La Morte amoureuseet autres nouvelles

THÉOPHILEGAUTIER

La Morte amoureuseet autres nouvelles

Présentation, notes et dossier parPERRINE DE LA ROCHE,

professeur de lettres

Le fantastiquedans la collection «Étonnants Classiques»BRADBURY, L’Heure H et autres nouvelles

L’Homme brûlant et autres nouvellesBUZZATI (Dino), Nouvelles étranges et inquiétantesCHAMISSO, L’Étrange Histoire de Peter SchlemihlContes de vampires (anthologie)GAUTIER, La Morte amoureuse. La Cafetière et autres nouvellesGOGOL, Le Nez. Le ManteauHOFFMANN, L’Enfant étranger

L’Homme au sableLe Violon de Crémone. Les Mines de Falun

KAFKA, La MétamorphoseLE FANU (Sheridan), CarmillaMATHESON (Richard), Au bord du précipice et autres nouvelles

Enfer sur mesure et autres nouvellesMAUPASSANT, Le Horla et autres contes fantastiquesMÉRIMÉE, La Vénus d’IlleMonstres et chimères (anthologie)Nouvelles fantastiques 1. Comment Wang-Fô fut sauvé et autres récitsNouvelles fantastiques 2. Je suis d’ailleurs et autres récitsPOE, Le Chat noir et autres contes fantastiquesPOUCHKINE, La Dame de pique et autres nouvellesSHELLEY, FrankensteinSTEVENSON, Le Cas étrange du Dr Jekyll et de Mr HydeSTOKER, DraculaVILLIERS DE L’ISLE-ADAM, Véra et autres nouvelles fantastiquesWILDE, Le Fantôme de Canterville et autres nouvelles

© Flammarion, Paris, 1995.Édition revue, 2014.ISBN : 978-2-0813-3025-2ISSN : 1269-8822

S O M M A I R E& Présentation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5

Théophile Gautier, un conteur fantastique 5

Fantastique et romantisme 5

Deux influences majeures : le roman noiret les contes d’Hoffmann 7

Gautier, un conteur original 8

Art et amour impossible 9

& Chronologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11

La Morte amoureuseet autres nouvelles

La Cafetière 19

Omphale 31

La Morte amoureuse 45

Le Pied de momie 83

& Dossier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101

Êtes-vous un lecteur attentif ? 103

À chaque conte son narrateur 104

Voyages dans l’espace et dans le temps 104

Explicable ou inexplicable ? 105

Retrouvez le fil de l’histoire 107

Enquête sur d’étranges événements 108

Quatre «mortes amoureuses » : anges ou démons ? 110

Doubles imaginaires 112

Mais tout cela est-il bien sérieux ? 112

Bilan 114

PRÉSENTATIONThéophile Gautier,

un conteur fantastiqueLe nom de Théophile Gautier évoque peut-être pour vous

Le Capitaine Fracasse ou Le Roman de la momie, mais saviez-vousqu’il avait consacré l’essentiel de son œuvre narrative à la littéra-ture fantastique ? Dans Omphale, le narrateur, qui ressembleétrangement au jeune Gautier, déclare se destiner à « la profes-sion de conteur fantastique » : un clin d’œil malicieux de l’auteurqui va effectivement écrire treize récits dans cette veine ! Aprèsune première et brève vocation de peintre, il débute sa carrière àl’âge de vingt ans avec La Cafetière, conte publié en 1831. Trente-cinq ans plus tard, son dernier récit sera Spirite, sous-titré parl’auteur « nouvelle fantastique ».

Pourquoi ce besoin de revenir constamment à un genre siparticulier ?

Fantastique et romantisme

Théophile Gautier n’est pas le seul écrivain de son époque às’intéresser à ce type de récit. Au début du XIXe siècle, et notam-ment autour des années 1830, un nombre impressionnant de

Présentation | 5

romans ou nouvelles fantastiques paraissent en France ; onassiste à une véritable explosion du genre.

Le mot fantastique, à l’origine synonyme d’imaginaire, prenddès lors un sens plus précis pour désigner un univers mystérieuxoù le surnaturel surgit brusquement dans le monde réel. Plu-sieurs artistes veulent donner à leur création une teinture « fan-tastique » : musiciens tels que Berlioz qui compose sa Symphoniefantastique en 1830, peintres visionnaires comme Delacroix illus-trant le Faust de Goethe (histoire d’un homme qui vendit sonâme au diable pour satisfaire un insatiable désir de jouissance etde connaissance) et surtout écrivains de cette génération roman-tique dont Gautier est l’un des principaux représentants.

C’est en effet à cette même époque que se révèle le roman-tisme français : un groupe de jeunes gens exaltés, contestataires,se réunit dans des ateliers d’artistes, des salons littéraires oucénacles comme celui animé par Victor Hugo, pour définir unnouvel idéal politique et artistique. Toutes les occasions sontbonnes pour défendre leurs convictions ; la plus fameuse est labataille d’Hernani livrée en 1830 par les troupes romantiqueslors de la première représentation du drame de Hugo pourdéfendre une nouvelle forme de théâtre contre les partisansdu théâtre classique (tel celui de Corneille et Racine). Gautier,alors âgé de dix-neuf ans et arborant avec provocation un giletrouge écarlate, est l’un des plus bouillants militants de cette« révolution ».

Au même moment s’affirme sa vocation de conteur fantas-tique avec la publication de ses premiers récits où l’on trouve denombreuses allusions à ses années de bohème artistique : leshéros-narrateurs de La Cafetière, d’Omphale et du Pied de momiesont peintres, amateurs d’art et d’antiquités ou écrivains débu-tants comme Gautier et ses camarades ; comme eux, ils sontrêveurs, idéalistes, hantés par l’image d’une femme inaccessibleet fascinés par des époques et des civilisations éloignées : le récit

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fantastique apparaît à Gautier comme un moyen de réaliser sesrêves.

Mais pour aborder ce genre littéraire, notre conteur a d’abordsubi l’influence de quelques précurseurs…

Deux influences majeures :le roman noir et

les contes d’Hoffmann

Gautier et les romantiques viennent de découvrir avec enthou-siasme les romans noirs anglais appelés aussi romans gothiques,écrits à la fin du XVIIIe siècle : Le Château d’Otrante de HoraceWalpole, Le Moine de Lewis par exemple, fascinent ces nouveauxlecteurs par leur univers de châteaux et de cimetières hantés,d’apparitions nocturnes et souvent démoniaques ; un climat d’an-goisse en accord avec le goût du temps pour les ténèbres, lesruines et toutes les forces mystérieuses qui peuvent s’y déployer.Ainsi le héros de La Morte amoureuse et son mystérieux guidechevauchent vers le palais de Clarimonde sur « deux chevauxnoirs comme la nuit », tels « deux spectres à cheval sur le cauche-mar » dans un paysage d’épouvante. La scène finale d’exorcismedans un cimetière rappelle également l’atmosphère macabre duroman gothique.

Mais la génération romantique s’enflamme surtout pourla littérature allemande et les Contes d’Hoffmann, traduits enfrançais en 1829. Immédiatement, Gautier considère Hoffmanncomme le grand maître du fantastique, qui devient un genre litté-raire à part entière : il préface et commente ses œuvres et s’en

Présentation | 7

inspire ouvertement pour La Cafetière, Omphale et Onuphrius,sous-titré « Les vexations fantastiques d’un admirateur d’Hoff-mann ». Il emprunte même à l’auteur son prénom, Théodore, etcelui de certains de ses personnages pour baptiser le narrateur deLa Cafetière, son héroïne Angéla et le prêtre Sérapion dans LaMorte amoureuse !

« Le merveilleux d’Hoffmann, écrit Gautier, a toujours un pieddans le monde réel. » Cette définition s’applique parfaitement àl’univers fantastique de Gautier : une situation initiale réaliste,souvent familière, comme dans La Cafetière, Omphale ou Le Piedde momie, et un dérapage soudain dans l’étrange ou le sur-naturel suivi d’un retour brutal à la réalité… Avec ce « réalismefantastique », nous sommes déjà assez loin des châteaux hantéset des moines démoniaques du roman gothique.

Gautier, un conteur original

Gautier va en effet prendre ses distances avec la mode dufantastique pour trouver son propre style et traduire ses obses-sions personnelles.

Il exprime sa différence par l’humour : humour présent dansnos contes sous forme de clins d’œil malicieux ou désenchantésdes narrateurs qui sont souvent les doubles du conteur ; humourà l’égard du genre fantastique, que Gautier ne semble jamaisprendre tout à fait au sérieux. Omphale s’achève sur cettepirouette : « Et puis je ne suis plus assez jeune ni assez joligarçon pour que les tapisseries descendent du mur en monhonneur. »

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Mais il prend aussi ses distances avec le romantisme en culti-vant la beauté parfaite, ce qu’il appellera « l’art pour l’art ».

Art et amour impossible

Le culte de la beauté idéale est sans doute un des thèmescommuns à tous les contes fantastiques de Gautier.

De sa première vocation de peintre et de la fréquentationassidue des ateliers et musées, il a gardé une véritable passionpour l’art ; les références à la peinture, à la sculpture et aux artsdécoratifs abondent dans les Contes fantastiques : le mobilierrégence, le style Pompadour, l’art égyptien y sont décrits avecun plaisir évident. C’est aussi avec ce regard de peintre qu’il faitle portrait des héroïnes des quatre contes.

La fascination pour la beauté est intimement liée à larecherche de l’amour idéal que Gautier semble avoir vainementpoursuivi toute sa vie : la dernière phrase de La Cafetière : « Jevenais de comprendre qu’il n’y avait plus pour moi de bonheursur la terre » résonne comme une confidence de l’auteur. Chaquerécit est une variation sur le thème romantique de l’amourimpossible. Les mystérieuses apparitions – Angéla, Omphale,Clarimonde et Hermonthis – sont d’une beauté si parfaite qu’elleéchappe à l’analyse et ne peut se décrire que par référence à desœuvres d’art dont elles sont d’ailleurs souvent les incarnationsfugitives. Elles sont d’autant plus inaccessibles qu’elles appar-tiennent presque toutes à une autre époque – Antiquité égyp-tienne, Régence, passé plus ou moins lointain auquel ellesinitient le narrateur et le lecteur.

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Création maquette intérieure :Sarbacane Design.

Composition : IGS-CP.No d'édition : L.01EHRN000421.N001

Dépôt légal : janvier 2014