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  • Linsistance du rel

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    Extrait de la publication

  • ScriptaCollection de lEcole de psychanalyse

    Sigmund FreudDirige par Franois Balms

    Cette collection prsente les concepts de la psychanalyse et examine leureffectivit et leur maniement. Elle aborde la pratique de la psychanalyseen rapport avec les questions fondamentales de notre temps.

    (Voir les titres dj parus en fin douvrage)

    Scripta exercices est une srie de la collection Scripta.Rdaction de ce volume :

    Franois Balms,Christian Centner (direction),

    lisabeth Leypold.

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    Extrait de la publication

  • Ont collabor cet ouvrage :

    Franois Balmslisabeth du Boucher-Lasry

    Isabelle FlochJean-Guy GodinBrigitte LemrerCharles NawawiSolal RabinovitchJosphine Roques

    Moustapha SafouanAnne-Lise Stern

    Marie-Laure SusiniAnnie Tardits

    Jean-Pierre ThomassetJean-Michel Vappereau

    Hector Yankelevich

    0 Premires pages 15/03/06 14:24 Page 4

    Extrait de la publication

  • Sous la direction deChristian Centner

    Linsistance du rel

    Scripta exercices

    0 Premires pages 15/03/06 14:24 Page 5

    Extrait de la publication

  • Conception de la couverture :Anne Hbert

    Publi avec le concours du Centre national du livre

    Version PDF ditions rs 2012CF - ISBN PDF : 978-2-7492-2800-6Premire dition ditions rs 2006

    33, avenue Marcel-Dassault, 31500 Toulouse, Francewww.editions-eres.com

    Aux termes du Code de la proprit intellectuelle, toute reproduction ou reprsentation, intgrale oupartielle de la prsente publication, faite par quelque procd que ce soit (reprographie, microfilmage,scannrisation, numrisation) sans le consentement de lauteur ou de ses ayants droit ou ayants cause estillicite et constitue une contrefaon sanctionne par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propritintellectuelle.Lautorisation deffectuer des reproductions par reprographie doit tre obtenue auprs du Centre franaisdexploitation du droit de copie (CFC), 20, rue des Grands-Augustins, 75006 Paris, tl. 01 44 07 47 70,fax 01 46 34 67 19.

    0 Premires pages.qxp 24/07/12 10:29 Page 6

  • PrsentationFranois Balms, Christian Centner . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9

    LE REL EN QUESTION DANS LA CURE

    Le psychanalyste, le patient et la mortlisabeth du Boucher-Lasry . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15

    Rinjecter IrmaIsabelle Floch . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23

    Position de lanalysteJean-Guy Godin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29

    Contrer le relCharles Nawawi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35

    Le pre voilJosphine Roques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43

    Une pratique du relSolal Rabinovitch . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53

    Une lecture du texte de Solal Rabinovitch : Une pratique du rel

    Christian Centner . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61

    Table des matires

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    Extrait de la publication

  • LE REL ET LA CIVILISATION

    Lencombrement du relBrigitte Lemrer . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 73

    HameonAnne-Lise Stern . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 83

    Sade, ou le rel du fantasmeMarie-Laure Susini . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 93

    Contrer le rel aussi hors cureJean-Pierre Thomasset . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 103

    LE REL DANS LENSEIGNEMENT DE LACAN

    Le Rel, est-ce que a marche ? Quelques rflexions pralables lusage de la catgorie

    Franois Balms . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 115

    Le rel qui se fait jour dans le langage Christian Centner . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 137

    Pourquoi dfinir le rel ?Moustapha Safouan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 163

    La ralisation de lhomme comme individuAnnie Tardits . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 169

    La deuxime. La raison dun chec (1967)Jean-Michel Vappereau . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 185

    Le Corps, lincorporel, le Rel, lirrelHector Yankelevich . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 201

    Index thmatique. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 216

    Linsistance du rel

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  • En hommage Franois Balms

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    Extrait de la publication

  • Tout dpend de si le rel insiste. Tout quoi ? Notre avenir celuide la psychanalyse, celui du discours du matre, celui de la civilisa-tion . Cest ce quavance Lacan en 1974 dans La troisime . Insis-tance du Rel renomme le symptme, jadis assign linsistance de lavrit dans le symbolique. Le symptme au sens analytique du termesapprhende ds lors sous la forme de linsistance de ce qui ne va pasdans le rel : Jappelle symptme, dit Lacan, ce qui vient du rel. Mais linsistance du rel commande aussi ce qui empche la bonnemarche des choses au pas de tout le monde, cest aussi bien ce qui semet en croix dans le charroi du discours du matre. Une ironie essen-tielle marque ds ce moment la position de lanalyste : assign contrer le rel, il ne saurait en tre le partisan, et pourtant il a partielie avec lui.

    Le choix du thme du prsent livre rpondait lintention derelancer le travail autour des questions de lactualit de la psychana-lyse, de son avenir et de son aptitude rpondre lvolution de lasocit et de la civilisation. Il sagissait avant tout dancrer cetterflexion dans une clinique et dans une pratique qui ne cde pas auxprjugs modernistes.

    Avant quune menace de rglementation de la psychanalyse nesoulve une tourmente politique qui ne connat peut-tre aujourdhuiquune pause passagre, les questions souleves par les formes

    Prsentation

    Franois Balms, Christian Centner

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    Extrait de la publication

  • 10 Linsistance du rel

    contemporaines de la civilisation et de son malaise taient dj nom-breuses, et une importante littrature sen faisait lcho. Quon les rap-porte la subjectivit ou la politique, certains faits simposentmassivement : la dgnrescence ou le remaniement des noms dupre, la transformation des formes sociales o se symbolisaient tradi-tionnellement la vie, la mort et la reproduction sexue, ainsi que ledplacement de leurs conditions relles, la fiction collectivemententretenue dune jouissance promue au titre de valeur marchandene sont que des exemples des transformations qui se produisent dansla Kultur et lgard desquels les sujets ne peuvent rien. Il paraissaitimportant dinterroger lincidence de ces changements, sur lesdemandes danalyse, sur les cures, et sur ce qui peut tre attendudune psychanalyse de la part de ceux qui sy engagent.

    Paralllement, de nombreuses tudes rcentes ont examin lesconsquences des mutations en cours sur les conditions de vie dansnos socits. Plusieurs dentre elles, provenant de lextrieur du champde lanalyse, allguent, peut-tre htivement, les dcouvertes du cogni-tivisme pour jeter le doute sur les avances thoriques dues la psy-chanalyse, et certaines, sassociant aux prtentions tatiques lvaluation et la mise aux normes du capitalisme mondialis, contes-tent son efficacit et son droit lexistence. Dautres travaux, labors lintrieur de notre champ, laissent entendre que la psychanalyseserait affaiblie voire impuissante devant les dispositions nouvelles dela subjectivit moderne. Dautres encore nhsitent pas se rallier auxidologies du temps pour proclamer que la question du Pre telle queFreud la pose serait dsormais sans objet, de mme que sans fonde-ment la logique de la sexuation telle que Lacan la formalise.

    Partant du principe quil ny a rien dans ce que Freud et Lacan ontapport qui ne puisse savrer utile un moment ou lautre dans unecure, nous avons voulu nous donner les moyens de penser ce quiarrive dans le social, sans pour autant lcher la corde de la clinique, niperdre de vue les points dancrage qui permettent de sy orienter.

    Dans cette vise, La troisime , confrence de Lacan Rome ennovembre 1974, et plus largement les textes et sminaires de cettepriode, nous ont paru dune lecture particulirement fconde. Lethme de linsistance du rel qui sen est dgag rapidement nous aparu convenir notre propos dans la mesure o il y dsigne dunmme trait, et sans pour autant les confondre, ce qui peut donner lieu une analyse, ce qui est traiter dans une cure, et ce qui se manifestesous forme de symptme dans le social. Le regain dintrt que cestextes ont suscit rcemment dans le champ analytique nous parat

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    Extrait de la publication

  • 11Prsentation

    confirmer la pertinence de notre choix dans le contexte des dbatsactuels. Mais llaboration de la catgorie du rel, qui devient prdo-minante partir du sminaire Les non-dupes errent, et qui ouvre la voieaux formulations saisissantes de La troisime , fait encore lobjetaujourdhui dun important travail de dchiffrage et dexplication. Lethme linsistance du rel comportait donc le pari de susciter dunmme geste un progrs dans le dchiffrage du rel lacanien et danscelui de la ralit contemporaine, celle de la clinique dabord, et cellede ce que nous pinglons depuis Freud du terme de la civilisation,ensuite.

    Les contributions qui sont rassembles dans ce livre 1 se centrenttoutes autour de la notion du rel telle que Lacan la labore et la plu-part dentre elles privilgient les indications quil a apportes dans cedomaine partir du moment o il sest efforc darticuler son discoursautour de la topologie du nud borromen.

    La diversit des approches et des aspects du rel en question dansces textes ne doit pas dconcerter le lecteur. Laphorisme selon lequel le rel nest pas un figure en bonne place parmi les noncs laidedesquels Lacan sest efforc de cerner son ide du rel, bien quejamais il nait renonc parler du rel, article singulier dfini. Comptetenu de ceci, lhtrognit qui se prsente la lecture de ces textesnest peut-tre pas un mauvais signe ; elle ne soppose en tout cas pas ce que chacun sa faon ait fini par rencontrer son objet. Cependant,sil est exclu dunifier le rel, den faire collection ou ensemble, il nenest que plus justifi de se demander chaque fois de quel rel il sagit.Trs souvent les auteurs de cet ouvrage ont eu le souci de retenir cettequestion et doprer des distinctions entre un rel et un autre. Parmiles diffrents aspects du rel dont le lecteur verra progressivement sedessiner ici le contour, nous mentionnerons : le rel de la rencontrecontingente qui prend loccasion figure de destin, le rel que le sujetprend son compte dans le discours qui le d-subjective, le relimpliqu dans la mise en acte du fantasme, le rel du non-rapportsexuel et celui du symptme, la relation entre le rel de la cure et lerel de la structure, le rel du Pre comme distinct ou non du presymbolique ou du pre sparateur, le croisement du rel de lhistoireet du rel de linconscient, le rel en jeu dans le plagiat et dans ledtournement de limage, le rel qui se laisse entrevoir derrire lha-

    1. Il sagit des prolongements dun colloque de lcole de psychanalyse SigmundFreud (EPSF) tenu sous ce titre les 20 et 21 mars 2004 Paris, au grand amphithtre delhpital Sainte-Anne.

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  • 12 Linsistance du rel

    giographie du Marquis de Sade, le rel que lanalyste a pour fonctionde contrer lorsquil choisit de travailler dans le social.

    Plusieurs auteurs se sont soucis davantage de restituer la portedu rel lacanien ainsi que la diversit des ples entre lesquels a oscillsa dfinition. Lun deux pose directement la question de la ncessitpour la psychanalyse de dfinir le rel, tandis quun autre, se faisantindirectement lcho de ce dernier, interroge la stagnation thoriquednonce par Lacan il y a plus de cinquante ans. Parmi ceux qui ontorient leurs travaux dans ce sens, certains soulignent le regain din-trt dont tmoigne Lacan dans la priode des nuds pour les ques-tions que posent la vie, le vivant, lindividu et le corps en regard de lathorie du sujet. Les dveloppements quils apportent concernant lerel de ce qui se noue entre corps et langage, viennent en contrepartiedune autre contribution qui voque lincidence dun rel mathma-tis en tant quobjet de science rfrence majeure du discours deLacan et qui se fait sentir dans lencombrement du rel descendudu ciel sous leffet du discours de la science.

    Dautres travaux interrogent le nouage borromen en tant que tel.Quil sagisse de faire tat du reprage clinique de certains croise-ments ou jointures du nud, des proprits intrinsques du nouage,ou des relations entre les catgories R, S et I, les indications qui sendposent semblent se rencontrer dans un mouvement de serrage oude coinage comparable celui que Lacan a plusieurs fois voqupour dcrire ce quil en est de ce nud.

    travers la diversit des approches et des trajectoires, les textesqui sont rassembls dans cet ouvrage laissent entrevoir diffrentsaspects du rel tel quil merge aujourdhui dans les cures et dans lesocial. Ils permettent ainsi dapprhender, voire de cerner, un certainnombre de points dmergence de linsistance du rel dans la subjecti-vit de notre poque.

    lorigine de ce recueil, linsistance du rel et plus gnralementles thmes dvelopps par Lacan au moment de la confrence Latroisime nous paraissaient propres laborer quatre questions quenous souhaitions aborder conjointement. En quoi les changementsactuels affectent-ils les sujets qui sadressent la psychanalyse ? Quelsen sont les incidences sur les cures ? Quel clairage lexprience ana-lytique apporte-t-elle sur cette actualit ? Quen rsulte-t-il quant laplace de la psychanalyse dans la cit ? Au terme de nos travaux nousavons rsolu de leur donner pour rpondant les trois sections de lou-vrage : le rel dans la cure, le rel et la civilisation et le rel dans lenseigne-ment de Lacan.

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    Extrait de la publication

  • LE REL EN QUESTIONDANS LA CURE

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    Extrait de la publication

  • 01 Intrieur 15/03/06 14:29 Page 14

    Extrait de la publication

  • 1. J. Lacan, Ou pire, indit, leon du 9 fvrier 1972.

    INTRODUCTION : LES DEUX JOINTURES DE R ET S

    Ds 1953 Lacan, dans son rapport du congrs de Rome Fonctionset champ de la parole et du langage , nous indique deux jointures pour le rel et le symbolique dans la cure : lune tient la position delanalyste, lautre se rfre au temps.

    Ce terme de jointure anticipe de faon prmonitoire ce que Lacannous dcrit partir de son sminaire Ou pire en 1972 1 lorsquil intro-duit pour la premire fois le nud Borromen pour la reprsentationdu nouage Rel Symbolique Imaginaire.

    Effectivement le cercle R et le cercle S se coupent en deux points,plus exactement ces deux points o le symbolique se superpose aurel constituent un nouage pour autant que le troisime cercle delimaginaire les fasse tenir ensemble.

    Pour revenir aux deux jointures du Rel et du Symbolique dans lacure (ou nouages) dcrites en 1953, Lacan, propos de la premirejointure concernant la position de lanalyste, nous dit :

    Car il est clair, dautre part, que labstention de lanalyste, son refus derpondre, est un lment de la ralit dans lanalyse. Plus exactement,

    Le psychanalyste, le patient et la mort

    lisabeth du Boucher-Lasry

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    Extrait de la publication

  • 16 Linsistance du rel

    2. J. Lacan, Fonction et champ de la parole et du langage , crits, Paris, Le Seuil, 1966,p. 309-310.3. Ibid., p. 310.

    cest dans cette ngativit en tant quelle est pure, cest--dire dtache detout motif particulier, que rside la jointure entre le symbolique et le Rel.Ce qui se comprend en ceci que ce non-agir est fond sur notre savoiraffirm du principe que tout ce qui est rel est rationnel, et sur le motifqui sensuit que cest au sujet quil appartient de retrouver sa mesure 2.

    Dans la suite du texte, Lacan explicite la deuxime jointure : Onvoit ds lors lautre moment o le symbolique et le rel se conjoignent[] [cest] dans la fonction du temps 3.

    Lacan souligne ensuite les effets techniques du temps dans la curesur lesquels je reviendrai dans un instant.

    Je voudrais voquer devant vous ces deux jointures et les effetssur elles de linsistance du Rel travers les fragments dune curemarque par lexplosion violente dune maladie dont la prsencepremptoire ne peut tre lude.

    En dautres termes, linsistance du rel dune part, et dautre partlintrusion de ce Rel devenu en quelque sorte une ralit de lacure, modifient-t-elles la position de lanalyste et la problmatique dutemps ?

    Avant de proposer une rponse cette question je voudrais toutdabord voquer ce rel dans la cure.

    LINSISTANCE DU REL ET LA CURE

    Cest de ce rel, de cette intrusion du Rel dans sa vie, que parlecette patiente tout dabord lors des entretiens prliminaires.

    Il y a quelques annes, D., brillante jeune femme de 38 ans sedcouvre une tumeur parasternale droite (cest--dire situe au niveaudu sternum). La biopsie tumorale pose le diagnostic de cancer loco-rgional dont la lsion primitive na jamais t retrouve. Une chimio-thrapie lourde est mise en route. Aprs la quatrime cure dechimiothrapie, D. prouve le besoin de sadresser un analyste.

    D. est lane dune famille de trois enfants. Son grand-prematernel tait lagonie (je la cite) pendant la grossesse de sa mreet dcde au moment de son baptme. Le frre chri, cadet de sa mre,meurt dune balle perdue pendant son service militaire en Algrie,

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  • 17Le psychanalyste, le patient et la mort

    quelques semaines avant sa naissance. D. portera le mme prnomque ces deux hommes.

    Pendant toute son enfance D. vit, dit-elle, trempe dangoisseavec un sentiment permanent de dsastre imminent . Ce sont sesmots. lge de 24 ans, elle dclenche une sclrose en plaques trsvolutive, avec atteinte du nerf optique, perte de lusage de sesjambes et du contrle de ses sphincters. Grabataire, elle est hospita-lise plusieurs mois. Chez un sujet jeune, une telle volution paratfoudroyante. Elle gurit pourtant, de faon totalement exception-nelle ce stade de la amaladie, gurison quelle attribue la ren-contre et aux soins prodigus par un jeune chef de service passionnde musique. Par ailleurs, la vie de D. est rgulirement ponctuedaccidents suivis dinterventions chirurgicales et de priodes dim-mobilisation.

    Aprs plusieurs relations amoureuses difficiles avec des hommesdont la psychose semble vidente (paranoaque pour le premier, puismaniaco-dpressif pour le second), D. vit depuis lge de 33 ans unerelation plus stable et plus apaise avec un homme qui porte, commeelle, le mme prnom que celui de son grand-pre et de son oncle.

    Linsistance du rel dans la vie de D. se poursuivra pendant toutela cure jusqu sa mort, soit durant une anne ponctue de chimioth-rapies, suivies de cures de rhydratation, de greffe de mlle ncessi-tant un isolement en bulle strile, de bilans dextension et desouffrances physiques.

    LA QUESTION DES EFFETS DE LINSISTANCE DU RELSUR LES DEUX NOUAGES DE R ET S DANS LA CURE

    Face une telle insistance du Rel voire son intrusion dans laralit de la cure quelle peut tre notre position danalyste ?

    Il ne sagit certes pas de donner un sens ce Rel, tant il est vraique ce Rel na pas de sens. La religion, la vraie et mme les fausses,sont capables de remplir cette fonction de donner un sens au rel.Cest en gnral ce que demandent ceux qui sadressent elles mais cenest pas le choix de D. Elle a choisi lanalyse.

    Comme Lacan nous a appel dans La troisime contrer lerel nous pouvons penser que lanalyse peut aider cette patiente mettre le rel la place qui est la sienne dans la symbolisation, soitcelle du hasard. Ce hasard pour lequel il ny a pas de loi, marquemme du rel comme Lacan nous la indiqu si souvent.

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    Extrait de la publication

  • 18 Linsistance du rel

    4. Ibid., p. 314.

    Cette marque du Rel, limpensable du hasard sans loi, D. la meten exergue ds le dbut de la cure en indiquant la place o elle met lamaladie qui la tourmente soit, pour elle, celle dune balle perdue mor-telle, archtype du hasard tragique, et rfrence la balle perdue quia tu celui dont elle porte le prnom, son oncle, sur le chemin desretrouvailles avec sa fiance, balle quelle associe immdiatement auxpremires irradiations douloureuses dans le dos provoques par satumeur au dbut de sa maladie.

    La position de lanalyste nest pas de donner un sens au rel quinen a pas, mme le rel le plus tragique, mais plutt daider sonpatient entendre ce qui cadre symboliquement ce rel, soit en loc-currence de cerner dans la parole ce qui fait trace du dsir de la mredans le choix du prnom de D. : ceci viendra sa place dans le travailde la cure, jen parlerai dans un instant.

    Venons-en maintenant la deuxime jointure entre R et S quiporte sur la question du temps.

    laisser se confondre lurgence que nous impose la maladie mor-telle de cette femme avec la hte conclure qui donne son rythmenaturel la logique du signifiant, on risque dobtenir les mmes effetsnfastes que ceux qui peuvent tre produits par le timing aveugle dessances de dure fixe, voire mme ceux engendrs par la fixationannonce du terme de lanalyse.

    Lacan le rappelle propos du timing des sances de dure fixe : Lindiffrence avec laquelle la coupure du timing interrompt lesmoments de hte dans le sujet, peut tre fatale la conclusion versquoi se prcipitait son discours [] 4.

    Laisser se confondre la ralit de lurgence avec le moment de hte conclure qui habite le sujet, cest renoncer notre fonction dans laponctuation dialectique que nous devons donner la parole du sujet,fonction qui est le support mme du don de la parole dont Lacannous dit quil doit suffire notre action.

    Assurment, le patient lui-mme, comme dautres patientsconfronts au mme rel traumatique, ne faiblira pas sur sa hte. Defait une telle cure se droule le plus souvent avec moins dpisodes defermeture de linconscient que lors dune cure moins tragique commesi linsistance permanente de lvolution de la maladie induisait uneleve des rsistances. Cest en tout cas ici mon hypothse.

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  • 19Le psychanalyste, le patient et la mort

    Il nen reste pas moins que la dure de lanalyse ne peut tre anti-cipe par le sujet que comme indfinie. Mme avec la mort au bout, oncroit toujours quon va pouvoir continuer.

    Ainsi constatons-nous que ni linsistance du Rel, ni son intrusiondans la ralit de la cure ne doivent changer fondamentalement lesdeux jointures, les deux nouages du rel et du symbolique : ni la posi-tion de lanalyste, ni la logique du temps.

    QUELQUES MOTS SUR LE DROULEMENT DE LA CURE

    Cest avec une dtermination admirable que D. ne cdera jamaissur son dsir de recherche de vrit jusquaux derniers jours de sa vie.Ainsi le droulement de la cure sinstalle malgr la mort si proche : lesrves fournissent un matriel abondant propice une avance rapide.

    La cure est difficile cependant, marque par de nombreuses mani-festations dagressivit contre lanalyste. La pathologie maternelle etles ravages du rapport la mre prennent le premier plan de la scne.Cest sur ces ravages quelle a beaucoup associ. Je vous en donnequelques exemples.

    Mre trs obsessionnelle, obsde de propret , pour qui lamaladie fait tache , mre qui empche sa fille dtre vivante. Ellevoque un souvenir dune crise dangoisse, sa mre riait, sa mre luifichait de leau sur le visage et lui disait tu vas te calmer . Elle dit sesentir vampirise par sa mre, se plaint de son irrespect invasif.

    Un pre trs absent du fait de sa profession, muet quand il est l,humili par sa femme qui passait son temps lopposer limageidalise de son frre mort. D. est une petite fille trs sage, immobile,trs bonne lve, solitaire, trempe dune angoisse comme elle ledit et le redit, que seule la prsence du pre pouvait un peu apaiser.

    Les vux de mort de la mre quant sa fille mergent lors denombreux rves. Je vous cite quelques fragments de rve.

    Un camp, chasse lhomme, elle est le gibier, une femme cruelleavec un bandeau de samoura la garde sous son regard pour diriger lecoup mortel sur elle.

    Autre fragment : limage dun tout petit bb suspendu en lair, toutseul dans la nuit, ce bb cest elle, elle associe sur le vers de Baudelaire je hais le mouvement qui dplace les lignes . D. connaissait proba-blement la fin de la strophe : Et jamais je ne pleure, et jamais je ne ris.

    Un autre fragment de rve : D. est vtue dune armure mdivale,une capuche sur la tte, accroupie par terre, recroqueville, il y a une

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  • 20 Linsistance du rel

    voix qui venait delle, de sa gorge, une voix de possession. Jeanne, jesuis Jeanne elle sait quon va lui ouvrir la porte. Elle demande quonlouvre. Derrire cette porte apparat un visage masqu, loncle D. etla mort. Cest un rve o ses associations portent sur lidentification sa mre, notamment travers le prnom de Jeanne. Jeanne est leprnom de sa mre.

    Au cours dune sance D. me dit : Ma mre sest programmepour ma mort. Qui plus est, sa mre aurait dit pendant sa grossesse : Je donnerais la vie de mon enfant pour sauver mon frre. Elle medit aussi : Mes souffrances tmoignent dune fidlit ma mre. Cesont ses propres mots.

    Ainsi surgissent les mots, toute la chane des signifiants, les fan-tasmes qui bordent le Rel et contribuent sa symbolisation.

    Pour douloureux que soient les fragments que je viens de citer, ilstmoignent du droulement dune cure ponctue par le travail sur lesrves et llaboration par le sujet de son insertion dans la ligne tra-vers les signifiants qui ont dtermin son destin. Cest sans doute cedroulement habituel de la cure qui a procur cette femme lapaise-ment quelle a manifest au cours des dernires semaines de sa vie.

    LA CURE ET LA MORT

    Dautres fragments que je vais maintenant voquer marquentcette cure de sa tonalit plus particulire, lie la proximit de la mort,dont la dimension symbolique se noue avec le rel de la maladie ducorps dans une nigmatique interfrence temporelle quil nous reste expliciter.

    Comme le dit La Rochefoucauld et comme Lacan la plusieurs foisrappel la mort [] on ne saurait pas plus que le soleil (la) regarderfixement .

    La mort est voque dans de nombreux rves qui maillent la cure.

    Dans un rve, le compagnon de D. lui dit que la mort la djfrle elle, une fois, une mort blanche et quelle va encore la rencon-trer ; elle lui demande, pour en finir plus vite, de ltrangler et ajoutequil ne sera pas inquit car cest un acte de gnrosit.

    Autre rve : Elle est dans une pice immense avec des sculpturescomme des tombeaux. Salle dgyptologie o moi, lanalyste, jaidress mon lit (divan ?). Je lui parle de mes bijoux en ambre, beautfragile dont on est responsable. Bague et ambre lui voquent un ct

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