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194 | La Lettre de l’Hépato-Gastroentérologue Vol. XIV - n ° 5 - septembre-octobre 2011 DOSSIER THÉMATIQUE Pathologies de l’intestin grêle La gastroentérite à éosinophiles Eosinophilic gastroenteritis Vered Abitbol* * Service de gastroentérologie, hôpital Cochin/Hôtel-Dieu Paris. L a gastroentérite à éosinophiles (GEAE) est une maladie rare du tube digestif, caractérisée par une symptomatologie gastro-intestinale associée à une infiltration primitive de la paroi digestive par des polynucléaires éosinophiles. Avec l’œsophagite à éosinophiles et la colite aux éosi- nophiles, la GEAE fait partie des affections primi- tives gastro-intestinales à éosinophiles. Depuis sa première description en 1937 par Kaijser (1), moins de 300 cas dans la littérature ont été rapportés, et il s'est agi de cas cliniques ou de séries rétrospectives n’excédant pas 40 malades (2). Sa prévalence est évaluée à 1/10 000 habitants, mais elle est proba- blement sous-évaluée du fait de formes cliniques peu spécifiques. La GEAE atteint l’homme 2 fois plus que la femme. Le diagnostic est fait le plus souvent dans la troisième décennie mais des séries pédiatriques ont été publiées (3). Le diagnostic de GEAE est un diagnostic d’élimination ; il repose sur 3 critères : l’existence d’une symptomatologie gastro-intestinale, la présence d’une infiltration à éosinophiles dans la paroi digestive, l’élimination d’autres causes d’hyperéosinophilie sanguine et digestive comme une pathologie parasitaire ou néoplasique, une maladie inflammatoire digestive... La GEAE peut toucher l’ensemble du tube digestif de la bouche au rectum, et l’infiltrat histologique à éosinophiles peut avoir une profondeur variée dans la paroi intestinale. Selon la classification de Klein, la profondeur de l’infiltration à éosinophiles permet de répartir les GEAE en 3 formes anato- miques : muqueuse, musculeuse et sérique (4). Le devenir et le rôle des éosinophiles dans le tube digestif restent mal connus, malgré les progrès récents dans la compréhension des mécanismes physiopathologiques. Physiopathologie de la gastroentérite à éosinophiles Les éosinophiles sont produits dans la moelle osseuse, puis, après un passage bref dans la circu- lation sanguine, ils migrent dans les tissus, essentiel- lement au niveau des muqueuses. Les éosinophiles se situent dans la lamina propria de l’ensemble du tube digestif, œsophage non compris. À l’état basal, ils ne provoquent ni réaction inflammatoire ni dommage tissulaire ; ils permettent une protection efficace contre les infections parasitaires. La prolifération et la présence dans le sang des éosinophiles dépendent surtout de l’IL-5 ; leur migration vers le tube digestif est contrôlée par l’éotaxine (2). L’activation des éosi- nophiles est responsable des lésions digestives de la GEAE. Des stimuli tissulaires non spécifiques, des allergènes ou des infections déclenchent la dégra- nulation des éosinophiles avec action cytotoxique directe, sécrétion de cytokines inflammatoires et d’IgE. Malgré les progrès récents, la physiopathologie de la GEAE reste mal connue. Manifestations cliniques Les manifestations cliniques de la GEAE sont poly- morphes et non spécifiques. La symptomatologie digestive est souvent intermittente, entrecoupée de périodes de rémission. Présentation générale La présentation clinique dépend classiquement de la profondeur de l’infiltration dans la paroi diges-

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194 | La Lettre de l’Hépato-Gastroentérologue • Vol. XIV - n° 5 - septembre-octobre 2011

DOSSIER THÉMATIQUEPathologies de l’intestin grêle

La gastroentérite à éosinophilesEosinophil ic gastroenterit is

Vered Abitbol*

* Service de gastroentérologie, hôpital Cochin/Hôtel-Dieu Paris.

La gastroentérite à éosinophiles (GEAE) est une maladie rare du tube digestif, caractérisée par une symptomatologie gastro-intestinale

associée à une infiltration primitive de la paroi digestive par des polynucléaires éosinophiles. Avec l’œsophagite à éosinophiles et la colite aux éosi-nophiles, la GEAE fait partie des affections primi-tives gastro-intestinales à éosinophiles. Depuis sa première description en 1937 par Kaijser (1), moins de 300 cas dans la littérature ont été rapportés, et il s'est agi de cas cliniques ou de séries rétrospectives n’excédant pas 40 malades (2). Sa prévalence est évaluée à 1/10 000 habitants, mais elle est proba-blement sous-évaluée du fait de formes cliniques peu spécifiques. La GEAE atteint l’homme 2 fois plus que la femme. Le diagnostic est fait le plus souvent dans la troisième décennie mais des séries pédiatriques ont été publiées (3). Le diagnostic de GEAE est un diagnostic d’élimination ; il repose sur 3 critères : l’existence d’une symptomatologie gastro-intestinale, la présence d’une infiltration à éosinophiles dans la paroi digestive, l’élimination d’autres causes d’hyperéosinophilie sanguine et digestive comme une pathologie parasitaire ou néoplasique, une maladie inflammatoire digestive... La GEAE peut toucher l’ensemble du tube digestif de la bouche au rectum, et l’infiltrat histologique à éosinophiles peut avoir une profondeur variée dans la paroi intestinale. Selon la classification de Klein, la profondeur de l’infiltration à éosinophiles permet de répartir les GEAE en 3 formes anato-miques : muqueuse, musculeuse et sérique (4). Le devenir et le rôle des éosinophiles dans le tube digestif restent mal connus, malgré les progrès récents dans la compréhension des mécanismes physiopathologiques.

Physiopathologie de la gastroentérite à éosinophilesLes éosinophiles sont produits dans la moelle osseuse, puis, après un passage bref dans la circu-lation sanguine, ils migrent dans les tissus, essentiel-lement au niveau des muqueuses. Les éosinophiles se situent dans la lamina propria de l’ensemble du tube digestif, œsophage non compris. À l’état basal, ils ne provoquent ni réaction inflammatoire ni dommage tissulaire ; ils permettent une protection efficace contre les infections parasitaires. La prolifération et la présence dans le sang des éosinophiles dépendent surtout de l’IL-5 ; leur migration vers le tube digestif est contrôlée par l’éotaxine (2). L’activation des éosi-nophiles est responsable des lésions digestives de la GEAE. Des stimuli tissulaires non spécifiques, des allergènes ou des infections déclenchent la dégra-nulation des éosinophiles avec action cytotoxique directe, sécrétion de cytokines inflammatoires et d’IgE. Malgré les progrès récents, la physiopathologie de la GEAE reste mal connue.

Manifestations cliniques

Les manifestations cliniques de la GEAE sont poly-morphes et non spécifiques. La symptomatologie digestive est souvent intermittente, entrecoupée de périodes de rémission.

Présentation générale

La présentation clinique dépend classiquement de la profondeur de l’infiltration dans la paroi diges-

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Points forts » La gastroentérite à éosinophiles (GEAE) est une maladie rare ; toute autre cause d’hyperéosinophilie

digestive doit toujours être éliminée avant d'en faire le diagnostic. » La présentation clinique dépend de la profondeur de l’infiltration à éosinophiles : muqueuse, musculeuse

et séreuse. » Les lésions muqueuses observées en endoscopie ne sont pas spécifiques ; l’analyse histologique des

biopsies permet de démontrer l’atteinte muqueuse. » L’atteinte musculeuse peut se manifester par un syndrome occlusif ; l’infiltration de la séreuse est

responsable d’une ascite à éosinophiles. » Le traitement par corticoïdes se fonde sur les cas cliniques rapportés. Il n’existe pas d’études contrôlées

des traitements utilisés dans la GEAE. » L’histoire naturelle de la GEAE est inconnue.

Mots-clésGastroentérite à éosinophiles Muqueuse intestinale AsciteCorticoïdes

HighlightsEosinophilic gastroenteritis is a rare disorder of unknown aetiology, characterized by eosinophilic infiltration of the intestinal wall. The symp-toms depend on the depth of eosinophilic infiltration in the digestive wall and the bowel segments involved. Its diagnosis is difficult, requiring elimination of other causes of eosinophilic infiltration. Treat-ment is based on oral cortico-steroids.

KeywordsEosinophilic gastroenteritis

Intestinal mucosa

Eosinophilic ascites

Steroids

tive. Quand elle prédomine dans la muqueuse, les signes cliniques sont la nausée, des vomissements, des douleurs abdominales, une diarrhée avec parfois malabsorption et/ou entéropathie exsudative. Lorsque la musculeuse est atteinte, les signes obstructifs sont au premier plan du tableau clinique. L’atteinte séreuse prédominante est une forme moins fréquente. Elle se manifeste par une ascite riche en éosinophiles et rarement par une effusion pleurale. La classification des GEAE sous les formes muqueuse, musculeuse et séreuse a été établie en 1970 par Klein et al. dans un groupe de patients où l’infiltration des éosinophiles était appréciée par l’étude de pièces opératoires (4). Talley et al. rapportaient 57,7 % de formes muqueuses, 30 % de formes musculeuses et 12,5 % de formes séreuses (5). L’équipe de Lille constate une prédomi-nance des formes muqueuses (44 %), une proportion plus importante des formes séreuses (49 %) et moindre en ce qui concerne les formes musculeuses (12 %) [2, 6]. Ces 2 dernières équipes ne signalent pas de corrélation entre la profondeur de l’infiltration à éosinophiles et les signes cliniques, en dehors de l’association significative entre l’atteinte séreuse et une ascite avec ballonnement abdominal. La discordance observée par rapport à Klein et al. peut s’expliquer par l’évaluation de l’infiltration sur des biopsies perendoscopiques, ne permettant pas d’étudier la paroi en profondeur. Les symptômes de la GEAE dépendent aussi de la distribution de l’infiltration à éosinophiles le long du tractus digestif. L’infiltrat est généralement plurisegmentaire et exceptionnellement diffus de l’œsophage au rectum.

Atteinte œsophagienne

L’atteinte œsophagienne est rarement symptoma-tique. Elle est le plus souvent associée à une autre localisation digestive qui l'est davantage. Elle est probablement sous-estimée du fait de l’absence de biopsies œsophagiennes systématiques dans les séries publiées. Elle peut se manifester par des troubles moteurs œsophagiens, et notamment par une dysphagie.

Atteinte gastrique

L’atteinte gastrique est fréquente (40 à 80 % des cas), justifiant des biopsies gastriques systématiques

lorsqu’on suspecte une GEAE. Elle touche essen-tiellement l’antre et se manifeste par des nausées, des vomissements des douleurs abdominales et un amaigrissement. Parfois, le tableau est celui d’une sténose du pylore ou d’un ulcère compliqué, le diagnostic pouvant alors être posé en peropératoire. Cette localisation est le plus souvent associée à une atteinte de l’intestin grêle.

Atteinte de l’intestin grêle

Les atteintes de l’intestin grêle sont les plus fréquentes. Elles peuvent être associées à une entéropathie exsudative, une malabsorption et une anémie ferriprive. Elles vont de pair avec une autre localisation dans 75 à 90 % des cas. Des sténoses intestinales ont été décrites. Des complications de type péritonite par perforation et occlusion intes-tinale ont été rapportées.

Atteinte du côlon

La localisation colique semble plus rarement décrite. Elle est probablement sous-estimée. Dans la série de Pineton de Chambrun et al., évaluant 41 malades, les biopsies coliques étaient systématiques et l’infil-tration colique était présente dans plus de 90 % des cas (6). Certaines atteintes iléocoliques peuvent poser des difficultés diagnostiques ; notamment lorsqu'il s'agit de les distinguer de celles qui sont dues à une maladie de Crohn. Dans ce cas, l’histo-logie et surtout l’évolution permettent d'ajuster le diagnostic.

Atteinte péritonéale

L’atteinte péritonéale de la GEAE se manifeste par une ascite exsudative riche en polynucléaires éosinophiles. Généralement, les éosinophiles représentent plus de 90 % des cellules périto-néales (environ 40 à 140 000 éosinophiles par microlitre). Ces ascites sont à distinguer des autres ascites à éosinophiles rencontrées au cours du syndrome d’hyperéosinophilie essentielle (SHE), des lymphomes abdominaux, du cancer du pancréas, d’infections péritonéales bactériennes ou parasitaires, de la périartérite noueuse ou des

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La gastroentérite à éosinophilesDOSSIER THÉMATIQUE

Pathologies de l’intestin grêle

Image 1. Gastroentérite à éosinophiles. Atteinte gastrique et aspect d’antrite congestive en endoscopie.

Image 2. Gastroentérite à éosinophiles. Endoscopie haute montrant une duodénite congestive.

dialyses péritonéales (3). L’ascite est probablement sous-estimée car elle est souvent transitoire, les ballonnements qui la précèdent peu spécifiques, et elle répond rapidement à un traitement par corticoïdes.

Atteintes extra-intestinalesDes atteintes extra-intestinales peuvent être obser-vées, essentiellement pancréatiques, vésiculaires et hépatobiliaires. Elles posent des problèmes de diagnostic différentiel parfois difficiles.

Explorations biologiques

Les 2 principales anomalies biologiques sont une hyperéosinophilie sanguine et une augmentation sérique du taux des IgE. L’hyperéosinophilie sanguine est présente dans plus de 70 % des cas. Il n’y a pas de corrélation entre les taux sanguins et tissulaires. L’hyperéosinophilie sanguine est parfois transitoire. Des taux médians d’éosinophiles de 1 500/mm3 ont été rapportés par l’équipe de Lille (2). L’éosinophilie sanguine, plus importante, semble-t-il, en cas de forme séreuse, serait absente chez 1 malade sur 5 et elle n’est donc ni suffisante ni nécessaire au diagnostic de GEAE. Les taux sériques d’IgE sont augmentés dans plus de 50 % des cas. La recherche d’IgE spécifique d’un allergène est presque toujours négative, même lorsqu’un allergène est suspecté lors de l’enquête allergique. Des marqueurs bio-logiques indiquant une malabsorption, une enté-ropathie exsudative, une atteinte pancréatique ou une inflammation digestive sont rarement mis en évidence au cours des GEAE.

Explorations morphologiques

La fibroscopie œso-gastroduodénale et l’iléo-coloscopie avec biopsies étagées sont nécessaires au diagnostic de GEAE. Les endoscopies peuvent montrer une muqueuse normale ou congestive (images 1 et 2), érodée, ulcérée ou nodulaire. Dans l’œsophage, des spasmes, des stries horizontales ou verticales et des décollements muqueux ont été décrits. L’examen histologique est essentiel au diagnostic. L’étude des biopsies montre l’infiltrat à éosinophiles. Dans la plupart des études, le seuil de 20 éosinophiles par champ au fort grossisse-ment (multiplié par 400) est retenu pour poser le diagnostic de GEAE (image 3). La présence d’éosino-philes en dehors de la lamina propria est considérée comme pathologique, surtout s’ils présentent des signes d’activation (dégranulation). L’échographie abdominale et ou la tomodensitométrie abdominale (TDM) montrent une éventuelle ascite, un épaissis-sement de la paroi digestive (images 4 et 5) et une éventuelle sténose dans les formes musculeuses.

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DOSSIER THÉMATIQUE

Image 3. Gastroentérite à éosinophiles. Aspect au microscope optique d’un infiltrat à éosinophiles de la muqueuse digestive.

Image 4. Gastroentérite à éosinophiles. TDM abdomino-pelvienne montrant des parois digestives épaissies, avec prise de contraste de la muqueuse.

Image 5. Gastroentérite à éosinophiles. Atteinte séreuse : TDM abdomino-pelvienne montrant un épanchement péritonéal abondant diffus, prédominant en périhépatique et périsplénique.

Diagnostic différentiel (7)

Le diagnostic de GEAE repose sur l’existence des 3 critères indispensables : une symptomatologie gastro-intestinale, une hyperéosinophilie digestive et l’élimination des autres causes d’hyperéosino-philie intestinale (tableau, p. 198). Le diagnostic de l’hyperéosinophilie repose sur l’analyse histo-logique des biopsies étagées lors des endoscopies digestives, sur celle du liquide d’ascite dans les formes séreuses ou sur celle d’une pièce opéra-toire en cas de complication chirurgicale. Cepen-dant, l’hyperéosinophilie n’est pas spécifique de la GEAE et elle peut avoir plusieurs autres causes, qui doivent être éliminées avant de faire le diagnostic de GEAE. Les parasitoses sont l’une des causes les plus fréquentes d’hyperéosinophilie digestive associée à une éosinophilie sanguine ; elles sont recherchées par l’interrogatoire, l’examen des selles, l’analyse des biopsies digestives et des séro-logies. Néanmoins, la fréquence de ces infections et la mauvaise sensibilité des recherches parasitaires peuvent justifier un traitement d’épreuve anti-parasitaire chez tous les patients avec une hype-réosinophilie intestinale. Des médicaments sont susceptibles d'entraîner une réaction allergique avec éosinophilie anormale sanguine et digestive. Il convient d’éliminer les vascularites et certaines maladies systémiques. Une hyperéosinophilie digestive a également été décrite dans le reflux gastro-œsophagien, la gastrite à Helicobacter pylori, la maladie cœliaque, et les maladies inflam-matoires chroniques intestinales (MICI). Enfin, il est

indispensable d’éliminer un SHE dont la définition est une hyperéosinophilie sanguine supérieure à 1 500/mm3 pendant plus de 6 mois associée à au moins une atteinte viscérale ; la recherche d’une prolifération clonale leucocytaire anormale permet d’orienter le diagnostic.

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La gastroentérite à éosinophilesDOSSIER THÉMATIQUE

Pathologies de l’intestin grêle

Arguments pour une origine allergiqueCertains arguments sont en faveur d’une origine allergique, mais celle-ci reste controversée. En effet, 25 à 75 % des patients atteints de GEAE ont des antécédents personnels ou familiaux d’atopie et d’allergie. L’élévation du taux sérique des IgE est aussi en faveur de l’origine allergique. La pratique d’une enquête allergologique détaillée, de tests cutanés et la recherche d’IgE spécifi ques doivent être toujours conduites. L’identifi cation d’un aller-

gène digestif spécifi que reste très rare sauf chez l’enfant. Le bénéfi ce de l’exclusion séquentielle des allergènes alimentaires incriminés est incons-tant (7, 8).

Traitement de la GEAE

Le traitement de la GEAE est mal défi ni en raison de sa rareté, de l’absence d’études contrôlées et d’une régression parfois spontanée des symptômes. L’histoire naturelle de la GEAE est très mal connue. Dans les formes allergiques, l’exclusion antigénique est parfois suffi sante, mais son effi cacité est souvent transitoire. Le traitement de la GEAE par stéroïdes repose sur les cas cliniques rapportés et il est effectué en fonction de la sévérité des symptômes. Des doses d’attaque de 20 mg à 40 mg par jour de prednisone et jusqu’à 1 mg/kg ont été rapportées. Une amélio-ration clinique s’observe pendant les 2 premières semaines mais une prise au long cours est parfois nécessaire. La réponse clinique des patients ayant une ascite à éosinophiles est spectaculaire. Le budésonide est une alternative thérapeutique qui comporte moins d’effets indésirables systémiques. Dans certains cas sévères de GEAE corticodépen-dants, un traitement immunosuppresseur tel que l’azathioprine peut se discuter. D’autres traitements ont été utilisés et rapportés dans des cas cliniques : cromoglycate disodique, montélukast, kétotifène et octréotide (7-9). ■

1. Kaijser R. Zur Kenntnis der allergischen Affektionen des Verdauungskanals vom tandpunkt des Chirurgen aus. Arch Klin Chir 1937;188:36-64.2. Pineton de Chambrun G, Desreumaux P, Colombel JF et al. La gastroentérite à éosinophiles. Revue française d’allergologie 2010;50:248-53.3. Seguy D, Desreumaux P, Colombel JF. La gastroentérite à éosinophiles. Pathologie du grêle. Progrès en hépatogas-troentérologie 1997;Ed. Doin:119-35.

4. Klein NC, Hargrove RL, Sleisenger MH et al. Eosinophilic gastroenteritis. Medicine 1970;49:299-319.5. Talley NJ, Shorter RG, Philips SF, Zinsmeister AR. Eosino-philic gastroenteritis: a clinicopathological study of patients with disease of the mucosa, muscle layer and subserosal tissues. Gut 1990; 31:54-8.6. Pineton de Chambrun G, Gonzalez F, Canva J et al. Natural history of eosinophilic gastroenteritis. Gastroenterology 2009; 136(5,Suppl.1):A-369.

7. Yan B M, Shaffer EA. Primary eosinophilic disorders of the gastrointestinal tract. Gut 2009;58:721-32.

8. Mendez-Sanchez N, Chavez-Tapia NC, Vazquez-Elizondo G et al. Eosinophilic gastroenteritis: a review. Dig Dis Sci 2007;52:2904-11.

9. Quack I, Sellin L, Buchner NJ et al. Eosinophilic gastroen-teritis in a young girl – long term remission under Montelu-kast. BMC Gastroenterology 2005;5:24.

Références bibliographiques

Tableau. Diagnostic différentiel des gastroentérites à éosinophiles.

Syndrome hyperéosinophilique essentiel (SHE)

– éosinophilie sanguine > 1 500/mm3 plus de 6 mois consécutifs– atteinte viscérale dont digestive dans 14 % des cas– recherche de clonalité des lymphocytes T et transcrits de fusion

Infections

– ascaridiose, oxyurose, toxocarose, trichinose, bilharziose, ankylostomiase, anguillulose, trichocéphalose, tænia, angiostrongylose– Helicobacter pylori, Escherichia Coli, Shigella

Médicaments

– sels d’or, hypoglycémiants oraux, psychotropes, antibiotiques, AINS

MICI : maladie de Crohn ou rectocolite ulcéro-hémorragique

Maladie cœliaque

Vascularites et connectivites : panartérite noueuse, Churg-Strauss, sclérodermie

Néoplasies et hémopathies