La parole citoyenne à l’épreuve de la privation de liberté · 4 GUINCHARD Serge (Dir.),...

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MASTER 2 Droit de l’Exécution des peines et Droits de l’Homme Institut de Droit et Economie d’Agen Promotion « Jean Moulin » 2016-2017 La parole citoyenne à l’épreuve de la privation de liberté Mémoire présenté par Coralie DREAN Sous la direction de Madame Joana FALXA Maître de conférences en droit privé et sciences criminelles à l’Université de Guyane

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MASTER 2

Droit de l’Exécution des peines et Droits de l’Homme

Institut de Droit et Economie d’Agen

Promotion « Jean Moulin » 2016-2017

La parole citoyenne à l’épreuve de la privation de liberté

Mémoire présenté par

Coralie DREAN

Sous la direction de

Madame Joana FALXA

Maître de conférences en droit privé et sciences criminelles à l’Université de Guyane

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MASTER 2

Droit de l’Exécution des peines et Droits de l’Homme

Institut de Droit et Economie d’Agen

Promotion « Jean Moulin » 2016-2017

La parole citoyenne à l’épreuve de la privation de liberté

Mémoire présenté par

Coralie DREAN

Sous la direction de

Madame Joana FALXA

Maître de conférences en droit privé et sciences criminelles à l’Université de Guyane

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« Je déclare sur l'honneur que ce mémoire a été écrit de ma main, sans aide extérieure non autorisée, qu'il n'a pas été présenté auparavant pour évaluation et qu'il n'a jamais été publié, dans sa totalité ou en partie. Toutes parties, groupes de mots ou idées, aussi limités soient-ils, qui sont empruntés ou qui font référence à d'autres sources bibliographiques sont présentés comme tels ».

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REMERCIEMENTS

Dans le cadre de la réalisation de ce mémoire, je tiens à remercier vivement les personnes

énoncées ci-dessous pour leurs précieuses informations et leurs explications qui se sont avérées

nécessaires tout au long de ma recherche et de ma rédaction.

- Monsieur Jean-Jacques URVOAS, Maître de conférences en droit public, Université

de Bretagne Occidentale ;

- Monsieur François KORBER, Délégué général de l’association Robin des Lois ;

- Madame Barbara HILD, Attachée temporaire d’enseignement et de recherche, Équipe

de Recherches en Droit Public, Université de Lille (Droit et Santé).

De plus, je tiens à exprimer toute ma reconnaissance à Monsieur Patrick MALLE et à

Madame Mathilde DESFORGES, pour m’avoir accordé leur confiance en m’acceptant en

stage au sein de leurs établissements, et de m’avoir fait découvrir, de la manière la plus complète

qu’il soit, le milieu carcéral. Leur disponibilité, leur dynamisme et leur accompagnement m’ont

été d’une précieuse aide pour la réalisation de ce travail. J’adresse aussi mes remerciements à

tout le personnel de la Maison d’arrêt de Caen et du Centre pénitentiaire pour femmes de Rennes

qui m’a accueilli chaleureusement, qui m’a permis de découvrir leur métier passionnant et qui

a accepté de répondre à mes nombreuses questions.

Enfin, je tiens à remercier tout particulièrement ma directrice de mémoire, Madame Joana

FALXA, pour avoir accepté de me suivre dans ce projet, pour son aide, son implication, ses

conseils et le temps qu’elle m’a consacré pour mener à bien ce mémoire.

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PRINCIPALES ABRÉVIATIONS

Revues et encyclopédies

AJDA : Actualité Juridique de Droit Administratif

(Dalloz)

AJ Pénal : Actualité juridique pénal (Dalloz)

ASH : Actualités sociales hebdomadaires

D. : Recueil Dalloz

J.O.R.F : Journal officiel de la République française

RSC : Revue de science criminelle et de droit pénal

comparé (Dalloz)

Institutions et juridictions

Cass. : Cour de cassation

Cons. const. : Conseil Constitutionnel

CE : Conseil d’Etat

CEDH : Cour européenne des droits de l’Homme

CDPC : Comité européen pour les problèmes

criminels

CGLPL : Contrôleur général des lieux de privation et

de liberté

CNCDH : Commission nationale consultative des

droits de l’Homme

CPT : Comité pour la prévention de la torture du

Conseil de l’Europe

JAP : Juge d’Application des Peines

Administration pénitentiaire

AP : Administration pénitentiaire

CAP : Commission d’application des peines

CD : Centre de détention

COS : Conseil d’orientation stratégique

CP : Centre pénitentiaire

CPIP : Conseiller Pénitentiaire d’Insertion et de

Probation

CPU : Commission pluridisciplinaire unique

GIP : Groupe d’informations sur les prisons

DAP : Direction de l’Administration Pénitentiaire

DISP : Direction Interrégionale des Services

Pénitentiaires

DP : Détention provisoire

ENAP : École Nationale d’Administration

Pénitentiaire

MA : Maison d’arrêt

MC : Maison centrale

PJJ : Protection judiciaire de la jeunesse

PPSMJ : Personnes placées sous main de justice

SPIP : Service Pénitentiaire d’Insertion et de

Probation

Sources

C. élect : Code électoral

Conv. EDH : Convention européenne de sauvegarde

des droits de l’homme et des libertés fondamentales

Cir. min. Circulaire ministérielle

C.pén : Code pénal

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C. pr. civ. : Code de procédure civile

C.pr. pén. : Code de procédure pénale

D.C : Décision du Conseil Constitutionnel

Déclaration de 1789 : Déclaration des droits de

l’Homme et du citoyen

D.U.D.H : Déclaration universelle des droits de

l’homme

RPE : Règles Pénitentiaires Européennes

QPC : Question prioritaire de Constitutionnalité

Abréviations générales

Al. : Alinéa

Art. : Article

C.A : Cour d’appel

C. : Code

Cf : Confer

c/ : Contre

Dir : Sous la direction de

Ibid : Ibidem

Ie : id est

Infra : Ci-dessous

Mn : Minutes

n° : Numéro

p. : Page

Passim : À plusieurs endroits

préc. : Précité

s. : Et suivants

Supra : Ci-dessus

Autres

GENEPI : Anciennement Groupement étudiant

national d’enseignement aux personnes incarcérées

OIP : Observatoire International des Prisons

SCC : Service Correctionnel Canadien

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SOMMAIRE

INTRODUCTION ............................................................................................................ 1

PARTIE I : UNE VOLONTE PREGNANTE DE PRISE EN COMPTE DE LA PAROLE CITOYENNE DES PERSONNES DETENUES .............................................................................................. 7

Chapitre 1 : Une acceptation extensive de la parole des personnes détenues ............... 7

Chapitre 2 : Un triptyque (détenus/personnels/société) – instigateur de la parole

citoyenne ....................................................................................................................... 18

PARTIE II : UNE PAROLE POURTANT NEUTRALISEE PAR LA PRIVATION DE LIBERTE ... 30

Chapitre 1 : Les marqueurs d’une parole illusoire ...................................................... 30

Chapitre 2 : La pérennité d’une pratique d’exception ................................................. 42

CONCLUSION ............................................................................................................... 54

DOCUMENTS ANNÉXÉS ............................................................................................ 56

INDEX THÉMATIQUE ................................................................................................. 77

BIBLIOGRAPHIE .......................................................................................................... 78

TABLE DES MATIÈRES .............................................................................................. 90

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INTRODUCTION

« Qu’est-ce qu’un citoyen qui doit faire la preuve, à chaque instant, de sa citoyenneté ? » 1

La citoyenneté s’inscrit dans un mouvement à deux mesures : le principe même d’une

citoyenneté automatique, et la pratique manifeste d’une citoyenneté à reconquérir. Pourtant

principe rassembleur de nos démocraties, son application semble davantage marquée par

l’exclusion qu’elle engendre. La situation des personnes détenues est placée au cœur de cette

dichotomie. Seulement, « la cité est composée de citoyens, parmi lesquels il faut compter sur les

détenus »2. C’est dans cette dynamique que doit être abordée la question de la parole citoyenne à

l’épreuve de la privation de liberté.

Définir la parole citoyenne relève d’une entreprise complexe. La parole tout d’abord se

distingue du principe constitutionnel maintes fois réaffirmé de la liberté d’expression3. En effet,

cette dernière est définie par la liberté de pensée et d’opinion, pleinement liée à la faculté de

s’exprimer par tout moyen. La proclamation des droits et devoirs vise ainsi le fond et la forme de

l’extériorisation. La parole quant à elle, ne vise que la simple expression par la capacité à parler, à

communiquer et à manifester une idée. La fonction de la parole est ainsi de faire d’un individu un

membre à part entière de la société et donc dans un sens large, un citoyen.

Aussi, par l’utilisation du vocable citoyen, est entendu « tout individu jouissant, sur le

territoire de l’Etat dont il relève, de droits clairement définis » 4. La capacité d’exercer des droits

civils5, politiques6 et sociaux7 induit alors des obligations dans la cité. Aussi, « tous ceux qui

jouissent de ce statut sont entièrement égaux en ce qui concerne les droits et les devoirs

associés »8. Cette idée d’égalité dans la participation à la vie démocratique publique est l’essence

même de ce principe. L’idée d’une citoyenneté plus large, entendue sous sa forme communautaire

1 Pierre BOURDIEU (1930-2002). Citation extraite d’un article lui étant consacré, publié dans le magazine Les Inrockuptibles le 8 octobre 1997. 2 Ivan ZAKINE, ancien Directeur de l’Administration Pénitentiaire (DAP), séance de section du 22 avril 1989 devant la Société générale des prisons sur la notion de « détenu-citoyen » lors du bicentenaire de la Déclaration de 1789. 3 Articles 10 et 11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, article 19 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de 1978, article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. 4 GUINCHARD Serge (Dir.), Lexique des termes juridiques, 20e édition, Paris, Editions Dalloz, 2013, p. 163. 5 Droit à la sureté, égalité devant la loi, égalité devant la justice, liberté de pensée, de l’opinion et d‘expression, droit de réunion, d’association et de manifestation. 6 Droit de vote, droit d’éligibilité. 7 Droit au travail, droit de grève, droit à l’éducation, droit à la sécurité sociale. 8 MARSHALL Thomas Humphrey, Class, citizenship and social development, Praeger, London, 1973, 334 pages.

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émerge depuis le traité de Maastricht de 1992. Seule sa définition nationale, et donc ne concernant

que la citoyenneté française, sera toutefois prise en considération.

Le discours sur la citoyenneté est omniprésent dans nos sociétés. Cependant, un mouvement

majoritaire tend à dénier aux personnes détenues leur statut de citoyens, par une simple

reconnaissance des devoirs, au détriment des droits. Or, comme le relève Alain, « résistance et

obéissance, voilà les deux vertus du citoyen. Par l’obéissance il assure l’ordre, par la résistance,

il assure la liberté » 9. Aussi, dans le domaine carcéral, seule l’obéissance serait requise. Il paraît

inconcevable aujourd’hui d’envisager le détenu privé par nature de toute liberté, autre que celle

d’aller et de venir.

Cela pose donc la question de sa parole citoyenne. La doctrine ne s’est que peu inspirée de

cette terminologie. Pourtant identifiable, elle est le moteur d’une démocratie participative dans

laquelle tous les citoyens doivent être entendus de la même façon. En effet, elle s’oppose

principalement à la notion de parole personnelle qui ne se réfère qu’à un engagement ou une action

individuelle dans le pur souhait d’amélioration de son bien être ou d’une satisfaction personnelle.

Cette parole se révèle dans la sphère intime, familiale, personnelle. Aussi, l’initiative n’engage que

la personne dans sa demande. Le collectif peut être source d’individuel, mais l’individuel ne créé

pas automatiquement le collectif.

A contrario, la parole dite citoyenne peut se rapprocher dans certaines formes d’une parole

collective, quand bien même l’aspect collectif n’est pas obligatoire. En effet, l’action individuelle

peut mener à un niveau de transformation sociale dans la société. Aussi, l’idée est de s’engager

dans la parole, de contribuer à la vie de la communauté en visant dans son expression l’intérêt

général et l’amélioration globale d’une situation. Le groupement du GENEPI pose ainsi comme

définition « la parole légitime à porter des revendications et susceptible de s’exprimer

collectivement » 10. Cette parole citoyenne est donc le véritable exercice de la démocratie par des

actions au service d’une cause commune. C’est donc l’expression du « nous » avant celle du « je ».

Le but rend la parole citoyenne.

La parole citoyenne se matérialise de plusieurs façons. Au cœur de la revendication, de la

contestation, de la sensibilisation ou de l’information, son objet militant est perceptible.

Seulement, à travers ce mouvement, c’est l’idée même de l’engagement qui ressort. L’exercice de

9 Alain, Propos II, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, Paris, 1970. 10 Groupes GENEPI Fresnes, Villepinte et la Santé « Une parole prisonnière », Passe-Murailles, n°25, juillet-aout 2010, p. 21.

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la citoyenneté peut se faire activement ou passivement, l’essentiel résidant dans l’octroi de cette

possibilité à toutes les personnes. Cela relève d’une condition démocratique, qu’Hannah Arendt

considère comme « l’appartenance à l’espace public », ou ce qu’elle appelle « l’espace

d’apparition »11. Aussi, même si une personne décide de ne pas s’en saisir, il s’agit d’un choix, et

non d’une contrainte. En effet, le droit français n’envisage pas la notion de « parole obligatoire »

que peut constituer l’obligation de vote dans certains pays12.

L’envie de partager ses idées et de défendre une cause permet par l’action citoyenne le dégagement

de la parole citoyenne, car « sans l’action et la parole, une personne est privée des conditions de

son inscription comme acteur du monde »13. La frontière entre la parole citoyenne et l’action

citoyenne semble ténue. Seule la parole, qui induit une expression, sera abordée, contrairement à

l’action citoyenne, qui implique des gestes14.

Cette parole citoyenne est relative, dans ce propos, aux personnes détenues. La question

particulièrement importante de la parole du personnel de l’Administration Pénitentiaire15 fait aussi

l’objet d’un débat brûlant. Cette règle institutionnelle du silence et de la réserve16 pèse grandement

sur cette administration, tant l’impression de censure est frappante. Seulement, cette réalité ne fera

pas l’objet de cette étude. De plus, est exclue des présents développements la question de la parole

intégralement initiée par l’extérieur (ie famille, associations, ONG). L’importance de la recherche

se centralise alors sur le principal moteur de la parole : les détenus. Mais qu’entendre donc par ce

terme ? Une définition large englobe « toute personne admise dans un établissement pénitentiaire,

indépendamment de la nature ou de la gravité de la mesure prononcée contre elle »17. Cette

définition exclut par essence les personnes condamnées placées en milieu libre ou les personnes

de la société civile. Seulement l’usage « d’établissement pénitentiaire » reste large18. La notion

de personne hébergée et privée de liberté sera préférée. Le profil des personnes détenues varie de

la même façon. Les contraintes sont donc différentes selon que l’individu est mineur, majeur,

11 ARENDT Hannah, Condition de l’homme moderne, Agora, Pocket, Paris, 1994, p. 259. 12 Le vote est dit obligatoire lorsqu’une absence de participation au vote est passible de sanctions, comme en Argentine, en Australie, ou en Belgique. 13 KAMINSKI Dan, « Violence et emprisonnement », RSC, 2013, p. 461. 14 Exemple d’une action citoyenne : 14 octobre 2016, 5 personnes de la MA de Reims ont nettoyé un columbarium et les allées d’un cimetière. C’est la volonté de témoigner de son appartenance à la société. 15 LIARAS Barbara, « Surveillants : silence dans les rangs », Dedans Dehors, mars 2013, n°79, p. 43. 16 Décret n°2010-1711 du 30 décembre 2010 portant code de déontologie du service public pénitentiaire, Titre II « Dispositions relatives aux personnels de l’administration pénitentiaire », Chapitre 1er « Devoirs généraux du personnel de l’administration pénitentiaire », articles 7, 9, 10, 11, 14. 17 GUINCHARD Serge, Lexique des termes juridiques, op. cit., p. 318. 18 La personne peut être placée dans un quartier de semi-liberté, dans un quartier pour peines aménagées, dans une maison d’arrêt, dans un centre de détention ou dans une maison centrale ou dans une structure particulière. Le seul acte d’écrou n’est donc pas suffisant.

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homme ou femme. Des particularités sont inhérentes à chaque public, seulement le regard se doit

de rester large, car tous forment, à plus ou moins long terme19, le corps des citoyens. Enfin, cette

constante inclut les personnes prévenues et condamnées. Un régime différent de contrôle de la

parole citoyenne découle de ce statut. Aussi, l’analyse ne se limitera qu’à l’étude des personnes

condamnées, qui constitue l’ensemble majoritaire20.

Seulement, cette notion de parole citoyenne reste récente dans l’histoire des prisons par

l’empreinte du silence jusqu’à la fin du XXe siècle. Objet d’un éternel balancier entre pensées

philanthropiques et mouvement conservateur, les prisons françaises ont fait l’objet d’une étude

comparée en vue de leur amélioration à partir de 1830. Alexis DE TOCQUEVILLE et Gustave

DE BEAUMONT21 décident alors de mener une analyse outre-Atlantique, en observant le système

américain. Le rapport oppose deux modèles : le modèle pennsylvanien et le modèle auburnien.

Ces derniers diffèrent sur la logique de mise en place de l’isolement mais se retrouvent sur

l’instauration totale du silence. La France décide d’adopter cette même règle, pensant aux bienfaits

d’un isolement complet. Le silence permettrait donc de lutter contre la contagion et la récidive22

pour favoriser la réclusion et l’amendement. Ce système particulièrement nocif va perdurer

pendant plus d’un siècle et demi, notamment par son inscription dans la loi Bérenger de 1875 qui

astreint les détenus au silence par le principe de l’encellulement individuel. En effet, ce n’est qu’à

partir de 1971 par les réformes menées par René PLEVEN, Garde des Sceaux sous Georges

POMPIDOU, que l’obligation du silence prend fin. Cette abrogation fait suite aux mutineries

menées en France au même moment. En effet, que la parole soit collective ou individuelle, il s’agit

d’un outil pour lutter contre une forme d’isolement social et une souffrance due à l’incarcération.

Ce retour à la parole s’inscrit donc dans la consécration des droits des personnes détenues en

leur qualité de citoyen. La citoyenneté provient d’un triple mouvement. Le statut dépend

premièrement de l’implication et de la participation d’une personne dans la cité. Cette définition

de la Grèce antique s’est complétée pendant la période romaine par une notion juridique

correspondant à la possession des droits associés. Enfin, la Révolution française fait évoluer ce

19 La nationalité est une condition majeure de la citoyenneté, seulement elle s’ajoute au fait de jouir de ses droits civils et politiques. Cet exercice n’est pas possible pour les mineurs avant l’âge de la majorité (restrictions identiques pour les majeurs sous tutelle et les personnes déchues de leurs droits après la décision d’un tribunal). 20 Sur 70 018 personnes détenues écrouées au 1er juillet 2017, 49 591 sont condamnées (soit un taux de 70,82%). 21 DE TOCQUEVILLE Alexis et DE BEAUMONT Gustave, Du système pénitentiaire aux Etats-Unis et de son application en France, Gosselin, 3e édition, Paris, 1845, 443 pages. 22 Les trois fléaux pénitentiaires étaient « l’épidémie, l’homosexualité et la récidive » : CARLIER Christian, « Histoire des prisons et de l’administration pénitentiaire française de l’Ancien Régime à nos jours », Criminocorpus, Varia, 14 février 2009, [http://criminocorpus.revues.org/246] [25/07/2017].

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statut, en passant du terme de sujet à citoyen23. Toute personne dispose donc de ce statut. En effet,

qu’une personne soit à l’extérieur ou incarcérée, le retrait de la citoyenneté ne s’applique pas de

façon automatique lors du prononcé d’une condamnation. Ce n’est que par décision expresse du

juge sur la base de l’article 131-26 du Code pénal24 qu’une peine complémentaire d’interdiction

des droits civiques, civils et familiaux sera prononcée. La personne détenue reste donc citoyenne.

Ce principe est en adéquation avec la résolution du parlement européen de décembre 1998 qui

pose que « la privation de la liberté de mouvement n’est pas la privation de toutes les libertés

fondamentales ; que les libertés de pensée, d’opinion, d’expression, d’appartenance politique ou

religieuse doivent être à cet égard impérativement respectées » 25.

Aussi, les termes de prison et de droits paraissent, après cette étude historique, se rapprocher.

Pourtant c’est leur rapport antagoniste qui est le plus marquant. Cette « case noire »26 semble

imperméable à tous droits. En effet, la figure du délinquant s’oppose à la figure de l’homme

intègre, et justifie donc pour de nombreuses personnes un régime dérogatoire. La pratique laisse

place à plusieurs catégories de citoyens. A cette dernière s’oppose pourtant la volonté marquée

d’appuyer les droits des personnes détenues dans un souci d’égalité entre tous les citoyens. Aussi,

les règles pénitentiaires européennes de 1973 et de 1987, dont s’inspire en partie la loi pénitentiaire

de 2009, œuvraient déjà à ce rapprochement car « les différences qui peuvent exister entre la vie

en prison et la vie libre tendent à affaiblir le sens de la responsabilité du détenu ou le respect de

la dignité de sa personne »27. La reconsidération de la parole citoyenne est donc l’enjeu principal

dans le parcours des personnes détenues par l’inclusion dans une société. C’est l’idée de

« normalisation » 28 de la vie citoyenne en détention.

23 MARQUETTY Thierry, HARDY-DOURNES Anne-Sophie, GLAYMANN Dominique (et al.), Culture générale : Toutes fonctions publiques Ville de Paris – Catégories A et B, Foucher, Vanves, 2010, p. 206. 24 Art 131-26 Code pénal : « L'interdiction des droits civiques, civils et de famille porte sur : 1° Le droit de vote ; 2° L'éligibilité ; 3° Le droit d'exercer une fonction juridictionnelle ou d'être expert devant une juridiction, de représenter ou d'assister une partie devant la justice ; 4° Le droit de témoigner en justice autrement que pour y faire de simples déclarations ; 5° Le droit d'être tuteur ou curateur ; cette interdiction n'exclut pas le droit, après avis conforme du juge des tutelles, le conseil de famille entendu, d'être tuteur ou curateur de ses propres enfants. L'interdiction des droits civiques, civils et de famille ne peut excéder une durée de dix ans en cas de condamnation pour crime et une durée de cinq ans en cas de condamnation pour délit. La juridiction peut prononcer l'interdiction de tout ou partie de ces droits. L'interdiction du droit de vote ou l'inéligibilité prononcées en application du présent article emportent interdiction ou incapacité d'exercer une fonction publique ». 25 Résolution du 17 décembre 1998 sur les conditions carcérales dans l’Union européenne, J.O C du 9/04/1999. 26 Le Manifeste du Groupe d’information sur les prisons, lecture par Michel FOUCAULT le 8 février 1971. 27 Résolution 60. 1) de l’Organisation des Nations Unies du 30 août 1955, règles a minima pour le traitement des détenus. 28 RPE 5 de 2006 : « La vie en prison est alignée aussi étroitement que possible sur les aspects positifs de la vie à l’extérieur de la prison ».

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L’enjeu est en effet bien déterminé. La volonté de rapprocher la situation des personnes détenues

et des personnes libres est l’objectif principal de cette redécouverte de la citoyenneté en détention.

L’ambition est alors de ramener la prison « au même niveau d’exigence démocratique que celui

qui fait cours dans le monde extérieur » 29. Cette souhait se trouve confronté parallèlement à un

désaveu flagrant des citoyens extérieurs à la vie de la cité. L’abstention massive lors des élections

présidentielles en mai 2017 (25,44% au second tour) révèle, pour partie, d’un désintérêt dans

l’utilisation de la parole et des droits citoyens. Aussi, cette inutilisation en milieu libre laisse penser

que son application en détention relève de l’utopie. L’idée de restaurer et de promouvoir la parole

dans le monde extérieur mène de fait à une reconsidération de son application globale.

Ainsi, cette étude amène à se demander si la place accordée à la parole citoyenne des

personnes privées de liberté permet leur consécration en tant que véritables sujets de droit. À ce

vocable de « sujet de droit », qui se réfère à une personne dotée de droits et devoirs provenant de

la personnalité juridique, s’oppose la notion d’« objets de droits », visant un individu « dépourvu

de droits subjectifs et de capacité d’agir »30. Néanmoins du fait de l’incarcération même, la place

des personnes détenues semble a priori réduite, brouillant donc leur statut de citoyen.

La place de la parole citoyenne ne peut être qu’amplifiée par la collaboration de tous les acteurs

de la société. Gabriel TARDE relève que « ce monde géographiquement proche au cœur de la cité

est une institution incontournable non seulement pour les détenus et les professionnels qui y

travaillent, mais aussi pour l’ensemble des citoyens ». La prison tend donc à devenir un lieu

accepté et inclu dans la société car les constants progrès mènent à une démocratisation de

l’institution. Malheureusement, cette dernière souffre encore de son impopularité. Le statut

juridique de ses occupants est nettement déconsidéré par rapport au statut des personnes vivant à

l’extérieur. On impose alors à la personne détenue d’agir comme un citoyen, dans le respect des

droits et de devoirs des autres, sans pour autant lui donner les moyens qui lui permettent de le faire.

Ce droit renforcé n’en reste pas moins entier. Par conséquent, le système carcéral français s’est

renouvelé par la volonté prégnante de prise en compte de la parole citoyenne des personnes

détenues (Partie I), qui s’oppose cependant à une pratique neutralisée par la simple circonstance

de privation de liberté (Partie II).

29 HERZOG-EVANS Martine, « La révolution pénitentiaire française » in Dan KAMINSKI et Olivier DE SCHUTTER (Dir), Institution du droit pénitentiaire, Coll. La pensée juridique, L.G.D.J, 2002. 30 BACISEZ KATWANYI Joseph Michée, La protection internationale de l’individu comme sujet du droit international : cas des minorités et des réfugiés, Université de Lubumbashi (UNILU), Licence en droit, 2008.

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PARTIE I

Une volonté prégnante de prise en compte de la parole citoyenne des personnes détenues

Auparavant cachée, éloignée, ou bafouée, la parole citoyenne des personnes détenues a pris

depuis les vingt dernières années un espace considérable dans les pratiques et dans le droit français

(Chapitre 1), essor qui serait aujourd’hui vain sans la cohésion de multiples acteurs (Chapitre 2).

Chapitre 1 : Une acceptation extensive de la parole des personnes détenues

La parole citoyenne, envisagée initialement comme un privilège octroyé aux personnes

détenues, est devenue un véritable droit. Objet d’une certaine évolution à la base de sa

reconsidération (Section 1), la parole est aujourd’hui diversifiée, que ce soit dans sa forme ou dans

ses objectifs (Section 2).

Section 1 : Une reconsidération de la fonction de la parole

L’ouverture du monde carcéral vers l’extérieur a permis l’indispensable consécration des

procédés de mise en place d’une parole citoyenne (I), parole qui dispose désormais d’un nouveau

rôle au sein de l’établissement pénitentiaire (II).

I- Un essor significatif des procédés permettant la mise en place de la parole

La consécration de la parole citoyenne ne s’est effectuée que récemment en pratique. Soulevée

par l’action de la société (A), ce mouvement a permis de libérer la parole, et ainsi de permettre son

inscription comme principe de droit fondamental dans les textes de référence (B).

A) Une pression sociale, facteur de changement de politique

Le 8 février 1971 signe la première tentative de la reconnaissance de la parole des détenus.

Soutenu par Michel Foucault31, le Groupe d’Informations sur les Prisons se donne comme mission

de décloisonner ce lieu. Focalisé sur la parole citoyenne, le groupe s’attache à ce que « les

prisonniers puissent dire ce qui est intolérable dans le système de la répression pénale » 32. Les

« enquêtes-intolérance » menées impliquent à la fois une dénonciation objective des conditions de

31 Michel Foucault lit le 8 février 1971 le manifeste du GIP lors d’une conférence de presse à Paris 15e concernant la création de ce mouvement. Le mouvement est pluriel en ce qu’il regroupe tous les corps de la société civile : journalistes, magistrats, intellectuels, médecins, détenus etc. 32 La parole des prisonniers politiques avait déjà été entendue avec le mouvement de l’« Organisation des Prisonniers Politiques » en 1970. L’objectif du GIP est de redonner la parole aux prisonniers de droit commun.

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détention mais aussi un engagement individuel sur cette situation. Ce constat amène à une lutte

intérieure et extérieure (réunions d’informations). La parole citoyenne laisse place en conséquence

à une nouvelle représentation de l’univers carcéral. Par ailleurs, l’affirmation du pouvoir des

magistrats à partir des années 1980 a permis l’incarcération de personnes disposant d’une notoriété

certaine et appelés « détenus VIP ». Désormais donc, « les magistrats ont montré que les notables

ne sont plus exclus de toute action judiciaire, faisant ainsi progresser l’égalité des citoyens devant

la justice »33. L’influence de ces détenus a permis un décloisonnement du monde pénitentiaire vers

l’extérieur. Cette parole dans les médias a exposé au grand jour ce qui était auparavant caché et tu.

La parole est désormais écoutée et non pas délaissée. Ce mouvement collectif fort et unanime a

permis l’émergence de la parole citoyenne.

Ces révolutions se sont accompagnées de témoignages corroborés par la société civile elle-

même. Diffusé par extraits dans le journal Le Monde le 14 janvier 2000 avant sa publication

intégrale, le livre de Véronique VASSEUR34 alors intervenante médicale à la prison de Paris-La

Santé constitue l’acte fondateur du profond changement de regard sur les droits des personnes

détenues. Inévitablement par cet outil, la parole citoyenne des personnes détenues s’est libérée.

Cette entreprise n’a cessé de croître par la prise en compte du milieu carcéral par de nombreuses

associations35. Classées selon la nature de leur action, les associations ont parfois comme objet

principal la valorisation de la parole citoyenne ainsi que le relais de cette parole. « Nous n‘écoutons

pas un détenu mais une personne » 36. Le constat que font ces organismes est criant : les révélations

de la société ne suffisent pas car « la France a résolument tourné le dos à la volonté réformatrice

qui avait ponctué la vaste enquête parlementaire de 2000 sur les prisons » 37.

Cette mobilisation communautaire n’a cependant pas suffit à la consécration de ce droit. Il

était donc du devoir du pouvoir législatif de s’en emparer.

B) Un encadrement législatif nécessaire à une prise en compte de la parole citoyenne

Dans l’esprit d’une modernisation menant à une humanisation du système carcéral, est lancée

en 200638 l’idée d’« Etats généraux de la condition pénitentiaire ». La diffusion des conclusions

avait ainsi pour but d’interpeller les candidats à l’élection présidentielle de 2007 et de créer « une

33 LYON-CAEN Pierre, « Le juge d’instruction. La menace d’une grave régression », Après-demain, n°15, 2010, p. 20-23. 34 VASSEUR Véronique, Médecin-chef à la prison de la Santé, Éditions du Cherche Midi, Paris, 2000, 201 pages. 35 Exemples : Le Courrier de Bovet, l’Observatoire International des Prisons, le GENEPI, la FARAPEJ. 36 DUHAMEL Rosine, « La Croix-Rouge, à l’écoute des détenus », Prison justice, n°107, janvier 2014, p.18. 37 MAREST Patrick, « Des états généraux derrière les barreaux », Libération, 10 janvier 2006, [http://www.liberation.fr/tribune/2006/01/10/des-etats-generaux-derriere-les-barreaux_25940] [28/05/2017]. 38 États généraux de la condition pénitentiaire qui se sont tenus du 31 mars jusqu’à fin juin 2006.

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injonction à agir » 39. L’initiative, pleinement soutenue par Robert BADINTER, est originale dans

sa forme car elle permet l’expression directe des personnes détenues par le biais de questionnaires.

Leur parole citoyenne est ouverte et crée un véritable débat politique sur cette question. Martin

HIRSCH40 clame lors du lancement de ces états généraux que seule la réunion de trois éléments

permet de mener cette révolution : « le témoignage des acteurs, l’expertise et le débat

contradictoire ». La parole des personnes détenues constitue la pierre angulaire de tout progrès.

C’est sous la présidence de Nicolas SARKOZY que, le 24 novembre 2009, va être adoptée la

tant attendue loi pénitentiaire. Déjà envisagée le 8 novembre 2000 par Lionel JOSPIN41,

l’influence européenne s’est avérée nécessaire dans l’accélération du processus. Aussi, la

traduction des RPE42 de 2006 en France pose la base des droits des personnes incarcérées. La loi

pénitentiaire consacre le droit à l’expression à son article 2943. Auparavant placé à un niveau infra-

normé, le système carcéral progresse vers sa consécration législative. L’obligation faite à tout

personnel du service public pénitentiaire de respecter les droits des personnes détenues44 est

rappelée par l’entrée en vigueur du Code de déontologie le 30 décembre 201045. Cependant, ces

textes ne restent que des embryons législatifs. L’indétermination du statut des personnes détenues

dans les textes n’entraine qu’une application partielle des droits. Cette déficience s’associe à une

lenteur d’application de ces textes en droit français. En effet, ce n’est que par le décret du 29 avril

201446 qu’est envisagée l’application concrète du droit de consultation des personnes détenues.

Malgré l’importance d’inscrire ce droit dans les textes, sa mise en place reste lacunaire47.

Cette consécration des droits a cependant apporté dans un même temps la valorisation concrète

de la parole citoyenne des personnes détenues ainsi que sa reconsidération.

39 BOUNIOT Sophie, « À quand une révolution pour les prisons ? », L’Humanité, 8 mars 2006, propos de Gabriel MOUESCA, [http://www.humanite.fr/node/346136] [13/07/2017]. 40 Président d’Emmaüs France de mai 2002 à mai 2007. 41 Déclaration de M. Lionel JOSPIN sur l’AP et la politique pénitentiaire lors de l'inauguration des locaux de l’ENAP à Agen le 8 novembre 2000, [http://discours.vie-publique.fr/notices/003002911.html]. 42 Les règles pénitentiaires européennes, dites RPE, proviennent du Comité européen de coopération pénologique formé des personnalités de haut-rang de 7 pays européens qui a reçu mandat du Comité des ministres du Conseil de l’Europe. Il s’agit de la troisième version des RPE (1973 et 1987) – RPE 50 en l’espèce. 43 Loi pénitentiaire n°2009-1436 du 25 novembre 2009, article 29 : « Sous réserve du maintien du bon ordre et de la sécurité de l’établissement, les personnes détenues sont consultées par l’administration pénitentiaire sur les activités qui leur sont proposées ». 44 Titre 1 dans les dispositions générales (Article 1, article 3), et encore plus dans le titre II sur les dispositions relatives aux personnels de l’administration pénitentiaire avec le chapitre II concernant les « Devoirs du personnel de l’administration pénitentiaire dans les relations avec les personnes qui lui sont confiées » (article 18). 45 Décret n° 2010-1711 du 30 décembre 2010 portant code de déontologie du service public pénitentiaire. 46 Décret n°2014-442 du 29 avril 2014 portant application de l’article 29 de la loi n°2009-1436 du 24 novembre 2009 dite loi pénitentiaire. 47 ALLAIN Emmanuelle, « Le bilan d’application de la loi pénitentiaire », Dalloz actualités, 16 juillet 2012, p. 16. : « À ce stade, l’application de la loi pénitentiaire n’est pas à la mesure des espoirs qu’elle avait soulevés ».

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II- Une parole repensée au sein de l’établissement pénitentiaire

Après un long processus de légitimation, la parole des personnes détenues est maintenant

reconsidérée dans sa fonction. Outre les demandes individuelles, l’expression d’une parole

citoyenne est un outil de gestion de la détention (A), outil efficace dans son simple emploi, car

bien souvent, elle suffit dans l’apaisement des conflits (B).

A) Un outil fort de gestion de la détention

Attributs même de la privation de droits et de libertés, les restrictions de droits forment une

forte pression dans un climat originel fragile. La prison est souvent perçue comme une « cocotte-

minute »48, prête à éclater à tout moment. Plusieurs procédés sont utilisés par les personnes

détenues afin d’obtenir des autorités une certaine écoute. L’agression est l’acte symbolique de

contestation et de revendication. Sa forme violente est la plus utilisée. La violence peut être mise

à exécution sur des codétenus, sur le personnel pénitentiaire ou sur soi-même. Tous ces procédés

ont pour but d’obtenir une réponse ou une réaction en cas de non-écoute. Jean-Marie DELARUE

relevait en 2013 que « s’il n’est accordé aucune importance à la parole, […] l’on observe un

recours à des procédés autres que la parole » 49.

Aussi, la parole apparaît comme un rempart à cette violence physique et verbale50.

L’organisation de la consultation des détenus par la parole permet d’apaiser des tensions présentes

en détention afin de casser un cycle perpétuel de violence et de répression en prison. On repense

alors la parole en prison. Le directeur interrégional des services pénitentiaires de Lyon a jugé dans

un rapport en 2010 que la « parole est un outil irremplaçable d’apaisement des conflit »51. Le but

est de créer des lieux d’extériorisation, dans le sens de manifester sa pensée pour, permettre aux

détenus de verbaliser leurs frustrations et désamorcer les tensions. Il s’agit d’une idée de meilleure

gestion de la détention. Néanmoins, cette stratégie ne doit pas être employée que dans sa fonction

managériale pour éviter une explosion mais comme la volonté de rétablissement d’un véritable

droit politique et social. Aussi, les méthodes de « sécurité active » ou de « sécurité dynamique »

anticipent et empêchent tout trouble. Il s’agit d’imposer des règles par la communication, sans

avoir besoin d’entrer automatiquement dans une démarche répressive. La maison centrale d’Arles

permet ce type de rapports entre les détenus et l’AP. Avant toute sanction disciplinaire est instauré

48 FORESTIER Marine « Surpopulation : « les prisons françaises sont des cocottes minute », Le Monde, 8 juillet 2016. 49 DELARUE Jean-Marie (interview) « Le couloir étroit de la parole carcérale », Dedans Dehors, n°79, mars 2013, p. 35. 50 Eschyle, « La parole apaise la colère », (in RADT Stefan, « Tragicorum graecorum fragmenta », L’antiquité classique, Tome 56, 1987, Bruxelles, p 310-312). 51 TOULOUZE Jean-Charles, Mission de réflexion sur les violences entre personnes détenues, DISP Lyon, juin 2010.

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un dialogue et un échange pour comprendre l’origine de toute faute. Bien que cette médiation

n’empêche pas toujours la procédure disciplinaire, elle renforce la confiance et le respect mutuel

entre personnel pénitentiaire et personnes détenues52.

La fonction apaisante de la parole citoyenne en détention n’implique pas automatiquement

une réponse favorable à la demande, le seul emploi permettant de délivrer une parole retenue.

B) L’emploi libérateur de la parole

La parole, même sans être suivie d’actes, est appréciée pour sa seule expression. Comme le

relève Victor HUGO « la parole intérieure démange »53, aussi une parole contenue est facteur

d’instabilité, alors qu’une parole exprimée sera facteur de libération. Ce lien direct entre le

personnel et les détenus est nécessaire. L’apaisement de la détention passe par cette parole qui se

doit d’être effective. L’écoute des personnes détenues est primordiale.

La nature de la réponse apparaît le plus souvent comme secondaire car la seule extériorisation,

est importante. C’est ce contact humain qui est primordial pour faire de l’Homme un véritable

citoyen intégré. A titre d’exemple, cet exercice de la parole se retrouve grandement dans la pratique

du Centre Pénitentiaire pour femmes de Rennes (CPF) par la volonté de recevoir les personnes en

entretien pour montrer que la personne a bien été entendue avec le désir « d’être là pour les détenus

»54. Même si la réponse ne sera pas toujours déterminante, il est quand même souvent attendu une

explication qui permet de comprendre, d’une certaine façon, le refus. Cela permet à la personne

détenue de se sentir « valorisée même si on nous répond NON, on prend le temps de nous expliquer,

c’est-à-dire qu’on nous considère, on nous perçoit autrement que par le numéro d’écrou »55.

Aussi, peu importe souvent le fond, l’utilisation de la parole reste déterminante. Le corolaire

de la parole est l’écoute. Quand une personne parle, cela implique qu’elle soit écoutée et prise en

considération car « ne pas être entendu provoque une incompréhension, une colère sourde »56.

Mais lorsque la parole est écoutée dans un sens, elle doit l’être dans l’autre, et donc une personne

qui a été écoutée, sera souvent plus encline à écouter par la suite. « Surveillant, ça fait toujours

plaisir d’avoir une conversation comme ça. Ça fait plaisir de pouvoir parler »57. L’appropriation

52 LANGLAIS Anne, La commission de discipline, un enjeu de la reconnaissance des personnels de surveillance, Mémoire de recherche et d’application professionnelle DSP, 44ème promotion, juin 2016, p. 12. 53 HUGO Victor, L’homme qui rit, Poche, 2002, 838 pages. 54 Témoignage de gradé au CPF Rennes recueilli lors d’un stage au mois d’avril 2017 dans l’établissement. 55 Rapport de BRUNET-LUDET Cécile, Bilan de l’expérimentation – De la formalisation du droit d’expression collective des personnes détenues : réalités et perspectives, Paris, DAP, janvier 2012. 56 LIARAS Barbara, « Cette impression de crier dans le désert », Dedans dehors Revue de l’Observatoire International des Prisons Section Française, mars 2013, n°79, p. 39. 57 FRAYER Arthur, Dans la peau d’un maton, Fayard, 2011, p. 123.

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de la parole personnelle entraine une plus grande maitrise de l’expression, de ses codes et de ses

objectifs. Cette aisance constitue le support privilégié de la parole citoyenne.

La parole citoyenne est reconsidérée depuis quelques années en détention. Ce constat ne peut

qu’être confirmé par la prise en compte de sa diversité.

Section 2 : La diversité de la parole

La parole citoyenne est un mécanisme affirmé dans nos sociétés contemporaines.

Démultipliée dans sa forme aujourd’hui (I), elle s’est surtout matérialisée par le biais du droit de

vote dans un contexte électoral fort en cette année 2017 (II).

I- La démultiplication de la parole

Il est préférable de parler « des paroles », tant leur forme est multiple et ne peut s’exprimer

d’une seule manière. La parole peut être l’objet d’une évolution dans son but (A), but qui peut être

exprimé de différentes manières, avec comme objectif une diffusion la plus large possible (B).

A) De l’individuel au collectif

La parole personnelle consiste en la revendication d’intérêts propres. Seulement, elle ne doit

pas être confondue avec la parole citoyenne individuelle, qui en s’exprimant individuellement peut

néanmoins viser un objectif collectif. L’orientation individuelle est « la propension à raisonner de

manière autonome et à se penser, en tant qu’individus, au cœur des stratégies des organisations

et de la construction de la société »58. Cette matérialisation d’une parole citoyenne individuelle

peut passer par l’action en justice car la réponse donnée à cette demande peut concerner plus

globalement d’autres personnes dans une situation similaire. En effet, cette action principalement

individuelle peut être portée devant les juridictions dans le seul objectif d’assainissement de

l’ordonnancement juridique, qui servira pour la protection ultérieure des droits de tous. C’est le

cas de nombreux arrêts59 qui, par la contestation d’une personne, ont permis une amélioration liée

des conditions de détention. La parole citoyenne individuelle agit pour l’intérêt commun.

Aussi, d’abord exprimée individuellement, cette dernière peut prendre un essor collectivement

par le soutien de multiples protagonistes concernés par une atteinte à leurs droits. Cette transition

se fait par la communication d’une parole individuelle qui va pouvoir impliquer et convaincre un

58 SAUQUET Michel et VIELAJUS Martin, L’Intelligence interculturelle : l’individuel et le collectif, je, nous, ils, Éditions Charles Léopold Mayer, 2014, p. 155. 59 Par exemple pour la question de la compétence entre juge judiciaire et juge administratif : Conseil d’État, 4 novembre 1994, n° 157435 Korber.

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ensemble de personnes. Le processus de réalisation du journal Citad’elles60, journal écrit par les

femmes détenues du CPF Rennes, en est une illustration. La phase de préparation débute

initialement par une rencontre d’idées sur le thème de la prochaine édition. Bien que des thèmes

puissent être personnels61, des sujets portent souvent sur une question d’ordre général pouvant

servir dans l’application des droits de chaque personne. La discussion collective instituée par les

intervenants extérieurs venant de divers corps de métiers fait naitre cet intérêt commun à

défendre62. La parole citoyenne, auparavant individuelle, peut ainsi devenir collective car portée

par un groupe entier. Cette parole commune dispose d’une large place et constitue la force du

groupe. Finalement collective, cette parole se porte sur des thématiques plus variées que la simple

protection des conditions de détention. La solidarité du groupe et l’attachement aux valeurs

citoyennes est le moteur de la parole. Cette direction collective permet ainsi de se « référer au

groupe pour toutes décisions de la vie sociale et à se penser comme éléments indissociables d’un

ensemble dont on dépend étroitement » 63.

Le porteur seul ou en groupe de la parole dispose d’une capacité multiple d’expression et de

libération dans un espace dédié amplifié.

B) Une forme libérée de la parole

La parole est la « faculté de s’exprimer par le langage articulé » et se rapporte dans son sens

courant à une « chose dite par quelqu’un »64. A l’intérieur même de cette possibilité, existe une

multitude de canaux d’expression citoyenne pouvant passer par l’oral ou par l’écrit, par parole

directe ou indirecte. De plus, l’extériorisation peut s’effectuer à différentes échelles, dans le cadre

d’un établissement pénitentiaire (EP) ou plus largement dans la société. La parole citoyenne en

établissement est de plus en plus libérée de par l’accroissement des possibilités techniques offertes.

En effet, qu’elle passe par un journal rédigé en détention65, ou encore par le biais du canal de

télévision interne66, l’ouverture sur le monde permet de s’inscrire dans cette société, pour ainsi

agir en son sein. L’inconvénient réside dans le fait que ces initiatives ne peuvent vivre qu’autant

60 Projet mis en place par les Établissements Bollec (association mettant en place des projets culturels dans la région rennaise et réunissant des dessinateurs, auteurs et graphistes). 61 Sujets sur le voyage, sur la nature, sur la culture d’un pays… La parole personnelle dans ce sens va permettre de libérer la personne par la restitution d’une expérience personnelle. 62 Rubriques « Citoyen un jour » et « On vous explique » qui exposent les droits des personnes détenues et incitent à les protéger. Dans le dernier numéro (n°14), le dossier porte sur la thématique du travail en détention. 63 SAUQUET Michel, VIELAJUS Martin, L’Intelligence interculturelle : l’individuel et le collectif, je, nous, ils, ibid. 64 Définition de la parole. Collectif, Le Grand Larousse, Larousse, Paris, Edition 2017. 65 Exemple du journal Citad’elles au CPF Rennes ou du Canard des détenus au CPH Rennes-Vezin ainsi que la rédaction des Poèmes de Fresnes. 66 Exemple des chaînes de télévision animées par les détenus eux-mêmes dans plusieurs EP comme Saint-Brieuc ou Metz.

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de temps que la mobilisation citoyenne est partagée. Si les personnes se détournent du projet, il

n’y aura plus de mise en valeur de la parole. Enfin, récente dans le monde carcéral, l’expression

militante à travers l’art musical67, graphique68 ou cinématographique69 permet aux personnes

détenues d’être au cœur du débat public. Ces techniques mettent en place une transmission

extérieure de la parole citoyenne. Du même fait, la médiatisation de la parole citoyenne, pendant

l’incarcération ou après, fait fonction de relais de la parole. Cette prise de position est appuyée par

des articles de presse, des entretiens téléphoniques, ou des interviews.

Enfin, le recueil de la parole passe par le biais de questionnaires. Distribués dans chaque EP,

l’objectif est d’avoir un ressenti commun formant un avis collectif. Les conditions de détention

sont les thématiques particulièrement abordées. Initiative qui se doit d’être remarquée, cette

libération de la parole est pourtant limitée70. En effet, les résultats ne sont pas toujours

représentatifs compte tenu des faibles retours. Concernant l’opération menée en 2006 en amont

des États généraux de la condition pénitentiaire, l’appréciation ne peut être que partielle car seules

les réponses de 8% de la population carcérale ont été exploitées. Est alors prise en compte une

parole dite collective citoyenne alors que cela ne concerne que très peu de personnes. L’enquête

sous forme de questions à choix multiples71 conditionne par là même les réponses données.

Cependant, dans cet univers considéré « sans voix »72, l’enquête a eu l’intérêt de donner une place

à la parole des personnes détenues.

L’exercice de la parole citoyenne se fait ainsi de plusieurs façons. Mais c’est bien dans

l’application des droits politiques qu’elle fait débat aujourd’hui : comment exercer le droit de vote

en détention ?

II- L’expression citoyenne par l’exercice du droit de vote

Depuis la loi du 1er mars 1994, il n’existe plus de privation automatique des droits

électoraux73. Aussi, le droit de vote, application majeure de la parole citoyenne, a fait l’objet de

67 La Shtar academy, groupe formé en détention, a sorti son premier album le 20 janvier 2014. 68 Cf Annexe 6 – Affiches d’information sur le vote par procuration réalisées par les personnes détenues en formation BEP infographie, MA Fleury-Mérogis, mars 2017. 69 RÉCHARD Catherine (réalisation), « Le déménagement », Candela productions, France Télévisions, 2011, 54 mn. 70 Cf Annexe 10. L’institut BVA, société d’études et conseil, a distribué 61 725 questionnaires en métropole et en outre-mer avant la tenue des états généraux de la question de la condition pénitentiaire. Cependant, 45 300 personnes ont effectivement reçu ce document, 15 530 ont été retournés, et seulement 5 000 ont été exploités (taux de 8% à peu près sur tous les formulaires envoyés). Extrait de « Condition pénitentiaire : la parole libérée des détenus et des professionnels », Actualités Sociales hebdomadaires, n°2475, 2006, p.39-40. 71 Les personnes ne peuvent que se borner à cocher des items présélectionnés et ne peuvent faire d’ajouts. 72 « Condition pénitentiaire : la parole libérée des détenus et des professionnels », ibid. 73 Article 131-26 C. pén. préc.

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nombreux débats durant la période électorale 2017. Ce droit s’envisage dans sa dimension

première, avec la procédure même du vote (A), et dans sa dimension géographique, par la volonté

d’implantation de bureaux de vote en établissements pénitentiaires (B).

A) Une claire valorisation du droit de vote par les acteurs du monde carcéral

Soulevée à partir de la Primaire ouverte de la droite et du centre en prévision des échéances

électorales de 2017, la question de la parole citoyenne des personnes détenues a fait l’objet de

débats. Consacré par tous les textes de référence, le droit de vote est la prérogative citoyenne

première. La Cour européenne des droits de l’homme contrôle rigoureusement cette application.

En cas de non-respect du droit de vote, elle condamne les Etats concernés sur la base de l’article 3

du protocole n°174. De plus, la RPE 24.1175 de 2006 relève que les autorités doivent favoriser et

veiller à la participation des détenus au vote. Enfin, en droit interne, la loi pénitentiaire prévoit à

son article 3076 les dispositions d’application de ce droit. Il existe donc, en théorie, une possibilité

totale d’exercice du droit de vote pour les personnes privées de liberté.

Afin de bénéficier pleinement de ce droit, toute personne se doit d’être inscrite sur les listes

électorales77 avant le 31 décembre précédant l’élection concernée. L’inscription sur ces listes

entraînera le rattachement au domicile déclaré de la personne ou à l’établissement. L’article 30 de

la loi pénitentiaire permet une plus grande facilité à élire domicile à l’EP référent. Seulement,

l’association Robin des Lois sollicite une inscription automatique à l’établissement lors de l’acte

d’écrou, ce qui permettrait une facilité dans la procédure d’inscription et surtout des oublis

moindres. Concernant l’aspect pratique, cette modalité pourrait s’effectuer par acte au greffe

permettant un suivi automatique en cas de transfert. Il s’agit d’une première étape cruciale dans

l’exercice de ce droit civique. Le concours des SPIP, du personnel de surveillance et de direction78

est alors précieux dans l’information des personnes détenues. La mobilisation peut d’ailleurs être

74 CEDH, 30 mars 2004, Hirst c/ Royaume-Uni et CEDH, 1er juillet 2008, Calmanovici c/ Roumanie : « Il faut qu’une privation, si elle est prononcée, ressorte de la durée de la peine prononcée et de la gravité de l’infraction ». 75 RPE 24.11 : « Les autorités pénitentiaires doivent veiller à ce que les détenus puissent participer aux élections, aux référendums et aux autres aspects de la vie publique, à moins que l’exercice de ce droit par les intéressés ne soit limité en vertu du droit interne ». 76 Loi pénitentiaire n°2009-1436 du 25 novembre 2009, article 30 : « Les personnes détenues peuvent élire domicile auprès de l’établissement pénitentiaire pour l’exercice de leurs droits civiques, lorsqu’elles ne disposent pas d’un domicile personnel. Avant chaque scrutin, le chef d’établissement organise avec l’autorité administrative compétente une procédure destinée à assurer l’exercice du vote par procuration ». 77 Art L.11 C. élect. – cf Annexe 1. 78 Une convention a été signée entre la MA Fleury-Merogis, le SPIP 91, l’association Lire c’est Vivre, l’association CASP-ARAPEJ, la PJJ, l’Éducation Nationale et le Conseil départemental d’accès au droit de l’Essonne pour la question de l’exercice du droit de vote en détention pour les élections de 2017.

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nécessaire par l’explication de ce droit. Des intervenants extérieurs sont parfois mobilisés pour

cette tâche visant la parole citoyenne79.

Au-delà de cette condition d’inscription, la promotion sur place du droit de vote en tant que

tel est nécessaire. La DAP communique à chaque élection une affiche de sensibilisation et

d’information à tous les établissements80. Aussi, l’exercice du droit de vote peut s’opérer de deux

façons : le détenu peut bénéficier d’une permission de sortir par le JAP en CAP ou effectuer un

vote par procuration. La première possibilité, d’une part, permet l’exercice direct du droit de vote

par la personne bénéficiaire elle-même en sollicitant une permission de sortir possible avec le

décret du 16 novembre 200781. Le JAP reste cependant l’unique décisionnaire. En pratique, cette

autorisation peut être octroyée pour une durée très courte permettant de faire l’aller-retour

rapidement. La loi du 31 décembre 197582, d’autre part, a ouvert le droit de vote par procuration

pour les personnes placées en DP et aux condamnés83. Ce vote a été facilité, mais se pose toujours

la question de trouver des personnes de confiance pour l’exercice de ce droit personnel et intime.

L’appui des associations84 est essentiel car elles permettent la mise en contact de personnes neutres

et des personnes détenues en amont des élections. L’objectif est d’instaurer un débat citoyen sur

cette question et ainsi voir s’il existe une compatibilité entre les personnes concernées. La

procédure peut s’arrêter à tout moment si la confiance n’est pas établie.

La mobilisation de tous les acteurs pour les élections passées est remarquable mais reste

insuffisante dans cet univers aussi fermé85. Le parcours du combattant opposé au détenu dans

l’exercice du droit de vote amène à envisager l’instauration de bureaux de vote en détention.

B) Une application toujours discutée en détention

La participation à la vie politique et l’exercice des droits civiques contribue à une intégration

dans la société. En pratique cependant, ce droit reste peu investi par la société dans son intégralité,

notamment à cause d’un certain désintérêt pour la chose politique86. Ce mouvement s’accentue

79 Au CPF Rennes, les bénévoles du Secours Catholique font des réunions de sensibilisation au droit de vote. 80 Affiches présentes sur tous les lieux de passage au CPF Rennes : coursives, unité de vie au CD, salles socio-culturelles etc. Cf Annexes 2,3 et 4. 81 Décret n°2007-1627 du 16 novembre 2007 modifiant le code de procédure pénale et renforçant le recours aux aménagements de peines et la lutte contre la récidive. Cf art. D 143-4 C. pr. pén. 82 Loi n°75-1329 du 31 décembre 1975 modifiant certaines dispositions du Code électoral, J.O.R.F, 3 janvier 1976. 83 Cf Annexe 5. 84 Exemple : au CPF Rennes, le Secours catholique mettait en relation une personne de confiance et la personne détenue souhaitant voter. 85 Pratique au CPF Rennes aux élections présidentielles de 2017 : 8 votantes dont 6 procurations (sur 57 places au quartier maison d’arrêt et 231 places au quartier centre de détention). 86 Interview de Christiane TAUBIRA par Yasmine Chouaki dans En Sol Majeur le 5 octobre 2014 - Sentiment de non-accès à la vie politique souvent liée à la complexité de la procédure (mais pas automatiquement).

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plus particulièrement en détention87, en raison de la lourde procédure administrative qui reste

toujours liée à la condition d’incarcération88.

En ce sens, l’ouverture de bureaux de vote en détention permettrait l’accès au droit de vote

d’un plus grand nombre de personnes. Envisagée par l’Ancien Garde des Sceaux, Jean-Jacques

URVOAS, l’ouverture de bureaux a été réfléchie par le ministère de la Justice dès le 14 mars 2017.

Ce dernier a alors recueilli les observations d’élus (député Sergio CORONADO, EELV), de

praticiens (avocats, personnel pénitentiaire) et d’associations (Robin des Lois, OIP). Le but de la

participation à la vie démocratique était bien sûr mis en avant. Toutefois, cette discussion n’a pas

abouti à cause du passage de relais permanent de responsabilités entre le ministère de la Justice et

le ministère de l’Intérieur. La décision d’ouverture de bureaux en détention revient pourtant de

droit au ministère de l’Intérieur par décision du préfet (art 40 du code électoral.). Les arguments

logistiques89 et sécuritaires90 ont anéanti toute avancée sur ce point. Les tribunaux administratifs

de Paris et de Poitiers91 n’ont pas suivi les référés mesures-utiles initiés par l’association Robin

des lois concernant l’obligation de mettre en place des bureaux de vote. Les raisonnements restent

techniques et se basent sur la non-caractérisation d’une situation d’urgence. La demande de mise

en place de bureaux de vote apparaît, pour les tribunaux, tardive car « de telles mesures ne

sauraient être ordonnées au-delà du 31 août de l’année précédant l’élection ». La question qui

devait faire l’objet d’une nouvelle étude pour les élections législatives a connu la même réponse.

François KORBER, délégué général de l’association Robin des Lois, note pourtant qu’une

application pratique s’annonce assez simple par la mise en place d’isoloirs dans une salle neutre

comme le greffe. Les mouvements ne seraient dans les faits que peu contraignants.

Ce droit qui ne demande que la stricte application de la loi fait défaut92. Aussi, le moteur de

cette évolution reste assurément la mobilisation de tous les acteurs en lien avec le monde carcéral.

87 70% des personnes incarcérées jouissent de ce droit de vote, mais seul 6,3 % des détenus pouvant voter l’on fait en 2007 pour les élections présidentielles, et seulement 3,9% en 2012. 88 Les permissions de sortir ne sont pas de droit et peuvent être refusées par le JAP compte tenu de la peine, du comportement en détention et du lieu d’inscription sur les listes électorales (éloignement géographique ou non). Les procurations sont peu nombreuses compte tenu du nombre de justificatifs à obtenir en vue du vote, de la procédure mise en place par l’établissement (venue éventuelle de l’OPJ), et de la difficulté à trouver un mandataire référent, digne de confiance. 89 L’argument provient de l’espace restreint en détention et de la difficulté d’effectuer les mouvements de toutes les personnes détenues pour un établissement entier. 90 Cette position met en avant le risque d’action collective (sanctionnée à l’article R 57-7-1 3° et R 57-7-2 7° C. pr. pén.) et interdit donc les débats et regroupements politiques, qui peuvent mettre en danger la sécurité de l’établissement ou l’ordre interne. 91 Décisions TA Paris du 21 mars 2017, n°1703348/9 et TA Poitiers du 17 novembre 2016, n°1602559. Commentaire HERZOG-EVANS Martine « Vote des détenus : entre droit théorique et droit effectif », AJ Pénal, 2017, n°5, p. 247. 92 Sur cette question consulter le site [http://robindeslois.org].

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Chapitre 2 : Un triptyque (détenus/personnels/société) – instigateur de la parole citoyenne

En référence au célèbre discours de Valéry Giscard-d’Estaing93, Guy CANIVET, Premier

président de la Cour de cassation, souligne en 2000 que « n’étant juridiquement privé que de sa

liberté, le détenu demeure titulaire de tous les autres droits »94. Cette considération du monde

politique des droits s’accompagne d’un intérêt certain de l’ensemble de la société. La communauté

devient soucieuse de la parole des détenus (Section 1), parole citoyenne amplement défendue par

les détenus eux-mêmes (Section 2).

Section 1 : La reconnaissance du « détenu-citoyen » par la communauté

Jean FAVARD utilise pour la première fois devant la société générale en 1989 le terme de

« détenu citoyen » 95. La société dispose donc d’un rôle dans l’exercice de cette parole (I), appuyée

par les droits processuels qui renforcent le statut de citoyen des personnes détenues (II).

I- La société comme support privilégié de la parole citoyenne

La parole citoyenne est désormais mise en avant grâce à l’implication particulière de la société

civile (A), investissement qui ne peut être possible sans la coopération effective de tous les acteurs

(B).

A) L’implication des acteurs extérieurs dans l’usage de la parole citoyenne

Les acteurs extérieurs, et notamment les associations, ont permis le développement d’ateliers

à destination des personnes détenues afin de favoriser une prise de parole citoyenne. Outre la

communication directe, la parole se construit et s’exerce par le biais d’activités collectives.

L’objectif principal est de sensibiliser les détenus sur les questions liées à la citoyenneté, sur

l’exercice de cette dernière et sur la manière d’exercer des droits et devoirs associés. Le but est

d’apprendre à s’écouter, à écouter l’autre et à canaliser les échanges. Des initiatives locales sont

parfois mises en place au sein de certains EP, comme au CPF Rennes. Ce projet a réuni un groupe

d’environ 5 personnes en 2016-2017 au cours de 10 séances durant lesquelles les valeurs

citoyennes tenaient la place centrale. Le programme fixé en amont a permis la collaboration

concrète d’experts dans chaque thématique. L’évolution de la citoyenneté, son application

93 « La prison c’est la privation de liberté et rien d’autre », Valéry GISCARD D’ESTAING, 1974, prison de Lyon. 94 Amélioration du contrôle extérieur des établissements pénitentiaire, commission présidée par Guy CANIVET. 95 FAVARD Jean, « Le détenu citoyen », Séance du 22 avril 1989 devant la Société générale des prisons, Revue pénitentiaire et de Droit pénal, 1989, p. 255. Expression réutilisée par Francesco MARTUCCI, Professeur à l’Université de Paris-Assas lors du colloque sur « Les droits de la personne détenue après la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 », in BOUSSARD Sabine (Dir), Les droits de la personne détenue : après la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009, Dalloz, Paris, 2013, 341 pages.

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concrète et sa signification actuelle ont été débattu avec des universitaires, des services civiques

ou encore des CPIP. L’ensemble fut coordonné par une animatrice référente présente à chaque

séance afin d’observer l’évolution du dialogue.

Ces ateliers permettent par ce biais la naissance d’un débat qui entraine un sentiment de

participation à la vie en communauté et à la vie en société. Les participants se confrontent aux

visions des autres participants sur une même problématique afin d’aboutir à une réflexion

commune, voire même une parole commune. Cet échange d’opinions parfois contraires favorise

la discussion et permet la consolidation de la parole. Dans ces débats, il est important que chacun

puisse s’exprimer. L’idée qui aura émergé collectivement sera prise en compte dans la restitution

du travail. Chaque personne pourra ainsi s’approprier ce qui aura été discuté. La personne détenue

passe par ce processus pour appuyer son statut de citoyen96.

Le rôle des intervenants extérieurs est de modérer les débats : ils vont veiller au bon équilibre

des débats, orienter les débats vers le sujet prédéfini et veiller au respect du temps de parole. Cette

rigueur permet de jauger la viabilité du projet. Dans l’exemple du projet rennais, cette absence de

cadre a affecté profondément la dynamique d’expression dans le groupe97. Les activités doivent

dépasser leur « finalité occupationnelle » 98 et devenir de véritables outils de la parole.

Ces ateliers de valorisation de la parole, créant une parole citoyenne, ne peuvent être mis en

œuvre efficacement sans le concours de tous les acteurs du monde carcéral.

B) Une véritable parole par la coopération effective des acteurs

Les ateliers citoyens pilotés par les acteurs extérieurs progressent en détention. Pourtant, sans

une aide des autorités en amont, aucune action ne peut être véritablement mise en place. L’action

du personnel pénitentiaire, à la fois de surveillance, de commandement et de direction, constitue

le support nécessaire à l’exercice de la parole. Didier GIROUD99 met l’accent sur l’importance du

soutien de la direction dans les actions menées auprès des personnes détenues. Il indique en effet

être « très attentif au comportement des uns et des autres, et trouve cela très significatif ». La

volonté progressiste de l’administration permet la réalisation des activités proposées dans de

meilleures conditions. Aussi, l’écrivain et scénariste Francis FEHR, évoquait que sans l’appui de

96 WERCKMANN Françoise, Apprentissage du débat et citoyenneté, Canopé Editions, 2012, Strasbourg, 192 pages. 97 L’influence de certaines personnes détenues sur le groupe, de vives altercations entre les protagonistes ainsi que le manque de neutralité des intervenants extérieurs lors des ateliers, ont amené à repenser le projet. 98 PAYEN-FOURMENT Delphine et MARCEL Cécile, « L’accès aux activités : un parcours d’obstacles », Dedans Dehors, avril 2016, n°91, p. 28. 99 Didier GIROUD, consultant indépendant et intervenant auprès d’organismes du secteur social et médico-social, dans un témoignage donné à la revue Prison justice, n° 107, janvier 2014, p. 14.

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la direction et des services pénitentiaires d’insertion et de probation, son projet d’écriture100 au CD

de Liancourt n’aurait jamais pu voir le jour. La transparence des deux côtés permet la réalisation

d’ateliers libres et qui respectent les contraintes sécuritaires liées à l’incarcération des personnes

détenues. La relation de confiance est essentielle dans la mise en place des ateliers. L’engagement,

la mise à disposition de moyens, la confiance et les encouragements sont nécessaires dans la mise

en œuvre concrète des projets. Cependant, la mobilité des acteurs de l’administration pénitentiaire

peut remettre en cause ces activités pourtant établies de longue date. Xavier DE LARMINAT, qui

s’est intéressé aux peines en milieu ouvert, soulève que les projets dépendent entièrement des

personnes qui les mettent en place101. Ce dernier évoque le problème de changement de personnel

dans les SPIP dans le suivi des relations avec les associations. La recréation d’un lien de confiance

met en suspend les activités.

Enfin, la routine carcérale limite dans certains cas ces expressions citoyennes. Une personne

détenue à la MA de Caen indiquait en effet que « nous ne sommes pas toujours appelés pour aller

aux activités alors que nous sommes prêts »102. La collaboration du personnel de surveillance est

alors indispensable. Cette triple contrainte de coopération des personnels pénitentiaires, des

détenus et des associations est constamment présente.

La société, par son action en détention, encourage la construction et la libération de la parole

citoyenne des personnes détenues. Cet appui extérieur s’illustre aussi par la volonté particulière de

renforcer les droits processuels des personnes détenues. Puisque « un titulaire de droits subjectifs

devient alors un sujet de droit »103, l’affirmation du détenu en tant que justiciable conduit à

l’affirmation du détenu en tant que citoyen. La reconquête des droits processuels a comme

conséquence immédiate le renforcement du droit à l’exercice de la parole citoyenne.

II- L’indispensable reconquête des droits processuels pour l’exercice de la parole citoyenne

Consacrés législativement, « les principes du contradictoire (A) et des droits de la défense

(B) sont passés de l’inconcevable à l’évidence »104. Ces droits au procès équitable, qui impliquent

une expression, fondent les bases d’une parole citoyenne.

100 FEHR Francis, « L’opération écrire enfermé », Prison justice, n°107, janvier 2014, p. 31. 101 DE LARMINAT Xavier, Hors des murs : l’exécution des peines en milieu ouvert, Presses Universitaires de France, Paris, 2014, passim. 102 Témoignage recueilli lors du stage effectué à la MA Caen en décembre 2016. 103 BORDONE Jacques, « Le droit des usagers des services publics », Journal du droit des jeunes, vol. 223, n°3, 2003, p. 26-29. 104 Rencontre-débat 04/03/2014 Orsay, partenariat avec l’association « Comprendre », intervenant Jean-Michel DEJENNE, premier secrétaire du Syndicat national des directeurs pénitentiaires, « La prison, un service public ».

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A) L’introduction du contradictoire : consécration de la parole

La loi du 12 avril 2000 reconnait les détenus comme usagers du service public pénitentiaire

par leur faculté à avoir « un regard critique sur les prérogatives de puissance publique »105, qui

sont « les pouvoirs exceptionnels dont dispose l’administration pour mener à bien sa mission

d’intérêt général »106. Aussi, l’AP s’est métamorphosée afin de respecter les droits fondamentaux

des personnes détenues pour traiter « les détenus comme des citoyens à part entière »107. Les règles

processuelles impliquent les droits citoyens.

Désormais, le détenu est titulaire d’un droit « d’échange »108 avec l’AP109. Ces échanges entre

les usagers et l’administration sont soumis à des règles de procédure strictes110, et notamment au

principe du contradictoire en application de l’article L 121-1 du Code des relations entre le public

et l’administration (CRPA). Ce principe est consacré par l’article 6 de la Conv. EDH111 et est

réaffirmé dans la jurisprudence nationale112. Cette possibilité s’applique aux réclamations initiales,

aux recours113 et aux décisions individuelles prises par l’AP114, ce qui renforce alors la parole de

l’usager et du justiciable. La place centrale dont dispose le détenu consacre son statut de citoyen,

dont le droit à la parole en découle principalement.

Une personne ne peut se voir opposer une décision sans avoir pu « discuter librement des

prétentions, des arguments et des preuves de la partie opposante » 115. L’article 24 de la loi du 12

avril 2000116 permet à la personne de présenter ses observations écrites ou ses observations orales

à sa demande117. Ce droit s’applique dès lors qu’un acte de l’AP restreint l’exercice d’une liberté

105 PÉCHILLON Éric, « La reconnaissance du « détenu-citoyen » », Dedans Dehors, mai 2000, n°19, p. 4. 106 Définition mise à jour le 22 mai 2017, [https://www.service-public.fr/particuliers/glossaire/R10958]. 107 PÉCHILLON Éric, « La reconnaissance du « détenu-citoyen » », op. cit. 108 Terme utilisé dans le CRPA entré en vigueur le 1er juin 2016 dans le livre I. 109 La loi du 12 avril 2000 n°2000-321 se réfère à l’ensemble des services publics, ce qui intègre l’AP. 110 Titre I et II du Livre I du CRPA. 111 Article 6 Conv. EDH : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi […] ». 112 Le principe du contradictoire est consacré comme principe fondamental reconnu par les lois de la République, Conseil d’Etat, 5 mai 1944, Dame Veuve Trompier-Gravier. 113 Les recours peuvent être hiérarchiques (adressés à l’autorité qui dispose de la compétence d’annuler ou modifier une décision en vertu des règles d’organisation à laquelle appartient l’auteur de la décision qui fait grief) ou gracieux (adressés à l’auteur de la décision administrative contestée afin de lui demander de l’annuler ou de la modifier). 114 Les décisions et mesures individuelles prises par l’administration sont celles qui restreignent l’exercice d’un droit, pour le détenu lui-même, ou toute personne en lien avec le service public pénitentiaire. 115 S. GUINCHARD (Dir.), Lexique des termes juridiques, op. cit., p 236. 116 Loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations - Art 24 al 1er abrogé par l’ordonnance n°2015-1341 du 23 octobre 2015 – art 6 « […] les décisions individuelles qui doivent être motivées […] n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. […]. L'autorité administrative n'est pas tenue de satisfaire les demandes d'audition abusives, notamment par leur nombre, leur caractère répétitif ou systématique ». 117 Conseil d’Etat, 26 mars 1982, C-P, n°20569.

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publique, abroge ou retire un droit. La personne détenue a donc la possibilité de déposer une

demande, qui sera entendue, et débattue contradictoirement. Il s’agit à la fois d’un échange mais

aussi d’une confrontation. La personne est reconsidérée positivement en tant que justiciable et est

inclus dans un système qui lui permet de libérer sa parole. Le rapport bilatéral qui permet de

s’exprimer et de se faire entendre occasionne une reconquête des droits citoyens. Le débat

contradictoire va permettre de réintroduire du lien social et du sens dans l’exécution de la peine.

Le détenu-usager dispose alors du plein exercice de sa parole. Aussi, le Comité Européen pour les

Problèmes Criminels a établi en 1977 que « les effets préjudiciables de la privation de liberté

dépendent de l’aptitude à communiquer conservée par le détenu et le droit de décider des questions

le concernant » 118.

Ce développement de la discussion citoyenne est aussi appliqué par l’introduction de l’avocat,

en tant que défenseur et relais de la parole citoyenne.

B) L’avocat comme appui de la parole citoyenne

Le décret n°83-1025 du 28 novembre 1983, portant sur les relations entre l’administration et

les usagers, a entrainé un questionnement sur la place de l’avocat dans les procédures afférentes.

Seulement, cette initiative a fait immédiatement l’objet d’une réserve non-dissimulée du personnel

pénitentiaire qui y voyait une ingérence dans son monde. Cette initiative s’est cependant

développée au début du XXI siècle. La loi du 12 avril 2000 a reconnu ce droit fondamental de

défense par la possibilité de se faire « assister par un conseil ou représenter par un mandataire de

son choix »119 . Cette mise en place a été discutée, notamment par le Conseil de l’Ordre des avocats,

qui craignait une instrumentalisation de l’avocat120.

L’avocat dispose désormais d’un champ d’action par son intervention au prétoire lors des

commissions disciplinaires, dans le suivi des actions lors d’un recours hiérarchique ou gracieux,

ainsi que dans les décisions individuelles portant atteinte à un droit de la personne détenue. Il existe

cependant des limites à ce droit processuel. D’une part, l’avocat n’intervient pas encore dans tous

les domaines et notamment dans les décisions du JAP qui touchent pourtant aux limites de la peine.

D’autre part, l’article R 57-7-16 C. pr. pén relève que « le délai dont [la personne détenue] dispose

pour préparer sa défense, ne peut être inférieur à vingt-quatre heures ». En pratique, la préparation

118 Dossier, « Liberté d’expression : faire sauter la chape de plomb », Dedans dehors, n°3 janvier 2003 p. 8-10. 119 Loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations - Art 24 préc. 120 FAVARD Jean, « Le détenu citoyen », Revue pénitentiaire et de Droit pénal, op. cit., p. 270 : « Pour le barreau, il se serait agi là d’une procédure bien étriquée, de nature à rendre la défense illusoire, voire à la faire considérer comme un alibi ».

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effective entre l’avocat et la personne détenue assistée est souvent très réduite. La réelle

concertation ne se fait généralement que quinze minutes avant le début de la commission de

discipline121. Aussi, tout l’intérêt est de ne pas déformer la parole donnée par la personne détenue,

pour qu’elle soit la plus véridique et la plus exacte possible. Mais, le manque de spécialisation des

avocats dans le domaine carcéral entraîne de graves lacunes dans la transmission de la parole

citoyenne. Le droit pénitentiaire est un droit technique qui demande une grande précision.

L’objectif est alors de renforcer le rôle de l’avocat comme appui de la parole. Il s’agit d’une

aide lors des décisions faisant grief à la personne et mettant en cause ses droits122. Les entretiens

préalables permettent la construction de la parole. La présence de l’avocat permet d’avertir la

personne détenue de l’étendue de ses droits et de ses devoirs, de ce qu’elle peut ou non mettre en

œuvre. Cependant, l’objectif de décloisonnement relève aussi du pouvoir de l’avocat. Il s’agit d’un

intermédiaire de la parole vers l’extérieur. L’avocat est doté d’un pouvoir de retransmission. Par

exemple, un avocat à l’Université de Bretagne Occidentale123 a utilisé ses fonctions d’avocat et

d’enseignant afin de sensibiliser les étudiants sur les questions carcérales, et notamment sur les

conditions de détention des personnes détenues. La parole des personnes détenues s’amplifie.

Enfin, l’accès à l’avocat est plus libre car la question financière n’entre plus en ligne de compte

car chaque personne peut bénéficier d’un conseil sur la base de l’aide juridictionnelle124.

Quiconque dispose du droit de se défendre et donc toute personne a accès à une réelle parole.

Le droit d’exercice de la parole citoyenne retrouve progressivement sa place en détention,

notamment par l’affirmation des droits du justiciable. Mais progressivement, ce sont les personnes

détenues elles-mêmes qui se sont emparées de l’expression tant sa finalité apparaît comme

essentielle dans le parcours d’exécution de la peine.

Section 2 : Les personnes détenues : figures principales de cette parole

La parole citoyenne dépend pleinement de l’implication concrète des détenus, tout d’abord

comme acteurs (I), puis ensuite comme véritable auteurs (II).

121 Ces observations lors du stage à la MA de Caen démontrent une situation encore plus dramatique pour des avocats commis d’office qui ne connaissent pas la personne détenue en amont, et dont ce manque de connaissance est perceptible dans la défense. 122 Par exemple la procédure disciplinaire ou la procédure d’isolement. 123 Les conditions carcérales ont été débattue lors des séances de cours avec Me ELARD, avocat et chargé de TD à l’Université de Bretagne Occidentale, grâce à son expérience auprès de ses clients à la MA de Brest. 124 Historiquement, la première réglementation qui date de 1951 se voyait appliquée aux indigents. Désormais, l’aide juridictionnelle est assurée par la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 et par le décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 relative à l’aide juridictionnelle.

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I- Les détenus, acteurs de leur parcours

L’investissement de la population pénale dans son droit à la parole intègre nécessairement les

personnes concernées dans un parcours citoyen. En effet, la prise de parole effectuée pour la

construction de leur récit, dont font partie leur histoire personnelle et les événements judiciaires,

(A) entraîne leur responsabilisation (B).

A) La prise de parole nécessaire à la construction du récit de la personne détenue

La parole, dans son usage personnel, permet de se raconter lors du procès. La personne revient

alors sur les faits incriminés et son passé personnel. Outre cette fonction de restitution, le fait de

pouvoir s’exprimer en étant écouté fait renaitre le sentiment d’appartenance à la société. La parole

perd son exclusivité personnelle et prend une place citoyenne par l’engagement dans les propos.

Dans cet objectif, l’association La parole est à l’accusé125 permet un accompagnement dans

l’utilisation de cette parole pour que la personne détenue redevienne un sujet de droit à part entière

en vue du procès prochain. Les ateliers en détention proposés aux participants se basent sur

l’explication des droits et devoirs dont chacun dispose, de l’aide à la parole, et sur le saisissement

des opportunités de dialogue. Le fond entre évidemment en ligne de compte, mais c’est la forme

de la parole qui est travaillée. L’appui de l’AP est nécessaire dans la mise en place de ces modules

de préparation qui peuvent être individuels ou collectifs dans l’optique « de construire un lieu de

considération mutuel qui permette une parole plurielle »126. Hélène CASTEL relève que la

maîtrise de ses droits et du langage sont décisifs dans le processus judiciaire127. Aussi, cette parole

permet de devenir acteur de son parcours.

S’être raconté permet de se sentir membre de la communauté. Mais cela encourage parfois

des personnes détenues à contribuer aux ateliers d’expression, non plus dans un but personnel mais

afin d’aider d’autres personnes détenues. Le partage de l’expérience œuvre dans le but de l’intérêt

général. Les rôles sont alors en perpétuelle évolution. La parole est polyvalente car elle permet de

placer une personne en tant que récepteur des procédés d’exercice de la parole, mais aussi en tant

d’instigateur de cette dernière.

125 L’association LAPAC a été fondée en 2009 avec l’appui d’Hélène Castel, ancienne détenue. L’objectif est d’aider à la prise de parole des prévenus lors de leur procès. Un projet pilote a débuté en 2013 à la maison d’arrêt de la Santé à Paris. Informations sur le site [http://larotative.org/la-parole-est-a-laccuse-lapac/] 126 DUCHIRON Elise, « Donner la parole aux prévenus », Témoignages d’Hélène CASTEL et Geoffroy VALADON, Prison justice, janvier 2014, n°107, p. 24. 127 CASTEL Hélène, Retour d’exil d’une femme recherchée, Paris, Seuil, 2009, chapitre XI.

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Cette inclusion des personnes détenues dans la cité permet leur responsabilisation, processus

important dans le parcours d’exécution des peines.

B) L’effet de responsabilisation des personnes détenues

L’article préliminaire de la loi pénitentiaire128 met en avant l’action de l’AP qui doit

« permettre de mener une vie responsable et de prévenir la commission de nouvelles infractions ».

La responsabilisation est au cœur du régime légal et au cœur du parcours du détenu. Chaque

citoyen dispose du droit de s’exprimer, et dans le régime carcéral, cela permet la libération de la

parole face au régime de détention. L’action permet la responsabilisation. C’est l’objectif qui était

posé au sein du Conseil d’orientation stratégique en 2001129 en prévision de la loi pénitentiaire. Le

but était de satisfaire à la RPE 102.1 qui relève qu’« au-delà des règles applicables à l’ensemble

des détenus, le régime des détenus condamnés doit être conçu pour leur permettre de mener une

vie responsable et exempte de crime » 130.

La responsabilisation des personnes détenues peut notamment découler de la participation à

la vie de l’établissement par la mise en place de réunions citoyennes. La première ébauche de cette

expression de la parole provient d’une circulaire Lecanuet du 26 mai 1975. Ce dispositif, autrement

appelé « comité des détenus », permet d’organiser des réunions de concertation entre les personnes

détenues et le personnel pénitentiaire dans l’objectif de promouvoir l’expression, les

revendications, les suggestions ou observations sur une thématique donnée. Les initiatives restent

peu développées en France131 contrairement à ce qui existe dans le monde anglo-saxon. L’initiative

est même obligatoire dans le Service Correctionnel Canadien (SCC) au Canada132. En effet, il est

reconnu que les comités de détenus ont des vertus « éducatives et socialisantes »133. L’intérêt de

ce procédé peut parfois être double lorsque les détenus exercent aussi leur droit de vote en élisant

les représentants des comités. Cette possibilité de vote n’est que peu appliquée en pratique. La

128 Loi pénitentiaire n°2009-1436 du 25 novembre 2009, article préliminaire : « Le régime d'exécution de la peine de privation de liberté concilie la protection de la société, la sanction du condamné et les intérêts de la victime avec la nécessité de préparer l'insertion ou la réinsertion de la personne détenue afin de lui permettre de mener une vie responsable et de prévenir la commission de nouvelles infractions ». 129 Conseil d’orientation stratégique (dit COS) constitué par la Garde des sceaux, Madame Marylise LEBRANCHU le 27 février 2001. Il était chargé de recueillir tous les avis sur les propositions menant à la future loi pénitentiaire. 130 RPE 102.1 de 2006, Chapitre VIII : « Objectif du régime de détenus condamnés ». 131 Des établissements pilotes ont expérimentés la mise en place de ces dispositifs (par exemple à la maison centrale de Saint-Martin-de-Ré) qui prévoient des réunions participatives entre le personnel de commandement ou de direction et la population pénale. 132 Appliqué dans les établissements fédéraux (pour les personnes purgeant une peine d’au moins deux ans d’emprisonnement), les personnes détenues sont élues comme délégués. Le chef d’établissement dispose du droit de destitution si les activités mettent en péril la sécurité de l’établissement ou si le détenu délégué profite de son poste pour parvenir à des fins personnelles. 133 Intervention de VALLOTON André, Dignité et exécution des peines – garde-fous et contrôles, Colloque 2008, Les temps et les lieux, table ronde 4.

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désignation directe par l’administration pénitentiaire elle-même reste le modèle privilégié pour la

constitution des comités de détenus134.

De plus, les comités permettent de tendre vers une réflexion générale sur les conditions de

détention, et de renforcer le sens des responsabilités des personnes détenues. Il s’agit d’avoir un

rôle dans un groupe, de savoir qui est le meneur, qui est le moteur d’un groupe, toutes les places

étant fondamentales. L’intérêt de ces comités est d’exclure les mises en causes personnelles et de

se pencher uniquement sur la parole collective citoyenne. La responsabilisation peut également

s’opérer par la sollicitation des détenus à des questions de politiques pénitentiaires. L’exemple

notable était celui de la conférence de consensus sur la prévention de la récidive qui s’est tenue le

14 et 15 février 2013135. Des porte-parole des personnes détenues ont été divisés en 5 groupes136

pour la préparation de la conférence en amont et par le biais de réunions collectives. La prise en

compte de la parole des personnes détenues pour une question d’intérêt général place les personnes

comme acteurs de leur parcours137. C’est une valorisation de leur expérience dans le débat public

par le constat qu’ils opèrent et l’émission de propositions particulières.

L’AP ne peut ignorer le panel d’outils mis à sa disposition pour favoriser l’exercice de la

parole citoyenne. Cette dernière prend aussi un essor par les détenus en tant qu’acteurs.

II- Les détenus, auteurs de leur parcours

Les personnes détenues s’impliquent dans leur droit à l’exercice de parole citoyenne par

l’utilisation de la médiatisation (A) ou par la sensibilisation après l’exécution d’une peine (B).

A) L’ouverture du discours des personnes détenues à la médiatisation

L’idée de médiatisation du milieu carcéral est fondamentale car elle permet de représenter aux

yeux de la société entière le statut de citoyen des personnes détenues, au même titre que dans le

monde extérieur. Le fait de donner la parole aux « oubliés » fait d’eux de véritables sujets de droit.

L’expression poursuit un intérêt plus global qui est d’attirer l’attention de l’extérieur sur l’univers

134 C’est par exemple le cas à la maison centrale d’Arles qui sélectionne les délégués sur proposition de l’administration ou sur candidature volontaire. Les cadres de commandements et direction peuvent décider de la nomination discrétionnairement ou après étude en CPU. 135 À la demande de Madame Christiane Taubira, alors Garde des Sceaux, la conférence était formée de représentants de la société civile : praticiens, associations, décideurs, usagers, professionnels ou non, qui sont concernés par la question de la prévention de la récidive. 136 Les 5 groupes comportent des personnes volontaires placées sous main de justice (PPSMJ) ou qui l’ont été : maison centrale d’Arles, maison d’arrêt de Bois d’Arcy, puis des groupes de PPSMJ à Paris, de PPSMJ à Dijon et de PPSMJ à Angers. 137 Les personnes détenues sont acteurs de leur parcours par les répercussions que peuvent avoir leur choix sur le parcours pénal de toute personne.

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carcéral, ce lieu inconnu et fantasmé. Même si la forme n’est pas revendicative, c’est pourtant

l’intérêt de la médiatisation.

L’article 41138 de la loi pénitentiaire de 2009 n’évoque qu’en filigrane la question de la

diffusion d’informations par le biais des médias. Le présent article ne s’attache d’ailleurs qu’à

l’énoncé des règles concernant les règles de diffusion ou d’utilisation de l’image des personnes

détenues. A contrario, la REP 24-12 indique qu’« à moins que des raisons impératives ne s’y

opposent au nom de la sécurité et de la sureté, de l’intérêt public ou de la protection des victimes,

des autres détenus et du personnel, les détenus peuvent s’exprimer dans les médias ». Cette règle

est plus précise et elle est appliquée rigoureusement par la Cour EDH qui a indiqué que cette

interprétation doit se faire de « manière étroite », et que la nécessité de restreindre cette liberté

doit être établie de « manière convaincante ». Dans un arrêt du 21 juin 2012 Schweizerische Radio–

Und Fernsehgesellschaft Srg c/ Suisse, la Cour indique qu’une limitation doit répondre à un besoin

social impérieux.

La médiatisation peut se faire par l’intermédiaire d’articles de presse, de films, ou encore de

documentaires. Ce dernier support a été utilisé au CPF Rennes139 afin d’ouvrir la « plus grande

prison pour femmes d’Europe » sur l’extérieur. Cinq femmes détenues volontaires140 ont été

filmées à visage découvert141 pour témoigner de leur quotidien dans les murs de l’établissement,

ainsi que sur la condition carcérale. La direction a soutenu immédiatement ce projet142 en

organisant une douzaine de séances sur six mois pour l’élaboration du reportage. Un simple

contrôle a été opéré par le service communication de la DAP sur le contenu du documentaire.

Il faut cependant faire attention aux conséquences de la médiatisation. En effet une

retranscription par une personne extérieure au monde pénitentiaire peut être ambigüe à cause d’une

méconnaissance antérieure du milieu. Les médias sont ainsi à double tranchant dans la restitution

138 Loi pénitentiaire n°2009-1436 du 25 novembre 2009, art 41, al 1 « Les personnes détenues doivent consentir par écrit à la diffusion ou à l'utilisation de leur image ou de leur voix lorsque cette diffusion ou cette utilisation est de nature à permettre leur identification » et al 2 « L'administration pénitentiaire peut s'opposer à la diffusion ou à l'utilisation de l'image ou de la voix d'une personne condamnée, dès lors que cette diffusion ou cette utilisation est de nature à permettre son identification et que cette restriction s'avère nécessaire à la sauvegarde de l'ordre public […] ». 139 Documentaire réalisé par Eric LEMASSON, « Prison de femmes », diffusion le 21/05/2017 sur TF1 dans l’émission Grands Reportages. 140 La direction a cependant donné son aval sur la candidature des femmes détenues, notamment en prenant en compte le comportement en détention. 141 L’AP avait interdit le témoignage à visage découvert pour le documentaire Le déménagement, sur l’ancien établissement Jacques Cartier. 142 Yves BIDET, le chef d’établissement, témoigne ainsi que « ce projet s’éloigne de l’habituel regard un peu voyeur et on découvre que les personnes condamnées travaillent à leur propre reconstruction ». Propos recueillis par ALLAIN Camille, « Rennes : TF1 s’immisce dans le quotidien des détenues de la prison des femmes », 20 minutes, 21 mai 2017.

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de la parole. La presse jouant sur le sensationnel143, la parole peut être lésée et instrumentalisée.

Cependant, c’est l’image donnée par les médias qui va déterminer la valeur de la parole des

personnes détenues.

Cette ouverture de la prison aux médias peut aussi s’accomplir hors les murs, pour la société

entière, dans une optique de sensibilisation.

B) L’objectif de sensibilisation à l’extérieur du monde pénitentiaire

Bien qu’une liste ne puisse être exhaustive144, il existe plusieurs réactions possibles après un

passage en détention : changer totalement de vie et laisser derrière soit le passé carcéral, décider

de se raconter à travers l’épreuve qui vient d’être vécue ou décider de s’engager activement dans

l’ouverture des portes de la prison par la sensibilisation. Cette sensibilisation est plus importante

après un passage en détention compte tenu de la large possibilité d’action, qui reste plus restreinte

quand une personne est incarcérée.

L’implication post-incarcération se fait par le biais de plusieurs engagements. Ce combat peut

se matérialiser par un investissement dans des associations de défense des droits145. Cela permet

de sensibiliser et d’interpeller sur le milieu carcéral. Sans pour autant narrer son histoire, l’objectif

est de s’inspirer de l’expérience personnelle mais aussi partagée de la population pénale pour

alerter ou informer sur les conditions carcérales. De plus, la parole permet d’aider les personnes

se trouvant dans une situation similaire avec l’implication des « pairs ». Ce dispositif existe au

Canada. Les mentors, qui sont d’anciens détenus, sont recrutés146 pour devenir des intervenants

accompagnateurs en détention. Une formation leur permet d’être sensibilisés aux problématiques

majoritaires en établissement147 mais leur action reste libre. Ils apportent leur soutien aux

participants et engagent un dialogue collectif.

D’autres engagements peuvent passer par le biais d’un investissement dans des associations à

but social. A titre d’exemple, Yazid KHERFI, ancien résident de Mantes-La-Jolie puis ancien

détenu, s’est investi dans l’association Médiation nomade afin « d’aider les jeunes des cités et

d’expliquer aux adultes le cheminement de la violence et de la délinquance »148. Son parcours peut

143 Exemple avec l’ouvrage d’Hélène CASTEL, Retour d’exil d’une femme recherchée, Paris, Seuil, 2009, 244 pages. Elle montre en effet que les journaux ont extrapolé de façon spectaculaire son affaire en la désignant comme terroriste, alors que les faits pour lesquels elle était incriminée ne s’y réfèrent aucunement. 144 C’est l’exemple de la récidive qui est aussi une voie qui peut être empruntée après une incarcération. 145 Par exemple : OIP, la Ligue des droits de l’homme, Robins des Lois. 146 La loi impose un délai de 5 ans après la sortie de prison. 147 Une sensibilisation à l’alcoolisme et à la consommation de stupéfiants permet aux pairs de mieux accompagner les participants. 148 Médiation nomade, Yazid Kherfi, médiateur tout-terrain, [http://www.mediationnomade.fr/lassociation/team/].

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à ce titre se confondre avec le parcours du public qu’il rencontre. Sa volonté est de pousser ces

jeunes à choisir une autre voie. L’idée est de retisser le lien social, pour que l’application de la

citoyenneté soit déjà présente à l’extérieur, et faire prendre conscience immédiatement aux

personnes de leur statut de citoyen. Leur slogan « La parole plus forte que la violence » montre

bien l’importance de l’expression dans la gestion des conflits. Enfin l’initiative « ils sont nous »

soutenue par l’Observatoire International des Prisons (OIP) en 2013 relate les parcours de vie

d’anciennes personnes détenues. Ces témoignages permettent ainsi de faire prendre conscience

aux personnes extérieures du monde carcéral qu’aucun individu n’est à l’abri d’un passage par

cette case149. Toute personne peut devenir détenue, tout comme chaque détenue reste une personne.

Cependant, il faut relever que même si des personnes anciennement détenues décident de

raconter leur histoire dans un objectif de sensibilisation et de prévention, leur parole ne reste que

minime de par l’intérêt parfois limité de la société pour les questions carcérales. La parole

citoyenne ne se limite qu’à l’expression directe par les livres ou les salons militants, moyens qui

n’intéressent qu’une partie de la population civile. Cependant et de plus en plus, les personnes

anciennement détenues sont conviées aux débats150 portant sur les politiques pénitentiaires

générales.

À première vue, la parole semble reprendre progressivement sa place auprès des personnes

privées de liberté, mais il est flagrant que ces droits ne sont que fonction d’un contexte particulier

caractérisé par la sécurité et les contraintes locales. L’équilibre entre droits/sécurité semble rompu

par le régime juridique en vigueur.

149 Le t-shirt porté par les bénévoles de l’OIP lors de salons militants comporte la phrase « en liberté provisoire ». Toute personne peut ainsi être touchée par ce milieu. 150 C’est l’exemple notamment de François KORBER sur la question du droit de vote, Yazid KHERFI en février 2017 à Matignon en présence du Premier ministre Bernard CAZENEUVE.

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PARTIE II

Une parole pourtant neutralisée par la privation de liberté

L’idée d’« institution totale » 151 qu’est la prison est encore forte aujourd’hui du fait de son

organisation singulière. En effet, ce milieu affecte par essence la reconnaissance des droits de la

population pénale menant ainsi à une parole que l’on peut considérer comme illusoire (Chapitre

1), à l’origine d’une pratique d’exception pérenne (Chapitre 2).

Chapitre 1 : Les marqueurs d’une parole illusoire

Les établissements pénitentiaires, très ancrés dans une logique sécuritaire (Section 1), restent

au cœur d’un système archaïque, dans lequel perdurent des lacunes intemporelles (Section 2).

Section 1 : La sécurité au-delà de la liberté

Le droit pénitentiaire est en constante recherche d’équilibre entre attentes de liberté et

impératif de sécurité. Giorgio AGAMBEN soulève l’instabilité de ce balancier car « l’impératif

de sécurité permet aux autorités de gouverner les populations au prix d’atteintes majeures aux

libertés »152. Cette limitation passe inévitablement par l’instauration d’un régime préventif (I), qui

mène à une application des droits purement dérogatoire (II).

I- La persistance d’un contrôle a priori

La mission de sécurité qui incombe à l’administration (A) est à l’origine d’une limitation des

moyens d’extériorisation de la parole citoyenne (B).

A) L’objectif sécuritaire de l’administration pénitentiaire

Dans le chapitre 1er de la loi pénitentiaire, relatif aux missions et à l’organisation du service

public pénitentiaire, l’article 2 de la loi153 identifie les trois prérogatives de l’administration

pénitentiaire : l’insertion ou la réinsertion, la prévention de la récidive, et la sécurité publique.

Cependant, à la lecture plus précise du texte dans son ensemble, chaque disposition relative aux

droits et devoirs de la personne détenue se trouve conditionnée par l’optique sécuritaire. Les

151 GOFFMAN Erving, Asiles : Études sur la condition sociale des malades mentaux, Minuit, Paris, 1998 (1968 Première Edition), 447 pages. 152 AGAMBEN Giorgio, « Sécurité contre libertés », Manière de voir, vol 140, n°4, 2015, p. 97. 153 Loi pénitentiaire n°2009-1436 du 25 novembre 2009, art 2 : « […] Il [Le service public pénitentiaire] contribue à l'insertion ou à la réinsertion des personnes qui lui sont confiées par l'autorité judiciaire, à la prévention de la récidive et à la sécurité publique dans le respect des intérêts de la société, des droits des victimes et des droits des personnes détenues […] ».

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articles 22 et 26154 de cette même loi formalisent les restrictions qui ne peuvent résulter que « des

contraintes inhérentes à la détention, du maintien de la sécurité et du bon ordre des

établissements ». La CNCDH relève toutefois que « le principe de libre communication des idées

et des informations ne doit pas souffrir d’exception en milieu carcéral, autres que celles prévues

par l’article 10 de la Conv. EDH »155. Il convient néanmoins de noter que la disposition de la

Conv. EDH relative à la liberté d’expression (l’article 10) évoque très vaguement les « mesures

nécessaires » qui peuvent restreindre ce droit156. La jurisprudence a cependant tenté de délimiter

cette notion. La Cour, dans l’arrêt du 26 novembre 199, Observer et Gardian c/ Royaume-Uni,

précise que « l’adjectif nécessaire au sens de l’article 10 paragraphe 2 implique un besoin social

impérieux ». Aussi, le moyen utilisé par les Etats se doit d’être proportionnel au but recherché157,

et cela même dans les domaines touchant à la sécurité158. La Cour effectue un contrôle in concreto

des mesures prises en analysant la nature de la restriction à la liberté d’expression à sa protection

posée par l’article. Malgré cela, en pratique, la mission de sécurité prend largement le pas sur les

autres missions. L’AP motive a minima ses décisions en invoquant ces notions vagues comme

arguments d’autorité. Ce mécanisme affaiblit les droits des personnes détenues. La personne ne se

sent alors pas écoutée dans sa parole quand aucune justification ne lui permet de comprendre la

restriction imposée.

De plus, dans un souci de maintien de l’ordre, le système pénitentiaire s’est doté d’un arsenal

disciplinaire menaçant toute formation de la parole citoyenne. La simple communication partagée

peut se retrouver anéantie tant la dimension collective en prison est prohibée. La formulation de la

faute disciplinaire consistant à « participer à toute action collective de nature à perturber l’ordre

de l’établissement » 159 semble pouvoir s’appliquer à toute réunion, même pacifique, compte tenu

de l’imprécision des termes employés. Ce contrôle permanent est réducteur de toute parole. Il

existe donc un conflit d’intérêt car l’AP se positionne sur cette notion d’ordre et de sécurité, et agit

en même temps comme juge et partie.

154 Loi pénitentiaire n°2009-1436 du 25 novembre 2009 – Titre I « Dispositions relatives au service public pénitentiaire et à la condition de la personne détenue » – Chapitre III « Dispositions relatives aux droits et devoirs des personne détenues ». 155 Rapport CNCDH sur les droits de l’homme en prison, Commission C – Septembre/décembre 2003. 156 Arrêt n°27273/95 du 23 septembre 1998, Petra c/ Roumanie : « les dispositions internes applicables en matière de contrôle de la correspondance des détenus […] laissent aux autorités nationales une grande latitude ». 157 Arrêt n°9063/80 du 24 novembre 1986, Gillow c/ Royaume-Uni : « La notion de nécessité implique un besoin social impérieux ; en particulier, la mesure prise doit être proportionnée au but légitime poursuivi ». 158 Arrêt n°9248/81 du 26 mars 1987, Leander c/ Suède : « La Cour doit se convaincre de l’existence de garanties adéquates et suffisantes contre les abus car un système destiné à protéger la sécurité nationale crée un risque de saper, voire de détruire, la démocratie au motif de la défendre ». 159 L’article R 57-7-1 3° C. pr. pén. est relatif au fait de se réunir lorsque l’action est précédée ou accompagnée de violences et l’article R 57-7-2 7° C. pr. pén est relatif à cette même action sans violence.

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Cependant, une utilisation massive de sécurité n’est pas gage de maintien de l’ordre car

lorsque les mutineries de 1970 ont éclaté160, la sécurité mise en place était considérée comme

« rigoriste et pointilleuse » 161. Inévitablement, les réactions à un régime total ont emprunté une

forme extrême de violence pour que soit entendue les revendications collectives des personnes

détenues qui concernaient majoritairement les conditions de détention. Ce moyen permet

d’imposer sa parole, pour qu’elle soit écoutée et considérée162. Ce mouvement de rébellion163 fait

l’objet d’une répression aggravée par sa commission en réunion164 lorsque les auteurs sont

détenus165. Le 17 août 2017, neuf détenus ont été condamné à une peine allant d’un an à deux ans

d’emprisonnement ferme suite à une émeute menée début août au centre pénitentiaire de Baie-

Mahault166. La parole reste un outil de gestion de la détention qui permet d’éviter cette forme de

violence. Aussi, l’argument répressif n’est donc pas viable.

L’omniprésence sécuritaire n’est pourtant pas remise en cause sérieusement167. Celle-ci

entraîne une limitation des moyens d’extériorisation, c’est-à-dire de la capacité à donner une réalité

à la parole de chaque personne détenue.

B) Les limitations des moyens d’extériorisation de la parole citoyenne

Les limitations à l’extériorisation peuvent s’appréhender sous plusieurs angles. Tout d’abord

dans une cadre purement carcéral, l’adoption de la loi pénitentiaire en 2009 a restreint

considérablement les possibilités de la parole des PPSMJ. La rédaction de l’article 29168 de la loi

a été pensée en référence à la RPE 50169, elle-même écrite en fonction d’une version

160 En décembre 1971, une révolte éclate à Toul suite aux suppressions des colis de Noël et à la multiplication des sanctions. En 1974, une vague de mutineries s’ensuivent à Clairvaux, Nîmes, Saint-Martin-de-Ré et Muret. Les détenus contestent les conditions d’incarcération (surpopulation carcérale, vétusté des bâtiments, problèmes d’hygiène) et l’omniprésence du répressif et de la violence. Cf DROLC Nicolas, Sur les toits, Les mutins de Pangée, Documentaire, 2013, 95 mn. 161 La Commission d’enquête sur les mutineries de Toul présidée par Robert SCHMELCK en 1972 sur demande du Garde des Sceaux, René PLEVEN faisait référence au régime strict de fouilles instauré à Toul. Ce rapport a amené une réforme des prisons. 162 Le même évènement s’est reproduit au CP de Valence en septembre et novembre 2016 pour la contestation du régime strict mis en place (fouilles permanentes et déshumanisation par la prison moderne). Cf JACQUIN Jean-Baptiste, « À Valence, deux mutineries révélatrices des failles des prisons ultramodernes », Le Monde, 22 mars 2017. 163 Article 433-6 C. pén : « Constitue une rébellion le fait d’opposer une résistance violente à une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public […] ». 164 Article 433-7 al 2 C. pén : « La rébellion commise en réunion est punie de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 € d’amende ». 165 Article 433-9 C. pén : « Lorsque l’auteur de la rébellion est détenu, les peines prononcées pour le délit de rébellion se cumulent […] ». 166 « Des peines supplémentaires pour les détenus impliqués dans la mutinerie de la prison », France Info, Guadeloupe 1ère, 18/08/2017. 167 Voir infra sur la construction des nouveaux établissements pénitentiaires ultra-sécurisés (Partie II, Chapitre I, Section 2, II, B). 168 Loi pénitentiaire n°2009-1436 du 25 novembre 2009, article 29 préc. 169 RPE 50 : « Sous réserve des impératifs de bon ordre, de sûreté et de sécurité, les détenus doivent être autorisés à

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préliminaire170. Cependant, sa richesse a connu un certain amenuisement progressif dû aux

différentes versions. On passe dès lors dans la version première des RPE des questions d’intérêt

commun (ie parole) aux simples activités (ie simple consultation) dans la loi pénitentiaire. L’effet

non-contraignant des RPE a permis de laisser une marge d’application aux Etats qui, ici, se révèle

néfaste. La version simplifiée finalement adoptée en France et liée à des questions de sécurité

limite l’extériorisation collective de la parole.

Cette limitation s’effectue aussi par l’extériorisation stricto sensu, en dehors des murs. Il est

inutile de revenir sur le droit à la vie privée et familiale171 qui se réfère à une parole personnelle et

qui n’est pas remise en cause par la CEDH. Cependant, se pose la question de la censure lorsque

le témoignage d’une personne détenue doit faire l’objet d’une diffusion à l’extérieur172. De

nombreux obstacles s’opposent aux détenus. La parole est conditionnée à des autorisations de la

direction, ce qui entraîne un découragement dû à la procédure administrative en vigueur. De plus,

même en procédant en toute légalité en saisissant les autorités en vue de la divulgation d’une

revendication écrite, la direction interrégionale des services pénitentiaires (DISP) se réserve le

droit de retenir l’écrit et ainsi d’interdire sa publication. Les personnes détenues qui se voient

censurées, utilisent alors des moyens détournés pour pouvoir s’exprimer, par le biais des parloirs

ou des codétenus173. La réaction de l’AP est immédiate et plus rigoureuse et tend à sanctionner

disciplinairement les personnes pour ainsi couper cette parole. Aussi, la parole est admise à titre

personnel, mais reste restreinte quand elle devient citoyenne. Le processus d’intégration et

d’insertion sociale auquel participe la parole citoyenne est alors très vite oublié.

Ce contrôle rigoureux des institutions mène à un « mutisme contraint » 174 du détenu citoyen

par « crainte de la parole des détenus » 175 . Cette méfiance conduit en pratique à une application

dérogatoire des droits des personnes détenues.

discuter de questions relatives à leurs conditions générales de détention et doivent être encouragés à communiquer avec les autorités pénitentiaires à ce sujet ». 170 Version préliminaire de la RPE 50 : « Sous réserve des impératifs de bon ordre, de sûreté et de sécurité, les détenus doivent être autorisés à se réunir pour débattre des questions d’intérêt commun. Les autorités pénitentiaires doivent encourager les comités représentant les détenus à communiquer avec elles concernant les modalités d’emprisonnement ». 171 Article 8 Conv. EDH : Droit au respect et à la vie privée et familiale 172 François KORBER, ancien détenu, faisait l’objet d’un contrôle systématique de ses écrits et de ses communications téléphoniques. C’est par des moyens détournés (parloirs notamment) qu’il faisait sortir ses témoignages. 173 Les codétenues peuvent faire passer des manuscrits ou tout autre document pour le compte d’une autre personne. Le procédé est mis en place si le codétenu fait l’objet d’une moindre surveillance. C’est l’utilisation des parloirs ou des courriers par exemple. 174 Groupes GENEPI de Fresnes, Villepinte et la Santé « Une parole prisonnière », Passe-Murailles, n°25, juillet-aout 2010, p. 21-22. 175 GIROUD Didier, témoignage « Recueillir les points de vue des personnes placées sous main de justice », Prison justice, numéro 107, janvier 2014, p.14.

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II- Une application des droits purement dérogatoire

La personne détenue, de par son incarcération, perd bien souvent l’exercice complet de sa

citoyenneté (A) et risque, avec l’exercice de sa parole, d’être l’objet de sanctions cachées (B).

A) Une utilisation du droit limitée du fait du statut des personnes détenues

En tant qu’usager du service public pénitentiaire, les personnes détenues disposent de larges

prérogatives face à l’administration référente depuis la loi du 2 avril 2000 relative aux droits des

citoyens dans leurs relations avec les administrés. Bien que ce lien ne soit pas volontaire, tout

administré dispose de la possibilité de s’exprimer en vue de contester n’importe quelle décision

prise à son encontre ou toute mesure d’organisation du service176. Les possibilités de recours leur

sont ouvertes. C’est le fait pour les personnes détenues de demander le respect d’un de leur droit

devant un tribunal. Le requérant doit avoir un intérêt personnel pour agir, mais cette action devient

citoyenne car elle poursuit souvent par ailleurs un but « d’assainissement de l’ordonnancement

juridique »177. Le recours œuvre en faveur de l’intérêt général et l’usage de la parole prend un sens

plus militant puisque c’est le souhait qu’un droit soit réellement respecté, pour tout le monde, et

de façon efficiente dans l’avenir. Le but est de faire évoluer le droit, sur une base clairement

individuelle mais qui est profitable à la communauté toute entière. Les médiatisations juridiques

permettent une prise de conscience plus générale par tous les citoyens extérieurs.

Cette possibilité, auparavant inexistante, est le fruit d’une large évolution débutée à partir de

la fin du XXe siècle. Des recours sont maintenant possibles et permettent une entrée du droit dans

le monde carcéral pour l’expression individuelle visant l’intérêt général. Depuis l’arrêt

d’Assemblée Marie du 17 février 1995, le juge administratif s’octroie la possibilité de contrôler

l’activité pénitentiaire par le biais de ce qui relève ou non des mesures d’ordre intérieur (ie qui

relève uniquement du pouvoir discrétionnaire de l’autorité pénitentiaire). Le juge se base sur la

nature et/ou sur les effets de la mesure178. Le CE a désormais clarifié sa jurisprudence sur cette

notion et intervient dès lors qu’une décision cause un grief à l’intéressé. Même si cette possibilité

existe, dans les faits, le plus souvent une pratique dérogatoire s’applique car cette notion reste au

176 Arrêt Conseil d’Etat, 21 décembre 1906, Syndicat des propriétaires et contribuables du quartier Croix-de-Seguey-Tivoli : « L’usager d’un service public de transport a automatiquement un intérêt à contester les mesures du service ». 177 L’assainissement de l’ordonnancement juridique est le pincipe qui permet d’ajouter ou de retirer quelque chose à l’état du droit. L’arrêt du Conseil d’Etat le 21 octobre 1988, Eglise de Scientologie de Paris, pose cette condition dans le recours. 178 Cette position a été affinée par la jurisprudence du Conseil d’État, notamment avec l’arrêt du 30 juillet 2003, Remli, sur la question de l’isolement, et par les arrêts du 14 décembre 2007, Boussouar, Planchenault et Payet.

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cœur d’une appréciation discrétionnaire179. Cette flexibilité justifiée par la nécessité de répondre à

des situations concrètes et de maintien de l’ordre reste génératrice d’insécurité juridique.

Quand bien même la parole est donnée sur le principe en vue d’une contestation dans un but

commun, en pratique, peu de personnes détenues s’en saisissent et l’utilisent dans ce but.

B) Le risque de sanctions cachées

Dans un univers de domination, les entraves implicites à la parole sont monnaie courante. Des

sanctions actives ou passives peuvent être de différentes natures. Lorsqu’elles sont disciplinaires,

ces sanctions sont susceptibles de faire l’objet d’un contrôle par la CEDH. Dans un arrêt Yankov

c/ Bulgarie, rendu le 11 décembre 2003, il a été jugé que l’équilibre entre le droit à la liberté

d’expression et la nécessité de protéger la réputation des fonctionnaires avait été rompu. En

l’espèce, le requérant, qui avait constitué un manuscrit de remarques critiques sur l’institution

carcérale, avait été sanctionné au niveau disciplinaire par les autorités pénitentiaires. La violation

de l’article 10 Conv. EDH a donc été constatée par la disproportion de la réponse. En pratique, la

crainte de passer devant la commission de discipline pèse sur la parole citoyenne libérée.

De plus, la notion de sanction cachée tend à sanctionner une personne par un moyen alternatif

non prévu légalement en réponse à une parole estimée critique. Dans le domaine infra-

disciplinaire, les rotations de sécurité, parfois surnommées « tourisme pénitentiaire », constituent

un moyen pour sanctionner une personne détenue, lorsqu’elle perturbe la vie en détention ou

lorsqu’elle dérange dans sa parole. Cette procédure dérogatoire reste entièrement admise même si

les motivations de transfert sont souvent vagues180. La procédure sera rapidement mise en place

pour tenter de réduire au silence les personnes. Certaines sanctions sont directement liées à la

parole citoyenne, notamment par les interdictions de parloir, les contrôles poussés des appels

téléphoniques ou la lecture systématique des courriers. Ces atteintes peuvent se justifier en cas de

sanction disciplinaire181 ou en cas d’inscription sur le registre des détenus particulièrement

surveillés182. Néanmoins, les espaces d’expression sont réduits à néant.

179 Par exemple, la décision de changement de cellule reste une mesure d’ordre intérieur, non susceptible de recours. 180 Les droits processuels ne s’appliquent pas si la personne détenue n’encourt pas d’atteinte à ses droits ou d’aggravation de son régime de détention par la décision de transfert. De plus, dans l’arrêt Payet c/ France du 20 janvier 2011, la Cour EDH relève que « compte tenu du profil, de la dangerosité ou du passé du requérant, les autorités pénitentiaires ont ménagé un juste équilibre entre les impératifs de sécurité et l’exigence d’assurer au détenu des conditions humaines de détention ». L’utilisation des motifs d’ordre et de sécurité est alors aisée. 181 Cf Article R 57-7-34 3° C. pr. pén : « La suppression de l’accès au parloir sans dispositif de séparation pour une période maximum de quatre fois ». 182 Cf Article D 276-1 C. pr. pén : « En vue de la mise en œuvre des mesures de sécurité adaptées, le ministre de la justice décide de l’inscription et de la radiation des détenus au répertoire des détenus particulièrement signalés ».

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Les sanctions cachées peuvent être utilisées pour protéger l’administration, ou a contrario,

dans un esprit de représailles. Le CGLPL, dans son rapport annuel de 2013 évoque la figure du

détenu procédurier, victime récurrente de ces sanctions cachées. Il relève qu’« on oppose aux

procéduriers les détenus effacés : ils ont compris que si on voulait survivre en détention, il ne

fallait pas protester ; sous peine de devoir le payer » 183. Ces sanctions occultes en guise de réponse

à une parole citoyenne exprimée provoquent « un sentiment de frustration chez les détenus : ils ne

se sentent plus écoutés ».

Cette logique sécuritaire contemporaine ne peut à elle seule expliquer cette limitation de la

parole. Des lacunes intemporelles en sont une cause directe.

Section 2 : Un système aux lacunes intemporelles

La rigidité du système carcéral provient, d’une part, de la persistance d’un frein à l’admission

de la parole citoyenne (I), et, d’autre part, d’une logistique lacunaire (II).

I- La persistance d’un frein à la parole libérée

Le développement des droits des personnes détenues, au-delà de leur application matérielle,

est confronté à de fortes réticences internes (A), et externes (B).

A) Une réticence interne à la reconnaissance d’un droit à la parole

Les slogans brandis par les syndicalistes lors des manifestations du personnel pénitentiaire en

1985 et en 1986184 contestaient l’octroi de nouveaux droits à la population carcérale. En effet, « les

surveillants ont pu comparer, parfois, les évolutions (…), et constater que ces évolutions étaient

plus rapides du côté de la population pénale alors que les contraintes les concernant

s’accentuent »185. Les agents y voient ainsi une « guerre au maton »186. Cette perpétuelle

comparaison entre droits des uns et droits des autres est à l’origine d’une réticence institutionnelle

au développement de la parole citoyenne. Pourtant, cette dichotomie est pourtant plus complexe.

183 Rapport annuel d’activité du CGLPL de 2013 rendu public lors d’une conférence de presse le 11 mars 2014, propos de Jean-Marie DELARUE sur la situation des détenus « procéduriers », p. 271. 184 Entre 1983 et 1985, la télévision est introduite en cellule, les parloirs sont désormais sans dispositifs de séparation, et les Quartiers de Haute sécurité sont supprimés. Suite à ces réformes, les syndicalistes (SNP-FO, UGSP-CGT) manifestent avec les slogans « Trop de droits pour le détenu, pas assez pour le surveillant » ou « Le personnel pénitentiaire est sacrifié aux détenus ». Le 8 octobre 1988, un accord de fin de grève est signé avec Gilbert BONNEMAISON, le médiateur nommé par la République. 185 DELLISTE Jimmy, entretien, « Freinages pénitentiaires », Dedans Dehors, n°79 mars 2013, p. 46. 186 FAVARD Jean, « Le détenu citoyen », Revue pénitentiaire et de Droit pénal, juillet-septembre 1989, p. 255.

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En effet, l’amélioration187 de la parole des personnes détenues entraîne une valorisation188 des

conditions de travail189 des agents pénitentiaires. La pression instaurée à cause de ce conflit mène

parfois au ralentissement de projets phares190 ou à leur abandon191.

Au-delà de ces objections syndicales, la vie quotidienne en établissement transmet cet règle du

silence. Les conceptions rigides de certains agents interdisent toute prise de parole des personnes

détenues (« Normalement on ne dit pas ça »192). Néanmoins, le système de protection des

personnels pénitentiaires par la hiérarchie reste fort193. Ces atteintes informelles à la parole des

personnes détenues ne sont ainsi pas condamnées.

Il faut se préoccuper de savoir si les personnels pénitentiaires sont formés aux dispositifs de

prise de parole citoyenne lors de leur formation, qu’elle soit initiale ou continue194, à l’ENAP. Le

corpus de cours commun permet des enseignements variés et notamment sur les droits et devoirs

fondamentaux des personnes détenues195. Cette formation est parfois considérée comme non-

prioritaire face à d’autres enseignements196 considérés comme plus importants. De plus, la théorie

187 VACHERTET Marion, « Relation sociales en milieu carcéral. Une étude des pénitenciers canadiens », Déviance et Société, 2002, n°26, p.83-104 : « Il ressort que le développement des droits montre une évolution dans les rapports de force survenant entre les membres de chacun des deux groupes ». 188 Lors du mouvement de blocage des EP français le 4 mai 2009, les surveillants pénitentiaires ont demandé une « amélioration de leurs conditions de travaillent et refusent d’être réduit à de « simples porte-clefs »» (« Pour ne pas être de « simples porte-clefs » », L’Obs, 7 mai 2009.). Le syndicat SNEPAP-FU souligne en 2013 lors des travaux d’une mission d’information sur les moyens de lutte contre la surpopulation carcérale devant l’AN que « les surveillants en sont réduits à gérer les flux plutôt que des individualités ». Aussi, avec l’amélioration des droits des personnes détenus, les agents ne sont plus réduits à ce rôle puisqu’un autre travail, plus social, s’y ajoute. 189 L’usage de la parole entraîne moins de violence à gérer en détention et donc un travail plus apaisé – cf Partie I, Chapitre I, Section 1, II, A. 190 Par exemple, le travail de retranscription des RPE en France a été ralenti en 2007 sous la pression syndicale. La volonté des syndicalistes était d’obtenir une application a minima des règles. (FARAPEJ, « Expression collective, prisons et associations », Perspectives pour une réflexion inter-associative, [http://www.farapej.fr/Documents/Presentation_GDT_Expression.pdf]). 191 Un projet d’expression collective des détenus (échanges entre population pénale et direction) avait démarré en novembre 2010 sur 10 sites. Après la période d’expérimentation, le bilan était mitigé, et le comité du projet a été dissout. En effet, Barbara LIARAS note que « Il semble que les pressions des syndicats pénitentiaires aient été si fortes que la tentative de mettre en place des espaces de dialogue avec les prisonniers ait été abandonnée ». (LIARAS Barbara, « Expression en prison : la parole disqualifiée », Dedans Dehors, n°79, mars 2013, p.31-32.) 192 Propos entendus lors d’un entretien à la MA de Caen entre un agent gradé et une personne détenue en décembre 2016. 193 Lors des stages à la MA de Caen et au CFP Rennes, il a pu être observé que la parole des agents pénitentiaires a une force plus probante que celles des personnes détenues lors de la commission d’une faute disciplinaire par exemple. 194 Décret n°2010-1711 30 décembre 2010, Article 26 du Code de déontologie du service public pénitentiaire : « l’AP fournit à son fonctionnaire les moyens de remplir ses obligations de formation (…). Elle vieille notamment à lui assurer, avant sa prise de fonctions, une formation sur les principales règles nationales et internationales relatives à la protection des droits de l’homme ». 195 Les enseignements des agents pénitentiaires concernent l’apprentissage des droits fondamentaux, des droits catégoriels, et de la loi pénitentiaire de 2009 qui a défini ces droits et devoirs. 196 FRAYER Arthur, Dans la peau d’un maton, Fayard, Paris, p. 66. Il se réfère à une anecdote expliquée par un professeur à l’ENAP. Le cours consacré aux droits de l’homme avait été supprimé car il était considéré comme non-prioritaire face aux autres enseignements, mais il a été rétabli pour être filmé pour un reportage consacré à l’école.

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de ces droits se confronte à la pratique du terrain197. Cependant, c’est avec une formation précise,

complète et suivie que le personnel acquerra une certaine aisance dans ces pratiques.

Bien souvent, cette réserve dans le cadre de l’activité professionnelle provient d’une confusion

avec l’opinion personnelle. Il est par ailleurs possible d’entendre dire par des agents pénitentiaires

que « faire entrer la culture en prison c’est ridicule, inutile, ces gens-là ne le méritent pas ! »198.

Une réticence externe apparaît ainsi.

B) Une réticence externe à la reconnaissance d’un droit à la parole

L’idée souvent répandue hors les murs est que « réfléchir au respect de la dignité des

personnes détenues équivaut à une perte de temps » 199. Ce rejet des personnes incarcérées qui peut

être exprimé200 est dû à la volonté d’une double peine201, considérée comme la conséquence

logique de la commission d’un acte délinquant. Il existe l’avis que les détenus « doivent payer »

par la prohibition de certains de leurs droits. Les résistances sont ancrées dans les esprits.

Cette vision restrictive largement partagée provient de ce que Robert Badinter a nommé la loi

d’airain de la prison. Il indique qu’« on ne peut pas, aux yeux de l’opinion publique, élever la

situation de détenu au-dessus de la condition du travailler libre le plus précaire »202. C’est le

constat que fait Simone VEIL en indiquant que « dans la longue marche nécessaire pour placer

le système carcéral français à un niveau convenable et respectable, les bonnes volontés se

heurtaient à un obstacle plus difficile encore à vaincre que les contraintes budgétaires : l’état de

l’opinion »203. Ce principe est la base de la réticence extérieure. Comme le rappelle Isabelle

MANSUY, l’objectif n’est pas d’obtenir des droits supérieurs pour les personnes détenues, mais

de faire en sorte que « les droits fondamentaux ne soient pas violés lors de l’incarcération »204.

De fait, l’impact de la société extérieure est crucial dans l’évolution du régime carcéral. Son

rôle clef se doit d’être mis en avant car rien ne peut être réformé en profondeur sans l’adhésion

197 « J’ai vu tout ce qu’on m’a dit de ne pas faire », propos recueillis par FRAYER Arthur, « Dans la peau d’un maton », op. cit., p. 58. 198 FEHR Francis, Propos recueillis par, « L’opération écrire enfermé », Prison justice, n° 107, janvier 2014, p. 31. 199 DUHAMEL Rosine, Témoignage, « La Croix-Rouge, à l’écoute des détenus ». Prison Justice, n° 107, octobre 2014, p. 18. 200 « Intéressez-vous à des causes plus louables », propos qui m’étaient adressés lors d’une sensibilisation extérieure dans le cadre du GENEPI dans les rues de Brest en 2013. 201 La volonté de la société extérieure est d’avoir simultanément une peine de condamnation et une peine infligée de par les conditions d’incarcérations ou par la limitation des droits. 202 Audition de M. Robert BADINTER lors des auditions de la commission d’enquête parlementaire sur la situation dans les prisons françaises, commission présidée par Louis MERMAZ, rapport déposé le 28 juin 2000. 203 Simone Veil, Une vie, Le livre de Poche, 2009. 204 MANSUY Isabelle, La protection des droits des détenus en France et en Allemagne, L’Harmattan, coll, Bibliothèque de droit, 2007, p. 43.

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des citoyens. Ivan ZAKINE indique qu’il faut faire comprendre « que la prison est une institution

de la société, qu’aucun citoyen ne doit s’en désintéresser et pas seulement quand un événement

dramatique apparaît sur les écrans de la télévision ou à la première page de certains

journaux »205. Il est important de rappeler au plus grand nombre qu’« une société se juge aussi à

l’état de ses prisons et au traitement de ses détenus »206 et que donc le monde carcéral relève de

la responsabilité de tous.

À ces freins internes et externes s’ajoute les difficultés liées à la logistique matérielle des

établissements pénitentiaires.

II- La parole citoyenne limitée par la logistique carcérale

Les murs s’opposent à l’expression citoyenne : très limitée en maison d’arrêt (A), c’est

l’architecture même qui est à l’origine des plus grandes restrictions à la parole citoyenne (B).

A) L’impossible expression en maison d’arrêt

Le régime maison d’arrêt est un régime particulier car les personnes sont confinées en cellule

le plus souvent, et ne peuvent en sortir que pour les activités ou les entretiens207. Elles sont

enfermées pour des durées pouvant aller de 21 heures à 24 heures. Les mouvements sont, de fait,

limités. Le Comité pour la Prévention de la Torture (CPT) reconnaît que les conditions matérielles

de détention varient selon les établissements208, mais souvent ce système entraîne une

désocialisation et une déresponsabilisation des personnes détenues. De plus, en comparaison avec

les établissements pour peine, les maisons d’arrêt ne disposent que d’une offre minime d’activités

proposées. Le profil pénal des personnes incarcérées ne pousse pas les autorités à en mettre

davantage en place car ne sont souvent effectuées que de courtes peines de moins de 2 ans. À ces

faibles propositions, s’ajoute parfois l’indifférence des personnes détenues quant aux activités209.

Cette résistance passive est d’autant plus notable pour les personnes ayant le statut de prévenu qui

ne peuvent s’inscrire dans un parcours avancé d’exécution des peines.

205 Séance de section du 22 avril 1989 devant la Société générale des prisons et devant la commission sur la notion du détenu citoyen. 206 BADINTER Robert, Humaniser et moderniser : bilan des réformes de Robert BADINTER, École nationale de l’administration pénitentiaire, service documentation, 1985, 3 pages. 207 Les entretiens peuvent se réaliser avec le SPIP, le service médical, le personnel de direction ou de commandement etc. 208 MARCEL Cécile, « Conditions indignes de détention : une énième mise en garde de l’Europe », Revue de l’Observatoire International des Prisons Section Française, n°96, juillet 2017, p. 5. 209 En pratique, au CFP de Rennes, les femmes détenues disposent d’un très large panel d’activités proposées qui apparaît comme unique en France. Cependant, certaines personnes détenues ne sont pas investies dans ces activités et bien souvent, ce sont les agents pénitentiaires gradés qui imposent aux personnes détenues de participer à ces activités.

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Le régime en maison d’arrêt limite les avancées souhaitées par le droit français. Les élections

des représentants pour les comités de détenus sont impossibles. En effet, compte tenu des rotations

continues de la population pénale, le projet impliquerait des élections régulières pour des mandats

à court terme. Cette procédure relève de l’impossible pour une question d’organisation et de

moyens. De plus, le phénomène de la surpopulation carcérale est le plus présent dans ces

établissements. Aussi, le partage de la cellule parfois à 2, 3 ou 4 personnes constituent une atteinte

à l’espace propre du détenu210. L’organisation spatiale entraine une limitation dans l’expression.

Anne-Julie AUVERT souligne bien que « le peu d’espace dont dispose les prisonniers produit des

effets sur la manière dont les individus se sentent considérés, et par conséquent sur leur

identité »211. Le confinement de l’espace se traduit inévitablement par le confinement de la pensée

et donc la restriction de la parole.

Ces politiques sont aussi discutables dans la commande initiale donnée pour la construction

des établissements, source de limitation primaire de la parole.

B) De forts obstacles architecturaux

La construction conditionne pleinement l’exercice de la parole. Les EP sont avant tout pensé

dans leur fonction : pourquoi et comment construire212 ? Cela interroge sur la « symbolique »213

même de la construction. Le travail de l’architecte est alors de réaliser les plans d’un établissement

selon le programme qui lui a été confié214. Il dispose par la suite d’une certaine liberté dans la

réalisation concrète du projet. Mais cette réalisation conditionne de fait la future vie en détention,

et donc les rapports entre le personnel pénitentiaire et les détenus, ainsi qu’entre détenus eux-

mêmes. À partir du XVIIIe siècle, les établissements se sont inspirés d’un modèle dominant dit

« panoptique » 215 cher à Bentham216. Placés sous le règne du silence, ces derniers n’offraient que

210 KNOBELPIESS Roger, Désordres de mémoire, Monaco Rocher, 2004. Il souligne que la cellule est une « Cage qui nierait sa qualité d’être humain au point de le réduire à l’état d’animal » 211 AUVERT Anne-Julie, Écrire pour survivre, Ban public, Association pour la communication sur les prisons et l’incarcération en Europe, 2003, Chapitre 2 « Effets de l’incarcération sur le corps des détenus », [http://prison.eu.org/spip.php?rubrique520]. 212 Il n’existe aucune disposition légale qui pose un cahier des charges dans la construction des établissements pénitentiaires en France. 213 DIEU François et MBANEOULOU Paul, L’architecture carcérale. Des mots et des murs, Éditions Privat, Toulouse, 2012, p. 9. 214 DIEU François et MBANZOULOU Paul, L’architecture carcérale. Des mots et des murs, op. cit. p. 43. 215 BENTHAM Jeremy, Panoptique, Poche, 2002, 72 pages. Jeremy BENTHAM a imaginé le modèle panoptique : prison circulaire organisée autour d’un bâtiment principal donnant sur de longues coursives avec les cellules normalement individuelles. Le but est qu’ainsi une seule personne soit en mesure de surveiller les cellules lorsqu’elle se trouve au centre de la prison. 216 Jeremy et Samuel BENTHAM, philosophe pour le premier, architecte pour le second.

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peu de possibilités aux personnes détenues dans la construction et dans la transmission de leur

parole. L’organisation spatiale ne permettait que l’amendement et la réclusion.

L’architecture contemporaine n’intègre pas plus de possibilité de parole car la sécurité

s’impose dans les établissements. Pourtant, le CGLPL invite les autorités à repenser l’architecture

des prisons dans un souci de protection des droits217. Ce constat s’effectue dans plusieurs

établissements récents supprimant tout contact possible entre personnel pénitentiaire et personnes

détenues218. Le documentaire « Le déménagement »219 traite du déménagement de la maison

d’arrêt Jacques Cartier, située en plein centre de la ville de Rennes, vers une maison d’arrêt située

en périphérie, à Vezin-Le-Coquet. Ce changement est pourtant critiqué. Cela est constaté dans le

documentaire par les personnes détenues et par le personnel pénitentiaire interrogés. Le nouvel

établissement, bien plus moderne, est pourtant décrié par l’isolement qu’il engendre. Isolé

géographiquement dans une zone industrielle, l’établissement isole aussi les personnes détenues.

Désormais ces dernières sont soumises à un passage automatique par des sas de sécurité dès la

sortie de cellule et assistent à une automatisation du lieu (ie ouverture automatique des portes et

donc moins de contacts avec les agents pénitentiaires). A contrario, l’ancienne prison, pourtant

vétuste et inadaptée, avait l’avantage d’être au cœur de la ville et permettait aux personnes

détenues d’être plus proches des personnels pénitentiaires.

Jean-Marie DELARUE compare les nouvelles architectures à une sorte « d’industrialisation

de la captivité »220 par la construction d’établissements de masse. Le documentaire précité met

l’accent sur les rapports humains qui sont « atomisés »221. L’espace de parole au sein de l’ancien

établissement Jacques Cartier était nécessaire car il est indispensable pour des personnes qui se

côtoient tous les jours de maintenir ce lien social. Aujourd’hui, « les architectes se font plaisir en

imaginant sur leur planche à dessin la prison du troisième millénaire »222. À cette conception

architecturale s’opposent encore les missions de l’administration pénitentiaire, à savoir la

surveillance et la sécurité.

Ces contraintes appliquées concrètement à la détention amènent au maintien d’une procédure

d’exception.

217 Rapport d’activité de 2013 du CGLPL, Chapitre 5 « Architecture et lieux de privation de liberté », p.149. 218 Les nouveaux établissements sécuritaires proviennent majoritairement du programme de construction 13 200 mis en place en 2002 et lancé par Dominique PERBEN. 219 RÉCHARD Catherine (réalisation), « Le déménagement », op.cit. 220 DELARUE Jean-Marie « Le couloir étroit de la parole carcérale », Dedans Dehors, n°79, mars 2013, p.34. 221 MARZOLF Hélène, « Le déménagement, la prison filmée par Catherine RECHARD », Télérama, 18 janvier 2013. 222 Propos de surveillant recueillis par BOËTON Marie, « L’architecture des prisons : un casse-tête non résolu », La Croix, 11 mars 2014.

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Chapitre 2 : La pérennité d’une pratique d’exception

Les restrictions à la parole citoyenne persévèrent en pratique (Section 1), et tendent à se

généraliser progressivement sans barrage fort venant s’y opposer (Section 2).

Section 1 : Une difficile application de la parole citoyenne

L’exercice du droit à la parole des personnes détenues reste limité par l’impact d’éléments

extérieurs, pesant sur les personnes détenues (I), et par l’impact d’éléments directement liées à ces

personnes (II).

I- L’impact d’éléments extérieurs à la personne

Chaque personne détenue, du simple fait de la privation de liberté, passe bien souvent par un

parcours du combattant avant de pouvoir libérer totalement sa parole (A), parole qui est par essence

limitée par le difficile accès matériel au recueil de l’information (B).

A) Un parcours du combattant dans la libération de la parole

Le monde carcéral est un lieu de sujétion, où chaque individu dépend inévitablement d’une

autorité hiérarchique supérieure. Seulement, cette relation est forcée car elle s’applique contre le

gré d’une personne. Ce lien de dépendance implique « l’état d’une personne qui ne peut plus

réaliser toute seule les actes de la vie quotidienne »223. Chaque acte se trouve conditionné à la

volonté dominante de l’AP224.

Par ailleurs, les autorités pénitentiaires imposent aux personnes détenues de passer

systématiquement par l’écrit pour toute demande, qu’elle soit personnelle225 ou collective226. Ce

système des courriers, à adresser à la direction ou au personnel de commandement, est né de l’idée

d’éviter toute forme de favoritisme entre les détenus, car tous les détenus sont placés dans les

mêmes conditions pour l’examen de leur demande227. Cette procédure entraîne parfois des

223 Définition de dépendance : Collectif, Le Grand Larousse, Larousse, Paris, Edition 2017. 224 Par exemple, une lettre peut faire l’objet d’un contrôle et peut être lue avant sa transmission soit de l’intérieur vers l’extérieur, ou soit de l’extérieur vers l’intérieur. Cette atteinte à l’intimité est liée à l’incarcération et fait dépendre les personnes détenues de l’administration pénitentiaire. 225 Lors du stage à la MA de Caen en décembre 2016, de nombreuses demandes personnelles concernaient la question des colis de Noël. 226 Une demande collective au CPF Rennes tendait à se voir octroyer une autorisation pour assister à la projection du documentaire d’Eric LEMASSON réalisé sur l’établissement, « Prison de femmes », op. cit. 227 Les lettres sont relevées par les surveillants chaque jour et sont remises au chef de détention (ou personnel de direction selon les établissements). Les lettres ne sont pas toujours suivies de réponse, ce qui laisse une parole suspendue.

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revendications des personnes détenues228 qui peut être à l’origine de tensions en détention229. Cette

nécessité de passer à tout moment par l’écrit constitue une procédure lourde dans l’extériorisation.

L’appel à un tiers est souvent nécessaire, mais ce long acheminement du message porté peut mener

à des dérives. Une peur d’instrumentalisation et de détournement de l’idée initiale peut faire naître,

chez les personnes détenues, une certaine méfiance tant les interlocuteurs sont nombreux, avec une

appréciation différente de la parole transmise. Cette transformation de la parole ne peut que

renforcer les tensions entre détenus et personnels.

Les difficultés dans la libération de la parole apparaissent aussi pour les personnes dont la

langue principale n’est pas le français. Le système juridique impose la constitution de listes

d’interprètes auprès de la Cour d’appel territorialement compétente230, professionnels qui peuvent

être appelés en détention pour faciliter la communication lors d’entretiens231. Pour des questions

de moyens et des questions de délais, la présence de l’interprète n’est pas toujours assurée. De ce

même fait, des codétenus exercent régulièrement ce rôle. En revanche la neutralité donnée à cette

parole ne peut être garantie232 et amène à un risque d’imprécision de la demande.

L’expression passe par un labyrinthe procédural avec la méfiance constante de ce qui peut être

rapporté. Mais l’impact d’éléments extérieurs se traduit aussi par la communication autour des

droits des personnes détenues.

B) Un accès matériel limité de fait dans le recueil de l’information

Sans une information préalable, une personne détenue ne peut pas s’exprimer dans de bonnes

conditions. L’exercice de la parole citoyenne n’est possible que dans le cas où les personnes

détenues ont connaissance des moyens pour le faire. Ce n’est que depuis la note du 20 décembre

2013233 que les établissements pénitentiaires ont l’obligation de mettre à disposition des personnes

détenues le règlement intérieur234. Le CGLPL, lors de plusieurs visites de contrôle dans des

228 Par exemple, à la MA de Caen en janvier 2017, un personnel de commandement a refusé de recevoir une personne détenue dans son bureau car cette dernière n’était pas passée par l’écrit (la personne détenue sortait d’un entretien avec son CPIP dans un bureau proche). La personne détenue a pris ce refus personnellement et a adopté un comportement injurieux envers le personnel présent. 229 Cf Partie I, Chapitre I, Section I, II, A. 230 Loi n°71-498 du 29 juin 1971 relative aux experts judiciaires, version consolidée au 31 juillet 2017. 231 L’interprète peut intervenir lors des entretiens avec le SPIP, lors des entretiens avec le personnel médical, ou encore lors des commissions de discipline. 232 Une interprétation de la parole de la personne détenue peut provenir d’une mauvaise compréhension de la langue (parfois langues ou dialectes similaires mais termes différents) ou dans une déformation volontaire de la parole de la personne écoutée. 233 Note du 20 décembre 2013 relative aux règlements intérieurs des établissements pénitentiaires, NOR : JUSK1340044N. 234 Note du 20 décembre 2013 - Publicité et communication du règlement, 3.2 « Les personnes détenues doivent donc connaître l’étendue exacte des obligations et des interdictions qu’elles doivent respecter ».

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établissements, a relevé à juste titre que les textes et codes en vigueur n’étaient pas à disposition,

ou n’étaient pas à jour235. L’article 2 de la loi du 12 avril 2000236 pose le devoir pour les autorités

de mettre en place « un accès simple aux règles de droit qu’elles édictent » car cette « mise à

disposition et la diffusion des textes constituent une mission de service public ». Mais, en théorie,

une personne détenue ne peut pas prendre connaissance de ses droits si elle n’est pas consciente

qu’elle en dispose déjà. En pratique, l’information des droits reste informelle et entre détenus.

Outre les textes juridiques, les documents portant information des droits politiques et sociaux

peuvent faire défaut ou être incomplets en établissement. Pour l’exemple du droit de vote237,

l’information sous forme écrite s’est substituée, dans de nombreux établissements, à l’information

orale. Seules des affiches238 ont été placardées dans les locaux afin d’inciter les personnes détenues

à exercer ce droit. Au cours des stages effectués à la MA de Caen et au CPF de Rennes,

l’information pour l’inscription sur les listes électorales a été donné par la direction le 16 novembre

2016239, ce qui permettait alors aux personnes détenues susceptibles d’être intéressées de s’inscrire

sur les listes électorales. La seule véritable remarque qui peut être observée porte dans le choix des

lieux d’affichage. Dans ces deux exemples, les documents étaient souvent noyés parmi les autres

documents d’information. Par ailleurs, des affiches n’étaient plus présentes par la détérioration de

ces espaces par certaines personnes détenues elles-mêmes.

Enfin, l’exercice du droit à la parole citoyenne passe, dans certains cas, par la participation à

des ateliers240. Aussi, la difficulté réside dans le fait de connaître les activités proposées.

L’information n’est pas toujours égale et va parfois cibler une certaine population pénale selon le

profil des personnes recherché. Les personnes participant déjà à des ateliers peuvent aussi, par le

biais du bouche à oreille, avoir connaissance de nouvelles activités alors que l’information sera

réduite pour le reste de la population pénale. Il y a donc une pré-sélection volontaire des personnes

pouvant exercer leur parole par le biais de ces activités. Pourtant, l’administration pénitentiaire

tend à limiter ce phénomène de traitement de faveur en laissant en cellule un livret qui recense les

235 Par exemple, le CGLPL a émis des recommandations le 24 décembre 2008 sur des observations faites à la MA de Villefranche-sur-Saône. Le CGLPL souligne que « les éléments matériels pour user de leurs droits doivent être procurés au détenu ». JORF n°0004 du 6 janvier 2009, texte n°80. 236 Loi n°2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, mise à jour le 28 mars 2017. 237 Cf Partie I, Chapitre 1, Section 2, II. 238 Cf Annexes 1,3 et 4. 239 Cf Annexe 1. 240 Cf Partie I, Chapitre 2, Section I, I.

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activités possibles dans l’établissement. Cette dernière étant parfois obsolète241, les activités

temporaires d’expression ne sont plus accessibles. Jean-Marie DELARUE relevait qu’« un nombre

restreint de détenus peuvent s’inscrire aux activités »242. Cependant, malgré l’inscription des

personnes détenues aux activités, leur présence reste aléatoire243.

Ces éléments extérieurs à la personne sont de natures différentes, mais tendent dans certains

établissements à s’améliorer. Des éléments propres à la personne détenue restent susceptible de

limiter sa parole.

II- L’impact d’éléments propres à la personne

Le plus souvent issues de milieux sociaux défavorisés (A), les personnes détenues se refusent

parfois tout droit d’expression en détention (B).

A) Une population souvent défavorisée

Le profil type des personnes détenues244 a fait l’objet de plusieurs recherches. En partenariat

avec l’AP, l’INSEE a réalisé entre octobre 1997 et janvier 1998 une enquête sur « L’histoire

familiale de 1700 détenus »245. Ces études conduisent à un constat frappant sur l’origine sociale

des personnes détenues. Les personnes incarcérées (dont 1 personne sur 4 a entre 18 et 25 ans au

1er janvier 2014) proviennent généralement des classes sociales à bas revenu et dont les relations

intrafamiliales sont conflictuelles. Les personnes incarcérées sont le plus souvent dans une

dynamique de rupture des liens sociaux et dans un processus de marginalisation face à la société

tant le sentiment d’exclusion sociale est présent. Cette situation ne leur permet pas d’exercer une

citoyenneté pleine et entière. L’exclusion sociale est liée à l’impression d’exclusion totale.

De plus, le faible niveau scolaire des personnes détenues est à prendre en considération. Peu

de détenus observés ont terminé leurs études. Les personnes incarcérées ont généralement un faible

niveau scolaire. Le taux impressionnant d’analphabétisme246 (27% au 1er janvier 2013) et

241 Au Centre de détention de Val de Reuil, par exemple, un détenu arrivé en janvier 2016 explique que « le livret, qui date du 4 novembre 2015, est déjà obsolète », « L’accès aux activités : un parcours d’obstacles », Revue Dedans Dehors, avril 2016, n°91, p. 29. 242 Rapport d’activité de 2008 du Contrôleur général des lieux de privation de liberté rendu public le 8 avril 2009 lors d’une conférence de presse. 243 Par exemple, au CPF de Rennes, de nombreuses activités sont proposées aux personnes détenues. Souvent, des activités se superposent (par exemple des ateliers sur la citoyenneté et le sport), donc les personnes détenues choisissent l’activité à laquelle elles veulent participer alors qu’elles sont inscrites aux deux. Le choix des activités dépend alors de leurs occupations parallèles. Les personnes détenues prennent la place d’une autre personne détenue, qui peut être très motivée par un projet. 244 DINDO Sarah, Parlons prison en 30 questions, Ed. La documentation française, Paris, 2015, p.26. 245 INSEE, « Enquête sur l’histoire familiale d’un échantillon de détenus », Cahiers de démographie pénitentiaire, décembre 2000. 246 Incapacité ou difficulté dans la lecture, l’écriture ou le calcul.

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d’illettrisme247 (11% au 1er janvier 2013) en détention explique l’attrait pour les cours proposant

des activités d’alphabétisation, de FLE248 et le passage du CFG249. Pourtant, le perpétuel

mouvement en maison d’arrêt notamment250 ne permet pas un suivi assidu et complet des cours.

Cela ne favorise pas un apprentissage efficace de la langue, utile dans le processus pénitentiaire

qui est uniquement basée sur la maîtrise de l’écrit.

Enfin, une sélection des personnes détenues peut être mise en place pour certains ateliers, sur

demande de l’intervenant ou lorsqu’un niveau d’expression (orale ou écrite) est requis. La faculté

de comprendre et de pouvoir s’exprimer en français peut alors exclure d’office certains individus

dont la motivation est pourtant réelle. Par exemple, dans la constitution d’un groupe d’expression

citoyenne en Belgique251, les organisateurs ont mis en place deux critères : la motivation et la

maîtrise de la langue. Ils soulignent par la suite que ce second critère, qui visait à trier les

candidatures des personnes détenues, « a volé en éclat car un participant a mis toute son énergie

pendant l’entretien à nous démontrer que le critère ne tenait pas la route »252. En effet, les

organisateurs de cet atelier rappellent que chaque personne « qui est partie prenante à un projet

peut y apporter des savoirs, des compétences et des habiletés diverses »253.

Au-delà de cette limite tenant au parcours de chaque personne, un nouvel obstacle plus fort

réside dans le comportement même des personnes détenues qui se refusent tout accès à la parole.

B) Le sentiment d’exclusion sociale : entrave à la parole citoyenne

« Il est incroyable de voir comme le peuple, dès qu’il est assujetti, tombe soudain dans un si

profond oubli de sa liberté qu’il lui est impossible de se réveiller pour la reconquérir »254. Cet

extrait du Discours de la servitude volontaire de La Boétie souligne ce sentiment d’exclusion qui

est très fort dans le milieu carcéral. Cette position est largement répandue entre les murs par des

personnes qui ne pensent pas avoir le droit d’exprimer leur opinion. Les expressions telles que « je

247 Difficultés de lecture et d’écriture alors que la personne a déjà fait l’objet d’une scolarisation. 248 Français Langue étrangère. 249 Certificat de formation générale et qui valide des acquis dans les domaines du français, des mathématiques et de la vie sociale/professionnelle. Il correspond à un diplôme de biveau VI (équivalent du niveau scolaire en CM2). 250 Cf Partie II, Chapitre 1, Section 1, II. 251 Juliette BÉGHIN et Cédric TOLLEY sont membres de l’association Bruxelles Laïque et ont mis en place un atelier d’expression citoyenne à la prison de Forest (Belgique) en 2013. 252 DUCHIRON Elise et TAMADON-LEMERLE Laetitia, « Atelier d’expression collective citoyenne à la prison de Forest », Prison justice, janvier 2014, n°107, p. 29. 253 DUCHIRON Elise et TAMADON-LEMERLE Laetitia, « Atelier d’expression collective citoyenne à la prison de Forest », op.cit, p. 28. 254 DE LA BOÉTIE Étienne, Discours de la servitude volontaire ou le Contr’un, La Petite Collection, 1576, p.57.

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ne pensais pas que j’y avais le droit » ou « je ne suis qu’un détenu, ma parole ne va rien valoir » 255 reviennent très souvent dans la pratique carcérale.

C’est l’impression, comme l’indique le Père André Clavier256, que « les détenus n’ont aucuns

droits »257. Les personnes détenues instituent elles-mêmes ce rapport d’inégalité lié

intrinsèquement à la privation de liberté en se privant d’un accès à la parole à laquelle elles auraient

pourtant parfois droit. Un enjeu de l’administration pénitentiaire serait de valoriser ce droit pour

une meilleure gestion de la détention. En effet, la principale difficulté est d’agir avec les règles qui

sont posées258 lorsque ne sont pas déterminés en retour les droits qui y sont liés.

Le sentiment que la parole ne sert à rien est fort pour les personnes détenues : « on va encore

parler et ça n’aboutira à rien »259. Cependant, même si la majorité des propositions ne peuvent

aboutir, certaines d’entre elles seront acceptées et ce sont ces décisions qui encouragent à oser

prendre la parole. Pourtant une réticence reste ancrée chez les personnes détenues. Le parcours

pénitentiaire de ces personnes fait souvent suite à un long cheminement devant différentes autorités

(foyer, police, école). Il existe alors une perte de confiance ou une défiance envers les institutions

de la justice. Ce frein volontaire à la parole des personnes détenues peut mener à un repli sur soi260.

Les personnes vont alors se satisfaire du silence qui présente un certain confort en détention dans

le parcours d’exécution de la peine. Le documentaire télévisé le 11 juin 2017 « Matons violents »261

souligne bien par le témoignage des anciens détenus entendus qu’« il existe des représailles pour

les détenus qui parlent trop ». Jean-Marie DELARUE relève que « ça conduit les personnes

détenues à se considérer comme des moins que personne, des moins que rien »262, à l’origine d’une

restriction de la parole.

Ces remparts contre une parole libre sont des facteurs forts de restriction qui se généralisent

progressivement dans le système carcéral français.

255 Ces phrases proviennent d’entretiens entre gradés et personnes détenues à la MA Caen en décembre 2016. 256 Aumônier à la maison d’arrêt de Paris La Santé 257 Père André Clavier lors de la séance de section de la Société générale des prisons du 22 avril 1989 devant la commission réunissant tous les acteurs du monde carcéral sur la notion du détenu citoyen « Il est important que les droits des personnes détenues soient évoqués, cependant cela ne correspond pas à la réalité pour les détenus qui ont l’impression de n’en avoir aucun ». 258 TOURNEFIER Virginie, Enjeux du débat contradictoire en détention, Mémoire du certificat d’aptitude aux fonctions de conseillers d’insertion et de probation, 9ème promotion, 2005, p. 26. 259 GIROUD Didier « Recueillir le point de vue des personnes placées sous main de justice », Prison justice, numéro 107, janvier 2014, p. 15 (témoignage d’une personne détenue). 260 TOURNEFIER Virginie, « Enjeux du débat contradictoire en détention », op. cit. p. 27. 261 DELLEUR Laurence, « Matons violents », Documentaire, Diffusé sur France 5 le 11 juin 2017, 2016, 55 mn. 262 Témoignage de Jean-Marie DELARUE dans le documentaire « Matons violents », supra.

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Section 2 : Une généralisation progressive de la privation de la parole citoyenne

Fortement altérée par la catégorisation des personnes détenues (I), la parole citoyenne ne

semble pas bénéficier d’un appui suffisant par les organes institutionnels nationaux et

internationaux pourtant supposés la protéger (II).

I- La catégorisation des détenus comme entrave à la parole

La parole citoyenne se trouve, dans les faits, limitée par une catégorisation formelle effectuée

par le législateur lui-même en fonction de l’infraction commise (A) et par une catégorisation

informelle installée entre les détenus eux-mêmes (B).

A) Le régime des détenus terroristes : un non-droit total

Le régime des détenus terroristes apparaît comme une exception dans le système juridique

français par sa répression aggravée263 et par son régime de procédure pénale spécial264. Mais, le

caractère exceptionnel de ce régime est aussi présent dans le parcours d’exécution des peines. En

effet, en réaction aux événements de 2015 et de 2016265, le législateur a cédé à l’adoption de lois

plus restrictives des droits266. Le GENEPI note ainsi que « c’est dans les temps de crise que les

réflexes sécuritaires »267 réapparaissent.

Le détenu terroriste, par la cruauté de ses actes, est désigné comme un ennemi de la nation qui

se doit, pour l’opinion publique, d’être privé de tous ses droits. L’adage de droit canon « necessitas

non habet legem » 268 trouve ici toute son application. Cette privation des droits entraîne une

prépondérance du répressif en détention. La mise en place d’unités dédiées269 devaient permettre

un isolement des personnes considérées comme terroristes dans un régime de détention particulier.

Ces dernières ont été jugées « peu convaincantes » par le CGLPL270 dans son rapport de 2016 sur

263 Art. 421-2-2 et s. du Code pénal : tous les actes susceptibles d’avoir un lien avec une entreprise terroriste sont concernés (financement d’une entreprise terroriste, association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste, non-justification de ressources, incitation à la commission d’une infraction terroriste). 264 Le régime de procédure pénale spécial permet de nouvelles techniques d’enquête et un régime dérogatoire de la garde à vue. 265 Il est ici fait référence aux attentats commis en France : attentats contre Charlie Hebdo le 7 janvier 2015, fusillade à Montrouge le 8 janvier 2015, prise d’otages au magasin Hyper Cacher le 9 janvier 2015, attentats du 13 novembre 2015 à Paris, attentat du 14 juillet 2016 à Nice, attentat de l’église de Saint-Etienne-du-Rouvray le 26 juillet 2016. 266 Cf Annexe 9. 267 Groupe GENEPI de Strasbourg, « L’expression individuelle des personnes détenues », Assemblée générale 2015. 268 Proverbe latin qui provient du XVe siècle : « Nécessité n’a point de loi ». 269 Cf Annexe 8 – La concentration des terroristes sur la même aile d’un bâtiment devait alors permettre la prévention de la radicalisation en détention. 270 Rapport du CGLPL sur la radicalisation islamiste en milieu carcéral et l’ouverture des unités dédiées, 7 juin 2016, passim.

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l’ouverture des unités dédiées. Le gouvernement a décidé d’abandonner ces structures en octobre

2016, qui sont maintenant remplacées par six quartiers d’évaluation de la radicalisation.

Enfin, le point central des restrictions réside dans le risque d’embrigadement terroriste en

prison. L’action d’embrigader correspond au fait de « faire entrer, par contrainte ou par

persuasion une personne, dans un groupe ou une association quelconque »271. Les procédés

d’embrigadement impliquent une parole entre deux protagonistes. L’isolement des personnes

considérées comme terroristes ne permet pas une expression sur les conditions de détention, bien

souvent plus sévères et rigoureuses que celles appliquées à une personne détenue incarcérée pour

une infraction de droit commun. Cependant, le CGLPL considère que « le risque d’embrigadement

et de radicalisation n’est pas supérieur dans les EP que dans le monde libre, si la détention se

déroule dans des conditions dignes et que des activités constructives et motivantes sont

présentes »272.

Cette distinction entre détenus de droits commun et détenus terroristes fait naître deux paroles.

Une différenciation pratique s’y ajoute et se base sur la nature de l’infraction commise.

B) Une hiérarchisation des détenus basée sur la sanction pénale

La hiérarchie carcérale est un phénomène fortement marqué dans l’univers pénitentiaire. La

hiérarchisation consiste à « classer dans un groupe social les personnes selon leur importance

respective »273 et instaure des rapports de subordination, en l’espèce, entre les détenus. Cette

« hiérarchie informelle »274 a fait l’objet d’évolutions au cours des dernières décennies275.

Aujourd’hui276, l’influence en détention provient de petits délinquants277 qui prennent le pouvoir

sur la parole commune. En bas de l’échelle, se retrouvent en revanche, ignorées et rejetées, les

personnes condamnées pour des actes de pédophilie ou de viol qui ne sont jamais écoutées278.

Cette collectivité ordonnée ne laisse plus de place à LA parole citoyenne, mais bien à UNE parole

citoyenne.

271 Définition d’embrigader : Collectif, Le Grand Larousse, Larousse, Paris, Edition 2017. 272 Rapport d’activité de 2016 du Contrôleur général des lieux de privation et de libertés du 7 avril 2017 sur des observations menées du 15 au 27 novembre 2015. 273 Définition de la hiérarchisation : Collectif, Le Grand Larousse, op.cit. 274 FRAYER Arthur, Dans la peau d’un maton, op. cit., p.143. 275 Propos recueillis auprès d’un premier surveillant au Centre pénitentiaire pour Femmes de Rennes lors d’un stage en avril 2017. 276 Auparavant, l’influence provenait des personnes présentées comme les « opprimés du système » (terme d’Arthur FRAYER) qui se rapportent aux braqueurs, aux casseurs et aux trafiquants de drogue. 277 Petits vols, petits trafics de drogue, racket, « voyoucratie ordinaire » (terme de Francis FEHR « L’opération écrire enfermé », Prison justice, janvier 2014, n°107, p. 33). 278 À cette catégorie rejetée s’ajoute la catégorie des personnes pour des infractions considérées comme minimes mais dont la parole n’est pas valorisée.

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À la hiérarchisation entre les détenus, s’ajoute le phénomène du caïdat qui implique de suivre

un chef de groupe pour obtenir par la suite un statut, des privilèges ou des avantages. Ces bandes

se forment alors en détention, et parfois, sur le même modèle qu’à l’extérieur. Le CGLPL souligne

en 2012 que ce phénomène de rivalité entre les bandes est clairement présent dans les EP et impacte

le maintien de l’ordre en détention279. L’objectif pour ces groupes est ainsi de recueillir le plus de

personnes. Par conséquent, la parole du plus grand groupe sur un sujet est donc plus écoutée et

suivie, peu important au demeurant cependant son contenu. L’adhésion aux idées d’un groupe ou

d’un individu peut s’inscrire dans un circuit intéressé ou dans un désir de protection. La seule

optique d’échapper à toute forme de pression constitue un leitmotiv important d’association. Aussi,

il existe le risque qu’au nom de la liberté, la conséquence soit « d’en restreindre, voire d’en faire

disparaitre une autre »280.

Enfin, la maitrise de l’art de la parole est un élément déterminant dans cette catégorisation.

Peu de personnes savent que dire, à quel moment et de quelle façon. La manipulation de la parole

est un art démultiplié en prison. Il s’agit d’un rapport de force privilégiant un procédé de séduction

dans un but individuel plutôt qu’une véritable persuasion et conviction dans un objectif commun.

On met en avant le « bien parlé »281 plutôt que le bien pensé. Cela fait écho au mécanisme

d’élection des représentants mis en place dans le SCC282. Les détenus désignés sont puissants et

privilégiés et bénéficient parfois d’avantages. La parole devient donc un outil indispensable.

Malgré des brèches profondes à l’exercice de la parole citoyenne libre, les autorités

institutionnelles ne peuvent y répondre que de façon timorée.

II- Une supervision institutionnelle inefficace

Les organes de contrôle français ne disposent, en pratique, que d’une force non-contraignante

face aux violations des droits des personnes détenues (A). Cette influence est tout aussi relative au

niveau international compte tenu de la sensibilité du sujet (B).

279 Recommandations du CGLPL du 12 novembre 2012 prises en application de la procédure d’urgence et relatives au centre pénitentiaire des Baumettes, à Marseille. 280 FAVARD Jean, « Le détenu citoyen », Revue pénitentiaire et de Droit pénal, juillet-septembre 1989, p. 255 (séance de section devant la Société générale des prisons du 22 avril 1989). 281 BRETON Philippe, La parole manipulée, Ed. La Découverte, Poche, Paris, 2000, p. 83. 282 Procédé mis en place dans le Système Correctionnel Canadien par la directive du commissaire n°3, publiée le 26 septembre 2008.

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A) Des avis non-contraignants face aux violations textuelles

La mise en place d’un Contrôleur général des lieux de privation et de liberté en 2007283, a

permis l’instauration d’un garde-fou considérable contre l’arbitraire de l’AP. Sa mission principale

est de prévenir les atteintes aux droits fondamentaux et d’œuvrer dans le sens de l’intérêt général

afin de prévenir de futures atteintes. Son contrôle s’effectue par le biais de visites programmées

ou inopinées en établissement284. Par suite, des recommandations sont émises concernant les

manquements relevés285. Le CGLPL contribue donc au débat sur la réalité carcérale et permet de

redonner une voix aux oubliés. Il constitue un relais de la parole citoyenne de ces personnes. De

plus, le suivi des recommandations est un élément fort dans la protection des droits et permet

d’alerter, de nouveau, le monde libre de la situation carcérale.

Depuis la loi du 26 mai 2014286, il existe un délit d’entrave qui permet au CGLPL d’avoir

accès à tous documents. Le personnel pénitentiaire a donc l’obligation de communiquer les

informations demandées, alors qu’il s’agissait auparavant d’une simple faculté. Cette mesure

renforce l’action du CGLPL.

L’influence du contrôleur est à nuancer et ne semble parfois que symbolique compte tenu de

la nature non-contraignante des avis. Cette force relative des recommandations constituait une

première crainte lors de la création de cet organe. Plusieurs exemples actuels relèvent

l’insuffisance de l’action du CGLPL. Les recommandations du CGLPL sur la maison d’arrêt de

Fresnes287 ont reconnu l’état particulièrement délétère de l’établissement. Néanmoins, en raison

de la simple valeur indicative de ses avis, les autorités n’ont aucune obligation de suivre à terme

les recommandations. L’indépendance même de cette autorité semble alors remise en cause. Le

CGLPL renouvèle ainsi ses avertissements, et si théoriquement, les avis du CGLPL ne sont que

déclaratoires, une certaine pression morale pousse parfois les EP à améliorer les conditions de

détention.

Par ailleurs, de vives oppositions peuvent exister entre les recommandations du CGLPL et la

politique générale de l’administration centrale de l’AP. Adeline HAZAN souligne en mars 2016

que « parfois nous posons des questions qui peuvent susciter des désaccords avec

283 Décret relatif au Contrôleur général des lieux de privation de liberté n°2008-246 du 12 mars 2008. 284 Entretiens programmés à la fois avec toute personne détenue et tout personnel le désirant. 285 Les rapports sont transmis au préalable à l’établissement dans un souci de contradictoire et correction d’éventuelles erreurs matérielles avant la transmission au ministre. 286 Loi n°2014-528 du 26 mai 2014 modifiant la loi n°2007-1545 du 30 octobre 2007 instituant un Contrôleur général des lieux de privation de liberté, J.O.R.F, 27 mai 2014, 287 Journal officiel du 14 décembre 2016.

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l’administration »288. À titre d’exemple, les contrôleurs se heurtent à la position de l’administration

sur la question de l’autorisation des téléphones portables dans les EP. À ce jour, les téléphones ne

sont pas admis en détention. Cependant, avec l’appui de la Garde des Sceaux, Nicole

BELLOUBET, qui a affirmé le 21 août 2017289 ne pas être opposée à leur introduction, la

divergence d’opinion entre le CGLPL et l’administration pénitentiaire peut prendre fin. Malgré

tout, l’action du CGLPL reste conditionnée aux avancées envisagées par l’administration elle-

même sur des questions globales des politiques pénitentiaires. Enfin, cette portée limitée des

pouvoirs du CGLPL provient également de l’opinion publique qui accepte difficilement des

mesures qu’il considère comme « pro-détenus » dans l’amélioration des conditions de détention.

Ce frein se retrouve dans les décisions internationales qui se doivent de prendre en compte les

spécificités locales et qui ne peuvent donc imposer une décision uniforme sans consensus des Etats.

B) L’hypothèse vaine d’une solution internationale

Une solution internationale est envisageable, mais semble pour la notion de la parole

citoyenne quelque peu utopique. Les textes internationaux et européens protègent depuis plusieurs

décennies les droits des personnes détenues dans leur expression collective. Pourtant, la Cour EDH

ne peut ainsi pas imposer de solution internationale unique de par la complexité de la question. La

Cour affirme qu’« à une liberté d’appréciation moins discrétionnaire correspond un contrôle

européen plus étendu »290. L’appréciation discrétionnaire se base sur la présence d’un consensus

des Etats ou non sur une question. La Cour fait une appréciation in concreto et tient donc compte

des spécificités locales et régionales. Une uniformisation dans ce cas n’est pas souhaitable.

La Cour européenne se confronte parfois à une réticence vive des Etats dans l’introduction de

la parole citoyenne dans la législation nationale. L’exemple le plus frappant sur ce désaccord est

la question du droit de vote. L’article 3 du Protocole 1 à la Conv. EDH291 instaure les bases du

droit à des élections libres et qui permettent l’application d’une démocratie dans les Etats de droit.

Ces droits ne sont pas absolus et font l’objet d’exceptions et de limitations ce qui permet d’accorder

à chaque Etat une certaine marge d’appréciation sur sa mise en place. La Cour indique qu’une

288 GAUTHIER Romain, « Bilan et perspectives du Contrôleur général des lieux de privation de libertés », entretien de Mme Adeline HAZAN, Droit pénal Lexis Nexis, Mars 2016, entretien 3, p. 8. 289 F.T, « La ministre de la justice ne s’oppose pas au portable en prison », La Provence, 21/08/2017. Nicole BELLOUBET explique même que « l’idée d’Adeline HAZAN n’a rien d’absurde, d’autant qu’il s’agirait de portables bridés et contrôlés ». 290 CEDH, 26 avril 1979, Sunday Times c/ Royaume-Uni. 291 Article 3 Protocole additionnel de la Conv. EDH : « Les Hautes Parties contractantes s’engagent à organiser, à des intervalles raisonnables, des élections libres au scrutin secret, dans les conditions qui assurent la libre expression de l’opinion du peuple sur le choix du corps législatif ».

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limitation de ces droits n’est possible que si elle est justifiée et proportionnée. Aussi, il n’est pas

possible qu’une personne soit déchue automatiquement de ce droit sur le simple fondement de son

incarcération.

L’application du droit de vote dans le régime français respecte les dispositions de la Cour

EDH292. La question de ce droit fait cependant grandement débat au Royaume-Uni qui a été

condamné à de multiples reprises par la Cour EDH293. La conception sur l’attribution du droit de

vote est ici au cœur du débat294. En effet, le Royaume-Uni n’accorde ce droit qu’à trois conditions

particulières : vivre au Royaume-Uni, être britannique et être éligible à payer les taxes dans le

pays. Ce dernier point remet en question la possibilité d’octroyer le droit de vote aux personnes

détenues. La Cour européenne a condamné le Royaume-Uni dans six affaires sur la base de la

violation de l’article 3 du protocole n°1. Plus de 2000 affaires sont pendantes devant la Cour EDH

sur la question de la déchéance automatique du droit de vote du fait de l’incarcération295. C’est sur

ce point que le Royaume-Uni pourrait être incité à modifier effectivement la loi. Ce conflit entre

le Royaume-Uni et la Cour EDH remet en question l’adhésion de l’Etat à la Conv. EDH. En effet,

le 1er octobre 2014 David CAMERON s’était exprimé en disant « nous n’avons pas besoin de

recevoir d’instructions de juges à Strasbourg »296. Une solution unique paraît difficilement

concevable tant les conceptions sur le droit de vote divergent et ne font pas l’objet d’un consensus.

292 Cf Partie 1, Chapitre 1, Section 2, II. 293 CEDH, 6 octobre 2005, Hirst c/ Royaume Uni, CEDH, 23 novembre 2010, Greens et M. T c/ Royaume-Uni, CEDH, 12 aout 2014, Firth et autres c/ Royaume-Uni, CEDH, 10 février 2015, McHugh et autres c/ Royaume-Uni et CEDH, 30 juin 2016, Millbank et autres c/ Royaume-Uni. Deux autres demandes ont été déclarées irrecevables par la Cour EDH (CEDH, 11 juin 2013, McLean et Cole c/ Royaume-Uni et CEDH, 13 mai 2014, Dunn et autres c/ Royaume-Uni). 294 L’Ancien Premier Ministre Britannique David Cameron avait à cet égard déclaré devant la Chambre des communes le 24 octobre 2012 “Prisoners will not get the vote as long as I am Prime Minister. Nothing is going to change. That idea of them getting the vote makes me physically sick” (« Les personnes détenues n’auront pas le droit de vote tant que je serai premier ministre. Cette idée de leur donner ce droit me rend malade »). 295 « L’Europe condamne le Royaume-Uni à propos du droit de vote des détenus », La Croix avec AFP, [http://www.la-croix.com/Actualite/Europe/L-Europe-condamne-le-Royaume-Uni-a-propos-du-droit-de-vote-des-detenus-2014-08-13-1191617][13/08/2014]. 296 Discours du 1er octobre 2014 à Birmingham lors du congrès du parti conservateur.

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CONCLUSION

En éternel mouvement, que ce soit dans ses sources ou dans sa forme, la parole citoyenne

trouve sa place dans cet univers pénitentiaire originellement reclus. L’effet de responsabilisation

et d’autonomisation par l’exercice de cette parole permet l’éclosion ou la renaissance de sujets de

droit en tant que tels. La personne détenue est alors reconsidérée comme étant capable de

s’exprimer et de créer une intelligence collective avec d’autres détenus.

La valorisation de ce droit par les textes, la coopération des acteurs et la mobilisation des

citoyens eux-mêmes, entraînent un changement de regard dans l’admission et dans la protection

de cette parole. Désormais, la parole citoyenne dispose d’une place significative dans le monde

carcéral. Pourtant, les ingérences de l’administration pénitentiaire restent nombreuses. Des

évolutions restent, dès lors, attendues, puisque ces limitations multiples, prises dans un engrenage

sécuritaire, altèrent profondément les possibilités de réadaptation à l’extérieur et à une vie

citoyenne et sociale saine.

En outre, la parole peut permettre de rapprocher la situation des personnes détenues à la

situation vécue à l’extérieur. En effet, comme il a été rappelé à de multiples reprises, « la continuité

sociale entre intérieur et extérieur est un impératif297 si l’on veut minimiser les risques de fractures

à la sortie »298. Il ne faut jamais perdre de vue qu’une personne détenue sera un jour à l’extérieur299

et qu’une resocialisation par la citoyenneté acquise en détention est un gage de réinsertion pour

l’avenir. L’objectif de réinsertion étant affirmé dans les textes, le but est alors de réduire les

divergences entre le discours officiel théorique et la réalité. La libre parole constitue un des enjeux

de la mission de « prévention de la récidive » 300 qui doit se substituer à terme à l’omniprésence

de la mission sécuritaire de l’administration pénitentiaire.

297 « Impératif de principe » - Rapport de Cécile Brunet-Ludet, Magistrate, Le droit d’expression collective des personnes détenues, Paris, DAP, Février 2010, 60 pages. 298 Groupe Genepi de Strasbourg, aidé de la délégation régionale Est, « L’expression collective », Assises de 2008, Clermont-Ferrand, [http://www.genepi.fr/p-67-les-positions-du-genepi.php] [12/01/2017]. 299 TOLSTOÏ Léon, Résurrection, Gallimard, 1994, 2ème partie, « Les détenus ne sont pas incarcérés éternellement, on les relâche ». 300 Loi pénitentiaire, préc, Titre préliminaire, art 1 : « […] nécessité de préparer l’insertion ou la réinsertion de la personne détenue »

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DOCUMENTS ANNÉXÉS

- Annexe 1 : « Le savez-vous ? Elections présidentielles et législatives 2017 : comment vous

inscrire sur une liste électorale ? ». Source : Information à l’attention des personnes détenues, Direction de l’administration pénitentiaire, note, Paris, le 16 novembre 2016.

- Annexe 2 : Elections présidentielles 2017 : modalités de vote. Source : Information du directeur de l’administration pénitentiaire, Philippe GALLI, Ministère de la justice, note d’information, Paris, 24 mars 2017.

- Annexe 3 : « Le savez-vous ? Elections présidentielles 2017 : comment participer ? ». Source : Information à l’attention des personnes détenues, Direction de l’administration pénitentiaire, note, Projet, Paris, 24 mars 2017.

- Annexe 4 : « Le savez-vous ? Elections législatives 2017 : comment participer ? ». Source : Information à l’attention des personnes détenues, Direction de l’administration pénitentiaire, note, Paris, le 16 mai 2017.

- Annexe 5 : Formulaire de vote par procuration avec une mention concernant les personnes

placées en détention provisoire ou les détenus purgeant une peine. Source : Formulaire de vote par procuration, République française.

- Annexe 6 : Affiches d’information sur le vote par procuration réalisées par les personnes

détenues en formation BEP infographie. Source : Projet élection et citoyenneté, MA Fleury-Mérogis, article du 17 mars 2017 (intranet justice).

- Annexe 7 : Page de couverture de la revue Citad’elles - Centre Pénitentiaire pour femmes de

Rennes Source : Exemple du numéro 7 et 10, Citad’elles, Le féminin sans barreaux, Rennes, Établissements Bollec, printemps 2015 et 2016.

- Annexe 8 : Program theory of the terrorism wing Source: VELDHUIS Tinka, « Prisoner Radicalization and terrorism detention policy: institutionalized fear or evidence-based policy making », Routledge Taylor and Francis Group, Londres, 2016, 195 pages, p 35.

- Annexe 9 : Fear-related policy making Source: VELDHUIS Tinka, « Prisoner Radicalization and terrorism detention policy: institutionalized fear or evidence-based policy making », Routledge Taylor and Francis Group, Londres, 2016, 195 pages, p 128.

- Annexe 10 : Questionnaires distribués à l’ensemble des acteurs du monde pénitentiaire lors des

états généraux de la condition pénitentiaire (extraits) Source : Consultation et recueil des questionnaires par l’institut BVA, [www.etatsgenerauxauxprisons.org].

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Annexe 1

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Annexe 2

7_

ffiÆUàty!lle"h!-:F,t:yyÿÈérugLtquu rRÂHç*tst

MINISTÈREDELA JUSTICE

E 4 HÂfl§ TOIT

LE PREFET,ôineêie uii oE L' AoM lN ls TR ATlo N P Ë N lrEN TIAIRE

OBJET:

PJ:

Le garde des sceaux, ministre de la justice

,àMadame etlviessieurc les dirrcteurs intertégionaux des

services Pénitenti"aires

Monsieur le directeur inter:'egional, chef de la mission des

services pénitentiaires d' Outre-mer

Mesdames et Messieurs les chefs d'établissementspénitentiaires

Mesdames et Messieurs les directeurs fonctionnelspénitentiaires d'insertion et de probation

Elections présidentielles 2017 : modalités de vote'

-Fac similé du modèle unique d'imprimé (cerfa no 14952*01) destiné à

l'établissement d'une ptocuration.- r< Le savez-vous ? ll

Textes de tefÉrence

- Loi no 62,- 1292 du 6 novembr e 1962 relative à l'élection du President de laRéPublique au suffi:age univetsel ;

_ Arricles i.t a r. $,{o.721-L à LO. 227-5,R. 1 à R, 25 du code électoral ;- Article 30 de la loi n' 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaile.;- Décret no 2013-11gT du 18 décembre 2013 portant simplification de I'exercice du

droit de vote Par Procuration ;- Article 19 du décret no iarc-nti du 30 décembre 2010 portant code de

déontologie du seryice public pénitentiaire ; -- Àrticles Ë. Sf-g-t t,D.-142 e iq,D, 220 elD - 221 du eode de procédure pénale ; -

- Anêté du 12 décembre 2013 pris en applieation des articles R. 5 et R' 60 du code

éiectoral;

oÀPÂdreÀsé oô§lale : 13, plâce VêndôffiÉ' 75042 FÂRt§ CedÊx 018;r;;ir'sltrré" : ss àe oe lâ gare ' 75010 PARIs

Tè1. : 01 ,{{ 77 6ô 6û

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- Cilculaire relative à la demande et à la délivrance de la carte nationale d'idenltéaux personnes détenues du 23 octobrc Z0l2;. Circulaire NûR/INT|A133L676C du 22 janvier 2014 relative aux modalitésd'exercice du droit de vote par procuration I- Note PMJ4 du 7 mai 2007 relative au vote par plocuration - possibilité pour lespersonnels pénitentiailes d'être mandataite des personnes détenues - Absence.

Modalités de vote

Par décret n" 2A17-223 du 24 février 2017,1es électeurs ont été convoqués poul participerà l'élection du Président de la République, aux dates suivantes :

Sont autorisées à participer à cette consultation les personnes remplissant les conditionspour exercer leur droit de vote et inscrites sur les listes électotales telles qu'elles ont étéarrêtées le 28 fevrier 2AL7, sous réserve des modilications intervenues en application desarticles L. 1l-Z (c'est-à-dire des jeunes atteignant leur majorité entre le ler mars et le 22avril), L, 30 à L. 40 et R. 18 du code électoral.

Il convient de rappeler que les persolures détenues peuvent exercet leul droit de vote pardeux moyens : le vote par procaration ou la permission de sortir.

!, Le votgpfir pracilr{!îîon.:.

Cette possibilité s'adresse à l'ensemble des personnes détenues, qu'elles soientcondanrnées ou prévenues.

n Exercice du tlroit de vote par procuration

En vertu des articles L. 7l et suivants du code électoral, les persorures détenues quisouhaitent exercer leur droit de vote peuvent le faire par la voie de la procuration. Lemandataire doit jouir de ses droits électoraux et êt'e inscrit dans la même cûmmune que lemandant, donc figurer sur la liste des électeurs admis à participer aux scnrtins meationnésci-dessus.

Chaque mandataire ne peut êh'e polteur de plus de dsux procurations, dont une seuleétablie en France,

En outrg en application des afiicles D.22A etD. 221du cbde de prncédure pénale et del'afiicle 19 du démet n" 2010-7711 du 30 décembre 2010 portant code de déontologie duservice public pénitentiaire, les membres du personnel pénitentiaire et les personnesremplissant une mission dans l'établissement pénitentiaire ne peuvent accepter d'êtremandataires d'une persolme détenue (cf. note PMJ4 du 7 mai 2007 visée en réference).

Durée du mandat: 5 ans(demière élection :22 awil

et 6 mai 20LZ)

23 avril et7 mü,2017 du Pr'ésident de la

Dates Élections Précisions

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: Yalirlité des procurations

- Durée :

En application de I'article R. 74 du code électoral, la validité des procurations est enprincipe limitée à un seul scrutin. Toutefois, à la demande du mandan! la ptncuration peutêtre établie poul une durÉe maximale d'un an à compter de sa date d'établissement. Rienn'interdit à iintéressé de la faire établir pouï une durée plus cout'te, par exsmple pour troismois, ou pour toute autre durée au choix du mandant. La durée de validité choisie pouÏ laprocuraüon doit êue mentionnée expressément sur celle-ci'

- Pièces à fournir :

Confognément aux dispositions de I'afiicle R. 73 du code électoral, les mandants doiventplouver leur idenüté, par tout moyen, par exemple en forntissant un extrait du registred'écrou.

x Etabliss"ment des procurations ,

En vertu des articles R. 72 et R. 73 du code électoral, les procuraüons ne peuvent êtleprÉsentées qu'aux autorités habilitées :

- le juge du tribunal d'instance ou le juge qui en exelce les fonctions, compétent à l'égarddes êtàbfissements pénitentaires situés dans le ressort du trtbunal de grande instance ;- le greffrer en chef de ce tribunal ;- l'offrcier de police judiciaire aut'e que les maires et leuls adjoints, I'agent de policejudiciaire, le réserviste au titre de la réserve civile de la police nationale ou au titre de lai.é*"ru* opérationnelle de la gendarmerie naüonale ayant la qualité d'agent de policejudiciaire désigné par le juge du tribunal d'instance compétent ;- tout autre mâgistrat ou greffîer en chef, en activité ou à la retraite, qui aura été désignépai le premier président de la cour d'appel sur demande du juge du tribunal d'instance.

Le chef d'établissement, après avoir pris comraissance des demandes des personnesdétenues recensées par le gràffe, prend contact avec I'autorité habilitée a{în de détenninerla venue d'un agent à l'établissement. Pour accéder aux établissements pénitentiaires, iesofficiers ou agents de police judiciaire ou leurs représentants devron't justifier de leuridentité et de leur qualité.

Afin de faeiliter le travail des autorités habilitées à délivrer des proeuraüons, les demandesde personnes détenues devrcnt êhe préalablement rassemblées pal l'établissementpénitentiaire.

Depuis le décret n" 2013-118? du 18 décembre 2013 portant simplification de l'exercice dudroit de vote parprocuration, les procurations peuvent être renseignées hors laprésence del'offrcier au â" lhgent de police judiciaire. Le formulaire Cerfa no 14952*01 joint à laprésente note peut ainsi êh'e imprimé par le greffe et être renseigné par la persoilne détenueavant d'être présenlé à l'officier ou l'agent de police judiciaire. Il doit impérativement êtreimprimé sur deux feuilles (et non en rectolverso). Les procurations peuvent également êtrerenseignées devant I'offrcier ou I'agent de police judiciaire, sur l'irnprimé Cerfa cartonnéhabituel d12668*01.

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Il n'appartient ni au chef d'établissement, ni à I'autorité.habilitée à établir la procuration devérifier si les personnes détenues jouissent ôu non de leurs droits civiques.

Par ailleurs, on cas de contestation de l'appréciation portée sur la régulalité de l'inscriptiond'une persoane détenue sur une liste électorale, il appartient à cette demière de saisir lejuge du t{bunal d'instance compétent.

L'établissement des procurations devra êtle effectué le pluq tôt possÎble pour permettre leurenvoi pal les autorités habilitées aux maà'es des communes coneemées (article R. 75 ducode électoral).

L'établissement de ces proculations peut poser des difficultés arlx personnes détenues qui,domiciliées à l'établissement pénitentiaire et inscr{tes sul les listes électorales de lacorrlmurre de rattachement, ne sont pas en mesule de trouver un mandataire. Je vousdemande en ce cas de prendre attache àvec le maire de la comrnune afin que, faisant appelà l'esprit civique de ses administrés, il puisse ploposôT le nombre de mandatairesnécessaires. Vous vous olganiserez alors de telle sorte que le mandataire pressenti et lapersonne détenue mandante puissent établir, en sÊ renconhant dans l'établissement, laconfiance nécessaire à l'établissement d'rule procuration. r

2. La »errnissjgn de sortîr :

En verlu des dispositions de l'article D. 143-4 du code de procédule pénal, les persornescondamnées à une ou plusieurs peines privatives de libefié dbne durée totale n'excédentpas cinq ans ainsi qu'aux personnes condatrnées à une ou plusieurs peines privatives deliberté dbne durée totale supérieure à cinq ans lorsque ces dernières ont exécuté la moitiéde leur peine, peuvent demander une permission de sortir d'une journée pout I'exercice deleur droit de vote.

Les documents permettant de justifier de son identité au moment du vote étant conselésau vestiaire de l'établissement, ils devront êtle remis à la personne détenue, sur sâdemande, à I'occasion de sa per:nission de sortir. La remise d'une photocopie ne zuffit pas(cf. circulaire du 23 octobre 2012visée enréférence).

Ces documents sont fixés aux articles 1 et 2 de I'auêté du 12 décembre 2û13 visé enréférence. Il s'agit notamment de la carte nationale d'identité et du passeport.

3. Mise en æuvrç,du üsp.!sit!.f :

Afin d'assurer l'effectivité de l'exercice du droit de vote dm p"rron res détenues, ilconviendra pour les établissements :

1/ de procéder à I'affichage dans les locaux de détention (tableaux d'affrchage dansles bâtiments d'hébergement, salles d'attente aux unités sanitaires et SMPR, bibliotheques,salles de elasses, salles d'activités, par{oirs, greffe pénitentiaire, locaux du SPIP) du « Lesavez.vous? », consacré aux élections présidentielles de2017, quivous sera adressé parcounier électronique par le SCERI ;

2l de distribuer à toutes les personnes détenues, lors de I'entretien entrant, le « Lesavez-vous ? lr consacré aux élections du printemps 2017 avec la dernière version du Guidedu déte*a a*irranl:,

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3/ d'ir:foimer düns une note à l'attention des pôr'sorurcs détenues les dates depassage des officiers ou agents de police judiciaire chargés d'établir les ptoculations ;

4/ de mettre à la disposition des peffiormes détenues dès maintenant la presente noteet ses pièces jointes ;

5l de rnettre en place localemen! en lien avec le Défenseur des droits et les pointsd'accès au droit et/ou des associations partenaires (GENEPI, ANVP, ..,), des actions desensibilisation des per.sonnes détenues. A cette frn, ces associations seront destinataires desdocuments élabores pal l'administration péaitentiaire. Le pilotage de ces actions seraassur'é par le SPIP.

Il est important que les pelsonnes détenues qui le souhaitent puissent exelcer effectivementleur droit de vote.

Je vous remercie de tout meth'e en æuvle pour la réussite de ce dispositif.

En cas de dif{iculté, je vous invite à prendre contact avec Mme Yasmihe Hennet-Azzoug(MI4) au 0t.70.22.82.A7 ou par courriel à l'adresse: yasmine.hentet-azzaug@justice. gouv. fi'.

La présente note et ses pièces jointes sont mises en ligne sur le site intranet de la DAP(FAQ actualitésjuridiques de l'adminishationpénitentiaile- Flash Actualités juridiques).

Vous me transmettrez pour Ie I"' juillet2OlT les actions mises en æur/re et, dans letableau joint eomplété par vos soins, le nombre de procurations tlemanelées, Ienombre de procurations effectivement établies, le nombre de pennissions de sortirdemanrlées et le nombre de perrnissions tle sortir accordées.

Le garde des sceaux, ministre de la justicePar délégation

Le préfet, directeur de I'adminish'ation pénitentiaire

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Annexe 3

Binecfisn de tr'ednainisfrcTion pêmitantiaire

éîe*orales saÿrt app

ité pr€vu par

pour ie jour du réfdrendum. Vaus devezur cela être condarctd à une peine inférieure

ou égale à 5 ans, au à une peine de plus de5 als et avoilaccornpli au nrains la raoitié devou,e peine.

. Quand devez-vous àire vctre demande ?

Qtt'il s'agisse dune demande de procurationou de permission de sorrir, il est recommanddde faite vos ddmarchs dès maintenant.Datrs le cadre d'une procuration, vôtredema"nde devrn parvenir au maire al'arit le jourdu scrutin.

Dans tous les cas, nthésitez pas à consulter legt"ffe péaitentiaire ou Ie CPIP qui peuventvous aider dans vos dérnarches.

de{e

Læ §#væx*v#us ?lnformotion à l'ottention des personnss dâfenues

ÉÊeceË$ras présâderstâeËâes 2*T Z :c$ËË!Ëx1e§rt Ë!ârtieâpee ?

Les 23 aarîl et 7 rnai 2Al7 les éIectcurs

Répablîgue,

dsmfi.?rd.e, darus les délais, de

pour les dlecrions p* vous jouisrez de êilElidqueset n'êtrs dansla ioi- rrous êtes inscrit lisre Électorale.

o Cofirtnent votrs y preridre pour voter ?

* \Ious posveu vCItsr I,âf procuratioa : unepersorlne de votre ch*jx ira rrotÊr pour vons.Cette personne doit être inscrite dans la mêmecomrrluile gue yoss, §,ile ne poutra êueFôrteuse que de deux procuredens, dont uneseule établie en F.rance.

* Vous pouvÊz aussi demander au jugel'appiicrtian des peines une permi*sion

,..d+ ^ B=+Wu* deuex remplir lss condîtiant poo*S{nrp-$h ao*e7roit de oote *faàre u*.e

?rrai 2A17, les éIectears frçr3.çais iruscrix su.r [es lùsteselés à élirw lr $u) nouaegifuaaÿellë) présàdent{e} de la

-r-/ =FqÆ+' =+/F" .+. -=<'-

e Pouvsz-Yo*s participer à cesOui, si:- îr'ous êres de nationalirC- vous zyez ^s moins 18

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Annexe 4

Paris, mai 2017

Information à l’attention des personnes détenues

• Pouvez-vous participer à ces élections ?Oui, si :- vous êtes de nationalité française- vous avez au moins 18 ans le 10 juin 2017pour les élections législatives- vous jouissez de vos droits civils et politiqueset n'êtes dans aucun cas d'incapacité prévu parla loi- vous êtes inscrit sur une liste électorale.

• Comment vous y prendre pour voter ?- Vous pourrez voter par procuration : une personne de votre choix ira voter pour vous. Cette personne doit être inscrite dans la mêmecommune que vous. Elle ne pourra être porteuse que de deux procurations, dont uneseule établie en France.

- Vous pouvez aussi demander au juge de l’application des peines une permission de

sortir pour le jour du vote. Vous devez pourcela être condamné à une peine inférieure ouégale à 5 ans, ou à une peine de plus de 5 ans et avoir accompli au moins la moitié devotre peine.

• Quand devez-vous faire votre demande ?Qu’il s’agisse d’une demande de procurationou de permission de sortir, il est recommandéde faire vos démarches dès maintenant.Dans le cadre d’une procuration, votredemande devra parvenir au maire avant le jourdu scrutin.

Dans tous les cas, n’hésitez pas à consulter legreffe pénitentiaire ou le CPIP qui peuventvous aider dans vos démarches.

Direction de l’administration pénitentiaire

Les 11 et 18 juin 2017, les électeurs français inscrits sur les listes électoralessont appelés à élire les nouveaux députés à l’Assemblée nationale.

Vous devez remplir les conditions pour exercer votre droit de vote et faire unedemande, dans les délais, de procuration ou de permission de sortir.

Elections législatives 2017 : comment participer ?

Le savez-vous ?

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Annexe 5

AT"E§TATIOTiI SUR rHOHNEIIBJe soussignri/aJ

Nom de naissance:

-!"

@bN. t4g5e*ü tDl

AttestË sttr l'hônnËur qu'll m'est impo*siblede ætisfahe à mss oblïgations élestorales*

v Préciser la raison (ne coc,ho qu'une seule cue)

§ en raison d'obligations p,rofessionnelles;

I en raison d'un handicap;

I pour raison de santé;

§ en raison d'assistance apportée à une personne maladeou lnfirme;

§ en raison d'obligations de formation;

§ parce que je suis en vaÊances;

EI parce que ie réside dans une commune différente decelle où .le suis inscrit(e] sur une liste élestorale. t

oate: L$-iQlôi qlXl,) I t ill LE MANDANT:{Signaturc du damandeut

t Les prrsonnôs plâcées en déteniion provisoite ou l8s dé΀nus purgeÉîl qn€ pein€ n'Êntraîôantpês d'inæpèei1È électorâle ne remplissenl pas cettê ttte*tion mai§ d§iveni foulnir un exlraitde regisl.e d'écrou

nÉcÉmssÉ À nrugrrnE AU mAHDÂHT (denandsuü

Nomdenaissance, t -frénom(s):

| (cod$r la æsê 1 paur étabtir aî€ pwfttiaa, 18 ca§ 2 Po1]t résllier unaproîlratio,1 ou les æ€os 2 et 1 po{r téiilis uûe grodrrctîon at sa établir uae

douv€lle )

r. EIn donné procuration à ;

Nom de naissance ; *Prénom {s} : N-Eæ

Prénom(s): {FFII}

fipourt'éteaion présidenüelle au la lelo l+lz lolt lzltyFd'électiên d6teduPrerniêriour

E pour le premier tour seulement'l§tpour le second tour seulêment ) ':y:n"*"I wleæ)Elpour les deux tours )

fllusqü'âu*'l I I "i I l--l-,1--l

a. Ele résilié une procuration.

oate:l I l I I I I i lHeurE:l I lt'l I I

Devant r Lieu :

Sionâtÿre et câdret de I'suterité ayant délivré lê plocuraaian:

r La tr§«|iltie pürt &e *radla pær rc durÉB tnsximslE du* .r s lâ ÉtiioiÊ nai6d d dètrois arc dên§ lës rilbâsedË oil pô{Ées ænsdâiras Pær 16 Frên!âl§ éta!Éis â l'élrârcer.

@bfi. 1,trr52rûr {D)

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Annexe 6

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Annexe 7

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Annexe 8

Annexe 9

'8ur,tr utstro.uâl âI{1 Jo altlcalqoÂrerui;d âql solnlllsuol suost.td uI ]uêuIllnJceJ pue uollezll€cIpe] Surluea'erd

l€ql luâuerlJed o1 Sutlt.r,tr ur paztseqdrua ectlsnl,lo Iâlslulur eql 'ç002;equeldagur',re.l6ero141 ,,'seuo8êlec êleurul reqtO ÊutzrluolpeJ JO 8ut1truco.t Uo4 punOr8

-IJeq lsrroJJâi s qll,e\ suosJêd lue'rerd o1 aq sÂe,ttie plnoqs 1ule 0q1,. treql sâl€1s

,icrlod uorleJluaJuoo eql ezrle8el 01 pâJrnbâr sluoupuâue 1e8e1 eqt segrlsnlluqliua*n"op ar{} 'aldLuuxâ loJ 'uotl€luêuncop ,{cr1od tue,raleJ ul pessncsrp ,{1a,trs

-uâlxo sr leq] a.tttcelqo ,(1uo aqt sI stql l€ql i3€J oql ul pêlcegêl osle sl ]nq s't\êl^-Jolul 3ql ruo"g eSrerua ,(1uo 1ou ptp uoltr€zllscrpur Sutlua,terd uo sncoS ,(luurudeqJ .uoqelndod eleuut uluârlsueul oql Suotus luaulllnJrêI pue setSoloept

lsruroJlxe luâlot^ go peards êr{1 lolunol 01 selros 8ut,tt rustro.uel eqi '11e â^oqv

salDmut n1n3at Sttowtt uotlrtzllDcryoJ puo luaw?tnJJâ"t tslxila4xa Tuat'atd o1:am1ea[Qo {-wrut,t4

aa11ta{qo [.rotu1"td

' I't âJnÊtC ur pâ1uâsoJdâr fquc[eueitrcs âJe qJIq,^A 'sâtuo3lno pâpuâlulârtl pu€ sluêunJlsur psuorsr^u3 âr{1 ueo,/|\lâq sdrqsuolleler Iesn€c pêrunsse

8ur,n rusrrol:l oql.1o ,i.roeq] ruu.r8o.r4 7 'E a.rndrT

t, ruaunrrsulIIItIIII us!ueqcauI PePuerutIIlIII/ âruoclno

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uo[Blndod êleuu1leJouê6 ôuot!pluaulnrcêr pue

uoliEzll€crpEr luê^êrd

128 Ccrptivated by,.fear

If policy makers aim to develop prison poricies that are goal oriented andevidence based. then awareness of the different ways in which fear can nega-tively influence the development, implementation, and outcomes of the policyprocess is of utmost importance. In this chapter, I argue, on the basis of areview of terrorism detention policy and relevant sociological, criminological,and psychological literature. that the policy and academù debate on prisonerradicalization and terrorism detention policy is biased by an institutionalizedmind-set of fear, which is likely to produce prison policies that are suboptimal.imbalanced, and prone to undesired outcomes. Ths core of my argument is notso much that decision makers are themselves fearful, but ihat-stakeholdersthroughout the policy process, incruding politicians, policy makers, scholars.and practitioners, adopt a discourse of threat and vulnerability. Even if thestakeholders themselves do not experience fear, a fear-oriented discourseshapes how they fra,re and respond to relevant poricy issues, rvhich impairsdecision making at different stages and levels of tire policy process (see Figure8.1). At the policy level, decision makers focus disiroportionaily on the pos-sibility of a threat and seem to use available informatiôn inadeqüately, result-ing in biased poticy decisions. At the scholarly level. fear-related institutionalbarriers hinder the generation of evidence-based knowredge, induci,gresearchers and experts to reiterate danger claims that are based À weak evid-ence and reinforce the discourse offear, Lastly, this fear-related discourse canalso spill over to the operational rever and induce càse-insensitive and rigidpolicy implementation, ultimately. the institutionalization of fèar can lead topolicy responses that are unbalanced and prone to enhance rather than reducethe threat of violent extremism.

Lack of/inadequate use

ol academicknowledge

Case-insensitiveand unnuanced

policyimplementation

Figure Fear-related policy making.

Discourse offear is adoptedthroughout thepolicy system

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Annexe 10

Etats généraux de la condition pénitentiaire

Une dizaine d’organisations a initié des Etats généraux de la condition pénitentiaire en mars dernier. Cette démarche exceptionnelle a pour ambition de favoriser la mise en œuvre d’une profonde réforme du système carcéral et, plus globalement, d’engager une vaste réflexion au sein de la société française sur le rôle et le fonctionnement de la prison. La clôture de ces Etats généraux interviendra à l’automne prochain. En totale indépendance du ministère de la Justice et de la direction de l’administration pénitentiaire, les Etats généraux ont décidé d’organiser une consultation de l’ensemble des personnes concernées, qu’il s’agisse des personnes détenues et de leurs familles, des magistrats, des avocats, des personnels pénitentiaires ou des intervenants en prison. Cette consultation est engagée à travers ce questionnaire unique qui aborde l’ensemble des aspects de la vie en détention et permet à chacun d’exprimer son point de vue. Le présent questionnaire a été remis à chaque personne incarcérée sous format papier par un délégué du Médiateur de la République. Les autres catégories de personnes sont invitées à répondre à ce questionnaire directement en ligne. Le traitement et l’analyse des questionnaires sont confiés à un professionnel des sondages, l’Institut BVA, qui garantit la neutralité du traitement des données recueillies ainsi que la confidentialité des réponses que vous fournirez. Les opinions et attentes exprimées à travers la réponse à ce questionnaire serviront à la rédaction de cahiers de doléances qui feront par la suite l’objet de débats publics en région sur une série de thèmes. La protection des droits fondamentaux de la personne en prison Q1. Concernant la protection des droits fondamentaux de la personne en prison, diriez-vous que la situation aujourd’hui en France est : O Très satisfaisante O Assez satisfaisante O Assez insatisfaisante O Très insatisfaisante O Ne se prononce pas Q2. Parmi les actions suivantes destinées à améliorer la protection des droits fondamentaux de la personne en prison, cochez celles qui doivent être mises en œuvre selon vous : O Elaborer une loi qui reconnaisse aux détenus tous les droits fondamentaux à l’exception de la liberté d’aller et venir

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O Autoriser les personnes détenues à discuter des conditions de détention entre elles, avec les personnels et les autorités pénitentiaires O Favoriser la communication des personnes détenues avec les médias au sujet des conditions de détention O Mettre en place un organe de contrôle extérieur et indépendant assurant la protection des droits et libertés en prison O Généraliser l’intervention des délégués du Médiateur de la République chargés de régler les litiges entre les personnes détenues et les administrations O Harmoniser les règlements intérieurs des établissements pénitentiaires O Prévoir un dispositif d’information permettant à chaque détenu de connaître ses droits O Autres O Ne se prononce pas Les métiers des personnels pénitentiaires Q3. Concernant les conditions d’exercice du métier de surveillant ou de travailleur social, diriez-vous que la situation aujourd’hui en France est : O Très satisfaisante O Assez satisfaisante O Assez insatisfaisante O Très insatisfaisante O Ne se prononce pas Q4. Parmi les actions suivantes destinées à améliorer les conditions d’exercice du métier de surveillant ou de travailleur social, cochez celles qui doivent être mises en œuvre selon vous : O Améliorer la formation des surveillants et en allonger la durée O Prendre en compte l’avis des surveillants et des travailleurs sociaux pour diminuer les tensions avec les personnes détenues O Reconnaître le droit de grève aux surveillants et aux travailleurs sociaux O Développer et renforcer la collaboration entre le personnel de surveillance et les travailleurs sociaux pour favoriser les démarches de réinsertion des détenus O Augmenter le nombre de travailleurs sociaux O Assouplir le devoir de réserve des surveillants et des travailleurs sociaux O Mieux faire connaître au public la nature du travail des surveillants et des travailleurs sociaux O Améliorer la formation des travailleurs sociaux O Augmenter le nombre de personnels de surveillance O Permettre un meilleur accès à des fonctions spécialisées par la formation continue O Organiser des rencontres régulières entre les personnels pénitentiaires et les détenus au sujet du fonctionnement de l’établissement O Assurer une formation permanente des personnels de surveillance et des travailleurs sociaux sur l’évolution des règles de droit qui encadrent leur travail O Autres O Ne se prononce pas

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(…) Les conditions générales de la détention Q7. Concernant les conditions de vie au quotidien des personnes détenues, diriez-vous que la situation aujourd’hui en France est : O Très satisfaisante O Assez satisfaisante O Assez insatisfaisante O Très insatisfaisante O Ne se prononce pas Q8. Parmi les actions suivantes destinées à améliorer les conditions de vie au quotidien des personnes détenues, cochez celles qui doivent être mises en œuvre selon vous : O Permettre à chaque détenu la pratique de sa religion et augmenter le nombre des aumôniers O Proposer l’achat des produits de cantine à un prix comparable à l’extérieur O Proposer à chaque détenu le prêt gratuit d’un téléviseur O Respecter des conditions minimales de superficie, de chauffage, d’éclairage et d’aération des cellules O Mettre en place des installations sanitaires (douches, toilettes) préservant l’intimité de la personne O Permettre à tout détenu qui le souhaite de loger pendant la nuit dans une cellule individuelle O Permettre un accès quotidien des détenus aux activités, à la formation ou au travail O Assurer à chaque détenu l’accès à un revenu minimal O Assurer à chaque détenu l’accès gratuit aux produits nécessaires à l’hygiène personnelle et à l’entretien de la cellule O Autres O Ne se prononce pas (…) Le régime de détention des prévenus Q23. Concernant les conditions de détention des personnes placées en détention provisoire, diriez-vous que la situation aujourd’hui en france est : O Très satisfaisante O Assez satisfaisante O Assez insatisfaisante O Très insatisfaisante O Ne se prononce pas Q24. Parmi les actions suivantes destinées à améliorer les conditions de détention des personnes placées en détention provisoire, cochez celles qui doivent être mises en œuvre selon vous : O Respecter la séparation des prévenus et des condamnés

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O Alléger le contrôle de la correspondance des prévenus O Prévoir la possibilité d’un rapprochement familial pour les prévenus O Faciliter les communications entre un prévenu et son avocat et en préserver la confidentialité O Autoriser l’affectation en établissement pour peine des prévenus dont l’instruction est terminée O Appliquer en maison d’arrêt les aspects positifs des conditions de vie en centre de détention (portes ouvertes, accès au téléphone, etc.) O Permettre à tout prévenu qui le souhaite de loger dans une cellule individuelle O Autres O Ne se prononce pas Le régime de détention des condamnés Q25. Concernant les conditions de détention des personnes condamnées, diriez-vous que la situation aujourd’hui en France est : O Très satisfaisante O Assez satisfaisante O Assez insatisfaisante O Très insatisfaisante O Ne se prononce pas Q26. Parmi les actions suivantes destinées à améliorer les conditions de détention des personnes condamnées, cochez celles qui doivent être mises en œuvre selon vous : O Permettre à tout condamné qui le souhaite de loger dans une cellule individuelle O Autoriser durant la journée la libre circulation des détenus au sein de leurs quartiers en maison centrale O Appliquer aux condamnés détenus en maison d’arrêt les aspects positifs des conditions de vie en centre de détention (portes ouvertes, accès au téléphone, etc.) O N’empêcher la libre circulation des condamnés au sein de la détention qu’exceptionnellement et pour des raisons ponctuelles O Limiter le contrôle de la correspondance des condamnés à la seule vérification par palpation O Autoriser durant la journée la libre circulation de tous les détenus au sein de leurs quartiers en centre de détention O Respecter le principe d’affectation en établissement pour peine des personnes condamnées à une peine supérieure à un an O Autres O Ne se prononce pas (…) Les mesures de sécurité Q29. Concernant le respect des droits des personnes détenues lorsqu’elles sont soumises à des mesures de sécurité, diriez-vous que la situation aujourd’hui en France est : O Très satisfaisante

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O Assez satisfaisante O Assez insatisfaisante O Très insatisfaisante O Ne se prononce pas Q30. Parmi les actions suivantes destinées à améliorer le respect des droits des personnes détenues lorsqu’elles sont soumises à des mesures de sécurité, cochez celles qui doivent être mises en œuvre selon vous : O Limiter l’usage de la fouille des personnes O Permettre un recours rapide pour contester une décision de placement à l’isolement O Interdire l’usage de menottes et d’entraves lors des consultations et hospitalisations O Permettre l’accès à des activités collectives pour tout détenu placé à l’isolement O Limiter les cas autorisés de fouilles des cellules O Permettre aux détenus d’assister à la fouille de leur cellule ou de leurs biens personnels O Limiter le recours au transfert imposé O Interdire l’intervention de personnels cagoulés O Limiter la durée du placement à l’isolement O Supprimer la fouille corporelle intégrale O Permettre un recours rapide pour contester une décision de transfert O Autres O Ne se prononce pas (…) Expression libre sur vos attentes Q37. Quels sont les aspects qui vous semblent les plus inacceptables concernant les conditions de détention dans les prisons françaises aujourd’hui ? Q38. Qu’attendez-vous d’une réforme des prisons ? Nous allons vous demander quelques informations complémentaires vous concernant. Nous vous demandons ces quelques renseignements pour analyser les résultats par grandes catégories de répondants (membres de la famille, médecins, etc). Vos réponses demeurent rigoureusement anonymes. Quel est votre statut ? O Membres de la famille d’un détenu O Personnel de l’administration pénitentiaire O Magistrats O Avocats O Personnel médical O Intervenants extérieurs O Autre

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Etes-vous ? O Un homme O Une femme Quel est votre âge ? _____ ans Quel est votre département de résidence ? Numéro du département _____ Depuis combien d’années travaillez-vous ou êtes vous en contact avec le milieu carcéral ? (si vous travaillez depuis moins d’un an merci de coder 0, si vous ne savez pas, codez 99) _____ ans

Nous vous remercions d’avoir participé à cette enquête. Les résultats de cette étude seront rendus publics par BVA et les Etats Généraux de la

condition pénitentiaire durant la première quinzaine du mois de septembre.

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INDEX THÉMATIQUE

Activités

Pages 9, 18, 19, 20, 25, 33, 39, 44, 45,

46 et 49.

Citad’elles

Pages 13, 68 et 69.

Citoyen

Pages 1, 2, 5, 11, 14, 18, 19, 21,

24, 25, 26, 29, 34 et 39, passim.

Convention européenne des Droits de

l’Homme

Pages 1, 21, 31, 33, 35, 52 et 53.

CPF Rennes

Pages 11, 13, 16, 18, 27, 42, 44 et 45.

Droit de vote

Pages 1, 3, 14, 15, 16, 17, 52

et 53, passim.

Établissement pénitentiaire

Pages 13, 14, 15, 18, 37, 40, 49, 50,

51 et 52.

Intérêt général

Pages 2, 21, 24, 26, 34 et 51.

Liberté d’expression

Pages 1, 9, 20, 22, 31, 35, 37 et 48.

Loi pénitentiaire

Pages 5, 9, 15, 18, 25, 27, 30, 32,

37 et 54.

Maison d’arrêt

Pages 39, 40, 41 46 et 51.

MA Caen

Pages 20, 23, 37, 42, 43, 44 et 47.

Parole

Pages 2, 10, 12, 13, 21, 22, 24, 26,

28, 46 et 50, passim.

RPE

Pages 9, 15, 25, 32, 33 et 37.

Sécurité

Pages 10, 27, 30, 31, 33 et 41.

Société

Pages 1, 6, 8, 12, 18, 26, 29 et 38.

Violence

Pages 10, 28, 29, 31 et 37.

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BIBLIOGRAPHIE

Manuels

GASSIN Raymond, CIMAMONTI Sylvie, BONFILS Philippe, Précis Criminologie, 7ème édition, Paris, Editions

Dalloz, 2011, 926 pages.

GUINCHARD Serge (Dir.), Lexique des termes juridiques, 20e édition, Paris, Editions Dalloz, 2013, 967 pages.

HERZOG-EVANS Martine, Droit de l’exécution des peines, 5ème édition, Paris, Dalloz, mars 2016, 1522 pages.

HERZOG-EVANS Martine, Droit pénitentiaire 2ème édition, Paris, Dalloz, mai 2012, 1073 pages.

JEANCLOS Yves, Dictionnaire de droit criminel et pénal : Dimension historique, Paris, Economica, 2011, 258 pages.

LARGUIER Jean, Criminologie et science pénitentiaire, 10ème édition, Paris, Editions Dalloz, 2005, 261 pages.

LOPEZ Gérard et TZITZIS Stamatios, Dictionnaire des sciences criminelles, Paris, Dalloz, 2004, 1013 pages.

MARQUETTY Thierry, HARDY-DOURNES Anne-Sophie, GLAYMANN Dominique (et al.), Culture générale :

Toutes fonctions publiques Ville de Paris – Catégories A et B, Foucher, Vanves, 2010, p. 206.

RENUCCI Jean-François, Droit européen des Droits de l’Homme – Droits et libertés fondamentaux garantis par la

CEDH, 6ème édition, Paris, L.G.D.J, Lextenso Editions, 2015, 506 pages.

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[http://www.conseil-etat.fr/]

[http://www.cidem.org/]

[http://www.defenseurdesdroits.fr]

[http://www.echr.coe.int/]

[http://www.farapej.fr/]

[http://www.justice.gouv.fr]

[http://larotative.org/la-parole-est-a-laccuse-lapac/]

[http://www.legifrance.gouv.fr/]

[http://oip.org]

[http://robindeslois.org]

[http://www.senat.fr]

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88

[http://www.vie-publique.fr]

[http://vosdroits.service-public.fr]

Textes de référence

Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, articles 1, 10, 11.

Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des libertés fondamentales, 4 novembre 1950.

Décret n°72-852 du 12 septembre 1972 modifiant certaines dispositions du Code de procédure pénale et

améliorant les régimes de détention et le régime d’exécution des peines, J.O.R.F, 20 septembre 1972.

Loi n°75-1329 du 31 décembre 1975 modifiant certaines dispositions du Code électoral et reconnaissant au

détenu le statut de citoyen à part en rétablissant le droit de vote au sein des établissements pénitentiaires, J.O.R.F,

3 janvier 1976.

Décret n°83-48 du 26 janvier 1983 modifiant le Code de procédure pénale en ce qui concerne la détention (spec.

Droit pour les détenus de correspondre librement par écrit), J.O.R.F, 28 janvier 1983.

Loi n°84-576 du 9 juillet 1984 tendant à renforcer les droits des personnes détenues (spec. Instauration d’un

débat contradictoire à la décision de placement initial en détention provisoire devant le juge d’instruction),

J.O.R.F, 10 juillet 1984.

Loi n°87-432 du 22 juin 1987 relative au service public pénitentiaire, J.O.R.F, 23 juin 1987.

Loi n°2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations

(spec. Entrée des avocats en détention), mise à jour le 28 mars 2017.

Recommandation n° R 2006-2, Comité des ministres, Conseil de l’Europe, portant adoption des Règles

Pénitentiaires Européennes le 11 janvier 2006 par la France.

Décret n°2007-1627 du 16 novembre 2007 modifiant le code de procédure pénale et renforçant le recours aux

aménagements de peines et la lutte contre la récidive, J.O.R.F, 18 novembre 2007.

Loi n°2007-1545 du 30 octobre 2007 instituant un Contrôleur général des lieux de privation de liberté.

Loi n°2009-1436 du 24 novembre 2009 dite loi pénitentiaire, J.O.R.F, 25 novembre 2009.

Décret n°2010-1711 du 30 décembre 2010 portant code de déontologie du service public pénitentiaire.

Note du 20 décembre 2013 relative aux règlements intérieurs des établissements pénitentiaires, NOR :

JUSK1340044N.

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Décret n°2014-442 du 29 avril 2014 portant application de l’article 29 de la loi n°2009-1436 du 24 novembre

2009 dite loi pénitentiaire, J.O.R.F, 2 mai 2014.

Loi n°2014-528 du 26 mai 2014 modifiant la loi n°2007-1545 du 30 octobre 2007 instituant un Contrôleur

général des lieux de privation de liberté, J.O.R.F, 27 mai 2014,

Loi n°2016-987 du 21 juillet 2016 portant mesures de renforcement de la lutte antiterroriste, J.O.R.F, 22 juillet

2016.

Autres

13ème législature, question écrite n°19451 de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, publiée au JO Sénat le 14/07/2011,

page 1855 et réponse du ministère de la justice et des libertés, « Droit à l’expression des personnes détenues »,

publiée dans le JO Sénat du 15/12/2011, page 3225.

BADINTER Robert, Humaniser et moderniser : bilan des réformes de Robert BADINTER, École nationale de

l’administration pénitentiaire, service documentation, 1985, 3 pages.

INSEE, « Enquête sur l’histoire familiale d’un échantillon de détenus », Cahiers de démographie pénitentiaire,

décembre 2000.

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TABLE DES MATIÈRES

REMERCIEMENTS

LISTE DES ABREVIATIONS

SOMMAIRE

INTRODUCTION ........................................................................................................................ 1

PARTIE I : UNE VOLONTE PREGNANTE DE PRISE EN COMPTE DE LA PAROLE CITOYENNE DES PERSONNES DETENUES .................................................................................................................... 7

Chapitre 1 : Une acceptation extensive de la parole des personnes détenues ............................. 7

Section 1 : Une reconsidération de la fonction de la parole ....................................................... 7

I- Un essor significatif des procédés permettant la mise en place de la parole ..................... 7 A) Une pression sociale, facteur de changement de politique .......................................... 7 B) Un encadrement législatif nécessaire à une prise en compte de la parole citoyenne .. 8

II- Une parole repensée au sein de l’établissement pénitentiaire ........................................ 10 A) Un outil fort de gestion de la détention ..................................................................... 10 B) L’emploi libérateur de la parole ................................................................................ 11

Section 2 : La diversité de la parole ......................................................................................... 12

I- La démultiplication de la parole ...................................................................................... 12 A) De l’individuel au collectif ........................................................................................ 12 B) Une forme libérée de la parole ................................................................................... 13

II- L’expression citoyenne par l’exercice du droit de vote .................................................. 14 A) Une claire valorisation du droit de vote par les acteurs du monde carcéral .............. 15 B) Une application toujours discutée en détention ......................................................... 16

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Chapitre 2 : Un triptyque (détenus/personnels/société) – instigateur de la parole citoyenne ... 18

Section 1 : La reconnaissance du « détenu-citoyen » par la communauté ............................... 18

I- La société comme support privilégié de la parole citoyenne ............................................... 18 A) L’implication des acteurs extérieurs dans l’usage de la parole citoyenne ................. 18 B) Une véritable parole par la coopération effective des acteurs ................................... 19

II- L’indispensable reconquête des droits processuels pour l’exercice de la parole citoyenne 20 A) L’introduction du contradictoire : consécration de la parole ..................................... 21 B) L’avocat comme appui de la parole citoyenne .......................................................... 22

Section 2 : Les personnes détenues : figures principales de cette parole ................................. 23

I- Les détenus, acteurs de leur parcours ................................................................................. 24 A) La prise de parole nécessaire à la construction du récit de la personne détenue ....... 24 B) L’effet de responsabilisation des personnes détenues ............................................... 25

II- Les détenus, auteurs de leur parcours ............................................................................... 26 A) L’ouverture du discours des personnes détenues à la médiatisation ......................... 26 B) L’objectif de sensibilisation à l’extérieur du monde pénitentiaire ............................ 28

PARTIE II : UNE PAROLE POURTANT NEUTRALISEE PAR LA PRIVATION DE LIBERTE ...................... 30

Chapitre 1 : Les marqueurs d’une parole illusoire .................................................................... 30

Section 1 : La sécurité au-delà de la liberté ........................................................................... 30

I- La persistance d’un contrôle a priori ............................................................................... 30 A) L’objectif sécuritaire de l’administration pénitentiaire ............................................. 30 B) Les limitations des moyens d’extériorisation de la parole citoyenne ........................ 32

II- Une application des droits purement dérogatoire ........................................................... 34 A) Une utilisation du droit limitée du fait du statut des personnes détenues ................. 34 B) Le risque de sanctions cachées .................................................................................. 35

Section 2 : Un système aux lacunes intemporelles ................................................................ 36

I- La persistance d’un frein à la parole libérée .................................................................... 36 A) Une réticence interne à la reconnaissance d’un droit à la parole .............................. 36

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B) Une réticence externe à la reconnaissance d’un droit à la parole .............................. 38

II- La parole citoyenne limitée par la logistique carcérale .................................................. 39 A) L’impossible expression en maison d’arrêt ............................................................... 39 B) De forts obstacles architecturaux ............................................................................... 40

Chapitre 2 : La pérennité d’une pratique d’exception ............................................................... 42

Section 1 : Une difficile application de la parole citoyenne .................................................. 42

I- L’impact d’éléments extérieurs à la personne ................................................................. 42 A) Un parcours du combattant dans la libération de la parole ....................................... 42 B) Un accès matériel limité de fait dans le recueil de l’information .............................. 43

II- L’impact d’éléments propres à la personne .................................................................... 45 A) Une population souvent défavorisée ......................................................................... 45 B) Le sentiment d’exclusion sociale : entrave à la parole citoyenne .............................. 46

Section 2 : Une généralisation progressive de la privation de la parole citoyenne ............... 48

I- La catégorisation des détenus comme entrave à la parole ................................................. 48 A) Le régime des détenus terroristes : un non-droit total ............................................... 48 B) Une hiérarchisation des détenus basée sur la sanction pénale ................................... 49

II- Une supervision institutionnelle inefficace .................................................................... 50 A) Des avis non-contraignants face aux violations textuelles ........................................ 51 B) L’hypothèse vaine d’une solution internationale ....................................................... 52

CONCLUSION ........................................................................................................................... 54

DOCUMENTS ANNÉXÉS ........................................................................................................ 56

INDEX THÉMATIQUE ............................................................................................................. 77

BIBLIOGRAPHIE ...................................................................................................................... 78

TABLE DES MATIÈRES .......................................................................................................... 90

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La parole citoyenne à l’épreuve de la privation de liberté

Lieux souvent peu identifiés et éloignés du regard de la société, les prisons françaises assouvissent le

phantasme d’un espace écarté de toute égalité et de tous droits. Pourtant, le premier article de la

Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, pose que toute personne, qu’elle soit libre

ou privée de liberté, est partie prenante de la communauté. Aussi, cette dualité dans l’appréciation

des droits, place en son cœur la problématique de la parole citoyenne.

La prison tend aujourd’hui à se transformer. Les procédés de mise en place de l’expression renforcent

la qualité citoyenne des personnes détenues. Malgré la défense de ce principe dans sa fonction et dans

son application, ce droit premier reste enfoui dans la réalité pénitentiaire. De fait, l’équilibre entre

droits et sécurité semble déséquilibré par nature. Inévitablement, les personnes détenues restent des

citoyens, mais des citoyens différents des autres.

*******************************

At first glance, French prison are considered by society as a remote space, far away from society’s

eye without any rights and equality. However, freedom of speech is consecrated in the Declaration of

the Rights of Man and of the Citizen, as a constitutional value in France since 1789. This inherent

human right is protected and involve same rights for all citizens. But, the principle may not be applied

equally for everybody, depending on various factors. It raises the issue of citizen speech in jail.

The prison now tends to change, and the administration is working to improve this right. But, despite

these guarantees, there are exceptions to free speech: national security and public order. The balance

between liberty and security seems to be unbalanced by nature. Inevitably, prisoners stay citizens, but

necessarily, citizens different from the others.

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Mots-clefs : Citoyenneté – Parole – Droits de l’homme – Sujet de droit – Lien social – Sécurité –

Société.