La gestion collective du droit d’auteur en péril (1)

download La gestion collective du droit d’auteur en péril (1)

of 4

Transcript of La gestion collective du droit d’auteur en péril (1)

  • 7/29/2019 La gestion collective du droit dauteur en pril (1)

    1/4

    pdfcrowd comPRO version Are you a developer? Try out the HTML to PDF API

    ElectronLibre

    La gestion collective du droit dauteur en pril (1)

    Publi le 08 fvrier 19h16 par Philippe Astor

    Partie 1 Une brusque redistribution des rapports de force aux Etats-Unis

    A la suite de Sony/ATV, Universal Music Publishing, numro un mondial du secteur de ldition musicale,

    a dcid de sortir de la gestion collective de ses droits dexcution publique sur Internet aux Etats-Unis.Dautres majors de ldition devraient suivre, au risque de fragiliser les socits de perception et de

    rpartition des droits, et de pnaliser les diteurs indpendants quelles continuent de reprsenter.

    La semaine dernire, Universal Music Publishing, filiale dUniversal Music Group dans ldition musicale (1),dcidait de retirer aux socits de gestion collective amricaines ASCAP et BMI (deux consurs amricaines dela Sacem) la gestion des droits dexcution publique de son rpertoire duvres musicales sur Internet. Ce retrait,qui porte sur tous les modes de diffusion en ligne (webradios, radios interactives, streaming la demande), prendraeffet le premier juillet prochain. Cest le dernier pisode dun mouvement de fond qui voit les majors de lditionsortir progressivement de la gestion collective de leurs droits dans le numrique, pour aller signer des deals plus

    juteux en direct avec les plateformes de musique en ligne. Un mouvement initi par EMI Music Publishing en 2011sur une partie de son rpertoire, avant son rachat par Sony/ATV, qui a adopt la mme stratgie aprs la fusion.

    Laccs aux deux plus grands rpertoires duvres musicales ceux issus des fusions entre Universal MusicPublishing et BMG Music Publishing en 2006, et entre Sony/ATV et EMI Music Publishing en 2012, qui reprsentent eux deux 50 % de parts de march et une proportion bien plus grande de hits ne se fera donc bientt plus parlintermdiaire des licences lgales accordes par les socits de gestion collective comme ASCAP et BMI auxtats-Unis, mais grce des accords ngocis de gr gr avec les membres de ce nouveau duopoleconstitu par Sony et Universal et point ouvertement du doigt par certains indpendants au Midem.

    http://pdfcrowd.com/http://pdfcrowd.com/customize/http://pdfcrowd.com/html-to-pdf-api/?ref=pdf
  • 7/29/2019 La gestion collective du droit dauteur en pril (1)

    2/4

    pdfcrowd comPRO version Are you a developer? Try out the HTML to PDF API

    Le service de radio interactive Pandora a dj pu en mesurer les consquences. Selon Billboard, au terme delaccord rengoci de gr gr avec Pandora en dbut danne, Sony/ATV a obtenu un taux de royalties suprieurde 25 % celui qui lui tait garanti dans le cadre de la gestion collective. La major percevra dsormais 5 % desrevenus bruts gnrs par son rpertoire de 2,5 millions de chansons sur Pandora, contre 4,1 % prcdemment moins les frais de gestion des socits de perception et de rpartition (SPRD), qui sont de lordre de 11 % 13 %.

    Rouleau compresseur

    Les termes de cet accord confidentiel, rvls par des sources proches du dossier, ont de quoi surprendre ; alorsque Pandora a instruit une action en justice contre lASCAP en novembre dernier, afin dobtenir une rvision labaisse de la rmunration verse ses socitaires (3). Mais face un rouleau compresseur comme Sony/ATV, quipse dsormais 20 % 25 % de parts de march dans ldition musicale, difficile pour Pandora de ne pas courberlchine. Si un acteur qui reprsente 10 % de parts de march chez nous se retire de notre plateforme, cest 50% de mes utilisateurs qui en seront affects et que je risque de perdre , confiait Axel Dauchez, PDG de Deezer,lors dune confrence de presse du commissaire europen Michel Barnier au Midem. Autant dire qu dfaut decder aux exigences de Sony/ATV, ce qui aurait entran le retrait de tout son rpertoire , Pandora navait plus qumettre la cl sous la porte.

    Cet effet de levier, qui donne encore plus de poids aux acteurs dominants du march dans la ngociation de gr gr avec les fournisseurs de services de musique en ligne, nul doute quUniversal Music Publishing va chercher enbnficier ds le 1er juillet prochain, date laquelle la major de ldition sortira elle aussi de la gestion collective dunumrique aux tats-Unis. Dautres acteurs de ldition, comme Warner/Chappell, filiale de Warner Music Group etnumro 3 mondial du secteur avec 16 % de parts de march, ne devraient pas tarder suivre la mme voie ; linstar de BMG Rights Management, numro 4 mondial un grand racheteur de petits catalogues , dixit unprofessionnel du secteur qui envisage dj publiquement cette option. Au final, et probablement trs courtterme, cest prs de 70 % des rpertoires duvres musicales qui sortiront de la gestion collective des droitsdexcution publique sur Internet aux tats-Unis.

    Laccord sign avec Sony/ATV naura quun impact mineur sur les finances de Pandora. Si les termes danslesquels il a t conclu se vrifient, et si les autres grands diteurs obtiennent des conditions similaires, il ne devrait

    http://pdfcrowd.com/http://pdfcrowd.com/customize/http://pdfcrowd.com/html-to-pdf-api/?ref=pdf
  • 7/29/2019 La gestion collective du droit dauteur en pril (1)

    3/4

    pdfcrowd comPRO version Are you a developer? Try out the HTML to PDF API

    tre que de quelques pour cent de son chiffre daffaires. Lessentiel des cots du catalogue de musique exploit parPandora (quelques centaines de milliers de titres peine, et non des millions) repose en effet sur les royaltiesreverses aux producteurs (labels et maisons de disques), qui sont de lordre de 55 % de ses revenus (4). Pandorane manquera certainement pas, en outre, dobtenir une rvision la baisse des taux de royalties pays ASCAP etBMI, dont la licence lgale ne couvrira plus de facto le rpertoire de Sony/ATV, rmunr 25 % plus cher parailleurs. La sortie dUniversal Music Publishing de la gestion collective, en juillet prochain, remettra une nouvelle foisen cause ces taux de royalties.

    Au dtriment de la diversit

    Ces rquilibrages successifs ont toutes les chances de se faire au dtriment des diteurs indpendants, qui nontpas les moyens daller ngocier en direct avec lensemble des plateformes de musique en ligne, et ne seront plusreprsents que par des socits de gestion collective affaiblies mme si limpact financier sera limit pour elles court terme, les droits en provenance du numrique ne reprsentant que 3 % de leurs perceptions. Mais lesinvestissements informatiques ncessaires pour automatiser le traitement des millions de ligne de reporting enprovenance dInternet resteront incompressibles, ce qui va peser sur leurs cots de gestion.

    La situation va devenir plus complexe galement pour les acteurs de la musique en ligne aux tats-Unis. Ils vont voirse multiplier les interlocuteurs dans ldition au cours des mois qui viennent, chacun essayant de tirer la couverture lui ; et se contenteront pour la plupart de signer des licences en direct avec trois ou quatre majors et quelques grosinds, ce qui sera largement suffisant pour quantit de services mainstream. Cette pratique risque de devenir asseznaturellement la rgle, au dtriment de la diversit musicale, et de tout le secteur indpendant de ldition.

    (1) Les diteurs de musique ou publishers, qui reprsentent les auteurs et les compositeurs, dtiennent les droits sur les uvres

    musicales en elles-mmes (paroles, partitions, arrangements), tandis que les diteurs de phonogrammes dtiennent des droits voisins

    sur les enregistrements dinterprtations de ces uvres.

    (2) Contrairement la Sacem en France, qui gre galement les droits de reproduction mcanique, ASCAP et BMI ne grent que les

    droits dexcution publique de leurs socitaires : sur Internet, la radio, dans les lieux sonoriss ou la tlvision. Les droits de

    reproduction mcanique sont soit grs sur une base collective par lagence Harry Fox, soit ngocis en direct avec les diteurs. Une

    http://pdfcrowd.com/http://pdfcrowd.com/customize/http://pdfcrowd.com/html-to-pdf-api/?ref=pdf
  • 7/29/2019 La gestion collective du droit dauteur en pril (1)

    4/4

    pdfcrowd comPRO version Are you a developer? Try out the HTML to PDF API

    3ime socit de gestion collective des droits dexcution publique amricaine, SESAC, ne fait pas lobjet de la mme dfiance de la part

    des grands diteurs, mais cest une socit but lucratif, qui passe des accords particuliers avec les auteurs, et naccorde pas de

    licence lgale.

    (3) Contrairement au taux de royalties reverses aux producteurs (labels et maisons de disques), qui est fix par le Bureau du copyright

    amricain, le taux de royalties reverses aux socits dauteurs et dditeurs par les webcasters est arbitr par des tribunaux aux tats-

    Unis.

    (4) Un taux dont Pandora espre quil sera revu significativement la baisse avec ladoption du successeur de lInternet Fairness Radio

    Act. Victime du calendrier parlementaire amricain, qui na pas permis son adoption avant la fin de la prcdente session, ce projet de loi

    amricain devrait tre re-dpos sous un autre nom dans le courant de lanne 2013 et pourrait entraner une baisse consquente des

    royalties reverses aux labels par Pandora (jusqu 85 %), tout en assujettissants pour la premire fois aux Etats-Unis les radios

    hertziennes une rmunration quitable des artis tes-interprtes et des producteurs. De quoi largement compenser la voracit des

    grands diteurs.

    2008-2013 Electronlibre.info. Tous droits rservs.

    http://pdfcrowd.com/http://pdfcrowd.com/customize/http://pdfcrowd.com/html-to-pdf-api/?ref=pdf