Ionesco

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RICHARD Adélaïde MA1 Langues et littératures françaises et romanes Finalité didactique 1 RENSEIGNEMENTS PRATIQUES Classe : 6 e générale Sujet : Eugène IONESCO Au tableau 1. Vie 2. Comparaisons : Ionesco – Racine 2.1. Résumés 2.2. Extraits 2.3. CONCLUSION 3. Analyses 3.1. Rhinocéros a) personnages b) dialogues c) thèmes d) sens général 4. SYNTHÈSE 5. Exercice : analyse a) personnages b) dialogues c) thèmes d) sens général 6. Exercices : la mise en scène – les didascalies Journal de classe : Le théâtre de l’absurde : E. Ionesco Méthodologie : Activités de la stagiaire Activités des élèves 1. Introduction : Présentation personnelle. Consignes pour l’analyse de l’affiche. Présentation des documents témoins. Lecture d’un extrait du texte de la une du journal Le Soir. Vérification de la prise de notes. Introduction : Analyse de l’affiche. Analyse des documents présentés. Hypothèses sur la vie d’Ionesco. Synthèse de la vie d’Ionesco et prise de notes de la synthèse. 2. Comparaison : 1. résumés 2. Extraits Consignes pour la lecture. Comparaison : la stagiaire guide les Comparaison : 1. résumés 2. Extraits Lecture par les élèves. Comparaison : les élèves comparent et

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RENSEIGNEMENTS PRATIQUES Classe : 6e générale Sujet : Eugène IONESCO Au tableau

1. Vie 2. Comparaisons : Ionesco – Racine 2.1. Résumés 2.2. Extraits 2.3. CONCLUSION

3. Analyses 3.1. Rhinocéros a) personnages b) dialogues c) thèmes d) sens général

4. SYNTHÈSE

5. Exercice : analyse

a) personnages b) dialogues c) thèmes d) sens général

6. Exercices : la mise en scène – les didascalies

Journal de classe : Le théâtre de l’absurde : E. Ionesco Méthodologie : Activités de la stagiaire Activités des élèves

1. Introduction : Présentation personnelle. Consignes pour l’analyse de l’affiche. Présentation des documents témoins. Lecture d’un extrait du texte de la une du journal Le Soir. Vérification de la prise de notes.

Introduction : Analyse de l’affiche. Analyse des documents présentés. Hypothèses sur la vie d’Ionesco. Synthèse de la vie d’Ionesco et prise de notes de la synthèse.

2. Comparaison : 1. résumés 2. Extraits Consignes pour la lecture. Comparaison : la stagiaire guide les

Comparaison : 1. résumés 2. Extraits Lecture par les élèves. Comparaison : les élèves comparent et

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élèves. Vérification de la prise de notes.

répondent aux questions de la stagiaire.

3. Analyses Consignes pour la lecture La stagiaire guide et pose des questions aux élèves.

Analyses Lecture Analyse selon 4 critères (personnages – dialogues – thèmes – sens général).

4. Synthèse générale Consignes Synthèse : aide les élèves à retrouver toutes les caractéristiques absurdes vues lors de la leçon. Vérification de la prise de notes.

Synthèse générale Synthèse : repérage, établissement de la synthèse et prise de notes.

5.Exercices (analyse et didascalies) Consignes (par groupe de 2) Le premier exercice sur les didascalies est accompagné par la stagiaire. Pour le second, les élèves, par groupes de 2, se débrouillent seuls. Correction

5.Exercices (analyse et didascalies) Exercices par groupes de 2 Le premier exercice sur les didascalies est accompagné par la stagiaire. Pour le second, les élèves, par groupes de 2, se débrouillent seuls. Correction par les élèves

Si temps supplémentaire, la stagiaire proposera deux citations d’Ionesco et demandera aux élèves leur avis.

Les élèves donnent leur avis sur les citations d’Ionesco

Savoirs disciplinaires

A. Savoirs sur la langue

· Avoir une connaissance critique de quelques informations relatives - au fonctionnement et aux variétés du lexique : néologismes.

B. Savoirs sur la littérature et l’art

2. Grandes références littéraires et artistiques constitutives du fond culturel contemporain : le tragique racinien, Ionesco, (Beckett) et le « nouveau théâtre ».

3. Savoirs conceptuels : étude (brève) des « instances de légitimation qui constituent le « champ » littéraire.

Compétences

A. Lire

2. Construire du sens

- Les sens inférentiels : § prendre conscience du fait que, le plus souvent, le sens littéral ne suffit pas. § Interpréter le texte en recourant à des informations internes au texte (titres,

arguments, etc.) et externes au texte (connaissances générales). 3. Exercer son esprit critique

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- Identifier les valeurs inhérentes au texte et l’idéologie qui sous-tend éventuellement.

4. Acquérir des connaissances 5. Identifier, comprendre et interpréter différents types de textes

· Associer un texte à une tendance, un courant esthétique, une époque, voire dans certains cas, un auteur, sur la base de critères d’identification génériques, lexicaux, thématiques, rhétoriques ou syntaxiques.

B. Écrire

6. Associer l’écrit à d’autres supports : associer l’écrit à la parole (prise de notes)

C. Parler – écouter

3. Élaborer des significations : · Confirmer ou infirmer les hypothèses qu’on élabore · reformuler des informations sous formes de synthèse, explication

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Préparation de leçon Buts : Comparaison avec des pré requis (tragédie classique) pour permettre une différenciation Connaissances et maîtrise des caractéristiques du théâtre absurde d’IONESCO.

1. Vie Accroche

Que voyez-vous?

Affiche / spectacle / pièce de théâtre amateur : élèves et professeurs du collège Saint-Pierre (Uccle) / février 2009 (proche) / Rhinocéros / Eugène Ionesco

Vie1 Avez-vous déjà entendu parler d’IONESCO ? Que savez-vous de lui ? Connaissez-vous la nationalité d’Ionesco ? Il est Roumain. Exposition et explications des documents : journal du jour de sa mort Lecture d’un extrait de la une du quotidien national Le Soir du 29 mars 1994 : Quels sont les éléments importants à retenir concernant IONESCO ? Comment peuvent être qualifiées ses œuvres ? Quelles thématiques illustrent-elles? ð + page 9 : titre = « IONESCO, le chantre chauve

de l’absurde et du grotesque ! » Quelqu’un peut-il me définir les mots « chantre », « grotesque », « absurde », « dérision » ?

Rien ou // Beckett (leçon introductive sur l’absurde). - écrivain FRANÇAIS d’origine roumaine - XXe - œuvre dramatique reconnue - absurdité - dérision Absurde = contraire à la raison, à la logique Chantre = personne qui célèbre. Grotesque = Risible par son apparence bizarre. Le comique de caricature poussé jusqu’au fantastique. Dérision = moquerie avec mépris

2. Comparaisons : IONESCO – RACINE

Nous allons comparer Ionesco à un auteur que vous avez sûrement vu, Racine. Nous allons voir quels ont été les choix d’Ionesco, s’il est plutôt comme Racine ou pas du tout. 1 ou 2 lecteurs

1IONESCO naît en Roumanie en 1912 d’un père roumain et d’une mère française. Entre 13-25, il émigre en France. En 40, il se fixe en France et devient correcteur dans une maison d’édition. La première représentation de sa pièce La Cantatrice chauve a lieu en 1950 et n’obtient pas les faveurs du public et de la critique, pourtant, elle consacrait IONESCO comme l’un des pères du théâtre de l’absurde. Il faudra attendre plusieurs pièces (La Leçon, Les Chaises, Les Victimes du devoir, Amédée ou comment s’en débarrasser, Jacques ou la soumission, L’Impromptu de l’Alma, Le Nouveau Locataire, Tueur sans gages) pour qu’enfin, en 59, avec Rhinocéros, IONESCO soit reconnu. A la fin de sa vie, IONESCO connaît la consécration : il est l’un des premiers auteurs à être publié de son vivant dans la collection La Pléiade et est élu à l’Académie française en 70. Il meurt en 94.

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2.1. Résumés RACINE, Britannicus

Au réveil, l’Empereur Néron vient d’enlever l’amante de Britannicus, Junie. Alors, Britannicus se laisse convaincre par Burrhus (conseiller de Néron) d’accepter l’offre de vengeance d’Agrippine. Celle-ci, n’ayant pas digéré de se voir écartée des projets de son fils, ferait de Britannicus (demi-frère de Néron) le nouvel Empereur (acte I). Burrhus avertit son maître du complot mais Néron n’est préoccupé que par sa passion naissante pour Junie qui refuse la demande en mariage de l’Empereur par amour pour Britannicus. Néron lui ordonne de rompre avec son amant pour lui éviter la mort (acte II). Tandis qu’Agrippine pense toujours à se venger, Junie révèle à Britannicus le stratagème de Néron qui fait de suite emprisonner son rival et fait maintenir Agrippine enfermée au palais (acte III). Néron rencontre enfin sa mère qui tente de le ramener à la raison : il promet de se réconcilier avec Britannicus lors du banquet mais, il hésite toujours entre la réconciliation et la vengeance (acte IV). Britannicus est empoisonné lors du festin et Junie s’enfuit du palais (acte V).

IONESCO, Rhinocéros Un dimanche matin, la soudaine apparition d’un rhinocéros provoque la stupeur et occupe quelque temps la conversation des passants : Bérenger, timide et confus, son ami Jean, avec lequel il se dispute, et d’autres personnages comme le Logicien. Malgré le passage d’un second animal, tout semble rentrer dans l’ordre (acte I). Le lendemain, au bureau de Bérenger et Daisy, les employés (Dudard et Botard) et le chef de service (M. Papillon) se montrent incrédules. Mais, bientôt, apparaît un nouveau pachyderme : Madame Bœuf reconnaît son époux. Dans sa chambre, Jean se métamorphose lui-même en rhinocéros sous les yeux de Bérenger (acte II). Traumatisé par ce bouleversement, Bérenger, reclus dans sa propre chambre, découvre l’ampleur de l’épidémie de « rhinocérite » à laquelle, un moment, il aspire à succomber. Abandonné de tous, même de Daisy, pourtant éprise de lui, il vacille un instant puis, s’armant d’une carabine, décide de ne pas capituler (acte III).

RACINE, Britannicus IONESCO, Rhinocéros Siècle des 2 auteurs Structure externe : actes Structure interne : progression dramatique Unités classiques - unité de lieu - unité de temps - unité d’action références intentions

XVII Actes 5 Exposition / crise / dénouement Ok (le palais) Ok (un jour) Ok (conflit Néron – Britannicus – Agrippine pour le trône) Politique antique (Empereur Néron 56 PCN) respect des règles classiques pour plaire au public en lui montrant des pièces « parfaites » = 5 actes, 3 unités, bienséance, vraisemblance.

XX Actes 3 / / (café, rue, bureau, chambre) / (plusieurs jours) Ok (rhinocéros) / / ? /

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2.2. Extraits 2 lecteurs : Bérenger et Jean / 2 lecteurs : Albine et Agrippine RACINE, Britannicus : acte I, scène 1

ALBINE Quoi ? vous à qui Néron doit le jour qu’il respire, Qui l’avez appelé de si loin à l’Empire ? Vous qui déshéritant le fils de Claudius, Avez nommé César l’heureux Domitius ? Tout lui parle, Madame, en faveur d’Agrippine : Il vous doit son amour.

AGRIPPINE Il me doit, Albine : Tout s’il est généreux, lui prescrit cette loi ; Mais tout, s’il est ingrat, lui parle contre moi.

ALBINE S’il est ingrat, Madame ! Ah ! Toute sa conduite Marque dans son devoir une âme trop instruite. Depuis trois ans entiers, qu’a-t-il dit ? qu’a-t-il fait Qui ne promette à Rome un empereur parfait ? Rome, depuis deux ans par ses soins gouvernée, Au temps de ses consuls croit être retournée : Il la gouverne en père. Enfin Néron naissant A toutes les vertus d’Auguste vieillissant.

IONESCO, Rhinocéros : acte I Jean est très soigneusement vêtu : costume marron, cravate rouge, faux col amidonné, chapeau marron. Il est un peu rougeaud de figure. Il a des souliers jaunes bien cirés ; Bérenger n’est pas rasé, il est tête nue, les cheveux mal peignés, les vêtements chiffonnés ; tout exprime chez lui la négligence […] BÉRENGER : Qu’est-ce que vous buvez ? JEAN : Vous avez soif, vous, dès le matin ? BÉRENGER : Il fait tellement chaud, tellement sec. JEAN : Plus on boit, plus on a soif, dit la science populaire…[…] BÉRENGER : Que voulez-vous dire par là, mon cher Jean ? JEAN : Vous me comprenez très bien. Je parle de l’aridité de votre gv gosier. C’est une terre insatiable. BÉRENGER : Votre comparaison, il me semble… JEAN : Je ne suis pas aveugle. Vous tombez de fatigue, vous avez encore perdu la nuit, vous bâillez, vous êtes mort de sommeil… BÉRENGER : J’ai mal aux cheveux… JEAN : Vous puez l’alcool ! BÉRENGER : J’ai un petit peu la gueule de bois, c’est vrai ! […]

RACINE, Britannicus IONESCO, Rhinocéros Que pouvez-vous me dire au niveau de la forme ? Les personnages sont-ils semblables ? Les dialogues se ressemblent-ils ? Finalement, on est en présence de quel genre de texte ?

Théâtre en vers Une reine et sa confidente. Très sérieux, tragiques, solennels Plus longs, plus tragiques, solennels, tirades. Texte qui annonce la tragédie.

Théâtre en prose Deux amis qui discutent. L’un est saoul et l’autre le réprimande. Plus brefs, informels, c’est une discussion ou l’un répond à l’autre du tac au tac. Texte plutôt drôle.

2.3. Conclusion

Comment qualifie-t-on la pièce Britannicus ? Tragédie classique Et Rhinocéros ? Théâtre absurde – nouveau théâtre => opposition

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3. Analyses

Vous allez lire et analyser deux extraits d’Ionesco, on continue avec son œuvre Rhinocéros. Ce que nous allons lire est la suite : nous sommes toujours avec Jean et Bérenger dans le café.

3.1. IONESCO, Rhinocéros Acte I (suite) 4 lecteurs : Bérenger, Jean, le Logicien, le Vieux Monsieur

Juste à ce moment, ils [Le Vieux Monsieur et le Logicien] passent à côté de Jean et Bérenger. Un bras de Jean heurte très fort le Vieux Monsieur qui bascule dans les bras du Logicien. LE LOGICIEN, continuant la discussion : Un exemple de syllogisme… (Il est heurté.) Oh !… LE VIEUX MONSIEUR, à Jean : Attention. (Au Logicien.) Pardon. JEAN, au Vieux Monsieur : Pardon. LE LOGICIEN, au Vieux Monsieur : Il n’y a pas de mal. LE VIEUX MONSIEUR, à Jean : Il n’y a pas de mal. Le Vieux Monsieur et le Logicien vont s’asseoir à l’une des tables de la terrasse, un peu à droite et derrière Jean et Bérenger. BÉRENGER, à Jean : Vous avez de la force. JEAN : Oui, j’ai de la force, j’ai de la force pour plusieurs raisons. D’abord, j’ai de la force parce que j’ai de la force, ensuite j’ai de la force parce que j’ai de la force morale. J’ai aussi de la force parce que je ne suis pas alcoolisé. Je ne veux pas vous vexer, mon cher ami, mais je dois vous dire que c’est l’alcool qui pèse en réalité. LE LOGICIEN, au Vieux Monsieur : Voici un syllogisme exemplaire. « Le chat a quatre pattes. Isidore et Fricot ont chacun quatre pattes. Donc Isidore et Fricot sont chats. » LE VIEUX MONSIEUR, au Logicien : Mon chien aussi a quatre pattes. LE LOGICIEN, au Vieux Monsieur : Alors, c’est un chat. BÉRENGER, à Jean : Moi, j’ai à peine la force de vivre. Je n’en ai plus envie peut-être. LE VIEUX MONSIEUR, au Logicien après avoir longuement réfléchi : Donc, logiquement, mon chien serait un chat. LE LOGICIEN, au Vieux Monsieur : Logiquement, oui. Mais le contraire est aussi vrai. BÉRENGER, à Jean : La solitude me pèse. La

a) Personnages Quels sont les personnages qui apparaissent dans l’extrait ? - Bérenger Comment est représenté Bérenger ? Il ne croit pas en la vie, il est assez pessimiste. Comment qualifieriez-vous son existence, sa vie ? Son existence est absurde : il boit le jour et la nuit. B. ne croit pas en l’existence, il a peur de la solitude. ð vide existentiel - Jean Comment est représenté Jean ? Il est très soigné (c’est un bourgeois). Il ne doute pas, il est catégorique. Il croit en l’existence. Quel est le lien entre B. et J. ? Se ressemblent-ils ? Jean >< Bérenger ð B. = existence vide ð J. = bourgeois pompeux Quels sont les autres personnages de l’extrait ? - Le Logicien Savant qui réfléchit sur des syllogismes2. - Le Vieux Monsieur Savant. Il parle avec le logicien de syllogismes. Ces deux personnages sont-ils réellement savants ? Ils sont attachés au raisonnement mais la conclusion est totalement absurde (un chien est un chat / le philosophe Socrate est un chat). ð caricature de la logique (illogisme)

b) Dialogues Au niveau des dialogues entre les personnages, que pouvez-vous remarquer ? On a deux conversations parallèles. Se rejoignent-elles ? Les considérations des deux couples sont-elles identiques ? Non B. et J. parlent de la vie et Le Logicien et le Vieux Monsieur dissertent sur des syllogismes complètement illogiques, ABSURDES ! ð incommunicabilité ð illogisme

2 Raisonnement déductif rigoureux. Démonstration.

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société aussi. JEAN, à Bérenger : Vous vous contredisez. Est-ce la solitude qui pèse, ou est-ce la multitude ? Vous vous prenez pour un penseur et vous n’avez aucune logique. LE VIEUX MONSIEUR, au Logicien : C’est très beau, la logique. LE LOGICIEN, au Vieux Monsieur : À condition de ne pas en abuser. BÉRENGER, à Jean : C’est une chose anormale de vivre. JEAN : Au contraire. Rien de plus naturel. La preuve : tout le monde vit. […] LE LOGICIEN, au Vieux Monsieur : Autre syllogisme : « Tous les chats sont mortels. Socrate est mortel. Donc Socrate est un chat. » LE VIEUX MONSIEUR : Et il a quatre pattes. C’est vrai, j’ai un chat qui s’appelle Socrate. LE LOGICIEN : Vous voyez… […] LE VIEUX MONSIEUR, au Logicien : Socrate était donc un chat ! LE LOGICIEN, au Vieux Monsieur : La logique vient de nous le révéler.

Finalement, le dialogue du Logicien et de son ami veut-il dire quelque chose ? NON ð dialogue vide

c) Thèmes Quels sont les thèmes qui transparaissent dans l’extrait ? Rappelez-vous des thèmes cités à la une du journal. Ionesco est le chantre de … ? - absurde L’existence de B. est vide : il ne fait que boire. B. et J. sont amis mais ne se comprennent pas. J. n’accepte pas la vie de B. Dialogues superposés, en parallèle : difficulté de la vie // logique du syllogisme qui au final est illogique. ð vide existentiel ð illogisme ð incommunicabilité (incompréhension) - dérision Que provoquent ces éléments absurdes chez vous ? Lorsque vous lisez que B. a « mal aux cheveux », ou qu’un philosophe antique et un chien sont des chats, qu’est-ce que cela provoque chez vous ? Le rire, la dérision.

Acte III 2 lecteurs : Dudard et Bérenger

BÉRENGER : Vous trouvez, vous, que c’est naturel ? DUDARD : Quoi de plus naturel qu’un rhinocéros ? BÉRENGER : Oui, mais un homme qui devient rhinocéros, c’est indiscutablement anormal. DUDARD : Oh indiscutablement !... vous savez… […] BÉRENGER, affolé : Vous croyez que je suis hors de moi ? On dirait que je suis Jean. Ah non, non, je ne veux pas devenir comme Jean. Ah non, je ne veux pas lui ressembler. Il se calme. […] BÉRENGER : Mais écoutez, je vais tâcher de retrouver le Logicien… DUDARD : Quel logicien ? BÉRENGER : Le Logicien, le philosophe, un logicien quoi… vous savez mieux que moi ce que c’est qu’un logicien. Un

a) Personnages - Bérenger Comment est présenté B. ? Son comportement est-il semblable à celui de l’acte I ? Non : il a peur de devenir comme J. Il est énervé contre les rhinocéros. - Dudard Comment est présenté Dudard ? Que dit-il à B. ? Il ne comprend pas pourquoi B. accorde autant d’importance aux rhinocéros. Il lui conseille de prendre les choses à la légère. Il est neutre, il examine >< B. est passionné. ð critique de l’intellectuel / de la logique ð absurdité de l’homme/existence - Le Logicien Qu’est devenu Le Logicien qui symbolisait le savoir ? Il est parmi les rhinocéros mais a conservé un élément de son individualité : il porte toujours son canotier. Que représentent ces rhinocéros ? Qui sont-ils ? Les rhinocéros se déplacent en groupe qui s’agrandit de jour

3 Chapeau de paille à bouts ronds.

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logicien que j’ai connu… […] DUDARD, assis : Je veux bien le connaître, votre Logicien. S’il veut m’éclairer sur ces points délicats, délicats et obscurs… je ne demande pas mieux, ma foi. BÉRENGER, tout en courant à la fenêtre face à la scène : Oui, je vous l’amènerai, il vous parlera. Vous verrez, c’est une personnalité distinguée. (En direction des rhinocéros, à la fenêtre.) Salauds ! DUDARD : Laissez-les courir. Et soyez plus poli. On ne parle pas de la sorte à des créatures… BÉRENGER, toujours à la fenêtre : En revoilà ! De la fosse d’orchestre, sous la fenêtre, on voit émerger un canotier3 transpercé par une corne de rhinocéros, qui, de gauche, disparaît très vite vers la droite. Un canotier empalé sur la corne du rhinocéros ! Ah, c’est le canotier du Logicien ! Le canotier du Logicien ! Mille fois merde, le Logicien est devenu Rhinocéros. […] DUDARD : Il a tout de même conservé un vestige de son ancienne individualité ! BÉRENGER, montrant de nouveau le poing en direction du rhinocéros à canotier qui a disparu : Je ne vous suivrai pas ! Je ne vous suivrai pas ! DUDARD : Si vous dites que c’était un penseur authentique, il n’a pas dû se laisser emporter. Il a dû peser le pour et le contre, avant de choisir. BÉRENGER, toujours criant à la fenêtre en direction de l’ex Logicien et des autres rhinocéros qui se sont éloignés : Je ne vous suivrai pas !

en jour. C’est un animal myope, borné, brutal. ð faiblesse de l’homme/ absurdité de l’existence

b) Thèmes - Absurde Des éléments vous paraissent-ils absurdes dans l’extrait ? Des rhinocéros se baladent sous la fenêtre et Dudard trouve cela normal. => !! grotesque !! Dudard demande à B. de ne pas insulter les rhinocéros car « on ne parle pas comme ça à des créatures ». ð incommunicabilité ð illogisme ð caricature de l’intellectuel - dérision Que provoquent chez vous ces éléments absurdes ? Ces éléments absurdes prêtent-ils à rire ? OUI : on a B. qui est agité et Dudard qui est très neutre face à ces rhinocéros qui circulent sous leur fenêtre. - Grotesque - fantastique Nous avons vu que les rhinocéros étaient un élément absurde de la pièce. Mais ne peut-on pas aussi les considérer comme des éléments anormaux, fantastiques, grotesques ? Que se passe-t-il en fait ? Qu’est-ce qu’il se passe avec les humains ? métamorphose en rhinocéros ð Faiblesse de l’homme ð Grotesque - fantastique chez Ionesco

c) Sens général Maintenant, j’aimerais que vous vous interrogiez sur l’intention d’Ionesco ? Il critique la logique, les intellectuels, les bourgeois mais au-delà de ça, que critique-t-il ? L’époque à laquelle il a vécu (1912-1994) n’a t-elle pas un lien avec son œuvre ? Qu’a-t-il vécu entre sa naissance et sa mort ? Les 2 guerres mondiales Que symboliserait cette épidémie de « rhinocérite » ? Ces gens qui se transforment petit à petit et ce groupe qui est solide, qui ne se sépare jamais, que symboliseraient-ils ? Les régimes totalitaires / les conformismes : les nazis par exemple. Vous connaissez le sens de la pièce et donc, trouvez-vous qu’il s’agit d’une dérision gaie ou plutôt finalement plutôt dérangeante ? Finalement, c’est un rire dérangeant.

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4. Synthèse C’est quoi le théâtre de l’absurde d’Ionesco ? Quelles sont ses caractéristiques ?

- vide existentiel Ex : Bérenger n’aime pas vivre, etc. - caricature/critique du bourgeois Ex : Jean - caricature de l’intellectuel / de la logique (=> illogisme) Ex : J. est odieux, etc. - incommunicabilité Ex : J. et B. ne se comprennent pas, les 2 conversations parallèles : le Logicien et le Vieux Monsieur / J. et B. - vide – incohérence du dialogue Ex : les 2 conversations parallèles : le Logicien et le Vieux Monsieur / J. et B. - humour – dérision => qui dérange Ex : le syllogisme, l’apparence de B., les rhinocéros, l’énervement de B. - grotesque : fantastique Ex : rhinocéros dans la ville - faiblesse des hommes Ex : les hommes se transforment tous les uns après les autres en rhinocéros Le surnom « le chantre de l’absurde et du grotesque » est-il révélateur de l’œuvre d’Ionesco ? ð Ionesco célèbre l’absurde et le grotesque : ses œuvres en sont truffées.

5. Exercice : analyse

L’avenir est dans les œufs ou Il faut de tout pour faire un monde (suite de Jacques ou la soumission) : analysez l’extrait suivant en observant les mêmes éléments que précédemment (personnages, dialogues, thèmes, sens de la pièce).

Contexte : Il s’agit de la suite de la pièce Jacques ou La soumission où le héros, Jacques, n’accepte pas les désirs de sa famille (il faut qu’il aime les pommes de terre au lard et qu’il se trouve une fiancée). Finalement, il cèdera.

Deux groupes se forment. Les parents Jacques, la grand-mère Jacques et Jacqueline entourent Jacques fils ; les parents Roberte entourent Roberte, qu’ils tirent un peu à l’écart. Roberte père, Roberte mère parlent à leur fille ; on entend docilement : « Oui, papa, oui, maman ». […] JACQUES père : Voici donc quelle est, en peu de mots, l’affreuse vérité !… Tu ne t’es pas demandé pourquoi tu n’entends plus chanter ton grand-père ? … JACQUES mère : Ton grand-père qui t’aimait tant et que tu adorais ? JACQUELINE, montrant le cadre : Ni pourquoi il est là ? Au lieu d’être ici, coude à coude avec nous ? Dans son cadre, le grand-père fait des signes de tête amicaux, sourit. JACQUES fils : Je ne me le suis pas demandé. […] JACQUES père, à son fils : Si tu ne te l’es jamais demandé, c’est le moment de le faire : demande-le-toi. JACQUES fils : Je me le demande. JACQUELINE : Que te réponds-tu ? JACQUES fils : Je ne me réponds rien. […] JACQUES grand-mère : C’est parce que ton grand-père est mort. Jacques fils ne réagit en aucune façon. […] JACQUES mère, à son fils : Pleure ! Allons, Jacquot,

a) Personnages Que pouvez-vous remarquer concernant les prénoms de tous les personnages ? Ils sont centrés sur le prénom des héros principaux (Jacques et Roberte). Que pouvez-vous me dire sur eux ? - Jacques Il ne réagit pas à la mort de son grand-père mais quand ses parents lui demandent de pleurer, il n’arrête plus. Il ne veut pas avoir d’enfant mais quand les parents insistent, il accepte finalement. Il est influençable. Les parents ne tiennent pas compte de J. ð faiblesse des hommes ð absurdité de l’existence ð incommunicabilité - Roberte Prend-elle souvent la parole ? Que dit-elle ? Sincères cordoléances Le mot « Cordoléances » existe-t-il ? Non c’est un néologisme. Cot-cot-daaac Elle n’est pas très intelligente. ð vide / incohérence des mots - Les 2 familles

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allons, pleure ! (Silence.) Pleure ! Allons, Jacquot ! Silence. Soudain, Jacques fils éclate en sanglots. JACQUES père : Ah, enfin, ça y est ! Ça y est ! JACQUES mère et JACQUES grand-mère : Ça y est ! Ça y est ! JACQUELINE : Ça y est ! JACQUES fils : Ooh ! Ooh ! Pauvre grand-père ! Il s’arrête et sourit. JACQUES mère : Encore ! JACQUES fils recommence : Ooh ! Ooh ! Pépé ! Pépé ! JACQUES mère embrasse son fils qui pleure : Mon cher enfant… Comme il souffre ! … JACQUES fils pleure : Hiiii ! Hiiii ! Hiiii ! […] ROBERTE : Chaleureuses cordoléances ! TOUS LES JACQUES sauf le grand-père, en chœur : Enchantés. ROBERTE mère et ROBERTE père : Nos chaleureuses cordoléances ! ROBERTE : Merci beaucoup. Enchantée. [...] JACQUES père : Il faut assurer la continuité de notre race. JACQUES fils : Pourquoi ? JACQUES père : La continuité de notre race… la blanche ! Vive la race blanche ! TOUS, sauf Jacques, applaudissent et disent, ensemble : Vive la race blanche ! Vive la race blanche ! JACQUES père, au fils : L’avenir de la race blanche est entre tes doigts. Il faut qu’elle continue, qu’elle continue, qu’elle étende de plus en plus sa puissance ! … JACQUES fils : Comment faire ? […] JACQUES père, à son fils : Par la production. […] JACQUELINE : Allons... allons… ROBERTE père : Allons, allons, sois un homme. Nous sommes tous passés par là. JACQUES père, à son fils, grosse voix : Dépêche-toi ou tu auras affaire à moi. […] JACQUES fils : Aïe ! Aïe ! Aïe ! VOIX DE ROBERTE FILLE : Cot-cot-cot-codac ! JACQUES mère : Chère madame Roberte mère… nos petits ! ROBERTE mère : Chère madame Jacques mère…nos enfants ! […] JACQUES fils, (dégoût) : Ah, je voudrais m’en aller ! […] JACQUES père : Comme ils sont tous frais, ils valent bien vingt francs pièce ! On peut les faire à la coque ! ROBERTE mère : Ce sont les trois premiers œufs de ma fille ! Ils lui ressemblent !

Ils veulent que leurs enfants procréent. Dans quel type de famille sommes-nous ? Paysanne ? Bourgeoise ? ð critique de la bourgeoisie

b) Dialogues

Après l’annonce de la mort du grand-père quelle réaction montre la famille Jacques ? Ils répètent tous la même chose. Comment pouvez-vous qualifier ce que dit Jacques fils à l’annonce de la mort de son grand-père ? Qu’est-ce que cela provoque chez le spectateur ? C’est absurde : il s’agit de mots sans signification (Hiii – Oooh - cordoléances) ð vide / incohérence des dialogues

c) Thèmes

- Absurde Quels sont les éléments absurdes de l’extrait ? Les parents demandent à Jacques de pleurer. ð faiblesse de l’homme Roberte est absurde dans son essence. ð absurdité de l’existence Les parents ne voient que par la reproduction ð absurdité de l’existence - Dérision Quels éléments font rire le spectateur mais qui présente une arrière-pensée de mépris ? Les bourgeois qui ne vivent que pour la production. - grotesque - fantastique Que repérez-vous comme élément plutôt anormaux dans l’extrait ? Des éléments fantastiques ? *Le grand-père qui bouge dans le cadre. Il est mort mais il vit à travers le cadre. *Le fait que Jacques et Roberte « accouchent » d’œufs.

d) Sens général Quel est le sens de la pièce ? Aidez-vous du titre ! L’avenir est dans les œufs. Qu’a voulu dire Ionesco ? ð ABSURDITE de la vie ! Production !

Production !

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6. Exercices : la mise en scène – les didascalies Pouvez-vous me dire ce que sont les didascalies ? A quoi servent-elles ? Indications de jeu aux acteurs par l’auteur destinées au metteur en scène et aux acteurs.

6.1. Exercice 1 : repérez les didascalies absurdes d’Ionesco et justifiez votre choix. A) ARGAN, seul dans sa chambre, assis, une table devant lui, compte des parties d'apothicaire avec des jetons; il fait, parlant à lui-même, les dialogues suivants.

MOLIÈRE, Le Malade imaginaire, Acte I, scène 1

Description, pas d’éléments absurdes ni fantastiques

B) Ils disparaissent derrière le rocher. Dans le ciel, le soleil, s'étant déplacé, regarde la scène, la scène vivante que les spectateurs ne voient pas, et se met à rire, à grandes rides rouges. Un peu de temps s'écoule. Soudain on entend un long cri de femme. Peut-être même le voit-on monter à même l'azur, cerclé d'or avec des barbes de membrane verte. Il fuserait de gauche à droite. Le soleil cligne des yeux et, pour un instant, se rapetisse. Puis un silence parachevé investit le territoire. Tout à coup, Félicien bondit sur le rocher. Il sort de ses poches l'un et l'autre de ses pistolets. Il tend son bras droit vers les taillis du fond et lâche un coup de feu. On voit une fleur rouge qui se démantibule. AUDIBERTI, La Fête Noire, Acte I

Lyrisme Poétique Fantastique mais pas absurde

C) […] Roberte père frappe silencieusement, lentement dans ses mains. Roberte mère, les bras croisés derrière la nuque, fait des pirouettes, en souriant stupidement. Jacques mère a une figure immobile, remue les épaules d’une façon grotesque. Jacques père retrousse ses pantalons en marchant sur les talons. […] Tout cela doit provoquer chez les spectateurs un sentiment pénible, un malaise, une honte. L’obscurité s’épaissit. […] On aperçoit encore les Jacques et les Roberte grouiller sur la scène. On entend leurs gémissements de bêtes, puis on ne les voit plus. On n’entend plus que leurs gémissements, leurs soupirs, puis tout disparaît, tout s’éteint. De nouveau une lumière grise. Tout le monde a disparu, sauf Roberte, couchée, ou plutôt accroupie enfouie sous sa robe. On voit seulement sa figure pâle, aux trois nez, se dandiner, et ses neuf doigts s’agiter comme des reptiles.

IONESCO, Jacques ou la soumission

Les didascalies participent-elles à la construction absurde d’une œuvre d’Ionesco ? Quelles sont leurs caractéristiques absurdes ? *Quelle attitude présentent les personnages ? *Les personnages ont-ils une vie bien remplie, intéressante ? * Avez-vous envie de rire ? Que disent les didascalies en ce qui concerne le sentiment que doivent ressentir les spectateurs ? * A la toute fin, comment est décrite Roberte II ? A-t-elle un physique normal ? Que critique Ionesco ? ð dérision ð incommunicabilité ð vide existence ð rire dérangeant ð grotesque / fantastique ð critique de la bourgeoisie

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6.2. Exercice 2 : repérez les didascalies absurdes d’Ionesco et justifiez votre choix.

A) La reine lui tourne le dos et s'éloigne jusqu'au bas de l'escalier. Elle s'y arrête et pose le pied sur la première marche. Stanislas la regarde. Il porte la main à son couteau de chasse. Il le retire de sa gaine. Seconde sonnerie de trompette. Stanislas s'élance vers la reine. Il la poignarde entre les épaules. La reine titube, se redresse et monte trois marches, le poignard planté dans le dos, comme le fit la reine Élisabeth.

COCTEAU, L’aigle à deux têtes, Acte III, scène 8

Tragique – classique

B) Le Gros Monsieur, l’air satisfait de soi, est en bras de chemise, une rose épinglée sur sa poitrine ; cravate aux couleurs stridentes ; il peut avoir les manches retroussées ; montre-bracelet énorme, en or, sur son poignet ; il se cure les dents avec un cure-dents en or, tout en parlant ; les oreilles avec un cure-oreilles qu’il a sur son bureau. […] Le Peintre est très pauvrement vêtu, mal rasé, il a presque l’apparence d’un clochard. Il porte une lavallière, sa toile enroulée sous le bras. Alice, très vieille femme, tablier sale, gros souliers ou sabots ou pantoufles sales ; cheveux blancs, dépeignés sous sa coiffe ; lunettes, un bâton blanc dans la main, manchote ; elle renifle souvent ; se mouche avec ou dans les doigts.

IONESCO, Le Tableau4

Quelles caractéristiques de l’absurde retrouvons-nous ici ? Que représente le Gros Monsieur ? ð critique de la bourgeoisie Les personnages ont-ils l’air d’avoir une vie bien remplie ? ð existence vide Cet extrait prête-t-il à rire ? ð rire dérangeant : le Gros Monsieur

étale sa richesse >< en face de pauvres gens.

ð // début de Rhinocéros : J. & B. (richesse intellectuelle de J. >< mollesse de B.)

C) Le théâtre représente une chambre à coucher superbe, un grand lit en alcôve, une estrade au-devant. La porte pour entrer s'ouvre et se ferme à la troisième coulisse à droite; celle d'un cabinet, à la première coulisse à gauche. Une porte, dans le fond, va chez les femmes. Une fenêtre s'ouvre de l'autre côté.

BEAUMARCHAIS, Le Mariage de Figaro, Acte II, scène 2

luxe, pas de caricature, description

Citations d’Eugène Ionesco : Le comique étant l’intuition de l’absurde, il me semble plus désespérant que le tragique. Notes et contre-notes Oublie que tu existes. Souviens-toi que tu es. Macbett

4 Le Gros Monsieur est un homme d’affaires irrésistible. Le Peintre, venu lui vendre une toile, finit par accepter de payer pour la location du mur où il a accroché le tableau. Alice, vieille, laide et malade, a été requise par son frère pour lui donner un coup de main. Après le départ du peintre, la relation entre le frère et la sœur s’inverse : la créature chétive, qu’elle était, devient autoritaire et exigeante, brandissant le bâton avec lequel elle s’aidait. Le Gros Monsieur obéit craintivement mais, profitant d’une faiblesse, sort un pistolet. Coup de feu : la vieille se transforme en une beauté resplendissante, la voisine, tout aussi vieille et laide, devient belle, et le Peintre devient beau. Le Gros Monsieur ne peut pas changer lui.

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7. Exercices : transformation

Transformez ces pièces classiques en pièces absurdes. Utilisez les caractéristiques vues. N’oubliez pas que les didascalies peuvent vous aider !

Beaumarchais, Le Mariage de Figaro : Acte I, scène 7 CHÉRUBIN, accourant : Ah, Suzon ! Depuis deux heures j’épie le moment de te trouver seule.

Hélas ! Tu te maries, et moi je vais partir. SUZANNE : Comment mon mariage éloigne-t-il du château le premier page de Monseigneur ? CHÉRUBIN, piteusement : Suzanne, il me renvoie. SUZANNE le contrefait : Chérubin, quelque sottise ! CHÉRUBIN: Il m’a renvoyé hier au soir chez ta cousine Fanchette, à qui je faisais répéter son

petit rôle d’innocente, pour la fête de ce soir : il s’est mis dans une fureur en me voyant ! « Sortez, m’a-t-il dit, petit… » Je n’ose pas prononcer devant une femme le gros mot qu’il a dit… « Sortez ; et demain vous ne coucherez pas au château. » Si Madame, si ma belle marraine ne parvient pas à l’apaiser, c’est fait, Suzon, je suis à jamais privé du bonheur de te voir.

Marivaux, Le jeu de l’Amour et du Hasard, acte III, scène1 DORANTE : Comment, insolent ! Tu veux que je laisse un honnête homme dans l'erreur, et que je souffre que tu épouses sa fille sous mon nom ? Écoute : si tu me parles encore de cette impertinence-là, dès que j'aurai averti Monsieur Orgon de ce que tu es, je te chasse, entends-tu ? ARLEQUIN : Accommodons-nous ; cette demoiselle m'adore, elle m'idolâtre ; si je lui dis mon état de valet, et que, nonobstant, son tendre cœur soit toujours friand de la noce avec moi, ne laisserez-vous pas jouer les violons ? DORANTE : Dès qu'on te connaîtra, je ne m'en embarrasse plus. ARLEQUIN : Bon ! Et je vais de ce pas prévenir cette généreuse personne sur mon habit de caractère. J'espère que ce ne sera pas un galon de couleur qui nous brouillera ensemble, et que son amour me fera passer à la table, en dépit du sort qui ne m'a mis qu'au buffet.

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Eugène IONESCO

1. Vie

Le Soir, mardi 29 mars 1994, 108e année, n° 74.

2. Comparaisons : IONESCO – RACINE 2.1. Résumés RACINE, Britannicus

Au réveil, l’Empereur Néron vient d’enlever l’amante de Britannicus, Junie. Alors, Britannicus se laisse convaincre par Burrhus (conseiller de Néron) d’accepter l’offre de vengeance d’Agrippine. Celle-ci, n’ayant pas digéré de se voir écartée des projets de son fils, ferait de Britannicus (demi-frère de Néron) le nouvel Empereur (acte I). Burrhus avertit son maître du complot mais Néron n’est préoccupé que par sa passion naissante pour Junie qui refuse la demande en mariage de l’Empereur par amour pour Britannicus. Néron lui ordonne de rompre avec son amant pour lui éviter la mort (acte II). Tandis qu’Agrippine pense toujours à se venger, Junie révèle à Britannicus le stratagème de Néron qui fait de suite emprisonner son rival et fait maintenir Agrippine enfermée au palais (acte III). Néron rencontre enfin sa mère qui tente de le ramener à la raison : il se réconciliera avec Britannicus le soir même lors du banquet. Mais, il hésite entre la réconciliation et la vengeance (acte IV). Britannicus est empoisonné lors du festin et Junie s’enfuit du palais (acte V).

IONESCO, Rhinocéros Un dimanche matin, la soudaine apparition d’un rhinocéros provoque la stupeur et occupe quelque temps la conversation des passants : Bérenger, timide et confus, son ami Jean, avec lequel il se dispute, et d’autres personnages comme le Logicien. Malgré le passage d’un second animal, tout semble rentrer dans l’ordre (acte I). Le lendemain, au bureau de Bérenger et Daisy, les employés (Dudard et Botard) et le chef de service (M. Papillon) se montrent incrédules. Mais, bientôt, apparaît un nouveau pachyderme : Madame Bœuf reconnaît son époux. Dans sa chambre, Jean se métamorphose lui-même en rhinocéros sous les yeux de Bérenger (acte II). Traumatisé par ce bouleversement, Bérenger, reclus dans sa propre chambre, découvre l’ampleur de l’épidémie de « rhinocérite » à laquelle, un moment, il aspire à succomber. Abandonné de tous, même de Daisy, pourtant éprise de lui, il vacille un instant puis, s’armant d’une carabine, décide de ne pas capituler (acte III).

Items RACINE, Britannicus IONESCO, Rhinocéros

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2.2. Extraits

RACINE, Britannicus : acte I, scène 1 ALBINE

Quoi ? vous à qui Néron doit le jour qu’il respire, Qui l’avez appelé de si loin à l’Empire ? Vous qui déshéritant le fils de Claudius, Avez nommé César l’heureux Domitius ? Tout lui parle, Madame, en faveur d’Agrippine : Il vous doit son amour.

AGRIPPINE Il me doit, Albine : Tout s’il est généreux, lui prescrit cette loi ; Mais tout, s’il est ingrat, lui parle contre moi.

ALBINE S’il est ingrat, Madame ! Ah ! Toute sa conduite Marque dans son devoir une âme trop instruite. Depuis trois ans entiers, qu’a-t-il dit ? qu’a-t-il fait Qui ne promette à Rome un empereur parfait ? Rome, depuis deux ans par ses soins gouvernée, Au temps de ses consuls croit être retournée : Il la gouverne en père. Enfin Néron naissant A toutes les vertus d’Auguste vieillissant.

IONESCO, Rhinocéros : acte I Jean est très soigneusement vêtu : costume marron, cravate rouge, faux col amidonné, chapeau marron. Il est un peu rougeaud de figure. Il a des souliers jaunes bien cirés ; Bérenger n’est pas rasé, il est tête nue, les cheveux mal peignés, les vêtements chiffonnés ; tout exprime chez lui la négligence, […] BÉRENGER : Qu’est-ce que vous buvez ? JEAN : Vous avez soif, vous, dès le matin ? BÉRENGER : Il fait tellement chaud, tellement sec. JEAN : Plus on boit, plus on a soif, dit la science populaire…[…] BÉRENGER : Que voulez-vous dire par là, mon cher Jean ? JEAN : Vous me comprenez très bien. Je parle de l’aridité de votre gosier. C’est une terre insatiable. BÉRENGER : Votre comparaison, il me semble… JEAN : Je ne suis pas aveugle. Vous tombez de fatigue, vous avez encore perdu la nuit, vous bâillez, vous êtes mort de sommeil… BÉRENGER : J’ai mal aux cheveux… JEAN : Vous puez l’alcool ! BÉRENGER : J’ai un petit peu la gueule de bois, c’est vrai !

Items RACINE, Britannicus IONESCO, Rhinocéros

2.3. Conclusion

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3. Analyses 3.1. IONESCO, Rhinocéros Acte I (suite)

Juste à ce moment, ils [Le Vieux Monsieur et le Logicien] passent à côté de Jean et Bérenger. Un bras de Jean heurte très fort le Vieux Monsieur qui bascule dans les bras du Logicien.

LE LOGICIEN, continuant la discussion : Un exemple de syllogisme… Il est heurté. Oh !… LE VIEUX MONSIEUR, à Jean : Attention. Au Logicien. Pardon. JEAN, au Vieux Monsieur : Pardon. LE LOGICIEN, au Vieux Monsieur : Il n’y a pas de mal. LE VIEUX MONSIEUR, à Jean : Il n’y a pas de mal.

Le Vieux Monsieur et le Logicien vont s’asseoir à l’une des tables de la terrasse, un peu à droite et derrière Jean et Bérenger.

BÉRENGER, à Jean : Vous avez de la force. JEAN : Oui, j’ai de la force, j’ai de la force pour plusieurs raisons. D’abord, j’ai de la force parce

que j’ai de la force, ensuite j’ai de la force parce que j’ai de la force morale. J’ai aussi de la force parce que je ne suis pas alcoolisé. Je ne veux pas vous vexer, mon cher ami, mais je dois vous dire que c’est l’alcool qui pèse en réalité.

LE LOGICIEN, au Vieux Monsieur : Voici un syllogisme exemplaire. « Le chat a quatre pattes. Isidore et Fricot ont chacun quatre pattes. Donc Isidore et Fricot sont chats. »

LE VIEUX MONSIEUR, au Logicien : Mon chien aussi a quatre pattes. LE LOGICIEN, au Vieux Monsieur : Alors, c’est un chat. BÉRENGER, à Jean : Moi, j’ai à peine la force de vivre. Je n’en ai plus envie peut-être. LE VIEUX MONSIEUR, au Logicien après avoir longuement réfléchi : Donc, logiquement, mon chien

serait un chat. LE LOGICIEN, au Vieux Monsieur : Logiquement, oui. Mais le contraire est aussi vrai. BÉRENGER, à Jean : La solitude me pèse. La société aussi. JEAN, à Bérenger : Vous vous contredisez. Est-ce la solitude qui pèse, ou est-ce la multitude ?

Vous vous prenez pour un penseur et vous n’avez aucune logique. LE VIEUX MONSIEUR, au Logicien : C’est très beau, la logique. LE LOGICIEN, au Vieux Monsieur : À condition de ne pas en abuser. BÉRENGER à Jean: C’est une chose anormale de vivre JEAN : Au contraire. Rien de plus naturel. La preuve : tout le monde vit. […] LE LOGICIEN, au Vieux Monsieur : Autre syllogisme : « Tous les chats sont mortels. Socrate est

mortel. Donc Socrate est un chat. » LE VIEUX MONSIEUR : Et il a quatre pattes. C’est vrai, j’ai un chat qui s’appelle Socrate. LE LOGICIEN : Vous voyez… […] LE VIEUX MONSIEUR, au Logicien : Socrate était donc un chat ! LE LOGICIEN, au Vieux Monsieur : La logique vient de nous le révéler.

a) Personnages

b) Dialogues

c) Thèmes

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Acte III

BÉRENGER : Vous trouvez, vous, que c’est naturel ? DUDARD : Quoi de plus naturel qu’un rhinocéros ? BÉRENGER : Oui, mais un homme qui devient rhinocéros, c’est indiscutablement anormal. DUDARD : Oh indiscutablement !... vous savez… […] BÉRENGER, affolé : Vous croyez que je suis hors de moi ? On dirait que je suis Jean. Ah non, non,

je ne veux pas devenir comme Jean. Ah non, je ne veux pas lui ressembler. Il se calme. […] BÉRENGER : Mais écoutez, je vais tâcher de retrouver le Logicien… DUDARD : Quel logicien ? BÉRENGER : Le Logicien, le philosophe, un logicien quoi… vous savez mieux que moi ce que c’est

qu’un logicien. Un logicien que j’ai connu… […] DUDARD, assis : Je veux bien le connaître, votre Logicien. S’il veut m’éclairer sur ces points

délicats, délicats et obscurs… je ne demande pas mieux, ma foi. BÉRENGER, tout en courant à la fenêtre face à la scène : Oui, je vous l’amènerai, il vous parlera.

Vous verrez, c’est une personnalité distinguée. En direction des rhinocéros, à la fenêtre. Salauds ! DUDARD : Laissez-les courir. Et soyez plus poli. On ne parle pas de la sorte à des créatures… BÉRENGER, toujours à la fenêtre : En revoilà ! De la fosse d’orchestre, sous la fenêtre, on voit

émerger un canotier transpercé par une corne de rhinocéros, qui, de gauche, disparaît très vite vers la droite. Un canotier empalé sur la corne du rhinocéros ! Ah, c’est le canotier du Logicien ! Le canotier du Logicien ! Mille fois merde, le Logicien est devenu Rhinocéros. […]

DUDARD : Il a tout de même conservé un vestige de son ancienne individualité ! BÉRENGER, montrant de nouveau le poing en direction du rhinocéros à canotier qui a disparu : Je

ne vous suivrai pas ! Je ne vous suivrai pas ! DUDARD : Si vous dites que c’était un penseur authentique, il n’a pas dû se laisser emporter. Il a

dû peser le pour et le contre, avant de choisir. BÉRENGER, toujours criant à la fenêtre en direction de l’ex Logicien et des autres rhinocéros qui se

sont éloignés : Je ne vous suivrai pas !

a) Personnages

b) Thèmes

c) Sens général

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4. Synthèse

C’est quoi le théâtre absurde d’IONESCO ? Quelles en sont les caractéristiques ?

5. Exercice : analyse

Analysez l’extrait suivant en observant les mêmes éléments que précédemment (personnages, dialogues, thèmes, sens de la pièce).

L’avenir est dans les œufs ou Il faut de tout pour faire un monde (suite de Jacques ou la soumission)

Deux groupes se forment. Les parents Jacques, la grand-mère Jacques et Jacqueline entourent Jacques fils ; les parents Roberte entourent Roberte, qu’ils tirent un peu à l’écart. Roberte père, Roberte mère parlent à leur fille ; on entend docilement : « Oui, papa, oui, maman ». […]

JACQUES père : Voici donc quelle est, en peu de mots, l’affreuse vérité ! … Tu ne t’es pas demandé pourquoi tu n’entends plus chanter ton grand-père ? …

JACQUES mère : Ton grand-père qui t’aimait tant et que tu adorais ? JACQUELINE, montrant le cadre : Ni pourquoi il est là ? Au lieu d’être ici, coude à coude avec

nous ? Dans son cadre, le grand-père fait des signes de tête amicaux, sourit.

JACQUES fils : Je ne me le suis pas demandé. […] JACQUES père, à son fils : Si tu ne te l’es jamais demandé, c’est le moment de le faire : demande-

le-toi. JACQUES fils : Je me le demande. JACQUELINE : Que te réponds-tu ? JACQUES fils : Je ne me réponds rien. […] JACQUES grand-mère : C’est parce que ton grand-père est mort.

Jacques fils ne réagit en aucune façon. […] JACQUES mère, à son fils : Pleure ! Allons, Jacquot, allons, pleure ! (Silence.) Pleure ! Allons,

Jacquot ! Silence. Soudain, Jacques fils éclate en sanglots.

JACQUES père : Ah, enfin, ça y est ! Ça y est ! JACQUES mère et JACQUES grand-mère : Ça y est ! Ça y est ! JACQUELINE : Ça y est ! JACQUES fils : Ooh ! Ooh ! Pauvre grand-père !

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Il s’arrête et sourit. JACQUES mère : Encore ! JACQUES fils recommence : Ooh ! Ooh ! Pépé ! Pépé ! JACQUES mère embrasse son fils qui pleure : Mon cher enfant… Comme il souffre ! … JACQUES fils pleure : Hiiii ! Hiiii ! Hiiii ! […] ROBERTE : Chaleureuses cordoléances ! TOUS LES JACQUES sauf le grand-père, en chœur : Enchantés. ROBERTE mère et ROBERTE père : Nos chaleureuses cordoléances ! ROBERTE : Merci beaucoup. Enchantée. [...] JACQUES père : Il faut assurer la continuité de notre race. JACQUES fils : Pourquoi ? JACQUES père : La continuité de notre race… la blanche ! Vive la race blanche ! TOUS, sauf Jacques, applaudissent et disent, ensemble : Vive la race blanche ! Vive la race

blanche ! JACQUES père, au fils : L’avenir de la race blanche est entre tes doigts. Il faut qu’elle continue,

qu’elle continue, qu’elle étende de plus en plus sa puissance ! … JACQUES fils : Comment faire ? […] JACQUES père, à son fils : Par la production. […] JACQUELINE : Allons... allons… ROBERTE père : Allons, allons, sois un homme. Nous sommes tous passés par là. JACQUES père, à son fils, grosse voix : Dépêche-toi ou tu auras affaire à moi. […] JACQUES fils : Aïe ! Aïe ! Aïe ! VOIX DE ROBERTE FILLE : Cot-cot-cot-codac ! JACQUES mère : Chère madame Roberte mère… nos petits ! ROBERTE mère : Chère madame Jacques mère…nos enfants ! […] JACQUES fils, (dégoût) : Ah, je voudrais m’en aller ! […] JACQUES père : Comme ils sont tous frais, ils valent bien vingt francs pièce ! On peut les faire à la

coque ! ROBERTE mère : Ce sont les trois premiers œufs de ma fille ! Ils lui ressemblent !

a) Personnages

b) Dialogues

c) Thèmes

d) Sens général

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6. Exercices : la mise en scène – les didascalies Exercice 1 : repérez les didascalies absurdes d’IONESCO et justifiez votre choix.

A) ARGAN, seul dans sa chambre, assis, une table devant lui, compte des parties d'apothicaire avec des jetons; il fait, parlant à lui-même, les dialogues suivants.

B) Ils disparaissent derrière le rocher. Dans le ciel, le soleil, s'étant déplacé, regarde la scène, la scène vivante que les spectateurs ne voient pas, et se met à rire, à grandes rides rouges. Un peu de temps s'écoule. Soudain on entend un long cri de femme. Peut-être même le voit-on monter à même l'azur, cerclé d'or avec des barbes de membrane verte. Il fuserait de gauche à droite. Le soleil cligne des yeux et, pour un instant, se rapetisse. Puis un silence parachevé investit le territoire. Tout à coup, Félicien bondit sur le rocher. Il sort de ses poches l'un et l'autre de ses pistolets. Il tend son bras droit vers les taillis du fond et lâche un coup de feu. On voit une fleur rouge qui se démantibule.

C) […] Roberte père frappe silencieusement, lentement dans ses mains. Roberte mère, les bras croisés derrière la nuque, fait des pirouettes, en souriant stupidement. Jacques mère a une figure immobile, remue les épaules d’une façon grotesque. Jacques père retrousse ses pantalons en marchant sur les talons. […] Tout cela doit provoquer chez les spectateurs un sentiment pénible, un malaise, une honte. L’obscurité s’épaissit. […] On entend leurs gémissements de bêtes, puis on ne les voit plus. On n’entend plus que leurs gémissements, leurs soupirs, puis tout disparaît, tout s’éteint. De nouveau une lumière grise. Tout le monde a disparu, sauf Roberte, couchée, ou plutôt accroupie enfouie sous sa robe. On voit seulement sa figure pâle, aux trois nez, se dandiner, et ses neuf doigts s’agiter comme des reptiles.

Exercice 2 : repérez les didascalies absurdes d’IONESCO et justifiez votre choix.

A) La reine lui tourne le dos et s'éloigne jusqu'au bas de l'escalier. Elle s'y arrête et pose le pied sur la première marche. Stanislas la regarde. Il porte la main à son couteau de chasse. Il le retire de sa gaine. Seconde sonnerie de trompette. Stanislas s'élance vers la reine. Il la poignarde entre les épaules. La reine titube, se redresse et monte trois marches, le poignard planté dans le dos, comme le fit la reine Élisabeth.

B) Le Gros Monsieur, l’air satisfait de soi, est en bras de chemise, une rose épinglée sur sa poitrine ; cravate aux couleurs stridentes ; il peut avoir les manches retroussées ; montre-bracelet énorme, en or, sur son poignet ; il se cure les dents avec un cure-dents en or, tout en parlant ; les oreilles avec un cure-oreilles qu’il a sur son bureau. […] Le Peintre est très pauvrement vêtu, mal rasé, il a presque l’apparence d’un clochard. Il porte une lavallière, sa toile enroulée sous le bras. Alice, très vieille femme, tablier sale, gros souliers ou sabots ou pantoufles sales ; cheveux blancs, dépeignés sous sa coiffe ; lunettes, un bâton blanc dans la main, manchote ; elle renifle souvent ; se mouche avec ou dans les doigts.

C) Le théâtre représente une chambre à coucher superbe, un grand lit en alcôve, une estrade au-devant. La porte pour entrer s'ouvre et se ferme à la troisième coulisse à droite; celle d'un cabinet, à la première coulisse à gauche. Une porte, dans le fond, va chez les femmes. Une fenêtre s'ouvre de l'autre côté.

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8. Exercices : transformation

Transformez ces pièces classiques en pièces absurdes. Utilisez les caractéristiques vues. N’oubliez pas que les didascalies peuvent vous aider !

Beaumarchais, Le Mariage de Figaro : Acte I, scène 7 CHÉRUBIN, accourant : Ah, Suzon ! Depuis deux heures j’épie le moment de te trouver seule.

Hélas ! Tu te maries, et moi je vais partir. SUZANNE : Comment mon mariage éloigne-t-il du château le premier page de Monseigneur ? CHÉRUBIN, piteusement : Suzanne, il me renvoie. SUZANNE le contrefait : Chérubin, quelque sottise ! CHÉRUBIN: Il m’a renvoyé hier au soir chez ta cousine Fanchette, à qui je faisais répéter son

petit rôle d’innocente, pour la fête de ce soir : il s’est mis dans une fureur en me voyant ! « Sortez, m’a-t-il dit, petit… » Je n’ose pas prononcer devant une femme le gros mot qu’il a dit… « Sortez ; et demain vous ne coucherez pas au château. » Si Madame, si ma belle marraine ne parvient pas à l’apaiser, c’est fait, Suzon, je suis à jamais privé du bonheur de te voir.

Marivaux, Le jeu de l’Amour et du Hasard, acte III, scène1 DORANTE : Comment, insolent ! Tu veux que je laisse un honnête homme dans l'erreur, et que je souffre que tu épouses sa fille sous mon nom ? Écoute : si tu me parles encore de cette impertinence-là, dès que j'aurai averti Monsieur Orgon de ce que tu es, je te chasse, entends-tu ? ARLEQUIN : Accommodons-nous ; cette demoiselle m'adore, elle m'idolâtre ; si je lui dis mon état de valet, et que, nonobstant, son tendre cœur soit toujours friand de la noce avec moi, ne laisserez-vous pas jouer les violons ? DORANTE : Dès qu'on te connaîtra, je ne m'en embarrasse plus. ARLEQUIN : Bon ! Et je vais de ce pas prévenir cette généreuse personne sur mon habit de caractère. J'espère que ce ne sera pas un galon de couleur qui nous brouillera ensemble, et que son amour me fera passer à la table, en dépit du sort qui ne m'a mis qu'au buffet.