Intérêt et limite de l’analyse rapide du liquide synovial par bandelette urinaire. Étude...

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Revue du rhumatisme 80 (2013) 583–586 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com Article original Intérêt et limite de l’analyse rapide du liquide synovial par bandelette urinaire. Étude prospective monocentrique de 98 liquides synoviaux Guillaume Coiffier , Stefan Pollet , Jean-David Albert , Aleth Perdriger , Pascal Guggenbuhl , Gérard Chales Service de rhumatologie, hôpital Sud, CHU de Rennes, 16, boulevard de Bulgarie, BP 90347, 35203 Rennes cedex 2, France info article Historique de l’article : Accepté le 7 mars 2013 Disponible sur Internet le 23 mai 2013 Mots clés : Liquide synovial Bandelette urinaire Dépistage Diagnostic Inflammation résumé Objectif. – Évaluer les performances de l’analyse rapide par bandelette urinaire (BU) du liquide synovial pour discriminer les liquides inflammatoires et mécaniques. Méthodes. – Il s’agit d’une étude prospective monocentrique de 12 mois comparant le dépistage de leu- cocytes dans le liquide synovial par BU par rapport à la technique de référence par numération cellulaire. Un liquide contenant plus de 2000 cellules/mm 3 était considéré de nature inflammatoire. Résultats. – Quatre-vingt-dix-huit liquides synoviaux (26 de nature mécanique et 72 inflammatoires) ont été examinés. Le dépistage de leucocytes par BU montrait une sensibilité de 79,2 %, une spécificité de 92,3 %, une valeur prédictive positive de 96,6 %, une valeur prédictive négative (VPN) de 61,5 %, un rapport de vraisemblance (LR) positif de 10,3 et négatif de 0,23. La reproductibilité du test d’analyse de la présence de leucocytes par la BU était de 0,70 [0,53–0,87] pour 73 liquides synoviaux analysés à deux reprises. L’absence de leucocytes sur deux BU successives avait une VPN de 80 % et le LR négatif de 0,08. Conclusion. – Le test à la BU est utile pour distinguer rapidement et de manière satisfaisante les liquides synoviaux inflammatoires des liquides mécaniques. © 2013 Société Française de Rhumatologie. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. 1. Introduction L’analyse du liquide synovial (LS) est un élément capital dans la démarche diagnostique d’un épanchement articulaire ou d’une arthrite. Un liquide riche en cellules est considéré comme inflam- matoire à partir d’une numération supérieure à 2000 éléments nucléés par millimètre cube, même si cette limite n’est pas absolue [1,2]. Les arthrites septiques sont définies par la présence de bacté- ries cultivables dans le liquide synovial ; les arthrites métaboliques par la présence de microcristaux en microscopie optique polarisée (urate de sodium pour la goutte et pyrophosphates de calcium di- hydraté pour la chondrocalcinose articulaire) ; il n’y a pas de critère spécifique usuel pour les arthrites rhumatismales. L’utilisation de la bandelette urinaire (BU) est validée pour le diagnostic rapide d’infection urinaire par la détection d’une activité estérase leucocytaire et/ou de nitrites [3,4]. Ce test a éga- lement montré une certaine utilité dans l’analyse d’autres liquides DOI de l’article original : http://dx.doi.org/10.1016/j.jbspin.2013.04.001. Ne pas utiliser, pour citation, la référence franc ¸ aise de cet article, mais la réfé- rence anglaise de Joint Bone Spine avec le DOI ci-dessus. Auteur correspondant. Adresse e-mail : guillaume.coiffi[email protected] (G. Coiffier). biologiques avec une excellente valeur prédictive négative (VPN) dans l’infection de liquide d’ascite [5] ou une bonne valeur prédic- tive positive (VPP) dans les méningites infectieuses [6]. Le but de notre étude était d’évaluer les performances de l’analyse rapide par BU du liquide synovial pour discriminer les liquides inflammatoires et mécaniques. 2. Méthodes Les liquides synoviaux prélevés à visée diagnostique dans un service de rhumatologie ont été collectés sur une période de 12 mois dans des tubes secs pour analyse rapide (moins d’une heure) à l’état frais par l’utilisation de bandelettes urinaires (Combur 10 Test ® UX testant dix paramètres physico-chimiques différents : densité, pH, leucocytes, nitrites, protéines, glucose, cétones, urobilinogène, bilirubine, érythrocytes par lecture auto- matisée par l’appareil Urisys 1100 ® , ROCHE). Les résultats étaient notés de manière semi-quantitative, expri- més en nombre de croix, pour le dépistage de leucocytes. Le critère de jugement principal était la numération cellulaire par millimètre cube rendue par le laboratoire. Tout liquide synovial avec une cellularité inférieure ou égale à 2000/mm 3 était considéré comme mécanique (non inflammatoire). Les liquides composés de plus de 2000 cellules/mm 3 étaient considérés comme inflammatoires et classés comme septiques 1169-8330/$ – see front matter © 2013 Société Française de Rhumatologie. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. http://dx.doi.org/10.1016/j.rhum.2013.03.003

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ervice de rhumatologie, hôpital Sud, CHU de Rennes, 16, boulevard de Bulgarie, BP 90347, 35203 Rennes cedex 2, France

i n f o a r t i c l e

istorique de l’article :ccepté le 7 mars 2013isponible sur Internet le 23 mai 2013

ots clés :iquide synovialandelette urinaireépistage

r é s u m é

Objectif. – Évaluer les performances de l’analyse rapide par bandelette urinaire (BU) du liquide synovialpour discriminer les liquides inflammatoires et mécaniques.Méthodes. – Il s’agit d’une étude prospective monocentrique de 12 mois comparant le dépistage de leu-cocytes dans le liquide synovial par BU par rapport à la technique de référence par numération cellulaire.Un liquide contenant plus de 2000 cellules/mm3 était considéré de nature inflammatoire.Résultats. – Quatre-vingt-dix-huit liquides synoviaux (26 de nature mécanique et 72 inflammatoires) ontété examinés. Le dépistage de leucocytes par BU montrait une sensibilité de 79,2 %, une spécificité de92,3 %, une valeur prédictive positive de 96,6 %, une valeur prédictive négative (VPN) de 61,5 %, un rapport

iagnostic

nflammation de vraisemblance (LR) positif de 10,3 et négatif de 0,23. La reproductibilité du test d’analyse de la présencede leucocytes par la BU était de 0,70 [0,53–0,87] pour 73 liquides synoviaux analysés à deux reprises.L’absence de leucocytes sur deux BU successives avait une VPN de 80 % et le LR négatif de 0,08.Conclusion. – Le test à la BU est utile pour distinguer rapidement et de manière satisfaisante les liquidessynoviaux inflammatoires des liquides mécaniques.

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© 2013 Société Fr

. Introduction

L’analyse du liquide synovial (LS) est un élément capital dansa démarche diagnostique d’un épanchement articulaire ou d’unerthrite. Un liquide riche en cellules est considéré comme inflam-atoire à partir d’une numération supérieure à 2000 éléments

ucléés par millimètre cube, même si cette limite n’est pas absolue1,2].

Les arthrites septiques sont définies par la présence de bacté-ies cultivables dans le liquide synovial ; les arthrites métaboliquesar la présence de microcristaux en microscopie optique polariséeurate de sodium pour la goutte et pyrophosphates de calcium di-ydraté pour la chondrocalcinose articulaire) ; il n’y a pas de critèrepécifique usuel pour les arthrites rhumatismales.

L’utilisation de la bandelette urinaire (BU) est validée pour

e diagnostic rapide d’infection urinaire par la détection d’unectivité estérase leucocytaire et/ou de nitrites [3,4]. Ce test a éga-ement montré une certaine utilité dans l’analyse d’autres liquides

DOI de l’article original : http://dx.doi.org/10.1016/j.jbspin.2013.04.001.� Ne pas utiliser, pour citation, la référence francaise de cet article, mais la réfé-ence anglaise de Joint Bone Spine avec le DOI ci-dessus.∗ Auteur correspondant.

Adresse e-mail : [email protected] (G. Coiffier).

169-8330/$ – see front matter © 2013 Société Française de Rhumatologie. Publié par Elsttp://dx.doi.org/10.1016/j.rhum.2013.03.003

se de Rhumatologie. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

biologiques avec une excellente valeur prédictive négative (VPN)dans l’infection de liquide d’ascite [5] ou une bonne valeur prédic-tive positive (VPP) dans les méningites infectieuses [6].

Le but de notre étude était d’évaluer les performances del’analyse rapide par BU du liquide synovial pour discriminer lesliquides inflammatoires et mécaniques.

2. Méthodes

Les liquides synoviaux prélevés à visée diagnostique dans unservice de rhumatologie ont été collectés sur une période de12 mois dans des tubes secs pour analyse rapide (moins d’uneheure) à l’état frais par l’utilisation de bandelettes urinaires(Combur 10 Test® UX testant dix paramètres physico-chimiquesdifférents : densité, pH, leucocytes, nitrites, protéines, glucose,cétones, urobilinogène, bilirubine, érythrocytes par lecture auto-matisée par l’appareil Urisys 1100®, ROCHE).

Les résultats étaient notés de manière semi-quantitative, expri-més en nombre de croix, pour le dépistage de leucocytes.

Le critère de jugement principal était la numération cellulairepar millimètre cube rendue par le laboratoire. Tout liquide synovial

avec une cellularité inférieure ou égale à 2000/mm3 était considérécomme mécanique (non inflammatoire).

Les liquides composés de plus de 2000 cellules/mm3 étaientconsidérés comme inflammatoires et classés comme septiques

evier Masson SAS. Tous droits réservés.

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Tableau 1Numérations cellulaires moyennes et pourcentages en polynucléaires neutrophiles(PNN) des 98 liquides synoviaux (LS) en fonction de l’étiologie retrouvée.

LS n Cellules/mm3 PNN (%)

Mécanique 26 546 ± 584 [20–2000] 24,6 ± 23,6Métabolique 30 25 239 ± 24 757 [2300–120 000] 78,9 ± 24,2RIC 30 24 423 ± 20 153 [2100–77 000] 58,9 ± 29,1Septique 7 24 457 ± 19 013 [4500–51 000] 86,4 ± 8,0Autres 5 24 360 ± 16 400 [2800–44 000] 69,6 ± 20,5

Sm

((pptbn

ld

R

3

slrmérpc

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0

10

20

30

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60

70

80

90

100

Mécanique RIC Métabolique Sep�que

24,6

58,9

78,9

86,4

p = 0,92

p < 0,001

p < 0,001

%age

Polynucléaires Neutrophiles

nombre moyen de polynucléaires neutrophiles (respectivement de25 515 ± 22 218/mm3 vs 26 914 ± 16 307/mm3) entre 2+ et 3+ à laBU (Fig. 2).

0

5000

10000

15000

20000

25000

30000

p = 0,001

p < 0,001

p = 0,87

cellules/mm3

ont exprimés en italique les écarts-type et entre crochets les minimales et maxi-ales. RIC : rhumatisme inflammatoire chronique.

culture bactériologique positive à 72 heures), métaboliquesprésence de microcristaux d’urate de sodium [goutte] ou de pyro-hosphate de calcium di-hydraté [CCA] en microscopie optiqueolarisée, sans germe en culture), ou en rapport avec un rhuma-isme inflammatoire chronique (absence de cristaux, absence deactéries en culture et histoire de rhumatisme inflammatoire chro-ique).

Pour évaluer la reproductibilité de la technique, deux tests àa bandelette étaient successivement réalisés, à quelques minutes’intervalle sur plusieurs liquides synoviaux.

Ce protocole a recu l’accord du comité d’éthique du CHU deennes (Avis no 12-57).

. Statistiques

Sensibilité (Se), spécificité (Sp), VPP et VPN, et rapport de vrai-emblance (LR) ont été calculées pour l’analyse à la BU en prenantes données du laboratoire comme critère de diagnostic. Les compa-aisons ont été réalisées par le test de Kruskal-Wallis pour lesoyennes et le test du Chi2 (ou test exact de Fisher si n < 5) a

té utilisé pour les différences de pourcentages. Pour évaluer laeproductibilité entre les deux bandelettes urinaire, le test nonaramétrique kappa de Cohen a été utilisé. Les différences ont étéonsidérées comme significatives si p < 0,05.

. Résultats

Durant la période de l’étude, 98 LS ont été analysés. Les prin-ipales articulations prélevées étaient le genou (76,5 %), la hanche7,1 %), l’épaule (6,1 %), le poignet (4,1 %) et le coude (3,1 %). Il yvait 26 LS mécaniques et 72 LS inflammatoires (30 métaboliques,0 rhumatismaux, sept septiques et cinq de cause indéterminée).e nombre moyen de cellules et le pourcentage de polynucléaireseutrophiles en fonction de l’étiologie ont été calculés, avec desésultats présentés dans le Tableau 1.

Parmi les LS inflammatoires, il n’y avait pas de différence signi-cative du nombre moyen de cellules entre les LS septiques,étaboliques ou rhumatismaux, autour de 25 000/mm3.En revanche, les LS de nature septique ou métabolique étaient

tatistiquement plus riches en polynucléaires neutrophiles que lesiquides rhumatismaux (respectivement 86,4 %, 78,9 % vs 58,9 %,< 0,001) (Fig. 1).

Parmi les liquides inflammatoires (> 2000 cellules/mm3), laecherche de leucocytes par le test à la BU était positive dans 57 cas79,2 %) alors que parmi les liquides mécaniques, 24 (92,3 %) nerésentaient pas de leucocytes à la BU. L’analyse montrait unee = 79,2 %, une Sp = 92,3 %, une VPP = 96,6 %, une VPN = 61,5 %, unR+ = 10,3 et un LR négatif = 0,23.

Parmi les 15 faux négatifs (BU négative malgré un liquide syno-ial comportant plus de 2000 cellules/mm3), huit (53,3 %) étaient

e nature lympho-monocytaire (PNN ≤ 50 %). Concernant la repré-entation des polynucléaires neutrophiles des 15 faux négatifs, laédiane de la numération était de 2113/mm3 et la médiane de la

ormule en PNN était de 50 % (Tableau 2).

Fig. 1. Pourcentages moyens de polynucléaires neutrophiles des 98 liquides syno-viaux étudiés et classés selon le diagnostic.

La reproductibilité du test d’analyse de la présence de leuco-cytes par la BU, mesurée par le test kappa, était de 0,70 [0,53–0,87]pour 73 liquides synoviaux analysés à deux reprises. Neuf LS pré-sentaient des résultats discordant après les tests par deux BUsuccessives (Tableau 3).

Cette reproductibilité était plus faible (kappa = 0,54 [0,38–0,70] ;p < 0,001) si on prenait en compte le nombre de croix de leucocytesentre les deux BU. Néanmoins, il n’existait pas de différence du

0 1 + 2 + 3 +

Fig. 2. Nombres moyens de cellules par millimètre cube en fonction du nombre decroix de leucocytes dépisté par bandelette urinaire sur 98 liquides synoviaux.

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Tableau 2Résultats des faux négatifs du test par la bandelette urinaire (BU) (BU ne retrouvant pas de leucocytes alors que les liquides synoviaux [LS] comprenaient plus de2000 cellules/mm3) sur 98 LS.

Numération leucocytes(cellules/mm3)

Polynucléaires neutrophiles Diagnostic

% Cellules/mm3

1 2100 9 189 RIC2 2300 85 1955 CCA3 2600 2600 2390 CCA4 3900 10 40 PR5 4500 4 180 SpA6 6700 39 2613 SpA7 9400 95 8930 Septique8 11 000 63 6930 Goutte9 11 900 66 7854 SpA10 12 400 78 9672 CCA11 15 000 15 2250 CCA12 15 000 43 6450 SpA13 21 400 50 10 700 SpA14 30 000 57 17 100 Still15 50 000 1 500 PR

R de ; Spd

(tnuu

5

rsr

ll2VdCellccV

TP

Rd

IC : rhumatisme inflammatoire chronique indéterminé ; PR : polyarthrite rhumatoïi-hydraté (PPCD) (chondrocalcinose articulaire).

Aussi, sur les 73 LS ayant été testés par deux BU successives, 5068,5 %) liquides inflammatoires présentaient des leucocytes posi-ifs sur au moins une des deux BU et 16 (92,3 %) liquides mécaniquese présentaient pas de leucocytes aux deux BU, soit une Se = 92,9 %,ne Sp = 84,2 %, une VPP = 94,3 %, une VPN = 80,0 %, un LR+ = 5,9 etn LR négatif = 0,08.

. Discussion

Les résultats de notre étude montrent un intérêt réel de l’analyseapide par BU pour déterminer la nature inflammatoire d’un liquideynovial avec une excellente VPP supérieure à 95 % et un LR+ supé-ieur à 10 en cas de positivité de la recherche de leucocytes.

Ces résultats confirment ceux de Ravaud et al. [7] qui ont menéa seule étude publiée à notre connaissance sur l’utilisation dea BU pour l’analyse du LS sur articulation native. Réalisée sur08 échantillons de LS, elle retrouvait une Se = 76,9 %, Sp = 86,9 %,PP = 77,9 %, VPN = 86,9 %, et un LR+ = 5,9 de la BU pour le diagnostice liquide inflammatoire en cas de positivité des leucocytes à la BU.es auteurs soulignaient une VPP faible en raison de faux négatifsn rapport avec la technique même de la BU qui ne dépiste que’activité estérase des leucocytes, ce qui exclut les liquides riches en

ymphocytes. La proportion de liquides majoritairement lympho-ytaires (53,3 %) dans notre population était plus faible que danselle de Ravaud et al. [7] (68,4 %), ce qui peut expliquer la meilleurePP retrouvée dans notre étude. De plus, nous avons recueilli les LS

ableau 3résentation des résultats discordants des tests par deux bandelettes urinaires successive

Bandelette urinaire(no 1/no 2)

Numération(cellules/mm3)

1 ++/0 35 0002 ++/0 54 0003 0/+ 17604 0/+ 21005 0/+ 21 4006 0/+ 50 0007 0/++ 26008 0/++ 11 0009 0/++ 3900

IC : rhumatisme inflammatoire chronique indéterminé ; PR : polyarthrite rhumatoïde ; SPi-hydraté (PPCD) (chondrocalcinose articulaire).

A : spondylarthropathie ; CCA : rhumatisme à dépôts de pyrophosphates de calcium

sur tube sec, sans ajout d’anticoagulant, ce qui entraîne un risque deséquestration des leucocytes dans le coagulum pour les LS les plusriches en fibrine et donc de faux négatifs pour le dépistage de leu-cocytes par la BU. Ce phénomène est sans doute lié au déséquilibreentre les activités pro-coagulantes et fibrinolytiques, bien étudiédans le contexte des polyarthrites rhumatoïdes [8].

Une étude récente [9] s’est intéressée à l’utilisation d’undépistage de leucocytes par la BU dans le LS lors de ponctiond’arthroplastie totale de hanche (n = 43) ou de genou (n = 180)pour suspicion d’infection prothétique. Les performances du testde dépistage d’un liquide inflammatoire étaient établies pour unecellularité supérieure à 3000/mm3, avec une Se = 92,9 %, Sp = 88,8 %,une VPP = 75,0 %, et une VPN = 97,2 %, soit proches des résultats denotre étude et celle de Ravaud et al. [7] bien que le seuil du critère dejugement soit différent des 2000 éléments nucléés par millimètrecube classiquement admis pour le diagnostic de liquide inflamma-toire.

L’intérêt majeur d’un dépistage par BU serait idéalement de pou-voir détecter à la consultation un liquide mécanique qui pourraitêtre infiltré sans risque d’infection. Pour cela, l’examen devrait pos-séder une excellente VPN ou LR négatif (< 0,1), ce qui n’était pas lecas dans l’étude de Ravaud et al. avec une VPN = 86,9 % et un LRnégatif = 0,27 [7].

Notre étude menée sur 98 LS montrait une VPN = 61,5 % et unLR négatif = 0,23, ce qui paraît insuffisant pour discriminer unliquide mécanique. Toutefois, sur les 73 LS qui ont été étudiés pardeux BU successives, deux résultats négatifs pour le dépistage des

s sur 73 liquides synoviaux.

Polynucléaires neutrophiles Diagnostic

(%) Cellules/mm3

91 31 850 Goutte79 42 660 RIC34 578 Arthrose

9 189 RIC50 10 700 SPA

1 500 PR92 2392 CCA63 6930 Goutte

1 39 PR

A : spondylarthropathie ; CCA : rhumatisme à dépôts de pyrophosphates de calcium

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86 G. Coiffier et al. / Revue du

eucocytes avaient une VPN = 80 % et un LR négatif = 0,08 d’avoirn liquide inflammatoire. La réalisation de deux BU paraît donclus fiable qu’une seule, en raison d’une reproductibilité moyenne,our dépister un liquide mécanique. Ce résultat mériterait d’êtreonfirmé par une autre étude.

L’excellente Sp (92,3 %) et la bonne Se (près de 80 %) du dépis-age de leucocytes par la BU dans le LS pourrait avoir un intérêtarticulier en médecine générale. La positivité de la BU pourraitffectivement être un bon indicateur pour le dépistage d’un liquidenflammatoire devant nécessiter un complément d’investigationar un rhumatologue spécialiste, a fortiori si les médecins géné-alistes n’ont pas l’habitude ou le temps de réaliser tous lesrélèvements nécessaires à l’analyse complète du LS.

Il est certain que la BU ne peut se substituer à la numérationt la formule leucocytaire, véritable gold standard pour évaluer laature du LS, bien que cette technique ne soit pas exemptée deroblèmes et de limites. Tout d’abord, la technique de référencee la numération leucocytaire par technique manuelle est longuet de fiabilité imparfaite, avec des scores de concordance kappaompris entre 0,76 et 0,80 [10]. Elle n’est que rarement pratiquée auaboratoire d’analyses médicales [11]. Même si les techniques auto-

atiques réputées fiables ont été développées [12,13], la qualité deeur résultats nécessite un acheminement du liquide au laboratoireans un tube EDTA dans les plus brefs délais, si possible moinse 24 heures [14], ce qui n’est pas toujours évident en pratique

ibérale.Notre étude possède plusieurs limites. Tout d’abord, la popu-

ation étudiée était celle d’un CHU francais, avec une prévalencee liquide de nature inflammatoire probablement supérieure àelle d’une pratique libérale. L’aspect macroscopique et la vis-

osité du liquide n’ont pas été pris en compte alors qu’il s’agit’un paramètre clinique important du LS. L’association de critèreacroscopique, BU associée à une lecture rapide en microscopie

ptique dans le service pourrait améliorer la puissance d’un tel

[

[

tisme 80 (2013) 583–586

dépistage. Néanmoins, ces données ne sont pas disponibles dans lalittérature.

Déclaration d’intérêts

Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en rela-tion avec cet article.

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