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La formation des professeurs delycée—ou: peut‐on bien faire unmétier que personne ne prend auserieux?Antoine ProstPublished online: 01 Dec 2006.

To cite this article: Antoine Prost (1983) La formation des professeurs de lycée—ou: peut‐onbien faire un métier que personne ne prend au serieux?, European Journal of TeacherEducation, 6:3, 259-270, DOI: 10.1080/0261976830060309

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European Journal of Teacher Education, Vol., 6, No. 3, 1983 259

La formation des professeurs de lycée—ou: peut-on bienfaire un métier que personne ne prend au serieux?

ANTOINE PROST

PRESENTATION L'auteur de cet article Antoine Prost a été chargé de constituer unecommission de réflexion et de propositions pour une réforme des lycées et de la formation deleurs personnel enseignant.

La situation dans les lycées se présente comme un ensemble disparate tant par les typesd'établissements que par l'hétéréogénéité des modes de recrutement et de formation desprofesseurs.

S'il est vrai que les professeurs de lycée sont souvent d'un bon niveau universitaire, leurformation est faible en épistémologie et didactique, le modèle du cours magistral restedominant et la conception des disciplines étroite; quant à la formation professionnelle, elleest à l'exception de celle dispensée dans les ENNA (Ecoles Normales Nationale d'Appren-tissage) empirique et archaïque. Elle ne prend en compte ni l'organisation et la gestion dutravail de classe, ni le suivi du travail des élèves.

Le diagnostic porté sur les lycées appelle une réforme radicale quant au recrutement età la formation des enseignants. Ce sont ces propositions de réforme qu'Antoine Prost exposedans la deuxième partie de son article.

La formation professionnelle des professeurs de lycées est, dans l'ensemble, inexis-tante. Il semblerait donc indispensable de procéder à de grandes réformes. Or seulesde petites ont quelque chance de se faire. Telle est, résumée à larges traits, lasituation qu'il faudrait expliquer.

I La situation actuelle

1 Un ensemble disparate

Les lycées actuels sont l'aboutissement historique d'établissements d'origine trèsdiverse. Les lycées d'enseignement général et/ou technologique (LEGT) font suiteà la fois aux anciens établissements secondaires du XIXo siècle, lycées et collèges, auxécoles primaires supérieures absorbées par les précédents en 1941, et aux écolesprofessionnelles ou techniques de tous ordres devenues lycées techniques en 1959.Quant aux lycées d'enseignement professionnel (LEP), ils continuent les centresd'apprentissage créés lors de la dernière guerre mondiale.

Rien d'étonnant, dans ces conditions, à la diversité des professeurs. Dans lesLEGT, on trouve principalement des agrégés, des certifiés, titulaires du certificatd'aptitudes pédagogiques à l'enseignement secondaire (CAPES) et des professeurstechniques de lycées techniques (PTLT): d'où une grande hétérogénéité, accrue par

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la coexistence, dans les disciplines techniques, des PTLT et des agrégés ou certifiésdes disciplines techniques. Formés en principe dans les mêmes écoles normalesnationales d'apprentissage (ENNA), les professeurs de LEP sont plus homogènes,même s'ils ne passent qu'une année dans ces ENNA, et si les contacts sont réduitsentre ceux qui se destinent aux enseignements généraux et aux enseignementsprofessionnels.

Cette hétérogénéité des modes de recrutement et de formation des professeurs delycées mérite d'être soulignée. Elle est aggravée par la hiérarchie des rémunérations,des agrégés aux professeurs de LEP, et par la hiérarchie inverse des obligations deservice: 15 h. de cours par semaine pour les agrégés, 18 pour les certifiés, 26 pour lesprofesseurs d'atelier dans les LEP. L'absence de formation commune et le cloisonne-ment de ces divers corps ne facilite pas la collaboration ultérieure des professeursdans les lycées. C'est là une première critique.

2 Une formation académique déséquilibrée

Les responsables du système éducatif français sont généralement satisfaits du "hautniveau" des professeurs des lycées. Il est vrai que le recrutement par concours estune garantie de niveau, surtout quand les candidats sont nombreux, vrai aussi que lemoment auquel interviennent ces concours garantit une formation universitairesolide, de 2 ans au moins pour les professeurs des LEP, de 3 pour les PTLT, de 4pour les certifiés et de 5 pour les agrégés. Enfin, les professeurs français sont plusspécialisés en général que leurs collègues étrangers, et ils sont formés dans une seulediscipline (mathématiques, anglais, allemand, français) ou dans deux au plus(histoire-géographie, physique-chimie); de ce fait, leur niveau de connaissances estplus poussé.

Il faut pourtant apprécier ces connaissances en fonction des missions des lycées.Ceux-ci ne sont pas des centres de recherche scientifique, ni des salons ou desacadémies. Les professeurs ne sont pas destinés à causer agréablement ou à écrire deslivres érudits ou profonds. L'Etat ne les paye pas parce qu'il a le devoir d'entretenirla flamme de la culture ou de la science, mais parce qu'il faut s'occuper de centainesde milliers de jeunes, de tous niveaux et de toute origine, et que, des études que cesjeunes feront au lycée, dépendent et leur avenir, leur succès dans la vie, et l'avenirdu pays au XXI° siècle.

De ce point de vue, irrécusable, il faut se demander si les professeurs français ontle niveau de connaissances nécessaire pour enseigner dans les lycées, et la réponse estnégative. Ni l'agrégation, ni le CAPES ne donnent satisfaction, dans le domainemême où ils prétendent exceller: celui des connaissances et du niveau intellectuel. Laformation que ces concours sanctionnent souffre, en effet, de trois défauts graves.

Le premier est l'absence de l'épistémologie et de la didactique. Transmettre desconnaissances, c'est les transmettre suivant un certain ordre, avec certains concepts.La pertinence de cet ordre et de ces concepts n'est pas affaire de techniquepédagogique, et il ne suffit pas qu'une manière d'expliquer soit efficace pour qu'elledevienne légitime; il faut encore qu'elle soit scientifiquement fondée, pour ne pasentraîner par la suite de méprises plus radicales. De même, pour diriger les étudesdes lycéens dans une discipline donnée, il ne suffit pas d'un savoir: l'enseignementn'est pas simple transmission de savoirs, ni même apprentissage par imitation: il estreconstruction, par les élèves, avec leurs démarches propres, d'un savoir personnel,intégré aux savoirs précédents. Sans connaissances sur ce point, le professeur estincapable de guider efficacement les études des lycéens. Ainsi, un professeur de

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mathématiques qui n'a jamais étudié les procédures de résolution de problèmes estincapable de savoir si le corrigé qu'il donne d'un exercice est ou non assimilable parses élèves. Or l'université n'étudie guère ce type de questions, et les concours derecrutement y sont totalement indifférents.

La seconde critique vise la conception étroite des disciplines académiques qui estcelle des universités. Les universités enseignent en effet les connaissances pour elles-mêmes; on y apprend à tenir un discours exact, documenté et argumenté sur dessujets précis. C'est évidemment nécessaire au futur professeur, mais ne lui suffit paspour réussir dans son métier. Il est téméraire, en effet, de supposer que des centainesde milliers de jeunes vont se passionner chaque année pour la crise de 1929, lesfonctions affines, la dialectique hégélienne ou la structure de l'ADN. S'il ne veut pasparler dans le désert, tandis que ses élèves liront des romans policiers ou jouerontaux cartes, le professeur doit éveiller leur intérêt. Cela est plus aisé, s'il est lui-mêmeintéressé, car l'intérêt est contagieux, mais cela suppose aussi qu'il soit capable dedonner toute leur dimension culturelle aux sujets qu'il traite. Ce n'est pas dans cetteoptique qu'on enseigne dans les universités.

Enfin, la formation académique donnée par les universités est contestable enraison des modèles pédagogiques qui l'inspirent. Modèle du cours magistral, adapté àla transmission de savoirs nouveaux ou mis à jour; modèle du travail individuel sanscontrainte institutionnelle. Or la transposition de ce modèle pédagogique dans leslycées peut provoquer l'effondrement des études secondaires. Au lycée, il fautapprendre aux élèves à prendre des notes, il faut veiller à ce qu'ils apprennentrégulièrement des leçons, il faut donner de nombreux exercices écrits ou oraux, etvarier ces exercices: toutes choses qu'en général les universités dédaignent superbe-ment, ce qui, soit dit en passant, explique leur médiocre efficacité.

Ces insuffisances graves de la formation académique pourraient être compenséespar une formation professionnelle bien conçue. C'est en partie le cas dans les ENNA[1], mais non dans les centres pédagogiques régionaux (CPR) qui sont censésassurer en un an la formation professionnelle des agrégés et certifiés. Les CPRréduisent en effet la formation professionnelle à une simple formation pédagogique,et celle-ci à un stage.

3 Une formation pédagogique archaïque

Jusqu'à la dernière année scolaire, la formation professionnelle se réduisait en effet àune année de stage. Les agrégés et les certifiés avaient la responsabilité d'une oudeux classes; pour les aider, on leur donnait des conseillers pédagogiques. Lescertifiés étaient obligés d'assister en partie aux cours de leurs conseillers, et de fairequelques leçons dans leurs classes. Au terme de cette année, et quels qu'en aient étéles résultats, eussent-ils même été sans cesse chahutés, les agrégés étaient définitive-ment nommés dans un lycée; les certifiés passaient une épreuve pratique devant unjury composé d'un inspecteur, d'un conseiller et d'un troisième professeur. Cetteépreuve décidait de leur titularisation et de leur affectation ultérieure.

Cette formation était totalement empirique. Les CPR ne disposent d'aucunpersonnel propre, pour former les stagiaires. C'est une différence majeure d'avec lesENNA, dont les professeurs sont spécialement recrutés, et qui constituent de ce faitun lieu de réflexion et de recherche. Certains des chercheurs les plus connus ensciences de l'éducation sont d'ailleurs d'anciens professeurs d'ENNA, comme MarcelPostic ou Guy Avanzini. Au contraire, les CPR n'ont même pas un directeur à tempsplein. Les conseillers pédagogiques sont des professeurs qui conservent toutes leurs

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classes; ils sont choisis par l'inspection parmi les professeurs qu'elle considère commebons, suivant ses propres critères, où l'innovation tient peu de place; l'institution neles convie jamais à réfléchir sur ce qu'ils peuvent apporter à leurs stagiaires, sur lafaçon dont leurs conseils peuvent être reçus, sur les difficultés des stagiaires etc.Enfin, l'épreuve pratique est une leçon dans une classe; elle était initialementdestinée à vérifier les aptitudes proprement pédagogiques des candidats et leurrelation à la classe. Mais, avec le temps, et de façon plus ou moins accusée suivant lesdisciplines, l'épreuve pratique est devenue un simple exposé oral, où les élèvestiennent le rôle de figurants. On le vit bien en 1976, quand les grèves avaient vidécertains lycées de leurs élèves: on fit passer des épreuves "pratiques" de CAPES sansélèves. Dans ces conditions, elles n'ont rien de plus "pratique" que les épreuvesorales du concours "théorique".

Depuis 1982, on s'est efforcé de donner aux stagiaires du CPR une formationprofessionnelle plus solide; une interrogation de connaissance de l'institution scolaires'ajoute désormais aux épreuves pratiques. Mais cette réforme a été contrariée par lapénurie d'enseignants, qui a obligé à donner en responsabilité un service plus lourdaux stagiaires, et à les nommer sur des postes vacants, souvent éloignés du CPR. Enoutre, à l'exception de la connaissance du système scolaire, ces nouveaux éléments deformation ne sont pas sanctionnés lors des épreuves pratiques. Enfin, de nombreuxstagiaires consacrent l'essentiel de leur année à préparer l'agrégation, ce qui relègueau second plan la formation professionnelle et les conduit bien souvent à s'endispenser.

Ce bricolage archaïque est assuré par des professeurs dont la compétence, quandelle existe, est le résultat d'un hasard heureux: ils ne font en effet l'objet d'aucunchoix spécifique de formateurs de professeurs, et ne reçoivent aucune préparation àces tâches. L'ensemble coûte cependant assez cher, car les conseillers pédagogiquesreçoivent des indemnités, et il faut régler des frais de déplacement aux stagiaires, enplus de leur traitement. Or cette formation est globalement inefficace, puisque lerésultat final de l'année dépend de l'épreuve pratique, et non de la formation elle-même.

L'organisation de l'épreuve pratique repose en effet sur une définition implicitedu métier d'enseignant: un bon professeur est quelqu'un qui sait parler de façoninformée et pertinente. Mais cette capacité a déjà fait l'objet d'une vérification, lorsdu concours de recrutement. Il est donc inutile de la vérifier une seconde fois.D'autant qu'on peut parler admirablement, et se révéler pourtant fort mauvaisprofesseur. Quatre aspects du métier, au moins, devraient être pris en compte.

Un bon professeur est d'abord celui qui sait organiser le travail d'une classe. Onretrouve ici, mais en partie seulement, les problèmes de didactique déjà évoqués,avec une dimension collective et une dimension chronologique supplémentaires.Comment organiser une année? Suivant quelle progression? Quels découpages?Comment graduer les exercices demandés aux élèves? Quels sujets se prêtent à unetravail d'équipe, et comment éviter que celui-ci ne tourne en de vaines parlotes?Quels sujets exigent d'autres approches? Comment utiliser les manuels? Autant dequestions très concrètes, qu'il serait utile aux futurs professeurs d'examiner avec eux.

En second lieu, le professeur doit suivre le travail des élèves; il corrige des devoirset met des notes. L'administration qui donne des classes à des professeurs qui n'ontjamais réfléchi à l'évaluation des élèves est irresponsable. A quelles conditions uneévaluation est-elle formative? Comment expliciter les objectifs pour permettre auxélèves de s'évaluer eux-mêmes? Comment faire le point avec eux sur leur travail?Comment noter? La docimologie est constituée depuis un demi-siècle, et l'on peut

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enseigner aujourd'hui en en ignorant le premier mot, alors que les enseignantsprennent des décisions d'orientation qui engagent l'avenir des élèves comme ils nel'avaient jamais fait jusqu'ici. On continue à accorder au baccalauréat et aux examensune valeur intangible, alors que de très nombreux examinateurs ne conçoivent mêmepas l'utilité de la concertation que l'administration leur demande, pour s'entendresur leurs critères de notation. Ces constats sont accablants.

L'évolution de notre société et celle de la jeunesse obligent à intégrer au métierd'enseignant deux dimensions nouvelles, qui posent des problèmes plus délicats. Lapremière concerne la gestion des classes. Les élèves sont très hétérogènes, mais auxdifférences individuelles s'ajoutent souvent des clivages de groupes. Les classes sontconstituées de sous-groupes souvent conflictuels, qui n'ont pas les mêmes objectifs:les uns veulent travailler d'une façon, les autres d'une autre; certains ne veulent pastravailler. Les solidarités se font ou se défont. Dans ces conditions, l'organisation dutravail collectif passe par la gestion avisée de ces sous-groupes: on peut se mettre uneclasse à dos pour l'année par une réprimande inopportune, ou, au contraire, enfermant les yeux sur une incartade que la plupart des élèves réprouvent. Le recoursaux sanctions, quand il reste possible, n'est plus une aide efficace. Bref, il fautaujourd'hui, pour tenir une classe, gérer des groupes multiples: cela exige dudiscernement, de l'attention, des interventions opportunes, toutes choses qu'uneformation peut développer, sinon apprendre.

Enfin, les professeurs sont plus exposés qu'autrefois aux sollicitations person-nelles des élèves. Certains adolescents s'opposent à leurs parents; d'autres éprouventle sentiment d'une impossibilité à se faire comprendre d'eux; d'autres encore seplacent malencontreusement dans des situations dont ils ne peuvent sortir seuls, etpour lesquelles, croient-ils, leurs parents ne sauraient les aider. Ils se confient alors àun adulte en qui ils ont confiance. Faut-il déplorer que les professeurs inspirentsouvent cette confiance?

Dans de telles situations, affirmer que le rôle des enseignants n'est pas d'être leconfident de leurs élèves ne sert à rien: l'initiative ne leur appartient pas, et, quandun lycéen se confie, il faut bien faire quelque chose. L'adresser à une personnesupposée compétente, assistante sociale ou médecin, équivaut souvent à refuser sonaide, car l'élève connaît l'existence de ces personnes, et il a ses raisons d'aller voirprécisément tel professeur. Mais, si celui-ci accepte de l'aider, dans quelle aventures'engage-t-il?

Deux anecdotes illustreront les difficultés de ces situations. La première concerneun professeur d'âge mûr, à qui une élève de l'année précédente demande un rendez-vous; il l'accorde, et l'élève lui raconte qu'elle est enceinte, qu'elle veut garder sonenfant et épouser le père, mais que ses parents ne veulent pas en entendre parler.Que faire? Le professeur a longuement écouté et n'est pas intervenu, sauf auprès del'administration, pour éviter un redoublement qui aurait encore compliqué lasituation, puis le temps a fait son oeuvre, et le drame s'est dénoué en dehors de lui.L'autre anecdote est plus dramatique. Elle met en scène une jeune certifiée, à quiune élève confie sous le sceau du secret, à la fin d'un cours qu'elle se droguait. Leprofesseur a accueilli la confidence et gardé le secret; elle n'a pas cherché d'autrecontact avec l'élève, qui n'en a pas manifesté le désir. Trois mois plus tard, l'élève sesuicidait. Le professeur se reproche maintenant de n'avoir rien fait pour l'aider, maisque pouvait-il faire?

Ces deux professeurs se seraient bien passé de confidences aussi embarassantes,qu'ils n'avaient en rien suscitées. Mais nul n'est à l'abri de telles sollicitations, car lepropre des lycées est de mettre des adultes en présence de jeunes. Mieux vaudrait

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que ces adultes ne soient pas trop désemparés, le cas échéant: cela suppose qu'ilspuissent eux-mêmes trouver de l'aide quelque part; cela suppose surtout que leurformation les ait au moins alertés, sinon préparés, à de telles éventualités. Les enjeuxen sont trop élevés.

II Evolutions souhaitables, évolutions possibles

1 Une proposition radicale

Ce diagnostic appelle une réforme radicale, qu'a proposée le rapport de Peretti. Ils'agit de revoir le recrutement et d'assurer la formation.

Les concours de recrutement actuels interviennent si tard, en effet, dans laformation des enseignants, qu'il n'est plus possible de donner une formationprofessionnelle sérieuse à ceux qui ont été ainsi recrutés. D'ailleurs, on l'a vu, il estexceptionnel qu'un stage pratique ait une sanction négative.

Le rapport de Peretti propose donc, sans modifier le niveau final de formation,d'avancer le moment du recrutement, et de le situer deux ou trois années après lebaccalauréat. Ce recrutement plus précoce permettrait des stages, à un moment où ilest encore temps d'orienter vers d'autres carrières ceux à qui l'enseignement neconvient pas. Il faciliterait une formation professionnelle plus complète, échelonnéesur deux ou trois ans, et liée à la formation universitaire. Celle-ci se trouverait enoutre indirectement modifiée: d'une part les futurs professeurs aborderaient leursétudes dans une perspective différente; d'autre part, les responsables de leur forma-tion pourraient négocier avec les universités les contenus de leurs études (didactiqueetc.).

Cette proposition oblige à supprimer les concours de recrutement actuels, car ils'inspirent d'une vue très différente, et leur maintien retirerait toute importance à laformation professionnelle, aux yeux mêmes des futurs professeurs, qui devraientpasser ces concours. De plus, il serait difficile de ne pas les ouvrir simultanément àdes étudiants libres; subsisterait ainsi une voie parallèle, qui risquerait de devenirplus prestigieuse, et où la formation au métier n'aurait aucune place.

Le projet de Peretti présente deux avantages supplémentaires. Il oblige à créer devéritables centres de formation, pour accueillir ceux qui ne seraient plus seulementdes stagiaires: d'où un brassage possible, au cours de leur formation, des professeursdes divers lycées et des diverses disciplines. D'où aussi—c'est le second avantage—laconstitution nécessaire d'équipes de formateurs, avec les conséquences bénéfiquesqu'on peut en attendre pour la formation continue des enseignants.

Depuis plus d'un an que cette proposition a été formulée, aucun signe n'annoncepourtant un début éventuel d'application. Manifestement, cette réforme ne se ferapas. Il est capital de comprendre pourquoi?

2 Les obstacles

En matière de formation des professeurs de lycées, la force des choses pèsemassivement en faveur du statu quo. Malgré les critiques sévères qu'il appelle, ilbénéficie de puissants soutiens.

En premier lieu, le statu quo coûte beaucoup moins cher que la réforme. Avantd'être employés à temps plein, les futurs professeurs sont payés un an seulement,pendant lequel ils enseignent d'ailleurs à temps partiel. La réforme de Peretti

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obligerait à les payer deux ou trois ans, et à entretenir des centres de formation, avecun personnel propre: les financiers sont réticents.

En second lieu, les règles de la fonction publique française lient en général leniveau de rémunération au niveau de recrutement. Certes, il serait possible demaintenir le niveau actuel de rémunération des certifiés à des professeurs formésdans des centres spéciaux en deux ou trois ans; des précédents existent en ce sens.Mais beaucoup craignent qu'à la longue, on ne finisse par considérer ces professeursnon comme des titulaires de la maîtrise—leur diplôme de sortie—mais comme deslicenciés ou des diplômés du premier cycle universitaire—leur diplôme d'entrée. Lacrainte n'est pas fondée, mais elle existe, et elle explique des réticences, notammentsyndicales.

Un troisième obstacle est la crainte qu'un tel système n'entraîne une baisse duniveau de formation des professeurs de lycées, une "primarisation". Certes, laréforme ne modifierait pas le niveau de formation universitaire, qui demeurerait lamaîtrise. Mais les Français croient davantage aux concours qu'aux examens, et ilsn'ont pas grande estime pour les exigences des universités. On a beau faire valoir queles élèves des grandes écoles, les polytechniciens par exemple, sont recrutés parconcours deux ou trois ans après le baccalauréat, sans que personne ne mette endoute leur niveau, rares sont ceux qui parieraient que les centres de formation desprofesseurs de lycées pourraient devenir des sortes de grandes écoles intégrées auxuniversités.

Les universités, elles-mêmes, ne seraient pas favorables à cette réforme. Ellescraindraient qu'elle ne vide leurs seconds cycles de leurs étudiants. Ceux-ci nemanqueraient pas de protester contre une sélection trop précoce à leurs yeux. Bref,chacun préfère hypocritement faire comme si tous les étudiants de licence ou demaîtrise se destinaient à l'enseignement, alors que tous savent parfaitement que seuleune infîme minorité réussira les concours.

L'obstacle le plus profond est cependant le scepticisme général envers la forma-tion professionnelle. Au vrai, il est insurmontable. Prôner une telle formation estprêcher dans le désert. Tout ce qui est "pédagogie" suscite en France, dans denombreux milieux, le mépris ou la dérision. Des hommes par ailleurs intelligentsaffirment sérieusement: "II n'y a pas de problèmes pédagogiques, il n'y a que desprofesseurs qui n'ont rien à dire", ou encore: "Quand le niveau de connaissances estsuffisant, le problème de relations ne se pose pas". Dès qu'on fait valoir que lesélèves existent, et qu'ils sont autres, on se voit accuser de vouloir la baisse du niveaudes professeurs. Accusation absurde, mais la défense du statu quo exige que sespartisans affectent d'entendre qu'on réclame une formation professionnelle à la placed'une formation de haut niveau, quand on la réclame en plus.

Si violentes sont les réactions, si manifeste l'aveuglement, qu'on s'interroge surleur fondement. Derrière ce débat absurde, où l'évidence est niée, ne s'agirait-il pasd'oblitérer les servitudes du métier pour préserver l'image libérale de l'enseignant?L'enjeu ne serait-il pas l'identité du professeur comme homme d'art ou de science, etnon comme homme de métier, payé pour accomplir un travail auprès des élèves?

Pour conforter cette image de l'enseignant comme "clerc"; il faut maintenir lestraditions, et d'abord les plus prestigieuses. L'agrégation revêt alors une importancesymbolique majeure. Ce concours remonte à l'Ancien Régime, et il constitue uneréférence centrale: y toucher serait un attentat, un sacrilège. Qu'importe, dans cesconditions, si les certifiés utilisent leur année de stage à préparer l'agrégation plutôtque d'apprendre leur métier: nous ne sommes plus dans le domaine du bon sens, oùl'on peut raisonner, mais dans celui de l'inconscient collectif.

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3 Des propositions insuffisantes

Devant ces facteurs d'immobilisme, grande est la tentation de renoncer, pour faireporter l'effort sur la formation continue des professeurs, dont l'importance estcapitale pour la transformation des lycées. Ce serait oublier d'évidentes solidarités.

Le fond du problème est que les responsables, et beaucoup des acteurs dusystème éducatif français ne croient pas qu'enseigner soit un métier, mais un art.Rien de ce qui fait un bon professeur ne saurait donc s'enseigner, hormis lesconnaissances: c'est affaire de talent, de don, d'intuition. Pour les partisans de cettethèse, et ils sont majoritaires, la formation continue est tout aussi superflue que laformation professionnelle initiale: c'est même supercherie, même temps perdu. Il n'ya donc aucune chance de faire admettre la nécessité de la formation continue, tantqu'on échoue à instituer une formation professionnelle initiale sérieuse.

Pour sortir de l'impasse, je préconiserais trois orientations.Il faut d'abord une politique ambitieuse de développement de la recherche en

éducation. Les insuffisances de la formation proprement académique, dénoncées plushaut, ne peuvent trouver de remède sans un effort intensif de recherche. Les axesprioritaires en devraient être la didactique des disciplines, la conception, l'organisa-tion et l'évaluation de séquences et de projets d'enseignement, l'observation etl'évaluation des processus cognitifs et éducatifs.

Le développement de la recherche suppose la constitution de nombreux foyersrégionaux décentralisés, liés aux lycées et appuyés à la fois sur les universités et surles missions académiques à la formation récemment créées. Son objectif n'est passeulement de fournir des contenus solides à la formation des professeurs, mais plusencore de développer une attitude nouvelle. Trop souvent, on voit s'affronter en undébat stérile, des conceptions également idéologiques de l'enseignement. La seulefaçon de dépasser ces conflits et de progresser consisterait à soumettre ces opinions àl'épreuve des faits, dans une perspective aussi objective que possible, bien que lesenjeux personnels soient pregnants. Sans un souci d'observation et d'évaluationrigoureuses, les lycées seront incapables de progresser. Les enseignants changerontde pratiques pédagogiques par mode ou par lassitude, quand il faudrait qu'ils tirentles leçons de leurs expériences. Impossible de concevoir et de mener à bien desprojets d'établissement, sans se donner des objectifs, avec des critères d'évaluationpour savoir si ces objectifs seront ou non atteints, et dans quelle mesure. Ledéveloppement de la recherche, ici, ne se limite pas à produire des savoirs nouveaux;il est facteur de progrès par la transformation des attitudes qu'il induit.

La seconde proposition consisterait à prendre au sérieux la formation desprofesseurs. Qu'elle ne le soit pas actuellement est une évidence, longuement étudiéeplus haut. Le signe irrécusable en est que n'importe qui peut être chargé de laformation des professeurs, pourvu qu'il ait une certaine ancienneté et ne se soit pasattiré la suspicion de l'inspection. Cette façon de nommer les directeurs de CPR etles conseillers pédagogiques est cohérente avec la conception majoritaire: si enseignern'est pas un métier, mais un art, il n'y a rien à apprendre, il suffit de regarder faired'autres hommes de l'art. Il en irait autrement si enseigner était un métier:l'apprendre à un collègue ne s'improviserait pas et requiererait une compétencespécifique.

Dans cette perspective, force est de constater que très rares sont actuellementdans les lycées ceux qui ont une compétence pour contribuer à la formationprofessionnelle des futurs enseignants. La mesure préconisée est donc simple: offriraux professeurs qui veulent être conseillers pédagogiques ou intervenir dans la

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formation des professeurs, une formation spécifique. Ceux qui refuseraient cetteformation manifesteraient qu'ils estiment n'avoir pas besoin de réfléchir et serévéleraient ainsi comme des incompétents inconscients de l'être. Moins dangereux,ceux qui reconnaitraient la nécessité de se former eux-mêmes pour former les autresdevraient seuls être mis à contribution. C'est d'ailleurs ainsi que fonctionnent denombreux organismes de formation d'adultes, où l'on ne peut être formateur sanss'engager soi-même dans une formation.

La troisième mesure consisterait à modifier le statut et le contenu de l'annéeactuelle de formation professionnelle.

Son statut d'abord: il conviendrait de considérer les concours actuels du CAPESet de l'agrégation comme la première partie seulement d'une procédure de recrute-ment, la seconde se déroulant un an plus tard, à l'issue de la formation profession-nelle. Concrètement, cela signifie que les notes du concours n'entreraient pas seulesen compte dans le classement des candidats, mais qu'il faudrait y joindre les notesobtenues à l'issue de l'année de formation.

Cela ne changerait rien, pour le CAPES du moins, si le contenu de l'année deformation professionnelle et les épreuves finales n'étaient profondément modifiées,car on a vu qu'elles redoublaient largement les oraux du concours lui-même. Ce n'estpas ici le lieu de préciser en détail quels pourraient être les contenus de l'année deformation professionnelle et la façon de les sanctionner: une réflexion plus approfon-die est nécessaire. On peut, du moins, esquisser à titre d'exemple quelques sugges-tions.

Pour ma part, je verrais d'une part quelques interrogations, sur des sujets commela connaissance de l'institution scolaire ou la docimologie. D'autre part, et surtout, jeproposerais deux épreuves centrales, dotées d'un fort coefficient. L'une serait lasoutenance d'un mémoire de recherche, sur un sujet précis de didactique, ou, pluslargement, de sciences de l'éducation, mais qui ait un rapport direct avec unepratique pédagogique: ni l'histoire, ni la sociologie du système éducatif ne nousintéressent ici. Il s'agit d'observer rigoureusement ce qui se passe dans les classes. Cemémoire devrait naturellement être suivi par un chercheur en sciences de l'éduca-tion, et le sujet avoir reçu l'agrément d'un conseiller pédagogique, qui pourraits'associer à sa préparation. L'autre serait la soutenance d'un rapport de stage: lecandidat expliquerait comment il a conduit l'une de ses classes, quel programme il atraité, suivant quelle progression; quels exercices il a donnés, comment il les acorrigés—les copies corrigées figurant au dossier. Il justifierait devant un jury seschoix pédagogiques, et l'on pourrait lui demander les leçons qu'il en tire pourl'année suivante.

Dans la perspective fortement tracée par ces épreuves terminales, dont leclassement des certifiés et agrégés dépendrait en partie, il devient possible de faireprendre au sérieux la préparation du métier d'enseignant. La formation peutcomprendre des apports de connaissances, dans des domaines ponctuels (docimolo-gie au sens large, didactique etc.) On peut alors proposer aux stagiaires desformations complémentaires, notamment pour les préparer aux difficultés liées à laconduite des groupes ou aux sollicitations éventuelles des élèves. On peut nouer,entre professeurs appelés plus tard à constituer des équipes pédagogiques, desrelations de travail en commun et d'aide réciproque.

Ces suggestions sont insuffisantes, car elles ne remédient pas au caractère troptardif du recrutement, ni au fait que ce recrutement ne prend pas en compte latotalité des capacités nécessaires à un professeur pour bien faire son métier. Dumoins ont-elles le mérite d'esquisser une orientation. Si l'on ne s'engage même pas

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dans ce sens, il est vain de proposer quelque réforme que ce soit, dans d'autressecteurs: on ne peut pas améliorer, en effet, l'exercice d'un métier qui n'existe pas.

Correspondence: Université de Paris I, F-75231 Paris, France.

NOTE

[1] Ecole Normale Nationale d'Apprentissage qui forme les personnels de l'en-seignement technique.

Summary

Antoine Prost examines the 'training' of 'lycée' teachers—a training which, heclaims, is virtually non-existent.

The Present Situation

Existing lycées are the institutional descendants of a variety of establishments.Consequently, it is not surprising that a wide range of qualifications is to be foundamong the teachers. In the General/Technical lycées (LEGT) teachers are agrégé,certifié, holders of the Technical Teacher qualification or of a qualification in one ormore of the technical disciplines; in the Vocational lycées (LEP) qualifications aremore homogeneous. But this diversity—and its accompanying disparities of remu-nerations and conditions of service, none of which make for collaborative attitudes—is a real problem.

There is no doubt that French lycée teachers have a high standard of subjectknowledge. But lycées are not cloisters of pure learning, and what the State payslycée teachers to do is to get on with the job of preparing hundreds of thousands ofFrench youngsters for their future—and the future of their country—in the twenty-first century. Measured against the demands of this responsibility, the level ofknowledge of lycée teachers is not adequate. There are three major weaknesses intheir training.

(1) First, no attention is given to epistemology or to didactics. Withoutknowledge in these fields, the teacher cannot adequately guide pupils' learning.(2) Secondly, the definition of 'subject' is the narrow one of the universities:knowledge for the sake of knowledge. In the lycées, the knowledge dispensedneeds to be seen to be relevant to the immediate and future world of the pupil.(3) Thirdly, the pedagogical model implicit in university teaching is itselfquestionable. It pays no attention to the learning process or needs of the student.The transfer of this model to the education of adolescents is a disaster.These serious weaknesses in academic education might be compensated by

proper professional preparation—and are, or partly so, in the case of the training oftechnical teachers. This is not so in the case of the training given to agrégé andcertifié teachers in the CPR (Centres Pédagogiques Régionaux).

Until very recently, professional training for these categories was, effectively, aone-year practicum. The CPR have no full-time staff—not even at Director level.More and more the practical test has become an exercise in spoken exposition.

From 1982, an attempt has been made to give a more real training. This howeverhas yet to prove effective, and much rests still on the practical test, and on the

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criterion that a good teacher is one who can hold forth in an informed manner (andwe note that each and every student has already passed a test under this criterionbefore admission to the CPR).

There are four professional considerations which should be taken into account:( 1 ) A good teacher needs to be able to organise the studies of a class.(2) A good teacher needs to be able to follow the progress of pupils and to makeand record constructive comments.(3) More and more, control of a classroom calls for the management of groups,sometimes in conflict one with another. The skills demanded are complex.(4) More and more also, teachers are called upon—by pupils themselves—toprovide counselling, an area in which they have no preparation.

The training of lycée teachers must take these demands into account.

Directions

A radical reform—vide de Peretti—is called for. Recruitment must be reexamined,and the quality of training guaranteed.

Recruitment (which is of course by competitive examination—R.G.) comes solate in a student's career as to allow little time for serious training. De Perettiproposed bringing it forward to two or three years post-baccalaureat, which wouldallow a training spread over two or three years, taken alongside university studies.(This proposal would replace, and not co-exist with, the present pattern, since theyare mutually incompatible.) It would make possible the creation of real trainingcentres, with full-time staff—with consequent benefits for inservice education.

But there is no indication that the proposal will be implemented. All thecircumstances are weighted in favour of the status quo, which is cheaper (oncerecruited, trainee teachers in France are salaried). Secondly, there is a fear—unfoun-ded—that the reform would lead to a lowering of status and salary. Third, concern isexpressed for academic standards. Nor do the universities favour the proposal,claiming that it would drain away their students (though in fact only a tiny minorityever pass the recruitment test).

But the most serious obstacle is scepticism about professional training. 'Peda-gogy' is scorned, and a desire to see professional training as additional to a high levelacademic education is misrepresented as a wish to see it as a replacement.

Behind this absurd debate, what is at stake is the image of the lycée teacher as aman or woman of letters, rather than as an employee paid to work with children.The outward symbol of this status, the agrégation, is inviolable, a sacred cow.

The temptation is to give up, and concentrate on inservice education. But thereare some things to build upon.

The root of the problem is that too many see teaching not as a profession, but asan art: teaching as a matter of talent, of having a gift, of intuition. From this point ofview, inservice training even is superfluous. To break out of these attitudes, threepossible orientations need to be explored.

First, a major effort needs to be made in the field of educational research. Thiswould call for the establishment of several regional centres, linked to lycées as wellas to universities and Missions Académiques. The development of high-level,academically respectable, research in education would gradually impact upon atti-tudes.

Secondly, training must be taken seriously. The supervisors of student teachersthemselves need to be trained.

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Thirdly, the year of professional training needs to be modified. The competitiveentry should be seen as the first stage only in recruitment, with a second coming ayear later, with succesful completion of training being a real hurdle. Additionally,course content needs to be changed. A knowledge of the school as an institution, forexample, is called for. A central place should be given to the study of didactics,linked to practical experience and also to detailed, self-evaluative reports on stu-dents' own practica.

These ideas are sketches only, but point to ways in which the professionaltraining of teachers might be taken seriously.

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