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La construction sémiotique de l’interaction sujet-environnement externe Caron-Pargue Josiane Université de Poitiers, France [email protected] La construcción semiótica de la historia

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La construction sémiotique de l’interactionsujet-environnement externe

Caron-Pargue Josiane

Université de Poitiers, France

[email protected]

La construcción semiótica de la historia

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OBJECTIF

Problème posé : comment travailler théoriquement etméthodologiquement avec les formes linguistiquespour les interpréter sémiotiquement et cognitivement

2 niveaux d’interprétation formes linguistiques : marqueurs d’opérations énonciatives

(Culioli)

opérations énonciatives : marqueurs de processus cognitifs

Caractériser l’histoire de l’interaction d’un

sujet cognitif avec l’environnement externe

au cours de l’effectuation d’une tâche

à partir des marques verbales

la tâche :« donner des instructions à un pair pour faire un noeud plat »

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Instructions pour faire unnoeud plat

Conditions expérimentales

Tâche : donner des instructions verbales à un pairafin de réaliser un noeud plat

Sujets : 10 couples d’enfants de 5 à 10 ans

Méthode pour identifier les référents (les ficelles) :

cohérence du noeud (le sujet qui parle sait faire le noeud)

rejet d’une approche négative qui juge les dires defaçon négative : on suppose que ce qu’il dit est correct

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L’opération de repérage (Culioli)<a,R,b> lexis (contenu propositionnel dénué de valeur de vérité)

b repéré à a dans la relation prédicative orientée aRba est le « repère » ; b est le « repéré »

Langacker : « reference point »

Sur le plan cognitif a b

Le repère « a » est focaliséattentionnellement

Il est suivi par le repéré « b »

R point de référence dans undomaine par un conceptualiseur C

Focalisé attentionnellement

Établit contact mental dirigé verscible T

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L’opération de repérage: critères, exemples

Critères :répétition de dénomination, ou de procédure

dissymétrie dans la dénomination d’objets de même nature

relation d’appartenance

Les critères s’appuient sur la notion de valeur (Saussure)fonctionnalisée dans le cadre de la tâche:

des choix lexicaux distincts pour un même objet (ou concept) sontles marqueurs de significations différentes

(5G9) On fait un noeud - un autre noeud après N1 N2

(6G4) Je mets la corde par dessus l’autre – je prends la corde…un bout de corde –je prends l’autre bout – je fais un noeud et je tire

f1 f2 f1 b1 b1 b2

(7G5) Tu passes ta corde sur l’autre – après tu passes l’autre …tu passes l’autrecomme ça …dessus l’autre – tu fais un noeud – tu passes ta corde dessusl’autre …tu passes à nouveau

f1 f2 ; f1 b1 ; cond (C1P1) ; act( C1P1) ; act(P1 P2)

Structuration de l’environnement externe

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Le terme de départ (Culioli)

Marqueur linguistique : anaphore

Définition:

Terme extrait de la relation prédicative orientée

Sert de repère pour la relation prédicative

Reconstruit la classe notionnelle dans le contexte del’énonciation

Relation prédicative orientée < a R b >

terme extrait de la relation prédicative orientée

Terme de départ premier argument ou second argument

ou

Repérage de cette relation (cad contextualisation)

ou par rapport au terme de départ

ou par rapport à la situation

a < - R b > b < a R - >

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Le terme de départ (Culioli)

Interprétation cognitive

1) Accès à l’abstraction

Peirce « prescission »

« hypostatic abstraction »

mécanismes de reconstruction dans le contexte(cf. Clancey (2001) les différentes conceptions de l’abstraction en cognition)

2) Processus d’internalisation : catégorisation des occurrences externes

réinscription au niveau interne

et d’externalisation dans l’environnement

Piaget (1976) ; Cellerier (1979) ; Karmiloff-Smith (1992) ; Zhang (2001)

Terme de départ: marqueur de l’espace interne, del’accès à l’abstraction, de sa reconstruction en contexte marqueur de catégorisation, d’externalisation

(Bégoin-Augereau et Caron-Pargue, 2009)

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Le terme de départ second argument (Culioli)Interprétation cognitive

(6G6) tu les croises … après tu prends une cordeune corde et puis tu lala passes …. et puisaprès tu fais un nœud en haut …après tu prends deux cordes et tu fais unnœud en haut

terme de départ < une corde >

(6G5) tu prends ta corde – tu mets l’autre sur ta cordeta corde queque t’as étendue – après tufais un nœud (pause) après tu fais encore un autre nœud

terme de départ < ta corde > ;

repérage avec terme de départ <ta corde l’autre>

« Prescission » (Peirce)

Une propriété est détachée des autres propriétés d’un objet

Elle peut amener des éléments dans la sphère attentionnelle

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Le terme de départ premier argument (Culioli)

Interprétation cognitive

(10G6) On met ….on met les ficelles en croix – puis celle de dessuscelle de dessus …… cellecellede dessusde dessus on lala prend au fond …celle de gauchecelle de gauche …… celle de gauchecelle de gauche tu lalaprends … tu lala prends et tu prends celle de droite – ensuite tu fais unnœud – tu serres le nœud – puis tu prends – et tu prends chaque bout maisdifférent … pas du même côté que le début

(10G1) Tu croises les deux ficelles - cellecelle quiqui estest àà ta droite quand elles seta droite quand elles secroisentcroisent tu lala passes tu lala passes dans un trou – après tu prends les deuxautres bouts et tu fais un nœud

« Hypostatic abstraction » (Peirce)Tout ce qui peut être enlevé, détaché du prédicat est transformé en« sujet », qui se trouve ainsi défini qualitativement

Ce qui reste dans le prédicat :établit un lien entre les sujets de la forme propositionnelle

est minimalement relié au « sujet »

plusieurs niveaux hiérarchisés de détachement sur le même modesont possibles

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Le terme de départ (Culioli)

Interprétation cognitive

Exemples de hiérarchisation (« hypostatstic abstraction »)

(10G4) Alors tu prends la cordela corde qquiui est dans ta main droiteest dans ta main droite tu la mets sous l’autre

[[ «« la cordela corde »» 1er argument (anaphore1er argument (anaphore quiqui) est aussi 2nd argument (anaphore) est aussi 2nd argument (anaphore lala) ]) ]

de façon à ce que ça forme un X tu prends tout le temps celle quicelle qui est dans taest dans ta[ idem:[ idem: «« cellecelle »» 1er argument (anaphore1er argument (anaphore quiqui) est aussi 2nd argument (anaphore) est aussi 2nd argument (anaphore lala) ]) ]

main droitemain droite tu la repasses dessous l’autre et tu fais un nœud avec les deux cordes

qui te restent

(10G4) A: Je fais le X je…la corde quila corde qui est dans ma main droiteest dans ma main droite dessous celle quicelle qui estestdans ma main gauchedans ma main gauche …celle de ma main droite je la mets dessus l’autre bout etensuite je fais un nœud avec les deux cordes opposéesB : tu recommences [ re[ reppéérage entre termes de drage entre termes de déépart <fpart <f11>><f<f22>]>]A : quand j’ai passé la corde sur la corde de la main gauche je fais un nœudavec les deux….avec le bout droit …avec le bout de la corde gauche et lebout de la corde droite et je tire sur les deux autres bouts

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Les expressions modales (Culioli)

Les détachements dus aux termes de départ peuvent se placer sur cediagramme, et s’additionner aux détachements dus aux termes modaux

D’où la possibilité de remonter dans le diagramme vers la situation p vers l’identification des contraintes de la situation

p p’

pp’

p!

p situation dans l’espace et le tempsp’ occurrences autres que ppp’ décroché de p et de p’, mais encore lié à p et

p’ en ce sens qu’il y a une route à comblerp! niveau détaché autre que pp’, n’est concerné ni

par p ni par p’

Une expression modale est la marque d’un décrochement

La conjonction de plusieurs modaux enchaîne lesdécrochements en suivant des passages obligatoires dansle schéma suivant

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Interaction sujet-environnement externe

(8G6) Il faut croiser les cordes – la première corde est dessous l’autre – il faut

pp’’(f(f11,f,f22)) pp’’(f(f11);); ff11ff22 pppp’’(f(f11))prendre la corde qui est en face …. faut prendre la corde qui est en face … cellecelle

p!(b(fp!(b(f11));));<b(f<b(f11))ff11>> pppp’’(b(f(b(f11)) p!(b(f)) p!(b(f11));));<b(f<b(f11))ff11>>

quiqui est pas devant mais la deuxiest pas devant mais la deuxièèmeme – on la tire – on attrape l’autre bout de la

pppp’’(f(f11)) p!(b(fp!(b(f11)))) pppp’’(b(f(b(f11))))corde et on fait le deuxième nœud – on fait passer entre les deux cordes – on

p(fp(f11,f,f22);); NN11NN22 p(fp(f11,f,f22))tire – puis on attrape les deux autres cordes

p(fp(f11,f,f22)) p(fp(f11,f,f22))

ff22

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(6G2) croise les deux cordes – puis tu prends la cordela corde quiqui est devant toiest devant toi …..cellecelle

p(fp(f11,f,f22)) pp’’(f(f11););<f<f11b(fb(f11)>)>

quiqui est la plus par lest la plus par làà basbas – tu la prends tu la montes tu la passes vers …. après ….

pppp’’(b(f(b(f11)))) p!(b(fp!(b(f11));));<b(f<b(f11)>)><f<f11>>

après tu prends celle qui est …. qui est à côté …pas celle que t’as prispp’’(f(f22););<f<f22 ff11>> pppp’’(f(f11))

…non…pas le morceau que t’as pris …l’autre…celle quicelle qui estest àà côtcôtéé …tu le

p!(fp!(f11)) pppp’’(b(f(b(f11));));<b(f<b(f22))b(fb(f11)>)> pppp’’(b(f(b(f22))))

prends tu le mets en l’air – après tu les croises – tu prends le morceau quile morceau qui estest àà

p!(b(fp!(b(f22)) ;)) ;<b (f<b (f22)>)><b(f<b(f11)>)> pppp’’(f(f11,f,f22)) p!(b(fp!(b(f11))))

la gauchela gauche …à…à la gauchela gauche……..àà la gauchela gauche – tu le prends tu le mets entre …dans le

pppp’’(b(f(b(f11)) ;)) ; <b (f<b (f11)>)><b(f<b(f22)>)>

rond – après tu prends les deux morceaux et tu tires

pppp’’(f(f11,f,f22)) p(fp(f11,f,f22))

Interaction sujet-environnement externe

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Extension à l’interactionentre sujets

Dans un premier temps on analyse la représentationd’ensemble avec les décrochements successifs

La représentation est distribuée entre les intervenants(Zhang, 1998)

L’intervention de l’autre introduit un décrochement

On situe ensuite la position de chaque intervenant

par rapport à la représentation d’ensemble

notamment par rapport aux processus d’internalisation etexternalisation

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Extension à l’interaction entre sujets

(8G3) A : On croise les deux ficelles – on prend une ficelle on la passe en dessous de l’autre

p(fp(f11,f,f22)) pp’’(f(f11);); <f<f11ff22>>

– on passe …on croise la première ficelle sur la deuxième – on fait un nœud – on prend les

pp’’(f(f11)) pp’’(f(f11);); ff11ff22 pp’’(f(f11,f,f22))

deux ficelles et on tire

pp’’(f(f11,f,f22)) pp’’(f(f11,f,f22))

B : comment on croise ?

p!(fp!(f11,f,f22)) (2 d(2 déécrochements : interruption + interrogation)crochements : interruption + interrogation)

A : on croise une ficelle en dessous et une ficelle par dessus

pppp’’(f(f11)) (interruption : changement(interruption : changement éénonciateur)nonciateur)

B : comment on fait le nœud ?

pppp’’(f(f11,f,f22)) (2 d(2 déécrochements : on descend et remonte)crochements : on descend et remonte)

A : on a croisé les deux ficelles – quand elles sont croisées on recroise par dessus une

p!(fp!(f11,f,f22)) ((chgtchgt éénonciateur)nonciateur) p(fp(f11);); NN11 NN22

ficelle et on tourne la première ficelle et on tire

p(fp(f11)) p(fp(f11,f,f22))

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CONCLUSION

Sémiotique : à la fois référence théorique et méthodologique pourinterpréter cognitivement les opérations énonciatives

On a pu déterminer les étapes de l’interaction sujet-environnement externe à partir de certaines formeslinguistiques interprétées sémiotiquement etcognitivement

Il reste à analyser qualitativement ces étapes sur le plancognitif en termes de processus d’identification decontraintes

D’autres formes de décrochement pourraient être considérées

Il serait intéressant d’analyser la signification des verbes etdes prépositions dans le cadre d’une telle analyse.

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References

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