relève de l’ar-chaïsme animal, de quelque chose de bio-logique. C’est comme dans une meute pri-mitive où il faut un seul chef pour maintenirle groupe et où la lutte pour la dominationest la plupart du temps une lutte à mort. Etc’est seulement à partir du moment où il ya un mâle - ou une femelle - dominant(e)qu’il devient possible d’attaquer l’autrecamp. Le camp, comme le parti politique,n’est fort que s’il y a un seul leader.

(1) Jean-Pierre Friedman est l’auteur de Dans la peau de Sarko :et de ceux qui veulent sa peau et Du pouvoir et des gommes :Jacques, Lionel, Jean-Pierre et les autres aux éditions Michalon.

CELA RELÈVEDE L’ARCHAÏSMEANIMAL ”

J

« Entre gens du même bord,la lutteest

haineuse »

VVIILLLLEENNEEUUVVEE DD’’AASSCCQQ.. Gérard Caudron (DVG) et Jean-Michel Stievenard (PS) ont travaillémain dans la main pendant vingt-quatre ans. Aujourd’hui en concurrence pour la mairie, ils selivrent à une guerre électorale sans merci. Pour le psychanalyste Jean-Pierre Friedman (1), cettelutte fratricide illustre un phénomène plus large.

Par HélèneBekmezian

Page 8: La pression de mars - numéro 7

∆ Habitants : 15.747∆ Taux de chômage : 12,8 %∆ Maire sortant : Jean-Jacques Delvaux∆ Nombre de listes : 2

Dossier réalisé par :Eric FilliastreCamille JanikGuillaume Willecoq

Où peut-on garer sa voitureà Saint-Omer ? Questionanodine en apparence,

mais qui pourrait bien coûter sa placeà Jean-Jacques Delvaux (UMP), lemaire sortant. Certaines décisions,comme la suppression de la gratuité dupremier quart d’heure de stationne-ment, ont été mal perçues par la popu-lation. Les commerçants du centre-ville, notamment, craignent que cettemesure ne dissuade les Audomarois dese garer à proximité de leurs enseignes.Délicat, d’autant que le centre com-mercial de Longuenesse, situé à moinsde dix minutes de la commune, exerceune forte attractivité. Il n’en fallait pasplus pour que BrunoMagnier, candidatPS, ne s’engouffre dans la brèche.« Lors de sa première élection, en 1983,Jean-Jacques Delvaux avait battu son ad-

versaire sur le thème du stationnement.Vingt-cinq ans après, le constat est clair :rien n’a changé. » Pour résoudre le pro-blème, Bruno Magnier préconise laconstruction d’un parking aérien de176 places, au-dessus de l’actuel par-king de l’Espla-nade. L’agran-dissement de ceparc de station-nement de 363places, très sou-vent saturé, re-présente un véri-table enjeu pourla ville, selon le candidat socialiste. « Lemanque de places disponibles a un effet né-gatif sur les visiteurs. Les travailleurs de Lillepourraient s’implanter à Saint-Omer pourprofiter du faible coût de l’immobilier, maisl’absence d’un grand parking à proximité dela gare les en dissuade. » Une situationdramatique selon Bruno Magnier, qui

compte sur le tourisme pour compen-ser les emplois supprimés à la cristalle-rie d’Arques.« La création d’un parking de 460 places enbas de la rue de Dunkerque répond à cettelogique », rétorque Jean-Jacques Del-

vaux. Le mairesortant compteinsuffler unnouveau dyna-misme à unezone marginale,et redonner vieaux commercesqui y sont im-

plantés. « Nous prévoyons la création d’unpôle touristique pour relier la ville au quar-tier du Marais, ainsi que l’aménagementdes quais pour permettre la navigation deplaisance. » Le candidat UMP se mon-tre très critique envers les propositionsde son opposant, à commencer par lacréation du parking aérien. « L’archi-

tecte des bâtiments de France a effectué uneétude sur la question. En raison de sa proxi-mité avec un monument historique, ledeuxième niveau ne pourrait occuper qu’unpeu moins des deux tiers de la surface del’actuel parking de l’Esplanade. » Nette-ment insuffisant selon Jean-JacquesDelvaux.Quant au quart d’heure de stationne-ment gratuit, « il existe toujours. Nousavons mis en place les PIAF, de petits horo-dateurs personnels que les gens alimententavec une carte et qui leur permet d’en béné-ficier. Le but était d’éviter le phénomène desvoitures-ventouse : les gens laissaient leurvoiture le matin et repartaient le soir ».Reste que beaucoup d’Audomaroisignorent l’existence de ce projet. « Lesgens s’informent de moins en moins, mêmesi on les inonde de documents », soupire lemaire. Il est vrai qu’un PV sur un pare-brise est beaucoup plus évocateurqu’un programme…

7La Pression de mars Vendredi 14 mars 2008

F O C U S

UN PV SURUN PARE-BRISE ESTPLUS ÉVOCATEUR

QU’UN PROGRAMME

REPÈRES

Stationnementà l’amende

Parkings bondés, voitures mal garées… Le stationnement est un vrai problème à Saint-Omer (lire aussi page 9).Un tel enjeu pour la ville que les deux candidats aux municipales en ont fait le thème principal de leur campagne.

Photo:

Eric

Filliastre

Saint-Omer

Page 9: La pression de mars - numéro 7

Jeunesse TourismeCadre de vie

� Poursuivre le programme de réno-vation des rues ; lutter contre le bruiten collaboration avec la police muni-cipale ; rénover l’éclairage publicdans l’ensemble de la ville ; défendrela propreté urbaine par des cam-pagnes de sensibilisation et une ver-balisation accrue des contrevenants.

� Créer une maison de quartier dansles faubourgs ; développer des ateliersde pratique musicale pour collégienset lycéens ; mettre en place un “pas-seport jeune” proposant aux adoles-cents des réductions en matière desport, de culture et de loisirs.

� Rénover l’arboretum du jardin pu-blic ; lancer un grand festival annuel“jardins et lumières” pour mettre envaleur le patrimoine de la ville ; pour-suivre la reconversion de l’Hôtel deville et de son théâtre en un centreculturel et d’animation.

� Entretien des voieries, des trottoirset de la propreté de la ville ; luttecontre les nuisances visuelles et so-nores ainsi que l’insécurité ; relaisentre les personnes âgées et les diffé-rentes structures d’accueil qui lesconcernent.

� Création d’emplois peu qualifiéspour les jeunes Audomarois non-di-plômés ; mettre des jeux pour enfantsau pied des immeubles ; création deconseils de quartiers pour prendre encompte les réalités locales spéci-fiques.

� Faire de Saint-Omer une ville tou-ristique accueillante et du tourismeun vecteur essentiel de développe-ment pour le Pays de Saint-Omer ;mettre en place une piste cyclable re-liant centre-ville et marais ; proposerdes boucles touristiques selon diversthèmes comme le patrimoine, la na-ture, le bois, l’aquatique…

ue de rebondissements !Les municipales de Saint--Omer font jaser. Les listespour les élections, c’esttoute une histoire. En no-vembre, les rumeurs en-flent déjà : Michel Lefait,député PS de la 8e circons-cription du Pas-de-Calais,

se présenterait aux élections municipales de Saint-Omer. Ce qu’il dément publiquement peu après.Quelques jours plus tard, c’est au tour de BrunoMagnier, le secrétaire de la section socialiste, de seporter premier candidat à la mairie. En décembre, leMoDem essaie de se rapprocher du socialiste en vued’une création de liste commune. « Muriel Volle, duMoDem, nous a contactés. On s’est réunis avec les mili-tants du MoDem, ainsi qu’avec Michel Lefait, à la mairied’Arques. Nous avons refusé un rapprochement car elledemandait la tête de liste », déclare le secrétaire de lasection socialiste. La presse a été informée, mais lareprésentante du MoDem a toujours nié ce rappro-chement.Ensuite, c’est au maire sortant de passer à l’action :Jean-Jacques Delvaux (UMP) annonce sa candida-

ture. Ni Muriel Volle, ni DanyMasset ni même Phi-lippe Caron (tous trois du MoDem) ne figurent sursa liste, alors qu’ils étaient colistiers aux dernièresmunicipales. Les trois évincés ont donc décidé deconduire leur propre liste, à quelques jours dupremier tour. Surpriseau soir du 9 mars :le socialiste BrunoMagnier est en têteavec 42,55 %, devantle maire sortant quitotalise 40,89 % desvoix.Malgré une courtecampagne, Muriel Volle est l’autre révélation de cepremier tour. Elle se place troisième, mais obtienttout de même 16,56 % des voix. Au lendemain dupremier tour, nouveaux rebondissements. La Voix duNord du 11 mars évoque des rumeurs de rapproche-ment entre la liste de Muriel Volle et celle de Jean-

Jacques Delvaux (UMP). Le journal parle même dedeux postes pour la liste de l’ancienne adjointe aumaire. Jean-Jacques Delvaux dément tout rappro-chement : « Il n’y a eu aucune négociation avec MurielVolle. Le lendemain des élections nécessite un climat de sin-

cérité et de loyauté. Cen’est pas avec une négocia-tion de couloir que l’on varéconcilier l’électeur et lapolitique. »Du côté de BrunoMagnier, aucune prisede contact ni aucuneconsultation avec Mu-

riel Volle. Finalement, cette dernière préfèrera jeterl’éponge sans donner de consigne de vote. Ce seradonc un duel Magnier-Delvaux au second tour. Maisl’issue du scrutin reste indécise. Qui remportera lamairie de Saint-Omer ? Aux électeurs de MurielVolle de se positionner.

8La Pression de mars Vendredi 14 mars 2008

F O C U S

Jean-Jacques Delvaux, maire de Saint-Omer depuis 1983, est arrivé en deuxièmeposition au premier tour. La mairie (ci-dessus) pourrait basculer à gauche.

Qui veut les voixdu MoDem ?

« LES NÉGOCIATIONSDE COULOIR NEVONT PASRÉCONCILIER L’ÉLECTEUR

ET LA POLITIQUE »

Q Photo:G

.A.

Maire sor-tant UMPNom :DelvauxPrénom :Jean-JacquesÂge : 65 ansProfession :retraité del’éducationnationale

Candidat PSNom :MagnierPrénom :BrunoÂge : 48 ansProfession :proviseur-adjoint

Jusqu’au bout, la campagneà Saint-Omer n’aura pas étéde tout repos. Muriel Volle,

la candidate du MoDem s’estfinalement désistée, après

de nombreuses tentatives d’union.

Page 10: La pression de mars - numéro 7

Jeunesse TourismeCadre de vie

� Poursuivre le programme de réno-vation des rues ; lutter contre le bruiten collaboration avec la police muni-cipale ; rénover l’éclairage publicdans l’ensemble de la ville ; défendrela propreté urbaine par des cam-pagnes de sensibilisation et une ver-balisation accrue des contrevenants.

� Créer une maison de quartier dansles faubourgs ; développer des ateliersde pratique musicale pour collégienset lycéens ; mettre en place un “pas-seport jeune” proposant aux adoles-cents des réductions en matière desport, de culture et de loisirs.

� Rénover l’arboretum du jardin pu-blic ; lancer un grand festival annuel“jardins et lumières” pour mettre envaleur le patrimoine de la ville ; pour-suivre la reconversion de l’Hôtel deville et de son théâtre en un centreculturel et d’animation.

� Entretien des voieries, des trottoirset de la propreté de la ville ; luttecontre les nuisances visuelles et so-nores ainsi que l’insécurité ; relaisentre les personnes âgées et les diffé-rentes structures d’accueil qui lesconcernent.

� Création d’emplois peu qualifiéspour les jeunes Audomarois non-di-plômés ; mettre des jeux pour enfantsau pied des immeubles ; création deconseils de quartiers pour prendre encompte les réalités locales spéci-fiques.

� Faire de Saint-Omer une ville tou-ristique accueillante et du tourismeun vecteur essentiel de développe-ment pour le Pays de Saint-Omer ;mettre en place une piste cyclable re-liant centre-ville et marais ; proposerdes boucles touristiques selon diversthèmes comme le patrimoine, la na-ture, le bois, l’aquatique…

ue de rebondissements !Les municipales de Saint--Omer font jaser. Les listespour les élections, c’esttoute une histoire. En no-vembre, les rumeurs en-flent déjà : Michel Lefait,député PS de la 8e circons-cription du Pas-de-Calais,

se présenterait aux élections municipales de Saint-Omer. Ce qu’il dément publiquement peu après.Quelques jours plus tard, c’est au tour de BrunoMagnier, le secrétaire de la section socialiste, de seporter premier candidat à la mairie. En décembre, leMoDem essaie de se rapprocher du socialiste en vued’une création de liste commune. « Muriel Volle, duMoDem, nous a contactés. On s’est réunis avec les mili-tants du MoDem, ainsi qu’avec Michel Lefait, à la mairied’Arques. Nous avons refusé un rapprochement car elledemandait la tête de liste », déclare le secrétaire de lasection socialiste. La presse a été informée, mais lareprésentante du MoDem a toujours nié ce rappro-chement.Ensuite, c’est au maire sortant de passer à l’action :Jean-Jacques Delvaux (UMP) annonce sa candida-

ture. Ni Muriel Volle, ni DanyMasset ni même Phi-lippe Caron (tous trois du MoDem) ne figurent sursa liste, alors qu’ils étaient colistiers aux dernièresmunicipales. Les trois évincés ont donc décidé deconduire leur propre liste, à quelques jours dupremier tour. Surpriseau soir du 9 mars :le socialiste BrunoMagnier est en têteavec 42,55 %, devantle maire sortant quitotalise 40,89 % desvoix.Malgré une courtecampagne, Muriel Volle est l’autre révélation de cepremier tour. Elle se place troisième, mais obtienttout de même 16,56 % des voix. Au lendemain dupremier tour, nouveaux rebondissements. La Voix duNord du 11 mars évoque des rumeurs de rapproche-ment entre la liste de Muriel Volle et celle de Jean-

Jacques Delvaux (UMP). Le journal parle même dedeux postes pour la liste de l’ancienne adjointe aumaire. Jean-Jacques Delvaux dément tout rappro-chement : « Il n’y a eu aucune négociation avec MurielVolle. Le lendemain des élections nécessite un climat de sin-

cérité et de loyauté. Cen’est pas avec une négocia-tion de couloir que l’on varéconcilier l’électeur et lapolitique. »Du côté de BrunoMagnier, aucune prisede contact ni aucuneconsultation avec Mu-

riel Volle. Finalement, cette dernière préfèrera jeterl’éponge sans donner de consigne de vote. Ce seradonc un duel Magnier-Delvaux au second tour. Maisl’issue du scrutin reste indécise. Qui remportera lamairie de Saint-Omer ? Aux électeurs de MurielVolle de se positionner.

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F O C U S

Jean-Jacques Delvaux, maire de Saint-Omer depuis 1983, est arrivé en deuxièmeposition au premier tour. La mairie (ci-dessus) pourrait basculer à gauche.

Qui veut les voixdu MoDem ?

« LES NÉGOCIATIONSDE COULOIR NEVONT PASRÉCONCILIER L’ÉLECTEUR

ET LA POLITIQUE »

Q Photo:G

.A.

Maire sor-tant UMPNom :DelvauxPrénom :Jean-JacquesÂge : 65 ansProfession :retraité del’éducationnationale

Candidat PSNom :MagnierPrénom :BrunoÂge : 48 ansProfession :proviseur-adjoint

Jusqu’au bout, la campagneà Saint-Omer n’aura pas étéde tout repos. Muriel Volle,

la candidate du MoDem s’estfinalement désistée, après

de nombreuses tentatives d’union.

Page 11: La pression de mars - numéro 7

Communautéd’agglomérationCulture

9La Pression de mars Vendredi 14 mars 2008

F O C U S Quelle premièremesure doitprendre votre

prochain maire ?

« Trouver un loge-ment sur Saint-Omern’est vraiment pasfacile. Les loyers

sont assez élevés pour les jeunes quicherchent à s’installer. Créer des em-plois sur l’Audomarois, peut-être dans letourisme, aiderait les jeunes. Je remet-trais en place le quart d’heure gratuitpour le stationnement, supprimé par lamunicipalité, et il faudrait égalementaugmenter ou créer des place de par-kings gratuites en centre-ville. »

Prénom : DamienÂge : 22 ansProfession :Commercial

Rechercheabstentionnistes

Une semaine avant le premier tour, BrunoMagnier, candidat PS, avait organisé troisréunions publiques. Pour le second tour, la

stratégie sera légèrement différente. « Nous allons nousorienter sur le porte-à-porte. Nous ne voulons pas faire commeJean-Jacques Delvaux, qui est plutôt un homme de salons etqui tient ses réunions dans des hôtels », explique le socia-liste, qui compte « se concentrer sur les électeurs des quartiersles moins favorables ». Au centre de la commune, dans lebureau de vote numéro 1 (Hôtel de ville), Jean-JacquesDelvaux devance Bruno Magnier de plus de cent voix.Pour conquérir de nouveaux électeurs, le candidatcompte également sur les réunions de bistrot. Ces soi-rées, qui consistent à organiser une rencontre avec lesélecteurs dans les bars de la ville, ont remporté un francsuccès auprès des Audomarois. BrunoMagnier comptebien en tenir au moins une d’ici le 16 mars, « pour fairele point, mais aussi parce que cela attire les gens des milieux po-pulaires, qui sont précisément les électeurs que nous souhaitonstoucher ».Même stratégie chez le maire sortant, Jean-JacquesDelvaux : « Nous n’avons plus aucune réunion publique pré-vue, nous en avons déjà organisé trois dans la semaine qui aprécédé le premier tour. » Le candidat UMP compte bienprofiter des quelques jours qui lui restent pour trans-mettre ses derniers messages de campagne aux habi-tants. L’occasion de les confronter à la situation poli-tique du second tour : « Nous allons leur expliquer qu’ils

auront un choix clair à faire entre Bruno Magnier et moi, di-manche. Nous voulons mettre en avant notre pleine connais-sance des dossiers et notre disponibilité pour la commune. »Avec, là encore, deux maîtres mots : contact et péda-gogie. « Cette semaine, nous allons nous livrer à une cam-pagne de proximité pour informer les électeurs de notre pro-gramme. Même si celui-ci a été bien expliqué, des questionssubsistent chez certains habitants. » Les deux candidats au-ront l’embarras du choix pour convaincre les indécis :dimanche, 40% des Audomarois s’étaient abstenus.

Il y a pas mal dechoses à faire àSaint-Omer. L’anima-tion n’est pluscomme avant. Beau-coup de fêtes qui

existaient ont été supprimées. J’organise-rais donc plus de concerts en centre-ville. Il n’y a pas encore assez de par-kings. Les seules places gartuites qui ontété créées sont éloignées du centre-ville.

Prénom : JosianeÂge : 56 ansProfession :Sans emploi

Je commencerais parla propreté de laville. Les déjectionscanines sur les trot-toirs, c’est insuppor-

table. Ensuite, je m’attaquerais au sta-tionnement car c’est une priorité àSaint-Omer.C’est payant quasiment par-tout même pour les riverains qui de-vraient avoir des prix avantageux. Il y ala place de créer un autre parking encentre-ville. Autre problème de station-nement : la gare.

Prénom : ThomasÂge : 22 ansProfession :Étudiant

Je rétablirais le quartd’heure gratuit pourles automobilistescar cette suppres-sion a fait beaucoup

de remous. Les gens qui déposent leurvoiture pour simplement acheter leurpain et qui reviennent avec un PV deonze euros, ça fait cher le pain !Je ne suis pas d’accord avec le déména-gement des bureaux de la municipalité.Elle était très bien sur la Grand’ place.

Prénom : CatherineÂge : 50 ansProfession :Buraliste

� Engager de nouvelles animations,comme la création d’une scène musi-cale sur la place Foch le samedi soiren été ; programmer un festival de ci-néma en plein air sur le site des rem-parts ; apporter un soutien logistiqueet financer encore davantage les asso-ciations culturelles.

� Poursuivre la collaboration avec lacommunauté d’agglomérations pourles grands projets de la ville ; créer ungrand parking auprès du quai des Sa-lines, subventionné à 40 % par laCommunauté d’agglomération deSaint-Omer (Caso) ; développer lesmaisons de la petite enfance danstous les secteurs de l’agglomération.

� Création d’un vrai journal de laville ; offrir aux quartiers la possibi-lité d’organiser des animations inté-grées et soutenues par la municipa-lité ; créer un théâtre de verdure auprofil antique, au pied des remparts ;organiser des concerts gratuits sur laGrand’place réaménagée et un festi-val de musique.

� Mettre en place une nouvelle fonc-tion : l’élu en charge des affaires éco-nomiques de la ville sera le représen-tant de la ville auprès de la Caso ;créer une commission de l’intercom-munalité pour permettre le lien entrel’économie et les autres secteurs.

Au second tour, cesera aux électeursde Muriel Vollede départagerles deux candidatsencore en lice.

Jean-JacquesDelvaux avait étélargement rééluen 2001 malgré laconcurrence d’uneautre liste de droite.

MUNICIPALES2001 : 2ème tour

MUNICIPALES2008 : 1er tour

Photo: G.A.

Liste Magnier (PS) : 42,55 %

Liste Delvaux (UMP) : 40,89 %

Liste Delvaux : 50,01 %

Liste Dehay (DVG) : 32,89 %

Liste Dubout (RPF) : 17,10 %

Pour les deux candidats en liceau second tour, l’heure

n’est plus aux réunions publiques,mais au contact direct

avec l’habitant.

Photo:G

.W.

Liste Volle (MoDem) : 16,56 %

Bruno Magnier (PS) chezlui mardi matin, avantde partir distribuerdes tracts dansles quartiers de la ville.

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F O C U S

10La Pression de mars Vendredi 14 mars 2008

Débat ou pas ?La situation rappelle 2007 et la fameuserencontre entre Ségolène Royal etFrançois Bayrou. Au lendemain du pre-mier tour, Jean-Jacques Delvaux, lemaire sortant de Saint-Omer, a conviéson adversaire socialiste à un débat.Mais ce dernier a rejeté la propositionde son concurrent. Le candidat PS craintque « le maire sortant ne reprenne à soncompte les idées de son programme ».

Barbier remporteSaint-Omer sudDans le canton de Saint-Omer sud, il n’yaura pas eu de surprise. Le conseillergénéral sortant, Jean-Marie Barbier, aété reconduit dans ses fonctions à unetrès large majorité des voix. Le candi-dat du PS recueille plus de 66 % desvoix au premier tour et devance nette-ment son adversaire de l’UMP, FrançoisDecoster, qui n’a pas dépassé 20 % dessuffrages. Un résultat significatif : avecla victoire du socialiste Bertrand Petitsur Jean-Jacques Delvaux dans l’arron-dissement de Saint-Omer nord, lesdeux cantons de la ville sont désormaisancrés à gauche.

Stationnement :l’œil de Muriel Volle

Malgré son désistement,Muriel Volle agardé tout son sens critique. Interrogéesur le manque de places de parking àSaint-Omer, l’ex-candidate a regretté« l’absence d’étude depuis 2000 ». L’an-cienne adjointe au maire a par ailleursestimé que « les parkings excentrés nesont pas tout à fait optimisés ». Un tacleau maire sortant et à son projetde création d’un parc de stationnement.

Les municipalespassionnent sur le NetQui a dit que la politique n’intéressaitplus personne ? Sur le site Internet deLaVoix du Nord, un article consacré aubilan du maire de Saint-Omer et au pro-gramme des différents candidats a déjàrecueilli près de 400 réactions.Mor-ceaux choisis : « Une seule possibilitéd’avancer, c’est la liste Magnier » ;« Jean-Jacques Delvaux, à renouvelersans modération pour le bien-être de laville… » Une belle réserve de sloganspolitiques. Si jamais le nouveau mairecherche des conseillers en communica-tion, il saura où aller les chercher…ement de 460 places en bas de la ruede Dunkerque.

2008,mais pas 2014

Jean-Jacques Delvaux l’a confirmé : il nese représentera pas en 2014. Interrogésur la présence des jeunes sur sa liste,le maire sortant a expliqué qu’il souhai-tait « préparer la relève. J’aurai 71 ans en2014, ce qui me conduirait à finir monmandat à 77 ans en 2020. » Un âge pas siavancé, pourtant. Jacques Chirac avait75 ans à sa sortie de l’Elysée, en 2007…« Oui,mais je ne me sens pas prêt à fairele même choix. Je pense qu’il faut savoirlaisser sa place », a affirmé le candidat.

L’aggloau secoursde la ville

À l’heure où l’ensemble de l’Audomaroisdoit appréhender les plans sociaux

de la Cristallerie d’Arques, les édilesde St-Omer s’accordent à voir

dans la communauté d’agglomérationun outil indispensable pour faire face.

Seule ville de droite dans une communauté d’agglo-mération de gauche. Isolée, mais pas sans poids.Saint-Omer, ce ne sont “que” 16 000 habitants, au

sein d’une Communauté d’agglomération de Saint-Omer(Caso) comptant 72 000 âmes. 16 000 personnes seulement ausein de la Caso, mais une ville qui en est le cœur industriel,touristique, et même historique – le district fut créé en 1962 àl’instigation de l’Audomarois Raymond Senellart. Au-jourd’hui, Jean-Jacques Delvaux, maire de Saint-Omer depuis1983, est le seul homme de droiteà occuper l’un des dix-neuf hôtelsde ville faisant partie de la Caso.Cette différence ne le gêne guère :« Dans le cas d’une communauté d’ag-glomération, il y a une solidarité qui doit jouer. Évidemment qu’il fautse battre pour obtenir quelque chose, mais ce n’est pas une questiond’étiquette politique. C’est juste que chaque ville veut tirer le maxi-mum de la Caso. » Jean-Jacques Delvaux explique ainsi que cer-tains dossiers municipaux n’auraient pu être menés à termesans l’apport de la communauté d’agglomération. « Nous avonspumonter à Saint-Omer un office de tourisme intercommunal qui n’ad’égal dans la région que celui de Lille. Je peux aussi citer la piscine,dont la réfection n’a été possible que grâce à l’apport financier de laCaso. » Un bilan positif que conteste vigoureusement BrunoMagnier, l’opposant PS de Jean-Jacques Delvaux dans lacourse à la mairie de Saint-Omer. Celui-ci déplore que la com-mune soit « isolée » au sein de la Caso. « Le maire ne cesse de s’op-poser aux propositions de la Communauté d’agglomération. Résultat: ces dernières années, Saint-Omer a perdu son rang dans le concert desvilles du Pas-de-Calais. » En revanche, il est un point sur lequel

les deux hommes sont sur la même longueur d’onde : si Saint-Omer veut retrouver son standing passé, cela passera obliga-toirement par la Communauté d’agglomération. Et ce, grâceà l’apport financier représenté par la taxe professionnelle quipermet d’exécuter de grands chantiers, et surtout grâce à l’em-ploi. Ainsi, Jean-Jacques Delvaux et Bruno Magnier pensentl’un comme l’autre que la catastrophe de la cristalleried’Arques (6 000 emplois supprimés en quatre ans) ne pourraêtre compensée qu’au niveau de la Caso.

« Depuis cette annonce, expliqueJean-Jacques Delvaux, l’Aggloméra-tion a développé plusieurs zones d’acti-vités dans les alentours. Ici, nous enavons une située du côté de la porte

multimodale, qui est actuellement en cours de construction sur un sitede 160 hectares. De nombreuses entreprises ont fait part de leur vo-lonté de venir s’y installer. » Par ailleurs, les deux candidats sou-lignent le haut potentiel touristique de la ville. « Saint-Omer pos-sède un patrimoine historique et naturel riche. Avec une bonneconcertation au niveau de la Caso, il doit être possible de pousser desgens qui ne font que passer ici à y rester quelques jours. » D’où despromesses des deux candidats de créer des emplois dans l’hô-tellerie ou la restauration. Seul regret pour le maire de Saint-Omer : « concernant la cristallerie d’Arques, nous nous sommes ré-veillés trop tard. Nous aurions dû anticiper ce qui allait se passer ets’y préparer bien plus tôt ».En tout cas, quel que soit le nom de l’homme qui occupera lafuture mairie, il ne recevra pas en bonus la présidence de laCommunauté d’agglomération : la fonction devrait en effetéchoir à Joël Duquesnoy, l’actuel maire d’Arques.

Saint-Omer est l’un des der-niers bastions de l’UMP dansle département du Pas-de-

Calais. Mais les choses pourraientbien changer avec le second tourdes élections municipales, di-manche.En mars 2008, tout l’Audomaroisest occupé par la gauche. Tout ?Non ! Une petite ville peupléed’irréductibles électeurs de droiterésiste encore et toujours à l’enva-hisseur... Depuis 1983, l’UMP estau pouvoir dans la ville de Saint-Omer, sous l’égide de Jean-Jacques Delvaux qui a ravi la mai-rie au socialiste sortant, JeanSaint-André. À ce jour, c’est laseule ville de droite dans l’Audo-marois. L’agglomération, compre-nant Longuenesse, Arques, Saint-

Martin-au-Laërt ou encore Blen-decques, est totalement acquise àla gauche. La Communauté d’ag-glomération de Saint-Omer, prési-dée par Jean-Marie Barbier (PS),aussi. La cité de Delvaux surnageseule au milieu d’une mer rose.Forte personnalité de la droite ré-gionale, le maire de Saint-Omerest également conseiller généraldu Pas-de-Calais.Pourtant, le 9 mars, Jean-JacquesDelvaux a perdu son poste au Dé-partement, au profit de BertrandPetit (PS), maire de Saint-Martin-au-Laërt, et ce dès le premier tour,avec 63,72 % des voix contre lui,dans son canton de Saint-Omernord. C’est une réelle surprisepour le premier magistrat deSaint-Omer d’être battu si large-

ment sur ces propres terres. Aulendemain du premier tour desélections municipales, le mairesortant se classe deuxième(40,89 %) derrière le socialisteBrunoMagnier (42,55 %). Autantdire que, dimanche 16 mars, la ba-taille est loin d’être gagnée pourJean-Jacques Delvaux. Si Saint-Omer passe à gauche, ce sera unenouvelle ville perdue par la droitedans le Pas-de-Calais. Pour le can-didat socialiste, « Delvaux et l’UMPjouent leur dernière cartouche. Il estcrucial pour eux de garder Saint-Omer ».Autrement dit, avec ses airs de vil-lage gaulois, Saint-Omer essaietant bien que mal de résister auxassauts d’une gauche ragaillardie.Mais y parviendra-t-elle ?

Dernier “village”d’irréductibles

Photo CJ

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SEULEVILLE DE DROITEDE L’AGGLOMÉRATION

L’avenir est sombrepour la cristallerie d’Arques.

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L’ E N Q U Ê T E

11La Pression de mars Vendredi 14 mars 2008

a faisait trente-huit ans que René Verfail-lis s’asseyait à cette table, dans la petite ar-rière-salle boisée de la mairie. D’abord entant que conseiller municipal, puis, dansle siège tapissé de velours rouge : la placedu maire de Neuville-Vitasse. Un village àune vingtaine de kilomètres d’Arras (Pas-

de-Calais). Mais après une vie entière de bonset loyaux services dédiés à cette commune de433 habitants, il a décidé de passer la main à 68ans. « La mairie, j’en ai assez. Je veux retrouver ma li-berté. Avoir du temps pour moi, pour partir en va-cances », explique René Verfaillis qui n’a jamaisété encarté dans un parti politique.Être maire rural, c’est un sacerdoce, une pas-sion. Si les maires dans les villages se défendentsouvent de faire de la politique, ils doiventd’abord gérer la commune et ses habitants. « Dèsque les gens ont des problèmes avec leur voisin, leursenfants, leur voi-ture, c’est la fautede ch’maire ! Il fautêtre disponible 24heures sur 24. »René se souvientdu jour où il a dûaller déterrer desobus de la Se-conde Guerre mondiale dans un champs der-rière le village, « avec une pelle et une pioche ! » Toutseul, avec beaucoup de travail et peu de moyens.Le bureau de l’employée communale n’est ou-vert que vingt heures par semaine. Cet après-midi, elle n’est pas là et de son passage dans lamatinée ne reste qu’une vieille machine à cal-culer devant sa chaise.« C’est sûr qu’il est plus difficile d’être maire au-jourd’hui. Mais je me demande si ce n’est pas une idéereçue cette crise de vocation », s’interroge SergeMartin, directeur de l’Association des maires du

Nord (affiliée à l’Association des maires deFrance). Il souligne que dans le Nord, 75 % desmaires se sont représentés. Un sondage Ipsospour le Courrier des maires (1) le confirme : lesmaires prennent goût à leur fonction. En France,les deux tiers des maires se représentent et ilssont plus de 90 % dans les villes de plus de10 000 habitants. C’est plus qu’en 2001. Ceuxqui font baisser la moyenne, ce sont les mairesdes toutes petites communes. Marcel Astruc,vice-président de l’Association des maires ru-raux de France (AMRF), estime, lui, que la crisede vocation est bien réelle : « Aujourd’hui, on nousprend pour des spécialistes, alors qu’avant, être mairedans un village de 300 habitants, ça voulait dire allerà la messe le dimanche et signer trois papiers. »Une école qui brûle, un toit qui s’écroule ou unenfant qui se blesse sur un terrain de football etla responsabilité du maire peut être mise en

cause. « Il y a deplus en plus denormes. C’est trèscompliqué », rap-porte Serge Mar-tin. Beaucoup demaires ont peur etsouhaitent êtredavantage proté-

gés. La complexité des réglementations, la dis-ponibilité croissante demandée et le manque demoyens financiers ont découragé des maires.« C’est sûr que si on est maire d’une commune demoins de 20 000 habitants, il faut une activité paral-lèle. Les réunions se passent le soir et le week-end. C’esttrès fatiguant », explique le directeur de l’associa-tion des maires du Nord.Impossible d’être disponible à plein temps pourles actifs. Les maires sont souvent des retraités.« Ce n’est pas sain ! Ils ne représentent qu’une partiede la population », s’indigne Marcel Astruc, lui-

même sexagénaire à la retraite et candidat dansson village du Puy-du-Dôme.Ou alors, il faut avoir une famille très conci-liante. René Verfaillis remercie encore sa femmepour toutes ces années où il rentrait tard desconseils municipaux ou des fêtes du village :« Allez expliquer à votre dame que vous ne voulez pasmanger de son pâté de tête, parce vous en avez déjàmangé au club des anciens ! » Dure aussi, la fonc-tion de première dame du village…

(1) Sondage Ipsos pour le Courrier des mairesréalisé en février 2007 auprès de 405 maires.

« C’est la fautede ch’maire! »

« AVANT, ÊTREMAIREÇAVOULAIT DIRE ALLERÀ LAMESSE LE DIMANCHEET SIGNERTROIS PAPIERS. »

çRÉGION. Même si deux tiers des mairesse représentent en France, une crise des vocationsfrappe les édiles des très petites communes.

René Verfaillis, maire de Neuville-Vitasse depuis 38 ans, ne se représente pas.

Photo:Thibaud

Vuitton

Par Sophie Bouillon et Gaël Cogné

Combien gagnevotre maire ?Voici le salaire mensuel des premiers magistratsque donne l’Association des maires de France :

- Pour une commune de moinsde 500 habitants, 632,85 euros

- De 500 à 1 000 habitants : 1 154,02 euros

- De 1 000 à 3 499 :1 600,73 euros

- De 3 500 à 9 999 : 2 047,45 euros

- De 10 000 à 19 999 : 2 419,72 euros

- De 20 000 à 49 999 : 3 350,38 euros

- De 50 000 à 99 999 : 4 094,90 euros

- Plus de 100 000 habitants : 5 397,83 euros

Le maire est payé par la commune. Il propose lorsdu conseil municipal son salaire (il n’est pasobligé de demander le maximum). Ses adjointstouchent 40 % du salaire du maire (là encore lenombre d’adjoints tolérés dépend de la taille dela commune). G.C

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P O I N T S D E V U E

1 2La Pression de mars Vendredi 14 mars 2008

Sans-papiersmais pas sans idées

«Les municipales représentent un espace dedécisions dans un territoire donné. »Bernard Pruvost, président de la

Chambre d’agriculture du Nord, ne suit pasde très près les élections de 2008. Ses préoc-cupations sont ailleurs. « La gestion de l’occu-pation des sols est très importante à mes yeux »,souligne-t-il. Antoine Jean, porte-parole dela Confédération paysanne, « n’attend pasgrand chose ». Originaire de Nomain, com-mune rurale à proximité d’Orchies, l’agri-culteur porte une attention particulière surles relations entretenues « entre la population

et le monde agricole ». Il admet qu’il « faudraitremettre du lien entre les consommateurs et lesproducteurs. La vente directe à la ferme revientpeu à peu à la mode mais pas suffisamment.Alors que ces consommateurs peuvent trouver àproximité de chez eux des produits de qualité ».Et de toute façon, « nous sommes condamnés àle faire ».Dans son village, quatre listes ont été pré-sentées lors du premier tour. « Dans chacuned’elles, il y avait au moins un représentant dumonde agricole. » Une force qu’il pense êtrebénéfique dans la mesure où il juge que lesintérêts des agriculteurs ne sont pas consi-dérés à leur juste valeur. Preuve en est, lacampagne municipale chez lui « ne s’est ré-sumée qu’à l’amélioration des cours d’eau ».Dans le Pas-de-Calais, 75 % du territoiresont des terres agricoles. « Nous avons besoinde nous investir », explique Bruno Roussel dela Fédération départementale des syndicatsd’exploitants agricoles (FDSEA).Natif de Campigneulles-les-Petites, com-mune de 500 âmes dans l’arrondissementde Montreuil-sur-mer, Bruno Roussel vientfraîchement d’être élu au conseil municipal.« Les villages ont beaucoup grossi, observe-t-il.De plus, le maire a entamé une révision du Pland’occupation des sols (PLU). Nous avons besoinde participer à la discussion. »Même si aujourd’hui les communes n’ontplus les compétences d’autrefois, certainsdossiers sensibles leur incombent encore.Être représentant à la communauté de com-munes de la Canche serait l’une des priori-tés de l’agriculteur de Campigneulles-les-Petites. Afin de « porter plus haut la parole desagriculteurs ». Une priorité pour le mondeagricole, aujourd’hui devenu minoritairedans la société, et qui pourtant reste le prin-cipal utilisateur du territoire.

La campagne électo-rale laisse plutôt indifférents lessans-papiers du Nord. Mercredi,comme toutes les semaines, leComité des sans-papiers duNord (CSP 59) s’est réuni sur laPlace de la République, sansparler une seule fois des élec-tions. Pour eux, la bagarre se dé-roule davantage du côté de laPréfecture et de son chef, DanielCanépa. « Ce que l’on attend duprochain maire, c’est que les pro-messes tenues soient respectées. Maisc’est surtout la guerre que nous mènele Préfet depuis août dernier quinous pose des problèmes », expliqueRoland Diagne, porte-parole duCSP 59. Nommé Préfet en 2006par Nicolas Sarkozy, alors mi-nistre de l’Intérieur, Daniel Ca-népa ne ménage pas sa peine

pour régler l’épineux problèmedes sans-papiers en particulier,et de l’immigration en général.« Pendant onze ans, on a fait uneéquation anormale : grève de lafaim équivaut à régularisation.Maintenant, c’est la rupture. Grèvede la faim entraîne inévitablementune reconduite à la frontière. Nonau chantage ! Non à la manipula-tion ! », marte-lait-il dans LaVoix du Nord enaoût dernier.Martine Aubryest complète-ment en porte-à-faux avec lePréfet. « La seulerépression n’estpas une solution à l’immigration. »Selon la maire de Lille, en passede garder son fauteuil, « la loi s’at-taque à la liberté des personnes ».Mais la maire socialiste n’a pastoujours été si tendre. « Il y a sixans, Martine Aubry barricadait ses

conférences de presse pour que l’onn’y accède pas, commente RolandDiagne. Aujourd’hui, c’est plus sou-ple, et puis il y a la place de la Ré-publique qu’elle a renommée placedes droits de l’Homme. C’est unsigne... »La droite lilloise n’emporte pasles faveurs du porte-parole duCSP 59, on s’en doute. « Je suis

content que ladroite ait pris uneclaque au pre-mier tour. » Peuimporte la cou-leur politiquepour Meciba,Algérien de34 ans, enFrance depuis

quelques années. « Ce que je veuxavant tout, c’est avoir des papiers,avoir un statut ici, en France. J’aides contacts pour du travail, mais ilme faut ces papiers. » Des préoccu-pations bien loin des bataillespour les municipales.

Les agriculteurs de la régionont des avis partagés sur les électionsmunicipales. Ce qui les préoccupeprincipalement : la gestionde l’espace et l’occupation des sols.

LILLE. Les sans-papiers sont aussi au cœur des élections,même s’ils ne se sentent pas toujours concernés par les municipales.

MARTINEAUBRY N’A PASTOUJOURS ÉTÉSITENDRE

Par Guillaume Carré

Par Benoist Pasteau

Roland Diagne, porte-paroledes sans-papiers attendbeaucoup du prochain maire.

Défendreles intérêtsagricoles

Les agriculteurs tiennent à défendre leurs intérêts.Notamment la gestion de l’occupation des sols.

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P O R T R A I T

13La Pression de mars Vendredi 14 mars 2008

ur les marchés, elle va même jusqu’à porter unecasquette “Sébastien Huyghe !” pour tracter »,s’enthousiasme Etienne Diot, benjamin de laliste UMP. Il est vrai qu’au premier abord,on a dumal à imaginer cette dame distinguée- chaussures Channel, foulard et fourrure -

endosser jusqu’à la caricature l’habit du militant debase. Mais lorsqu’elle s’anime, évoquant la « gauchecaviar » qu’elle « exècre », ou pointant la politique« paillettes » de Martine Aubry, l’évidence est là : Bri-gitte Mauroy est une combattante. Et dans son com-bat contre la candidate PS, elle se dépense sanscompter.Son anti-aubrismes’exacerbe en 2004.Chef du serviceurologie au CHUde Roubaix, face « àla mauvaise applica-tion des 35 heures àl’hôpital public », elleclaque la porte.« Comment voulez-vous faire confiance à une femme qui aété incapable de concertation et de souplesse en imposantles 35 heures ? » Et ainsi de suite.Son oncle Pierre Mauroy, le frère de papa a, paraît-il, très bien pris son engagement aux côtés deHuyghe. « Il a compris que c’était un engagement ci-toyen. » Car Brigitte Mauroy ne fait pas de politique,ce mot lui hérisserait presque le poil : elle fait de la« citoyenneté », répète-t-elle à l’envi. D’ailleurs, elle sesent un peu de gauche, pas vraiment de droite, mêmesi elle n’a « jamais pu voter socialiste ».Pour la sensibilité de gauche, en 2005, aux législa-tives de la 4e circonscription, elle a frayé avec le Partiradical de gauche, en tant que suppléante de Jacques

Mutez. « Mais je me suis éloignée quand j’ai compris qu’ilse rapprochait de Martine Aubry. » Son point de vue surl’État-providence la ferait plutôt pencher du côtédroit de la balance : « Quand on attend trop de l’État-providence, on cherche moins à exploiter les forces que cha-cun a en soi. Mais attention, je suis pour de vraies poli-tiques sociales : il faut aider les gens qui en ont besoin. »Elle ne reconnaît qu’un défaut à son oncle : « Celuid’être socialiste ».Elle avoue que son nom lui en a fait « baver ». Mâ-choires serrées : « À votre avis, c’est facile de s’appelerMauroy en 1981 [NDLR : Pierre Mauroy est alors

Premier ministre deMitterrand] dansle milieu médical,traditionnellement dedroite ? »Prolixe sur le bilan« négatif » de la mairesortante, sur « l’enga-gement et la gentil-lesse » de Sébastien

Huyghe, elle se ferme comme une huître sur des su-jets qui appartiennent « à [son] premier cercle ». Les loi-sirs ? « Je n’en parlerai pas. » Les enfants ? Silence.« Oui, j’en ai un. » Rideau. Est-elle mariée ? « Oui. »Depuis combien de temps ? « Ça ne vous regarde pas. »Tout au plus apprendra-t-on qu’elle se passionnepour Albert Camus (« pour la liberté que l’on sent dansson oeuvre »), mais aussi pour les Beatles (« On n’a ja-mais fait mieux du point de vue mélodique. »)« Femme de dossier » mais pas « femme publique », ellereconnaît tout de même que son entrée en campagnea constitué « un coup médiatique ». « Je l’assume pleine-ment puisque c’est une manière d’aider Sébastien et de mebattre contre la maire sortante. »

Tuerle Pierre

Par Françoise Marmouyet

« COMMENTVOULEZ-VOUS FAIRECONFIANCE À UNE FEMME QUI AÉTÉ INCAPABLE DE SOUPLESSE EN

IMPOSANT LES 35 HEURES ? »

Brigitte Mauroypoursuit CharlieHebdo en diffamationJeudi 6 mars, 22h30. Dans les locaux deFrance 3 Nord-Pas de Calais, les quatreprincipaux candidats à la mairie de Lillecroisent le fer au cours d’un ultimedébat avant le premier tour. D’entrée, la“polémique du jour” est mise sur letapis : dans son édition du mercredi5 mars,Charlie Hebdo accuse BrigitteMauroy de justifier l’excision. L’hebdo-madaire satirique pointe un articlesigné par la colistière de SébastienHuyghe dans Le Dictionnaire de lasexualité humaine, paru en 2004. BrigitteMauroy y résume ainsi les propos d’unauteur de 1949 au sujet du capuchon duclitoris : « Ce repli peu développé chezles Occidentales est beaucoup plus longchez certaines Asiatiques ou Africaines,ce qui fait procéder à une circoncision. »Une façon, selon Charlie Hebdo, de justi-fier cette mutilation. Ce dont l’intéres-sée se défend. S’en suit une joute entreles équipes de Huyghe et d’Aubry. Mor-ceaux choisis. Huyghe : « Ce sont desméthodes fascistes, je pense que ceuxqui les ont utilisées ne sont pas des gensqui nous soutiennent et donc ce sont desadversaires. » Patrick Kanner, le direc-teur de campagne de Martine Aubry,réplique : « [Sébastien Huyghe] vient defranchir une nouvelle étape en accusantles listes concurrentes d’être à l’originede cette affaire.C’est une dernière pro-vocation d’un candidat qui n’a rien à diresur Lille. » Brigitte Mauroy a, quant àelle, annoncé qu’elle attaquait CharlieHebdo en diffamation.

LLIILLLLEE.. Brigitte, la nièce de Pierre Mauroy, urologue, ancienneadhérente du parti radical de gauche, a été propulsée sur le devant de la scène politique locale en janvier, lorsque Sébastien Huyghe (UMP)l’a recrutée pour être la numéro deux de sa liste pour les municipales.

Brigitte Mauroy a rejoint laliste de Sébastien Huyghe,candidat UMP à Lille.

«SPhoto : Gaël Cognet

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E T A I L L E U R S

14La Pression de mars Vendredi 14 mars 2008

Boycott du Salondu livreLe Salon du livre, qui ouvre à Paris au-jourd’hui pour six jours, est boycottépar les pays arabes.Cette 28eédition,dont l’invité d’honneur est Israël, doitêtre inaugurée ce matin par le Premierministre israélien Shimon Pérès. L’appelau boycott de l’Organisation panisla-mique des sciences et de la culture areçu un accueil favorable dans plu-sieurs pays arabes. « Une mauvaise mé-thode », pour David Martinon, porte-pa-role de l’Élysée. « Le salon du livre estun lieu de dialogue qui doit échapper àla polémique », a-t-il affirmé.

Dati n’est pas sûred’assumersa fonction de maireLa ministre de la Justice Rachida Dati,dont la liste a recueilli 49,5 % des voixdans leVIIe arrondissement de Paris, arefusé de dire si elle assumerait la fonc-tion de maire de quartier. « Cela dépen-dra des résultats. Si Françoise de Pana-fieu est maire, il est clair que nous auronsune équipe au niveau de la mairie deParis.Cela dépendra du nombre deconseillers de Paris à l’issue du secondtour », a-t-elle assuré. En clair, si Ber-trand Delanoë, favori, remporte la mai-rie de Paris, Rachida Dati risque de lais-ser sa place au maire sortant MichelDumont.Celui-ci, qui figure en secondeplace sur la liste de la ministre, aura bé-néficié d’un joli coup de pub.

Le rival de Juppéjette l’épongeL’adversaire d’Alain Juppé à la mairiede Bordeaux, Alain Rousset (PS), a dé-missionné du conseil municipal avecquatre de ses colistiers. Il avait obtenu11 sièges contre 50 pour la liste d’AlainJuppé, élu dès le premier tour. Le direc-teur de campagne d’Alain Rousset aprécisé qu’il s’était présenté « pourgérer en cas de victoire, pas pour êtredans l’opposition ».

Act-up ironise sur ladéfaite deVanneste« Mais où va la France ? », c’est le titredu communiqué de presse envoyé hieraux rédactions par l’association Act-up.Un texte pour le moins ironique sur ladéfaite de ChristianVanneste (UMP)aux municipales de Tourcoing face ausocialiste Michel-François Delannoy.« Avec la défaite de ChristianVanneste,c’est encore la France qui part un peuplus à la dérive.Cette France qui refusequ’on appelle homophobie la luttecontre le communautarisme ». En janvierdernier, ChristianVanneste avait étécondamné à 3 000 euros d’amendepour propos homophobes.

Auto-écoles en grève

« La sécurité routière ne se brade pas »,pouvait-on lire sur les banderoles desmanifestants hier à Nancy (Meurthe-et-Moselle).Quelques 500 voitures-écolesainsi que 160 bus et camions s’étaientrassemblés pour protester contre la ré-forme du permis de conduire. L’an-nonce faite par le gouvernement selonlaquelle le code de la route pourraitdésormais être passé dans les écoles adéclenché une grogne des auto-écoles,qui craignent pour leur chiffre d’af-faires. Des manifestations ont eu lieu unpeu partout en France.

Guerreà gauchedans le 9-3SSEEIINNEE--SSAAIINNTT--DDEENNIISS.. Le maintiendes candidats socialistes contre des maires sortants communistes sonnele glas d’une entente mutuelle qui duraitdepuis 1972. À Aubervilliers, bastion PChistorique, le PS pourrait s’imposer.

Sur le marché d’Aubervilliers (Seine-Saint-Denis), socialistes et communistes se livrentà une véritable guerre. Mégaphones en ban-

doulière, les militants de la liste PCF menée par lemaire sortant Pascal Beaudet arpentent les allées. Lacible de leurs attaques, ce n’est pas l’UMP, mais belet bien le candidat socialiste Jacques Salvator. Dansce contexte, l’absence d’accord entre ces deux listesn’a rien d’une surprise. Il y aura donc une quadran-gulaire à Aubervilliers. À ellesdeux, les listes du communiste Pas-cal Beaudet (34,94 %) et du socia-liste Jacques Salvator (31,95 %) to-talisent près de 67 % des voix. Uneaubaine pour l’UMP que les deuxlistes adverses n’aient pas trouvéd’accord. Sans ça, l’élection étaitpliée au premier tour.À Saint-Denis aussi, les deux listes de gauche semaintiennent au second tour. Le socialiste GeorgesSali obtient 22,57 % des voix, loin derrière la listecommuniste de Didier Paillard (42,02 %), mais de-vant l’UMP Xavier Ducos-Fonfrede (13,45 %).Lescénario est identique à La Courneuve et à Bagnolet.En Seine Saint Denis, le PS se maintient donc dansquatre villes face aux communistes. Résultat : la fé-dération du PS a appelé, lundi dernier, à « chercherl’union ». Sans grand succès. Depuis 1972 et le Pro-gramme commun, socialistes et communistes font

pourtant cause commune aux élections munici-pales. Jusqu’en 2001, malgré le déclin électoral pro-gressif du PCF, le soutien des socialistes avait per-mis à de nombreux maires communistes de semaintenir, notamment en Seine-Saint-Denis. Maisla stratégie du PS a changé. En septembre dernierdéjà, la chef de file du PCF, Marie-George Buffet,s’était inquiétée d’une volonté d’émancipation duPS. Elle avait multiplié les appels au “rassemble-ment de la gauche au premier tour”. En vain. Lessocialistes veulent récupérer les bastions rouges. Un

comportement condamnémême à gauche. Jean-LucMélenchon, sénateur PS del’Essonne, n’héiste pas à fusti-ger les « dangereux irresponsa-bles » qui ont déclenché« cette guerre injuste et stupide ».À La Courneuve, Saint-Denis

et Bagnolet, le combat risque d’être dur pour le PS.Il est peu probable que les électeurs de droite repor-tent leurs voix sur les socialistes, même pour fairebarrage au PCF, alors que les scores obtenus par leurscandidats au premier tour leur assurent au moins unsiège au conseil municipal. À Aubervilliers, bastioncommuniste depuis 1945, seules 348 voix séparentles deux candidats de gauche. Dans un contexte oùle MoDem et l’UMP se maintiennent au secondtour, l’issue du scrutin risque fort de dépendre de lacapacité des candidats à mobiliser les quelques13 000 abstentionnistes (53 %) du premier tour.

François Fillon et Rachida Datise sont déclarés hostiles au-jourd’hui à la demande d’eu-

thanasie de Chantal Sébire. Cettefemme de 52 ans souffre d’une tu-meur du sinus et de la cavité nasalequi la défigure et la fait souffrir. Ellea demandé au président du tribunalde Dijon d’autoriser son médecintraitant à l’aider à mourir. Le magistrat doit statuer lundi, maisFrançois Fillon et Rachida Dati ontdéjà tranché ce matin. Interrogés res-pectivement sur RTL et France Inter,ils se sont tous deux prononcéscontre la demande de Chantal Sébire.Sans empiéter franchement sur le ter-

rain de la justice, la ministre s’est ditpersuadée que le juge ne pourrait pasaccéder à cette requête. « Cette dame de-mande à la justice de pouvoir exonérer dela responsabilité pénale le médecin pour luiadministrer une substance létale (...) Cen'est pas notre droit et nous avons fondénotre droit et la convention européenne desdroits de l'Homme sur le droit à la vie ». Quant à François Fillon, il estimeque la loi Léonetti de 2005 sur la finde vie, qui autorise les médecins àcesser les soins palliatifs, est suffi-sante. Une loi décriée par les asso-ciations pro-euthanasie qui jugentqu’elle ne va pas assez loin. La ques-tion avait d’ailleurs divisé les candi-

dats Sarkozy et Royal au moment del’élection présidentielle. « On est là auxlimites de ce que la société peut dire, de ceque la loi peut faire. Je pense qu'il fautavoir la modestie de reconnaître que la so-ciété ne peut pas répondre à toutes cesquestions », a affirmé François Fillon.Reste que si la Justice n’accède pas àla demande de Chantal Sébire, l’af-faire pourrait bien se retrouver de-vant les tribunaux. Avec des méde-cins à la barre des accusés, cette fois.Pour François Fillon, « il reste la solu-tion qui lui a été proposée qui est une so-lution qui de mon point de vue est accep-table ». Comprendre un placementdans le coma.

Fillon préfère le comaà l’euthanasie

Par Séverine Fiévet

Par Séverine Fiévet

Marie-Georges Buffet et François Hollande qui s’embrassent. Une image dépassée ?

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348 VOIX ENTRE LES DEUX

CANDIDATS

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E T A I L L E U R S

15La Pression de mars Vendredi 14 mars 2008

Les pontes à la rescoussePÉRIGUEUX. Les deux François,Fillon et Hollande, ont faitle déplacement pour soutenirleurs candidats respectifs,Xavier Darcos et Michel Moyrand.

À Périgueux (Dordogne), le PSet l’UMP sortent la grosse ar-tillerie. Xavier Darcos, mairesortant qui brigue un troisième

mandat, est au coude à coude avec le candidatdu PSMichel Moyrand qui dispose d’une légèreavance : 45,70 % contre 45,25 % pour le minis-tre de l’Éducation nationale.François Fillon lui-même, ainsique le maire de Bordeaux nou-vellement réélu, Alain Juppé,devaient se rendre, hier soir, àsa réunion publique. Au mêmemoment, François Hollande,lui, prévoyait d’aller au mee-ting de Michel Moyrand afin de le soutenir.Le duel de Périgueux était plutôt inattendu : le22 février, un sondage du quotidien Dordognelibre donnait Xavier Darcos gagnant dès le pre-mier tour. Comme en 2001, où il s’était installéhaut la main dans son fauteuil de maire avecplus de 59 % des voix. Michel Moyrand n’avaitalors recueilli que 34 % des suffrages. Dimanchedernier, c’est avec 56 voix de retard sur son ad-versaire socialiste que Xavier Darcos s’est vucontraint d’aborder le second tour des munici-

pales. Un camouflet dur à digérer,au point de passer la soirée électo-rale enfermé dans son QG.Pour tenter de convaincre, le minis-tre de l’Éducation nationale misedonc sur un engagement résolumentlocal. Il ne s’est d’ailleurs pas renduau Conseil des ministres, mercredi,pour ne pas avoir à quitter Péri-gueux. Mardi, il a consacré sa mati-

née à promener lesjournalistes dans saville, s’extasiant, icisur une boulange-rie, là sur un atelierd’art. But de la ma-nœuvre : montrerqu’il est bien implanté dans sa

ville. Une manière de répondre à l’oppositionqui l’accuse de gérer sa ville de Paris, entre deuxréunions de politique nationale. À Périgueux,Nicolas Sarkozy avait été largement devancé parSégolène Royal lors du deuxième tour de l’élec-tion présidentielle. Xavier Darcos, qui ne faitd’ailleurs pas référence à l’UMP sur ses affichesde campagne, table sur son bilan et sur la proxi-mité.Pour conquérir la ville, les deux candidats mi-sent aussi sur les quelques 5 600 abstentionnistes

(30 % de l’électorat) et tentent de séduire le can-didat du Modem, à la tête d’une liste « ni dedroite, ni de gauche », Jean-Louis Demaret. Avec6,05 % des suffrages, l’homme se retrouve bel etbien en position d’arbitre de la campagne.Lundi, il a pris son petit déjeuner avec MichelMoyrand, puis a déjeuné avec Xavier Darcos.Avant de finalement décider de rester neutre. Laville, bastion de la droite depuis quarante ans,pourrait donc basculer à gauche si les électeursde Jean-Louis Demaret décidaient de reporterleurs voix dimanche sur le candidat PS.

«Plus sarkozyste que ChristianEstrosi, tu meurs ! » C’estun jeune militant UMP

qui traduit le mieux, par cette for-mule lapidaire, un sentiment una-nimement partagé par les fidèlesdu candidat à la mairie de Nice.Christian Estrosi, 52 ans, n'a pascessé d'afficher son amitié avec lechef de l'Etat depuis leur rencon-tre en 1988. Dès cette époque, lesecrétaire d'État à l'Outre-mer atoujours revendiqué une fidélitésans faille à son mentor, celui-cilui rendant la pareille à l’occasion,comme en 1993, lorsque le brasdroit d’Edouard Balladur appuiela candidature d’Estrosi à la dé-

putation dans les Alpes-Mari-times. Dans ces conditions, le can-didat UMP à la mairie de Nice nepeut que pâtir de la chute de po-pularité du président. S’y est ajou-tée la polémique sur son déplace-ment à Washington le 23 janvier,révélée par le Canard enchaîné. Aulieu de prendre un vol régulier AirFrance pour assister à une confé-rence dans la capitale américaine,Christian Estrosi a fait appel auxservices de Dassault Falcon Ser-vice pour un montant de 138 000euros. Conséquence : alors qu'ennovembre il était donné gagnantdès le premier tour, le résultat dedimanche dernier lui a prouvé

qu’il était loin d’avoir gagné.Christian Estrosi arrive certes entête, mais avec seulement 35,80 %des suffrages recueillis. Il devancele maire sortant (DVD) JacquesPeyrat, qui a su convaincre23,14 % des électeurs, et le candi-dat socialiste Patrick Allemand,qui a obtenu 22,3 % des voix.Selon un sondage TNS-Sofres-/Logica pour Nice Matin publié le23 février, Christian Estrosi l'em-porterait au second tour avec44 % des voix. Loin du plébisciteattendu il y a encore quelquesmois.S’il est élu, il a déjà annoncé qu’ildémissionnera de son poste au

gouvernement, et il fera siéger à latrès sensible présidence de laCommission des appels d'offresun élu de l'opposition de gauche.Preuve de cette volonté d’ouver-ture très “tendance”, la liste deChristian Estrosi comprend pourmoitié des membres de la sociétécivile, ainsi que le radical degauche Jean-Michel Galy.Le maire sortant et ex-frontisteJacques Peyrat, suspendu del’UMP et entré en dissidencecontre le poulain de Sarkozy, n’yva pas par quatre chemins et aver-tit : « Si Estrosi l'emporte, les Sarko-Boys déferleront sur la Promenade desAnglais. »

Estrosi, disciplede Sarkozy, est favori

Par Séverine Fiévet

Par Jeffrey Martin

LEMODEMDÉTIENTLA CLÉ

Le candidat Estrosi multiplieles actions sur le terrain

NICE. Rien n’est encore jouéentre le maire historiqueJacques Peyrat et ChristianEstrosi, mais le secrétaire d’Etatà l’Outre-mer tient la corde.

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Sourire de façade pour un Xavier Darcosen difficulté dans son fief

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D É C A L É

16La Pression de mars Vendredi 14 mars 2008

«Comme je ne me représente pas, il ya pléthore de candidats. » PourMarie-Jeanne Dufernez,

maire sortante de la petite commune de Châ-teau-l’Abbaye, près de Saint-Amand-les-Eaux,tout est normal. Pour un observateur extérieur,le mot “pléthore” est encore trop faible. Quatrelistes en course pour la mairie d’un village de 700habitants, ce n’est pas banal. Et cela n’est pas dûau seul fait que la maire sortante, en place depuis1977, ne brigue pas un nouveau mandat. Eneffet, la première édile, apparentée extrêmegauche, a l’honneur de voir son fils, 41 ans, surune autre liste, plutôt de droite. « La maire et sonfils se sont d’ailleurs vigoureusement expliqué sur laplace publique », selon Quentin Sénéchal, un desautres prétendants à la gestion de la commune.Pour Marie-Jeanne Dufernez, il n’y a pas périlen la demeure. « Disons que l’on n’a pas les mêmesidées politiques, mais je n’ai aucun problème avec monfils », explique-t-elle. La mère, vêtue d’un pullrouge, va même plus loin. « Certaines personnes,sous couvert d’anonymat, nous attaquent sur cela.C’est inacceptable. La Voix du Nord devrait suppri-mer tous les commentaires anonymes. C’est un site decorbeaux. » Comme Marie-Jeanne Dufernez le

laisse entendre dans sa plaidoirie, Château-l’Ab-baye est bien alimenté en connexion Internet.La campagne électorale a pris une tournure mal-saine dans ce petit bourg. La faute aux com-mentaires que l’on peut laisser sur le site de laVoix du Nord à propos du bilan des maires. Plusde 200 pour le village !Kévin, 18 ans, tout juste en âge de voter en amarre de ces histoires qui pourrissent l’am-biance. « Tout le monde s’entend bien d’habitude dansla commune, mais depuis quelques temps, les gens nese disent plus bonjour. Il est temps que ça se finisse. »L’écœurement n’est pas lemonopole des habitants.Quentin Sénéchal dirige laliste Avenir castellabien, uneliste faite par les jeunes, pourles jeunes. « Notre programmeest complètement axé sur lesjeunes, raconte le jeunehomme de 23 ans, compta-ble dans la vie. Ça fait quinzeans que j’habite ici, rien n’avraiment évolué pour nous. Etcomme on n’est pas représenté dans le conseil, on a dé-cidé d’agir. » À ses côtés, Pascal Gollunski, unvieux de la vieille. Malgré ses 43 ans, Pascal nechoque pas dans cette liste. Il adhère au projet. Ilfaut dire qu’il est pour le changement : « Il y a septans, je me suis présenté tout seul, avec un slogan sim-ple : “Seul contre tous”. J’ai fait 15 %, explique-t-il.Notre but absolu, c’est qu’il y ait au moins deux ou

trois jeunes dans le conseil, pour qu’ils puissent se faireentendre, car rien ne bouge ici. »Au café, sur la place de l’église et de la mairie,on est aussi consterné. « Il y a une mauvaise en-tente dans le village, et ça date de la campagne électo-rale menée en 1977 par Marie-Jeanne Dufernez. Pen-dant trois jours et trois nuits, elle a cherché pour voirsi mon père avait détourné de l’argent à Château-l’Ab-baye », commente, consternée, Nicole, la pa-tronne de ce bar qui n’a pas de nom.Alain, l’un des plus fidèles clients du bistrot,poursuit : « Je suis arrivé il y a 35 ans, par amour du

village, et aujourd’hui j’ai envieque ça change car on n’a pasbeaucoup amélioré les choses de-puis tout ce temps », clame ceBelge d’origine. Marie-Hé-lène, née ici et qui a passéplus de 25 ans dans le villagea « beaucoup souffert de ces gué-guerres internes à la com-mune. » Aujourd’hui exté-rieure au bourg, elle s’amusepresque de raconter que « sa-

medi dernier, vers 23 h, un corbeau a glissé une lettreanonyme dans les boîtes aux lettres de la commune »,attaquant la liste de droite, dans laquelle le filsde la maire est inscrit. Autrement dit, vivementque ces élections se terminent à Château-l’Ab-baye. Et encore, tout le monde n’est pasconvaincu que les choses reviennent à la nor-male lundi matin.

DEPUISQUELQUES

TEMPS, LES GENSNE SE DISENT

PLUS BONJOUR”

Le fils de la maire actuelle pourraitbien se retrouver à la tête de la mairiedimanche soir : un sujet qui fait jaser

dans cette petite commune.

Un villageen pagaille

CHÂTEAU-L’ABBAYE. Dans ce villagede 700 habitants, quinze sièges sontà pourvoir au conseil municipal et.. .quatre listes sont en lice. Depuis plusieurssemaines, l’ambiance dans la communes’est considérablement alourdie,et le premier tour n’y a rien changépuisque personne n’a été élu.

Par Benoist Pasteau