La pratique infirmière en soins palliatifs auprès de ... · de Jean Watson (1979). Méthode :...
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La pratique infirmière en soins palliatifs auprès de
patients atteints de cancer au sein d’une équipe
interdisciplinaire : une étude de cas au Liban
Thèse
Mona Saouma
Doctorat en sciences infirmières
Philosophiae doctor (Ph.D.)
Québec, Canada
© Mona Saouma, 2017
ii
La pratique infirmière en soins palliatifs auprès de
patients atteints de cancer au sein d’une équipe
interdisciplinaire : une étude de cas au Liban
Thèse
Mona Saouma
Sous la direction de :
Jean-François Desbiens, directeur de recherche
Johanne Gagnon, codirectrice de recherche
iii
Résumé
Problématique : Les soins palliatifs sont des soins délivrés par une équipe
interdisciplinaire, dans une approche holistique, afin d'améliorer la qualité de vie des
personnes atteintes d'une maladie grave et potentiellement mortelle. Selon le World Health
Organization et la Worldwide Palliative Care Alliance (2014), des inégalités dans les
formations et le manque d’organisation des soins palliatifs dans plusieurs pays n’ont pas
favorisé le développement de la pratique infirmière dans ce domaine. Ainsi, cette situation
a entraîné des disparités dans la prestation et les services de soins palliatifs entre différents
pays. Au Liban, les infirmières sont peu préparées à délivrer des soins palliatifs et la pratique
dans ce domaine est peu documentée. But : Cette étude visait à comprendre l’exercice de la
pratique infirmière en soins palliatifs dans une région du Liban, auprès de patients atteints
de cancer en fin de vie et au sein d’une équipe interdisciplinaire. Cadre de référence : Le
cadre de référence de l’étude intègre trois éléments, soit le plan directeur de développement
des compétences des intervenants en soins palliatifs (MSSS, 2008), les facteurs contraignant
ou facilitant la pratique infirmière en soins palliatifs, ainsi que la théorie du Human Caring
de Jean Watson (1979). Méthode : Dans le cadre de cette recherche, le devis descriptif
qualitatif choisi est une étude de cas simple à niveaux d’analyse imbriqués. Cette étude est
réalisée dans une unité d’oncologie d’un centre hospitalier, dans une région urbaine du
Liban. L’analyse des données a été effectuée par une double triangulation de méthodes et
de sources, soit l’entrevue individuelle auprès de l’infirmière spécialisée en soins palliatifs
(n= 1), auprès de l’infirmière-chef en oncologie (n= 1), auprès des infirmières de l’unité
d’oncologie (n= 9), auprès des experts en soins palliatifs (n=3), auprès de certains membres
de famille de personnes soignées (n=3) et l’entrevue de groupe auprès des professionnels
de la santé de l’équipe de soutien mobile (n=3), l’étude des documents pertinents,
l’observation directe non participante de la pratique infirmière en soins palliatifs et le journal
de bord de l’étudiante-chercheuse. Résultats : Cinq thèmes centraux ont émergé de la
pratique infirmière auprès de patients cancéreux au sein d’une équipe interdisciplinaire au
Liban : 1) la perception des soins palliatifs : un moyen d’offrir une meilleure qualité de vie;
2) la pratique infirmière : une prise en charge globale des besoins du patient; 3) la pratique
en collaboration interdisciplinaire : un élément clé pour les soins palliatifs; 4) la spiritualité :
une toile de fond pour la pratique infirmière en soins palliatifs et 5) l’accompagnement de
iv
la famille : le rôle indispensable de l’infirmière. De plus, les résultats ont mis en relief divers
facteurs, à la fois contraignant ou facilitant la démarche. Ces facteurs sont d’ordres
professionnel, organisationnel et émotionnel. Ils sont associés à l’exigence de la pratique en
soins palliatifs. Les infirmières ont démontré également une relation humaniste empreinte
de caring au cœur des soins palliatifs et qui transcende l’ensemble des cinq thèmes centraux.
Discussion : Cette étude a permis de mettre en lumière l’exercice de la pratique infirmière
en soins palliatifs, au sein d’une équipe interdisciplinaire. Les résultats de cette étude
pourront fournir des assises empiriques afin de guider le développement de la pratique
infirmière en soins palliatifs au Liban et assurer une meilleure prise en charge en fin de vie.
Mots clés : Pratique infirmière, Soins palliatifs, Interdisciplinarité, Caring, Facteurs
facilitants, Facteurs contraignants, Recherche qualitative, Étude de cas.
v
Abstract
Background : Palliative care is a holistic approach, delivered by an interdisciplinary team,
in order to improve the quality of life of people facing a serious and life-threatening illness.
According to the World Health Organization and the Worldwide Palliative Care Alliance
(2014), inequalities in training and lack of organization of palliative care in several
countries have limited the development of nursing practice in this domain. Thus, this
situation has led to disparities in the delivery of palliative care services between countries.
In Lebanon, nurses are little prepared to deliver palliative care, and nursing practice in this
domain is not well documented. Aim : This study aimed to understand nursing practice
within an interdisciplinary team providing palliative care to end-of-life cancer patients in
a Lebanese region. Framework : The study framework integrates three components that
are the Plan directeur de développement des compétences des intervenants en soins
palliatifs (Skill development plan for palliative care providers) (MSSS, 2008), the
hindering and facilitating factors related to palliative care requirement, and Jean Watson’s
Theory of Human Caring (1979). Methods : The descriptive qualitative research design
chosen was a single case study with embedded levels of analysis. This study was conducted
in an oncology unit of a hospital in an urban Lebanese region. Data was analyzed through
a double triangulation of methods and sources, consisting of individual interview with the
specialized palliative care nurse (n = 1) , with the head oncology nurse (n = 1), with
oncology unit nurses (n= 9), with palliative care experts (n = 3), with family members of
treated patients (n = 3) and group interview with healthcare professionals of the mobile
support team (n = 3), analysis of relevant documents, direct non-participant observation of
palliative nursing care, and the student’s research diary. Results : Five central themes
emerged from nursing practice with cancer patients in an interdisciplinary team in
Lebanon: 1) palliative care: a way to provide better quality of life; 2) nursing practice:
holistic care for patient’s needs; 3) interdisciplinary: collaborative practice a main element
for palliative care; 4) spirituality: a backdrop for nursing practice in palliative care and 5)
family support: indispensable role of the nurse. Moreover, results have highlighted various
hindering and facilitating factors of professional, organizational and emotional nature
related to palliative care requirement. Nurses also demonstrated a humanistic relation
marked with caring at the core of palliative care, which transcends all five central themes.
vi
Discussion : This study allowed shedding light on nursing practice in palliative care within
an interdisciplinary team. Results could provide empirical foundations for informing the
development of nursing practice in palliative care in Lebanon and ensure better end-of-life
care for patients.
Key words: Nursing practice, Palliative care, Interdisciplinarity, Caring, Facilitators,
Barriers, Qualitative research, Case study.
vii
Table des matières
RESUME ...................................................................................................................................... III
ABSTRACT ................................................................................................................................... V
TABLE DES MATIERES ........................................................................................................ VII
LISTE DES TABLEAUX ......................................................................................................... XII
LISTE DES FIGURES ............................................................................................................. XIII
REMERCIEMENTS .................................................................................................................. XV
INTRODUCTION ......................................................................................................................... 1
CHAPITRE 1 – PROBLEMATIQUE ......................................................................................... 3
1.1 La pratique en soins palliatifs : approche interdisciplinaire, holistique et humaniste ........ 4
1.2 La pratique infirmière au sein d’une équipe interdisciplinaire en soins palliatifs .............. 6
1.2.1 La pratique infirmière en soins palliatifs : facteurs contraignants professionnels,
organisationnels et émotionnels. .............................................................................................. 7
1.3 L'approche de caring : solution intéressante pour une pratique professionnelle optimale . 9
1.4 Le contexte libanais et les soins palliatifs ........................................................................ 11
1.5 Le but et la question générale de recherche ..................................................................... 17
CHAPITRE 2 – RECENSION DES ECRITS ........................................................................... 18
2.1 La stratégie de repérage des écrits .................................................................................... 18
2.2 La pratique en soins palliatifs........................................................................................... 19
2.2.1 L’approche holistique des soins palliatifs ....................................................................... 19
2.2.1.1 La réponse aux besoins physiques .......................................................................... 19
2.2.1.2 La réponse aux besoins psychologiques ................................................................. 24
2.2.1.3 La réponse aux besoins spirituels ........................................................................... 26
2.2.2 L’interdisciplinarité en soins palliatifs ............................................................................ 28
2.2.3 La pratique infirmière au sein d'une équipe interdisciplinaire ........................................ 32
2.3 L’approche du caring en soins palliatifs .......................................................................... 34
2.4 Les facteurs contraignant ou facilitant la pratique infirmière en soins palliatifs ............. 39
2.4.1 Les facteurs contraignants et les facilitateurs professionnels ......................................... 39
2.4.1.1 Les décisions divergentes ....................................................................................... 40
2.4.1.2 La résistance médicale ............................................................................................ 41
2.4.1.3 Le manque de temps ............................................................................................... 41
2.4.1.4 Le manque de formation ......................................................................................... 42
2.4.1.5 Les difficultés de communication........................................................................... 46
2.4.1.6 Le manque de collaboration interdisciplinaire ....................................................... 48
2.4.2 Les facteurs contraignants et les facilitateurs organisationnels ...................................... 50
viii
2.4.2.1 La structure organisationnelle ................................................................................ 50
2.4.2.2 L’accessibilité aux ressources humaines et matérielles .......................................... 51
2.4.3 Les facteurs contraignants et les facilitateurs émotionnels ............................................. 53
CHAPITRE 3 - CADRE DE REFERENCE ............................................................................. 57
3.1 Le plan directeur de développement des compétences des intervenants
en soins palliatifs .................................................................................................................... 57
3.2 Les facteurs contraignant ou facilitant la pratique infirmière en soins palliatifs ............. 61
3.3 La Théorie du Human Caring de Jean Watson ................................................................ 62
3.3.1 La relation transpersonnelle ............................................................................................ 63
3.3.2 Le moment du caring ...................................................................................................... 64
3.3.3 Les processus de caritas cliniques ................................................................................... 64
3.4 Le cadre de référence intégrateur ..................................................................................... 66
3.5 Les questions spécifiques de recherche ............................................................................ 72
CHAPITRE 4 - METHODE ....................................................................................................... 73
4.1 L’approche privilégiée ..................................................................................................... 73
4.2 Le devis de recherche : choix et justification ................................................................... 74
4.3 L’étude de cas .................................................................................................................. 74
4.3.1 Le cas étudié ................................................................................................................... 75
4.3.2 Le milieu à l’étude .......................................................................................................... 76
4.3.3 Les niveaux d’analyse imbriqués .................................................................................... 77
4.4 Le déroulement de l'étude ................................................................................................ 78
4.4.1 Les stratégies de recrutement : l’échantillonnage et les critères de sélection ................. 78
4.4.2 Les méthodes de collecte des données ............................................................................ 80
4.4.2.1 L’entrevue individuelle .......................................................................................... 80
4.4.2.2 L’entrevue de groupe .............................................................................................. 82
4.4.2.3 L’observation directe non participante ................................................................... 82
4.4.2.4 L’étude des documents ........................................................................................... 84
4.4.2.5 Le journal de bord .................................................................................................. 85
4.5 Le plan d’analyse des données ......................................................................................... 85
4.5.1 La condensation des données .......................................................................................... 85
4.5.1.1 La codification des données ................................................................................... 86
4.5.1.2 L’élaboration de catégories .................................................................................... 86
4.5.1.3 La codification thématique ..................................................................................... 86
4.5.2 La présentation des données ........................................................................................... 87
4.5.3 L’élaboration et la vérification des conclusions.............................................................. 87
ix
4.6 Les critères de rigueur scientifique .................................................................................. 88
4.7 Les considérations éthiques .............................................................................................. 90
CHAPITRE 5 – RESULTATS ................................................................................................... 91
5.1 La description du milieu à l’étude .................................................................................... 91
5.2 Les profils des participants ............................................................................................... 93
5.2.1 Le profil des infirmières .................................................................................................. 93
5.2.2 Le profil des professionnels de la santé .......................................................................... 94
5.2.3 Le profil des experts ........................................................................................................ 95
5.2.4 Le profil des membres de famille ................................................................................... 95
5.3 D’autres sources de données ............................................................................................ 96
5.3.1 La période d’observation ................................................................................................ 96
5.3.2 La documentation............................................................................................................ 96
5.3.3 Le journal de bord ........................................................................................................... 97
5.4 La pratique infirmière auprès des patients cancéreux au sein d’une équipe
interdisciplinaire .................................................................................................................... 97
5.4.1 La perception des soins palliatifs : un moyen d’offrir une meilleure qualité de vie ..... 100
5.4.2 La pratique infirmière : une prise en charge globale des besoins du patient ................ 102
5.4.2.1 Les besoins physiques .......................................................................................... 103
5.4.2.2 Les besoins psychologiques.................................................................................. 106
5.4.2.3 Les besoins sociaux .............................................................................................. 108
5.4.3 La pratique en collaboration interdisciplinaire : un élément clé pour les soins
palliatifs ................................................................................................................................ 110
5.4.4 La spiritualité : une toile de fond pour la pratique infirmière en soins palliatifs .......... 115
5.4.5 L’accompagnement de la famille : le rôle indispensable de l’infirmière ...................... 119
5.5 L’approche humaniste de caring en soins palliatifs ....................................................... 123
5.6 Les facteurs contraignant ou facilitant la pratique infirmière en soins palliatifs ........... 127
5.6.1 Les facteurs contraignant la pratique infirmière en soins palliatifs .............................. 127
5.6.1.1 Les facteurs contraignants professionnels ............................................................ 128
5.6.1.1.1 La résistance des médecins ......................................................................................... 128
5.6.1.1.2 Le manque de consensus ............................................................................................. 129
5.6.1.1.3 Le manque de formation en soins palliatifs ................................................................ 131
5.6.1.2 Les facteurs contraignants organisationnels ......................................................... 131
5.6.1.2.1 Le manque d’infrastructures organisationnelles ......................................................... 131
5.6.1.2.2 Le manque de temps et la surcharge de travail ........................................................... 132
5.6.1.3 Les facteurs contraignants émotionnels ................................................................ 134
5.6.2 Les facteurs facilitant la pratique infirmière en soins palliatifs .................................... 136
x
5.6.2.1 Les facteurs facilitants professionnels .................................................................. 136
5.6.2.1.1 La reconnaissance nationale ....................................................................................... 137
5.6.2.1.2 L’harmonisation de la collaboration interdisciplinaire ............................................... 138
5.6.2.1.3 La formation en soins palliatifs .................................................................................. 139
5.6.2.2 Les facteurs facilitants organisationnels ............................................................... 140
5.6.2.2.1 L’environnement propice ............................................................................................ 140
5.6.2.2.2 Le réaménagement de la structure organisationnelle .................................................. 141
5.6.2.3 Les facteurs facilitants émotionnels ..................................................................... 141
5.6.2.3.1 L’accompagnement psychologique des infirmières .................................................... 142
CHAPITRE 6 – DISCUSSION................................................................................................. 145
6.1 Les considérations d’ordre empirique ............................................................................ 145
6.1.1 La pratique infirmière en soins palliatifs ...................................................................... 145
6.1.1.1 La perception des soins palliatifs : un moyen d’offrir une meilleure qualité de
vie ..................................................................................................................................... 146
6.1.1.2 La pratique infirmière : une prise en charge globale des besoins du patient ........ 147
6.1.1.2.1 Les besoins physiques ................................................................................................. 148
6.1.1.2.2 Les besoins psychologiques ........................................................................................ 150
6.1.1.2.3 Les besoins sociaux .................................................................................................... 152
6.1.1.3 La pratique en collaboration interdisciplinaire : un élément clé pour les soins
palliatifs. ........................................................................................................................... 153
6.1.1.4 La spiritualité : une toile de fond pour la pratique infirmière en soins palliatifs .. 156
6.1.1.5 L’accompagnement de la famille : le rôle indispensable de l’infirmière ............. 157
6.2 Les considérations d’ordre théorique ............................................................................. 160
6.2.1 L’utilisation du Plan directeur ...................................................................................... 160
6.2.2 L’utilisation du cadre du Human Caring de Jean Watson ............................................ 164
6.2.3 L’utilisation des facteurs contraignant ou facilitant la pratique infirmière en soins
palliatifs ................................................................................................................................ 169
6.2.3.1 Les facteurs contraignants et les facilitateurs professionnels ............................... 169
6.2.3.2 Les facteurs contraignants et les facilitateurs organisationnels ............................ 173
6.2.3.3 Les barrières et les facilitateurs émotionnels ........................................................ 175
6.3 Les considérations d’ordre méthodologique .................................................................. 176
6.4 Les limites ...................................................................................................................... 178
6.5 Les retombées de l’étude ................................................................................................ 179
6.6 Les recommandations ..................................................................................................... 181
6.6.1 Pour la gestion............................................................................................................... 181
6.6.2 Pour la pratique ............................................................................................................. 182
xi
6.6.3 Pour la formation .......................................................................................................... 183
6.6.4 Pour la recherche........................................................................................................... 184
CONCLUSION .......................................................................................................................... 185
REFERENCES .......................................................................................................................... 188
ANNEXE 1 – CARTE CONCEPTUELLE DE L’ETUDE DE CAS ................................... 201
ANNEXE 2 – FEUILLETS D’INFORMATION ET FORMULAIRES DE
CONSENTEMENT ................................................................................................................... 202
ANNEXE 3– GUIDES D’ENTREVUE ................................................................................... 222
ANNEXE 4 – GRILLE D’OBSERVATION ........................................................................... 230
ANNEXE 5 – GRILLE D’ANALYSE DOCUMENTAIRE ................................................... 231
ANNEXE 6 – EXEMPLE DE TABLEAU DE SYNTHESE DES ENTREVUES ................ 233
ANNEXE 7 –THEMES CENTRAUX DE LA PRATIQUE INFIRMIERE EN SOINS
PALLIATIFS ............................................................................................................................. 234
xii
Liste des tableaux
Tableau 1. Synthèse des domaines et compétences (MSSS, 2008) ............................................... 58
Tableau 2. Facteurs contraignant ou facilitant la pratique infirmière en soins palliatifs ............... 61
Tableau 3. Processus de caritas cliniques de Jean Watson (1998) ................................................ 65
Tableau 4. Caractéristiques sociodémographiques des infirmières ............................................... 94
xiii
Liste des figures
Figure 1 Cadre de référence intégrateur ....................................................................................... 68
Figure 2. Étude de cas simple imbriquée ....................................................................................... 76
Figure 3. Processus d’analyse des données ................................................................................... 99
Figure 4. Perception des soins palliatifs : un moyen d’offrir une meilleure qualité de vie ......... 102
Figure 5. Pratique infirmière : une prise en charge globale des besoins du patient..................... 109
Figure 6. Pratique en collaboration interdisciplinaire : un élément clé pour les soins palliatifs . 115
Figure 7. Spiritualité : une toile de fond pour la pratique infirmière en soins palliatifs .............. 119
Figure 8. Accompagnement de la famille : le rôle indispensable de l’infirmière ........................ 122
Figure 9. Approche humaniste de caring en soins palliatifs ....................................................... 127
Figure 10. Facteurs contraignant la pratique infirmière en soins palliatifs ................................ 136
Figure 11. Facteurs facilitant la pratique infirmière en soins palliatifs ....................................... 143
xv
Remerciements
La réalisation d'une thèse de doctorat est une expérience qui s'appuie sur une générosité et
un appui persévérant de plusieurs personnes que je tiens à remercier à leur juste valeur.
Dans le cheminement ayant conduit à la réalisation de cette thèse, mes remerciements vont
à Monsieur Jean-François Desbiens mon directeur de thèse. Sa passion pour les soins
palliatifs, son soutien constant, ses conseils avisés et ses suggestions pertinentes ont été
pour moi une source de motivation tout au long de mon parcours. Je désire également
exprimer ma plus profonde gratitude à Madame Johanne Gagnon, ma codirectrice de thèse,
pour ses commentaires judicieux, son support inestimable, sa rigueur, sa disponibilité et sa
promptitude. Femme exceptionnelle et inspirante, Madame Gagnon a su me transmettre sa
passion pour la recherche, et m’a permis de cheminer et de m’accomplir. Mon appréciation
se tourne aussi vers les membres de mon comité de thèse, Mesdames Diane Tapp et Judith
Lapierre pour le précieux temps consacré à la lecture et l’évaluation du présent projet.
Je ne peux passer sous silence la contribution essentielle des infirmières 1 et des
professionnels de la santé qui ont accepté avec beaucoup d'ouverture, au travers de leurs
engagements multiples, de collaborer si généreusement à ce projet de recherche. Je tiens à
remercier grandement les experts du Comité National des soins palliatifs au Liban pour
leur collaboration et leurs précieux conseils qui ont contribué à alimenter ma réflexion dans
le domaine des soins palliatifs. Une grande reconnaissance va aux membres des familles
rencontrés qui, nonobstant leur propre chagrin, ont accepté de partager leur expérience. Je
désire aussi offrir mes sincères remerciements à la direction des soins infirmiers du centre
hospitalier libanais concerné par l’étude, pour avoir accueilli ce projet de recherche dans
son milieu. Sans eux, ce projet n’aurait pu être possible.
Je remercie très particulièrement l’Université Antonine (UA), université au sein de laquelle
je dirige le Département des sciences infirmières, pour son soutien sans faille lors de mes
études doctorales. J’adresse des remerciements de même ordre à l’équipe pédagogique du
1 Le féminin est utilisé à la seule fin d’alléger le texte.
xvi
Département des sciences infirmières pour leur patience et leurs encouragements, dans
toutes les circonstances.
Incontestablement, sans le soutien et l’amour de ma famille, jamais cette étude doctorale
n’aurait été menée à terme. J'apprécie la présence, la patience, la compréhension et le
soutien indéfectible de mon mari Antoine tout au long de ce périple. À mes deux bijoux,
Vincent et Steven, qui ont partagé avec moi cette aventure, merci pour votre amour
inconditionnel, vous êtes ma plus grande richesse.
Enfin, cette liste n’ayant pas de prétention à l’exhaustivité, je tiens à saluer toutes les
personnes qui ont contribué, de près ou de loin, à la réalisation de ce projet de thèse.
1
Introduction
Les soins palliatifs sont généralement décrits comme des soins délivrés à des personnes
atteintes de maladie grave et potentiellement mortelle, par une équipe interdisciplinaire
selon une approche holistique. Visant à préserver une meilleure qualité de vie, la pratique
en soins palliatifs en fin de vie nécessite une prise en compte de la souffrance non
seulement physique, mais également psychologique, sociale et spirituelle. De même, cette
approche exige de sauvegarder la dignité du patient et de soutenir son entourage. Un choix
difficile à réaliser sans une relation transpersonnelle de caring empreinte de confiance,
d’empathie et de chaleur humaine.
Au Liban, les soins palliatifs sont encore en voie de développement et prennent leur essor
pour accompagner les patients en fin de vie. Malgré quelques progrès au cours des
dernières années, peu de patients cancéreux ont eu l’opportunité de bénéficier de ce type
de soins au Liban. Cette situation résulte d’une insuffisance de prestataires de soins formés
en soins palliatifs, du manque de services spécialisés et surtout du manque de
sensibilisation et d’information du public envers les soins palliatifs.
Cette thèse de doctorat émane de la nécessité de développer les soins palliatifs dans le
contexte libanais et de la priorité de rehausser la pratique dans ce domaine. Elle s’inscrit
plus particulièrement en sciences infirmières, et vise à comprendre l’exercice de la pratique
infirmière en soins palliatifs au sein d’une équipe interdisciplinaire au Liban. En effet, bien
que la pratique infirmière au sein de l’équipe interdisciplinaire soit bien décrite dans la littérature,
il n’en demeure pas moins que qu’on ne sait pas comment elle s’exerce dans les pays où les soins
palliatifs sont encore en émergence.
Le premier chapitre de cette thèse circonscrit la problématique à la base de l'étude en
documentant d’abord la pratique infirmière au sein d’une équipe interdisciplinaire en soins
palliatifs selon une approche holistique, ainsi que les facteurs qui contraignent ou facilitent
la pratique infirmière en soins palliatifs. Le choix du caring2 se présente ainsi comme un
2 Le terme anglophone caring sera utilisé dans cette étude.
2
soutien pour le développement d’une approche humaniste au sein des soins palliatifs au
Liban. Ensuite, la problématique expose le contexte libanais des soins palliatifs, puis
finalement, la formulation du but et de la question générale de recherche clôturent le
premier chapitre. Le deuxième chapitre propose une recension des écrits. Il expose le
contexte des soins palliatifs au Liban et l’état des connaissances sur la pratique infirmière
en soins palliatifs, l’approche de caring et les facteurs influençant cette pratique. Le
troisième chapitre fait mention du cadre de référence de l’étude. Ce cadre intègre, d’une
part, le plan directeur de développement des compétences des intervenants en soins
palliatifs (MSSS, 2008) ainsi que les facteurs contraignant ou facilitant la pratique
infirmière des soins palliatifs et, d’autre part, la théorie du Human Caring de Jean Watson
(1979).
Par la suite, le quatrième chapitre explicite la perspective méthodologique de l’étude
notamment, l'approche et le devis de recherche privilégiés, les méthodes de collecte et
d'analyse des données, les critères de rigueur scientifique et les considérations éthiques.
Les résultats de l’étude sont détaillés au cinquième chapitre. Outre la description du milieu
de l’étude, du profil des participants et des sources de données, la pratique infirmière auprès
des patients cancéreux au sein d’une équipe interdisciplinaire est présentée à travers les
thèmes qui ont émergé. Dans ce même chapitre, la relation humaniste empreinte de caring
apparaît également comme un élément au cœur des soins palliatifs. Le sixième chapitre
discute des résultats obtenus en lien avec la recension des écrits selon plusieurs points de
vue : empirique, théorique et méthodologique. A la lumière des limites et des retombées
de l’étude, certaines recommandations pour la recherche, la pratique, la formation et la
gestion viennent clore ce chapitre.
3
Chapitre 1 – Problématique
Ce premier chapitre présente la problématique à la base de cette recherche. Cette dernière
émane de la priorité d’étudier la pratique infirmière en soins palliatifs au Liban, afin de
guider l’adoption d’un modèle de prestation de soins palliatifs sensible à la culture, et qui
répond aux besoins de la population libanaise (Abu-Saad Huijjer, Deeb, Ghusn, Karam, &
Zeineldin, 2013). Le problème de la pratique infirmière en soins palliatifs au sein d’une
équipe interdisciplinaire est d’abord présenté, suivi de l’approche de caring proposée
comme soutien à une relation humaniste au sein des soins palliatifs. Ensuite, les soins
palliatifs dans un contexte libanais sont discutés. Finalement, le but et la question générale
de recherche viennent clore ce chapitre.
Les soins palliatifs sont des soins actifs délivrés à une clientèle atteinte d’une maladie grave
évolutive, dans une approche holistique et par une équipe interdisciplinaire (Société
Française d'Accompagnement et de Soins palliatifs [SFAP], 2009). Selon l’Association
Canadienne des Soins Palliatifs (ACSP, 2012), le choix de cette approche présente des
avantages pour les patients, les familles et le système de soins de santé. En effet, les soins
palliatifs offrent aux patients et à leur famille la possibilité de participer aux soins. Ces
soins apportent, également, un soutien pour la prise de décision, une éventuelle diminution
du nombre d’hospitalisations et une réduction des coûts pour le système de soins de santé
(ACSP, 2012; Meyers et al., 2011; Smith et al., 2012). Les soins palliatifs ne visent pas à
traiter et guérir la maladie, mais cherchent à améliorer la qualité de vie (Mahon &
McAuley, 2010). D’ailleurs, divers essais expérimentaux ayant évalué l’efficacité
d’intégrer les soins palliatifs tôt dans le parcours de la maladie, ont révélé plusieurs
bénéfices associés à cette intégration, dont notamment, une amélioration des symptômes
physiques, de l’état psychologique, de la satisfaction des patients et de la qualité de vie
(Bakitas, Bishop, Caron & Stephens, 2010; Bandieri et al., 2012; Brumley et al., 2007;
Gade et al., 2008; Rabow, Dibble, Pantilat, & McPhee, 2004).
Il est vrai que dans les pays développés, le progrès des soins palliatifs est remarquable,
mais il reste encore des besoins non comblés à ce niveau dans plusieurs pays moins
développés, et la disponibilité des services de soins palliatifs varie grandement d’un milieu
4
à l’autre (Faull, Caestecker, Nicholson, & Black, 2012). Selon l’Atlas Mondial des soins
palliatifs en fin de vie, publié conjointement par le World Health Organization [WHO] et
la Worldwide Palliative Care Alliance [WPCA] (2014), parmi les 20 millions de patients
requérant des soins palliatifs tous les ans, seulement une personne sur dix en reçoit à l’heure
actuelle dans le monde (WHO &WPCA, 2014).
Dans les paragraphes qui suivent, la pratique en soins palliatifs sera abordée sous l’angle
de l’interdisciplinarité, de l’holisme et de l’humanisme. Ensuite, les obstacles face à la
pratique infirmière en soins palliatifs, ainsi que l’approche de caring comme soutien pour
le développement d’une approche humaniste en soins palliatifs seront illustrés. Enfin, le
contexte des soins palliatifs au Liban sera examiné.
1.1 La pratique en soins palliatifs : approche interdisciplinaire, holistique
et humaniste
Depuis les débuts du mouvement des soins palliatifs dans les années 1970, ces soins sont
dispensés selon une approche à la fois interdisciplinaire, holistique et humaniste. Ils visent
la prévention de la souffrance et le traitement des problèmes physiques, psychologiques,
sociaux et spirituels (ACSP, 2012; Carstairs, 2010; SFAP, 2009; WHO, 2002). Le travail
en interdisciplinarité constitue une caractéristique essentielle des soins palliatifs pour la
prise en charge des patients et la réponse à leurs besoins (Jacquemin, 2009). Les experts
dans le domaine des soins palliatifs soutiennent l’importance de la prestation de soins de
qualité aux patients atteints d’une maladie grave évolutive, et ce, par une équipe
interdisciplinaire ayant acquis les compétences requises (ACSP, 2012; Silberman et al.,
2013; WPCA, 2008). En phase terminale, les soins palliatifs sont prodigués aux patients
par une équipe interdisciplinaire qui peut regrouper différentes catégories d'intervenants :
médecins, psychologues, infirmières, aides-soignantes, kinésithérapeutes, pharmaciens,
assistantes sociales, bénévoles et représentants du culte. La présence de cette équipe est
nécessaire dans la pratique en soins palliatifs, afin d’assurer des soins thérapeutiques
holistiques, qui répondent à l’ensemble des besoins diversifiés de la personne en fin de vie.
Ces besoins sont aussi bien physiques que psychologiques, sociaux et spirituels.
5
Les professionnels de la santé, qui avaient tendance à se centrer sur les problèmes
physiques et leurs traitements, s’éloignent de plus en plus d’un modèle de soins axé sur les
tâches pour se tourner vers une approche holistique centrée sur la personne et qui tient
compte de son expérience personnelle et de l'ensemble de ses besoins (Timothy, 2003).
D’ailleurs, le WHO (2002) met en avant une approche holistique qui prend en compte les
besoins de la personne dans toutes ses dimensions, tant physique, psychologique, sociale
que spirituelle, auxquelles s’ajoutent les dimensions morale et relationnelle selon
Gastmans, De Casterele, et Schotsmans (1998). D’une part, la dimension physique réfère
à ce qui a trait au confort et au soulagement de la douleur et des autres symptômes
physiques. Et d’autre part, la valorisation du caractère unique de la personne et de son bien-
être émotionnel dans chacune des situations de fin de vie correspond à la principale
caractéristique de la dimension psychologique. Quant à la dimension sociale, celle-ci reste
relative au fonctionnement dans les activités de tous les jours. Alors que la dimension
spirituelle propose le respect des croyances et des religions ainsi que l’offre du service
pastoral, la dimension morale est reliée au respect de la dignité humaine, des valeurs et de
l’intimité, tandis que la dimension relationnelle gravite autour de l’humanisation des soins,
l’accompagnement de la famille et son implication dans les soins palliatifs. Ainsi, une
approche holistique de la personne prend en compte l’ensemble de ces dimensions
(Gastmans et al., 1998; WHO &WPCA, 2014).
Accompagner une personne, c’est lui apporter le soutien et les soins nécessaires pour la
soulager et l’aider à supporter ses souffrances physiques et morales (SFAP, 2009). Pour
Zerwekh (2010), l’infirmière accompagne les patients en soins palliatifs par sa présence
humaine et authentique. À ce sujet, Richard (2008) mentionne que l’accompagnement
humaniste suppose l’écoute de la souffrance du malade et de ses proches ainsi qu’une
présence empreinte de respect, de délicatesse et de discrétion. De même, Gastmans et al.
(1998) définissent la pratique infirmière par le rapport synergique de trois éléments : la
relation de caring, le comportement de caring et les « bons soins ». Ces propos ont été
repris par Radwin, Farquhar, Knowles et Virchick (2005) qui ont défini la pratique du
caring par des comportements émotionnels tels que la manifestation de la compassion,
l’empathie, la confiance, le respect de l’intimité, le souci pour autrui ainsi que les activités
6
en lien avec la surveillance et le confort. De même, Foucault et Mongeau (2004)
mentionnent que l’approche humaine des soins infirmiers palliatifs intègre une attention
empathique de la part de l’infirmière à l’égard des sentiments de la personne mourante, du
maintien d’un espoir réaliste et d’un soutien apporté au patient et à ses proches dans leur
cheminement personnel.
En définitive, dans les pays où les soins palliatifs sont développés, la pratique de ces soins
s’exerce par une équipe interdisciplinaire qui dispense des soins holistiques et humanistes
auprès d'une clientèle en fin de vie. L’accompagnement d’un patient et de sa famille en
soins palliatifs prend en compte les dimensions physique, psychologique, sociale,
spirituelle, morale et relationnelle. Il exige également, une écoute respectueuse ainsi
qu’une relation humaniste qui peut s’exprimer pour l’infirmière à travers une relation de
caring (Foucault & Mongeau, 2004; Gastmans et al., 1998). Dans ce contexte, le rôle de
l’infirmière occupe une place centrale au sein d’une équipe interdisciplinaire.
1.2 La pratique infirmière au sein d’une équipe interdisciplinaire en soins
palliatifs
Membres de l’équipe interdisciplinaire, les infirmières œuvrant en soins palliatifs
prodiguent par leurs connaissances et leurs compétences des soins complets, coordonnés
et compatissants aux personnes qui vivent avec une maladie mortelle (ACSP, 2012). Selon
certains auteurs (Razban, Iranmanesh, & Rafiei, 2013; Thacker, 2008; Zerwekh, 2010), de
par leur présence constante auprès de la personne soignée, les infirmières jouent un rôle
pivot dans la pratique en soins palliatifs au sein d’une équipe interdisciplinaire. Pour sa
part, Jacquemin (2009) soutient que la spécificité de la pratique infirmière en soins
palliatifs au sein de l’équipe interdisciplinaire réside, non seulement dans le rôle propre de
l’infirmière pour la conception du soin, mais aussi dans le suivi de la prise en charge
holistique du patient qui ne peut relever d’une seule discipline. Ce même auteur ajoute que
l’infirmière réalise la démarche de soins, évalue les résultats, mais aussi, coordonne les
soins palliatifs avec les différents professionnels. Dans ce sens, Zerwekh (2010) ajoute que
l’infirmière est responsable du confort physique et psychologique du patient en soins
palliatifs et du maintien de la communication entre celui-ci et les membres de l’équipe
7
interdisciplinaire. Ainsi, la prestation des soins palliatifs par l’infirmière implique d’une
part, l’accompagnement humaniste, la communication et la prestation des soins directs aux
patients, et d’autre part, la planification et la gestion des soins palliatifs au niveau local.
Bien que la spécificité de la pratique infirmière au sein d’une équipe interdisciplinaire soit
définie et décrite d’un point de vue plus conceptuel, très peu d’études scientifiques ont été
menées pour décrire et déterminer l’implication de l’infirmière dans la prestation des soins
palliatifs en interdisciplinarité, du moins dans les pays où les soins palliatifs sont encore en
émergence. Cependant, il est dit dans la littérature recensée que plusieurs facteurs peuvent
rendre difficile la mise en œuvre de la pratique infirmière en soins palliatifs. Il est donc
intéressant de se pencher sur certains obstacles dont l’impact semble grand.
1.2.1 La pratique infirmière en soins palliatifs : facteurs contraignants professionnels,
organisationnels et émotionnels.
Les facteurs contraignant la prestation de soins palliatifs par des infirmières peuvent être
regroupés, selon les écrits scientifiques, en trois catégories : les facteurs professionnels,
organisationnels et émotionnels (Fillion & Saint Laurent, 2003; Fridh, Forsberg, &
Berghom, 2009 ; Gross, 2006; McCallum & McConigley, 2013; McCourt, Power, &
Glackin, 2013).
Les facteurs professionnels, qui influencent la pratique des infirmières en soins palliatifs,
sont particulièrement associés au manque de formation ainsi qu’aux difficultés de
communication entre les infirmières, les médecins, les patients et leur famille. En effet, les
résultats de l’étude descriptive de Beckstrand et Kirchhoff (2005), qui visait à déterminer
les perceptions des infirmières relatives aux obstacles de prestation des soins en fin de vie
en oncologie, révèlent que le manque de connaissances des infirmières sur la gestion des
symptômes et de la douleur constitue l’un des principaux obstacles qui limitent la prestation
de soins palliatifs holistiques. D’autres obstacles professionnels émergent en lien avec la
communication interprofessionnelle. En effet, le déficit de communication et de
collaboration entre les professionnels de la santé, les médecins, la famille et les patients
entrave la pratique en soins palliatifs lors de situations cliniques complexes (Abu-Saad
8
Huijer, Doumit, Abboud, & Dimassi, 2012; Fillion & Saint-Laurent, 2003; Sheldon, Barret,
& Elligton, 2006). À ces obstacles professionnels s’ajoutent d’autres défis en lien avec
l’organisation et l’environnement de travail (Fillion & Saint-Laurent, 2003).
La prépondérance de facteurs organisationnels, auxquels les infirmières font face lors de
leur pratique en soins palliatifs, peut avoir un impact négatif sur la pratique et la qualité
des soins palliatifs. D’ailleurs, le manque de structure organisationnelle affecte l’intimité
et empêche les personnes de vivre leurs derniers moments dans la dignité. À cela s’ajoute
le surcroît de travail et le manque de ressources pour les soins (Fillion & Saint-Laurent,
2003; Gross, 2006; McCallum & McConigley, 2013).
Quant aux facteurs émotionnels, ils sont en lien avec le travail en soins palliatifs. Dans ce
cadre, les infirmières sont confrontées quotidiennement à l’accompagnement de patients
ayant une maladie évolutive grave, à la souffrance et à l’angoisse de la mort. Compte tenu
de la complexité des situations rencontrées en soins palliatifs, il est attendu que les
infirmières soient prêtes à y faire face. Mais, c’est l’impuissance face à la souffrance et la
répétition des situations émotionnelles intenses en phase terminale qui peuvent devenir une
source d’angoisse et de stress pour les infirmières (Bonnières, Behar, & Lassaunière, 2010;
Fillion & Saint Laurent, 2003; Zerwekh, 2010).
Bref, trois types de facteurs qui contraignent la pratique infirmière dans ce contexte ont été
cernés. Ces facteurs s’interférent avec la pratique des infirmières à plusieurs niveaux. Ils
nuisent à l’environnement de travail auprès des patients mourants, ils créent des conflits de
valeurs chez les infirmières, ils ne favorisent pas une approche interdisciplinaire et par
conséquent, ils risquent d'affecter l’accompagnement humaniste et la qualité des soins
globaux fournis aux patients (Gross, 2006). Ainsi, l’identification de ces obstacles paraît
donc essentielle. Cela permettrait d’une part, de les contrer tant sur le plan émotionnel
qu’organisationnel et professionnel. Puis, d’autre part, il en résulterait une pratique
infirmière interdisciplinaire de qualité. Cette pratique, plus à l’écoute, répondrait davantage
aux besoins des patients atteints de maladie grave et de leur famille.
9
À cet effet, l’accompagnement humaniste, le soutien émotionnel ainsi que la
communication ont été identifiés comme des comportements relatifs à la pratique du
caring, qui peuvent aider à dépasser certains facteurs contraignant la prestation des soins
palliatifs de qualité (Gross, 2006; McCallum & McConigley, 2013; MSSS, 2008; Radwin
et al. 2005). Dans la prochaine section, cette approche sera examinée ainsi que son utilité
pour cette recherche.
1.3 L'approche de caring : solution intéressante pour une pratique
professionnelle optimale
Le concept de caring est défini par différents auteurs comme un élément fondamental de
la pratique infirmière (O’Connell & Landers, 2008; Poirier & Sossong, 2010). Selon Pépin,
Ducharme et Kérouac (2017), il englobe des éléments indissociables de l’acte de soin à
caractère scientifique et humaniste. Le caring est un idéal moral faisant appel à un
engagement personnel, dont l’objectif est le respect de la dignité humaine. Dans ce sens,
Cara et O’Reilly (2008) ajoutent que si le caring est représenté comme l’essence des soins,
les infirmières se doivent de développer et de préserver l’approche humaniste et
relationnelle dans l’exercice de leur profession. D’ailleurs, Ferell et Coyle (2010) postulent
que les soins infirmiers palliatifs combinent une approche scientifique avec une approche
humaniste des soins. De ce fait, les valeurs humanistes des soins et l’approche relationnelle
au cœur du caring concordent avec les valeurs véhiculées en soins palliatifs. De même,
Betcher (2010) ajoute que les patients en fin de vie et leur famille désirent et s’attendent à
une attitude de caring de la part de l’infirmière. Ces propos s’accordent avec ceux de
Radwin et al. (2005) qui définissent la pratique du caring par des comportements
émotionnels qui s’avèrent essentiels en soins palliatifs. Ces comportements se manifestent
par la compassion, l’empathie, la confiance, le respect de l’intimité, le souci d’autrui ainsi
que les activités en lien avec la surveillance et le confort.
Lorsqu’elle est adoptée en fin de vie, l’approche de caring exige une qualité de présence
des soignants. Cette présence cherche à assurer aux patients un sentiment de sérénité et un
pouvoir décisionnel, ainsi qu’à préserver leur dignité. Dans la même veine, Foucault et
Mongeau (2004) ajoutent que « la composante humaine des soins palliatifs intègre une
10
attention empathique de la part de l’infirmière à l’égard des sentiments de la personne
mourante, et un caring découlant d’une alliance thérapeutique transpersonnelle » (p.14).
En outre, Finfgeld-Connett (2008), qui a procédé à une métasynthèse des écrits sur le
caring, avance que ce dernier est un processus interpersonnel caractérisé par une expertise
dans les soins infirmiers ainsi qu’une relation interpersonnelle. D’ailleurs, Liu, Mok, et
Wong (2006) précisent que la pratique du caring exige une attitude et des compétences
professionnelles de la part des infirmières. Ainsi, elles seront prêtes à fournir un soutien
émotionnel aux patients cancéreux et à mieux répondre à leurs besoins. En accord avec Liu
et al. (2006), Irnamench, Axelsson, Sävenstedt et Häggström (2009) ajoutent que la
création d’une relation de caring requiert de la part des infirmières une présence, une
écoute active ainsi qu’un partage de valeurs et croyances avec les patients et leur famille.
En d’autres mots, la pratique du caring représente une approche humaniste et relationnelle.
En soins palliatifs, cette approche implique, de la part de l’infirmière, de préserver la
dignité humaine, de s’assurer du confort de la personne et d’établir une relation de
confiance avec le patient et les membres de sa famille.
Ainsi, selon Leininger (2002), le caring se présente comme un phénomène universel, mais
les expressions, les processus et les patterns du caring varient culturellement. De plus,
selon la théorie du Human Caring de Jean Watson (1979), le caring représente un
processus interactif et intersubjectif à travers une relation transpersonnelle établie pendant
des moments de vulnérabilité entre l’infirmière et le patient. Ainsi, il serait possible de
croire qu’en utilisant le caring pour guider les infirmières libanaises, celles-ci seraient en
mesure d’établir une relation soignante plus humaniste et transpersonnelle empreinte de
confiance, de congruence, d’empathie et de chaleur humaine dans leur pratique en soins
palliatifs. Par sa présence authentique auprès des patients en soins palliatifs, l’infirmière
apporte un soutien psychologique au patient et à sa famille, et crée un environnement
physique et spirituel favorisant le confort, la dignité humaine et une transition à la mort
dans un contexte le plus serein et paisible possible.
À notre connaissance, aucune étude ne s’est intéressée à la pratique en soins palliatifs
adoptant une approche de caring au Liban, où les valeurs culturelles diffèrent des pays
11
occidentaux et américains. Les paragraphes qui suivent exposent la pratique en soins
palliatifs dans le contexte libanais.
1.4 Le contexte libanais et les soins palliatifs
Selon le WHO et la WPCA (2014), près de 80 % des besoins mondiaux en soins palliatifs
se situent dans les pays à revenu faible ou intermédiaire, et seulement vingt pays dans le
monde ont pleinement intégré les soins palliatifs dans leur système de soins de santé. Or,
le Liban ne compte pas parmi ces pays (Abu Zeinah, Al Kindi, & Hassan, 2012). Bien
qu’on dispose de peu de statistiques et d’information sur la pratique des soins palliatifs
dans les pays du Moyen-Orient, il semblerait qu'aucun de ces pays ne dispense des soins
optimaux aux personnes en situation de fin de vie (Abu Zeinah et al., 2012 ; Silbermann et
al., 2013). Le niveau de développement des soins palliatifs varie selon les pays. Ces soins
sont plus développés en Arabie Saoudite et Jordanie, inexistants en Syrie, et sont en phase
intermédiaire d’implantation dans des pays comme Oman, Bahreïn et le Liban (Abu Zeinah
et al., 2012 ; Silbermann et al., 2013). Cela signifie que, si les soins palliatifs étaient
intégrés dans le système de santé du pays, les patients ayant des maladies graves et
incurables pourraient accéder à des soins de qualité selon leurs besoins.
Cependant, le peu d’information dont on dispose ne permet pas d’identifier les pratiques
de soins palliatifs à développer au Liban. À l’instar de la majorité des pays du Moyen-
Orient, la notion de soins palliatifs au Liban est nouvelle dans le domaine des soins de santé
(Abu-Saad Huijer, Abboud, & Dimassi, 2009; Osman et al., 2013; Zeinah, Al-Kindi, &
Hassan, 2012). Malgré quelques progrès au cours des dernières années, les soins palliatifs
restent au stade primaire au Liban, et ont ainsi besoin d’être développés pour combler
l’écart avec les standards internationaux (Abu-Saad Huijer, et al., 2012; Daher, 2012;
Doumit, 2011). Puisque le cancer constitue l’une des principales causes de mortalité dans
le pays, la pratique des soins palliatifs est étroitement liée aux patients cancéreux en phase
terminale (Daher, Estephan, Huijer, & Naja, 2008). Selon le Recueil National des
Statistiques Sanitaires au Liban (2012), le taux de mortalité par année est de 5,4 par 1000
habitants, et la cause de décès par néoplasmes est de 19% par année. Quant au nombre de
nouveaux cas de cancers, ce dernier a été évalué en 2007 à 8868 par année. Daher et al.
12
(2013) présagent qu’en 2030, ce nombre pourrait atteindre 12000 cas par année. Ces
mêmes auteurs estiment que seulement 10% des patients cancéreux bénéficient de soins
palliatifs au Liban, en raison d’une insuffisance de prestataires de soins formés en soins
palliatifs, du manque de services spécialisés et surtout du déficit dans la sensibilisation du
public aux alternatives de soins palliatifs en milieux hospitaliers.
Historiquement, ce fut en 1995 que le domaine des soins palliatifs a été introduit pour la
première fois au Liban, lors d’un atelier national des leaders de santé sur la lutte contre le
cancer, sous la supervision du Ministère de la Santé Libanais et de l’Organisation mondiale
de la Santé [OMS], cité dans Daher et al. (2013). Le besoin de soins palliatifs et le besoin
de soulager la douleur ont été identifiés comme prioritaires parmi les recommandations,
mais le seul aboutissement principal du dit atelier a été de dispenser gratuitement les
médicaments de chimiothérapie. Ensuite, en mai 1999, un symposium sur les soins
palliatifs et l’éthique a eu lieu lors du Congrès d’oncologie du Moyen-Orient, et les
recommandations développées par le Ministère de la Santé Libanais et l’OMS ont été
approuvées. Ces recommandations, qui incluent sept points d’action essentiels, sont citées
dans Daher et al. (2013) : 1) une politique nationale claire pour offrir le traitement de la
douleur à un coût réduit ; 2) une disponibilité des médicaments ; 3) une éducation et une
formation en soins palliatifs pour les professionnels de la santé ; 4) le remboursement des
services des médecins pour les soins palliatifs ; 5) une approche multidisciplinaire pour les
soins palliatifs ; 6) un renforcement des soins à domicile et de l’assistance sociale et 7) la
reconnaissance du droit de tous les patients qui souffrent d’une maladie chronique fatale
de recevoir des soins palliatifs.
Toutefois, c’est principalement à l’hôpital que les patients viennent vivre leur dernier
moment, même si c’est à la maison, entourés par les leurs qu'ils le souhaiteraient (Ammar
& Hamra, 2013). Étant donné que les soins palliatifs ne sont pas encore officiellement
institutionnalisés, certains patients peuvent être financièrement couverts par des
compagnies d’assurance privées, mais peu de Libanais bénéficient d’une telle couverture
médicale. Le Ministère de la Santé couvre uniquement les soins palliatifs à l’hôpital, ce qui
oblige l’hospitalisation des patients, afin qu’ils puissent avoir accès aux opiacés.
13
Également, en l’absence d’une structure spécialisée en soins palliatifs, l’accompagnement
en fin de vie se fait dans divers services hospitaliers et unités de soins (Tohmé, Abi Khalil,
& Kanaan, 2013). Quant à la prise en charge en communauté, certaines organisations non
gouvernementales (ONG) assurent les soins à domicile aux patients en fin de vie dans les
grandes villes, sous la supervision d’une équipe interdisciplinaire constituée de médecins
(oncologues ou généralistes), d’infirmières, de pharmaciens, de travailleurs sociaux, de
bénévoles et de psychologues (Daher et al., 2008; Zeinah et al., 2012).
D’autres avancées sont survenues dans ce domaine. A titre d’exemple, l’article 1 de la loi
libanaise n°574 sur « les droits des patients et le consentement éclairé » promulguée en
2004, donne le droit à toute personne de recevoir des soins adaptés à son état, dans le
respect de sa dignité. Cette loi prévoit également une attention particulière au soulagement
de la douleur. Également, une spécialité de « Médecine de la douleur » a été reconnue par
le Ministère de la Santé, et la « Société libanaise de traitement de la douleur » a été fondée
en 2006. Dans le même essor des soins palliatifs au Liban, un « Comité National de Soins
Palliatifs et de Douleur » a été constitué en 2011, sous l’égide du Ministère de la Santé
(Daher et al., 2013).
Dans ce sens, et dans le but d’offrir des soins de qualité à ses patients, un hôpital
universitaire dans une région urbaine libanaise a créé, en 2014 une équipe mobile
interdisciplinaire de soins palliatifs (EMSP). Cette EMSP ne se substitue pas aux équipes
référentes, mais intervient auprès des différentes unités de soins de l’hôpital pour fournir
un soutien aux équipes soignantes dans la prise en charge des patients en fin de vie et leur
famille. Cette EMSP participe également, à la diffusion de la démarche palliative au sein
du centre hospitalier. En plus de cette équipe, une unité de soins palliatifs de sept lits a été
créée dans le même hôpital en avril 2016. Première dans le pays, cette unité a prévu dans
sa mission d’être un modèle sur le plan national dans la prise en charge des patients, mais
aussi dans la sensibilisation des professionnels de la santé au concept de soins palliatifs.
En effet, pour Silberman et al. (2015), la présence d’une équipe interdisciplinaire de soins
palliatifs sur le plan national, à l’instar d’autres pays du Moyen-Orient, constitue une force
dans l’évolution de ce domaine.
14
En effet, des progrès ont été réalisés au cours des dernières années pour développer le
domaine des soins palliatifs pour qu’il fasse partie intégrante du système de soins de santé
au Liban (Abu-Saad Huijer, Saab & Hajjar, 2016). Dans ce sens, quatre sous-comités ont
été créés par le Comité National de Soins Palliatifs et de Douleur pour œuvrer aux niveaux
de l’éducation, de la pratique, de la recherche et des politiques de santé dans le domaine
des soins palliatifs. Dans leur plan de travail, ces sous-comités ont élaboré des
recommandations qui visent, à titre d’exemple, à développer des normes et des lignes
directrices de pratique clinique interdisciplinaire pour guider la pratique en soins palliatifs.
De même, ces sous-comités proposent de réviser la législation régissant la prestation des
analgésiques opioïdes, développer un modèle pour les services de soins palliatifs, et lancer
des campagnes dans le pays pour sensibiliser le public aux soins palliatifs. De plus, une
attention particulière est accordée pour promouvoir l’éducation et développer la formation
des professionnels de la santé à ce niveau (Abu-Saad Huijer et al., 2016).
Toutefois, et malgré les efforts fournis pour le développement des soins palliatifs dans le
pays, les études montrent que certains patients libanais ne finissent pas leurs jours avec
confort et dignité (Tohmé et al., 2013). Bien que la prise en charge des problèmes physiques
soit considérée comme adéquate, la réponse aux problèmes psychologiques reste
insuffisante. Force est de constater que cette inadéquation est due à plusieurs raisons,
notamment, la charge du travail de l’équipe soignante ainsi que le manque de formation et
de communication avec le malade et ses proches (Tohmé et al., 2013 ; Abu-Saad Huijer et
al., 2012). Selon Saad Huijer et al. (2016), les soins palliatifs restent sous-développés au
niveau de la formation, et nécessitent le développement de compétences des professionnels
de la santé dans ce domaine. Comparée à certains pays occidentaux, ce n’est que
récemment que la médecine palliative a été reconnue comme une nouvelle discipline de la
médecine, mais le nombre de praticiens reste insuffisant pour répondre aux besoins de la
population (Osman, 2015).
De même, selon Daher et al. (2013), peu d’infirmières au Liban sont formées dans le
domaine des soins palliatifs, ce qui pourrait se répercuter sur la qualité des soins fournis
aux patients. Par ailleurs, les quelques infirmières qui ont reçu de la formation en soins
15
palliatifs font partie d'équipes interdisciplinaires dans des centres hospitaliers en milieux
urbains, en particulier les centres qui ont développé des équipes mobiles de soutien. Ces
derniers, qui sont déjà rattachés à quelques centres hospitaliers, interviennent à titre de
consultants auprès des autres professionnels de la santé. Force est de constater l’urgence
de former plus d’infirmières spécialisées en soins palliatifs, qui pourraient soutenir leurs
collègues dans leur pratique auprès des patients en fin de vie. Par conséquent, ces dernières
pourraient contribuer au déploiement des soins palliatifs au Liban.
Quelques changements, qui ont déjà eu lieu, peuvent être cités, notamment à travers
l’intégration des notions de base en soins palliatifs dans les cursus de formation générale
des infirmières et des médecins. Ces notions concernent l’évaluation et la réponse aux
besoins d’ordre physique, en particulier la prise en charge de la douleur et des symptômes
généraux, ainsi que la réponse aux besoins d’ordres psychologique et spirituel. Cependant,
il reste encore du chemin à parcourir pour placer les soins palliatifs sur le calendrier
national de santé au Liban et les intégrer dans les différents programmes de formation des
professionnels de la santé (Doumit, 2011 ; Khoury, 2008 ; Kronfol & Sibai, 2012 ; Tohmé
et al. 2013).
Dans ce sens, Khoury (2008) ajoute qu’il est du devoir de la profession infirmière de plaider
en faveur d'un système qui fournisse des soins palliatifs et des soins de fin de vie de qualité
au Liban pour les patients. De même, Tohmé et al. (2013) ont mené une étude descriptive
et comparative, au Liban, pour évaluer le point de vue des soignants et celui des proches
sur la qualité d’accompagnement des patients en soins palliatifs. Bien que les résultats
montrent que 30% des soignants aient déjà bénéficié d’une formation en soins palliatifs,
ils révèlent également que 56% des soignants souhaiteraient d’autres formations pour
optimiser leur pratique dans ce domaine.
Etant donné le manque de guides de pratique ou de référentiels de compétences en soins
palliatifs au Liban, il serait pertinent, pour le développement des soins palliatifs, de prendre
appui dans un premier temps sur des lignes directrices ou des guides de pratique
exemplaires développés ailleurs. Ces modèles ont déjà été élaborés dans d’autres pays
16
comme le Canada, l’Australie et l’Europe, pour bâtir la pratique des professionnels de la
santé en soins palliatifs. Par ailleurs, peu d’information est disponible sur la mise en œuvre
de ces pratiques par l’infirmière spécialisée de l’équipe de soutien mobile en soins
palliatifs, d’où l’importance du développement de la recherche. À cet effet, Abu-Saad
Huijjer et al. (2013) insistent sur la priorité d’étudier la pratique en soins palliatifs dans le
pays, afin de guider l'adoption d'un modèle de prestation de soins palliatifs sensible à la
culture et aux besoins de la population libanaise.
Cette priorité a suscité une réflexion et une motivation pour la réalisation d’un projet de
recherche doctoral. De telles recherches pourraient également guider l’élaboration de
programmes de formation en soins palliatifs dans le pays, pour améliorer la pratique
infirmière et la qualité de vie des patients en fin de vie. Les résultats de cette recherche
pourront être bénéfiques à long terme par leur contribution à l’amélioration de la pratique
et à l’accès aux soins palliatifs spécialisés au Liban. Les soins palliatifs au Liban
connaissent actuellement une phase d’émergence que cette étude pourrait soutenir en lui
fournissant un ancrage par le développement de fondements scientifiques empiriques
solides. Les professionnels de l’équipe interdisciplinaire pourraient ainsi développer des
interventions basées sur des données scientifiques et concevoir des formations qui
répondraient aux besoins de la population libanaise.
En résumé, compte tenu des efforts déployés par les experts nationaux pour promouvoir la
pratique de soins palliatifs et la placer sur le calendrier national de la santé au Liban, il est
étonnant de constater que cette pratique en soit toujours à ses débuts, loin d’occuper un
statut stable. Il est de même intriguant que l’accent soit toujours limité au soulagement de
la douleur. On peut alors se demander ce qu’il en est des autres dimensions des soins
palliatifs. Également, il semble y avoir une volonté nationale de structurer l’offre de soins
palliatifs, mais avec des retombées sur le terrain qui tardent à se faire sentir.
17
1.5 Le but et la question générale de recherche
Le but de cette recherche est donc de comprendre l’exercice de la pratique infirmière en
soins palliatifs, auprès de patients atteints de cancer en fin de vie, au sein d’une équipe
interdisciplinaire, d’une région du Liban.
Afin d’atteindre ce but, une question générale de recherche est formulée : Comment
s’exerce la pratique infirmière en soins palliatifs, auprès de patients en fin de vie atteints
de cancer, au sein d’une équipe interdisciplinaire, d’une région du Liban ?
18
Chapitre 2 – Recension des écrits
Ce deuxième chapitre présente l’état des connaissances lié à l’exercice de la pratique
infirmière en soins palliatifs auprès de patients cancéreux au sein d’une équipe
interdisciplinaire. Il commence par une brève description de la stratégie de repérage des
écrits. Ensuite, la pratique en soins palliatifs est abordée, en mettant en évidence la
pratique holistique et le contexte d’interdisciplinarité en soins palliatifs, ainsi que la
pratique infirmière au sein d’une équipe interdisciplinaire. Puis, l’approche de caring en
soins palliatifs est examinée. Finalement, les écrits sur les facteurs contraignant et
facilitant la pratique infirmière en soins palliatifs sont présentés.
2.1 La stratégie de repérage des écrits
Une recherche documentaire réalisée à partir des bases de données CINAHL, MEDLINE,
PubMed et ProQuest a permis de répertorier les principales études permettant de
documenter la pratique infirmière en soins palliatifs. Cette recherche a été réalisée en
utilisant les mots-clés, les opérateurs booléens et les routines de recherche suivants:
« palliative care » or « end-of-life-care » or « terminal care » and « nurs* » or « palliative
nursing » or « oncology nurses » and « barriers » or « obstacles » or « palliative
obstacles » and « facilitators » or « palliative facilitators » and « interdisciplinarity team »
or « interdisciplinary care » and « caring ».
La liste des références de chacun des écrits sélectionnés a également été rigoureusement
examinée, afin de cibler des livres et des articles spécifiques en lien avec l’objet de l’étude.
À cela s’ajoutent les différents sites Internet d'organisations œuvrant dans le domaine des
soins palliatifs, à titre d’exemple : « American Academy of Hospice and Palliative
Medicine », « Association Canadienne des soins Palliatifs », « Association Canadienne
des Écoles de Sciences Infirmières », « Association Européenne de Soins Palliatifs »,
« Association des Infirmières et Infirmiers du Canada », « Comité des équipes
interdisciplinaires de lutte contre le cancer », « International Association for Hospice and
palliative care », « Organisation Mondiale de la Santé », « Ministère de la Santé et des
Services sociaux du Québec », « Société Suisse de Médecine et de Soins Palliatifs » et
« The National Council for palliative care in England ».
19
2.2 La pratique en soins palliatifs
La littérature recensée a permis de mettre en lumière certaines caractéristiques de la
pratique en soins palliatifs notamment, l’approche holistique des soins palliatifs,
l’interdisciplinarité ainsi que la pratique infirmière spécifique au sein d'une équipe
interdisciplinaire.
2.2.1 L’approche holistique des soins palliatifs
Les soins palliatifs supposent, selon certains auteurs, la réponse aux besoins globaux du
patient dans ses dimensions physique, psychologique et spirituelle (ACSP, 2013 ;
Bonnières, et al., 2010 ; Buzgova, Sikorova, & Jarosova, 2016 ; Dong et al., 2016 ; Fridh
et al., 2009 ; Guay et al., 2011 ; Lofandjola Masumbuku & Coppieters 2014 ; Zheng, Guo,
Dong, & Owens, 2015). Ces conceptions sont alignées avec la définition des soins
palliatifs comme une approche qui cherche à améliorer la qualité de vie des patients et de
leur famille face aux conséquences d’une maladie potentiellement mortelle, par le
traitement de la douleur et des autres problèmes physiques, psychologiques et spirituels
qui lui sont liés (WHO, 2002). Quant à la dimension relationnelle, cette dernière est
intégrée dans la dimension psychologique. Ainsi, dans les paragraphes suivants, les soins
globaux qui tiennent compte des besoins du patient et de sa famille seront présentés. Ces
besoins sont d’ordres physique, psychologique et spirituel.
2.2.1.1 La réponse aux besoins physiques
La réponse aux besoins physiques a été abordée dans les écrits scientifiques comme étant
primordiale pour la pratique des soins palliatifs. Ces besoins concernent spécifiquement
le soulagement de la douleur et des autres symptômes physiques courants notamment, les
symptômes cardio-respiratoires, gastro-intestinaux et buccaux, mais aussi les symptômes
généraux qui altèrent le niveau de conscience et l’état cognitif de la personne (ACSP,
2013 ; Zheng et al., 2015). La gestion de la douleur est perçue comme une intervention
prioritaire et fondamentale pour améliorer la qualité de vie des patients. Pour ce faire, il
est recommandé d’employer toutes les techniques et l’arsenal thérapeutique reconnu de
même que les mesures non pharmacologiques complémentaires (Vedel et al., 2014).
Ainsi, pour un soulagement adéquat de la douleur et des autres symptômes, une évaluation
20
préalable de la situation de santé par l’infirmière est essentielle. Ce bilan permettra
d’assurer une planification judicieuse et personnalisée des interventions adaptées à la
situation clinique et aux préférences de la personne en phase terminale (Dong et al., 2016 ;
Fridh, et al., 2009 ; Lofandjola Masumbuku & Coppieters, 2014 ; Spence et al., 2010 ;
Vedel et al., 2014 ; Zheng et al., 2015).
Par ailleurs, Dong et al. (2016) ont mené une étude phénoménologique en Chine auprès
de 15 médecins et 22 infirmières, pour explorer leur expérience dans la pratique des soins
palliatifs. Les participants interviewés mentionnent comment la gestion de la douleur chez
les patients en fin de vie, par l’administration des analgésiques puissants, est au cœur de
leur responsabilité. Cette gestion est considérée comme une priorité qui assure une qualité
de vie optimale.
Dans une même perspective, Vedel et al. (2014) ont réalisé une étude transversale par
théorisation ancrée. Cette recherche a été conduite afin d’identifier les points de
convergence et de divergence relatifs à la qualité des soins palliatifs selon les différentes
parties prenantes. Les données de l’étude ont été collectées selon la méthode de boule de
neige et jusqu’à la saturation des données auprès de 61 participants, incluant des patients,
des membres de leur famille et des professionnels de la santé, tous recrutés dans la région
parisienne en France. Des entrevues, individuelles et de groupes, ont été menées pour
collecter les données. L’analyse des résultats concernant la réponse aux besoins physiques
montre que les professionnels de la santé considèrent la gestion de la douleur comme un
critère fondamental de la qualité des soins. Cet aspect permettrait de fournir une meilleure
qualité de soins palliatifs, ce qui concorde avec les propos des membres de la famille.
Outre la gestion de la douleur, les participants ajoutent que d’autres interventions sont
requises, comme la gestion des symptômes associés, en particulier les problèmes gastro-
intestinaux et respiratoires.
D’un autre côté, les résultats d’une étude descriptive qualitative réalisée en Chine (Zheng
et al., 2015) auprès de 28 infirmières en oncologie mettent en évidence l’importance
d’éviter les traitements agressifs ou invasifs autant que possible afin de ne pas augmenter
21
la douleur et la souffrance auprès de la personne en fin de vie. À cet égard, les infirmières
interviewées multiplient leurs efforts pour répondre aux besoins physiques en assurant
également les soins fondamentaux globaux adaptés aux conditions de santé de chaque
patient. De même, la réponse aux besoins reliés aux activités de la vie quotidienne et au
maintien de l’autonomie est évoquée. Outre un positionnement et une alimentation
adéquats, un contrôle optimal des symptômes est visé pour fournir le confort et garantir
une qualité de vie à travers la réponse aux besoins fondamentaux, et ce jusqu’au décès.
Ces résultats montrent ainsi que le soulagement de la douleur et la réponse aux besoins
physiques ne se font pas uniquement par des traitements pharmacologiques et
l’administration d’opiacés.
En revanche, bien que la gestion de la douleur semble prioritaire en soins palliatifs, des
écrits montrent qu’elle est sujette à des barrières culturelles qui limitent sa prise en charge.
En effet, Spence et al. (2010) ont mené en Jamaïque une étude transversale avec un devis
mixte auprès de 81 patients atteints de cancer, 51 aidants naturels, 20 professionnels de la
santé et 7 informateurs-clés de la communauté. Cette recherche avait pour but d’évaluer
les besoins des patients atteints de cancer, des aidants naturels et des professionnels de la
santé dans le contexte jamaïcain. Même si 75% des aidants naturels identifient le besoin
de gestion de la douleur comme un élément clé d’une prise en charge adéquate des patients
en fin de vie, les résultats ont montré que 42% des patients interviewés ayant expérimenté
la douleur durant leur maladie ont évoqué un manque d’accès aux antalgiques. Il faut
savoir qu’en Jamaïque l’accès à la morphine est limité. Dans ce contexte, cette substance
est perçue comme étant dangereuse. Elle n’est par ailleurs, pas administrée de manière
appropriée aux patients par les professionnels de la santé. L’une des limites de cette étude
est le devis transversal qui ne permet pas de prendre en considération l’évolution des
besoins du patient tout au long de la trajectoire de sa maladie. Cependant, ces résultats
soulignent comment le soulagement de la douleur peut être influencé par diverses
barrières en lien avec la culture du pays.
Dans la même veine, Lofandjola Masumbuku et Coppieters (2014) ont réalisé une étude
qualitative auprès de 30 médecins et 90 infirmiers ayant une expérience d’au moins une
22
année dans six hôpitaux de Kinshasa en République démocratique du Congo (RDC),
accueillants des patients en fin de vie. Cette recherche visait à documenter les
représentations des professionnels de la santé des soins palliatifs et de l’accompagnement
en fin de vie à Kinshasa. Dix groupes de discussion focalisée ont été menés. Les auteurs
interprètent les résultats de leur étude en les insérant dans le contexte culturel de leur pays.
Selon les participants, le soulagement de la douleur est intégré dans la politique de santé
en RDC et il s’avère capital pour les patients en phases aiguë et chronique. Toutefois, 70%
des participants indiquent que les besoins en soins palliatifs des malades en fin de vie
doivent être formulés par la famille. Dans ce contexte, la morphine est considérée comme
une substance qui pousse le malade vers une mort certaine. Ces résultats se recoupent avec
ceux déjà avancés par Spence et al. (2010) dans son étude menée en Jamaïque, sur les
barrières au soulagement de la douleur. Bien que l’étude de Lofandjola Masumbuku et
Coppieters (2014) permette de bien identifier les barrières freinant l’applicabilité de cette
approche dans la pratique dans un pays où les soins palliatifs sont en émergence, les
données recueillies ne fournissent pas d’explication claire sur la prise en charge globale
des patients en soins palliatifs. Par ailleurs, les résultats ne montrent pas si les infirmières
sont en mesure de bien gérer les approches pharmacologiques visant à soulager la douleur.
Ainsi, les thèmes discutés restent généraux et manquent parfois de précision.
Dans la même lignée des études citées précédemment, Fridh, et al. (2009) ont mené une
étude descriptive et exploratoire auprès de neuf infirmières œuvrant dans trois unités de
soins intensifs en Suède. Cette étude avait comme but d’explorer leur expérience et leurs
perceptions quant aux soins à prodiguer aux patients en fin de vie en contexte de soins
intensifs. Bien que les données recueillies étaient limitées à neuf entrevues, Fridh, et al.
(2009) confirment l’atteinte de la saturation empirique des données. Les données
recueillies soulignent l’importance de la gestion de la douleur en fin de vie et des autres
symptômes, en particulier les troubles digestifs et les effets secondaires des traitements.
Elles mettent également l’accent sur le rôle que jouent les infirmières. En effet, pour
assurer la dignité et le confort au patient en fin de vie, les infirmières administrent des
doses puissantes d’analgésiques dans le but de soulager la douleur. Cette pratique de soins
en fin de vie, bien que jugée bénéfique par les infirmières pour le patient et pour sa famille,
23
contraste avec les études précédentes. Ces études soulignaient l’impact des croyances
entourant la sécurité de la morphine, ce qui freinait le soulagement de la douleur.
Dans un contexte libanais, Abu-Saad Huijer et al. (2012) ont réalisé une étude descriptive
quantitative transversale auprès de 200 patients atteints de cancer. Le but de cette étude
était d'évaluer la qualité de vie, la gestion des symptômes et la qualité des soins palliatifs
chez des patients libanais atteints de cancer au Centre médical de l'Université américaine
de Beyrouth. Les instruments « Quality of Palliative Care Questionnaire-Adult » [QPCQ-
A] et « European Organization for Research and Treatment of Cancer-Quality of Life
Questionnaire » [EORTCQLQ-C30] ont été traduits en arabe pour le contexte de l’étude.
Bien que les résultats montrent un niveau satisfaisant de la qualité des soins, une fréquence
élevée des symptômes physiques et psychologiques a été identifiée. Au niveau des
symptômes physiques, les résultats de cette étude libanaise ont mis en relief, la présence
de 59,6% de manque d’énergie, de 30,3% de nausées avec 55,1% de douleur. Quant aux
symptômes psychologiques, une fréquence de sentiments de nervosité (66.3%), de
tristesse (60,7%) et d’inquiétude (48,3%) a été évoquée. Dans la réponse aux besoins des
patients, les auteurs font deux constats. D’une part, les nausées et les douleurs étaient les
symptômes les plus souvent traités à 44,4% et 59,2% respectivement. Mais, d’autre part,
la prise en charge des symptômes psychologiques était presque insuffisante, avec 23,3%
pour la prise en charge de la nervosité, 9,3% pour l’inquiétude et 4,7% pour la tristesse. Il
est vrai que ces résultats s’accordent avec les écrits occidentaux, cependant, les auteurs
mettent en doute la représentativité de l’échantillon, et par la suite, la généralisation des
résultats. Il est à noter que l’étude fut menée dans un seul centre hospitalier au Liban et
les participants à l’étude étaient suivis par un seul groupe de professionnels de la santé.
Les résultats des études, toutes descriptives, recensées dans cette section s’accordent avec
les normes élaborées par la SFAP (2009) qui insistent sur la nécessité d’assurer la
continuité des soins de maintien de la vie, par la réponse aux besoins physiques,
notamment, à travers le soulagement de la douleur et des autres symptômes. Dans le même
ordre d’idées, l’ACSP (2013) souligne que l’infirmière en soins palliatifs dispense des
soins fondés sur les bonnes pratiques, dans la prise en charge de la douleur et des
24
symptômes. Cependant, les résultats recensés ne permettent pas de dresser un portrait de
la pratique infirmière en soins palliatifs visant à répondre aux besoins physiques, dans des
pays où les soins palliatifs sont en émergence, et plus spécifiquement au Liban.
Toutefois, le soulagement de la souffrance globale en fin de vie ne se limite pas à la gestion
de la douleur physique, mais doit aussi faire place au soulagement de la souffrance
psychologique. D’ailleurs, la douleur physique et la souffrance psychologique semblent
indissociables, puisque la douleur altèrerait la personne dans ses attachements affectifs et
relationnels et engendrerait de la souffrance psychologique (Abraham, 2015). La
dimension psychologique sera d’ailleurs examinée dans la prochaine section.
2.2.1.2 La réponse aux besoins psychologiques
La réponse aux besoins psychologiques fait l’objet de diverses recherches. Ces recherches
mettent notamment, en évidence les aspects relationnels ainsi que le rôle que ceux-ci
jouent pour répondre aux besoins psychologiques du patient (Buzgova et al., 2016 ;
Johnson et al., 2011 ; Guay et al., 2011 ; Vedel et al., 2014). Ainsi, une relation semble
s’établir lorsque l’infirmière écoute le patient en soins palliatifs, et lui assure un soutien
psychologique dans les moments difficiles. Dans ce sens, Zerwekh (2010) postule que
l’écoute est vitale à la création des liens et à la réponse des besoins psychologiques. Cette
écoute implique souvent la capacité de créer des silences et de se concentrer sur les
attitudes non verbales du patient pour décoder les messages émotionnels.
D’un autre côté, les résultats de Buzgova et al., (2016) montrent que le respect et le soutien
psychologique constituent les besoins les plus fréquemment rapportés, et ce par 90% des
patients, suivi par la gestion des symptômes physiques (75%). Cette étude corrélationnelle
visait à explorer les besoins de 349 patients en soins palliatifs de fin de vie et à analyser
les facteurs influençant leurs besoins. Les résultats de Buzgova et al., (2016) sont
corroborés par les propos des professionnels de la santé rapportés dans une étude
descriptive exploratoire effectuée en Australie auprès de 35 infirmières, de trois médecins
et de sept autres professionnels de la santé impliqués dans la prestation des soins palliatifs
(Johnson et al. 2011). Cette étude avait pour but de mieux comprendre les pratiques de
25
référence en soins palliatifs et les facteurs affectant l’accès à ce service. Les résultats
mettent en relief l’approche holistique en soins palliatifs et l’importance de la réponse aux
besoins, aussi bien physiques que psychologiques, afin de maximiser la qualité de vie des
patients. Selon Johnson et al. (2011), l’établissement d’une relation de confiance avec le
patient et sa famille facilite l’exploration des besoins émotionnels et psychologiques.
Malgré son importance, la réponse aux besoins psychologiques n’est pas toujours évidente
chez les professionnels de la santé. D’ailleurs, une étude descriptive transversale a permis
de comparer les perceptions de 358 professionnels de la santé et 89 proches quant à la
qualité de l’accompagnement des malades en fin de vie au Liban (Tohmé et al., 2013).
Les résultats montrent que si la prise en charge des problèmes physiques est considérée
adéquate par 68% des soignants, celle des problèmes psychologiques ne l’est que pour
40% d’entre eux. Cette faible prise en charge des besoins psychologiques est surtout due,
selon les soignants, à la charge de travail de l’équipe (34%), à leur manque de formation
(22%) et à un manque de communication avec le malade et ses proches (20%).
L’insuffisance de la prise en charge psychologique des malades atteints de cancer au Liban
a été également documentée par Abu-Saad Huijer et al. (2012), dans son étude citée
précédemment.
Ces propos se rapprochent de ceux de Vedel et al. (2014) qui soutiennent que la pratique
en soins palliatifs requiert non seulement une approche technique de l’infirmière, mais
également une approche relationnelle qui inclut aussi la famille, en particulier en fin de
vie. Selon ces auteurs, la préparation de la famille peinée au processus de la mort devrait
être intégrée dans la pratique de l’infirmière en soins palliatifs. Plus spécifiquement, en
lui assurant un soutien émotionnel face aux situations auxquelles elle est exposée et en
l’accompagnant dans le deuil qu’elle doit traverser. Par ailleurs, une récente étude
qualitative utilisant la théorisation ancrée s’est spécifiquement intéressée à décrire
l’engagement de 22 infirmières auprès de familles Malaisiennes dans les unités de soins
palliatifs (Namasivayam, et al, 2013). Pour collecter les données, Namasivayam et al.
(2013) ont réalisé entre 2007 et 2009, sept entrevues individuelles et huit entrevues de
groupe. Les résultats permettent de faire ressortir l’engagement avec la famille, comme
26
un élément important de la pratique en soins palliatifs. Cet engagement nécessite de
préparer la famille aux soins palliatifs et de la tenir informée de la progression de la
maladie.
De même, l’importance du soutien psychologique comme élément clé de la pratique
infirmière en soins palliatifs est décrite non seulement dans les écrits scientifiques, mais
aussi dans les recommandations des experts à travers des manuels (Abraham, 2015 ;
SFAP, 2013). Cela exige des infirmières de faire preuve d’écoute active, de respecter le
cheminement unique de chaque patient, de démontrer de la compassion et de faire preuve
d’empathie envers la famille qui expérimente parfois l’épuisement physique et
émotionnel. Cette empathie se caractérise par un profond désir de compréhension et une
capacité de percevoir ce que ressente leur proche en fin de vie. Ce cheminement de pré
deuil amortirait le choc du décès et faciliterait le processus de deuil.
Mais souvent, la souffrance psychologique engendre une souffrance existentielle et
spirituelle qui relève essentiellement d’un questionnement fondamental sur le sens de la
vie et de la mort (Abraham, 2015).
2.2.1.3 La réponse aux besoins spirituels
Les besoins spirituels constituent une dimension essentielle en soins palliatifs, où
l’infirmière se doit de posséder un minimum de compétences (MSSS, 2008). Certains
auteurs soutiennent que la pratique infirmière répond aux besoins spirituels en assurant
une paix émotionnelle au patient et sa famille ou une mort digne, en évaluant et dépistant
les besoins spirituels et en tentant de répondre à leurs attentes en fin de vie (McCallum &
McConigley, 2013 ; Zheng et al., 2015). Bien que ces attentes envers les infirmières soient
parfois idéalistes, McCallum et McConigley (2013) soutiennent que la réponse aux
besoins spirituels peut se concevoir par le maintien de l’espoir, le respect des croyances
culturelles et religieuses des patients en fin de vie ainsi que par la préservation de leur
dignité. De son côté, Abraham (2015) postule que la spiritualité témoigne des aspirations
profondes de l’être humain, qui peuvent s’harmoniser pour donner un sens à la vie. De
27
même, cet auteur ajoute dans son ouvrage que la foi pour les croyants donne sens à la vie
et permet de trouver une unité intérieure dans les moments de grandes souffrances.
Dans ce sens, Guay et al. (2011) ont mené une étude phénoménologique herméneutique
qui avait pour but de comprendre comment se manifestent les « bons soins » palliatifs,
selon la perspective des infirmières de soins intensifs. Les données ont été recueillies en
plusieurs phases. Dans la première phase, six entrevues de groupe ont été réalisées auprès
de 27 infirmières ayant prodigué des soins en fin de vie. Ensuite, des séances
d’observation d’une situation de soins palliatifs ont eu lieu dans la deuxième phase. Lors
de la phase trois, six entrevues individuelles ont été menées auprès des infirmières qui ont
vécu la situation de soins palliatifs. Enfin, dans la quatrième phase, cinq entrevues de
validation des résultats en groupe se sont déroulées auprès de 21 infirmières. Toutefois,
des limites méthodologiques ont compromis l’atteinte de la saturation des données,
puisque le nombre d’entrevues de groupe dans la première phase était prédéterminé. De
même, ces entrevues ont eu lieu la même journée, ce qui a empêché l’évolution du guide
d’entrevue. Les résultats de l’étude de Guay et al. (2011) montrent que les « bons soins »
palliatifs se manifestent par la considération de la personne dans toutes ses dimensions.
Selon Gastmans et al. (1998), il s’agit de dimensions physique, relationnelle,
psychologique, morale, sociale et spirituelle. Pour décrire la dimension spirituelle en lien
avec la pratique infirmière, les participants de l’étude de Guay et al. (2011) mettent en
évidence la référence au service pastoral pour les patients en fin de vie comme un élément
du protocole de soins. A cela s’ajoute le respect des croyances religieuses et des rituels et
une importance accordée à l’expérience vécue et à la signification de la mort pour chaque
patient.
En résumé, ces écrits, majoritairement descriptifs, renforcent l’importance des soins
centrés sur la personne à travers la réponse aux besoins physiques et la prise en compte
des aspects psychologiques et spirituels. La réponse aux besoins physiques est assurée en
particulier par le soulagement de la douleur physique et des autres symptômes. À cela
s’ajoute la réponse aux besoins psychologiques. En effet, la pratique infirmière en soins
palliatifs est empreinte d’écoute, de respect, de silence, d’empathie, de relation de
28
confiance, de soutien et de transmission d’information, pour répondre aux besoins
psychologiques des patients et de leur famille. De plus, la réponse aux besoins
psychologiques tient compte de l’accompagnement qui favorise l’expression non verbale
des émotions. Ces émotions sont liées à la détresse et à l’anxiété, relatives aux pertes
encourues et au deuil. En ce qui concerne les besoins spirituels, la pratique infirmière se
caractérise par le respect des croyances religieuses et le maintien de la dignité du patient.
Outre la réponse aux attentes et souhaits des patients, l’évaluation des besoins spirituels
les aide à trouver un sens à leur situation, à préserver l’espoir et à satisfaire leurs besoins
spirituels.
Ainsi, une approche interdisciplinaire qui s’appuie sur la combinaison de l’expertise de
chacun des professionnels participants s’avère fondamentale pour une pratique en soins
palliatifs qui vise à répondre aux multiples besoins des patients et de ses proches
(Lassaunière, 2008).
2.2.2 L’interdisciplinarité en soins palliatifs
L’interdisciplinarité exprime la dynamique entre des personnes de différentes disciplines
qui échangent entre elles à partir de leur domaine de connaissances en s’enrichissant
mutuellement (Lassaunière, 2008). Les soins palliatifs sont prodigués de façon optimale
par une équipe interdisciplinaire, constituée d’intervenants possédant des connaissances
et des compétences complémentaires et reliées à tous les aspects du processus de soins,
propres à leur champ de pratique (ACSP, 2013). L’interdisciplinarité en soins palliatifs
est par ailleurs, décrite comme une exigence nécessaire, en raison des avantages pressentis
pour les patients, les proches aidants, les médecins ainsi que pour l’organisation des soins
(Joly, Lainé, Catan, & Pochard, 2011 ; Leclerc et al., 2014). Ces avantages sont
particulièrement en lien avec l’interaction et la communication entre les professionnels,
la prestation de soins de qualité, l’approche holistique des soins et la satisfaction du
patient. L’interdisciplinarité crée des liens entre les professionnels de la santé et ouvre des
canaux formels et informels de communication (MSSS, 2005). L’interdisciplinarité en
soins palliatifs, selon Vedel et al. (2014), implique l’engagement de plusieurs disciplines
pour une prise en charge globale du patient, favorisant ainsi une meilleure qualité de vie.
29
Les équipes interdisciplinaires qui fournissent les soins palliatifs sont formées,
généralement, de médecins, d’infirmières, de psychologues, de travailleurs sociaux, de
kinésithérapeutes, d’aides-soignantes et de représentants religieux ; des bénévoles
peuvent aussi y contribuer (Joly et al., 2011 ; Naccache, Abou Zeid, Ayoub, & Antakly,
2008 ; Spruyt, 2011 ; Wentlandt et al., 2016 ; Youngwerth & Twaddle 2011 ; Zerwekh,
2010).
Afin de mieux comprendre l’importance de l’interdisciplinarité dans la pratique des soins
palliatifs, plusieurs études qualitatives furent menées. Une recherche utilisant la
théorisation ancrée a été effectuée à Torento par Wentlandt et al. (2016). Cette étude
cherchait à identifier des aspects importants de la qualité et de la satisfaction des soins
dans une unité de soins palliatifs. Les données de la recherche ont été collectées à l’aide
d’entrevues de groupe auprès de 46 patients et familles et d’entrevues individuelles auprès
de 39 professionnels de la santé détenant au moins une année d’expérience dans l’unité de
soins palliatifs. L’analyse des résultats laisse voir que la qualité des soins dans l’unité de
soins palliatifs s’articule autour de six thèmes principaux : 1) l’équipe interdisciplinaire;
2) la communication; 3) l’attention et le soin personnalisé; 4) le soin centré sur la famille;
5) le soin accessible et consistant et 6) le soutien de l’environnement. Wentlandt et al.
(2016) indiquent que l’équipe interdisciplinaire constitue un thème commun et englobant
qui a rejoint tous les participants de l’étude, soit les patients, les familles et les
professionnels de la santé. De plus, Wentlandt et al. (2016) insistent sur l’importance de
cette équipe interdisciplinaire, en raison de son expertise professionnelle et de son
dynamisme pour un soin holistique. Néanmoins, certaines limites font obstacle à cette
étude, notamment l’état de santé des patients en stade terminal qui a raccourci le temps
des entrevues. Les résultats de l’étude de Wentlandt et al. (2016) rappellent les
conclusions de celle de Vedel et al. (2014) qui ont souligné, à leur tour, l’importance de
l’approche holistique interdisciplinaire dans les soins, pour la prestation des soins de
qualité en fin de vie.
D’autres auteurs ont également mis l’accent sur les liens entre l’interdisciplinarité et
l’approche holistique. D’ailleurs, une étude qualitative a été conduite dans le sud du Brésil
30
par Porto et al. (2012) auprès d’une équipe interdisciplinaire formée de huit participants :
une infirmière, une infirmière technicienne, un chirurgien, un travailleur social, un
théologien, une assistante administrative, un psychologue et un médecin coordonnateur
de l’équipe. Cette étude avait pour but de comprendre la pratique interdisciplinaire en
soins palliatifs auprès d’une équipe interdisciplinaire en oncologie, délivrant des soins aux
patients atteints de cancer. Les données ont été recueillies par observation non participante
et par un groupe de discussion focalisée. Les résultats qui émergent de cette recherche
décrivent le thème de la pratique interdisciplinaire comme un processus en construction
permanente basé sur un esprit d’interaction entre les professionnels participants à l’étude.
Dans cette dernière étude, l’approche holistique des soins apparaît comme une finalité
pour la pratique interdisciplinaire en soins palliatifs. Les interventions individualisées et
guidées par l’humanisation des soins des différents membres de l’équipe interdisciplinaire
visent une meilleure qualité de vie et une mort paisible pour les patients. Ainsi,
l’intégration de l’interdisciplinarité, dans la pratique des soins palliatifs, contribue à
l’amélioration de l’approche globale des soins fournis aux patients en fin de vie. Ces
résultats avaient été rapportés antérieurement par Jacquemin (2009), qui a souligné
l’intérêt de l’interdisciplinarité pour une prise en charge globale du patient.
D’ailleurs, Jacquemin (2009) soutient que l’interdisciplinarité, qui concerne l’ensemble
des professionnels, trouve une place centrale dans la pratique des soins palliatifs. À travers
l’interdisciplinarité, la pratique en soins palliatifs pourrait rencontrer au mieux la globalité
des besoins du patient, aussi bien physiques que psychologiques, sociaux et spirituels. Ces
propos sont corroborés aussi par les résultats de l’étude qualitative de Johnson et al. (2011)
menée auprès de 35 infirmières, de trois médecins et de sept autres professionnels de la
santé impliqués dans la prestation des soins palliatifs. En effet, les participants de cette
étude incitent à promouvoir l’interdisciplinarité par une approche holistique des soins
palliatifs. À ces écrits s’ajoute l’étude qualitative de Klarare, Hagelin, Fürst, et Fossum
(2013) qui a exploré l’interaction entre les membres de l’équipe interdisciplinaire en soins
palliatifs auprès de 15 professionnels de la santé provenant de trois équipes spécialisées
en soins palliatifs. Les données ont été recueillies à l’aide d’entrevues semi-structurées.
31
Les résultats montrent l’importance de la collaboration et de la coordination entre les
membres de l’équipe pour résoudre les problèmes dans une perspective holistique des
soins. La communication s’avère essentielle aussi bien entre les membres de l’équipe
qu’avec le patient et sa famille.
D’un autre côté, Tremblay et al. (2011) ont évalué dans leur étude quasi expérimentale,
les effets de l’ajout d’une équipe interdisciplinaire en soins palliatifs. Cette étude a été
effectuée auprès de 2000 patients et 100 professionnels de la santé, afin d’évaluer les effets
du travail en interdisciplinarité sur l’expérience de soins des patients atteints de cancer et
sur l’expérience de travail des professionnels de la santé œuvrant dans des équipes de
cancérologie. L’échantillon randomisé a été constitué à partir de 12 équipes
interdisciplinaires au Québec. L’intensité de l’équipe interdisciplinaire constituait la
variable indépendante. Les variables dépendantes correspondaient à l’expérience des
soins des patients et l’expérience de travail des professionnels de la santé. Les effets de
l’interdisciplinarité ont été mesurés à partir de questionnaires auto administrés à T1 et T2.
Les résultats montrent deux niveaux d’interdisciplinarité ; des scores élevés allant de 7,88
à 9,75 et d’autres moins élevés variant entre 4,08 et 6,17. Pour mesurer les variables
dépendantes, un questionnaire a été adressé aux patients portant sur leurs perceptions de
l’expérience de soins à la clinique de cancérologie. À cela s’ajoutent le profil
sociodémographique et les caractéristiques cliniques des patients. Les résultats montrent
que dans les milieux où le niveau d’interdisciplinarité est élevé, les patients ont une
perception positive de la promptitude des soins et de leurs habiletés d’autosoins acquises
suite à des interventions de l’équipe interdisciplinaire. Les aspects les plus appréciés par
les patients sont la continuité des soins et la qualité de l’environnement physique, suivies
par la communication et les soins centrés sur la personne. De même, les résultats de l’étude
montrent que dans les équipes où le niveau d’interdisciplinarité est élevé, les patients
tendent à recevoir des soins de qualité centrés sur la personne et répondant à leurs besoins
complexes. Quant aux professionnels de la santé, outre le profil sociodémographique et
les caractéristiques professionnelles, le questionnaire portait sur leurs perceptions et
attitudes en regard du travail en interdisciplinarité. Les résultats de l’étude ne révèlent pas
32
de différence significative entre les attitudes et les perceptions des professionnels quel que
soit le niveau d’interdisciplinarité.
L’opinion d’experts libanais en soins palliatifs va dans le même sens. En effet, Naccache
et al. (2008) précisent que la mise en œuvre efficace de soins palliatifs de qualité nécessite
un travail en équipe interdisciplinaire par des professionnels de santé de plusieurs
disciplines pour accroître l’efficacité des soins, dans la prise en charge des patients en fin
de vie.
Leclerc et al. (2014) ont effectué une revue systématique portant sur l’efficacité des
équipes interdisciplinaires sur les soins palliatifs de fin de vie. Les résultats de cette revue
systématique rappellent le manque de données probantes fiables sur le sujet, où seulement
quatre études ont répondu aux critères d’inclusion déterminés. Leclerc et al. (2014) ont
souligné le point de vue des acteurs clés sur le degré d’intégration du fonctionnement
interdisciplinaire dans les équipes de soins. Les conclusions des auteurs appuient la
contribution des équipes interdisciplinaires dans l’amélioration de la satisfaction des
patients en soins palliatifs.
En résumé, l’interdisciplinarité en soins palliatifs procure des bénéfices notables pour le
système de soins et les usagers. En effet, cette interdisciplinarité est considérée comme un
élément clé pour la pratique des soins palliatifs en fin de vie, en particulier par l’interaction
et la communication entre les professionnels, la prestation de soins de qualité ainsi que
l’approche holistique dans les soins. Mais qu’en est-il du rôle de l’infirmière au sein de
l’équipe interdisciplinaire ?
2.2.3 La pratique infirmière au sein d'une équipe interdisciplinaire
La littérature recensée n'a pas permis de trouver des recherches qui ont examiné la pratique
infirmière au sein d’une équipe interdisciplinaire en soins palliatifs, mais plutôt des écrits
théoriques et des recommandations de grandes associations professionnelles. Ces deux
derniers laissent voir que parmi les membres de l’équipe interdisciplinaire, l’infirmière
33
occupe une place centrale dans la prise en charge du patient et de sa famille (Foucault &
Mongeau 2004 ; SFAP, 2013 ; Zerwekh, 2010).
De par l’essence même de sa profession et de sa présence continue auprès du patient,
l’infirmière joue un rôle pivot en soins palliatifs (Foucault & Mongeau, 2004 ; SFAP,
2013). Le rôle de l’infirmière dans l’équipe interdisciplinaire s’articule particulièrement
autour de l’approche collaborative interdisciplinaire, de la relation thérapeutique avec le
patient et de la prestation des soins. L’infirmière remplit son rôle grâce à son expertise et
ses connaissances en soins palliatifs. Selon la SFAP (2009), les infirmières sont des
membres à part entière des équipes de soins palliatifs. À ce sujet, la SFAP (2009) affirme
que : « l’infirmière effectue des évaluations et des interventions judicieuses et détermine
des objectifs pour les soins. Elle surveille l’état de santé et l’évolution de la maladie de la
personne et répond à ses besoins complexes, touchant plusieurs dimensions des soins
palliatifs » (SFAP, 2009, p.7).
Dans le cadre de son rôle de collaboration, l’infirmière assure la fonction principale de
liaison entre les différents partenaires de soins, en particulier le médecin, et souvent entre
l’équipe interdisciplinaire et les proches du patient (ACSP, 2012 ; SFAP, 2013). Dans le
cadre de sa collaboration avec ses collègues qui sont dans d’autres domaines, comme les
infirmières en oncologie, l’infirmière de l’équipe interdisciplinaire joue un rôle primordial
en les aidant à surmonter la peur d’approcher un mourant et en précisant les soins de
confort à mettre en place pour réaliser des soins palliatifs de qualité (SFAP, 2013). Elle
assume un rôle de participation en matière de soins cliniques, surtout dans le soulagement
efficace de la douleur qui fait partie intégrante de la sécurité du patient en soins palliatifs.
De par son rôle dans l’équipe interdisciplinaire, elle participe à l’élaboration de politiques
et au questionnement éthique en équipe (Jacono et al., 2009 ; Zerwekh, 2010). Cette
collaboration est initiée par le respect de la complémentarité interdisciplinaire, afin
d’assurer la continuité des soins et une prise en charge holistique du patient et de son
entourage. Selon le Centre national de ressources de soins palliatifs (CNRSP, 2014) en
France, l’infirmière participe à la coordination des soins au sein de l’équipe
34
interdisciplinaire et au projet de retour du patient à domicile. D’ailleurs, c’est l’infirmière
de l’équipe interdisciplinaire qui favorise le transfert d’information vers ses pairs, en
partageant ses observations cliniques ou en orientant le patient vers un autre professionnel
de l’équipe. Le maintien de la communication entre les membres de l’équipe est également
de son ressort.
En définitive, l’infirmière de l’équipe interdisciplinaire est une personne ressource qui a
une double fonction. Elle aide, d’une part, à la diffusion des soins palliatifs et apporte,
d’autre part, un soutien psychologique aussi bien à l’équipe qu’au patient et à sa famille
(CNRSP, 2014). Au niveau relationnel, son rôle consiste à accompagner le patient et sa
famille dans leur parcours de fin de vie et à établir une relation thérapeutique. Elle fait
preuve d’empathie, de respect de soi et des autres et développe des attitudes propices pour
l’établissement d’une relation de confiance avec le patient en fin de vie (Foucault &
Mongeau, 2004). En réalité, honorer la personne jusqu’aux derniers moments se manifeste
à travers des attitudes de caring en particulier, et ce en respectant sa dignité et en
l’accompagnant comme une personne humaine (Guay et al., 2011).
2.3 L’approche du caring en soins palliatifs
Tel qu’il est énoncé dans les normes canadiennes de pratique en soins infirmiers palliatifs,
le rôle de l’infirmière en soins palliatifs repose sur des habiletés découlant de l’approche
humaniste des soins (ACSP, 2012). Ces habiletés rejoignent, selon Foucault et Mongeau
(2004), l’approche humaniste du caring, par l'alliance qui se crée entre l’infirmière et la
personne soignée lors de la pratique en soins palliatifs en fin de vie. Cette alliance
thérapeutique consiste à développer une approche humaniste, en promouvant des attitudes
de caring propices aux soins palliatifs, spécifiquement par l’accompagnement en fin de
vie, le respect du confort, la présence, le maintien de la dignité et la communication
(Foucault & Mongeau, 2004).
D’ailleurs, la notion d’accompagnement a été définie par la SFAP (2013) comme une
approche alliant les soins techniques et la dimension relationnelle. Cette relation est
assurée lorsque l’infirmière se centre sur la personne soignée, communique avec elle et
35
lui assure une présence et un soutien dans les moments difficiles (SFAP, 2013).
L’accompagnement engage le soignant en tant que personne dans une relation ancrée dans
le champ des valeurs humaines empreintes de caring. Effectivement, plusieurs écrits
scientifiques confirment l’importance de la pratique du caring en soins palliatifs auprès
des personnes en fin de vie (Andersson, Salickiene, & Rosengren, 2016 ; Betcher, 2010 ;
Fortin & Bouchard, 2009 ; Guay et al., 2011 ; Kourkouta & Papathanasiou, 2014 ;
Pennbrant, Tomaszewska, & Paentilӓ, 2015 ; Poirier & Sossong, 2010 ; Zheng et al.,
2015).
Fortin et Bouchard (2009) ont mené une étude phénoménologique, qui avait pour but de
décrire l’expérience du caring auprès des infirmières œuvrant dans des unités de soins
curatifs. Des entrevues semi-structurées ont été réalisées auprès de cinq infirmières
travaillant dans des unités de soins curatifs d’un centre universitaire montréalais et ayant
soigné au moins une personne en fin de vie au cours des trois derniers mois. L’analyse
des résultats, basée sur la méthode de Giorgi, a fait ressortir le pouvoir des infirmières
d’exercer les soins palliatifs selon des fondements humanistes. Les participantes ont
communiqué que l’expérience de soigner une personne en fin de vie leur offrait
l’opportunité d’exercer leurs habiletés relationnelles de soin par l’accompagnement. Un
accompagnement qui se réalise par l’empathie, l’écoute et la compassion en utilisant une
approche humaniste de caring. Les infirmières ont réalisé l’importance de cette approche
sur les patients en fin de vie, et elles se sentaient valorisées par ce travail.
En outre, selon Fortin et Bouchard (2009), soigner une personne en fin de vie et maintenir
sa dignité avant et après son décès sont considérés par les infirmières comme une
expérience enrichissante pour elles, comme une occasion de réflexion sur la condition
humaine et comme le témoignage d’un sens de la vie et de la mort. Bien que Fortin et
Bouchard (2009) présentent et interprètent leurs résultats selon les fondements humanistes
du caring, aucune indication ne permet de déterminer sur quel auteur ou théoricien du
caring ils se sont appuyés. Malgré les limites relevées par les auteurs de cette recherche
en lien avec la taille restreinte de l’échantillon, les résultats de l’étude ont pu fournir une
compréhension de l’expérience vécue par ces infirmières.
36
Les propos de ces infirmières sont notamment, partagés par d’autres auteurs (McCallum
et McConigley, 2013 ; Silva et al., 2014 ; Zheng et al., 2015) qui considèrent que le caring
pour des patients en fin de vie a des bénéfices sur soi-même, s’il est vécu comme une
expérience unique et profonde. En effet, ces résultats sont corroborés par ceux de l’étude
qualitative effectuée en Chine par Zheng et al. (2015), qui visait à décrire l’expérience de
caring de 28 infirmières en oncologie auprès des personnes en fin de vie. Parmi les thèmes
du caring qui ont émergé de l’analyse, celui de l’accompagnement du patient reste à
souligner. Cet accompagnement permet de préserver la dignité du patient et de répondre
à ses souhaits finaux. Il représente également l’un des aspects favorisant une mort paisible.
De plus, les résultats montrent que cette expérience du caring avec les patients en fin de
vie aide les infirmières à réfléchir sur le sens de la vie et de la mort. Les infirmières
participantes perçoivent qu’elles ont fait preuve de soutien psychologique, de compassion
et d’empathie envers la famille qui expérimente, à son tour, l’épuisement physique et
émotionnel.
De plus, le caring incite le soignant à assurer le maintien du confort concernant le patient
en fin de vie. En effet, McCallum et McConigley (2013) ont mené une étude descriptive
et exploratoire pour décrire l’expérience du caring de cinq infirmières œuvrant dans une
unité de soins critiques auprès de patients mourants. Malgré la taille limitée de
l’échantillon, les auteurs indiquent que l’environnement clos de l’unité de soins critiques
a permis de mettre en relief le rôle de l’infirmière en tant que protectrice du patient et de
sa famille pour maintenir son confort. Plus récemment, Dong et al. (2016) ont mené une
étude qualitative en Chine auprès de 15 médecins et 22 infirmières, pour explorer leur
expérience et leurs perceptions de caring dans la pratique des soins palliatifs. Les résultats
de l’étude démontrent l’importance d’assurer le confort physique du patient mourant.
Également, Silva et al. (2014) ont effectué une étude phénoménologique au Brésil, dans
le but de comprendre la perception de l’équipe soignante en oncologie sur la pratique des
soins palliatifs. Les résultats des entrevues et de l’observation auprès de 21 infirmières
indiquent que le maintien du confort constitue une priorité et un fondement pour un soin
humain et respectueux du patient.
37
A cela s’ajoute un autre aspect du caring soit, l’importance de maintenir une présence
auprès du patient en fin de vie et de ne pas le laisser mourir seul, en cas d’absence de la
famille. Une étude descriptive exploratoire a été menée par Fridh et al. (2009) pour
explorer les perceptions de neuf infirmières suédoises auprès de patients mourants aux
soins intensifs. Les résultats de l’étude montrent que l’expérience de leur pratique de
caring se manifeste par la présence de l’infirmière en cas d’absence de personnes
significatives et d’accompagnement de la famille. Les résultats de Fridh et al. (2009) sont
évoqués dans l’étude de Guay et al. (2011), qui rapportent qu’aucun patient ne devrait
mourir seul et qu’en l’absence de la famille, l’infirmière doit jouer le rôle de substitut.
Autre facteur clé, la communication, semble être fondamental à l’approche de caring.
D’ailleurs, selon Betcher (2010), le développement d’une relation de confiance avec le
patient requiert une communication efficace au sein de l’approche humaniste de caring en
soins palliatifs. L’auteur a élaboré un programme de formation visant à développer les
compétences de communication des infirmières auprès de personnes en fin de vie dans un
hôpital de 208 lits en Amérique du Nord. Ce programme avait pour finalité d’aider les
infirmières à communiquer avec les patients et leur famille avec efficacité et compassion.
L’évaluation du programme montre que les infirmières ont développé des habiletés dans
la capacité de transmettre une attitude de caring, et ont pu répondre aux besoins du patient
par une relation de confiance à travers la communication. Dans la même veine, Kourkouta
et Papathanasiou (2014) ajoutent qu’une bonne communication entre l’infirmière et le
patient demeure essentielle pour la prestation d’un soin humain individualisé et de qualité
au patient. Également, une autre étude phénoménologique réalisée en Suède par Pennbrant
et al. (2015) auprès de six infirmières en oncologie avait comme but de décrire
l’expérience de caring des infirmières auprès de patients en stade palliatif. L’analyse des
résultats a identifié le thème du développement des compétences en communication,
comme un principe majeur en soins palliatifs. Les infirmières interviewées déclarent que
la qualité de la communication dépend de la nature de leur relation avec le patient et du
degré de confiance dans cette relation. Elles ajoutent que la réponse aux besoins des
patients devient plus efficace si les infirmières créent une bonne communication avec le
patient.
38
Dans une étude plus récente menée par Andersson et al. (2016), le thème central s’est
avéré l’implication dans le processus de caring. Même si le but de l’étude se rapproche
de celui de l’étude Pennbrant et al. (2015) menée dans le même pays, les résultats
d’Andersson et al. (2016) ne rapportent pas les mêmes conclusions. En effet, la recherche
qualitative d’Andersson et al. (2016) menée en Suède, visait aussi à décrire l’expérience
des infirmières relative à la pratique de caring en fin de vie. Six entrevues avec des
infirmières ont été menées. Les résultats de l’étude montrent que les infirmières décrivent
qu’elles se voient engagées dans le processus de caring lors de situations de soins en fin
de vie, par le soutien au patient et sa famille. Toutefois, bien que ces deux écrits cherchent
à décrire et comprendre l’approche de caring des infirmières au sein de leur pratique, il
n’en demeure pas moins que ces auteurs n’ont pas utilisé un cadre de recherche sur le
caring dans leur étude.
Les perceptions de caring entre les patients et les infirmières de l’unité d’oncologie ont
également porté notre attention. Ces perceptions ont été décrites, en 2010, par deux études
descriptives comparatives (Poirier & Sossong, 2010 ; Zamanzadeh, Azimzadeh, Rahmani
& Valizadeh, 2010). D’ailleurs, les résultats de l’étude de Poirier et Sossong (2010),
auprès de 19 patients et 15 infirmières au sein de l’unité d’oncologie, révèlent une
différence entre les perceptions des patients et celles des infirmières par rapport au caring.
Ces résultats montrent que les infirmières attribuent des niveaux élevés à leurs propres
comportements de caring, notamment par leurs relations interpersonnelles. En effet, les
infirmières perçoivent aider le patient à se sentir chez lui, respecter sa vie privée et tenter
d’atténuer leurs malaises. Quant aux perceptions des patients, ces derniers soutiennent que
les infirmières répondent plus à leurs besoins techniques qu’à leurs besoins affectifs ou
spirituels. Contrairement aux résultats de Poirier et Sossong, Zamanzadeh et al. (2010)
ont recruté 200 patients et 40 infirmières. Les résultats présentent des perceptions de
caring similaires entre les deux groupes, notamment en matière de relations
interpersonnelles empreintes de confiance entre l’infirmière et le patient, et de
disponibilité.
39
Bien que Zamanzadeh et al. (2010) se sont référés à la théorie de Watson (1979) dans la
recension des écrits pour décrire le caring, aucun cadre de référence ne soutient leur étude.
Par contre, la force de l’étude de Poirier et Sossong (2010) est son ancrage disciplinaire
par l’utilisation de la théorie du caring de Jean Watson. En effet, très peu d’études, parmi
celles recensées, ont utilisé une théorie du caring pour guider leur recherche sur le caring,
et par la suite leur pratique en soins palliatifs.
En bref, par une approche humaniste et des attitudes de caring propices aux soins
palliatifs, les infirmières assurent l’accompagnement du patient en fin de vie, le respect
de son confort, la présence, le maintien de la dignité et de la communication lors de la
pratique infirmière en soins palliatifs. Néanmoins, de nombreux facteurs entrent en jeu
pour faciliter ou entraver cette pratique infirmière. Les paragraphes qui suivent en
exposent quelques-uns.
2.4 Les facteurs contraignant ou facilitant la pratique infirmière en soins
palliatifs
Les facteurs contraignant ou facilitant la prestation des soins palliatifs par les infirmières
peuvent être regroupés, selon les écrits scientifiques, sous trois catégories: professionnels,
organisationnels et émotionnels (Fillion & Saint Laurent, 2003; Fortin & Bouchard, 2009 ;
Fridh et al., 2009; Gross, 2006 ; Jacono et al., 2009 ; Johnson et al., 2011 ; Klarare et al.,
2013 ; McCallum & McConigley, 2013 ; McCourt, et al., 2013).
2.4.1 Les facteurs contraignants et les facilitateurs professionnels
Les facteurs professionnels associés aux exigences de la pratique des soins palliatifs
comprennent plusieurs éléments, notamment 1) les décisions divergentes relatives à la
prestation des soins palliatifs ; 2) la résistance médicale ; 3) le manque de temps ; 4) le
manque de connaissances et de formation ; 5) les difficultés de communication, ainsi que
6) le manque de collaboration interdisciplinaire ou avec la famille.
40
2.4.1.1 Les décisions divergentes
Les professionnels de la santé sont souvent confrontés à des barrières liées à des décisions
divergentes durant la phase de transition vers les soins palliatifs. En effet, deux études,
l’une phénoménologique menée auprès de cinq infirmières (Fortin & Bouchard, 2009), et
une autre descriptive qualitative menée auprès de six infirmières (Andersson et al., 2016),
indiquent que les infirmières sont souvent confrontées à des décisions qui vont à
l’encontre de leurs attentes. Ces décisions peuvent découler de plusieurs situations, dont
entre autres, de l’exposition des patients à l’acharnement thérapeutique, de la poursuite
des traitements actifs, ou encore des procédures invasives inappropriées qui augmentent
la souffrance du malade, indépendamment de la mort imminente (Andersson et al., 2016 ;
Fortin & Bouchard, 2009). En effet, les infirmières participantes à l’étude de Fortin et
Bouchard (2009) déclarent qu’elles sont souvent témoins de situations d’acharnement
thérapeutique et d’interventions de réanimation qu’elles jugent futiles (Fortin &
Bouchard, 2009). Elles déclarent également, qu’elles doivent appliquer des soins
douloureux et agressifs aux patients en stade terminal qui vont parfois à l’encontre de leurs
valeurs et éthique professionnelle. Elles perçoivent des interventions, tels que des prises
de sang ou des investigations en fin de vie, comme étant de la torture pour les patients. Ce
malaise a été évoqué également aussi par les infirmières participantes de l’étude
d’Andersson et al. (2016), qui ont considéré ces soins comme inappropriés pour le
maintien de la qualité de vie et comme une atteinte à la dignité des patients. Bref, ces
interventions génèrent chez les infirmières un véritable inconfort et un sentiment d’être
déchirées entre défendre les intérêts du patient et maintenir une bonne relation avec les
membres de l’équipe.
Les résultats de ces deux études semblent similaires, notamment dans la prestation
d’interventions futiles pour maintenir la vie des patients en fin de vie. Toutefois, quelques
différences peuvent être notées. D’un côté, Andersson et al. (2016) évoquent une barrière
qui n’avait pas été identifiée par Fortin et Bouchard (2009), à laquelle les infirmières font
face lors de leur pratique en soins palliatifs, celle de leur faible participation au processus
décisionnel avec les médecins. D’un autre côté, les cinq infirmières interviewées de Fortin
et Bouchard (2009) sentent que les soins curatifs passent en premier dans l’échelle de
41
priorité des soins, et que les soins palliatifs sont marginalisés par l’équipe de soins. Elles
disent qu’elles ont de la difficulté à soigner deux clientèles différentes dans une même
unité. En effet, elles se sentent tiraillées entre le désir de prodiguer des soins palliatifs et
celui de répondre aux besoins urgents des patients en phase aiguë.
2.4.1.2 La résistance médicale
D’autres écrits évoquent des facteurs professionnels liés à la résistance des médecins à
l’égard des soins palliatifs. Ces obstacles affectent surtout le moment où débutent les soins
palliatifs, et empêchent que ces soins puissent être débutés précocement. En effet, dans
leur étude auprès des professionnels de la santé, Lofandjola Masumbuku et Coppieters
(2014) révèlent que les médecins au Congo hésitent à aborder les soins palliatifs, ce qui
serait dû au « caractère paternaliste de la relation médicale » (p.85). Les auteurs ajoutent
que cette résistance médicale est accompagnée d’une réticence de la famille quant aux
soins palliatifs. Cette attitude se manifeste en particulier, quand il s’agit de l’utilisation de
la morphine, ce qui signifie pour la famille « une mort certaine ou une précipitation douce
vers la mort » (p.85).
Les résultats concernant la résistance médicale aux soins palliatifs, rejoignent ceux de
l’étude de Fortin et Bouchard (2009) qui soutiennent que certains médecins hésitent de
prescrire des sédatifs et évitent d’entrer dans la chambre du patient en fin de vie. De plus,
les auteurs décrivent le manque de soutien médical envers les infirmières, et ajoutent que
celles-ci se voient obligées d’accentuer les demandes auprès des médecins pour obtenir
une intervention thérapeutique convenable contre la douleur en fin de vie.
2.4.1.3 Le manque de temps
À ces facteurs s’ajoutent d’autres en lien avec le manque de temps alloué aux soins
palliatifs. D’ailleurs, les propos consensuels des cinq infirmières participantes à l’étude
phénoménologique de Fortin et Bouchard (2009) le confirment. Elles sentent qu’elles ne
peuvent pas accorder la durée de temps requise pour réaliser des soins palliatifs de qualité,
ou pour assurer une présence auprès des patients et de ses proches. Ce temps est souvent
42
« escamoté au profit des personnes traitées en soins aigus » (p.113), ce qui contribue à
leur frustration de ne pas fournir la qualité des soins à laquelle le patient aurait droit.
Ces résultats se rapprochent de ceux de l’étude qualitative d’Andersson et al. (2016), qui
a été conduite auprès de six infirmières en Suède. Les résultats des entrevues avec les
infirmières, qui visaient à décrire leur expérience quant à la pratique du caring en fin de
vie, montrent qu’elles se sentent déchirées entre la contrainte du temps et leurs
responsabilités dans la pratique des soins. Cette situation s’aggrave en cas de prise en
charge de plusieurs patients. Les infirmières affirment par ailleurs, qu’elles éprouvent un
sentiment de frustration pour équilibrer le temps entre le curatif et le palliatif, et sentent
également une inadéquation dans les soins aux patients par manque de temps.
Une autre étude, celle-ci quantitative, a été menée par Beckstrand, Colette, Callister et
Luthy (2012), avec un échantillon aléatoire de 1005 infirmières œuvrant en oncologie
auprès de patients atteints de cancer. Cette étude cherchait à déterminer l’impact des
obstacles et des facteurs facilitants sur la prestation des soins en fin de vie, selon les
perceptions des infirmières en oncologie. Les résultats de Beckstrand et al. (2012) ont
montré que le manque de temps ou le fait d’être appelé auprès d’autres patients, avec des
traitements et des diagnostics différents, sont considérés comme des barrières pour fournir
un soin de qualité en fin de vie.
2.4.1.4 Le manque de formation
À ces facteurs professionnels s’ajoute le manque de connaissances et de formation des
infirmières à la pratique des soins palliatifs. Cet aspect a fait l’objet de plusieurs
publications provenant de différents pays (Andersson et al., 2016 ; Beckstrand, et al.,
2012 ; Dong et al. 2016 ; Fillion & Saint-Laurent, 2003 ; Fortin & Bouchard, 2009 ;
Jacono et al., 2009 ; Lofandjola Masumbuku & Coppieters, 2014 ; Maharaj & Harding,
2016 ; McCourt, Power, & Glackin, 2013; Peterson et al., 2010 ; Rassouli & Sajjadi,
2016 ; Razban et al., 2013 ; Silberman et al., 2015 ; Spence et al., 2010 ; Zheng et al.,
2015). D’ailleurs, selon les opinions d’experts, la plupart des infirmières n’ont pas de
connaissances spécifiques et n’ont pas reçu la formation requise pour apporter le soutien
43
nécessaire aux patients en fin de vie et à leur famille. Dans ce sens, Carstairs (2010), dans
le rapport du Comité sénatorial au Canada, met en évidence le manque de formation et
d’expérience des infirmières dans ce domaine. Il fait de même référence, à la nécessité
d’une formation adéquate de l’équipe interdisciplinaire en soins palliatifs. Également,
l’ACSP (2011) évoque la déficience au niveau de la formation des professionnels de la
santé dans ce domaine. Dans la même orientation, le WHO et la WPCA (2014) mettent
en évidence l’importance de lever les obstacles sur les soins palliatifs, en particulier celui
du manque de formation des professionnels de la santé en soins palliatifs, et considèrent
cet aspect comme étant l’un des facteurs limitant l’accès à des soins palliatifs dignes. Ces
derniers ajoutent que les professionnels de la santé se doivent de s’approprier de
meilleures connaissances scientifiques pour assurer le développement de leurs
compétences en soins palliatifs, et par conséquent, fournir une meilleure qualité de soins
en fin de vie.
Ces opinions sont aussi appuyées par diverses revues des écrits. D’ailleurs, les
professionnels de la santé manifestent eux-mêmes des besoins de formation en soins
palliatifs afin de développer leurs compétences dans ce domaine. En effet, Abu-Saad
Hujjer et Dimassi (2007) ont effectué une étude descriptive quantitative auprès de 1873
infirmières et 1884 médecins, dans le but de déterminer l’état des connaissances, des
attitudes et des pratiques des médecins et des infirmières en matière de soins palliatifs au
Liban. Ils cherchaient également à évaluer leurs besoins et à identifier les meilleurs
modèles pour rendre de tels services. Les résultats ont révélé que seulement 16,7% des
infirmières et 12,3% des médecins ont reçu une formation de base en soins palliatifs.
Toutefois, 93% des infirmières et 96% des médecins étaient en mesure d’identifier les
objectifs des soins palliatifs. Quant à l’évaluation des besoins de formation, les
participants ont manifesté l’importance de développer leurs compétences dans ce
domaine, et jugent nécessaire d’implanter des programmes d’éducation et de formation
continue en soins palliatifs (Abu-Saad Huijer & Dimassi, 2007).
Également, l’analyse des études recensées par Maharaj et Harding (2016) identifie aussi,
parmi les thèmes récurrents, un manque de connaissances et de formation pratique des
44
professionnels de la santé en soins palliatifs. La revue des écrits de Mc Court et al. (2013)
avait confirmé que le manque de formation et de connaissances des infirmières constituait
une des barrières significatives à la prestation de soins palliatifs holistiques pour les
patients et leur famille. Une autre revue de littérature menée par Rassouli et Sajjadi (2016)
évoque la difficulté des infirmières œuvrant en oncologie en Iran à participer aux
programmes de formation en soins palliatifs à l’instar des médecins, en raison notamment,
de problèmes linguistiques et organisationnels. À titre d’exemple, le manque d’accès à
l’Internet et aux ressources électroniques nuit à la participation de ces infirmières aux
programmes de formation.
Ces propos sont de même repris par l’étude de Fortin et Bouchard (2009), citée
précédemment. Ceux-ci rapportent que les participantes se sentent mal préparées à faire
face aux différentes situations en fin de vie et incapables de gérer les divers symptômes
spécifiques. Elles évoquent un manque de connaissances marqué en soins palliatifs et
disent n’avoir reçu aucune formation dans ce domaine. Ces résultats sont soutenus par
Zheng et al. (2015) qui, à leur tour, ont mené une étude qualitative descriptive en Chine
auprès de 28 infirmières en oncologie pour décrire l’expérience de caring auprès des
personnes en fin de vie. Les résultats dévoilent un manque de connaissances et une
incapacité à fournir des soins de fin de vie, par manque de formation. Les infirmières
participantes ont mis en évidence des lacunes au niveau de leurs connaissances en soins
palliatifs. Elles se voient insuffisamment préparées pour l’accompagnement des patients
en fin de vie et de leur famille, et disent qu’elles font de leur mieux pour y arriver. De
même, les infirmières perçoivent l’accompagnement des patients en fin de vie parmi les
responsabilités les plus complexes et les plus douloureuses auxquelles elles doivent faire
face dans leur pratique (Jacono et al., 2009). C’est également ce que rapportent les
résultats de l’étude de Beckstrand, et al. (2012). Ces derniers révèlent que le manque de
formation des infirmières constitue l’un des obstacles limitant la prestation de soins
palliatifs de qualité.
De plus, les participants infirmiers et médecins de l’étude de Lofandjola Masumbuku et
Coppieters (2014), menée en République démocratique du Congo, considèrent
45
l’inexistence dans le curriculum académique de notions relatives aux soins palliatifs,
comme un frein potentiel dans les hôpitaux à Kinshasa. Les participants ajoutent que les
compétences des professionnels de la santé en soins palliatifs semblent faibles, et que
l’activité professionnelle est la seule source de connaissances des soignants sur les soins
palliatifs. À cet effet, les professionnels de la santé ont manifesté une volonté de formation
en soins palliatifs. Les auteurs insistent sur le développement des programmes de
formation continue. Ces programmes sont considérés comme un facteur facilitant la
démarche. Ils peuvent combler les lacunes et ainsi, améliorer la qualité de la prise en
charge des patients en fin de vie. Ces formations doivent inclure, selon les auteurs, les
buts et les objectifs des soins palliatifs et la manière de les intégrer dans la prise en charge
des patients.
Par ailleurs, Dong et al. (2016) confirment les propos de Lofandjola Masumbuku et
Coppieters (2014) en ajoutant que le système d’éducation Chinois ne prépare pas les
jeunes médecins et infirmières à leur rôle pour faire face à la mort des patients, et que les
infirmières ont peu d’expertise dans la pratique des soins en fin de vie. Dong et al. (2016)
recommandent d’enrichir les connaissances et les compétences des professionnels de la
santé pour réorganiser leur vision sur les soins palliatifs. Le manque de formation en soins
palliatifs a été évoqué aussi dans les pays développés comme les États-Unis et le Canada.
En effet, les résultats de l’étude américaine, conduite par Peterson et al. (2010), évoquent
le manque de cours sur les problèmes en fin de vie dans les programmes de formation des
infirmières. Desbiens et Fillion (2011) pointent notamment, des besoins particuliers de
formation. Cette étude descriptive a été menée au Canada, auprès d’infirmières
susceptibles d’être exposées aux soins palliatifs. En effet, ces résultats montrent que les
infirmières perçoivent des besoins importants de formation dans les soins spirituels, les
enjeux éthiques ainsi que les soins psychologiques.
Les contextes de ces différentes études semblent être comparables également avec la
situation au Moyen-Orient, tout en nuançant d’autres spécificités dans les besoins de
formation. En effet, une recherche descriptive menée par Silberman et al. (2015), a évalué
les besoins en soins palliatifs auprès de 776 professionnels de la santé de 15 pays du
46
Moyen-Orient, dont le Liban. Les résultats de l’étude montrent que 86% des participants
souhaitent avoir plus de connaissances sur les soins palliatifs, afin d’assurer un
changement aux niveaux des attitudes et des pratiques. À cet effet, les répondants de
l’étude proposent l’intégration des formations sur les soins palliatifs dans les programmes
de formation générale des infirmières et des médecins, en particulier celles en lien avec
les stratégies de communication et le soutien psychologique en fin de vie. Ce besoin de
formation a été identifié également par Zheng et al. (2015) où les infirmières ont manifesté
le besoin de développer leurs compétences dans la communication. Le besoin de
formation des professionnels de la santé en soins palliatifs est repris au sein d’un autre
continent, par Johnson et al. (2011), dans leur étude conduite en Australie. Cette étude
qualitative décrit la formation comme un aspect facilitateur pour la prise en charge des
besoins du patient et de sa famille.
De manière générale, il est à noter que les études recensées dans ce chapitre sont
majoritairement qualitatives. Bien qu’elles soient très récentes et que les contextes ne
soient pas les mêmes, les résultats de ces différentes études se rejoignent pour évoquer un
même consensus. Ce consensus porte sur le fait qu’il y a un besoin de formation relatif à
la pratique en soins palliatifs dans différents pays.
2.4.1.5 Les difficultés de communication
Alors que la communication est considérée comme une pierre angulaire dans la relation
entre l’infirmière et le patient, des études identifient le déficit de communication entre les
professionnels de la santé, les médecins, la famille et les patients. Ce manque est considéré
comme l’un des facteurs entravant la pratique des soins palliatifs lors de situations
cliniques complexes (Brett, 2002 ; Goel et al., 2014; Gross, 2006 ; Scheldon et al., 2006 ;
Zheng et al., 2015). De même, la récente revue des écrits de Maharaj et Harding (2016)
met en exergue que les infirmières ont, non seulement un manque de formation pour
combler une grande partie des besoins de la personne en fin de vie, mais doivent
développer aussi des compétences nécessaires en communication pour assurer le soutien
du patient en fin de vie. Il est vrai que la communication réduit le stress psychologique en
fin de vie, mais elle n’a jamais été une tâche facile pour les infirmières avec les patients
47
mourants, selon Zheng et al. (2015). Elle est plutôt considérée comme un défi. En général,
autant les jeunes infirmières que celles plus expérimentées éprouvent des difficultés à
communiquer avec les patients en fin de vie et avec leur famille.
Dans le même ordre d’idées, Peterson et al. (2010) ont mené une étude par théorisation
ancrée, pour examiner l’expérience des infirmières et leurs préoccupations au sujet du
prendre soin d'un patient mourant. C’est à partir d’entrevues individuelles, en face à face
ou en ligne, que 15 infirmières ont participé à la collecte des données. Bien que la
participation en ligne de ces infirmières ait fourni des réponses similaires à celles des
entrevues individuelles, cette méthode de collecte des données comporte des limites. Ces
limites sont dues, d’une part, aux réponses incomplètes concernant les questions ouvertes
et, d’autre part, au manque d’opportunité de retour aux participantes pour validation.
Néanmoins, les résultats mis en avant par Peterson et al. (2010) mettent l’accent sur les
préoccupations personnelles des infirmières quant aux difficultés de communication avec
le patient et sa famille. En effet, les résultats de cette étude montrent que pour amorcer un
partenariat de collaboration, cela exige de l’infirmière des aptitudes à la communication
et aux relations interpersonnelles. D’ailleurs, les infirmières participantes craignent que
leur manque d’expérience puisse causer des difficultés de communication à plusieurs
niveaux, soit aussi bien avec le patient et sa famille qu’avec les autres professionnels
(Peterson et al., 2010). Il est à souligner que cette notion n’a pas été évoquée par d’autres
auteurs.
Dans ce contexte, la communication ne se limite pas à l’interaction avec le patient,
l’infirmière est aussi concernée par la communication et la collaboration avec la famille.
Plusieurs écrits scientifiques ont évoqué des difficultés de communication avec la famille
(Beckstrand, Moore, Callister, & Bond, 2009 ; Gross, 2006 ; Peterson et al., 2010). Ces
auteurs considèrent qu’il est difficile de faire face à la colère de la famille qui n’accepte
pas le mauvais pronostic du patient. Les résultats de ces études sont confirmés par ceux
de Spence et al. (2010) qui eux, cherchaient à évaluer les besoins des patients cancéreux
en Jamaïque. Cette étude avec devis mixte a utilisé des questionnaires auprès de 81
patients et 51 aidants naturels ainsi que des entrevues de groupe auprès des professionnels
48
de la santé. Les résultats de l’étude montrent que le manque de communication entre les
différents professionnels de la santé constitue une barrière considérable dans la prestation
de soins pour les patients atteints de cancer. Ainsi, pour combler cette barrière, les
participants de l’étude de Johnson et al. (2011) soutiennent qu’une bonne communication
représente un aspect important pour l’information, la prise de décision et l’acceptation de
la maladie par le patient et sa famille. À cet effet, les auteurs ajoutent l’importance de
développer les compétences des infirmières en communication depuis leur formation
générale jusqu’à leur insertion en milieux cliniques. Ainsi, une communication efficace
favorise une meilleure relation thérapeutique, selon l’ACSP (2013). Elle optimise, d’un
côté, la prise de décision pour la prestation des soins, et d’un autre côté, la diminution des
problèmes d’épuisement des professionnels de santé (ACSP, 2013).
En bref, plusieurs écrits scientifiques convergent sur l’efficacité de la communication pour
la prestation de soins palliatifs de qualité en fin de vie (Betcher, 2010 ; Kourkouta &
Papathanasiou, 2014 ; Malloy, Virani, Kelly, & Munévar, 2010 ; Spence et al., 2010 ;
Zheng et al., 2015). Toutefois, d’autres difficultés dont celles de collaboration
interprofessionnelle émergent dans ce même cadre.
2.4.1.6 Le manque de collaboration interdisciplinaire
Bien qu’une bonne collaboration interdisciplinaire facilite la pratique des soins palliatifs,
des difficultés de collaboration et de travail en équipe ont été identifiées (Beckstrand, et
al., 2009 ; Fillion & Saint-Laurent, 2003 ; Lee, Choi, Kim, Kim, & Kim, 2013). En fait,
l’importance de la collaboration interprofessionnelle est soutenue par l’étude descriptive
mixte menée par Fillion et Saint-Laurent (2003). Cette étude québécoise avait pour but de
décrire les stresseurs liés au travail infirmier en soins palliatifs auprès d’infirmières et de
gestionnaires. La méthode de collecte de données, réalisée à travers des groupes de
discussion et des questionnaires, fut effectuée en deux phases. Dans la première phase de
l’étude, l’échantillon était constitué d’infirmières travaillant en soins palliatifs dans les
principaux lieux de prestation, soit les centres hospitaliers, les institutions spécialisées et
à domicile. Pour le volet qualitatif, 60 infirmières ont participé aux entrevues de groupe,
50 ont participé aux entrevues téléphoniques individuelles, tandis que pour le volet
49
quantitatif 214 infirmières ont répondu aux questionnaires. Dans la deuxième phase de
l’étude, 20 décideurs et gestionnaires ont participé à deux groupes de discussion. Les
résultats de l’étude montrent que les difficultés de collaboration interprofessionnelle sont
identifiées comme étant des barrières professionnelles importantes. Ces difficultés se
manifestent en particulier, entre les infirmières, les médecins, les collègues et les autres
professionnels de la santé. À cet effet, les auteurs proposent d’encourager la mise en place
d’équipes interdisciplinaires qui fournissent des soins palliatifs, selon une philosophie
commune.
Toutefois, une autre étude menée en France cette fois-ci, a montré un avis contraire sur la
collaboration interdisciplinaire, notamment que le travail d’équipe constitue pour les
infirmières un mode de soutien important en soins palliatifs (Bonnières et al., 2010). Cette
étude descriptive effectuée auprès de soignants exerçant en soins palliatifs cherchait à
analyser les déterminants de la satisfaction professionnelle de 72 médecins et 80
infirmières. Les résultats de l’étude montrent que l’interdisciplinarité est fortement
appréciée par les participants, compte tenu du niveau hiérarchique des intervenants, et ne
manque pas de points positifs sur l’amélioration de la prise en charge des patients. Les
auteurs ajoutent que cette collaboration est constructive et complémentaire.
Pour Lee et al. (2013), le manque de collaboration s’applique également à la relation entre
l’équipe interdisciplinaire et la famille du patient. Cette étude descriptive exploratoire
menée auprès de 383 infirmières coréennes avait pour but de décrire leurs perceptions
relatives aux obstacles et aux facteurs facilitant la prestation des soins en fin de vie. Les
résultats de l’étude soulignent un manque de collaboration entre l’équipe interdisciplinaire
et les proches du patient. Ces résultats correspondent aux conclusions de l’étude de
Beckstrand et al. (2009), qui ont identifié les mêmes barrières en lien avec la famille que
celles évoquées par Lee et al. (2013).
Toutefois, à ces différents facteurs professionnels s’ajoutent d’autres, qui sont en lien avec
l’organisation de l’environnement de travail.
50
2.4.2 Les facteurs contraignants et les facilitateurs organisationnels
Les facteurs organisationnels qui nuisent ou qui facilitent la pratique infirmière des soins
palliatifs sont nombreux. Certains, parmi ces derniers, sont en lien avec 1) la structure
organisationnelle et 2) l’accessibilité aux ressources humaines et matérielles.
2.4.2.1 La structure organisationnelle
Selon certaines études, les infirmières identifient l’environnement physique comme un
obstacle qui affecte l’intimité et la qualité des soins palliatifs fournis aux patients. Par
conséquent, cet environnement empêche une mort digne et paisible. Dans cette
perspective, l’étude exploratoire et descriptive de McCallum et McConigley (2013) a été
menée auprès de cinq infirmières, afin de décrire leurs perceptions sur la pratique des
soins palliatifs en fin de vie dans un centre hospitalier universitaire. L’analyse des
résultats, issus des entrevues semi-structurées, a permis de mettre en lumière des obstacles
organisationnels au niveau de l’environnement physique. Ces résultats soulignent en
particulier, le manque de chambres individuelles comme une barrière considérable pour
favoriser une intimité dans les soins et permettre la réalisation de soins palliatifs de qualité.
Ces résultats se recoupent également, avec les barrières identifiées par Fridh et al. (2009)
dans leur étude qualitative sur les perceptions de neuf infirmières auprès de patients
mourants. Les infirmières ont cité également l’environnement physique, en particulier la
présence de plus d’un patient dans une chambre, comme une barrière qui empêche
d’assurer la confidentialité de la famille avec leurs proches en fin de vie. Les participants
de l’étude soutiennent qu’une chambre à plusieurs lits limite l’opportunité, d’une part, aux
membres de la famille d’exprimer leur chagrin, et d’autre part, aux infirmières d’assurer
adéquatement les soins du patient mourant et le bien-être d’un autre patient dans la même
chambre. Dans le même ordre d’idées, le manque de chambres particulières affecte
négativement la qualité des soins fournis aux patients en fin de vie, selon McCourt et al.
(2013).
Outre le manque de chambre individuelle, les écrits mettent en évidence un facteur
organisationnel corollaire. Ce facteur facilite la prestation des soins palliatifs de qualité,
en créant un espace particulier pour la famille afin d’exprimer leur chagrin. En effet, les
51
résultats d’Iglesias, Pascual et Vallejo (2013) sont évocateurs quant au fait que les patients
et leur famille manquent d’intimité en fin de vie. Ces auteurs ont mené une étude auprès
d’infirmières expertes de soins critiques afin de décrire les obstacles et les facteurs
facilitant la prestation des soins de fin de vie. Cette étude descriptive a été conduite dans
deux unités de soins intensifs, adultes et pédiatriques, d’un hôpital en Espagne. Parmi les
472 infirmières sollicitées avec un minimum de trois mois d’expérience aux soins
intensifs, 227 ont accepté de participer à l’étude. En plus du besoin d’une chambre privée
pour les patients en fin de vie, les auteurs identifient le manque de place appropriée à la
famille pour favoriser leur intimité et réagir face à la situation de leur proche (Iglesias et
al., 2013). Ce manque d’intimité entre le patient et sa famille, évoqué par Iglesias et al.
(2013) comme une barrière, a été fortement recommandé comme un facteur facilitant, une
année plus tard, par Vedel et al. (2014). En effet, malgré que les résultats montrent que les
patients et leur famille sont satisfaits d’être ensemble aux derniers moments de leur vie,
les familles participantes à l’étude transversale de Vedel et al. (2014) ont apprécié d’avoir
un espace particulier pour la famille afin d’exprimer leur chagrin. Les résultats évoquent
la satisfaction des patients et de leur famille d’être ensemble aux derniers moments de leur
vie. De même, ces propos sont abordés dans la revue des écrits de McCourt et al. (2013).
2.4.2.2 L’accessibilité aux ressources humaines et matérielles
L’accessibilité aux ressources humaines et matérielles semble une composante essentielle
qui favorise la qualité dans la prestation des soins palliatifs. Ainsi, la surcharge de travail
et le ratio infirmière-patients empêchent l’infirmière de passer du temps avec les patients
mourants (Bonnières et al., 2010; Lofandjola Masumbuku & Coppieters, 2016 ; Poirier &
Sossong, 2010 ; Vedel et al., 2014 ; Wentlandt et al., 2016). En effet, les infirmières
participantes à l’étude descriptive comparative de Poirier et Sossong (2010) ont fait
mention de barrières en lien avec le manque de ressources humaines, qui limitent la
prestation des soins axés sur le patient en oncologie. De même, tous les participants de
l’étude (23 patients, 23 aidants naturels et 39 professionnels de la santé) de Wentlandt et
al. (2016) s’accordent pour dire que la disponibilité de l’équipe soignante est un élément
important pour un soin de qualité.
52
Par conséquent, le manque de ressources humaines contribue à la perception d’un climat
de travail défavorable en soins palliatifs. Dans ce contexte, deux exemples peuvent être
donnés : le nombre d’infirmières limité, en fin de semaine et la nuit, et les ratios élevés
patients/infirmier sont autant d’éléments qui viennent s’ajouter à la charge de travail.
Selon les auteurs (Poirier & Sossong, 2010 ; Wentlandt et al., 2016), ces éléments limitent
les soins personnalisés aux patients. De même, Vedel et al. (2014) ajoutent que les
infirmières se voient surchargées par la multiplication de responsabilités et incapables de
fournir une prise en charge suffisante pour le patient, car la priorité va avant tout aux soins
curatifs.
Dans ce sens, les infirmières de l’étude descriptive de Bonnières et al. (2010), citée
auparavant, réclament des moyens supplémentaires tels que le renforcement des effectifs
infirmiers pour une amélioration de la prise en charge des patients. De plus, les résultats
de cette étude mettent aussi en évidence des éléments pour la gestion de la charge physique
globale de travail. Ces éléments concernent en particulier, la gestion du temps et le surcroît
du travail des infirmières, ainsi que l’organisation du ratio patients-infirmière et du travail
d’équipe. Selon Bonnières et al. (2010), ces éléments pourront contribuer à une meilleure
qualité de prise en charge du patient en soins palliatifs et compenser la charge psychique
des infirmières. Ce faisant, ces mêmes auteurs ajoutent qu’une meilleure répartition des
charges dans les services et un renforcement de l’effectif sont nécessaires pour une
amélioration de l’organisation du travail des infirmières. Par ailleurs, il est à noter que les
limites de l’étude ne sont pas présentées clairement par les auteurs. Il en est de même des
implications des résultats sur la pratique clinique et sur les travaux de recherche. Ces
résultats rejoignent les propos des infirmières de l’étude de Lee et al. (2013), qui
souhaitent avoir plus de temps dans l’organisation de leur travail pour communiquer et
préparer la famille à la mort attendue de leur proche. D’autres barrières s’ajoutent à celles
déjà examinées. Celles-ci sont dues au manque de soutien des infirmières par les
gestionnaires et au manque de services consultatifs tels le service de soutien émotionnel
et de debriefing pour les infirmières après la mort du patient (McCourt et al., 2013 ; Gross,
2006).
53
Quant aux ressources matérielles, plusieurs besoins restent à combler. Le manque de
moyens thérapeutiques comme le manque d’analgésiques sont considérés comme un frein
important entravant la prestation de soins palliatifs en Afrique. D’ailleurs, parmi les
professionnels de la santé (30 médecins et 90 infirmières) participant à l’étude de
Lofandjola Masumbuku et Coppieters (2016), 70% d'entre eux considèrent que les soins
palliatifs sont des soins difficiles à appliquer par manque de ressources médicales et
techniques dans les hôpitaux de Kinshasa. Ces professionnels trouvent que le travail avec
de faibles ressources matérielles a des conséquences négatives sur la qualité des soins
fournis aux patients.
Il est vrai que le manque de ressources affecte la qualité de la prestation des soins
palliatifs, mais certaines barrières ou facilitateurs émotionnels risquent également
d’influencer la vie personnelle des infirmières.
2.4.3 Les facteurs contraignants et les facilitateurs émotionnels
Les facteurs émotionnels réfèrent surtout aux exigences émotionnelles liées à la
confrontation quotidienne avec la mort (Andersson et al., 2016 ; Bonnières et al., 2010 ;
Fillion & St Laurent, 2003 ; Pennbrant et al., 2015). En fait, selon Fillion (2011), ces
exigences sont reliées en particulier au travail dans le secteur d’oncologie et de soins
palliatifs. Elles se manifestent suite à l’exposition à la détresse et à la souffrance des
personnes atteintes de cancer et de leurs proches. Les résultats de l’étude
phénoménologique de Dong et al. (2016), menée en Chine auprès de 15 médecins et 22
infirmières vont dans le même sens. D’ailleurs, ces résultats montrent que la présence des
infirmières auprès des patients mourants augmente leur épuisement et affecte leur mobilité
professionnelle. Les infirmières interviewées ajoutent, dans leurs propos, que la mort de
leurs patients influence leur vie personnelle. Elles décrivent ainsi, le poids psychologique
comme : une grande pression psychologique ressentie, une mauvaise humeur ainsi qu’une
perturbation du rythme de leur sommeil, lors du décès du patient. Dong et al. (2016), pour
leur part, ne mentionnent pas de stratégies pour gérer la détresse émotionnelle des
infirmières œuvrant auprès des patients en fin de vie. En revanche, Pennbrant et al. (2015)
font des recommandations dans leur étude à ce niveau. Ces derniers proposent des séances
54
de soutien aux infirmières en vue d’une meilleure gestion de leurs émotions, face aux
situations stressantes vécues auprès des patients en soins palliatifs.
Toutefois, des similitudes ont été identifiées entre les deux études phénoménologiques de
Dong et al, (2016) et de Pennbrant et al. (2015) qui avaient pour but de décrire l’expérience
des infirmières œuvrant en soins palliatifs, auprès des patients en fin de vie. En effet, les
résultats mettent en évidence l’ampleur des exigences émotionnelles des infirmières liées
à la fin de vie ainsi que le manque de soutien. Les infirmières interviewées éprouvent
également un bouleversement affectif face à la souffrance des patients qui vient alimenter
la frustration et la détresse émotionnelle qu’elles peuvent ressentir. À cet effet, les
infirmières font état de leurs besoins de soutien dans la gestion de leurs sentiments et
émotions.
Selon Bonnières et al. (2010), les infirmières sont confrontées quotidiennement à la mort.
Elles expérimentent des sentiments d’impuissance, d’angoisse et de stress par le fait d’être
témoins de la souffrance physique et morale des patients sans pouvoir l’atténuer. Ce
sentiment d’impuissance a aussi été évoqué par les infirmières devant la confrontation aux
décès et aux deuils multiples dans l’étude de Fortin et Bouchard (2009). Dans ce cadre,
les infirmières expriment leur désarroi, non seulement devant la souffrance physique et
morale des patients en fin de vie, mais surtout, devant l’inéluctabilité de la mort. Elles
sont souvent témoins de la souffrance humaine et vivent des moments désagréables si elles
ne parviennent pas à soulager complètement la souffrance des patients. À cet effet, Fortin
et Bouchard (2009) ajoutent la nécessité de valoriser et de soutenir ces infirmières pour
améliorer leur qualité de vie au travail. Elles tentent ainsi de retenir leurs émotions pour
éviter de ressentir une détresse émotionnelle. En revanche, Peterson et al. (2010)
mentionnent une barrière peu traitée dans d’autres études. Celle-ci concerne la résolution
des conflits entre le patient et les membres de la famille. Ces disputes, selon les
chercheurs, portent souvent sur la décision des traitements.
Dans la même veine, et afin de gérer les sentiments de stress et de deuil après le décès du
patient, les infirmières interviewées de l’étude d’Andersson et al. (2016) décrivent leurs
55
stratégies pour y faire face. Parmi celles-ci, la prise de distance et la discussion avec les
collègues, ainsi que la nécessité du refus de l’acharnement thérapeutique sont mentionnées
(Bonnières et al., 2010). Dans un autre contexte, les infirmières œuvrant en oncologie
insistent sur l’importance de séparer leur vie professionnelle de leur vie privée, afin de
préserver leur équilibre émotionnel (Pennbrant et al., 2015).
En bref, les écrits recensés identifient des facteurs contraignant ou facilitant la pratique
infirmière en soins palliatifs. Ces écrits insistent d’une part, sur les facteurs professionnels,
organisationnels et émotionnels identifiés, qui contraignent la pratique infirmière des
soins palliatifs. Puis, d’autre part, ils mettent en exergue certains facilitateurs qui peuvent,
à leur tour, les contrebalancer. Ainsi, ces facilitateurs peuvent favoriser le déploiement de
cette pratique infirmière.
En somme, cette recension des écrits a permis de mettre en lumière des éléments de la
pratique infirmière en soins palliatifs en particulier, les soins centrés sur la personne qui
tiennent compte des besoins du patient et de sa famille et qui sont d’ordres physique,
psychologique et spirituel. De plus, l’interdisciplinarité est considérée comme un élément
clé pour la pratique des soins palliatifs en fin de vie. Cet aspect est évoqué en particulier,
par l’interaction et la communication entre les professionnels, la prestation de soins de
qualité et l’approche holistique interdisciplinaire dans les soins du patient en phase
terminale. Enfin, l’infirmière, qui représente l’un des professionnels de la santé central de
l’équipe interdisciplinaire, développe une approche humaniste. Cette approche s’incarne
en promouvant des attitudes de caring propices aux soins palliatifs, notamment
l’accompagnement en fin de vie, le maintien de la dignité et la communication. Également,
les écrits recensés identifient des facteurs contraignant ou facilitant la pratique infirmière
en soins palliatifs.
Enfin, ce chapitre a permis d’inventorier des études utilisant majoritairement des devis
qualitatifs et descriptifs, quelques devis corrélationnels, expérimentaux et mixtes ainsi que
des revues de la littérature. En effet, très peu d’études explicatives et prédictives ont été
recensées, ce qui laisse penser que les recherches dans ce domaine sont à l’étape de
56
compréhension et du développement de connaissances de la pratique infirmière en soins
palliatifs, et non pas à l’étape d’évaluation d’interventions pour une éventuelle
amélioration de cette pratique. Ce constat explique le nombre restreint d’études
expérimentales. De plus, très peu des études recensées utilisaient un cadre de référence
pour guider le développement de la recherche.
57
Chapitre 3 - Cadre de référence
Ce troisième chapitre présente le cadre de référence retenu pour guider cette étude et lui
donner une perspective théorique disciplinaire. Ce cadre intègre trois éléments : 1) le plan
directeur de développement des compétences des intervenants en soins palliatifs (MSSS,
2008); 2) les facteurs contraignant ou facilitant la mise en œuvre de la pratique infirmière
en soins palliatifs et 3) la théorie du Human Caring de Jean Watson (1979). Ces trois
éléments sont d’abord présentés, suivis du cadre de référence intégrateur et des questions
spécifiques de recherche.
3.1 Le plan directeur de développement des compétences des
intervenants en soins palliatifs
Afin de déterminer les meilleures pratiques infirmières en soins palliatifs, plusieurs
référentiels de compétences, guides et normes de pratique ont été recensés auprès de divers
organismes et associations (Association canadienne des écoles de sciences infirmières
[ACESI], 2012; Association Européenne de soins palliatifs [EAPC], 2004; Association
des infirmières et infirmiers du Canada, 2013; National Consensus Project for Quality
Palliative Care, 2009; Comité des normes en soins infirmiers de l’Association canadienne
de soins palliatifs [ACSP], 2009; Ministère de la Santé et de la Protection sociale en
France, 2004; MSSS, 2008; Société Suisse de médecine et de soins palliatifs, 2012).
Toutefois, ces différents guides et normes concernent l’Amérique du Nord et l’Europe. À
notre connaissance, aucun guide de pratique ou référentiel de compétences en soins
palliatifs n’existe au Liban ni au Moyen-Orient. Le « plan directeur de développement des
compétences des intervenants en soins palliatifs », élaboré par le MSSS du Québec en
2008, a été retenu pour encadrer la pratique en soins infirmiers palliatifs dans le contexte
de cette recherche. En effet, l’ensemble des dimensions des soins palliatifs déjà
répertoriées est présent, celles-ci sont définies clairement et comportent des éléments
opérationnels qui permettent de les repérer au sein de la pratique d’infirmières en
oncologie auprès de personnes en fin de vie, dans le cadre de cette étude.
Le plan directeur de développement des compétences des intervenants en soins palliatifs
du Québec permettra, grâce à une vision holistique, de circonscrire surtout le rôle de
58
l’infirmière. Il décrit ce qu’elle devrait être capable de faire pour soigner une personne
atteinte d’une maladie grave et situe la pratique des infirmières dans le domaine des soins
infirmiers palliatifs. À cet effet, le plan directeur (Tableau 1) propose 10 domaines de
compétence [DC], ainsi que les compétences générales et spécifiques pour chacun de ces
domaines (MSSS, 2008). Le choix des dix domaines de compétence repose sur une
recension de la littérature en soins palliatifs et sur les normes canadiennes de soins
palliatifs (Ferris et al., 2002). Parmi les dix domaines d’habiletés génériques, cinq d’entre
eux concernent des compétences relatives aux besoins fondamentaux de la personne
malade et ses proches. Il s’agit des domaines en lien avec la douleur et les symptômes, les
besoins psychosociaux et spirituels, les besoins liés à l’organisation de la vie quotidienne,
l’agonie et le décès, et enfin le deuil. Quant aux cinq autres domaines, ils concernent des
compétences relatives aux « modalités des soins », telles que la communication, la
collaboration, les questions éthiques et légales, le développement personnel et
professionnel, et enfin l’organisation des services de santé. Bien que les domaines et les
compétences générales soient transversaux et partagés par les membres de l’équipe
interdisciplinaire, les compétences spécifiques sont propres à chacune des disciplines
(MSSS, 2008).
Tableau 1
Synthèse des domaines de compétence (DC) et des compétences générales et spécifiques
des intervenants en soins palliatifs (MSSS, 2008)
Compétences générales Compétences spécifiques des infirmières
DC#1. Domaine de compétence : Douleur et symptômes
Observer, évaluer et traiter la douleur
et les symptômes.
- Collaborer avec la personne, ses proches et l’équipe
interdisciplinaire pour élaborer un plan de gestion de la
douleur et des symptômes ; évaluer, réévaluer et réviser les
objectifs et le plan de soins selon les besoins. - Comprendre les classifications de la douleur et leur
importance pour une gestion efficace / Connaître la
physiologie de la douleur.
59
DC#2. Domaine de compétence : Besoins psychosociaux et spirituels
Évaluer les besoins psychosociaux et
spirituels de la personne et de ses
proches et y répondre.
- Cerner l’impact de la maladie grave au sein de la famille et
sur tous ses membres, de même que les conséquences
sociales qui en découlent.
- Aider la personne et ses proches à accéder aux ressources
appropriées pour répondre à leurs besoins de soutien
psychologique, social et spirituel. - Accompagner la personne et ses proches dans leur adaptation
à la maladie et aux pertes qui y sont associées. DC#3. Domaine de compétence : Besoins liés à l’organisation de la vie quotidienne
Offrir un soutien à la personne et à ses
proches pour déterminer leurs besoins
liés à l’organisation de la vie
quotidienne et trouver des moyens d’y
répondre.
- Aider la personne à conserver, dans la mesure du possible, sa
capacité fonctionnelle et son autonomie.
- Reconnaître les facteurs de stress inhérents à la prestation des
soins qui entraînent l’épuisement des proches.
- Aider la personne et ses proches à accéder aux ressources
appropriées pour répondre à leurs besoins de soutien
financier et pratique. DC#4. Domaine de compétence : Agonie et décès
Procurer un soutien à la personne et à
ses proches au moment de la fin de vie.
- Prévoir et reconnaître les signes et symptômes d’une mort
imminente ; intervenir. - Connaître et appliquer les stratégies de gestion de la douleur
et des symptômes, caractéristiques des dernières heures de
vie (incluant la sédation palliative). - Aider la personne et ses proches à se préparer au moment de
la mort. - Accompagner la personne et ses proches en tenant compte de
leurs besoins. DC#5. Domaine de compétence : Deuil
Connaître les processus normaux et
atypiques de deuil. Savoir soutenir la personne et ses
proches dans ces processus.
- Connaître et comprendre les sentiments de perte et de deuil.
Reconnaître les réactions normales relatives au deuil.
Distinguer les catégories de deuils. - Aider les proches à reconnaître et prévoir leurs réactions
personnelles à la perte et à la mort, et les orienter vers des
ressources s’il y a lieu. - Reconnaître les personnes qui sont à risque de vivre un deuil
atypique et les orienter vers d’autres professionnels de
l’équipe ou du réseau. DC#6. Domaine de compétence : Communication
Communiquer efficacement avec la
personne et ses proches.
- Comprendre et appliquer les principes généraux de la
communication. - Soutenir les proches dans les situations d’annonce de
mauvaises nouvelles. - Communiquer avec clarté et précision à la personne et à ses
proches les renseignements liés aux soins. - Fournir des renseignements pertinents adaptés au stade de
développement de la personne et de ses proches sur différents
aspects relatifs à la maladie et à ses conséquences.
60
DC#7. Domaine de compétence : Collaboration centrée sur la personne et ses proches
Collaborer en tant que membre d’une
équipe interdisciplinaire. Collaborer à la continuité des soins et
des services.
- Connaître précisément les rôles de chacun des membres de
l’équipe. - Communiquer efficacement avec les membres de l’équipe.
- Utiliser une approche interdisciplinaire dans le travail avec
les membres de l’équipe en soins palliatifs et les autres
membres du personnel soignant. - Favoriser la collaboration en discutant avec les membres
appropriés de l’équipe interdisciplinaire et en dirigeant la
personne et ses proches vers ces membres. DC#8. Domaine de compétence : Questions éthiques et légales
Comprendre les dimensions éthiques et
légales pouvant influencer les services
de soins palliatifs. Collaborer aux discussions et aux
prises de décisions cliniques à
dimension éthique.
- Intégrer à sa pratique des repères éthiques et légaux
permettant d’élaborer un jugement éthique et assumer la
responsabilité de sa prise de parole, de ses décisions et de ses
actions.
- Discuter des principaux enjeux éthiques rencontrés dans la
pratique clinique et collaborer avec la personne, ses proches
et les membres de l’équipe interdisciplinaire, aux prises de
décisions cliniques comportant des enjeux éthiques. DC#9. Domaine de compétence : Développement personnel et professionnel
Être capable d’introspection.
Améliorer sa pratique clinique et
promouvoir le développement de la
profession.
- Reconnaître l’influence de ses propres valeurs et croyances
sur la prestation des soins.
- Reconnaître les facteurs de stress particuliers aux soins
infirmiers palliatifs et déterminer des stratégies d’adaptation
qui assurent le bien-être. - Reconnaître les pertes et les deuils multiples qui
s’accumulent et prendre les mesures appropriées pour s’y
adapter. - Participer régulièrement à des activités de formation et mettre
en pratique ses nouvelles connaissances en dispensant des
soins infirmiers palliatifs. DC#10. Domaine de compétence : Soins palliatifs et organisation des services de santé
Connaître les différents enjeux relatifs à
l’offre de soins palliatifs dans le
contexte québécois.
- Connaître l’évolution historique, les valeurs et les principes
du mouvement des soins palliatifs.
- Être en mesure de discuter de la structure et des modèles des
différents services de soins palliatifs qui sont offerts dans sa
région. Tiré de : « Plan directeur de développement des compétences des intervenants en soins palliatifs » ;
Ministère de la Santé et des Services Sociaux [MSSS] du Québec (2008, p.58-70).
Bref, malgré l’importance du développement des compétences des infirmières en soins
palliatifs, des facteurs peuvent entraver ou faciliter la pratique infirmière en soins palliatifs
et la prise en charge adéquate des patients en fin de vie. Les paragraphes qui suivent
décrivent une synthèse de ces facteurs.
61
3.2 Les facteurs contraignant ou facilitant la pratique infirmière en soins
palliatifs
La recension des écrits a mis en évidence des facteurs contraignant ou facilitant la pratique
infirmière en soins palliatifs (Tableau 2). Les facteurs qui entravent la pratique infirmière en soins
palliatifs ont été classés selon trois types d’ordres : professionnel, organisationnel et émotionnel.
Au niveau professionnel, ces facteurs sont en lien avec la divergence de décision et la résistance
des médecins pour la transition aux soins palliatifs, au manque de temps alloué pour les soins
palliatifs, au manque de formation spécialisée en soins palliatifs ou à la difficulté de
communication et de collaboration interdisciplinaire. Quant aux facteurs organisationnels, ils
concernent en particulier la structure organisationnelle et le manque de ressources humaines et
matérielles. Enfin, les facteurs émotionnels décrivent l’épuisement émotionnel des infirmières
face à leur confrontation quotidienne à la mort. Par ailleurs, divers facteurs facilitants ont été
identifiés. En particulier la nécessité de soutenir la décision de transition aux soins palliatifs,
d’équilibrer le temps entre le curatif et le palliatif, de favoriser le développement des
connaissances dans le domaine des soins palliatifs par une meilleure formation, d’assurer une
communication efficace et de maintenir une bonne collaboration interdisciplinaire. De même, le
fait d’assurer un environnement physique adéquat constitue un facteur organisationnel facilitant
une pratique de soins palliatifs individualisés. Quant aux facteurs émotionnels, les écrits insistent
sur l’importance de valoriser et d’assurer le soutien aux infirmières pour gérer leurs émotions afin
de préserver leur équilibre émotionnel.
Tableau 2
Facteurs contraignant ou facilitant la pratique infirmière en soins palliatifs
Types de facteurs (FA) Facteurs contraignants Facteurs facilitants
Professionnels Décisions divergentes (FA#1)
Résistance médicale (FA#2)
Manque de temps (FA#3)
Manque de connaissances
/Formation (FA#4)
Difficultés de communication
(FA 5)
Manque de collaboration
interdisciplinaire (FA#6)
Transition tôt aux soins palliatifs
dans la trajectoire de la maladie
Équilibre curatif et palliatif
Développement de
connaissances/Formations
spécifiques
Communication efficace
Développement de la collaboration
interdisciplinaire
62
Organisationnels Structure organisationnelle
(FA#7)
Manque de ressources
humaines et matérielles (FA#8)
Environnement physique adéquat
Accessibilité aux ressources humaines
et matérielles
Émotionnels Exigences/Épuisement
émotionnels (FA#9) Préservation équilibre émotionnel des
infirmières/Valorisation
En bref, le plan directeur de développement des compétences des intervenants en soins
palliatifs du Québec (MSSS, 2008) et les facteurs facilitants et contraignants guident la
compréhension de l’exercice de la pratique infirmière en soins palliatifs dans les différents
domaines de compétence des infirmières, et permettent de soutenir la discussion des
résultats. Cependant, à la connaissance de l’étudiante-chercheuse, le Plan directeur
(MSSS, 2008) n’a pas été testé empiriquement. De plus, ce plan directeur ainsi que les
facteurs facilitants ou contraignants sont assez génériques et ne développent pas certains
aspects de l’approche humaniste de soins palliatifs. Cette approche fait appel à la relation
transpersonnelle qui apparaît pendant les moments de vulnérabilité entre l’infirmière et le
patient, d’où l’importance de s’ouvrir à un cadre théorique qui prône l’humanité dans les
soins.
Plusieurs auteurs (Cara & O’Reilly, 2008; Jesse, 2010; Meleis, 2012; Noel, 2010; Pépin
et al., 2017; Vandenhouten, Kubsh, Peterson, Murdock, & Leher, 2012; Watson, 2006)
identifient le caring comme un processus intersubjectif humain. Ce processus a comme
objectif ultime, le respect de la dignité de la personne soignée et la préservation de
l’humanité dans les soins. À cet effet, la théorie du Human Caring de Jean Watson (1979)
s’ajoute au cadre de compétences du MSSS (2008) pour mieux définir la relation
thérapeutique. Selon l’approche humaniste du caring, la relation thérapeutique est
l’empreinte de compassion et d’empathie dans la pratique en soins infirmiers palliatifs
(Watson, 1979). De plus, la théorie du Human Caring de Jean Watson (1979) permet
d’assurer un ancrage théorique disciplinaire à cette étude en sciences infirmières.
3.3 La Théorie du Human Caring de Jean Watson
Le caring constitue une philosophie des soins humanistes. Selon la Théorie du Human
Caring de Jean Watson (1979), le caring est un idéal fondé sur un engagement moral
63
envers la protection de la dignité humaine et la préservation de l’humanité. Le caring
signifie également, le soutien de la personne en respectant ses valeurs, ses croyances, son
mode de vie et sa culture (Pépin et al., 2017; Leininger, 2002; Watson 1997). En fait,
Watson postule que le caring constitue un élément fondamental de la pratique infirmière.
Il promeut d’une part, les soins infirmiers holistiques, solidement ancrés dans les sciences,
et d’autre part, l’art d’une pratique professionnelle. Cette pratique cible la promotion de
la santé dans une harmonie du corps, de l’âme et de l’esprit (Watson, 2012). Considérant
que cette théorie offre une approche claire sur la nature du caring et des éléments qui le
constituent, elle pourrait occuper une place de choix lors de la pratique des soins palliatifs.
Ainsi, par la relation transpersonnelle et par le moment du caring, l’infirmière pourrait
accompagner le patient. Elle aiderait le patient atteint d’une maladie grave incurable, à
comprendre l’expérience de sa maladie ainsi qu’à partager ses sentiments négatifs et
positifs. De même, elle pourrait démontrer de l’empathie, de la chaleur humaine, de la
compassion, du respect pour sa dignité et de la considération par rapport à ses besoins.
Trois éléments principaux constituent la Théorie du caring humain de Watson, soit 1) la
relation transpersonnelle; 2) le moment du caring et 3) les processus de caritas cliniques.
3.3.1 La relation transpersonnelle
La relation transpersonnelle est un élément primordial de la Théorie du Human Caring.
Elle caractérise une relation entre le soignant et le soigné, qui s’appuie sur des valeurs
humanistes (Watson, 2012). Cette relation met l’accent sur la composante humaine des
soins, et réfère à une relation intersubjective d’humain à humain. La relation
transpersonnelle de caring privilégie la connaissance et le contrôle de soi. Elle désigne la
notion d’« être avec » un autre être humain, en étant relié d’« âme à âme » (Watson, 2006).
En s’appuyant sur l’authenticité d’être et de devenir, cette relation vise, à la fois, la
préservation de la dignité humaine de la personne soignée ainsi que son intégralité (Cara
& O’Reilly, 2008). Il est à noter que dans cette relation transpersonnelle, les notions
d’intentionnalité et de champ d’énergie représentent les fondements du caring qui assurent
la relation soignant-soigné (Pépin et al., 2017; Watson, 2012).
64
À cet effet, Jesse (2010) ajoute que l’habileté des infirmières de se connecter avec une
autre personne dans cette relation transpersonnelle d’esprit à esprit est traduite par les
mouvements, les gestes, les expressions faciales et verbales, les procédures, les
informations, le toucher, ou d’autres moyens de communication de l’art humain des soins.
3.3.2 Le moment du caring
Le moment réel du caring est le point focal, dans le temps et l’espace, où l’infirmière et
la personne soignée sont en interaction. Ces deux personnes se rencontrent avec leur
champ phénoménal (Cara & O’Reilly, 2008; Caruso, Cisar, & Pipe, 2008; Pépin et al.,
2017 ; Vandenhouten et al., 2012; Watson, 2012). Ce moment de caring requiert des
connaissances, des habiletés et des attitudes d’écoute active pour que l’infirmière soit dans
l’unicité de la relation avec chacune des personnes soignées (Watson, 2012).
À cet effet, Watson (2005) invite les infirmières à se détourner du monde de la technologie
et à rejoindre le monde de la connexion entre deux humains par un moment de caring,
pour combler des besoins humains. L’influence du moment du caring dépend de la
relation et de la nature de celui-ci. Ce moment devient une opportunité de choix et
d’actions dans la mesure où les personnes impliquées décident de la façon d’être, dans le
processus relationnel ou dans le moment du caring (Pépin et al., 2017). L’infirmière
s’appuie sur l’authenticité pour vivre un moment de caring avec la personne soignée, et
atteindre une harmonie entre âme, corps et esprit, lorsque son champ phénoménal
rencontre celui de la soignée (Watson, 2012). Pour ce faire, Watson a proposé dix
processus de caritas cliniques qui traduisent une philosophie humaniste et des valeurs, en
même temps qui fournissent des pistes pour mettre le caring en pratique (Pépin et al.,
2017).
3.3.3 Les processus de caritas cliniques
Les processus de Caritas Cliniques [PCC] (Tableau 3) élaborés par Watson (2012, tirés
de Pépin et al., 2017, p.73) sont:
65
Tableau 3
Processus de caritas cliniques de Jean Watson
Processus de caritas cliniques (PCC)
PCC#1. La pratique d’amour-bonté et d’égalité dans un contexte de conscience caring ;
PCC#2. La facilitation et le maintien d’un système de croyances profondes et le monde
subjectif du soignant et du soigné, en étant authentiquement présent ;
PCC#3. La culture de ses propres pratiques spirituelles et du soi transpersonnel et aller
au-delà du soi ego, s’ouvrir aux autres avec sensibilité et compassion ;
PCC#4. Le développement d’une relation d’aide et de confiance empreinte de caring ;
PCC#5. La présence et le soutien de l’expression des sentiments positifs et négatifs ;
PCC#6. L’utilisation créative du soi et de tous les modes de savoirs comme faisant
partie du processus de caring ; l’engagement dans les pratiques artistiques du caring-
healing ;
PCC#7. L’engagement dans une expérience d’enseignement-apprentissage authentique
qui s’intéresse à l’unité de l’être et à la signification ;
PCC#8. La création d’un environnement facilitant la guérison (healing) à tous les
niveaux par lesquels il y a l’entièreté, la beauté, le confort, la dignité et la paix ;
PCC#9. L’assistance en regard des besoins de base, avec une conscience de caring
intentionnelle, l’administration des soins humains essentiels qui potentialisent
l’alignement « esprit-corps-âme », l’intégralité et l’unité de la personne dans tous les
aspects du soin, entretenir l’incarnation et l’évolution de l’émergence spirituelle ;
PCC#10. L’ouverture et l’attention aux dimensions spirituelles-mystérieuses de sa
propre vie-mort ; soin de l’âme pour soi-même et pour le soigné.
En effet, ces dix processus s’avèrent pertinents à l’encadrement de la pratique infirmière
en soins palliatifs. Imprégnés de spiritualité et d’amour, ils pourront contribuer à soutenir
le développement de la dimension relationnelle et transpersonnelle du caring entre
l’infirmière et la personne soignée en soins palliatifs. Par conséquent, ils contribueront à
la compréhension du phénomène à l’étude. En développant des attitudes humanistes et
des comportements altruistes, proposés par les processus de caritas cliniques, l’infirmière
acquiert certaines habiletés. Ces habiletés lui permettent de communiquer et de pratiquer
les soins palliatifs et les actes de la vie quotidienne avec amour et bonté. Ainsi, les patients
en phase terminale de la maladie peuvent bénéficier d’une relation humaine empreinte de
caring à l’intérieur d’un climat de confiance. De même, ces processus de caritas cliniques
encouragent et soutiennent le développement de la relation transpersonnelle de caring
entre l’infirmière et la clientèle bénéficiant de soins palliatifs. Ces processus fournissent
également, des pistes qui aident l’infirmière à s’engager dans une expérience
66
d’enseignement-apprentissage authentique et à l’assister en regard des besoins de base,
avec une conscience de caring intentionnelle. De même, à travers une relation humaniste
de caring, l’infirmière répond aux besoins psychologiques et spirituels du patient, à
travers le maintien de son système de croyances et en s’ouvrant aux dimensions
spirituelles.
Les études de Poirier et Sossong (2010) et de Zamanzadeh et al. (2010), cités
précédemment, se rejoignent dans leurs propos. Les auteurs soulignent que les patients en
phase terminale de la maladie peuvent privilégier, à l’intérieur d’un climat de confiance,
d’une relation interpersonnelle avec l’infirmière et bénéficier d’une relation humaine
empreinte de caring. Poirier et Sossong (2010) ont utilisé comme cadre de référence pour
leur étude descriptive comparative, la Théorie du Human Caring de Watson ainsi que
l’instrument Caring Behaviors Inventory-Elders [CBI-E] pour mesurer le caring. Tandis
que Zamanzadeh et al. (2010) n’ont pas mentionné de cadre de référence dans leur
recherche descriptive. Toutefois, Fortin et Bouchard (2009) présentent et interprètent leurs
résultats selon les fondements humanistes du caring. Ces auteurs ont souligné que
l’expérience auprès des personnes en fin de vie s’est réalisée par un accompagnement basé
sur l’empathie, l’écoute et la compassion. Cet accompagnement est empreint d’une
approche humaniste du caring.
Enfin, s’appuyer sur la théorie du Human Caring aide à mieux circonscrire les soins
palliatifs dans une approche humaniste, selon une conception de la discipline infirmière,
afin de guider les infirmières à prodiguer des soins holistiques. Cette théorie aide aussi, à
accompagner le patient en fin de vie, à améliorer la communication, à démontrer de la
compassion en soulageant la souffrance des patients et de leur famille et à accompagner
les patients mourants dans la dignité.
3.4 Le cadre de référence intégrateur
Les dix Domaines de Compétences [DC] ciblés par le MSSS (2008) du Québec et les
Facteurs contraignants ou facilitants [FA] recensés dans les écrits, ont constitué dans cette
présente étude des guides pour faciliter la compréhension de la pratique infirmière en soins
67
palliatifs. Les dix domaines de compétences du MSSS (2008) ont un double objectif. Ils
décrivent d’une part, ce qui est attendu des infirmières, et ciblent d’autre part, leurs
domaines d’expertise. Dans cette perspective, ces domaines tracent le chemin, afin que
les infirmières soient en mesure de répondre aux besoins des personnes atteintes de cancer,
d’assurer leur confort et de maintenir leur qualité de vie. Bien que ces domaines
permettent de mieux circonscrire la pratique infirmière en soins palliatifs, ces derniers
sont confrontés à des facteurs qui freinent l’application de cette pratique. De même, ces
domaines ne précisent pas l’approche à adopter pour mettre en œuvre cette pratique. À cet
effet, la théorie du Human caring de Watson (1979) s’ajoute en toile de fond, à travers les
Processus de Caritas Cliniques [PCC], comme un filtre pour guider la relation
transpersonnelle entre l’infirmière et la personne soignée lors de la pratique des soins
palliatifs en fin de vie. De même, cette théorie a servi de guide aussi bien pour les
entrevues que pour l’analyse. Ainsi, l’intégration de ces trois éléments forme le cadre de
référence de cette étude (Figure 1).
68
Figure 1 Cadre de référence intégrateur
Dans la Figure 1, les FA sont exposés dans le cercle blanc le plus extérieur, les dix DC
sont présentés dans le cercle intermédiaire rose, et les dix PCC sont représentés dans le
cercle interne bleu. La flèche verte, située en haut et au centre de la Figure, représente la
pratique que l’infirmière exerce en soins palliatifs auprès du patient et de sa famille, qui
sont, eux, au centre des soins dans le cercle gris. Les flèches hachurées, qui vont des
domaines aux processus de caritas cliniques, représentent la relation humaniste du caring
qui guide l’infirmière pour accomplir les soins palliatifs. Quant aux flèches pleines
recourbées, elles représentent un alignement cohérent des FA avec les DC ou les PCC.
Ainsi, par son développement personnel et professionnel (DC#9), l’infirmière tente
continuellement d’améliorer sa pratique et de s’enrichir d’une pratique humaniste auprès
69
des patients en fin de vie. Cette pratique se caractérise par de l’amour et de la bonté
(PCC#1), mais aussi par l’utilisation créative de soi (PCC#6), pour accompagner le patient
dans la recherche d’un sens à son existence. Cette pratique est représentée par la flèche
hachurée en bleue gitane. Toutefois, le développement professionnel peut être limité par
le manque de connaissances et de formation (FA#4) sur la philosophie des soins palliatifs.
Cette limite est représentée par la flèche recourbée bleue foncée.
Par ailleurs, les flèches hachurées en couleur verte montrent que pour apporter une réponse
et un soulagement de la douleur et des symptômes physiques du patient (DC#1),
l’infirmière l’assiste en regard des besoins de base de son corps (PCC#9) et crée un
environnement facilitant la guérison (PCC#8). Toutefois, les infirmières ont souvent des
difficultés à établir une harmonie entre le curing et le caring suite aux décisions
divergentes (FA#1) pour la transition vers les soins palliatifs dans la trajectoire de la
maladie. À cela s’ajoute des barrières organisationnelles en lien avec le manque de
ressources humaines (FA#8), ce qui induit une surcharge de travail pour les infirmières et
un manque de temps pour les soins palliatifs (FA#3). Cet alignement est représenté par
les deux flèches recourbées en bleu turquoise.
L’infirmière répond également aux besoins psychologiques et spirituels du patient (DC#2),
soit à son âme, à travers le maintien de son système de croyances (PCC#2) et en s’ouvrant
aux dimensions spirituelles (PCC#10). Elle s’intéresse encore à son esprit, à travers ses
émotions tout en le laissant exprimer ses sentiments positifs et négatifs (PCC#5). Mais
aussi, elle assure le réconfort et le soutien psychologique, en étant authentiquement
présente (PCC#2). Cette interaction est représentée par les flèches hachurées jaunes.
Ainsi, à la lumière de la théorie de Watson (2012), cette harmonie entre le corps, l’âme et
l’esprit influence la connexion entre l’infirmière et le patient (PCC#9). De même, elle
facilite la relation humaine transpersonnelle dans un contexte de caring. Cette harmonie
est représentée par les flèches noires hachurées. Cependant, le manque de formation
(FA#4) des professionnels de la santé est susceptible de freiner la pratique d’une approche
globale dans ce domaine. Cette limite est représentée par la flèche recourbée en rose
foncée.
70
Selon les domaines de compétences, en lien avec les moments de deuil (DC#4), d’agonie
et de décès (DC#5), l’infirmière aide les proches à reconnaître leurs réactions
personnelles. Par conséquent, cela exige le développement d’une relation de confiance
(PCC#4), empreinte de caring pour pouvoir soutenir leurs sentiments positifs et négatifs
(PCC#5) et faciliter le processus normal de deuil. Une relation humaniste suppose
également le respect de leurs perceptions de la mort en leur procurant un moment
d’intimité et en respectant leur dignité au moment de la fin de vie (PCC#8). Cette relation
est représentée par les flèches rouges hachurées. Cependant, ce choix est susceptible de
rencontrer des barrières émotionnelles dans la pratique infirmière en soins palliatifs.
L’épuisement émotionnel est souvent en lien avec les deuils multiples que vivent les
infirmières lors des décès des patients (FA#9). Cette exigence émotionnelle fait référence
aussi à la vulnérabilité des infirmières, qui se voient souvent soumises à une pression
psychologique et une impuissance face à des soins qui vont à l’encontre de leurs valeurs
personnelles. Cette exigence est représentée par la flèche recourbée verte.
De même, les facteurs contraignants ont mis en évidence certains enjeux au niveau de la
création d’un environnement facilitant la guérison (PCC#8). Ces enjeux sont relatifs à
l’offre de soins palliatifs au niveau de la structure organisationnelle (FA#7) qui limite
l’intimité des soins avec le patient et sa famille d’une part, et avec l’équipe soignante,
d’autre part. De même, un autre enjeu est en lien avec la résistance médicale (FA#2). Les
enjeux de ces facteurs sont représentés par la flèche recourbée rouge en bas de la Figure.
Par sa collaboration centrée sur la personne et ses proches (DC#7), l’infirmière contribue,
en tant que membre de l’équipe interdisciplinaire, à la continuité des soins et des services,
en s’ouvrant aux autres, avec sensibilité et compassion (PCC#3). Cette collaboration est
démontrée par une flèche hachurée rose foncé. En effet, elle favorise une bonne transition
entre les différents membres de l’équipe interdisciplinaire d’une part, et les infirmières de
l’unité d’oncologie, d’autre part. Toutefois, cette relation centrée sur la personne et ses
proches est parfois sujette à des facteurs contraignants en lien avec les difficultés de
communication (FA#5) et le manque de collaboration interdisciplinaire (FA#6). Elle est
représentée par les deux flèches recourbées jaunes en haut de la Figure.
71
De plus, connaissant les différents enjeux éthiques et ceux relatifs à l’organisation des
services de soins palliatifs au Liban (DC#8; DC#10), l’infirmière de l’équipe mobile
participe aux décisions cliniques, et aide le patient et ses proches à l’accès aux ressources
appropriées par l’organisation de la vie quotidienne (DC#3). À cet effet, elle s’engage
dans un processus d’enseignement-apprentissage authentique (PCC#7) avec les proches,
afin de créer un environnement facilitant la guérison (PCC#8). Elle œuvre, de même, à les
habiliter à la prestation de soins à domicile. Pour ce faire, elle établit une communication
claire et précise avec les proches (DC#6). Cette interaction est démontrée dans les flèches
hachurées de couleur orange en bas de la Figure.
En résumé, le cadre de référence est constitué de trois éléments. D’une part, le Plan
directeur de développement des compétences des intervenants en soins palliatifs (MSSS,
2008) du Québec et les facteurs contraignants ou facilitants issus de la recension des écrits,
encadrent la compréhension d’une pratique des soins infirmiers palliatifs. D’autre part, la
Théorie du Human Caring de Watson aide à définir et à guider les aspects humanistes de
la relation transpersonnelle entre l’infirmière et la personne soignée lors de la pratique en
soins palliatifs en fin de vie. D’ailleurs, ces trois éléments se complètent. Force est de
constater que les domaines de compétence du Plan directeur donnent une vision
fragmentée de la personne, qu’ils divisent selon plusieurs besoins. D’où le risque de perdre
de vue la personne en soi, son expérience ou le sens qu’elle accorde à sa vie. De même,
les domaines de compétence mettent l’accent sur la communication, qui est très technique,
mais n’abordent pas la relation humaniste, qui est au cœur des soins palliatifs.
De plus, les facteurs contraignants ou facilitants ainsi que le Plan directeur n’offrent pas
de vision infirmière et disciplinaire de la personne, du soin et de la santé. Pour ce faire,
c’est la Théorie Humaniste du Caring qui pourrait aider à réconcilier et à combler cet
écart. Ainsi, par la relation transpersonnelle et par le moment du caring, l’infirmière
pourra accompagner le patient, qui a une maladie grave incurable, à comprendre
l’expérience de sa maladie ainsi qu’à partager ses sentiments négatifs et positifs. De
même, elle pourra démontrer de l’empathie, de la chaleur humaine, de la compassion, du
respect pour sa dignité et de la considération par rapport à ses besoins. Par conséquent,
72
l’approche holistique des soins, empreinte de l’approche de caring, émerge dans la
pratique professionnelle des infirmières en soins palliatifs.
3.5 Les questions spécifiques de recherche
Ainsi, pour répondre à la question principale : Comment s’exerce la pratique infirmière
en soins palliatifs, auprès de patients en fin de vie atteints de cancer, au sein d’une équipe
interdisciplinaire, d’une région du Liban ? et suite à la recension des écrits et le choix du
cadre de référence, deux questions spécifiques de recherche sont énoncées :
1) Comment s’exerce la pratique du caring en soins palliatifs auprès de patients, en
fin de vie, atteints de cancer dans une région du Liban ?
2) Quels sont les facteurs contraignant ou facilitant la mise en œuvre de la pratique
infirmière en soins palliatifs au sein d’une équipe interdisciplinaire dans une
région du Liban ?
`
73
Chapitre 4 - Méthode
Dans ce quatrième chapitre, l’approche privilégiée pour atteindre le but et répondre aux
questions de recherche est présentée dans un premier temps. Elle est suivie par le choix et
la justification du devis d’étude de cas. Le déroulement de l’étude, suit dans un deuxième
temps. Ainsi, les stratégies de recrutement, les méthodes de collecte et le plan d’analyse
des données sont décrits. Finalement, les critères de rigueur scientifique et les
considérations éthiques viennent conclure cette section.
4.1 L’approche privilégiée
Dans le cadre de cette recherche, l’approche privilégiée est qualitative. L’approche
qualitative vise à comprendre des concepts, des caractéristiques et des phénomènes vécus
par des personnes (Fortin & Gagnon, 2016). Cette étude qualitative s’inscrit dans le
paradigme interprétatif. Elle implique donc, une vision interprétative des phénomènes en
fonction des significations que les gens leur apportent (Denzin & Lincolin, 2005; Fortin
& Gagnon, 2016; Sylvain, 2008). Ainsi, les chercheurs dans ce paradigme tentent de
comprendre l’expérience humaine comme elle est vécue, grâce à la collecte et à l’analyse
de données subjectives et narratives. Selon Miles et Huberman (2003), l’approche
qualitative est mise en œuvre à travers un contact prolongé et intense avec une situation
qui reflète la vie d’individus, de groupes, de sociétés ou d’organisations au quotidien. Elle
permet par ailleurs, d’explorer un phénomène social d’un point de vue holistique
(Creswell, 2013; Gagnon, 2012; Miles & Huberman, 2003).
Ainsi, dans la présente étude, les données qualitatives colligées ont un caractère englobant,
ce qui permet de produire des descriptions et des explications riches pour faciliter une
compréhension en profondeur de la pratique infirmière en soins palliatifs, dans son
contexte réel et selon différentes perspectives. Le choix de cette approche qualitative
s'avère tout indiqué pour cette recherche afin d’obtenir une description et une explication
profonde d’un phénomène peu présent dans la littérature et particulièrement, dans un
contexte libanais, soit la pratique infirmière en soins palliatifs au sein d’une équipe
interdisciplinaire.
74
4.2 Le devis de recherche : choix et justification
Le principal objectif du devis descriptif, selon Fortin et Gagnon (2016), est de dresser un
portrait précis des caractéristiques d’une personne, d’une situation ou d’un groupe. Ce
devis semble ainsi, approprié pour cette étude. Cette étude cherche en effet à décrire la
pratique infirmière afin de mieux la comprendre, particulièrement dans le domaine des
soins palliatifs, au sein d'une équipe interdisciplinaire et dans un contexte libanais.
L'approche descriptive qualitative permet, non seulement d'obtenir une description
détaillée du phénomène du point de vue des infirmières, mais elle permet également,
d'intégrer une nouvelle perspective. Cette approche intègre les acteurs impliqués dans la
pratique et le développement des soins palliatifs au Liban. La description ainsi que
l’explication du phénomène seront considérées comme des réalités significatives.
L'approche descriptive qualitative permet ainsi, de décrire un phénomène peu connu
(Fortin & Gagnon, 2016 ; Sandelowski, 2011). Dans le cadre de cette étude, le devis
descriptif qualitatif choisi est une étude de cas. L’étude de cas, au moyen d’une approche
qualitative, donne accès aux informations souhaitées et tient compte, comme l’explique
Yin (2014), des conditions contextuelles du phénomène à l’étude.
4.3 L’étude de cas
L’étude de cas permet d’étudier en profondeur un phénomène, un événement, un groupe
ou un ensemble d’individus, pour en obtenir une description précise (Yin, 2014). Elle est
indiquée quand on dispose de peu de données sur le phénomène étudié, et que la recherche
projetée suggère l’investigation en profondeur d’un phénomène contemporain, dans son
contexte réel (Gagnon, 2012; Yin, 2014). L’étude de cas consiste également, à faire état
d’une situation réelle particulière, prise dans son contexte. Elle permet de découvrir
« comment » et « pourquoi » se manifestent et évoluent les phénomènes sociaux auxquels
le chercheur s’intéresse (Fortin & Gagnon, 2016; Yin, 2014). L’étude de cas est donc
pertinente pour répondre à la question principale de cette recherche. Cette question de
recherche vise à comprendre comment s’exerce la pratique infirmière en soins palliatifs,
dans son contexte réel, auprès de patients atteints de cancer en fin de vie, au sein d’une
équipe interdisciplinaire, dans une région du Liban.
75
L’étude de cas peut être, selon le but et la perspective de l’étude, quantitative ou
qualitative, descriptive/exploratoire ou explicative, holistique ou imbriquée, simple ou
multiple (Fortin & Gagnon, 2016; Creswell, 2013; Yin, 2014). Deux raisons ont orienté
ce choix : le peu de données sur la pratique infirmière en soins palliatifs au Liban et
l’impossibilité d’envisager une étude de cas multiples dans plusieurs centres hospitaliers
dans le pays. Ainsi, une étude de cas simple avec des niveaux d’analyse imbriqués, en
raison du contexte socio-politique libanais, est proposée pour cette recherche.
Effectivement, une étude de cas simple suppose « l’analyse en profondeur de divers
aspects d’une situation pour en faire ressortir les éléments significatifs et les liens qui les
unissent » (Fortin & Gagnon, 2016, p.198). La méthode d’étude de cas à niveaux
d’analyse imbriqués sert de guide pour le processus de collecte des données empiriques.
Ces données proviennent de plusieurs sources et par le biais de différentes méthodes. Il
est important, de même, de signaler que le phénomène de la pratique en soins palliatifs au
sein d’une équipe interdisciplinaire au Liban, n’avait jamais été analysé sous cet angle
auparavant. Cet aspect constitue notamment une pertinence pour cette étude. Le devis
d'étude de cas implique au départ une définition du « cas ».
4.3.1 Le cas étudié
Le « cas » peut être un individu, une institution, un groupe, une organisation ou un
événement (Fortin & Gagnon, 2016 ; Yin, 2014). Dans le cadre de cette recherche, le cas
étudié (Figure 2) réfère à la pratique infirmière en soins palliatifs auprès de patients
atteints de cancer en fin de vie, au sein d’une équipe interdisciplinaire, dans la région de
Beyrouth au Liban. Le choix de cette décision découle du contexte actuel des soins
palliatifs au Liban. Ces soins sont en majorité dispensés dans les hôpitaux des grandes
villes, laissant un grand segment du pays sans accès à ces services de soins (Daher et al.,
2013). Une carte conceptuelle de l’étude de cas étudié est exposée à l’Annexe 1.
76
Figure 2. Étude de cas simple imbriquée
Deux raisons ont favorisé le choix du terrain. D’abord, il n’était pas possible d’étudier la
pratique infirmière en soins palliatifs sur tout le territoire libanais. De plus, il manque
d'unités de soins palliatifs dans le pays. C’est pourquoi, l’unité de soins en oncologie d’un
centre hospitalier situé dans la région de Beyrouth a été sélectionnée comme milieu pour
l’étude de cas. Cette unité offre des soins aux patients atteints de cancer en fin de vie.
4.3.2 Le milieu à l’étude
Le centre hospitalier universitaire choisi est un établissement privé, ouvert depuis 1923.
Il est considéré comme un pôle de référence aux niveaux national, régional et
international. Il dispose d’une capacité de 405 lits avec 30 213 admissions par an. Ce
centre hospitalier regroupe également, diverses unités où toutes les spécialités sont
représentées, de la consultation jusqu'à l'hospitalisation. Dans sa mission affichée sur son
site officiel, cet établissement s’engage à « assurer aux patients une médecine et des soins
77
de qualité et de les accueillir sans discrimination ». Le choix de cet hôpital est motivé par
le fait que ce dernier possède une équipe de soutien mobile. Cette équipe a un rôle de
conseil et d’expertise en soins palliatifs auprès des professionnels de la santé de
l’établissement. Dans l’attente de développer une unité de soins palliatifs, l’hôpital a
formé cette équipe interdisciplinaire de soutien mobile qui est composée d’une infirmière
spécialisée en soins palliatifs, d’un médecin qui a fait sa formation en soins palliatifs, d’un
pharmacien, d’un psychologue, d’un travailleur social, d’un aumônier et d’un
kinésithérapeute. Il est à noter, qu’à ce jour, c’est l’infirmière spécialisée qui fait la
coordination de la pratique des soins palliatifs auprès de l’équipe de soutien mobile et des
infirmières de l’unité d’oncologie.
La sélection de l’unité d’oncologie est justifiée non seulement par sa clientèle, mais aussi
par la pratique qui y est adoptée. En effet, les patients desservis dans cette unité ont des
besoins en soins palliatifs. De même, la pratique des soins palliatifs est étroitement liée
aux patients cancéreux en phase terminale. La capacité d’accueil pour l’unité d’oncologie
dans cet établissement est de 19 patients. Les infirmières dans cette unité sont au nombre
de dix, soit une infirmière-chef et neuf infirmières soignantes qui font la rotation de jour
et de nuit. Enfin, pour des considérations de faisabilité, les contacts personnels de
l’étudiante-chercheuse avec les responsables de l’hôpital ont facilité l’accès aux
ressources locales ainsi que l’intégration au milieu.
4.3.3 Les niveaux d’analyse imbriqués
Afin de mieux comprendre la pratique des soins palliatifs, l’étude de cas simple à trois
niveaux d’analyse imbriqués a été privilégiée, soit aux niveaux : individuel,
organisationnel et contextuel. La collecte des données auprès des infirmières permet
l’analyse au niveau individuel, tandis que la collecte des données auprès des
professionnels de la santé qui forment l’équipe interdisciplinaire de soutien mobile
conduit au niveau organisationnel. Quant au niveau contextuel, ce dernier est lien avec la
collecte des données auprès des membres du Comité National Libanais pour le contrôle
de la douleur et les soins palliatifs ainsi qu’auprès des membres de la famille des personnes
soignées. En accord avec l’étude de cas et les trois niveaux d’analyse imbriqués, quatre
78
grandes sources de collecte de données ont été privilégiées : 1) les entrevues individuelles
et de groupe, 2) l’observation, 3) les sources documentaires, et 4) le journal de bord
(Figure 2).
Ces différents niveaux d’analyse jouent plusieurs rôles. Ils permettent de diversifier les
connaissances, de mieux comprendre la pratique infirmière en soins palliatifs selon
différents acteurs participant à l’étude et d’assurer un maximum de diversité
interdisciplinaire. Selon Creswell (2013), cette diversification permet de contraster,
comparer et renforcer la véracité des résultats.
4.4 Le déroulement de l'étude
Dans cette section, les stratégies de recrutement ainsi que les méthodes de collecte et
d’analyse des données sont présentées tour à tour.
4.4.1 Les stratégies de recrutement : l’échantillonnage et les critères de sélection
L’échantillon par choix raisonné demeure la stratégie privilégiée dans l’étude de cas.
Ainsi, le choix des participants et des sites peut être fait en fonction du phénomène à
l’étude (Fortin & Gagnon, 2016). Dans cette recherche, l’unité d’oncologie d’un centre
hospitalier de la région urbaine de Beyrouth au Liban a été retenue par choix raisonné,
puisque que des soins palliatifs sont dispensés sur cette unité à des personnes en fin de vie
atteintes de cancer, avec le soutien d’une équipe interdisciplinaire mobile en soins
palliatifs. Cependant, bien que le site ait été sélectionné par choix raisonné, les participants
à l’étude ont plutôt été recrutés par une méthode de convenance, selon s’ils étaient
accessibles et s’il était possible de les rejoindre. Ainsi, l’ensemble de la population
accessible dans l’unité d’oncologie, qui se compose de l’infirmière-chef et de l’ensemble
des infirmières de l’unité de soins, a été invité à participer à l’étude. De même, tous les
professionnels de l’équipe de soutien mobile en soins palliatifs ont été invités à participer.
Finalement, des experts qui font partie du Comité national pour le contrôle de la douleur
et les soins palliatifs ainsi que des proches des personnes soignées qui ont expérimenté les
soins palliatifs dans l’établissement à l’étude ont été contactés pour participer à l’étude.
79
Pour l’ensemble des participants, les critères d’inclusion étaient les suivants : 1) être en
mesure de fournir une information détaillée quant à l’objet d’étude; 2) être capables de
s’exprimer en français et 3) être disponibles pour une entrevue et une validation des
conclusions. Pour les infirmières, 4) elles devaient travailler à titre d’infirmières
soignantes dans l’unité d’oncologie.
Par conséquent, l’infirmière de l’équipe de soutien mobile spécialisée en soins palliatifs
(n= 1), l’infirmière-chef de l’unité d’oncologie (n= 1), toutes les infirmières de l’unité
d’oncologie œuvrant le jour (n= 9), les professionnels de la santé de l’équipe de soutien
mobile en soins palliatifs (n= 4), des experts nationaux en soins palliatifs (n= 3), ainsi que
la famille de personnes soignées (n= 3) ont été recrutés.
Ainsi, après l’approbation des instances concernées, une rencontre avec le responsable de
l’équipe de soutien mobile a eu lieu afin de présenter plus précisément le projet de
recherche, de répondre aux questions et de solliciter la collaboration des membres de
l’équipe. Ensuite, pour collecter les données auprès des infirmières soignantes et de
l’infirmière-chef de l’unité participante, ces dernières ont été invitées à participer à l’étude
grâce aux gestionnaires de l’établissement. De même, chacune d’elles a rencontré
l’étudiante-chercheuse et a reçu des explications sur le projet ainsi que le formulaire de
consentement pour signature.
Quant aux experts, le projet de recherche a été présenté aux responsables du Comité
National de soins palliatifs, qui ont accordé leur participation. Ils ont par ailleurs, guidé
l’étudiante-chercheuse vers les personnes éligibles à participer et qui répondaient aux
critères d’inclusion de l’étude. Pour le recrutement de certains proches des patients, il a
été convenu, avec l’équipe mobile en soins palliatifs, de choisir des familles dont le proche
était décédé il y a environ deux mois, et qui avaient déjà expérimenté la pratique des soins
palliatifs dans le même établissement. Les coordonnées de ces personnes figurent dans le
registre de l’hôpital qui a, à son tour, donné l’accord de les fournir à l’étudiante-
chercheuse. Les proches ont été contactés par l’étudiante-chercheuse par appel
80
téléphonique et ont été invités à participer à l’étude. Les entrevues ont eu lieu selon la
convenance des proches.
Les périodes d'observation non participante (n=22) de la pratique en soins palliatifs, de
l’infirmière spécialisée et des infirmières de l’unité d’oncologie, ont été effectuées avant
leur entrevue, pour éviter la possibilité que les participantes changent de comportements
après la connaissance des thèmes abordés durant l’entrevue. Pour réaliser les périodes
d'observation, un calendrier des présences de l’étudiante-chercheuse fut réalisé en
collaboration avec les infirmières concernées. Par la suite, les entrevues individuelles ont
été effectuées.
4.4.2 Les méthodes de collecte des données
En accord avec l’étude de cas (Yin, 2014), le chercheur doit recourir à des méthodes de
collecte de données multiples et des sources d’information variées, afin d’effectuer une
évaluation globale du phénomène et de son contexte. D’ailleurs, Yin (2014) précise que
la triangulation des sources et des méthodes de données est un principe de base de la
collecte des données d’une étude de cas. En accord avec l’étude de cas simple imbriquée,
la production des données dans le cadre de cette recherche a été effectuée par une double
triangulation, soit des méthodes et des sources. Cette double triangulation inclut les
éléments suivants : 1) l’entrevue individuelle auprès de l’infirmière spécialisée en soins
palliatifs; 2) l’entrevue individuelle auprès de l’infirmière-chef en oncologie; 3) l’entrevue
individuelle auprès des infirmières de l’unité d’oncologie; 4) l’entrevue de groupe auprès
des professionnels de la santé de l’équipe de soutien mobile; 5) l’entrevue individuelle
auprès des experts en soins palliatifs; 6) l’entrevue individuelle auprès des membres de
famille; 7) l’étude des documents pertinents; 8) l’observation directe non participante de
la pratique infirmière en soins palliatifs et 9) le journal de bord de l’étudiante-chercheuse.
La collecte des données a eu lieu entre juillet 2015 et février 2016.
4.4.2.1 L’entrevue individuelle
L’entrevue individuelle constitue un outil de collecte de données privilégié pour l’étude
de cas qualitative, surtout qu’elle permet au chercheur d’accéder à l’expérience des
personnes et de comprendre la perception d’un phénomène tel qu’il est vécu par les
81
participants (Fortin, 2010; Yin, 2014). Dans le cadre de cette étude, 17 entrevues
individuelles semi-structurées ont été effectuées, après avoir obtenu le consentement des
personnes interviewées (Annexe 2), soit l’infirmière spécialisée en soins palliatifs,
l’infirmière-chef, les infirmières de l’unité d’oncologie, des experts nationaux en soins
palliatifs ainsi que de membres de famille des personnes soignées.
Suite à la signature du formulaire de consentement, les infirmières de l’unité d’oncologie
ont eu dans un premier temps à remplir un questionnaire sociodémographique, avant de
procéder à l’entrevue. Les entrevues ont eu lieu durant l’horaire de travail. Toutes les
entrevues ont été réalisées par l’étudiante-chercheuse. Elles ont pris fin à l’atteinte du
nombre total possible des participantes infirmières, soit la population accessible. Quant
aux entrevues auprès des experts en oncologie et des proches de patients décédés, il était
prévu initialement d’atteindre la saturation, mais des barrières inhérentes au recrutement
ne l’ont pas permis. Pour une entrevue semi-structurée, Poupart et al. (1997) suggèrent
que le chercheur guide la conversation sans l’imposer, mais en demeurant ouvert à
l’émergence de dimensions nouvelles non pressenties au départ. Ainsi, afin d’explorer le
phénomène en profondeur, la parole a été donnée aux participants avec la latitude requise
pour exprimer leurs opinions et expériences. Les différents répondants étaient appelés à
se prononcer selon un guide d’entrevue semi-structurée, individuelle ou de groupe, adapté
selon le type de participants (Annexe 3). Les questions traitaient en particulier : 1) de
l’exercice de la pratique infirmière en soins palliatifs; 2) des obstacles et des facteurs
facilitant la pratique infirmière en soins palliatifs au sein d’une équipe interdisciplinaire;
3) des besoins des patients et de leur famille en fin de vie et 4) de l’approche du caring en
soins palliatifs auprès de patients en fin de vie atteints de cancer. Ces guides d’entrevue
ont été inspirés de la recension des écrits, du cadre de référence et des questions de
recherche de l’étude. Le guide d’entrevue adressé aux infirmières a été modifié dans un
continuel va-et-vient, et des probes ont été ajoutés pour tenter de recueillir un maximum
d’informations. Les différents guides adressés aux infirmières en oncologie, à
l’infirmière-chef, aux experts et aux familles ont été pré-testés préalablement auprès des
personnes répondant aux mêmes critères d’inclusion que les participants à l’étude (n=4).
Il est à noter que cette validation de la formulation et de la compréhension des questions
82
fut réalisée auprès d’une infirmière, d’une infirmière-chef, d’un expert et d’une famille
qui n’ont pas été inclus dans l’étude.
4.4.2.2 L’entrevue de groupe
L’utilisation de l’entrevue de groupe permet de confronter et de clarifier certaines idées
(Yin, 2014). Dans le cadre de cette recherche, l’entrevue de groupe a été réalisée lors
d’une rencontre avec quatre professionnels de la santé de l’équipe de soutien mobile dans
le but de susciter la réflexion et la discussion ouverte ainsi que l’échange des idées sur la
pratique infirmière en soins palliatifs dans le contexte libanais. Cette entrevue de groupe
a permis d’assurer un maximum de diversité interdisciplinaire ainsi qu’une
compréhension élargie de la pratique infirmière en soins palliatifs. Afin que les
participants puissent s’exprimer librement sur la pratique infirmière en soins palliatifs,
l’infirmière spécialisée de l’équipe mobile a plutôt été rencontrée en entrevue individuelle
et n’a pas participé à l’entrevue de groupe.
4.4.2.3 L’observation directe non participante
Dans le cadre d’une étude de cas, le chercheur a recours au plus grand nombre de sources
possibles pour recueillir les données sur le cas et de s’assurer que les informations
recueillies représentent bien la réalité (Yin, 2014). À cet effet, Gagnon (2012) propose de
« recueillir des données relatives à des comportements ou à des conditions
environnementales observables en étant présent dans le milieu » (p. 61). L’observation est
considérée également pour Yin (2014), comme une source importante de collecte des
données pour l’étude de cas. Elle vise à décrire les composantes d’une situation sociale
donnée afin d’en extraire des typologies ou la signification (Fortin & Gagnon, 2016). De
même, elle permet de relativiser l’écart entre les interventions effectuées dans le contexte
réel et ce que les personnes en disent (Poupart et al., 1997; Yin, 2014). En effet, la méthode
d’observation permet une description détaillée des comportements signifiants pour une
activité donnée telle que la pratique infirmière. Dans l’observation non participante, le
chercheur observe et enregistre ce qu’il voit sans intervenir dans les activités des
participants (Fortin & Gagnon, 2016). Étant donné que cette étude vise à comprendre la
pratique infirmière en soins palliatifs dans son contexte réel, l’observation directe non
83
participante des situations réelles de soins constitue l’une des méthodes pertinentes de
collecte des données. Ainsi, 22 périodes d’observation non participante, étalées sur seize
jours durant les mois de juillet et août 2015, ont eu lieu auprès de l’infirmière de l’équipe
mobile des soins palliatifs (12 périodes) et auprès de cinq infirmières (10 périodes)
travaillant dans l’unité d’oncologie et participant à l’étude. La durée de chaque
observation dépendait du soin effectué. Ainsi, le nombre total de périodes d’observation
est d’environ 24 heures.
En premier lieu, il était important d’établir une relation professionnelle et un lien de
confiance entre les intervenants et l’étudiante-chercheuse pour se faire accepter dans les
milieux observés. Par la suite, l’étudiante-chercheuse a passé plusieurs journées avec
l’infirmière de l’équipe mobile de soins palliatifs et a effectué les douze périodes
d’observation durant les soins effectués. L’observation de la pratique de cette infirmière
porte sur les actes infirmiers et les interactions avec les patients et leur famille. À cet effet,
l’infirmière de l’équipe mobile des soins palliatifs a sondé préalablement l’intérêt des
patients observés. Elle a pris contact avec les patients et leur famille en leur demandant
un premier accord verbal de participation à un projet de recherche. L’infirmière a expliqué
aux patients et leur famille que leur consentement était requis pour que l’étudiante-
chercheuse puisse assister et observer les soins effectués. Après avoir obtenu leur accord
verbal, l’étudiante-chercheuse a fait signer le formulaire d’information et de consentement
du patient avant de débuter la période d’observation du soin. Lorsque le patient n’était pas
dans un état lui permettant de donner son consentement, c’est la famille qui a consenti
pour lui. Quant aux infirmières du service d’oncologie, ces dernières ont été observées
durant leurs tournées auprès des mêmes patients référés par l’infirmière de l’équipe mobile
interdisciplinaire de soins palliatifs. Les dix périodes d’observation ont eu lieu auprès de
cinq infirmières travaillant dans l’unité d’oncologie et participant à l’étude. Une grille
d’observation (Annexe 4) a servi de guide pour décrire la pratique infirmière en soins
palliatifs.
84
4.4.2.4 L’étude des documents
L’étude documentaire constitue une des principales sources de données dans l’étude de
cas (Gagnon, 2012; Yin, 2014). Dans le cadre de cette présente étude, l’étudiante-
chercheuse a sélectionné deux documents pertinents, soit : 1) la fiche de « demande de
consultation » de l’équipe mobile de soins palliatifs et 2) la brochure d’information des
soins palliatifs « Nos mains dans vos mains pour accompagner la vie ». L’utilité de ces
documents réside dans leur capacité à corroborer les renseignements provenant d’autres
sources (Yin, 2014). Ces deux documents ont fait également, l’objet d’analyse à partir
d’une grille d’analyse documentaire (Annexe 5).
La fiche de « demande de consultation » constitue une fiche de liaison officielle entre le
médecin traitant et l’équipe mobile de soins palliatifs. Elle permet d’identifier les
différents besoins du patient référé en soins palliatifs. Les différentes thématiques traitées
dans le document incluent, dans une première section, la collecte des données personnelles
du patient, de ses antécédents, ainsi que l’histoire de sa maladie en incluant le diagnostic
et le pronostic. La deuxième section réfère à l’évaluation de la douleur et des autres
symptômes non contrôlés chez le patient. La troisième section comporte une identification
du contexte psycho familial et une évaluation de la dépendance et de la charge des soins
pour le patient. Une énumération des traitements du patient est finalement présentée.
La brochure d’information sur les soins palliatifs est représentée par un fascicule de
données sur les soins palliatifs qui est remis aux patients et à leur famille lors de la visite
de l’équipe mobile de soins palliatifs. Cette brochure est exposée dans le couloir du service
d’oncologie et des différentes unités de l’établissement pour être à la portée des patients
référés en soins palliatifs et de leurs proches. Il est à noter que cette brochure est écrite
dans les deux langues, soit en français et en arabe, pour faciliter sa diffusion. La définition
des soins palliatifs et leurs objectifs sont rédigés et présentés d’une façon claire. Dans
cette présentation, l’accent est mis sur plusieurs points dont la nécessité de gérer la douleur
et les autres symptômes, d’accorder une écoute et de préserver la qualité de vie ainsi que
la dignité du patient. L’équipe mobile interdisciplinaire de soins palliatifs est présentée
avec une description détaillée de son rôle de coordination et de conseil auprès des équipes
85
au sein de l’hôpital. Le fascicule décrit également, un modèle de soins palliatifs expliquant
le parcours du patient depuis le diagnostic jusqu’au décès, en passant par les soins curatifs,
palliatifs et terminaux.
4.4.2.5 Le journal de bord
Tout au long de l’étude, des notes de terrain ont été rédigées par l’étudiante-chercheuse
dans un journal de bord afin de tenir compte des impressions du moment et des constats
résultant des observations de la pratique infirmière en soins palliatifs. Des descriptions et
des commentaires sur chacune des entrevues, de même que sur les activités relatives à ce
projet, ont également été rédigés tout de suite après l'entrevue. Ainsi, il est possible
d’identifier certains facteurs qui pourraient influencer l'entrevue, et assurer par la suite
l’interprétation la plus juste possible des propos recueillis. De plus, l’étudiante-chercheuse
a aussi noté dans son journal de bord ses réflexions et remarques tout au long des périodes
d’observation.
4.5 Le plan d’analyse des données
Pour analyser les données de l’étude de cas, la méthode d’analyse de contenu qualitatif
proposée par Miles et Huberman (2003) est principalement utilisée dans cette présente
recherche qualitative. Cette méthode a été choisie en raison de son modèle itératif et
circulaire d’analyse des données comportant trois composantes-activités qui interagissent
au cours du processus d’analyse, soit 1) la condensation des données; 2) la présentation
des données et 3) l’élaboration et la vérification des conclusions. Selon Miles et Huberman
(2003), ces trois composantes-activités imbriquées interviennent simultanément en cours
d’analyse et après la collecte des données. Ainsi, les données recueillies sont traitées et
analysées au fur et à mesure de la collecte. Il est donc possible de détecter à temps les
données manquantes et de préparer la prochaine collecte des données en conséquence
(Mukamurera, Lacourse, & Couturier, 2006).
4.5.1 La condensation des données
Selon Miles et Huberman (2003), « la condensation des données renvoie à l’ensemble des
processus de sélection, simplification, abstraction et transformation des données brutes
86
figurant dans les transcriptions » (Miles & Huberman, 2003, p.29). La condensation des
données comprend la codification des données, l’élaboration de catégories et la
codification thématique.
4.5.1.1 La codification des données
La codification est un processus qui consiste à reconnaître les mots, les thèmes ou les
concepts récurrents et à leur attribuer des symboles ou des mots. Le système de
codification permet de diviser le texte en petites unités significatives. Les éléments de
données à coder sont découpés en unités de sens, parfois des mots seuls ou la plupart du
temps des segments de phrase ou de texte (Miles & Huberman, 2003).
4.5.1.2 L’élaboration de catégories
L’élaboration de catégories consiste à relever des thèmes saillants, des phrases récurrentes
et des modèles de référence qui lient les participants et les milieux en vue de dégager des
catégories significatives. C’est un regroupement de codes apparentés ou similaires (Fortin,
2010). Au fur et à mesure de la transformation des données, des thèmes sont identifiés,
puis classés par catégories et sous-catégories sous-tendues par des phrases ou
comportements (Miles & Huberman, 2003).
4.5.1.3 La codification thématique
La codification thématique sert à dégager des thèmes à travers l’examen des codes et des
catégories. Il s’agit d’un méta-code qui recherche les régularités répétables à travers tout
le corpus. Cette opération conduit à l’émergence de thèmes englobant des catégories et
des sous-catégories. Pour Fortin et Gagnon (2016), « les thèmes sont des modèles
généraux tirés des données, grâce à la catégorisation et à l’analyse d’unités de
signification » (p.363). Le codage thématique sert à regrouper chacun des segments en des
thèmes synthétiques, plus réduits (Miles & Huberman, 2003). Le codage thématique
remplit, dans l’analyse qualitative, quatre fonctions importantes (Miles & Huberman,
2003) à savoir:
87
1) il réduit de grandes quantités de données en un petit nombre d’unités
analytiques ; 2) il amène le chercheur à l’analyse pendant le recueil de données, de
sorte que les recueils ultérieurs peuvent être plus centrés ; 3) il l’aide à construire
une carte cognitive, un schéma évolutif lui permettant de comprendre ce qui se
passe sur un site et 4) lorsque plusieurs chercheurs sont engagés dans une seule
étude de cas, il établit les bases d’une analyse inter-site en révélant des thèmes
communs et des processus de causalité (p.133).
Selon Miles et Huberman (2003), la recherche de codes thématiques succède à une
intuition du chercheur concernant les relations entre les catégories. Elle peut se faire à
l’aide de différentes techniques, entre autres la triangulation qui permet de comparer
différentes sources, situations et méthodes pour vérifier le maintien des modèles
récurrents (Fortin & Gagnon, 2016).
4.5.2 La présentation des données
La présentation des données représente la seconde composante de l’activité analytique.
Selon Miles et Huberman (2003), la forme la plus fréquente pour présenter les données
qualitatives est le texte narratif. Outre les textes narratifs, Miles et Huberman (2003)
suggèrent également de regrouper les données autour de matrices et de figures descriptives
et explicatives, selon le but de l’analyse.
4.5.3 L’élaboration et la vérification des conclusions
La condensation et la présentation des données facilitent la formulation de conclusions
logiques issues de l’analyse des données. Il s’agit de dégager des significations pour
expliquer les données présentées. Les conclusions et les significations qui se dégagent des
données doivent être testées quant à la plausibilité et à la validité en cours d’analyse (Miles
& Huberman, 2003). La phase d’interprétation, qui intervient au fur et à mesure de
l’analyse, inclut également l’étape de vérification de la vraisemblance, la rigueur et la
validité des conclusions (Fortin & Gagnon, 2016 ; Miles & Huberman, 2003).
88
En résumé, les trois types d’activités analytiques des données forment un processus
cyclique et interactif et se présentent successivement au fil de l’analyse. Ainsi, « le
chercheur fait la navette entre la condensation, la présentation et l’élaboration/vérification
des conclusions tout le long de l’étude » (Miles & Huberman, 2003, p.31). Ainsi, des
conclusions et des décisions se dégagent, à mesure que la matrice est complétée (Miles &
Huberman, 2003). À cet effet et en s’aidant de tableaux, une synthèse pour chacune des
entrevues est rédigée, suivie d’une synthèse globale. Ainsi, la synthèse des entrevues
individuelles (de l’infirmière spécialisée, de l’infirmière-chef et des neuf infirmières, des
experts nationaux et des membres de famille de personnes soignées), ainsi que la synthèse
de l’entrevue de groupe avec les professionnels ont été réalisées. Par la suite, une synthèse
générale intégrant la perspective des différents participants a été rédigée. La synthèse
générale des analyses qualitatives a été transmise par courriel aux participants en vue
d’une vérification des données et une corroboration des interprétations. A la suite de
l’analyse du cas, une triangulation des données provenant des différents participants et
méthodes a été effectuée pour assurer la validité des données (Yin, 2014).
4.6 Les critères de rigueur scientifique
Les critères de scientificité de la recherche qualitative ont été respectés dans cette
recherche pour s’assurer de la véracité des résultats. Plus spécifiquement, il s’agit de la
crédibilité, la transférabilité, la fiabilité et la confirmation (Drapeau, 2004; Guba &
Lincoln, 1989; Miles & Huberman, 2003).
Selon Gagnon (2012), une des forces de l’étude de cas est qu’elle assure une forte
crédibilité, puisque les phénomènes relevés sont des représentations authentiques de la
réalité étudiée. Dans le cas de la présente étude, la crédibilité a été assurée par le respect
des éléments suivants : (1) les entrevues jusqu’à la saturation des données pour les
infirmières soignantes; (2) l’évaluation continue des résultats obtenus des entrevues; (3)
la synthèse des conclusions des analyses qualitatives retournée aux participants en vue
d’une corroboration des interprétations; (4) l’enregistrement des entrevues individuelles
et de groupe qui évite la perte de données essentielles et (5) la double triangulation des
méthodes de données et des types de participants. De plus, la crédibilité a été établie par
89
la présence prolongée de l’étudiante-chercheuse sur le terrain qui a permis de renforcer le
climat de confiance et de cerner différents points de vue des participants soutenus par des
observations non participantes.
La transférabilité renvoie à la possibilité de transférer les observations recueillies à
d’autres contextes similaires (Drapeau, 2004; Fortin & Gagnon, 2016; Miles &
Huberman, 2003; Yin, 2014). Une description détaillée du contexte permet notamment,
d’assurer la transférabilité des résultats (Miles & Huberman, 2003). Pour satisfaire ce
critère, la description détaillée du cas, l’échantillon ciblé et représentatif du phénomène
d'intérêt, le choix de participants issus de différentes disciplines, ainsi qu’une observation
de la pratique infirmière en soins palliatifs sur le terrain, ont permis une comparaison
appropriée des résultats avec d’autres cas similaires dans la littérature.
La fiabilité fait référence à la reproductibilité d’une recherche et la persistance d’une
procédure à procurer les mêmes résultats par un autre chercheur (Drapeau, 2004 ; Fortin
& Gagnon, 2016; Gagnon, 2012; Yin, 2014). Ce critère a été satisfait par l’objectivité et
la description précise et la plus complète possible de l’ensemble du phénomène, soit de la
pratique infirmière en soins palliatifs. De même, la production d'un journal de bord et la
documentation précise du processus constituent également des éléments qui soutiennent
la fiabilité. La contre-vérification de certaines portions de codage et des interprétations a
été assurée par l’étudiante-chercheuse et ses directeurs de recherche pour établir une
entente inter-juges sur les codes et éviter des erreurs de perception. Finalement,
l’utilisation de plusieurs méthodes a permis également de respecter la fiabilité des résultats
obtenus (Miles & Huberman, 2003).
La confirmation permet de s’assurer que les interprétations et les résultats sont enracinés
dans le contexte et ne sont pas le produit de l’imagination du chercheur (Sylvain, 2008).
Selon Yin (2014), une meilleure validité des résultats est assurée par la triangulation des
données de différentes sources et méthodes. Dans cette étude, la confirmation a été assurée
par des synthèses validées par les participants tout au long de la recherche ainsi que par la
90
validation des résultats grâce à la triangulation des différentes données collectées et des
différentes sources d’information utilisées.
4.7 Les considérations éthiques
Ce projet a été soumis et accepté pour approbation au Comité d’éthique de la recherche
en sciences de la santé de l’Université Laval : No d’approbation 2015-083, date
d’approbation: 08-06-2015. De même, cette recherche a été approuvée par le comité
d’éthique du centre hospitalier libanais concerné par l’étude. D’autres démarches ont été
faites auprès de la directrice des soins infirmiers et du directeur médical de
l’établissement, pour obtenir leur autorisation à accomplir la recherche auprès des
infirmières du service d’oncologie et de l’équipe mobile de soins palliatifs.
Afin d’assurer les droits fondamentaux des participants, le principe de consentement libre
et éclairé a été respecté. À cet effet, un feuillet explicatif et un formulaire de consentement
portant sur l’objet de l’étude ont été signés par chaque participant avant d'entreprendre
l’entrevue (Annexe 2). Les participants ont été avisés de leur droit de refuser ou de se
retirer, à tout moment, sans avoir à fournir de raison ni à subir aucun préjudice. De plus,
afin de préserver l’anonymat et la confidentialité des données, l’identité des participants
a été dissimulée et un pseudonyme leur a été assigné. Quant au consentement des proches
pour participer à l’étude, ses derniers ont été contactés par l’étudiante-chercheuse par un
appel téléphonique pour sonder leur intérêt à y participer. Aucune pression n’a été exercée
sur les proches par l’équipe mobile de soins palliatifs, et cette dernière n’a pas été informée
de l’identité des participants. De même, tous les documents permettant d’identifier les
participants ou l’unité de soins sont fidèlement conservés sous clé par l’étudiante-
chercheuse, durant une période de cinq ans après le dépôt final de la thèse; échéance après
laquelle ils seront détruits.
91
Chapitre 5 – Résultats
Ce cinquième chapitre présente les résultats de l’étude de cas réalisée. Le but de cette
recherche qualitative était de mieux comprendre l’exercice de la pratique infirmière en
soins palliatifs au Liban, auprès de patients cancéreux, au sein d’une équipe
interdisciplinaire. Les deux questions spécifiques de recherche étaient : « Comment
s’exerce la pratique du caring en soins palliatifs auprès de patients en fin de vie atteints
de cancer dans une région du Liban ? » et « Quels sont les facteurs contraignant ou
facilitant la mise en œuvre de la pratique infirmière en soins palliatifs au sein d’une équipe
interdisciplinaire dans une région du Liban ? ».
Pour favoriser une compréhension générale du phénomène étudié, le milieu de l’étude et
le profil des différents types de participants sont décrits dans un premier temps (Yin,
2014). Les résultats sont présentés, par la suite, selon la méthode d’analyse de contenu
proposée par Miles et Huberman (2003). Cinq thèmes centraux ont émergé de l’analyse
des données triangulées, provenant de différentes sources et méthodes de collecte. Ceux-
ci sont en lien avec la pratique infirmière, auprès de patients cancéreux au sein d’une
équipe interdisciplinaire au Liban et permettent de répondre au but et à la question
générale de recherche. Ces thèmes sont : 1) la perception des soins palliatifs : un moyen
d’offrir une meilleure qualité de vie ; 2) la pratique infirmière : une prise en charge globale
des besoins du patient ; 3) la pratique en collaboration interdisciplinaire : un élément clé
pour les soins palliatifs ; 4) la spiritualité : une toile de fond pour la pratique infirmière en
soins palliatifs et 5) l’accompagnement de la famille : le rôle indispensable de l’infirmière.
De même, pour répondre à la première question spécifique de recherche, les facteurs
contraignant et facilitant la mise en œuvre de la pratique infirmière en soins palliatifs sont
présentés. Enfin, l’approche humaniste de caring en soins palliatifs, qui apparaît comme
un élément clé au cœur des soins palliatifs et qui transcende les cinq thèmes centraux,
permet de répondre à la deuxième question spécifique de recherche.
5.1 La description du milieu à l’étude
Dans le cadre de cette recherche, le cas étudié réfère à l’exercice de la pratique infirmière
en soins palliatifs auprès de patients atteints de cancer en fin de vie, au sein d’une équipe
92
interdisciplinaire. Pour ce faire, cette recherche a été réalisée dans un centre hospitalier
universitaire libanais, situé dans la région de Beyrouth, spécifiquement dans l’unité de
soins d’oncologie. Cette unité d’oncologie prend en charge des patients atteints de cancer,
à chaque étape de leur maladie, soit le diagnostic, le curatif et le palliatif, avec une capacité
d’accueil allant jusqu’à un maximum de 19 patients. En regard de l’environnement
physique, l’observation sur le terrain a permis de constater que l’unité d’oncologie dispose
de cinq chambres à occupation simple et de sept à occupation double, situées le long d’un
corridor. Le poste des infirmières se situe au centre du service, en face des chambres de
patients. En plus, une salle de réunion est aménagée pour étudier le dossier du patient et
échanger avec les médecins qui le prennent en charge.
Les infirmières œuvrant dans l’unité d’oncologie sont au nombre de dix y compris
l’infirmière-chef. Les infirmières assurent la prise en charge des patients dans cette unité.
Durant leur quart de travail de 12 heures, elles prennent en charge de 4 à 5 patients
hospitalisés pour des soins aigus et/ou des soins palliatifs. Selon l’équipe mobile, les
patients relevant de soins palliatifs dans l’unité d’oncologie sont en moyenne de quatre
par mois. Ainsi, ces infirmières donnent de manière concomitante des soins aigus à visée
curative ainsi que des soins de confort en fin de vie. Puisque l’infirmière en oncologie
n’est pas experte de l’approche de soins palliatifs, une équipe mobile interdisciplinaire la
soutient. Cette équipe est, par ailleurs, responsable de l’organisation et du suivi du patient
en soins palliatifs. Elle s’implique suite à une demande officielle de l’équipe soignante
pour initier une éventuelle prise en charge palliative du patient. Une collaboration étroite
est créée entre les membres des deux équipes respectives. L’observation de la pratique sur
le terrain a permis de constater que la prestation des soins, centrée sur le patient, est
délivrée dans une approche interdisciplinaire. Cette approche mobilise les compétences
de l’ensemble des professionnels de la santé impliqués dans les soins aux patients
desservis sur cette unité.
Cependant, étant donné le manque de lits « identifiés de soins palliatifs » dans cette unité,
les patients sont hébergés dans des chambres à occupation simple ou double, selon leur
couverture sociale et le mode de financement de leur hospitalisation. Ainsi, un patient en
93
fin de vie pourra être voisin de chambre d’un autre patient qui débute son traitement de
chimiothérapie, ce qui empêche souvent l’intimité entre les patients et leur famille. De
plus, selon les infirmières de l’unité d’oncologie, ce partage de chambre est souvent
contraignant pour les personnes qui suivent un traitement de chimiothérapie. Ces derniers
vivent de l’espoir de guérir et peuvent se sentir mal à l’aise d’échanger avec une personne
en fin de vie dans la même chambre.
5.2 Les profils des participants
Tout comme il est recommandé pour l’étude de cas (Yin, 2014), une attention particulière
a été accordée à la sélection des participants et des méthodes, dans le but d’obtenir la plus
grande diversité de participants possible. Pour ce faire, l’infirmière dédiée aux soins
palliatifs, l’infirmière-chef et les neuf infirmières de l’unité d’oncologie, des
professionnels de la santé, des experts nationaux en soins palliatifs ainsi que des membres
de famille de personnes soignées ont été sollicités pour participer à cette étude.
5.2.1 Le profil des infirmières
Les caractéristiques sociodémographiques des infirmières sont présentées au Tableau 4
(infirmière de l’équipe mobile, infirmière-chef et infirmières d’oncologie). L’âge des
infirmières participantes varie entre 21 et 50 ans pour une moyenne de 32 ans. En regard
des années d’expérience comme infirmière, il est noté une étendue entre 1 et 28 années
d’expérience professionnelle avec une moyenne de 8,96 ans. Tandis que la moyenne du
nombre d’années d’expérience dans l’unité de soins d’oncologie est de 4 ans, avec une
étendue qui se situe entre 0 et 11 ans, ce qui reflète la variabilité au sein du groupe en
regard de leur expertise professionnelle.
Ainsi, certaines remarques surgissent de ces caractéristiques. D’abord, la majorité des
participantes infirmières est de sexe féminin (n=10), avec un pourcentage presque égal
entre célibataires et mariées. En ce qui a trait au niveau d’éducation, la totalité des
infirmières ont un niveau de formation générale de Licence (premier cycle universitaire).
Par ailleurs, il est noté que quatre d’entre elles ont suivi des formations continues en
réanimation et en oncologie. Seule une infirmière a suivi une formation spécialisée en
94
soins palliatifs. Également, l’une d’entre elles affirme avoir une expérience
professionnelle en soins palliatifs dans un autre pays, tandis qu’une autre a suivi un cours
relatif aux soins palliatifs dans le cadre de sa formation en oncologie.
Tableau 4
Caractéristiques sociodémographiques des infirmières (n = 11)
Variables Moyenne ± Ecart-
type Min-Max
Age 32 ± 9,42 21-50
Expérience professionnelle 8,96 ± 9,60 1-28
Expérience en oncologie 4 ± 3,35 0-11
n %
Infirmière Équipe mobile 1 9,1
Infirmière-chef 1 9,1
En oncologie 9 81,8
Genre M 1 9,1
F 10 90,9
Statut familial Célibataire 6 54,5
Marié(e) 5 45,5
Niveau d’éducation Licence 11 100
Formation continue DU1 en réanimation 1 9,1
DU en oncologie 3 27,3
DU en soins palliatifs 1 9,1
Aucune formation 6 54,5 1 DU : Diplôme Universitaire
5.2.2 Le profil des professionnels de la santé
Les professionnels de la santé qui ont participé à l’étude forment officiellement l’équipe
interdisciplinaire de soins palliatifs de l’établissement. Cette équipe est constituée de
l’infirmière consultante en soins palliatifs, du médecin de l’équipe, du psychologue, du
travailleur social et de l’aumônier. L’équipe mobile interdisciplinaire de soins palliatifs a
pour principale mission d’appuyer et de conseiller les équipes soignantes dans la prise en
charge des patients en soins palliatifs. Elle opère en étroite liaison avec ces différents
95
membres, dans une perspective interdisciplinaire. Les professionnels de la santé ont été
rencontrés lors d’une réunion de l’équipe mobile. Tous les membres de l’équipe ont
accepté de participer à l’étude. Il est à noter que dans le cadre de cette recherche,
l’infirmière de l’équipe a été exclue de l’entrevue de groupe pour être rencontrée
individuellement. De même, le profil sociodémographique des participants n’a pas été
recueilli lors de l’entrevue de groupe effectuée avec eux, notamment pour des fins de
confidentialité étant donné leur petit nombre.
5.2.3 Le profil des experts
Les experts recrutés sont membres du Comité National de Soins Palliatifs et de Douleur
et de différents sous-comités établis par ledit comité. Ce dernier a comme mission de
développer des unités de soins pour les patients en fin de vie, de promouvoir
l’enseignement et la recherche ainsi que d’instituer les soins palliatifs à l’échelle nationale.
Ils ont été choisis en raison de leur implication sur le plan national comme pionniers dans
le domaine des soins palliatifs, ce qui leur permet de fournir des informations détaillées
quant à l’objet de l’étude et une vision plus large sur l’organisation des soins aux
personnes en fin de vie. Trois experts répondant aux critères d’inclusion étaient éligibles
pour participer à l’entrevue individuelle et à la validation des conclusions. Il s’agit de deux
médecins et une infirmière.
5.2.4 Le profil des membres de famille
Les proches des personnes soignées rencontrées sont ceux qui ont accepté de fournir à
l’étudiante-chercheuse les informations en lien avec leur expérience sur la pratique des
soins palliatifs dans l’établissement choisi pour l’étude de cas. Suite à la demande de
l’équipe mobile, le recrutement de la famille a été fait après au moins deux mois du décès
de la personne soignée. Les coordonnées de ces personnes figurent dans le registre de
l’hôpital. L’institution a donné son accord de les fournir à l’étudiante-chercheuse. Les
proches ont été contactés par l’étudiante-chercheuse par un appel téléphonique et ont été
invités à participer à l’étude. Les trois proches recrutés (deux femmes et un homme) ont
perdu respectivement: une sœur, un mari et une mère. Ces personnes ont été présentes
auprès de leur proche à l’unité d’oncologie, et ont pu observer les soins prodigués en fin
96
de vie par les infirmières et par l’équipe interdisciplinaire de soins palliatifs de
l’établissement.
5.3 D’autres sources de données
D’autres sources ont complété la collecte des données, soit : 1) la période d’observation,
2) la documentation et 3) le journal de bord.
5.3.1 La période d’observation
L’observation directe non participante de situations réelles de soins constitue l’une des
méthodes de collecte des données utilisée. Ainsi, l’observation de la pratique des
infirmières a porté sur les actes infirmiers et les interactions entre l’infirmière de l’équipe
mobile et les infirmières de l’unité d’oncologie d’une part, et avec les patients et leur
famille, d’autre part. Au total, 22 périodes d’observation étalées sur seize jours ont eu lieu
auprès de l’infirmière de l’équipe mobile des soins palliatifs, ainsi qu’auprès de cinq
infirmières travaillant dans l’unité d’oncologie et participant à l’étude. La durée des
observations dépendait du temps alloué aux soins effectués, avec un minimum de 60
minutes et un maximum de 90 minutes. La durée totale des observations est d’environ 24
heures. Ainsi, l’étudiante-chercheuse a passé dix journées avec l’infirmière de l’équipe
mobile et a réalisé douze observations durant les soins effectués. Quant à l’observation
des infirmières en oncologie, dix périodes d’observation ont eu lieu auprès de cinq
infirmières du service, durant leur temps de travail. Ces infirmières ont été observées
durant six journées, auprès des patients référés à l’équipe mobile interdisciplinaire de
soins palliatifs. Les observations ont eu lieu lors de la première tournée du matin et avant
la visite de l’équipe mobile. Toutefois, lors de quelques périodes d’observation des
infirmières en oncologie, l’infirmière de l’équipe mobile était également présente et
orientait les interventions des infirmières.
5.3.2 La documentation
Étant donné la nouveauté de l’approche de soins palliatifs dans l’établissement, la
politique et le plan stratégique permettant de définir ou d’encadrer cette approche étaient
en cours de développement. Ainsi, dans le cadre de cette étude, seulement deux documents
97
pertinents en lien avec la pratique des soins palliatifs ont pu être sélectionnés. Les
documents suivants ont fait l’objet d’analyse: 1) la fiche de « demande de consultation »
de l’équipe mobile de soins palliatifs et, 2) la brochure d’information des soins palliatifs
à l’attention des patients et de leur famille.
5.3.3 Le journal de bord
Au fur et à mesure de l’avancement de la collecte des données, le journal de bord a permis
à l’étudiante-chercheuse d’apposer ses notes. Ces notes décrivent les réactions des
participants, ainsi que les impressions et les questionnements de l’étudiante-chercheuse.
Une relecture de ce journal a permis à l’étudiante-chercheuse de se remémorer plus
fidèlement les entrevues. De plus, les remarques colligées tout au long des périodes
d’observation dans le journal de bord ont aussi permis de valider la concordance des
résultats entre les entrevues et les observations du terrain.
5.4 La pratique infirmière auprès des patients cancéreux au sein d’une
équipe interdisciplinaire
Les résultats issus de la triangulation de l’analyse des données recueillies lors des
entrevues individuelles et de groupe auprès des différents participants, des périodes
d’observation sur le terrain, de l’examen des documents, ainsi que lors de la lecture du
journal de bord, seront présentés. Les données recueillies ont été analysées selon la
méthode d’analyse de contenu qualitatif de Miles et Huberman (2003), soit : 1) la
condensation des données, 2) la présentation des données et 3) l’élaboration et la
vérification des conclusions.
Ainsi, toutes les entrevues individuelles et de groupe ont fait l’objet d’un enregistrement
audionumérique, et ont été fidèlement et intégralement retranscrites en verbatim pour
l’analyse de contenu. La transcription a été effectuée par l’étudiante-chercheuse soutenue
par une assistante. Les transcriptions faites par l’assistante ont été vérifiées par l’étudiante-
chercheuse en écoutant ce qui a été dit sur le support audio. Selon la phase de condensation
des données, l’analyse de contenu effectuée manuellement a débuté après une lecture
répétée et approfondie du matériel, ce qui a permis de se familiariser avec le contenu et
98
de vérifier la présence d’informations pertinentes sur la pratique infirmière en soins
palliatifs. De plus, étant donné que l’analyse des données qualitatives est un processus
inductif (Fortin & Gagnon, 2016), l’aller et le retour effectué entre la collecte des données
et leur analyse a eu un apport important au niveau de l’interprétation des données. Il a été
possible de détecter à temps, les données manquantes et de préparer en conséquence, la
collecte de données suivante. Ensuite, à la lecture des retranscriptions, le processus
analytique a permis la fragmentation des données en unités de sens, parfois des mots seuls,
mais pour la plupart du temps des segments de phrases, ce qui a permis de transformer les
données brutes figurant dans les transcriptions. Ces unités ont servi de base pour
l’élaboration de codes et de catégories dans le corpus et ce, pour l’ensemble des
participants. L’élaboration des catégories a consisté à regrouper les phrases récurrentes en
vue d’en dégager des catégories et des sous-catégories significatives.
De ce fait, l’analyse de l’ensemble des entrevues a permis l’élaboration de catégories et
de sous-catégories (voir exemple en Annexe 6). Par la suite, l’étape de la codification
thématique a été réalisée à travers l’examen minutieux des significations récurrentes. Les
régularités repérables à travers tout le corpus ont été triées et organisées. À cet effet, et en
s’inspirant de Yin (2014), des synthèses pour chacune des entrevues ont été rédigées,
suivies d’une autre synthèse pour chacune des catégories de participants et de méthodes.
Par la suite, une synthèse des entrevues individuelles et de groupe a été rédigée. Tout ce
processus a permis de dégager des codes thématiques, en intégrant la perspective des
différents participants. De même, des synthèses des observations des infirmières sur le
terrain, des documents et du journal de bord ont également été rédigées.
La recherche de modèles de référence peut se faire, selon Miles et Huberman (2003), à
l’aide de différentes techniques, entre autres la triangulation. Cette dernière permet ainsi,
de comparer différentes sources, situations et méthodes pour vérifier le maintien des
modèles récurrents et en tirer des conclusions sur la réalité du phénomène étudié (Fortin
& Gagnon, 2016). Dans le cadre de cette étude, l’analyse des données triangulées,
provenant de différentes méthodes et sources de collecte de données, a permis de rédiger
une synthèse générale (Figure 3). L’analyse des données, effectuée par un va-et-vient avec
99
les codes thématiques récurrents de la synthèse générale a permis d’obtenir les résultats.
Par la suite, dans la seconde composante de l’activité analytique qui est la présentation
des données (Miles & Huberman, 2003), les données qualitatives ont été élaborées par un
texte narratif avec des tableaux et des figures à l’appui, pour faciliter la formulation des
conclusions. Enfin, pour élaborer et vérifier les conclusions, des significations ont été
dégagées pour expliquer les données présentées. De même, la phase d’interprétation, qui
a eu lieu au fur et à mesure de l’analyse a impliqué également la vérification des
conclusions quant à leur vraisemblance, leur rigueur et leur confirmation.
Figure 3. Processus d’analyse des données
100
Ainsi, les résultats issus des données triangulées visant à répondre à la question générale
de recherche ont conduit à l’émergence de cinq thèmes centraux, soit : 1) la perception
des soins palliatifs : un moyen d’offrir une meilleure qualité de vie ; 2) la pratique
infirmière : une prise en charge globale des besoins du patient ; 3) la pratique en
collaboration interdisciplinaire : un élément clé pour les soins palliatifs ; 4) la spiritualité :
une toile de fond pour la pratique infirmière en soins palliatifs et 5) l’accompagnement de
la famille : le rôle indispensable de l’infirmière.
5.4.1 La perception des soins palliatifs : un moyen d’offrir une meilleure qualité de
vie
Questionnées sur leurs perceptions des soins palliatifs, les infirmières les décrivent
comme des soins qui ne visent ni à traiter ni à guérir la maladie, mais plutôt qui cherchent
à améliorer la qualité de vie. La qualité de vie est définie comme une manière d’ajouter
de la vie aux années, sans prolonger la vie ni sans considérer le nombre d’années, mais
telle qu'elle est vécue par la personne. En effet, « assurer une qualité de vie pour les
patients en soins palliatifs » a été soulignée à plusieurs reprises par les participants. Une
infirmière [I] participante se réfère à un proverbe pour désigner l’importance de prendre
en considération la qualité de vie au détriment de la quantité: « Il y a un proverbe que
j’aime beaucoup, celui qui dit qu’il faut ajouter de la vie aux années et pas des années à la
vie » (I09). Une autre ajoute « En soins palliatifs, on doit avoir comme objectif dans les
soins d’assurer une bonne qualité de vie et mourir en dignité » (I01). Dans cet extrait, ces
infirmières intègrent à leur pratique des repères éthiques par la promotion de la qualité de
vie, le respect de la vie de la personne et de sa dignité.
On constate, également, des similitudes avec les propos des experts qui affirment
l’importance de prioriser des interventions qui favorisent l’amélioration de la qualité de
vie. Dans ce sens, un expert [E] note l’importance d’assurer les conditions pour que le
patient vive le mieux possible ses derniers moments de vie : « Les soins palliatifs sont des
soins d’accompagnement et de confort pour des personnes en fin de vie. Pour moi, ce sont
des soins très importants qui aident beaucoup le malade à vivre le mieux possible et dans
les meilleures conditions, et de vivre en dignité jusqu’à sa mort quand elle est inéluctable »
(E02). De même, un autre expert ajoute que « Les soins palliatifs sont des soins importants
101
pour assurer une qualité de vie, pour vivre et mourir en dignité » (E03). De même, les
soins palliatifs sont décrits par les infirmières comme des soins qui visent surtout à
améliorer la qualité de vie en donnant un sens au temps qui reste à vivre, pour maintenir
l’espoir, vivre en dignité et finir en paix. L’une d’elles ajoute: « Pour moi les soins
palliatifs sont des soins qui sont procurés à un patient pour lui donner une meilleure qualité
de vie en donnant un sens pour les jours qui restent à vivre » (I02). En fait, même si
l’espoir de guérison n’est plus présent, l’infirmière peut mobiliser des sources d’espoir.
Elle peut aider à donner un sens au temps, en considérant le présent du patient comme une
priorité pour répondre au mieux à ses choix durant les derniers moments de sa vie, et en
offrant la possibilité que la famille et les proches puissent rester auprès de lui.
Cependant, d’autres préoccupations exprimées par les participantes relient le curatif au
palliatif. Des infirmières amènent l’idée que les soins palliatifs s’opposent aux soins
curatifs, tout en demeurant toujours fortement associés à la qualité de vie. L’une d’entre
elles précise : « Les soins palliatifs sont des soins accomplis quand dans le curatif on ne
peut plus rien pratiquer » (I10). Une autre soutient : « On est dans le soulagement et dans
le réconfort, on n’est plus dans le curatif » (I01). Une autre infirmière ajoute : « Pour moi
les soins palliatifs sont un engagement avec le patient durant les derniers moments de sa
vie […], des actes qu’on fait, non pas pour le guérir, mais pour améliorer l’état du patient
en fin de vie puisque sa vie est devenue courte » (I04). Les propos de ces infirmières font
penser qu’elles font face à des dilemmes entre le curatif et le palliatif. Pour elles, la
prestation des soins ne doit pas viser à traiter et à guérir la maladie, mais vise plutôt à
améliorer la qualité de vie, tout en considérant le caractère éphémère de la vie du patient.
Bien que les infirmières voient les soins curatifs et palliatifs en opposition, toutefois, l’avis
des professionnels de l’entrevue de groupe [EG] ne va pas dans ce même sens. L’un
d’entre eux dit : « Les soins palliatifs ne substituent pas les soins curatifs qui visent à
guérir. Ils viennent les compléter » (EG). Dans cet extrait, le professionnel de la santé
réfère à la complémentarité entre les soins curatifs et palliatifs.
Bref, une meilleure qualité de vie est définie comme une manière d’ajouter de la vie aux
années, en assurant de meilleures conditions pour vivre et mourir en dignité, en donnant
102
du sens à la vie par l’espoir et par la présence. Le curatif et le palliatif s’opposent, pour
les uns, mais représente un lien de complémentarité, pour les autres (Figure 4).
Figure 4. Perception des soins palliatifs : un moyen d’offrir une meilleure qualité de vie
Ainsi, l’objectif de l’exercice de la pratique infirmière serait d’atteindre ou de maintenir
la qualité de vie de la personne en prenant en compte les caractéristiques de cette qualité
de vie, telles que définies par les participants de cette étude. Mais encore reste-t-il à
comprendre comment s’exerce cette pratique en soins palliatifs.
5.4.2 La pratique infirmière : une prise en charge globale des besoins du patient
L’exercice de la pratique infirmière en soins palliatifs concerne la prise en charge globale
à travers la réponse aux besoins de la personne dans toutes ses dimensions. Cette vision
globale des besoins de la personne est mise en avant par l’un des experts : « La priorité
est de soulager les patients, spécifiquement en fin de leur vie, physiquement et
psychologiquement. Il faut aussi répondre à leurs besoins sociaux et spirituels » (E01). La
réponse à l’ensemble des besoins du patient revêt une importance aussi bien dans les
discours des professionnels de la santé et des infirmières de l’unité de soins en oncologie
que dans l’observation terrain de la pratique et dans l’étude des documents utilisés. Ainsi,
pour évaluer et intervenir auprès de l’ensemble des besoins de la personne, il a été possible
103
d’observer que la fiche de demande de consultation en soins palliatifs comprend une
section sur l’évaluation des besoins. Cette fiche permet à l’infirmière de l’équipe mobile
de faire une évaluation plus approfondie des différents besoins du patient référé aux soins
palliatifs. La fiche de demande de consultation en soins palliatifs évalue la douleur et les
autres symptômes non contrôlés chez le patient. Elle précise l’évaluation de l’état
psychologique du patient, la conscience, la communication, la respiration, l’autonomie,
l’élimination ainsi que l’intégrité de la peau. Cette fiche constitue également, un document
utile pour l’exercice de la pratique en soins palliatifs dans l’évaluation de la dépendance
et de la charge des soins pour le patient. Celle-ci, qui fait référence à l’évaluation des
besoins du patient, permet de guider l’infirmière de l’équipe mobile ainsi que les autres
professionnels dans leurs interventions, pour assurer une réponse adéquate à certains
besoins spécifiques.
Pour une prise en charge globale du patient, les infirmières se préoccupent de répondre
dans leur pratique aux besoins des patients dans différents aspects, aussi bien physiques
que psychologiques et sociaux. Les besoins relatifs au contexte spirituel feront l’objet de
discussion dans une section distincte.
5.4.2.1 Les besoins physiques
Une manière d’assurer la prise en charge des besoins physiques de la personne consiste à
lui fournir des soins de confort. Selon les infirmières, les soins à visée palliative assurent
une fin de vie confortable. Ces soins concernent les soins d’hygiène, ainsi que les soins
reliés à l’élimination, l’alimentation et la mobilisation (par exemple le fait de repositionner
le patient ou de l'asseoir confortablement dans son lit). Une infirmière décrit les soins
effectués : « On assure le confort du patient, on vérifie s’il a besoin d’un matelas à eau,
s’il arrive à manger, on lui met une sonde urinaire au besoin, s’il est constipé on lui fait
les soins nécessaires ou le positionner au lit » (I04). Une autre ajoute : « Il faut assurer le
soin de confort du patient, surtout son hygiène » (I03). Dans la même veine, une infirmière
mentionne : « Il faut faire des soins pour répondre aux besoins du patient et le soulager.
Par exemple, lui mettre une sonde urinaire, lui assurer l’alimentation, s’il n’est pas capable
de se lever faire le changement de position » (I04). Une autre infirmière mentionne « Il
104
faut fournir tous les soins de confort aux malades qui sont atteints de maladies chroniques
et mortelles en fin de vie et éviter les investigations qui assurent l’inconfort » (I09).
Un autre moyen dont dispose l’infirmière dans sa pratique pour répondre aux besoins de
la personne est celui du soulagement de la souffrance. La souffrance, vue d’une manière
générale, semble être comme un élément crucial et présent en fin de vie. La souffrance
peut être physique ou psychologique. Principalement, le soulagement de la souffrance
physique du patient en fin de vie, par des interventions pharmacologiques et non
pharmacologiques, concerne la gestion de la douleur et des autres symptômes physiques
comme les symptômes digestifs, la dyspnée, l’asthénie, la bouche sèche et les mycoses.
Le soulagement de la souffrance physique, par la mise en place de protocoles
pharmacologiques, a été identifié dans les observations terrain et dans les entrevues
comme un élément clé de la pratique des soins palliatifs. Les protocoles pharmacologiques
en vigueur en fin de vie, dans cet établissement, concernent en particulier la prescription
de la Morphine® en perfusion continue. Selon les infirmières, un premier aspect à
considérer pour le patient est de veiller au soulagement de la souffrance physique du
patient, avant même de tenter d’autres soins ou d’aller plus loin. L’observation de la
pratique effectuée dans l’unité de soins en oncologie confirme également, que le souci des
infirmières est de gérer la souffrance du patient, et que l’évaluation de la douleur est
systématique et régulière pour les patients référés en soins palliatifs. Cette évaluation,
réalisée principalement par une échelle numérique, est suivie d’une prise en charge
thérapeutique adaptée. Ainsi, les infirmières vont appliquer le protocole pharmacologique
prescrit pour tenter d’obtenir un soulagement optimal du patient en fin de vie.
Ainsi, la douleur est vue comme un symptôme sérieux à apaiser par des techniques et
l’arsenal thérapeutique en tenant compte des interactions et des complications possibles.
Sur ce plan, les infirmières ont parlé de la stratégie visant à déployer des interventions
variées pour soulager la douleur et les symptômes. Tout comme le dit cette infirmière :
« Je sais qu’il va mourir, mais je ne veux pas qu’il souffre. Je calme surtout sa douleur, je
donne des antalgiques, selon la prescription et au besoin, on augmente la dose de la
105
morphine. Aussi, je vérifie s’il a d’autres symptômes ou effets secondaires du traitement »
(I07). Une autre infirmière abonde dans ce sens : « Parfois nos patients ont des douleurs
vraiment qui sont insupportables. Après l’avis de l’équipe mobile qui passe souvent voir
les patients en soins palliatifs et le médecin traitant, on peut régler les antalgiques selon le
besoin du patient » (I02). Une autre ajoute : « Je fais le maximum pour répondre à leurs
besoins, s’il s’agit de la douleur, on administre des antalgiques pour la douleur, s’il y a
hypotension ou autre problème, on avertit le médecin » (I08). D’ailleurs, l’observation de
leur pratique témoigne que l’infirmière ne manque pas de passer plusieurs fois par la
chambre du patient pour vérifier et observer s’il y a des signes de douleur ou de malaise,
lorsque le patient peut le communiquer verbalement.
En outre, pour gérer les symptômes physiques, les infirmières ont parfois recours à des
interventions non pharmacologiques: « Je donne le traitement prescrit par le médecin. Je
leur donne de la glace à sucer pour les nausées. Je les mets dans une position confortable
quand ils ont une dyspnée. Je leur demande parfois de faire une tournée ou une petite
promenade en dehors de la chambre » (I08).
Les professionnels de la santé établissent également, une interconnexion entre la réponse
aux besoins physiques et la réponse aux besoins psychologiques et émotionnels des
patients. En effet, ils priorisent la prise en charge de la douleur et des symptômes
physiques afin de diminuer l’épuisement et l’anxiété du patient et faciliter une meilleure
communication avec lui. Un membre de l’équipe mobile évoque cette réflexion : « Il faut
essayer de diminuer tout ce qui est douleur et autres symptômes physiques par tous les
moyens thérapeutiques, si le malade a mal, il est épuisé, on ne pourra jamais discuter avec
lui, et quand la souffrance du malade diminue, l’anxiété diminue » (EG). Un membre de
la famille (F) ajoute à ce niveau « Quand on apaise la douleur, ça a un effet psychologique
sur ma mère, elle devient calme, moins anxieuse » (F02). Un propos similaire est fait par
une autre infirmière : « Pour soulager la douleur, ça m’arrive souvent de faire des
massages. Parfois, il y a des douleurs qui sont exagérées par l’angoisse, le fait d’écouter,
de toucher parfois, ça aide le patient et soulage sa douleur. J’ai eu l’occasion de faire des
massages pour une jeune, elle avait trop mal au dos, j’ai fait des massages relaxants, ça
106
l’a soulagé […]. Le massage a diminué la tension qu’elle avait » (I11). Dans ce dernier
extrait, l’infirmière confirme aussi le lien entre la réponse aux besoins physiques et
psychologiques, par le fait que le soulagement des besoins émotionnels aide au
soulagement de la douleur physique. Ainsi, dans le souci d’avoir une approche plus
globale pour la réponse aux besoins, l’infirmière regroupe plusieurs moyens pour la
gestion de la souffrance psychologique et de l’angoisse du patient, soit de l’écoute, en
passant par le toucher jusqu’au massage.
5.4.2.2 Les besoins psychologiques
Les propos des autres professionnels amènent l’idée qu’une prise en charge de la douleur
physique n’exclut pas la prise en compte de la souffrance psychologique. Dans le contexte
d’une souffrance psychologique, prendre soin se traduit par des efforts favorisant un
confort moral et émotionnel des patients en fin de vie. L’analyse des synthèses des
observations, effectuées auprès des infirmières sur le terrain, a permis de mettre en relief
la réponse des infirmières à la souffrance psychologique des patients et de leur famille,
notamment par le fait d’être à l’affut de leurs soucis et en répondant à leurs préoccupations
avec professionnalisme.
Les professionnels concentrent leurs efforts pour garantir le soulagement de la souffrance
psychologique du patient dans ses derniers jours. La prise de conscience de l’importance
de cette prise en charge est révélée ici par une infirmière : « Pour moi, il faut surtout
soulager la souffrance morale du patient par l’écoute » (I08). De même, une attention
particulière est accordée par une autre infirmière, à la qualité d’échange avec le patient et
sa famille, à l’écoute de leurs plaintes, de leurs angoisses et de leur peur de la mort.
L’expertise du psychologue auquel l’infirmière a recours pour répondre à la souffrance
psychologique de la personne, vient s’ajouter à l’écoute et l’échange de celle-ci. Par cette
demande d’expertise, elle tente d’avoir une réponse holistique aux besoins psychologiques
du patient, lorsque les soins à prodiguer dépassent son niveau d’expertise.
Pour les participantes infirmières, proposer les services du psychologue est un moyen
recommandé pour écouter les patients quand elles ne peuvent pas leur consacrer le temps
107
nécessaire ou quand elles ne se sentaient pas entièrement habilitées pour répondre à leurs
besoins psychologiques: « Il y a beaucoup de malades qui ont peur de la mort. Pour calmer
leur angoisse, la psychologue intervient directement. Actuellement, on a un malade qui
est très angoissé, qui connaît son état et qui sait qu’il ne va pas s’améliorer. […]. La
psychologue est venue le voir, elle l’a écouté […]. Maintenant, il est prêt à mourir, mais
il a envie de se sentir vivant jusqu’à ce moment » (I11). Cette même infirmière ajoute :
« La psychologue est toujours là aussi, si on sent que le malade a besoin d’un psychologue,
tout de suite on l’appelle et on discute les cas avec elle pour analyser les situations
ensemble, même si elle n’a pas besoin d’intervenir ». Une autre abonde dans ce sens : « Si
je n’ai pas de réponses à leurs questions ou je ne peux pas soulager leur souffrance morale,
je prends l’avis de la psychologue » (I05).
Toutefois, la réponse aux besoins psychologiques ne pourrait se faire aussi bien sans une
bonne communication. D’ailleurs, à la lumière de l’analyse des entrevues, la notion de
communication nous ramène à l’échange qui s’accomplit entre les soignants et le soigné,
par l’engagement dans un processus de respect mutuel. Une infirmière déclare qu’il arrive
que le patient ait besoin de parler, alors elle profite du moment du soin pour susciter une
communication active avec le patient afin de comprendre ses réactions émotionnelles :
« Je profite aussi du moment du soin pour pouvoir communiquer avec le malade. Donc,
le soin n’est pas uniquement un soin pour moi, mais j’essaye de pousser une porte pour
pouvoir être en communication plus active avec le malade, peut-être qu’il a besoin de
parler à quelqu’un » (I01). De même le besoin de communication chez les patients est
relaté par un membre de la famille: « Ma sœur avait besoin de parler avec quelqu’un.
Quand on parle avec elle, sa douleur n’a pas diminué, ni sa dyspnée, mais elle est
tranquille » (F04). L’observation du terrain témoigne également, que les infirmières
profitent du soin pour établir une relation avec le patient et sa famille. Elles communiquent
et fournissent des renseignements pertinents sur différents aspects relatifs aux soins ou à
la maladie et à ses conséquences. D’ailleurs, cet aspect est validé par les proches des
patients qui ont expérimenté les soins palliatifs à l’établissement. Pour eux, la
communication était de rigueur lors des rencontres avec l’équipe soignante.
108
5.4.2.3 Les besoins sociaux
Outre la réponse aux besoins physiques et psychologiques, une attention est portée sur la
dimension sociale dans la réponse aux besoins du patient et de sa famille. Selon le contexte
culturel, la famille assure une présence continue auprès de son proche, plus
particulièrement en fin de vie, d’où son implication fréquente dans les soins. Ainsi, tout
en répondant aux besoins physiques et psychologiques du patient en cours
d’hospitalisation, il a été possible de constater d’autres types de besoins de nature
sociale, à travers les entrevues et les observations de la pratique des participants. Il s’avère
important de planifier la réponse aux besoins sociaux du patient après sa sortie de
l’hôpital, par l’organisation de la vie quotidienne et des soins à domicile. Cet
aménagement consiste en particulier à élaborer des liens avec des organisations non
gouvernementales [ONG], actives en soins palliatifs à domicile. Ces ONG œuvrent sous
la supervision d’une équipe interdisciplinaire constituée de médecins, d’infirmières, de
pharmaciens, de travailleurs sociaux, de bénévoles et de psychologues.
Selon les propos des infirmières de l’unité d’oncologie, c’est l’infirmière de l’équipe
mobile de soins palliatifs qui coordonne les soins et services avec ces organisations. Ces
ONG procurent des ressources humaines et matérielles aux patients désirant un suivi à
domicile. En effet, lors des périodes d’observation terrain, l’étudiante-chercheuse a pu
relever que l’infirmière de l’équipe mobile prépare la sortie du patient à domicile. Elle
offre un soutien à la personne et à ses proches pour déterminer leurs besoins, en ce qui
concerne l’organisation de la vie quotidienne. Elle ne manque pas de donner des conseils
relatifs à la prestation des soins à domicile, pour la famille, afin de les aider à conserver
la capacité fonctionnelle de leur proche et son autonomie. À cela s’ajoutent les conseils
liés à la facilité d’accès aux ressources et aux équipements appropriés que peuvent fournir
ces organismes caritatifs.
Selon certains participants, l’aménagement de la vie à domicile a émergé suite aux attentes
des patients ou de leur famille d’être accompagnés chez eux, et aussi par manque de
soutien financier, comme en a témoigné cette infirmière : « Tout malade en fin de vie à
un stade avancé demande d’aller à la maison. Mais, comme il n’y a pas de système qui
109
couvre les frais du malade à la maison, quand le malade veut sortir et s’il est dans la région,
celui-ci est orienté vers des ONG qui fournissent des actions sociales et qui s’occupent
des malades en fin de vie à domicile » (I11). À ce propos une famille ajoute : « L’ONG a
été proposée pour nous fournir les soins à la maison, car l’assurance ne couvre que les
frais du séjour à l’hôpital » (F01).
En d’autres mots, la pratique infirmière en soins palliatifs est vue comme une prise en
charge globale des besoins du patient. Cette prise en charge vient répondre spécifiquement
aux besoins physiques, psychologiques et sociaux, auxquels s’ajoutent les besoins
spirituels qui seront traités ultérieurement. Une réponse aux besoins physiques est réalisée
notamment, en assurant le confort physique et la gestion de la souffrance physique. À cela
s’ajoute la gestion de la souffrance psychologique du patient en fin de vie, par l’écoute et
la communication. Quant à la réponse aux besoins sociaux, une organisation des soins à
domicile et une coordination des soins et services avec des organisations caritatives sont
également réalisées (Figure 5).
Figure 5. Pratique infirmière : une prise en charge globale des besoins du patient
110
5.4.3 La pratique en collaboration interdisciplinaire : un élément clé pour les soins
palliatifs
L’analyse des données recueillies a permis de révéler que la collaboration
interdisciplinaire semble être un élément clé pour une prestation de soins adéquats aux
patients en fin de vie. En effet, les infirmières de l’unité d’oncologie peuvent profiter de
l’expertise d’autres disciplines, pour la prestation des soins aux patients atteints de cancer
en fin de vie, en particulier celle de l’équipe mobile interdisciplinaire en soins palliatifs
de l’établissement. Une collaboration qui débute par une demande formelle de
consultation du médecin traitant, adressée à l’équipe mobile interdisciplinaire de soins
palliatifs. Les professionnels de la santé de cette équipe conjuguent leurs efforts pour
optimiser la santé et le bien-être du patient. Les infirmières en oncologie font mention
d’une collaboration étroite qui se fait avec l’équipe mobile interdisciplinaire. L’une
d’entre elles dit: « Il y a le médecin, le résident des soins palliatifs, il y a la psychologue,
il y a les bénévoles qui sont toujours là [...]. Il y toujours la présence de l’infirmière et de
la psychologue qui sont en contact ensemble, il y a beaucoup de communication » (I10).
D’ailleurs, le travail d’équipe ne pourrait se faire sans la communication interdisciplinaire,
mise en place entre tous les membres impliqués en soins palliatifs.
À cet effet, les professionnels de la santé ont mentionné qu’il y avait des rencontres
organisées entre les membres de l’équipe mobile d’une part, et l’équipe soignante de
l’unité d’oncologie, d’autre part. Ces rencontres cherchent à mettre à profit l’expertise des
différents professionnels, et par conséquent, répondre d’une façon optimale aux besoins
des patients en soins palliatifs. Un professionnel déclare à ce propos : « L’équipe mobile
se réunit au moins deux fois par mois. Lors de ces réunions, on discute entre nous, les cas
référés en soins palliatifs pour pouvoir répondre à tous les besoins des patients. De même,
on prend conscience des problèmes auxquels nous sommes confrontés pour tenter de les
régler » (EG).
Lors de la collecte des données, l’étudiante-chercheuse a pu assister à l’une des réunions
de l’équipe mobile. Une infirmière précise que des échanges se font de même, entre
l’équipe soignante de l’unité d’oncologie et l’équipe mobile, dans le cadre des rencontres
111
formelles ou informelles pour partager des informations sur l’état des patients en soins
palliatifs. « Il y a souvent des réunions organisées dans le service entre l’équipe mobile,
les infirmières et le médecin traitant. De même, cet échange se fait tous les jours avec
l’infirmière de l’équipe mobile. On communique ensemble sur l’état des patients en soins
palliatifs et les soins à fournir en fin de vie » (I09). Corroborant ces propos, une autre
infirmière réfère à la collaboration de l’équipe mobile avec l’équipe soignante en
oncologie : « Il y a une collaboration étroite avec l’infirmière des soins palliatifs. Aussi
entre le médecin traitant, le médecin des soins palliatifs et les infirmières sur le traitement
du patient, surtout sur les doses et le nombre de prises de morphine par jour » (I07). Ces
extraits montrent que la collaboration interdisciplinaire permet aux membres de l’équipe
d’oncologie de bénéficier de l’expertise particulière des membres de l’équipe mobile au
profit du patient. Ce qui permet de bonifier et d’améliorer la qualité des soins de fin de
vie au sein de l’équipe d’oncologie.
De même, les professionnels de l’équipe interdisciplinaire mentionnent qu’ils travaillent
en dyade, en particulier lors de la première visite chez le malade référé en soins palliatifs.
En effet, l’observation du terrain a permis de constater le travail binôme entre l’infirmière
de l’équipe interdisciplinaire et le psychologue. Par la suite, la réponse aux besoins en
interdisciplinarité constitue une stratégie en soi pour l’équipe :
En général, on rentre en binôme autant que possible lors de la première visite, on
voit le malade et on fait une évaluation. Le médecin de l’équipe mobile passe
régulièrement. L’infirmière passe presque tous les jours, elle voit les malades,
évalue leurs besoins, leur état, et analyse la situation pour y répondre. Elle partage
après avec nous ces informations, pour prendre les décisions nécessaires dans la
résolution des problèmes qui relèvent parfois de l’éthique (EG).
Cet extrait montre qu’il y a une bonne collaboration, et des discussions sont menées pour
des prises de décisions cliniques à dimension éthique entre les différents professionnels,
particulièrement avec l’infirmière de l’équipe mobile. Bien que les infirmières de l’unité
d’oncologie se voient impliquées dans les prises de décisions cliniques avec l’équipe
112
mobile, elles ne participent pas à celles comportant des enjeux éthiques. Une infirmière
mentionne à ce propos : « On ne se mêle pas des décisions éthiques, c’est le médecin qui
décide » (I07). Une autre enchérit : « On discute des décisions avec le médecin. Le
médecin de l’équipe mobile discute avec nous sur le cas du patient. […], mais c’est la
famille et le médecin qui prennent les décisions éthiques, pas nous » (I06).
A la collaboration susmentionnée s’ajoute une collaboration intra-disciplinaire entre les
infirmières de l’unité d’oncologie et l’infirmière spécialisée de l’équipe mobile en soins
palliatifs. Les propos des infirmières en oncologie soulignent notamment, le rôle pivot de
l’infirmière de l’équipe mobile dans la collaboration entre les professionnels de la santé
et son expertise pour la prestation des soins palliatifs auprès des patients en fin de vie.
Une infirmière en oncologie décrit l’importance de la collaboration avec cette infirmière
de l’équipe mobile, de par sa disponibilité, la qualité de son approche avec le patient en
créant un lien de confiance avec lui et sa famille et surtout pour son expertise dans ce
domaine. « L’infirmière de l’équipe mobile fait une bonne communication avec le patient
et la famille, elle donne tout son temps pour leur expliquer. Tous les patients ont confiance
en elle. Elle avertit le médecin traitant et travaille en collaboration pour résoudre le
problème » (I06). Une autre infirmière affirme la disponibilité et la collaboration étroite
avec l’infirmière de l’équipe mobile : « Elle est vraiment là, elle vient tout de suite quand
on la demande. On travaille toujours en collaboration » (I10). Une autre infirmière
reconnaît l’expertise de l’infirmière de l’équipe mobile et confirme l’acceptation et
l’importance de son rôle : « Parfois, l’infirmière du service ne sait pas quoi faire, comme
elle n’est pas experte en soins palliatifs. L’infirmière de l’équipe mobile nous aide, elle
éclaircit les choses et collabore avec le médecin de l’équipe mobile pour améliorer la
qualité et soulager la douleur » (I05).
Ces propos sur la collaboration de l’infirmière dédiée aux soins palliatifs sont également
appuyés par un professionnel de l’équipe mobile lors de l’entrevue de groupe (EG), qui
décrit la capacité de l’infirmière à établir des relations entre les différents professionnels ;
des relations influencées par des rapports de confiance: « Il y a une collaboration étroite
avec l’infirmière, chacun fait son travail, mais on se complète. Le rôle de l’infirmière dans
113
l’équipe est global. On a confiance en elle, elle sait déléguer aux autres professionnels.
Son rôle est d’introduire et d’aider les équipes à dispenser les soins palliatifs » (EG). Un
autre propos venant d’une famille souligne l’importance de son rôle dans la collaboration
interdisciplinaire : « l’infirmière des soins palliatifs était un trait d’union avec les autres
infirmières et le médecin de l’équipe mobile » (F03).
Cependant, un manque de consensus semble émerger entre les différents professionnels
sur le rôle de l’infirmière de l’équipe mobile dans la prestation des soins techniques aux
patients en soins palliatifs. Un professionnel de l’équipe mobile, lors de l’entrevue de
groupe, décrit le rôle de cette dernière plutôt comme une consultante et comme une source
d’aide pour les équipes soignantes : « L’infirmière de l’équipe mobile n’est pas censée
faire les soins techniques, ce n’est pas dans son profil. Nous, on est des consultants, on
peut aider les équipes, discuter et réfléchir avec l’équipe soignante. Mais, l’infirmière n’a
pas un rôle de soins directs avec le malade, elle n’a pas à donner des soins » (EG).
Néanmoins, les propos de deux infirmières en oncologie ne manquent pas de confirmer
l’importance de son rôle pour des soins spécifiquement techniques aux patients en
contexte de fin de vie, en raison de son expertise dans ce domaine: « Parfois, il y a des
soins qu’on n’arrive pas à réaliser calmement, on fait appel à elle, et elle les fait […]. Pour
moi, c’était elle qui pouvait uniquement les faire » (I01). « En plus de l’accompagnement
psychologique, elle peut mettre une sonde gastrique, une sonde urinaire, mettre du sérum
ou une perfusion » (I02).
En effet, l’observation de la pratique infirmière confirme les propos de ces deux
infirmières. Suite à la demande de l’infirmière soignante, l’infirmière de l’équipe mobile
de soins palliatifs a pu convaincre un patient de l’importance d’un acte de soin, soit la
pose d’une sonde nasogastrique qu’il avait refusée auprès d’autres professionnels. Durant
sa tournée auprès des patients référés en soins palliatifs, l’étudiante-chercheuse a pu
remarquer également, que l’infirmière de l’équipe mobile est considérée comme une
personne ressource pour les infirmières de l’unité d’oncologie. De par sa présence
régulière auprès de ces malades, elle les assiste souvent, lors des soins auprès des patients
en fin de vie, surtout quand les infirmières d’oncologie ne se sentent pas capables de les
114
effectuer. Il va de soi que les propos des infirmières et des professionnels laissent voir que
l’infirmière de l’équipe mobile occupe une place importante au sein de l’unité d’oncologie
et de son équipe. D’ailleurs, les observations de la pratique de l’infirmière de l’équipe
mobile ont révélé sa disponibilité et son rôle dans la sensibilisation à la pratique des soins
palliatifs, à la collaboration interdisciplinaire et à l’accompagnement spirituel. De même,
les propos d’une famille témoignent de la disponibilité de l’infirmière de l’équipe mobile :
« C’était l’infirmière de l’équipe qui m’a parlé des soins palliatifs pour mon mari […].
Elle s’en occupait souvent et venait régulièrement nous voir » (F03). Une autre famille
ajoute : « Elle était disponible toujours en contact avec nous, même en dehors de ses
heures de service » (F02).
En somme, la pratique infirmière en soins palliatifs bénéficie d’une collaboration étroite
interdisciplinaire qui débute par une demande formelle, mais qui se poursuit par une bonne
communication entre les membres impliqués en soins palliatifs. Une disponibilité
marquée de l’équipe mobile et un travail en binôme sont mis en relief. En définitive, cette
pratique réussit grâce aux échanges entre les membres de l’équipe mobile, d’une part, et
entre l’équipe soignante en oncologie, d’autre part. L’accent est par ailleurs, mis sur
l’expertise de l’infirmière de l’équipe mobile et sur son rôle comme personne ressource
auprès des infirmières en oncologie et de la famille (Figure 6).
115
Figure 6. Pratique en collaboration interdisciplinaire : un élément clé pour les soins
palliatifs.
5.4.4 La spiritualité : une toile de fond pour la pratique infirmière en soins palliatifs
La spiritualité émerge de l’analyse de l’observation du terrain et des entrevues avec les
différents participants, comme une toile de fond de l’exercice infirmier en soins palliatifs.
En effet, les propos relatifs à l’accompagnement spirituel sont omniprésents, aussi bien
dans le discours des professionnels de la santé et des infirmières que celui de l’infirmière
de l’équipe mobile. D’ailleurs, tous les participants s’accordent sur l’importance de
l’accompagnement spirituel des patients et de leur famille, tout en respectant leurs
croyances culturelles et religieuses. Ce constat fut validé également, lors de l’observation
de la pratique. Ainsi, il était possible de discerner les efforts déployés par les infirmières
pour assurer un accompagnement spirituel. Cet accompagnement dépendait de la volonté
des patients et de leurs proches ou bien de l’avis des infirmières, le jugeant nécessaire ou
bénéfique pour le patient. Cet accompagnement est mis en relief, en évaluant les besoins
spirituels et en respectant les croyances, les pratiques et les convictions religieuses. Mais
116
aussi, les participants n’ont pas manqué de considérer le contexte culturel, d’assurer une
présence et un silence auprès d’un patient en fin de vie ou de l’aider dans la remise en
question du sens de sa vie.
Selon les infirmières, une évaluation des besoins spirituels permet de mieux comprendre
les demandes exprimées par le patient, afin de déterminer la meilleure manière pour y
répondre. Une infirmière déploie son engagement et son discernement pour le respect des
pratiques religieuses, notamment par l’appel à un référent du culte concerné : « Respecter
sa dignité surtout au niveau des croyances du malade. S’ils veulent un prêtre pour prier
avec eux ou un Cheikh, on les encourage, peu importe leur religion » (I07). Une autre
infirmière ajoute : « S’il a besoin du prêtre, il faut répondre à son besoin » (I03). Toutefois,
cet accompagnement ne se limite pas aux infirmières. L’interdisciplinarité prend toute sa
dimension avec la présence de ressources disponibles dans l’établissement, notamment
l’intervenant spirituel de l’équipe mobile des soins palliatifs. Celui-ci s’engage avec une
approche humaine sans distinction entre les religions. Le rôle de l’intervenant spirituel
semble important selon les infirmières. L’une d’entre elles dit : « Un patient qui se posait
beaucoup de questions, pourquoi moi ? Pourquoi le bon Dieu m’a fait ça ? […]. Là je l’ai
référé au prêtre. Il a été le voir, il l’a aidé à se déculpabiliser et à accepter mieux sa
situation » (I11). Dans cet extrait, l’infirmière tente d’apaiser la souffrance en le référant
à l’intervenant spirituel pour répondre aux questionnements existentiels et spirituels et
l’aider à accepter sa situation. D’ailleurs, l’observation de l’étudiante-chercheuse a mis en
relief la présence journalière du représentant spirituel dans l’unité d’oncologie, son
accompagnement spirituel auprès des patients et de leur famille, toutes religions
confondues, ainsi que son implication aux plans humain et spirituel.
Les propos des infirmières témoignent également, que la réponse aux besoins spirituels
respecte les croyances religieuses de chacun, tout en respectant sa dignité. Dans ce sens,
les infirmières font référence à un ensemble d’actes rituels liés aux croyances religieuses
des patients et de leur famille, qui peut se manifester par des prières individuelles ou en
famille pour une protection divine, en référence à leur tradition religieuse. « Les patients
et leur famille quand ils prient, on ne les dérange pas, on respecte leurs croyances » (I06).
117
Pour une autre infirmière: « Je respecte les croyances du patient. Par exemple, s’il a une
photo d’un saint avec lui, il faut la garder à côté de lui comme il le souhaite » (I03). Une
autre stratégie d’accompagnement spirituel est celle de tenter d’exhausser les vœux et les
pratiques religieuses des patients ou de leur famille par l’assistance à la prière et par le
respect de leur volonté dans l’application de leurs actes de foi. L’une d’entre elles
mentionne à ce propos : « Quand l’aumônier vient chez les malades et nous sommes
présents dans la chambre, on participe aux prières avec eux. Une patiente a demandé
d’aller à l’église, elle souffrait beaucoup, elle n’arrivait pas à marcher, on l’a installée sur
un fauteuil roulant et on l’a descendue à l’église » (I07).
Certains patients et proches sont attachés également, à l’espoir de guérison, même en fin
de vie, d’où la nécessité de respecter leurs convictions. Une infirmière décrit ce contexte
qui semble la mettre devant un dilemme éthique: « Il y a un accompagnement spirituel
aussi avec les patients qui attendent jusqu’au dernier moment un miracle […], on ne peut
rien faire, il faut respecter leurs convictions » (I03). Dans cet extrait, l’infirmière fait le
choix de ne pas ébranler la conviction du patient et de sa famille. Elle fait le choix de le
respecter. Un choix qui semble difficile pour l’infirmière, puisqu’il peut empêcher le
patient ainsi que sa famille de se préparer à la mort qui s’en vient.
Une infirmière explique de même, la prise en charge d’un patient tout en considérant son
contexte culturel et sa volonté : « Selon la culture de chaque patient, parfois je peux mettre
la main sur l’épaule du patient, d’autres non […]. On a, par exemple, un jeune qui refuse
de me regarder. Je m’agenouille, à côté de lui, pour que je puisse parler avec lui, c’est une
approche pour lui dire que je suis à côté de lui » (I02). Par ses propos, l’infirmière
démontre ici un engagement par sa présence, tout en considérant le contexte culturel et la
volonté de chaque patient.
L’accompagnement spirituel s’avère essentiel pour les infirmières, afin d’aider le patient
dans la remise en question du sens donné à sa vie. « Les soins pour moi n’étaient plus
uniquement des soins physiques que je faisais tous les jours, j’essayais au début pour le
stimuler pour reprendre ce goût à la vie parce qu’il était déprimé, autant que possible pour
118
qu’il retrouve lui-même le sens de la vie. Ce n’était pas facile de l’aider à se remettre
debout et l’aider à regarder les choses un peu plus sereinement » (I01). Cette infirmière
soutient que sa pratique de soins visait, non seulement des soins physiques, mais aussi
spirituels pour accompagner le patient et le stimuler à cheminer avec l’expérience de sa
maladie, pour reprendre goût à la vie.
Bref, l’accompagnement spirituel des patients et de leur famille occupe une place centrale
dans la pratique des soins palliatifs en fin de vie, principalement dans le contexte libanais.
Cet accompagnement spirituel qui s’intègre au processus de soin est fondé sur l’évaluation
des besoins spirituels, le respect des croyances, des pratiques et des convictions religieuses
du patient et de sa famille. Cet accompagnement est appuyé par la présence d’un
représentant religieux qui s’implique sur les plans humain et spirituel auprès des
différentes religions. Les observations et les entrevues manifestent aussi l’importance,
pour les infirmières, de considérer le contexte culturel, de garder parfois le silence durant
les échanges ou d’être présentes pour répondre aux questionnements sur le sens donné à
la vie humaine et au temps qui reste à vivre (Figure 7).
119
Figure 7. Spiritualité : une toile de fond pour la pratique infirmière en soins palliatifs
5.4.5 L’accompagnement de la famille : le rôle indispensable de l’infirmière
Pour les infirmières, l’accompagnement s’avère nécessaire pour la famille des patients qui
accompagne elle-même leur proche en fin de vie et qui reçoit souvent l’annonce du
pronostic vital. De même, les observations de l’étudiante-chercheuse peuvent témoigner
que cet accompagnement prend toute son ampleur pour aider la famille dans l’expérience
qu’elle vit avec son proche. Ainsi, cet accompagnement est réalisé par l’écoute, le soutien
au moment du deuil et la transmission d’information.
L’accompagnement de la famille est réalisé, selon les infirmières de l’unité d’oncologie,
par l’écoute. Celles-ci les encouragent à exprimer leurs émotions en leur donnant
l’occasion d’exprimer leur chagrin. Une infirmière estime que pour une famille anxieuse,
la meilleure stratégie c’est l’écoute : « Les familles anxieuses ont besoin qu’on écoute
leurs plaintes, leur laisser exprimer leurs plaintes et leurs pleurs devant nous » (I08). Une
autre affirme : « Les familles ont besoin d’être écoutées pour exprimer leurs inquiétudes,
pour bien accompagner leur malade » (I11). Une infirmière renchérit: « Les soins
120
palliatifs, c’est un accompagnement individualisé avec la famille du patient en fin de vie
[…], il faut écouter leurs plaintes » (I03).
Cet accompagnement est indissociable du soutien assuré à la famille au moment de la fin
de vie, de l’agonie et du deuil. En comprenant les réactions émotives de la famille, les
infirmières essayent de l’aider à traverser les phases du deuil pour pouvoir aborder
sereinement la fin de vie de leur proche. À cet égard, une infirmière qui interprète le
processus normal de deuil apporte un soutien aux proches en fin de vie pour mieux aborder
l’agonie et le décès. Elle décrit le déni de la mort par la famille et explique les difficultés
d’acceptation qui entourent souvent la phase terminale de la vie du malade. Elle mentionne
à ce propos : « Il faut surtout accompagner les membres de la famille […], leur dire les
choses telles qu’elles sont, en même temps les aider à cheminer vers une vérité. Ils sont
parfois en déni de la mort, c’est difficile d’accepter la fin de vie » (I01). Cette même
infirmière ajoute que « C’est normal que la famille passe par une étape de deuil, de refus,
de révolte. Mais à un moment donné, il faut accompagner la famille à travers ces étapes
pour pouvoir aborder la mort, peut-être à long terme, plus sereinement » (I01). Ces propos
s’alignent avec ceux d’une autre famille qui mette l’accent sur la nécessité d’accompagner
la famille durant la phase terminale de leur proche : « Un accompagnement psychologique
était important pour moi et pas pour le patient, et j’insiste que c’est pour moi, c’était
nécessaire pour traverser cette période difficile…ça m’a aidé plus à accepter » (F02).
Ainsi, les infirmières décident de mettre en œuvre leurs connaissances au service de la
famille pour lui procurer un soutien, la préparer aux derniers moments de la vie du proche
et lui expliquer le processus qui s’en suit, comme l’exprime cette infirmière: « La famille
a besoin de plusieurs explications. Elle n’a pas vu de patients en stade terminal, elle ne
sait pas quoi faire, il faut que la famille soit préparée pour ce temps-là » (I06). Dans cet
extrait, l’infirmière cherche à favoriser une diminution de l’anxiété de la famille et à la
rassurer devant l’inconnu, surtout pour les proches accompagnateurs qui n’ont jamais
vécu de situation semblable auparavant. Ces propos sont partagés par le discours de la
famille qui témoigne de l’importance du soutien assuré par les infirmières, lors de
l’hospitalisation de leur proche: « Pour la famille, ça soulage beaucoup un
121
accompagnement aussi une présence en cas de panique et d’angoisse » (F03). Une autre
famille souligne aussi comment les infirmières l’ont consolée dans un moment où elle
était présente auprès de son proche: « Ils étaient à nos petits soins, ils étaient là pour nous
consoler. Ils m’ont beaucoup aidée. Ils m’ont préparée pour cheminer dans mon propre
chagrin » (F02). De plus, une famille renchérit en disant : « Vous savez, c’était pour moi
plus que pour elle […], ils m’ont aidée plus moi » (F01). Ici, les proches précisent que
l’accompagnement des infirmières était une source d’aide importante pour eux. Ces
extraits montrent comment ces derniers sont accompagnés dans la compréhension de la
maladie de leur proche malade et dans leur propre cheminement de deuil. Cet
accompagnement les aide à surmonter la séparation douloureuse d’un être cher.
De plus, de par leur présence au quotidien avec le patient et sa famille, les infirmières
accompagnent la famille par la transmission d’information sur la progression du
cheminement de leur proche. Elles ont constaté que les familles réclament régulièrement
des explications sur l’état de leur proche. Elles donnent aussi des explications à la famille
concernant les soins qu’elles prodiguent et l’informent sur les changements potentiels
relatifs à l’état de leur proche. Grâce à leurs soins, elles assurent la transmission
d’information à la famille sur l’action des médicaments et les effets susceptibles de
survenir. Ces explications permettraient de les rassurer: « La famille a toujours besoin
d’explications et le besoin de l’informer de tout bonne communication, même si on a
changé par exemple le sérum du glucosé au sérum salé, la famille pose des questions,
pourquoi il y a eu ce changement. Il faut toujours les informer » (I03). Cette infirmière
qui se soucie du bien-être de la famille décrit le besoin de celle-ci, d’être rassurée par la
transmission d’information relative aux soins de leur proche malade. Dans la même
perspective et pour assurer le bien-être de la personne, une infirmière en oncologie raconte
son expérience avec une malade. Durant ce temps, elle accompagnait la famille pour
l’habiliter à prendre soin de la personne en fin de vie et de lui permettre de demeurer à
domicile et y mourir. « J’avais une patiente jeune de 30 ans [...]. Sa mère avait envie que
sa petite fille meurt à domicile [...]. La patiente était sous morphine en pousse-seringue
[...]. J’ai enseigné à la mère comment faire la surveillance de la perfusion, comment faire
122
fonctionner un pousse seringue, comment donner la morphine à sa fille en sous cutanée,
si elle en a besoin, et comment faire des pansements et ce qu’elle va surveiller » (I06).
En résumé, l’accompagnement de la famille des personnes soignées prend toute sa
dimension dans la pratique infirmière en soins palliatifs. Cet accompagnement est réalisé
grâce à l’écoute qui donne l’occasion à la famille d’exprimer leur chagrin. Les infirmières
mettent également, à disposition des familles, leurs connaissances par la transmission
d’information en lien avec les soins et l’organisation de la vie quotidienne de leur proche
malade. Mais aussi, en accompagnant la famille pour l’aider à traverser les phases du deuil
(Figure 8).
Figure 8. Accompagnement de la famille : le rôle indispensable de l’infirmière
En d’autres mots, l’analyse de la triangulation des différentes sources et méthodes de
collecte des données, relatives à la pratique infirmière auprès des patients cancéreux au
sein d’une équipe interdisciplinaire au Liban, a permis de mettre en lumière cinq thèmes
centraux (Annexe 7). Ainsi, les soins palliatifs sont perçus par les participants de cette
étude comme des soins qui favorisent une meilleure qualité de vie, par une prise en charge
holistique de la personne à travers les dimensions aussi bien physique, que psychologique
et sociale, tout en tenant compte également des besoins spirituels. Bien que la prestation
de soins palliatifs fasse partie de la pratique des infirmières, pour assurer une prise en
charge holistique, ces dernières sont épaulées par une équipe mobile interdisciplinaire.
123
Enfin, les données recueillies ont mis en relief le rôle des infirmières dans
l’accompagnement de la famille des patients.
Toutefois, l’analyse des données révèle que l’exercice de la pratique infirmière exige
également une écoute attentive et un accompagnement chaleureux afin d’assurer une
présence auprès du patient et de sa famille. À cet effet, il est intéressant de signaler que
les entrevues et l’observation sur le terrain amènent à constater que cet accompagnement
est fondé sur une relation humaniste empreinte de caring dans la prise en charge du patient
en fin de vie. Dans la mesure où cette approche humaniste de caring s’inscrit comme une
toile de fond pour la pratique en soins palliatifs, elle transcende l’ensemble des cinq
thèmes centraux. Le choix de cette approche va permettre d’abord, d'aller plus loin dans
l’analyse par rapport à cet accompagnement humaniste, et ensuite, de constituer un
élément clé au cœur des soins palliatifs, en lui donnant un ancrage disciplinaire infirmier.
Il permettra enfin, de répondre à la deuxième question spécifique de recherche. Les
paragraphes qui suivent décrivent les propos des participants en lien avec l'approche
humaniste du caring en soins palliatifs.
5.5 L’approche humaniste de caring en soins palliatifs
Lorsque questionnées sur la relation humaniste de caring, les infirmières ont indiqué à
quel point l’aspect relationnel avait une place centrale pour elles, quand elles dispensent
des soins palliatifs. Selon elles, la notion du soin humain est étroitement liée à celle des
soins palliatifs, et semble majeure dans la pratique infirmière auprès des patients en fin de
vie. En effet, lors de l’observation de la pratique, l’étudiante-chercheuse a été témoin de
l’intérêt marqué des infirmières à vouloir trouver les moments propices pour accompagner
ces patients. Ces moments sont marqués par une relation particulière de présence, de
respect et d’écoute active. Les soins authentiques mettent la personne au cœur du soin.
La majorité des infirmières interviewées identifie l’importance de la présence auprès du
patient dans la relation humaniste du caring. Une infirmière mentionne que par sa
proximité physique, elle cherche à s’immerger dans une approche humaine avec le patient
souffrant: « Il y a la réponse aux besoins du patient, mais il y a aussi la présence. […].
124
Être présente, être plus humaine, ne pas être robotique dans la pratique, ne pas juste donner
le médicament et quitter » (I03). De même, l’une d’elles décrit son engagement, pour
rester proche du patient malgré sa charge de travail, pour partager avec lui ses instants
d’angoisse. Par sa présence, elle démontre empathie et compassion envers le patient, en
lui manifestant le sentiment qu’elle comprend ce qu’il vit. « Je préfère être très proche du
patient, je travaille sur ce point même si j’ai du travail, pour écouter ses plaintes [...], lui
faire sentir que je comprends ses souffrances » (I09). Corroborant ces propos, une autre
infirmière a imagé le soin humain comme une disponibilité auprès du patient: « Pour un
patient en soins palliatifs, il faut être présent quand il nous le demande, quand il a besoin
de nous » (I03). Ces extraits mettent en évidence l’importance pour les infirmières de
démontrer une présence auprès de leur patient en fin de vie. Elles vont prendre le temps
de calmer son angoisse ou de s’informer de ce qu’il ressent. À cet égard, un membre d’une
famille témoigne de l’attitude humaniste empreinte d’empathie créée entre l’infirmière et
la patiente pour l’accompagner en fin de vie : « C’est la présence, le toucher, c’est la
proximité de l’infirmière […]. Elle était proche de ma sœur, elle comprenait sa
souffrance » (F03).
De plus, les infirmières démontrent une relation de caring par un respect envers le patient.
Elles tentent même, de faire reconnaître et respecter sa volonté en fin de vie. Lors d’une
entrevue, une infirmière déclare à ce propos : « Il faut respecter ce que le patient demande,
tout ce dont il a besoin, il faut le lui donner, lui permettre de prendre ce qu’il veut » (I03).
L’observation de la pratique sur le terrain témoigne également, que malgré leur surcharge
de travail auprès des patients et la surcharge administrative, les infirmières n’ont pas
manqué de démontrer en continu une attitude de respect envers le patient et sa famille.
La relation humaine centrée sur le caring se réalise également, chez les infirmières par
une pratique d’écoute active du vécu du patient et de sa famille. Les infirmières ont évoqué
l’importance de prendre le temps d’écouter le patient et la famille, ce qui peut être
bénéfique pour eux. Une infirmière de l’unité d’oncologie affirme que l’écoute des
patients est un moyen pour les encourager à exprimer leurs émotions et leurs sentiments
positifs et négatifs. « Pour les accompagner, il faut juste prendre le temps de les écouter,
125
pour exprimer leurs sentiments et leurs plaintes » (I03). L’observation de la pratique
infirmière a permis d’identifier l’importance d’écouter le patient. En effet, lors des soins,
les infirmières ont eu l’occasion de mettre en valeur leurs capacités relationnelles
d’écoute. Elles ont privilégié parfois le silence pour écouter les plaintes du patient et celles
de sa famille. Une autre infirmière affirme également, l’importance de l’écoute ainsi que
l’humanisation des soins pour le patient: « C’est avec beaucoup d’écoute qu’on assure
l’accompagnement des patients en fin de vie. Le fait de les écouter, c’est qu’ils sont
importants et qu’ils sont présents, qu’ils ne soient pas un numéro ou un cas » (I11).
En outre, les entrevues et les observations témoignent du souci de certains participants à
respecter le silence, durant les moments d’échanges avec la famille, par exemple. Dans ce
contexte, il faut savoir faire preuve d’écoute active et respecter le cheminement personnel
du patient et de sa famille. Une infirmière décrit son attitude envers une proche qui pleurait
en présence de l’aumônier dans la chambre : « C’est par mon silence, je l’ai laissée
exprimer ce qu’elle ressentait. Je n’ai rien dit, je n’ai fait que mettre la main sur son épaule
et de la laisser elle-même prendre le temps, soit de parler ou de garder le silence ou de
pleurer. Mais, elle sait qu’il y a quelqu’un qui est là […], qu’elle n’est pas seule » (I01).
Dans cet extrait, l’infirmière favorise le silence dans son attitude avec la famille peinée.
Pour elle, c’est par le silence qu’elle doit recueillir l’expression des émotions des proches
et ainsi, leur montrer son soutien par le toucher, en particulier, la pose de la main sur ses
épaules.
D’autres propos mènent à constater que l’approche relationnelle du caring constitue une
approche de soins authentique où la personne est au cœur du soin. Les aspects de la
relation humaine de caring se concrétisent pour les infirmières en offrant des soins
infirmiers personnalisés au patient, et en développant une relation authentique avec
chaque patient dans la pratique professionnelle. Les résultats de la présente étude ont
montré que les infirmières respectent le cheminement unique de chaque patient. Une
infirmière décrit l’approche humaniste des soins par le fait de considérer chaque patient
comme étant unique, ce qui permet de prodiguer des soins humains individualisés : « C’est
la personne en tant que telle qu’on doit prendre en charge, dénudée de tout ce qu’elle avait
126
comme grandeur […]. La réponse aux besoins est dépassée pour toucher l’humanité de la
personne » (I02).
Cette approche de caring se trouve intégrée à la routine des infirmières lors de la prestation
des soins auprès de leurs patients. Elle relève du travail quotidien de l’équipe soignante,
comme l’indique une infirmière: « Moi je crois qu’on fait toujours du caring sans le
savoir, sans réfléchir que je fais du caring. On le fait d’une façon inconsciente chaque
jour » (I10).
Les observations effectuées auprès des infirmières ont permis d’appuyer leurs propos sur
l’accompagnement à travers la relation humaine de caring, une approche centrée sur le
patient en fin de vie. En effet, lors des entrevues, les infirmières ont traité à différentes
reprises des éléments fondamentaux d’une relation empreinte de caring, telle la présence,
le respect et l’écoute active tout en privilégiant parfois le silence et en centrant la personne
au cœur du soin (Figure 9). Écouter la personne soignée et être présente sont des moyens
identifiés par les infirmières pour accompagner et soulager les personnes qu’elles soignent.
Les infirmières veillent à combiner leurs activités de nature technique et relationnelle pour
optimiser le peu de temps dont elles disposent auprès du patient, afin de fournir une
meilleure qualité de vie avec une prise en charge globale des besoins du patient. Elles
profitent de leur présence lors des soins à accomplir afin de créer une relation de confiance
avec le patient, de communiquer avec lui, de le toucher, de s’asseoir près de lui, de détecter
sa détresse ou de répondre à ses questions.
127
Figure 9. Approche humaniste de caring en soins palliatifs
5.6 Les facteurs contraignant ou facilitant la pratique infirmière en soins
palliatifs
La première question spécifique de recherche s’intéressait particulièrement aux facteurs
qui peuvent exercer une influence sur la pratique infirmière en soins palliatifs. Les
paragraphes qui suivent décrivent en premier, les différents facteurs contraignant, et par
la suite, ceux facilitant la pratique infirmière en soins palliatifs.
5.6.1 Les facteurs contraignant la pratique infirmière en soins palliatifs
Les entrevues avec les différents types de participants illustrent une panoplie de facteurs
contraignant l’exercice des soins palliatifs. Ces barrières limitent les aspirations des
acteurs pour une pratique de qualité. L’analyse des données recueillies met en évidence
trois catégories de facteurs contraignants: professionnels, organisationnels et émotionnels.
128
5.6.1.1 Les facteurs contraignants professionnels
Au cours de la pratique des soins palliatifs, les infirmières sont en face de barrières qui se
résument par la résistance des médecins, le manque de consensus sur le début des soins
palliatifs et le manque de formation.
5.6.1.1.1 La résistance des médecins
Un consensus dans les discours des répondants rend compte d’une importante barrière liée
à la pratique des soins palliatifs, soit la perception de résistance de l’équipe médicale en
oncologie en regard de l’approche palliative. Cette résistance se manifeste notamment,
par le manque de coordination interdisciplinaire. À cela s’ajoute l’introduction tardive des
soins palliatifs pour les patients atteints de cancer incurable ou de la référence à l’équipe
de soins palliatifs. Une infirmière exprime ses plaintes en regard des résistances des
médecins à l’approche palliative : « Il n’y a pas beaucoup de coordination entre le médecin
curatif et le médecin de l’équipe mobile des soins palliatifs. On n’est pas encore arrivé à
un stade où on accepte les propositions palliatives, ça crée des difficultés pour les
introduire » (I11).
De même, pour un expert, la difficulté à se référer à l’équipe de soins palliatifs réside
souvent dans la crainte pour les médecins de ne plus être en mesure de diriger les soins au
patient : « Le médecin a peur […], s’il veut référer son patient à l’équipe de soins
palliatifs, de perdre son patient » (E02). Dans la même veine, un autre expert renchérit
que pour certains médecins, il est important de ne pas enlever l’espoir de guérir un patient
par l’arrêt du traitement curatif : « Soigner un malade jusqu’au bout c’est leur devoir (les
oncologues), et qu’on ne peut pas abandonner un malade qui a une maladie à laquelle ils
connaissent encore un soi-disant traitement » (E03). Ce même expert ajoute qu’il arrive
que certains oncologues adoptent des stratégies de soins palliatifs selon leur vision :
« Parfois, il y a certains oncologues qui pratiquent les soins palliatifs sans les appeler.
C'est-à-dire qu’il arrête une chimiothérapie et dit aux infirmières que le malade n'est pas
à réanimer […]. C'est-à-dire, de ne pas s’acharner » (E03).
129
La résistance des oncologues sur la pratique des soins palliatifs a été également soutenue
par un professionnel : « Il y a la mentalité, certains savent que les soins palliatifs existent,
mais ils croient que ce sont juste des soins de fin de vie […]. Dans les soins palliatifs, on
pense symptomatique, les autres médecins (oncologues) pensent toujours curatif » (EG).
Une infirmière donne aussi son avis à ce propos : « Il y a quatre ou cinq médecins qui
refusent l’idée de soins palliatifs, ils veulent faire tout jusqu’au bout » (I08).
5.6.1.1.2 Le manque de consensus
La résistance de l’équipe médicale en oncologie, en regard de l’approche palliative,
implique également une ambigüité et un manque de consensus à deux niveaux. Celui du
moment de l’introduction des soins palliatifs dans la trajectoire de la maladie et celui du
discernement entre le curatif et le palliatif. À cela s’ajoute la fausse croyance que les soins
palliatifs induisent la mort du patient. D’où la nécessité de trouver le moment opportun
pour laisser la place à l’approche palliative, comme en témoigne cette infirmière : « Les
soins palliatifs ce n’est pas laisser la personne mourir et ne rien faire, ce n’est pas
s’acharner, non plus. Il y a le juste milieu à faire selon le cas, et c’est ça qui est difficile à
comprendre » (I01).
À ces propos s’ajoutent la tendance des oncologues de référer tardivement leurs patients
aux soins palliatifs : « Les soins palliatifs sont toujours demandés en retard. On ne peut
pas débuter les soins palliatifs en fin de vie, les patients doivent en profiter plus tôt pour
améliorer leur qualité de vie » (I10). Dans ses propos, l’infirmière explique que la
transition tardive des soins curatifs aux soins palliatifs empêche l’accès aux bénéfices
escomptés de la pratique des soins palliatifs et limite leur efficience dans l’amélioration
de la qualité de vie. Une autre infirmière explique que les soins palliatifs sont souvent
marginalisés par rapport aux soins curatifs : « Un vrai soin palliatif c’est en premier, une
bonne relation d'aide avec la famille et avec le patient. Une relation qui ne doit pas se faire
24h avant la mort du patient, mais avant. Par exemple, avant un mois ou deux mois, ce
qui est nécessaire pour le patient, afin qu’il comprenne c’est quoi les soins palliatifs »
(I06). Une infirmière exprime également, son malaise sur le suivi tardif des patients dans
la trajectoire de la maladie, et considère les soins fournis aux patients comme des soins
130
terminaux, plutôt que des soins palliatifs: « Ce qui empêche, c’est le suivi tard, il peut
commencer un peu plut tôt, beaucoup plus tôt, même avec le curatif [...]. Mais, on laisse
tout jusqu'à la fin, ce sont des soins terminaux plutôt, pas palliatifs purs » (I10). La
difficulté à établir des frontières entre le curatif et le palliatif est évoquée par d’autres
participants. À titre d'exemple, cet extrait des propos d’un professionnel de la santé fait
état des contraintes des infirmières face à la transition du curatif au palliatif : « Les
infirmières sont frustrées parce qu’elles n’arrivent pas à pratiquer les soins palliatifs,
comme elles le voient et comme elles l’ont appris dans leur cours. Elles ont toujours cet
arrachement entre le curatif et le palliatif » (EG).
En outre, les soins palliatifs sont appliqués souvent en association avec d’autres
traitements déraisonnables, visant à prolonger la vie et incluant des investigations jugées
inutiles en fin de vie. Une infirmière exprime son malaise à ce propos : « On demande des
bilans même en fin de vie, on a fait une fois un bilan pour la patiente, le temps de mettre
l’étiquette sur les tubes, elle était décédée. Ce n’est pas acceptable » (I09). Dans cet
extrait, l’infirmière reconnaît qu’elle est tenue à effectuer des examens qu’elle trouve
inutiles et intolérables pour des patients en fin de vie, puisque cela n’améliore pas leur
condition.
Un autre facteur qui fait obstacle à la pratique infirmière des soins palliatifs réside dans le
manque de modèle national de soins palliatifs, à l’instar des modèles existants dans le
monde, selon les experts. Il s’agit d’un modèle qui serait transposable au contexte de la
population libanaise et qui unifierait la pratique des soins palliatifs entre les différents
acteurs : « On n’a pas de modèle de soins palliatifs qui existe au Liban, pourtant il y a des
modèles qui existent dans le monde, on peut adopter quelques modèles, mais un modèle
au Liban n’existe pas » (E02). L’importance au recours à un modèle en soins palliatifs a
été également évoquée par un autre expert. « Pas de modèle en soins palliatifs à suivre au
Liban. Ce n’est pas chaque hôpital ou chaque université qui va avoir son propre modèle.
Il faut avoir un seul modèle sur le plan national qui guide les soins palliatifs » (I03).
131
5.6.1.1.3 Le manque de formation en soins palliatifs
Le manque de formation en soins palliatifs a émergé comme une barrière qu’évoquent
surtout, les infirmières et les experts. Pour l’un des experts, il s’agit d’un manque de
connaissances et de formation spécialisée des équipes en oncologie sur les soins palliatifs,
vu que cette spécialité n’était pas intégrée dans les cursus académiques auparavant. « Le
Comité national des soins palliatifs a introduit les principes de base des soins palliatifs
dans les programmes de formation générale des infirmières, mais ce n’est pas suffisant.
Aussi, il y a un manque de connaissances chez les médecins. Dix ans plus tôt, les médecins
n’avaient pas une formation sur ce domaine » (E02). A l’égard des notions de base sur les
soins palliatifs introduits dans les cursus, les infirmières en oncologie affirment
l’insuffisance de leurs connaissances sur les soins palliatifs et réclament une formation
spécialisée pour s’engager davantage avec les patients. L’une d’entre elles ajoute : « C’est
souvent le manque de formation, on n’est pas vraiment spécialisée en soins palliatifs »
(I06). De même, une autre infirmière confirme son besoin de connaissances
supplémentaires sur les soins palliatifs : « On aime en savoir plus, avoir plus de
connaissances à propos des soins palliatifs » (I09). Une autre ajoute : « Je souhaite suivre
des formations ou des sessions en soins palliatifs […]. La formation nous aide à savoir
comment parler avec le patient en soins palliatifs et à lui fournir le meilleur soin de
qualité » (I08). Ces extraits relatent la soif des infirmières à développer leurs
connaissances afin d’offrir aux patients la meilleure qualité possible de soins palliatifs.
5.6.1.2 Les facteurs contraignants organisationnels
Les facteurs organisationnels évoqués par les participants à l’étude reviennent au manque
d’infrastructures organisationnelles ainsi qu’au manque de temps et à la surcharge de
travail.
5.6.1.2.1 Le manque d’infrastructures organisationnelles
Les barrières organisationnelles semblent dominer dans les entrevues avec les infirmières,
surtout en ce qui concerne les infrastructures permettant le respect de la vie privée du
patient et de sa famille en fin de vie. Par ailleurs, selon la perspective des infirmières, la
structure organisationnelle est façonnée par un ensemble d’éléments contextuels qui
132
délimitent le cadre dans lequel peuvent s’exercer les soins palliatifs. Parmi ces éléments,
le manque d’unités de soins palliatifs et la promiscuité entre les patients dans une même
chambre sont identifiés comme des barrières entravant la prestation de soins palliatifs. En
effet, l’observation de la pratique a permis de noter que les patients en oncologie sont à
des stades différents de la maladie et sont souvent hébergés dans une même chambre avec
des patients qui ont des diagnostics différents. Un malade en début de chimiothérapie
pourrait par exemple, se retrouver avec un malade en fin de vie.
Ainsi, cette barrière, qui semble être un élément récurrent chez plusieurs infirmières, rend
plus difficile la prestation des soins de qualité, autant pour les patients en oncologie que
pour ceux en soins palliatifs. L’une des infirmières mentionne ses plaintes à ce propos :
« Il n’y a pas de chambre particulière. Le patient en fin de vie a le droit d’être dans une
chambre à un seul lit parce que parfois, le patient regarde son voisin qui meurt et qui me
dit : « Je serai le suivant » (I08). Une autre confirme cette perspective « C’est difficile, le
fait qu’il y ait un malade en soins palliatifs et un autre qui ne l’est pas, dans la même
chambre » (I05). Cette difficulté a été décelée lors des observations des infirmières. En
effet, cette promiscuité impose le manque de vie privée entre les patients et ses proches,
et limite les soins individualisés dans l’exercice infirmier de soins palliatifs. À cela
s’ajoute les difficultés de communication avec la famille. Ainsi, pour divulguer une
information, l’infirmière se retire de la chambre avec la famille pour discuter dans le
couloir ou dans une chambre avoisinante afin de respecter la confidentialité dans les
échanges.
5.6.1.2.2 Le manque de temps et la surcharge de travail
À ces données liées aux infrastructures organisationnelles s’ajoutent d’autres obstacles,
tels le manque de temps ainsi que l’intensité de la charge de travail des équipes soignantes.
La surcharge de travail est perçue, tant par les infirmières que par les autres participants,
comme l’une des composantes qui affectent le plus la réalisation des soins palliatifs. Les
infirmières reconnaissent la lourdeur de leurs tâches et les considèrent souvent
accablantes. Une infirmière semble exprimer un sentiment de frustration de ne pas avoir
donné les soins qu’elle aurait voulu pour un patient en soins palliatifs, par manque de
133
temps et suite à sa surcharge lors de son quart de travail. Ainsi, le fait d’avoir un patient
en soins palliatifs peut représenter une différence au niveau de la charge de travail de
l’infirmière. Pour elle, la présence d’un patient en soins palliatifs constitue une charge de
travail additionnelle. « Personnellement, je ne peux pas donner toutes les informations que
j’aime donner au patient en soins palliatifs et à sa famille si j’ai, par exemple, six et sept
patients avec un patient en soins palliatifs. La charge du travail va diminuer nos forces à
donner plus d’information, je n’ai pas le temps à lui donner tout seul » (I03). Une autre
précise : « Le temps nous manque, les ressources nous manquent aussi» (I08).
Quand les patients en fin de vie sont hospitalisés dans une unité de soins en oncologie,
l’infirmière est contrainte à faire des choix. Elle priorise les soins aux patients ayant des
soins aigus plutôt que ceux qui sont en soins palliatifs. Ce choix est motivé soit par un
manque de temps ou soit par un manque de compréhension de ce que sont les soins
palliatifs. L’une d’entre elles dit : « Je pense qu’il y a des malades plus prioritaires, il y a
des malades en soins aigus, et non pas palliatifs, qui exigent beaucoup de soins. Ainsi, je
laisse tomber parfois les soins de ceux qui sont en soins palliatifs. J’ai l’idée que c’est le
maximum qu’on peut faire pour ces malades. Ils sont en fin de vie et c’est fini » (I04).
Les infirmières et les experts s’accordent à dire dans leurs propos, que la surcharge de
travail des infirmières empêche une prise en charge globale du patient, par manque de
temps. Les infirmières déplorent que le manque de temps les empêche d’établir une
relation personnalisée avec le patient et de communiquer suffisamment avec lui. Faute
d’une charge de travail équilibrée, les infirmières n’ont pas toujours le temps d’être
proches comme elles le souhaiteraient avec le patient en fin de vie. Assurer plus de
présence auprès de lui exigerait selon elles, une vaste disponibilité dans leur horaire. Ainsi,
le déficit en effectifs infirmiers et les ratios élevés patients/infirmier sont autant
d’éléments qui contribuent, à la fois, à l’augmentation de la charge de travail perçue par
les infirmières et à la perception d’un climat de travail défavorable en soins palliatifs,
comme en témoignent certaines. Le nombre insuffisant d’infirmières dans l’unité tend à
limiter la présence de l’infirmière avec le patient et par conséquent, la possibilité d’entrer
en communication avec lui ou de créer une relation d’aide. Une infirmière précise : « Le
134
nombre d’infirmières n’est pas toujours suffisant pour répondre aux besoins du malade.
Parfois, quand je prends en charge cinq malades, je peux avoir un malade en fin de vie, je
ne peux pas être très proche de lui, je n’ai pas le temps d’être à côté de lui, il n’y a pas de
temps suffisant » (I09). Une autre renchérit en disant : « Nous, comme infirmières, on ne
peut pas souvent faire une relation d’aide, car on prend en charge en moyenne six à sept
patients. Parfois, on a deux patients en soins palliatifs et d’autres qui sont en état critique
et qui ont besoin de beaucoup de temps pour des choses vitales. On n’a pas trop le temps
pour la communication, pour avoir une bonne relation » (I06). L’avis d’un expert soutient
ces propos : « Les infirmières ne peuvent pas pratiquer les soins palliatifs avec la surcharge
de travail. Elles n’ont pas le temps de s’asseoir à côté du malade pour discuter avec lui,
prendre le temps avec lui. On ne doit pas avoir la même charge de travail pour les mêmes
ratios de malades » (E02).
La charge administrative est également, à l’origine d’un sentiment de malaise évoqué par
une infirmière, celui de manquer de temps pour se consacrer à des activités de nature
relationnelle avec le patient. Le travail administratif pour elle, prend le pas sur sa présence
auprès des patients: « On a à peine le temps de rester avec ses patients pour écouter leurs
plaintes, vu le travail dans tout le service et la charge administrative » (I10). En effet,
l’observation de leur pratique a permis de distinguer plusieurs barrières à la pratique des
soins palliatifs. Sur l’ensemble du travail effectué par les infirmières, entre les soins aux
patients et le travail administratif, c’est ce dernier qui domine. Sur le terrain, les
infirmières consacrent une grande partie de leur temps à la tenue des dossiers.
5.6.1.3 Les facteurs contraignants émotionnels
La lourde charge émotive relative à la pratique infirmière auprès des personnes en fin de
vie ainsi que le manque de temps dû à la surcharge du travail, empêchent les infirmières
de faire leur deuil après le décès du patient. « Parfois, on n’a pas le temps de faire le deuil
du malade. On est en déni, on n’a pas le temps entre un patient et un autre patient. L’un
est mort et on prépare la chambre pour un autre. On n’a pas le temps d’accepter sa mort.
On ne peut pas vivre la mort du patient, on devient robotique d’après ce qui se passe »
(I03). De même, aller à l’encontre de leurs valeurs constitue un obstacle émotionnel qui
135
provoque chez les infirmières soignantes une frustration et un épuisement émotionnel, qui
par conséquent, affecte leur vie personnelle. Ce constat est confirmé par les propos d’une
infirmière qui se voit obligée de s’acharner sur un patient mourant pour effectuer une
investigation ou une réanimation qu’elle juge inappropriée :
On s’acharne jusqu’au bout et c’est là qu’on épuise les infirmières et parfois nous
sommes obligées de faire des choses qui sont à l’encontre de notre conscience, de
nos valeurs. Nous, en tant qu’infirmières, nous ne sommes pas convaincues, mais
nous sommes obligées de le faire selon la prescription médicale [...]. Par exemple,
un malade est en train de mourir, et lui faire un bilan ou bien faire passer un culot
globulaire. Le culot est encore branché et le malade expire (I01).
Ces dissensions poussent certaines infirmières à se protéger de l’épuisement par des
mécanismes de défense, en évitant de s’impliquer émotionnellement avec le patient. Ce
malaise se traduit chez une infirmière : « Parfois, j’essaye de garder des limites et de ne
pas m’investir avec le patient. Déjà, je suis dans le burn-out et ça affecte ma vie privée et
je ne veux pas aller jusqu’au bout, ce sont mes mécanismes de défense, face à la souffrance
des patients » (I08). Dans cet exemple, l’infirmière explique son attitude qui l’empêche
de s’investir dans la relation humaniste avec le patient, en mettant une barrière aux
échanges intimes avec l’autre, et en évitant de s’engager émotionnellement avec lui pour
éviter un épuisement émotionnel. Dans la même veine, un autre propos d’experts confirme
les attitudes des infirmières dans la prise de distance: « Elles répondent aux besoins du
patient en fin de vie. Elles font le juste nécessaire dans la gestion des besoins physiques,
sans s’investir. Elles essayent de ne pas s’attacher aux patients en fin de vie ou de
s’impliquer à leurs besoins psychologiques et spirituels pour se protéger du burn-out »
(E02).
Bref, l’analyse des résultats a permis d’identifier des facteurs contraignant la pratique
infirmière en soins palliatifs. D’abord, les facteurs professionnels en lien avec la résistance
des médecins, le manque de consensus sur le début des soins palliatifs par rapport aux
soins curatifs et le manque de formation des infirmières. Ensuite, des facteurs relatifs à la
136
structure organisationnelle et la surcharge de travail des infirmières sont mis en évidence.
Enfin, les facteurs émotionnels qui ont surgi, sont ceux liés à la tension psychologique et
émotive. Une tension à laquelle les infirmières sont confrontées dans leur pratique
quotidienne en soins palliatifs auprès de personnes atteintes de cancer en fin de vie (Figure
10).
Figure 10. Facteurs contraignant la pratique infirmière en soins palliatifs
5.6.2 Les facteurs facilitant la pratique infirmière en soins palliatifs
Face à ce large éventail d’obstacles dégagés qui peuvent entraver la pratique infirmière en
soins palliatifs, des facteurs facilitants ont aussi pu être identifiés. Ceux-ci sont répartis en
trois groupes, soit les facteurs professionnels, organisationnels et émotionnels.
5.6.2.1 Les facteurs facilitants professionnels
Les sections suivantes reflètent certaines propositions que les participants à l’étude
considèrent comme des facteurs professionnels facilitant la promotion de la pratique en
soins palliatifs. Ces facteurs dépendent de la reconnaissance nationale de cette pratique,
de l’harmonisation de la collaboration interdisciplinaire et du développement de la
formation dans ce domaine.
137
5.6.2.1.1 La reconnaissance nationale
Un premier facteur facilitant la pratique des soins palliatifs est celui de sa reconnaissance
nationale. Les opinions divergent parmi les différents experts nationaux à ce sujet. L’un
des experts estime que les soins palliatifs sont déjà considérés comme une discipline
reconnue dans le domaine de la médecine : « La spécialité des soins palliatifs est reconnue
au Liban, actuellement comme une spécialité à part entière pour la médecine palliative »
(E01). Un autre expert le contredit : « Les soins palliatifs doivent être une part de
l’environnement, de l’atmosphère de chaque hôpital, dans le système de santé au Liban,
ce qu’on n’a pas » (E02). À cet égard, les professionnels de la santé et certaines infirmières
plaident la nécessité de reconnaître les bénéfices des soins palliatifs, pour son
développement: « Quand la spécialité sera reconnue sur le plan national, ça va sûrement
faciliter les soins palliatifs » (EG). Cet avis est partagé par une infirmière qui soutient le
besoin de reconnaissance des soins palliatifs pour faciliter l’exercice infirmier dans ce
domaine et améliorer la prise en charge du patient et de sa famille : « Ce qui va faciliter,
c’est la notion des soins palliatifs qui va être plus reconnue [...], ça facilite plutôt les
explications pour les patients et leur famille [...], pour que la famille parfois assimile c’est
quoi les soins palliatifs » (I10).
Toutefois, les experts se rejoignent dans leurs propos sur le besoin de sensibilisation du
grand public par les médias pour faire évoluer les mentalités envers la pratique des soins
palliatifs et faire reconnaître cette spécialité. Un expert propose: « Moi, je pense qu’une
campagne de presse serait très bénéfique pour les soins palliatifs. Faire connaitre les soins
palliatifs aux gens, les faire connaître au grand public, parce que quand le grand public
connaît les soins palliatifs, c’est lui qui demandera ça à son médecin » (E03). Deux autres
confirment ses propos : « Il faut sensibiliser et éduquer le public aux soins palliatifs pour
qu’il soit demandeur » (E01). « Quand le peuple devient vigilant pour cette facilité, il sera
demandeur » (E02). De même, pour l’un des experts, la sensibilisation des décideurs est
considérée comme l’un des facteurs facilitant la demande et l’émergence de la culture
palliative, et par conséquent, l’amélioration de l’exercice des soins palliatifs dans le pays.
« Faciliter l’accès aux soins palliatifs, c’est surtout faire rentrer dans la mentalité des gens
et des oncologues en particulier, les bénéfices des soins palliatifs » (E03).
138
En d’autres mots, suite à tous ces commentaires et aux observations effectuées sur le
terrain, même si la pratique des soins palliatifs est considérée comme pionnière dans le
milieu étudié, il va sans dire qu’il reste encore du chemin à parcourir dans ce domaine.
5.6.2.1.2 L’harmonisation de la collaboration interdisciplinaire
Quoique la collaboration soit considérée comme une force qui marque la relation étroite
entre les équipes, cette collaboration mérite d’être bonifiée selon les entrevues de certaines
infirmières et selon les experts. Ainsi, les données recueillies suggèrent une harmonisation
de la collaboration interdisciplinaire comme un moyen pour fournir une bonne
communication, une meilleure qualité de soins, une réponse aux besoins du patient, et par
conséquent, un contexte plus favorable à la pratique des soins palliatifs.
L’interdisciplinarité est vue comme une nécessité par la majorité des participants, qui
souligne l’importance de la collaboration entre les intervenants au sein de l’équipe
interdisciplinaire, afin d’assurer une meilleure qualité de vie aux patients en fin de vie et
défier les obstacles. Une infirmière a déclaré à ce propos : « Je pense que s’il y avait plus
de coordination, on pourrait y arriver » (I11). Cette même infirmière voit qu’une bonne
collaboration interdisciplinaire peut être un facteur facilitant la prestation des soins
palliatifs : « Il faut avoir plus de pluridisciplinarité, de dialogue entre les équipes et les
médecins, car plus on en parle et on coordonne, plus on va pouvoir appliquer de bons
soins palliatifs » (I11). Un expert soutient ces propos: « Il faut créer des équipes
interdisciplinaires, car au sein d’une équipe on peut dialoguer, discuter, échanger et créer
une atmosphère de collaboration » (E01). Un autre expert confirme également la nécessité
de la collaboration interdisciplinaire : « Nous avons besoin d’une équipe interdisciplinaire
disponible pour être une équipe consultante, dans tous les hôpitaux, pour n’importe quelle
unité. On a besoin d’avoir un psychologue, une infirmière, un médecin, un assistant social,
une nutritionniste, un homme de religion, un physiothérapeute […]. Mais, le cœur de
l’équipe doit être une infirmière » (E02).
De même, les professionnels de l’équipe mobile de soins palliatifs relatent : « On a besoin
d’être solidaires entre nous-mêmes, ça demande beaucoup de professionnalisme dans le
139
travail » (EG). De plus, ces propos ont été ratifiés lors des périodes d’observation de
l’étudiante-chercheuse. En effet, il a été remarqué qu’en dépit de la collaboration qui se
fait sur une base d’échanges verbaux entre différents acteurs impliqués dans les soins
palliatifs de l’établissement, les membres de l’équipe mobile de soins palliatifs
interviennent le plus souvent en collaboration binôme.
5.6.2.1.3 La formation en soins palliatifs
Un consensus ressort également, des échanges avec les différents participants, soit celui
de la formation en soins palliatifs. La nécessité de cette formation et le développement
des connaissances à l’approche palliative constituent un défi important à relever. Il s’avère
fondamental, selon la majorité des participants, de promouvoir la formation continue en
soins palliatifs pour outiller les infirmières à utiliser l’approche palliative dans les soins
de fin de vie. En effet, les résultats issus des entrevues auprès des experts, des
professionnels de la santé et des infirmières s’accordent sur le besoin de formation
spécialisée en soins palliatifs. Cette formation représente un facteur facilitant le
développement de ce domaine dans le pays. Les infirmières ont exprimé le besoin de
développer leur expertise en soins palliatifs pour assurer une meilleure qualité de soins
dans la pratique des soins palliatifs. L’une d’entre elles souligne le caractère essentiel de
la formation : « On a besoin de connaître plus sur les soins palliatifs, pour assurer de bons
soins » (I02). Dans le même sens, un expert insiste sur l’importance de l’éducation des
infirmières sur les soins palliatifs par des formations continues pour une meilleure
compréhension du domaine : « Les infirmières ont besoin de recevoir des formations
continues, l’éducation des infirmières est importante, par exemple comment différencier
les soins palliatifs des curatifs » (E02). De même, un autre expert exprime le besoin de
personnes expertes en soins palliatifs pour délivrer les soins : « Les soins palliatifs ce n’est
pas pour les jeunes, les soins palliatifs, c’est pour des gens qui ont déjà de l’expérience »
(E03).
Ce besoin de formation, évoqué par les infirmières et les experts, se recoupe avec les
points de vue exprimés par les professionnels de la santé. En effet, lors de l’entrevue de
groupe, les professionnels de l’équipe mobile postulent que le recours à la formation
140
spécialisée des professionnels de la santé sur les soins palliatifs favoriserait la cohésion
professionnelle autour des soins palliatifs et serait précurseur de son développement. En
outre, cette équipe interdisciplinaire évoque un besoin de formation continue orientée vers
l’accomplissement de leur mission, celle de promouvoir les soins palliatifs. Elle déclare :
Il y a un besoin sur le plan national d’avoir, dans les universités, des formations
spécialisées pour les professionnels de la santé à l’approche palliative. Il y a un
besoin d’un diplôme universitaire multidisciplinaire en soins palliatifs où tous les
professionnels qui doivent travailler en soins palliatifs prennent le cours ensemble
[...]. Moi, je pense que des formations spécialisées sont très importantes pour
l’équipe de soins palliatifs aussi. Ce sont des moyens pour continuer (EG).
5.6.2.2 Les facteurs facilitants organisationnels
Les résultats de cette étude ont mis en lumière des facteurs organisationnels facilitant
l’exercice de la pratique en soins palliatifs. Ceux qui émergent sont en lien avec la création
d’un environnement propice et le réaménagement de la structure organisationnelle.
5.6.2.2.1 L’environnement propice
Assurer un environnement propice à la pratique des soins palliatifs est considéré comme
l’un des facteurs facilitant la prestation des soins palliatifs. En revanche, cet
environnement est limité par les actes invasifs et les investigations à visée préventive ou
diagnostique, jugés inutiles en fin de vie. Une infirmière propose : « Il faut faire moins
d’acharnement thérapeutique avec les patients, faire moins de bilans en fin de vie et
donner moins d’antibiotiques quand un patient est en stade terminal » (I02). Une autre
ajoute à ce niveau : « Limiter les soins qui ne sont pas indispensables en fin de vie, éviter
les va-et-vient, limiter les bilans qui ne sont pas importants, mettre le patient au repos »
(I05). Les propos d’une autre infirmière corroborent également, ceux de ses collègues:
« On donne de la morphine et des antalgiques pour calmer la douleur en soins palliatifs,
mais aussi on donne de la chimiothérapie, des antibiotiques et des anticoagulants » (I08).
D’autre part, un environnement propice est possible, selon ces infirmières, en créant une
ambiance appropriée pour le patient afin de favoriser une mort paisible et assurer son
141
confort : « Mettre le patient au repos entouré par sa famille, assurer une meilleure
ambiance pour partir en paix » (I05) et « […], assurer le confort du patient […], que le
patient soit à l’aise et parte en paix » (I06).
5.6.2.2.2 Le réaménagement de la structure organisationnelle
Assurer une meilleure pratique infirmière de soins palliatifs impose également, un
réaménagement de la structure organisationnelle. Ce réaménagement réussira avec la
création d’une unité spécifique pour les soins palliatifs. Dans ce cadre, il sera possible de
favoriser un moment intime entre le patient et sa famille en fin de vie, par sa présence
dans une chambre individuelle. Une infirmière dit à ce niveau : « Il serait intéressant
d’avoir les moyens dans le service, comme des chambres avec un seul lit pour que la
famille puisse être présente en intime avec le patient. Un service spécialisé manque aussi
dans l’établissement » (I06). À cet effet, même si la création d’une unité spécifique aux
soins palliatifs est relatée comme un facteur facilitant la pratique des soins palliatifs, un
expert rejette cette possibilité. Pour cet expert, les soins palliatifs sont intégrés dans le
plan de soins et dans l’environnement de toutes les unités. Il n’est pas nécessaire de créer
un service qui sera considéré comme un mouroir : « Moi, je ne suis pas d’accord avec
l’idée d’avoir une unité de soins palliatifs, parce que ce sera étiqueté de soins de fin de
vie. Les soins palliatifs sont intégrés dans le plan des soins […]. Les gens ne doivent pas
dire, ce malade est dans cette unité, donc il va mourir. Les soins palliatifs sont une part de
l’environnement de chaque hôpital et dans le système de santé » (E02). Les propos de
l’expert soulignent l’importance d’éviter la stigmatisation des patients dans des unités de
soins palliatifs et d’intégrer les soins palliatifs aussi bien dans le plan de soins des hôpitaux
que dans le système de santé.
5.6.2.3 Les facteurs facilitants émotionnels
Pour contrer les barrières émotionnelles que subissent les infirmières dans le cadre de leur
implication en soins palliatifs, il est primordial de prendre en compte leur ressenti et
d’amorcer un accompagnement psychologique adéquat.
142
5.6.2.3.1 L’accompagnement psychologique des infirmières
Il est vrai que les infirmières accompagnent les patients, mais les experts et les
professionnels de la santé se rejoignent pour dire qu’elles-mêmes ont besoin de soutien et
d’accompagnement psychologique. Cet accompagnement est primordial pour les aider à
affronter la charge émotive et à se débarrasser de cumuls subis lors de la prestation des
soins auprès des patients en fin de vie. L’un des professionnels de la santé a confirmé par
ailleurs, ce besoin suite à la surcharge émotionnelle que les infirmières subissent en
prodiguant les soins aux patients en fin de vie: « Les infirmières ont besoin de support
aussi […], elles font la connaissance d’un patient au début de sa maladie, et par la suite,
elles voient que leur patient s’éteint devant elles. La présence d’un psychologue est
indispensable auprès d’elles » (EG). Un autre expert affirme la nécessité du soutien
psychologique des infirmières : « Les infirmières qui veulent travailler ou qui travaillent
aux soins palliatifs doivent avoir un psychologue ou un psychiatre pour les aider à se
débarrasser des cumuls vécus avec les malades en fin de vie » (E02). Un troisième expert
insiste sur l’importance de leur valorisation au travail, pour pouvoir continuer dans ce
domaine : « Il faut valoriser le rôle de l’infirmière […] sur le plan de soutien moral parce
que c’est un travail psychologiquement éprouvant pour l’infirmière » (E01). Ainsi, le
psychologue n’intervient pas seulement auprès du patient, mais il soutient également,
l’infirmière pour qu’elle puisse, à son tour, accompagner psychologiquement la personne
en fin de vie et répondre adéquatement à ses besoins.
En résumé, trois types de facteurs contraignant ou facilitant la pratique infirmière en soins
palliatifs ont été identifiés. En premier lieu, il a été question de facteurs contraignants
professionnels. Ceux-ci renvoient à la résistance des médecins, au manque de consensus
sur le début des soins palliatifs et au manque de formation. En deuxième lieu, les facteurs
organisationnels ainsi que les facteurs émotionnels ont été examinés. Ces facteurs
contraignants concernent la structure organisationnelle et la surcharge de travail des
infirmières. Ils sont liés à la charge émotive que confrontent les infirmières dans leur
pratique quotidienne. Pour remédier à ces manques, les participants à cette étude doctorale
ont proposé des facteurs facilitant la pratique infirmière en soins palliatifs, qui se
regroupent également en trois catégories. La reconnaissance nationale et la sensibilisation
143
du public, la collaboration interdisciplinaire ainsi que la formation des infirmières
constituent des facteurs professionnels facilitant la prestation des soins dans ce domaine.
Parmi les facteurs organisationnels facilitants identifiés, les participants soulignent la
nécessité d’assurer un environnement propice et de réaménager la structure
organisationnelle. Ces deux mesures faciliteront la pratique infirmière en soins palliatifs.
Enfin, l’accompagnement psychologique des infirmières pour gérer leurs exigences
émotionnelles constitue un facteur facilitant émotionnel (Figure 11).
Figure 11. Facteurs facilitant la pratique infirmière en soins palliatifs
En conclusion de la triangulation des données provenant de différents participants et
différentes méthodes, cinq thèmes ont émergé. Les résultats montrent que la pratique
infirmière en soins palliatifs auprès de patients atteints de cancer se fonde sur une relation
humaniste centrée sur le caring, empreinte de soins qui visent une meilleure qualité de vie,
par une prise en charge holistique de la personne. Cette prise en charge est appuyée par
une collaboration avec une équipe mobile interdisciplinaire de soins palliatifs et un
accompagnement spirituel lors de la pratique infirmière en soins palliatifs, tout en
maintenant l’accompagnement de la famille des patients. Cependant, cette pratique ne
semble pas optimale puisque l’analyse des résultats a permis d’identifier des facteurs
144
contraignant l’exercice de la pratique infirmière en soins palliatifs à plusieurs niveaux.
Ces facteurs sont d’ordres professionnel, organisationnel et émotionnel. Ces derniers sont
modulés par d’autres facteurs facilitant qui font souvent écho aux barrières répertoriées.
Cette pratique se fonde sur une relation humaniste centrée sur le caring. Elle est
caractérisée d’une part, par la présence, le respect et l’écoute active des infirmières, et
d’autre part, par des soins authentiques centrés sur la personne au cœur du soin.
145
Chapitre 6 – Discussion
Ce sixième chapitre présente la discussion des principaux résultats de cette étude, dont la
finalité était de mieux comprendre l’exercice de la pratique infirmière en soins palliatifs,
auprès de patients en fin de vie atteints de cancer, au sein d’une équipe interdisciplinaire
d’une région du Liban. Dans un premier temps, les considérations empiriques sont
discutées en regard des résultats de cette recherche, et ce en lien avec les études recensées.
Dans un second temps, les considérations théoriques sont présentées. Elles mettent en
parallèle les résultats de l’étude avec son cadre de référence. Ensuite, les considérations
méthodologiques permettent d’expliciter la pertinence de la méthode choisie pour
répondre aux questions de recherche et atteindre le but fixé. Finalement, les limites, les
retombées de l’étude ainsi que les recommandations pour la gestion, la pratique, la
formation et la recherche sont décrites. Elles viennent clore le chapitre.
6.1 Les considérations d’ordre empirique
À notre connaissance, cette étude de cas est l’une des premières à explorer le phénomène
de la pratique infirmière en soins palliatifs au sein d’une équipe interdisciplinaire au
Liban. Les résultats de cette recherche doctorale issus de la triangulation de l’analyse des
données ont permis de décrire certaines composantes qui reflètent l’exercice de la pratique
infirmière en soins palliatifs, l’approche humaniste du caring ainsi que les facteurs
facilitant ou entravant la pratique infirmière en soins palliatifs, au Liban.
6.1.1 La pratique infirmière en soins palliatifs
À travers les propos que les différents participants ont évoqués sur la pratique infirmière
en soins palliatifs, cinq thèmes centraux ont émergé et sont discutés en lien avec les écrits
recensés, soit : 1) la perception des soins palliatifs : un moyen d’offrir une meilleure
qualité de vie; 2) la pratique infirmière : une prise en charge globale des besoins du patient;
3) la pratique en collaboration interdisciplinaire : un élément clé pour les soins palliatifs;
4) la spiritualité : une toile de fond pour la pratique infirmière en soins palliatifs et 5)
l’accompagnement de la famille: le rôle indispensable de l’infirmière.
146
6.1.1.1 La perception des soins palliatifs : un moyen d’offrir une meilleure qualité de
vie
Les résultats de l’étude actuelle soulignent les grands efforts déployés par les infirmières
pour fournir une meilleure qualité de vie aux patients en soins palliatifs. Ces résultats
s’alignent avec la définition des soins palliatifs du WHO et WPCA (2014), communément
admise et adoptée par plusieurs autorités dans ce domaine. Cette définition décrit les soins
palliatifs comme « une approche visant l’amélioration de la qualité de vie des personnes
et de leur famille vivant une situation associée à une maladie avec pronostic réservé, à
travers la prévention, le soulagement de la souffrance et par l’entremise de l’identification
précoce, l’évaluation adéquate et le traitement de la douleur et des problèmes physiques,
psychologiques et spirituels associés » (WHO & WPCA, 2014, traduction libre, p. 5).
En effet, les participantes infirmières perçoivent les soins palliatifs comme des soins qui
préconisent l’amélioration de la qualité de vie. Elles considèrent le présent du patient
comme une priorité. Ce temps lui permettra d’accomplir au mieux ses choix, de vivre les
derniers moments de sa vie en dignité et de mourir en paix. En plus des propos des
infirmières, ce constat de préservation de la qualité de vie va dans le même sens que les
objectifs des soins palliatifs reconnus dans l’établissement. Ces objectifs sont documentés
dans la brochure élaborée pour sensibiliser les intervenants à la pratique des soins palliatifs.
De même, ces propos corroborent les écrits (Abu-Saad Huijer & Dimassi, 2007; Mahon
& McAuley, 2010 ; Tohmé et al., 2013), qui perçoivent les soins palliatifs comme des
soins qui ne visent pas nécessairement à traiter et guérir la maladie, mais qui cherchent à
améliorer la fin de vie par une prise en charge interdisciplinaire. D’où l’importance de
promouvoir la qualité de vie des patients par la prestation de soins palliatifs en fin de vie.
Aussi, les présents résultats rejoignent les normes de pratique en soins palliatifs élaborées
par l’ACSP (2012, cités dans WHO, 2002) qui considèrent ces soins comme des soins qui
ne visent ni à hâter ni à prolonger le processus de la mort, mais plutôt à soulager le fardeau
de la souffrance et à améliorer la qualité de vie et la fin de vie.
En d’autres mots, l’amélioration de la qualité de vie en soins palliatifs ressort dans les
résultats de cette étude comme un but à atteindre, selon les définitions élaborées par
147
plusieurs experts. Toutefois, les propos des infirmières et l’observation sur le terrain
laissent croire que tous les cliniciens ne partagent pas cette même vision de la qualité de
vie en fin de vie, et des pistes de réflexion s’imposent. L’une de ces pistes est le manque
de consensus sur le moment où les soins palliatifs devraient être introduits dans la
trajectoire de la personne et son expérience de la maladie. Bien que les opinions des
professionnels de la santé réfèrent à la complémentarité lorsqu’ils parlent de soins curatifs
et palliatifs pour assurer une meilleure qualité de vie, un questionnement semble évident
sur la persistance de certaines pratiques à visée curative en fin de vie. Un manque de
cohérence est également constaté, notamment lors de l’exercice de pratiques ciblant la
quantité de vie, sans tenir compte de la qualité de vie. Certaines infirmières semblent
également, opposer les objectifs de soins curatifs aux objectifs de soins centrés sur la
qualité de vie, alors que les soins palliatifs se définissent en concomitance avec les soins
curatifs et non pas en opposition. Ces divergences de vision, qui constituent une piste à
explorer en comparaison avec d’autres pays, pourraient s’expliquer probablement par le
fait que les soins palliatifs sont en stade de développement au Liban, et que certaines
infirmières et certains professionnels de la santé ne sont pas formés dans ce domaine. Par
conséquent, leurs propos pourraient ne pas refléter la vision actuelle des soins palliatifs.
En effet, les experts ont proposé une piste de solution à ces barrières, celle de faire la
promotion des soins palliatifs au niveau national. De même, la formation continue pourrait
aussi constituer un bon moyen pour offrir une meilleure qualité de vie.
6.1.1.2 La pratique infirmière : une prise en charge globale des besoins du patient
À la lumière des écrits recensés, les soins palliatifs sont décrits comme des soins qui
prônent la prise en charge globale des besoins de la personne en fin de vie. D’ailleurs, les
résultats de diverses recherches soutiennent cette vision des soins palliatifs comme une
réponse aux besoins globaux du patient dans toutes ses dimensions (Bonnières, et al.,
2010 ; Buzgova, et al., 2016 ; Dong et al., 2016 ; Fridh et al., 2009 ; Guay et al., 2011 ;
Johnson et al., 2011 ; Lofandjola Masumbuku & Coppieters, 2014 ; Zheng, et al., 2015 ;
Wentlandt et al., 2016). Les résultats de la présente étude mettent en lumière l’importance
de l’atténuation de la douleur et des autres symptômes, ainsi que de la prise en compte des
besoins psychologiques, sociaux et spirituels, bien que ces soins ne soient pas optimaux
148
selon les participants. Les paragraphes qui suivent décrivent les besoins physiques,
psychologiques et sociaux tandis que les besoins relatifs au contexte spirituel feront l’objet
de discussion dans une section distincte.
6.1.1.2.1 Les besoins physiques
La réponse aux besoins physiques figure dans le discours des infirmières et de la majorité
des professionnels de la santé, comme un élément crucial et essentiel pour la pratique en
soins palliatifs en fin de vie. D’ailleurs, les résultats de cette étude montrent que la réponse
aux besoins physiques constitue en général la dimension la plus développée parmi toutes
les dimensions proposées par le Plan directeur du MSSS (2008), et ce à plusieurs niveaux :
celui du discours des participants, celui de l’observation directe non participante et celui
de la documentation utilisée dans l’unité de soins en oncologie. Il est possible que, les
soins palliatifs étant en voie de développement au Liban, les professionnels de la santé
priorisent d’abord la réponse aux besoins physiques et au soulagement de la douleur, et
que la réponse aux autres dimensions proposées par le Plan directeur du MSSS (2008) se
développera au fil du temps.
Les résultats de cette recherche doctorale montrent que la gestion de la douleur, citée
également dans les recherches répertoriées (Fridh, et al., 2009 ; Guay et al., 2011 ; Johnson
et al., 2011 ; Lofandjola Masumbuku & Coppieters, 2014 ; Vedel et al., 2014), est au cœur
de la responsabilité des professionnels de la santé œuvrant auprès des personnes en soins
palliatifs. Elle est perçue comme un critère fondamental pour fournir une meilleure qualité
de vie jusqu’à la mort. Les résultats de l’étude actuelle concordent également, avec les
conclusions de Vedel et al. (2014), qui rapportent que les professionnels de la santé ont
identifié la gestion de la douleur comme fondamentale pour la prestation de soins palliatifs
en fin de vie. L’observation effectuée dans l’unité de soins en oncologie confirme par
ailleurs, que les protocoles pharmacologiques en vigueur en fin de vie concernent en
particulier la prescription de la Morphine® en perfusion continue. Cette pratique est jugée,
selon les infirmières, comme bénéfique puisqu’elle assure le soulagement de la souffrance
et le confort aux patients en fin de vie. Ces résultats renforcent ceux de Fridh et al. (2009)
qui ont rapporté que les infirmières interviewées dans leur étude confirment qu’elles
149
administrent des doses élevées d’antalgiques aux patients en fin de vie pour la gestion de
leur douleur. La brochure d’information, distribuée par l’équipe mobile de soins palliatifs,
montre également, que le soulagement de la douleur du patient figure parmi les objectifs
visés de la pratique en soins palliatifs. Ces résultats s’accordent aussi, avec les propos des
familles interviewées. Celles-ci considèrent que le soulagement de la douleur est une
priorité pour leur proche en fin de vie.
Les résultats de la présente étude rapportent que les participants prennent également en
charge la gestion des symptômes associés, en particulier les problèmes gastro-intestinaux
et respiratoires, pour répondre aux besoins physiques du patient. Ces pratiques infirmières
sont rapportées dans les études de Vedel et al. (2014) et de Zheng et al. (2015), qui
soutiennent qu’une évaluation de l’ensemble des symptômes physiques permet de
répondre aux besoins de la vie quotidienne et d’assurer une qualité de vie jusqu’au décès.
Dans le cadre de cette étude, il a été possible d’observer que les infirmières utilisent, en
plus du dossier infirmier, un formulaire de référence à l’équipe mobile spécifique aux
patients en soins palliatifs. Ce formulaire témoigne de l’évaluation complète des besoins
physiques, effectuée par l’infirmière et le médecin de soins palliatifs. À cet égard, dans
leur étude, Zheng et al. (2015) ajoutent que les infirmières multiplient leurs efforts pour
répondre aux besoins physiques en assurant également les soins fondamentaux globaux.
Cependant, il est important de noter que les infirmières au Liban ne disposent pas de
normes des meilleures pratiques, de lignes directrices ou de guides de soins palliatifs, pour
les intégrer dans leur pratique. Nonobstant ce manque de fondements scientifiques à la
pratique, les résultats de la présente étude mettent en évidence que les infirmières du
service d’oncologie ont le souci continu de fournir des soins de confort aux patients en
soins palliatifs. Elles tentent de soulager au mieux, la douleur et les autres symptômes
pour améliorer la qualité de vie de leurs patients, un élément clé discuté précédemment.
L’ensemble des soins pour la gestion de la douleur et d'autres symptômes, nous ramène à
la définition des soins palliatifs décrits par le WHO et la WPCA (2014). Cette définition
inclut des valeurs et principes particuliers portant sur la prévention de la souffrance et des
150
autres symptômes gênants, ainsi que l’assurance d’un soutien au patient. Ce soutien lui
permet de vivre activement le plus longtemps possible et d’améliorer sa qualité de vie.
Les présents résultats s’accordent également, avec les normes de pratique et les rapports
élaborés par des experts en soins palliatifs, dans des pays où ces derniers sont bien
développés. Dans ce sens, l’ACSP (2012) et le Palliative Care Australia (2015) mettent
l’accent sur l’évaluation et la gestion promptes et appropriées de la douleur et des autres
symptômes, à titre de composante fondamentale des soins palliatifs. Dans la même
perspective, la Circulaire DHOS/02/2008/99 du 25 mars 2008 relative à l’organisation des
soins palliatifs en France fait référence, dans sa vision, au développement de la démarche
palliative, au soulagement de la souffrance des patients et à la préservation de la meilleure
qualité de vie possible jusqu’à la mort.
De plus, les présents résultats ont montré que les participants établissent un lien entre la
réponse aux besoins physiques et la réponse aux besoins psychologiques. Ils constatent
que le soulagement des besoins émotionnels aiderait au soulagement de la douleur
physique. Dans ce sens, Abraham (2015) ajoute que le soignant ne doit pas se limiter à la
prise en charge de la douleur physique, mais doit aussi prendre soin du contexte
psychologique. De même, Bonnières et al. (2010) affirment que la prise en charge globale
du patient en phase terminale comprend également, des soins relationnels.
6.1.1.2.2 Les besoins psychologiques
Des similitudes ont été retrouvées entre les résultats de cette recherche et ceux des études
antérieures traitant de la réponse aux besoins psychologiques, dans la pratique en soins
palliatifs (Johnson et al., 2011 ; Lofandjola Masumbuku & Coppieters, 2014 ; Vedel et
al., 2014). En effet, les résultats de l’étude actuelle ont permis de mettre en relief la
réponse des infirmières à la souffrance morale des patients et de leur famille par une
approche relationnelle et un soutien psychologique, notamment par l’écoute et la
communication. De même, les professionnels de la santé interviewés soulagent la
souffrance psychologique du patient dans ses derniers jours, tout en favorisant un climat
de confiance. Parallèlement, les membres des familles rencontrés, nonobstant leur propre
chagrin, ont confirmé l’efficacité de l’accompagnement des infirmières comme une source
151
principale de soutien psychologique lors de l’hospitalisation de leur proche en fin de vie.
Ces résultats s’accordent avec ceux de Lofandjola Masumbuku et Coppieters (2014) qui
ont précisé dans leur étude que les professionnels de la santé croient que la dimension
psychologique est une partie intégrale des soins palliatifs. Cela s’est avéré semblable dans
la recherche de Vedel et al. (2014), qui indique que le soutien du patient requiert une
approche relationnelle lors des soins, notamment en fin de vie. Johnson et al. (2011)
apportaient une nuance en proposant de développer une relation de confiance avec le
patient et la famille pour faciliter l’exploration émotionnelle et le soutien psychologique.
Les résultats de la présente étude montrent également, que les infirmières se sentent
responsables de la satisfaction des attentes du patient. Une attention particulière est
accordée par les infirmières à la qualité d’échange avec le patient et sa famille, à l’écoute
de leurs plaintes et à la compréhension de leurs réactions émotionnelles. D'une manière
similaire, cela a également été révélé dans l’ouvrage de Zerwekh (2010), qui confirme que
la réponse aux besoins psychologiques du patient et de sa famille peut être réalisée par
une écoute active.
De même, les infirmières interviewées dans l’étude actuelle ont identifié la
communication avec le patient en fin de vie comme un élément central pour son
accompagnement psychologique. De plus, les observations sur le terrain peuvent
confirmer que les infirmières cherchent à établir une communication verbale ou non
verbale, avec le malade et sa famille. D’ailleurs, selon Kourkouta et Papathanasiou (2014),
une bonne communication entre l’infirmière et le patient demeure essentielle pour la
prestation d’un soin humain individualisé et de qualité en fin de vie. De même, la nécessité
de communiquer avec le patient et sa famille a été relatée dans l’étude phénoménologique
menée en Suède par Pennbrant et al. (2015). En effet, les auteurs ont identifié le thème du
développement des compétences en communication comme un élément important en
soins palliatifs. Dans ce cadre, ils insistent sur la nécessité de communiquer avec le patient
et sa famille et de lui fournir les informations nécessaires en réponse à ses questions et
plaintes. Ils ajoutent de même, que la réponse aux besoins des patients devient plus
efficace, si les infirmières créent une bonne communication avec le patient.
152
Alors que les études menées par Tohmé et al. (2013) et Abu-Saad Huijer et al. (2012)
considèrent que la prise en charge des problèmes psychologiques des malades atteints de
cancer et de leur proche au Liban est inadéquate pour les soignants, les résultats de la
présente étude laissent entrevoir que les infirmières libanaises sont à l’affut des soucis des
patients et de leur souffrance psychologique. En effet, les entrevues et les observations
effectuées sur le terrain, auprès des infirmières, témoignent qu’elles tentent de répondre
aux préoccupations des patients et de leur famille avec beaucoup de professionnalisme,
souvent en collaboration avec l’équipe interdisciplinaire. D’ailleurs, les résultats de
l’étude actuelle mettent en évidence la proximité du discours des professionnels de la santé
interviewés et celui des infirmières dans leur relation avec les patients. Les deux discours
se rejoignent dans l’attention qu’ils accordent à la réponse aux besoins psychologiques.
Bien que ces résultats mettent en relief les efforts déployés des infirmières pour favoriser
un accompagnement psychologique adéquat des patients, cet accompagnement se résume
dans l’ensemble à : l’écoute, la communication, l’échange et la compréhension de leurs
réactions émotionnelles. Compte tenu du manque de temps, causé par la surcharge de
travail et le manque de formation spécifique, les résultats de cette étude montrent que les
infirmières ont recours le plus souvent au service du psychologue. Ce soutien permet de
répondre aux besoins psychologiques du patient en soins palliatifs et favorise un soutien
psychologique holistique. Comparés à d’autres études dans des pays où les soins palliatifs
sont développés, ces résultats corroborent ceux de Desbiens et Fillion (2011). Ces derniers
montrent que les infirmières se sentaient peu préparées pour prodiguer des soins
psychosociaux. De plus, elles manquaient de temps à accorder aux patients, de formation
et de valorisation des soins psychosociaux.
6.1.1.2.3 Les besoins sociaux
Les résultats de la présente étude amènent par ailleurs, d’autres points de discussion liés
aux besoins sociaux. Ainsi, la réponse aux besoins du patient en milieux hospitaliers
semble être associée à la collaboration avec des organismes communautaires pour les
soins à domicile. Cette collaboration répond aux besoins financiers de certains patients ou
se font à la demande d’autres qui souhaitent terminer leur dernier moment chez eux,
153
entourés des leurs. Les résultats de cette étude doctorale laissent voir également, que les
infirmières évaluent les besoins et les capacités fonctionnelles liés à l’organisation de la
vie quotidienne des patients et des proches, et tentent d’assurer une continuité de services
et de ressources en soins palliatifs à domicile. Ces résultats s’alignent avec les données du
rapport sur les soins palliatifs en Australie, élaboré par le « Palliative Care Australia »
(2015). Ce rapport aborde aussi bien l’organisation de la prestation des soins palliatifs à
domicile, que le soutien social et financier de la famille en fin de vie. Dans le cadre de
cette étude, les infirmières trouvent des moyens pour orienter les patients et leur famille
vers des organismes de nature caritative qui s’occupent gracieusement des malades à
domicile en fin de vie, sous la supervision d’une équipe interdisciplinaire. Cette
organisation de la vie quotidienne semble être d’une grande importance pour la famille,
elle la rassure dans la prise en charge de leur proche à domicile.
Toutefois, aucun professionnel n’est habilité à répondre à l’ensemble des besoins de la
personne de manière experte. Ainsi, pour mettre en avant une approche holistique, il faut
parfois combiner les forces dans le cadre d’une collaboration interdisciplinaire.
6.1.1.3 La pratique en collaboration interdisciplinaire : un élément clé pour les soins
palliatifs.
Les résultats de cette recherche doctorale amènent à réfléchir sur la collaboration
interdisciplinaire, comme un élément clé pour la prestation de soins palliatifs aux patients
en fin de vie. En effet, les résultats indiquent que l’équipe mobile interdisciplinaire de
soins palliatifs établit une collaboration étroite entre ses différents membres d’une part, et
avec les infirmières de l’unité d’oncologie et certains oncologues, d’autre part. Bien que
cette collaboration soit importante, elle est souvent limitée par la résistance de certains
acteurs. Ces résultats, évoquant l’importance de la collaboration interdisciplinaire, sont
appuyés par les propos de plusieurs auteurs, qui expliquent comment les soins palliatifs
sont organisés et dispensés grâce aux efforts de collaboration de l’équipe interdisciplinaire
(Klarare et al., 2013 ; Leclerc et al., 2014 ; Naccache et al., 2008 ; Wentlandt et al., 2016).
A ce sujet, Leclerc et al. (2014) montrent dans leur étude que l’équipe interdisciplinaire
154
facilite le travail des professionnels, surtout au niveau de l’amélioration de la qualité des
soins et de la cohésion au sein de l’équipe.
Dans le même sens, Wentlandt et al. (2016) ajoutent que les équipes interdisciplinaires de
soins palliatifs peuvent améliorer la satisfaction des patients envers les soins reçus. De
plus, la présente étude montre que cette collaboration est assurée par la prestation des
soins palliatifs selon une approche holistique, ainsi que par l’interaction et la
communication entre les professionnels concernés. Pour y parvenir, certains
professionnels joignent leurs forces pour optimiser la prestation des soins de qualité et
assurer une présence régulière auprès des patients en fin de vie. Ces résultats s’alignent
avec ceux de Wentlandt et al. (2016), qui soutiennent dans leur étude qualitative auprès
de patients, d’aidants naturels et de professionnels de la santé, que l’équipe
interdisciplinaire est nécessaire en soins palliatifs pour un soin global de qualité, en raison
de la complémentarité de l’expertise professionnelle de ses membres et de leur
dynamisme.
À cet égard, Leclerc et al. (2014) ajoutent qu’on s’attend à ce que l’approche
interdisciplinaire soit avantageuse pour les soins palliatifs. Celle-ci permet de donner des
soins holistiques et complets qui tiennent compte des besoins physiques, psychosociaux
et spirituels du patient et de sa famille. Comparés aux résultats de la présente étude, ces
propos permettent de comprendre le besoin, pour les infirmières de l’unité d’oncologie,
de faire appel, à certains moments, au service du psychologue ou de l’intervenant spirituel.
Ainsi, dans un souci de complémentarité d’expertise, les infirmières mobilisent les forces
des autres pour tenter de procurer des soins palliatifs dans une approche holistique.
Les professionnels de la santé de cette étude considèrent que la cohésion entre les
différents professionnels de l’équipe interdisciplinaire favorise la prestation d’un soin de
qualité. Cela est corroboré par l’étude de Klarare et al. (2013), qui a exploré l’interaction
entre les membres de l’équipe interdisciplinaire en soins palliatifs auprès de quinze
professionnels de la santé, membres de trois équipes spécialisées en soins palliatifs. Les
résultats de l’étude Klarare et al. (2013) renforcés par ceux de Cheng, Dy, Fang, Chen, et
155
Chiu (2013) montrent que la coordination et la discussion entre les membres de l’équipe
interdisciplinaire permettent de répondre aux besoins des patients dans une perspective
holistique et optimale des soins palliatifs en fin de vie. Néanmoins, dans le cadre de l’étude
de Cheng et al. (2013), des contraintes au niveau de la collaboration interdisciplinaire ont
été évoquées. Bien que l'équipe mobile vise à mettre en place une collaboration
interdisciplinaire étroite, les participants de l’équipe mobile et certaines infirmières n’ont
pas manqué d’évoquer leurs plaintes à l’égard de l’application de cette collaboration dans
tout l’établissement. Pour eux, cette collaboration semblait parfois insuffisante et
rencontrait des obstacles avec d’autres membres de l’équipe médicale.
De plus, le croisement des résultats de l’étude actuelle avec la littérature fait ressortir que
le rôle de l’infirmière semble central dans la pratique des soins palliatifs en
interdisciplinarité. De par son rôle dans l’équipe interdisciplinaire, l’infirmière participe
à l’élaboration de politiques, à la diffusion de la démarche palliative et aux
questionnements éthiques relatifs aux soins palliatifs (ACSP, 2012 ; Jacono et al., 2009,
SFAP, 2013). Les résultats de la présente étude ont mis en évidence le rôle de l’infirmière
de l’équipe mobile au sein de l’équipe interdisciplinaire. En effet, les observations
effectuées auprès de cette infirmière révèlent son rôle pivot dans la sensibilisation à la
communication interdisciplinaire. De plus, les propos des autres professionnels de
l’équipe mobile, des familles et des infirmières en oncologie reconnaissent aussi, la qualité
de l’approche de l’infirmière spécialisée en soins palliatifs, son expertise dans la prestation
de soins auprès des patients en fin de vie, ainsi que sa disponibilité indéfectible. Le rôle
central de l’infirmière au sein de l’équipe interdisciplinaire corrobore également, les
propositions du MSSS du Québec (2008) qui mettent l’accent sur les rôles et
responsabilités des différents professionnels, y compris ceux de l’infirmière, dans la
collaboration au sein d’une équipe interdisciplinaire.
Dans le cadre de cette étude, de par sa présence au sein de l’équipe interdisciplinaire de
soins palliatifs, l’infirmière de l’équipe mobile a assuré la coordination des soins au sein
de l’équipe et a organisé, le cas échéant, le retour du patient à domicile. De même, un
transfert d’information est réalisé par l’infirmière de l’équipe mobile, quand elle partage
156
les observations cliniques ou oriente vers un autre professionnel de l’équipe. D’ailleurs,
dans son ouvrage, Zerwekh (2010) déclare que c’est l’infirmière qui favorise le maintien
de la communication entre les membres de l’équipe et qui participe à la coordination des
soins au sein de l’équipe interdisciplinaire.
6.1.1.4 La spiritualité : une toile de fond pour la pratique infirmière en soins palliatifs
Au regard de la spiritualité, les résultats de l’étude montrent que le respect de celle-ci est
bien intégré dans le processus de la pratique des soins palliatifs au Liban. Cette attitude
aide le patient dans sa vulnérabilité et dans la remise en question du sens donné à sa vie.
À ce niveau, le rôle de l’infirmière consiste à accompagner le patient et sa famille dans
cette démarche, en considérant la cohabitation et la diversité des religions, ce qui constitue
un défi pour les infirmières.
En effet, les résultats de l’étude actuelle montrent que les infirmières libanaises déploient
leur engagement et leur discernement par l’évaluation des besoins spirituels et la
proposition d’interventions adaptées. De plus, il est aussi noté que l’accompagnement
spirituel des infirmières est fondé sur le respect des croyances religieuses du patient et de
sa famille. Ces résultats s’apparentent à ceux de l’étude de McCallum et McConigley
(2013), qui soulignent que la réponse aux besoins spirituels peut se concevoir par le
respect des croyances culturelles et des convictions religieuses des patients en fin de vie
ainsi que par la préservation de leur dignité. D’une manière similaire, les résultats d’une
étude récente menée en Chine par Dong et al. (2016), auprès de médecins et infirmières,
proposent de respecter les valeurs spirituelles et culturelles des patients mourants pour
offrir des soins culturellement sensibles. Selon Dong et al. (2016), le respect de la
spiritualité et de la religion sont des aspects importants pour préserver la dignité de la
personne. En effet, dans l’étude actuelle, les infirmières interviewées ont fait preuve
d’ouverture aux diversités et aux rituels religieux en tentant d’exhausser les souhaits
relatifs aux convictions religieuses des patients et leur famille. De plus, l’observation sur
le terrain a montré que les patients et leurs proches, toutes religions confondues, ont une
foi et une croyance à la volonté divine. Cela peut s’expliquer par le fait que la pratique
religieuse est considérée comme un rempart pour faire face à leur détresse durant cette
157
expérience de santé et une aspiration à la guérison de la maladie, même en fin de vie. Ces
résultats rejoignent ceux de l’étude de Doumit, Huijer, et Kelley (2007) menée pour
décrire l’expérience des patients libanais recevant des soins palliatifs. Dans ce contexte,
certains thèmes où les auteurs citent la croyance en Dieu et la divinité dans le processus
de guérison, même en fin de vie, ont été identifiés.
Les résultats de cette recherche doctorale montrent que malgré leurs efforts, les infirmières
se sentent souvent peu qualifiées pour prendre en charge la personne dans sa globalité et
répondre à tous les besoins spirituels de leurs patients. D’ailleurs, l’étude de Desbiens et
Fillion (2011) présente des résultats semblables en ce qui concerne le manque de
qualification des infirmières pour répondre aux besoins spirituels des patients. Selon ces
auteurs, le rôle de l’infirmière ne consiste pas à combler tous les besoins spirituels de la
personne, mais plutôt à l’accompagner. Ainsi, dans le cadre de cette étude, pour prendre
en compte toute la dimension spirituelle, les infirmières de l’unité d’oncologie, ainsi que
l’infirmière de l’équipe mobile, proposent l’appel au représentant religieux de l’équipe
interdisciplinaire. Compte tenu de la diversité des religions au Liban, ce représentant
assure, au besoin, le lien avec les différentes religions. Ces résultats corroborent ceux de
Guay et al. (2011), qui selon eux, le service pastoral devrait faire partie des soins palliatifs
puisqu’il satisfait un besoin exprimé par les patients et les familles. D’ailleurs, les
observations du terrain laissent aussi entrevoir que l’approche du représentant religieux
au sein de l’équipe interdisciplinaire est souvent une approche « d’humain à humain ».
Cette approche aide les patients à trouver un sens à leur vie et une réponse aux aspects
existentiels liés à la fin de vie. Abraham (2015) postule également dans son ouvrage, que
la souffrance spirituelle se traduit en un questionnement existentiel sur le sens de la vie et
de la mort. Elle permet par ailleurs, de trouver une unité intérieure dans les moments de
grandes souffrances par le recours à la religion, qui constitue un appui pour la personne
souffrante.
6.1.1.5 L’accompagnement de la famille : le rôle indispensable de l’infirmière
Selon le contexte culturel du Liban, la famille assure une présence continue auprès de son
proche en fin de vie, d’où la nécessité de les accompagner. Parmi la littérature recensée,
158
les définitions des soins palliatifs incluent de manière explicite la famille parmi les
destinataires du projet de soins. Dans ce sens, ce n'est pas seulement l’individu qu'il faut
soigner et soutenir, mais aussi la famille, qui est souvent épuisée de par sa présence auprès
de son proche. D’ailleurs, selon la définition donnée par le WHO en 2002, les soins
palliatifs cherchent à améliorer la qualité de vie, aussi bien des patients que de leur famille.
Dans cette perspective, les résultats de la présente étude montrent bien que les infirmières
et les professionnels de la santé font preuve d’empathie et de compassion envers les
proches. Ceux-ci expérimentent parfois un épuisement émotionnel et de l’incertitude dus
à l'imminence de la fin. Ces résultats rejoignent ceux de Vedel et al. (2014) qui soutiennent
que les infirmières accompagnent aussi les membres de la famille dans la compréhension
de la maladie du patient et dans leur propre cheminement de deuil. Les résultats de la
présente étude ajoutent que les infirmières sont à l’affût des besoins des familles par un
accompagnement réalisé à travers l’écoute, le soutien au moment du deuil et la
transmission d’information. L’infirmière travaille sur la capacité de la famille afin de
l’habiliter à prendre soin de son proche, notamment lors d’un retour à domicile. Ces
propos sont évoqués dans l’étude de Vedel et al. (2014), qui précisent que la famille doit
être préparée à la mort de leur proche, d’où le besoin de l’écouter, l’informer, lui assurer
un soutien émotionnel face aux situations auxquelles elle est exposée et l’accompagner
pour traverser son deuil. Ce constat rejoint aussi les conclusions de Namasivayam et al.
(2013), sur « l’engagement avec la famille » qui inclue trois sous-catégories, soit le fait
de préparer la famille aux soins palliatifs, d’improviser les soins et de s’engager avec la
famille. Ces résultats montrent l’importance de préparer la famille à la mort de leur proche
et de l’informer de la progression de la maladie ou de la soutenir dans le processus de
deuil.
Les présentes conclusions s’alignent avec les recommandations d’associations en soins
palliatifs, visant à promouvoir le soutien psychologique de la famille au sein de la pratique
infirmière en soins palliatifs. D’ailleurs, la Société Française d'Accompagnement et de
Soins palliatifs (2009) considère que le soutien psychologique du patient et de ses proches
est primordial en soins palliatifs. Elle atteste de même, que le choix de réconcilier et
159
d’accompagner la famille du patient en soins palliatifs amortit le choc du décès et facilite
le processus de deuil. Plus récemment, le WHO et la WPCA (2014) proposent d’offrir du
soutien à la famille pour l’aider à faire face à cette expérience. D’où l’importance
d’assurer l’accompagnement de la famille au moment de l’agonie et dans le processus de
deuil qui entoure souvent la phase terminale de la vie du malade.
En résumé, cinq thèmes centraux ont émergé de l’analyse de la pratique infirmière en
soins palliatifs. Les résultats de l’étude ont mis l’accent sur la prestation des soins palliatifs
comme un moyen pour offrir une meilleure qualité de vie aux patients en fin de vie et ce,
par une approche holistique et en répondant aux besoins des patients aussi bien physiques
que psychologiques et sociaux. L’exercice de la pratique est réalisé dans le cadre d’une
collaboration interdisciplinaire, en respectant le contexte spirituel des patients et en
accompagnant la famille. Il est vrai que ces éléments fondamentaux dans la pratique
infirmière en soins palliatifs occupent une place centrale, mais le rôle de caring joué par
les infirmières, en accompagnant les patients en soins palliatifs, est incontournable,
puisqu’il transcende les cinq thèmes centraux et soutient la pratique infirmière en soins
palliatifs.
En somme, d’un point de vue empirique, cette recherche doctorale corrobore les écrits
stipulant que la pratique infirmière en soins palliatifs, qui vise une meilleure qualité de
vie, est centrée sur la prise en charge holistique de la personne dans toutes ses dimensions :
physique, psychologique et sociale. Cette pratique infirmière est facilitée par une bonne
collaboration interdisciplinaire, enrichie par la présence d’une équipe mobile de soins
palliatifs. À cela s’ajoute, une prise en compte des dimensions spirituelles, marquées par
la présence d’un référent de culte qui assure le soutien à l’équipe soignante dans
l’accompagnement spirituel des patients en fin de vie. De plus, l’exercice de la pratique
infirmière est réalisé par une approche humaniste qui semble similaire à celle observée
dans plusieurs pays et confirmée par la littérature. Cette approche soutient la pratique
infirmière en soins palliatifs et favorise la qualité de vie des patients et des proches.
160
6.2 Les considérations d’ordre théorique
Aux fins de cette étude doctorale, le cadre de référence utilise le Plan directeur du MSSS
(2008), les facteurs facilitant ou contraignant la pratique des soins palliatifs et l’approche
humaniste des soins. D’une part, le Plan directeur des compétences des intervenants en
soins palliatifs du Québec (MSSSQ, 2008) et les facteurs facilitant ou contraignant la
pratique infirmière en soins palliatifs sont adoptés comme guides pour mieux décrire et
comprendre la pratique des soins infirmiers palliatifs. D’autre part, la théorie du Human
Caring de Jean Watson (1979) a été utilisée pour guider les observations des aspects de la
relation transpersonnelle entre l’infirmière et la personne soignée, lors de la pratique des
soins palliatifs en fin de vie. De même, la théorie du Human Caring de Jean Watson (1979)
a servi de guide aussi bien pour les entrevues que pour l’analyse. Les paragraphes qui
suivent décrivent, tour à tour, l’utilisation du plan directeur, et de la théorie du caring,
pour terminer par les facteurs facilitant ou contraignant la pratique infirmière en soins
palliatifs.
6.2.1 L’utilisation du Plan directeur
L’utilisation du Plan directeur du MSSS du Québec (2008) au sein de cette thèse a permis,
grâce à sa vision holistique, de situer les pratiques des infirmières dans le domaine des
soins palliatifs à une personne atteinte d’une maladie grave. Etant donné que ce plan
s’adresse à plusieurs intervenants, il est considéré comme un point de repère. Il accorde
en particulier, une grande importance à l’approche interdisciplinaire dans la pratique des
soins palliatifs.
En comparant les résultats de la présente étude avec les domaines (Tableau 1) des soins
palliatifs du Plan directeur du MSSS (2008), il est noté que certains domaines sont
fortement représentés et plus développés que d’autres qui sont peu présents. Toutefois, la
réponse n’est pas toujours optimale, même à l’intérieur de ces domaines mieux
représentés. En effet, les domaines de « douleur et symptômes » (DC#1) et de
« collaboration centrée sur la personne et ses proches » (DC#7) sont très présents au sein
des résultats de cette présente étude. Comme le montre le Plan directeur, les infirmières
dans l’unité d’oncologie observent, évaluent et traitent la douleur et les symptômes, dans
161
la mesure du possible et selon les besoins. Les actions infirmières ne sont pas toujours
basées sur des lignes directrices et les meilleures pratiques. Les patients sont soulagés au
mieux de leur possibilité. De même, les infirmières dans l’unité d’oncologie collaborent
avec le patient et sa famille ainsi qu’avec les membres de l’équipe interprofessionnelle
pour répondre aux besoins physiques du patient et de ses proches. Bien que la
collaboration interdisciplinaire n’est pas toujours parfaite, notamment en raison de la
résistance médicale perçue, elle est existante entre différents membres de l’équipe et
appréciée.
Prodiguer des soins palliatifs en fin de vie, c’est aussi accompagner le patient et sa famille
et répondre à leurs besoins psychosociaux et spirituels. Cette perception des infirmières
renvoie à un autre domaine, celui des besoins psychosociaux et spirituels (DC#2) du Plan
directeur du MSSS (2008). Ce domaine nécessite l’observation et l’évaluation des besoins
spirituels de la personne et de ses proches en vue de pouvoir y répondre. Il contribue
également, à la clarification des valeurs, des croyances et des besoins spirituels de la
personne et de ses proches. Dans le cadre de cette étude, cet accompagnement est rendu
possible grâce à la complémentarité des différents membres de l’équipe interdisciplinaire
dans la pratique des soins palliatifs, pour assurer un soutien psychologique, social et
spirituel. D’ailleurs, selon le MSSS (2008), les domaines de compétence du Plan directeur
sont partagés par l’ensemble des membres de l’équipe interdisciplinaire.
Les infirmières dans l’unité d’oncologie accompagnent la famille pour procurer un soutien
au moment de « l’agonie et décès » (DC#4). Également, elles aident la famille à cheminer
dans le processus de « deuil » (DC#5), qui entoure souvent la phase terminale de la vie du
proche. Ces résultats s’alignent avec les propositions du Plan directeur du MSSS (2008)
sur la nécessité de soutenir la personne et ses proches dans ce processus de deuil et de
comprendre leurs réactions émotives.
D’autres pratiques relatives à la prestation des soins palliatifs, proposées par le Plan
directeur (MSSS, 2008), sont identifiées parmi les pratiques en soins palliatifs des
infirmières libanaises. En particulier, celles liées au fait d’offrir un soutien à la personne
162
et à ses proches pour déterminer leurs « besoins liés à l’organisation de la vie
quotidienne » (DC#3) et y répondre. Selon le MSSS (2008), cette dimension réfère à la
possibilité d’aider la personne et ses proches à accéder aux ressources appropriées pour
répondre à leurs besoins de soutien financier et pratique. D’ailleurs, l’observation sur le
terrain a permis de constater que l’infirmière de l’équipe interdisciplinaire assure un
soutien de la vie quotidienne en proposant des liens avec des organismes de nature
caritative et actifs en soins palliatifs à domicile.
De même, les résultats de cette étude s’alignent avec les propositions du Plan directeur
sur la nécessité d’une « collaboration centrée sur la personne et ses proches » (DC#7),
entre les membres de l’équipe en soins palliatifs et les autres membres du personnel
soignant. Cette collaboration interdisciplinaire se réalise dans un cadre de dialogue avec
les membres de l’équipe mobile et en dirigeant la personne et ses proches vers ces
membres, en particulier le psychologue et le représentant spirituel. L’infirmière de
l’équipe mobile spécialisée en soins palliatifs est au cœur de cette collaboration
interdisciplinaire et elle établit plus spécifiquement, des liens étroits avec les infirmières
en oncologie.
Dans le domaine de la « communication » (DC#6), le Plan directeur (MSSS, 2008)
propose une transmission d’information et un enseignement adaptés à la capacité de
compréhension et aux besoins de la personne et de ses proches. Dans l’étude actuelle, les
participants, en particulier les infirmières de l’unité d’oncologie, profitent du moment du
soin pour proposer des interventions d’enseignement au patient et à sa famille. Ce contact
vise l’acquisition et le maintien des capacités d’autosoins, surtout à domicile. Il est aussi
possible d’établir un lien avec la dimension des « questions éthiques et légales » (DC#8)
du Plan directeur du MSSS (2008). Cette dimension est peu représentée dans les résultats
de l’étude. En effet, les infirmières intègrent des repères éthiques par la promotion de la
qualité de vie, le respect des valeurs de la personne et de sa dignité. Toutefois, en ce qui a
trait à la collaboration aux discussions et aux prises de décisions cliniques à dimension
éthique, cette pratique ne relève pas directement des fonctions des infirmières en
oncologie, mais plutôt de l’équipe médicale et de l’équipe interdisciplinaire, à laquelle
163
participe l’infirmière de l’équipe mobile. Cependant, les infirmières en oncologie
pourraient accompagner et soutenir les patients et leurs proches dans cette expérience et
tout au long de leur processus de prise de décision, ce qui semble tout de même peu
présent. Ce qui d’ailleurs peut entraîner des souffrances éthiques et des dilemmes moraux
auprès des infirmières en oncologie, lorsque les décisions ne lui apparaissent pas
contribuer au mieux-être et à la qualité de vie de la personne.
Les résultats de l’étude soulignent l’importance du « développement personnel et
professionnel » (DC#9), une dimension du Plan directeur (MSSS, 2008). Les limites
personnelles et professionnelles que rencontrent les infirmières libanaises dans leur
pratique des soins palliatifs, ainsi que leur vulnérabilité lorsqu’elles se voient souvent
soumises à des soins qui vont à l’encontre de leurs valeurs personnelles, montrent la
nécessité de poursuivre le développement de la pratique infirmière en soins palliatifs afin
de renforcer le travail de ces infirmières. Au niveau professionnel, le manque de formation
et les deuils multiples que vivent les infirmières pointent l’importance d’assurer le
développement personnel et professionnel de ces dernières pour maintenir et améliorer la
qualité de leur pratique.
Le domaine relatif aux « soins palliatifs et organisation des services de santé » (DC#10)
du MSSS (2008), a été pris en compte par la description des enjeux relatifs à l’offre de
soins palliatifs dans le contexte libanais, et à sa structure organisationnelle qui limite
l’intimité des soins. De même, il met en relief le manque d’ouverture à la philosophie qui
entoure les soins palliatifs par la résistance des acteurs et le manque d’intégration de
normes de pratique.
Bref, les résultats de la présente étude rejoignent les propositions de domaines du Plan
directeur du MSSS du Québec (2008). Cette conformité permet de décrire l’exercice de la
pratique infirmière en soins palliatifs. Elle trace le chemin des infirmières pour répondre
aux besoins des personnes atteintes de cancer, assurer leur confort et maintenir leur qualité
de vie. Elle permet également, de soutenir la discussion des résultats. Toutefois, la
collaboration avec la personne et ses proches semble être générique et ne va pas dans
164
l’approfondissement de l’accompagnement et la relation avec la personne. Ce constat a
conduit à faire appel à un cadre théorique, celui du caring, afin d’approfondir cet aspect
relationnel.
6.2.2 L’utilisation du cadre du Human Caring de Jean Watson
D’une manière analogue, la théorie du Human Caring de Jean Watson a été utilisée
comme toile de fond pour exposer l’approche humaniste des soins infirmiers palliatifs. En
effet, le caring soutient la personne en respectant ses valeurs, ses croyances, et en l’aidant
à atteindre un plus haut niveau d'harmonie entre son âme, son corps, et son esprit. Cet
aspect de la relation avec le patient était peu présent dans le Plan directeur, et s’avère donc
essentiel pour les soins palliatifs. Il était alors judicieux de choisir un tel cadre qui
transcende tous les domaines du plan directeur. Il s’est avéré également utile, pour la
conception du guide d’entrevue et l’analyse des résultats, de se référer à la théorie de
Watson.Les résultats de cette recherche doctorale amènent à penser qu’il y a une grande
implication des infirmières de l’unité d’oncologie pour des soins humanistes. Cette
implication semble nécessaire, bien qu’elle ne soit pas guidée officiellement par une
approche spécifique comme celle de Watson, par manque d’intégration dans
l’établissement d’une philosophie de soins sous-jacente au caring.
En effet, il ressort de toutes les données recueillies que les infirmières privilégient
l’approche humaniste du caring, comme un aspect incontournable pour la prestation de
soins palliatifs auprès de patients en fin de vie. En effet, l’approche humaine du caring
transcende les cinq thèmes centraux qui ont émergé de l’analyse des résultats et qui
permettent de mieux comprendre la pratique infirmière en soins palliatifs au Liban. En
particulier, cet accompagnement humain se réalise par la façon d’être avec le patient à
travers la présence, le respect et l’écoute active, tout en plaçant la personne au cœur du
soin. En effet, les résultats de cette présente recherche ainsi que ceux de Fridh et al. (2009)
et de Guay et al. (2011) permettent de déterminer que la présence de l’infirmière, auprès
du patient en fin de vie, constitue un aspect important de l’approche de caring.
165
La relation humaniste de caring est basée, selon les infirmières libanaises interviewées,
sur le respect du patient et de ses proches. Lors de la prestation des soins, les infirmières
ont en effet montré leur souci du respect du patient. D’ailleurs, l’analyse des entrevues a
fait ressortir le terme « respect » à plusieurs occasions. Il était lié particulièrement, au
respect de la vie de la personne, de la dignité, des croyances, des valeurs de la personne,
de la volonté du patient en fin de vie et de son droit. De plus, les infirmières n’ont pas
manqué d’exprimer leur respect pour le cheminement des patients et de créer, lors des
soins, une relation qui vise la protection et la préservation de leur dignité humaine. Ces
résultats sont en lien avec d’autres études qualitatives (Dong et al., 2016 ; Fridh et al.,
2009 ; Guay et al., 2011 ; Silva et al., 2014), qui ont mis en lumière le respect du patient
mourant comme une priorité et un fondement pour un soin humain en soins palliatifs. Les
infirmières ont évoqué également, l’importance de favoriser une relation humaniste par
l’écoute active des plaintes et de la souffrance de la personne et de ses proches. Cette
relation est assurée lorsque l’infirmière écoute avec disponibilité et chaleur le patient en
soins palliatifs et lui assure un soutien psychologique dans les moments difficiles. Cette
confirmation s’aligne avec les propos de Zerwekh (2010), qui a identifié l’écoute comme
une composante vitale dans la création de liens entre l’infirmière et le patient en fin de
vie. De plus, les résultats de la présente étude ont permis de mettre en lumière l’importance
pour l’infirmière de garder le silence comme un moment d’échange avec leurs patients.
Selon les infirmières interviewées, l’écoute implique souvent la capacité de créer des
silences pour décoder les messages émotionnels du patient et de ses proches.
Par ailleurs, Foucault et Mongeau (2004) indiquent dans leur ouvrage que les soins
palliatifs intègrent une attention empathique de la part de l’infirmière à l’égard des
sentiments de la personne mourante, et que la pratique du caring découle d’une alliance
thérapeutique transpersonnelle. Ces propos sont appuyés par les résultats de l’étude de
Fortin et Bouchard (2009) qui décrivent des pratiques de soins exercées par les infirmières
comme la communication, l’écoute, l’empathie et la présence lors de l’accompagnement
de patients en fin de vie. Cet accompagnement est considéré par ces infirmières comme
une expérience enrichissante qui leur permet de réfléchir aux fondements humanistes des
soins et aux valeurs de la vie. Bien que l’étude phénoménologique effectuée en Chine par
166
Zheng et al. (2015) montre que l’expérience du caring auprès de patients en fin de vie
aide les infirmières à réfléchir sur le sens donné à la vie et à la mort, cet aspect de
l’expérience du caring ne s’accorde pas avec les résultats de cette présente étude. En effet,
à l’instar des infirmières des études de Fortin et Bouchard (2009) et de Zheng et al. (2015),
celles interviewées dans la présente étude n’ont pas considéré leur expérience auprès des
personnes en fin de vie comme enrichissante, et cette expérience n’a pas suscité chez elles
des réflexions sur la vie et la mort. Cette différence pourrait être due au manque de
formation dans ce domaine.
À la lumière des résultats de cette recherche doctorale, il est possible de constater que les
valeurs prônées en soins palliatifs par les infirmières libanaises concordent avec
l’approche relationnelle et humaniste au cœur du caring, notamment au niveau des
processus de caritas cliniques. Les prochains paragraphes discutent les résultats de l’étude
en lien avec les processus de caritas cliniques, en référence au Tableau 3, du cadre de
référence.
En ce qui a trait aux processus de caritas cliniques, ces derniers ne sont pas tous présents.
Ainsi, l’application de la théorie n’est pas optimale. Pour les processus de caritas cliniques
en lien avec l’assistance en regard des besoins de base (PCC#9), selon Watson (2012),
l’infirmière doit considérer les besoins des patients avec une conscience de caring et
administrer des soins humains qui potentialisent l’harmonie esprit-corps-âme. Dans ce
sens, les infirmières participantes à l’étude ont procédé à la dispensation de soins
humanistes pour les patients atteints de cancer en fin de vie, en négligeant souvent
l’harmonie et l’alignement entre esprit-corps-âme, ou de vivre le moment du caring avec
la personne soignée en rencontrant son champ phénoménal. Mais, cette pratique se
caractérise par de l’amour et de la bonté (PCC#1), tout en considérant la personne dans sa
globalité, afin d’améliorer sa qualité de vie pendant cette phase vulnérable. Les infirmières
ont assisté les patients dans leurs activités quotidiennes et évalué en permanence les
situations que vivent les patients et les soins dont ils auront besoin, tout en préservant la
dimension humaine du soin. Les infirmières ont répondu également, aux besoins
psychologiques et spirituels de la personne soit à son âme, à travers le maintien de son
167
système de croyances (PCC#2) et en s’ouvrant aux dimensions spirituelles (PCC#10),
mais aussi, par l’utilisation créative de soi (PCC#6) pour aider le patient à donner un sens
à son existence. En effet, les infirmières participantes à cette recherche veillent à combiner
leurs activités de nature technique et relationnelle. D’ailleurs, elles ont souligné
l’importance de leur présence auprès du patient et de sa famille, malgré leur manque de
temps. Cette attitude de caring renvoie au moment de caring proposé par Watson (2012),
qui se manifeste par la constance de la présence auprès du patient qui souffre (PCC#5),
pour lui manifester qu’il n’est pas abandonné, mais plutôt qu’il est bien entouré.
D’ailleurs, les infirmières de cette étude disent qu’elles profitent de cette présence pour
instaurer un climat de confiance (PCC#4) propice à l’établissement d’une relation
humaine avec le patient, communiquer avec lui quand son état le permet, assurer son
confort, s’asseoir près de lui, détecter sa détresse ou répondre à ses questions. Elles
prennent conscience de sa présence et du fait de vivre un moment de caring avec la
personne soignée.
Ces résultats s’alignent avec le processus de caritas clinique de Watson (2012) en lien
avec la facilitation et le maintien d’un système de croyances profondes, en étant
authentiquement présent (PCC#2). Les résultats de cette étude mettent aussi l’accent sur
l’approche humaniste centrée sur la personne. Ils mettent en valeur l’authenticité dans la
pratique professionnelle en soins palliatifs. D’ailleurs, la relation humaniste du caring de
Watson (2012), en particulier la relation transpersonnelle, met l’accent sur l’authenticité
et la composante humaine des soins, puisqu’elle réfère à une relation intersubjective
d’humain à humain (PCC#2). En effet, l’observation sur le terrain témoigne que les soins
fournis par les infirmières participantes à l’étude, œuvrant auprès de patients en soins
palliatifs, tenaient compte en particulier de l’authenticité de chaque patient. Cette
approche du caring, qui donne du sens à la pratique infirmière, se trouve souvent intégrée
à la routine des infirmières lors de la prestation des soins auprès de leurs patients, mais à
des degrés différents. D’ailleurs, plusieurs attitudes en lien avec le caring ont été
observées. Ainsi, les infirmières ont établi une relation de confiance et facilité le système
de croyances profondes et le monde subjectif du patient et de sa famille (PCC#2). Elles
168
ont encouragé l’expression de leurs émotions et de leurs sentiments positifs et négatifs,
même parfois par le silence (PCC#5).
De plus, comme le propose Watson (1979), les infirmières interviewées et observées sur
le terrain ont développé une relation thérapeutique d’aide et de confiance empreinte de
congruence, d’empathie et de chaleur humaine avec le patient et sa famille. Elles ont
développé une relation d’aide empreinte de caring, en s’ouvrant aux autres avec sensibilité
et compassion (PCC#3), en démontrant de l’écoute, et en respectant les droits du patient
en fin de vie, mais en omettant l’ouverture à leurs propres pratiques spirituelles et leur soi
transpersonnel. Elles ont démontré une disponibilité et une réceptivité pour prodiguer des
soins émotionnels et répondre aux besoins psychologiques du patient et de sa famille. En
plus, dans le cadre de cette étude, les participantes ont utilisé un langage qui dénote le
caring en regard de leur relation avec le patient et sa famille. Elles ont respecté le
cheminement unique de chaque patient et sa volonté, en manifestant le sentiment qu’elles
comprennent ce qu’il vit et en suscitant une communication active.
De même, Watson (2012) propose la création d’un environnement facilitant la guérison à
tous les niveaux, et par lequel l’entièreté, la beauté, le confort, la dignité et la paix (PCC#8)
sont présents. Sur ce plan, les infirmières ont favorisé le confort ainsi qu’un
environnement physique et spirituel, tout en maintenant la dignité humaine et une mort en
paix. Dans sa théorie du Human Caring, Watson (1979) note également, l’importance de
l’engagement dans une expérience d’enseignement-apprentissage authentique qui
s’intéresse à l’unité de l’être et à la signification (PCC#7). Dans ce contexte, les résultats
de l’étude actuelle démontrent que les infirmières se sont engagées avec la personne en
fin de vie dans une expérience d’enseignement-apprentissage authentique. Cette
expérience s’intéresse à l’unité de l’être et à sa signification, par la transmission
d’information pour réduire l’anxiété du patient et de sa famille liée à l’incertitude et à la
gravité de sa maladie.
Malgré les efforts pour la prestation de soins palliatifs optimaux et humanistes, certains
facteurs semblent contrecarrer ces efforts ou parfois les faciliter.
169
6.2.3 L’utilisation des facteurs contraignant ou facilitant la pratique infirmière en
soins palliatifs
Les résultats de la présente thèse et la revue des écrits ont révélé qu’il subsistait des
facteurs contraignant ou facilitant la pratique infirmière en soins palliatifs, en l’occurrence
des facteurs professionnels, organisationnels et émotionnels.
6.2.3.1 Les facteurs contraignants et les facilitateurs professionnels
A la lumière des données recueillies, les discours des participants ont mis l’accent sur la
résistance des médecins (FA#2, en référence au Tableau 2 du cadre de référence) au regard
de l’approche palliative. Ainsi, la résistance de certains oncologues met en relief le
manque d’ouverture à la philosophie qui entoure les soins palliatifs. De même, cette
résistance pourrait être en lien avec le modèle médical basé sur des algorithmes
thérapeutiques orientés vers les interventions curatives.
En ce qui concerne le manque de consensus et aux décisions divergentes (FA#1) relatifs
au début des soins palliatifs, ces derniers sont considérés comme des soins terminaux, car
ils sont introduits tardivement dans la trajectoire de la maladie des patients atteints de
cancer. En revanche, l’étude des documents réalisée dans cette présente recherche va plus
loin, en mettant en évidence la transition tardive entre les soins palliatifs et curatifs. Le
document « brochure » de l’établissement concerné décrit le modèle des soins palliatifs
selon la trajectoire de soins, soit du diagnostic au décès. Selon ce modèle, les soins
palliatifs s’intègrent tôt dans la trajectoire de soins. Il est vrai que cette brochure reste en
partie théorique Selon les participants à l’étude, puisque sur le terrain les soins palliatifs
sont introduits tardivement. Cette pratique semble avoir un impact négatif sur l’exercice
infirmier des soins palliatifs. D’ailleurs, les infirmières considèrent que cette transition
tardive limite l’accès aux bénéfices escomptés de la pratique des soins palliatifs, en
particulier l’amélioration de la qualité de vie, d’où l’importance d’abolir la frontière entre
le curatif et le palliatif.
Les résultats ont également, mis en évidence la souffrance des infirmières devant
l’obligation d’exécuter des interventions curatives au détriment des soins de confort. En
170
fait, les infirmières interviewées perçoivent que la pratique infirmière en soins palliatifs,
dans leur unité, est souvent accompagnée d’autres traitements déraisonnables. Il s’agit
parfois de traitements dans un but de guérison ou d’investigations jugées inutiles en fin
de vie. Les infirmières reconnaissent qu’elles sont tenues d’effectuer des examens en fin
de vie qu’elles trouvent intolérables et inutiles, ce qui ne fait qu’augmenter la souffrance
du patient. Ces résultats peuvent être comparés aux écrits de Fortin et Bouchard (2009),
qui décrivent dans leur étude qualitative comment les infirmières participantes à l’étude
étaient souvent témoins de situations d’acharnement thérapeutique et étaient parfois
contraintes d’y participer. En effet, elles disaient participer à des manœuvres de
réanimation qu’elles jugeaient futiles, aux dépens de l’accompagnement psychologique et
des soins de confort que requièrent les patients en fin de vie. Ces soins leur apparaissaient
comme étant source de douleur et de torture pour les patients. Ces propos ont également
été évoqués par les infirmières de l’étude de Gross (2006), qui affirment que ces
traitements à visée curative ou de rétablissement peuvent contribuer à donner de faux
espoirs sur la possibilité de guérison pour les patients et les familles. En outre, ces
investigations et traitements déraisonnables semblent relever d’une mauvaise
compréhension des soins palliatifs, des valeurs qui les sous-tendent, de leur but principal
et des bénéfices qu’ils peuvent apporter à la personne.
De même, le rythme des activités, le manque de temps (FA#3, Tableau 2) nécessaire pour
accomplir un soin ou le fait d’être demandées auprès d’autres patients ont été identifiés
comme des barrières qui peuvent limiter la prestation d’un soin de qualité en fin de vie.
Ces résultats concordent avec ceux d’Andersson et al. (2016), qui montrent que les
infirmières se sentent déchirées entre la contrainte du temps et leurs responsabilités dans
la pratique des soins, surtout quand elles ont la charge de plusieurs patients en même
temps. Elles affirment éprouver un sentiment de frustration de ne pouvoir équilibrer le
temps entre le curatif et le palliatif, et sentent une inadéquation dans la pratique des soins
aux patients en fin de vie. De même, ces résultats renforcent ceux de Fortin et Bouchard
(2009) et de Vedel et al. (2014), qui confirment que le manque de temps des infirmières
constitue une contrainte importante suite à la prise en charge de plusieurs patients avec
des traitements et des diagnostics différents. Selon les résultats de Fortin et Bouchard
171
(2009) et de Vedel et al. (2014), les infirmières se voient surchargées par la multiplication
de responsabilités. Elles sont incapables de fournir une prise en charge suffisante pour le
patient, car leur temps est souvent escamoté au profit des personnes traitées en soins aigus.
Par conséquent, elles ne sont pas toujours en mesure de réaliser des soins palliatifs de
qualité ou d’assurer une présence auprès des patients ainsi que de leurs proches.
De plus, les résultats actuels ont permis de mettre en lumière un obstacle qui a fait
consensus dans la littérature scientifique, celui du manque de connaissances et de
formation (FA#4, Tableau 2) nécessaires pour soigner une personne en fin de vie. Ce
constat rejoint les propos des experts, en particulier le WHO et la WPCA (2014), qui
postulent dans l’Atlas Mondial des soins palliatifs en fin de vie, que le manque de
formation constitue une barrière pour le développement des soins palliatifs. Les difficultés
associées à la pratique en soins palliatifs sont inhérentes au manque de connaissances de
la plupart des infirmières qui n’ont pas reçu la formation requise pour apporter le soutien
nécessaire aux patients en fin de vie et à leur famille. A l’égard des notions de base sur les
soins palliatifs introduits dans les formations académiques des infirmières et des efforts
déployés par le comité national des soins palliatifs libanais à ce niveau, les infirmières
interrogées affirment l’insuffisance de leurs connaissances sur les soins palliatifs. Elles
réclament par ailleurs, le développement d’une formation spécialisée, qui s’avère
nécessaire pour s’engager davantage avec les patients en fin de vie. D’ailleurs, parmi les
participantes, une seule infirmière a suivi une formation spécialisée en soins palliatifs, ce
qui pourrait être une limite pour l’unité de soins et un facteur défavorable à la prestation
de soins palliatifs de qualité pour les patients.
Force est de constater que le manque de formation apparaît comme un obstacle dans
plusieurs recherches provenant de différents pays. En particulier, en Suède (Andersson et
al., 2016), en Corée du Sud (Lee et al., 2013), en République démocratique du Congo
(Lofandjola Masumbuku & Coppieters, 2014), en Australie (Johnson et al., 2011), en Iran
(Rassouli & Sajjadi, 2016 ; Razban et al., 2013), en Chine (Dong et al., 2016 ; Zheng et
al., 2015), aux USA (Beckstrand et al., 2012 ; Gross, 2006 ; Peterson et al., 2010), au
Canada (Fillion & Saint-Laurent, 2003 ; Fortin & Bouchard, 2009), et au Moyen-Orient
172
(Silberman et al., 2015). De même, des résultats similaires sont évoqués dans une revue
systématique qui a été conduite par McCourt et al., en 2013, pour explorer les expériences
des infirmières qui fournissent des soins palliatifs en fin de vie.
Pour pallier à cet obstacle, les écrits scientifiques (Dong et al., 2016 ; Johnson et al., 2011 ;
Lofandjola Masumbuku & Coppieters, 2014 ; Mc Court et al., 2013 ; WHO & WPCA,
2014) recommandent un développement de programmes de formation continue. Cet effort
pourra combler les lacunes et améliorer la qualité de la prise en charge holistique des
patients en fin de vie. Les résultats de la présente étude vont dans le même sens que ceux
de Silberman et al. (2015). Leur étude, menée dans 15 pays du Moyen-Orient, portait sur
l’importance du développement des connaissances en soins palliatifs par l’intégration de
formations dans les programmes académiques des infirmières et des médecins. Selon les
chercheurs, cette intégration est essentielle pour permettre un changement au niveau des
compétences dans le domaine des soins palliatifs afin de prodiguer aux patients en fin de
vie des soins de qualité, selon une approche globale.
Dans ce sens, Dong et al. (2016) ainsi que Lofandjola Masumbuku et Coppieters (2014)
mentionnent que les professionnels de la santé adéquatement formés en soins palliatifs
peuvent offrir des soins de haute qualité pour les patients atteints de cancer en fin de vie.
Ces propos rejoignent les demandes des infirmières libanaises qui souhaitent la mise en
place de programmes de formation, afin de les aider à améliorer leurs connaissances et
compétences en soins palliatifs. Par ailleurs, les experts dans ce domaine proposent des
formations en interdisciplinarité. En effet, le MSSS (2015) du Québec propose le
développement professionnel en soins palliatifs par des stratégies d’apprentissage
interdisciplinaire qui mise sur les interactions entre les participants, afin de favoriser
l’atteinte de l’objectif fondamental, celui d’améliorer la pratique professionnelle en
équipe. Cette proposition a également été évoquée lors d’une entrevue avec un expert
national en soins palliatifs participant à la présente étude. Celui-ci a proposé des sessions
d’apprentissage interdisciplinaire, pour une meilleure compréhension du travail d’équipe
et une meilleure collaboration interdisciplinaire.
173
De même, les résultats de cette présente étude soulignent une barrière principale, à savoir,
l’absence de modèle national de soins palliatifs au Liban. Ce manque de modèle peut être
relié au manque d’intégration des soins palliatifs dans le système de soins de santé au
Liban. À cet effet, l’ACSP (2013, p. 2) soutient qu’un « modèle national de soins palliatifs
est nécessaire à l’établissement d’une vision commune ainsi qu’à la normalisation et à la
cohérence de la prestation des soins […], de l’éducation et de la promotion des soins
palliatifs à l’échelle du Canada ». Ces propositions corroborent celles du WHO et de la
WPCA (2014), qui ont publié dans l’Atlas mondial des soins palliatifs en fin de vie
plusieurs modèles existants de par le monde. Ces différents modèles peuvent être utiles
pour des pays où les soins palliatifs sont en voie de développement.
6.2.3.2 Les facteurs contraignants et les facilitateurs organisationnels
Des similitudes se retrouvent entre les résultats de cette recherche doctorale et les écrits
traitant des facteurs contraignants organisationnels attribuables à l’environnement de
soins (Andersson et al., 2016 ; Fridh et al., 2009 ; Iglesias et al., 2013 ; McCallum &
McConigley, 2013 ; McCourt et al., 2013 ; Vedel et al., 2014). En effet, le manque
d’infrastructures organisationnelles (FA# 7, Tableau 2) semble dominer dans les propos
des participants de cette présente étude, en particulier des infirmières, qui se plaignent
d’un manque d’intimité du patient et de sa famille en fin de vie. Ces résultats s’accordent
avec ceux de Fridh et al. (2009), de McCallum et McConigley (2013) et de McCourt et al.
(2013) sur le manque de chambres individuelles qui affecte négativement la qualité des
soins fournis aux patients en fin de vie. Une telle opinion réfère en partie, au manque
d’unités d’hospitalisation spécifiques aux soins palliatifs dans l’établissement. Incitées à
réfléchir sur les éléments qui devraient être considérés pour pallier à cet obstacle, les
infirmières proposent de reconsidérer l’environnement physique pour que les patients en
soins palliatifs aient accès à une chambre individuelle. Dans ce sens, il était possible
d’envisager des transferts dans des chambres privées, lorsque possible, pour que le patient
en soins palliatifs puisse se retrouver seul dans sa chambre. Selon les infirmières, ce
transfert faciliterait la prestation des soins à ces patients vulnérables dans les derniers
moments de leur vie. De même, cet aménagement permettrait aux patients en fin de vie
174
d'être accompagnés par leurs proches en toute intimité et leur assurerait une mort en toute
dignité (McCallum & McConigley, 2013 ; Fridh et al., 2009).
De même, la littérature recensée a permis d’identifier un autre obstacle, celui du manque
d’espace approprié à la famille afin d’exprimer leur chagrin (Iglesias et al., 2013 ; Lee et
al., 2013). Cet obstacle n’a cependant pas été mentionné dans la présente étude doctorale.
Ces propos sont également abordés dans la revue des écrits de McCourt et al. (2013) et
dans la recherche conduite par Vedel et al. (2014). Bien que les résultats de Vedel et al.
(2014) montrent que les patients et leur famille sont satisfaits d’être ensemble aux derniers
moments de leur vie, les familles participantes à leur étude ont souhaité d’avoir une place
privée pour elles, afin d’exprimer leur peine. Cette particularité a été fortement
recommandée par les professionnels de la santé de la même étude pour pouvoir discuter
avec la famille (Vedel et al., 2014). Cependant, les résultats de la présente recherche
doctorale sont quelque peu différents dans ce sens, puisque cet obstacle n’a pas été relevé
par les infirmières participantes à la présente étude. Pourtant, l’observation des pratiques
des infirmières sur le terrain a permis de constater que souvent elles se retirent avec la
famille dans le couloir ou dans une chambre libre avoisinante pour échanger discrètement
avec les membres de la famille sur l’état de leur proche.
Le manque de ressources humaines (FA#8, Tableau 2), en particulier des infirmières,
constitue un autre obstacle d’ordre organisationnel. La dotation inadéquate de ratio
infirmière-patients par manque d’effectifs apparaît comme une barrière affectant
l’exercice d’une pratique infirmière efficace en soins palliatifs. Les résultats de cette
présente recherche soulignent l’impact de la charge administrative. Elle est à l’origine
d’un sentiment de malaise évoqué par quelques infirmières et confirmé par les
observations effectuées sur le terrain. Par ailleurs, ces observations montrent que les
infirmières tentent de contourner la barrière du temps dans l’organisation de leur travail,
en demandant de l’aide à l’infirmière spécialisée de l’équipe mobile. Il est possible de
penser que cette organisation ne constitue pas nécessairement une solution gagnante.
L’infirmière de l’équipe mobile, qui a un rôle de consultante, risque d’être accaparée par
les soins de base et ne pourra plus jouer son rôle entièrement, qui consiste à accompagner
175
les infirmières et à donner des soins plus complexes, afin d’aider à améliorer la réalisation
des soins. Ensuite, cela pourrait donner à l’organisation et aux gestionnaires la fausse
impression que la charge de travail est adéquate, puisque les soins sont livrés tels que
requis en bout de ligne. Ils risquent alors de n’apporter aucun changement pour contrer la
charge de travail, empêchant les infirmières en oncologie d’accompagner les patients en
soins palliatifs. À cet effet, Bonnières et al. (2010) ont mis en évidence la répartition des
charges dans les services et le renforcement de l’effectif, pour une meilleure prise en
charge des patients en soins palliatifs.
6.2.3.3 Les barrières et les facilitateurs émotionnels
Les résultats de cette thèse ont permis de décrire que les exigences émotionnelles (FA#9,
Tableau 2) liées à la confrontation quotidienne avec la mort constituent des barrières qui
freinent la pratique infirmière en soins palliatifs. Ces exigences semblent être associées
au travail des infirmières en unité d’oncologie suite à l’exposition répétée à la détresse des
personnes atteintes de cancer et de leurs proches. S’opposer aux valeurs des infirmières
soignantes constitue également, un obstacle émotionnel qui provoque chez elles une
frustration affectant leur vie personnelle. En fait, les résultats de la présente étude laissent
entrevoir que les infirmières évitent de s’impliquer émotionnellement avec le patient et
cherchent à se protéger de l’épuisement et du burn-out par des mécanismes de défense.
D’ailleurs, l’expression « burn-out » utilisée par plusieurs infirmières interrogées, amène
à comprendre qu’elles sont probablement confrontées à des conflits de valeurs ou à un
dilemme d’éthique professionnelle. Ces résultats rejoignent ceux mentionnés par Fillion
(2011) et Dong et al. (2016), et renforcent ceux évoqués par Peterson et al. (2010). Ces
derniers précisent que c’est notamment, en s’impliquant avec trop de compassion que les
infirmières œuvrant en soins palliatifs ont des difficultés à garder leurs distances
professionnelles. Elles tentent de retenir leurs émotions pour éviter de ressentir une
détresse émotionnelle. Pennbrant et al. (2015) avaient mentionné l’importance de séparer
la vie professionnelle de la vie privée des infirmières œuvrant en soins palliatifs, afin de
préserver leur équilibre émotionnel.
176
Par ailleurs, il est important de souligner que les présents résultats apportent une nuance
intéressante, à savoir que la lourde charge de travail et la confrontation aux décès multiples
empêchent les infirmières de faire leur deuil après le décès d’un patient. Ces résultats sont
corroborés par l’étude de Fortin et Bouchard (2009) et celle d’Andersson et al. (2016), qui
proposent des stratégies pour y faire face, par exemple, la prise de distance et la discussion
avec des collègues. Ainsi, les résultats de cette présente étude font ressortir la nécessité de
l’accompagnement psychologique des infirmières, afin d’affronter la charge émotive et
les aider à se débarrasser de cumuls subis lors de la dispensation de soins auprès de
patients atteints de cancer en fin de vie. Ainsi, la valorisation du travail des infirmières
reste un facteur essentiel. Il paraît de même, que des séances de soutien et de
« debriefing » soient bénéfiques pour gérer les émotions face aux situations de stress
vécues auprès des patients en soins palliatifs, et pour les soutenir (Andersson et al., 2016 ;
Pennbrant et al., 2015).
6.3 Les considérations d’ordre méthodologique
L’étude de cas simple, à niveaux d’analyse imbriqués, a permis d’expliquer un phénomène
peu connu au Liban, soit celui de la pratique infirmière en soins palliatifs. L’utilisation de
cette méthode de recherche est appropriée pour répondre à la question relative au « quoi »
et au « comment » de phénomènes sociaux complexes (Yin, 2014). En effet, c’est la raison
pour laquelle ce devis a été choisi et a permis de répondre aux questions de recherche en
lien avec l’objet d’étude.
Le modèle proposé par Miles et Huberman (2003) s’est avéré pertinent pour l’analyse du
contenu qualitatif. Les trois composantes du modèle interagissent au cours du processus
d’analyse d’une façon circulaire et itérative, par la condensation des données, la
présentation des données et l’élaboration des conclusions. Selon Yin (2014), l’étude de
cas à niveaux d’analyse imbriqués sert de guide dans le processus de collecte des données
empiriques, qui proviennent de plusieurs sources et de différentes méthodes. En effet, les
méthodes de collecte des données étaient appropriées pour ce devis, tout en utilisant de
multiples sources de données de manière à expliquer en profondeur le phénomène étudié.
Selon Miles et Huberman (2003), et en raison de la flexibilité inhérente aux études
177
qualitatives, les méthodes de collecte des données peuvent être modifiées en cours
d’étude. Ce faisant, le guide d’entrevue adressé aux infirmières de l’unité d’oncologie a
été modifié dans un continuel va-et-vient, et des probes ont été ajoutés. Ainsi, du fait que
les données recueillies ont été traitées et analysées au fur et à mesure de la collecte, il a
été possible de détecter à temps quelques données manquantes, et de préparer les
prochaines collectes de données en conséquence par l’ajout des probes. De ce fait,
l’interaction entre la collecte d’information et son analyse a permis l’atteinte de la
saturation des données, provenant des entrevues individuelles et de groupe, des notes
prises au cours des observations faites sur le terrain, de l’analyse des documents et du
journal de bord de l’étudiante-chercheuse.
En conséquence, les entrevues auprès des différents types de participants ont permis de
dresser un portrait détaillé de la pratique infirmière en soins palliatifs, au sein d’une équipe
interdisciplinaire. En ce qui concerne les séances d’observation auprès des infirmières de
l’unité d’oncologie et de l’infirmière de l’équipe mobile, ces dernières ont permis de
mettre en évidence la pratique des soins palliatifs dans des situations réelles de soins, tant
au niveau des actes infirmiers qu’au niveau des interactions avec les patients et leur
famille. Ces observations se concentraient sur des activités et événements qui survenaient
dans des contextes naturels de la pratique infirmière au quotidien. De plus, l’étude
documentaire s’est avérée pertinente pour renforcer la compréhension de la vision des
soins palliatifs dans l’établissement. Sans oublier les notes de terrain rédigées par
l’étudiante-chercheuse dans un journal de bord qui d’une part, ont permis de tenir compte
des constats et des impressions résultant des entrevues et des observations, et d’autre part,
de consolider l’interprétation la plus juste possible des propos recueillis. Par la suite, la
triangulation des données, provenant de multiples participants et de multiples sources de
données, constitue un point de force de cette étude. En effet, cette triangulation a permis
de prendre en compte les perspectives de plusieurs acteurs dans la collecte des données et
de tirer des conclusions valables sur ce qui constitue la réalité de l’exercice de la pratique
infirmière en soins palliatifs.
178
6.4 Les limites
Cette recherche doctorale comporte quelques limites à souligner. D’abord, elle porte sur
les infirmières dans un contexte de soins en oncologie. Or, il aurait été pertinent de jeter
un regard sur les infirmières œuvrant dans d’autres unités similaires, qui hospitalisent
également des patients atteints de cancer ou d’autres maladies graves en fin de vie.
D’autant plus que, conformément aux préconisations du WHO et de la WPCA (2014), les
soins palliatifs s’adressent à toute personne atteinte d’une affection grave mettant en jeu
le pronostic vital, en phase avancée ou terminale.
Bien que la reconnaissance de l’étude de cas repose principalement sur la forte validité
interne de ses résultats, sa faible validité externe constitue une problématique qui menace
le transfert des résultats (Yin, 2014; Gagnon, 2012). Dans le cadre de cette étude, la
stratégie de sélection des infirmières constitue une limite en raison de sa répartition par
rapport à l'ensemble des infirmières au Liban. En outre, et contrairement à plusieurs
établissements de santé au Liban, celui où l’étude a été réalisée a créé une équipe mobile
interdisciplinaire de soins palliatifs qui intervient au sein des services de l’hôpital pour
appuyer et conseiller les équipes dans la prise en charge des soins palliatifs. En
conséquence, les observations effectuées, les résultats présentés et les conclusions tirées
ne sont pas tout à fait transférables à d’autres établissements, surtout si ceux-ci n’ont pas
développé une équipe mobile interdisciplinaire en soins palliatifs. Néanmoins, cette
faiblesse est diminuée par la description détaillée du processus permettant de porter un
jugement quant à l’application des résultats à d’autres contextes (Fortin & Gagnon, 2016).
À cet égard, tel qu’introduit par Yin (2014), bien qu’il s’agisse d’un cas unique, il pourra
être représentatif sur le plan théorique plutôt que sur les populations. En effet, plusieurs
similarités avec des études antérieures furent constatées notamment, en ce qui concerne
l’utilisation de l’approche holistique des soins et l’identification de facteurs facilitant ou
contraignant la pratique infirmière en soins palliatifs. Dans ce sens, considérant les
similitudes avec la littérature, il serait possible de croire qu’il y a une conformité de la
réalité observée avec d’autres établissements qui dispensent des soins palliatifs au Liban.
179
Une autre limite inhérente à cette étude est en lien avec le petit nombre de familles
interviewées (n=3). En effet, la langue du guide d’entrevue, soit le français, a limité le
nombre d’entrevues réalisées avec les familles. Bien que l’échantillon de trois familles ait
permis de circonscrire des informations importantes sur la pratique infirmière en soins
palliatifs, il aurait été certes intéressant d’avoir quelques participantes supplémentaires
afin d’explorer plus en profondeur et d’atteindre la saturation des données lors des
entrevues avec ces familles. De même, la langue du guide d’entrevue a limité l’accès à
d’autres experts du comité national en soins palliatifs, qui ne sont pas francophones, d’où
le petit nombre des experts interviewés (n=3).
Une autre limite à considérer est en lien avec la courte durée des entrevues qui auraient
pu se prolonger pour aller plus en profondeur. Il en est de même pour les documents
recensés; même s’ils se sont avérés utiles, ils étaient somme toute peu nombreux. En outre,
la perspective des patients sur l’objet de la question de recherche n’a pas pu être explorée
en raison de leur état de santé critique. De plus, selon Fortin et Gagnon (2016), l’effet de
réactivité ou l’effet Hawthorne peut constituer un biais, puisqu’il est possible que les
participants ayant conscience qu’ils participent à une étude aient ajusté leurs propos et
leur comportement par une tendance à donner des réponses favorables pouvant avoir des
répercussions sur les résultats. Toutefois, ce risque a été réduit par le fait que les
observations de la pratique des infirmières sur le terrain ont été effectuées avant les
entrevues, pour éviter la possibilité que les participants changent de comportements après
la connaissance des thèmes abordés durant l’entrevue. Il est à noter, également, que grâce
à la triangulation, ces observations ont permis de valider les propos des infirmières
évoqués lors des entrevues.
6.5 Les retombées de l’étude
Comme il a déjà été mentionné, cette thèse est pionnière sur le plan national au Liban,
dans le domaine des soins palliatifs. En effet, aucune étude, à notre connaissance, n’a porté
sur la pratique des soins palliatifs prodigués par des infirmières au sein d’une équipe
interdisciplinaire auprès de patients atteints de cancer. Aucune étude n’a également décrit
la pratique du caring auprès de ce groupe de patients ainsi que les facteurs contraignant et
180
facilitant l’exercice de la pratique infirmière en soins palliatifs. Ainsi, l’envergure des
résultats obtenus par cette recherche qualitative est importante et pourra être prise en
compte pour l’avancement des connaissances dans la pratique infirmière en soins palliatifs
au Liban.
Au niveau de la pratique clinique, bien que les soins palliatifs soient en développement au
Liban et qu’il reste beaucoup de défis à relever, la présente étude pourra tout de même
avoir des retombées positives. Elle a mis en relief effectivement, une pratique infirmière
qui évalue et répond aux besoins des patients et de leur famille, selon une approche
holistique dans une collaboration interdisciplinaire, pour une meilleure qualité de vie.
Dans la mesure où le caring s’inscrit comme une toile de fond pour la pratique en soins
palliatifs, il contribue à soutenir le développement de la dimension relationnelle entre
l’infirmière et la personne soignée en soins palliatifs. Les résultats de l’étude ont mis en
relief que les infirmières en oncologie ont démontré leur enthousiasme et leur implication
dans l’adoption et l’utilisation de l’approche humaniste, auprès de patients en fin de vie et
leurs proches, à plusieurs moments de l’étude. Cette étude a aussi des implications
concrètes, puisqu’il s’agit, à notre connaissance, de la première étude au Liban qui a
permis de cibler des barrières qui pourraient freiner l’exercice de la pratique en soins
palliatifs dans le pays. Appuyés par la littérature, les résultats de cette étude doctorale
fournissent de nombreuses pistes pour améliorer la pratique infirmière en soins palliatifs.
Cette éventuelle amélioration sera envisageable en surmontant les obstacles par des
interventions appropriées et en se basant sur les facteurs facilitants proposés par les
participants. Bien que cette étude ait mis en lumière ces barrières, les propos et les
observations sur le terrain montrent que les infirmières essayaient parfois de les surmonter
pour pratiquer des soins palliatifs appropriés dans la mesure du possible. Bien que la
collaboration de l’équipe interdisciplinaire se montre souvent limitée avec l’équipe
médicale pour l’approche palliative, cette recherche met l’accent sur la collaboration et le
soutien continu de cette équipe avec les infirmières de l’unité d’oncologie.
Quant à la formation, les propos des infirmières ont identifié des difficultés reliées au
manque de formation nécessaire pour soigner une personne en fin de vie. Pour y parvenir,
181
les résultats de cette étude, mettant en lumière ce besoin imminent de formation, serviront
comme assises pour le développement d’un programme de spécialisation postuniversitaire
en soins palliatifs pour les infirmières libanaises. Ce programme de spécialisation, qui sera
élaboré par l’étudiante-chercheuse, permettra de développer les compétences et répondre
aux besoins des infirmières libanaises et de leur pratique professionnelle en soins
palliatifs. Les résultats de l’étude actuelle serviront également, de repère pour la
construction d’une pratique factuelle basée sur des recherches scientifiques.
6.6 Les recommandations
Des recommandations pour la gestion, la pratique, la formation et la recherche, en lien
avec les résultats de cette étude, sont présentées dans cette dernière section.
6.6.1 Pour la gestion
Dans le cadre des actions du Comité National de Soins Palliatifs afin d’instituer les soins
palliatifs à l’échelle nationale, il serait congruent d’effectuer des démarches auprès du
Ministère de la Santé Publique pour promouvoir l’élaboration et l’implication d’une
politique nationale en matière de soins palliatifs dans le système de soins de santé au
Liban. Il reste à souhaiter que l’ensemble des résultats obtenus puisse guider au mieux les
décideurs et les experts. Ceux-ci sont appelés à poursuivre leur investissement pour
développer et optimiser l’avenir prometteur dans ce domaine. Pour ce faire, il sera
indispensable de développer un modèle pour les services de soins palliatifs adapté au
contexte du Liban. De surcroît, des politiques d’information et de sensibilisation du
public, dans l’intérêt de toute la collectivité, sont nécessaires pour le déploiement des soins
palliatifs sur le plan national. A l’instar d’autres pays (Australie, Canada, UK, USA), il
serait important d’élaborer des lignes directrices et des guides de pratique clinique en soins
palliatifs, afin de faciliter la pratique au sein des équipes interdisciplinaires.
En outre, en s’appuyant sur les résultats de cette recherche, particulièrement ceux liés aux
contraintes de temps et à la surcharge de travail, les établissements de santé pourront
mettre en avant des politiques et des procédures appropriées pour y remédier. De même,
ils pourront prendre des décisions stratégiques concernant la dotation en infirmières dans
182
les unités de soins. De plus, les établissements de santé ont tout avantage à mettre en place
des stratégies appropriées afin de valoriser les infirmières, les soutenir et prévenir le
burnout. Il est suggéré également de légitimer le rôle des infirmières au sein de l’équipe
interdisciplinaire.
Il ressort aussi qu’il incombe aux organisations de reconsidérer l’environnement physique
pour assurer le respect de la vie privée des patients et de leur famille en fin de vie, ainsi
qu’une mort en toute dignité. L’instauration d’une unité de soins palliatifs pour les patients
en fin de vie dans les établissements et une prise en charge par une équipe
interdisciplinaire spécialisée permettront de prodiguer des soins palliatifs mieux adaptés,
dans une atmosphère digne et paisible et un accompagnement de fin de vie de haute
qualité. Il devient également crucial de sensibiliser davantage les professionnels de la
santé ainsi que la population libanaise aux bénéfices d’une transition plus précoce des
patients en soins palliatifs.
6.6.2 Pour la pratique
Au niveau de la pratique clinique, l’ensemble des résultats propose des pistes
d’intervention pouvant servir de guide au développement de la pratique infirmière en soins
palliatifs. Pour y parvenir, il serait recommandé que les infirmières adoptent une pratique
factuelle dans l’exercice de leur profession. Pour ce faire, il devient essentiel de
s’approprier les normes actuelles et les guides de pratique clinique en soins palliatifs, pour
prodiguer des soins palliatifs de qualité et répondre aux besoins des patients. De plus,
l’envergure des résultats obtenus en lien avec les obstacles identifiés doit être prise en
compte. En effet, comme les participants à l’étude ont identifié des obstacles limitant la
pratique en soins palliatifs, il devient donc prioritaire de les contrer, par la mise en place
de nouveaux modèles et guides cliniques qui visent l’amélioration et le développement de
soins palliatifs de qualité.
L’intégration d’une philosophie de soins fondée sur les valeurs de caring est fortement
recommandée pour s’engager dans une pratique relationnelle et humaniste, ancrée dans
les soins. Cette approche de caring permettra de guider les interventions de soins et de
183
renforcer la relation transpersonnelle entre l’infirmière, le patient et la famille ; une
relation qui se voit empreinte de congruence, d’écoute, d’empathie et de chaleur humaine
avec les patients en fin de vie. Appliquée par les infirmières, cette philosophie de soins
pourrait favoriser des changements dans la pratique professionnelle en soins palliatifs et
par conséquent, une meilleure qualité de vie des patients.
6.6.3 Pour la formation
Les résultats émergeant de cette étude doctorale fournissent des pistes de réflexion pour
la formation des infirmières dans le domaine des soins palliatifs. À la lumière de la
recension des écrits, une compréhension des notions théoriques sur les soins palliatifs par
une formation adaptée offerte aux professionnels de la santé et par un développement des
compétences des infirmières dans ce domaine et dans le domaine du caring, semblent de
rigueur pour combler les lacunes identifiées. Déjà, le MSSS du Québec (2015) a proposé
dans son Plan directeur que : « les professionnels appelés à intervenir auprès de la
personne et de ses proches doivent posséder des compétences propres au domaine des
soins palliatifs de fin de vie, étant donné la complexité des besoins. En plus d’une
formation initiale […], le développement des compétences par la formation continue en
cours d’emploi est privilégié par des stratégies d’apprentissage interdisciplinaire »
(MSSSQ, 2015, p.31). En plus, il serait opportun d’intégrer dans les cursus universitaires
dès la formation initiale, des cours et des stages spécifiques aux soins palliatifs et
répondant aux besoins globaux des patients en fin de vie. Dans le même ordre d’idées, il
devient fondamental pour les infirmières de déployer des moyens pour maintenir leurs
connaissances à jour, pour prodiguer des soins palliatifs humains et de qualité en fin de
vie. Dans ce sens, il s’avère essentiel de renforcer le développement des activités de
recherche au niveau de la formation en soins palliatifs.
Parallèlement, il semble crucial de promouvoir la formation interdisciplinaire afin
d’assurer aux personnes en fin de vie une qualité de vie holistique et optimale, dans un
contexte de collaboration interprofessionnelle. Des formations devraient aussi être
offertes dans les centres hospitaliers qui pratiquent des soins palliatifs, pour offrir à toutes
les infirmières des possibilités de développement de connaissances et combler les lacunes
184
dans ce domaine, en particulier pour celles qui n’ont pas accès aux formations
académiques.
6.6.4 Pour la recherche
Le développement de la recherche en soins palliatifs constitue une voie essentielle pour
développer des approches novatrices et améliorer la qualité des soins en soins palliatifs.
De ce fait, des pistes de recherche ressortent des résultats de cette étude. Des recherches
futures effectuées dans d’autres contextes paraissent souhaitables. Ce faisant, il pourrait
être pertinent de reproduire cette même recherche dans d’autres sites d’une part, pour
permettre de faire le point sur l’exercice de la pratique des soins palliatifs sur le plan
national, et d’autre part, pour vérifier si les résultats s’avèrent similaires. Par la suite, une
étude de cas multiples permettrait de fournir un portrait plus global des soins palliatifs au
Liban et de comparer la pratique infirmière en intersites. De même, d’éventuelles études
réalisées auprès d’infirmières dans d’autres établissements de santé semblent pertinentes,
en particulier dans les établissements qui n’ont pas d’équipes mobiles de soins palliatifs
qui pourraient les soutenir. Il semble également pertinent de réaliser une recherche auprès
des infirmières qui ont une formation spécialisée en soins palliatifs pour décrire leurs
expériences.
Il serait aussi intéressant de documenter le problème avec d’autres méthodologies, à la
fois qualitatives et quantitatives. Il serait également recommandé éventuellement, de tester
les compétences des infirmières et les effets du programme de formation spécialisée en
soins palliatifs qui serait développé. Enfin, une recherche abordant spécifiquement
l’exploration des besoins du patient en soins palliatifs en fin de vie serait fortement
recommandée.
185
Conclusion
Cette étude doctorale avait pour but de comprendre l’exercice de la pratique infirmière en
soins palliatifs, auprès de patients en fin de vie atteints de cancer, au sein d’une équipe
interdisciplinaire d’une région du Liban. Le devis d’étude de cas simple, à niveaux
d’analyse imbriqués, a permis une compréhension plus approfondie du phénomène à
l’étude dans son contexte. La portée interdisciplinaire de cette thèse représente également
un ajout important. Au niveau de la discipline infirmière, les résultats de cette présente
étude apportent une contribution originale au développement des connaissances en soins
palliatifs, et par conséquent, au savoir infirmier. De surcroît, les résultats de l’étude ont
permis de relier la pratique des infirmières auprès de patients en soins palliatifs à
l’approche humaniste du caring de Watson, ce qui constitue un apport à la discipline
infirmière.
D’ailleurs, l’analyse des données a permis de mettre en lumière une réalité substantielle
et non négligeable de la pratique infirmière en soins palliatifs. Les infirmières
interviewées ainsi que les professionnels de l’équipe interdisciplinaire ont à cœur de
prodiguer des soins palliatifs holistiques en fin de vie, qui préconisent l’amélioration de
la qualité de fin de vie. Les thèmes et les sous-thèmes identifiés font également valoir que
l’adoption d’une approche centrée sur la réponse aux besoins globaux du patient, dans ses
dimensions physiques, psychologiques, sociales et spirituelles, semble être centrale dans
l’exercice de la pratique infirmière en soins palliatifs. Il est évident que la collaboration
interdisciplinaire quotidienne, entre les membres de l’équipe mobile en soins palliatifs et
l’équipe soignante en particulier, occupe une grande place dans la prise en charge des
patients atteints de cancer en fin de vie. De surcroît, les influences religieuses des patients
et de leur famille sont prises en considération lors de la pratique en soins palliatifs, aussi
bien par les infirmières que par un représentant du culte, tout en maintenant le confort, la
dignité humaine et la mort en paix.
En ce qui concerne la relation thérapeutique avec le patient et sa famille, bien que la
théorie du Human Caring de Jean Watson (1979) ne soit pas adoptée dans le milieu de
soins concerné, les infirmières ont démontré une contribution à cette approche en initiant
186
une relation humaine au cœur des soins palliatifs. L’essence de cette contribution s’est
articulée autour de la mise en application d’une prestation de soins palliatifs imprégnée
de présence, d’empathie, de respect, d’écoute active et parfois de présence silencieuse. À
cela s’ajoute la pertinence du recours au Plan directeur du MSSS du Québec (2008) pour
guider l’exercice de la pratique infirmière en soins palliatifs et soutenir la discussion des
résultats. Son originalité vient du fait que le plan directeur accorde une grande importance
à l’approche interdisciplinaire dans la pratique des soins palliatifs.
De plus, des facteurs contraignant ou facilitant la pratique infirmière en soins palliatifs,
appuyés par la littérature, ont aussi été documentés. Même si les infirmières ont pu pallier
à certaines de ces barrières, il reste que ces facteurs contraignants complexifient l’exercice
de la pratique infirmière en soins palliatifs et limitent l’accès aux patients à des soins
palliatifs adéquats. D’où l’importance de favoriser les facteurs facilitants et tenter de
contrôler ou éliminer les barrières qui entravent le développement de la pratique infirmière
en soins palliatifs. De plus, au terme de cette recherche, il s’est avéré que les infirmières
soignantes avaient des préoccupations à l’égard des objectifs de soins curatifs et palliatifs
qui s’opposaient souvent. Cette difficulté à délimiter les frontières entre le curatif et le
palliatif génère chez elles à long terme un risque élevé d’épuisement émotionnel, qui
retentit sur leur vie personnelle. D’où la nécessité d’un développement de stratégies qui
contribuent à la prévention du burnout chez cette population infirmière, afin de favoriser
leur pérennité dans la profession.
En parallèle, les différents participants impliqués ont priorisé le besoin de formation en
soins palliatifs. À la lumière de ces résultats, les décideurs auront tout avantage à
considérer ce besoin dans une perspective de développement de formation adaptée. Pour
ce faire, il est pressant de mettre en action des formations initiales et continues visant à
développer les connaissances des professionnels de la santé dans ce domaine. Ce faisant,
il est recommandé de faire une révision des cursus de formation générale des infirmières
et d’y intégrer des contenus théoriques sur les soins palliatifs.
187
Dans le même ordre d’idées, il s’avère indispensable d’investir dans le développement des
compétences humaines de caring des infirmières. Il semble également impératif de former
des infirmières spécialisées en soins palliatifs. Elles-mêmes pourront être des agentes clés
de la conduite du changement. Quant au domaine de la recherche, un investissement en
soins palliatifs s’avère essentiel pour le développement des connaissances scientifiques,
nécessaires à un meilleur discernement dans ce domaine, et pour favoriser l’application
des résultats probants dans la pratique.
En l’occurrence, bien qu’on constate que des efforts se déploient sur le plan national au
Liban pour l’amélioration et la pratique des soins palliatifs, il reste toutefois un long
chemin et plusieurs étapes à franchir.
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vie et se famille. Traduction de l’édition américaine par Derand, M., Bruxelles ;
De boeck.
202
Annexe 2 – Feuillets d’information et formulaires de consentement
FEUILLET D’INFORMATION ET FORMULAIRE DE CONSENTEMENT
(À l’intention des Infirmières, Entrevues individuelles)
Nous sollicitons votre participation à ce projet de recherche. Cependant, avant d’accepter de signer ce
formulaire d’information et de consentement, veuillez prendre le temps de lire et de comprendre les
renseignements qui suivent. Nous vous invitons à poser toutes les questions que vous jugerez utiles à
l’étudiante-chercheuse et à lui demander de vous expliquer tout renseignement qui n’est pas clair.
Présentation des chercheurs
Cette recherche est réalisée dans le cadre du projet de doctorat en sciences infirmières de Mona Nehmé Ph.D.
(C), dirigé par Jean-François Desbiens, Ph.D. (Directeur) et Johanne Gagnon, Ph.D. (Co-directrice), de la
Faculté des Sciences Infirmières de l’Université Laval au Canada.
Nature et but de l’étude
Les soins palliatifs (SP) sont des soins délivrés par une équipe interdisciplinaire, dans une approche
holistique, afin d'améliorer la qualité de vie des personnes atteintes d'une maladie grave et potentiellement
mortelle. La situation des SP est peu documentée au Liban, notamment en ce qui concerne les infirmières.
La présente étude vise à décrire l’exercice de la pratique infirmière en soins palliatifs, auprès de patients
atteints de cancer en fin de vie, au sein d’une équipe interdisciplinaire, d’une région du Liban.
Déroulement de la participation
Votre participation à cette recherche consiste à prendre part à une entrevue d’une durée d’environ 60 minutes,
dans le milieu de pratique, pendant l’horaire de votre travail et selon votre disponibilité. L’entretien sera
enregistré sur bande numérique et des notes pourront être prises par l’étudiante-chercheuse. Les entrevues
permettront de clarifier des éléments spécifiques, en lien avec les thèmes suivants:
L’exercice de la pratique infirmière en soins palliatifs
Les obstacles et les facteurs facilitant la pratique infirmière en soins palliatifs au sein d’une équipe
interdisciplinaire
Les besoins des patients et de leur famille en fin de vie
La pratique du Caring en soins palliatifs auprès de patients en fin de vie atteints de cancer
Risques, avantages et compensation
Cette étude ne comporte aucun risque. Il ne s’agit pas d’une évaluation de votre travail. Le seul inconvénient
est de prendre le temps nécessaire pour participer à l’entrevue, soit environ 60 minutes. Le fait d’y participer
ne procurera aucun avantage immédiat et individuel. Cependant, elle permettra l’avancement de la recherche
dans le domaine des sciences infirmières et des soins infirmiers palliatifs. Aucune compensation financière
ne sera donnée pour votre participation à l’étude.
Participation volontaire et droit de retrait
Votre participation à cette étude est complètement volontaire. Vous êtes donc libre de refuser d’y participer.
Vous pouvez également vous retirer de ce projet, à n’importe quel moment, sans préjudice et sans devoir
justifier votre décision. Si vous décidez de mettre fin à votre participation, il est important de prévenir
l’étudiante-chercheuse de ce projet de recherche. Ainsi, le matériel et les données que vous avez fournis
seront détruits. De plus, si certaines questions vous mettent mal à l’aise, vous pouvez simplement refuser d’y
répondre sans avoir à vous justifier.
203
Confidentialité
L’étudiante-chercheuse tient à vous assurer de la plus stricte confidentialité qui sera préservée à toutes les
étapes de la recherche de même qu’au moment de la diffusion du rapport de recherche et des publications
émanant de la présente étude. Toutes les informations recueillies seront saisies et conservées de façon non
nominale par l’étudiante-chercheuse. L’identité des participants sera dissimulée et un pseudonyme leur sera
assigné pour l’utilisation des citations à des fins d’analyse. Tout le matériel de la recherche, incluant les
formulaires de consentement signés, les enregistrements ainsi que tous les documents permettant d’identifier
les participants ou l’unité de soins, sera fidèlement conservé sous clé par l’étudiante-chercheuse, durant une
période de cinq ans après le dépôt final de la thèse; échéance après laquelle ils seront détruits, soit en automne
2020.
Remerciements et renseignements supplémentaires
Votre collaboration est très précieuse pour nous permettre de réaliser cette étude, et nous vous en remercions.
Un résumé des résultats de la recherche sera expédié aux participants qui en feront la demande en indiquant
l’adresse où ils aimeraient recevoir le document, juste après l’espace prévu pour leur signature.
Si vous avez besoin d’informations supplémentaires, des questions sur la recherche ou sur les implications
de votre participation, veuillez communiquer avec l’étudiante-chercheuse :
Mona NEHMÉ inf., Ph.D (c)
Courriel : [email protected]
Tél. :(961) 5 924 073 poste 445
Déclaration de consentement du participant
Je soussigné(e) _____________________________consens librement à participer à la recherche intitulée :
« La pratique infirmière en soins palliatifs auprès de patients atteints de cancer au sein d’une équipe
interdisciplinaire : une étude de cas au Liban». J’ai pris connaissance du formulaire et j’ai compris le but, la
nature, les avantages, les risques et les inconvénients du projet de recherche. Je suis satisfait(e) des
explications, précisions et réponses que la chercheuse m’a fournies, le cas échéant, quant à ma participation
à ce projet.
__________________________________________ ________________________
Signature du participant, de la participante Date
Un court résumé des résultats de la recherche sera expédié aux participants qui en feront la demande en
indiquant l’adresse où ils aimeraient recevoir le document. Les résultats ne seront pas disponibles avant
décembre 2016. Si cette adresse changeait d’ici cette date, vous êtes invité(e) à informer la chercheure de la
nouvelle adresse où vous souhaitez recevoir ce document. L’adresse (électronique ou postale) à laquelle je
souhaite recevoir un court résumé des résultats de la recherche est la suivante :
__________________________________________
Déclaration de l’étudiante-chercheuse
Je soussigné(e) _____________________________ certifie que le but, la nature de l'étude, la participation
attendue, les avantages et les inconvénients à participer au projet de recherche ont été expliqués aux
participants. De plus, j'ai avisé le participant qu'il est libre de se retirer de l'étude en tout temps sans que cela
ne lui cause aucun problème. J'ai répondu au meilleur de ma connaissance aux questions posées. Enfin, j'ai
vérifié la compréhension du participant.
_________________________________________ ________________________
Signature de l’étudiante-chercheuse Date
204
Renseignements supplémentaires
Si vous avez besoin d’informations supplémentaires, des questions sur la recherche ou sur les implications
de votre participation, veuillez communiquer avec l’étudiante-chercheuse :
Mona NEHMÉ inf., Ph.D (c)
Courriel : [email protected]
Tél. :(961) 5 924 073 poste 445
Plaintes et critiques
Toute plainte ou critique sur ce projet pourra être adressée, en toute confidentialité à l’adresse suivante :
***
Directrice des soins
***
Beyrouth-Liban
205
FEUILLET D’INFORMATION ET FORMULAIRE DE CONSENTEMENT
(À l’intention de l’infirmière dédiée aux soins palliatifs, observation directe)
Nous sollicitons votre participation à ce projet de recherche. Cependant, avant d’accepter de signer ce
formulaire d’information et de consentement, veuillez prendre le temps de lire et de comprendre les
renseignements qui suivent. Nous vous invitons à poser toutes les questions que vous jugerez utiles à
l’étudiante-chercheuse et à lui demander de vous expliquer tout renseignement qui n’est pas clair.
Présentation des chercheurs
Cette recherche est réalisée dans le cadre du projet de doctorat en sciences infirmières de Mona Nehmé Ph.D.
(C), dirigé par Jean-François Desbiens, Ph.D. (Directeur) et Johanne Gagnon, Ph.D. (Co-directrice), de la
Faculté des Sciences Infirmières de l’Université Laval au Canada.
Nature et but de l’étude
Les soins palliatifs (SP) sont des soins délivrés par une équipe interdisciplinaire, dans une approche
holistique, afin d'améliorer la qualité de vie des personnes atteintes d'une maladie grave et potentiellement
mortelle. La situation des SP est peu documentée au Liban, notamment en ce qui concerne les infirmières.
La présente étude vise à décrire l’exercice de la pratique infirmière en soins palliatifs, auprès de patients
atteints de cancer en fin de vie, au sein d’une équipe interdisciplinaire, d’une région du Liban.
Déroulement de la participation
Votre participation à cette recherche consiste à accepter d’être accompagnée par l’étudiante-chercheuse afin
qu’elle puisse observer votre pratique auprès des patients et de leurs proches. L’étudiante-chercheuse passera
du temps avec vous au moment des soins durant deux à trois quarts de votre travail. Ces observations
pourraient être révélatrices de l’exercice de la pratique infirmière en soins palliatifs. Vous devrez pour ce
faire obtenir la permission verbale du patient et de ses proches, afin que l’étudiante-chercheuse puisse réaliser
les sessions d’observation pendant les soins effectués. De plus, suite à l’observation de la pratique, une
entrevue individuelle semi-dirigée sera effectuée par l’étudiante-chercheuse. Cette entrevue, de 90 minutes,
permettra de valider les éléments des différentes sessions d’observation pendant les soins effectués, et de
clarifier des éléments spécifiques, en lien avec les thèmes suivants:
L’exercice de la pratique infirmière en soins palliatifs
Les obstacles et les facteurs facilitant la pratique infirmière en soins palliatifs au sein d’une équipe
interdisciplinaire
Les besoins des patients et de leur famille en fin de vie
La collaboration interdisciplinaire avec l’équipe mobile de soins palliatifs
La pratique du Caring en soins palliatifs auprès de patients en fin de vie atteints de cancer
Risques, avantages et compensation
Cette étude ne comporte aucun risque. Il ne s’agit pas d’une évaluation de votre travail. Le fait d’y participer
ne procurera aucun avantage immédiat et individuel. Cependant, elle permettra l’avancement de la recherche
dans le domaine des sciences infirmières et des soins infirmiers palliatifs. Aucune compensation financière
ne sera donnée pour votre participation à l’étude.
Participation volontaire
Votre participation à cette étude est complètement volontaire. Vous êtes donc libre de refuser d’y participer.
Vous pouvez également vous retirer de ce projet, à n’importe quel moment, sans préjudice et sans devoir
justifier votre décision. Si vous décidez de mettre fin à votre participation, il est important de prévenir
l’étudiante-chercheuse de ce projet de recherche. Ainsi, le matériel et les données que vous avez fournis
seront détruits. De plus, si certaines questions vous mettent mal à l’aise, vous pouvez simplement refuser d’y
répondre sans avoir à vous justifier.
Confidentialité L’étudiante-chercheuse tient à vous assurer de la plus stricte confidentialité qui sera préservée à toutes les
étapes de la recherche de même qu’au moment de la diffusion du rapport de recherche et des publications
émanant de la présente étude. Toutes les informations recueillies seront saisies et conservées de façon non
nominale par l’étudiante-chercheuse. L’identité des participants sera dissimulée et un pseudonyme leur sera
206
assigné pour la transcription des notes d’observation et pour l’utilisation des citations à des fins d’analyse.
Tout le matériel de la recherche, incluant les formulaires de consentement signés, les notes d’observation, les
enregistrements ainsi que tous les documents permettant d’identifier les participants ou l’unité de soins, sera
fidèlement conservé sous clé par l’étudiante-chercheuse, durant une période de cinq ans après le dépôt final
de la thèse; échéance après laquelle ils seront détruits, soit en automne 2020.
Remerciements et renseignements supplémentaires
Votre collaboration est très précieuse pour nous permettre de réaliser cette étude, et nous vous en remercions.
Un résumé des résultats de la recherche sera expédié aux participants qui en feront la demande en indiquant
l’adresse où ils aimeraient recevoir le document, juste après l’espace prévu pour leur signature.
Si vous avez besoin d’informations supplémentaires, des questions sur la recherche ou sur les implications
de votre participation, veuillez communiquer avec l’étudiante-chercheuse :
Mona NEHMÉ inf., Ph.D (c)
Courriel : [email protected]
Tél. :(961) 5 924 073 poste 445
Déclaration de consentement du participant
Je soussigné(e) _____________________________consens librement à participer à la recherche intitulée :
« La pratique infirmière en soins palliatifs auprès de patients atteints de cancer au sein d’une équipe
interdisciplinaire : une étude de cas au Liban». J’ai pris connaissance du formulaire et j’ai compris le but, la
nature, les avantages, les risques et les inconvénients du projet de recherche. Je suis satisfait(e) des
explications, précisions et réponses que la chercheuse m’a fournies, le cas échéant, quant à ma participation
à ce projet.
__________________________________________ ________________________
Signature du participant, de la participante Date
À moins d’avis contraire ou d’empêchement, il a été convenu avec l’étudiante-chercheure que celle-ci
m’accompagnera à titre d’observatrice dans l’ensemble de mes activités professionnelles durant les quarts de
travail suivants :
__________________________________________
Un court résumé des résultats de la recherche sera expédié aux participants qui en feront la demande en
indiquant l’adresse où ils aimeraient recevoir le document. Les résultats ne seront pas disponibles avant
décembre 2016. Si cette adresse changeait d’ici cette date, vous êtes invité(e) à informer la chercheure de la
nouvelle adresse où vous souhaitez recevoir ce document. L’adresse (électronique ou postale) à laquelle je
souhaite recevoir un court résumé des résultats de la recherche est la suivante :
__________________________________________
Déclaration de l’étudiante-chercheuse
Je soussigné(e) _____________________________ certifie que le but, la nature de l'étude, la participation
attendue, les avantages et les inconvénients à participer au projet de recherche ont été expliqués aux
participants. De plus, j'ai avisé le participant qu'il est libre de se retirer de l'étude en tout temps sans que cela
ne lui cause aucun problème. J'ai répondu au meilleur de ma connaissance aux questions posées. Enfin, j'ai
vérifié la compréhension du participant.
__________________________________________ ________________________
Signature de l’étudiante-chercheuse Date
207
Renseignements supplémentaires
Si vous avez besoin d’informations supplémentaires, des questions sur la recherche ou sur les implications
de votre participation, veuillez communiquer avec l’étudiante-chercheuse :
Mona NEHMÉ inf., Ph.D (c)
Courriel : [email protected]
Tél. :(961) 5 924 073 poste 445
Plaintes et critiques
Toute plainte ou critique sur ce projet pourra être adressée, en toute confidentialité à l’adresse suivante :
***
Directrice des soins
208
FEUILLET D’INFORMATION ET FORMULAIRE DE CONSENTEMENT
(À l’intention des professionnels de la santé de l’équipe de soutien mobile, entrevue de groupe)
Nous sollicitons votre participation à ce projet de recherche. Cependant, avant d’accepter de signer ce
formulaire d’information et de consentement, veuillez prendre le temps de lire et de comprendre les
renseignements qui suivent. Nous vous invitons à poser toutes les questions que vous jugerez utiles à
l’étudiante-chercheuse et à lui demander de vous expliquer tout renseignement qui n’est pas clair.
Présentation des chercheurs
Cette recherche est réalisée dans le cadre du projet de doctorat en sciences infirmières de Mona Nehmé Ph.D.
(C), dirigée par Jean-François Desbiens, Ph.D. (Directeur) et Johanne Gagnon, Ph.D. (Co-directrice), de la
Faculté des Sciences Infirmières de l’Université Laval au Canada.
Nature et but de l’étude
Les soins palliatifs (SP) sont des soins délivrés par une équipe interdisciplinaire, dans une approche
holistique, afin d'améliorer la qualité de vie des personnes atteintes d'une maladie grave et potentiellement
mortelle. La situation des SP est peu documentée au Liban, notamment en ce qui concerne les infirmières.
La présente étude vise à décrire l’exercice de la pratique infirmière en soins palliatifs, auprès de patients
atteints de cancer en fin de vie, au sein d’une équipe interdisciplinaire, d’une région du Liban.
Déroulement de la participation
Votre participation à cette recherche consiste à prendre part à une entrevue de groupe d’une durée d’environ
60 minutes. La date et le lieu de l’entrevue seront fixés à votre convenance. Cette entrevue a pour but de
susciter la réflexion et la discussion ouverte ainsi que l’échange des idées sur la pratique infirmière en soins
palliatifs dans le contexte libanais. Ces entrevues de groupe permettent d’assurer un maximum de diversité
interdisciplinaire ainsi qu’une compréhension élargie de la pratique infirmière en soins palliatifs. L’entretien
sera enregistré sur bande numérique et des notes pourront être prises par l’étudiante-chercheuse.
Risques, avantages et compensation
Cette étude ne comporte aucun risque. Il ne s’agit pas d’une évaluation de votre travail. Le seul inconvénient
est de prendre le temps nécessaire pour participer à l’entrevue, soit environ 60 minutes. Le fait d’y participer
ne procurera aucun avantage immédiat et individuel. Cependant, elle permettra l’avancement de la recherche
dans le domaine des sciences infirmières et des soins infirmiers palliatifs. Aucune compensation financière
ne sera donnée pour votre participation à l’étude.
Participation volontaire et droit de retrait
Votre participation à cette étude est complètement volontaire. Vous êtes donc libre de refuser d’y participer.
Vous pouvez également vous retirer de ce projet, à n’importe quel moment, sans préjudice et sans devoir
justifier votre décision. Si vous décidez de mettre fin à votre participation, il est important de prévenir
l’étudiante-chercheuse de ce projet de recherche. Ainsi, le matériel et les données que vous avez fournis
seront détruits. De plus, si certaines questions vous mettent mal à l’aise, vous pouvez simplement refuser d’y
répondre sans avoir à vous justifier.
Confidentialité L’étudiante-chercheuse tient à vous assurer de la plus stricte confidentialité qui sera préservée à toutes les
étapes de la recherche de même qu’au moment de la diffusion du rapport de recherche et des publications
émanant de la présente étude. Toutes les informations recueillies seront saisies et conservées de façon non
nominale par l’étudiante-chercheuse. L’identité des participants sera dissimulée et un pseudonyme leur sera
assigné pour la transcription des notes d’observation et pour l’utilisation des citations à des fins d’analyse.
Tout le matériel de la recherche, incluant les formulaires de consentement signés, les notes d’observations,
les enregistrements ainsi que tous les documents permettant d’identifier les participants ou l’unité de soins,
sera fidèlement conservé sous clé par l’étudiante-chercheuse, durant une période de cinq ans après le dépôt
final de la thèse; échéance après laquelle ils seront détruits, soit en automne 2020.
209
Remerciements et renseignements supplémentaires
Votre collaboration est très précieuse pour nous permettre de réaliser cette étude, et nous vous en remercions.
Un résumé des résultats de la recherche sera expédié aux participants qui en feront la demande en indiquant
l’adresse où ils aimeraient recevoir le document, juste après l’espace prévu pour leur signature.
Renseignements supplémentaires
Si vous avez besoin d’informations supplémentaires, des questions sur la recherche ou sur les implications
de votre participation, veuillez communiquer avec l’étudiante-chercheuse :
Mona NEHMÉ inf., Ph.D (c)
Courriel : [email protected]
Tél. :(961) 5 924 073 poste 445
Déclaration de consentement du participant
Je soussigné(e) _____________________________consens librement à participer à la recherche intitulée :
« La pratique infirmière en soins palliatifs auprès de patients atteints de cancer au sein d’une équipe
interdisciplinaire : une étude de cas au Liban». J’ai pris connaissance du formulaire et j’ai compris le but, la
nature, les avantages, les risques et les inconvénients du projet de recherche. Je suis satisfait(e) des
explications, précisions et réponses que la chercheuse m’a fournies, le cas échéant, quant à ma participation
à ce projet.
__________________________________________ ________________________
Signature du participant, de la participante Date
Un court résumé des résultats de la recherche sera expédié aux participants qui en feront la demande en
indiquant l’adresse où ils aimeraient recevoir le document. Les résultats ne seront pas disponibles avant
décembre 2016. Si cette adresse changeait d’ici cette date, vous êtes invité(e) à informer la chercheure de la
nouvelle adresse où vous souhaitez recevoir ce document. L’adresse (électronique ou postale) à laquelle je
souhaite recevoir un court résumé des résultats de la recherche est la suivante :
__________________________________________
Déclaration de l’étudiante-chercheuse
Je soussigné(e) _____________________________ certifie que le but, la nature de l'étude, la participation
attendue, les avantages et les inconvénients à participer au projet de recherche ont été expliqués aux
participants. De plus, j'ai avisé le participant qu'il est libre de se retirer de l'étude en tout temps sans que cela
ne lui cause aucun problème. J'ai répondu au meilleur de ma connaissance aux questions posées. Enfin, j'ai
vérifié la compréhension du participant.
__________________________________________ ________________________
Signature de l’étudiante-chercheuse Date
Renseignements supplémentaires
Si vous avez besoin d’informations supplémentaires, des questions sur la recherche ou sur les implications
de votre participation, veuillez communiquer avec l’étudiante-chercheuse :
Mona NEHMÉ inf., Ph.D (c)
Courriel : [email protected]
Tél. :(961) 5 924 073 poste 445
Plaintes et critiques
Toute plainte ou critique sur ce projet pourra être adressée, en toute confidentialité à l’adresse suivante :
***
Directrice des soins
***
Beyrouth-Liban
210
FEUILLET D’INFORMATION ET FORMULAIRE DE CONSENTEMENT
À l’intention des experts nationaux (Entrevues de groupe)
Nous sollicitons votre participation à ce projet de recherche. Cependant, avant d’accepter de signer ce
formulaire d’information et de consentement, veuillez prendre le temps de lire et de comprendre les
renseignements qui suivent. Nous vous invitons à poser toutes les questions que vous jugerez utiles à
l’étudiante-chercheuse et à lui demander de vous expliquer tout renseignement qui n’est pas clair.
Présentation des chercheurs
Cette recherche est réalisée dans le cadre du projet de doctorat en sciences infirmières de Mona Nehmé Ph.D.
(C), dirigée par Jean-François Desbiens, Ph.D. (Directeur) et Johanne Gagnon, Ph.D. (Co-directrice), de la
Faculté des Sciences Infirmières de l’Université Laval.
Nature et but de l’étude
Les soins palliatifs (SP) sont des soins délivrés par une équipe interdisciplinaire, dans une approche
holistique, afin d'améliorer la qualité de vie des personnes atteintes d'une maladie grave et potentiellement
mortelle. La situation des SP est peu documentée au Liban, notamment en ce qui concerne les infirmières.
La présente étude vise à décrire l’exercice de la pratique infirmière en soins palliatifs, auprès de patients
atteints de cancer en fin de vie, au sein d’une équipe interdisciplinaire, d’une région du Liban.
Déroulement de la participation
Votre participation à cette recherche consiste à prendre part à une entrevue de groupe d’une durée d’environ
60 minutes. La date et le lieu de l’entrevue seront fixés à votre convenance. Cette entrevue a pour but de
susciter la réflexion et la discussion ouverte ainsi que l’échange des idées sur la pratique infirmière en soins
palliatifs dans le contexte libanais. Ces entrevues de groupe permettent d’assurer un maximum de diversité
interdisciplinaire ainsi qu’une compréhension élargie de la pratique infirmière en soins palliatifs. L’entretien
sera enregistré sur bande numérique et des notes pourront être prises par l’étudiante-chercheuse.
Risques, avantages et compensation
Cette étude ne comporte aucun risque. Il ne s’agit pas d’une évaluation de votre travail. Le seul inconvénient
est de prendre le temps nécessaire pour participer à l’entrevue, soit environ 60 minutes. Le fait d’y participer
ne procurera aucun avantage immédiat et individuel. Cependant, elle permettra l’avancement de la recherche
dans le domaine des sciences infirmières et des soins infirmiers palliatifs. Aucune compensation financière
ne sera donnée pour votre participation à l’étude.
Participation volontaire et droit de retrait
Votre participation à cette étude est complètement volontaire. Vous êtes donc libre de refuser d’y participer.
Vous pouvez également vous retirer de ce projet, à n’importe quel moment, sans préjudice et sans devoir
justifier votre décision. Si vous décidez de mettre fin à votre participation, il est important de prévenir
l’étudiante-chercheuse de ce projet de recherche. Ainsi, le matériel et les données que vous avez fournis
seront détruits. De plus, si certaines questions vous mettent mal à l’aise, vous pouvez simplement refuser d’y
répondre sans avoir à vous justifier.
Confidentialité L’étudiante-chercheuse tient à vous assurer de la plus stricte confidentialité qui sera préservée à toutes les
étapes de la recherche de même qu’au moment de la diffusion du rapport de recherche et des publications
émanant de la présente étude. Toutes les informations recueillies seront saisies et conservées de façon non
nominale par l’étudiante-chercheuse. L’identité des participants sera dissimulée et un pseudonyme leur sera
assigné pour la transcription des notes d’observation et pour l’utilisation des citations à des fins d’analyse.
Tout le matériel de la recherche, incluant les formulaires de consentement signés, les notes d’observations,
les enregistrements ainsi que tous les documents permettant d’identifier les participants ou l’unité de soins,
sera fidèlement conservé sous clé par l’étudiante-chercheuse, durant une période de cinq ans après le dépôt
final de la thèse; échéance après laquelle ils seront détruits, soit en automne 2020.
211
Remerciements et renseignements supplémentaires
Votre collaboration est très précieuse pour nous permettre de réaliser cette étude, et nous vous en remercions.
Un résumé des résultats de la recherche sera expédié aux participants qui en feront la demande en indiquant
l’adresse où ils aimeraient recevoir le document, juste après l’espace prévu pour leur signature.
Si vous avez besoin d’informations supplémentaires, des questions sur la recherche ou sur les implications
de votre participation, veuillez communiquer avec l’étudiante-chercheuse:
Mona NEHMÉ inf., Ph.D (c)
Courriel : [email protected]
Tél. :(961) 5 924 073 poste 445
Déclaration de consentement du participant
Je soussigné(e) _____________________________consens librement à participer à la recherche intitulée :
« La pratique infirmière en soins palliatifs auprès de patients atteints de cancer au sein d’une équipe
interdisciplinaire : une étude de cas au Liban». J’ai pris connaissance du formulaire et j’ai compris le but, la
nature, les avantages, les risques et les inconvénients du projet de recherche. Je suis satisfait(e) des
explications, précisions et réponses que la chercheuse m’a fournies, le cas échéant, quant à ma participation
à ce projet.
__________________________________________ ________________________
Signature du participant, de la participante Date
Un court résumé des résultats de la recherche sera expédié aux participants qui en feront la demande en
indiquant l’adresse où ils aimeraient recevoir le document. Les résultats ne seront pas disponibles avant
décembre 2016. Si cette adresse changeait d’ici cette date, vous êtes invité(e) à informer la chercheure de la
nouvelle adresse où vous souhaitez recevoir ce document. L’adresse (électronique ou postale) à laquelle je
souhaite recevoir un court résumé des résultats de la recherche est la suivante :
__________________________________________
Déclaration de l’étudiante-chercheuse
Je soussigné(e) _____________________________ certifie que le but, la nature de l'étude, la participation
attendue, les avantages et les inconvénients à participer au projet de recherche ont été expliqués aux
participants. De plus, j'ai avisé le participant qu'il est libre de se retirer de l'étude en tout temps sans que cela
ne lui cause aucun problème. J'ai répondu au meilleur de ma connaissance aux questions posées. Enfin, j'ai
vérifié la compréhension du participant.
__________________________________________ ________________________
Signature de l’étudiante-chercheuse Date
Renseignements supplémentaires
Si vous avez besoin d’informations supplémentaires, des questions sur la recherche ou sur les implications
de votre participation, veuillez communiquer avec l’étudiante-chercheuse
Mona NEHMÉ inf., Ph.D (c) :
Courriel : [email protected]
Tél. :(961) 5 924 073 poste 445
Plaintes et critiques
Toute plainte ou critique sur ce projet pourra être adressée, en toute confidentialité à l’adresse suivante :
***
Directrice des soins
***
Beyrouth-Liban
212
FEUILLET D’INFORMATION ET FORMULAIRE DE CONSENTEMENT
(À l’intention des membres de familles de personnes soignées, entrevues individuelles)
Nous sollicitons votre participation à ce projet de recherche. Cependant, avant d’accepter de signer ce
formulaire d’information et de consentement, veuillez prendre le temps de lire et de comprendre les
renseignements qui suivent. Nous vous invitons à poser toutes les questions que vous jugerez utiles à
l’étudiante-chercheuse et à lui demander de vous expliquer tout renseignement qui n’est pas clair.
Présentation des chercheurs
Cette recherche est réalisée dans le cadre du projet de doctorat en sciences infirmières de Mona Nehmé Ph.D.
(C), dirigé par Jean-François Desbiens, Ph.D. (Directeur) et Johanne Gagnon, Ph.D. (Co-directrice), de la
Faculté des Sciences Infirmières de l’Université Laval.
Nature et but de l’étude
Les soins palliatifs (SP) sont des soins délivrés par une équipe interdisciplinaire, dans une approche
holistique, afin d'améliorer la qualité de vie des personnes atteintes d'une maladie grave et potentiellement
mortelle. La présente étude vise à décrire l’exercice de la pratique infirmière en soins palliatifs, auprès de
patients atteints de cancer en fin de vie, au sein d’une équipe interdisciplinaire, d’une région du Liban.
Déroulement de la participation
Votre participation à cette recherche consiste à prendre part à une entrevue d’une durée d’environ 60 minutes.
Cette entrevue se déroulera à votre domicile ou à un autre lieu qui vous conviendra, à une date planifiée à
l’avance avec l’étudiante-chercheuse. Les entrevues permettront de clarifier des éléments spécifiques, en lien
avec les thèmes suivants:
L’exercice de la pratique infirmière en soins palliatifs
Les besoins des patients et de leur famille en fin de vie
Les obstacles et les facteurs facilitant la pratique infirmière en soins palliatifs au sein d’une équipe
interdisciplinaire
L’entretien sera enregistré sur bande numérique et des notes pourront être prises par l’étudiante-chercheuse.
Risques, avantages et compensation
Cette étude ne comporte aucun risque. Le seul inconvénient est de prendre le temps nécessaire pour participer
à l’entrevue, soit environ 60 minutes. Le fait d’y participer ne procurera aucun avantage immédiat et
individuel. Cependant, elle permettra l’avancement de la recherche dans le domaine des sciences infirmières
et des soins infirmiers palliatifs. Aucune compensation financière ne sera donnée pour votre participation à
l’étude.
Participation volontaire et droit de retrait
Votre participation à cette étude est complètement volontaire. Vous êtes donc libre de refuser d’y participer.
Vous pouvez également vous retirer de ce projet, à n’importe quel moment, sans préjudice et sans devoir
justifier votre décision. Si vous décidez de mettre fin à votre participation, il est important de prévenir
l’étudiante-chercheuse de ce projet de recherche. Ainsi, le matériel et les données que vous avez fournis
seront détruits. De plus, si certaines questions vous mettent mal à l’aise, vous pouvez simplement refuser d’y
répondre sans avoir à vous justifier.
Confidentialité L’étudiante-chercheuse tient à vous assurer de la plus stricte confidentialité qui sera préservée à toutes les
étapes de la recherche de même qu’au moment de la diffusion du rapport de recherche et des publications
émanant de la présente étude. Toutes les informations recueillies seront saisies et conservées de façon non
nominale par l’étudiante-chercheuse. L’identité des participants sera dissimulée et un pseudonyme leur sera
assigné pour la transcription des notes d’observation et pour l’utilisation des citations à des fins d’analyse.
Tout le matériel de la recherche, incluant les formulaires de consentement signés, les notes d’observation, les
enregistrements ainsi que tous les documents permettant d’identifier les participants ou l’unité de soins, sera
213
fidèlement conservé sous clé par l’étudiante-chercheuse, durant une période de cinq ans après le dépôt final
de la thèse; échéance après laquelle ils seront détruits, soit en automne 2020.
Remerciements et renseignements supplémentaires
Votre collaboration est très précieuse pour nous permettre de réaliser cette étude, et nous vous en remercions.
Un résumé des résultats de la recherche sera expédié aux participants qui en feront la demande en indiquant
l’adresse où ils aimeraient recevoir le document, juste après l’espace prévu pour leur signature.
Si vous avez besoin d’informations supplémentaires, des questions sur la recherche ou sur les implications
de votre participation, veuillez communiquer avec l’étudiante-chercheuse :
Mona NEHMÉ inf., Ph.D (c)
Courriel : [email protected]
Tél. :(961) 5 924 073 poste 445
Déclaration de consentement du participant
Je soussigné(e) _____________________________consens librement à participer à la recherche intitulée :
« La pratique infirmière en soins palliatifs auprès de patients atteints de cancer au sein d’une équipe
interdisciplinaire : une étude de cas au Liban». J’ai pris connaissance du formulaire et j’ai compris le but, la
nature, les avantages, les risques et les inconvénients du projet de recherche. Je suis satisfait(e) des
explications, précisions et réponses que la chercheuse m’a fournies, le cas échéant, quant à ma participation
à ce projet.
__________________________________________ ________________________
Signature du participant, de la participante Date
Déclaration de l’étudiante-chercheuse
Je soussigné(e) _____________________________ certifie que le but, la nature de l'étude, la participation
attendue, les avantages et les inconvénients à participer au projet de recherche ont été expliqués aux
participants. De plus, j'ai avisé le participant qu'il est libre de se retirer de l'étude en tout temps sans que cela
ne lui cause aucun problème. J'ai répondu au meilleur de ma connaissance aux questions posées. Enfin, j'ai
vérifié la compréhension du participant.
__________________________________________ ________________________
Signature de l’étudiante-chercheuse Date
Renseignements supplémentaires
Si vous avez besoin d’informations supplémentaires, des questions sur la recherche ou sur les implications
de votre participation, veuillez communiquer avec l’étudiante-chercheuse : Mona NEHMÉ inf., Ph.D (c)
Courriel : [email protected]
Tél. :(961) 5 924 073 poste 445
Plaintes et critiques
Toute plainte ou critique sur ce projet pourra être adressée, en toute confidentialité à l’adresse suivante :
***
Directrice des soins
***
Beyrouth-Liban
214
FEUILLET D’INFORMATION ET FORMULAIRE DE CONSENTEMENT
(À l’intention des infirmières en oncologie, observation directe)
Nous sollicitons votre participation à ce projet de recherche. Cependant, avant d’accepter de signer ce
formulaire d’information et de consentement, veuillez prendre le temps de lire et de comprendre les
renseignements qui suivent. Nous vous invitons à poser toutes les questions que vous jugerez utiles à
l’étudiante-chercheuse et à lui demander de vous expliquer tout renseignement qui n’est pas clair.
Présentation des chercheurs
Cette recherche est réalisée dans le cadre du projet de doctorat en sciences infirmières de Mona Nehmé Ph.D.
(C), dirigé par Jean-François Desbiens, Ph.D. (Directeur) et Johanne Gagnon, Ph.D. (Co-directrice), de la
Faculté des Sciences Infirmières de l’Université Laval au Canada.
Nature et but de l’étude
Les soins palliatifs (SP) sont des soins délivrés par une équipe interdisciplinaire, dans une approche
holistique, afin d'améliorer la qualité de vie des personnes atteintes d'une maladie grave et potentiellement
mortelle. La situation des SP est peu documentée au Liban, notamment en ce qui concerne les infirmières.
La présente étude vise à décrire l’exercice de la pratique infirmière en soins palliatifs, auprès de patients
atteints de cancer en fin de vie, au sein d’une équipe interdisciplinaire, d’une région du Liban.
Déroulement de la participation
Votre participation à cette recherche consiste à accepter d’être accompagnée par l’étudiante-chercheuse afin
qu’elle puisse observer votre pratique auprès des patients et de leurs proches. L’étudiante-chercheuse passera
du temps avec vous au moment des soins durant deux à trois quarts de votre travail. Ces observations
pourraient être révélatrices de l’exercice de la pratique infirmière en soins palliatifs. Vous devrez pour ce
faire obtenir la permission verbale du patient et de ses proches, afin que l’étudiante-chercheuse puisse réaliser
les sessions d’observation pendant les soins effectués. De plus, suite à l’observation de la pratique, une
entrevue individuelle semi-dirigée sera effectuée par l’étudiante-chercheuse pendant l’horaire de votre travail
et selon votre disponibilité
Cette entrevue, de 90 minutes, permettra de valider les éléments des différentes sessions d’observation
pendant les soins effectués, et de clarifier des éléments spécifiques, en lien avec les thèmes suivants:
L’exercice de la pratique infirmière en soins palliatifs
Les obstacles et les facteurs facilitant la pratique infirmière en soins palliatifs au sein d’une équipe
interdisciplinaire
Les besoins des patients et de leur famille en fin de vie
La collaboration interdisciplinaire avec l’équipe mobile de soins palliatifs
La pratique du Caring en soins palliatifs auprès de patients en fin de vie atteints de cancer
Risques, avantages et compensation
Cette étude ne comporte aucun risque. Il ne s’agit pas d’une évaluation de votre travail. Le fait d’y participer
ne procurera aucun avantage immédiat et individuel. Cependant, elle permettra l’avancement de la recherche
dans le domaine des sciences infirmières et des soins infirmiers palliatifs. Aucune compensation financière
ne sera donnée pour votre participation à l’étude.
Participation volontaire
Votre participation à cette étude est complètement volontaire. Vous êtes donc libre de refuser d’y participer.
Vous pouvez également vous retirer de ce projet, à n’importe quel moment, sans préjudice et sans devoir
justifier votre décision. Si vous décidez de mettre fin à votre participation, il est important de prévenir
l’étudiante-chercheuse de ce projet de recherche. Ainsi, le matériel et les données que vous avez fournis
seront détruits. De plus, si certaines questions vous mettent mal à l’aise, vous pouvez simplement refuser d’y
répondre sans avoir à vous justifier.
Confidentialité L’étudiante-chercheuse tient à vous assurer de la plus stricte confidentialité qui sera préservée à toutes les
étapes de la recherche de même qu’au moment de la diffusion du rapport de recherche et des publications
émanant de la présente étude. Toutes les informations recueillies seront saisies et conservées de façon non
nominale par l’étudiante-chercheuse. L’identité des participants sera dissimulée et un pseudonyme leur sera
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assigné pour la transcription des notes d’observation et pour l’utilisation des citations à des fins d’analyse.
Tout le matériel de la recherche, incluant les formulaires de consentement signés, les notes d’observation, les
enregistrements ainsi que tous les documents permettant d’identifier les participants ou l’unité de soins, sera
fidèlement conservé sous clé par l’étudiante-chercheuse, durant une période de cinq ans après le dépôt final
de la thèse; échéance après laquelle ils seront détruits, soit en automne 2020.
Remerciements et renseignements supplémentaires
Votre collaboration est très précieuse pour nous permettre de réaliser cette étude, et nous vous en remercions.
Un résumé des résultats de la recherche sera expédié aux participants qui en feront la demande en indiquant
l’adresse où ils aimeraient recevoir le document, juste après l’espace prévu pour leur signature. Si vous avez
besoin d’informations supplémentaires, des questions sur la recherche ou sur les implications de votre
participation, veuillez communiquer avec l’étudiante-chercheuse :
Mona NEHMÉ inf., Ph.D (c)
Courriel : [email protected]
Tél. :(961) 5 924 073 poste 445
Déclaration de consentement du participant
Je soussigné(e) _____________________________consens librement à participer à la recherche intitulée :
« La pratique infirmière en soins palliatifs auprès de patients atteints de cancer au sein d’une équipe
interdisciplinaire : une étude de cas au Liban». J’ai pris connaissance du formulaire et j’ai compris le but, la
nature, les avantages, les risques et les inconvénients du projet de recherche. Je suis satisfait(e) des
explications, précisions et réponses que la chercheuse m’a fournies, le cas échéant, quant à ma participation
à ce projet.
__________________________________________ ________________________
Signature du participant, de la participante Date
À moins d’avis contraire ou d’empêchement, il a été convenu avec l’étudiante-chercheure que celle-ci
m’accompagnera à titre d’observatrice dans l’ensemble de mes activités professionnelles durant les quarts de
travail suivants :
__________________________________________
Un court résumé des résultats de la recherche sera expédié aux participants qui en feront la demande en
indiquant l’adresse où ils aimeraient recevoir le document. Les résultats ne seront pas disponibles avant
décembre 2016. Si cette adresse changeait d’ici cette date, vous êtes invité(e) à informer la chercheure de la
nouvelle adresse où vous souhaitez recevoir ce document. L’adresse (électronique ou postale) à laquelle je
souhaite recevoir un court résumé des résultats de la recherche est la suivante :
__________________________________________
Déclaration de l’étudiante-chercheuse
Je soussigné(e) _____________________________ certifie que le but, la nature de l'étude, la participation
attendue, les avantages et les inconvénients à participer au projet de recherche ont été expliqués aux
participants. De plus, j'ai avisé le participant qu'il est libre de se retirer de l'étude en tout temps sans que cela
ne lui cause aucun problème. J'ai répondu au meilleur de ma connaissance aux questions posées. Enfin, j'ai
vérifié la compréhension du participant.
__________________________________________ ________________________
Signature de l’étudiante-chercheuse Date
216
Renseignements supplémentaires
Si vous avez besoin d’informations supplémentaires, des questions sur la recherche ou sur les implications de
votre participation, veuillez communiquer avec l’étudiante-chercheuse :Mona NEHMÉ inf., Ph.D (c)
Courriel : [email protected], Tél. :(961) 5 924 073 poste 445
Plaintes et critiques
Toute plainte ou critique sur ce projet pourra être adressée, en toute confidentialité à l’adresse suivante :
***
Directrice des soins
217
FEUILLET D’INFORMATION ET FORMULAIRE DE CONSENTEMENT
(À l’intention des patients ou leurs proches pour observation)
Nous sollicitons votre participation à ce projet de recherche. Cependant, avant d’accepter de signer ce
formulaire d’information et de consentement, veuillez prendre le temps de lire et de comprendre les
renseignements qui suivent.
Présentation des chercheurs
Cette recherche est réalisée dans le cadre du projet de doctorat en sciences infirmières de Mona Nehmé Ph.D.
(C), dirigé par Jean-François Desbiens, Ph.D. (Directeur) et Johanne Gagnon, Ph.D. (Co-directrice), de la
Faculté des Sciences Infirmières de l’Université Laval.
Nature et but de l’étude
Les soins palliatifs (SP) sont des soins délivrés par une équipe interdisciplinaire, dans une approche holistique,
afin d'améliorer la qualité de vie des personnes atteintes d'une maladie grave et potentiellement mortelle. La
présente étude vise à décrire l’exercice de la pratique infirmière en soins palliatifs, auprès de patients atteints
de cancer en fin de vie, au sein d’une équipe interdisciplinaire, d’une région du Liban.
Déroulement de la participation
Votre consentement éclairé est requis afin que l’étudiante-chercheuse puisse observer la pratique infirmière en
soins palliatifs.
Risques, avantages et compensation
Cette étude ne comporte aucun risque. Le fait d’y participer ne procurera aucun avantage immédiat et individuel.
Cependant, elle permettra l’avancement de la recherche dans le domaine des soins infirmiers palliatifs.
Participation volontaire et droit de retrait
Votre participation à cette étude est complètement volontaire. Vous êtes donc libre de refuser d’y participer.
Vous pouvez également vous retirer de ce projet, à n’importe quel moment, sans préjudice et sans devoir
justifier votre décision
Confidentialité L’étudiante-chercheuse tient à vous assurer de la plus stricte confidentialité qui sera préservée à toutes les étapes
de la recherche de même qu’au moment de la diffusion du rapport de recherche et des publications émanant de
la présente étude. Toutes les informations recueillies seront saisies et conservées de façon non nominale par
l’étudiante-chercheuse. L’identité des participants sera dissimulée et un pseudonyme leur sera assigné pour la
transcription des notes d’observation et pour l’utilisation des citations à des fins d’analyse. Tout le matériel de
la recherche, incluant les formulaires de consentement signés, les notes d’observation, les enregistrements ainsi
que tous les documents permettant d’identifier les participants ou l’unité de soins, sera fidèlement conservé
sous clé par l’étudiante-chercheuse, durant une période de cinq ans après le dépôt final de la thèse; échéance
après laquelle ils seront détruits, soit en automne 2020.
Remerciements et renseignements supplémentaires
Votre collaboration est très précieuse pour nous permettre de réaliser cette étude, et nous vous en remercions.
Si vous avez besoin d’informations supplémentaires, des questions sur la recherche ou sur les implications de
votre participation, veuillez communiquer avec l’étudiante-chercheuse :
Mona NEHMÉ inf., Ph.D (c)
Courriel : [email protected]
Tél. :(961) 5 924 073 poste 445
Déclaration de consentement du participant
218
Je soussigné(e) _____________________________consens librement à participer à la recherche intitulée : « La
pratique infirmière en soins palliatifs auprès de patients atteints de cancer au sein d’une équipe interdisciplinaire
: une étude de cas au Liban». J’ai pris connaissance du formulaire et j’ai compris le but, la nature, les avantages,
les risques et les inconvénients du projet de recherche. Je suis satisfait(e) des explications, précisions et réponses
que la chercheuse m’a fournies, le cas échéant, quant à ma participation à ce projet.
__________________________________________ ________________________
Signature du participant, de la participante Date
Déclaration de l’étudiante-chercheuse
Je soussigné(e) _____________________________ certifie que le but, la nature de l'étude, la participation
attendue, les avantages et les inconvénients à participer au projet de recherche ont été expliqués aux participants.
De plus, j'ai avisé le participant qu'il est libre de se retirer de l'étude en tout temps sans que cela ne lui cause
aucun problème. J'ai répondu au meilleur de ma connaissance aux questions posées. Enfin, j'ai vérifié la
compréhension du participant.
__________________________________________ ________________________
Signature de l’étudiante-chercheuse Date
Renseignements supplémentaires
Si vous avez besoin d’informations supplémentaires, des questions sur la recherche ou sur les implications de
votre participation, veuillez communiquer avec l’étudiante-chercheuse : Mona NEHMÉ inf., Ph.D (c)
Courriel : [email protected]
Tél. :(961) 5 924 073 poste 445
Plaintes et critiques
Toute plainte ou critique sur ce projet pourra être adressée, en toute confidentialité à l’adresse suivante :
***
Directrice des soins
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Beyrouth-Liban
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(A l’intention des patients ou leurs proches pour observation) Version Arabe
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