La budgéti- sation sensible au genre

84
CENTRE HUBERTINE AUCLERT ( 1 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes _ LA BUDGéTI- SATION SENSIBLE AU GENRE GUIDE PRATIQUE

Transcript of La budgéti- sation sensible au genre

Page 1: La budgéti- sation sensible au genre

Centre Hubertine AuClert ( 1 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

_Labudgéti-sationsensibleau genreGuide prAtique

Page 2: La budgéti- sation sensible au genre

—so

mm

air

e

édito 3

INTRODUCTION 5

PARtiE 1

BudgétisAtion sEnsiBlE Au gEnRE :dE quoi PARlE-t-on ? 6

Cadre conceptuel / définitions 7

Du concept de genre à l’approche intégrée de l’égalité

Regarder sous l’angle financier les politiques et leurs impacts en matière d’égalité

Des enjeux d’égalité, de bonne gouvernance et d’évaluation

Pour améliorer et transformer les politiques publiques et leur mise en œuvre

Cadre d’application 14

La budgétisation sensible au genre impulsée dans le cadre des politiques internationales d’aide au développement

Différentes démarches en Europe

En France, un état des lieux des crédits concourant à l’égalité femmes – hommes

Dans les collectivités locales en France, une application de la BSG balbutiante

PARtiE 2

MéthodologiE Et outils PouR MEttRE En œuvRE lA Bsg 24

Les incontournables de la BSG 25

Des statistiques ventilées par sexe

La connaissance des inégalités femmes-hommes

Définition et renseignement d’indicateurs sexués

Formation des personnels sur l’égalité femmes-hommes et l’approche intégrée de l’égalité

Page 3: La budgéti- sation sensible au genre

CONCLUSION 74

ANNEXE 77

Les différentes approches 27

L’approche tri-catégorielle  mise en œuvre notamment en Belgique

L’approche par le cadre du cycle budgétaire

L’approche par la circulaire budgétaire intégrant la perspec-tive de genre mise en œuvre en France

Quels sont les outils adaptés aux collectivités locales françaises ? 34

L’analyse a priori de l’impact du budget sur l’égalité femmes-hommes

Étapes à suivre pour qualifier les effets directs ou indirects

Analyse de la distribution des dépenses publiques

Autres démarches pouvant enrichir l’analyse des budgets

PARtiE 3

AdAPtER Et APPliquER lA BudgétisAtion sEnsiBlE Au gEnRE dAns lEs collEctivités

locAlEs En FRAncE 50—

Quelques éléments sur l’élaboration d’un budget au niveau local 51

Un budget composé de deux sections et voté en équilibre

Un acte juridique dans un calendrier contraint

Intégrer la perspective de genre dans le cycle budgétaire local 56

Vers une organisation du budget plus lisible et transparente

Convaincre et définir sa stratégie pour une application de la BSG 62

Des arguments légalistes et économiques

Expérimenter la BSG puis la généraliser

Page 4: La budgéti- sation sensible au genre

— édit

o

Page 5: La budgéti- sation sensible au genre

La budgétisation sensible au genre est un outil formidable et efficace pour parvenir à l’égalité réelle entre les femmes et les hommes. C’est tout l’objet des guides pratiques qu’édite le Centre Hubertine Auclert que de donner les clés, les arguments et la méthodologie pour atteindre cet objectif.

Si la budgétisation sensible au genre (BSG), ou gender budgeting, est recommandée par des instances internationales telles qu’ONU femmes ou le Conseil de l’Europe, elle est pourtant peu mise en application. Ainsi en France, sur plus de 36  000 communes, EPCI, régions ou départements, les politiques BSG se comptent sur les doigts d’une main !

Le Centre Hubertine Auclert souhaite donc donner à la BSG toute son importance par la publication de ce guide et la promotion de cette politique au travers de ses actions en direction des collectivités locales.

La législation avance aussi en ce sens puisque la loi du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre femmes et hommes prévoit que les collectivités mettent en œuvre une politique intégrée de l’égalité. L’article 61 dispose également que les collectivités de plus de 20 000 habitants devront présenter avant le débat d’orientation budgétaire un rapport relatif à leurs actions en faveur de l’égalité.

En outre, dans une période financière contrainte pour les collectivités, le budget sensible au genre est à la fois un outil de transparence et d’allocation équitable de l’argent public. En effet, les femmes sont trop souvent les victimes indirectes de la réduction de l’offre de services publiques.

Vous trouverez dans ce troisième guide pratique tous les éléments pour mettre en œuvre une politique BSG. Le Centre Hubertine Auclert est à vos côtés pour vous accompagner dans ces démarches.

Alors n’attendez plus, l’égalité femmes-hommes passe aussi et surtout par les territoires !

Djénéba Keita

Présidente du Centre Hubertine Auclert

— édit

o

Page 6: La budgéti- sation sensible au genre
Page 7: La budgéti- sation sensible au genre

intRoduCtionEn 2013, au travers de son étude, Les politiques locales d’égalité en France, analyse des expériences de 30 collectivités engagées pour l’égalité femmes-hommes, le Centre Hubertine Auclert avait recensé de nombreuses actions in-novantes conduites au niveau local.

Le Centre a depuis publié deux guides pratiques à destination des collectivi-tés territoriales : Pour convaincre du bien-fondé des politiques locales d’égalité femmes-hommes et Planifier, conduire et évaluer une politique locale d’égalité femmes-hommes. Ces outils, les événements organisés par le Centre Huber-tine Auclert, ainsi que l’accompagnement sur-mesure proposé à ses membres ont contribué au développement de politiques locales intégrées de l’égalité femmes-hommes.

Cependant, un dernier champ semble encore en retrait de cette dynamique : celui du budget. Trop technique ? Trop stratégique ? Quelle qu’en soit l’explica-tion, rares sont les collectivités territoriales françaises à s’être essayées à la mise en place d’une démarche de budgétisation sensible au genre.

Il est vrai que le vocable lui-même est austère, et peu engageant. Budgétisation sensible au genre, gender budgeting, gender responsive budget : sous tous ces noms se cache un principe unique, intégrer une perspective genre dans l’analyse et la construction des budgets.

Si de nombreuses publications sur le sujet existent, en anglais et en français, elles s’adressent bien souvent à des professionnel-le-s de la coopération inter-nationale, qui tentent de mettre en œuvre le gender budgeting dans les pays en développement, au Sud. Quelques initiatives européennes en la matière ont été menées, mais les ressources documentaires sont éclatées, et le contexte n’est pas totalement comparable à celui de la France.

C’est face à ces constats que le Centre Hubertine Auclert a choisi de consacrer son troisième guide pratique à la budgétisation sensible au genre. Il s’agit de la première publication à destination des collectivités territoriales françaises qui se propose de leur donner les clefs pour mettre en œuvre cette politique inno-vante.

Construit en trois temps, ce guide propose tout d’abord une définition de la BSG et dresse un état des lieux des expériences en la matière. Il fournit ensuite des éléments méthodologiques pour la mettre en œuvre. Enfin, il suggère des pistes pour intégrer une perspective de genre dans le cycle budgétaire local.Nous invitons les collectivités franciliennes à se saisir de ces outils pour devenir pionnières de la budgétisation sensible au genre !

Page 8: La budgéti- sation sensible au genre

—budgétisation sensibLe au genRe : de quoi parle-t-on ?

PARTIE 1

Page 9: La budgéti- sation sensible au genre

Centre Hubertine AuClert ( 7 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

PARTIE 1 / BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE : dE quoI PARlE-T-on ?

_Cadre conceptuel / définitions_La budgétisation sensible au genre (ou gender budgeting, abrégée dans ce guide par BSG) vise à intégrer la perspective de genre dans tout le cycle budgétaire pour analyser l’impact différencié des dépenses et des recettes des budgets publics sur les femmes et les hommes.

Le Conseil de l’Europe propose la définition suivante, également re-tenue par l’Union européenne :

«  L’intégration d’une perspective de genre dans le processus budgétaire est une application de l’approche intégrée de l’égalité entre les femmes et les hommes dans le processus budgétaire. Cela implique une évaluation des budgets existants avec une perspec-tive de genre à tous les niveaux du processus budgétaire ainsi qu’une restructuration des revenus et dépenses dans le but de promouvoir l’égalité entre les femmes et les hommes.1»

du concEPt dE gEnRE à l’APPRochE intégRéE dE l’égAlité

On ne peut expliquer ce qu’est la budgétisation sensible au genre sans clari-fier la notion de genre et celle d’approche intégrée de l’égalité femmes-hommes.

1 Conseil de l’Eu-rope, L’égalité dans les budgets : pour une mise en œuvre pratique, 2009.

Page 10: La budgéti- sation sensible au genre

( 8 ) Centre Hubertine AuClertCentre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

Le genre est un « outil critique qui permet d’analyser et de comprendre comment la société attribue aux individus masculins et féminins des rôles déterminés. Le concept de genre suppose donc que l’identité sexuée, c’est-à-dire le fait d’être reconnu comme femme ou homme dans la société, n’est pas qu’une affaire de sexe biologique mais découle d’une construction so-ciale. »2

Cette construction sociale de la différence des sexes s’appuie sur deux pro-cessus  : la division et la hiérarchisation sexuelles des tâches. Ainsi les femmes et les hommes n’ont pas les mêmes rôles dans la famille, ils n’exercent pas les mêmes métiers, et ceux qu’exercent les hommes sont sou-vent jugés comme ayant plus de valeur que ceux qu’exercent les femmes. Les études sur le genre démontrent que malgré des progrès significatifs en matière d’égalité femmes-hommes, des inégalités persistent du fait de ces processus de division et de hiérarchisation qui perdurent via une socialisa-tion différenciée dès le plus jeune âge et les stéréotypes de sexe qui fonctionnent comme des croyances.

L’approche intégrée du genre ou le gender mainstreaming est un autre concept qu’il est important de maîtriser quand on souhaite travailler sur la budgétisation sensible au genre. Cette approche vise, tout au long du pro-cessus d’élaboration d’une politique publique ou d’une action, à s’in-terroger sur la situation respective des femmes et des hommes de manière préventive et transversale et sur les effets différenciés que les mesures pourraient avoir sur l’un ou l’autre sexe. Ainsi il sera possible de déterminer si la politique ou l’action est susceptible de réduire ou au contraire de renforcer les inégalités existantes.

2 Centre Hubertine Auclert, Pour

convaincre du bien-fondé des

politiques locales d’égalité femmes-

hommes, juin 2014 (mise à jour en

novembre 2014), p. 28.

PARTIE 1 / BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE : dE quoI PARlE-T-on ?

Le guide Pour convaincre du bien-fondé des politiques locales d’égalité femmes-hommes du Centre Hubertine Auclert explique ces différents processus. Vous trouverez en outre dans ce guide les chiffres à connaître pour s’attaquer aux idées reçues ; les concepts-clés utiles à maîtriser ; les cadres juridiques et politiques sur lesquels vous appuyer ainsi qu’un argumentaire dont vous pourrez vous inspirer pour convaincre vos pairs de s’engager sur le chemin de l’égalité.

Page 11: La budgéti- sation sensible au genre

Centre Hubertine AuClert ( 9 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

Le premier enjeu de l’approche intégrée est de rendre visible les femmes et les inégalités par une lecture sexuée du contexte et des effets attendus de telle ou telle politique. Cette démarche implique la formation des acteurs qui au départ ne sont pas des spécialistes des questions d’égalité (contrairement à ceux qui conduisent des programmes sur l’égalité femmes-hommes) ainsi que la modification des procédures et la création de techniques et d’outils. Le second enjeu consiste à impliquer tous les acteurs qui ont un rôle décisionnel et de mise en pratique : les élu-e-s, les services, les associations locales, les organisations professionnelles, etc.

PARTIE 1 / BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE : dE quoI PARlE-T-on ?

L’approche intégrée et ses outils (diagnostic, plan d’action, indicateurs, approche participative etc.) sont notamment présentés dans le guide Planifier, conduire et évaluer une politique locale d’égalité femmes-hommes du Centre Hubertine Auclert3.

Ce guide s’adresse aux collectivités qui souhaitent mettre en œuvre une politique locale d’égalité femmes-hommes, il propose de :

/ découvrir les méthodes pour élaborer de manière participative un diagnostic territorial des inégalités femmes-hommes,

/ connaitre la méthodologie pour construire un plan d’action de manière participative avec les services de la collectivité et les habitant-e-s,

/ élaborer des outils de pilotage, de suivi et d’évaluation,

/ identifier les freins et les leviers pour réaliser le diagnostic et le plan d’action,

/ connaitre des exemples concrets d’actions à mener pour l’égalité femmes-hommes dans les différents champs d’intervention de la collectivité.

3 Centre Hubertine Auclert, Planifier, conduire et évaluer une politique locale d’égalité femmes-hommes, décembre 2014.

Page 12: La budgéti- sation sensible au genre

( 10 ) Centre Hubertine AuClertCentre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

PARTIE 1 / BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE : dE quoI PARlE-T-on ?

AnAlYsER sous l’AnglE FinAnciER lEs PolitiquEs Et lEuRs iMPActs En MAtièRE d’égAlité

La budgétisation sensible au genre consiste à appliquer l’approche intégrée de l’égalité entre les femmes et les hommes au volet financier des politiques publiques. Ainsi, intégrer une démarche de BSG conduit à se demander si la collecte (impôts, taxes, paiement du service etc.) et la distribution des ressources financières (subventions aux associations, investissements dans des équipements, fonctionnement des services etc.) renforcent ou diminuent les inégalités entre les sexes. Au regard des résultats, il s’agit alors de pro-poser des ajustements et des modifications budgétaires pour mieux garantir l’égalité.

Un budget public et notamment un budget local est un acte poli-tique. Un budget illustre des priorités sociales, économiques, sportives, culturelles, et des projets à court, moyen et long terme dans ces domaines. Il est rare pour une collectivité qui doit présenter un budget équilibré, de pouvoir investir ou proposer des services dans tous les domaines et cette capacité tend à se réduire aujourd’hui. Ainsi en termes d’investissement, la construction d’une nouvelle tribune au terrain de sport ou d’un bâtiment pour héberger le pôle petite enfance n’aura pas le même impact sur les femmes et sur les hommes du fait des rôles sociaux au sein de la famille et de la pratique différenciée de certains sports.

De même, l’accès à certains services comme la cantine, les transports en commun, ou à certains loisirs comme la piscine, la bibliothèque peut être plus ou moins onéreux selon la prise en compte dans la tarification de la si-tuation personnelle, professionnelle et financière des familles. Une politique se traduit donc bien par des choix financiers qu’il est pertinent d’analyser sous l’angle de l’égalité femmes-hommes.

La budgétisation sensible au genre c’est :/ analyser la distribution des dépenses en termes de genre,/ s’assurer du fait que la commande publique promeuve l’égalité entre femmes et hommes,/ être attentif à ce que les cotisations et redevances soient également partagées entre femmes et hommes.

La budgétisation sensible au genre, ce n’est pas :/ un budget séparé pour les femmes,/ comptabiliser uniquement les crédits dédiés à l’égalité femmes-hommes (même si cela peut y contribuer),/ des arbitrages opposant les femmes et les hommes,/ des dépenses supplémentaires. 

Page 13: La budgéti- sation sensible au genre

Centre Hubertine AuClert ( 11 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

PARTIE 1 / BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE : dE quoI PARlE-T-on ?

dEs EnjEux d’égAlité, dE BonnE gouvERnAncE Et d’évAluAtion

Le premier des enjeux est de favoriser l’égalité d’accès aux ressources et aux services et l’égalité dans les prélèvements. Cette égalité est souvent acquise aux yeux des élu-e-s ou des agent-e-s qui vont assurer que les équi-pements ou les services à la population sont à destination de toutes et tous. En effet, il est rare que des publics (notamment au regard de leur sexe) soient directement exclus ; mais dans la pratique, l’usage d’un équipement ou d’un service peut être davantage le fait des femmes ou des hommes.

Par exemple, généralement, un terrain de foot est plus fréquenté par les garçons et les hommes et une bibliothèque, plus fréquentée par les filles et les femmes. En lisant un budget au regard du genre (en considérant les rôles sociaux genrés), on peut mieux identifier les ressources qui vont aux hommes et celles qui vont aux femmes et vérifier que la distribution est équilibrée.

Il est important, dans une période de restriction budgétaire, de s’interroger sur l’impact différencié que peut avoir la réduction de certains crédits sur les femmes et les hommes. Par exemple, la modification d’horaires de garderie périscolaire visant à réduire le coût du personnel peut impacter fortement les familles monoparentales qui ont à leur tête dans 83% des cas une femme4. Dans ce cas, la réduction de la dépense publique peut en effet augmenter très fortement la charge de travail domestique (garde d’enfant directement par le/la chef-fe de famille) ou les coûts supportés par le ménage (recours à un mode de garde privée).

Intégrer l’égalité femmes-hommes dans le processus budgétaire permet aus-si de répondre à l’enjeu de bonne gouvernance. La présentation d’un bud-get peut être plus ou moins explicite et transparente. Certaines collectivités présentent leur budget de façon très formelle par section (section d’inves-tissement, section fonctionnement) et par grands chapitres. Leur lecture est difficile pour une personne non initiée. D’autres collectivités présentent aussi leur budget par domaine au moins pour les charges (sports, culture, enfance etc.), ce qui permet d’avoir une évaluation de la répartition des dépenses par champ. Intégrer l’égalité femmes-hommes, c’est compléter cette approche thématique par une approche par sexe et donc avoir une lecture plus fine encore. Cette lecture facilitée participe ainsi à plus de transparence.

La bonne gouvernance passe aussi par la consultation et la participation des habitant-e-s dans le cadre de l’élaboration des budgets. Pour l’égalité femmes-hommes, des associations locales peuvent accompagner les élu-e-s et les services dans la définition de moyens efficients. Il est aussi pos-

4 Source : Insee, recensement de la population 2011 ; des données par commune sont disponibles sur le site de l’Insee.

Page 14: La budgéti- sation sensible au genre

( 12 ) Centre Hubertine AuClertCentre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

PARTIE 1 / BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE : dE quoI PARlE-T-on ?

sible, dans le cadre d’une consultation générale de la population ou d’une consultation spécifique sur le sujet de l’égalité, d’interroger les femmes et les hommes sur leurs besoins, sur la satisfaction de ceux-ci, sur leur perception de la répartition des moyens, etc.

La budgétisation sensible au genre répond aussi à l’enjeu d’évaluation des politiques publiques. En s’interrogeant sur les caractéristiques (dont le sexe) des bénéficiaires de telle ou telle politique, on peut vérifier que la politique est efficace, c’est-à-dire qu’elle touche toutes les personnes et/ou le public ciblé par l’action et répond bien à leurs attentes ou problématiques. On peut aussi analyser l’efficience des politiques : est ce que les moyens mis en œuvre sont appropriés et les ressources bien utilisées et réparties ?

En essayant d’estimer la part des filles et des femmes et la part des garçons et des hommes qui pourraient bénéficier et qui bénéficient au final de tel ou tel service, on vérifie que l’action publique s’adresse bien au plus grand nombre ou à celles et ceux qui en ont le plus besoin, et non à une part réduite de la population.

PouR AMélioRER Et tRAnsFoRMER lEs PolitiquEs PuBliquEs Et lEuR MisE En œuvRE

En appliquant une démarche de budgétisation sensible au genre, l’objectif est de transformer et d’adapter le budget, et donc les poli-tiques, pour que les besoins spécifiques et intérêts stratégiques des femmes et des hommes soient mieux pris en compte. Par exemple, une collectivité va revoir les critères d’octroi d’une aide à la création d’entreprise pour en faciliter l’accès aux femmes.

L’étude du budget sous l’angle de l’égalité peut aussi permettre l’émergence de nouvelles politiques en matière d’égalité femmes-hommes. Par exemple, après avoir analysé sous l’angle de l’égalité les sub-ventions et les actions mises en œuvre par les associations sportives locales, un objectif d’égalité femmes-hommes peut être intégré dans les conventions financières triennales avec ces associations. Celles qui proposent des actions concrètes pour l’égalité femmes-hommes pourraient avoir une subvention bonifiée de 5 % pendant 3 ans.

Cette approche permet aussi de se doter de moyens de suivi et d’évalua-tion supplémentaires par la définition d’indicateurs sexués sur la redistri-bution des ressources, mais aussi relatifs à l’efficience des moyens.

Page 15: La budgéti- sation sensible au genre

Centre Hubertine AuClert ( 13 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

PARTIE 1 / BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE : dE quoI PARlE-T-on ?

Les enjeux d’une action en matière d’égalité femmes-hommes peuvent en effet avoir été identifiés lors de la phase de diagnostic, sans que les moyens alloués au projet s’avèrent être suffisants. Par exemple, on peut avoir pour objectif d’accueillir autant de garçons que de filles mais proposer des acti-vités qui ne permettent pas cette mixité ou avoir une équipe d’animateurs non-mixte. Certaines actions en faveur de l’égalité demandent aussi du temps pour une mise en œuvre effective car il faut informer, convaincre, mobiliser certaines associations et partenaires. Les indicateurs de résultat doivent donc prendre en compte cet aspect.

Phase 2 : reformuler les politiques budgétaires et

répartir les ressources de

manière à atteindre les objectifs

d’égalité femmes-hommes.

Phase 3 : œuvrer systématiquement

à l’intégration d’une perspective

de genre dans tous les processus

budgétaires

Phase 1 : analyser le budget selon une perspective de genre pour déterminer la différence d’impact

du budget sur les femmes et les

hommes.

lA déMARchE dE BudgétisAtion sEnsiBlE Au gEnRE

Page 16: La budgéti- sation sensible au genre

( 14 ) Centre Hubertine AuClertCentre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

PARTIE 1 / BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE : dE quoI PARlE-T-on ?

_Cadre d’application _La budgétisation sensible au genre peut être mise en œuvre au niveau d’un État, d’une collectivité territoriale, mais aussi par des organisations mettant en œuvre des programmes et des projets comme les organisations non-gou-vernementales dans le cadre de la coopération avec les pays en développe-ment ou des associations de développement local en France, ou à l’étranger.

lA BudgétisAtion sEnsiBlE Au gEnRE iMPulséE dAns lE cAdRE dEs PolitiquEs intERnAtionAlEs d’AidE Au dévEloPPEMEnt

Comme l’approche intégrée du genre, la budgétisation sensible au genre est explicitement mentionnée (art. 345, 346 et 358) dans le programme d’action de Beijing / Pékin5. Plusieurs textes ou stratégies d’aide au développement des Nations Unies, de l’OCDE ou de l’Organisation internationale de la Fran-cophonie s’engagent aussi sur des objectifs d’égalité femmes-hommes et impulsent des démarches intégrées de l’égalité et de budgétisation sensible au genre.

Les Nations Unies, via ONU Femmes, mettent en place depuis 1997 des programmes d’appui à la budgétisation sensible au genre, en partenariat notamment avec la commission européenne. Ces programmes d’appui concernent les pays bénéficiaires de l’aide au développement ou en restruc-turation comme les pays de l’Est. Comme le précise le site d’Adéquations6, «  de nombreux pays du Sud sont engagés d’une part dans des plans de développement au niveau national qui s’articulent aux DSRP (Documents stratégiques de réduction de la pauvreté), DSCRP (Document stratégiques de croissance et de réduction de la pauvreté), et d’autre part dans des réformes du secteur public et des procédures budgétaires (gestion par les résultats, indicateurs de performance etc.) ». Un site web lancé par ONU Femmes pro-pose un état des lieux des initiatives, démarches et outils mis en œuvre dans soixante-cinq pays7.

5 Organisation des nations unies,

Déclaration et pro-gramme d’action de

Beijing, 1995.

6 www.adequa-tions.org

voir page « Budgéti-sation sensible au genre & coopéra-

tion au développe-ment ».

7 www.gen-der-budgets.org

Page 17: La budgéti- sation sensible au genre

Centre Hubertine AuClert ( 15 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

PARTIE 1 / BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE : dE quoI PARlE-T-on ?

diFFéREntEs déMARchEs En EuRoPE

Au niveau des pays européens, des travaux ont été lancés durant les années 2000. Le conseil de l’Europe a publié un manuel sur l’égalité dans les bud-gets en 20098. Un réseau européen sur la budgétisation sensible au genre réunissait des institutions, des collectivités locales, des chercheur-e-s et des associations. Un manifeste a été adopté en juin 2007, demandant la mise en œuvre d’une BSG dans l’Union européenne. Un site web est toujours ouvert bien que le réseau ne semble plus se réunir9.

Certains pays européens ont opté pour une inscription dans la loi de l’obligation de prendre en compte le genre dans le processus budgé-taire. C’est le cas notamment de l’Autriche, de la Belgique et de l’Espagne.

En Autriche, un amendement de la constitution fédérale de janvier 2008 oblige les entités à tous les niveaux (fédéral, Länder et municipalités) à viser l’égalité femmes-hommes dans leur gestion budgétaire. Cet objectif d’égali-té entre les femmes et les hommes a été inscrit dans le cadre d’une réforme du droit budgétaire visant à une budgétisation axée sur les performances et la transparence en 2013.

En Belgique, la loi du 12 janvier 2007 « visant au contrôle de l’application des résolutions de la Conférence mondiale sur les femmes réunie à Pékin en septembre 1995 et intégrant la dimension du genre dans l’ensemble des politiques fédérales » a pour ambition de concrétiser le principe d’égalité des femmes et des hommes au niveau fédéral, notamment par la mise en place de budgets genrés. Cette loi impose d’établir une « note de genre » pour chaque projet de budget général des dépenses. Cette note présente, par département, les crédits relatifs aux actions spécifiques visant à réaliser l’égalité entre les hommes et les femmes.

En Espagne, l’article 15 de la loi constitutionnelle de 2007 précise que les gouvernements s’emploieront à intégrer le principe de l’égalité femmes-hommes dans l’adoption et la mise en œuvre de leur législation, dans la dé-finition et la budgétisation des politiques publiques dans tous les domaines.

Des expériences ont aussi été conduites en Europe au niveau local. Une méthode a notamment été testée en Suède par plusieurs administrations locales. Il s’agit de la méthode des 3R/4R, qui laisse une place à l’analyse genrée des politiques publiques d’un point de vue budgétaire.

Le gender budgeting a aussi été mis en œuvre dans plusieurs collectivités locales en Autriche (voir l’exemple de Vienne) et en Italie.

8 Conseil de l’Eu-rope, L’égalité dans les budgets : pour une mise en œuvre pratique, 2009.

9 Le site du réseau européen sur la budgétisa-tion sensible au genre : http://www.infopolis.es/web/GenderBudgets/egbn.html

Page 18: La budgéti- sation sensible au genre

( 16 ) Centre Hubertine AuClertCentre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

La méthode des 3R/4R

La méthode des 3R a été mise en œuvre en Suède dans le cadre du projet JämKom (l’égalité femmes-hommes à l’échelon municipal), portée par l’Association suédoise des pouvoirs locaux en 1996 et 1997 10. En octobre 2014, elle avait été utilisée par 44 municipalités suédoises11.

Le JämStöd (le comité suédois d’appui à la mise en œuvre d’une politique intégrée d’égalité femmes-hommes) a proposé en 2007 une réactualisation de cet outil, qui devient la méthode des 4R, que nous présentons ici.

La méthode des 4R vise à analyser une action mise en place par une collectivité territoriale au prisme du genre, selon quatre étapes successives :

Représentation : cette première étape consiste à déterminer la part de femmes et d’hommes parmi toutes les parties-prenantes impliquées dans l’action. Il s’agit à la fois d’identifier qui sont les décisionnaires, qui sont ceux qui mettent en œuvre les activités (administrations, associations, entreprises etc.) et le groupe-cible bénéficiaire, dans une perspective de genre.

Ressources : la seconde étape de l’analyse vise à répondre à la question de la distribution des ressources en termes de genre. Celles-ci peuvent-être à la fois :

/ financières : c’est la budgétisation sensible au genre, stricto sensu !

/ spatiales : accès aux équipements sportifs, salles municipales, ou distribution dans un espace donné des individus par exemple ;

/ temporelles : durée des prises de parole publiques ou arbitrages relatifs aux horaires de réunion par exemple ;

/ informationnelles : accès aux informations relatives à l’action ;

10 Pour plus d’informations

sur la mise en oeuvre du projet JämKom

voir Birgitta Åseskog, « National

machinery for gender equality in

Sweden and other Nordic

Countries » in Shirin M.

Rai (dir.), Mainstreaming

gender, democratizing

the state ? Institutional

mechanisms for the

advancement of women,

2003.

11 Haut Conseil à l’Egalité femmes-hommes,

Rapport relatif à la lutte contre les stéréotypes,

pour l’égalité femmes-

hommes et contre les

stéréotypes de sexe,

conditionner les

financements publics, 2014,

p.59.

12 JämStod, Gender Mainstreaming Manual, 2007.

PARTIE 1 / BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE : dE quoI PARlE-T-on ?

Page 19: La budgéti- sation sensible au genre

Centre Hubertine AuClert ( 17 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

/ en ressources humaines : par exemple combien d’équivalents temps plein ont été affectés à la conduite du projet, quelles formations ont été proposées à ceux ou celles qui sont chargé-e-s de mettre en œuvre l’action.

Realia  13: après les deux étapes précédentes qui consistent en un travail de documentation quantitative de l’action étudiée, ce troisième temps d’analyse est quant à lui qualitatif. On connaît la représentation des femmes et des hommes dans l’action ainsi que la distribution des différentes ressources, il s’agit à présent de déterminer pourquoi les choses sont ainsi.

Réalisation : cette quatrième et dernière phase permet de définir de nouveaux objectifs et/ou d’adapter l’action considérée, ou une politique à venir, en fonction des résultats des trois étapes précédentes.

13 Le rapport du HCEfh relatif à la lutte contre les stéréotypes traduit realia par « finalité qualitative » et indique que le terme dérive « du latin realia qui signifie les “vraies choses” ou encore les “choses matérielles”, le concept de réalia en politiques publiques se réfère au contenu qualitatif, c’est-à-dire aux valeurs, normes et mesures qualitatives qui gouvernent une opération et qui constituent ainsi la norme de référence dans l’opération », HCEfh, op.cit. , 2014, p.58.

PARTIE 1 / BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE : dE quoI PARlE-T-on ?

Page 20: La budgéti- sation sensible au genre

( 18 ) Centre Hubertine AuClertCentre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

L intégRation de La dimension de genRe dans Les PRoCessus budgétaiRes (gendeR budgeting) dans Le

12ème aRRondissement de Vienne

La ville de Vienne a également intégré, depuis 2006, la budgétisation sensible au genre dans ses projets de budget.

Les dépenses sur lesquelles l arrondissement a un pouvoir de décision ont toutes été analysées. Cette analyse a été axée sur les questions suivantes :

/ Qui sont les bénéficiaires des prestations de service/produits ? Présentation de faits et chiffres sexués complétés si possible des données sur l’âge, la nationalité, les revenus etc.

/ À qui bénéficient actuellement les différentes dépenses et prestations de service/différents produits, et qui peut y recourir et les utiliser en premier lieu ?

/ Comment pourra-t-on adapter les produits/prestations de service afin qu´ils correspondent mieux aux objectifs de la politique de l arrondissement, et afin de permettre aux groupes cibles définis à l´origine de mieux en profiter et de mieux les utiliser ?

a) Analyse sur l entretien des cimetières :

L analyse des utilisateur-trice-s a montré que parmi les personnes qui fréquentent les cimetières, il y a 71 % de femmes et 60 % de personnes âgées14. L objectif a donc consisté à en tenir compte lors de futurs investissements.

Ainsi, il a été décidé :

/ de concevoir les points d eau de manière à ce qu´ils puissent être utilisés facilement par les femmes âgées,

/ de mettre à disposition des chariots pour que les arrosoirs puissent être transportés jusqu aux tombes sans grand effort,

14 Ville de Vienne, Gender

budgeting, 2007 (en

allemand).

PARTIE 1 / BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE : dE quoI PARlE-T-on ?

Page 21: La budgéti- sation sensible au genre

Centre Hubertine AuClert ( 19 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

/ d’implanter plus de bancs pour offrir davantage de possibilités de s arrêter en chemin et de se reposer,

/ de renforcer l’offre de bus pour accéder au cimetière.

b) Les académies de musique

Celles-ci sont fréquentées par 59 % de filles et 41 % de garçons. Lors de la répartition des fonds, par contre, les proportions sont inversées, car un grand pourcentage de filles apprend à jouer des instruments moins coûteux, comme la guitare ou la flûte à bec, tandis que les garçons préfèrent les instruments chers comme la batterie. À l académie de musique de Meidling, lorsqu´il s agit d acquérir de nouveaux instruments, il est prévu désormais de tenir compte tenu de ce rapport : au lieu d´une nouvelle batterie, on va par exemple acheter une nouvelle harpe – un instrument (cher) qui constitue surtout le premier choix des filles.

PARTIE 1 / BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE : dE quoI PARlE-T-on ?

Page 22: La budgéti- sation sensible au genre

( 20 ) Centre Hubertine AuClertCentre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

PARTIE 1 / BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE : dE quoI PARlE-T-on ?

En FRAncE, un étAt dEs liEux dEs cRédits concouRAnt à l’égAlité FEMMEs – hoMMEs

En France, l’approche intégrée est dorénavant inscrite dans la loi puisque l’article 1er de la loi du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes précise que «l’État et les collectivités territoriales ainsi que leurs établissements publics mettent en œuvre une politique pour l’égalité entre les femmes et les hommes selon une approche intégrée ». Toutefois, il n’est pas fait référence à la budgétisation sensible au genre.

Dans ce domaine, la France mesure depuis le début des années 2000 le ni-veau des crédits engagés par l’ensemble des ministères sur l’égalité femmes-hommes. En effet, l’élaboration des documents de politique transversale (DPT), qui se sont substitués aux « jaunes budgétaires » en 2009, permet, lors de la préparation des lois de finances, de faire état des crédits des différents ministères qui concourent aux actions en faveur des droits des femmes et de l’égalité entre les sexes.

La circulaire du 23 août 2012 relative à la mise en œuvre de la politique interministérielle en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes instaure une étude d’impact des textes législatifs et réglementaires sur l’égalité femmes-hommes (voir pages 30-31).

dAns lEs collEctivités locAlEs En FRAncE, unE APPlicAtion dE lA Bsg BAlButiAntE

Plusieurs collectivités territoriales françaises signataires de la charte euro-péenne pour l’égalité des femmes et des hommes dans la vie locale15 envi-sagent de construire des budgets genrés.

Ainsi, des collectivités ont conduit des analyses ponctuelles sur la répar-tition de subventions montrant que cette répartition peut être inégale et renforcer les inégalités entre les femmes et les hommes.

Le Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes fait état, dans son rapport sur la lutte contre les stéréotypes et le conditionnement des finan-cements publics16, des données d’une ville de Haute Garonne (voir l’encart). Dans le guide « Planifier, conduire et évaluer une politique locale d’égalité

15 L’Association française du conseil des communes et régions d’Europe

(AFCCRE) promeut

cette charte en France,

et anime des groupes

de travail sur cette

thématique, à destination

des collectivités territoriales.

Pour plus d’informations

www.afccre.org 

16 Haut conseil à l’égalité femmes-

hommes, op. cit. , 2014.

Page 23: La budgéti- sation sensible au genre

Centre Hubertine AuClert ( 21 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

PARTIE 1 / BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE : dE quoI PARlE-T-on ?

femmes-hommes » du Centre Hubertine Auclert17, deux études de cas de dispositifs portés par des collectivités locales sont aussi proposées. L’une porte sur des aides à la création d’entreprise, l’autre sur les aides directes et indirectes d’une commune aux clubs sportifs18.

Dans UnE viLLE DE HaUTE GaronnE

/ Les hommes représentent 60% des licencié-e-s de clubs sportifs,

/ Ils bénéficient de 73% des subventions,

/ La municipalité accorde 22,7 euros par homme inscrit dans une associa-tion sportive contre 12,9 euros par femme.

Ces analyses de dispositifs sont une première étape. Pour généraliser la dé-marche et l’intégrer au processus d’élaboration budgétaire, il faut que cette démarche soit co-construite avec les responsables (élu-e-s et services) en charge de l’élaboration des budgets et ceux en charge de la mise en œuvre de la politique en faveur de l’égalité femmes-hommes. Or ces deux mondes se côtoient peu. Par ailleurs, il faut adapter les outils de la BSG, testés en Eu-rope ou dans les pays en développement à la réalité de l’élaboration et de la mise en œuvre des budgets des collectivités locales. C’est ce qui est proposé dans les prochaines parties du présent guide.

17 Centre Hubertine Auclert, Pour convaincre du bien-fondé des politiques locales d’égalité femmes-hommes, juin 2014 (mise à jour en novembre 2014), pp. 38 à 40.

18 La même iniquité de répartition des ressources publiques dans le domaine des équipements sportifs a été mise en évidence en 2004 à Berlin : sur les 4,1 millions d’euros affectés à la maintenance, au fonctionnement et à l’investissement dans les infrastructures sportives, 38 % seulement bénéficiaient aux femmes, contre 62 % aux hommes ; voir Ministère fédéral pour les femmes et la fonction publique, Guidance Gender Budgeting in Public Administration, 2012 (en anglais).

Page 24: La budgéti- sation sensible au genre

( 22 ) Centre Hubertine AuClertCentre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

PARTIE 1 / BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE : dE quoI PARlE-T-on ?

Page 25: La budgéti- sation sensible au genre

Centre Hubertine AuClert ( 23 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

budgétisation sensibLe au genRe :de quoi PaRLe-t-on ?

/ La budgétisation sensible au genre consiste à anticiper les inégalités femmes-hommes qu’un budget pourrait engendrer, et les corriger.

/ La budgétisation sensible au genre (ou gender budgeting) s’intègre dans le cadre des politiques intégrées de l’égalité femmes-hommes, qu’encouragent l’Europe et l’État (loi du 4 août 2014) ;

/ Un budget est un acte politique ; la budgétisation sensible au genre répond à des enjeux de transparence, de bonne gouvernance et d’évaluation des politiques publiques ;

/ Dans un contexte de raréfaction des ressources, les femmes sont souvent les premières impactées par la réduction de la dépense publique ;

/ Le gender budgeting est mis en œuvre depuis plus de 20 ans à l’international et promu par les institutions européennes ;

/ Dans plusieurs pays européens (Belgique, Autriche, Suède, etc.) des collectivités locales ont mis en œuvre des budgets sensibles au genre, mais les expériences en France demeurent balbutiantes.

PARTIE 1 / BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE : dE quoI PARlE-T-on ?

en

b

re

F

Page 26: La budgéti- sation sensible au genre

PARTIE 2

—méthodoLogie et outils pour mettre en œuvre la bsg

Page 27: La budgéti- sation sensible au genre

Centre Hubertine AuClert ( 25 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

PARTIE 2 / MéThodologIE ET ouTIls PouR METTRE En œuvRE lA Bsg

Comme nous l’avons vu en première partie, la budgétisation sensible au genre étant une application de l’approche intégrée de l’égalité femmes-hommes au processus budgétaire, sa mise en place suppose les mêmes in-contournables.

stAtistiquEs vEntiléEs PAR sExE RElAtivEs Aux hABitAnt-E-s

Il faut pouvoir s’appuyer sur des statistiques ventilées par sexe relatives aux habitant-e-s. Ces données sexuées sont disponibles auprès de l’Insee, sur in-ternet19. Des données par quartier politique de la ville sont dorénavant dispo-nibles sur le site du Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET)20.

Par ailleurs la collectivité est ou peut être, elle aussi, productrice de données sexuées. Les inscriptions à la cantine, à la médiathèque, au centre de loisirs, à la garderie périscolaire, au service de repas à domicile peuvent donner lieu notamment à la production et à l’analyse de données sexuées. La collectivité peut également intégrer des dispositifs de collecte de données à travers les documents qu’elle produit. Par exemple, à travers les dossiers de demande de subvention, les associations peuvent renseigner la répartition sexuée (et par âge) de leurs adhérent-e-s.

19 http://www.insee.fr/fr/bases-de-donnees/default.asp? page =statistiques-locales.htm

20 http://www.ville.gouv.fr/?donnees-statistiques-pour-l,3529

_les incontournables de la bsg_

Centre Hubertine AuClert ( 25 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

Page 28: La budgéti- sation sensible au genre

( 26 ) Centre Hubertine AuClertCentre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

lA connAissAncE dEs inégAlités FEMMEs-hoMMEs

L’analyse des budgets au regard de leur impact sur l’égalité femmes-hommes doit s’appuyer sur les études existantes, se nourrir des travaux universitaires, qui analysent les champs d’action des collectivités locales dans une perspec-tive de genre.

Cette connaissance sur les inégalités femmes-hommes est en constante progression du fait du développement des études sur le genre dans diffé-rentes disciplines des sciences humaines. Par ailleurs, depuis 2012, la mise en place de feuilles de route ministérielles sur l’intégration de l’égalité femmes-hommes en France facilite la production et l’analyse de données et de pro-blématiques dans tous les champs de l’action publique. Il en est de même des études d’impacts des projets de lois en termes d’égalité entre les femmes et les hommes.

déFinition Et REnsEignEMEnt d’indicAtEuRs sExués

Intégrer l’égalité femmes-hommes que ce soit dans une politique, une action ou un budget suppose que l’on détermine le résultat que l’on souhaite at-teindre et donc que l’on définisse des indicateurs.

Définir des indicateurs et les renseigner, cela permet de se fixer un objectif, de suivre sa mise en œuvre et éventuellement d’apporter des éléments cor-rectifs si les objectifs ne sont pas ceux que l’on attend.

Par exemple, dans le cadre de la politique jeunesse, une collectivité attribue une subvention de 500 € aux jeunes porteurs d’initiatives. Le budget est de 5 000 €, soit la possibilité de soutenir dix projets dans l’année. La population des jeunes de 15 à 25 ans de la commune est composée de 50 % de filles et de 50 % de garçons. La collectivité se fixe donc comme objectif d’atteindre une répartition par sexe à parité mais se donne, au regard du nombre de projet, une marge de 10 points soit une représentation 40 % / 60 %.

FoRMAtion dEs PERsonnEls suR l’égAlité FEMMEs-hoMMEs Et l’APPRochE intégRéE dE l’égAlité

Cette démarche demande que les personnes soient bien sensibilisées et for-mées à l’égalité femmes-hommes.

Si les personnes (élu-e-s et chargé-e-s de mission) qui sont chargées de défi-nir et mettre en œuvre les politiques d’égalité femmes-hommes sont souvent formées, au moins partiellement, sur la question, ce n’est pas le cas des

PARTIE 2 / MéThodologIE ET ouTIls PouR METTRE En œuvRE lA Bsg

Page 29: La budgéti- sation sensible au genre

Centre Hubertine AuClert ( 27 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

agent-e-s et élu-e-s en charge des finances et de l’élaboration des budgets. C’est un des freins à la mise en œuvre de la BSG dans la collectivité. Il est donc nécessaire avant la mise en place de toute démarche de budgétisa-tion sensible au genre que les personnes concernées puissent suivre une formation. Ainsi elles seront en mesure de comprendre pourquoi l’égalité femmes-hommes est un enjeu dans l’élaboration des budgets et comment cette dimension peut y être mieux prise en compte.

_les différentes approches _Nous présenterons ici trois approches pour mettre en œuvre la BSG :

1 - l’APPRochE tRi-cAtégoRiEllE2 - l’APPRochE PAR lE cAdRE du cYclE BudgétAiRE3 - l’APPRochE PAR lA ciRculAiRE BudgétAiRE

1 - l’APPRochE tRi-cAtégoRiEllE

Cette approche consiste à classer et à analyser les programmes selon leur impact supposé sur l’égalité femmes-hommes. Il existe trois caté-gories possibles :

1/ des programmes neutres qui ne sont pas susceptibles d’avoir un im-pact selon le genre,

2/ des programmes spécifiques au genre qui consistent en des actions favorisant volontairement l’égalité entre les femmes et les hommes,

3/ des programmes susceptibles d’avoir un éventuel impact selon le genre.

Cette approche est adoptée en Belgique. La mise en œuvre du gender budgeting au niveau fédéral belge dans le cadre de la loi gender mainstrea-ming du 12 janvier 2007 se concentre sur l’analyse des dépenses publiques ex-ante. Les administrations doivent mener une réflexion qui leur permette de classer tous les crédits et les dossiers qui y sont associés dans une catégorie.

PARTIE 2 / MéThodologIE ET ouTIls PouR METTRE En œuvRE lA Bsg

Page 30: La budgéti- sation sensible au genre

( 28 ) Centre Hubertine AuClertCentre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

En catégorie 1 sont classés les crédits relatifs à des dossiers qui concernent le fonctionnement interne ou qui ne présentent pas de dimension de genre.

En catégorie 2 sont classés les crédits relatifs aux actions visant à réaliser l’égalité entre les les femmes et les hommes. Tous ces crédits sont intégrés dans la note de genre. Dans le cadre de la loi gender mainstreaming du 12 janvier 2007, chaque projet de budget général des dépenses comporte une « note genre » identifiant par département les crédits qui visent à réaliser l’égalité des femmes et des hommes et tenant compte de la dimension de genre dans les lignes budgétaires.

En catégorie 3 sont classés les crédits relatifs à des dossiers qui concernent une politique publique et qui présentent une dimension de genre. L’impact en terme de genre est notamment détecté au regard du groupe-cible du dossier et de sa composition sexuée. Si les crédits demandés appartiennent à la catégorie 3, les gestionnaires de dossiers doivent approfondir leur ré-flexion et expliquer brièvement dans un « commentaire genre » la manière dont la dimension de genre est ou sera prise en compte dans le cadre du dossier.

Exemple :

cAtégoRiE ExEMPlEs dE PolitiquEs concERnéEs

Catégorie 1Crédits relatifs à des dossiers qui concernent le fonctionnement interne ou qui ne présentent pas de dimen-sion de genre

/ Dépenses diverses de fonctionnement en ma-tière d’informatique ;

/ Location de biens immobiliers ;

/ Politique de destruction des déchets toxiques.

Catégorie 2Crédits relatifs aux actions visant à réa-liser l’égalité entre les hommes et les femmes

/ Dépenses de toute nature destinées à promou-voir l’égalité des chances entre les hommes et les femmes dans les services publics ;

/ Dotation à l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes.

Catégorie 3Crédits relatifs à des dossiers qui concernent une politique publique et qui présentent une dimension de genre

/ Prévention et lutte contre la consommation de drogues ;

/ Soutien à l’entrepreneuriat ;

/ Protection des témoins en matière de collabora-tion judiciaire internationale.

PARTIE 2 / MéThodologIE ET ouTIls PouR METTRE En œuvRE lA Bsg

Page 31: La budgéti- sation sensible au genre

Centre Hubertine AuClert ( 29 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

Centre Hubertine AuClert ( 29 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

Sur la base des données transmises par les administrations, la dimension de genre sera intégrée dans le budget général des dépenses. La caté-gorisation (1, 2 ou 3) des crédits qui doit être mentionnée dans les fiches budgétaires sera reprise dans les tableaux budgétaires du projet de budget général des dépenses, dans une colonne dite CRIPG21. Les notes de genre transmises par les administrations, qui énumèrent les allocations de base de la catégorie 2, seront annexées à la justification des dépenses comme le sont les documents de politique transversale (DPT) en France (voir ci-après). Le commentaire genre relatif aux dossiers ayant une dimension de genre (catégorie 3) est inclus dans la justification des allocations de base.

C’est cette démarche de catégorisation qui est aussi mise en œuvre dans les études d’impact des projets de lois en France dans le cadre de la circulaire du 23 août 201222. En mai 2015, sur 60 projets de lois étudiés dans le cadre de la circulaire du 23 août 2012, 37 % étaient estimés n’avoir aucun impact sur l’égalité femmes-hommes (voir focus pages 34 à 39).

L’enjeu pour les administrations est d’arriver à une bonne catégorisation des politiques publiques, qui peuvent paraître neutres mais ne le sont pas. Pour cela il est déterminant de former les personnels à l’égalité femmes-hommes mais aussi de réunir et collecter des données sexuées.

/ Catégoriser des lignes budgétaires n’est pas les modifier

Dans une conférence organisée par le cabinet Genderatwork avec l’Institut Belge de l’égalité entre les femmes et les hommes sur le gender budgeting, un premier bilan de cette approche par catégorisation a été fait 23 : « Une fois que les budgets sont établis, on va seulement les catégoriser en fonc-tion des critères de gender budgeting. Généralement, cette catégorisation n’est pas correcte, car trop de budgets sont considérés comme neutres. Mais même si elle est correcte, ce n’est encore qu’un début pour les budgets de la troisième catégorie : en principe, il convient, lors d’une prochaine étape, d’évaluer la mesure dans laquelle ces lignes budgétaires ouvertes au genre favorisent ou non l’égalité entre hommes et femmes, et ensuite procéder éventuellement aux adaptations qui s’imposent. La pratique montre que gé-néralement, cela ne peut pas se produire immédiatement mais que la ca-tégorisation incite néanmoins à la réflexion et peut parfois avoir un impact intéressant, même avec du retard. »

21 Institut belge pour l’égalité des femmes et des hommes, Manuel pour la mise en œuvre du gender budgeting, 2010.

22 Circulaire du 23 août 2012 relative à la prise en compte dans la préparation des textes législatifs et réglementaires de leur impact en termes d’égalité entre les femmes et les hommes.

23 Genderatwork, Le genre en action ! Récits de la pratique de l’égalité entre hommes et femmes, 2014, p. 49.

PARTIE 2 / MéThodologIE ET ouTIls PouR METTRE En œuvRE lA Bsg

Page 32: La budgéti- sation sensible au genre

( 30 ) Centre Hubertine AuClertCentre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

2 - l’APPRochE PAR lE cAdRE du cYclE BudgétAiRE

Cette approche s’inspire du cadre logique, outil de conception, de conduite et d’évaluation de projet. Le cadre logique est une méthode de gestion axée sur les résultats. Il synthétise sous forme de tableau (une matrice) toutes les informations clés d’un projet : objectifs, résultats, activités, risques, pro-grammation, ressources. Le cadre logique va permettre de répondre aux questions suivantes :

/ Quel est le but du projet ?

/ Quelles activités vont être menées pour atteindre ce but ?

/ Quelles sont les ressources nécessaires ?

/ Quels risques pourraient affecter la mise en œuvre du projet ?

/ Comment seront mesurées l’évolution des activités et l’atteinte des objectifs ?

La budgétisation sensible au genre par le cycle budgétaire consiste à intégrer la dimension du genre dans les différentes composantes d’un projet (objectif principal, objectifs spécifiques, activités, ressources), à identifier les niveaux auxquels les déséquilibres se manifestent et à détecter les points qui nécessitent une adaptation / intervention. On est dans :

/ l’évaluation ex ante : quels sont les apports, les activités, les produits et l’impact planifiés (et attendus) ?

/ l’évaluation ex post des politiques publiques : quels sont les apports, les activités, les produits et l’impact réalisés ?

Par exemple pour une collectivité qui finance et met en œuvre une action en direction des chômeur-se-s de longue durée, le questionnement à chaque étape du projet sera le suivant :

PARTIE 2 / MéThodologIE ET ouTIls PouR METTRE En œuvRE lA Bsg

Page 33: La budgéti- sation sensible au genre

Centre Hubertine AuClert ( 31 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

Centre Hubertine AuClert ( 31 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

Il est, par exemple, possible qu’un programme soit sensible au genre dans ses objectifs, mais que des inégalités de redistribution apparaissent au niveau des activités. Au lieu d’abandonner le programme entier ou de le restructu-rer, on pourrait alors suggérer des changements qui se limitent aux activités.

nivEAu dAns lA chAinE cAusAlE

ExEMPlEs PERsPEctivE dE gEnRE

imPaCT

(réalisations liées à de plus larges

objectifs)

Réduction du chômage de longue

durée

/ Existe-t-il un impact diffé-rent sur les hommes et sur les femmes ?

/ Comment la réalisation de l’objectif (réduction du chômage) contribue-t-elle à l’égalité des genres ?

ProDUiTs

(niveau d’utilisa-tion du service)

Nombre de chômeur-se-s de

longue durée ayant suivi une formation

/ Les femmes et les hommes bénéficient-ils au même niveau des produits ?

/ Comment les produits contribuent-ils à l’égalité des genres ?

aCTiviTés

(fourniture de services)

Formation

Contrats aidés

/ Les femmes et les hommes ont-ils un accès équitable aux activités ?

/ Les femmes et les hommes rencontrent-ils des freins spécifiques dans l’accès aux activités ?

aPPorTs

Allocation formation

Conseiller-ière-s emploi

/ Les moyens sont-ils suffi-sants pour stimuler l’égalité des genres ?

PARTIE 2 / MéThodologIE ET ouTIls PouR METTRE En œuvRE lA Bsg

Page 34: La budgéti- sation sensible au genre

( 32 ) Centre Hubertine AuClertCentre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

3 - l’APPRochE PAR lA ciRculAiRE BudgétAiRE intégRAnt lA PERsPEctivE dE gEnRE MisE En œuvRE En FRAncE

Cette approche vise à prendre en compte l’égalité entre femmes et hommes dans les circulaires budgétaires, dans les justificatifs des budgets et dans les comptes. Il s’agit de rendre compte des mesures et crédits mobilisés et fléchés sur l’égalité femmes-hommes dans les différents ministères ou admi-nistrations et services.

Cette approche a été mise en place en France en 2000 via les «  jaunes budgétaires », les annexes au budget national. L’une d’entre-elles présen-tait chaque année, ministère par ministère, les résultats d’analyse budgétaire sensible au genre.

Depuis la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), le dispositif a évolué : on parle de documents de politique transversale (DPT)24. Un programme «  égalité entre les hommes et les femmes  » est créé (n°137) dans la mission « solidarité et intégration » avec dix-sept autres programmes transversaux. Le DPT est obligatoire et le pilotage en est assuré par un comité interministériel.

La première partie du document consiste en une présentation stratégique de la politique transversale. Elle expose les objectifs de la politique transversale et les moyens qui sont mis en œuvre pour les atteindre dans le cadre inter-ministériel. Outre le rappel des programmes budgétaires qui concourent à la politique transversale, sont détaillés les axes de la politique, ses objectifs, les indicateurs de performance retenus et leurs valeurs associées.

Le document présente ensuite de manière détaillée l’effort financier consacré par l’état à la politique transversale pour l’année à venir, l’an-née en cours et l’année précédente, y compris en matière de dépenses fis-cales. Dix programmes sont identifiés.

Enfin, le document montre comment chaque programme budgétaire participe, au travers de ses différents dispositifs, à la politique trans-versale.

24 Ministère des affaires sociales,

de la santé et des droits des femmes, Document de po-

litique transversale égalité femmes-hommes, 2015.

PARTIE 2 / MéThodologIE ET ouTIls PouR METTRE En œuvRE lA Bsg

Page 35: La budgéti- sation sensible au genre

Centre Hubertine AuClert ( 33 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

PARTIE 2 / MéThodologIE ET ouTIls PouR METTRE En œuvRE lA Bsg

n°PRogRAMME noM du PRogRAMME

MontAnt cRédits dE PAiEMEnt

PRojEt dE loi dE FinAncEs 2015

(En €)

137 Égalité entre les femmes et les hommes 25 167 624

124 Conduite et soutien des politiques sanitaires, so-ciales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative

20 196 613

141 Enseignement scolaire public du second degré 49 840 864

219 Sport 6 027 181

147 Politique de la ville 90 683 400

204 Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins 140 000

101 Accès au droit et à la justice 3 130 000

107 Administration pénitentiaire 78 120

185 Diplomatie culturelle et d’influence 170 000

209 Solidarité à l’égard des pays en développement 29 467 024

ToTaL 224 900 826

Selon le projet de loi de finances 2015, les crédits de paiement consacrés à l’égalité femmes-hommes étaient ainsi estimés à 224 900 826 d’euros, soit un peu moins de 0,057 % des crédits du budget général de l’État25.

On peut par exemple connaitre la distribution des crédits participant à l’éga-lité entre les femmes et les hommes dans la politique de la ville. Les femmes sont ainsi bénéficiaires de :

/ 52 % des crédits du dispositif « internats de la réussite » (ex-internats d’ex-cellence) ; / 39 % des crédits du programme « Ville Vie Vacances » ; / 52 % des crédits du dispositif« École de la deuxième chance » ; / 28 % des crédits dédiés à l’EPIDE (Établissement public d’insertion de la Défense) ; / 42 % des crédits du dispositif « réussite éducative » ;/ 62 % des crédits du dispositif « adultes-relais ».

L’approche par circulaire budgétaire est donc intéressante pour identifier les crédits qui concourent de manière directe à l’égalité femmes-hommes. Par contre, cette approche ne rend pas compte des crédits ou budgets qui ont un impact indirect sur les femmes et les hommes.

25 Les crédits de paiement ouverts aux missions du budget général s’élevaient à 395 617 020 335 € selon le projet de loi de finances 2015.

Page 36: La budgéti- sation sensible au genre

( 34 ) Centre Hubertine AuClertCentre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

Les manuels à disposition sur la budgétisation sensible au genre, dont ceux produits par les instances européennes26, décrivent une dizaine d’outils tes-tés notamment sur des budgets nationaux et des programmes d’aide au développement. Dans ce guide à destination des collectivités françaises, le choix est fait de ne présenter que les outils que nous avons jugés les plus adaptables à l’élaboration et au suivi des budgets locaux.

l’AnAlYsE A PRioRi dE l’iMPAct du BudgEt suR l’égAlité FEMMEs-hoMMEs

Il s’agit d’évaluer l’impact potentiel que les investissements et les budgets pourront avoir sur la situation des femmes et la situation des hommes. Selon les résultats de cette analyse, on prévoit des mesures et crédits correctifs ou des modifications dans la structuration du budget ou du dispositif pour mieux prendre en compte l’égalité femmes-hommes a priori.

Cette analyse va s’appuyer sur l’étude des documents publics présentant ces politiques et déclarations d’intentions. Cette étude nécessite de disposer a minima de données relatives à la problématique de l’égalité femmes-hommes dans le champ concerné.

Les études d’impact des projets de loi prévus dans le cadre de la cir-culaire du 23 août 201227 sont des analyses a priori. En effet, la circulaire précise que « l’analyse conduite au stade de la préparation d’un projet de loi aura notamment pour objet :

26 Par exemple : Conseil de

l’Europe, op. cit. , L’égalité

dans les budgets : pour

une mise en œuvre pratique, 2009 et

Commission européenne,

Note d’information

sur la budgétisation

sensible au genre : son utilité dans

les approches d’aide fondées

sur les programmes,

2008.

27 Circulaire du 23 août 2012

relative à la prise en

compte dans la préparation

des textes législatifs et

réglementaires de leur impact

en termes d’égalité entre les femmes et

les hommes.

PARTIE 2 / MéThodologIE ET ouTIls PouR METTRE En œuvRE lA Bsg

_quels sont les outils adaptés aux collectivités locales françaises ?_

Page 37: La budgéti- sation sensible au genre

Centre Hubertine AuClert ( 35 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

/ de s’assurer que les dispositions envisagées ne portent pas at-teinte aux droits des femmes, ni n’aggravent les inégalités entre les femmes et les hommes : il conviendra d’apprécier si ces dispositions ont pour effet, direct ou indirect, de favoriser un sexe au détriment d’un autre, si elles peuvent avoir des conséquences négatives ou aggraver une situa-tion existante, par exemple en matière d’égalité professionnelle, d’accès aux droits ou d’effectivité des droits, d’articulation entre vie personnelle et vie professionnelle. Si tel était le cas, des mesures correctrices devraient être prévues ;

/ de s’interroger sur l’opportunité de prévoir des dispositions spéci-fiques de nature à mieux garantir les droits des femmes ou à réduire des inégalités existantes entre les femmes et les hommes, comme l’explique le guide méthodologique produit par la Direction Générale de la Cohésion Sociale 28».

Dans un guide méthodologique réactualisé en septembre 2014, le service des Droits des femmes et à l’égalité explique comment l’analyse de l’impact en termes d’égalité peut être réalisée29. Cela consiste à analyser si le projet de loi ou la mesure aura un impact :

/ sur les droits des femmes ;

/ sur l’égalité entre les femmes et les hommes ;

/ sur le renforcement de l’égalité femmes-hommes à travers des mesures compensatrices.

Comme l’explique le guide, cette analyse nécessite plusieurs étapes :

1. Il faut tout d’abord connaitre la composition sexuée des publics concernés directement ou indirectement par le projet de loi, recenser les différences entre femmes et hommes dans le domaine en cause et identifier les éventuelles difficultés que soulèvent ces différences. Une disposition apparemment neutre est souvent loin de l’être et peut favoriser en réalité l’un des deux sexes, du simple fait de la composition du pu-blic ;

2. Il faut ensuite évaluer l’effet direct des mesures envisagées , notam-ment en termes de parité, d’égalité professionnelle, de lutte contre les vio-lences faites aux femmes, de santé et de lutte contre les stéréotypes sexistes ;

3. Il convient enfin d’évaluer leur effet indirect et proposer, si nécessaire,

28 Direction générale de la cohésion sociale (DGCS), service des droits des femmes (SDFE), ministère des Affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, Prendre en compte l’égalité entre les femmes et les hommes dans les études d’impact, 2014.

29 DGCS-SDFE, Ibid, pp. 14-20.

PARTIE 2 / MéThodologIE ET ouTIls PouR METTRE En œuvRE lA Bsg

Page 38: La budgéti- sation sensible au genre

( 36 ) Centre Hubertine AuClertCentre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

des mesures correctrices. Pour analyser de possibles effets indirects du projet sur les femmes et les hommes, il faut s’interroger sur l’existence pos-sible de comportements différenciés chez les femmes et chez les hommes, de discriminations multiples ou/et d’impacts différenciés dans le temps qui conduiraient à un effet inégalitaire du projet de loi sur les femmes et les hommes.

L’analyse de 60 projets de loi après deux ans d’application de la circulaire montre que :

/ 37 % des projets n’ont aucun impact, / 63 % des projets de loi ont un impact sur l’égalité

Sur les 60 projets de loi étudiés :

/ 40 % ont un effet direct, / 35 % un effet indirect, / 16 % comprennent des mesures compensatoires30.

Des projets de loi peuvent être concernés à la fois par un effet direct/indirect et des mesures compensatoires.

30 Plus d’informations sur les études d’impacts des projets de loi

sont accessibles en ligne : http://femmes.gouv.

fr/dossiers/ egalite-

professionnelle/promotion-de-legalite-

professionnelle/ projets-de-lois-

les-etudes-dimpact-

sur-legalite-femmes-hommes/

PARTIE 2 / MéThodologIE ET ouTIls PouR METTRE En œuvRE lA Bsg

Page 39: La budgéti- sation sensible au genre

Centre Hubertine AuClert ( 37 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

PARTIE 2 / MéThodologIE ET ouTIls PouR METTRE En œuvRE lA Bsg

inexistence d’inégalités

dans la composition

sexuée

présence d’inégali-tés dans

la composi-tion sexuée

attention à la discrimination

indirecte

1/ le projet de loi a-t-il pour objectif de réduire les inégalités entre les femmes et les hommes ?

2/ quelle est la composition sexuée du public cible direct et/ou indirect du projet de loi ?

3/ déterminer l’éventuelle existence d’un effet indirect

volet 1 : prise en compte des comportements différenciés

volet 2 : prise en compte des discriminations multiples

volet 3 : prise en compte des impacts différenciés dans le temps

4/ mettre en place une éventuelle mesure correctrice des inégalités entre les sexes si le projet de loi le justifie

effet diReCt Pas d’effet diReCtoui

AnAlYsERvERiFiER

non

Source : Direction générale de la cohésion sociale (DGCS), service des droits des femmes (SDFE), ministère des Af-faires sociales, de la santé et des droits des femmes, Prendre en compte l’égalité entre les femmes et les hommes dans les études d’impact, 2014, p.21.

étAPEs à suivRE PouR quAliFiER lEs EFFEts diREcts ou indiREcts

Page 40: La budgéti- sation sensible au genre

( 38 ) Centre Hubertine AuClertCentre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

Une étude d’impact a l’obligation de recenser les impacts financiers de chacune des dispositions des projets de loi. Par contre, il n’y a pas encore d’analyse sexuée de cet impact financier et donc pas d’application de la bud-gétisation sensible au genre en tant que telle. Néanmoins, la démarche et les questionnements des études d’impact des lois peuvent être adaptés aux programmes développés dans les collectivités et aux ressources correspondantes.

ExTraiT DE L’éTUDE D’imPaCT DU ProjET DE Loi rELaTif à La BanqUE PUBLiqUE D’invEsTissEmEnT

En France, l’égalité entre les femmes et les hommes, acquise en droit, peine à se matérialiser dans les faits. L’accès des femmes à l’emploi conti-nue de se faire dans des conditions défavorables : leurs salaires restent de 20% inférieurs à ceux des hommes, elles travaillent plus souvent à temps partiel et la part des femmes dans les hauts postes des entreprises reste faible.

Les femmes ne représentent que 38 % des créations d’entreprises indi-viduelles en 2011. Au travers des entreprises qu’elle va soutenir, la BPI jouera un rôle en termes d’emplois et aura donc un effet sur l’égalité entre les femmes et les hommes. Pour mémoire, les femmes ne repré-sentent que 28 % des salariés de l’industrie : parmi les dix secteurs où les femmes sont majoritaires en termes d’emplois figurent essentiellement des services. En revanche, les dix secteurs où plus de 80 % des emplois sont occupés par des hommes sont industriels (en dehors du commerce / réparation automobile). Les données statistiques montrent de plus que la plupart des secteurs identifiés comme porteurs sont ac-tuellement peu féminisés. Par exemple, seulement 19 % des emplois dans le secteur de l’énergie sont occupés par des femmes. Dans le domaine de l’information et de la communication, seulement 16 % des entreprises sont créées par des femmes, et 34 % de ses salariés sont des femmes. D’après la DARES, l’économie verte ne compte que 13 % de salariés femmes. À l’inverse, le secteur de l’économie sociale et solidaire (ESS), est très féminisé, puisque 65 % des emplois sont oc-cupés par des femmes. Ce taux élevé résulte essentiellement de la forte implication de ce secteur dans des domaines d’activité où les emplois féminins sont traditionnellement surreprésentés.

Pour pouvoir suivre l’impact de l’action de la BPI en termes d’inégalité entre les femmes et les hommes, la BPi devra se donner les moyens d’évaluer ex post la part de l’aide qui bénéficie aux femmes. Pour

PARTIE 2 / MéThodologIE ET ouTIls PouR METTRE En œuvRE lA Bsg

Page 41: La budgéti- sation sensible au genre

Centre Hubertine AuClert ( 39 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

cela, il sera donc nécessaire que le système d’information de la BPi prévoit la possibilité de recueillir des éléments d’information sexuée, tels que le sexe du dirigeant des entreprises faisant l’objet d’un soutien et la proportion de femmes parmi les salariés et au sein, s’il y a lieu, des instances de direction.

AnAlYsE dE lA distRiBution dEs déPEnsEs PuBliquEs

Il s’agit ici de mesurer et d’analyser la distribution des ressources bud-gétaires entre les femmes et les hommes. L’analyse est donc a posteriori.

Il s’agit de comparer le coût d’un service, ou le montant d’une subvention, avec le degré de l’utilisation de ce service ou d’octroi de cette subvention par les femmes et les hommes.

Et de se questionner :

/ Quelle est la répartition des dépenses entre les femmes et les hommes ? Constate-t-on des écarts ? Comment sont-ils expliqués ? Sont-ils justifiés ou non ?

/ Si on constate des écarts injustifiés, comment les explique-t-on ?

/ Peut–on mettre en place des mesures correctives ?

Ce type d’étude est encore peu réalisé alors qu’il est à la portée des collecti-vités comme le montre l’exemple ci-après.

Un conseil départemental propose une aide à la création d’entreprise pour les jeunes sous la forme d’une subvention de 3 000 € qui s’intitule la bourse aux jeunes créateurs d’entreprise (BJCE). Pour accéder à cette subven-tion, il faut avoir moins de 30 ans et créer son activité dans le domaine de l’artisanat de production, du bâtiment, de l’industrie et des services aux entreprises.

PARTIE 2 / MéThodologIE ET ouTIls PouR METTRE En œuvRE lA Bsg

Page 42: La budgéti- sation sensible au genre

( 40 ) Centre Hubertine AuClertCentre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

Une étude de la répartition sexuée des subventions octroyées montre que :

/ Le nombre de bénéficiaires de la BJCE sur la période 2000-2004 est de 119 personnes dont 93 hommes et 26 femmes. Il y a donc chez les béné-ficiaires 78,15 % d’hommes et 21,85 % de femmes.

/ La moyenne d’âge des bénéficiaires de la BJCE est de 27,1 ans (respecti-vement 27,4 ans pour les hommes et 25,9 pour les femmes). Les femmes bénéficiaires sont donc plus jeunes.

/ Le niveau d’étude des femmes bénéficiaires de la BJCE est supérieur à celui des hommes.

/ La situation professionnelle des bénéficiaires de la BJCE est majoritaire-ment celle de demandeurs d’emploi (59,66 %), et cela est d’autant plus vrai pour les femmes (65,38 % contre 58,06 % pour les hommes).

1. Comparer la répartition sexuée des subventions à la répartition sexuée du public cible

Pour déterminer si le niveau de répartition de cette subvention aux femmes et aux hommes est satisfaisant, il faut le comparer à la répartition sexuée du public cible, c’est-à-dire les créateur-trice-s de moins de 30 ans sur le territoire concerné. Pour la BJCE, l’analyse rend compte d’un écart important en défaveur des femmes (voir graphique).

En effet, les femmes de moins de 30 ans représentent 34 % des créateur-trice-s d’entreprise dans le département concerné mais seulement 21,85 % des bé-néficiaires de la BJCE. On constate donc un écart de plus de 10 points.

PARTIE 2 / MéThodologIE ET ouTIls PouR METTRE En œuvRE lA Bsg

100

50

0

34

66

32,3

67,7

30

70

78,15

21,85% F

BÉNÉFICIAIREBJCE

CRÉATIOND’ENTREPRISEDÉPARTEMENT

CRÉATIOND’ENTREPRISERÉGION

CRÉATIOND’ENTREPRISEFRANCE

% H

%TAUX DE CRÉATION D’ENTREPRISES PAR LES FEMMES ET LES HOMMES DE MOINS DE 30 ANS

Page 43: La budgéti- sation sensible au genre

Centre Hubertine AuClert ( 41 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

2. identifier les causes des écarts (voir notamment les critères d’octroi, les modalités d’accès, etc.)

L’analyse va aussi consister à identifier les causes d’un tel écart. Au niveau de l’exemple étudié, les écarts sont dûs aux deux critères d’octroi que sont les secteurs d’activité concernés et l’âge. Les secteurs d’activité éligibles sont des secteurs à dominante masculine. Les femmes créent davantage des en-treprises dans le secteur de l’éducation, de l’action sociale et dans les services à la personne qui ne sont pas concernés par l’aide. En ce qui concerne l’âge, 30 ans est l’âge moyen du premier enfant pour les femmes. Les chiffres de la BJCE montrent que les femmes bénéficiaires sont plus jeunes en moyenne que les garçons. Les études montrent que les femmes créent leurs entre-prises avant et surtout après avoir eu leurs enfants.

3. proposer des mesures correctrices ou une trans-formation du dispositif, du budget

Cette analyse a permis de proposer des mesures compensatrices ou correc-trices dont :

/ l’augmentation à 35 ans de la limite d’âge pour les femmes,

/ l’élargissement de l’aide aux entreprises de service à la personne et au commerce en milieu rural.

Ainsi trois ans après la mise en œuvre de ces dispositions, les femmes repré-sentaient 67 % des bénéficiaires dont 25 % avaient entre 31 et 35 ans. La surreprésentation des femmes peut probablement s’expliquer par l’augmen-tation de la limite d’âge pour elles-seules.

Cependant, cet exemple montre que la mise en œuvre d’un dispositif devrait reposer en amont sur un diagnostic sexué. Celui-ci aurait permis de déceler le caractère désavantageux des critères. Mais il montre aussi que l’analyse a posteriori peut permettre de rééquilibrer l’accès aux ressources par des mesures correctrices.

AnAlYsE PARticiPAtivE PAR EnquêtE ou focus group AvEc lEs BénéFiciAiREs

L’adaptation des budgets locaux aux besoins du public peut aussi être éva-luée par les bénéficiaires des services publics via des enquêtes quantitatives et qualitatives. Il s’agit alors de vérifier le niveau d’accès et le degré de satis-faction des usager-e-s.

PARTIE 2 / MéThodologIE ET ouTIls PouR METTRE En œuvRE lA Bsg

Page 44: La budgéti- sation sensible au genre

( 42 ) Centre Hubertine AuClertCentre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

Il est utile notamment de connaître les besoins définis par les femmes et par les hommes et d’analyser les écarts éventuels au regard des ressources et des rôles sociaux assignés. Il s’agit ensuite de noter comment les services propo-sés sont évalués par les femmes et par les hommes et d’identifier là aussi les éventuelles différences.

L’analyse peut être enrichie par l’identification de difficultés qui pourraient être spécifiques à des groupes vulnérables dont les femmes seules avec en-fants, les femmes d’origine étrangère etc.

Certaines collectivités sont engagées dans des démarches qualité certifiées qui reposent notamment sur une enquête de satisfaction annuelle auprès des usagers. Il est possible d’envisager que cette enquête soit sexuée et porte sur les services proposés par la collectivité.

lE lEviER dE lA coMMAndE PuBliquE

Outre la possibilité de travailler sur les actions conduites en propre par la collectivité, il est possible d’envisager de se servir de la commande publique comme d’un outil pour l’égalité. C’est d’ailleurs l’un des engagements qu’ac-ceptent les signataires de la Charte pour l’égalité des femmes et des hommes dans la vie locale, dont l’article 12 précise que « le signataire reconnaît que dans l’exécution de ses tâches et de ses obligations relatives aux fournitures de biens et de services, y compris les contrats d’achat de produits, le recours à des services et la réalisation de travaux, il est de sa responsabilité de pro-mouvoir l’égalité des femmes et des hommes »31.

Entre 2012 et 2015, les villes de Nantes et de Lyon, la communauté ur-baine Nantes Métropole, le bureau d’étude ISM CORUM et l’organisation non-gouvernementale Migration Policy Group ont mené le projet BUYDIS visant à identifier les conditions juridiques et modalités permettant d’inclure dans les marchés publics passés par les collectivités des clauses promouvant l’égalité. Ces travaux ont donné lieu à la publication d’un guide pratique sur cette thématique.32

Ce dernier propose à la fois des exemples de clauses en faveur de l’égalité déjà mises en œuvre en France ou en Europe, propose une méthodologie de conduite de projet et se livre à une analyse des outils juridiques à disposition au sein du code des marchés publiques.

Le guide conclut qu’« en l’état actuel du droit, le pouvoir adjudicateur qui souhaite poursuivre un objectif de lutte contre les discriminations dans l’em-ploi à travers sa politique de commande publique dispose (…) de tout un

31 Conseil des communes et

régions d’Europe, Charte pour l’éga-lité des femmes et des hommes dans

la vie locale, 2006 ; pour une présen-

tation de cette charte voir Centre Hubertine Auclert,

Pour convaincre du bien-fondé des

politiques locales d’égalité femmes-

hommes, pp. 45-47.

32 ISM CORUM, Lutte contre les

discriminations et promotion de l’éga-lité dans l’emploi à travers les clauses des marchés pu-

blics. Projet BUYDIS. Un premier guide pour les collectivi-tés, octobre 2014.

PARTIE 2 / MéThodologIE ET ouTIls PouR METTRE En œuvRE lA Bsg

Page 45: La budgéti- sation sensible au genre

Centre Hubertine AuClert ( 43 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

éventail d’outils, qu’il pourra choisir de mettre en œuvre graduellement ou non, en les combinant ou non »33. Il propose ainsi plusieurs pistes pour pro-mouvoir l’égalité au travers des marchés publics, parmi lesquelles l’applica-tion des interdictions de soumissionner liées au non-respect des politiques d’égalité ou la valorisation par un critère d’attribution spécifique des actions promouvant l’égalité mises en œuvre par les prestataires.

Rédigé conjointement par des agent-e-s en charge des politiques d’égalité et des commandes publiques, ce guide fournira donc de précieux éléments aux collectivités territoriales désireuses de se servir des marchés publics comme d’un levier pour l’égalité.

AnAlYsE dEs iMPôts diREcts Et indiREcts Et cotisAtions PAYéEs PAR lEs FEMMEs Et lEs hoMMEs

Les outils proposés ci-dessus concernent les dépenses des collectivités lo-cales qui, pour une partie sont redistribuées sous forme de service, de sub-vention ou qui constituent la commande publique. Mais il est aussi possible d’évaluer la quantité relative d’impôts indirects et directs et/ou de cotisations payées par les femmes et les hommes habitant le terri-toire.

En effet, les modalités de calcul de l’impôt ne sont pas neutres en termes de genre. Au niveau national, le mode de calcul de l’impôt sur le revenu renfor-cerait les inégalités femmes-hommes car il n’inciterait pas le conjoint qui a les plus bas revenus (donc dans la majorité des cas la femme) à travailler da-vantage. C’est notamment un des points mis en avant par des chercheur-e-s du Conseil d’analyse économique dans une note sur les inégalités de salaires entre les femmes et les hommes34 : « La fiscalité française contient un élé-ment bien connu qui contribue à la construction des inégalités entre hommes et femmes : le quotient conjugal. (...) Les travaux existants s’accordent sur le fait que cette forme de traitement fiscal nuit à l’activité et aux salaires des femmes. Ils préconisent de réduire le taux marginal du second apporteur de ressources du couple afin de favoriser sa participation au marché du travail. Les quelques chiffrages existants suggèrent que le quotient conjugal réduit de 1 à 2 points de pourcentage le taux d’emploi des femmes en France ».

En France, la création ou la modification d’un impôt est toujours décidée par le Parlement. En vertu du principe de libre administration (art. 72 de la Constitution) et d’autonomie fiscale (art.  72-2), les collectivités territo-riales peuvent fixer le taux des taxes directes (taxe d’habitation, taxes foncières, contribution économique territoriale) qu’elles perçoivent mais doivent cependant respecter les règles fixées par la loi. A priori, les marges

33 Ibid, p. 28.

34 Conseil d’analyse écono-mique, Réduire les inégalités de salaires entre femmes et hommes, note du CAE n°17, 2014, p. 11.

PARTIE 2 / MéThodologIE ET ouTIls PouR METTRE En œuvRE lA Bsg

Page 46: La budgéti- sation sensible au genre

( 44 ) Centre Hubertine AuClertCentre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

de manœuvre des collectivités sont donc assez étroites en matière d’impo-sition.

Cependant, les collectivités peuvent agir, notamment en prenant en compte la composition des familles.

ConTriBUTion DEs ménaGEs aU fonCTionnEmEnT DEs aCTiviTés ET sErviCEs PUBLiCs ProPosés Par LEs aDminisTraTions LoCaLEs : LE qUoTiEnT famiLiaL

La loi permet d’instaurer une différenciation des tarifs des services publics en fonction du revenu des ménages, pour y garantir un accès égal à tou-te-s. Ainsi, le prix payé pour accéder aux prestations proposées par la collectivité en matière de restauration scolaire, de garderie, d’accueil de loisir, d’accès à la piscine etc. variera selon la composition et les ressources du foyer.

L’instrument majoritairement utilisé pour déterminer les tarifs appliqués est le quotient familial local. Le vocable « quotient familial » est hérité du dispositif du même nom, mis en place par l’État en 1945, et visant à accorder un avantage fiscal croissant avec le nombre d’enfants par foyer dans le cadre de l’imposition sur le revenu.

Cependant, si le mode de calcul du quotient familial national est inscrit dans la loi, les modalités de détermination du quotient familial local demeurent à la discrétion de la collectivité35.

Or, les modalités de calcul du quotient familial local auront une répercussion directe sur les tarifs réglés par les administrés.

En tenant compte du fait qu’au niveau national plus de 83 % des familles monoparentales sont composées d’une femme avec enfant(s)36, il peut être intéressant de s’interroger sur les effets sexo-spécifiques des tarifs aux usagers pour certains services.

35 L’article 147 de la loi n°98-657 du 29 juillet 1998

d’orientation relative à la lutte

contre les exclusions indique que : « Les

tarifs des services publics adminis-

tratifs à caractère facultatif peuvent être fixés en fonc-tion du niveau du

revenu des usagers et du nombre de

personnes vivant au foyer.

Les droits les plus élevés ainsi fixés ne peuvent être supé-rieurs au coût par

usager de la presta-tion concernée.

Les taux ainsi fixés ne font pas obstacle

à l’égal accès de tous les usagers au

service. »

36 Source : Insee, recensement de la population 2011 ;

des données par commune sont

disponibles sur le site de l’Insee.

PARTIE 2 / MéThodologIE ET ouTIls PouR METTRE En œuvRE lA Bsg

Page 47: La budgéti- sation sensible au genre

Centre Hubertine AuClert ( 45 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

PARTIE 2 / MéThodologIE ET ouTIls PouR METTRE En œuvRE lA Bsg

un Cas ConCRet

Une municipalité francilienne propose le mode de calcul suivant pour le quotient familial :

Le mode de calcul des parts est le suivant :

Foyer= 1 partAdulte = 0,5 part1er et 2ème enfant = 1 part pour chacun3ème enfant et suivant(s) = 1,5 parts pour chaque enfantPersonne handicapée = 0,5 part supplémentaire

Plus le nombre de parts (diviseur) sera élevé, plus le quotient familial sera faible, et les tarifs bas.

COMPAROnS LA SItUAtIOn DE DEUx FOyERS, En 2015 :

Foyer 1 : une famille monoparentale de deux enfants aura un nombre de parts égal à 3.5 (1+0.5+1*2)

Foyer 2 : un couple ayant deux enfants aura un nombre de parts égal à 4 (1+0.5*2+1*2)

(revenus annuels − impôts) / 12 (+ ou −) pensions alimentaires + prestations sociales et familialesnombre de parts

Page 48: La budgéti- sation sensible au genre

( 46 ) Centre Hubertine AuClertCentre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

LECTURE : si les ressources globales des foyers 1 et 2 sont égales à 22 500 euros annuels, le tarif d’accès à la cantine par enfant du foyer 1 sera su-périeur de 44 centimes d’euros à celui appliqué aux enfants du foyer 2.

NB : LES TARIFS SONT EXPRIMÉS EN EUROS, ET PAR ENFANT. IL S’AGIT À CHAQUE FOIS DE LA DIFFÉRENCE DE TARIF ENTRE FOYER 1 ET FOYER 2 ET NON DU TARIF LUI-MêME.

Si les ressources globales annuelles des foyers 1 et 2 sont égales à 30 000 euros chacune, et si les deux enfants du foyer 1 et du foyer 2 mangent tous les jours de l’année scolaire (environ 144 jours pour le primaire) à la cantine, le foyer 1 (monoparental) payera donc environ 167 euros supplémentaires par rapport au foyer 2.

PARTIE 2 / MéThodologIE ET ouTIls PouR METTRE En œuvRE lA Bsg

REssouRcEs gloBAlEs (EuRos)37

dEs FoYERs 1 Et 2

diFFéREncE tARiF

cAntinE EntRE

FoYER 1 Et 2 PAR jouR

diFFéREncE tARiF séjouR dE vAcAncEs

(d’un PRix coutAnt dE 1000 EuRos)

diFFéREncE tARiF jouRnéE

AccuEil loisiR sAns

héBERgEMEnt duRAnt lEs vAcAncEs,

REPAs inclus

diFFéREncE tARiF

MEnsuEl étudE

diRigéE dE 16h30 à 18h30

15 000 0,29 27,60 0,17 0,95

17 500 0,34 32,19 0,20 1,10

20 000 0,39 36,79 0,23 1,26

22 500 0,44 41,39 0,25 1,42

25 000 0,48 45,99 0,28 1,58

27 500 0,53 50,59 0,31 1,73

30 000 0,58 55,19 0,34 1,89

37 On entend ici, par

ressources globales, le résultat de la somme (revenus annuels-

impôts)/12 (+ ou - )

pensions alimentaires

+ prestations familiales.

Le mode de calcul du quotient familial a donc un réel impact en termes d’iné-galités femmes-hommes comme le met en lumière le cas concret ci-dessus.

Pourtant, en 2012, 36 % des familles monoparentales disposaient de reve-nus inférieurs à 60 % du revenu médian (seuil de pauvreté), contre 11,3 % des couples38.

A contrario de notre exemple, de nombreuses collectivités accordent cepen-dant d’ores et déjà un nombre égal de parts aux couples et aux personnes isolées. Elles prennent en compte la spécificité des familles monoparentales, qui sont majoritairement composées de femmes avec enfant(s).

38 Source : Insee, Nombre

et taux de personnes

vivant sous le seuil de

pauvreté selon le type de ménage,

Insee-DGFiP-Cnaf-Cnav-

CCMSA, enquête Revenus

fiscaux et sociaux, 2012.

Page 49: La budgéti- sation sensible au genre

Centre Hubertine AuClert ( 47 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

TaxE oU rEDEvanCE D’EnLèvEmEnT DEs orDUrEs ménaGèrEs

La taxe et la redevance d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM et REOM) pourraient également être interrogées dans une perspective genrée.

Au niveau national, les ménages composés uniquement d’une femme seule représentent 19,7 % des ménages contre 14,4 % pour les ménages compo-sés uniquement d’un homme seul ; en Ile-de-France, ils représentent respec-tivement 20,7 % et 15,1 %39.

En 2008, les femmes vivant seules dans leur logement représentaient 8,3 % de la population, contre 5,9 % pour les hommes vivant seuls40. Les parents et enfants d’une famille monoparentale représentaient quant à eux 10 % de la population (respectivement 3,9 % et 6,1 %).

On peut supposer qu’un ménage dont la taille est restreinte (personne seule ou famille monoparentale par rapport à un couple ayant le même nombre d’enfants) produit moins de déchets.

Or, la TEOM est un impôt dû par le contribuable, quel que soit son utilisa-tion du service, et est uniquement indexée sur la valeur locative cadastrale du logement. Ainsi, si un couple avec deux enfants occupe un logement de même valeur locative cadastrale que celui occupé par une femme seule, les deux ménages payeront la même chose.

À noter, l’article 97 de loi de finances 2012 a créé une TEOM incitative, dont la mise en œuvre est facultative : il s’agit de mettre en place une part variable de taxe, proportionnelle au volume de déchets produits.

La REOM est quant à elle calculée en fonction du service rendu, et paraît donc plus équitable. Certaines collectivités proposent ainsi une tarification proportionnelle à la taille du ménage.

Alors que de nombreuses réflexions sont en cours au sein des collectivités quant aux modalités de financement du service public de collecte et de trai-tement des ordures ménagères, questionner celles-ci au regard du genre pourrait être un levier d’action pertinent pour lutter contre les inégalités femmes-hommes.

39 Source : Insee, recensement de la population, 2011.

40 Source : Insee, recensements de la population de 2008 (exploitations complémentaires) : http://www.insee.fr/fr/themes/document.asp?ref_id=ip1392

PARTIE 2 / MéThodologIE ET ouTIls PouR METTRE En œuvRE lA Bsg

Page 50: La budgéti- sation sensible au genre

( 48 ) Centre Hubertine AuClertCentre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

PARTIE 1 / BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE : dE quoI PARlE-T-on ?

Page 51: La budgéti- sation sensible au genre

Centre Hubertine AuClert ( 49 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

méthodoLogie et outiLs PouR mettRe en œuVRe La bsg

Pour mettre en œuvre la budgétisation sensible au genre, il faut :

/ collecter des statistiques ventilées par sexe,

/ définir des indicateurs sexués de suivi des actions,

/ former les élu-e-s et agent-e-s aux politiques locales d’égalité femmes-hommes.

Plusieurs approches expérimentées en Europe (catégorisation, cycle budgétaire) ou par l’État français (circulaire budgétaire) peuvent inspirer les collectivités ;

Les moyens d’actions sont nombreux et complémentaires :

/ L’analyse du budget a priori, pour évaluer l’impact en termes d’égalité des actions menées,

/ l’analyse du budget a posteriori, en étudiant la distribution des ressources allouées,

/ les démarches participatives pour identifier les besoins des habitant-e-s,

/ la commande publique (clauses d’égalité),

/ les cotisations et redevances acquittées par les usager-e-s (modalités de fixation du quotient familial, de la tEOM etc.) »

PARTIE 1 / BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE : dE quoI PARlE-T-on ?

en

b

re

F

Page 52: La budgéti- sation sensible au genre

( 50 ) Centre Hubertine AuClertCentre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

PARTIE 3

—adaPteR et aPPLiqueRla budgétisation sensible au genre dans les ColleCtivités loCales en FranCe

Page 53: La budgéti- sation sensible au genre

Centre Hubertine AuClert ( 51 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

PARTIE 3 / AdAPTER ET APPlIquER lA BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE dAns lEs collEcTIvITés locAlEs En FRAncE

Centre Hubertine AuClert ( 51 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

un BudgEt coMPosé dE dEux sEctions Et voté En équiliBRE

Le budget d’une collectivité locale comprend une section de fonctionne-ment et une section d’investissement, chacune de ces sections se composant d’une colonne « dépenses » et d’une colonne « recettes ». À l’intérieur de chaque colonne, il existe des chapitres, qui correspondent à chaque type de dépenses ou de recettes, ces chapitres étant eux-mêmes divisés en articles.

_quelques éléments sur l’élaboration d’un budget au niveau local _

Page 54: La budgéti- sation sensible au genre

( 52 ) Centre Hubertine AuClertCentre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

achats de services,

subventions versées,

frais de personnel,

charges de gestion courante.

équipement brut,

autres investissements,

remboursement d’emprunts.

dotations et subventions

d’investissement,

autres recettes.

recettes fiscales,

dotations de l’état,

produits des services.

déPenses

déPenses

ReCettes

ReCettes

fon

Cti

on

ne

me

nt

inV

esti

ss

em

en

t

éPARgnE BRutE

éPARgnE BRutE (AutoFinAncEMEnt)

_structure du budget d’une collectivité locale

PARTIE 3 / AdAPTER ET APPlIquER lA BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE dAns lEs collEcTIvITés locAlEs En FRAncE

Page 55: La budgéti- sation sensible au genre

Centre Hubertine AuClert ( 53 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

Les budgets des collectivités doivent toujours être votés en équilibre réel et sincère. La section de fonctionnement est adoptée avant la section d’in-vestissement. Les budgets sont votés par chapitre ou, si l’assemblée délibé-rante le décide, par article à l’intérieur de chaque section.

Différentes comptabilités sont applicables au secteur public local selon le type de collectivités (communes, départements, régions) et selon la nature de l’activité exercée (service public administratif ou service public à caractère industriel et commercial). Ces différents types de comptabilités se déclinent par des instructions comptables  : M14 pour les communes, M52 pour les départements, M71 pour les régions, M4 pour les services à caractère in-dustriel et commercial, M22 pour les ESMS, M31 pour les Offices publics de l’habitat etc.

un ActE juRidiquE dAns un cAlEndRiER contRAint

Le budget est un acte juridique préparé par l’exécutif local et approuvé par l’assemblée délibérante de la collectivité. Il prévoit et autorise les recettes et les dépenses pour une année donnée. L’exercice budgétaire coïncide avec l’année civile : il commence le 1er janvier et se termine le 31 décembre.

Acte prévisionnel, il peut être modifié ou complété en cours d’exécution par l’assemblée délibérante.

Ainsi, est tout d’abord voté le budget primitif qui énonce aussi précisé-ment que possible l’ensemble des recettes et des dépenses pour l’année. Il doit être voté par l’assemblée délibérante avant le 15 avril de l’année à laquelle il se rapporte, ou le 30 avril l’année de renouvellement de l’assem-blée, et transmis au représentant de l’État dans les quinze jours qui suivent son approbation.

La tenue d’un débat d’orientation budgétaire dans les deux mois précé-dant le vote du budget primitif est obligatoire, sauf pour les communes de moins de 3 500 habitants. Il permet d’informer l’assemblée sur la situation financière de la collectivité et de présenter les grandes orientations pour l’an-née à venir. Après le débat, mais avant le vote, les membres de l’assemblée doivent recevoir le budget et ses annexes.

En cours d’année, des budgets supplémentaires ou rectificatifs sont nécessaires afin d’ajuster les dépenses et les recettes aux réalités de leur exécution.

PARTIE 3 / AdAPTER ET APPlIquER lA BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE dAns lEs collEcTIvITés locAlEs En FRAncE

Page 56: La budgéti- sation sensible au genre

( 54 ) Centre Hubertine AuClertCentre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

_Le cycle

budgétaireannuel

sePtembRe/oCtobRe année n :

budget rectificatif ou décision

modificative du budget année n

aVant Le 15 aVRiL :vote du budget primitif année n

aVant Le 30 juin de L’année n :

approbation du compte administratif

de l’année n-1 par l’assemblée

délibérante et vote éventuel d’un budget supplémentaire pour

l’année n

déCembRe :débat d’orientation

budgétaire n+1

PARTIE 3 / AdAPTER ET APPlIquER lA BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE dAns lEs collEcTIvITés locAlEs En FRAncE

Page 57: La budgéti- sation sensible au genre

Centre Hubertine AuClert ( 55 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

Des budgets annexes distincts du budget principal proprement dit, mais votés par l’assemblée délibérante, retracent les recettes et les dépenses de services particuliers (eau, assainissement, etc.) Il existe aussi des budgets autonomes. Ils sont établis par les établissements publics locaux gérant cer-tains services (centre d’action sociale, caisse des écoles, par exemple), ainsi que les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI, par exemple les syndicats, communautés de communes, communautés d’agglo-mération, etc.) ; ils sont votés par les instances responsables de l’EPCI.

aTTEnTion : UnE PréParaTion BiEn En amonT DU BUDGET LoCaL n+1

La préparation d’un budget n+1 relève de l’exécutif local (maire, président-e du conseil départemental, président-e du conseil régional) et est assurée par les services financiers des collectivités. Elle nécessite une évaluation des dépenses et des recettes pour l’année à venir.L’État doit fournir les renseignements indispensables (montant des dota-tions, détermination des bases d’imposition, informations générales sur le personnel) pour que les collectivités puissent évaluer leurs recettes.

En ce qui concerne les dépenses, des discussions sont engagées avec les services, selon un calendrier établi en interne, et sont suivies de réunions d’arbitrage. Souvent les premières orientations sont travaillées avant l’été de l’année n.

PARTIE 3 / AdAPTER ET APPlIquER lA BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE dAns lEs collEcTIvITés locAlEs En FRAncE

Page 58: La budgéti- sation sensible au genre

( 56 ) Centre Hubertine AuClertCentre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

PARTIE 3 / AdAPTER ET APPlIquER lA BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE dAns lEs collEcTIvITés locAlEs En FRAncE

Vers une organisation du budget plus lisible et transparente

Dans les communes de plus de 3 500 habitants, la M14 met en place une nomenclature fonctionnelle, permettant de reclasser les recettes et les dépenses selon les politiques conduites par la commune (enseignement, culture, action économique, administration générale, etc.) Le vote du bud-get peut également s’effectuer par fonction, mais seulement pour les com-munes de 10 000 habitants et plus.

Souvent, cette présentation fonctionnelle est aussi présente dans les docu-ments budgétaires à la disposition de la population (site internet ou maga-zine) comme le montre l’exemple ci-dessous.

PARTIE 3 / AdAPTER ET APPlIquER lA BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE dAns lEs collEcTIvITés locAlEs En FRAncE

_intégrer la perspective de genre dans le cycle budgétaire local_

Page 59: La budgéti- sation sensible au genre

Centre Hubertine AuClert ( 57 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

PARTIE 3 / AdAPTER ET APPlIquER lA BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE dAns lEs collEcTIvITés locAlEs En FRAncE

PARTIE 3 / AdAPTER ET APPlIquER lA BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE dAns lEs collEcTIvITés locAlEs En FRAncE

RÉPARTITION DES DÉPENSES, TOUS BUDGETS CONFONDUS (FONCTIONNEMENT ET INVESTISSEMENT) POUR LA VILLE X

%

Page 60: La budgéti- sation sensible au genre

( 58 ) Centre Hubertine AuClertCentre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

stRuctuRAtion du RAPPoRt dE BudgEt PRiMitiF

contEnuintégRAtion dE lA diMEnsion gEnRE

1. RAPPEL DES GRANDES ORIENTA-TIONS BUDGÉTAIRES

Le rapport rappelle ici les orientations budgétaires définies lors du précé-dent conseil municipal.

Il pourrait y être fait mention d’une volonté d’intégrer une lecture égalité femmes-hommes pour évaluer l’équi-libre de la répartition des dépenses et investissements et des ressources entre les femmes et les hommes.

2. ÉQUILIBRE BUDGÉ-TAIRE DU BUDGET PRIMITIF 2014

Présente les principales évolutions dans la structure du budget (dé-penses et recettes de fonctionnement et d’investissement, capacité d’autofi-nancement etc.)

Pas d’objet.

3. LA PRÉSENTATION PAR NATURE DU BUDGET

Présente :

A/ Le budget de fonctionnement par nature.

B/ Le budget de d’investissement par nature.

Les commentaires portent sur les cha-pitres prévus dans la nomenclature M14. Certains postes sont détaillés mais sans que l’on puisse y intégrer une dimension genre  : électricité, chauffage, assurance etc.

Pas d’objet ou difficilement appli-cable.

PARTIE 3 / AdAPTER ET APPlIquER lA BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE dAns lEs collEcTIvITés locAlEs En FRAncE

Une dimension égalité femmes-hommes peut être introduite dans cette présentation fonctionnelle des dépenses comme le montre l’analyse de la présentation du budget primitif 2014 d’une commune de 17 000 habitants.

TABLEAU : INTÉGRER L’ÉGALITÉ FEMMES-HOMMES DANS UN RAPPORT DE BUDGET PRIMITIF

Page 61: La budgéti- sation sensible au genre

Centre Hubertine AuClert ( 59 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

PARTIE 3 / AdAPTER ET APPlIquER lA BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE dAns lEs collEcTIvITés locAlEs En FRAncE

Que la dimension égalité femmes-hommes apparaisse dans les documents relatifs au budget local est un premier objectif. La BSG suppose aussi que la dimension égalité femmes-hommes (EFH) participe à orienter ou réorienter les priorités ou certaines priorités du budget. Il convient pour ce faire d’ins-crire la démarche dans tout le cycle d’élaboration du budget.

4. LA PRÉSENTATION PAR FONCTION DU BUDGET

Présente les Dépenses réelles de fonc-tionnement (DRF) et d’investissement par fonction :

1. Charges financières ;

2. Opérations non ventilables ;

3. Service généraux, sécurité et

4. Salubrité publique ;

5. Enseignement - jeunesse ;

6. Culture ;

7. Sports et nautisme ;

8. Intervention sociales, santé, fa-mille, logement ;

9. Aménagements et services ur-bains, environnement ;

10. Action économique.

À l’exception des charges financières et des opérations non ventilables, il serait envisageable d’apporter des éléments sexués.Par exemple, sur le volet jeunesse, en dépenses de fonctionnement, sont listées les actions suivantes :

/ Le maintien d’un conseil des jeunes pour les pré-ados ; / La poursuite de la bourse au per-

mis de conduire ; / Le développement des chantiers

loisirs jeunes ; / La poursuite, avec le point infor-

mation jeunesse (PIJ), de la mise en place d’une démarche pour ré-pondre aux attentes des écoles.

Pour l’ensemble de ces actions, il se-rait possible de disposer du montant des budgets alloués par la commune et du nombre de filles et de garçons devant en bénéficier.

Page 62: La budgéti- sation sensible au genre

( 60 ) Centre Hubertine AuClertCentre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

PARTIE 3 / AdAPTER ET APPlIquER lA BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE dAns lEs collEcTIvITés locAlEs En FRAncE

stAdE du PRocEssus BudgétAiRE

ActEuRs

Activités / PRocéduREs

d’élABoRAtion du BudgEt

quEstions/outils/ stRAtégiE PouR intégRER unE

PERsPEctivE dE gEnRE

PRéPARAtion

Direc-tion des finances, DGA, DGS

Président-e de l’exécutif local

Lettre de cadrage par la direction financière et la présidence de l’exécutif (juillet n-1)

Concertation : Réunion avec des cadres A, séminaire d’élu-e-s etc. (septembre n-1)

Débat d’orientation budgétaire (DOB)

(décembre n-1)

/ Possibilité de rappeler les objectifs EFH ;

/ Vérifier que les arbitrages ne vont pas à l’encontre de l’égalité ;

/ Réalisation d’une note compre-nant des données, des indicateurs clés dans les domaines des direc-tions et faisant le lien avec le plan d’action s’il existe. (voir comme exemple le guide méthodologique sur les études d’impact, pages 34 à 39) ;

/ Présentation de la note / inter-vention sur EFH en séminaire d’élu-e-s et des cadres ou au bureau de l’exécutif ;

/ Pour les communes, EPCI, conseils départementaux et régionaux, pré-sentation d’un rapport sur la situa-tion en matière d’EFH (pas unique-ment en interne, voir encadré page 63).

TABLEAU : INTÉGRER L’ÉGALITÉ FEMMES-HOMMES DANS LE CYCLE BUDGÉTAIRE

Page 63: La budgéti- sation sensible au genre

Centre Hubertine AuClert ( 61 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

PARTIE 3 / AdAPTER ET APPlIquER lA BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE dAns lEs collEcTIvITés locAlEs En FRAncE

APPRoBAtion

Services et élu-e-s

Délibération

Vote par l’assemblée délibérative de la collec-tivité

(avant le 15 avril de l’année n)

/ Rappel dans les objectifs géné-raux de l’intégration de l’égalité femmes-hommes ;

/ Intégrer des données sur l’égalité femmes-hommes et des indicateurs dans la présentation du budget mis en délibération (voir tableau pages 58 et 59 : intégration de l’EFH dans un rapport de budget primitif).

Exécution

Communication

Explication du budget

/ Identification des indicateurs EFH ;

/ Prévoir la collecte de certains de ces indicateurs dans les dossiers de subvention ;

/ Prévoir des graphes sur l’EFH dans la communication en direction du public ;

/ Possibilité d’ouvrir une boite cour-riel dédiée en cas de question sur l’exécution du budget et EFH ;

/ Organisation de temps d’informa-tion - formation des partenaires et du réseau EFH.

suivi

Reporting avec indica-teurs

/ Renseignement des indicateurs ou données sur EFH ;

/ Analyse des indicateurs et des données.

évAluAtion

Bilan quantitatif et qualitatif

Contrôle de gestion

Clôture exercice n (vote sur le compte adminis-tratif en juin n+1)

/ Rapport d’activité intégrant l’égali-té femmes-hommes ;

/ Avoir un indicateur EFH par direc-tion sur les indicateurs demandés pour le contrôle de gestion.

Page 64: La budgéti- sation sensible au genre

( 62 ) Centre Hubertine AuClertCentre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

La mise en place d’une budgétisation sensible au genre nécessite la mobi-lisation des acteurs concernés notamment de la direction des finances et de l’exécutif, qui ne sont pas nécessairement des spécialistes de l’égalité femmes-hommes. L’équipe en charge de cette politique (élu-e et chargé-e-s de mission) va devoir les convaincre, les mobiliser et mettre en place une stratégie pour ce faire.

dEs ARguMEnts légAlistEs Et éconoMiquEs

Il existe plusieurs éléments favorables à la mise en place de la BSG. Il existe notamment de nouvelles dispositions législatives. Par ailleurs, le contexte de contrainte budgétaire favorise la mise en place d’une démarche d’évaluation des politiques publiques que la BSG vient nourrir.

Les collectivités peuvent en effet se saisir de la BSG dans le cadre de la loi du 4 août pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes au regard de l’application de l’approche intégrée de l’égalité41 et de l’article 61 de cette même loi (voir encadré ci-contre). Les études d’impact sur les projets de loi participent aussi d’un point de vue méthodologique au développement de l’analyse a priori des politiques publiques et de leurs impacts sur les inéga-lités entre les femmes et les hommes ainsi qu’à en diffuser les enjeux et conclusions. Enfin, il faut rappeler que l’application de la budgétisation sensible au genre est un des engagements de la charte européenne pour l’égalité des femmes et des hommes dans la vie locale dont plu-sieurs collectivités impliquées pour l’égalité femmes-hommes sont signa-taires. Il est aussi possible de s’appuyer sur le rapport du Haut Conseil à l’Egalité entre les femmes et les hommes d’octobre 2014 abordant la ques-tion de l’éga-conditionnalité42 (voir encadré pages 64-65).

41 L’article 1er de la loi précise

que « L’État et les collectivités terri-toriales, ainsi que

leurs établissements publics, mettent en

œuvre une politique pour l’égalité entre

les femmes et les hommes selon une

approche inté-grée. », voir Centre Hubertine Auclert,

Pour convaincre du bien-fondé des

politiques locales d’égalité femmes-

hommes, juin 2014 (mise à jour en

novembre 2014), pp. 54-55.

42 Haut Conseil à l’Égalité femmes-

hommes, op. cit. , 2014.

PARTIE 3 / AdAPTER ET APPlIquER lA BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE dAns lEs collEcTIvITés locAlEs En FRAncE

_Convaincre et définir sa stratégie pour une application de la bsg_

Page 65: La budgéti- sation sensible au genre

Centre Hubertine AuClert ( 63 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

La situation économique et le contexte de réduction budgétaire sont aussi des éléments qui doivent conduire les collectivités à réinterroger l’efficacité et l’efficience des politiques développées et des moyens engagés. Les priori-tés d’action peuvent être redéfinies et les choix peuvent s’opérer notamment au regard des impacts présumés ou vérifiés des politiques et dispositifs sur l’égalité femmes-hommes.

Cela suppose toutefois que les différent-e-s acteur-trice-s en présence com-prennent et analysent les enjeux et les impacts. Cela passe par la formation mais aussi par la mise en place d’une stratégie d’action axée sur l’expérimen-tation d’une démarche permettant à chacune des parties prenantes de s’ap-proprier les outils, les résultats et la transformation éventuelle des dispositifs mais aussi des procédures.

PARTIE 3 / AdAPTER ET APPlIquER lA BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE dAns lEs collEcTIvITés locAlEs En FRAncE

La loi du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes prévoit en son article 61 que « Dans les communes de plus de 20 000 habitants, préalablement aux débats sur le projet de budget, le maire présente un rapport sur la situation en matière d’égalité entre les femmes et les hommes intéressant le fonctionnement de la commune, les politiques qu’elle mène sur son territoire et les orientations et programmes de nature à améliorer cette situation. Le contenu de ce rapport et les modalités de son élaboration sont fixés par décret. Ces dispositions sont applicables aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre regroupant plus de 20 000 habitants [ainsi qu’aux conseils départementaux et régionaux] ». Le décret n°2015-761 du 24 juin 2015 indique que les communes, EPCI et Départements devront, à partir du 1er janvier 2016, présenter préalable-ment au débat d’orientation budgétaire un rapport concernant à la fois l’égalité professionnelle en interne, mais également les actions menées en faveur de l’égalité femmes-hommes sur leur territoire dans une optique intégrée. L’intégration de clauses d’égalité dans les marchés publics devra également être traitée par cet outil. Le même dispositif s’imposera aux Régions à partir du 1er janvier 2017. Cette nouvelle obligation pour les collectivités est une réelle incitation à la mise en œuvre de la budgé-tisation sensible au genre.

Page 66: La budgéti- sation sensible au genre

( 64 ) Centre Hubertine AuClertCentre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

qu’est-ce que l’éga-conditionnalité ?

L’éga-conditionnalité est l’une des mesures préconisées par le Haut Conseil à l’Égalité entre les femmes et les hommes dans son rapport relatif à la lutte contre les stéréotypes de sexe remis en octobre 2014 à Marisol TOURAINE, Ministre des Affaires sociales, de la Santé et des Droits de femmes et Pas-cale BOISTARD, Secrétaire d’État chargée des Droits des femmes.

Le Rapport du HCEfh fait suite à une saisine de Najat VALLAUD-BELKA-CEM, alors ministre chargée des Droits des femmes. La saisine attendait un travail d’analyse globale sur les stéréotypes. Il était demandé au HCEfh de formuler des préconisations pour faire reculer les stéréotypes et les rendre de plus en plus intolérables dans la société, et en particulier dans trois champs : les médias, la communication institutionnelle et l’éduca-tion. La Commission Stéréotypes, présidée par Isabelle Germain, a été chargée de ce travail.

Dans ce rapport, le HCEfh propose une démarche structurante et pro-gressive en deux étapes.

En premier lieu, il est proposé de rendre visibles les stéréotypes de sexe avec des grilles d’indicateurs. Plusieurs outils ont été élaborés : une grille d’analyse des stéréotypes dans les manuels scolaires, en parte-nariat avec le Centre Hubertine Auclert, un guide pour une communica-tion publique sans stéréotypes43, co-construite avec les services de l’État, des collectivités territoriales et des chercheur-e-s, et une grille d’analyse des stéréotypes dans les fictions audiovisuelles, adressée au Conseil Su-périeur de l’Audiovisuel.

Il est dans un second temps recommandé de généraliser le mécanisme d’éga-conditionnalité. Le HCEfh fait notamment référence au méca-nisme de conditionnalité mis en œuvre depuis 2005 dans le cadre de la Politique Agricole Commune (PAC). Ce mécanisme subordonne les paiements directs au respect par les agriculteurs de critères (normes de base concernant l’environnement, sécurité alimentaire, santé animale et végétale, bien-être des animaux et maintien des terres dans de bonnes conditions agricoles et environnementales).

43 Publication prochaine.

PARTIE 3 / AdAPTER ET APPlIquER lA BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE dAns lEs collEcTIvITés locAlEs En FRAncE

Page 67: La budgéti- sation sensible au genre

Centre Hubertine AuClert ( 65 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

La définition du HCEfh de l’éga-conditionnalité est la suivante : subor-donner les financements publics transférés à une partie tiers au respect de l’égalité femmes-hommes et à la lutte contre les sté-réotypes de sexe.

Il s’agit d’éviter trois écueils comme dans une démarche de budgétisation sensible au genre :

/ Un renforcement de structures inégalitaires,

/ Une distribution inégale entre les bénéficiaires femmes et hommes,

/ Un renforcement d’activités qui diffusent des stéréotypes.

Plusieurs bonnes pratiques déjà à l’œuvre sont identifiées. L’une d’elle est portée par le Conseil général de l’Essonne qui a mis en place un condi-tionnement des aides financières destinées aux associations sportives au respect de trois critères dont l’un concerne l’égalité femmes-hommes. Ainsi depuis 2012, le conseil d’administration (CA) de l’association spor-tive ou du comité sportif départemental devait comprendre au moins 30 % de chaque sexe et au moins une personne de moins de 25 ans. À partir de 2015, le CA doit être paritaire et être composée d’au moins une personne de moins de 25 ans. 7,5 euros sont prévus par adhérent-e-s. Le non-respect de l’un des critères abaisse la subvention par adhérent-e de 50 centimes. Les minorations ne s’appliquent cependant pas aux clubs de moins de 51 licencié-e-s.

PARTIE 3 / AdAPTER ET APPlIquER lA BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE dAns lEs collEcTIvITés locAlEs En FRAncE

Page 68: La budgéti- sation sensible au genre

( 66 ) Centre Hubertine AuClertCentre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

PARTIE 3 / AdAPTER ET APPlIquER lA BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE dAns lEs collEcTIvITés locAlEs En FRAncE

ExPéRiMEntER lA Bsg Puis lA généRAlisER

Compte tenu du caractère novateur de la BSG, il peut être pertinent d’envi-sager une application en deux temps : expérimenter sur quelques poli-tiques ou dispositifs avant de procéder à la généralisation.

Le choix des politiques ou des dispositifs pour lesquels il serait pertinent d’appliquer la BSG peut s’appuyer sur plusieurs éléments :

/ la mobilisation et l’implication de l’élu-e (ou des élu-e-s) en charge du-des dispositif-s ou de la politique analysée car les résultats de l’analyse peuvent éventuellement conclure qu’il faut modifier des orientations et critères d’octroi ;

/ les compétences de la collectivité (enfance, sport, formation profession-nelle par exemple)

/ la disponibilité des données sur :

/ les publics concernés ou le secteur concerné au niveau régio-nal (ou national) ;

/ sur les bénéficiaires (individus ou personne morale) des crédits ;

/ la possibilité de production de données sexuées relatives aux bénéficiaires des crédits.

/ la nature des crédits en présence :

/ crédits de fonctionnement de la collectivité (personnel, actions etc.) alloués directement à un public (demandeur-ses d’emploi, enfants, jeunes, étudiant-es, entrepreneur-ses, sportifs-ves etc.)

/ crédits de fonctionnement alloués à des associations ou fédé-rations d’associations (subvention, mise à disposition de per-sonnel, d’équipement etc.)

/ crédits d’investissement ou d’équipements.

Plus globalement, il est nécessaire d’évaluer la situation de la collectivité au regard des incontournables de la BsG (données sexuées, études sur le genre, formation etc.) Certains moyens seront peut-être à mobiliser avant d’appliquer réellement la BSG (voir «  Les incontournables de la BSG », page 25).

Afin de tester les outils et de sensibiliser les différent-e-s actrices et acteurs,

Page 69: La budgéti- sation sensible au genre

Centre Hubertine AuClert ( 67 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

PARTIE 3 / AdAPTER ET APPlIquER lA BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE dAns lEs collEcTIvITés locAlEs En FRAncE

il est possible d’expérimenter la BsG sur un premier dispositif simple à étudier. L’octroi d’une subvention individuelle pour une action bien iden-tifiée ou encore l’organisation d’une activité par la collectivité en direction d’un public ciblé sont des dispositifs assez simples à analyser en terme d’im-pact sexué (combien de femmes et d’hommes touché-e-s par rapport à leur répartition dans la population locale) et en termes financiers (sommes moyennes perçues / ou moyens humains et autres ressources mobilisées).

Un exemple de démarche vous est proposé dans le tableau suivant.

Page 70: La budgéti- sation sensible au genre

( 68 ) Centre Hubertine AuClertCentre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

PARTIE 3 / AdAPTER ET APPlIquER lA BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE dAns lEs collEcTIvITés locAlEs En FRAncE

étAPEs / Actions

oBjEctiFs outils MoBilisABlEs

PRÉPARER L’ExPÉRI-MENTA-TION DE LA BSG

identifier les politiques et donc les postes budgétaires qui se prêtent à une intégra-tion du genre

analyse par catégorie : va permettre de classer les politiques selon leur impact sur l’EFH

Prioriser les politiques ou dispositifs à analyser

Au regard des compétences de la collec-tivité : petite enfance, éducation, jeunesse formation, transports, économie, sports etc.

important : à voir aussi au regard des élu-e-s et services mobilisables.

Des données disponibles et analysables :

- Existence de données sexuées sur le/les publics concernés ou le secteur concerné au niveau régional (ou national) ;

- Existence de données sexuées sur les bé-néficiaires (individus ou personne morale) des crédits ;

- Possibilité de production de données sexuées sur les bénéficiaires des crédits.

au regard des types de crédit :

- Crédits de fonctionnement alloués directement à un public (demandeur-se-s d’emploi, étudiant-e-s, jeunes, entrepre-neur-se-s, sportif-ve-s etc.)

- Crédits de fonctionnement alloués à des associations ou fédérations d’associations ;

- Crédits de fonctionnement dont charges de personnel ;

- Crédits d’investissement ou d’équipements.

Page 71: La budgéti- sation sensible au genre

Centre Hubertine AuClert ( 69 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

PARTIE 3 / AdAPTER ET APPlIquER lA BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE dAns lEs collEcTIvITés locAlEs En FRAncE

étAPEs / Actions

oBjEctiFs outils MoBilisABlEs

PRÉPARER L’ExPÉRI-MENTA-TION DE LA BSG

identifier les politiques et donc les postes budgétaires qui se prêtent à une intégra-tion du genre

analyse par catégorie : va permettre de classer les politiques selon leur impact sur l’EFH

Prioriser les politiques ou dispositifs à analyser

Au regard des compétences de la collec-tivité : petite enfance, éducation, jeunesse formation, transports, économie, sports etc.

important : à voir aussi au regard des élu-e-s et services mobilisables.

Des données disponibles et analysables :

- Existence de données sexuées sur le/les publics concernés ou le secteur concerné au niveau régional (ou national) ;

- Existence de données sexuées sur les bé-néficiaires (individus ou personne morale) des crédits ;

- Possibilité de production de données sexuées sur les bénéficiaires des crédits.

au regard des types de crédit :

- Crédits de fonctionnement alloués directement à un public (demandeur-se-s d’emploi, étudiant-e-s, jeunes, entrepre-neur-se-s, sportif-ve-s etc.)

- Crédits de fonctionnement alloués à des associations ou fédérations d’associations ;

- Crédits de fonctionnement dont charges de personnel ;

- Crédits d’investissement ou d’équipements.

ExEMPlE

/ Poste énergie : pas d’impact sur l’EFH

/ Investissements équipements sportifs : un impact indirect

/ Politique de lutte contre les violences faites aux femmes : impact direct

/ En tant que municipalité et au regard des projets de la nouvelle mandature, les compé-tences « petite enfance, éducation et jeunesse » sont jugées prioritaires.

/ La BSG peut être appliquée notamment aux activités de loisirs du mercredi et vacances scolaires.

/ Existence de données sur la démographie de la commune par tranche d’âge et par sexe via l’INSEE ;

/ Existence de données par tranche d’âge et par sexe de la fréquentation des centres de loi-sirs et des activités vacances mises en œuvre par les animateurs municipaux ;

/ Possibilité d’obtenir des données sexuées et par tranche d’âge de la part des centres sociaux et de loisirs associatifs via les dossiers de demande de subvention.

Pour une BSG appliquée aux activités de loisirs du mercredi et vacances scolaires :

/ Montant des charges de personnel (postes animateur-trices par exemple) et charges de fonctionnement des centres de loisirs, des activités vacances etc.

/ Montant des subventions allouées aux associations ;

/ Amortissement des équipements / estimation coût des équipements mis à disposition.

Page 72: La budgéti- sation sensible au genre

( 70 ) Centre Hubertine AuClertCentre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

PARTIE 3 / AdAPTER ET APPlIquER lA BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE dAns lEs collEcTIvITés locAlEs En FRAncE

étAPEs / Actions

oBjEctiFs outils MoBilisABlEs

ExPÉRI-MENTER

Appliquer la BSG

analyse a priori

1. Connaître la composition sexuée des pu-blics concernés directement ou indirecte-ment par la politique ou le dispositif étudié, recenser les différences entre les filles et les garçons, les femmes et les hommes dans le domaine et identifier les éventuelles difficul-tés que soulèvent ces différences ;

2. Évaluer l’effet direct des mesures envisa-gées ;

3. Évaluer leur effet indirect et proposer, si nécessaire, des mesures correctrices.

analyse a posteriori

Il s’agit de mesurer et d’analyser la distri-bution des ressources budgétaires entre les filles et les garçons et les femmes et les hommes.

1. Quelle est la répartition des dépenses entre les femmes et les hommes ? Constate-t-on des écarts ? Comment s’ex-pliquent-ils ? Sont-ils justifiés ou non ?

2. Si on constate des écarts injustifiés, comment les explique-t-on ?

ÉLARGIR LE ChAMP D’APPLI-CATION OU GÉNÉ-RALISER LA BSG

Étendre l’application de la BSG à plus de politiques et/ou l’appliquer sur l’ensemble du budget.

À partir des enseignements de l’expérimen-tation élargir ou généraliser l’application de la BSG à l’aide de divers outils :

Analyse a priori ;

Analyse a posteriori ;

Enquête population ;

Analyse des recettes.

Page 73: La budgéti- sation sensible au genre

Centre Hubertine AuClert ( 71 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

PARTIE 3 / AdAPTER ET APPlIquER lA BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE dAns lEs collEcTIvITés locAlEs En FRAncE

ExEMPlE

/ Étudier les données Insee par sexe et tranche d’âge, prendre en compte la dimension sté-réotypée et sexuée de certaines activités ;

/ Intégrer l’égalité filles-garçons dans le projet pédagogique : formation des profession-nel-le-s, construire, proposer un programme avec des activités mixtes pour faciliter l’accès du plus grand nombre etc.

/ Mise en place d’actions spécifiques sur l’égalité F-G : activités non-mixtes pour attirer les garçons ou les filles, journée « sports et filles », ateliers créatifs sur le thème de l’égalité F-G etc. Tout en faisant attention à ne pas renforcer les stérotypes.

/ Important : Définir des indicateurs et des objectifs et suivre ces indicateurs, par exemple :

/ Participation globale : pas plus de cinq points d’écart entre la participation féminine et mas-culine (par exemple filles 45 % - garçons 55 %, ou l’inverse) ;

/ Coût moyen pour les activités générales : x € pour les filles comme pour les garçons ;

/ Participation aux actions visant spécifiquement les filles ou les garçons : F = 80 % G= 20 %

/ Coût moyen pour les actions spécifiques : x € pour les filles et y € pour les garçons

/ Étude des données sur la participation des filles et des garçons par âge selon les activités mises en œuvre par la municipalité (dans l’idéal analyser aussi les activités mises en œuvre par les associations) et analyse par rapport aux données de l’Insee : constate-t-on une moindre présence des filles ou des garçons au regard de leur classe d’âge ? si oui quelles en seraient les raisons (programme, non mixité de l’équipe de professionnel-le-s, freins parentaux etc.) ?

/ Quel est le coût moyen par activité et au regard de la participation sexuée ? et quel est l’investissement moyen par sexe ?

/ Quelles sont les mesures à mettre en place pour réduire les inégalités constatées (modifi-cation du programme d’activités, mise en place d’actions spécifiques, formation de l’équipe, travail auprès des parents etc.) ?

/ Important : Définir de nouveaux indicateurs en termes de taux de participation et d’inves-tissements moyens par sexe.

/ Élargissement de la BSG appliquée aux activités de loisirs du mercredi et des vacances sco-laires à l’ensemble des politiques « éducation » et « jeunesse »

étAPEs / Actions

oBjEctiFs outils MoBilisABlEs

ExPÉRI-MENTER

Appliquer la BSG

analyse a priori

1. Connaître la composition sexuée des pu-blics concernés directement ou indirecte-ment par la politique ou le dispositif étudié, recenser les différences entre les filles et les garçons, les femmes et les hommes dans le domaine et identifier les éventuelles difficul-tés que soulèvent ces différences ;

2. Évaluer l’effet direct des mesures envisa-gées ;

3. Évaluer leur effet indirect et proposer, si nécessaire, des mesures correctrices.

analyse a posteriori

Il s’agit de mesurer et d’analyser la distri-bution des ressources budgétaires entre les filles et les garçons et les femmes et les hommes.

1. Quelle est la répartition des dépenses entre les femmes et les hommes ? Constate-t-on des écarts ? Comment s’ex-pliquent-ils ? Sont-ils justifiés ou non ?

2. Si on constate des écarts injustifiés, comment les explique-t-on ?

ÉLARGIR LE ChAMP D’APPLI-CATION OU GÉNÉ-RALISER LA BSG

Étendre l’application de la BSG à plus de politiques et/ou l’appliquer sur l’ensemble du budget.

À partir des enseignements de l’expérimen-tation élargir ou généraliser l’application de la BSG à l’aide de divers outils :

Analyse a priori ;

Analyse a posteriori ;

Enquête population ;

Analyse des recettes.

Page 74: La budgéti- sation sensible au genre

( 72 ) Centre Hubertine AuClertCentre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

PARTIE 3 / AdAPTER ET APPlIquER lA BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE dAns lEs collEcTIvITés locAlEs En FRAncE

Page 75: La budgéti- sation sensible au genre

Centre Hubertine AuClert ( 73 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

adaPteR et aPPLiqueR La budgétisation sensibLe au genRe dans Les CoLLeCtiVités LoCaLes en fRanCe

L’élaboration d’un budget au niveau local est un processus long  : la dimension genre est en prendre en compte dès sa préparation ;

Il est important d’inscrire cette démarche dans tout le cycle d’élaboration du budget ;

Le contexte législatif et européen est favorable à la mise en œuvre de la budgétisation sensible au genre au niveau local :

/ La loi du 4 août 2014 dispose que les collectivités territoriales françaises mènent une politique intégrée de l’égalité femmes-hommes,

/ Les communes, EPCI, et Départements devront dès le 1er janvier 2016 présenter un rapport en matière d’égalité femmes-hommes avant le débat d’orientation budgétaire ; dès 2017 pour les Régions,

/ La budgétisation sensible au genre est l’un des engagements de la Charte européenne pour l’égalité des femmes et des hommes dans la vie locale, dont plus de 186 collectivités françaises sont signataires.

La BSG est une politique innovante  : il est possible de l’expérimenter sur une partie du budget ou un ensemble d’actions donné avant de la généraliser. e

n

br

eF

PARTIE 3 / AdAPTER ET APPlIquER lA BudgéTIsATIon sEnsIBlE Au gEnRE dAns lEs collEcTIvITés locAlEs En FRAncE

Page 76: La budgéti- sation sensible au genre

( 74 ) Centre Hubertine AuClertCentre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

—CONCLUSION

Page 77: La budgéti- sation sensible au genre

La budgétisation sensible au genre, qui permet d’analyser l’impact différencié des dépenses et des recettes des budgets publics sur les femmes et les hommes reste

à développer en France, notamment à l’échelon territorial.

Ce guide vise à donner des repères et des conseils pour l’adaptation aux collectivités françaises des outils déjà mis en œuvre ou testés en Europe.

Gageons que ce guide incite plusieurs d’entre elles à tenter l’expérience de la BSG en s’appuyant sur les dynamiques actuelles d’approche intégrée de l’égalité.

Le Centre Hubertine Auclert se tient bien évidemment à la disposition de toutes les collectivités franciliennes qui souhaiteraient mettre en place un budget

sensible au genre, pour les accompagner, capitaliser et valoriser l’innovation.

_

Centre Hubertine AuClert ( 75 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

Page 78: La budgéti- sation sensible au genre

( 76 ) Centre Hubertine AuClertCentre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

—anneXe

Page 79: La budgéti- sation sensible au genre

AnnEXE

Centre Hubertine AuClert ( 77 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

/ Birgitta Åseskog, « National machinery for gender equality in Sweden and other Nordic Countries » in Shirin M. Rai (dir.), Mainstreaming gender, democratizing the state ? Institutional mechanisms for the advancement of women, 2003 (en anglais).

/ Centre Hubertine Auclert, Les politiques locales d’égalité en France, ana-lyse des expériences de 30 collectivités engagées pour l’égalité femmes-hommes, 2013.

/ Centre Hubertine Auclert, Planifier, conduire et évaluer une politique lo-cale d’égalité femmes-hommes, décembre 2014.

/ Centre Hubertine Auclert, Pour convaincre du bien-fondé des politiques locales d’égalité femmes-hommes, mise à jour de novembre 2014.

/ Commission européenne, Note d’information sur la budgétisation sen-sible au genre : son utilité dans les approches d’aide fondées sur les pro-grammes, 2008.

/ Conseil d’analyse économique, Réduire les inégalités de salaires entre femmes et hommes, note du CAE n°17, 2014.

/ Conseil de l’Europe, L’égalité dans les budgets : pour une mise en œuvre pratique, 2009.

/ Conseil des communes et régions d’Europe, Charte pour l’égalité des femmes et des hommes dans la vie locale, 2006

/ Direction générale de la cohésion sociale (DGCS), service des droits des femmes (SDFE), ministère des Affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, Prendre en compte l’égalité entre les femmes et les hommes dans les études d’impact, 2014.

/ Genderatwork, Le genre en action  ! Récits de la pratique de l’égalité entre hommes et femmes , 2014.

/ Institut belge pour l’égalité des femmes et des hommes, Manuel pour la mise en œuvre du gender budgeting, 2010.

/ Haut Conseil à l’Egalité femmes-hommes, Rapport relatif à la lutte contre les stéréotypes, pour l’égalité femmes-hommes et contre les stéréotypes de sexe, conditionner les financements publics, 2014.

Page 80: La budgéti- sation sensible au genre

( 78 ) Centre Hubertine AuClertCentre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

/ ISM CORUM, Lutte contre les discriminations et promotion de l’égalité dans l’emploi à travers les clauses des marchés publics. Projet BUYDIS. Un premier guide pour les collectivités, octobre 2014.

/ JämStod, Gender Mainstreaming Manual, 2007 (en anglais).

/ Ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, Do-cument de politique transversale égalité femmes-hommes, 2015.

/ Ministère fédéral pour les femmes et la fonction publique, Guidance Gen-der Budgeting in Public Administration, 2012 (en anglais).

/ Organisation des nations unies, Déclaration et programme d’action de Beijing, 1995.

sitEs WEB utilEs

/ Observatoire de la Charte européenne pour l’égalité des femmes et des hommes dans la vie locale : http://www.charter-equality.eu/me-thods-and-evaluation/methodes.html?lang=fr

/ www.femmes.gouv.fr : voir rubrique études d’impact

/ L’institut belge de pour l’égalité des femmes et des hommes : http://igvm-iefh.belgium.be/fr/domaines_action/gender_mainstreaming/

/ Site suédois sur l’approche intégrée de l’égalité FH et la budgétisation sensible au genre : www.includegender.org :

/ Un site canadien de ressources sur l’égalité femmes-hommes et analyse différenciée selon le sexe (ADS) dans les politiques locales : Observatoire sur le développement régional et l’analyse différenciée selon les sexes (ORÉGAND) : http://www.oregand.ca/veille/outils.html#ads3

/ Site web d’ONU Femmes faisant état des initiatives, démarches et outils mis en œuvre dans 65 pays : www.gender-budgets.org

/ Le site du réseau européen sur la budgétisation sensible au genre : www.infopolis.es/web/GenderBudgets/egbn.html

AnnEXE

Page 81: La budgéti- sation sensible au genre

Centre Hubertine AuClert ( 79 ) Centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes

Page 82: La budgéti- sation sensible au genre

redACtiOnCentre Hubertine Auclert :Paul DaulnyPerfégal : Isabelle Gueguen

ÉditeurCentre Hubertine AuclertAoût 2015

pHOtO© Pierre-Yves Brunaud

MAquetteMarieClaire Grafilles

Mise en pAGeMarc Blanchard ISSN : 2116-1631

Page 83: La budgéti- sation sensible au genre
Page 84: La budgéti- sation sensible au genre

Le Centre Hubertine Auclert contribue avec l’ensemble de ses membres, à la lutte contre les inégalités et les discriminations fondées sur le sexe et le genre et promeut l’égalité femmes-hommes.

Ses missions se déclinent en quatre pôles :

/ Construire une plateforme régionale de ressources et d’échanges sur l’égalité femmes-hommes : “l’égalithèque”.

/ Renforcer le réseau des acteurs et actrices franciliennes de l’égalité femmes-hommes à travers des accompagnements individuels et l’organisation de cadres d’échanges collectifs.

/ Promouvoir l’éducation à l’égalité, notamment via la publication d’études et d’analyses des outils éducatifs au prisme du genre.

/ Lutter contre toutes les formes de violences faites aux femmes, avec l’Observatoire régional des violences faites aux femmes intégré en 2013 au Centre Hubertine Auclert.

www.centre-hubertine-auclert.fravec le soutien de :