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La Météorologie - n° 59 - novembre 2007 39 Figure 1 - Limites de la montagne corse. En blanc figurent les zones de plaine et en gris les espaces d’altitude comprise entre 500 et 800 mètres, non considérés comme appartenant au domaine de montagne méditerranéenne. Les points noirs représentent les 213 postes météorologiques référencés par Météo-France. Les principaux sommets sont signalés. Climatologie La montagne corse et ses caractéristiques climatiques Sandra Rome (1) et Jean-Paul Giorgetti (2) (1) UMR Pacte - Université Joseph-Fourier Grenoble 1 14 bis, avenue Marie-Reynoard - 38100 Grenoble [email protected] (2) Météo-France - Centre départemental de la météorologie de Haute-Corse Bastia-Poretta Résumé Parmi les six massifs français recon- nus, celui de Corse est l’un des plus petits, mais la topographie insulaire est accidentée. Pourtant, cet espace est convoité pour l’attrait touristique lié à l’authenticité et la préservation des paysages. L’essentiel des villages de la montagne corse est situé entre 300 et 900 mètres d’altitude. Or, dès qu’un événement météorologique extrême se produit, la population montagnarde est momentanément coupée du reste de l’île. Nous présen- tons ici les grands traits du climat dans le domaine de montagne en Corse, c’est-à-dire au-dessus de 800 mètres d’altitude, avant de pro- poser deux phénomènes météorolo- giques extrêmes ayant touché tout ou partie du massif insulaire. Il apparaît que le climat de la montagne corse présente des caractères typiquement méditerranéens comme des jours de forte chaleur et un déficit hydrique en été, mais aussi des nuances alpines, tel un plus grand nombre de jours de pluie et de gel. Abstract Corsican mountains and its climatic features Corsica is an island of steep moun- tains whose wildness attracts many tourists. Most Corsican mountain villages lie between 300 and 900 meters and are liable to be isola- ted by extreme phenomena. We begin by describing the main features of the mountain climate of Corsica, i.e. above 800 meters. We then discuss two extreme weather phenomena affecting all or part of the island. It appears that the Corsican mountain climate has typical Mediterranean characteristics like days of drought and great heat in summer, but also of the alpine nuances, such as more days of rain and frost. L a Corse est la quatrième plus grande île de la Méditerranée après la Sicile, la Sardaigne et Chypre. Avec ses 183 km de long et ses 83,5 km de large, cette « montagne dans la mer », ainsi qualifiée par le géographe alle- mand Ratzel en 1882, est la seule région du bassin méditerranéen qui offre un espace de montagne supérieur au tiers de sa superficie. En effet, 39 % de ses 8 722 km 2 s’élèvent au-dessus de 600 mètres d’altitude, avec une altitude moyenne de 568 mètres et cent vingt cimes dépassant 2 000 mètres. Si la montagne corse est un milieu difficile en raison de la topographie insulaire accidentée, cet espace est convoité pour l’attrait touris- tique lié à l’authenticité et la préservation des paysages. Toutefois, la localisation de la plupart des villages de monta- gne en Corse, entre 450 et 900 mètres d’altitude, tient avant tout à des facteurs histo- riques (voir l’ennemi arriver) et sanitaires (éviter les épidé- mies de malaria des plaines marécageuses). La position géographique fait que l’île de Beauté appartient en grande partie au domaine climatique méditerranéen. Cependant, l’île connaît aussi des nuances du climat alpin, en particulier en hiver (Rome et Giorgetti, 2006). Nous analysons ici le réseau météorologique de l’île, avant d’étudier quelques caractères clima- tiques caractéristiques de la montagne corse, saisonniers, d’une part, et liés à des aléas (1) météo-climatiques aux lour- des conséquences, d’autre part. (1) Aléa : étymologiquement, aléa vient de « coup de dés », phénomène aléatoire en probabilité ; c’est un incident du hasard. L’aléa désigne la pro- babilité d’occurrence d’un phénomène (avalan- che, crue, inondation...).

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La Météorologie - n° 59 - novembre 2007 39

Figure 1 - Limites de la montagne corse.En blanc figurent les zones de plaine

et en gris les espaces d’altitude comprise entre 500 et 800 mètres,

non considérés comme appartenant audomaine de montagne méditerranéenne.

Les points noirs représentent les 213 postes météorologiques référencés

par Météo-France. Les principaux sommets sont signalés.

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La montagne corse et ses caractéristiques climatiquesSandra Rome(1) et Jean-Paul Giorgetti(2)

(1) UMR Pacte - Université Joseph-Fourier Grenoble 114 bis, avenue Marie-Reynoard - 38100 [email protected]

(2) Météo-France - Centre départemental de la météorologie de Haute-CorseBastia-Poretta

RésuméParmi les six massifs français recon-nus, celui de Corse est l’un des pluspetits, mais la topographie insulaireest accidentée. Pourtant, cet espaceest convoité pour l’attrait touristiquelié à l’authenticité et la préservationdes paysages. L’essentiel des villagesde la montagne corse est situé entre300 et 900 mètres d’altitude. Or, dèsqu’un événement météorologiqueextrême se produit, la populationmontagnarde est momentanémentcoupée du reste de l’île. Nous présen-tons ici les grands traits du climatdans le domaine de montagne enCorse, c’est-à-dire au-dessus de800 mètres d’altitude, avant de pro-poser deux phénomènes météorolo-giques extrêmes ayant touché tout oupartie du massif insulaire. Il apparaîtque le climat de la montagne corseprésente des caractères typiquementméditerranéens comme des jours deforte chaleur et un déficit hydrique enété, mais aussi des nuances alpines,tel un plus grand nombre de jours depluie et de gel.

AbstractCorsican mountains and its climaticfeatures

Corsica is an island of steep moun-tains whose wildness attracts manytourists. Most Corsican mountainvillages lie between 300 and900 meters and are liable to be isola-ted by extreme phenomena. We beginby describing the main features of themountain climate of Corsica, i.e.above 800 meters. We then discusstwo extreme weather phenomenaaffecting all or part of the island. Itappears that the Corsican mountainclimate has typical Mediterraneancharacteristics like days of droughtand great heat in summer, but also ofthe alpine nuances, such as more daysof rain and frost.

L a Corse est la quatrième plusgrande île de la Méditerranée aprèsla Sicile, la Sardaigne et Chypre.

Avec ses 183 km de long et ses 83,5 kmde large, cette « montagne dans la mer »,ainsi qualifiée par le géographe alle-mand Ratzel en 1882, est la seule régiondu bassin méditerranéen qui offre unespace de montagne supérieur au tiersde sa superficie. En effet, 39 % de ses8 722 km2 s’élèvent au-dessus de600 mètres d’altitude, avec une altitudemoyenne de 568 mètres et cent vingtcimes dépassant 2 000 mètres. Si lamontagne corse est un milieu difficileen raison de la topographie insulaireaccidentée, cet espace estconvoité pour l’attrait touris-tique lié à l’authenticité et lapréservation des paysages.Toutefois, la localisation de laplupart des villages de monta-gne en Corse, entre 450 et900 mètres d’altitude, tientavant tout à des facteurs histo-riques (voir l’ennemi arriver)et sanitaires (éviter les épidé-mies de malaria des plainesmarécageuses).

La position géographique faitque l’île de Beauté appartienten grande partie au domaine

climatique méditerranéen. Cependant,l’île connaît aussi des nuances du climatalpin, en particulier en hiver (Rome etGiorgetti, 2006). Nous analysons ici leréseau météorologique de l’île, avantd’étudier quelques caractères clima-tiques caractéristiques de la montagnecorse, saisonniers, d’une part, et liés àdes aléas(1) météo-climatiques aux lour-des conséquences, d’autre part.

(1) Aléa : étymologiquement, aléa vient de « coupde dés », phénomène aléatoire en probabilité ;c’est un incident du hasard. L’aléa désigne la pro-babilité d’occurrence d’un phénomène (avalan-che, crue, inondation...).

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Photo 1 - Vue sur le lac de Renoso et le massif de Punta Alle Porte (2 313 m), depuis la Maniccia. (Photo Y.Graudé, Météo-France, Bastia-Poretta)

Le massif corse, entre Alpes et Méditerranée

Une limite inférieure fixée à 800 mètres d’altitudeLa Corse est traversée par le 9e méridienEst et le 42e parallèle Nord. Le massifcorse est donc la montagne la plusorientale de France métropolitaine, et laplus méridionale avec les Pyrénées. Lerelief corse est très escarpé puisque70 % des terres sont situées à une alti-tude supérieure à 200 m et un tiers del’île dépasse 500 m (figure 1).

La montagne française couvre unesuperficie de 124 000 km2 sur laquellevivent 4 350 000 habitants répartis sur6 128 communes. En élargissant auxfonds de vallée, aux piémonts et auxvilles, on passe à 160 000 km2, soit29 % du territoire national métropoli-tain, et à 7 700 000 habitants concernés,sur six massifs : les Alpes (autrefoisséparées en Alpes du Nord et Alpes duSud), le Massif central, les Vosges, leJura, la Corse et les Pyrénées.

Bien qu’il soit difficile de délimiter defaçon objective les zones de montagne,plusieurs approches fournissent descritères qualitatifs et quantitatifs.Depuis les articles 3 et 4 de la loi dite« montagne », les zones de montagneen métropole comprennent les commu-nes ou parties de communes caractéri-sées par une limitation considérabledes possibilités d’utilisation des terreset un accroissement important descoûts des travaux dus, soit à l’existencede conditions climatiques très diffici-les du fait de l’altitude, soit à la pré-sence de fortes pentes, soit à lacombinaison de ces deux facteurs lors-qu’ils sont chacun moins accentués(Journal officiel de la République fran-çaise, 1985). La haute montagnecomprend les territoires situés au-des-sus de 800 m dans les Vosges, 1 100 mdans le Jura, 1 600 m dans les Alpes,1 400 m dans les Pyrénées, 1 200 mdans le Massif central et 1 100 m enCorse (Journal off iciel de laRépublique française, 1977). L’altitudede 600 à 800 mètres selon les massifs,est retenue pour marquer la limite infé-rieure du domaine montagnard fran-çais, soit 800 mètres pour les

montagnes en France méditer ra-néenne. Les textes encadrant la poli-tique de la montagne ont évolué, avecnotamment la « loi sur le développe-ment des territoires ruraux » publiée le23 février 2005 et la « loi d’orientationagricole » publiée le 5 janvier 2006.

Les parties axiales de la montagne corsesont souvent partiellement dénuées devégétation, en raison de l’altitude biensûr qui limite le développement desplantes, mais aussi des pentes, ce quilaisse paraître les paysages rocailleux,souvent de type granitique (photos 1 et2). En effet, la structure géologique dela Corse (figure 2) fait qu’elle comptesur les deux tiers ouest de l’île, de laBalagne à l’Alta Rocca en passant parles massifs du Cinto, du Rotondo et du

Rinosu, des formations anciennesdatant de l’orogenèse(1) hercynienne. Cesocle cristallin supporte pourtant lesplus hauts sommets et s’étire du nord-nord-est au sud-sud-est ; cette « Corsehercynienne » est constituée de rochesplutoniques (granites, diorites, gabbros)et d’un complexe volcanique rhyoli-tique dans les massifs du Cinto notam-ment et d’Osani.

Le quart nord-est de l’île, du cap Corseà la Castagniccia, est constitué deroches métamorphiques datant des oro-genèses alpine et pyrénéo-provençale.Cette « Corse alpine » d’âge tertiaire,

Photo 2 - Vue de la Maniccia sur la Punta Muzzellu (2 342 m).

(Photo Y. Graudé, Météo-France, Bastia-Poretta)

(1) Pour les termes géologiques, voir l’encadrépage suivante.

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Figure 2 - Structure géologique simplifiée de la Corse. (Source : Bureau de recherches géologiques et minières – BRGM)

est constituée d’ophiolites, de schistessériciteux, de prasinites, de cipolins, dequartzites, de serpentines et de gneissentre autres. La « dépression centrale »,entaillée par de profonds accidents tec-toniques, forme avec la vallée duTavignano, un couloir isolant le massifde Tende cristallin (Agriate) et donc la« Corse alpine » de la « Corse hercy-nienne ». Les terrains sédimentairesmiocènes (tertiaire) et quaternaires sontponctuellement constitués par les bas-sins calcaro-gréseux de Saint-Florent etde Bonifacio, et par les conglomérats etles dépôts marno-sableux d’originemarine et continentale de la Plaineorientale. Ces formations assez tendressont fortement entaillées par les coursd’eau.

La roche mère conditionne, avec le cli-mat, les types de sols et par conséquentla végétation qu’ils supportent.

Glossaire géologique

Conglomérat : roche sédimentairedétritique, formée de galets (poudin-gues) ou de fragments anguleux (brè-ches) ou d’autres roches cimentées.

Hercynien(ne) : se dit de la périodegéologique faisant référence aux plisse-ments datant de l’ère primaire ayantaffecté la France entière, entre 230 et345 millions d’années.

Miocène : période géologique de l’èretertiaire débutant il y a 23 millions d’années.

Orogenèse : plissements à l’origine dela formation des chaînes de montagneou ayant af fecté d’autres terrains.L’orogenèse alpine comprend les plis-sements alpins, jurassiens, pyrénéens,provençaux et corses qui se sont pro-duits à l’ère tertiaire dès la fin du cré-tacé (135 millions d’années) à la fin dunéogène (2 millions d’années).

Plutonique : synonyme d’endogène ;se dit d’une roche magmatique quin’est pas apparue à la surface de laTerre lors de sa formation (exempledes granites). Ces roches ont une struc-ture grenue : les cristaux se distinguentà l’œil nu.

Rhyolite : roche d’origine volcaniquede même composition chimique quele granite, mais de structure micro-lithique (les cristaux sont très petits etse distinguent à la loupe).

Roche mère : roche en place n’ayantencore subi aucune altération.

Étagement de la végétation et conditions climatiquesLa limite de la montagne peut égalementêtre définie par des divisions biogéogra-phiques déterminées par des séries devégétation(1), fonction de l’étagementaltitudinal (figure 3). La limite infé-rieure de l’étage montagnard, caractériséen Corse par les séries du pin laricio, dusapin et du hêtre, commence vers 1 100-1 200 mètres, contre 500 mètres dans lesVosges, 600 mètres dans les Alpes duNord et 800 mètres dans les Alpes du Sud(Ozenda, 1985). L’étage montagnardatteint 1 750-1 800 mètres, limite supé-rieure des forêts en Corse (Dupias et al.,1965) contre 1 600 à 1 900 mètres enmoyenne dans l’ensemble des montagnesfrançaises. L’étage subalpin s’étendentre 1 750-1 800 mètres et 2 000-2 100 mètres en moyenne ; il est caracté-risé en Corse par le développement de

fourrés (arbustes tels l’aulne odorant etdes fougères) et de landes (genêts et thymnotamment), sans véritables arbres.L’étage alpin est situé au-delà de la limitesupérieure des brousses et des landes àarbustes nains et pelouses, soit au-dessusde 2 000-2 100 mètres ; il est caractérisépar la durée de l’enneigement, la rigueurde l’hiver, les fortes amplitudes ther-miques et une relative sécheresse estivale.Par ailleurs, une part non négligeable dumassif corse est protégée grâce à la créa-tion en 1972 du Parc naturel régional deCorse qui couvre 350 510 hectares répar-tis sur cent quarante-cinq communes(Parc naturel régional de Corse, 2006).

Compte tenu des spécificités de cet éta-gement de végétation, les facteurs cli-matiques susceptibles d’expliquer lesprincipaux traits du climat de montagnede l’île sont analysés en distinguant troistypes de stations climatiques classées

(1) Série de végétation : type de végétation spon-tanée appelée série ou étage de végétation par lesbotanistes en fonction d’une succession continueallant de la prairie aux landes, aux hautes brous-sailles puis à la forêt, stade ultime d’évolutionsans contrainte humaine.

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Figure 4 - Le réseau météorologique utilisé. À gauche : carte des stations en fonction de l’altitude à partir des données de la base Aurelhy de Météo-France. À droite en haut :tableau des 14 stations de montagne ; à droite en bas : relation entre l’altitude et le nombre de postes météorologiques référencés par Météo-France pour la Corse (les his-togrammes correspondent aux 213 stations de mesure de la température de l’air).

Figure 3 - L’étagement de la végétation en Francemétropolitaine (à gauche) et en Corse (à droite).

selon leur altitude : les stations dites deplaine, situées à moins de 500 mètresd’altitude, celles dites « des villages »,

Étage collinéen- série du chêne rouvre

- série du chêne pubescent- série du pin maritime

Étage méditerranéensupérieur - pin mésogéen - faciès à châtaignier, aulne cordé, charme houblon, chêne sessile - série du chêne pubescent - série du chêne vert propéméditerranéeninférieur - série du chêne liège - série du chêne vert - séries des pins pignon et d’Alep

Étage nival

Étage alpin(sans arbres)

Étage subalpinséries : pin à crochets, pin cembrot, mélèze, aulne vert

Étage montagnardHumide : séries de l’épicéa,du hêtre et du sapinSec : série du pin sylvestre

Étage alpinPoa violacea

Étage subalpingenêt, thym, aulne odorant,

genévrier nain, spinella

Étage montagnard- série du sapin- série du hêtre

- série du pin laricio

Nord, ubac ou ombrée Sud, a sulanaSud, adret ou soulane Nord, umbria

Moyenne montagne

Moyenne montagne

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Altitude(m)

Étagement de la végétation dans les montagnes françaises

Montagne corseMontagnes françaises métropolitaines (hors Corse)

situées entre 500 et 800 mètres, et cellesde montagne localisées au-delà de800 mètres.

Climat et variabilitésaisonnière

Un réseau de mesuresinégalement répartiUne recherche précédente montre l’ani-sotropie géographique du réseau ther-mique actuel (Rome, 2005) ; parexemple, sur les deux cent treize sta-tions référencées en Corse par Météo-France, seules trente-huit fournissentdes données quotidiennes de tempéra-ture minimale (Tn) et de températuremaximale (Tx), sans données manquan-tes pour la période allant du 1er juin au31 août 2003. Les postes fournissantdes données sans lacunes sont pourmoitié situés en dessous de 200 mètres

Code Station Lieu-dit Altitude (en m)

1 Albertacce Sponde 1 9802 Ghisoni Village 1 6753 Bastelica Plateau d’Ese 1 6204 Asco Station ski 1 4235 Albertacce Col de Vergio 1 4156 Carbini Col de Mela 1 0687 Évisa ONF Aiton 1 0008 Porto-Vecchio M.F. Marghese 9809 Calacuccia Gendarmerie 875

10 Sampolo Village 85011 Évisa Gendarmerie 83012 Bastelica Village 82813 Felce Bourg 81014 Vivario Col de la Serra 806

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d’altitude, là où vit une grande partie dela population. Sur les deux cent treizestations répertoriées, seules 20 % sontlocalisées au-dessus de 625 mètres,aucune au-delà de 1 450 mètres (figure4). Le présent travail s’appuie sur qua-torze stations de montagne (altitudesupérieure à 800 m), quatorze stationsvillageoises (altitude entre 500 et800 m) et quarante-sept stations deplaine (altitude inférieure à 500 m)réparties sur l’ensemble de l’île.

Caractéristiques généralesdu climat de montagne Le climat de montagne est essentielle-ment caractérisé par une diminutionrégulière de la température avec l’alti-tude et une augmentation des précipita-tions, des variations thermiquesannuelles et diurnes importantes, desprécipitations pluvieuses et neigeuses etdes vents fortement conditionnés par lerelief local.

Un gradient pluviométrique révèle unecroissance des pluies de l’ordre de160 mm par 100 mètres entre Ajaccio etle plateau d’Ese sur la façade occidentalede la Corse, et entre Aléria et la station deski de Ghisoni sur le versant oriental dumassif. Corollairement à l’augmentationdes pluies, l’altitude explique près de78 % de l’augmentation du nombremoyen annuel de jours de pluie, mais ellen’exprime que 46 % du nombre moyenannuel de jours de gel (figure 5) ; celaindique que d’autres facteurs hormis l’altitude, comme par exemple la positiontopographique de la station ou des effetslocaux, influent également sur le nombrede jours de gel.

De plus, l’insolation est relativementplus importante en montagne, car lesnuages bas qui diminuent l’ensoleille-ment dans les vallées font souvent placeau ciel clair en altitude, principalementen hiver. Des effets de foehn peuvent seproduire de part et d’autre d’un massifmontagneux en fonction de l’orienta-tion du relief par rapport aux fluxatmosphériques dominants, et ce phé-nomène est fréquent en Corse.

Un régime pluvio-thermiqueà la fois méditerranéen et alpinLa variabilité saisonnière moyenne despluies et des températures des stations demontagne en Corse (altitude supérieure à800 mètres) montre un régime caractéris-tique du domaine méditerranéen (figure 6).

Figure 5 - Relation entre l’altitude des stations en Corse et le nombre annuel moyen (1971-2000) de jours de pluie (à gauche) et de jours de gel (à droite). En haut et à gauchede chaque graphique figure l’équation de la relation linéaire, suivie du coefficient de détermination (R2).

500

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2 000 y = 28,256 x -1 802,9R2 = 0,78

y = 11,666 x + 153,4R2 = 0,46

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Altit

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Stations Nombre moyen annuel de jours de pluie Nombre moyen annuel de jours de gel Moyenne 1971-2000StationsTendanceTendance

Légende des diagrammes

Précipitations (P)Températures (T)Tx° moy

T° moy

Tn° moy

AAscoAscoco

ndendeSpondeSpoSppo

C iCarbiniCarbirb

GhisoniG

eceelceFelc

Source base Aurélhy de Météo-France D'après Rome, 2007

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J F M A M J J A S O N D

Albertacce Sponde (1 980 m)P : 1 643 mm

T : 8,3 °C

Asco station ski (1423 m) P : 1 379 mm

T : 8,9°C

Bastelica Plateau d'Ese (1 620 m)P : 1 644 mm

T : 12,8 °C

Felce (810 m)P : 1 297 mm

T : 12,4 °C

Sampolo (850 m)P : 1 301 mm

T : 11,8 °C

Ghisoni (1 675 m)P : 1 722 mm

T : 10,1 °C

Carbini col de Mela (1 068 m)P : 1 250 mm

T : 12,2 °CFigure 6 - Régimes climatiques de quelques stations demontagne corses. Les diagrammes ombro-thermiques(du grec ombros, eau, et thermos, température) sontconstruits à partir des normales 1971-2000 de la baseAurelhy de Météo-France. Les graphiques présentent,sur une échelle à double graduation, la hauteur de préci-pitations (P) moyennes mensuelles par des histogram-mes et la température (T) moyenne mensuelle par unecourbe. En domaine méditerranéen, l’échelle respecte larelation P = 2T (relation de Gaussen), ici P = 4T (milieude montagne).

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Figure 7 - Précipitations moyennes cumulées en Corse pour l’année, au printemps, en été, en automne et en hiver, représentées d’après les normales 1971-2000 de la baseAurelhy de Météo-France.

Figure 8 - Régime pluviométrique moyen sai-sonnier dans l’ensemble des stations du réseau météorologique de Corse pour trois types destations en fonction de leur altitude, d’après les normales 1971-2000.En abscisses figurent lesmois de l’année.

Le climat méditerranéen est déterminépar la persistance de sécheresse estivale,d’étés chauds (de 22 à 25 °C en moyenneen juillet et août) accompagnés d’unegrande luminosité du ciel. À l’intérieurdes terres se produisent des manifesta-tions orageuses, parfois violentes en find’été et début d’automne. Les hivers sontrelativement doux (de 7 à 9 °C en jan-vier). Les vents locaux (mistral, tramon-tane, libeccio) sont fréquemmentviolents, atteignant des forces moyennesde 60 à 80 km/h. Les précipitations tom-bent souvent sous forme d’averses répar-ties sur 50 à 80 jours seulement, avecdeux apports principaux, l’un en find’automne, l’autre en début d’hiver et deprintemps (figures 6 et 7). L’effet ther-mique méditerranéen estival est ici mar-qué par la chaleur des températuresdiurnes (24,3 °C en moyenne par exem-ple en juillet à la station de ski d’Ascosituée à 1 423 m) et la fréquence dessécheresses estivales (seulement 27 mmd’eau en moyenne en juillet dans les sta-tions les plus hautes).

Des nuances du climat alpin sont cepen-dant très présentes dans les stations dehaute montagne en Corse, avec des tem-pératures moyennes mensuelles infé-rieures à 5 °C de novembre à avril.L’intensité des précipitations en altitudeest plus importante qu’en plaine puis-qu’en altitude, les pluies mensuellesdépassent 150 mm d’eau pendant cinq àsix mois de l’année. Les principauxcumuls pluviométriques se produisentbien en hiver, fréquemment sous formede neige, d’où leur intérêt pour les res-sources en eau.

Nombre de jours et hauteurs de pluie L’analyse du nombre de jours de pluie etde la hauteur moyenne des pluies saisonnières moyennes (1971-2000)permet de différencier les régimes plu-viométriques des stations de montagnede celles situées en plaine et en positionintermédiaire (figure 8).

Quelles que soient la saison et l’altitudedes stations, le nombre de jours et leshauteurs de pluie varient suivant lemême modèle. L’activité pluvieuse aug-mente nettement en automne-hiver et en

début de printemps(de fin octobre à finavril), avec une nettediminution estivale.Le nombre de jourset les quantités depluie sont toujoursplus élevés en mon-

tagne (altitude supérieure à 800 mètres).Les précipitations sont presque deuxfois plus importantes dans les stationsde montagne que dans celles de plaine ;les totaux moyens au mois d’avril pas-sent ainsi de 81 mm en plaine à 146 mmen montagne et le cumul annuel moyenpasse de 771 mm en plaine contre1 390 en montagne. Un gradient plu-viométrique calculé entre Ajaccio,aéroport situé à 4 mètres d’altitude, etle plateau d’Ese à 1 620 mètres, montreune augmentation des précipitationsmoyennes annuelles de l’ordre de160 mm/100 mètres (tableau 1).

Tableau 1 - Calcul du gradient pluviométrique altitudinal

entre Ajaccio et le plateau d’Ese.

J F M A M J J A S O N D0No

mbre

de jo

urs d

e plui

e

J F M A M J J A S O N D0

50

100

150

200

0

5

10

15

Haut

eur (

en m

m)

Stations 500 -800 m

Stations > 800m

Stations < 500 m

Station Lieu Altitude Pluies annuelles (en mm) (en m) 1971-2000

Ajaccio Aéroport 4 639 Bastelica Plateau d’Ese 1 620 1 644

Gradient pluviométrique : 161 mm/100 m

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La Météorologie - n° 59 - novembre 2007 45

(1) Subtropical : le climat subtropical se rencon-tre dans chaque hémisphère entre 30° et 40° à45° de latitude en moyenne. Le climat méditerra-néen, marqué par des étés secs, en est un sous-type.

Ainsi, les quantités et le nombre de joursde pluie associés sont globalement deuxfois plus forts en montagne que dans lesstations de basse altitude, ce qui estcaractéristique du domaine montagnard.Qu’en est-il des températures ?

Chaleur et peu de jours de gelLa Corse est dominée par un régime ther-mique méditerranéen aux fortes affinitéssubtropicales(1), chaud à très chaud en été,y compris en altitude, allié à la douceurrelative hivernale procurée par la mer(Bruno et al., 2001). La moyenneannuelle varie de 15-16 °C en zonecôtière à 8-9 °C en haute montagne (fi-gure 9). Les hivers, très doux sur unegrande frange littorale, sont bien marquésdans l’intérieur ainsi qu’en montagne, enparticulier dans les massifs de Haute-Corse.

Les jours de gel sont enregistrés d’octo-bre à mai et quelle que soit l’altitude desstations (plaine, village ou montagne), cenombre de jours de gel s’annule en mêmetemps, entre mai et octobre (figure 10).

Cependant, la progression des jours degel s’intensifie avec l’altitude au cœur del’hiver. Le maximum de jours de gel estévidemment enregistré en janvier etfévrier, avec un jour de gel sur deux enmoyenne (respectivement 15,9 et14,2 jours).

Par ailleurs, l’été peut être chaud dans lamontagne en Corse, en particulier durantla troisième décade de juillet (figure 10).Début mai et fin septembre, le nombrede jours de forte chaleur (c’est-à-direTx > 30 °C) tend vers 0 quelle que soitl’altitude, contrairement au milieu del’été où les écarts varient beaucoup, dusimple au double. En effet, les stations demontagne enregistrent fin juillet jusqu’à6,3 jours de forte chaleur en moyenne,contre 8,8 et 12,9 jours, respectivement,dans les stations d’altitude intermédiaireet de plaine.

Ainsi, des nuances du climat alpin sontnotamment caractérisées, dans la mon-tagne corse, par : – la présence de jours de gel trois foisplus importants en altitude qu’en plaine ;

– une amplitude thermique marquée, del’ordre de 20 °C sur les Tx (amplitude de17,1 °C à Felce à 23,3 °C à Sponde pourla période 1971-2000) ;– l’inversion thermique en fond devallée ;– le régime de brise de pentes ; – l’effet de foehn ;– l’effet Venturi ;– des chutes de neige.

Un faible gradient thermique altitudinalLa décroissance des températuresmoyennes annuelles avec l’altitude estfaible, variant de -0,31 °C/100 m entreAjaccio et le plateau d’Ese sur le versantoccidental de la montagne corse, et de -0,49 °C/100 m entre Bastia et Asco, station de ski, sur le flanc oriental (Romeet Giorgetti, 2006). En France conti-nentale, cette décroissance thermique

Figure 9 - Distribution des températures moyennes annuelles, de printemps, d’été, d’automne et d’hiver en Corse, établies à partir des normales 1971-2000 de la baseAurelhy de Météo-France.

Figure 10 - Nombre de jours de gel (à gauche) et de jours de forte chaleur (à droite) en Corse. (Source Météo-France, normales 1971-2000)

J F M A M J J A S O N D0

5

10

15

20

Nomb

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0 °C

J F M A M J J A S O N D0

5

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0 °C

Stations 500-800 m Stations > 800 mStations < 500 m

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46 La Météorologie - n° 59 - novembre 2007

altitudinale avoisine plutôt -0,65 °C/100 m en moyenne dans l’atmosphèrelibre. Cependant, en Corse, les gra-dients sont plus accentués en hiverqu’en été, ce qui montre bien les nuan-ces alpines hivernales et l’effet ther-mique méditerranéen estival.

Outre la variabilité climatique saison-nière et interannuelle, le massif corseconnaît des aléas parfois extrêmes.

Divers phénomènesmétéorologiquesextrêmes Parmi les aléas climatiques, certainsont marqué les annales météorolo-giques en Corse, en particulier le« déluge » de la Toussaint 1993, maisaussi des avalanches de neige, et lacanicule d’août 2003.

Pluies cévenoles et effet de foehn de la Toussaint 1993Certains épisodes pluvieuxprésentent un caractère excep-tionnel par leur intensité en unlaps de temps très court,comme ce fut le cas du« déluge » de la Toussaint1993 sur la plaine et lamajeure partie des massifsorientaux de l’île. Cet épisodetrès pluvieux qui s’est abat-tu sur le versant oriental de la Corse les 31 octobre et 1er novembre 1993, s’appa-rente à des pluies cévenoles(1) ;il est également dû au redou-blement de « retours d’est »(2)

engendrés par la présenced’une dépression quasi sta-tionnaire centrée sur le nord-est de la Corse, et bloquée àl’est par une cellule anticyclo-nique établie sur la merTyrrhénienne, favorisant ledéveloppement de cumulo-nimbus à régénérescence mul-tiple. Le fort gradient depression entre les deux centresd’action génère un courantperturbé d’est-sud-est modéréà assez fort (figures 11 et 12).De fortes pluies se déversentd’abord sur le sud de l’île le29 octobre, puis sur les ver-sants orientaux le 31, en s’in-tensifiant, cumulant près de70 mm en une heure à Bavella

le 31 octobre (Maripa et al., 2004 ). Lesmulticellules orageuses longent la merTyrrhénienne et gagnent la région bas-tiaise en remontant les vallées de lafaçade orientale et franchissant la lignede crête de Corse-du-Sud. Les pluies s’a-battent en avant des reliefs et dépassent200 mm en 48 heures sur toute la façadeest de l’île, atteignant 701 mm d’eau enHaute-Corse et 906 mm en 48 heures enCorse-du-Sud (figure 13), soit presque lanormale(3) annuelle en deux jours ! C’est

donc le maintien à deux reprises de ladépression sur la Corse, qui a conféré àce phénomène pluvieux une longévité etune intensité rarissimes, occasionnant lacrue subite qualifiée de centennale duRizzanese, pourtant situé sur le versantoccidental ; parmi les lourdes conséquen-ces : un mort, des maisons inondées, desponts génois endommagés (BDEM, 1993 ;Maripa et al., 2004 ; Dupré et Giorgetti,2005a et 2005b). Or, l’ouest du massif,abrité par un effet de foehn, enregistre despluies inférieures à 50 mm en 48 heures,y compris en montagne (figure 14).

Figure 13 - Les pluies cévenoles à l’est du massifcorse : cartographie du cumul pluviométrique de laToussaint 1993.

(1) Pluies cévenoles : elles tirent leur nom desCévennes, bordure méridionale du Massif central.Ces pluies ont un caractère soudain, violent etorageux qui se manifeste le plus fréquemment auxintersaisons à l’avant des reliefs.(2) Retour d’est : situation météorologique bienconnue en Corse qui véhicule des vents de secteurest postérieurs au passage d’une dépression sur legolfe de Gênes.(3) Normale : moyenne calculée sur une périodede trente ans servant de référence. La normaleactuellement utilisée par Météo-France est cellede 1971 à 2000.

Figure 11 - Pointage des observations de surface du 31 octobre 1993à 18 h UTC. Remarquer les forts vents d’est, de la Corse au littoralvarois. (D’après Giorgetti et al., 1994)

Figure 12 - Analyse à 500 hPa le 31 octobre 1993 à 12 h UTC.Géopotentiels en mètres, températures en °C. Établissement du régimede sud-ouest sur le bassin occidental méditerranéen, à l’avant du vasteminimum de l’ouest du Portugal. (D’après Giorgetti et al., 1994)

Figure 14 - L’effet de foehn en Corse lors de retours d’est . Exemple de la Toussaint 1993.

Altitude

2 500 m

2 000 m

1 500 m

1 000 m

500 m

0Ouest 9° E Est

Galeria

Massif du Cintu

CortenaisCastagniccia Costa Verde

Air doux et sec Air frais et humide

Méditerranée Tyrrhénienne

Versant sous le ventP < 50 mm en 48 heures

Versant au vent200 < P < 906 mm en 48 heures

1025

102

1020

1020

1015

1015

10151015 1

,5

101 5

5680

5690 5640

5600

5120

5880

5640

5600

57605720

- 20

-20-16

-16

-16

-12

-12

-12

-8

-8-8

-6

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La Météorologie - n° 59 - novembre 2007 47

L’avalanche de neige, aléaparfois meurtrier en CorseLes chutes de neige se produisent dansla montagne corse dès la fin du moisd’octobre jusqu’en avril, avec un maxi-mum d’enneigement entre la mi-févrieret la fin mars. Le manteau neigeux peutatteindre deux à six mètres d’épaisseuren moyenne en haute montagne. Lafonte y est très lente et peut se poursui-vre jusqu’à fin juillet en ubac (Bruno etal., 2001).

L’avalanche correspond au glissementgravitaire, plus ou moins rapide, le longd’un versant ou d’un thalweg(1), d’unemasse de neige déstabilisée (photo 3).Le risque d’avalanche est l’une descontraintes les plus fortes et les plusprésentes en haute montagne, notam-ment par le nombre des victimes et parle montant des enjeux f inanciers ethumains (Chardon, 1996). La termino-logie internationale, d’origine alpine,distingue trois types d’avalanches : lesavalanches de neige récente, poudreuseou mouillée, qui ont généralement descoulées de déplacement limité ; les plusimportantes peuvent provoquer le déga-gement d’aérosols. Les avalanches deplaques, très dangereuses, résultent dela rupture d’une strate du manteau nei-geux composée de glace et de neigedurcie, reposant sur une sous-couchepeu cohérente ; elles font « boule deneige » sur le versant, créant un amaschaotique de blocs dans le bas ; ces ava-lanches de plaques sont responsables de70 % des accidents et des décès enFrance, en très grande partie hors desdomaines skiables balisés. Les avalan-ches de fond ou de fonte sont forméesde neige transformée par le redoux, lapluie, le gel-dégel, et prennent parfois laforme de boules (les grelots). Elles s’é-coulent à la fin de l’hiver et au prin-temps dans les thalwegs, à des vitessesvariables, et constituent un danger sou-vent connu et prévisible.

En Corse, la gestion et la prévision del’aléa avalancheux sont assurées par leCentre d’étude de la neige de Météo-France. L’avalanche la plus meurtrièreest sans doute l’avalanche de plaqued’Ortiporio qui s’est produite le 4 février 1934 et a entraîné la mort detrente-sept personnes de ce village dunord de la Castagniccia. L’aléa avalan-cheux n’est pas si rare sur l’île puisqued’autres épisodes se sont produits auXIXe siècle, souvent après de fortes chutes

de neige, suivies d’un redoux. On peutnotamment citer les avalanches de Tas-so (12 décembre 1926), de Palneca etCozzano (7 et 8 février 1927) et celle deBocognano (4 février 1934) qui a tuéneuf personnes (Maripa et al., 2004).Plus récemment, d’autres avalanches sesont produites, comme l’avalanche deplaque de la Maniccia en février 2003(photo 4) ou celle du 6 mars 2006 tou-jours dans le massif du Rotondo (photo5). Cette dernière était pourtant prévuedès le 3 mars 2006 par les bulletins« Estimation du risque d’avalanche » deMétéo-France qui prévoyaient un risque

marqué de niveau 3,sur une échelle euro-péenne qui en compte5. L’avalanche duRotondo du 6 mars2006 s’explique parl’instabilité du man-teau neigeux ; eneffet, l’enneigementest excellent, supé-rieur aux normalessaisonnières : entre1,30 et 1,60 mètres à1 600 mètres d’alti-tude, supérieur à2 mètres au-delà de2 000 mètres. Mais, àla faveur du fort ventqui souffle sur lesmassifs, la neige esttransportée, accumu-

lée et balayée, formant des plaques àvent. La pluie et le redoux du 5 marsoccasionnent des départs spontanés d’a-valanches de neige humide. Puis le fortvent d’ouest provoque un importanttransport de neige et de nouvellesplaques se forment en versants est,reposant sur des sous-couches sansgrande cohésion (Météo-France, 2006).La plaque instable, provoquée par lepassage de trois randonneurs chevron-nés évoluant sur le GR20, se déclenchele 6 mars vers 13 h 30 au lieu-dit PinziCurbini, sur une largeur de 200 mètreset dévale le versant sur 500 mètres de

(1) Thalweg : ligne des points bas d’un versant,souvent occupé par un cours d’eau.

Photo 3 - Cicatrice d’arrachement d’une avalanche de plaque.(Photo PGHM - CRDP de Corse)

Photo 4 - Avalanche de plaque de la Maniccia de février 2003. (Photo PGHM - CRDP de Corse)

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48 La Météorologie - n° 59 - novembre 2007

Figure 15 - Vague de chaleuren Europe de l’Ouest

lors de l’été 2003. Analyse des isothermes

du 6 août 2003 à 850 hPa. (Source Météo-France)

dénivelé, emportant trois skieurs dontdeux s’en sortent indemnes et le troi-sième avec plusieurs fractures.

La canicule d’août 2003Selon Météo-France, la canicule cor-respond, en France et avant la caniculede 2003, à des températures maximalesdu jour (Tx) supérieures ou égales à35 °C pendant au moins deux joursconsécutifs (Bessemoulin et al., 2004).Météo-France précise alors que cettedurée ne convient pas pour toutes lesrégions et qu’il faut ajuster le seuil des35 °C en fonction de la région et tenircompte des températures nocturnes.Depuis 2004, le terme de canicule estdésormais employé quand la Tx estsupérieure à une tem-pérature maximalediurne fixée et révi-sée annuellement etvariable selon lesd é p a r t e m e n t sconcernés. Par exem-ple, en 2006, le seuilcaniculaire f ixé enHaute-Corse est de34 °C pour les Tx,

contre 33 °C en Corse-du-Sud, soitrespectivement un et deux degrés demoins qu’en 2003.

La vague de chaleur qui a affectél’Europe de l’Ouest durant l’été 2003 aégalement touché la montagne corse.Le contexte synoptique correspond àune situation de « blocage » ; en effet,une puissante dorsale d’altitude sta-tionne sur l’Europe occidentale (figure15). En surface, l’anticyclone desAçores se prolonge sur la France ; laremontée d’une masse d’air chaud etsec par le sud enveloppe le pays demanière durable (Manach, 2004).

Des travaux précédents montrent égale-ment que la période juin-juillet-août2003 a été particulièrement chaude par-

tout en Corse, avec des températureslocalement supérieures de 8 à 10 °C auxnormales saisonnières, en particulier du6 au 19 août où les températures maxi-males (Tx) ont dépassé 35 °C (Giorgetti,2005 ; Rome, 2005). La canicule d’août2003 concerne essentiellement les sta-tions intérieures de l’île situées à moinsde 500 mètres d’altitude, comme PonteLeccia (203 m), Castirla (351 m) ouCorte (404 m) ; elle a aussi touché lemassif corse pendant neuf jours consé-cutifs à Calacuccia situé en positiond’abri au sud du Cinto (Rome, 2005).Les températures diurnes (Tx) moyen-nes d’août 2003 ont été partout très éle-vées, dépassant, en montagne, 32 °C ;de plus, les températures nocturnes (Tn)sont restées élevées, résultant d’unrefroidissement limité la nuit (figure16). On remarque que les Tn d’août2003 sont localement bien plus chaudesque la normale 1971-2000 des Tx, ce quimontre bien l’ampleur de la vague dechaleur. Les pluies et les brises ont ététrès faibles pendant cette période, ce quia renforcé l’impression de chaleur.

Des indices régionaux de températuresont calculés par Rome (2005) à partirdes résultats d’une analyse en compo-santes principales (ACP). Ils résultentde la moyenne des Tn et des Tx pour unéchantillon de trente-huit stationssituées à différentes altitudes, ayant uneforte coordonnée sur la première com-posante de l’ACP. Le choix des trente-huit stations est déterminé par larecherche de stations du réseau de laCorse ayant des données thermiquesquotidiennes complètes du 1er juin au 31 août 2003. Les indices thermiques(figure 17) montrent que les Tx et les Tn

sont très élevées sur toute la période, etplus particulièrement du 6 au 19 août(indice Tx > 35 °C). Seules les pre-mières décades de juin et de juilletmontrent des Tx inférieures à 30 °C(Rome, 2005). Cependant, la différencede température entre les trente-huit sta-tions (valeurs extrêmes des Tx, parexemple) est assez importante, allantnotamment de 21,2 °C pour la station la plus fraîche à 38 °C pour les pluschaudes le 31 juillet. L’indice régionaldes Tx est cependant satisfaisant carreprésentatif de l’ensemble des stations,contrairement à l’indice régional des Tn,moins bien centré sur les valeurs d’am-plitude spatiale. La figure 17 montreaussi que la Tx de certaines stations a étéplus fraîche que la Tn d’autres, à l’instar

Photo 5 -L’avalanche du 6 mars 2006 dans le massif du Rotondo. (Source : Corse-Matin, 7 mars 2006)

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La Météorologie - n° 59 - novembre 2007 49

du 4 juillet où le minimum des Tx àCarbini-Col de Mela (18,8 °C) est infé-rieur au maximum des Tn à Bastia-Fango (23,4 °C).

En altitude, la canicule d’août 2003 acependant été peu ressentie puisque lesstations de montagne n’enregistrent quedes jours de forte chaleur, mais pas decanicule au sens défini à l’époque parMétéo-France, sauf dans la région dubarrage de Calacuccia. En effet, dans leNiolo (région du Monte Cinto), la tem-pérature maximale de l’air est supé-rieure à 35 °C pendant neuf joursconsécutifs à Calacuccia, station située à875 mètres d’altitude ! Plus à l’ouestdans cette même région, la station villa-

geoise d’Évisa (830 m) enregistre aussides jours de très forte chaleur fin juin,au début de la troisième décade de juilletet en août (figure 18). Évisa est situéeplus bas que Calacuccia, mais la couver-ture végétale y est beaucoup plus déve-loppée, ce qui semble réduire leréchauffement diurne. Un peu plus haut,dans la station forestière d’Évisa ONFAïtone, située à 1 000 mètres, aucunjour de très forte chaleur n’est enregis-tré, mais plusieurs jours de forte chaleur,en juin, juillet et août. Globalement, lesTx sont largement supérieures aux nor-males 1971-2000 tout au long de lapériode juin-juillet-août, à l’exceptionde quelques jours début juillet où les Tx

sont inférieures aux normales. Ces Tx

dépassent parfois de 8 à 10 °C les nor-males saisonnières. Les Tn sont ellesaussi supérieures à la normale, mais ladouceur nocturne est moins marquéeque la chaleur diurne, à Calacucciacomme à Évisa-gendarmerie. Lesgrands écarts de température entre cesdeux stations s’explique moins par legradient altitudinal que par les particula-rités du site : zone dénuée de végétationet en position d’abri à Calacuccia, zonepériforestière à Évisa.

Les températures de l’été 2003 ont ainsiété particulièrement chaudes partout enCorse, localement supérieures de 8 à10 °C aux normales saisonnières. Cettevague de chaleur a eu, selon Hémon etJougla (2003), moins de conséquencessanitaires dans les deux départements dela Corse que sur le continent ; ce fait estprobablement lié, d’une part, à l’accoutu-mance de la population locale aux tempé-ratures estivales élevées et, d’autre part, àun effet culturel : en effet, les personnesâgées ou fragilisées sont très entouréespar les plus jeunes qui passent l’été au« village », bénéf iciant ainsi d’unmeilleur encadrement familial. Cepen-dant, les taux de mortalité surnumérairediffèrent entre la Haute-Corse, où lenombre de décès est proportionnellementplus important (entre +65 et +104 %),qu’en Corse-du-Sud (-14 à +35 %), maisaucune explication n’a été proposée parles services sanitaires locaux.

ConclusionL’analyse des principaux paramètres cli-matiques (précipitations, températures,nombre de jours de gel, de jours de fortechaleur, de jours de pluie et la hauteur despluies) de stations de montagne en Corsemet en évidence le caractère méditerra-néen dominant en été dans sonensemble : fréquence des sécheressesestivales, irrégularité des précipitationsqui peuvent être subites, violentes etintenses ; de plus, les températures sontchaudes en été. Cependant, des traits duclimat alpin apparaissent clairement, en

Tx août normal Tx août 2003

Tx août (° C)

Figure 16 - Températures maximales (Tx) d’août, en moyenne (à gauche) et en août 2003 (à droite).

Figure 17 - Indices régionaux de températures minimales et maximales en juin-juillet-août 2003. Les indices thermiques (courbes) sont obtenus par la moyenne des Tn (pointillé) et des Tx (trait plein) pour un échantillon de stations ayant une forte coordonnée sur la première composanted’une ACP. Les valeurs minimales (figurés vides) et maximales (figurés pleins), respectivement des Tn (carrés) et des Tx (ronds) mesurées montrent l’étendue des températures quotidiennesinsulaires. (D’après Rome, 2005)

Indice Tn min des Tn max des Tn min des Tx max des TxIndice Tx

0

5

10

15

20

25

30

35

40

45

0

5

10

15

20

25

30

35

40

45

01/06/03 16/06/03 01/07/03 16/07/03 31/07/03 15/08/03 30/08/03

Tem

péra

ture

(en

°C)

Juin Juillet Août

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50 La Météorologie - n° 59 - novembre 2007

particulier en période hivernale : pré-sence de jours de gel significatif, ampli-tude thermique marquée, inversionthermique en fond de vallée, régime debrise de pentes, effet de foehn, chutes deneige.

Soumis à de forts aléas climatiques(pluies extrêmes, contrastes thermiquesviolents, avalanches de neige), le massifcorse présente, par ces faits, les caracté-ristiques des milieux méditerranéen etalpin.

RemerciementsNous tenons à remercier :• Yann Graudé du Centre Météo-France de Bastia-Poretta ;• Jean Alesandri du Centre régional dedocumentation pédagogique (CRDP)de Corse ;• Yvan Caballero du Bureau de recher-che géologique et minière de Corsepour la carte géologique simplifiée dela Corse et son aide pour la simplifica-tion de la légende ;

• le Bureau de climatologie interrégio-nale de Météo-France d’Aix-en-Provence pour la réalisation decertaines cartes des figures 9 et 16.

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Bibliographie

Figure 18 - Températurede l’air en juin-juillet-août 2003 dans deux stations de montagne en Corse,Calacuccia (875 m) et Évisa ONF (1 000 m).En rouge figurent les Tx,en bleu les Tn ; les normales 1971-2000des Tx et des Tn sontrespectivement représentées en vert et en jaune. (Source Météo-France)

Seuil des très fortes chaleurslCaniculei lC i lC i lCaniculeC i lCanic le

Tx Évisa ONF Tn Calacuccia Tn Evisa ONF

Normale Tx Normale Tx ÉÉÉvisa ONFvisa ONFÉvisa ONFÉÉ

Normale Tn N l T ÉÉvisa ONFi ONONONÉvisa ONFÉ

Normale Tx Calacuccia Normale Tx Calacuccia

Normale Tn Calacuccia

40

35

30

25

20

15

10

5

Temp

érat

ure (

en °C

)

Été 2003

1er juin 15 juin 1er juillet 15 juillet 1er août 15 août 31 août

Tx Calacuccia