JOURNEE PETITE ENFANCE TOULON 2015 - Textes · Le nouveau né sort de la cavité amniotique...

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Association ANTHEA Journée de la Petite Enfance de Toulon Jeudi 29 Janvier 2015 Pleurer … Communications des conférenciers

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Association

ANTHEA

Journée de la Petite Enfance de Toulon Jeudi 29 Janvier 2015

Pleurer …

Communications des conférenciers

Les pleurs dans le développement de l’enfant Mélodie Beaumont, pédopsychiatre

L’étude des pleurs chez le bébé permet d’approcher une compréhension de l’origine des pleurs chez l’être humain Les pleurs peuvent être envisagés comme l’expression d’un lien: en tant que manifestation émotionnelle ils sont un pont entre le corps et le psychisme, mais créent aussi un lien empathique entre les êtres. Ils sont un lien entre l’adulte et l’enfant qu’il a été.

1. Les pleurs chez le bébé de zéro à deux an : description chronologique

Nous allons partir d’une revue des capacités sensorielles du fœtus et du nouveau né afin de situer les pleurs du nouveau né et de l’enfant plus grand dans une perspective développementale.

a. continuité entre les perceptions intra utérines et aériennes : les compétences du nouveau-né:

Les travaux scientifiques démontrent chez le fœtus en fin de gestation un certain fonctionnement sensoriel et perceptif : il perçoit la lumière extérieure, les sons, des odeurs, est sensible aux perceptions tactiles, répond aux stimulations vestibulaires (inclinaisons ou déplacements rapides du corps) (Granier-Deferre et Schaal). Il existe donc déjà une interaction prénatale avec le milieu. Il a été montré que le nouveau né semble conserver un sentiment de familiarité avec les perceptions reçues régulièrement avant la naissance :

- Le nouveau né montre une préférence pour la voix de sa mère par rapport à une autre voix humaine. Une séquence de basson de Pierre

et le loup de Prokofiev est reconnue par le bébé qui l’a déjà entendu plusieurs fois avant sa naissance, ce qui n’est pas le cas du bébé qui l’entend pour la première fois (expérience de Feijoo de 1981 citée par Delaroche).

- Le nouveau-né de 3 jours s’oriente préférentiellement vers l’odeur du liquide amniotique par rapport à une odeur témoin. Lorsqu’il est confronté à un choix entre son liquide amniotique et un liquide amniotique non familier, il s’oriente plus rapidement et plus longuement vers le sien (Schaal et coll.). Cette orientation préférentielle montre à la fois que le cerveau fœtal traite et mémorise les caractéristiques individuelles du milieu prénatal, et que le cerveau néonatal discrimine deux stimulations complexes qualitativement proches et commande l’orientation vers la plus familière.

- Des nouveau-nés de 4 jours, dont les mères ont consommé de l’anis pendant les deux dernières semaines de grossesse, manifestent une préférence stable pour cette odeur par rapport à une autre de référence ; en revanche, les nouveau-nés témoins, dont les mères n’ont jamais consommé d’anis, expriment soit de l’indifférence, soit de l’aversion vis-à-vis de l’odeur d’anis (Schaal et coll., 2000).

Cette capacité du cerveau fœtal à mémoriser et reconnaître des stimuli sensoriels (arômes, mélodies) rend certaines caractéristiques de l’environnement postnatal prédictibles pour le nouveau-né, dans la mesure où ces mêmes entrées sensorielles sont émises par – ou autour de – l’organisme maternel. Les arômes du liquide amniotique sont transmis au colostrum et au lait, de même que la voix maternelle entendue

dans le contexte utérin continue d’être émise. Enfin, le fœtus, sensible aux déplacements maternels, pourrait en retenir certaines caractéristiques, comme le rythme habituel de la marche. (Granier-Deferre, Schaal)

b. Appétence pour la relation humaine :

Au delà de cette évidence que le nouveau né a besoin des adultes qui l’entourent pour vivre, on observe que le bébé est sensible à la relation humaine : - Quelques minutes après la naissance, les bébés manifestent une préférence pour un dessin représentant schématiquement un visage humain par rapport à un autre dessin (Jonhson, 1991). Quelques jours après la naissance, il manifeste une préférence pour le visage maternel par rapport à un autre visage (Pascalis, 1995). Farroni et al. ont mesuré la préférence de nouveau-nés pour des visages ayant différentes orientations du regard. Ils observent que les nouveau-nés préfèrent le regard direct au regard détourné. Etre le centre de l’attention et établir des contacts avec l’autre semble être ce qui compte au départ. - Chez les enfants nés prématurément, le portage peau à peau a été étudié : la durée de sommeil augmente de façon significative chez les bébés portés en peau à peau par comparaison au sommeil dans l’incubateur (Bauer, et al., 1998). Par ailleurs, il a été montré que les bébés portés en peau à peau avaient une meilleure organisation du sommeil au voisinage du terme avec des périodes de sommeil calme plus longues et pour corollaire de meilleures capacités d’organisation et d’habituation (Feldman, et al., 2002 ; Feldman, et al., 2003).

c. les pleurs du nouveau-né :

Des recherches ont trouvé des constantes dans les pleurs normaux des premiers mois de la vie des enfants (Barr) : la quantité générale de pleurs quotidiens augmente jusqu’au deuxième mois, puis à diminue et à se stabiliser vers l’âge de trois à cinq mois ; plusieurs accès de pleurs par jour sont inattendus et imprévisibles et résistent sont inconsolables ; le nourrisson semble souffrir, même quand ce n’est pas le cas ; les accès de pleurs durent plus longtemps qu’à n’importe quel âge parfois une heure ou deux ; les pleurs ont tendance à se concentrer en fin d’après-midi et dans la soirée.

La grande majorité (plus de 95 %) des pleurs entrent dans le cadre d’un développement normal, sans aucun lien pathologique. Les pleurs précoces font donc partie du développement normal du nourrisson. Le nouveau né a peu de moyens de communiquer avec sa mère : ses mouvements peuvent l’informer, mais les cris sont le seul mode de communication quand les parents sont à distance, avant que l’enfant enrichisse ses modes de communication (mimique, babillage). Comme l’indique J. Israël, « le langage du corps va se développer progressivement au cours des premiers mois, il précède de beaucoup la parole. Les

pleurs sont nécessaires, ils expriment des besoins absolus et indiscutables et sont inévitables. »

Le nouveau né sort de la cavité amniotique entourée par le placenta, dans laquelle il était nourri en continu par l’intermédiaire du cordon ombilical, pour se retrouver à l’air libre, sans équilibre, sans repères proprioceptifs. Il doit s’adapter à un nouvel environnement physique et sensoriel (les sons et la lumière sont plus vifs, il découvre la sensation de gravité, de froid, de faim, etc). Il va avoir besoin d’être protégé des

stimulations sensorielles violentes, d’être nourri mais aussi de se sentir contenu. Pour cela, les bras ou les habits, tout ce qui le contient et l’entoure, le rassure. Les pleurs du nourrisson en bonne santé peuvent être le signe d’une détresse, d’un inconfort lié à des désagréments sensoriels, à la faim, au sommeil. Le bébé a certaines attentes sensorielles (Schaal et al.), c’est à dire une prédisposition à accueillir certaines stimulations qui vont l’apaiser. Pour Myriam David : « pendant les premières semaines, l’enfant est dans un état de nébuleuse psychique qu’il nous est difficile de nous représenter. (…) Il n’a pas aucune notion du temps ni de l’espace ; il vit seulement dans le présent, ne peut ni prévoir, ni se souvenir ; il ne se distingue pas du reste du monde. Il lui faudra longtemps pour savoir ce qu’est son corps, pour en distinguer les diverses parties, savoir qu’elles font partie de lui. Il est l’objet de sensations diffuses de bien être ou de malaise. Entièrement absorbé en lui même, il est dans un état de « tout ou rien » : tantôt le bien-être semble l’envahir dans a totalité ; tantôt le malaise a ce même caractère de malaise total, insupportable. » Pour évoquer ces états de malaise, Winnicott parle d’ « angoisses archaïques » qui menacent le sentiment d’existence même du bébé, son « sentiment de continuité d’être ». En alertant l’adulte, les pleurs vont permettre grâce à la réponse de celui-ci, l’instauration d’un bien être sensoriel (par exemple le fait de téter et le sentiment de réplétion) et relationnel (contact, regard, paroles). Les pleurs sont un mode efficace de communication et favorisent le début des interactions entre le bébé et ses parents. Ils permettent donc de faire connaissance durant les premiers jours qui suivent la naissance. La conséquence extrême la plus dangereuse pour le nourrisson est la maltraitance ou la négligence, et surtout le type de maltraitance que l’on appelle « syndrome du bébé secoué ».

En conclusion provisoire : - les pleurs du nourrisson sont dans la majorité des cas normaux, développementaux. On retrouve des durées de pleurs équivalente quelle que soit les habitudes culturelles de maternage. Dans l’ethnie des Kung San (Afrique du Sud) où les mères sont en contact constant avec leurs nourrissons, les allaitent quatre fois par heure et font tout ce qui devrait apaiser le bébé, le modèle de pleurs précoces accrus puis de diminution des pleurs est également observé (Barr). - Répondre aux pleurs de l’enfant lui permet de construire un sentiment de sécurité affective. Une étude de Mary Ainsworth (1974) montre qu’à partir de 3 mois, les bébés dont les pleurs ont suscité une réponse rapide de la mère depuis la naissance ont développé une large gamme de nouveaux moyens de communication (mimiques, vocalisations,..), mais aussi que la fréquence des pleurs est réduite durant le reste de la première année. Une étude de D. Candilis-Huisman, retrouve les mêmes résultats. - Entre 0 et 3 mois, il existe une « bulle mère bébé « qui protège le nouveau né. Après 3 mois, il est nécessaire que cette bulle commence à s’ouvrir pour permettre un début d’ouverture au monde et d’autonomisation du bébé. d. à partir de 3 mois : il existe une meilleure régulation des besoins physiologiques et les pleurs sont plutôt réservés à de véritables difficultés (faim douloureuse, autre douleur) qu’aux moments d’inconfort. La mère commence à se séparer du bébé, c’est souvent le moment où elle reprend son travail. C’est le début d’une activité de représentation: le bébé commence à pouvoir anticiper sur le futur proche grâce à la création d’habitudes, et à

supporter l’absence des parents car il peut en conserver une représentation intérieure. Albert Ciccone décrit des expériences de discontinuité chez le bébé (lever, repas, journée en crèche, retrouvailles avec les parents, etc), expériences dont la rythmicité est constitutive de la sécurité de base, mais dont l’incohérence (absence de régularité dans le changement) fabrique du chaos psychique. Le psychanalyste Erik Erikson va dans le même sens : « Le propre de l’homme est d’avoir une longue enfance et de l’homme civilisé est d’avoir une enfance toujours plus longue. Cette longue préparation fait de l’homme un virtuose technique et mental, mais elle lui lègue aussi pour la vie un résidu d’immaturité émotionnelle […] La première réussite sociale du bébé est donc son acceptation de laisser sa mère s’éloigner de sa vue sans manifester d’anxiété ou de colère exagérée, parce qu’elle est devenue une certitude intérieure autant qu’une prédictibilité extérieure. Une telle assurance, une telle continuité, une telle identité d’expérience crée un sentiment rudimentaire de l’identité du moi […]. »

Le langage va prendre plus de place dans la relation : les mots vont permettre à l’enfant dont le système physiologique est plus mature et qui supporte mieux les petit inconforts, de différer ses besoins. La mère peut dire « tu as faim » ou « je suis là ». La berceuse va progressivement remplacer le bercement des bras. Les mots et les sons soutiennent l’enfant et l’aident à dépasser son malaise. En conclusion provisoire : cette période correspond à un début d’autonomisation, car le bébé intègre la notion de régularité qui lui permet de se passer de ses parents pendant quelques heures. Il est encore très immature et n’a pas la notion d’être un individu. d. après 6 mois, le bébé prend peu à peu conscience d’être distinct de sa mère et de son environnement. Il commence à distinguer ce qui est lui et ce qui n’est pas lui mais aussi les personnes connues des inconnus. Les capacités de représentation se complexifient : il anticipe de mieux en mieux, comprend ce qu’il va se passer dès les préparatifs d’une action qu’il connaît (sortir se promener, préparer le repas, aller se coucher…) C’est aussi l’étape essentielle pour accéder au stade du miroir : à 5 mois, bébé sourit à son image, à 6 mois il va se retourner vers son père ou sa mère, quand il est dans leur bras et les voit dans la glace, mais ce n’est qu’à partir de 9 mois qu’il va se reconnaître lui-même ». Pour Lacan, ce « stade du miroir » est capital car c’est la première forme visible que l’enfant perçoit de lui-même, ce qui va lui permettre de se nommer et d’exister en tant que sujet, de dire JE, et à partir de l’intégration de cette « matrice symbolique » de prendre son destin en mains. « Ses pleurs traduisent la peur, le manque, et doivent être considérés comme le langage normal d’un ressenti et d’une incompréhension. Le simple fait d’y répondre par une présence physique ou verbale, voire les deux, permet au bébé de ne pas se sentir isolé dans la difficulté. S’il continue de pleurer après la véritable séparation, que ce soit au coucher, lorsqu’on le laisse seul dans sa chambre, à la crèche ou en halte-garderie, cela ne veut pas dire qu’il est traumatisé pour autant. La plupart du temps, il va se calmer rapidement et accueillera les parents avec le sourire dès qu’il les reverra ; avec ses pleurs, il exprime des émotions. » (J. Israël) En conclusion provisoire : à partir de 6 mois, l’enfant prend peu à peu conscience d’être un sujet distinct de sa mère et de son environnement. Les pleurs viennent signaler cette nouvelle capacité de percevoir la séparation. e. les pleurs entre 1 et 2 ans (M. David):

L’enfant prend conscience de ce qu’il peut faire : il maitrise sa motricité, il comprend ce qu’il se passe autour de lui, il peut prévoir la

conséquence de certains de ses actes. La maîtrise de soi et de l’entourage, l’autonomie, deviennent des besoins psychologiques pressants. Il prend conscience que ses parents ne le laissent pas faire tout ce qu’il veut et veulent lui faire faire des choses qu’il ne veut pas. Il éprouve ce sentiment d’opposition mais ne le raisonne pas et peut ressentir une rage envers sa mère dont il pense qu’elle éprouve le même sentiment envers lui. Les pleurs seront plutôt liés à la frustration. Les parents vont devoir permettre à l’enfant d’exprimer cette frustration, mais aussi savoir le protéger par une attitude sachant imposer des limitations pour faciliter son rapport au réel. L’enfant peut alors développer sa capacité à supporter des frustrations, et accéder à l’idée que la relation est un échange, ainsi qu’aux sentiments d’altruisme et de coopération. Il accède à une première forme d’empathie vers 1 an et demi, en reconnaissant que l’autre peut avoir des désirs différents des siens. 2. Les catégories de pleurs du bébé chez Winnicott Winnicott, pédiatre et psychanalyste anglais, décrit lui 4 types de pleurs chez le bébé : - Les pleurs de satisfaction qui correspondent à l’expérimentation par le bébé de ses capacités à utiliser sa respiration et à faire du bruit. - Les pleurs de douleur, la douleur pouvant être due à la faim ou à d’autres raisons pathologiques ou pas. Ces pleurs évoluent vers des pleurs d’inquiétude ou d’anticipation de la douleur quand il commence à utiliser son expérience pour comprendre l’environnement : par exemple, si on l’allonge sur la table à langer, il pleure car il sait qu’il va être déshabillé et va quitter sa chaleur confortable, avant même que cela n’arrive. - Les pleurs de colère : pour Winnicott, « il est sain que le bébé apprenne à connaître l’étendue de sa rage : il hurle, donne des coups de pied, s’il est assez grand il mord et griffe, peut cracher, vomir. Pendant quelques minutes, il a réellement l’intention de détruire les personnes ou les choses, ou de leur faire du mal. C’est là qu’il gagne quelque chose. Car si un bébé pleure de rage et éprouve le sentiment d’avoir détruit tout le monde, et si néanmoins tous les gens autour de lui restent calmes et entiers, cette expérience renforce son aptitude à comprendre que ce qu’il éprouve comme vrai n’est pas nécessairement réel. » Pour lui, « les cris de colère signifient qu’il croit en son parent, mais qu’il est déçu et espère le changer. Un bébé qui a perdu la faculté de croire ne se met pas en colère, il peut pleurer d’une manière triste et désillusionnée, ou avoir des stéréotypies (se cogner la tête contre l’oreiller ou contre le mur par exemple). Ces pleurs sont généralement liés à une frustration.

- les pleurs de chagrin : pour illustrer ces pleurs, il utilise un cas clinique : un petite fille de 18 mois, adoptée à l’âge de 4 mois, dont la mère part quelques jours en vacances. La petite fille ne manifeste rien pendant cette période, mais au retour de sa mère, pleure dans ses bras. Il explique cette réaction par la colère ressentie par l’enfant de l’absence de la mère, colère qu’elle a fini par croire qui était la raison pour laquelle la mère était partie. Les pleurs expriment la culpabilité d’avoir pu être en colère contre la mère, d’avoir été « mauvaise ». Si la rage est une réaction plus ou moins directe à la frustration, le chagrin implique une évolution complexe dans l’esprit du bébé. Ces pleurs, très complexes à analyser, sont la marque qu’il éprouve un sentiment de responsabilité vis à vis de ceux qui l’entourent. « Il a gagné sa place dans le monde et n’est plus une écorce qui flotte sur les vagues. » Ces pleurs sont l’équivalent d’avant le langage des mots « merci » et « pardon », c’est à dire des marques d’expression de la reconnaissance et du remord. Les pleurs d’un bébé peuvent donc s’entendre comme des signes positifs de ses efforts pour s’adapter à une nouvelle situation. Chercher à

faire taire un bébé, pour le faire taire et non pour l’aider à se sentir mieux, c’est l’inciter à retenir son émotion, au lieu de l’accompagner et

de le rassurer.

Les pleurs sont la marque de l’évolution du bébé, de sa maturation cognitive et psychologique. 3. Les pleurs dans l’interaction parents-enfant : concepts psychopathologiques Les pleurs sollicitent la sensibilité des parents aux besoins de leur enfant. Dès la naissance voire même déjà pendant la grossesse, une valeur affective est attribuée aux manifestations du bébé. Comme l’explique Marie Léonard-Mallaval, « On s’adresse au nouveau-né, on lui parle, on apprécie ou pas ce qu’il manifeste. On en fait le récit à la parentèle et au réseau amical. Une narration se met à l’œuvre et, partant, on construit une réputation à ce bébé. On le qualifie de gentil ou pas. C’est bon, beau et bien, quand il ou elle tète sans difficulté, quand il dort, gazouille, sourit, suit du regard, imite la langue tirée, etc. Ce n’est pas bon ni beau quand il ou elle pleure, rage, geint : on lui fait « chut ! », pour lui signifier que cela n’est pas bien et pour lui faire même comprendre qu’il est méchant. On crispe alors les muscles en le tenant de façon moins douce, on le berce avec trop d’énergie, dans l’exaspération que les pleurs peuvent provoquer. On prête à ce pauvre bébé l’intention, presque la volonté d’être insupportable, et il faut donc déjà le punir ». Le risque est d’attribuer au bébé une intentionnalité dont il n’est pas encore capable. Toute la nuance va se situer dans la capacité d’empathie des parents envers leur enfant (sensibilité à ses besoins), différente des pensées projectives qui prêteraient à l’enfant des intentions particulières (qui sont alors le reflet de la problématique personnelle des adultes). Plusieurs concepts permettent de comprendre comment les parents sont impliqués dans la régulation émotionnelle du bébé. Ces modèles se complètent plutôt qu’ils ne s’opposent. Wilfred Bion parle de la « rêverie maternelle » où la mère prête à son bébé, même avant la naissance, des pensées, des émotions et des croyances dans un processus qui crée un lien précoce entre les deux. Pour Bion, les éléments « bêta » issus du bébé doivent être désintoxiqués par la mère, par sa fonction alpha, sa capacité de rêverie, pour qu’il puisse tirer parti de son expérience émotionnelle initialement inaccessible pour lui. En clair, les données brutes, non mentalisées et encore moins structurées ou pensées du vécu du bébé sont reprises sur un mode cohérent par la mère, qui en mettant de l’ordre aide l’enfant à profiter d’une expérience vécue lue clairement afin que cela lui serve. Sous le terme de préoccupation maternelle primaire, D.W. Winnicott décrit cliniquement la période particulière, de quelques semaines précédant l’accouchement et le suivant immédiatement, pendant laquelle la mère se montre tout spécialement « capable de s’adapter aux tout premiers besoins du nouveau-né, avec délicatesse et sensibilité ». Elle capte des signaux venant de l’enfant qu’elle réussit à interpréter avec une grande acuité. Cette sorte d’indifférenciation émotionnelle entre la mère et l’enfant, ce repli de la mère proche d’un état de dissociation dure pendant les semaines qui suivent la naissance avant de disparaître. D. Braunschweig et M. Fain appellent « censure de

l’amante » la resexualisation par la mère d’un certain nombre d’objets autres que le bébé (compagnon, profession…), qui s’accompagne d’un désinvestissement relatif de l’enfant. Ce désinvestissement partiel est éventuellement douloureux, mais structurant pour lui, puisqu’il l’amène à créer et à inventer des moyens de substitution propres à le faire entrer dans une phase de dépendance désormais relative (Monique Bydlowski). Concept voisin, pour Winnicott, la mère doit être « suffisamment bonne », c’est à dire une mère fiable et qui s’adapte aux besoins du bébé, mais va progressivement s’en écarter, permettant à l’enfant d’être « désillusionné », c’est à dire d’avoir accès au fait que ses désirs ne sont pas

la réalité, et que sa mère est distincte de lui.

Esther Bick a développé une méthode d’observation des nourrissons au sein de leur environnement familial. Elle décrit la capacité à contenir de la mère, qui doit contenir les angoisses de son bébé. La théorie de l’attachement de John Bowlby développe l’idée suivante : « si chaque fois que l’enfant a été dans la détresse, les personnes qui l’élèvent ont répondu de manière adéquate (c’est-à-dire rapidement et avec la volonté d’apporter de manière sensible, réconfort et consolation) à ses besoins d’attachement, l’enfant développe deux images mentales : d’une part une image de l’autre comme digne de confiance, disponible, sur qui l’on peut compter pour être aidé, trouver des solutions et, d’autre part, une image de Soi, complémentaire ; un Soi digne d’intérêt ayant de la valeur et digne d’amour puisque même en situation de détresse ou d’alarme, on a toujours répondu à l’enfant, et qu’il s’est senti reconnu en tant que tel » (Nicole Guedeney). L’enfant développe également un sentiment d’efficacité personnelle puisque tous ses signaux ont reçu une réponse adaptée et rapide de l’environnement. Les pleurs du bébé, mais aussi ses capacités de succion, d’agrippement, son regard dirigé vers l’adulte, tous ces outils relationnels, stimulent normalement chez l’adulte donneur de soin le désir d’aider et de s’occuper du bébé. Les pleurs sont d’une importance primordiale dans le développement de l’attachement. Les chercheurs de l’attachement accordent une importance particulière à la sensibilité maternelle (soignant principal) pour qu’un attachement sécure s’établisse. Cassidy (1994), cité par Ibanez, considère que l’enfant apprend la régulation émotionnelle, qu’il élabore sa conduite pour s’accommoder à son environnement de soin et maintenir sa figure d’attachement proche. Cassidy identifie trois modes de régulation émotionnelle chez l’enfant reliés aux différences de sensibilité maternelle : 1. Quand les mères sont sensibles à toute la gamme d’émotions de l’enfant et que leurs réponses sont adaptées aux signaux de l’enfant, celui-ci peut exprimer toute la gamme d’émotions librement, et ce faisant favorise la proximité de la mère ; 2. Face à des mères repliées sur elles-mêmes et émotionnellement non disponibles quand l’enfant est en détresse, l’enfant apprend à minimiser les effets négatifs en essayant d’éviter le rejet de la figure d’attachement ; 3. Face à des mères qui répondent de façon non adaptée aux émotions négatives, l’enfant apprend à augmenter son expression émotionnelle pour augmenter les probabilités de présence de la figure d’attachement. Ces trois modes de régulation émotionnelle de l’enfant sont en accord avec les différents styles d’attachement, sécure et insécure évitant et insécure ambivalent (ou résistant). Fonagy (Fonagy et Target, 2006) a développé le concept de fonction réflexive, correspondant à la capacité du parent à refléter, contenir, labelliser, interpréter et résoudre les émotions négatives de son enfant. Ceci n’est possible que si le parent considère son enfant avant tout comme un être distinct, doté d’intentions et d’états mentaux qui sont différents des siens mais dont il peut cependant deviner l’existence. Un exemple de mise en œuvre de cette fonction réflexive est le mirroring, décrit par Fonagy. Face à une expression de détresse de son bébé, l’adulte percevant ce malaise, reproduit par sa mimique et son intonation (registre émotionnel infra-verbal) une émotion proche de celle de l’enfant, mais en la modifiant légèrement. Cette réponse en miroir déformant permet que l’enfant sente son émotion identifiée et comprise par un adulte qui ne vit pas cette émotion (puisqu’il la déforme).

Daniel Stern décrit l’accordage affectif qui consiste en un comportement, support du partage transmodal (auditif, visuel, tactile) de l’expérience subjective, de l’affect. « l’accordage affectif est l’exécution de comportements qui expriment la propriété émotionnelle d’un état affectif partagé sans imiter le comportement expressif exact de l’état interne » . Par exemple, la force de la vocalisation maternelle peut égaler celle d’un mouvement brutal du bras fait par le nourrisson. Au contraire de l’empathie, l’accordage n’implique pas la médiation de processus cognitifs. Le bébé a lui aussi la faculté de se synchroniser à l’adulte : il tend à synchroniser ses vocalisations, ses regards, et aussi ses mouvements, à la voix maternelle. À 4 mois, le bébé articule le rythme de ses vocalisations (silence, prise de parole, pause…) à celui des vocalisations de l’adulte, et réciproquement. À 6 semaines, les bébés vocalisent encore peu, mais régulent l’interaction à travers le regard ou bien l’évitement du regard. Nous pouvons conclure de ce panorama que la régulation des émotions négatives est d’abord un phénomène interpersonnel, qui implique

l’interaction parent-enfant et ne devient que secondairement intrapsychique. La régulation des émotions négatives chez l’adulte repose sur

cette base de construction interpersonnelle, mais est aussi liée à l’histoire et aux compétences propres du sujet. 4. Les nourrissons difficiles Certains enfants pleurent plus que d’autres, sont plus difficiles à calmer. Beaucoup d’enfants qui consultent en pédopsychiatrie on été difficiles étant bébés, selon les parents. Des études (revue de la littérature par Stifter, 2005) ont montré une corrélation entre les difficultés pendant la petite enfance (bébés qui pleurent beaucoup, difficiles à calmer) et les problèmes de comportement scolaire et d’adaptation à l’adolescence. Deux choses sont importantes dans ces résultats: 1) ce ne sont pas tous les nourrissons difficiles qui ont manifesté des problèmes de comportement ultérieurs; et 2) dans la plupart des études, le tempérament et les problèmes de comportement étaient évalués par les parents, ce qui soulève la question du biais des répondants. Cela soulève la question de l’ajustement : l’enfant agité est il source des difficultés de sa mère ou la mère est elle peu compétente et moins stimulante avec comme résultat un enfant agité ? Des études montrent que les mères de nourrissons difficiles seraient moins réceptives et qu’elles manifesteraient des niveaux moins élevés de comportement maternel positif (contact visuel, physique, stimulation, comportements apaisants). Ces données suggèrent que le fait de s’occuper d’un nourrisson agité difficile à apaiser impose un stress qui en retour peut influencer les résultats développementaux de l’enfant. Cette question soulève l’importance de la prévention et donc du suivi des situations d’interactions perturbées. Il existe d’ailleurs des études qui montrent que les interventions qui modifient les attitudes et les comportements amortissent les effets négatifs du tempérament difficile. 5. Qu’en est –il du bébé qui ne pleure pas ? Un bébé qui ne pleure jamais (vraiment jamais) est suspect d’être déprimé ou d’avoir une forme d’autisme. La dépression chez le bébé est une forme de retrait d’investissement pour l’environnement ; comme si son intérêt pour la vie et les autres disparaissait et que le bébé devenait indifférent à tout, comme une anesthésie affective. Cela peut se manifester par un retard de développement, un retrait affectif et différencier ces tableaux de l’autisme est parfois difficile et c’est l’évolution qui va préciser le diagnostic.

L’expérience du still face (développée par Tronick et l’équipe de Boston en 1975) est une situation expérimentale cherchant à mimer l’interaction d’un nourrisson avec une mère déprimée. On demande à la mère de conserver un visage impassible face à son bébé durant plusieurs minutes. Dans l’expérience des interactions différées (développée par Murray et Trevarthen en 1985, l’enfant est mis face à un écran sur lequel un film montrant le visage de la mère est projeté, les expressions de la mère n’étant pas coordonnées avec les attitudes de l’enfant. Dans les deux cas, le bébé va chercher à conserver une interaction avec la mère, puis manifester de la détresse, et enfin se retirer de la relation et se replier sur lui même. Les interactions mère-enfant sont décisives pour un bon développement affectif. Dans la dépression du post-partum, ces interactions sont profondément affectées : les mères dépressives passent beaucoup moins de temps avec leurs bébés et, dans les quelques moments de rapprochement, elles manifestent peu d’expressions positives et plus d’expressions négatives que les mères non dépressives. A leur tour, les bébés des mères dépressives vont répondre beaucoup moins aux expressions faciales de l’autre et vont spontanément produire plus d’expressions négatives que positives. Cela montre bien que, même s’ils sont capables de reconnaître et produire précocement des expressions faciales, les enfants peuvent perdre ces capacités si ces activités ne sont pas renforcées par un comportement approprié de la part de l’entourage. (Gliga) 6. L’empathie : la réaction d’autrui aux pleurs - chez le bébé : En 1970, Marvin Simner a montré que des nouveau-nés de 5 jours pleuraient plus fort en entendant des pleurs de bébés de leur âge que d'autres bruits. Plus tard, en 1987, une série d'études de Grace Martin et Russel Clark a établi des limites à ce phénomène : la contagion ne se fait pas avec des pleurs de chimpanzé (aux vocalises pourtant proches). Plus intéressant encore, les bébés ne réagissent pas à leurs propres pleurs enregistrés ni aux pleurs d'un bébé plus âgé. Ces résultats sont importants parce qu'ils démontrent que le nouveau-né possède les deux aspects essentiels à l'expression de l'empathie : le partage d'émotions avec les personnes avec lesquelles il peut s'identifier et la distinction implicite entre soi et autrui. -chez l’adulte : Nos capacités d'empathie sont par ailleurs modulées par notre motivation. La plupart du temps, nos capacités empathiques sont inhibées. Une même situation peut déclencher une réponse empathique ou antipathique selon qu'elle est vécue (ou simplement rapportée) par un membre d'un groupe social auquel nous sommes affiliés ou non. Enfin, il n'est pas rare de rencontrer des personnes qui manifestent d'avantage d'empathie pour leur animal (ou leur voiture) que pour un enfant. En conclusion : Les pleurs construisent la relation entre le bébé et ses parents et leur évolution est la marque de son bon développement psychique. En cela ils constituent quelque chose de profond et d’indispensable. Quelquefois les parents se plaignent de la quantité excessive des pleurs, parfois de leur tonalité désespérée, parfois de leur horaire (la nuit) parfois de leur dimension inconsolable-Parfois encore ce sont les parents qui craquent par manque de patience, de sommeil ou de répit. N’est-ce pas par la compréhension du sens des pleurs que les professionnels de la petite enfance peuvent aider les parents à mieux ajuster leurs réponses ?

Bibliographie :

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Les douces violences à l’origine des pleurs de l’enfant ? Christine Schuhl, Educatrice de jeunes enfants, Rédactrice en chef du magazine « Métiers de la petite enfance »

- Un bébé qui pleure : tout le monde ne réagit pas au même moment.

- Sensibilités différentes

- Niveau de tolérances différentes

- Réponses différentes

- Qui commence ?

- Et si c’était l’adulte qui ne comprenait pas ce bébé qui communique ?

- Exemple PGV

- L’adulte peut être focalisé sur ses propres attentes,

- Son propre rythme

- Sa perception… d’adulte

- Le bébé ne comprend pas comme un adulte

- Il n’a pas de capacité d’analyse mais des capacités statistiques

- Beaucoup de clichés autour des pleurs

- Si je lui réponds : je cède (rapport de force), l’E tyran, plus d’autorité, de cadre

- Beaucoup de situations de douces violences sont à l’origine des pleurs

- Mais beaucoup de pleurs déclenchent des DV

- Les entend-on ?

- Comment les considérons-nous ?

- Comment les parle-t-on ?

- Comment les analysons-nous ?

- Aucun pleur n’est anodin

- Tous les pleurs doivent nous alerter

- Apprenons à regarder le contexte : que se passe t-il ?

- Où est l’adulte ?

- Où sont les enfants ?

- Qu’est-ce qui bouge, qui reste stable ?

- Que voit le bébé ?

- Peut-on prendre en considération ce bébé dans un ici et maintenant dégagé de toutes les influences des transmissions ?

- Accepter que l’enfant nous guide

- Accepter de lui proposer nos bras, notre présence

- Le tact

- Lui montrer que l’on accepte ses refus, ses colères, ses demandes.

- Toutes ces phrases assassines :

- Arrête de pleurer c’est rien !

- Quand tu te seras calmé je viendrai (alors qu’il est dans un réel désespoir)

- Quel braillard celui-là

- Aller ! encore tu pleures, tu ne sais faire que ça !

- Vont avec ces mots, les gestes fermes, rapides, le portage forcé, les mouchages invasifs, la main sur la bouche du bébé, les doudous

sur les yeux…

- Les soupirs, le vocabulaire, les regards noirs…

- Notre position de professionnel n’est pas une position parentale.

- Nous ne nous inscrivons pas de la même manière dans le rapport éducatif

- Notre sensibilité à l’enfant doit être sans faille

- Nos réponses adaptées, précises, individualisées jamais banalisées.

- Les pleurs sont un de ces signaux qui nous démontre combien le bébé nous dit qu’il n’est pas bien, que ce qu’il vit ne lui convient pas.

- Ne cherchons pas à tout expliquer, à tout comprendre, acceptons ce signal de manière très simple, comme un appel :

- J’ai besoin de toi, ici, maintenant… humainement !

- Réactions diff.

- sensibilité – tolérance

- Réponses

- Qui commence ? A

- Attentes A

- Rythme A

- Bébé comprend pas co. A

- Clichés pleurs

- DV – pleurs / pleurs-DV

- Q°

- Alerte

- Contexte

- Dégager influences des trans

- Bras

- Tact

- Accepte réaction

- Mots gestes, portage forcé…

- Inscrit diff rapport éducatif

- Pleurs signal

- Pas tout expliquer

- Appel : j'ai besoin de toi, ici, maintenant… Humainement !

Les pleurs intenses et prolongés et le syndrome du bébé secoué Marie-Bernadette Esterni-Coggia, Médecin de crèche

Vous savez quand les histoires finissent bien, on dit : « ils vécurent heureux, se marièrent et ils eurent beaucoup d’enfants » Mais personne ne dit si ces enfants pleuraient . . . . ou pas et qui s’en occupait. Les bébés ont toujours pleuré :

Dans certaines représentations traditionnelles on dit même que lesnouveau-nés seraient des migrants, des êtres de passage entre deux

mondes :celui des limbes, des ancêtres et. . . . le nôtre. Un être entre deux, qui peut repartir d’où il vient, qui peut mourir ou être possédé par des esprits malfaisants ou encore tomber malade. Alors quand le bébé pleure, il se met en danger parce que ses pleurs signalent aux prédateurs possibles (les animaux sauvages ou domestiques) et aux esprits maléfiques, qu’un petit est là, vulnérable et sans défense. C’est pourquoi, on ne laisse pas pleurer un bébé, on essaie tout pour le calmer, on le prend aux bras, on le berce, on le met au sein, on lui donne à manger. Et aujourd’hui en 2015, les bébés pleurent toujours:

Mais on va osciller entre plusieurs attitudes : • Le laisser pleurer parce que ça lui fait les poumons, ou qu’il en a besoin, ou bien ça le défoule. . . . mais ça c’est le jour. • Parce que la nuit, on ne va pas le laisser pleurer à cause des voisins, du grand qui doit aller à l’école, de papa qui doit aller travailler lui, bref de tout le monde qui a besoin de dormir !

• Et « on va tout essayer » sans vraiment prendre le temps de s’interroger sur la signification de ces pleurs. Quand un couple désire un enfant,

Qu’y a-t-il derrière le projet des parents d’avoir un enfant ? Le désir de pouponner, de câliner, de remplir une maison qui paraît vide de cris et de rires d'enfants ?

Le désir de transmettre des valeurs, de donner un sens à sa vie, à son couple, de l’inscrire dans une filiation, dans une histoire familiale ?

On parle même de droit à l’enfant. . . et il faut avoir rencontré la détresse des couples infertiles et leur mobilisation en quête de l’aide de la médecine et de la Procréation Médicalement Assistée pour se faire une petite idée de ce que peut être le désir d’enfant. Les besoins du petit d’homme vus par les futurs parents

Mais ça c’est le projet et quand il est en route ce petit d’homme et que l’on interroge les futurs parents sur ses besoins, On a d’abord des réponses comme : o Manger o Dormir

o Etre propre o Pas trop chaud, pas trop froid o Des soins s’il est malade, un bon docteur, o On a souvent : il a besoin d’une ambiance calme et sereine ! • Ensuite viennent le jeu, la stimulation, l’éveil. . c’est pourquoi 90% des parents souhaitent une place en crèche pour leur bébé ! • Et puis l’amour, la tendresse de ses parents et là c’est plus difficile à préciser . . . il faut souvent les pousser un peu pour qu’ils parlent de câlins, de caresses, de regards, de voix, d’odeurs. . . • Pratiquement jamais spontanément : o le besoin de sortir, de changer d’air o le besoin de bouger à son aise, sans contrainte. On sait bien que ce n’est pas si facile de devenir parents et c’est toujours avec le 1° enfant qu’ils apprennent, c’est lui qui va « faire la trace ». On a beau suggérer de faire le 2° enfant d’abord, très peu nous écoutent ! Alors de quoi a-t-il vraiment besoin ce petit ?

• Bien sûr de manger mais pas tout le temps et pas chaque fois qu’il pleure, • Bien sûr de dormir mais pas forcément de s’endormir au sein ou aux bras ou encore dans le lit de maman. • Bien sûr qu’on l’éveille mais quand, lui est disponible pas forcément quand papa ou maman rentre du travail ; on doit respecter ses rythmes de sommeil et d’éveil, • Bien sûr qu’on assure sa sécurité physique : on ne lâche pas un bébé s’il n’est pas en sécurité (lit à barreaux, parc, siège adapté pour les transports). • Bien sûr d’être propre (la couche, le bain) et d’être soigné quand il est malade. Mais il a surtout besoin (et vous le savez bien, vous les professionnels de la petite enfance), qu’on lui parle, qu’on le touche, qu’on le regarde, qu’on le caresse, qu’on le prenne aux bras, qu’on le rassure, bref, qu’on assure sa sécurité affective. Et on sait maintenant qu’il semble que le moment où un bébé est le mieux de toute sa vie, c’est bien à la fin de la grossesse, quand il est à peu près fini, qu’il n’a pas froid, pas faim, qu’il n’est pas enrhumé, qu’il n’a pas de coliques, qu’on ne lui a pas fait un vaccin. . . mais qu’il est : • dans un environnement (même un peu à l’étroit), • où il entend des bruits qu’il connaît (le coeur et les gargouillis de l’intestin de maman), • où il est contenu dans l’utérus recroquevillé en position foetale, • et qu’il touche de partout : de la tête, des épaules, des fesses. . . C’est une sorte de « nirvana » qu’il va chercher à reproduire chaque fois qu’il sera perdu. . . Il n’y a qu’à voir comment on s’installe, nous les

anciens foetus, quand on est malade : recroquevillé, en position foetale, calé contre des oreillers ou les coussins de la banquette et si quelqu’un nous gratte le dos. . . on a l’impression d’avoir un peu moins de fièvre ! Les compétences en communication du tout petit :

Le petit d'homme est un être de sensations et de communication avec des compétences qui ne demandent qu'à s'exprimer mais à condition qu’il soit mis dans un environnement adapté. Le développement affectif et relationnel du nourrisson est à la fois spécifique au « petit » de l’homme et intimement lié aux relations avec son entourage. La communication émotionnelle et affective de l’enfant existe

d’emblée chez le nouveau né. Elle est déterminante pour le développement et la vie psychique de l’enfant. La découverte par les parents des compétences de leur enfant va faciliter la mise en place de ces fameuses interactions où les signaux vont dans les 2 directions : le bébé est à la fois soumis aux influences de ses parents et entraîne chez eux des modifications en lien avec l’attachement précoce. Et en même temps, un bébé, c’est incroyablement attractif et il y a un plaisir spécifique dans cette communication avec le bébé. Et ce puissant mécanisme de l’attachement avec des forces extraordinaires qui poussent les mères (le plus souvent encore) vers les bébés est nécessaire à la survie de

l’espèce humaine

Concept d’individuation - séparation

C’est MALHER qui distingue nettement la naissance biologique immédiate avec la coupure du cordon ombilical, de la naissance psychologique

du bébé, celle qui va lui donner l’impression d’exister comme un être individualisé qui elle est d’apparition progressive et qui va évoluer au gré de ses acquisitions : • l’objet transitionnel, • ses déplacements autonomes, • son exploration des objets et de l’espace, • l’utilisation du langage, • les jeux symboliques. . Les réponses adaptées à ses besoins vont le rassurer dans les capacités de son entourage à prendre soin de lui. • Si les réponses sont adéquates, l’enfant va développer un attachement

sécure

o Base de sécurité o Image positive de lui même o Développement de nouvelles compétences o Capacité de se séparer o Capacité d’attendre o Capacité plus tard de répondre aux besoins d’attachement d’un plus petit. • Si les réponses ne sont pas adéquates : l’attachement sera insécure :

o Sans base de sécurité satisfaisante o Pas de confiance en lui ni en l’autre o Avec une image de lui même négative o C’est un attachement angoissé, ambivalent, évitant ou désorganisé.

Il est donc capital pour le petit d’homme, de bien s’attacher pour pouvoir bien se détacher ensuite.

Des moyens de communication limités :

Mais les bébés n'ont pas tout un arsenal de communication, ils n’ont pas de mail, de téléphone portable et ils ne parlent pas encore notre langue ; ils n’ont que les outils de la communication non verbale c. à d. les sourires, les mimiques, les grimaces, les gazouillis, les vagissements, la succion, les regards ++, l’agrippement et les pleurs.

Les pleurs du bébé sont donc un signal et décrypter ce signal pour pouvoir y répondre, demande de connaître les différents besoins d’un bébé. Et ce n’est pas évident de comprendre la signification des pleurs de son bébé. Sans compter sur les réflexions de l’entourage : • « Laisse le pleurer, ça lui fait les poumons », • « Ça lui forge le caractère », • « Laisse le, il te fait un caprice » (les bébés font toujours à leur mère : les dents, une angine, une otite !!!!) Et il y a 2 mythes qui ont la vie dure et à qui il faut ++ tordre le cou : • Celui du nouveau né tube digestif dont les pleurs ne seraient que des signes d’inconfort digestif, en lien avec la faim, les coliques, le trop plein gastrique ou la couche sale. • Nouveau né capricieux et manipulateur qui pleurerait pour obtenir ce qu’il veut en tyrannisant son entourage. Ces explications faussent la compréhension des pleurs du bébé, elles entraînent des réponses de l’entourage, non-seulement inadaptées mais aussi préjudiciables à l’adaptation sécurisée de l’enfant. Quand le bébé perçoit des menaces :

• Intérieures : faim, coliques, sommeil. . • Extérieures : froid, perte de repères. . . il va réclamer avec les moyens qu’il a, (des pleurs, de l’agrippement, une succion plus ou moins intense) : • Protection, • Réconfort • Consolation Il ne recherche qu’une seule chose : une sensation de sécurité

Donc les bébés pleurent, quelques chiffres :

Les pleurs du bébé sont le 2° motif de consultation médicale : 20% Quand une maman ne comprend pas et n’arrive pas à calmer les pleurs de son bébé, quand elle n’en comprend pas la signification, les pleurs deviennent insupportables et elle a un sentiment d’impuissance, qui lui fait perdre confiance dans ses capacités à être mère, une bonne mère. Si on tape sur Google « pleurs incessants du bébé » on obtient plus de 177 000 réponses !

Alors oui les bébés pleurent et pourquoi pleurent-ils ?

Mais même si les pleurs de la tombée de la nuit sont fréquents : Ils pleurent plutôt entre 18 et 23 heures, Avec souvent un pic des pleurs vers 6 semaines, Et une disparition autour de 3 mois. Il n’y a pas une, mais plusieurs raisons qui font pleurer et crier très fort un bébé : • De la douleur • De l’inconfort • De la frustration • Du chagrin • La faim, • De la colère, • Du désarroi, • Le besoin de dormir. Et à partir de quand doit-on s’inquiéter ?

L’ancienne règle de WESSEL qui date de 1954, (ce qui nous fait penser que les bébés pleuraient aussi à cette date) et qui faisaient s’inquiéter le monde médical quand les bébés pleuraient plus de 3 heures par jour, plus de 3 jours par semaine pendant au moins 3 semaines n’est bien sûr plus de mise ! On s’attache plus à mesurer le retentissement de ces pleurs sur la sphère familiale du tout petit et le ressenti des parents.

L’appel téléphonique

Le médecin appelé va devoir déterminer, à partir des indications téléphoniques données si l’enfant nécessite : • Des soins immédiats avec nécessité de prise en charge d’urgence SAMU, • Une consultation immédiate sans tarder, • Une consultation dans la journée, • Une consultation qui peut être différée.

La consultation médicale

L’interrogatoire

• Refait l’historique des pleurs : depuis quand, comme d’habitude ou différents ? • Recherche des signes associés qui vont orienter le diagnostic: o de la fièvre, o des signes respiratoires : difficultés à respirer, toux, o des signes digestifs : vomissements, diarrhée, o des signes cutanés : pâleur, cyanoses, éruption, o des troubles du tonus : tout mou ou trop raide, o ou un comportement inhabituel.

• fait préciser les rythmes de veille et de sommeil, l’organisation de la journée, des sorties, des temps de sommeil, • détaille les heures des repas et leur contenu. L’examen systématique doit être complet sur un enfant entièrement déshabillé avec qui on tente d’entrer en relation, et dont on guette les réactions aux diverses manipulations. L’objectif de l’examen est: • d’éliminer l’urgence nécessitant une intervention immédiate • et de rechercher les causes d’une éventuelle douleur à traiter. On va donc : • apprécier le tonus de l’enfant, palper les fontanelles, • apprécier l’état de la peau : souple, sèche, avec des lésions de grattage, • vérifier les orifices herniaires et les aires ganglionnaires, • palper l’abdomen, rechercher un ballonnement, une corde colique, un débord du foie ou de la rate, • rechercher un érythème fessier, une fissure annale, • explorer la sphère ORL.

Les causes médicales

Au terme de ces investigations on a en général obtenu une idée de l’origine des pleurs qui peuvent être en lien avec : • une urgence thérapeutique nécessitant une hospitalisation :

o une cause chirurgicale : § L’invagination intestinale aigue § La torsion testiculaire § Une hernie étranglée § Un traumatisme : membres, articulations, crane, o ou une cause médicale grave comme une méningite, une encéphalite ou une septicémie, une pyélonéphrite. • une douleur:

o une otite, o une sinusite, o une pharyngite, o une fissure anale, o un érythème fessier. • un reflux gastro-oesophagien avec ou sans régurgitations pouvant se compliquer d’oesophagite avec des enfants inconfortables tout le temps, jamais sereins, toujours agités, pouvant aller jusqu’à refuser de s’alimenter. C’est une pathologie fréquente qui doit être traitée par des médicaments spécifiques : o des anti reflux, o des épaississants et

o des inhibiteurs de la pompe à protons qui fabrique l’acidité. Mais aussi ne pas oublier les petits moyens comme : o desserrer les couches (pas de paquet cadeau bien ficelé) et laisser un espace d’au moins 2 doigts verticaux. o position semi assise, ne pas les coucher tout de suite après le repas. o pas de vêtements serrés, de jeans ou de pantalons qui plient le ventre en deux dès qu’ils sont en position assise. • Le reflux peut être associé ou pas à une allergie alimentaire, la plus fréquente bien sûr est celle aux protéines du lait de vache. Elle peut donner, outre des signes digestifs, des signes cutanés à type de peau sèche, voire d’eczéma avec des tentatives de grattage dès que l’enfant est déshabillé. Elle doit être systématiquement recherchée, évaluée par des tests cutanés, voire une prise de sang et traitée en général par un lait spécifique, sans protéines de lait de vache (NUTRAMIGEN, NEOCATE) • un trouble du sommeil et des rythmes de l’enfant avec : o des difficultés à l’endormissement ayant entraîné des conduites inadaptées (aux bras, en poussette, en balancelle, en voiture, dans le lit des parents. .). o Des réveils nocturnes assortis d’autant de biberons que l’enfant se réveille c a d toutes les 2 heures ! o Des rythmes de vie irréguliers, des horaires différents tous les jours, des modes de garde multiples et imprévisibles pour l’enfant. • un trouble des interactions parentales

o des signes de dépression maternelle o de la compétition parentale, des règles éducatives non concertées, voire opposées, o un climat insécurisant avec des violences verbales et ou physiques, o de réactions inadaptées et d’ajustement difficile. Et puis très souvent, rien de tout cela et on s’oriente vers les fameuses

coliques du nourrisson

Le tableau clinique est facile à reconnaître :

Le bébé devient érythrosique (on dit rouge de colère), s’agite dans tous les sens, se tortille, a le front plissé, les poings serrés, a le ventre ballonné, fait des gaz et crie très très fort ( niveau sonore élevé, plus de 80 dB). Il n’est pas calmé par l’alimentation. Elles sont très fréquentes (1/4) A l’examen clinique, le développement psychomoteur et la croissance staturopondérale sont normaux.

Elles disparaissent aux alentours des 3 mois : 100 jours !

La physiopathologie est incertaine, il n’y a pas de consensus : • Pour certains, le terme français de coliques oriente plutôt vers des douleurs spasmodiques d’origine digestive en lien avec la maturation du système digestif : 3 mètres d’intestin et des milliards de villosités intestinales qui n’ont jamais travaillé in utéro et doivent donc apprendre à le faire. C’est une explication que les mamans peuvent entendre, imaginer. • Pour d’autres et plutôt les anglo-saxons qui parlent de « pleurs inconsolables et exagérés » qui seraient en lien avec une irritabilité, une

labilité émotionnelle, un orage pulsionnel augmenté par l’anxiété maternelle. • Enfin pour les spécialistes de troubles du sommeil, ces pleurs du soir seraient la première ébauche du passage d’un rythme ultradien basé sur 4 heures à un rythme circadien basé sur 24 heures : c’est également une explication plutôt bien acceptée : bientôt il va faire ses nuits ! Ce qui est certain :

• que ces manifestations de grand inconfort d’un bébé, majorent l’inquiétude de sa maman qui se sent impuissante et incompétente. • qu’il y a des bébés qui font plus de coliques que d’autres et que ce sont précisément ceux dont les mères sont inquiètes parce qu’il a des coliques. Ce qu’il ne faut pas faire :

• Ecouter les réflexions de l’entourage : « tu es sûre que ton lait est bon ? », « tu crois que tu as assez de lait ? ». . . • Arrêter l’allaitement maternel. • Changer de lait, la valse des laits ne s’arrête en général que quand on en a enfin trouvé un qui ne lui fait pas mal. . . c’est à dire quand le bébé a 100 jours et n’a plus de coliques ! • Donner des médicaments antispasmodiques (Débridat, Spasfon, Polysilane) qui n’ont jamais fait la preuve de leur efficacité. • Ne pas banaliser : « ce n’est rien » mais évaluer ++ le retentissement sur les parents. Ce qu’on doit faire :

• Avoir une attitude empathique, écouter, prendre en considération le symptôme. • Examiner l’enfant et rechercher une éventuelle autre cause médicale, • Si la recherche est négative, l’examen normal et le développement satisfaisant, il y a de grandes chances pour que ce soit des coliques simples.

• Expliquer les mécanismes, les petits moyens pour le calmer : o lui parler, le rassurer, lui expliquer que maintenant il doit digérer tout seul, lui masser le ventre éventuellement avec ses propres genoux ce qui a l’avantage de desserrer la couche et d’ouvrir l’anus et de l’aider à évacuer ses gaz. o Le masser, le bercer, déambulation aux bras en position ventrale. o Vérifier la taille de l’ouverture de la tétine o On peut lui donner des infusions de plantes (verveine, camomille, fenouil, réglisse, menthe). o Les italiens ont proposé des pro biotiques (lactobacillus) : ce doit être confirmé par d’autres études. • Informer les futures mères de leur existence et de la CAT devant un bébé qui a des coliques parce qu’une mère avertie est beaucoup moins inquiète. Savoir repérer les situations dangereuses et les signaux d’alerte

Repérer et identifier les familles vulnérables. Les cris excessifs d’un bébé sont d’autant plus mal supportés que : § 1° enfant § Vie urbaine § Niveau d’étude élevé des 2 parents

§ Travail des 2 parents § Age maternel 30/34 ans § Pas de soutien familial § Famille monoparentale § Dépression maternelle § Tensions intra familiales § Bébé précieux. . . § Sur-stimulation Ecouter ce que disent les parents et faire attention aux phrases ayant valeur de signaux d’alarme. o Dire : o le pauvre, il a mal, il me fait de la peine, o j’ai mal pour lui, je ne sais plus quoi faire pour le soulager. . . o C’est autre chose de dire : o il m’en veut, o il le fait exprès pour nous embêter, o faut qu’il m’écoute, o faut qu’il comprenne, o pourquoi me faire ça à moi ? o il n’aura pas le dernier mot, o faut qu’il s’arrête, il a tout eu, o il est méchant ! • Repérer le risque de passage à l’acte, il y a des profils à risque :

o Jeune âge maternel o Faible niveau d’étude o Isolement parental o Conduites addictives o Violences intra familiales o Faible estime de soi o Acte de maltraitance. Le BEBE SECOUE

une forme mal connue de maltraitance aux conséquences irréparables Il s’agit d’un traumatisme crânien infligé à un enfant. C’est un véritable problème de santé publique, A telle enseigne que la HAS (la Haute Autorité de Santé) a organisé en 2011, une

audition publique et publié ses conclusions avec la Société Française de Médecine et de Réadaptation et le Ministère de la Santé.

Cette publication vise à donner aux professionnels de Santé : • Des informations précises pour améliorer le repérage, savoir y penser pour protéger l’enfant et prévenir les récidives. • Des messages destinés à informer systématiquement les parents sur les risques du secouement et les moyens de l’éviter. Il survient lorsqu’un nourrisson ou un jeune enfant, tenu par le tronc, les épaules ou les extrémités, est secoué violemment. La tête du bébé ballotte dans tous les sens, des vaisseaux sanguins vont être abîmés, ça va saigner dans son cerveau. Des cellules nerveuses sont endommagées qui ne guériront jamais. Les jeunes enfants victimes du syndrome du bébé secoué sont issus de tous les milieux socio économiques et de toutes les cultures. Ce n’est pas l’apanage des profils à risque. Le responsable est le plus souvent un membre

de la famille ou une personne qui en a la garde. C’est un adulte qui à un moment donné, épuisé et exaspéré par les pleurs du bébé qui ne se calment pas, à bout de nerfs, qui ne sachant pas maîtriser sa colère, secoue le bébé pour le faire taire. Il s’agit bien d’un traumatisme crânien

infligé à un nourrisson de moins d’un an, le plus souvent de moins de 6 mois.

Quelques chiffres :

• Au moins 200 syndromes de bébé secoué se produiraient chaque année en France. De 15 à 30 / 100 000 enfants. Chiffre probablement sous estimé car le diagnostic est difficile, les signes évocateurs souvent mal connus. • L’enfant (CHU de Besançon)

o Un bébé de moins d’un an, le plus souvent moins de 6 mois. o Une fois sur 5 le bébé meurt. o 50% gardent des séquelles graves. o Des récidives dans 50% des cas avec une moyenne de 10 fois. o Plus fréquent chez les garçons : x par 1,3 à 2,6, o Plus fréquent chez le bébé prématuré : x par 3 (11 à 21% / 7%), o Plus fréquent en cas de gémellité : x par 3 (5% / 1,5%) • L’auteur des faits avoués ou non (CHU de Besançon)

o 70% c’est un homme o Le père de l’enfant 1/2, o Le compagnon de la mère 1/5, o 17% c’est une nourrice ou une baby-sitter, o Autre 13% • L’élément déclencheur : pratiquement toujours les pleurs du bébé.

Le tableau clinique. Ce peut être : • un décès inattendu (1/5). • Un tableau de détresse neurologique inaugurale avec o état de mal convulsif,

o enfant devenu brutalement tout mou, o une perte de connaissance, souvent un coma. • Mais aussi des signes non spécifiques, un tableau subaigu avec : o la notion de malaise, de somnolence, o de refus du biberon, des vomissements, o de modification du comportement, o un bébé pâle, algique, geignant. o avec une augmentation récente du PC. • A l’interrogatoire on retrouve : o Un retard dans le recours aux soins o Le manque de réactivité de l’entourage o L’absence d’explications plausibles o Pas de notion de TC accidentel récent. A la différence du TC accidentel, il n’y pas d’intervalle libre entre le traumatisme et l’apparition des premiers signes. Le bilan doit être complet :

• Interrogatoire précis sur les circonstances de survenue, le début des signes. • Examen clinique complet • Des investigations : o Echographie à travers la fontanelle, o Radiologique : scanner et IRM • Bilan ophtalmologique avec fond d’oeil. C’est un diagnostic difficile à porter mais on a de fortes présomptions quand on se trouve devant : • une triade clinique avec

o des lésions intra crâniennes pluri focales : hématome sous dural, hémorragie sous arachnoïdienne associée, o Hémorragies rétiniennes profuses au fond d’oeil, o Absence de signes de traumatisme extérieur. 15 • Chez un enfant de moins d’un an

• Avec des circonstances de survenue peu claires, incohérentes, contradictoires et peu compatibles avec les lésions observées :

o L’enfant aurait fait une chute de faible hauteur, o Il aurait été secoué par un enfant plus grand dans le transat. o Il aurait été victime de manoeuvres considérées par l’entourage comme des jeux : avion, tourniquet, balancelle !

Le diagnostic différentiel :

Ce n’est pas un diagnostic facile à établir. Mais on sait que : • Le secouement ne peut pas être le fait d’un enfant : o moins de 4 ans, incapable de secouer des poids de 3 kg, o moins de 6 ans, incapable de secouer des poids de 5 Kg, o moins de 9 ans des poids de 7 kg (poids d’un bébé de 6 mois). • Une chute de faible hauteur entraîne exceptionnellement des manifestations cliniques mais jamais d’Hématome SD ou d’H Rétinienne. • Le secouement par un enfant dans un transat ne génère pas de lésions cérébrales, • On a peu d’étude sur les jeux d’avion, de tourniquet et de balancelle mais c’est peu vraisemblable. • Au décours d’un accouchement difficile, on peut observer un HSD mais sans symptomatologie, résolutif en 1 mois et qui ne récidive pas. • De même en cas de ventouses ou de forceps des HR sont possibles mais disparaissent en moins d’un mois. • Enfin il existe des enfants présentant de manière physiologique un élargissement des espaces sous arachnoïdiens, considérés comme un trouble transitoire de la réabsorption du LCR. Ce sont souvent des garçons avec une macrocranie (+2 DS) et une fontanelle antérieure large et depressible mais sans signes neurologiques. Et on s’est interrogé sur la possibilité de survenue spontanée c’est à dire sans manoeuvre de secouement, chez ces enfants d’HSD : pas d’argument en faveur de cette hypothèse, au contraire plutôt effet d’amortissement protecteur. Alors au terme de ces investigations et d’une concertation pluridisciplinaire, le diagnostic de bébé secoué peut être : • Hautement probable voire certain,

• Probable,

• Possible,

• Ecarté.

Le signalement

Quand le diagnostic est suspecté le signalement s’impose, il vise 2 objectifs : • l’urgence est de protéger l’enfant en le gardant à l’hôpital,

• Prévenir les récidives : o par un signalement à l’autorité judiciaire = le Procureur de la République quand le diagnostic est certain, hautement probable ou probable. o par une information préoccupante au Président du Conseil Général quand le diagnostic est possible. Le signalement est en soi un acte médical de prévention qui vise à protéger l’enfant de nouvelles atteintes à sa santé. Les soins à apporter à l’enfant :

C’est un traumatisme crânien sévère, une urgence médico chirurgicale nécessitant : • un traitement adéquat immédiat car le pronostic vital est en jeu:

o la lutte contre l’oedème cérébral,

o le traitement des convulsions, o la sédation antidouleur, o geste chirurgical de drainage pour évacuer un hématome important. • Un suivi avec des prises en charge et des rééducations à long

terme (plusieurs années). 2/3 des enfants qui survivent au syndrome du bébé secoué vont garder des séquelles: o Risque d’épilepsie séquellaire o Risque d’atrophie corticale o Risque de cécité o Risque de troubles moteurs o Troubles cognitifs o Retard de développement motricité et langage o Trouble des apprentissages à l’école

Deux témoignages rapportés dans l’étude de l’hôpital Sainte Justine

à Montréal au Québec

• « Mon bébé pleurait, pleurait sans arrêt. Je faisais tout mais rien ne le consolait. Je ne savais plus quoi faire et je n’étais plus capable de l’entendre. J’ai crié. . . Je l’ai pris quand même et je l’ai secoué. Je l’ai remis dans son lit parce qu’il avait l’air calme, mais le soir venu, il a recommencé à pleurer. Je l’ai refait pour qu’il arrête. Au matin, il ne voulait pas boire, il était tout mou. Je ne comprends pas parce que je l’avais déjà fait avant et il n’était pas devenu comme ça. » • « J’étais morte de fatigue, en pleine nuit, je n’étais plus capable je n’avais pas d’aide. C’était assez ! J’ai brassé le lit et je l’ai pris, je l’ai secoué tellement fort que sa tête ballottait dans tous les sens. . Elle s’est mise à vomir. Je l’ai remise dans son lit et je me suis mise à pleurer. . . pour toujours. Les conséquences

L’enfant est bien sûr la première victime et l’urgence est double: • lui prodiguer les soins nécessaires à sa survie avec le moins de séquelles possibles. • et le protéger d’éventuelles récidives. Mais la famille est toujours fortement ébranlée : • parfois incapable d’accepter la réalité même devant les faits et l’apparition des symptômes chez l’enfant. • Les partenaires, les conjoints, les parents sont souvent rongés par la culpabilité, ils sont les deuxièmes victimes. • Non seulement ils sont séparés de leur bébé qui est souvent placé au titre de sa protection, • la famille va devoir se soumettre à une enquête, ils seront interrogés par plusieurs services : • les travailleurs sociaux de l’hôpital puis de l’ASE

• la police ou la gendarmerie pour l’enquête pénale • le juge des enfants • voire le juge d’instruction, un procès. . . et les sanctions pénales.

Sans compter le positionnement et l’attitude de l’entourage familial, des copains, des voisins, des collègues de travail . . . C’est une famille qui explose ou qui implose ? Le retentissement est à vie pour l’enfant comme pour sa famille.

Alors quelle prévention possible ?

Des messages à diffuser auprès des jeunes parents :

• oui un bébé, pleure et il peut même pleurer longtemps et fort même sans raison apparente et c’est normal ! • Ces pleurs peuvent nous exaspérer au point d’avoir envie de le secouer (ou de « le passer par la fenêtre »), en être conscient ! • Tout le monde est à risque : fatigue, manque de sommeil, difficultés, prise de médicaments, d’alcool, de drogues. • Mais un bébé c’est fragile : o Le poids de sa tête par rapport à celui de son corps est proportionnellement plus élevé. o Le cerveau flotte en quelque sorte dans la boîte crânienne o Les cellules endommagées du cerveau ne se régénèrent pas. • Le secouement peut le tuer ou l’handicaper à vie : une seule fois suffit ! • Secouer est plus grave qu’une chute de la table à langer. • Jouer avec un enfant ne doit pas le secouer : ne pas le lancer en l’air, même si ça le fait rire. • Une seule solution en cas d’exaspération pour éviter de passer à l’acte: coucher le bébé dans son lit, sur le dos, et quitter la pièce !

Des supports pour en parler :

Le thermomètre de la colère des parents : c’est un outil élaboré par les canadiens qui décrit : • les paroles des parents dans les situations difficiles comme lorsque le bébé pleure beaucoup, • Ainsi que les différentes émotions négatives qui y sont illustrées : de la tristesse à l’irritabilité et l’impatience jusqu’à la colère. • Et leur demande de s’interroger pour savoir si la situation leur paraît contrôlable. Les fiches COURLYGONES

Les lyonnais dans le cadre du réseau Ville-Hôpital ont mis au point des fiches à l’intention des parents confrontés à différentes situations avec leur enfant, ce sont les fiches COURLYGONE avec des conseils de CAT. • Mon bébé a de la fièvre • Mon bébé a de la diarrhée

• Mon bébé pleure. . . Avec pour chaque situation la même CAT : • OBSERVER, • SURVEILLER, • AGIR. L’affiche avec des dessins du Chat de GELUCK coéditée par le Ministère de la Santé et des Solidarités avec l’Assistance Publique des hôpitaux de Paris, la FEHAP, l’URIOPS . . . A afficher dans vos structures, ce peut être l’occasion d’en parler avec les parents. Enfin, il n’y pas que des messages à diffuser, il y a une attitude à avoir :

Et vous le savez bien vous qui vous occupez d’enfants, et c’est le rôle de tous les professionnels qui gravitent autour de lui : • Les soignants, en ville, à l’hôpital, en PMI, • Ceux qui les accueillent : les crèches, les haltes garderies, les LAEP, les assistantes maternelles, • Les travailleurs sociaux du CG, de la CAF, de la mairie. . . que prendre soin du petit, c’est aussi prendre soin des ses parents, c’est être à l’écoute de ce qu’ils disent et de ce qu’ils ne savent pas dire, et avoir une attitude bienveillante et accueillante peut permettre de prévenir des passages à l’acte de parents totalement démunis. Bibliographie :

• Neurologie pédiatrique 3° Edition, Médecine-Science Flammarion. • HAS « bébé secoué, une forme méconnue de maltraitance aux conséquences irréparables », communiqué de presse 13 sept 2011. • Syndrome du bébé secoué, CHU de Sainte Justine, Université de Montréal. • Guide de la consultation en pédiatrie, 10° édition, J.Valleteau de Mouillac, Masson 2012. • Archives de pédiatrie, Coliques du nourrisson, enquête sur 2773 nourrissons, oct 1997.• PPT « Pleurs incessants du nourrisson et douleurs abdominales », DIU de médecine générale de l’enfant, Jean Stagnara, oct 2013. • PPT « Du syndrome de bébé secoué au traumatisme crânien infligé », Christine Guillermet, CHU de Besançon, Nov 2011. • PPT « Pleurs inexpliqués du nourrisson », Alain Merget, CHU Besançon, Réseau périnatalité de Franche-Comté, nov 2011. • Co-naître « regard anthropologique et signification des pleurs du nourrisson, Laurence Girard, Cahier de la puéricultrice, nov 2012. • Publicité Geluck Philippe, Ne pas secouer un bébé. Le Chat 2012.

La relaxation ludique du jeune enfant Michelle Andres, Sophrologue

Je souhaite vous faire partager mon enthousiasme pour la relaxation et ma conviction que la relaxation peut être non seulement proposée sous forme d’ateliers et intégrée à la vie quotidienne de la crèche. Cette pratique vous permet de prendre soin de l’enfant tout en vous faisant du bien. Qu’est ce que la relaxation ?

Il est important de comprendre ce qu’est la finalité de la relaxation car même si elle se pratique différemment selon les âges, et qu’elle n’a pas les même objectifs, l’état d’esprit à cultiver est le même ; et cela est très important de le connaître pour le garder présent à l’esprit.

Définition du mot relaxer

« Relaxer » se définit dans le dictionnaire comme le fait de remettre en liberté une personne, de la libérer des charges qui pèsent sur elle. Je vais en effet libérer mon corps de tout ce qui pèse sur lui et m’empêche d’être réellement moi ou dit d’une façon plus spirituelle cela empêche mon Etre intérieur de s’éveiller. C’est pourquoi la relaxation est une démarche beaucoup plus large qu’une simple détente physique ou un calme mental Elle permet d’ Aller vers un mieux être Corporel à pour accéder à un épanouissement de l’Etre

Le CORPS ET L’ETRE

- J’ai un corps que je sens à travers mes actions, mes besoins

Mon corps « je sens » et avec lui j’agis. J’existe. Sentir son corps ce n’est pas le « penser » Si c’est important de savoir que j’ai 2 jambes, 2 bras, 1 têtes c’est essentiel de les sentir car les sensations sont autant d’indicateurs sur ma fatigue, mon état émotionnel… Par la prise en compte du « corps » je vais pouvoir m’incarner par la réalisation d’objectifs définis et garder les pieds sur terre. Le corps est le lieu de manifestation de l’Etre.

- Je suis un être humain Avec l’Etre « je suis » sans avoir besoin de faire ou d’avoir. en prenant en compte « l’Etre » je vais m’épanouir en suivant mes aspirations, mes valeurs, mes rêves ce qui fait sens et qui permet de garder la tête dans les étoiles. L’Etre est une vitalité profonde et un potentiel qui s’actualise ou non au cours de la vie. CES 2 DIMENSIONS SONT ESSENTIELLES POUR UN EPANOUISSEMENT GLOBAL ET HARMONIEUX

- Si je ne sens pas mon corps, si je ne suis pas connecté à lui, j’aurai tendance à être un enfant dans la lune, de laisser les autres décider pour moi, coupé de mes besoins, de mes émotions.

- Si je ne suis pas à l’écoute de mon Etre, je risque de souffrir de « mal être », d’errer dans la vie comme une âme en peine En définissant ainsi la relaxation vous comprenez que La relaxation est un outil d’éveil et de thérapie

- Dans son rôle d’éveil, la relaxation concerne tous les enfants et les adultes, Elle favorise la présence à soi-même, la connaissance de ses besoins, de ses envies, de ses aspirations, de ses limites, améliore la communication et la relation à soi et aux autres.

- Dans sa fonction d’aide ou de thérapie : elle peut aider des enfants qui ont des insomnies, des terreurs nocturnes, des difficultés de concentration, des comportements violents, à mieux gérer les douleurs.

- La relaxation ce n’est pas seulement avoir un corps détendu.

Une séance de relaxation, c’est un champ d’expérimentation où on donne une place essentielle au corps et aux sensations

Cela veut dire quoi donner une place essentielle au corps et aux sensations

Par exemple si je pose un objet dans votre main alors que vous avez les yeux fermés, immédiatement (d’une manière automatique et inconsciente) vous cherchez ce que c’est.. C’est très intéressant d’être capable de reconnaître l’objet, C’EST NOTRE CAPACITE D’EMISSIVITE, C’EST LE DOMAINE DE LA PENSEE Nous vivons dans un monde émissif, c’est à dire que nous cherchons toujours à nommer ou à reconnaître avant de sentir ou de découvrir par les sens.. LA RECEPTIVITE EST DU DOMAINE DE LA SENSATION. La réceptivité consiste simplement à accueillir pour elle-même la sensation Je vous propose de souffler sur la paume d’une main en faisant Ahhh ...bouche grande ouverte puis souffler sur le dos de la main sur les doigts et observez si les sensations sont toujours identiques Et maintenant soufflez sur votre main lèvres pincées et observez si la sensation est la même et observez la sensation que vous préférez… La réceptivité sensorielle amène spontanément un état de détente, une baisse de la tension nerveuse. Elle repose le cerveau qui ne peut pas en même temps émettre et recevoir (de même que je ne peux pas en même temps inspirer et expirer) C’est parce que l’attention aux sensations crée cet état de détente et de sécurité et nous verrons plus loin pourquoi créer cet état de détente et de sécurité est important au-delà du fait d’être détendu et en sécurité. Cet état de réceptivité est l’état naturel des jeunes enfants

JE VIS UNE EXPERIENCE EN CONSCIENCE PUISQUE JE LA NOMME ET LA, ALORS ELLE PREND DU SENS Expliquer ou informer ne suffit pas…

La connaissance passe par l’expérimentation

Et cela est vrai quelque soit les âges

On ne crée pas des sensations que par des massages mais manger, boire, se laver les mains …. toutes ces activités créent des sensations et si on y est attentif on peut les vivre comme un moment de détente. LA RELAXATION EST UN ART DE VIVRE UNE MANIERE D’ETRE AU MONDE La relaxation chez les jeunes enfants

Nous pouvons nous demander si on a vraiment besoin de relaxer les jeunes enfants ?

Le jeune enfant vit le plus souvent son corps à travers

− des tensions internes(ex : sensation de faim, de fatigue…) et au fur et à mesure qu’il se construit psychiquement, par des pulsions (de désir, d’agressivité ) qui ne sont pas toujours simples à retenir… L’enfant vit son corps avant tout à travers la frustration d’un besoin non satisfait.

− d’autre part, l’enfant est aussi « le miroir » de l’ambiance dans laquelle il évolue. Il perçoit toutes les tensions venant de l’extérieur : (les cris, les pleurs , des bruits violents…) et le ressenti des personnes qui l’entourent (exemples : l’inquiétude, l’indifférence, l’énervement..).

Ce vécu corporel est l’expression d’une forme de « mal-être ». Rencontrer l’enfant avec une conscience globale et évolutive

Dans ma pratique, je considère l’enfant comme fort sous une apparente fragilité. - Il a la fragilité de celui qui a besoin de l’autre pour vivre et être révélé à lui-même. - Il a la force de l’être vivant qui possède déjà tout en lui. Je dis à l’enfant que son corps est comme un instrument de musique et je vais lui apprendre à le découvrir et à en jouer de différentes façons

La relaxation n’a pas pour intention de changer l’enfant

Que la relaxation soit utilisée dans un but d’éveil ou de thérapie elle n’a pas pour objectif de rendre l’enfant plus calme et silencieux (ou seulement lui apprendre à se tenir tranquille) Avec la relaxation et l’écoute des sensations l’enfant retrouve sa capacité à :

- être plus présent à ce qui se passe en lui,

Et c’est parce que l’attention aux sensations crée cet état de détente et de sécurité que l’enfant va pouvoir aller vers sa fragilité : ce qui lui est inconnu, ce qui lui est difficile, ce qui l’inquiète.

- expérimenter d’autres états

Ainsi il va expérimenter que le corps a différents besoins et va apprendre - reconnaitre ses besoins,

Avec la relaxation l’enfant découvre que ses expériences sensorielles lui appartiennent en propre et l’enfant apprend que ce qu’il sent est juste. Ainsi se développe sa confiance en soi.

- choisir ce qui est bon pour lui

- développer ses capacités de choix.

Et l’enfant inhibé pourra s’extérioriser quand il le souhaite et que l’enfant dans une « agitation désordonnée » trouve une voie d’intériorisation de qualité. Avec ce contexte de confiance et de sécurité créé par la relaxation, l’enfant apprend à faire le lien entre ses sensations, ses émotions, ses sentiments Je ne travaille pas sur le symptôme mais je pars de l’état naturel de l’enfant (par exemple un enfant agité je vais lui proposer une activité très dynamique (comme sauter, danser) mais organisée et l’amener doucement sur le terrain de correction (expérimenter l’immobilité, la lenteur) Donc, le but de la relaxation n’est pas d’être le meilleur, le champion, de guérir d’une maladie mais propose à l’enfant une nouvelle relation avec lui-même ; l’essentiel est de lui permettre d’accéder et d’explorer d’autres aspects, d’autres états, d’autres dimensions de son corps.

Les bienfaits de la relaxation

La relaxation favorise :

• L’éveil et une meilleure connaissance de soi

O Développement de la CONSCIENCE CORPORELLE O Stimulation des CAPACITES D’APPRENTISSAGE O EPANOUISSEMENT PERSONNEL O PLUS GRANDE CONFIANCE EN SOI

• Un bien-être quotidien

o Etat de bien être o Sentiment de CALME o Prévention des maladies

• La relation à l’autre (enfant et adulte) :

o Optimisation de la relation adulte-enfant o Il adhère pleinement à ce que vous lui dites puisqu'il l'a expérimenté. o Expression de soi

La relaxation un moyen infaillible ?

Les jeux de relaxation ne constituent pas une panacée à tous les maux qui affligent les enfants.

Il faut éviter de tomber dans le piège de la recette miracle, car plusieurs comportements d’enfants restent fort complexes à comprendre et à atténuer. Quoique efficaces, les jeux de relaxation et d’attention ne sont pas conçus pour remédier au déficit grave d’attention, aux problèmes sévères de comportement ou de troubles anxieux et ne peuvent par conséquent, remplacer l’aide de thérapeutes dont les jeunes enfants ont besoin.

Comment proposer la relaxation à de jeunes enfants ?

1. La relaxation est avant tout un état d’esprit Relaxer un enfant, c’est établir une connexion entre lui et son corps. Cette connexion va se réaliser par la manière dont moi je vais rentrer en contact avec lui. C’est la rencontre du petit prince et du renard : apprivoiser l’enfant pour lui permettre de se révéler. Cela veut dire :

• Avancer sans tout savoir

L’enfant utilise naturellement son corps comme un instrument de communication avec les autres, le monde qui l’entoure. Son attitude physique manifeste ce qu’il vit : - son état intérieur sous-tend et détermine sa posture corporelle et son niveau énergétique et réciproquement - la manière dont il se tient et dont il vit son corps agit sur l’état intérieur et influence sa communication avec le monde et avec lui-

même

La posture de l’enfant a un sens mais l’approche corporelle de la relaxation ne vise pas à connaître ce sens ou la raison de cette attitude. Elle sert à libérer la mobilité corporelle et à favoriser le passage d’une position à l’autre.

• Centré sur soi et sur l’enfant

o Aidez-le à percevoir des sensations simples (comme chaud, froid, lourd, léger, doux, dur…). Etre dans la sensation permet la concentration et le calme. Pour favoriser cet état de réceptivité chez l’enfant, vous serez à l’écoute de vos propres sensations.

o Aidez l’enfant à nommer ses sensations. Par la mise « en parole » des sensations vécues, l’enfant va pouvoir se construire de l’intérieur tout en ayant des repères qu’il aura expérimentés et qui auront été nommés par vous. Il pourra ainsi créer un lien entre son monde intérieur et le monde extérieur et, pour l’enfant de 2 ans ½ à 3 ans, accéder à son imaginaire et le laisser s’exprimer. En l’aidant à percevoir et à nommer des sensations simples l’enfant va pouvoir découvrir qu’il n’est pas un enfant mou, agité, pénible mais qu’il peut être et mou et agité selon les moments et choisir l’état le plus adapté à ce qu’il est en train de vivre.

• Disponible et attentionné

o Proposez une qualité de présence et d’écoute qui permet au jeune enfant, avec un monde intérieur en pleine construction, d’explorer par lui-même son environnement, de vivre de nouvelles expériences et de faire des découvertes, qui sous votre « regard » attentionné vont prendre sens et l’aider à traverser les différentes étapes de son évolution.

o Abandonnez vos préjugés et vos jugements préétablis sur l’enfant : « tu es toujours grognon », « tu es excité »…qui enferment l’enfant et l’empêchent de se révéler.

• Confiant et patient

o Prendre en compte les besoins de l’enfant. Accueillez l’enfant tel qu’il est avec son énergie du moment, si l’enfant a besoin de courir, de sauter , lui proposer des activités dynamiques organisées pour l’amener à expérimenter que naturellement son corps aura envie de vivre un état de calme et d’être plus posé

� Je pars du « terrain naturel ou habituel « de l’enfant pour l’amener vers le « terrain de correction ou inexploré ». � J’évite de vouloir corriger le « symptôme » mais je prends l’enfant dans sa globalité et dans une perspective d’évolution.

o Lâcher prise en matière des attentes, c’est l’enfant qui sait ce qui est bon pour lui ici et maintenant. Soyez dans un lâcher prise sur ce qui est prévu, afin d’être dans une relation juste avec lui. Laissez-vous guider par lui et soyez convaincu qu’il a tout en lui et que, d’une manière inconsciente, il sait où il va.

o Faire preuve de patience et de constance pour récolter des effets durables. N’attendez pas des résultats immédiats et spectaculaires, C’est une expérience dans laquelle on avance à petits pas, quel que soit l’âge. Prenez le temps nécessaire pour que l’enfant soit prêt à vivre ce que vous lui proposez. Un enfant peut faire les exercices proposés mais ne pas être dans la relaxation. L’enfant peut entrer dans la relaxation juste en fin de séance et très rapidement.

o Notez les changements même minimes (expression du visage, le regard, l’attitude…) du jeune enfant , observez les outils qui sont efficaces pour lui et ceux qu’il préfère.

o Faites confiance en l’enfant et a sa capacité de se transformer. Acceptez avec bienveillance que cela ne marche pas ou que l’enfant ne soit pas prêt.

o Prenez le temps de trouver cette « clé » (à travers la technique d’éveil qui aura la préférence de l’enfant) et qui le ramènera à lui.

Travailler des choses sérieuses d’une manière légère

Les moyens et les outils de relaxation sont les mêmes que pour les adultes. Seul le vocabulaire est spécifique ainsi que la forme plus ou moins ludique selon l’âge Proposez aux enfants des expériences concrètes qui sollicitent leur corps et leurs sens

- Permettez aux enfants d’être actifs de manière organisée - A un public d’enfants si jeunes, on ne propose pas « des techniques de relaxation à apprendre » mais on peut en revanche l’amener à

utiliser son corps comme un instrument à découvrir des sensations nouvelles, à jouer, ainsi on lui apporte du bien être et on favorise son développement corporel.

- Proposez des jeux qui amènent à avoir du plaisir à se détendre - Les jeunes enfants ne peuvent se détendre en demeurant passifs et immobiles.

Proposez une variété de jeux : les sens en éveil un corps en action

- jeux d’écoute - jeux d’étirement - jeux de silence - jeux de contraste (dur/mou) - jeux visuels - jeux de balancement - jeux olfactifs - jeux tactiles Des massages ou des automassages amusants

- Avec ou sans accessoires - seul ou à deux une respiration consciente des comptines et des chansons

- jeux d’inspiration - à écouter - jeux d’expiration - à chanter

- à mimer

Construction d’une séance

Chaque relaxation est construite comme un scénario, une trame sur laquelle l'enfant s'appuie, mais libre à lui et à l’adulte de revisiter les activités en fonction des besoins du moment. Se laisser guider par l’enfant qui saura nous faire comprendre ce qu’il attend de nous

Etape Objectifs Exemples

Evacuer et se poser

Créer un rituel pour permettre aux enfants de rentrer dans la séance de relax.

créer un état de calme et de sécurité

installer une écoute entre eux et créer le groupe

créer un cadre sécurisant pour faire connaissance avec les nouveaux enfants (si c’est le cas ) et permettre aux plus timides de prendre leur place

évacuer les tensions.

enlever les chaussures pour se mettre à l’aise bouger ou chanter pour se défouler s’installer confortablement avec un coussin s’asseoir en rond pour mieux se voir et être

ensemble faire chanter le bâton de pluie pour marquer sa

présence attendre le silence pour s’applaudir.

Bouger

Proposer une activité dynamique, artistique… où les enfants vont expérimenter leur corps, découvrir des sensations.

expérimenter son corps à travers les sensations

sentir son corps par le mouvement, par l’étirement, par le massage…

installer la détente renforcer l’équilibre en position

debout jouer avec son corps pour le

vivre avec plaisir.

Masser avec une plume, une balle, jouer avec une partie de son corps : mains, pieds, dos…

Jeux d’étirement, jeux sensoriels

Respirer et se relaxer

Moment de la relaxation où les enfants adoptent une position confortable de leur choix (allongés ou assis avec les yeux ouverts ou fermés) et sur une musique douce vivent la détente de leur corps. Nommer ce que l’enfant peut vivre : « quand

vivre une détente physique et assimiler certaines expériences vécues lors de la séance

installer le calme et la détente dans son corps

prendre conscience des exercices qui ont fait du bien.

raconter une histoire proposer aux enfants d’adopter une position de

détente (allongée idéalement mais pas obligatoirement) et d’écouter de la musique

faire intervenir un signal, par exemple « jolie fleur » qui, en touchant l’enfant, détend son corps ou signale que le corps se réveille de nouveau (en laissant dans la mesure du possible, à chaque enfant la liberté de décider s’il reste encore allongé ou s’il se relève)

je m’allonge et que je fais la poupée de chiffon mon corps est tout mou et c’est calme dans mon corps».

Clôturer la séance par un jeu de réveil corporel ou par une chanson, ce qui permet aux enfants de bien sortir de la relax et de se dynamiser.

S'exprimer

À la fin de la séance de relaxation, les enfants disposent de différents supports graphiques (papiers, crayons, pâte à modelée) afin qu'ils dessinent les sensations vécues. Ce moment supplémentaire de partage apporte une nouvelle fois à l'enfant la sensation vécue de bien-être.

Relaxation et les pleurs

Nous avons vu que les pleurs sont le premier langage du bébé et du jeune enfant qui n’a pas encore un langage évolué

Si nous considérerons les larmes de l’enfant comme des « appareils de communication »; ce sont des outils qui permettent aux enfants de faire connaître leurs besoins et leurs sentiments aux adultes qui les entourent.

Les pleurs peuvent être l’expression :

• d’une besoin à satisfaire - Il a la faim - Il a soif, trop chaud, trop froid - Il a sommeil - Il a besoin d’être rassuré - Il est fatigue ou en fin de journée, il se décharge de la tension de la journée

• d’une émotion : tristesse, colère, peur

- Il ne se sent pas bien, il a besoin de quelque chose mais il ne sait pas quoi - Il s’ennuie, il a besoin d’attention constante - Il veut quelque chose ou il veut être avec quelqu’un et ce n’est pas possible - Il manifeste son désaccord à une activité, une personne que ce soit un enfant ou à un adulte

La relaxation peut proposer 2 types de soutien

1. Réduire les pleurs liés au stress, à la fatigue et à l’ennui et améliorer le bien-être au quotidien en aidant l’enfant à s’auto- satisfaire 2. Faire face aux besoins qu’on ne peut pas satisfaire et qui génèrent des pleurs qui persistent

Réduire les pleurs liés au stress, à la fatigue et à l’ennui et améliorer le bien-être au quotidien, pour aider l’enfant à s’auto- satisfaire

Dans une crèche, même quand tout va bien, le stress est présent aussi bien pour le personnel que pour les enfants.

- C’est un milieu avec de nombreuses et constantes stimulations sensorielles ‘au niveau des couleurs, des formes, des sons) qui sont pour les enfants au système nerveux et cérébrale encore immature des opportunités d’apprentissage, d’éveil mais aussi de fatigue. car l’enfant est sollicité en permanence

- Par ailleurs les enfants sont considérés comme des éponges qui ressentent toutes les émotions des adultes (indifférence, inquiétude, énervement…) sans pour autant les reconnaître et les expliquer ; et cela génère chez eux des angoisses

Pour procurer un apaisement et permettre aux enfants de refaire le plein en énergie, on peut envisager la relaxation en proposant :

- une séance structurée (relaxation formelle) qui fournit à l’enfant, placé en situation, la stimulation nécessaire pour faire naître le réflexe de relaxation.

- une « pause minute énergique », (relaxation informelle) utilisée d’une manière quotidienne, permet au jeune enfant de se percevoir dans son « moi ici et maintenant » à différents moments. Utiliser les activités habituelles pour réaliser des petites pauses « relaxation » o n peut proposer aux enfants de vivre des activités comme se laver les mains, ranger les jouets, comme une mini-relaxation Ex : quand tu auras terminé de te laver les mains et que tu auras les bras le long du corps comme un soldat, je taperai dans les mains, cela

voudra dire que le jeu est terminé.

• Aménager un coin relax dans la crèche

Un coin tranquille dans la crèche où les enfants pourront se retirer au besoin. Il suffit de quelques coussins, d’un animal en peluche, de deux ou trois livres ou mieux, d’albums à images relaxantes (bébés animaux, images de la nature, reproductions d’œuvres d’art). Établissez des consignes claires quant à son utilisation (un enfant à la fois) et la durée de fréquentation, si plus d’un enfant veut y aller.

Un lieu sécurisant : pièce isolée Un lieu chaleureux : matelas, coussins, musiques, lumière douce Un lieu adapté : à l’abri des bruits environnants et des sources de distractions.

Exemple une salle Snoezelen

Le concept snoezelen initié par les hollandais dans les années 80 pour des personnes gravement handicapées a pour but de favoriser la relation, la perception corporelle, l’expérimentation, le plaisir. Dans ce lieu se développe une relation spontanée et l ‘expression et la communication y sont favorisés dans une approche humaine et positive. La salle snoezelen est de 11m2, elle est volontairement obscure La salle snoezelen se compose : – d’un matelas à eau : permet la détente, la relaxation, la perception corporelle.

• de colonnes à bulles sur un socle rigide : permet la perception corporelle et la simulation basale (somatique, vibratoire et vestibulaire) stimule aussi les sens (vue, toucher, ouïe)

• d’effets lumineux : donnent dans l’espace une impression feutrée, intime..amène la détente corporelle très rapidement. Permettent à l’enfant de choisir l’effet visuel (suivre des yeux, se cacher, manipuler)

• de lumières à échelles : ces échelles incitent l’enfant, de façon ludique à produire des sons, des bruits voire des mots….permettent de comprendre la relation de cause à effets dans la production vocale et lumineuse.

• effets à néon ultra violet : permettent d’utiliser le potentiel visuel si minime soit-il… • télécommande laser : permet à l’enfant de choisir la stimulation souhaitée en touchant le bouton pressoir.

Salle snoezelen

Faire face aux besoins de l’enfant qu’on ne peut pas satisfaire et qui génèrent des pleurs persistants

Ex : un enfant qui veut son père ou sa mère Non seulement il y a les pleurs stridents et persistants de l’enfant qui sont source de fatigue et d’énervement, mais cette situation est particulièrement délicate car elle renvoie l’adulte à un sentiment d’impuissance à satisfaire le désir de l’enfant, pas toujours facile à accepter quand on est en charge de jeunes enfants si fragiles, et cela peut provoquer un sentiment de culpabilité de ne pas y arriver. Dans ce contexte ce ne sont pas les techniques de relaxation qui vont vous aider dans un premier temps mais l’état d’esprit que nécessite la pratique de la relaxation

A. Accueillir avec un regard attentif, ouvert et curieux, sans a priori

S’autoriser à ressentir ce qui compose l’expérience désagréable permet d’expérimenter sa capacité à être là en compagnie de cette expérience désagréable. Je peux la regarder et parce que je la regarde je prends du recul. l’enfant n’est pas malade, pas blessé c’est une situation ennuyeuse, compliquée mais pas dramatique

B. Accepter avec bienveillance sans jugement

L’acceptation permet à l’esprit de s’ouvrir à la compréhension profonde de la réalité vécue telle qu’elle est. Il y a une place à une autre attitude pour accueillir cette situation qui n’est pas celle que je souhaite, que j’aime ou je suis à l’aise.

o J’ai à m’occuper d’un enfant qui pleure, o Je suis épuisé, dépassé car j’ai d’autres enfants à m’occuper

J’arrête de refuser ce qui est (qui ne me convient, me tire souci ...) et je peux m’occuper de ce qui se présente Cet enfant qui pleure a besoin d’attention malgré le fait que j’ai fait tout ce que j’ai pu, rien ne marche Mais cette partie de moi qui est mal, qui culpabilise, qui n’est pas aussi « parfaite que j’aimerai a elle aussi besoin d’indulgence Etre dans cet observation et cette acceptation bienveillante va permettre à l’esprit de s’apaiser et au lieu de réagir sous l’effet du stress, vous allez apporter une réponse différente, adaptée à cet enfant dans cette situation là. Vous gagnez en liberté pour faire des choix conscients.

C. Agir avec confiance, centré calme avec une compassion lucide

Envisager cette situation comme une expérience intéressante et pas seulement comme pénible va être source d’enrichissement

C’est Ce n’est pas Concrètement

Accueillir avec un regard

attentif, ouvert et

curieux, sans a priori

o Etre présent à ce qui est o Etre ouvert o Etre en contact avec ce qui est o Etre attentif et disponible

o Analyser o Evaluer, juger o comparer avec une situation

similaire

o Prendre le temps de : o Se poser et d’arrêter de faire ce qu’on était en train

de faire : se mettre à la hauteur de l’enfant, le prendre d’en ses bras…

o Se rendre disponible o Observer ce qui est là sans jugement immédiat : o c’est une situation compliquée, difficile, ennuyeuse,

désagréable o observer avec attention la réalité de l’enfant : la

nature des pleurs, son corps tendu, agité…) o d’observer avec attention votre ressenti : souvent

complexe et confus (comment vous accueillez ces pleurs avec patience, avec agacement, avec contrariété, culpabilité, avec découragement,

Accepter avec

bienveillance sans

jugement envers l’enfant

bien sûr mais aussi envers

soi

o Etre confiant et patient - Reconnaître que l’enfant

ressent exprime un mal être, un mécontentement

- Reconnaitre et nommez le stress que vous êtes en train de ressentir car l’enfant le perçoit et cela l’insécurise « je

suis ennuyé car je ne sais pas

quoi faire »

- Reconnaître la difficulté présente

- Nommer ces sensations, présentes Tu as de la

tristesse, tu as de la colère …. - Prendre conscience de la

fatigue, des doutes, de l’inquiétude à ne pas arriver à calmer les pleurs, du sentiment de culpabilité,

- Se résigner à laisser l’enfant pleurer ou à se sentir mal avec cet enfant qui pleure.

- Etre indifférent ou laisser faire - Chercher à trouver du sens ou à

analyser - Identifier l’enfant à ses émotions

« tu es un pleurnicheur » si vous le pensez même sans le dire l’enfant va le sentir

- Vous identifier à ce que vous ressentez ou vous juger S’il pleure avec moi c’est que je ne

sais pas m’y prendre, il ne m’aime

pas…

Si je n’arrive pas à le calmer c’est

que je ne suis pas compétent

- Reconnaître que « C’est comme ça pour le moment - Observer ce qui change dans les pleurs de l’enfant,

Laissez l’enfant se libérer de son émotion en pleurant

- Et il expérimente sa capacité à traverser la tristesse, à surmonter la frustration, à accepter les règles « et oui

parfois on aimerait pouvoir continuer à jouer et ce

n’est plus possible c’est comme ça on ne peut pas faire

toujours ce qu’on veut - Expérimenter votre capacité à rester avec ce qui

n’est pas agréable sans perdre vos moyens Intérieurement vous pouvez vous dire

- oui je peux être avec moi, même si je sens l’anxiété

monter

- oui je peux être avec moi, même si je sens le doute,

la colère, la tristesse présents

- je suis ennuyé car je ne sais pas quoi faire mais je

suis là avec toi et si cela te fait du bien de pleurer et

bien pleure

- Contenir les pleurs par une présence sécurisante et

d’impuissance respectueuse les enfants vont s’apaiser lorsqu’ils comprendront que vous pouvez accueillir la tristesse, la colère avec compréhension et en toute sécurité

Agir avec confiance,

centré calme avec une

compassion lucide

- Agir avec discernement : - faire preuve de

compréhension o Qu’est ce qui me fait

manquer de patience, de confiance (peut cette image de toute puissance, de professionnel idéal parfait)

o Qu’est ce qui fait que cet enfant ne répond pas à mes attentes ?

- Assouplir l’idée que je me fais de quel professionnel je dois être

- Assouplir ma relation avec l’idée que je me fais des enfants

- Apporter une réponse adaptée à la situation et à l’enfant o En fonction de votre

connaissance de l’enfant, de vos possibilités vous allez proposer à l’enfant des choix d’activités, de posture ‘s’allonger, s’asseoir,…

Apporter une réponse adaptée au contexte, à l’enfant